- Speaker #0
Alors me voilà un jour de bac de philo, alors autant vous dire que je faisais un bac économique fainéant, je l'étais.
- Speaker #1
Béatrice Gruau-Racine, entrepreneur talentueuse, cinquième génération de la famille Gruau, femme lumineuse et engagée.
- Speaker #0
Donc le gars voit qu'en face de lui, il a quand même quelqu'un qui n'est pas solide en philo, et il se dit mais je ne vais pas y arriver, quand je vais m'enquiquiner avec cette nana, ce n'est pas possible. Il voyait surtout que je regardais ma montre, alors pour tout vous dire, nous sommes la semaine des 24 heures du Mans. Nous sommes un mercredi, il est 16h30 et les essais ont démarré à 16h. Alors voilà, c'est ma vie, c'est la course automobile, c'est les 24h du Mans. Je suis au Mans mais je suis en train de passer mon bac philo. Donc l'examinateur voit que je regarde ma montre tout le temps, il me dit mais vous avez quelque chose, là il se passe quelque chose et tout. Et je lui dis bah oui les 16h30, les essais ont démarré les 24h du Mans, vous savez il y a un circuit là à 16h. Et moi j'espère à 17h ou plus tard être sur le bord du circuit. Et là le mec hallucine en disant... Vraiment, là, j'ai un cas. Il me dit, bon, ben, choisissez. Et donc, il me met dans les mains 6, 7 petits papiers. Il y avait des textes dessus. Et moi, je ne lis même pas les titres. Je prends le plus court. Et puis, je prends le petit papier et je lis celui-là. et je regarde, c'était la passion. Mais parce que vous, sur la passion, j'ai dit, mais écoutez, alors franchement, là, franchement, les 24 heures ont commencé, les essais vous commencent, et vous comprenez, et là, je déroule, je suis incapable de vous dire, si ça se trouve, on a discuté une demi-heure, le mec s'arrête, il me regarde et me dit, et si je vous dis 15, est-ce que ça ira ? Et j'ai eu 15 à mon bac philo, c'est un truc de... Je quitte la salle, et au moment où j'allais mettre la poignée sur la porte, il me dit, au fait, mademoiselle Gruau, alors je me retourne, il me fait juste une chose. Vous n'êtes pas passionné par l'automobile, vous êtes passionné par la vie. Et pendant des années, et encore aujourd'hui, quand j'y repense, finalement c'est à lui que je repense. Cette première rencontre, sans doute.
- Speaker #1
Passion et rencontre sont sans doute les mots qui qualifient le mieux l'engagement de Béatrice Gruau-Racine. Femme élégante au regard vif, elle est née dans une famille d'entrepreneurs mayennais. Elle nous fait le plaisir de nous accueillir dans les locaux de l'aventure Gruau, dont elle a été la cheville ouvrière. Alors qu'elle rêvait de jouer les éclairagistes au théâtre ou au cinéma, elle se lance à 23 ans à peine dans l'aventure entrepreneuriale, ancrée en Prestige Communication, une agence de communication à une époque où nous parlions surtout de pubs ou encore de réclames. Esprit libre et femme d'engagement, elle a fait de la rencontre et des échanges avec les autres son leitmotiv depuis plus de 30 ans. De ces rencontres, elle a beaucoup appris et a choisi aujourd'hui de nous partager ce parcours original et passionné. Béatrice, bonjour.
- Speaker #0
Bonjour. Parcours de vie. Déjà, finalement, une fois un bac économie obtenu, un départ vers la capitale, donc je restitue le contexte, nous sommes en 81, donc ce n'est pas là hier, c'est avant-hier, on va dire, et avec une envie d'aller peut-être vers des nouveaux horizons, et donc surtout des métiers de la communication qui étaient encore... à l'époque je veux juste dire en France on disait pas communication on disait réclame à la télé donc moi me voilà partie vers quelque chose qui m'emmènerait à communiquer je ne savais pas encore quoi et donc je suis partie à 17 ans, 16 ans même à Paris pour commencer une école d'attaché de presse Mon amoureux demande en mariage. Là, d'un seul coup, un truc se fait vraiment... se met devant moi. Me marier, oui, bien évidemment. Avec lui, oui, bien évidemment. Mais pas rester à Paris. Et donc, je dis, ouais, ouais, OK, mais t'es Parisien, mais moi, je te propose de venir découvrir la province. Et pourquoi pas la Mayenne ? Et là, c'était un pari complètement incroyable de revenir en province et de revenir surtout à Laval. Donc là, je vais à la rencontre d'un chef. Mon papa, entre-temps, était décédé. Donc, il fallait quelqu'un sur lequel je puisse m'appuyer. Et je rencontre à l'époque Bernard Robert, le bras droit de Michel Beignet, qui était un ami de mon papa et qui me dit, écoute, Béatrice, même nous, à l'époque, Beignet, notre service com est à Paris. Donc, rentrer à Laval, moi, je ne vais pas pouvoir te prendre. Et je lui dis, non, non, mais je ne viens pas pour ça. Mais à ton avis, je fais quoi ? Et là, il a eu de la dré de rire et il me dit, tu ferais bien de créer ton entreprise. et j'avais 21 ans je me dis mais c'est juste pas possible il me dit mais essaye tu verras bien
- Speaker #1
Et l'aventure a démarré.
