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Mélanie Demers – Danse, résistance et liberté: l'art comme arme politique cover
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Paix, amour, et nous vaincrons! — Sol Zanetti

Mélanie Demers – Danse, résistance et liberté: l'art comme arme politique

Mélanie Demers – Danse, résistance et liberté: l'art comme arme politique

37min |11/06/2025
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Paix, amour, et nous vaincrons! — Sol Zanetti

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Description

Dans cet épisode de Paix, Amour et Nous Vaincrons, Sol Zanetti reçoit la chorégraphe, metteuse en scène et artiste engagée Mélanie Demers pour une discussion vibrante sur le pouvoir subversif de l’art.


💃 Pourquoi les corps en mouvement dérangent-ils autant ?
📉 Comment expliquer la précarité grandissante du milieu artistique ?
📣 Peut-on vraiment faire de l’art un acte politique et de résistance ?
💥 Et pourquoi tant de politiciennes se font humilier pour avoir dansé ?

De la nécessité de l’inutile à la fragmentation du travail artistique, en passant par le male gaze inversé, les sabres lasers et la tendresse d’un parent qui danse avec son enfant, cet épisode est une invitation à réfléchir… et à ressentir.


Une conversation libre, touchante, qui donne envie de lever le poing✊… ou de se laisser aller au rythme de la liberté.🕺💃


Une balado de Sol Zanetti, député de Jean-Lesage et porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de culture, de communications, d'éducation et d'enseignement supérieur à l'Assemblée nationale du Québec.

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Musique originale d'Erika Zarya
Montage: Antoni Castonguay-Harvey


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour tout le monde, bienvenue au deuxième épisode de Paix, Amour et nous vaincrons, la balado qui traite de sujets politiques, sociaux, culturels, dans une optique non déprimante pour cultiver l'espoir en politique québécoise, quand même utile. Mon nom c'est Sol Zanetti, je suis député à l'Assemblée nationale pour la circonscription de Jean Lesage, responsable des dossiers de culture, éducation, enseignement supérieur et bien d'autres. Et aujourd'hui... Mon invité sera Mélanie Demers, une chorégraphe, femme de théâtre, artiste québécoise que je vais vous présenter. On va aborder beaucoup de thèmes. Je l'avais invitée parce que la première fois que je l'ai entendue faire un discours, c'était à la grande mobilisation pour les arts en 2024 au printemps. Elle avait fait un discours qui m'avait tellement bouleversé par sa profondeur. et sa justesse, puis je me suis dit, ça y est, il faut que je l'invite dans ma balado. Alors, on va parler de beaucoup de choses aujourd'hui. Le rôle de l'art, le rôle de la danse et des corps dans la résistance à une oppression politique. Et je lui ai aussi posé la question, pourquoi les femmes politiques qui dansent créent scandale ? Alors, restez avec nous et allons-y avec paix, amour et une vraie croix. Bonjour Mélanie Demers.

  • Speaker #1

    Bonjour Sol.

  • Speaker #0

    Ça va bien ?

  • Speaker #1

    Ça va très bien.

  • Speaker #0

    Très bien, merci. Oui, bon, parfait. On a eu une grosse discussion sur le vous, le tu, puis on a dit vous. Allons-y avec ça.

  • Speaker #1

    Allez-y. Merci. Merci d'aider. Parfait.

  • Speaker #0

    Alors, Mélanie Demers, vous êtes artiste en danse, née à Montréal, grandie à Québec, entre, vous dites, le zoo et la prison d'Orsinville. Oui,

  • Speaker #1

    j'ai hésité à être très dramatique en racontant ma petite histoire.

  • Speaker #0

    Très poétique, très poétique. Et ensuite, vous êtes venue étudier à l'École de danse contemporaine de Montréal. Dans la vingtaine, ensuite, en sortant de l'école, vous avez été recrutée par la compagnie Au Vertigo de Juliette Lorrain, avec laquelle vous avez tourné pendant à peu près dix ans, avant de fonder en 2007 votre compagnie, la compagnie de danse Médée, avec laquelle vous avez créé plus d'une dizaine de spectacles. Et plus récemment, vous avez, en 2024, gagné le prix du CNA dans le cadre de la cérémonie de la gouverneure générale. Donc, un prix très prestigieux. Félicitations !

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Et vous touchez aussi à la danse, mais aussi au théâtre. Oui. Puis dans une perspective d'art total.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas comment on pourrait décrire mon travail, mais c'est vrai que la lentille par laquelle je crée, c'est par le corps. Puis le corps, c'est une arme totale. C'est-à-dire que mes spectacles ont évidemment de la danse, mais j'aime utiliser les mots, j'aime la poésie, j'aime les arts visuels. Évidemment, il y a beaucoup de musique aussi. puis je demande aux protagonistes, aux gens qui sont dans mes spectacles d'être très versatiles, même s'ils ne sont pas spécialistes. J'aime ça que les gens se mettent en danger en allant explorer des territoires inconnus d'eux et d'elles.

  • Speaker #0

    C'est quand même intéressant, un corps, une arme redoutable. Moi, je suis bon, je fais de la politique, on est beaucoup trop dans notre tête en général, toujours là-dedans, le débat, les arguments, etc. Puis, ça va me faire du bien justement qu'on parle de corps un peu aujourd'hui, vraiment. la raison pour laquelle je vous ai invité à cette balade. Lado, c'est qu'il y a en ce moment des problèmes dans le milieu des arts, Québec, tous les milieux des arts. Un effondrement de la capacité financière de plein d'organisations et de productions à arriver. Il y a des compagnies qui ferment, il y a des spectacles qui s'annulent, etc. Il y a les conditions d'yeux aussi des artistes qui sont de plus en plus précarisées. Il y a eu une grande manifestation au printemps 2024, le 16 mai à Montréal. et vous avez pris la parole à ce moment-là en faisant un discours qui est... Il m'a tellement inspiré. Je disais, « Ah, mon Dieu, ça n'a pas de bon sens. Il faut qu'on en parle davantage, qu'on creuse ça. » Puis dans ce discours-là, vous disiez à un moment donné, vous disiez qu'une société sans art est vouée à l'asphyxie. Qu'est-ce que ça veut dire ?

  • Speaker #1

    Je pense que c'est tout simplement l'idée de redonner à l'art ses lettres de noblesse. Oui, c'est vrai que ça nous divertit, mais ça nous aligne aussi. se réfléchir. Pour moi, quand on... Quand on pratique l'art, on peut se réfléchir, on peut se projeter, on peut s'observer. On doit faire preuve d'introspection et en même temps de projection. Donc, c'est un voyage à la fois à l'intérieur et à l'extérieur de soi. Donc, quand on pratique, c'est une arme pour mieux se connaître. Puis, quand on le consomme, j'aime mieux dire quand on le regarde, quand on l'expérimente, c'est une façon d'apprendre sur soi, en fait, en regardant. dans d'autres personnes vivre devant nous. Moi, je fais des arts vivants, je pratique les arts vivants, donc c'est le lieu de l'éphémère, c'est le lieu de la volatilité. Ça se passe là, ce soir, maintenant, et après, ça s'évapore, cette expérience-là d'être ensemble en communion et en communication. Pour moi, c'est aussi quelque chose qui est essentiel, fondamental à notre capacité de vivre en communauté.

  • Speaker #0

    Il y a le... comment dire ? Tu sais, on dit, j'entendais dire quand on consomme, mais là vous êtes dit, ah non, j'aime pas ça dire consomme. Des fois, on parle de l'industrie culturelle. On a comme un vocabulaire qui est emprunté. mettons, à l'idée de la production. Puis des fois, on regarde l'art, puis là, pas nous, là, mais des fois, l'art est regardé comme étant une affaire, ah, c'est plaisant, c'est agréable, ça divertit, mais en même temps, quand on dit qu'une société sans art est vouée à l'asphyxie, c'est presque faire de la question de l'art une question de vie ou de mort,

  • Speaker #1

    quelque part.

  • Speaker #0

    C'est de grande importance comme pour l'être.

  • Speaker #1

    Hum hum. Je pense que c'est impossible, une société sans arts, là. Puis c'est peut-être aussi pour ça que les gouvernements pensent parfois que c'est pas nécessaire de le subventionner, parce qu'il y aura toujours une petite pousse. Il y aura toujours une petite pousse qui va émerger du trottoir, là. Donc c'est comme si c'est tellement essentiel, c'est tellement nécessaire. On dirait qu'on le sait qu'il va y avoir quelqu'un qui va écrire quelque chose, qui va chanter une chanson, qui va se mettre à danser, qui va écrire une pièce de théâtre. Ce besoin-là est inné et nécessaire depuis la grotte de Lascaux jusqu'à maintenant. On a besoin d'un miroir. Puis l'art, c'est un miroir. C'est un miroir, ce n'est pas juste un miroir, c'est comme une loupe. C'est un pétri, c'est comme de nous regarder exister. Donc, on sait que ça va être toujours là. Je pense que les sociétés en santé ou les sociétés qui se voient, qui se projettent dans l'avenir investissent dans l'art parce que c'est un vocabulaire différent. C'est comme une façon de se décrire différemment. J'ai l'impression aussi que si on pense l'art en termes fonctionnels ou en termes comptables, on va toujours être perdant. C'est comme de comptabiliser quelque chose qui n'a pas de prix. On le sait, quand on se prive, pour moi, de l'eau, de l'air ou de l'art, c'est la même chose. on a besoin de ça pour pour exister.

  • Speaker #0

    Il y a souvent un discours très bienveillant sur la culture qui dit qu'il faut investir en culture parce qu'il y a des retombées économiques. Là même, on entendait la Chambre de commerce de Montréal faire un plaidoyer pour qu'il y ait un système de chômage adapté pour les travailleurs autonomes du milieu culturel. C'est comme si l'argument est de dire qu'il faut faire ça parce qu'il faut soutenir les arts parce que les arts amènent des retombées économiques. Mais c'est vrai, il faut le faire. Tant mieux si ça parle aux gens pour qui ça, c'est l'affaire la plus importante. au monde, mais en même temps, c'est beaucoup plus que ça à quelque part.

  • Speaker #1

    Ça, c'est un discours néolibéral puis les artistes, parfois, on est même coupable d'emprunter cet argumentaire-là pour convaincre les gens. Alors que moi, j'ai l'impression qu'on devrait célébrer de façon subversive la nécessité de l'inutile.

  • Speaker #0

    La nécessité de l'inutile,

  • Speaker #1

    j'adore ça. En fait, c'est important de penser qu'on doit avoir des espaces où l'inspiration peut advenir, où l'inattendu peut advenir, où le choc de deux idées inattendues. peut faire naître quelque chose sans penser de le monnayer nécessairement. Puis je pense qu'à partir de ce moment-là, on s'extrait d'une pensée qui est plus dans le capitalisme. C'est vraiment difficile de s'en extraire, mais je pense que c'est ça qui est subversif, de penser que des gens sains d'esprit, comme vous et moi, parfois, on s'en va dans... Sains d'esprit parfois, mais on s'en va dans un studio. Puis on essaie de créer quelque chose à partir de la matière première d'un corps en mouvement. C'est vraiment comme une idée extraordinaire de penser qu'à partir de rien, peut-être qu'un sens va émerger, peut-être que notre cœur va s'ouvrir, peut-être qu'une vérité va émerger. C'est difficile d'aller argumenter auprès des gouvernements quand on pense comme ça, mais on sait que c'est nécessaire. On sait que les musées sont nécessaires pour parler du passé, puis l'art vivant est nécessaire pour parler du présent. Mais je pense que je ne suis même pas d'accord avec moi. Les musées, ce n'est pas juste pour parler du passé, mais je veux dire, ça témoigne de quelque chose, parce que c'est quelque chose qui reste. Alors que les arts vivants, ça s'évanouit. Et ça, c'est important quand même de parler de la beauté de ce qui s'évanouit.

  • Speaker #0

    Dans votre discours aussi à la manifestation, vous disiez, je cite, « C'est peut-être à l'avantage du système que nous ne soyons pas connectés à nos corps. Tous les systèmes d'oppression commencent par l'oppression du corps, attachés à nos appareils intelligents, scotchés à nos écrans, fossilisés sur nos sofas, bientôt contrôlés par l'intelligence artificielle, artificiellement connectés, mais tétanisés par le contact réel. » Peut-être que c'est plus facile de contrôler une population qui n'a pas envie de danser. Alors, je propose la danse comme une arme contre l'oppression. C'est magnifique ! Mais c'est une question de l'oppression du corps. On est dans une période où il y a beaucoup d'oppression sur la Terre. Dans plein de régimes, l'oppression prend des formes particulièrement violentes envers les femmes, mais envers des populations entières à plein d'endroits dans le monde. Mais même là où on est dans des, mettons, démocraties, prendre le terme en gros guillemets, quand même, il y a des formes d'oppression qui oppressent le corps. Puis comment, qu'est-ce qui vous est, pourquoi vous avez dit ça ? En fait, qu'est-ce qui vous a inspiré ça, cette réflexion ?

  • Speaker #1

    Bien, moi, j'ai l'impression que, pour moi, d'avoir pratiqué la danse, ça m'a mis en contact avec... Avec moi-même, en fait, j'avais un professeur qui avait dit ça, danser, c'est découvrir la vie à travers l'intelligence du corps. Puis de développer cette intelligence-là, la capacité à sentir, à ressentir, c'est une forme d'intelligence qui n'est pas nécessairement mise de l'avant. Puis c'est ça que je voulais dire aussi, peut-être, avec cette idée-là que... Quand on n'est pas en contact avec soi-même, on n'est pas en contact avec une certaine forme d'empathie, on n'est pas en contact avec les autres non plus, et puis c'est plus facile de nous contrôler, c'est plus facile de nous faire avaler qu'on a besoin d'acheter ci, d'acheter ça. Je veux dire, ça, c'est peut-être, comment dire, les chaînes les plus faciles à mettre. Puis des fois, c'est même nous-mêmes qui nous mettons ces propres chaînes-là. Donc pour moi, le rôle de l'art, c'est des signes de nous défaire de nos chaînes invisibles. Puis la danse, peut-être que c'est l'art le plus évident pour ça, parce qu'essayer de se projeter dans nos corps en essayant de dépasser nos limites, en essayant aussi d'être proche d'une autre personne. Quand on pratique, la danse, c'est quelque chose. Puis quand on va la voir, bien... Ça paraît peut-être un peu ésotérique ce que je dis là, mais il y a un ressenti kinétique qui fait qu'on ressent les vagues d'énergie comme quand on va voir aussi une manifestation sportive. Ce qui fait qu'on est tellement dedans, c'est de ressentir le corps pulsé, de voir l'intelligence des stratégies pour se sortir d'une situation. c'est ça qui fait qu'ensemble, il y a des dizaines, des centaines, des dizaines de milliers de personnes parfois qui... qui vibrent à un événement. Mais c'est ça que ça fait l'art aussi.

  • Speaker #0

    C'est vrai. C'est vrai qu'il y a une parenté forte. Parce que quand on voit les sportifs, la vitesse à laquelle ça se déroule, ils ne pensent pas. Ils sont dans le corps.

  • Speaker #1

    Dans un instinct. Dans un instinct. Ils sont dans une intelligence extrême, entraînés extrêmement à leur sport, à la stratégie de leur sport. C'est la même chose quand on voit un danseur ou une danseuse de haut niveau ou quand on voit la virtuosité d'un acteur, par exemple, se transformer devant nos yeux, expérimenter la vie, puis qui nous donne accès aussi à des parties de nous que parfois on préfère laisser dans les tiroirs. C'est incroyable quand même de s'observer en empathie avec quelqu'un qui ne vit même pas un vrai drame. Alors qu'on regarde les nouvelles, puis parfois, ça ne nous fait rien de voir Gaza. C'est fou.

  • Speaker #0

    Comme si on s'habitue, puis c'est comme...

  • Speaker #1

    Bien, on s'habitue à ne pas ressentir. Puis ça, pour moi, c'est une chaîne. C'est les chaînes dont je parlais. Donc, c'est l'asphyxie dont je parlais. C'est l'oppression dont je parlais.

  • Speaker #0

    Des fois, j'ai l'impression que tout est orienté pour nous faire croire que ce qu'on veut finalement, c'est telle affaire ou telle autre. Puis que tout le monde veut nous faire croire qu'on veut telle chose. Puis des fois, ça marche. On achète plein d'affaires que clairement, on n'y aurait jamais pensé. Ce n'est pas venu de nous.

  • Speaker #1

    Il n'a pas besoin d'un air fryer.

  • Speaker #0

    Ça, c'est drôle de me reparler de tout ça aujourd'hui. mais moi c'est ça moi je suis comme je sais pas pourquoi sur quoi j'ai cliqué le mais depuis ça fait deux deux halloween que je suis ciblé par des publicités pour le vendre un sabre laser un vrai sabre laser avec le son important il est jusqu'à je résiste je résiste non c'est comme bon qu'est ce que je vais faire avec ce qui est bon en tout cas c'est la résistance mais bref j'en ai pas vraiment besoin c'est pas quelque chose qui m'est venu en étant connecté à mon corps puis effectivement il ya peu de moments dans la vie où est ce que on travaille, après ça on se déplace. on vient puis on fait les tâches domestiques, il y a peu de moments pour être connecté à soi, connecté au corps, puis l'art, on dirait, ça sert à créer un espace pour dire « ok, là on arrête tout, puis on se connecte à l'art » . même entre nous à quelque chose.

  • Speaker #1

    La danse est intéressante parce que moi, la danse que je pratique, c'est une danse contemporaine. On appelle ça une danse de concert, une danse savante, une danse de, comment dire, d'héritage. européens, mais dans nos vies, la danse, les danses traditionnelles, danser à son mariage, dans... J'ai beaucoup voyagé en Afrique, les danses rituelles... font partie de la vie. Puis c'est comme si on évacue ça de nos vies parce que c'est pas fonctionnel, ça sert à rien. Puis je pense que c'est là où est-ce que j'essaie de m'insurger puis de résister de façon subversive en disant, non, mais ces moments-là où est-ce qu'on est en contact, où est-ce qu'on est... ensemble, lorsqu'on se regarde les yeux dans les yeux. C'est ça, la vie, là. C'est ça qui reste à la fin, là. Parce que le sabre laser, il vaudra plus rien à la fin. Je suis super dramatique ! J'aime ça !

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup de... Ça dépend évidemment des cultures, tout ça. Mais mettons au Québec. Je veux dire, il y a... Moi, je suis un gars au Québec, puis je suis quand même gêné de danser. Sauf, mettons, après quelques...

  • Speaker #1

    Quelques verres.

