- Speaker #0
Lorsque ce petit bolide atteindra 88 miles à l'heure, attends-toi à voir quelque chose qui décoiffe.
- Speaker #1
Ce qui place votre zone d'atterrissage à 5,0667 degrés de latitude nord et 77,3333 de longitude ouest.
- Speaker #0
Rien de tout ça derrière. Qu'est-ce que le réel ? La seule variable constante est l'inattendu. On ne peut pas la contrôler. Je crois que vous êtes encore pire que ces créatures. Elle, elle n'essaie pas de se massacrer entre elles pour tirer le plus gros paquet de fric. Voyons si une capacité de poussée de 10% permet le décollage. Et 3, 2, 1... Chers auditeurs, chères auditrices, bienvenue dans ce nouvel épisode de Science, Art et Curiosité, le podcast du MUMONS. J'accueille non pas une, non pas deux, mais bien trois pointures de la vulgarisation. J'ai déjà enregistré des épisodes avec tous ces invités séparément, mais je ne les ai jamais rassemblés. Chères auditrices, chers auditeurs, j'espère que tu es prêt. Aujourd'hui j'accueille Francesco Loboué. Salut Max. Salut Francesco, comment vas-tu ? Super content d'être là. Le dernier épisode qu'on a enregistré ensemble, c'était la machine denticitaire. Un épisode vraiment incroyable. Comment oublier ça ? Comment oublier ça exactement. Et est-ce que tu peux nous dire en une minute, vraiment en une minute, qui est Francesco Loboué ? Alors Francesco Loboué, il est physicien et il a la chance de diriger le MUMONS. Et donc c'est un grand fanat d'astro. Super. J'accueille ensuite Claude Sommet. Salut Claude ! Bonjour ! Comment vas-tu ?
- Speaker #2
Très bien, on a excellente compagnie d'ailleurs.
- Speaker #0
Alors le dernier épisode qu'on a enregistré ensemble, et je te tape un peu sur les mains, ça date de 2023 Claude.
- Speaker #2
Ouh déjà !
- Speaker #0
Et c'était sur Oppenheimer, le film. Donc on va reprévoir des épisodes ensemble Claude. Et est-ce que tu peux nous dire qui est Claude Sommet en une minute ?
- Speaker #2
Claude Sommet, il est professeur de physique à l'université de Mons. J'enseigne la mécanique quantique et je fais des travaux de recherche en mécanique quantique. Et je suis un super grand fan de science-fiction.
- Speaker #0
Et enfin, j'ai la chance aujourd'hui d'accueillir un troisième cabaléros, Roland Lehoucq. Salut Roland.
- Speaker #1
Salut Max.
- Speaker #0
Comment vas-tu ?
- Speaker #1
Très très bien, tu m'étonnes, je suis là, je suis tranquille, je suis à mon, c'est génial avec des copains, ça va bien.
- Speaker #0
Alors le dernier épisode qu'on a enregistré ensemble, c'était sur la physique de l'impossible, un livre que tu as sorti en 2024. D'ailleurs, cher auditeur, cher auditrice, je t'invite à aller écouter ce podcast parce qu'il est incroyable. Et comme tu es un invité un peu spécial, je te donne... Deux minutes pour te présenter.
- Speaker #1
C'est beaucoup trop. Donc, je suis Roland Lehoucq, je suis astrophysicien. Je travaille au Commissariat à l'énergie atomique de Saclay, qui est dans le sud de Paris, en France. Et j'ai une grande activité de diffusion des connaissances scientifiques, notamment en utilisant la science-fiction, dont je suis aussi un grand fan. Et il se trouve que je suis aussi le président des Utopial, un festival de science-fiction qui se déroule chaque année à Nantes, dans la grande île de Nantes.
- Speaker #0
Festival qui, entre parenthèses, m'a vraiment beaucoup inspiré pour les podcasts. un j'ai
- Speaker #1
piquer plein d'idées dans ce que j'ai pu voir.
- Speaker #0
C'était incroyable.
- Speaker #1
Nous-mêmes, on pique ailleurs, on se fait piquer. C'est parfait, c'est exactement ça que ça doit fonctionner. Échanger les connaissances, échanger les savoirs, échanger le plaisir qu'on peut avoir à voir telle ou telle chose, c'est exactement notre ambition.
- Speaker #0
Et aujourd'hui, on va aborder ensemble un monument de la science-fiction, mais une science-fiction particulière, puisqu'on va parler de science-fiction chinoise. Alors, ces dernières années, elle a fait véritablement un plein boom. Il y a plein de nouvelles. qui ont été diffusées, ça a été aussi clairement identifié parce qu'il y avait des films qu'on avait vus, par exemple je pense à Premier Contact qui est en fait un film basé sur une nouvelle chinoise et on va passer 50 minutes parce qu'au niveau temps on est vraiment ric-rac aujourd'hui, Roland juste après va faire une conférence au MUMONS, on va parler du problème à trois corps. Alors moi quand j'ai lu le problème à trois corps, ça a complètement changé ma perception je vais dire de la science-fiction. J'ai trouvé que c'était vraiment un vent de fraîcheur, mais même si c'est de la art science fiction quand même, on est sur quelque chose d'assez complet, mais c'est extrêmement intéressant et j'ai pris beaucoup de plaisir à le lire. Cher auditeur, chère auditrice, si tu ne l'as pas encore lu, je t'invite à le lire, tu peux regarder aussi la série Netflix bien entendu. Il y a une série chinoise, on va en parler très vite, qui est très intéressante. Et donc ce problème à trois corps, qui s'appelle en fait la trilogie des trois corps, qui s'appelle aussi Chronique de la Terre, ça dépend les traductions, c'est une trilogie de science-fiction du romancier chinois Liu Xixin, et elle a été publiée entre 2006 et 2010. Alors le premier tome de la trilogie s'appelle Le problème à trois corps, et elle narre la participation d'une astrophysicienne chinoise à un projet radiotélescopique, secret bien entendu, durant la révolution culturelle. Et puis l'enquête d'un chercheur sur une vague de suicides dans la communauté scientifique au début du XXIe siècle, et ses deux intrigues débouchant sur une révélation finale du premier tome. Je spoil un peu donc. Si tu ne veux pas entendre, cher auditeur, chère auditrice, tu passes les 30 prochaines secondes. Sur une menace cosmique pesant sur l'humanité, les deux volumes suivants, La forêt sombre et la mort immortelle, décrivent en fait les stratégies adoptées pour cette dernière, pour y faire face, mobilisant à la fois les ressources de la technologie et la compréhension d'un univers apparaissant de plus en plus hostile. Puisqu'en effet, il s'agit d'une race extraterrestre qui va mettre 400 ans à arriver sur Terre. Mais comment on fait pour se préparer à une arrivée qui, on le sait tout de suite, n'est pas pour faire copain-copain ? Alors, c'est un succès immédiat en Chine. Et ensuite, bien au-delà, elle commence à se diffuser et elle est reconnue internationalement après l'attribution du prestigieux Prix Hugo en 2015 à la traduction anglophone du premier tome. Elle donne lieu à plusieurs œuvres dérivées et adaptations, notamment sous forme de séries. Le problème à trois corps de Tencent, qui est la fameuse série chinoise dont je parlais de 2022, qui adapte en une vingtaine d'épisodes le premier tome, mais d'une façon extrêmement fidèle, donc c'est très intéressant, et le problème à trois corps qu'on connaît en 2024 sur Netflix. C'est un sujet très très vaste, c'est une oeuvre littéraire que j'ai complètement dévorée, ça m'a pris un mois pour lire les trois, mais on est à pratiquement 1000 pages par tome. Moi j'ai noté complètement dingue, je sais pas dire autre chose. Claude, je sais que tu ne l'as pas encore lu, donc je te le conseille vraiment, c'est très très bon. Et en fait c'est tellement dingue qu'il y aura deux épisodes sur cette oeuvre. Celui-ci, plutôt centré sur des concepts physiques, et un prochain plutôt centré sur une lecture sociale et anthropologique. de ce que vivent les héros par rapport à cette invasion extraterrestre. Et je vais commencer avec une question un petit peu obvious, mais qui pourtant est très très importante. Mais au final, c'est quoi un problème à trois corps ?
