- Speaker #0
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- Speaker #1
Bonjour, je m'appelle César Ancel-Ancel. Je suis médecin généraliste et urgentiste. Vous êtes sur le podcast Patient, saison 2. Bienvenue dans Parole d'expert. La semaine dernière, avec Fanny, nous avons parlé de stress post-traumatique. Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'échanger avec Vincent pour compléter ce témoignage. Bonjour Vincent, je suis très content de t'accueillir. La semaine dernière, j'étais avec Fanny qui nous a raconté en détail son histoire. Et naturellement, dans la conversation est arrivé ton nom et la structure pour laquelle tu travailles, qui s'appelle Baptiste Med. Est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?
- Speaker #0
Bonjour César et merci déjà de m'accueillir. Alors oui, moi je m'appelle Vincent Meurisse, j'ai 47 ans, je vis en Guadeloupe puisque... Notre technique bâtissmède passe par la plongée sous-marine, donc la Guadeloupe c'est idéal pour ça, mais originaire du nord de la France. Donc je suis moniteur de plongée, gérant d'un centre de plongée, mais je suis aussi sophrologue et préparateur mental sportif. Et avec mon collègue et ami Frédéric Benetton, on a... confondé ensemble Baptisme Med qui est une méthode à visée thérapeutique, on va pas dire thérapeutique à part entière mais à visée thérapeutique pour les différentes pathologies du stress, en l'occurrence le stress post-traumatique qui a été notre première cible et qu'on a étudié depuis 2017.
- Speaker #1
Alors justement est-ce que tu pourrais nous parler de ce protocole Baptisme Med ?
- Speaker #0
Alors le protocole Baptisme Med c'est une histoire assez marrante en fait qui a commencé en 2015 lorsque mon associé ami Frédéric Bénéton a a publié la première étude clinique sur les bienfaits de la plongée. Disons que, historiquement, on a toujours publié sur les risques reliés à la plongée. Encore maintenant, des gens pensent que la plongée, c'est très très dangereux, ce qui n'est pas tout à fait le cas en fait, c'est même plutôt très sécure comme activité. Mais on a beaucoup publié sur les effets potentiellement néfastes de la plongée et rarement sur les effets positifs. Et donc, Frédéric Bénéton a été le premier en 2015 à publier dessus suite à un burn-out. Frédéric Bénéton, c'est un ancien élève de... Polytechnique, qui a fait un burn-out relativement sévère dans le milieu de la banque et qui, à l'issue du burn-out, l'a obligé à sortir de ce genre de milieu. Pendant sa période de récupération, il s'était rendu compte qu'au final, quand il partait en vacances plonger, il récupérait mieux et plus vite que s'il allait faire du ski ou de la randonnée en montagne ou d'autres sports de ce type-là. Et pour le coup, il s'est intéressé à la question en passant un master en physiologie du stress. Et il a publié sur les premiers effets bénéfiques de la plongée. Alors là, à l'époque, on parlait de plongée classique, c'est-à-dire juste effectivement aller sous l'eau, explorer, voir la mer, les poissons, le récif. Et l'étude a été plutôt assez étonnante, puisqu'elle a démontré que les gens avaient des meilleures capacités de gestion du stress, et que ça avait tendance à perdurer dans le temps. et que ces capacités de gestion étaient meilleures que les capacités de gestion qu'on a développées via les autres sports, même si on sait très bien que le sport ça fait du bien. Donc ça c'est en 2015, c'est quelqu'un qui plongeait chez moi, enfin qui a eu plongée chez moi plusieurs fois. Et moi à l'époque, hasard ou pas, j'étais en train de passer mon niveau de sophrologue en fait. Et j'étais en train d'étudier en fait des techniques, enfin j'avais mis en place des techniques de sophrologie dérivées sous l'eau. Parce que je m'étais rendu compte qu'au final, lorsque je pratiquais la sophrologie sous l'eau, j'évoluais plus vite que lorsque je pratiquais la sophrologie en surface. En fait, quand vous devenez sophrologue, on vous oblige finalement à pratiquer tout seul, à faire vos séances de sophrologie, méditation. Et donc en surface, finalement, c'était moins pertinent que ce qui se passait sous l'eau. Et là, je me suis dit, pourquoi pas tenter avec des clients que je connaissais très très bien et dériver ces exercices de sophrologie et de préparation mentale sportive, en l'occurrence, sous l'eau et voir l'impact que ça a. Donc pendant un an, quelque part, j'ai fait... Je menais des tests un peu personnellement de mon côté avec des clients que je connaissais très très bien. Et donc c'était assez concluant et la conjoncture a fait que pile au moment où Frédéric Benetton publiait, finalement on s'est retrouvés tous les deux en Guadeloupe, comme ça on va dire sur le coup du hasard, et on s'est dit il faut faire quelque chose.