- Speaker #0
C'est l'aventure d'une entreprise qui m'a permis en permanence et au quotidien de rencontrer des personnes. C'est plus peut-être le métier de la communication qui a fait ça. Mais le fait d'être dans mon entreprise, en tous les cas, c'est ce qui m'a permis, et d'une, de rencontrer dans des domaines divers et variés. Faire de la communication, c'était une chose, mais faire de la communication... Pour une seule entreprise, ça aurait été trop difficile. Donc il fallait que ce soit avec des milieux divers et variés. Je pouvais parler le lendemain, j'allais parler de sous-traitance automobile, et puis un autre jour de bâtiment. Donc toutes ces personnes rencontrées m'ont rendu riche de sujets, de matières. Chaque rencontre, et c'est aujourd'hui évidemment, aujourd'hui à 59 ans, finalement c'est ce qui m'apparaît le plus évident aujourd'hui, c'est que moi j'offrais mes compétences en matière de communication qui était à mon avis bien plus naturel et bien plus de bon sens que de choses apprises à l'école. Mais grâce à ça, les autres mettaient devant moi leur richesse d'esprit, leur richesse de connaissances par rapport à leur milieu. Et en fait, j'ai eu l'impression de vivre plutôt toute ma vie en échange avec mes clients. C'est un mot que je n'aime pas d'ailleurs, mais avec les gens avec qui j'ai pu collaborer toute ma vie. Chaque rencontre n'a été que du cadeau, parce que des fois c'était humaine, Des fois, d'ailleurs, trois heures au bout de trois heures, on va peut-être se mettre au boulot. Je dois quand même vous avouer que moi, les histoires d'entreprise, elles m'ont nourri toute ma vie. Donc, on parlait de l'entreprise et très souvent, si c'était une entreprise patrimoniale, on finissait par parler de famille. Et là, alors là, c'était du délice, du pur délice parce que parler des enfants, parler des grands-parents, dire mais oui, à tel endroit, en Mayenne, il y avait telle chose. Parce qu'on avait un fil conducteur commun, la plupart du temps quand même, c'était la Mayenne. Et très sincèrement, je n'ai jamais eu envie de m'extirper de ce département. A aucun moment, même si j'aurais pu aller à Rennes, ce n'est pas très loin. A aucun moment, la seule chose qui m'intéressait, c'était les entreprises de ce département. La Mayenne, c'est la richesse de ce tissu d'entreprise patrimoniale. Je le dis, je le redis. Et en final, c'est aussi toutes ces personnes qui, via un grand groupe, sont venues diriger des entreprises en Mayenne et qui sont restées, quitte même à changer d'activité, mais n'ont pas voulu partir. Et puis, c'est un positionnement extraordinaire entre Paris et la mer, qui n'est pas très loin. J'aime la fidélité des gens en Mayenne. On dit toujours que la Mayenne a un véritable matelas d'amortissement. On est plus... Plus long que tout le monde a démarré quand il y a une belle croissance économique, mais on est aussi beaucoup plus long que tous les autres à tomber quand il y a une décroissance économique et quand il y a des vrais problèmes. Il y a un matelas, il y a un coussin d'amortissement qui est très important et j'aime ça. Et on retrouve ça dans le caractère des personnes. On ne fait pas trop de bruit, on est aussi cette nature qui n'est pas à se vanter en permanence, comme on disait dans les cours d'école. On ne se vante pas, on est qui on est. Si on nous demande notre avis, si on nous demande de nous mettre en avant, on essaie de le faire et le mieux possible. Mais sinon, ce n'est pas la peine de faire du bruit.