- Speaker #1
Alors le problème à trois corps, ça fait référence explicitement à une question d'astronomie, de mécanique céleste, qui est d'étudier d'abord, l'astronomie c'est d'abord d'étudier le mouvement des astres, des planètes autour du Soleil, même si les premiers modèles n'étaient pas des modèles héliocentriques, des planètes autour du Soleil. Et dans ce système, qui est notre système solaire finalement, le système est assez simple. Il y a un astre central qui est le Soleil, qui est immense au regard des autres planètes, même de la plus grosse planète qui est Jupiter. Le Soleil représente à lui seul 99,8% de la masse du système solaire et les débris, si j'ose dire, qui tournent autour. Et quand on s'intéresse à l'orbite d'une planète particulière, par exemple la Terre, en première approximation, on peut la traiter comme un problème à deux corps. Le Soleil, le corps principal, et la poussière qui tourne autour, la Terre. Et ce problème a été d'abord écrit, mathématisé par Newton, qui a permis de redémontrer ce qu'on appelle les lois de Kepler. Kepler était un astronome qui a trouvé des lois empiriques sur le mouvement de ces planètes. Par exemple, elles suivent une orbite elliptique autour du Soleil. Par exemple, leur vitesse dépend de la position sur cette ellipse et il y a une règle très précise qui règle cette vitesse. Ou encore, la période de la planète et le rayon de son orbite, ou le demi-grand axe de son orbite, si on parle d'une ellipse, sont liés par une relation très particulière qu'on appelle la troisième loi de Kepler. Newton écrit la gravitation universelle, redémontre les lois de Kepler, et on a l'impression d'avoir compris la gravitation dans le sème solaire et les orbites des planètes. Il y a des raffinements variés, bien sûr, la planète Jupiter a une influence un peu sur l'orbite de la Terre, ce sont des raffinements de Newton et du problème à deux corps. Après, c'est rapidement poser la question, mais alors si on a trois corps, alors quand on dit trois corps, ça veut dire deux corps de masse comparables, disons, des corps qui comptent, et puis un troisième qui serait la poussière, alors assez rapidement, on tombe sur des difficultés mathématiques techniques. qui sont absolument impossibles à résoudre analytiquement, c'est-à-dire par le calcul à la main, si je veux dire. Alors que le problème à deux corps se résout analytiquement depuis Newton. Ce n'est pas facile, mais c'est au niveau d'un élève de première année d'université, et même d'une année avant de la première année d'université, au niveau du baccalauréat, ça se fait sans trop de problèmes pour qu'on soit un peu aguerri dans ces questions. Le problème à trois corps a excité beaucoup les mathématiciens, et plus généralement le problème à N corps, N voulant dire un nombre entier de corps plus grand strictement que 2, donc 3, 4, 5, 10, 100, 1000 corps. Et là, on s'est rendu compte que ce problème mathématique est très compliqué. Dans le cas du roman du Liu Xixin, le problème à 3 corps, il donne son titre au roman parce que les extraterrestres dont il est question, les trisolariens, sont sur une planète qui a 3 soleils, qui est dans un système à... trois soleils, d'où le nom de trois corps. Alors strictement, on devrait dire plutôt le problème à quatre corps, parce que c'est les trois soleils, supposés de masse voisine, des étoiles, il y a des grosses et des petites étoiles, et puis la poussière, la planète. Et cette planète, elle a une orbite extrêmement chaotique. Et ce qui fait que la civilisation des trisolariens doit se développer en dépit de variations climatiques, de variations d'ensoleillement extraordinairement difficiles à prévoir. Et donc cette civilisation développe des stratégies pour finalement aboutir à un niveau technique élevé, en dépit de l'aspect chaotique de son orbite.
- Speaker #0
Des espèces de rebouts de la civilisation parce qu'il y a des moments où la situation est tellement chaotique que tout s'éteint pendant plusieurs milliers d'années.
- Speaker #1
Exactement, il y a une capacité de cette espèce extraterrestre à se mettre en état, disons, on appréhend ça sur Terre, en crypto-bio, c'est-à-dire qu'ils ne sont pas morts mais ils sont en état de ralentissement métabolique, c'est même plus qu'un ralentissement, c'est même un arrêt métabolique, ils se dessèchent. Alors en ce sens, ça ressemble à des êtres qui se dessèchent spontanément. Sur Terre ça existe, c'est les arbres par exemple qui font des graines ou les plantes qui font des graines qui sont des petits machins desséchés. On les met dans un coin pendant un siècle ou deux puis après on les met dans la Terre avec un peu d'eau et un peu de lumière. Et hop là c'est reparti, l'être, la plante se redéveloppe à nouveau. Donc c'est des sortes d'êtres plantes on va dire, ils sont capables de se dessécher. Alors ils le font quasi instantanément ou très rapidement donc ça c'est la magie de la science-fiction. Là pour le coup on invente un truc mais...
- Speaker #0
Les tardigrades macroscopiques en fait. Oui,
- Speaker #1
les tardigrades macroscopiques, oui les tardigrades, très bien, les tardigrades font ça aussi très bien. Donc ils ont une capacité à passer ces étapes difficiles et un de leurs problèmes c'est d'essayer d'anticiper ces saisons dures, qu'elles soient froides ou très froides ou très chaudes, pour s'en prémunir et peut-être mettre à l'abri des choses qui ne voudraient pas voir disparaître le temps que la période difficile se passe.
- Speaker #0
Claude, de ce que je me souviens de notre discussion, tu as écrit un article sur le problème à Encore.
- Speaker #2
Oui, oui, mais c'était... plutôt un problème à une corps quantique. Où là, paradoxalement, les choses sont un peu plus simples. Parce que quand tu prends des particules quantiques, tu considères par exemple toute une collection de particules identiques. Et dans ce cas-là, tu peux utiliser des principes de symétrie pour simplifier le problème. Et donc, paradoxalement, un système quantique à une corps peut parfois être beaucoup plus simple à traiter qu'un problème mécanique classique à une corps.
- Speaker #0
Dans la série Netflix, on voit une scène assez particulière où justement... Avec l'alignement des trois soleils par rapport à la planète, donc on a une espèce d'éclipse de soleil, de soleil, ils sont alignés. En fait, avec l'attraction gravitationnelle de ces trois soleils combinés, les gens commencent à s'élever vraiment dans l'air. Est-ce que vous pouvez nous parler de cette scène un peu incroyable ?
- Speaker #1
Alors cette scène, elle est incroyable à voir, mais elle est assez fausse du point de vue technique, puisque finalement, que les trois gravités des astres s'alignent, bon ben, l'attraction semble être alignée dans le même sens. Ce n'est pas pour autant qu'elle va dépasser l'attraction. du sol de la planète sur laquelle sont posés les êtres. En revanche, ce que ça peut causer, et là ça aurait été plus réaliste, c'est ce qui se passe très clairement sur Terre. Quand le Soleil et la Lune, toutes proportions gardées, parce que là ce n'est pas trois soleils, c'est le Soleil et la Lune, s'alignent, il y a des moments où les forces de marée, l'effet de marée de la Lune et du Soleil s'additionnent et ça provoque les grandes marées. Ça le provoque régulièrement, toutes les nouvelles lunes à peu près, il y a un effet de grande marée. Et pareil quand c'est de l'autre côté, quand l'une est de l'autre côté, c'est aligné aussi avec la Terre. De sorte que ce bourrelet océanique qui est dû aux variations de la force de gravitation de la Lune ou du Soleil sur la taille, sur le diamètre de la Terre, la gravité est une force qui dépend de la distance. Et donc quand on est sous la Lune, on est plus attiré par la Lune que quand on est de l'autre côté de la Terre, au diamètre allemand opposé. Mais on reste toujours évidemment collé à la Terre. Et bien cet effet-là de différence de gravitation étire les océans, les masses déformables de notre planète, et tirent les océans, ils font un double bourrelet qui sont les deux... Marais hautes, les deux marais hautes par jour. Il y a dans les marais, il y a beaucoup d'autres subtilités en plus, mais en gros, on comprend comme ça les deux marais hautes par jour. Alors dans le cas de, on appelle ça techniquement, on a trouvé une 6J, ça s'écrit S-Y-Z-Y-G-Y-E. Je l'avais mal écrit dans mes notes. 6J, c'est en plus un peu compliqué à dire, mais ce qui est un peu amusant, c'est que dans la série Netflix, ils parlent de 6J, et je trouve assez marrant que dans une série télévisée grand public, On met un mot à ce point technique qui a une explication, qui est un mot réellement utilisé en astronomie, pour désigner ce que tu appelais cet alignement, qui n'est rien d'autre que cet alignement. Donc la scène, elle est fausse, elle est curieuse, elle est spectaculaire à voir, elle est fausse. En revanche, il pourrait y avoir effectivement des effets de marée. En plus des effets climatiques qu'on voit sur la planète, il pourrait y avoir des effets de marée très considérables. Et donc, indépendamment du fait chaud, du fait froid, il pourrait y avoir cette... des montées d'océans sur ce monde qui sont si considérantes.
- Speaker #0
Des montées de sol peut-être.
- Speaker #1
De sol ou même de marées continentales. Parce que bien sûr, il y a aussi des marées continentales. D'ailleurs, je crois que c'est à Bruxelles qu'il y a un très grand labo qui étudie les marées continentales. C'est-à-dire le fait que la croûte terrestre se déplace un petit peu sous l'influence des marées lunaires et solaires. Alors, ça se déplace d'une trentaine de centimètres. C'est toute la croûte. Ce n'est pas juste une région et ça craque en dessous. c'est un peu toute la croûte terrestre 30 cm c'est beaucoup moins que les marées océaniques mais ça commence à être... Pas complètement négligeable, il s'est étudié en détail. Donc là, il pourrait y avoir d'autres effets marrants à montrer, oui.
- Speaker #2
D'ailleurs, si je ne me trompe pas, il me semble que ces marées terrestres ont une influence sur les mesures que l'on fait au LHC. On doit prendre en compte ces variations régulières. Et j'imagine que si tu as trois soleils qui s'alignent et qui provoquent... D'énormes marées océaniques, ça pourrait provoquer des marées de croûte terrestre beaucoup plus importantes, avec peut-être des tremblements de terre et des réveils volcaniques à la clé.