- Speaker #1
Vincent, on va rentrer un peu plus tard dans le détail du protocole. Juste avant, j'aimerais bien qu'on parle un peu de sophrologie, parce que tu es sophrologue. Est-ce que tu peux expliquer aux personnes qui nous écoutent ce qu'est la sophrologie ?
- Speaker #0
Alors la sophrologie c'est une... Des techniques de relaxation dynamique. Ce sont des techniques qui ont été créées par le professeur Alfonso Caicedo il y a plus de 40 ans, et qui était un neuropsychiatre qui travaillait principalement en France et en Espagne, qui étudiait à l'époque les phénomènes de la conscience et qui essayait de guérir les gens en hôpital psychiatrique par le biais de l'hypnose ou d'autres techniques comme la psychothérapie, la psychanalyse. Et toujours est-il qu'il s'était rendu compte de certaines limites, Et... Ce qui s'est passé, c'est qu'en fait, il a fait un voyage en Orient pendant à peu près 4 ans, et il s'est inspiré des techniques de yoga, de méditation, de bouddhisme, de zen japonais en l'occurrence aussi, pour créer des techniques qui soient adaptables au milieu plutôt occidental. Il y a un côté très scientifique, très thérapeutique, c'est ce qui la diffère peut-être le plus avec la méditation de pleine conscience, où en général les gens vont être plus dans une sorte d'acceptation, de lâcher prise, alors que la sophrologie a une visée... presque plus, on va dire, contrôlés à visée thérapeutique. Même si on peut faire de la sophrologie uniquement pour méditer. Il y a beaucoup de techniques en sophrologie. Et voilà, ce n'est pas quelque chose qui date d'hier. Et maintenant, c'est plutôt assez bien connu en Europe. Encore beaucoup, finalement, sur les zones américaines. Mais en tout cas, en France et en Europe, c'est quand même beaucoup utilisé.
- Speaker #1
Ok, très clair. Dis-moi, est-ce que tu peux essayer de nous synthétiser le protocole BATISMED ? On a bien compris qu'il s'agissait de plonger. Il y avait une utilisation associée de techniques de sophrologie ou de techniques de psychothérapie. Est-ce que tu peux me résumer comment ça se passe ?
- Speaker #0
C'est un protocole qui va se dérouler en gros en une dizaine de plongées. En général, pour l'instant, sur les études cliniques qu'on a menées, c'est toujours une dizaine de plongées. Et dans ces dizaines de plongées, on va permettre aux gens de travailler sur trois domaines différents. Il y a une première partie qui est très tournée sur le corporel, c'est-à-dire la gestion du stress pur d'un point de vue physiologique. Donc mieux maîtriser ses sorties d'émotions, la tension musculaire, le rythme cardiaque. Une deuxième partie qui va être... Très porté sur justement les capacités mentales, attention, concentration, contemplation. Et une dernière partie sur laquelle on fait une sorte de liaison avec tout ça, où on complète le protocole avec une sorte de lâcher prise générale et plus tourné vers ce qu'on appelle la pleine conscience, c'est-à-dire un état de bien-être plus général et qu'on essaye de reproduire à plusieurs reprises dans le temps. C'est-à-dire que c'est une boîte à outils principalement qu'on va donner. C'est pas même psychothérapie à part entière, puisqu'on ne fait pas de psychothérapie avec les gens qu'on emmène sous l'eau. Mais en l'occurrence, on utilise le milieu sous-marin pour potentialiser justement toutes les techniques qui, on sait, fonctionnent déjà en surface. En l'occurrence, la méditation, la sophrologie, la préparation mentale, même la psychologie d'ailleurs en soi. Finalement, vous êtes dans un milieu, on va appeler ça stressant, mais c'est un stress positif quelque part. Et le cerveau a tendance à ne pas forcément rentrer dans des pensées parasites du type je suis dans le passé ou je suis dans le futur On est toujours présent à soi avec en plus l'accompagnement de sa respiration via le détendeur. où au final, le fait de s'entendre respirer et de travailler en apesanteur va justement augmenter les bénéfices, parce qu'on est vraiment dans sa bulle, avec soi-même. Tout simplement. Et on va profiter de ces moments pour justement mettre en place différents exercices pour lesquels on aurait du mal à mettre en place justement une sorte de thérapie en surface. Pour être plus précis, par exemple, sur le stress post-traumatique, principalement chez les militaires, ils ont beaucoup testé la méditation de pleine conscience. Mais quelque part, quand vous êtes en hyper-vigilance, en crise d'angoisse sévère, méditer dans une salle, ce n'est pas si simple que ça en fait. Donc ça fonctionne, mais c'est compliqué et ça prend du temps. Alors qu'au final, sous l'eau... Vous êtes dans une sorte d'état d'hypervigilance, mais c'est une hypervigilance qui est saine. On est centré sur soi, on fait ce qu'on a à faire, et nous on profite finalement de ce temps de présence à soi pour pouvoir justement placer des exercices et qui au fur et à mesure des répétitions vont pouvoir donner des résultats plutôt positifs.