  • Speaker #0

    Quelques verres. Là, c'est comme... Ça se peut que je danse. Mais sinon, je suis comme... Ou tout seul avec ma fille chez nous. Je n'ai pas peur du jugement. Alors, on danse beaucoup. Et c'est drôle. et puis j'ai... Dans le fond, c'est comme s'il y a quelque chose de l'humiliation qui est liée pour beaucoup de monde à la danse. Puis là, en préparant justement cette entrevue-là, on regardait, on se rappelait avec mes collègues au bureau de circonscription, on disait, il y a des politiciennes qui se font souvent contentes d'humilier parce qu'elles ont dansé, parce qu'elles sont faites prendre à danser. Puis là, on prenait l'exemple plus local, Dominique Anglade, ancienne chef du Parti libéral, juste avant le débat des chefs de la campagne. électorale 2022 à la com danser sur du black eyed peas puis là les jambes ce c'est résoudu comme pour l'humilier je sais pas quel point ça marchait mais l'intention était mais comme pour c'était mesquin il ya eu aussi ben alexandria ocasio cortez qui qui s'est fait faire sortir une vidéo du collège de du passé dans lequel elle dansait sur un toit puis c'est comme tu regardes cette vidéo c'est que c'est quoi le problème dans ce biais formidable mais Et ça a été utilisé comme pour l'huile noire. Puis, je pense peut-être la... la chose la plus violente qu'il y a eu, c'est la première, l'ancienne première ministre finlandaise en 2022, Sana Marin, qui, elle, bon, était dans un party, carrément, elle a dansé sur le party avec du monde, puis là, cette vidéo-là lui a valu de la violence publique importante, tu sais, pas comme les gens voulaient l'humilier. Puis je me dis, comment ça qu'on veut humilier des politiciennes qui dansent ? C'est quoi ce lien avec l'humiliation ? Bien, ça ouvre

  • Speaker #1

    Des portes à des choses vraiment... très intéressante, ça me fait penser à Martha Graham, la grande chorégraphe Martha Graham qui disait « La danse ne ment pas » . C'est-à-dire que la danse nous révèle telle que nous sommes, puis on dirait qu'on a peur de cette vérité-là. Après ça, je pense qu'on est très durs avec les femmes. Moi, j'ai envie de dire « Go girl » . C'est comme « Allez-y » . Moi, j'aurais comme tendance à me méfier plus des gens qui dansent pas. Tu sais, comme pris dans leur corps en pâté, ça me fait plus peur. Je comprends. Je comprends. Parce que c'est de la liberté. Ça veut dire qu'on a peur de la liberté et on a peur des femmes libres. C'est juste ça que ça veut dire pour moi. C'est vraiment comme... une façon de mettre une honte sur quelque chose qui devrait être célébré.

  • Speaker #0

    Aïe aïe aïe, il y a du chemin à faire quand même.

  • Speaker #1

    Mais pour les femmes, je pense qu'on peut comprendre.

  • Speaker #0

    Oui, clairement. Parce que les hommes qui dansent...

  • Speaker #1

    Parce que non, mais Barack Obama il dansait et on était comme « Oh wow ! » Il est swag.

  • Speaker #0

    Exactement. Donald Trump qui danse comme un peu un robot dans ses trucs, il bouge les bras. Je sais pas si c'est de la danse, je veux pas insulter la...

  • Speaker #1

    danser. Je ne vais pas rentrer sur ce sujet. Pour moi, c'était comme road to hell.

  • Speaker #0

    Donc, oui, c'est ça. Eux autres, c'est comme, mais il faudrait qu'ils dansent bien, par exemple. C'est comme, moi, c'est ça. Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Non, mais je pense que de bouger son corps, c'est de se permettre d'être libre. Moi, je pense que c'est vraiment, c'est l'équation que je fais. C'est d'aller vers plus de liberté, puis aller vers plus de liberté, ça fait peur.

  • Speaker #0

    Le milieu de la danse aujourd'hui témoigne de son épuisement. Les artistes disent... des tabous de souffle. Et, bon, vous évoluez dans le milieu de la danse depuis un certain temps. Puis, à un moment donné, quand je le disais en introduction, avec Au Vertigo, vous êtes partis en tournée pendant à peu près dix ans. Et puis, Ginette Lorrain, elle engageait des artistes à la... l'année. Puis les gens pouvaient être engagés, employés par une compagnie. Je suis artiste de la danse à telle place, etc. Tandis qu'aujourd'hui, on sent que c'est beaucoup plus précaire, beaucoup plus de travail autonome, de travail interrompu. On ne sait pas de quoi le prochain mois sera. sera fait, à quel point ça s'est dégradé en quelques années ?

  • Speaker #1

    Bien, j'utiliserais le mot « fragmenté » . Moi, j'ai vraiment vu la fragmentation du travail, c'est-à-dire qu'effectivement, j'ai eu la chance d'être sur les dernières privilégiées, les dernières élues qui avaient la possibilité d'être dans des compagnies qui étaient du travail à temps plein. et Et il y a eu comme une espèce de renversement qui faisait qu'il y a eu de plus en plus de compagnies, de plus en plus de chorégraphes indépendants qui ne pouvaient pas soutenir leurs activités sur la totalité de l'année. Donc, ça a créé une forme de fragmentation où les danseurs se sont mis à danser pour plusieurs chorégraphes. Et là, c'est comme si le milieu a implosé. et ce qui rend les relations, les complicités, les loyautés de plus en plus difficiles à soutenir sur le long terme. Mais c'est aussi que les compagnies, une compagnie comme la mienne, par exemple, a des activités sur toute l'année, mais pas avec un seul spectacle. Quand j'étais avec Ouvertigo, par exemple, on créait pendant six mois un an puis on partait en tournée pendant deux ans. Et c'était, on travaillait sur un spectacle.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Maintenant, ce n'est pas ça. Cette année, je vais tourner quatre spectacles différents avec quatre distributions différentes. Je pense qu'on va en Europe, on va aux États-Unis, on va à Montréal, puis on va dans l'Ouest canadien. Sur plein de territoires différents aussi.

  • Speaker #0

    Quel impact ça a sur la vie ? d'artiste, cette fragmentation-là, cette aussi incertitude chronique-là ?

  • Speaker #1

    Hum-hum. Mais je pense que ce qui est positif, c'est que les... Pardon ! Les danseurs, les performants... ont la chance de travailler avec plusieurs personnes, donc il y a quelque chose qui est nourrissant là-dedans. Ce qui est négatif, l'impact, c'est que, par exemple, si j'ai besoin de partir en tournée, je ne sais jamais si les danseurs avec lesquels j'ai travaillé vont être disponibles. Donc on est toujours en train soit de remplacer des gens, soit de courir après les agendas ou d'annuler des possibilités de tournée parce qu'on ne réussit pas à recréer les... distribution, ça, ça coûte beaucoup de sous et ça coûte beaucoup de temps. Puis je pense que l'effet le plus grand sur les coupures dans le domaine des arts, c'est le temps. C'est-à-dire que ça nous prend tellement plus de temps de faire les choses qu'avant. Puis je ne sais pas si les gens le savent, mais au Conseil des arts et des lettres du Québec, nos budgets en fonctionnement. Donc, le budget de ma compagnie n'avait pas été... augmenté depuis 2017. Donc, entre 2017 et 2024, il s'est passé une foule de choses. Le monde a changé. Il y a eu une pandémie. Les prix, l'inflation, tout ça a changé. Mais nos budgets étaient les mêmes. Donc, la détérioration des conditions de travail s'en est suivie. Et ça, c'est très difficile à rattraper. On ne sera jamais capables de rattraper ce grand gap, finalement. Et j'ai l'impression qu'une beauté de notre milieu, c'est qu'il est riche, c'est qu'il y a plein de diversité, il y a plein de pluralité. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de gens qui veulent faire ce travail-là, mais avec des petits moyens. Donc, on va devoir se poser des grandes questions sur cet essoufflement-là, justement. Il est dû à quoi ? On ne peut pas continuer de vivre sur le respirateur artificiel.

  • Speaker #0

    Parce que le revenu médian des artistes au Québec... en ce moment, c'est à peu près 17-18 000 $ par année. Donc, on comprend bien qu'avec le prix actuel des loyers, l'épicerie qui a explosé, c'est pas viable, ça fonctionne pas. Et c'est un problème, ça doit être, du point de vue du travailleur autonome, qui sait jamais... L'année prochaine, qu'est-ce qu'il va faire ? Ça doit être vraiment très anxiogène pour les artistes.

  • Speaker #1

    En fait, c'est que les artistes, c'est des couteaux suisses. Ils sont capables, ils font plein d'affaires. La plupart d'entre eux et elles ont deux, trois jobs différents. Ils sont capables de faire un travail qui est plus clérical et un travail qui est plus, comment dire, artistique. Moi, ce que je vois aussi, c'est que les arts vivants pâtissent de ça, parce que quand je travaille avec des acteurs, par exemple, c'est sûr qu'ils doivent travailler à la télévision pour faire du théâtre. C'est comme s'ils financent un peu leur passion pour le théâtre en allant faire de la télévision ou des voix ou je ne sais pas. Donc, c'est sûr que... C'est le lieu de la passion, les arts vivants. C'est des gens qui se donnent à fond. C'est touchant de voir que ce niveau-là d'engagement et de passion existe. encore, puis après ça, je pense qu'il faut le questionner. On ne peut pas juste continuer de vivre sur le jus de bras et la sueur et le sang des gens.

  • Speaker #0

    C'est comme si les artistes étaient condamnés à survivre, mais là, il faudrait qu'on soit dans une société où ils peuvent vivre carrément.

  • Speaker #1

    Oui, puis aussi, comment dire, exister dans toute leur noblesse, parce que ça devient un peu, comment dire, oui, ça devient un peu gênant de dire que c'est ça le travail qu'on fait.

  • Speaker #0

    puis si on mettons qu'on voulait imaginer positivement une société d'artistes parce que c'est possible à quoi ça ressemblerait qu'est-ce qu'on pourrait faire pour vivre dans une société d'artistes ? Politiquement, socialement, ça ressemblerait à quoi ? Les obstacles à enlever sont où ?

  • Speaker #1

    Une société d'artistes où tout le monde est artiste,

  • Speaker #0

    je ne suis pas sûre que je voudrais vivre dans cette société. Tu vois, où être artiste et, disons, on peut vivre artiste. Oui,

  • Speaker #1

    c'est ça. Moi, je pense que ça prend des gens qui apprécient les arts et ça prend des gens qui veulent le pratiquer. Je pense pas qu'on veut vivre dans une société où tout... tout le monde est artiste, ce serait vraiment fatigant. En tout amour, là. Mais je pense que pour moi, la clé, c'est vraiment l'éducation. Puis c'est d'amener nos enfants au théâtre, d'amener nos enfants à la danse, d'amener nos enfants à la bibliothèque et au musée. Que ça devienne un incontournable, que ça devienne une nécessité. Puis les études le prouvent, mais dès que... Cette nourriture-là fait partie de la diète des enfants, mais en grandissant, ça devient une nécessité. Moi, j'ai joué à un jeu avec mon enfant. On a beaucoup voyagé avant la pandémie, puis je l'amenais toujours avec moi en tournée. Puis je lui disais, à partir d'un an, quand on va dans une nouvelle ville, il faut aller au musée. C'est comme, c'est obligatoire. Et jusqu'à ce qu'il ait 9 ans, je pense qu'il pensait que c'était vraiment une vraie obligation.

  • Speaker #0

    C'est qu'il y a une loi.

  • Speaker #1

    Oui, il y avait comme une loi.

  • Speaker #0

    Ils vont vérifier.

  • Speaker #1

    Exactement. Il était comme, OK, bien là, dans quel musée on va aller ? Je suis comme, bien, je ne sais pas. Fais tes recherches, on ira. Puis c'est tellement drôle de le voir, lui, exister avec cette, comment dire, cette nécessité-là dans la vie. On va dans une nouvelle ville, on n'a pas le choix. Donc, lequel musée on va voir ? Puis, bien, ça, c'est de la manipulation. et de passer à la maison. Bienveillante. Bienveillante, exactement. Mais je trouvais ça intéressant de lui avoir transmis ça, cette nécessité. Moi, je pense qu'il devrait y avoir un budget pour que tous les profs amènent les enfants, les classes au théâtre. Puis pas juste le théâtre pour enfants, mais le théâtre at large. C'est tellement intéressant d'aller au théâtre quand il y a une classe de cégep qui est là. C'est comme la façon de réagir, la façon de s'endormir. Quand c'est plate, on le sait tout de suite. C'est immédiat. Moi, je trouve que c'est le public le plus honnête. Donc, on devrait investir là. Pour moi, c'est la clé.

  • Speaker #0

    C'est comme si on a né un enfant ou un adolescent, un jeune adulte. voir des oeuvres d'art assister à un spectacle, c'est comme un peu lui offrir une occasion de se reconnecter avec lui-même, avec son ressenti, avec qui il est.

  • Speaker #1

    Puis il y a toute la médiation aussi qui vient avec voir une oeuvre, oui. Mais comment on la traduit dans nos vies ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Comment ça résonne ? Tu sais, c'est nos profs préférés, ceux qui sont capables de faire résonner la philosophie dans nos vies, ceux qui sont capables de faire résonner l'art dans nos vies, même ceux qui sont capables de nous expliquer les mathématiques puis qui nous donnent à voir... J'ai à tomber amoureux avec le ciel, les astres, la physique, la chimie, puis que ça devienne passionnant. Donc là, je mets beaucoup de pression sur les profs, mais je trouve que c'est tellement ces personnes-là qui nous... inspire et qui nous donne un sens. Parce qu'aller à l'école, s'il n'y a pas ce prof-là ou cette prof-là qui nous fait résonner avec le vivant, avec le monde, c'est plate. Donc, je pense que c'est vraiment ma clé.

  • Speaker #0

    Merci les profs qui font vibrer les jeunes. Oui !

  • Speaker #1

    Qui les inspirent,

  • Speaker #0

    qui leur donnent des étincelles dans les yeux.

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Bon, là, j'ai une question concrète à poser une question très concrète. dans le fond, moi, j'ai... Est-ce que vous auriez un conseil pour moi pour danser ?

  • Speaker #1

    Mais, Sol, vous avez donné la réponse pendant l'entrevue, c'est que vous m'avez dit que vous avez une fille. Oui. Quel âge a-t-elle ?

  • Speaker #0

    4 ans.

  • Speaker #1

    Ben, voilà ! Vous faites des enfants, c'est sûr que vous allez danser ! C'est évident, parce que c'est... tellement inspirant de voir un enfant développer ses capacités motrices. puis triper sur qu'est-ce que fait un bras, qu'est-ce que fait une jambe. On dit que les athlètes professionnels ne sont même pas capables de suivre ce qu'un enfant de deux ans fait dans une journée tellement c'est puissant, comment dire, la force motrice que ça prend pour se mouvoir dans le monde à cet âge-là. Donc oui, faites des enfants, puis suivez-les, vous êtes sûrs que vous allez danser.

  • Speaker #0

    Alors si je comprends bien, la prochaine fois que je suis dans une situation sociale où je suis un peu gêné je dois danser, il faut que je m'imagine être tout seul avec ma fille de 4 ans.

  • Speaker #1

    Ah oui, mais on dit danser aussi comme si personne nous regardait. Oui, c'est ça. Donc, je pense que le regard des autres, souvent, c'est ça qui tue, c'est ça qui nous emprisonne. Puis c'est pour ça que je parlais de liberté tout à l'heure. Donc, c'est comme rentrer en contact avec notre liberté. Ouais, s'en foutre, finalement.

  • Speaker #0

    Des fois même, je ne sais pas si je fais de la projection, mais dans des lieux où les gens dansent, les gens vont moins dans les discothèques. Même discothèques, j'ai l'impression que c'est comme vintage. On dirait que je sors des questions d'église.

  • Speaker #1

    Ça doit plus s'appeler comme ça. Allez, empoîte.

  • Speaker #0

    Allez, empoîte. C'est comme si... J'ai l'impression que des fois, les gens se demandent de comment... qu'est-ce que les gens pensent quand ils me regardent. Puis les gens se regardent beaucoup. Tu sais, même en penchant la tête vers le bas, pour voir si ça a-tu de l'allure. ce mouvement-là et tout ça. C'est comme, mon Dieu, mais quelque part, quelle tristesse pour qu'on se soumets à cet exercice. Mais ça pourrait être autre chose que ça.

  • Speaker #1

    C'est complètement d'autre chose que ça. La danse, c'est vraiment pluriel, mais une des choses que la danse contemporaine a faite, en fait c'est de se défaire des miroirs Donc, quand on fait du ballet, souvent, on fait du ballet devant un miroir puis on se regarde. En tout cas, quand j'étais petite, quand je faisais du ballet, c'était comme ça. Puis la danse contemporaine, elle, c'est d'effet de ce regard-là. Donc, c'est vraiment un regard qui est plongé à l'intérieur. Donc, les sensations de l'intérieur. Et ça, c'est complètement un autre monde. Quand on arrête de se regarder de l'extérieur puis qu'on plonge à l'intérieur. Quelque chose de plus introspectif. Ou alors, je dirais, toutes les danses de salon. de plus beau que le tango argentin, par exemple, d'être en contact avec le corps de quelqu'un qui, en tout cas, moi, qui me guide, quelqu'un qui me guide ou qu'on guide quelqu'un dans une espèce de... Oui, c'est ça, de symbiose. Il n'y a rien de plus beau, de plus sensuel et de plus profond que ça.

  • Speaker #0

    C'est fou, parce qu'on dirait que j'aurais... Moi, en fait, dans ma vie, ce qui m'a gêné, c'est comme... danser tout seul dans un bar avec plein de monde qui danse tout seul puis essayer d'avoir la même chose. C'est super anxiogène, mais en même temps, je me dis si j'avais eu des cours quand j'étais plus jeune ou maintenant, des cours de tango ou de danse sociale où on m'avait dit « garde danser, tu fais ça, pas là, c'est pas là, c'est pas là » , on dirait que ça m'aurait comme rassuré puis je me serais dit « ah ok, bien regarde, c'est fais je fais ça puis en même temps ben c'est pas est ce que c'est ça peut être autant une Une voix d'expression, comme un cadre comme ça, oui ?

  • Speaker #1

    Bien, il y a des danses très chorégraphiées, il y a des danses improvisées. Donc, si on parle, par exemple, de toute la culture urbaine hip-hop, c'est des danses d'improvisation. Donc, il y a un langage appris, puis après ça, la danse, ça devient comment chaque personne tisse. ces mouvements tissent l'expression de ces mouvements. Puis ça, c'est aussi, je ne sais pas si c'est un langage ou si c'est une intelligence suprême, mais c'est extraordinaire de voir les gens improviser. C'est complètement différent d'apprendre un pas après l'autre, c'est une chose, mais d'apprendre à se mouvoir dans le mouvement, c'est autre chose. C'est comme si apprendre un texte de théâtre par cœur ou connaître son sujet très bien. Ça dépend ce qu'on préfère. Je comprends.

  • Speaker #0

    Merci, merci, Mélanie. C'est vraiment inspirant puis ça donne envie de se battre pour les arts.