- Speaker #1
Exactement. Ces effets de marées, ces forces de marées de la Lune sur la Terre, on les connaît. De la Terre sur la Lune, on les connaît moins. Ça soulève la croûte de la Lune de 1 mètre et ça fait des failles. Au fil des milliards d'années, ça finit par faire des failles qu'on reconnaît comme conséquences des forces de marées de la Terre sur la Lune. Et puis, Jupiter a de nombreux satellites, dont le satellite Io. et le satellite UO subit. La distance qu'il sépare de Jupiter, c'est à peu près la distance qui sépare la Terre et la Lune, donc assez proche finalement de Jupiter, qui est une planète bien plus massive que la Terre, qui est à peu près 300 fois plus massive que la Terre. Donc au final, les marées de Jupiter sur Io sont si intenses que la croûte de Io se soulève d'une centaine de mètres sur un objet qui fait en gros la taille de la Lune, typiquement 1700-1800 km de diamètre. 100 mètres sur 1700 km, on se dit que c'est quand même pas grand-chose, mais ça le subit régulièrement dans son orbite d'un peu moins de deux jours. Et à force, ça écrabouille, relâche, écrabouille, relâche, qui fracture la croûte de Io. Il y a, je ne sais plus combien, mais plusieurs dizaines de volcans actifs sur Io qui résultent des failles dans la croûte, des volcans au sens de volcans de roches liquides, comme les volcans terrestres. C'est le seul endroit du Seine-Solaire où il y a un volcanisme actif comme sur Terre.
- Speaker #0
Dites-moi si je me trompe, il y a aussi le cas d'Anslade avec Saturne, où justement, il y a aussi des marées extrêmement importantes qui font que les croûtes de glace d'Anslade se soulèvent et on a une éjection de matière en continu. Oui,
- Speaker #2
tout à fait.
- Speaker #1
Exactement, la même chose sur Ancelade. À la différence que c'est du cryovolcanisme, cette fois-ci, la matière chaude, ce n'est pas de la roche liquide à 1000 degrés, c'est de l'eau à 0 degré Celsius, en gros de l'eau liquide. Et la matière solide froide, c'est de la glace à moins de 100 degrés Celsius. Donc l'ambiance est un peu différente, mais c'est la même idée. C'est les forces de marée qui vont provoquer, qui vont dissiper de l'énergie dans le corps, provoquer la fusion d'un solide, de la glace ou de la roche, et provoquer l'éjection du liquide associé.
- Speaker #0
Alors dans le problème à trois corps, il y a un élément qu'on ne va pas détailler ici parce que fondamentalement, physiquement, il n'a pas nécessairement beaucoup de sens. On va parler de l'intellectron. Mais cet intellectron, il fait quelque chose et là on va en parler. Son action est très très intéressante. C'est l'intellectron, ce proton qui peut aller à la vitesse de la lumière, arrive en fait à perturber tous les instruments de mesure sur Terre et donc la science fondamentale ne peut plus avancer. Elle est bloquée. Et comme on ne peut plus découvrir de nouveaux concepts, aller plus loin dans l'exploration de la science fondamentale, en quelque sorte, on est bloqué dans la science appliquée. Et un des personnages du problème à trois corps se dit en fait, mais ça reste quand même intéressant parce qu'au final, on doit explorer intégralement et en profondeur tout ce que l'on connaît avant d'aller chercher une nouvelle connaissance qui nous permette de nouvelles applications. Quand moi j'ai lu ce passage, je me suis dit, mais est-ce que ce ne serait pas au final une... une solution pour notre monde, de se dire que plutôt que de pousser la recherche toujours vers l'avant, se dire, OK, on arrête. On arrête de chercher des nouvelles choses. Et on cherche à comprendre ce que l'on a découvert par le passé, mais d'une façon beaucoup plus poussée et en prenant le temps de le faire. Quelle est votre position un petit peu par rapport à ça ? Et là, je vous regarde tous les trois. Je pense que ce serait intéressant d'avoir votre avis.
- Speaker #2
C'est un peu difficile à dire. Alors, il y a sans doute... Toute une série de choses dans lesquelles on pourrait continuer à progresser, même avec des instruments de mesure perturbés, c'est tout simplement dans les mathématiques. Où là, l'intellect humain peut suffire, bon parfois on se fait aider d'ordinateur, ça c'est clair, mais il y a toute une série de choses où c'est le raisonnement pur qui peut permettre de faire progresser les choses. J'imagine aussi peut-être une chose dans laquelle on pourrait peut-être progresser, c'est la mécanique quantique, pour laquelle on a énormément d'interprétations différentes, mais qui correspondent toutes au même ensemble d'équations. et au même ensemble de mesures, mais on n'arrive pas à se faire une image mentale correcte de ce que ça représente, de quels sont les éléments de réalité qui se cachent derrière cette théorie, donc on pourrait sans doute encore progresser beaucoup là-dedans. Après, qu'est-ce que ça veut dire exactement explorer un champ disciplinaire que tu connais déjà, avec des instruments de mesure qui ne peuvent plus te donner de mesures fiables ? Pour moi, ce n'est pas tout à fait évident ce que ça pourrait dire.
- Speaker #1
Ce que ça évoque aussi, c'est le fait qu'en science, on a collecté une quantité considérable d'informations déjà. Je pense par exemple en astronomie, en astrophysique, où on a déjà collecté énormément d'informations dont l'essentiel n'a pas été traité. Et bien sûr, les scientifiques qui s'intéressent à ces observations vont essayer d'abord de traiter les choses les plus croustillantes, disons les plus prometteuses pour une découverte, ce qui est assez légitime. Mais il reste en fait énormément d'informations qui n'ont pas été traitées. Les grands observatoires maintenant modernes qui font des surveillances du ciel continuellement pour rechercher des objets, pour étudier les supernovas, les galaxies, etc. Ces objets produisent littéralement des dizaines de teraoctets de données chaque nuit. Donc quand on en a accumulé un certain nombre, Dans un nombre de nuits, on se dit, il y a du boulot, bon, il n'y a pas que de la bonne information, il y a peut-être des choses qui sont perdues, qui sont canulées d'une façon ou d'une autre. C'est pareil en physique des particules, il y a énormément d'informations qui n'est pas regardée parce qu'on se focalise sur la partie intéressante, enfin, qui nous paraît intéressante, importante. Donc ça pose la question de, est-ce qu'il faut continuer à fabriquer de nouveaux instruments ? Je pose cette question parce que, précisément en ce moment, le CERN suggère de fabriquer le FCC, c'est le futur collisionneur de particules. pour creuser un tunnel de 90 km de circonférence, alors que le tunnel actuel du CERN fait, où il y a le LHC, et avant il y avait le LEP, qui fait 27 km de circonférence, est-ce qu'il faut construire cet instrument ? Il y a des arguments scientifiques pour dire, il nous faut un plus grand instrument pour explorer le microscopique de telle et telle façon. Pareil en astrophysique, il nous faut un plus grand télescope ou un télescope spatial de telle et telle façon. Est-ce qu'il faut construire de nouveaux instruments comme ça, ou se contenter des données que nous avons déjà et pas encore analysées, dans un contexte, c'est pas juste... pour le plaisir, la question qui serait posée, dans un contexte de raréfaction des ressources et de diminution, qu'il faudrait diminuer l'empreinte environnementale de l'humanité, de mille façons, dont l'empreinte des recherches scientifiques qui fait partie de l'empreinte de l'humanité, et qu'on ne peut pas dire, ah ben la science c'est bien. Donc elle a le droit de polluer là où, je ne sais pas moi, l'industrie agroalimentaire, c'est mal qu'elle pollue. En même temps, c'est bien parce que ça nous fait manger. Ou l'industrie minière, c'est mal qu'elle pollue. Ah oui, mais ça permet d'extraire les métaux qui vont permettre de faire les super accélérateurs de particules. Donc on voit bien que, comme toutes ces choses-là sont liées, ça pose la question très concrète de à quel moment on arrête dans un monde qui est désespérément fini et qui, par bien des aspects, nécessiterait qu'on le laisse un peu se reposer, qu'on arrête de l'exploiter, de l'extraire, etc. Donc cette question-là de... Faut-il arrêter la science ? Là, dans le cas des trisolariens, leur objectif est clair. Ils arrivent, ils mettent 400 ans pour arriver avec leur vaisseau.
- Speaker #0
Donc c'est des vaisseaux normaux, moins rapides que la lumière, il n'y a pas de magie de la science-fiction à cet endroit-là. Mais en 400 ans, ces diables d'humains pourraient progresser. Nous envoyons la baguette magique, les intélectrons, qui vont ralentir le progrès humain. Donc cette question de faut-il ralentir le progrès technique humain est une question intéressante. Elle a déjà été posée aussi à d'autres moments en science-fiction. Je pense notamment à un texte de Léo Szilard. Je vous fais juste du name dropping, je vous irai voir sur Internet. La fondation Marc Gebel, M-A-R-K et Gebel G-A-B-L-E, et c'est un milliardaire qui se demande, on est dans un roman de Léo Zillard, un physicien qui a motivé Einstein pour faire la lettre à Roosevelt qui a donné lieu au projet Manhattan, et donc Léo Zillard, désolé de voir les conséquences de l'arme nucléaire et du projet Manhattan, se pose des questions sur le progrès technique et constate, lui comme auteur, il le met dans la voix de ce milliardaire, que le progrès technique va beaucoup trop vite au regard du progrès moral et éthique de l'humanité. ne faudrait-il pas trouver un moyen de ralentir le progrès technique pour que ce qui est toujours à la traîne, ce qui est toujours plus lent, les évolutions qui sont plutôt d'ordre social, politique, toujours beaucoup plus lentes que ce progrès technique qui semble insatiable et en accélération permanente, puissent rattraper le coup et que, enfin, les techniques que nous produisons ne soient pas des fusils donnés à des enfants, d'une certaine façon. Et donc, Léo Zillard pose concrètement la question. Il propose une solution que je vous laisse découvrir. Vous trouverez sur Internet facilement la nouvelle et même le petit extrait important de la fondation Mark Gable, qui est édifiant. Et quand on le lit, ce petit extrait, on réalise que ce n'est pas si dissemblable de certains fonctionnements de financement de la recherche, que ce soit en France ou en Belgique d'ailleurs.