- Speaker #1
C'est super intéressant. J'aimerais bien qu'on parle du parcours des patients. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir comment est-ce que les personnes arrivent vers vous ? Parce que j'imagine qu'au début, les personnes qui souffrent de stress post-traumatique, elles font l'objet d'une prise en charge au préalable. Donc comment ça se passe ?
- Speaker #0
Alors le cadre de soins dans le stress post-traumatique, il doit rester quand même très médical à l'origine. C'est-à-dire que quelqu'un qui ne va pas bien, il ne va pas déjà démarrer par nous. D'ailleurs, nous, les moniteurs conformes à l'heure actuelle, ils ont vraiment une ligne de conduite. Tout simplement, c'est-à-dire que le moniteur de plongée ne va pas se soustraire ni aux médecins ni aux psychologues. C'est-à-dire que déjà il y a une prise en charge qui est forcément et psychologique et médicale, et en fonction du degré de stress post-traumatique de la personne et de l'état dans lequel la personne se trouve à l'instant T, peut-être à ce moment-là, le psychologue ou les médecins vont nous amener ces personnes-là, mais pas dans le cadre d'un traitement, parce qu'à l'heure actuelle... On ne peut pas se prôner de dire qu'on va guérir les gens, au contraire, on va plutôt être un complément de ce qui va se passer dans le travail de toute façon que la personne va faire sur le plan médical et sur le plan psychologique. On est plutôt une sorte de boîte à outils qui va permettre d'accélérer le retour à la normale. Voilà, c'est ce qu'on essaye de donner principalement aux gens. Donc maintenant, il existe avec la plongée des contre-indications entre la partie médicamenteuse et la possibilité d'aller sous l'eau. Donc il y a un diagnostic qui est fait initialement par des médecins, des psychiatres principalement. Et avec l'acceptation de ces psychiatres, oui ou non, les personnes vont nous envoyer, justement, les gens qui peuvent souffrir de stress post-traumatique, à des moniteurs qu'on a formés spécifiquement dans ce genre de domaine. C'est-à-dire que ce n'est pas un moniteur de plongée classique, c'est quelqu'un qui a suivi une formation.
- Speaker #1
Concernant la durée du protocole, comment ça se passe ? Ça dure combien de temps ?