- Speaker #1
Et alors, après cette première partie de votre vie professionnelle, vous dites que vous avez une deuxième vie professionnelle, avec différents engagements, puisque c'est, je crois, un mot qui vous caractérise vraiment, l'engagement pour vos passions. Est-ce que vous pouvez nous en dire un petit peu plus ?
- Speaker #0
Alors une fois les emplois du temps, mon emploi du temps un petit peu dégagé de mes trois enfants, des propositions sont venues au fur et à mesure du temps. La première date d'il y a une vingtaine d'années en disant tiens, est-ce que ça t'intéresserait de prendre un mandat MEDEF ? Donc c'est le MEDEF le premier qui est par la voix de son président de l'époque. Est-ce que tu voudrais prendre un mandat pour aller défendre un petit peu nos opinions, nos idées ? On nous demande dans le cadre du paritarisme de participer à des choses. Alors autant vous dire que je ne me sentais pas du tout ni crédible, ni je ne voyais pas ce que j'allais y faire. Mais allez, je suis joueuse, donc j'ai dit bon, ok, j'y vais. Je me suis retrouvée dans une instance de recours gracieux avec la direction du travail et de l'emploi et à l'époque la NPE, qui au début m'a tétanisée en disant mais je n'ai rien à faire ici, je ne suis pas crédible, je suis trop jeune, je ne connais pas ces choses-là. Et puis finalement, je suis vite revenue à une chose essentielle en Mayenne, qui est le bon sens. Et dès le début, j'ai pris à bras le corps ce premier mandat, mais uniquement avec mon bon sens. L'écoute, alors le sens premier de quelqu'un qui veut être engagé, pour moi c'est l'écoute, savoir écouter. Et le deuxième sens, c'est n'oublie jamais que tu as un nez au milieu du visage, c'est le nez du bon sens et utilise ça à fond. Et puis il y a eu ensuite un appel via APM. Alors APM étant l'association pour le management des chefs d'entreprise, enfin pour la formation. C'est un cycle de formation pour les chefs d'entreprise. Ce sont des clubs avec 25 chefs d'entreprise. Et moi j'anime un de ces clubs-là. Là c'est encore autre chose que l'on demande de ma part. C'est mon côté communicant, réseau. C'est un rôle d'animatrice. joyeux de rire ou maîtresse avec une règle pour dire un peu de silence ou un peu de machin mais surtout animé pour que ce club vive aussi autrement qu'autour d'une expertise Et mon dernier temps en dehors de mon agence de communication, et je termine toujours par ça, parce que c'est ce qui emporte le plus, évidemment, ma passion, mon cœur, mon âme et moi, qui est ce temps au sein de l'aventure Gruau. Donc, en fait, j'anime. L'orchestration et l'organisation du patrimoine historique du groupe familial, le groupe Grueau, 134 ans d'histoire. Et depuis toujours finalement, savoir conserver les bonnes pièces depuis 8 ans et les mettre au service de nos nombreux visiteurs maintenant. Et en tous les cas, faire découvrir ce groupe industriel, leader européen quand même. Dans son domaine d'activité qui est la carrosserie industrielle, nous avons aujourd'hui un outil auquel j'ai vraiment largement collaboré et j'y passe beaucoup de temps encore aujourd'hui, faire partager cette passion, cette vie avec beaucoup de hauts mais aussi beaucoup de bas dans le domaine de la sous-traitance automobile et nous le faisons au service de nos fournisseurs, de nos clients et surtout de nos nouveaux collaborateurs. Nous aimons. qu'ils viennent chercher ici l'ADN du groupe. Et ça, c'est mon quatrième temps, vous voyez. Alors, l'esprit entrepreneurial, eh bien oui, on a vécu toute notre vie, parce que même si notre papa, en tous les cas, mon papa, moi, est décédé, j'avais 18 ans, donc vous imaginez, ma vie en Mayenne... de par mon métier, n'a fait que de me faire rencontrer ces chefs d'entreprise. Donc la veine entrepreneuriale amenée par toutes les familles, et puis mon frère Patrick qui a toujours été à la destinée de ce groupe familial, et puis mes amis, et puis voilà, je crois que j'avais ça aussi en moi. Sur quatre enfants, nous sommes trois à être chefs d'entreprise. Oui, il y a vraiment quelque chose, c'est vraiment... Dans l'année L, de nos caractères, de tels que nous sommes, et de tout ce qu'on a, on ne voit peut-être pas le danger, ou en tous les cas, on ne le perçoit pas de la même façon que les autres, même si je trouve qu'aujourd'hui, le statut, par exemple, d'auto-entrepreneur est un statut fabuleux, pour que des gens qui n'auraient jamais osé avant se jettent à l'eau. Et plus on va pouvoir aider ces personnes, parce que je pense qu'il n'y a pas que les gens qui sont issus de familles d'entrepreneurs qui ont... qui peuvent être entrepreneurs. C'est vrai que dans le temps, votre papa n'était qu'un cahier, votre papa était chef d'entreprise, vous deveniez, et encore, je dis les femmes, bien souvent, elles restaient à la maison. Donc voilà, c'est quelque chose qui a évolué et c'est tant mieux. Et aujourd'hui, c'est aussi ça, donner l'envie aux jeunes de franchir le pas. Voilà.