- Speaker #1
Ce qui veut dire que c'est un petit peu catastrophique.
- Speaker #0
Ce qui veut dire que c'est un petit peu catastrophique, oui. C'est-à-dire qu'en dépit des efforts prétendus pour faire progresser la science, pour que la science progresse et que l'innovation innove, en fait, les mécanismes mis en place ne sont pas à ce point optimum pour que ça aille aussi vite qu'on pourrait l'imaginer.
- Speaker #2
Oui, et il ne faut pas oublier, ça fait écho aussi à l'appel qui a été fait récemment par un certain nombre de scientifiques, de mettre en pause les progrès sur l'intelligence artificielle, puisqu'elle peut nous aider, évidemment, dans toute une série de domaines, mais elle peut aussi être à même de provoquer des catastrophes. Malheureusement, je ne pense pas que ce soit la voie qu'on prenne, puisque je pense que pour le moment, il y a beaucoup d'entreprises qui se disent qu'il y a moyen de faire beaucoup d'argent avec l'intelligence artificielle, surtout ne mettons pas de frein et développons, alors qu'il y a quand même des dangers réels. Peut-être un peu fantasmé, mais réel sur les problématiques de l'emploi et autre chose.
- Speaker #1
Disons que c'est difficile d'enlever les clés d'une voiture qui roule à 250 km heure.
- Speaker #0
Oui, mais c'est difficile d'enlever les clés d'une voiture qui roule vite. Mais le problème, c'est qui a fabriqué la voiture ? Et est-ce qu'il n'y a pas des gens qui sont en même temps en train de bosser pour qu'elle aille à 300 km à l'heure ? Et il n'est pas impossible que ce soit aussi, appelons ça, le monde de la recherche en général, que ce soit de la recherche fondamentale, mais de la recherche... appliquées, la recherche environnementale n'étant pas pure et éthérée, par défaut, les applications de la mécanique quantique ont donné tous les ordinateurs qui font l'intelligence artificielle, qui font les ordres atomiques, la relativité générale a donné notre compréhension de la gravitation, avec les ordres atomiques, dans des satellites, a permis de faire le réseau de géolocalisation, dont les conséquences c'est d'accélérer les flux de toutes les matières et de tous les transports qui provoquent pour partie ou qui accélèrent aussi pour partie notre emploi environnemental, notre emploi climatique, bref, on pourrait faire un raccourci énorme. la physique quantique et la relativité générale sont les causes du réchauffement climatique, sont parmi les causes du réchauffement climatique ou de l'empreinte environnementale de l'humanité. Donc ce n'est pas de la science pure et éthérée, il y a toujours des conséquences à ce que l'on fait, même si elles sont lointaines, même si elles ne sont pas imaginées au moment où on les produit. Et donc finalement cette question des électrons, même si c'est dans un monde de fiction et pour tout à fait d'autres raisons, il nous pose la question de notre rapport aux sciences, de notre rapport au progrès technique.
- Speaker #1
Francesco, un mot sur notre rapport aux sciences et au progrès technique ?
- Speaker #3
Je pense qu'en fait on vit dans un monde où sans cesse on entend le progrès, tout ce qu'on peut faire on doit le faire. Et là se pose la question de, est-ce que tout ça fait sens en fait ? Et donc à la fois tu as une partie de la population qui voit dans la science tous les problèmes actuels et une autre qui dit mais de toute façon on aura des problèmes qui vont être résolus par la technologie et c'est une fuite en avant. Et je pense que plus que jamais ici c'est la question du sens qui se pose en fait.
- Speaker #1
Et je pense qu'une question qui se pose aussi, et je ne vous demande pas nécessairement de réagir, mais c'est la question de l'éthique. derrière la science, c'est ok, on peut découvrir quelque chose, mais est-ce qu'on veut nécessairement faire quelque chose de ce qu'on a découvert qui serve le bien humain ou qui desserve le bien humain ?
- Speaker #0
Là, le point, c'est qu'on ne peut pas le décider à l'avance. Une fois qu'une chose est inventée, on ne peut pas la désinventer. Donc, peut-être, il faudrait s'interdire d'aller dans des voies. Je pensais, tout à l'heure, Claude faisait fort justement référence aux questions d'intelligence artificielle, mais qui sont déjà là, donc c'est déjà d'une certaine façon presque perdu d'avance. Il y a la même chose qui se pose en biologie. Il y a eu récemment, au mois de décembre dernier, dans la revue Science, il y a un collectif de biologistes qui se posent des questions très concrètes sur toutes les études qui sont faites sur le vivant miroir. L'idée que nous vivons, nous, la vie terrestre vit avec... que des molécules qui ont des images miroirs différentes, c'est-à-dire que la molécule et son image dans un miroir n'ont pas les mêmes effets, et que le vivant terrestre fonctionne sur des molécules, soit l'évogir, soit d'extrogir selon les procédés, mais qui ont une forme particulière, l'autre forme étant totalement évincée du vivant terrestre. Et des questions de biologie fondamentale se posent. Est-ce qu'on peut synthétiser ces molécules miroirs artificiellement ? Est-ce qu'on pourrait imaginer, créer ? Un être vivant, pour l'instant, on est tout à fait incapable de créer une molécule from scratch, c'est-à-dire juste en la construisant artificiellement, pas une molécule, une cellule. Est-ce qu'on pourrait faire des cellules qui vivraient sur ça ? Mais du coup, ça a des conséquences qui sont inimaginables, puisque notre système immunitaire, par exemple, il fonctionne par défaut avec le vivant terrestre. Puis c'est un vivant qui, pour nous, humains, est un vivant désavantageux. C'est des bactéries, des virus qui nous affligent. Mais s'il y avait des bactéries ou des virus qui fonctionnent sur le monde miroir, sur ces chimies miroirs Alors peut-être qu'ils ne seraient pas reconnus et que leur viralité serait démultipliée. Bref, ça pose des questions très complexes. On est encore loin de savoir le faire. Mais est-ce qu'il ne faudrait pas tout simplement faire un moratoire d'interdiction de ce genre de recherche-là ? Comme on fait un moratoire sur les manipulations génétiques, sur les humains, sur les embryons humains, parce qu'on a décidé que ce n'était pas éthique de faire ça.
- Speaker #1
Ce qui n'a pas empêché un Chinois de faire des recherches pour... essayer de modifier des embryons pour qu'ils soient résistants.
- Speaker #0
Ça a été fait. Les jumelles sont nées et elles sont vivantes.
- Speaker #1
Toutes les questions derrière, est-ce que ça a une influence sur leur intelligence, sur leur immunité, etc.
- Speaker #0
Mille questions éthiques se posent, très complexes. Et donc, peut-être que des fois, de temps en temps, la réponse serait on arrête et on se donne un siècle pour réfléchir. Et après, on verra.
- Speaker #1
La version un peu plus trash ne se touche pas à sa petite compte.
- Speaker #2
Oui, il y a aussi le fait, par exemple, le clonage humain. Finalement, on s'interdit de le faire. Je pense que technologiquement parlant, ce ne serait pas très compliqué d'y arriver. Mais simplement, on ne veut pas le faire et il faut avouer qu'il n'y a pas un intérêt énorme à le faire. A moins peut-être que des milliardaires imaginent se fabriquer des pièces de rechange qui pourraient se faire greffer en découpant le clone.
- Speaker #0
Ce que la science-fiction a mis en scène. De mille façons différentes, absolument.
- Speaker #1
Un autre concept physique qui est quand même abordé dans le problème à trois corps, c'est le paradoxe de Fermi. Pourquoi, au final, on ne rentre pas en contact avec d'autres civilisations ? Pourquoi d'autres civilisations extraterrestres ne rentrent pas en contact avec nous. Est-ce qu'elles existent ? Est-ce qu'elles n'existent pas ? C'est quoi un peu ce concept de forêt sombre aussi dont on parle dans le deuxième tome ? Sans trop dévoiler non plus. Claude, je te regarde particulièrement. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu d'où ça ?
- Speaker #2
Alors, il faut expliquer un peu aussi d'où ça vient. C'est le physicien Enrico Fermi qui, lors d'un dîner, se faisait la réflexion. Mais si la galaxie est pleine de planètes abritant des formes de vie, certaines ont pu apparaître bien avant nous et développer une technologie. leur permettant de franchir le grand vide interstellaire. Or, on n'a aucune trace de forme de vie extraterrestre évoluée, et donc il s'est posé la question, mais où sont-ils ? Pourquoi ne les voit-on pas s'il y en a tellement ? Alors il y a énormément d'hypothèses qui ont été développées sur ce paradoxe de Fermi. Il y a notamment un bouquin, je crois, qui est en recense 71, 71, pardon. pour notre ami Roland. Je l'ai traduit directement.