- Speaker #0
Le protocole, en fait, on ne va pas parler réellement de temps, on va plutôt parler du nombre de plongées. Nous, le protocole qu'on a, on va dire, déposé, parce qu'on ne peut pas clairement déposer une thérapie sur la base d'un nombre de plongées, mais le protocole qu'on a mis en place va durer 10 plongées, donc il peut être étalé sur... Une dizaine de jours, un mois, deux mois, trois mois, ça va dépendre de la personne aussi. Récemment, on a fini une étude clinique justement sur l'obésité l'année dernière, qui va être publiée prochainement, dans laquelle on a réappliqué ce protocole-là, mais sur l'alimentation émotionnelle. Donc on n'était pas dans le cadre de la perte de poids, on était plutôt dans le cadre de la gestion de l'alimentation émotionnelle. Et donc sur cette étude clinique, qui a duré presque cinq mois, les gens ont plongé à raison de deux plongées par semaine. Donc ça a duré quasiment 5 semaines. Donc les gens peuvent tout à fait diviser le nombre de plongées. Et je mets un bémol dessus, ce n'est pas des plongées de type classique où vous êtes en pleine mer à 20 mètres de profondeur. C'est excessivement progressif. D'ailleurs, on commence toujours à très très faible profondeur en piscine fréquemment. Donc au moins les 2-3 premières plongées, on est à très très faible profondeur. Donc on apprend aux gens justement à se maîtriser, à retrouver leurs sensations. Parce que sous l'eau, vous allez avoir justement des... On va dire à peu près 60% du temps de ces plongées qui sont accordées au protocole pur. Et après, le reste du temps à la plongée plutôt dite classique, avec de l'exploration et dans un état de pleine conscience et en bien-être. Ne serait-ce que pour redonner aux gens confiance en eux et rebooster un peu leur estime d'eux aussi.
- Speaker #1
Dis-moi, j'aimerais bien qu'on parle des études scientifiques que vous avez menées. Est-ce que tu peux nous donner quelques informations ? A priori, il y a une amélioration de l'état psychique des personnes. Combien de temps ça dure cette amélioration ?
- Speaker #0
Alors ça a été là justement une des premières problématiques qu'on a eues sur la première étude clinique qu'on a fait en 2017. Jusqu'à quasiment six mois on a des effets plus que positifs et après ça a tendance à diminuer. Ce qui est relativement normal si vous faites par exemple de la sophrologie, du yoga, de la méditation. Si vous répétez fréquemment une fois par semaine, les effets vont perdurer, vont continuer à s'appliquer. Puis d'un coup, si la personne arrête complètement, forcément ça va avoir tendance à s'estomper. Mais on s'est rendu compte qu'en refaisant plonger les gens par la suite, ils récupéraient aussi assez rapidement finalement les bénéfices. Maintenant, justement, pour la dernière étude clinique qu'on a menée sur l'obésité, on avait développé un détendeur connecté à un masque de réalité virtuelle où les gens pouvaient continuer dans les mois qu'on suivit, finalement, des plongées en réalité virtuelle, ce qui nous permettait de voir justement s'il est bien fait, aller durer plus longtemps, ce qui a été effectivement le cas. Mais encore une fois, l'étude doit être publiée prochainement, donc il faut attendre encore quelques mois pour voir cette étude apparaître.
- Speaker #1
C'est hyper intéressant parce qu'on voit que les possibilités... Elles sont immenses. Comment tu vois l'avenir de ce protocole ?
- Speaker #0
Alors la bonne nouvelle c'est que pour l'instant, beaucoup de gens s'y intéressent en dehors de la France. Donc maintenant ça fait depuis 2019 qu'on forme vraiment les moniteurs avec des équipes aussi de scientifiques. C'est-à-dire que pendant deux semaines les gens ont des cours par des médecins, des psychologues, des méditants, des sophrologues, des plongeurs. Et à l'heure actuelle on en est à peu près à plus de 80 moniteurs formés. On en a maintenant au Canada, à Bali, on en a aussi en Australie. Donc... Le développement, c'est maintenant se faire reconnaître plus sur la partie internationale. Et puis pour nous, continuer justement les études cliniques. Donc là, on a quand même deux sur le Burnout, une autre étude clinique qui justement va pas tarder à sortir sur la partie obésité. Et une qui va démarrer normalement en 2025, une très très grosse étude sur le Burnout, mais pour le coup avec les personnels hospitaliers. Puisqu'on travaille aussi avec Pierre Michelet, qui est le chef des services des urgences de Marseille, la Timone, qui est quand même le plus gros service d'urgence de France. Et donc il fait partie de notre équipe maintenant. Et voilà, on est en train de travailler pour mettre en place cette étude sur le Barnard, principalement sur les milieux de la santé, et voir justement comment on peut faire varier Val-Ladon aussi. Ça reste quand même une pathologie du stress, quoi qu'il en soit.
- Speaker #1
Écoute, on te souhaite beaucoup de réussite pour cette étude. Vincent, on a donc vu le témoignage de Fanny, qui concerne le stress post-traumatique. Merci. Est-ce que tu peux faire un petit rappel sur ce stress post-traumatique ?