  • Speaker #1

    Merci. En tout cas, on lève notre poing puis on est là pour la nécessité de l'inutile.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Merci à tout le monde d'avoir été avec nous. Je tiens également à remercier Éric Azaria pour la musique. Anthony Castonguay-Harvey pour le montage, Madeleine Cloutier et Nadia Girard-Hedaya pour l'organisation et l'enregistrement. Et on ne lâche pas la patate, car l'espoir, c'est un choix.

Description

Dans cet épisode de Paix, Amour et Nous Vaincrons, Sol Zanetti reçoit la chorégraphe, metteuse en scène et artiste engagée Mélanie Demers pour une discussion vibrante sur le pouvoir subversif de l’art.


💃 Pourquoi les corps en mouvement dérangent-ils autant ?
📉 Comment expliquer la précarité grandissante du milieu artistique ?
📣 Peut-on vraiment faire de l’art un acte politique et de résistance ?
💥 Et pourquoi tant de politiciennes se font humilier pour avoir dansé ?

De la nécessité de l’inutile à la fragmentation du travail artistique, en passant par le male gaze inversé, les sabres lasers et la tendresse d’un parent qui danse avec son enfant, cet épisode est une invitation à réfléchir… et à ressentir.


Une conversation libre, touchante, qui donne envie de lever le poing✊… ou de se laisser aller au rythme de la liberté.🕺💃


Une balado de Sol Zanetti, député de Jean-Lesage et porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de culture, de communications, d'éducation et d'enseignement supérieur à l'Assemblée nationale du Québec.

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Musique originale d'Erika Zarya
Montage: Antoni Castonguay-Harvey


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour tout le monde, bienvenue au deuxième épisode de Paix, Amour et nous vaincrons, la balado qui traite de sujets politiques, sociaux, culturels, dans une optique non déprimante pour cultiver l'espoir en politique québécoise, quand même utile. Mon nom c'est Sol Zanetti, je suis député à l'Assemblée nationale pour la circonscription de Jean Lesage, responsable des dossiers de culture, éducation, enseignement supérieur et bien d'autres. Et aujourd'hui... Mon invité sera Mélanie Demers, une chorégraphe, femme de théâtre, artiste québécoise que je vais vous présenter. On va aborder beaucoup de thèmes. Je l'avais invitée parce que la première fois que je l'ai entendue faire un discours, c'était à la grande mobilisation pour les arts en 2024 au printemps. Elle avait fait un discours qui m'avait tellement bouleversé par sa profondeur. et sa justesse, puis je me suis dit, ça y est, il faut que je l'invite dans ma balado. Alors, on va parler de beaucoup de choses aujourd'hui. Le rôle de l'art, le rôle de la danse et des corps dans la résistance à une oppression politique. Et je lui ai aussi posé la question, pourquoi les femmes politiques qui dansent créent scandale ? Alors, restez avec nous et allons-y avec paix, amour et une vraie croix. Bonjour Mélanie Demers.

  • Speaker #1

    Bonjour Sol.

  • Speaker #0

    Ça va bien ?

  • Speaker #1

    Ça va très bien.

  • Speaker #0

    Très bien, merci. Oui, bon, parfait. On a eu une grosse discussion sur le vous, le tu, puis on a dit vous. Allons-y avec ça.

  • Speaker #1

    Allez-y. Merci. Merci d'aider. Parfait.

  • Speaker #0

    Alors, Mélanie Demers, vous êtes artiste en danse, née à Montréal, grandie à Québec, entre, vous dites, le zoo et la prison d'Orsinville. Oui,

  • Speaker #1

    j'ai hésité à être très dramatique en racontant ma petite histoire.

  • Speaker #0

    Très poétique, très poétique. Et ensuite, vous êtes venue étudier à l'École de danse contemporaine de Montréal. Dans la vingtaine, ensuite, en sortant de l'école, vous avez été recrutée par la compagnie Au Vertigo de Juliette Lorrain, avec laquelle vous avez tourné pendant à peu près dix ans, avant de fonder en 2007 votre compagnie, la compagnie de danse Médée, avec laquelle vous avez créé plus d'une dizaine de spectacles. Et plus récemment, vous avez, en 2024, gagné le prix du CNA dans le cadre de la cérémonie de la gouverneure générale. Donc, un prix très prestigieux. Félicitations !

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Et vous touchez aussi à la danse, mais aussi au théâtre. Oui. Puis dans une perspective d'art total.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas comment on pourrait décrire mon travail, mais c'est vrai que la lentille par laquelle je crée, c'est par le corps. Puis le corps, c'est une arme totale. C'est-à-dire que mes spectacles ont évidemment de la danse, mais j'aime utiliser les mots, j'aime la poésie, j'aime les arts visuels. Évidemment, il y a beaucoup de musique aussi. puis je demande aux protagonistes, aux gens qui sont dans mes spectacles d'être très versatiles, même s'ils ne sont pas spécialistes. J'aime ça que les gens se mettent en danger en allant explorer des territoires inconnus d'eux et d'elles.

  • Speaker #0

    C'est quand même intéressant, un corps, une arme redoutable. Moi, je suis bon, je fais de la politique, on est beaucoup trop dans notre tête en général, toujours là-dedans, le débat, les arguments, etc. Puis, ça va me faire du bien justement qu'on parle de corps un peu aujourd'hui, vraiment. la raison pour laquelle je vous ai invité à cette balade. Lado, c'est qu'il y a en ce moment des problèmes dans le milieu des arts, Québec, tous les milieux des arts. Un effondrement de la capacité financière de plein d'organisations et de productions à arriver. Il y a des compagnies qui ferment, il y a des spectacles qui s'annulent, etc. Il y a les conditions d'yeux aussi des artistes qui sont de plus en plus précarisées. Il y a eu une grande manifestation au printemps 2024, le 16 mai à Montréal. et vous avez pris la parole à ce moment-là en faisant un discours qui est... Il m'a tellement inspiré. Je disais, « Ah, mon Dieu, ça n'a pas de bon sens. Il faut qu'on en parle davantage, qu'on creuse ça. » Puis dans ce discours-là, vous disiez à un moment donné, vous disiez qu'une société sans art est vouée à l'asphyxie. Qu'est-ce que ça veut dire ?

  • Speaker #1

    Je pense que c'est tout simplement l'idée de redonner à l'art ses lettres de noblesse. Oui, c'est vrai que ça nous divertit, mais ça nous aligne aussi. se réfléchir. Pour moi, quand on... Quand on pratique l'art, on peut se réfléchir, on peut se projeter, on peut s'observer. On doit faire preuve d'introspection et en même temps de projection. Donc, c'est un voyage à la fois à l'intérieur et à l'extérieur de soi. Donc, quand on pratique, c'est une arme pour mieux se connaître. Puis, quand on le consomme, j'aime mieux dire quand on le regarde, quand on l'expérimente, c'est une façon d'apprendre sur soi, en fait, en regardant. dans d'autres personnes vivre devant nous. Moi, je fais des arts vivants, je pratique les arts vivants, donc c'est le lieu de l'éphémère, c'est le lieu de la volatilité. Ça se passe là, ce soir, maintenant, et après, ça s'évapore, cette expérience-là d'être ensemble en communion et en communication. Pour moi, c'est aussi quelque chose qui est essentiel, fondamental à notre capacité de vivre en communauté.

  • Speaker #0

    Il y a le... comment dire ? Tu sais, on dit, j'entendais dire quand on consomme, mais là vous êtes dit, ah non, j'aime pas ça dire consomme. Des fois, on parle de l'industrie culturelle. On a comme un vocabulaire qui est emprunté. mettons, à l'idée de la production. Puis des fois, on regarde l'art, puis là, pas nous, là, mais des fois, l'art est regardé comme étant une affaire, ah, c'est plaisant, c'est agréable, ça divertit, mais en même temps, quand on dit qu'une société sans art est vouée à l'asphyxie, c'est presque faire de la question de l'art une question de vie ou de mort,

  • Speaker #1

    quelque part.

  • Speaker #0

    C'est de grande importance comme pour l'être.

  • Speaker #1

    Hum hum. Je pense que c'est impossible, une société sans arts, là. Puis c'est peut-être aussi pour ça que les gouvernements pensent parfois que c'est pas nécessaire de le subventionner, parce qu'il y aura toujours une petite pousse. Il y aura toujours une petite pousse qui va émerger du trottoir, là. Donc c'est comme si c'est tellement essentiel, c'est tellement nécessaire. On dirait qu'on le sait qu'il va y avoir quelqu'un qui va écrire quelque chose, qui va chanter une chanson, qui va se mettre à danser, qui va écrire une pièce de théâtre. Ce besoin-là est inné et nécessaire depuis la grotte de Lascaux jusqu'à maintenant. On a besoin d'un miroir. Puis l'art, c'est un miroir. C'est un miroir, ce n'est pas juste un miroir, c'est comme une loupe. C'est un pétri, c'est comme de nous regarder exister. Donc, on sait que ça va être toujours là. Je pense que les sociétés en santé ou les sociétés qui se voient, qui se projettent dans l'avenir investissent dans l'art parce que c'est un vocabulaire différent. C'est comme une façon de se décrire différemment. J'ai l'impression aussi que si on pense l'art en termes fonctionnels ou en termes comptables, on va toujours être perdant. C'est comme de comptabiliser quelque chose qui n'a pas de prix. On le sait, quand on se prive, pour moi, de l'eau, de l'air ou de l'art, c'est la même chose. on a besoin de ça pour pour exister.

  • Speaker #0

    Il y a souvent un discours très bienveillant sur la culture qui dit qu'il faut investir en culture parce qu'il y a des retombées économiques. Là même, on entendait la Chambre de commerce de Montréal faire un plaidoyer pour qu'il y ait un système de chômage adapté pour les travailleurs autonomes du milieu culturel. C'est comme si l'argument est de dire qu'il faut faire ça parce qu'il faut soutenir les arts parce que les arts amènent des retombées économiques. Mais c'est vrai, il faut le faire. Tant mieux si ça parle aux gens pour qui ça, c'est l'affaire la plus importante. au monde, mais en même temps, c'est beaucoup plus que ça à quelque part.

  • Speaker #1

    Ça, c'est un discours néolibéral puis les artistes, parfois, on est même coupable d'emprunter cet argumentaire-là pour convaincre les gens. Alors que moi, j'ai l'impression qu'on devrait célébrer de façon subversive la nécessité de l'inutile.

  • Speaker #0

    La nécessité de l'inutile,

  • Speaker #1

    j'adore ça. En fait, c'est important de penser qu'on doit avoir des espaces où l'inspiration peut advenir, où l'inattendu peut advenir, où le choc de deux idées inattendues. peut faire naître quelque chose sans penser de le monnayer nécessairement. Puis je pense qu'à partir de ce moment-là, on s'extrait d'une pensée qui est plus dans le capitalisme. C'est vraiment difficile de s'en extraire, mais je pense que c'est ça qui est subversif, de penser que des gens sains d'esprit, comme vous et moi, parfois, on s'en va dans... Sains d'esprit parfois, mais on s'en va dans un studio. Puis on essaie de créer quelque chose à partir de la matière première d'un corps en mouvement. C'est vraiment comme une idée extraordinaire de penser qu'à partir de rien, peut-être qu'un sens va émerger, peut-être que notre cœur va s'ouvrir, peut-être qu'une vérité va émerger. C'est difficile d'aller argumenter auprès des gouvernements quand on pense comme ça, mais on sait que c'est nécessaire. On sait que les musées sont nécessaires pour parler du passé, puis l'art vivant est nécessaire pour parler du présent. Mais je pense que je ne suis même pas d'accord avec moi. Les musées, ce n'est pas juste pour parler du passé, mais je veux dire, ça témoigne de quelque chose, parce que c'est quelque chose qui reste. Alors que les arts vivants, ça s'évanouit. Et ça, c'est important quand même de parler de la beauté de ce qui s'évanouit.

  • Speaker #0

    Dans votre discours aussi à la manifestation, vous disiez, je cite, « C'est peut-être à l'avantage du système que nous ne soyons pas connectés à nos corps. Tous les systèmes d'oppression commencent par l'oppression du corps, attachés à nos appareils intelligents, scotchés à nos écrans, fossilisés sur nos sofas, bientôt contrôlés par l'intelligence artificielle, artificiellement connectés, mais tétanisés par le contact réel. » Peut-être que c'est plus facile de contrôler une population qui n'a pas envie de danser. Alors, je propose la danse comme une arme contre l'oppression. C'est magnifique ! Mais c'est une question de l'oppression du corps. On est dans une période où il y a beaucoup d'oppression sur la Terre. Dans plein de régimes, l'oppression prend des formes particulièrement violentes envers les femmes, mais envers des populations entières à plein d'endroits dans le monde. Mais même là où on est dans des, mettons, démocraties, prendre le terme en gros guillemets, quand même, il y a des formes d'oppression qui oppressent le corps. Puis comment, qu'est-ce qui vous est, pourquoi vous avez dit ça ? En fait, qu'est-ce qui vous a inspiré ça, cette réflexion ?

  • Speaker #1

    Bien, moi, j'ai l'impression que, pour moi, d'avoir pratiqué la danse, ça m'a mis en contact avec... Avec moi-même, en fait, j'avais un professeur qui avait dit ça, danser, c'est découvrir la vie à travers l'intelligence du corps. Puis de développer cette intelligence-là, la capacité à sentir, à ressentir, c'est une forme d'intelligence qui n'est pas nécessairement mise de l'avant. Puis c'est ça que je voulais dire aussi, peut-être, avec cette idée-là que... Quand on n'est pas en contact avec soi-même, on n'est pas en contact avec une certaine forme d'empathie, on n'est pas en contact avec les autres non plus, et puis c'est plus facile de nous contrôler, c'est plus facile de nous faire avaler qu'on a besoin d'acheter ci, d'acheter ça. Je veux dire, ça, c'est peut-être, comment dire, les chaînes les plus faciles à mettre. Puis des fois, c'est même nous-mêmes qui nous mettons ces propres chaînes-là. Donc pour moi, le rôle de l'art, c'est des signes de nous défaire de nos chaînes invisibles. Puis la danse, peut-être que c'est l'art le plus évident pour ça, parce qu'essayer de se projeter dans nos corps en essayant de dépasser nos limites, en essayant aussi d'être proche d'une autre personne. Quand on pratique, la danse, c'est quelque chose. Puis quand on va la voir, bien... Ça paraît peut-être un peu ésotérique ce que je dis là, mais il y a un ressenti kinétique qui fait qu'on ressent les vagues d'énergie comme quand on va voir aussi une manifestation sportive. Ce qui fait qu'on est tellement dedans, c'est de ressentir le corps pulsé, de voir l'intelligence des stratégies pour se sortir d'une situation. c'est ça qui fait qu'ensemble, il y a des dizaines, des centaines, des dizaines de milliers de personnes parfois qui... qui vibrent à un événement. Mais c'est ça que ça fait l'art aussi.

  • Speaker #0

    C'est vrai. C'est vrai qu'il y a une parenté forte. Parce que quand on voit les sportifs, la vitesse à laquelle ça se déroule, ils ne pensent pas. Ils sont dans le corps.

  • Speaker #1

    Dans un instinct. Dans un instinct. Ils sont dans une intelligence extrême, entraînés extrêmement à leur sport, à la stratégie de leur sport. C'est la même chose quand on voit un danseur ou une danseuse de haut niveau ou quand on voit la virtuosité d'un acteur, par exemple, se transformer devant nos yeux, expérimenter la vie, puis qui nous donne accès aussi à des parties de nous que parfois on préfère laisser dans les tiroirs. C'est incroyable quand même de s'observer en empathie avec quelqu'un qui ne vit même pas un vrai drame. Alors qu'on regarde les nouvelles, puis parfois, ça ne nous fait rien de voir Gaza. C'est fou.

  • Speaker #0

    Comme si on s'habitue, puis c'est comme...

  • Speaker #1

    Bien, on s'habitue à ne pas ressentir. Puis ça, pour moi, c'est une chaîne. C'est les chaînes dont je parlais. Donc, c'est l'asphyxie dont je parlais. C'est l'oppression dont je parlais.

  • Speaker #0

    Des fois, j'ai l'impression que tout est orienté pour nous faire croire que ce qu'on veut finalement, c'est telle affaire ou telle autre. Puis que tout le monde veut nous faire croire qu'on veut telle chose. Puis des fois, ça marche. On achète plein d'affaires que clairement, on n'y aurait jamais pensé. Ce n'est pas venu de nous.

  • Speaker #1

    Il n'a pas besoin d'un air fryer.

  • Speaker #0

    Ça, c'est drôle de me reparler de tout ça aujourd'hui. mais moi c'est ça moi je suis comme je sais pas pourquoi sur quoi j'ai cliqué le mais depuis ça fait deux deux halloween que je suis ciblé par des publicités pour le vendre un sabre laser un vrai sabre laser avec le son important il est jusqu'à je résiste je résiste non c'est comme bon qu'est ce que je vais faire avec ce qui est bon en tout cas c'est la résistance mais bref j'en ai pas vraiment besoin c'est pas quelque chose qui m'est venu en étant connecté à mon corps puis effectivement il ya peu de moments dans la vie où est ce que on travaille, après ça on se déplace. on vient puis on fait les tâches domestiques, il y a peu de moments pour être connecté à soi, connecté au corps, puis l'art, on dirait, ça sert à créer un espace pour dire « ok, là on arrête tout, puis on se connecte à l'art » . même entre nous à quelque chose.

  • Speaker #1

    La danse est intéressante parce que moi, la danse que je pratique, c'est une danse contemporaine. On appelle ça une danse de concert, une danse savante, une danse de, comment dire, d'héritage. européens, mais dans nos vies, la danse, les danses traditionnelles, danser à son mariage, dans... J'ai beaucoup voyagé en Afrique, les danses rituelles... font partie de la vie. Puis c'est comme si on évacue ça de nos vies parce que c'est pas fonctionnel, ça sert à rien. Puis je pense que c'est là où est-ce que j'essaie de m'insurger puis de résister de façon subversive en disant, non, mais ces moments-là où est-ce qu'on est en contact, où est-ce qu'on est... ensemble, lorsqu'on se regarde les yeux dans les yeux. C'est ça, la vie, là. C'est ça qui reste à la fin, là. Parce que le sabre laser, il vaudra plus rien à la fin. Je suis super dramatique ! J'aime ça !

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup de... Ça dépend évidemment des cultures, tout ça. Mais mettons au Québec. Je veux dire, il y a... Moi, je suis un gars au Québec, puis je suis quand même gêné de danser. Sauf, mettons, après quelques...

  • Speaker #1

    Quelques verres.