- Speaker #0
Je parle au couramment belge.
- Speaker #2
C'est extrêmement intéressant. Mais donc, il y a des hypothèses qui sont plutôt sombres, dans le sens qu'en fait, dès qu'une civilisation atteint un niveau de technologie suffisant, elle s'autodétruit. Et donc, c'est pour ça qu'on n'en voit pas. Il y en a d'autres qui disent, tout simplement, le voyage interstellaire est technologiquement impossible et donc c'est normal qu'on n'en ait jamais rencontré. Il y en a aussi d'autres qui sont encore plus sombres, si j'ose dire. Qui serait de, ok, une forme de vie extraterrestre qui serait beaucoup plus évoluée que nous, c'est pas forcément une forme de vie amicale. Et donc, pour vivre heureux, vivons cachés. Essayons en fait de faire le moins de bruit possible autour de nous, essayons de nous rendre le moins visibles possible pour ne pas attirer l'attention d'une race extraterrestre potentiellement prédatrice, qui, elle, jouerait le jeu de, puisque moi je suis potentiellement un danger pour les autres, les autres peuvent être aussi un danger potentiel pour moi. Donc dès que je vois une forme de vie qui commence à développer une société technologique, on la détruit de manière à ce qu'elle ne puisse pas poser un problème pour nous plus tard. Et donc c'est ça l'idée. Peut-être que la galaxie est pleine de formes de vie à l'aube de la technologie ou technologique, mais qu'elle reste bien silencieuse pour ne pas se faire remarquer.
- Speaker #1
Et c'est vraiment le concept de forêt sombre. En fait, on est dans une forêt qui est sombre. Et si on commence à diffuser des signaux, on allume une torche et on est visible par tous les gens, même si nous qui avons la torche, on ne voit pas les gens. Et la question est, est-ce que parmi ces gens, il y a des gens suffisamment évolués pour, en un seul coup de fusée, nous détruire ? Et ce concept de la forêt son, moi je ne connaissais pas du tout. Alors on m'a dit après que ça existait depuis longtemps, etc. Mais je trouvais ce concept complètement dingue en fait.
- Speaker #0
En fait, on le voit beaucoup dans la science-fiction, dans Alien par exemple, dans le film Alien. ils sont L'antiforêt sombre, ils savent qu'il y a le monstre dans le vaisseau, le vaisseau il est fermé, l'extérieur c'est l'espace, et puis ils cherchent le chat, où es-tu le chat ? Alors qu'on aurait plus tendance à dire on va se planquer, on va pas essayer de...
- Speaker #1
Darwin s'est retourné plusieurs fois dans sa tombe avec Alien, mais...
- Speaker #0
On va pas se faire remarquer d'un être qui manifestement a l'air assez attrabilaire et qui peut nous manger très rapidement, donc voilà, ils font l'antiforêt sombre dans Alien. Mais oui, cette idée-là, elle est intéressante. Alors, toutes les résolutions, entre guillemets, tous les arguments qui ont été donnés pour essayer de comprendre... Ce paradoxe de Fermi, en fait, de façon assez normale, ils sont très humano-centrés ou bio-centrés sur le vivant terrestre, parce que c'est nous qui les émettons. Ils en disent plus sur nous, finalement, que sur les extraterrestres, dont on ne sait rien, dont on ne sait en particulier même pas s'il y en a, s'il y a une forme de vie extraterrestre. Donc ce paradoxe, il a une vertu, c'est aussi de réfléchir sur une question d'un point de vue assez, on va dire, métaphysique. On n'a pas de concret sous la main, mais ça permet de réfléchir à tout un tas de questions. Et ça serait quoi ? d'évoluer, si nous étions capables, nous, d'aller dans l'univers, de nous déplacer en voyage interstellaire, ça serait quoi les conséquences ? Comment on pourrait se comporter ? Ou si à l'inverse, on ne sait jamais, qu'un extraterrestre, que des êtres extraterrestres arrivent sur Terre ou qu'on en détecte, quelle serait notre réaction et comment on devrait se comporter avec des êtres dont on ne sait rien, a priori, absolument rien ?
- Speaker #3
Moi ça fait penser, on a eu toute une série de conférences au niveau de l'intelligence animale, etc. avec le copain Sébastien Moreau, mais en fait quand tu te rends compte que ce qu'on connaît aujourd'hui nous montre qu'énormément d'espèces animal en conscience d'exister, même le petit labre, le petit poisson qui fait 10 cm de long. Je trouve qu'il y a un paradigme qui est en train de changer complètement. Nous, pour l'instant, on a toujours eu l'impression, le sapien, c'est le king de l'évolution. Et tout ce qu'on fait, c'est normal que les grandes siles sont vont le faire. Donc si nous, on va dans l'espace, c'est normal que les autres vont y aller. Mais bon, tu prends une baleine, est-ce qu'une baleine a besoin de sortir de l'eau ? Parce que les gens disent tout le temps, on est les kings parce qu'on a le plus gros cerveau. Non, là-bas, on a un cerveau encore plus gros, donc on ne sait pas ce qu'elle pense, on ne sait pas comment elle fonctionne. Mais est-ce qu'elle a vraiment besoin de faire autre chose ? Est-ce que vraiment la technologie, c'est quelque chose d'universel ou bien ce n'est pas propre vraiment à nous ? Et puis se poser la question, moi, ça me fascine toujours. C'est un peu les idées d'Hubery, parce que quand il dit, finalement, on est quoi ? On est le fruit d'une évolution cosmique de 15 milliards d'années. On a un peu la nature qui prend conscience d'elle-même. La nature, elle crée plein de choses. il n'y a pas forcément de bien de mal et puis là maintenant on commence à se rendre compte qu'on peut choisir de ce qu'on veut faire ou pas. Mais donc finalement, c'est la question qu'on a déjà eu souvent. Quand tu développes un tracteur, est-ce que le tracteur est naturel ou pas ? Est-ce que finalement, modifier le code génétique, c'est la nature qui elle-même se pose des questions. Est-ce que je le fais ou est-ce que je ne le fais pas ? Qui on est finalement ? C'est sans fin.
- Speaker #1
Moi, je me rappelle d'une étude qui m'a assez bien marqué quand j'étais à l'UNIF. Donc, je vais avoir 20 ans, tant que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, hélas. Cette étude, en fait, elle expliquait que si une race extraterrestre vous les rentrez en contact. Avec quelque chose sur Terre, vu les complexités du langage, elle ne le ferait pas nécessairement avec les humains, elle le ferait plutôt avec les baleines. Parce que le chant des baleines a une complexité beaucoup plus importante que notre langage humain au niveau des sons, et donc il n'y a pas de raison, malgré notre égo qui se dit « oui mais c'est avec nous qu'on rentrera en contact » . Qu'une race extraterrestre nous choisisse pour discuter, entre guillemets...
- Speaker #0
On aurait un vent des extraterrestres, ça serait quand même terrible. Oui ! La fusée déboule, elle se pose, elle va discuter avec les baleines, elle fait un deal, puis elle se barre, et nous on est là, mais...
- Speaker #1
Une belle leçon d'humilité !
- Speaker #0
Là,
- Speaker #2
on serait difficile à digérer pour l'égo humain. Mais j'y crois pas trop, parce que quand même, la technologie, c'est quand même un signe qui ne trompe pas qu'on a atteint un certain niveau d'intellectualisation et d'intelligence.
- Speaker #0
On le voit dans 2001, c'est de l'espace, puisque c'est exactement comme ça que les extraterrestres repèrent le niveau d'évolution des humains, en mettant une sorte de balise sur la Lune. Et si la balise, elle fait bip, c'est-à-dire que quelqu'un l'a touchée. Si quelqu'un a touché une balise située sur le satellite naturel d'une planète qui est la Terre où le vivant s'est développé, ça veut dire que les gars de la Terre, les filles de la Terre, ont réussi à faire des plans pour aller sur la Lune. Ça donne tout de suite une idée de leur capacité.
- Speaker #3
En fait, pour ça, c'est le blague qui circule sur Internet. tu vois des extraterrestres qui débarquent de leur soucoupe volante Il voit un humain et dit « amenez-moi votre chef » . Et alors en fait on l'emmène à un chat. C'est vraiment...
- Speaker #1
C'est un peu l'idée, complètement. Alors, on progresse dans ce podcast, je surveille vraiment le temps. Un élément que je voudrais discuter avec vous, et je discute de celui-là parce qu'il n'a pas pu être discuté avec Roland, alors que c'est abordé dans son livre « La physique de l'impossible » , les ascenseurs spatiaux. Est-ce qu'une personne parmi vous peut me parler un petit peu de ces ascenseurs spatiaux, de ce qu'ils apportent comme avantages, peut-être des inconvénients qu'il y a derrière ? et de pourquoi ce serait intéressant d'en avoir un sur Terre, et en considérant les limites planétaires, est-ce que c'est vraiment une bonne chose ?