- Speaker #0
Le stress post-traumatique, ce n'est pas une maladie nouvelle. Ça date de très longtemps. Il y a des écrits qui datent d'avant Jésus-Christ. Même s'ils sont restreints, avant les années 1800, on a des témoignages sur les guerres napoléoniennes, même dans Roméo et Juliette finalement ils en parlent, sur les cauchemars qui sont nommés dans l'œuvre de Shakespeare. Et en fait c'est surtout à partir de la guerre de sécession qu'on se rend compte que finalement les guerres amènent d'autres problèmes que la blessure physique et la blessure psychique. Après forcément on a toute la problématique des guerres mondiales, donc première guerre mondiale où finalement les dégâts sont quand même... relativement sévère. À cette époque-là, ça ne s'appelait pas le stress post-traumatique, ça s'appelait la neurasthénie de guerre, l'obusite, il y avait plein de noms comme ça, assez chantants, si on peut appeler ça comme ça. Et forcément, la Seconde Guerre mondiale va encore plus exploser le phénomène. On va vraiment s'intéresser maintenant à la partie psychologie de l'après-guerre. Mais au final, il faut attendre finalement la guerre du Vietnam pour que vraiment on s'intéresse complètement au stress post-traumatique. Parce que sur à peu près les 3 millions d'Américains qui ont été envoyés là-bas, je crois que c'est à peu près 700 000 qui sont revenus avec des séquelles psychologiques. Donc ce n'est pas anodin, on est presque à un tiers de dégâts. Avec bien sûr des symptômes relativement sévères. Le stress post-traumatique, on va appeler ça un carré symptomatique, c'est toujours à peu près les quatre mêmes symptômes. Donc un symptôme central qui est ce qu'on appelle l'arrêt-vivissance, où les gens vont se retrouver projetés finalement dans des scènes traumatiques. Alors le stress post-traumatique, ça peut être vaste, ça peut être un attentat, ça peut être une agression dans la rue, une agression sexuelle, ça peut être témoin d'un accident. Dans les symptômes, on a parlé bien sûr de cette partie révivissante, qui est le symptôme central. Ensuite, on va avoir un autre symptôme qu'on appelle l'évitement, où les gens vont avoir tendance à éviter un maximum les situations qui peuvent redéclencher un souvenir du stress. Et puis derrière, on va avoir l'hypervigilance, qui est souvent compliquée, puisqu'elle va obliger finalement le cerveau à rester hypervigile constamment, donc avec les troubles du sommeil forcément, parce que dormir, c'est perdre sa vigilance, donc les gens ne dorment plus. Donc des gros troubles d'insomnie et tout ça, ça amène à des troubles cognitivo-comportementaux, où les gens vont rentrer en dépression et trouver des stratégies pas forcément toujours super pour essayer de faire face, donc l'alcool, la drogue, et ça peut amener sur des dépressions qui amènent au suicide. Donc ce n'est pas une maladie sympa, mais ce qu'on... Ce qu'on a vu et ce qu'on étudie, ce qu'on a comme retour depuis qu'on a démarré ces travaux, c'est que généralement au bout de deux ans, ça a tendance quand même à s'estomper pour pas mal de gens. Mais malgré tout, le stress post-traumatique peut durer quand même très longtemps. Donc on a une première phase dite de choc émotionnel, quand la personne finalement est témoin de quelque chose ou subit une agression. Donc la phase initiale après le traumatisme, qui va durer en général entre 15 jours et 3 semaines. Au-delà de ça, on rentre dans ce qu'on appelle le stress aigu, qui peut être porté jusqu'à trois mois, et après trois mois, on considère que le stress est chronique, et là, on peut clairement définir que la personne est en stress post-traumatique. Donc ça reste quelque chose de complexe, voire même, vous avez aussi des stress post-traumatiques qui arrivent à distance, tout simplement, et donc qui vont se déclencher plusieurs années après un traumatisme. C'est-à-dire qu'une personne va subir un événement violent, le cerveau va dissocier, donc ranger le souvenir quelque part, sans y prêter attention, donc une sorte de micro-perte de mémoire, et puis un jour, un autre événement, x ou y. va déclencher un nouvel événement traumatique. Ça s'est vu d'ailleurs pendant le Covid. J'en ai eu quelques-uns qui sont passés par nous justement et qui ont décompensé finalement pendant le Covid. Donc d'autres traumatismes y sont ressortis. Donc voilà, c'est pas forcément une maladie super sympa, mais depuis uniquement 1992, elle est reconnue dans le manuel des classifications mondiales. 1992, c'est pas si loin que ça au final. Maintenant, on sait que le stress post-traumatique, c'est complexe. Il y a plein de causes diverses, naturelles. Par exemple le tsunami que vous avez en Asie, ça peut être des causes humaines, soit volontaires, soit non volontaires. Quelqu'un qui va agresser une personne ou carrément être témoin d'un accident. Et ça, ça peut être aussi soit collectif, soit individuel. Ça va dépendre aussi des champs. Mais le stress post-traumatique reste le stress post-traumatique quoi qu'il en soit. Donc ça veut dire qu'avec tous les dégâts qui vont derrière et finalement ces quatre symptômes principaux sur lesquels justement on va essayer d'appliquer des choses pendant la phase de plongée.