  • Speaker #0

    Quelques verres. Là, c'est comme... Ça se peut que je danse. Mais sinon, je suis comme... Ou tout seul avec ma fille chez nous. Je n'ai pas peur du jugement. Alors, on danse beaucoup. Et c'est drôle. et puis j'ai... Dans le fond, c'est comme s'il y a quelque chose de l'humiliation qui est liée pour beaucoup de monde à la danse. Puis là, en préparant justement cette entrevue-là, on regardait, on se rappelait avec mes collègues au bureau de circonscription, on disait, il y a des politiciennes qui se font souvent contentes d'humilier parce qu'elles ont dansé, parce qu'elles sont faites prendre à danser. Puis là, on prenait l'exemple plus local, Dominique Anglade, ancienne chef du Parti libéral, juste avant le débat des chefs de la campagne. électorale 2022 à la com danser sur du black eyed peas puis là les jambes ce c'est résoudu comme pour l'humilier je sais pas quel point ça marchait mais l'intention était mais comme pour c'était mesquin il ya eu aussi ben alexandria ocasio cortez qui qui s'est fait faire sortir une vidéo du collège de du passé dans lequel elle dansait sur un toit puis c'est comme tu regardes cette vidéo c'est que c'est quoi le problème dans ce biais formidable mais Et ça a été utilisé comme pour l'huile noire. Puis, je pense peut-être la... la chose la plus violente qu'il y a eu, c'est la première, l'ancienne première ministre finlandaise en 2022, Sana Marin, qui, elle, bon, était dans un party, carrément, elle a dansé sur le party avec du monde, puis là, cette vidéo-là lui a valu de la violence publique importante, tu sais, pas comme les gens voulaient l'humilier. Puis je me dis, comment ça qu'on veut humilier des politiciennes qui dansent ? C'est quoi ce lien avec l'humiliation ? Bien, ça ouvre

  • Speaker #1

    Des portes à des choses vraiment... très intéressante, ça me fait penser à Martha Graham, la grande chorégraphe Martha Graham qui disait « La danse ne ment pas » . C'est-à-dire que la danse nous révèle telle que nous sommes, puis on dirait qu'on a peur de cette vérité-là. Après ça, je pense qu'on est très durs avec les femmes. Moi, j'ai envie de dire « Go girl » . C'est comme « Allez-y » . Moi, j'aurais comme tendance à me méfier plus des gens qui dansent pas. Tu sais, comme pris dans leur corps en pâté, ça me fait plus peur. Je comprends. Je comprends. Parce que c'est de la liberté. Ça veut dire qu'on a peur de la liberté et on a peur des femmes libres. C'est juste ça que ça veut dire pour moi. C'est vraiment comme... une façon de mettre une honte sur quelque chose qui devrait être célébré.

  • Speaker #0

    Aïe aïe aïe, il y a du chemin à faire quand même.

  • Speaker #1

    Mais pour les femmes, je pense qu'on peut comprendre.

  • Speaker #0

    Oui, clairement. Parce que les hommes qui dansent...

  • Speaker #1

    Parce que non, mais Barack Obama il dansait et on était comme « Oh wow ! » Il est swag.

  • Speaker #0

    Exactement. Donald Trump qui danse comme un peu un robot dans ses trucs, il bouge les bras. Je sais pas si c'est de la danse, je veux pas insulter la...

  • Speaker #1

    danser. Je ne vais pas rentrer sur ce sujet. Pour moi, c'était comme road to hell.

  • Speaker #0

    Donc, oui, c'est ça. Eux autres, c'est comme, mais il faudrait qu'ils dansent bien, par exemple. C'est comme, moi, c'est ça. Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Non, mais je pense que de bouger son corps, c'est de se permettre d'être libre. Moi, je pense que c'est vraiment, c'est l'équation que je fais. C'est d'aller vers plus de liberté, puis aller vers plus de liberté, ça fait peur.

  • Speaker #0

    Le milieu de la danse aujourd'hui témoigne de son épuisement. Les artistes disent... des tabous de souffle. Et, bon, vous évoluez dans le milieu de la danse depuis un certain temps. Puis, à un moment donné, quand je le disais en introduction, avec Au Vertigo, vous êtes partis en tournée pendant à peu près dix ans. Et puis, Ginette Lorrain, elle engageait des artistes à la... l'année. Puis les gens pouvaient être engagés, employés par une compagnie. Je suis artiste de la danse à telle place, etc. Tandis qu'aujourd'hui, on sent que c'est beaucoup plus précaire, beaucoup plus de travail autonome, de travail interrompu. On ne sait pas de quoi le prochain mois sera. sera fait, à quel point ça s'est dégradé en quelques années ?

  • Speaker #1

    Bien, j'utiliserais le mot « fragmenté » . Moi, j'ai vraiment vu la fragmentation du travail, c'est-à-dire qu'effectivement, j'ai eu la chance d'être sur les dernières privilégiées, les dernières élues qui avaient la possibilité d'être dans des compagnies qui étaient du travail à temps plein. et Et il y a eu comme une espèce de renversement qui faisait qu'il y a eu de plus en plus de compagnies, de plus en plus de chorégraphes indépendants qui ne pouvaient pas soutenir leurs activités sur la totalité de l'année. Donc, ça a créé une forme de fragmentation où les danseurs se sont mis à danser pour plusieurs chorégraphes. Et là, c'est comme si le milieu a implosé. et ce qui rend les relations, les complicités, les loyautés de plus en plus difficiles à soutenir sur le long terme. Mais c'est aussi que les compagnies, une compagnie comme la mienne, par exemple, a des activités sur toute l'année, mais pas avec un seul spectacle. Quand j'étais avec Ouvertigo, par exemple, on créait pendant six mois un an puis on partait en tournée pendant deux ans. Et c'était, on travaillait sur un spectacle.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Maintenant, ce n'est pas ça. Cette année, je vais tourner quatre spectacles différents avec quatre distributions différentes. Je pense qu'on va en Europe, on va aux États-Unis, on va à Montréal, puis on va dans l'Ouest canadien. Sur plein de territoires différents aussi.

  • Speaker #0

    Quel impact ça a sur la vie ? d'artiste, cette fragmentation-là, cette aussi incertitude chronique-là ?

  • Speaker #1

    Hum-hum. Mais je pense que ce qui est positif, c'est que les... Pardon ! Les danseurs, les performants... ont la chance de travailler avec plusieurs personnes, donc il y a quelque chose qui est nourrissant là-dedans. Ce qui est négatif, l'impact, c'est que, par exemple, si j'ai besoin de partir en tournée, je ne sais jamais si les danseurs avec lesquels j'ai travaillé vont être disponibles. Donc on est toujours en train soit de remplacer des gens, soit de courir après les agendas ou d'annuler des possibilités de tournée parce qu'on ne réussit pas à recréer les... distribution, ça, ça coûte beaucoup de sous et ça coûte beaucoup de temps. Puis je pense que l'effet le plus grand sur les coupures dans le domaine des arts, c'est le temps. C'est-à-dire que ça nous prend tellement plus de temps de faire les choses qu'avant. Puis je ne sais pas si les gens le savent, mais au Conseil des arts et des lettres du Québec, nos budgets en fonctionnement. Donc, le budget de ma compagnie n'avait pas été... augmenté depuis 2017. Donc, entre 2017 et 2024, il s'est passé une foule de choses. Le monde a changé. Il y a eu une pandémie. Les prix, l'inflation, tout ça a changé. Mais nos budgets étaient les mêmes. Donc, la détérioration des conditions de travail s'en est suivie. Et ça, c'est très difficile à rattraper. On ne sera jamais capables de rattraper ce grand gap, finalement. Et j'ai l'impression qu'une beauté de notre milieu, c'est qu'il est riche, c'est qu'il y a plein de diversité, il y a plein de pluralité. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de gens qui veulent faire ce travail-là, mais avec des petits moyens. Donc, on va devoir se poser des grandes questions sur cet essoufflement-là, justement. Il est dû à quoi ? On ne peut pas continuer de vivre sur le respirateur artificiel.

  • Speaker #0

    Parce que le revenu médian des artistes au Québec... en ce moment, c'est à peu près 17-18 000 $ par année. Donc, on comprend bien qu'avec le prix actuel des loyers, l'épicerie qui a explosé, c'est pas viable, ça fonctionne pas. Et c'est un problème, ça doit être, du point de vue du travailleur autonome, qui sait jamais... L'année prochaine, qu'est-ce qu'il va faire ? Ça doit être vraiment très anxiogène pour les artistes.

  • Speaker #1

    En fait, c'est que les artistes, c'est des couteaux suisses. Ils sont capables, ils font plein d'affaires. La plupart d'entre eux et elles ont deux, trois jobs différents. Ils sont capables de faire un travail qui est plus clérical et un travail qui est plus, comment dire, artistique. Moi, ce que je vois aussi, c'est que les arts vivants pâtissent de ça, parce que quand je travaille avec des acteurs, par exemple, c'est sûr qu'ils doivent travailler à la télévision pour faire du théâtre. C'est comme s'ils financent un peu leur passion pour le théâtre en allant faire de la télévision ou des voix ou je ne sais pas. Donc, c'est sûr que... C'est le lieu de la passion, les arts vivants. C'est des gens qui se donnent à fond. C'est touchant de voir que ce niveau-là d'engagement et de passion existe. encore, puis après ça, je pense qu'il faut le questionner. On ne peut pas juste continuer de vivre sur le jus de bras et la sueur et le sang des gens.

  • Speaker #0

    C'est comme si les artistes étaient condamnés à survivre, mais là, il faudrait qu'on soit dans une société où ils peuvent vivre carrément.

  • Speaker #1

    Oui, puis aussi, comment dire, exister dans toute leur noblesse, parce que ça devient un peu, comment dire, oui, ça devient un peu gênant de dire que c'est ça le travail qu'on fait.

  • Speaker #0

    puis si on mettons qu'on voulait imaginer positivement une société d'artistes parce que c'est possible à quoi ça ressemblerait qu'est-ce qu'on pourrait faire pour vivre dans une société d'artistes ? Politiquement, socialement, ça ressemblerait à quoi ? Les obstacles à enlever sont où ?

  • Speaker #1

    Une société d'artistes où tout le monde est artiste,

  • Speaker #0

    je ne suis pas sûre que je voudrais vivre dans cette société. Tu vois, où être artiste et, disons, on peut vivre artiste. Oui,

  • Speaker #1

    c'est ça. Moi, je pense que ça prend des gens qui apprécient les arts et ça prend des gens qui veulent le pratiquer. Je pense pas qu'on veut vivre dans une société où tout... tout le monde est artiste, ce serait vraiment fatigant. En tout amour, là. Mais je pense que pour moi, la clé, c'est vraiment l'éducation. Puis c'est d'amener nos enfants au théâtre, d'amener nos enfants à la danse, d'amener nos enfants à la bibliothèque et au musée. Que ça devienne un incontournable, que ça devienne une nécessité. Puis les études le prouvent, mais dès que... Cette nourriture-là fait partie de la diète des enfants, mais en grandissant, ça devient une nécessité. Moi, j'ai joué à un jeu avec mon enfant. On a beaucoup voyagé avant la pandémie, puis je l'amenais toujours avec moi en tournée. Puis je lui disais, à partir d'un an, quand on va dans une nouvelle ville, il faut aller au musée. C'est comme, c'est obligatoire. Et jusqu'à ce qu'il ait 9 ans, je pense qu'il pensait que c'était vraiment une vraie obligation.

  • Speaker #0

    C'est qu'il y a une loi.

  • Speaker #1

    Oui, il y avait comme une loi.

  • Speaker #0

    Ils vont vérifier.

  • Speaker #1

    Exactement. Il était comme, OK, bien là, dans quel musée on va aller ? Je suis comme, bien, je ne sais pas. Fais tes recherches, on ira. Puis c'est tellement drôle de le voir, lui, exister avec cette, comment dire, cette nécessité-là dans la vie. On va dans une nouvelle ville, on n'a pas le choix. Donc, lequel musée on va voir ? Puis, bien, ça, c'est de la manipulation. et de passer à la maison. Bienveillante. Bienveillante, exactement. Mais je trouvais ça intéressant de lui avoir transmis ça, cette nécessité. Moi, je pense qu'il devrait y avoir un budget pour que tous les profs amènent les enfants, les classes au théâtre. Puis pas juste le théâtre pour enfants, mais le théâtre at large. C'est tellement intéressant d'aller au théâtre quand il y a une classe de cégep qui est là. C'est comme la façon de réagir, la façon de s'endormir. Quand c'est plate, on le sait tout de suite. C'est immédiat. Moi, je trouve que c'est le public le plus honnête. Donc, on devrait investir là. Pour moi, c'est la clé.

  • Speaker #0

    C'est comme si on a né un enfant ou un adolescent, un jeune adulte. voir des oeuvres d'art assister à un spectacle, c'est comme un peu lui offrir une occasion de se reconnecter avec lui-même, avec son ressenti, avec qui il est.

  • Speaker #1

    Puis il y a toute la médiation aussi qui vient avec voir une oeuvre, oui. Mais comment on la traduit dans nos vies ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Comment ça résonne ? Tu sais, c'est nos profs préférés, ceux qui sont capables de faire résonner la philosophie dans nos vies, ceux qui sont capables de faire résonner l'art dans nos vies, même ceux qui sont capables de nous expliquer les mathématiques puis qui nous donnent à voir... J'ai à tomber amoureux avec le ciel, les astres, la physique, la chimie, puis que ça devienne passionnant. Donc là, je mets beaucoup de pression sur les profs, mais je trouve que c'est tellement ces personnes-là qui nous... inspire et qui nous donne un sens. Parce qu'aller à l'école, s'il n'y a pas ce prof-là ou cette prof-là qui nous fait résonner avec le vivant, avec le monde, c'est plate. Donc, je pense que c'est vraiment ma clé.

  • Speaker #0

    Merci les profs qui font vibrer les jeunes. Oui !

  • Speaker #1

    Qui les inspirent,

  • Speaker #0

    qui leur donnent des étincelles dans les yeux.

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Bon, là, j'ai une question concrète à poser une question très concrète. dans le fond, moi, j'ai... Est-ce que vous auriez un conseil pour moi pour danser ?

  • Speaker #1

    Mais, Sol, vous avez donné la réponse pendant l'entrevue, c'est que vous m'avez dit que vous avez une fille. Oui. Quel âge a-t-elle ?

  • Speaker #0

    4 ans.

  • Speaker #1

    Ben, voilà ! Vous faites des enfants, c'est sûr que vous allez danser ! C'est évident, parce que c'est... tellement inspirant de voir un enfant développer ses capacités motrices. puis triper sur qu'est-ce que fait un bras, qu'est-ce que fait une jambe. On dit que les athlètes professionnels ne sont même pas capables de suivre ce qu'un enfant de deux ans fait dans une journée tellement c'est puissant, comment dire, la force motrice que ça prend pour se mouvoir dans le monde à cet âge-là. Donc oui, faites des enfants, puis suivez-les, vous êtes sûrs que vous allez danser.

  • Speaker #0

    Alors si je comprends bien, la prochaine fois que je suis dans une situation sociale où je suis un peu gêné je dois danser, il faut que je m'imagine être tout seul avec ma fille de 4 ans.

  • Speaker #1

    Ah oui, mais on dit danser aussi comme si personne nous regardait. Oui, c'est ça. Donc, je pense que le regard des autres, souvent, c'est ça qui tue, c'est ça qui nous emprisonne. Puis c'est pour ça que je parlais de liberté tout à l'heure. Donc, c'est comme rentrer en contact avec notre liberté. Ouais, s'en foutre, finalement.

  • Speaker #0

    Des fois même, je ne sais pas si je fais de la projection, mais dans des lieux où les gens dansent, les gens vont moins dans les discothèques. Même discothèques, j'ai l'impression que c'est comme vintage. On dirait que je sors des questions d'église.

  • Speaker #1

    Ça doit plus s'appeler comme ça. Allez, empoîte.

  • Speaker #0

    Allez, empoîte. C'est comme si... J'ai l'impression que des fois, les gens se demandent de comment... qu'est-ce que les gens pensent quand ils me regardent. Puis les gens se regardent beaucoup. Tu sais, même en penchant la tête vers le bas, pour voir si ça a-tu de l'allure. ce mouvement-là et tout ça. C'est comme, mon Dieu, mais quelque part, quelle tristesse pour qu'on se soumets à cet exercice. Mais ça pourrait être autre chose que ça.

  • Speaker #1

    C'est complètement d'autre chose que ça. La danse, c'est vraiment pluriel, mais une des choses que la danse contemporaine a faite, en fait c'est de se défaire des miroirs Donc, quand on fait du ballet, souvent, on fait du ballet devant un miroir puis on se regarde. En tout cas, quand j'étais petite, quand je faisais du ballet, c'était comme ça. Puis la danse contemporaine, elle, c'est d'effet de ce regard-là. Donc, c'est vraiment un regard qui est plongé à l'intérieur. Donc, les sensations de l'intérieur. Et ça, c'est complètement un autre monde. Quand on arrête de se regarder de l'extérieur puis qu'on plonge à l'intérieur. Quelque chose de plus introspectif. Ou alors, je dirais, toutes les danses de salon. de plus beau que le tango argentin, par exemple, d'être en contact avec le corps de quelqu'un qui, en tout cas, moi, qui me guide, quelqu'un qui me guide ou qu'on guide quelqu'un dans une espèce de... Oui, c'est ça, de symbiose. Il n'y a rien de plus beau, de plus sensuel et de plus profond que ça.

  • Speaker #0

    C'est fou, parce qu'on dirait que j'aurais... Moi, en fait, dans ma vie, ce qui m'a gêné, c'est comme... danser tout seul dans un bar avec plein de monde qui danse tout seul puis essayer d'avoir la même chose. C'est super anxiogène, mais en même temps, je me dis si j'avais eu des cours quand j'étais plus jeune ou maintenant, des cours de tango ou de danse sociale où on m'avait dit « garde danser, tu fais ça, pas là, c'est pas là, c'est pas là » , on dirait que ça m'aurait comme rassuré puis je me serais dit « ah ok, bien regarde, c'est fais je fais ça puis en même temps ben c'est pas est ce que c'est ça peut être autant une Une voix d'expression, comme un cadre comme ça, oui ?

  • Speaker #1

    Bien, il y a des danses très chorégraphiées, il y a des danses improvisées. Donc, si on parle, par exemple, de toute la culture urbaine hip-hop, c'est des danses d'improvisation. Donc, il y a un langage appris, puis après ça, la danse, ça devient comment chaque personne tisse. ces mouvements tissent l'expression de ces mouvements. Puis ça, c'est aussi, je ne sais pas si c'est un langage ou si c'est une intelligence suprême, mais c'est extraordinaire de voir les gens improviser. C'est complètement différent d'apprendre un pas après l'autre, c'est une chose, mais d'apprendre à se mouvoir dans le mouvement, c'est autre chose. C'est comme si apprendre un texte de théâtre par cœur ou connaître son sujet très bien. Ça dépend ce qu'on préfère. Je comprends.

  • Speaker #0

    Merci, merci, Mélanie. C'est vraiment inspirant puis ça donne envie de se battre pour les arts.

  • Speaker #1

    Merci. En tout cas, on lève notre poing puis on est là pour la nécessité de l'inutile.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Merci à tout le monde d'avoir été avec nous. Je tiens également à remercier Éric Azaria pour la musique. Anthony Castonguay-Harvey pour le montage, Madeleine Cloutier et Nadia Girard-Hedaya pour l'organisation et l'enregistrement. Et on ne lâche pas la patate, car l'espoir, c'est un choix.