- Speaker #0
Alors l'ascenseur spatial, c'est une idée qui date de 1960, d'un russe qui s'appelle Yuri Arturatov, qui a publié ça en russe, dans une revue russe. Et cet ascenseur spatial, l'idée est la suivante. D'abord, ça s'appelle plutôt les tours orbitales, l'idée qu'on veut aller dans l'espace. La première solution, c'est de la fusée, le truc canonique. C'est encore un russe qui avait imaginé ça, d'aller dans l'espace avec des fusées, qui est Konstantin Tsiolkovsky, dans la fin du 19e siècle. Et là, on pourrait dire, on va faire une tour. On va faire une très grande tour parce que l'espace, c'est quand même, ça n'est pas si loin. C'est comme de Paris à Bruxelles. Si on mettait Bruxelles au-dessus de Paris, verticalement ou l'inverse, la deuxième ville serait dans l'espace au-dessus de la première, à 200 kilomètres, un peu plus. Évidemment, ça ne serait pas sans conséquences, évidemment, dramatiques pour ses habitants. Et donc, l'espace n'est pas si loin. On ferait une tour de 300 ou 400 kilomètres. Et puis, au-dessus de la tour, on jette un truc. On jette un truc dans l'espace pour qu'il reste en orbite autour de la Terre. Alors cette question-là, on peut l'amplifier, on dit pourquoi faire une tour de 200 ou 300 km ? Pourquoi pas une tour de 2000, 3000, 36 000 km ? Ah là là, ça serait bien, ça serait une tour en orbite géostationnaire. Après, il se pose la question, c'est gentil, mais cette tour, est-ce qu'elle a pas s'écrouler sous son propre poids ? Qu'à cela ne tienne, on ne va pas faire une tour, on va faire un câble suspendu dans l'espace, accroché à la Terre, la tour inversée. Et puis pour qu'il soit à l'équilibre, ce câble, entre son poids qui le tient vers la Terre et la force centrifuge, parce qu'il tourne avec la Terre, et la force centrifuge qui le fait tourner avec la Terre, il faut qu'il ait une longueur complète de 144 000 km. Et ensuite, une fois que le câble est installé... Je vous passe beaucoup de détails techniques. Il n'y a plus qu'à monter le long du câble, littéralement de monter le long du câble par un ascenseur. On monte à vitesse assez lente, à quelques centaines de kilomètres par heure. Ça met du temps pour aller en orbite. Les fusées font ça en quelques minutes. Là, il faudrait des heures et des heures. Mais c'est pratiquement gratuit, l'ascenseur qui tombe. tirent l'ascenseur qui monte, et il y a un peu d'effrontement, alors on met un petit peu d'énergie pour propulser tout ça. L'énergie, comme le truc fait 144 000 km de long, mais quelques panneaux solaires là-haut qui prennent l'énergie solaire en permanence et qui alimentent électriquement le système. Bref, vous vous trouvez avec un système pour aller dans l'espace, où vous pouvez, au lieu d'envoyer quelques misérables tonnes toutes les semaines ou tous les mois, vous envoyez littéralement des tonnes chaque minute dans l'espace. Et là, vous avez un accès très facile. très peu coûteux et très efficace à l'espace. Et donc, vous devenez littéralement une civilisation spatiale. Alors que là, on fait des choses dans l'espace, mais ça s'amplifie beaucoup, avec les lancements récents et tout ce qu'on peut voir récemment dans le new space. Mais on reste assez modeste, en réalité. Donc, l'ascenseur spatial, ça donnerait vraiment un accès privilégié à l'espace. La question qui se pose, c'est c'est quoi la matière pour faire ce câble ? Et là, évidemment, c'est la question qui fâche. Il faut une matière qui soit extraordinairement résistante. Jusqu'à récemment, elles n'existaient pas. Là, elles existent, les nanotubes de carbone. Problème, on n'en fait que des longueurs d'une dizaine de centimètres. On ne sait pas les tisser, il y a plein de choses qu'on ne sait pas faire. Quand des propriétés, ces nanotubes et aussi les films de carbone, ont des propriétés mécaniques, des propriétés électriques, des propriétés thermodynamiques extraordinaires, eh bien, ces nanotubes de carbone, on ne sait pas en faire 144 000 kilomètres de long. Voilà, c'est un peu la difficulté. Et la science-fiction s'est aussi emparée de l'ascenseur spatial, un roman d'Arthur Clarke qui s'appelle « Les fontaines du paradis » . Et puis à côté, il y a un roman de Charles Sheffield, la même année, mais sans qu'ils se discutent entre eux. L'idée devait être mûre, sans doute, qui s'appelle « La toile entre les mondes » , qui met en scène la construction du premier ascenseur spatial sur Terre.
- Speaker #2
Mais alors, il faut aussi imaginer une chose, se poseraient quand même rapidement des problèmes de sécurité. Qu'est-ce qui se passe si le câble casse ? Par exemple, un sabotage. Dans ce cas-là, le câble va s'enrouler autour de la Terre à une vitesse supersonique en dégageant une énergie absolument colossale.
- Speaker #1
Situation que l'on observe dans la série Fondation. Je parle bien, pas nécessairement de la série de livres, mais bien de la série télévisée, où on voit cet ascenseur spatial qui explose et ce câble qui vient s'entourer tout autour de la planète. C'est exactement ça.
- Speaker #2
Et alors, en fait, une petite anecdote. J'ai chez moi un vieux jeu de société qui s'appelle Buckroger au 25e siècle. Et là, dans le plateau de jeu, on a mis un ascenseur spatial, mais sur Mars, où c'est un petit peu plus crédible parce que la pesanteur martienne est plus faible. Or, Mars tourne à peu près à la même vitesse sur elle-même que la Terre. Et donc, les contraintes sur le câble seraient un petit peu moins fortes.
- Speaker #0
Il faut le faire sur Mars, et donc il faut aller sur Mars, donc il faut avoir une infrastructure...
- Speaker #1
Bien joué Roland, merci.
- Speaker #0
Mais sur Mars, il y a aussi des années de fiction où c'est sur la Lune. L'ascenseur spatial est sur la Lune.
- Speaker #1
Cet ascenseur spatial, il pose quand même une question qui pour moi est fondamentale, c'est celle des ressources. Est-ce qu'on a assez de ressources sur Terre pour fabriquer un ascenseur spatial pour aller dans l'espace ?
- Speaker #0
Alors, sans doute oui, parce que des ressources, il en reste encore beaucoup sur Terre. La question c'est, est-ce qu'on peut sacrifier ce montant considérable de ressources ? Pour un ascenseur spatial, au prétexte que nous donnons un accès à l'espace, alors le capitalisme pourrait glorieusement s'exporter, exploiter les astéroïdes, faire des plans, pourrait glorieusement s'exporter pour écrabouiller les écosystèmes extraterrestres, enfin, il n'y a pas beaucoup d'écosystèmes au sens de vivants, mais en tout cas, écrabouiller la Lune, les astéroïdes, Mars, etc. Ça donnerait des moyens. On le voit d'ailleurs dans un certain nombre de romans de science-fiction, l'ascenseur spatial, il est là précisément pour ça, comme support, parce que... S'il existait d'un coup de baguette magique, alors ça changerait complètement notre accès à l'espace, notre facilité d'accès à l'espace. Donc cet ascenseur spatial, on pourrait décider que, oui, c'est rentable de sacrifier beaucoup de ressources pour le fabriquer, dans la mesure où il nous donnerait un accès si privilégié, si facile à l'espace, qu'on pourrait ensuite exploiter massivement, ce que nous sommes incapables de faire maintenant, les ressources lunaires ou les ressources des astéroïdes. Donc la question n'est pas si facile à trancher, c'est pas que la question localement de fabrication d'ascenseurs spatials sur Terre.
- Speaker #1
Et on reste dans cette logique d'exploitation au final, qui est un petit peu un enjeu de l'espèce humaine à l'heure actuelle.
- Speaker #0
Effectivement, cette ascension spatiale, ce serait encore une traduction de l'hubris humain, qui a volonté à s'étendre absolument partout, qui veut mettre sous sa coupe réglée technique, extractiviste et consumériste, l'ensemble de la Terre d'abord, et puis après l'ensemble du système solaire. Donc on pourrait décider que non, il ne faut pas faire d'ascenseur spatial, parce que précisément, ça reviendrait à exporter massivement dans le système solaire tous les problèmes que nous avons sur Terre, n'en résolvant aucun, puisque en dépit des ressources évidemment sans doute considérables auxquelles nous aurions accès dans le système solaire, on n'aurait pas résolu le problème fondamental de comment on s'organise pour vivre, disons, sainement et humainement en société.