- Speaker #1
Et justement, quel conseil pourriez-vous donner à des personnes qui... qui ont envie et qui n'osent pas encore tout à fait ?
- Speaker #0
Il faut réellement arrêter d'écouter tout ce qu'ils entendent autour d'eux. Le seul truc qui fait fonctionner, c'est le cœur. Et si tu as vraiment une partie de toi qui a envie d'y aller, il faut y aller. Mais je ne peux pas dire mieux. Moi, c'est comme un espèce de raz-de-marée. Vous imaginez, il faut visualiser, vous fermez les yeux. Et si vraiment il y a un truc qui vous... Et dites-vous que si jamais ça ne se fait pas, c'est que c'est le destin. Il ne faut pas regretter. Voilà. Et puis écoutez, tout chef d'entreprise, franchement, sur une carrière, il y a bien 20 projets qui ont foiré, qui n'ont pas marché, qui ont coûté de l'argent mais qui n'ont pas rapporté. Enfin voilà. Donc ça veut dire que tout ne marche pas du premier coup. Mais pour quelqu'un qui est intimement persuadé, au fond de lui, qu'il devrait faire ça, surtout ne jamais le transformer en j'aurais dû faire ça ne jamais. Donc, un conseil. Alors, en prenant soin d'avoir pris la mesure de plein de choses avant, mais quand bien même, il reste des incertitudes. De toute façon, il y a toujours des incertitudes. Moi, je dis que la barre, elle est facile. Vous regardez une montre, il y a 60 petites montres ou une horloge. dès lors que vous êtes à 31 ou 32, vous pouvez y aller. Si vous avez validé la moitié de l'horloge, n'attendez pas que l'autre moitié soit validée, vous n'y arriverez jamais. On ne part jamais avec 100% de chance de réussir. Donc, vous validez pour qu'il y en ait au moins 50% de choses sur lesquelles vous allez pouvoir prendre équilibre. Vous validez que pourquoi pas le marché, vous validez que vos finances vont vous porter pendant un an. Et puis, le 50% du reste, c'est vous qui allez le faire avec votre envie et vos tripes en vous lançant. Et voilà. Et puis, ce n'est pas grave si ça ne marche pas. Il y a autre chose qui marchera. Et puis, quand je dis entrepreneur, ah oui, je voulais aussi finir là-dessus, c'est restreint, entrepreneur, dans beaucoup d'esprits des gens, c'est, il faut une entreprise. Pas du tout. Moi, j'ai connu des directeurs de lycée qui étaient plus entrepreneurs que bien des entrepreneurs. Ils ne sont pas entrepreneurs que des gens qui ont une entreprise au sens propre du terme. On peut être salarié dans une entreprise sans aucun problème, mais être un véritable entrepreneur dans l'âme, franchement. Et il y a... J'admire, je suis admirative de gens qui, par exemple, président des clubs de foot, de judo, de tir à l'arc, enfin tout ce qui va être là pour animer, par exemple, la jeunesse et la petite enfance. Ils sont le reste du temps salariés dans leur entreprise. Et là, c'est merveilleux. C'est merveilleux. Ils sont entrepreneurs.
- Speaker #1
Merci, Béatrice, de nous avoir embarqués dans la folle aventure d'une femme qui a osé tout au long de sa vie. Nous nous retrouvons très prochainement pour un nouvel épisode de Osons la Mayenne.
- Speaker #0
Osons,
- Speaker #1
parcours féminin d'entrepreneurs engagés, un podcast être communication en partenariat avec le Medef de la Mayenne.