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Description

Dans cet épisode de Paix, Amour et Nous Vaincrons, Sol Zanetti reçoit la chorégraphe, metteuse en scène et artiste engagée Mélanie Demers pour une discussion vibrante sur le pouvoir subversif de l’art.


💃 Pourquoi les corps en mouvement dérangent-ils autant ?
📉 Comment expliquer la précarité grandissante du milieu artistique ?
📣 Peut-on vraiment faire de l’art un acte politique et de résistance ?
💥 Et pourquoi tant de politiciennes se font humilier pour avoir dansé ?

De la nécessité de l’inutile à la fragmentation du travail artistique, en passant par le male gaze inversé, les sabres lasers et la tendresse d’un parent qui danse avec son enfant, cet épisode est une invitation à réfléchir… et à ressentir.


Une conversation libre, touchante, qui donne envie de lever le poing✊… ou de se laisser aller au rythme de la liberté.🕺💃


Une balado de Sol Zanetti, député de Jean-Lesage et porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de culture, de communications, d'éducation et d'enseignement supérieur à l'Assemblée nationale du Québec.

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Musique originale d'Erika Zarya
Montage: Antoni Castonguay-Harvey


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour tout le monde, bienvenue au deuxième épisode de Paix, Amour et nous vaincrons, la balado qui traite de sujets politiques, sociaux, culturels, dans une optique non déprimante pour cultiver l'espoir en politique québécoise, quand même utile. Mon nom c'est Sol Zanetti, je suis député à l'Assemblée nationale pour la circonscription de Jean Lesage, responsable des dossiers de culture, éducation, enseignement supérieur et bien d'autres. Et aujourd'hui... Mon invité sera Mélanie Demers, une chorégraphe, femme de théâtre, artiste québécoise que je vais vous présenter. On va aborder beaucoup de thèmes. Je l'avais invitée parce que la première fois que je l'ai entendue faire un discours, c'était à la grande mobilisation pour les arts en 2024 au printemps. Elle avait fait un discours qui m'avait tellement bouleversé par sa profondeur. et sa justesse, puis je me suis dit, ça y est, il faut que je l'invite dans ma balado. Alors, on va parler de beaucoup de choses aujourd'hui. Le rôle de l'art, le rôle de la danse et des corps dans la résistance à une oppression politique. Et je lui ai aussi posé la question, pourquoi les femmes politiques qui dansent créent scandale ? Alors, restez avec nous et allons-y avec paix, amour et une vraie croix. Bonjour Mélanie Demers.

  • Speaker #1

    Bonjour Sol.

  • Speaker #0

    Ça va bien ?

  • Speaker #1

    Ça va très bien.

  • Speaker #0

    Très bien, merci. Oui, bon, parfait. On a eu une grosse discussion sur le vous, le tu, puis on a dit vous. Allons-y avec ça.

  • Speaker #1

    Allez-y. Merci. Merci d'aider. Parfait.

  • Speaker #0

    Alors, Mélanie Demers, vous êtes artiste en danse, née à Montréal, grandie à Québec, entre, vous dites, le zoo et la prison d'Orsinville. Oui,

  • Speaker #1

    j'ai hésité à être très dramatique en racontant ma petite histoire.

  • Speaker #0

    Très poétique, très poétique. Et ensuite, vous êtes venue étudier à l'École de danse contemporaine de Montréal. Dans la vingtaine, ensuite, en sortant de l'école, vous avez été recrutée par la compagnie Au Vertigo de Juliette Lorrain, avec laquelle vous avez tourné pendant à peu près dix ans, avant de fonder en 2007 votre compagnie, la compagnie de danse Médée, avec laquelle vous avez créé plus d'une dizaine de spectacles. Et plus récemment, vous avez, en 2024, gagné le prix du CNA dans le cadre de la cérémonie de la gouverneure générale. Donc, un prix très prestigieux. Félicitations !

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Et vous touchez aussi à la danse, mais aussi au théâtre. Oui. Puis dans une perspective d'art total.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas comment on pourrait décrire mon travail, mais c'est vrai que la lentille par laquelle je crée, c'est par le corps. Puis le corps, c'est une arme totale. C'est-à-dire que mes spectacles ont évidemment de la danse, mais j'aime utiliser les mots, j'aime la poésie, j'aime les arts visuels. Évidemment, il y a beaucoup de musique aussi. puis je demande aux protagonistes, aux gens qui sont dans mes spectacles d'être très versatiles, même s'ils ne sont pas spécialistes. J'aime ça que les gens se mettent en danger en allant explorer des territoires inconnus d'eux et d'elles.

  • Speaker #0

    C'est quand même intéressant, un corps, une arme redoutable. Moi, je suis bon, je fais de la politique, on est beaucoup trop dans notre tête en général, toujours là-dedans, le débat, les arguments, etc. Puis, ça va me faire du bien justement qu'on parle de corps un peu aujourd'hui, vraiment. la raison pour laquelle je vous ai invité à cette balade. Lado, c'est qu'il y a en ce moment des problèmes dans le milieu des arts, Québec, tous les milieux des arts. Un effondrement de la capacité financière de plein d'organisations et de productions à arriver. Il y a des compagnies qui ferment, il y a des spectacles qui s'annulent, etc. Il y a les conditions d'yeux aussi des artistes qui sont de plus en plus précarisées. Il y a eu une grande manifestation au printemps 2024, le 16 mai à Montréal. et vous avez pris la parole à ce moment-là en faisant un discours qui est... Il m'a tellement inspiré. Je disais, « Ah, mon Dieu, ça n'a pas de bon sens. Il faut qu'on en parle davantage, qu'on creuse ça. » Puis dans ce discours-là, vous disiez à un moment donné, vous disiez qu'une société sans art est vouée à l'asphyxie. Qu'est-ce que ça veut dire ?

  • Speaker #1

    Je pense que c'est tout simplement l'idée de redonner à l'art ses lettres de noblesse. Oui, c'est vrai que ça nous divertit, mais ça nous aligne aussi. se réfléchir. Pour moi, quand on... Quand on pratique l'art, on peut se réfléchir, on peut se projeter, on peut s'observer. On doit faire preuve d'introspection et en même temps de projection. Donc, c'est un voyage à la fois à l'intérieur et à l'extérieur de soi. Donc, quand on pratique, c'est une arme pour mieux se connaître. Puis, quand on le consomme, j'aime mieux dire quand on le regarde, quand on l'expérimente, c'est une façon d'apprendre sur soi, en fait, en regardant. dans d'autres personnes vivre devant nous. Moi, je fais des arts vivants, je pratique les arts vivants, donc c'est le lieu de l'éphémère, c'est le lieu de la volatilité. Ça se passe là, ce soir, maintenant, et après, ça s'évapore, cette expérience-là d'être ensemble en communion et en communication. Pour moi, c'est aussi quelque chose qui est essentiel, fondamental à notre capacité de vivre en communauté.

  • Speaker #0

    Il y a le... comment dire ? Tu sais, on dit, j'entendais dire quand on consomme, mais là vous êtes dit, ah non, j'aime pas ça dire consomme. Des fois, on parle de l'industrie culturelle. On a comme un vocabulaire qui est emprunté. mettons, à l'idée de la production. Puis des fois, on regarde l'art, puis là, pas nous, là, mais des fois, l'art est regardé comme étant une affaire, ah, c'est plaisant, c'est agréable, ça divertit, mais en même temps, quand on dit qu'une société sans art est vouée à l'asphyxie, c'est presque faire de la question de l'art une question de vie ou de mort,

  • Speaker #1

    quelque part.

  • Speaker #0

    C'est de grande importance comme pour l'être.

  • Speaker #1

    Hum hum. Je pense que c'est impossible, une société sans arts, là. Puis c'est peut-être aussi pour ça que les gouvernements pensent parfois que c'est pas nécessaire de le subventionner, parce qu'il y aura toujours une petite pousse. Il y aura toujours une petite pousse qui va émerger du trottoir, là. Donc c'est comme si c'est tellement essentiel, c'est tellement nécessaire. On dirait qu'on le sait qu'il va y avoir quelqu'un qui va écrire quelque chose, qui va chanter une chanson, qui va se mettre à danser, qui va écrire une pièce de théâtre. Ce besoin-là est inné et nécessaire depuis la grotte de Lascaux jusqu'à maintenant. On a besoin d'un miroir. Puis l'art, c'est un miroir. C'est un miroir, ce n'est pas juste un miroir, c'est comme une loupe. C'est un pétri, c'est comme de nous regarder exister. Donc, on sait que ça va être toujours là. Je pense que les sociétés en santé ou les sociétés qui se voient, qui se projettent dans l'avenir investissent dans l'art parce que c'est un vocabulaire différent. C'est comme une façon de se décrire différemment. J'ai l'impression aussi que si on pense l'art en termes fonctionnels ou en termes comptables, on va toujours être perdant. C'est comme de comptabiliser quelque chose qui n'a pas de prix. On le sait, quand on se prive, pour moi, de l'eau, de l'air ou de l'art, c'est la même chose. on a besoin de ça pour pour exister.

  • Speaker #0

    Il y a souvent un discours très bienveillant sur la culture qui dit qu'il faut investir en culture parce qu'il y a des retombées économiques. Là même, on entendait la Chambre de commerce de Montréal faire un plaidoyer pour qu'il y ait un système de chômage adapté pour les travailleurs autonomes du milieu culturel. C'est comme si l'argument est de dire qu'il faut faire ça parce qu'il faut soutenir les arts parce que les arts amènent des retombées économiques. Mais c'est vrai, il faut le faire. Tant mieux si ça parle aux gens pour qui ça, c'est l'affaire la plus importante. au monde, mais en même temps, c'est beaucoup plus que ça à quelque part.

  • Speaker #1

    Ça, c'est un discours néolibéral puis les artistes, parfois, on est même coupable d'emprunter cet argumentaire-là pour convaincre les gens. Alors que moi, j'ai l'impression qu'on devrait célébrer de façon subversive la nécessité de l'inutile.

  • Speaker #0

    La nécessité de l'inutile,

  • Speaker #1

    j'adore ça. En fait, c'est important de penser qu'on doit avoir des espaces où l'inspiration peut advenir, où l'inattendu peut advenir, où le choc de deux idées inattendues. peut faire naître quelque chose sans penser de le monnayer nécessairement. Puis je pense qu'à partir de ce moment-là, on s'extrait d'une pensée qui est plus dans le capitalisme. C'est vraiment difficile de s'en extraire, mais je pense que c'est ça qui est subversif, de penser que des gens sains d'esprit, comme vous et moi, parfois, on s'en va dans... Sains d'esprit parfois, mais on s'en va dans un studio. Puis on essaie de créer quelque chose à partir de la matière première d'un corps en mouvement. C'est vraiment comme une idée extraordinaire de penser qu'à partir de rien, peut-être qu'un sens va émerger, peut-être que notre cœur va s'ouvrir, peut-être qu'une vérité va émerger. C'est difficile d'aller argumenter auprès des gouvernements quand on pense comme ça, mais on sait que c'est nécessaire. On sait que les musées sont nécessaires pour parler du passé, puis l'art vivant est nécessaire pour parler du présent. Mais je pense que je ne suis même pas d'accord avec moi. Les musées, ce n'est pas juste pour parler du passé, mais je veux dire, ça témoigne de quelque chose, parce que c'est quelque chose qui reste. Alors que les arts vivants, ça s'évanouit. Et ça, c'est important quand même de parler de la beauté de ce qui s'évanouit.

  • Speaker #0

    Dans votre discours aussi à la manifestation, vous disiez, je cite, « C'est peut-être à l'avantage du système que nous ne soyons pas connectés à nos corps. Tous les systèmes d'oppression commencent par l'oppression du corps, attachés à nos appareils intelligents, scotchés à nos écrans, fossilisés sur nos sofas, bientôt contrôlés par l'intelligence artificielle, artificiellement connectés, mais tétanisés par le contact réel. » Peut-être que c'est plus facile de contrôler une population qui n'a pas envie de danser. Alors, je propose la danse comme une arme contre l'oppression. C'est magnifique ! Mais c'est une question de l'oppression du corps. On est dans une période où il y a beaucoup d'oppression sur la Terre. Dans plein de régimes, l'oppression prend des formes particulièrement violentes envers les femmes, mais envers des populations entières à plein d'endroits dans le monde. Mais même là où on est dans des, mettons, démocraties, prendre le terme en gros guillemets, quand même, il y a des formes d'oppression qui oppressent le corps. Puis comment, qu'est-ce qui vous est, pourquoi vous avez dit ça ? En fait, qu'est-ce qui vous a inspiré ça, cette réflexion ?

  • Speaker #1

    Bien, moi, j'ai l'impression que, pour moi, d'avoir pratiqué la danse, ça m'a mis en contact avec... Avec moi-même, en fait, j'avais un professeur qui avait dit ça, danser, c'est découvrir la vie à travers l'intelligence du corps. Puis de développer cette intelligence-là, la capacité à sentir, à ressentir, c'est une forme d'intelligence qui n'est pas nécessairement mise de l'avant. Puis c'est ça que je voulais dire aussi, peut-être, avec cette idée-là que... Quand on n'est pas en contact avec soi-même, on n'est pas en contact avec une certaine forme d'empathie, on n'est pas en contact avec les autres non plus, et puis c'est plus facile de nous contrôler, c'est plus facile de nous faire avaler qu'on a besoin d'acheter ci, d'acheter ça. Je veux dire, ça, c'est peut-être, comment dire, les chaînes les plus faciles à mettre. Puis des fois, c'est même nous-mêmes qui nous mettons ces propres chaînes-là. Donc pour moi, le rôle de l'art, c'est des signes de nous défaire de nos chaînes invisibles. Puis la danse, peut-être que c'est l'art le plus évident pour ça, parce qu'essayer de se projeter dans nos corps en essayant de dépasser nos limites, en essayant aussi d'être proche d'une autre personne. Quand on pratique, la danse, c'est quelque chose. Puis quand on va la voir, bien... Ça paraît peut-être un peu ésotérique ce que je dis là, mais il y a un ressenti kinétique qui fait qu'on ressent les vagues d'énergie comme quand on va voir aussi une manifestation sportive. Ce qui fait qu'on est tellement dedans, c'est de ressentir le corps pulsé, de voir l'intelligence des stratégies pour se sortir d'une situation. c'est ça qui fait qu'ensemble, il y a des dizaines, des centaines, des dizaines de milliers de personnes parfois qui... qui vibrent à un événement. Mais c'est ça que ça fait l'art aussi.

  • Speaker #0

    C'est vrai. C'est vrai qu'il y a une parenté forte. Parce que quand on voit les sportifs, la vitesse à laquelle ça se déroule, ils ne pensent pas. Ils sont dans le corps.

  • Speaker #1

    Dans un instinct. Dans un instinct. Ils sont dans une intelligence extrême, entraînés extrêmement à leur sport, à la stratégie de leur sport. C'est la même chose quand on voit un danseur ou une danseuse de haut niveau ou quand on voit la virtuosité d'un acteur, par exemple, se transformer devant nos yeux, expérimenter la vie, puis qui nous donne accès aussi à des parties de nous que parfois on préfère laisser dans les tiroirs. C'est incroyable quand même de s'observer en empathie avec quelqu'un qui ne vit même pas un vrai drame. Alors qu'on regarde les nouvelles, puis parfois, ça ne nous fait rien de voir Gaza. C'est fou.

  • Speaker #0

    Comme si on s'habitue, puis c'est comme...

  • Speaker #1

    Bien, on s'habitue à ne pas ressentir. Puis ça, pour moi, c'est une chaîne. C'est les chaînes dont je parlais. Donc, c'est l'asphyxie dont je parlais. C'est l'oppression dont je parlais.

  • Speaker #0

    Des fois, j'ai l'impression que tout est orienté pour nous faire croire que ce qu'on veut finalement, c'est telle affaire ou telle autre. Puis que tout le monde veut nous faire croire qu'on veut telle chose. Puis des fois, ça marche. On achète plein d'affaires que clairement, on n'y aurait jamais pensé. Ce n'est pas venu de nous.

  • Speaker #1

    Il n'a pas besoin d'un air fryer.

  • Speaker #0

    Ça, c'est drôle de me reparler de tout ça aujourd'hui. mais moi c'est ça moi je suis comme je sais pas pourquoi sur quoi j'ai cliqué le mais depuis ça fait deux deux halloween que je suis ciblé par des publicités pour le vendre un sabre laser un vrai sabre laser avec le son important il est jusqu'à je résiste je résiste non c'est comme bon qu'est ce que je vais faire avec ce qui est bon en tout cas c'est la résistance mais bref j'en ai pas vraiment besoin c'est pas quelque chose qui m'est venu en étant connecté à mon corps puis effectivement il ya peu de moments dans la vie où est ce que on travaille, après ça on se déplace. on vient puis on fait les tâches domestiques, il y a peu de moments pour être connecté à soi, connecté au corps, puis l'art, on dirait, ça sert à créer un espace pour dire « ok, là on arrête tout, puis on se connecte à l'art » . même entre nous à quelque chose.

  • Speaker #1

    La danse est intéressante parce que moi, la danse que je pratique, c'est une danse contemporaine. On appelle ça une danse de concert, une danse savante, une danse de, comment dire, d'héritage. européens, mais dans nos vies, la danse, les danses traditionnelles, danser à son mariage, dans... J'ai beaucoup voyagé en Afrique, les danses rituelles... font partie de la vie. Puis c'est comme si on évacue ça de nos vies parce que c'est pas fonctionnel, ça sert à rien. Puis je pense que c'est là où est-ce que j'essaie de m'insurger puis de résister de façon subversive en disant, non, mais ces moments-là où est-ce qu'on est en contact, où est-ce qu'on est... ensemble, lorsqu'on se regarde les yeux dans les yeux. C'est ça, la vie, là. C'est ça qui reste à la fin, là. Parce que le sabre laser, il vaudra plus rien à la fin. Je suis super dramatique ! J'aime ça !

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup de... Ça dépend évidemment des cultures, tout ça. Mais mettons au Québec. Je veux dire, il y a... Moi, je suis un gars au Québec, puis je suis quand même gêné de danser. Sauf, mettons, après quelques...

  • Speaker #1

    Quelques verres.