- Speaker #1
Moi, sur mon petit compteur, il fait noter 45 minutes. Donc, on arrive tout doucement à la fin de l'épisode en sachant qu'il y a encore plein plein de choses dont on voulait parler et qu'on n'a pas fait. Claude le disait dans des échanges de mails, oui oui, en 48 heures c'est réglé. Je vais passer plutôt sur des sujets un petit peu philosophiques pour conclure le podcast. Et au final, on voit que dans cette trilogie du problème à trois corps... La société qui nous est décrite est une société hyper technologique parce que dans ce roman on voit il y a la cryostase qui existe donc des héros qu'on suit à un moment donné peuvent être littéralement transportés 200, 300, 400 ans plus tard pour voir ce qu'est devenu le monde. Et un point commun entre toutes ces civilisations, c'est l'hypertechnologie. Que ce soit sur Terre, avec des publicités mais qui sont hyper-invasives, que ce soit sur des vaisseaux spatiaux, avec des cabines qui en fait sont pratiquement en nanotechnologie où des sièges peuvent apparaître, des écrans peuvent apparaître n'importe où, on est sur une société hyper-technologique. Je voudrais un petit peu votre avis à vous trois sur est-ce qu'à votre avis l'humanité doit évoluer vers cette société hyper technologique ou potentiellement est-ce qu'elle pourrait évoluer vers autre chose ?
- Speaker #2
Personnellement je n'ai rien contre l'existence de sociétés technologiques d'autant plus qu'il faut quand même remarquer que ça nous a apporté un certain confort de vie on n'est plus obligé de trimer comme des malades pratiquement toute la journée pour pourpourrir sa nourriture on a des médicaments on a des IRM on a des hôpitaux on peut soigner les gens donc la société technologique moi je suis plutôt pour le problème c'est l'usage qu'on en fait la technologie pour la technologie pour moi c'est stupide La technologie, ça doit être au service de l'humain, et il faut que l'humain puisse donner un sens à son existence. Dans la mesure où la technologie est un support pour mieux vivre, pour explorer de nouveaux champs, oui, dans la mesure où c'est un moyen de s'enrichir à outrance ou d'exploiter l'humanité... non. Donc la technologie n'est pas un mal en soi mais elle peut le devenir ou elle peut tout simplement être utilisée à bon escient. Donc je pense que notre vrai problème avec la technologie, c'est pas la technologie c'est évidemment, mais ça c'est une banalité c'est l'usage qu'on en fait. C'est quel sens les êtres humains veulent donner à leur vie dans cet environnement technologique.
- Speaker #1
C'est vrai que c'est une banalité, j'entends. Néanmoins, je pense que c'est, dans la société actuelle, hyper important de le rappeler. Parce qu'on a tendance à croire que la technologie est une finalité. alors qu'elle restera à tout jamais un outil qui nous permet de faire des choses. Roland, je te laisse peut-être réagir. Oui,
- Speaker #0
alors, cette question de rapport aux technologies m'intéresse beaucoup et a été évidemment beaucoup discutée dans la science-fiction. La science-fiction qui est une littérature qui est née d'un émerveillement pour les sciences et les techniques et donc qui était dans un premier temps très, on dirait maintenant, techno-solutionniste. Il n'y a pas de problème que la technique ne peut résoudre. Alors, il y a aussi des œuvres de fiction. Je pense notamment à un roman qui s'appelle La vague montante, qui a été réédité il y a un an ou deux, de Marion Zimmer Bradley, de Marion Zimmer Bradley jeune, à 25 ans, qui a écrit un roman où des humains ont pour la première fois la capacité de faire un voyage interstellaire. Donc ils sont assez évolués techniquement. Déjà, on ne sait pas le faire nous maintenant. Ils ont les moyens d'en faire un seul, ça coûte beaucoup de ressources, ils le font. Ces humains vont sur une planète qui est dans le système d'alpha du centaure. Les ponts avec la Terre sont coupés parce que la distance fait que rapidement les humains, les centauriens désormais évoluent tout seuls, croissés et multipliés. 4 ou 5 cents ans après, ils ont les moyens eux. Ils sont partis du substrat initial que la technique humaine de l'époque, eux, sont partis. Ils ont à nouveau les moyens de faire un voyage interstellaire. Et ils choisissent de revenir sur Terre, pas de revenir tous ensemble, mais de faire une mission vers la Terre. Et ils reviennent sur Terre. Ils auraient pu choisir d'aller vers une nouvelle planète pour en se monter. se lancer une autre planète. Ils reviennent sur Terre en disant ça va être incroyable, les progrès de l'humanité qu'on a quittés, il y a 400 ans, ça va être d'une folie, on y retourne pour voir ce qu'ils ont fait. Ils arrivent un peu désolés, un peu désolés de voir que, ben non, il n'y a rien, le spatioport, ils ne le voient pas, il n'y a plus de grande ville, enfin, ils sont un peu désolés, mais il y a des humains, ils sont là, ils font des trucs, ils arrivent, les humains les regardent arriver, ils ne sont pas du tout impressionnés, avec leurs gros vaisseaux qui se posent là où ils peuvent, en essayant de ne pas écraser trop de monde. Et ils comprennent petit à petit que ces humains ont renoncé à la technique. Alors ils ont renoncé, mais pas totalement. Je ne vais pas vous déflorer toute l'histoire, mais en fait, ils sont arrivés dans une situation... La technique, oui, mais quand c'est nécessaire ? Sinon, quand on peut faire les choses de manière très basique... et que ça n'a aucune conséquence autre que c'est un peu plus long, mais finalement, il n'y a pas les conséquences négatives qui vont avec. À faire les choses vite et faire les choses en ampleur, on le voit, ça conduit à artificialiser les sols, à conduire à polluer l'environnement, à détruire les écosystèmes, à polluer l'atmosphère, à tuer des gens indirectement par ces pollutions, etc. Et donc, on pourrait décider que faire les choses lentement... et moins grande ampleur, c'est plus fatigant, effectivement, donc on veut bien quelques éléments techniques qui nous aident quand même, qui allègent notre tâche, mais juste au bon niveau. Et donc ces humains, ces centauriens revenus sur Terre, comprennent la logique qu'est d'ailleurs ces humains 400 ans avant. après qui ont refusé, qui ont mis de côté la technique et qui ont pourtant, et dans le roman on le voit, des objets techniques extrêmement performants mais dont ils ne se servent que quand c'est nécessaire, que quand c'est vraiment vraiment, vraiment important.
- Speaker #1
Tu peux rappeler le titre du bouquin ?
- Speaker #0
La vague montante. C'est un court roman, le style n'est pas flamboyant, c'est un des premiers romans de Marion Zia-Bradley, c'est pas un excellent roman au sens du style, en revanche du point de vue des idées, c'est très intéressant, cette idée-là. et de ce confrontation d'une humanité centaurienne maintenant, qui est dressée extrêmement technique, et qui est confrontée avec ses ancêtres qui ont renoncé à ça. Et donc c'est ce choc-là de culture finalement qui est assez intéressant.
- Speaker #3
Finalement, ce que tu dis Roland, c'est un peu une forme de sagesse par rapport à la technologie, parce que finalement, est-ce que le progrès technologique aujourd'hui, ce qui le motive le plus, je ne pense pas que ce sont vraiment des grandes idées humanistes. Mon avis, c'est le côté économique, parce que finalement, tu dois produire de plus en plus, vendre de plus en plus, parce que tu fonctionnes dans un dogme capitalisme, la consommation qui doit systématiquement augmenter, et donc je fais un PC qui va être plus performant, et un processeur qui va être comme ceci, sans que ce soit vraiment utile. Et finalement, on invente des trucs juste parce qu'on a envie de vendre de plus en plus, et créer une utilisation qui devienne absolument indispensable à tout le monde, car en fait, ça ne sert à rien. Mais ce n'est pas encore qu'on pourrait créer des machins pour vraiment aider les gens. C'est plutôt en lien avec l'économie, donc...
- Speaker #1
Et c'est ça qui est super intéressant dans le problème à trois corps au final. C'est que, à un moment donné, l'humanité sait que dans 400 ans, elle va se faire éclater, fondamentalement, puisqu'elle ne peut plus progresser scientifiquement. Et donc, t'as toute l'humanité qui se mobilise, non pas pour générer du profit, mais pour résister à une invasion qui va avoir lieu. Et Claude, tu voulais réagir aussi un petit peu à tous ces propos.
- Speaker #2
C'est pour revenir sur un point précédent, c'est que si l'évolution naturelle de toute société technologique, c'est de renoncer à l'ultra-technologie, c'est aussi une explication au paradoxe de Fermi, tout simplement. Parce qu'il n'y a pas de civilisation qui décide d'aller conquérir la galaxie pour je ne sais quelle raison. Futile, puisqu'ils ont trouvé des choses plus paisibles et plus intéressantes à faire finalement.
- Speaker #1
Ce qui reste aussi intéressant dans le livre, et on va... commencer à terminer par ça, c'est que comme la problématique elle dure sur 400 ans, c'est-à-dire que les trisolariens vont arriver 400 ans plus tard après avoir appris qu'ils arrivaient, il commence à y avoir des doutes, des résistances, des personnes qui se disent qu'en fait non, il n'y a pas de trisolariens, ils n'existent pas, c'est juste un complot pour permettre à la société d'évoluer dans un sens et pas dans un autre. Alors... Bien entendu, cette forme de négationnisme qu'on voit apparaître dans le roman, il est assez intéressant parce qu'au final, il fait vraiment un parallèle et il fait vraiment écho à un négationnisme que l'on a aujourd'hui par rapport aux institutions scientifiques, par rapport aux conclusions scientifiques. Et j'aimerais vous poser une question un petit peu pour terminer le podcast, c'est est-ce qu'on est condamné en tant qu'espèce humaine à ne jamais être tous d'accord ?