  • Speaker #0

    Quelques verres. Là, c'est comme... Ça se peut que je danse. Mais sinon, je suis comme... Ou tout seul avec ma fille chez nous. Je n'ai pas peur du jugement. Alors, on danse beaucoup. Et c'est drôle. et puis j'ai... Dans le fond, c'est comme s'il y a quelque chose de l'humiliation qui est liée pour beaucoup de monde à la danse. Puis là, en préparant justement cette entrevue-là, on regardait, on se rappelait avec mes collègues au bureau de circonscription, on disait, il y a des politiciennes qui se font souvent contentes d'humilier parce qu'elles ont dansé, parce qu'elles sont faites prendre à danser. Puis là, on prenait l'exemple plus local, Dominique Anglade, ancienne chef du Parti libéral, juste avant le débat des chefs de la campagne. électorale 2022 à la com danser sur du black eyed peas puis là les jambes ce c'est résoudu comme pour l'humilier je sais pas quel point ça marchait mais l'intention était mais comme pour c'était mesquin il ya eu aussi ben alexandria ocasio cortez qui qui s'est fait faire sortir une vidéo du collège de du passé dans lequel elle dansait sur un toit puis c'est comme tu regardes cette vidéo c'est que c'est quoi le problème dans ce biais formidable mais Et ça a été utilisé comme pour l'huile noire. Puis, je pense peut-être la... la chose la plus violente qu'il y a eu, c'est la première, l'ancienne première ministre finlandaise en 2022, Sana Marin, qui, elle, bon, était dans un party, carrément, elle a dansé sur le party avec du monde, puis là, cette vidéo-là lui a valu de la violence publique importante, tu sais, pas comme les gens voulaient l'humilier. Puis je me dis, comment ça qu'on veut humilier des politiciennes qui dansent ? C'est quoi ce lien avec l'humiliation ? Bien, ça ouvre

  • Speaker #1

    Des portes à des choses vraiment... très intéressante, ça me fait penser à Martha Graham, la grande chorégraphe Martha Graham qui disait « La danse ne ment pas » . C'est-à-dire que la danse nous révèle telle que nous sommes, puis on dirait qu'on a peur de cette vérité-là. Après ça, je pense qu'on est très durs avec les femmes. Moi, j'ai envie de dire « Go girl » . C'est comme « Allez-y » . Moi, j'aurais comme tendance à me méfier plus des gens qui dansent pas. Tu sais, comme pris dans leur corps en pâté, ça me fait plus peur. Je comprends. Je comprends. Parce que c'est de la liberté. Ça veut dire qu'on a peur de la liberté et on a peur des femmes libres. C'est juste ça que ça veut dire pour moi. C'est vraiment comme... une façon de mettre une honte sur quelque chose qui devrait être célébré.

  • Speaker #0

    Aïe aïe aïe, il y a du chemin à faire quand même.

  • Speaker #1

    Mais pour les femmes, je pense qu'on peut comprendre.

  • Speaker #0

    Oui, clairement. Parce que les hommes qui dansent...

  • Speaker #1

    Parce que non, mais Barack Obama il dansait et on était comme « Oh wow ! » Il est swag.

  • Speaker #0

    Exactement. Donald Trump qui danse comme un peu un robot dans ses trucs, il bouge les bras. Je sais pas si c'est de la danse, je veux pas insulter la...

  • Speaker #1

    danser. Je ne vais pas rentrer sur ce sujet. Pour moi, c'était comme road to hell.

  • Speaker #0

    Donc, oui, c'est ça. Eux autres, c'est comme, mais il faudrait qu'ils dansent bien, par exemple. C'est comme, moi, c'est ça. Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Non, mais je pense que de bouger son corps, c'est de se permettre d'être libre. Moi, je pense que c'est vraiment, c'est l'équation que je fais. C'est d'aller vers plus de liberté, puis aller vers plus de liberté, ça fait peur.

  • Speaker #0

    Le milieu de la danse aujourd'hui témoigne de son épuisement. Les artistes disent... des tabous de souffle. Et, bon, vous évoluez dans le milieu de la danse depuis un certain temps. Puis, à un moment donné, quand je le disais en introduction, avec Au Vertigo, vous êtes partis en tournée pendant à peu près dix ans. Et puis, Ginette Lorrain, elle engageait des artistes à la... l'année. Puis les gens pouvaient être engagés, employés par une compagnie. Je suis artiste de la danse à telle place, etc. Tandis qu'aujourd'hui, on sent que c'est beaucoup plus précaire, beaucoup plus de travail autonome, de travail interrompu. On ne sait pas de quoi le prochain mois sera. sera fait, à quel point ça s'est dégradé en quelques années ?

  • Speaker #1

    Bien, j'utiliserais le mot « fragmenté » . Moi, j'ai vraiment vu la fragmentation du travail, c'est-à-dire qu'effectivement, j'ai eu la chance d'être sur les dernières privilégiées, les dernières élues qui avaient la possibilité d'être dans des compagnies qui étaient du travail à temps plein. et Et il y a eu comme une espèce de renversement qui faisait qu'il y a eu de plus en plus de compagnies, de plus en plus de chorégraphes indépendants qui ne pouvaient pas soutenir leurs activités sur la totalité de l'année. Donc, ça a créé une forme de fragmentation où les danseurs se sont mis à danser pour plusieurs chorégraphes. Et là, c'est comme si le milieu a implosé. et ce qui rend les relations, les complicités, les loyautés de plus en plus difficiles à soutenir sur le long terme. Mais c'est aussi que les compagnies, une compagnie comme la mienne, par exemple, a des activités sur toute l'année, mais pas avec un seul spectacle. Quand j'étais avec Ouvertigo, par exemple, on créait pendant six mois un an puis on partait en tournée pendant deux ans. Et c'était, on travaillait sur un spectacle.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Maintenant, ce n'est pas ça. Cette année, je vais tourner quatre spectacles différents avec quatre distributions différentes. Je pense qu'on va en Europe, on va aux États-Unis, on va à Montréal, puis on va dans l'Ouest canadien. Sur plein de territoires différents aussi.

  • Speaker #0

    Quel impact ça a sur la vie ? d'artiste, cette fragmentation-là, cette aussi incertitude chronique-là ?

  • Speaker #1

    Hum-hum. Mais je pense que ce qui est positif, c'est que les... Pardon ! Les danseurs, les performants... ont la chance de travailler avec plusieurs personnes, donc il y a quelque chose qui est nourrissant là-dedans. Ce qui est négatif, l'impact, c'est que, par exemple, si j'ai besoin de partir en tournée, je ne sais jamais si les danseurs avec lesquels j'ai travaillé vont être disponibles. Donc on est toujours en train soit de remplacer des gens, soit de courir après les agendas ou d'annuler des possibilités de tournée parce qu'on ne réussit pas à recréer les... distribution, ça, ça coûte beaucoup de sous et ça coûte beaucoup de temps. Puis je pense que l'effet le plus grand sur les coupures dans le domaine des arts, c'est le temps. C'est-à-dire que ça nous prend tellement plus de temps de faire les choses qu'avant. Puis je ne sais pas si les gens le savent, mais au Conseil des arts et des lettres du Québec, nos budgets en fonctionnement. Donc, le budget de ma compagnie n'avait pas été... augmenté depuis 2017. Donc, entre 2017 et 2024, il s'est passé une foule de choses. Le monde a changé. Il y a eu une pandémie. Les prix, l'inflation, tout ça a changé. Mais nos budgets étaient les mêmes. Donc, la détérioration des conditions de travail s'en est suivie. Et ça, c'est très difficile à rattraper. On ne sera jamais capables de rattraper ce grand gap, finalement. Et j'ai l'impression qu'une beauté de notre milieu, c'est qu'il est riche, c'est qu'il y a plein de diversité, il y a plein de pluralité. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de gens qui veulent faire ce travail-là, mais avec des petits moyens. Donc, on va devoir se poser des grandes questions sur cet essoufflement-là, justement. Il est dû à quoi ? On ne peut pas continuer de vivre sur le respirateur artificiel.

  • Speaker #0

    Parce que le revenu médian des artistes au Québec... en ce moment, c'est à peu près 17-18 000 $ par année. Donc, on comprend bien qu'avec le prix actuel des loyers, l'épicerie qui a explosé, c'est pas viable, ça fonctionne pas. Et c'est un problème, ça doit être, du point de vue du travailleur autonome, qui sait jamais... L'année prochaine, qu'est-ce qu'il va faire ? Ça doit être vraiment très anxiogène pour les artistes.

  • Speaker #1

    En fait, c'est que les artistes, c'est des couteaux suisses. Ils sont capables, ils font plein d'affaires. La plupart d'entre eux et elles ont deux, trois jobs différents. Ils sont capables de faire un travail qui est plus clérical et un travail qui est plus, comment dire, artistique. Moi, ce que je vois aussi, c'est que les arts vivants pâtissent de ça, parce que quand je travaille avec des acteurs, par exemple, c'est sûr qu'ils doivent travailler à la télévision pour faire du théâtre. C'est comme s'ils financent un peu leur passion pour le théâtre en allant faire de la télévision ou des voix ou je ne sais pas. Donc, c'est sûr que... C'est le lieu de la passion, les arts vivants. C'est des gens qui se donnent à fond. C'est touchant de voir que ce niveau-là d'engagement et de passion existe. encore, puis après ça, je pense qu'il faut le questionner. On ne peut pas juste continuer de vivre sur le jus de bras et la sueur et le sang des gens.

  • Speaker #0

    C'est comme si les artistes étaient condamnés à survivre, mais là, il faudrait qu'on soit dans une société où ils peuvent vivre carrément.

  • Speaker #1

    Oui, puis aussi, comment dire, exister dans toute leur noblesse, parce que ça devient un peu, comment dire, oui, ça devient un peu gênant de dire que c'est ça le travail qu'on fait.

  • Speaker #0

    puis si on mettons qu'on voulait imaginer positivement une société d'artistes parce que c'est possible à quoi ça ressemblerait qu'est-ce qu'on pourrait faire pour vivre dans une société d'artistes ? Politiquement, socialement, ça ressemblerait à quoi ? Les obstacles à enlever sont où ?

  • Speaker #1

    Une société d'artistes où tout le monde est artiste,

  • Speaker #0

    je ne suis pas sûre que je voudrais vivre dans cette société. Tu vois, où être artiste et, disons, on peut vivre artiste. Oui,

  • Speaker #1

    c'est ça. Moi, je pense que ça prend des gens qui apprécient les arts et ça prend des gens qui veulent le pratiquer. Je pense pas qu'on veut vivre dans une société où tout... tout le monde est artiste, ce serait vraiment fatigant. En tout amour, là. Mais je pense que pour moi, la clé, c'est vraiment l'éducation. Puis c'est d'amener nos enfants au théâtre, d'amener nos enfants à la danse, d'amener nos enfants à la bibliothèque et au musée. Que ça devienne un incontournable, que ça devienne une nécessité. Puis les études le prouvent, mais dès que... Cette nourriture-là fait partie de la diète des enfants, mais en grandissant, ça devient une nécessité. Moi, j'ai joué à un jeu avec mon enfant. On a beaucoup voyagé avant la pandémie, puis je l'amenais toujours avec moi en tournée. Puis je lui disais, à partir d'un an, quand on va dans une nouvelle ville, il faut aller au musée. C'est comme, c'est obligatoire. Et jusqu'à ce qu'il ait 9 ans, je pense qu'il pensait que c'était vraiment une vraie obligation.

  • Speaker #0

    C'est qu'il y a une loi.

  • Speaker #1

    Oui, il y avait comme une loi.

  • Speaker #0

    Ils vont vérifier.

  • Speaker #1

    Exactement. Il était comme, OK, bien là, dans quel musée on va aller ? Je suis comme, bien, je ne sais pas. Fais tes recherches, on ira. Puis c'est tellement drôle de le voir, lui, exister avec cette, comment dire, cette nécessité-là dans la vie. On va dans une nouvelle ville, on n'a pas le choix. Donc, lequel musée on va voir ? Puis, bien, ça, c'est de la manipulation. et de passer à la maison. Bienveillante. Bienveillante, exactement. Mais je trouvais ça intéressant de lui avoir transmis ça, cette nécessité. Moi, je pense qu'il devrait y avoir un budget pour que tous les profs amènent les enfants, les classes au théâtre. Puis pas juste le théâtre pour enfants, mais le théâtre at large. C'est tellement intéressant d'aller au théâtre quand il y a une classe de cégep qui est là. C'est comme la façon de réagir, la façon de s'endormir. Quand c'est plate, on le sait tout de suite. C'est immédiat. Moi, je trouve que c'est le public le plus honnête. Donc, on devrait investir là. Pour moi, c'est la clé.

  • Speaker #0

    C'est comme si on a né un enfant ou un adolescent, un jeune adulte. voir des oeuvres d'art assister à un spectacle, c'est comme un peu lui offrir une occasion de se reconnecter avec lui-même, avec son ressenti, avec qui il est.

  • Speaker #1

    Puis il y a toute la médiation aussi qui vient avec voir une oeuvre, oui. Mais comment on la traduit dans nos vies ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Comment ça résonne ? Tu sais, c'est nos profs préférés, ceux qui sont capables de faire résonner la philosophie dans nos vies, ceux qui sont capables de faire résonner l'art dans nos vies, même ceux qui sont capables de nous expliquer les mathématiques puis qui nous donnent à voir... J'ai à tomber amoureux avec le ciel, les astres, la physique, la chimie, puis que ça devienne passionnant. Donc là, je mets beaucoup de pression sur les profs, mais je trouve que c'est tellement ces personnes-là qui nous... inspire et qui nous donne un sens. Parce qu'aller à l'école, s'il n'y a pas ce prof-là ou cette prof-là qui nous fait résonner avec le vivant, avec le monde, c'est plate. Donc, je pense que c'est vraiment ma clé.

  • Speaker #0

    Merci les profs qui font vibrer les jeunes. Oui !

  • Speaker #1

    Qui les inspirent,

  • Speaker #0

    qui leur donnent des étincelles dans les yeux.

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Bon, là, j'ai une question concrète à poser une question très concrète. dans le fond, moi, j'ai... Est-ce que vous auriez un conseil pour moi pour danser ?

  • Speaker #1

    Mais, Sol, vous avez donné la réponse pendant l'entrevue, c'est que vous m'avez dit que vous avez une fille. Oui. Quel âge a-t-elle ?

  • Speaker #0

    4 ans.

  • Speaker #1

    Ben, voilà ! Vous faites des enfants, c'est sûr que vous allez danser ! C'est évident, parce que c'est... tellement inspirant de voir un enfant développer ses capacités motrices. puis triper sur qu'est-ce que fait un bras, qu'est-ce que fait une jambe. On dit que les athlètes professionnels ne sont même pas capables de suivre ce qu'un enfant de deux ans fait dans une journée tellement c'est puissant, comment dire, la force motrice que ça prend pour se mouvoir dans le monde à cet âge-là. Donc oui, faites des enfants, puis suivez-les, vous êtes sûrs que vous allez danser.

  • Speaker #0

    Alors si je comprends bien, la prochaine fois que je suis dans une situation sociale où je suis un peu gêné je dois danser, il faut que je m'imagine être tout seul avec ma fille de 4 ans.

  • Speaker #1

    Ah oui, mais on dit danser aussi comme si personne nous regardait. Oui, c'est ça. Donc, je pense que le regard des autres, souvent, c'est ça qui tue, c'est ça qui nous emprisonne. Puis c'est pour ça que je parlais de liberté tout à l'heure. Donc, c'est comme rentrer en contact avec notre liberté. Ouais, s'en foutre, finalement.

  • Speaker #0

    Des fois même, je ne sais pas si je fais de la projection, mais dans des lieux où les gens dansent, les gens vont moins dans les discothèques. Même discothèques, j'ai l'impression que c'est comme vintage. On dirait que je sors des questions d'église.

  • Speaker #1

    Ça doit plus s'appeler comme ça. Allez, empoîte.

  • Speaker #0

    Allez, empoîte. C'est comme si... J'ai l'impression que des fois, les gens se demandent de comment... qu'est-ce que les gens pensent quand ils me regardent. Puis les gens se regardent beaucoup. Tu sais, même en penchant la tête vers le bas, pour voir si ça a-tu de l'allure. ce mouvement-là et tout ça. C'est comme, mon Dieu, mais quelque part, quelle tristesse pour qu'on se soumets à cet exercice. Mais ça pourrait être autre chose que ça.

  • Speaker #1

    C'est complètement d'autre chose que ça. La danse, c'est vraiment pluriel, mais une des choses que la danse contemporaine a faite, en fait c'est de se défaire des miroirs Donc, quand on fait du ballet, souvent, on fait du ballet devant un miroir puis on se regarde. En tout cas, quand j'étais petite, quand je faisais du ballet, c'était comme ça. Puis la danse contemporaine, elle, c'est d'effet de ce regard-là. Donc, c'est vraiment un regard qui est plongé à l'intérieur. Donc, les sensations de l'intérieur. Et ça, c'est complètement un autre monde. Quand on arrête de se regarder de l'extérieur puis qu'on plonge à l'intérieur. Quelque chose de plus introspectif. Ou alors, je dirais, toutes les danses de salon. de plus beau que le tango argentin, par exemple, d'être en contact avec le corps de quelqu'un qui, en tout cas, moi, qui me guide, quelqu'un qui me guide ou qu'on guide quelqu'un dans une espèce de... Oui, c'est ça, de symbiose. Il n'y a rien de plus beau, de plus sensuel et de plus profond que ça.

  • Speaker #0

    C'est fou, parce qu'on dirait que j'aurais... Moi, en fait, dans ma vie, ce qui m'a gêné, c'est comme... danser tout seul dans un bar avec plein de monde qui danse tout seul puis essayer d'avoir la même chose. C'est super anxiogène, mais en même temps, je me dis si j'avais eu des cours quand j'étais plus jeune ou maintenant, des cours de tango ou de danse sociale où on m'avait dit « garde danser, tu fais ça, pas là, c'est pas là, c'est pas là » , on dirait que ça m'aurait comme rassuré puis je me serais dit « ah ok, bien regarde, c'est fais je fais ça puis en même temps ben c'est pas est ce que c'est ça peut être autant une Une voix d'expression, comme un cadre comme ça, oui ?

  • Speaker #1

    Bien, il y a des danses très chorégraphiées, il y a des danses improvisées. Donc, si on parle, par exemple, de toute la culture urbaine hip-hop, c'est des danses d'improvisation. Donc, il y a un langage appris, puis après ça, la danse, ça devient comment chaque personne tisse. ces mouvements tissent l'expression de ces mouvements. Puis ça, c'est aussi, je ne sais pas si c'est un langage ou si c'est une intelligence suprême, mais c'est extraordinaire de voir les gens improviser. C'est complètement différent d'apprendre un pas après l'autre, c'est une chose, mais d'apprendre à se mouvoir dans le mouvement, c'est autre chose. C'est comme si apprendre un texte de théâtre par cœur ou connaître son sujet très bien. Ça dépend ce qu'on préfère. Je comprends.

  • Speaker #0

    Merci, merci, Mélanie. C'est vraiment inspirant puis ça donne envie de se battre pour les arts.

  • Speaker #1

    Merci. En tout cas, on lève notre poing puis on est là pour la nécessité de l'inutile.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Merci à tout le monde d'avoir été avec nous. Je tiens également à remercier Éric Azaria pour la musique. Anthony Castonguay-Harvey pour le montage, Madeleine Cloutier et Nadia Girard-Hedaya pour l'organisation et l'enregistrement. Et on ne lâche pas la patate, car l'espoir, c'est un choix.

Description

Dans cet épisode de Paix, Amour et Nous Vaincrons, Sol Zanetti reçoit la chorégraphe, metteuse en scène et artiste engagée Mélanie Demers pour une discussion vibrante sur le pouvoir subversif de l’art.


💃 Pourquoi les corps en mouvement dérangent-ils autant ?
📉 Comment expliquer la précarité grandissante du milieu artistique ?
📣 Peut-on vraiment faire de l’art un acte politique et de résistance ?
💥 Et pourquoi tant de politiciennes se font humilier pour avoir dansé ?

De la nécessité de l’inutile à la fragmentation du travail artistique, en passant par le male gaze inversé, les sabres lasers et la tendresse d’un parent qui danse avec son enfant, cet épisode est une invitation à réfléchir… et à ressentir.


Une conversation libre, touchante, qui donne envie de lever le poing✊… ou de se laisser aller au rythme de la liberté.🕺💃


Une balado de Sol Zanetti, député de Jean-Lesage et porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de culture, de communications, d'éducation et d'enseignement supérieur à l'Assemblée nationale du Québec.

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Musique originale d'Erika Zarya
Montage: Antoni Castonguay-Harvey


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour tout le monde, bienvenue au deuxième épisode de Paix, Amour et nous vaincrons, la balado qui traite de sujets politiques, sociaux, culturels, dans une optique non déprimante pour cultiver l'espoir en politique québécoise, quand même utile. Mon nom c'est Sol Zanetti, je suis député à l'Assemblée nationale pour la circonscription de Jean Lesage, responsable des dossiers de culture, éducation, enseignement supérieur et bien d'autres. Et aujourd'hui... Mon invité sera Mélanie Demers, une chorégraphe, femme de théâtre, artiste québécoise que je vais vous présenter. On va aborder beaucoup de thèmes. Je l'avais invitée parce que la première fois que je l'ai entendue faire un discours, c'était à la grande mobilisation pour les arts en 2024 au printemps. Elle avait fait un discours qui m'avait tellement bouleversé par sa profondeur. et sa justesse, puis je me suis dit, ça y est, il faut que je l'invite dans ma balado. Alors, on va parler de beaucoup de choses aujourd'hui. Le rôle de l'art, le rôle de la danse et des corps dans la résistance à une oppression politique. Et je lui ai aussi posé la question, pourquoi les femmes politiques qui dansent créent scandale ? Alors, restez avec nous et allons-y avec paix, amour et une vraie croix. Bonjour Mélanie Demers.

  • Speaker #1

    Bonjour Sol.

  • Speaker #0

    Ça va bien ?

  • Speaker #1

    Ça va très bien.

  • Speaker #0

    Très bien, merci. Oui, bon, parfait. On a eu une grosse discussion sur le vous, le tu, puis on a dit vous. Allons-y avec ça.

  • Speaker #1

    Allez-y. Merci. Merci d'aider. Parfait.

  • Speaker #0

    Alors, Mélanie Demers, vous êtes artiste en danse, née à Montréal, grandie à Québec, entre, vous dites, le zoo et la prison d'Orsinville. Oui,

  • Speaker #1

    j'ai hésité à être très dramatique en racontant ma petite histoire.

  • Speaker #0

    Très poétique, très poétique. Et ensuite, vous êtes venue étudier à l'École de danse contemporaine de Montréal. Dans la vingtaine, ensuite, en sortant de l'école, vous avez été recrutée par la compagnie Au Vertigo de Juliette Lorrain, avec laquelle vous avez tourné pendant à peu près dix ans, avant de fonder en 2007 votre compagnie, la compagnie de danse Médée, avec laquelle vous avez créé plus d'une dizaine de spectacles. Et plus récemment, vous avez, en 2024, gagné le prix du CNA dans le cadre de la cérémonie de la gouverneure générale. Donc, un prix très prestigieux. Félicitations !

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Et vous touchez aussi à la danse, mais aussi au théâtre. Oui. Puis dans une perspective d'art total.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas comment on pourrait décrire mon travail, mais c'est vrai que la lentille par laquelle je crée, c'est par le corps. Puis le corps, c'est une arme totale. C'est-à-dire que mes spectacles ont évidemment de la danse, mais j'aime utiliser les mots, j'aime la poésie, j'aime les arts visuels. Évidemment, il y a beaucoup de musique aussi. puis je demande aux protagonistes, aux gens qui sont dans mes spectacles d'être très versatiles, même s'ils ne sont pas spécialistes. J'aime ça que les gens se mettent en danger en allant explorer des territoires inconnus d'eux et d'elles.

  • Speaker #0

    C'est quand même intéressant, un corps, une arme redoutable. Moi, je suis bon, je fais de la politique, on est beaucoup trop dans notre tête en général, toujours là-dedans, le débat, les arguments, etc. Puis, ça va me faire du bien justement qu'on parle de corps un peu aujourd'hui, vraiment. la raison pour laquelle je vous ai invité à cette balade. Lado, c'est qu'il y a en ce moment des problèmes dans le milieu des arts, Québec, tous les milieux des arts. Un effondrement de la capacité financière de plein d'organisations et de productions à arriver. Il y a des compagnies qui ferment, il y a des spectacles qui s'annulent, etc. Il y a les conditions d'yeux aussi des artistes qui sont de plus en plus précarisées. Il y a eu une grande manifestation au printemps 2024, le 16 mai à Montréal. et vous avez pris la parole à ce moment-là en faisant un discours qui est... Il m'a tellement inspiré. Je disais, « Ah, mon Dieu, ça n'a pas de bon sens. Il faut qu'on en parle davantage, qu'on creuse ça. » Puis dans ce discours-là, vous disiez à un moment donné, vous disiez qu'une société sans art est vouée à l'asphyxie. Qu'est-ce que ça veut dire ?

  • Speaker #1

    Je pense que c'est tout simplement l'idée de redonner à l'art ses lettres de noblesse. Oui, c'est vrai que ça nous divertit, mais ça nous aligne aussi. se réfléchir. Pour moi, quand on... Quand on pratique l'art, on peut se réfléchir, on peut se projeter, on peut s'observer. On doit faire preuve d'introspection et en même temps de projection. Donc, c'est un voyage à la fois à l'intérieur et à l'extérieur de soi. Donc, quand on pratique, c'est une arme pour mieux se connaître. Puis, quand on le consomme, j'aime mieux dire quand on le regarde, quand on l'expérimente, c'est une façon d'apprendre sur soi, en fait, en regardant. dans d'autres personnes vivre devant nous. Moi, je fais des arts vivants, je pratique les arts vivants, donc c'est le lieu de l'éphémère, c'est le lieu de la volatilité. Ça se passe là, ce soir, maintenant, et après, ça s'évapore, cette expérience-là d'être ensemble en communion et en communication. Pour moi, c'est aussi quelque chose qui est essentiel, fondamental à notre capacité de vivre en communauté.

  • Speaker #0

    Il y a le... comment dire ? Tu sais, on dit, j'entendais dire quand on consomme, mais là vous êtes dit, ah non, j'aime pas ça dire consomme. Des fois, on parle de l'industrie culturelle. On a comme un vocabulaire qui est emprunté. mettons, à l'idée de la production. Puis des fois, on regarde l'art, puis là, pas nous, là, mais des fois, l'art est regardé comme étant une affaire, ah, c'est plaisant, c'est agréable, ça divertit, mais en même temps, quand on dit qu'une société sans art est vouée à l'asphyxie, c'est presque faire de la question de l'art une question de vie ou de mort,

  • Speaker #1

    quelque part.

  • Speaker #0

    C'est de grande importance comme pour l'être.

  • Speaker #1

    Hum hum. Je pense que c'est impossible, une société sans arts, là. Puis c'est peut-être aussi pour ça que les gouvernements pensent parfois que c'est pas nécessaire de le subventionner, parce qu'il y aura toujours une petite pousse. Il y aura toujours une petite pousse qui va émerger du trottoir, là. Donc c'est comme si c'est tellement essentiel, c'est tellement nécessaire. On dirait qu'on le sait qu'il va y avoir quelqu'un qui va écrire quelque chose, qui va chanter une chanson, qui va se mettre à danser, qui va écrire une pièce de théâtre. Ce besoin-là est inné et nécessaire depuis la grotte de Lascaux jusqu'à maintenant. On a besoin d'un miroir. Puis l'art, c'est un miroir. C'est un miroir, ce n'est pas juste un miroir, c'est comme une loupe. C'est un pétri, c'est comme de nous regarder exister. Donc, on sait que ça va être toujours là. Je pense que les sociétés en santé ou les sociétés qui se voient, qui se projettent dans l'avenir investissent dans l'art parce que c'est un vocabulaire différent. C'est comme une façon de se décrire différemment. J'ai l'impression aussi que si on pense l'art en termes fonctionnels ou en termes comptables, on va toujours être perdant. C'est comme de comptabiliser quelque chose qui n'a pas de prix. On le sait, quand on se prive, pour moi, de l'eau, de l'air ou de l'art, c'est la même chose. on a besoin de ça pour pour exister.

  • Speaker #0

    Il y a souvent un discours très bienveillant sur la culture qui dit qu'il faut investir en culture parce qu'il y a des retombées économiques. Là même, on entendait la Chambre de commerce de Montréal faire un plaidoyer pour qu'il y ait un système de chômage adapté pour les travailleurs autonomes du milieu culturel. C'est comme si l'argument est de dire qu'il faut faire ça parce qu'il faut soutenir les arts parce que les arts amènent des retombées économiques. Mais c'est vrai, il faut le faire. Tant mieux si ça parle aux gens pour qui ça, c'est l'affaire la plus importante. au monde, mais en même temps, c'est beaucoup plus que ça à quelque part.

  • Speaker #1

    Ça, c'est un discours néolibéral puis les artistes, parfois, on est même coupable d'emprunter cet argumentaire-là pour convaincre les gens. Alors que moi, j'ai l'impression qu'on devrait célébrer de façon subversive la nécessité de l'inutile.

  • Speaker #0

    La nécessité de l'inutile,

  • Speaker #1

    j'adore ça. En fait, c'est important de penser qu'on doit avoir des espaces où l'inspiration peut advenir, où l'inattendu peut advenir, où le choc de deux idées inattendues. peut faire naître quelque chose sans penser de le monnayer nécessairement. Puis je pense qu'à partir de ce moment-là, on s'extrait d'une pensée qui est plus dans le capitalisme. C'est vraiment difficile de s'en extraire, mais je pense que c'est ça qui est subversif, de penser que des gens sains d'esprit, comme vous et moi, parfois, on s'en va dans... Sains d'esprit parfois, mais on s'en va dans un studio. Puis on essaie de créer quelque chose à partir de la matière première d'un corps en mouvement. C'est vraiment comme une idée extraordinaire de penser qu'à partir de rien, peut-être qu'un sens va émerger, peut-être que notre cœur va s'ouvrir, peut-être qu'une vérité va émerger. C'est difficile d'aller argumenter auprès des gouvernements quand on pense comme ça, mais on sait que c'est nécessaire. On sait que les musées sont nécessaires pour parler du passé, puis l'art vivant est nécessaire pour parler du présent. Mais je pense que je ne suis même pas d'accord avec moi. Les musées, ce n'est pas juste pour parler du passé, mais je veux dire, ça témoigne de quelque chose, parce que c'est quelque chose qui reste. Alors que les arts vivants, ça s'évanouit. Et ça, c'est important quand même de parler de la beauté de ce qui s'évanouit.

  • Speaker #0

    Dans votre discours aussi à la manifestation, vous disiez, je cite, « C'est peut-être à l'avantage du système que nous ne soyons pas connectés à nos corps. Tous les systèmes d'oppression commencent par l'oppression du corps, attachés à nos appareils intelligents, scotchés à nos écrans, fossilisés sur nos sofas, bientôt contrôlés par l'intelligence artificielle, artificiellement connectés, mais tétanisés par le contact réel. » Peut-être que c'est plus facile de contrôler une population qui n'a pas envie de danser. Alors, je propose la danse comme une arme contre l'oppression. C'est magnifique ! Mais c'est une question de l'oppression du corps. On est dans une période où il y a beaucoup d'oppression sur la Terre. Dans plein de régimes, l'oppression prend des formes particulièrement violentes envers les femmes, mais envers des populations entières à plein d'endroits dans le monde. Mais même là où on est dans des, mettons, démocraties, prendre le terme en gros guillemets, quand même, il y a des formes d'oppression qui oppressent le corps. Puis comment, qu'est-ce qui vous est, pourquoi vous avez dit ça ? En fait, qu'est-ce qui vous a inspiré ça, cette réflexion ?

  • Speaker #1

    Bien, moi, j'ai l'impression que, pour moi, d'avoir pratiqué la danse, ça m'a mis en contact avec... Avec moi-même, en fait, j'avais un professeur qui avait dit ça, danser, c'est découvrir la vie à travers l'intelligence du corps. Puis de développer cette intelligence-là, la capacité à sentir, à ressentir, c'est une forme d'intelligence qui n'est pas nécessairement mise de l'avant. Puis c'est ça que je voulais dire aussi, peut-être, avec cette idée-là que... Quand on n'est pas en contact avec soi-même, on n'est pas en contact avec une certaine forme d'empathie, on n'est pas en contact avec les autres non plus, et puis c'est plus facile de nous contrôler, c'est plus facile de nous faire avaler qu'on a besoin d'acheter ci, d'acheter ça. Je veux dire, ça, c'est peut-être, comment dire, les chaînes les plus faciles à mettre. Puis des fois, c'est même nous-mêmes qui nous mettons ces propres chaînes-là. Donc pour moi, le rôle de l'art, c'est des signes de nous défaire de nos chaînes invisibles. Puis la danse, peut-être que c'est l'art le plus évident pour ça, parce qu'essayer de se projeter dans nos corps en essayant de dépasser nos limites, en essayant aussi d'être proche d'une autre personne. Quand on pratique, la danse, c'est quelque chose. Puis quand on va la voir, bien... Ça paraît peut-être un peu ésotérique ce que je dis là, mais il y a un ressenti kinétique qui fait qu'on ressent les vagues d'énergie comme quand on va voir aussi une manifestation sportive. Ce qui fait qu'on est tellement dedans, c'est de ressentir le corps pulsé, de voir l'intelligence des stratégies pour se sortir d'une situation. c'est ça qui fait qu'ensemble, il y a des dizaines, des centaines, des dizaines de milliers de personnes parfois qui... qui vibrent à un événement. Mais c'est ça que ça fait l'art aussi.

  • Speaker #0

    C'est vrai. C'est vrai qu'il y a une parenté forte. Parce que quand on voit les sportifs, la vitesse à laquelle ça se déroule, ils ne pensent pas. Ils sont dans le corps.

  • Speaker #1

    Dans un instinct. Dans un instinct. Ils sont dans une intelligence extrême, entraînés extrêmement à leur sport, à la stratégie de leur sport. C'est la même chose quand on voit un danseur ou une danseuse de haut niveau ou quand on voit la virtuosité d'un acteur, par exemple, se transformer devant nos yeux, expérimenter la vie, puis qui nous donne accès aussi à des parties de nous que parfois on préfère laisser dans les tiroirs. C'est incroyable quand même de s'observer en empathie avec quelqu'un qui ne vit même pas un vrai drame. Alors qu'on regarde les nouvelles, puis parfois, ça ne nous fait rien de voir Gaza. C'est fou.

  • Speaker #0

    Comme si on s'habitue, puis c'est comme...

  • Speaker #1

    Bien, on s'habitue à ne pas ressentir. Puis ça, pour moi, c'est une chaîne. C'est les chaînes dont je parlais. Donc, c'est l'asphyxie dont je parlais. C'est l'oppression dont je parlais.

  • Speaker #0

    Des fois, j'ai l'impression que tout est orienté pour nous faire croire que ce qu'on veut finalement, c'est telle affaire ou telle autre. Puis que tout le monde veut nous faire croire qu'on veut telle chose. Puis des fois, ça marche. On achète plein d'affaires que clairement, on n'y aurait jamais pensé. Ce n'est pas venu de nous.

  • Speaker #1

    Il n'a pas besoin d'un air fryer.

  • Speaker #0

    Ça, c'est drôle de me reparler de tout ça aujourd'hui. mais moi c'est ça moi je suis comme je sais pas pourquoi sur quoi j'ai cliqué le mais depuis ça fait deux deux halloween que je suis ciblé par des publicités pour le vendre un sabre laser un vrai sabre laser avec le son important il est jusqu'à je résiste je résiste non c'est comme bon qu'est ce que je vais faire avec ce qui est bon en tout cas c'est la résistance mais bref j'en ai pas vraiment besoin c'est pas quelque chose qui m'est venu en étant connecté à mon corps puis effectivement il ya peu de moments dans la vie où est ce que on travaille, après ça on se déplace. on vient puis on fait les tâches domestiques, il y a peu de moments pour être connecté à soi, connecté au corps, puis l'art, on dirait, ça sert à créer un espace pour dire « ok, là on arrête tout, puis on se connecte à l'art » . même entre nous à quelque chose.

  • Speaker #1

    La danse est intéressante parce que moi, la danse que je pratique, c'est une danse contemporaine. On appelle ça une danse de concert, une danse savante, une danse de, comment dire, d'héritage. européens, mais dans nos vies, la danse, les danses traditionnelles, danser à son mariage, dans... J'ai beaucoup voyagé en Afrique, les danses rituelles... font partie de la vie. Puis c'est comme si on évacue ça de nos vies parce que c'est pas fonctionnel, ça sert à rien. Puis je pense que c'est là où est-ce que j'essaie de m'insurger puis de résister de façon subversive en disant, non, mais ces moments-là où est-ce qu'on est en contact, où est-ce qu'on est... ensemble, lorsqu'on se regarde les yeux dans les yeux. C'est ça, la vie, là. C'est ça qui reste à la fin, là. Parce que le sabre laser, il vaudra plus rien à la fin. Je suis super dramatique ! J'aime ça !

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup de... Ça dépend évidemment des cultures, tout ça. Mais mettons au Québec. Je veux dire, il y a... Moi, je suis un gars au Québec, puis je suis quand même gêné de danser. Sauf, mettons, après quelques...

  • Speaker #1

    Quelques verres.