- Speaker #0
Je ne sais pas, c'est une vaste question. En tout cas, ce n'est pas simple de se mettre d'accord ensemble sur ce qu'est le réel finalement. Se mettre d'accord sur une sorte de... Qu'est-ce qui est, disons, vrai ? Et qu'est-ce qui ne l'est pas ? Et ça a mis du temps à commencer à se mettre d'accord. Et on est en ce moment dans une phase où la vision commune de ce qui est considéré comme une connaissance partagée, les pierres tombent, le soleil brille et la Terre tourne autour, la Terre est sphérique, j'ai dit des éléments scientifiques, mais il y a aussi plein d'éléments plus compliqués, mais de nature plus politique ou sociale, et bien ces éléments communs se délitent complètement puisque maintenant toutes les opinions se valent, toutes les opinions peuvent s'exprimer. Et on est dans une situation où on est en train de... de perdre cette vision commune du monde, de ce qui fait, de ce qui est commun à tous, dans la perception de notre monde, de notre réalité. Et donc cette question-là est importante. Ce n'est pas tant qu'un défi aux sciences qu'un défi en général au réel. Encore une fois, qu'il soit scientifique, le malheur des lois de la physique, c'est qu'on ne les décrète pas à l'Assemblée, on ne négocie pas avec elles et on n'aura jamais raison contre elles. Mais dans le reste, pour les lois humaines, pour les relations humaines, effectivement, on aurait pu aboutir à une vision commune de comment il faut s'organiser en société. On a réussi sur certaines aires géographiques. Mais c'est en train de partir en biberine parce que, précisément, il y a une perte de ce qui fait commun au sens d'un commun des connaissances. Comme on perd les communs des sociétés, l'hôpital en France a attaqué régulièrement, l'enseignement a attaqué régulièrement, la recherche a attaqué régulièrement, la justice a attaqué régulièrement. Bref, on est en train de perdre ce qu'on a mis du temps à construire, une sorte de vision commune de ce qui est le réel et de bien commun dans les structures dont les humains fonctionnent en structure politique ou sociale. Donc cette question-là que pose Liu Xixin dans la situation des stris solariens, on la voit aussi dans Dolphin que vous avez peut-être vu, donc Look Up, où il y avait cette idée de la catastrophe.
- Speaker #1
Il va y avoir un podcast avec un philosophe des sciences sur Don't Look Up, ça va être terrible.
- Speaker #0
Cette fois-ci, la catastrophe annoncée n'est pas l'arrivée dans 400 ans d'extraterrestres, mais l'arrivée dans 6 mois d'une météorite énorme qui doit frapper la Terre. Qu'est-ce qu'on fait ? Comment on s'organise ? Et on voit bien à quel point ça part en tous sens et de manière tout à fait si désordonnée qu'en fait la catastrophe se réalise sans qu'aucun moyen n'ait été sérieusement mis en place pour ne serait-ce que l'éviter ou l'atténuer.
- Speaker #2
Je pense que personne n'ignore que de l'autre côté de l'Atlantique, dans un grand pays que je ne nommerai pas, il y a une espèce de tentative de déconstruction de la science.
- Speaker #1
J'espère que d'ici à ce que le podcast soit diffusé... Il y a une solution, plus ou moins extrême, qui a été trouvée.
- Speaker #2
Mais c'est pas sûr. Je pense que cette déconstruction, elle est assumée de manière à mieux asseoir son pouvoir. Donc il y a aussi, je pense, derrière ça, un projet politique de domination. Et une manière d'y arriver, c'est de déconstruire un certain nombre de choses connues, de socles communs, de faits scientifiques.
- Speaker #3
J'allais terminer par une boutade. Est-ce que la solution à tout ça, c'est pas l'arrivée d'Auréel Trisolarien qui règle tout ? À coup de laser et d'un T-électron.
- Speaker #1
Mais tu rigoles parce qu'au final, ce que montre le roman aussi, c'est que ce projet de résistance aux trisolariens, c'est le premier projet global de l'humanité à travers toute l'histoire de l'humanité. C'est la première fois qu'une humanité arrive à se mobiliser ensemble vers un projet. Parce que quand on regarde le projet Manhattan, quand on regarde le projet Apollo, bien entendu ça a mobilisé beaucoup de gens, mais en fait ça a mobilisé des nations, ça n'a pas mobilisé une planète. Or, ce projet, enfin, cette résistance aux trisolariens, elle mobilise la planète entière qui essaie de travailler, bien entendu avec des doutes qui sont émis, mais globalement on a une planète qui se mobilise et c'est la première fois dans l'histoire de l'humanité que ça arrive, c'est assez intéressant.
- Speaker #0
Alors, deux remarques sur ça, la première c'est qu'aussi... L'origine de l'arrivée des trisolariens, c'est une astrophysicienne chinoise qui parle aux trisolariens Et qui leur dit, venez, venez à nous, parce qu'elle est convaincue qu'eux pourront résoudre les problèmes qu'elle voit dans l'humanité. Donc ce que tu proposais comme solution, c'est, ils n'ont qu'à venir, ils vont nous casser la figure, mais est-ce que ça peut être vraiment pire que ce que nous vivons actuellement ?
- Speaker #1
Et elle était dans les années 60.
- Speaker #0
Et elle était dans les années 60. Et puis deuxièmement, l'idée qu'une menace extérieure serait une façon d'unifier l'humanité pour se protéger globalement d'un désastre commun. Elle est aussi dans la série, dans bande dessinée, qui s'appelle Les Watchmen, et dans lesquelles un des personnages, Ozymandias, un milliardaire... crée quelque chose, il crée une horreur volontairement dans le but d'horrifier l'humanité, je ne dis pas l'horreur pour ne pas vous spoiler la fin, et de la fédérer, qu'elle travaille enfin ensemble vers le bien commun de l'humanité et pas chacun dans son coin. Enfin, en termes de menaces, il y en a une qui nous afflige, qui est le réchauffement climatique, mais généralement la destruction de l'environnement, de l'habitabilité même de notre planète finalement, la perte d'origine humaine de l'habitabilité même de notre planète, et bien peut-être que ça, ça devrait être quelque chose qui nous motive. et apparemment non. Enfin, ça motive certains, d'autres moins. En tout cas, ceux qui ont le pouvoir, non. Et du coup, est-ce qu'une espèce extraterrestre invasive, si on reprend Liu Xixin, a réussi à motiver ? Est-ce que ce n'est pas aussi un peu naïf quand on constate que dans un cas très concret, où nous sommes à l'origine du problème qui nous afflige, pas grand-chose de très constructif n'est fait. Il n'y a pas rien qui est fait, mais pas du tout à la bonne échelle.
- Speaker #1
Alors, pour terminer ce podcast, je vais faire moi-même la citation. Ça évitera de vous faire chercher et de perdre du temps parce que, cher auditeur, chère auditrice, il est 19h30 quand je prononce ces mots et la conférence a lieu à 20h. Donc, on ne va pas déconner. Alors, je vais prendre en fait un extrait du problème à trois corps, le deuxième tome, donc la forêt sombre, qui condense un petit peu plein de choses dont on a parlé et qui nous mettent un petit peu en perspective par rapport à notre humanité et à cette intelligence dont on se targue continuellement. L'univers est une forêt sombre dans laquelle chaque civilisation est un chasseur armé d'un fusil. Il glisse entre les arbres comme un spectre, relève légèrement les branches qui lui barrent la route. Il s'efforce de ne pas faire de bruit avec ses pas, il retient même sa respiration. Il doit être prudent, car la forêt est pleine d'autres chasseurs comme lui. S'il remarque une autre créature vivante, il n'a qu'un seul choix, ouvrir le feu et l'éliminer. Dans cette forêt, l'enfer c'est les autres, une éternelle menace. Chaque créature qui dévoile son existence est très vite anéantie. Voici la cartographie de la société cosmique. C'est la réponse au paradoxe de Fermi. Mais dans cette forêt sombre, il y a un enfant idiot qui s'appelle l'humanité, qui a allumé une torche et qui crie tout autour de lui. Et je trouve que cet extrait, il explique à lui seul notre situation et notre compréhension du monde. On est des idiots qui courent partout. Waouh ! Et bien sur ce, chers auditeurs, chères auditrices, je vous propose de terminer ce premier épisode un petit peu incroyable avec trois grands invités. Et on se retrouve dans deux semaines pour le prochain épisode de Science, Art et Curiosité. Et cette fois-ci, on va continuer à parler du problème à trois corps, mais on va plutôt l'analyser avec un regard anthropologique et relever un petit peu toutes les questions sociétales qui sont liées à ce premier contact avec une race extraterrestre qui veulent nous détruire. Je vous souhaite une très très bonne journée. Claude, Roland, Francesco, merci beaucoup d'avoir participé. Et à très très bientôt, je l'espère, pour un prochain épisode. Tu viens d'écouter un épisode du podcast du MUMONS. Et franchement, j'espère qu'il t'a plu. D'ailleurs, si en passant, tu veux me faire un retour, ou si tu as des idées d'amélioration, surtout n'hésite pas à nous contacter. Tu peux aussi devenir notre ambassadeur et faire découvrir ce podcast tout autour de toi. Si tu as des idées de sujets ou si tu souhaites enregistrer un épisode, surtout n'hésite pas à nous contacter. Rendez-vous sur le site internet mumons.be ou sur la page Facebook du Mumons.