  • Speaker #0

    Quelques verres. Là, c'est comme... Ça se peut que je danse. Mais sinon, je suis comme... Ou tout seul avec ma fille chez nous. Je n'ai pas peur du jugement. Alors, on danse beaucoup. Et c'est drôle. et puis j'ai... Dans le fond, c'est comme s'il y a quelque chose de l'humiliation qui est liée pour beaucoup de monde à la danse. Puis là, en préparant justement cette entrevue-là, on regardait, on se rappelait avec mes collègues au bureau de circonscription, on disait, il y a des politiciennes qui se font souvent contentes d'humilier parce qu'elles ont dansé, parce qu'elles sont faites prendre à danser. Puis là, on prenait l'exemple plus local, Dominique Anglade, ancienne chef du Parti libéral, juste avant le débat des chefs de la campagne. électorale 2022 à la com danser sur du black eyed peas puis là les jambes ce c'est résoudu comme pour l'humilier je sais pas quel point ça marchait mais l'intention était mais comme pour c'était mesquin il ya eu aussi ben alexandria ocasio cortez qui qui s'est fait faire sortir une vidéo du collège de du passé dans lequel elle dansait sur un toit puis c'est comme tu regardes cette vidéo c'est que c'est quoi le problème dans ce biais formidable mais Et ça a été utilisé comme pour l'huile noire. Puis, je pense peut-être la... la chose la plus violente qu'il y a eu, c'est la première, l'ancienne première ministre finlandaise en 2022, Sana Marin, qui, elle, bon, était dans un party, carrément, elle a dansé sur le party avec du monde, puis là, cette vidéo-là lui a valu de la violence publique importante, tu sais, pas comme les gens voulaient l'humilier. Puis je me dis, comment ça qu'on veut humilier des politiciennes qui dansent ? C'est quoi ce lien avec l'humiliation ? Bien, ça ouvre

  • Speaker #1

    Des portes à des choses vraiment... très intéressante, ça me fait penser à Martha Graham, la grande chorégraphe Martha Graham qui disait « La danse ne ment pas » . C'est-à-dire que la danse nous révèle telle que nous sommes, puis on dirait qu'on a peur de cette vérité-là. Après ça, je pense qu'on est très durs avec les femmes. Moi, j'ai envie de dire « Go girl » . C'est comme « Allez-y » . Moi, j'aurais comme tendance à me méfier plus des gens qui dansent pas. Tu sais, comme pris dans leur corps en pâté, ça me fait plus peur. Je comprends. Je comprends. Parce que c'est de la liberté. Ça veut dire qu'on a peur de la liberté et on a peur des femmes libres. C'est juste ça que ça veut dire pour moi. C'est vraiment comme... une façon de mettre une honte sur quelque chose qui devrait être célébré.

  • Speaker #0

    Aïe aïe aïe, il y a du chemin à faire quand même.

  • Speaker #1

    Mais pour les femmes, je pense qu'on peut comprendre.

  • Speaker #0

    Oui, clairement. Parce que les hommes qui dansent...

  • Speaker #1

    Parce que non, mais Barack Obama il dansait et on était comme « Oh wow ! » Il est swag.

  • Speaker #0

    Exactement. Donald Trump qui danse comme un peu un robot dans ses trucs, il bouge les bras. Je sais pas si c'est de la danse, je veux pas insulter la...

  • Speaker #1

    danser. Je ne vais pas rentrer sur ce sujet. Pour moi, c'était comme road to hell.

  • Speaker #0

    Donc, oui, c'est ça. Eux autres, c'est comme, mais il faudrait qu'ils dansent bien, par exemple. C'est comme, moi, c'est ça. Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Non, mais je pense que de bouger son corps, c'est de se permettre d'être libre. Moi, je pense que c'est vraiment, c'est l'équation que je fais. C'est d'aller vers plus de liberté, puis aller vers plus de liberté, ça fait peur.

  • Speaker #0

    Le milieu de la danse aujourd'hui témoigne de son épuisement. Les artistes disent... des tabous de souffle. Et, bon, vous évoluez dans le milieu de la danse depuis un certain temps. Puis, à un moment donné, quand je le disais en introduction, avec Au Vertigo, vous êtes partis en tournée pendant à peu près dix ans. Et puis, Ginette Lorrain, elle engageait des artistes à la... l'année. Puis les gens pouvaient être engagés, employés par une compagnie. Je suis artiste de la danse à telle place, etc. Tandis qu'aujourd'hui, on sent que c'est beaucoup plus précaire, beaucoup plus de travail autonome, de travail interrompu. On ne sait pas de quoi le prochain mois sera. sera fait, à quel point ça s'est dégradé en quelques années ?

  • Speaker #1

    Bien, j'utiliserais le mot « fragmenté » . Moi, j'ai vraiment vu la fragmentation du travail, c'est-à-dire qu'effectivement, j'ai eu la chance d'être sur les dernières privilégiées, les dernières élues qui avaient la possibilité d'être dans des compagnies qui étaient du travail à temps plein. et Et il y a eu comme une espèce de renversement qui faisait qu'il y a eu de plus en plus de compagnies, de plus en plus de chorégraphes indépendants qui ne pouvaient pas soutenir leurs activités sur la totalité de l'année. Donc, ça a créé une forme de fragmentation où les danseurs se sont mis à danser pour plusieurs chorégraphes. Et là, c'est comme si le milieu a implosé. et ce qui rend les relations, les complicités, les loyautés de plus en plus difficiles à soutenir sur le long terme. Mais c'est aussi que les compagnies, une compagnie comme la mienne, par exemple, a des activités sur toute l'année, mais pas avec un seul spectacle. Quand j'étais avec Ouvertigo, par exemple, on créait pendant six mois un an puis on partait en tournée pendant deux ans. Et c'était, on travaillait sur un spectacle.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Maintenant, ce n'est pas ça. Cette année, je vais tourner quatre spectacles différents avec quatre distributions différentes. Je pense qu'on va en Europe, on va aux États-Unis, on va à Montréal, puis on va dans l'Ouest canadien. Sur plein de territoires différents aussi.

  • Speaker #0

    Quel impact ça a sur la vie ? d'artiste, cette fragmentation-là, cette aussi incertitude chronique-là ?

  • Speaker #1

    Hum-hum. Mais je pense que ce qui est positif, c'est que les... Pardon ! Les danseurs, les performants... ont la chance de travailler avec plusieurs personnes, donc il y a quelque chose qui est nourrissant là-dedans. Ce qui est négatif, l'impact, c'est que, par exemple, si j'ai besoin de partir en tournée, je ne sais jamais si les danseurs avec lesquels j'ai travaillé vont être disponibles. Donc on est toujours en train soit de remplacer des gens, soit de courir après les agendas ou d'annuler des possibilités de tournée parce qu'on ne réussit pas à recréer les... distribution, ça, ça coûte beaucoup de sous et ça coûte beaucoup de temps. Puis je pense que l'effet le plus grand sur les coupures dans le domaine des arts, c'est le temps. C'est-à-dire que ça nous prend tellement plus de temps de faire les choses qu'avant. Puis je ne sais pas si les gens le savent, mais au Conseil des arts et des lettres du Québec, nos budgets en fonctionnement. Donc, le budget de ma compagnie n'avait pas été... augmenté depuis 2017. Donc, entre 2017 et 2024, il s'est passé une foule de choses. Le monde a changé. Il y a eu une pandémie. Les prix, l'inflation, tout ça a changé. Mais nos budgets étaient les mêmes. Donc, la détérioration des conditions de travail s'en est suivie. Et ça, c'est très difficile à rattraper. On ne sera jamais capables de rattraper ce grand gap, finalement. Et j'ai l'impression qu'une beauté de notre milieu, c'est qu'il est riche, c'est qu'il y a plein de diversité, il y a plein de pluralité. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de gens qui veulent faire ce travail-là, mais avec des petits moyens. Donc, on va devoir se poser des grandes questions sur cet essoufflement-là, justement. Il est dû à quoi ? On ne peut pas continuer de vivre sur le respirateur artificiel.

  • Speaker #0

    Parce que le revenu médian des artistes au Québec... en ce moment, c'est à peu près 17-18 000 $ par année. Donc, on comprend bien qu'avec le prix actuel des loyers, l'épicerie qui a explosé, c'est pas viable, ça fonctionne pas. Et c'est un problème, ça doit être, du point de vue du travailleur autonome, qui sait jamais... L'année prochaine, qu'est-ce qu'il va faire ? Ça doit être vraiment très anxiogène pour les artistes.

  • Speaker #1

    En fait, c'est que les artistes, c'est des couteaux suisses. Ils sont capables, ils font plein d'affaires. La plupart d'entre eux et elles ont deux, trois jobs différents. Ils sont capables de faire un travail qui est plus clérical et un travail qui est plus, comment dire, artistique. Moi, ce que je vois aussi, c'est que les arts vivants pâtissent de ça, parce que quand je travaille avec des acteurs, par exemple, c'est sûr qu'ils doivent travailler à la télévision pour faire du théâtre. C'est comme s'ils financent un peu leur passion pour le théâtre en allant faire de la télévision ou des voix ou je ne sais pas. Donc, c'est sûr que... C'est le lieu de la passion, les arts vivants. C'est des gens qui se donnent à fond. C'est touchant de voir que ce niveau-là d'engagement et de passion existe. encore, puis après ça, je pense qu'il faut le questionner. On ne peut pas juste continuer de vivre sur le jus de bras et la sueur et le sang des gens.

  • Speaker #0

    C'est comme si les artistes étaient condamnés à survivre, mais là, il faudrait qu'on soit dans une société où ils peuvent vivre carrément.

  • Speaker #1

    Oui, puis aussi, comment dire, exister dans toute leur noblesse, parce que ça devient un peu, comment dire, oui, ça devient un peu gênant de dire que c'est ça le travail qu'on fait.

  • Speaker #0

    puis si on mettons qu'on voulait imaginer positivement une société d'artistes parce que c'est possible à quoi ça ressemblerait qu'est-ce qu'on pourrait faire pour vivre dans une société d'artistes ? Politiquement, socialement, ça ressemblerait à quoi ? Les obstacles à enlever sont où ?

  • Speaker #1

    Une société d'artistes où tout le monde est artiste,

  • Speaker #0

    je ne suis pas sûre que je voudrais vivre dans cette société. Tu vois, où être artiste et, disons, on peut vivre artiste. Oui,

  • Speaker #1

    c'est ça. Moi, je pense que ça prend des gens qui apprécient les arts et ça prend des gens qui veulent le pratiquer. Je pense pas qu'on veut vivre dans une société où tout... tout le monde est artiste, ce serait vraiment fatigant. En tout amour, là. Mais je pense que pour moi, la clé, c'est vraiment l'éducation. Puis c'est d'amener nos enfants au théâtre, d'amener nos enfants à la danse, d'amener nos enfants à la bibliothèque et au musée. Que ça devienne un incontournable, que ça devienne une nécessité. Puis les études le prouvent, mais dès que... Cette nourriture-là fait partie de la diète des enfants, mais en grandissant, ça devient une nécessité. Moi, j'ai joué à un jeu avec mon enfant. On a beaucoup voyagé avant la pandémie, puis je l'amenais toujours avec moi en tournée. Puis je lui disais, à partir d'un an, quand on va dans une nouvelle ville, il faut aller au musée. C'est comme, c'est obligatoire. Et jusqu'à ce qu'il ait 9 ans, je pense qu'il pensait que c'était vraiment une vraie obligation.

  • Speaker #0

    C'est qu'il y a une loi.

  • Speaker #1

    Oui, il y avait comme une loi.

  • Speaker #0

    Ils vont vérifier.

  • Speaker #1

    Exactement. Il était comme, OK, bien là, dans quel musée on va aller ? Je suis comme, bien, je ne sais pas. Fais tes recherches, on ira. Puis c'est tellement drôle de le voir, lui, exister avec cette, comment dire, cette nécessité-là dans la vie. On va dans une nouvelle ville, on n'a pas le choix. Donc, lequel musée on va voir ? Puis, bien, ça, c'est de la manipulation. et de passer à la maison. Bienveillante. Bienveillante, exactement. Mais je trouvais ça intéressant de lui avoir transmis ça, cette nécessité. Moi, je pense qu'il devrait y avoir un budget pour que tous les profs amènent les enfants, les classes au théâtre. Puis pas juste le théâtre pour enfants, mais le théâtre at large. C'est tellement intéressant d'aller au théâtre quand il y a une classe de cégep qui est là. C'est comme la façon de réagir, la façon de s'endormir. Quand c'est plate, on le sait tout de suite. C'est immédiat. Moi, je trouve que c'est le public le plus honnête. Donc, on devrait investir là. Pour moi, c'est la clé.

  • Speaker #0

    C'est comme si on a né un enfant ou un adolescent, un jeune adulte. voir des oeuvres d'art assister à un spectacle, c'est comme un peu lui offrir une occasion de se reconnecter avec lui-même, avec son ressenti, avec qui il est.

  • Speaker #1

    Puis il y a toute la médiation aussi qui vient avec voir une oeuvre, oui. Mais comment on la traduit dans nos vies ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Comment ça résonne ? Tu sais, c'est nos profs préférés, ceux qui sont capables de faire résonner la philosophie dans nos vies, ceux qui sont capables de faire résonner l'art dans nos vies, même ceux qui sont capables de nous expliquer les mathématiques puis qui nous donnent à voir... J'ai à tomber amoureux avec le ciel, les astres, la physique, la chimie, puis que ça devienne passionnant. Donc là, je mets beaucoup de pression sur les profs, mais je trouve que c'est tellement ces personnes-là qui nous... inspire et qui nous donne un sens. Parce qu'aller à l'école, s'il n'y a pas ce prof-là ou cette prof-là qui nous fait résonner avec le vivant, avec le monde, c'est plate. Donc, je pense que c'est vraiment ma clé.

  • Speaker #0

    Merci les profs qui font vibrer les jeunes. Oui !

  • Speaker #1

    Qui les inspirent,

  • Speaker #0

    qui leur donnent des étincelles dans les yeux.

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Bon, là, j'ai une question concrète à poser une question très concrète. dans le fond, moi, j'ai... Est-ce que vous auriez un conseil pour moi pour danser ?

  • Speaker #1

    Mais, Sol, vous avez donné la réponse pendant l'entrevue, c'est que vous m'avez dit que vous avez une fille. Oui. Quel âge a-t-elle ?

  • Speaker #0

    4 ans.

  • Speaker #1

    Ben, voilà ! Vous faites des enfants, c'est sûr que vous allez danser ! C'est évident, parce que c'est... tellement inspirant de voir un enfant développer ses capacités motrices. puis triper sur qu'est-ce que fait un bras, qu'est-ce que fait une jambe. On dit que les athlètes professionnels ne sont même pas capables de suivre ce qu'un enfant de deux ans fait dans une journée tellement c'est puissant, comment dire, la force motrice que ça prend pour se mouvoir dans le monde à cet âge-là. Donc oui, faites des enfants, puis suivez-les, vous êtes sûrs que vous allez danser.

  • Speaker #0

    Alors si je comprends bien, la prochaine fois que je suis dans une situation sociale où je suis un peu gêné je dois danser, il faut que je m'imagine être tout seul avec ma fille de 4 ans.

  • Speaker #1

    Ah oui, mais on dit danser aussi comme si personne nous regardait. Oui, c'est ça. Donc, je pense que le regard des autres, souvent, c'est ça qui tue, c'est ça qui nous emprisonne. Puis c'est pour ça que je parlais de liberté tout à l'heure. Donc, c'est comme rentrer en contact avec notre liberté. Ouais, s'en foutre, finalement.

  • Speaker #0

    Des fois même, je ne sais pas si je fais de la projection, mais dans des lieux où les gens dansent, les gens vont moins dans les discothèques. Même discothèques, j'ai l'impression que c'est comme vintage. On dirait que je sors des questions d'église.

  • Speaker #1

    Ça doit plus s'appeler comme ça. Allez, empoîte.

  • Speaker #0

    Allez, empoîte. C'est comme si... J'ai l'impression que des fois, les gens se demandent de comment... qu'est-ce que les gens pensent quand ils me regardent. Puis les gens se regardent beaucoup. Tu sais, même en penchant la tête vers le bas, pour voir si ça a-tu de l'allure. ce mouvement-là et tout ça. C'est comme, mon Dieu, mais quelque part, quelle tristesse pour qu'on se soumets à cet exercice. Mais ça pourrait être autre chose que ça.

  • Speaker #1

    C'est complètement d'autre chose que ça. La danse, c'est vraiment pluriel, mais une des choses que la danse contemporaine a faite, en fait c'est de se défaire des miroirs Donc, quand on fait du ballet, souvent, on fait du ballet devant un miroir puis on se regarde. En tout cas, quand j'étais petite, quand je faisais du ballet, c'était comme ça. Puis la danse contemporaine, elle, c'est d'effet de ce regard-là. Donc, c'est vraiment un regard qui est plongé à l'intérieur. Donc, les sensations de l'intérieur. Et ça, c'est complètement un autre monde. Quand on arrête de se regarder de l'extérieur puis qu'on plonge à l'intérieur. Quelque chose de plus introspectif. Ou alors, je dirais, toutes les danses de salon. de plus beau que le tango argentin, par exemple, d'être en contact avec le corps de quelqu'un qui, en tout cas, moi, qui me guide, quelqu'un qui me guide ou qu'on guide quelqu'un dans une espèce de... Oui, c'est ça, de symbiose. Il n'y a rien de plus beau, de plus sensuel et de plus profond que ça.

  • Speaker #0

    C'est fou, parce qu'on dirait que j'aurais... Moi, en fait, dans ma vie, ce qui m'a gêné, c'est comme... danser tout seul dans un bar avec plein de monde qui danse tout seul puis essayer d'avoir la même chose. C'est super anxiogène, mais en même temps, je me dis si j'avais eu des cours quand j'étais plus jeune ou maintenant, des cours de tango ou de danse sociale où on m'avait dit « garde danser, tu fais ça, pas là, c'est pas là, c'est pas là » , on dirait que ça m'aurait comme rassuré puis je me serais dit « ah ok, bien regarde, c'est fais je fais ça puis en même temps ben c'est pas est ce que c'est ça peut être autant une Une voix d'expression, comme un cadre comme ça, oui ?

  • Speaker #1

    Bien, il y a des danses très chorégraphiées, il y a des danses improvisées. Donc, si on parle, par exemple, de toute la culture urbaine hip-hop, c'est des danses d'improvisation. Donc, il y a un langage appris, puis après ça, la danse, ça devient comment chaque personne tisse. ces mouvements tissent l'expression de ces mouvements. Puis ça, c'est aussi, je ne sais pas si c'est un langage ou si c'est une intelligence suprême, mais c'est extraordinaire de voir les gens improviser. C'est complètement différent d'apprendre un pas après l'autre, c'est une chose, mais d'apprendre à se mouvoir dans le mouvement, c'est autre chose. C'est comme si apprendre un texte de théâtre par cœur ou connaître son sujet très bien. Ça dépend ce qu'on préfère. Je comprends.

  • Speaker #0

    Merci, merci, Mélanie. C'est vraiment inspirant puis ça donne envie de se battre pour les arts.

  • Speaker #1

    Merci. En tout cas, on lève notre poing puis on est là pour la nécessité de l'inutile.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Merci à tout le monde d'avoir été avec nous. Je tiens également à remercier Éric Azaria pour la musique. Anthony Castonguay-Harvey pour le montage, Madeleine Cloutier et Nadia Girard-Hedaya pour l'organisation et l'enregistrement. Et on ne lâche pas la patate, car l'espoir, c'est un choix.

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