- Speaker #1
Oui, et d'ailleurs, on a mis en évidence que parfois, ça touche même les personnes témoins ou qui ont entendu le récit d'un événement traumatique. Donc, ce qui veut dire, en fait, finalement, que ce stress post-traumatique, il est sous-estimé et qu'il y a des gens qui passent entre les mailles du filet, avec toutes les conséquences désastreuses que ça peut avoir. Est-ce que tu peux nous parler de l'évolution du stress post-traumatique ? On en guérit ?
- Speaker #0
Alors, la bonne nouvelle, clairement, c'est que oui, on peut en guérir. Parce que, voilà, depuis nous, On travaille sur le sujet et on voit les gens s'améliorer. La phase initiale est souvent compliquée. Les deux premières années ne sont pas forcément les plus simples à gérer, mais c'est ce qu'on essaye de faire finalement dans notre boîte à outils, c'est de donner des capacités de résilience aux gens. Et ces capacités de résilience, ça va être l'outil principal que les personnes vont pouvoir développer pour faire face au stress post-traumatique. Alors la résilience, elle ne s'acquiert pas comme ça. Elle est reliée à plein de paramètres différents. Déjà, la capacité personnelle à faire face à un défi, les soutiens de groupes, familiales, diverses et nombreuses. Donc l'entourage compte quand même pour beaucoup. C'est une espèce de capacité d'analyse et de mieux comprendre ce qui se passe. voire même de la psychoéducation, parce que souvent les gens vont plus subir, mais pas forcément essayer de comprendre. Et c'est ce qu'on essaie aussi de rajouter finalement dans ce qu'on fait. Il y a des plongées, mais il y a aussi une part de psychoéducation avec une sorte d'apprentissage théorique sur ce que c'est que le stress. Mais oui, quand les gens travaillent vraiment dessus, non seulement bien souvent ils vont s'en sortir, mais même mieux que ça, puisque c'est vraiment des témoignages qu'on a nous souvent, les gens finissent par dire finalement... Je suis content que ça me soit arrivé. Ce qui peut paraître hyper contradictoire initialement, mais c'est quand même quelque chose qu'on entend très souvent et les gens se disent, si c'était à refaire, franchement, pourquoi pas ? Parce que ça m'a appris tellement de choses sur moi, ça m'a appris à rebondir, à faire face à différentes situations et voir même, les gens se disent, maintenant je me sens finalement beaucoup plus fort que ce que j'étais avant.
- Speaker #1
Oui, mais en fait c'est ça, c'est que ça se soigne, ça se traite. Et l'un des principaux défis finalement, c'est de le diagnostiquer.
- Speaker #0
Alors à ce niveau-là, il y a un questionnaire qui est quand même officiel, qu'on appelle le PCL5, un questionnaire où il y a une vingtaine de questions qui vont aller de 1 à 5 points par question, donc ça peut aller jusqu'en gros 80 points, et quand les gens sont aux alentours des 40 points sur ce questionnaire, on peut considérer clairement qu'ils sont en stress post-traumatique. Nous finalement, c'est le questionnaire officiel qu'on a utilisé sur les études cliniques, et qui nous permet d'avoir des mesures assez fiables. Il y a d'autres questionnaires bien sûr, mais il y a quand même celui-là principalement, qui permettent déjà de voir à peu près où se situent les gens. Donc même un thérapeute X ou Y, je l'ai déjà utilisé en cabinet de sophrologie, où des fois il y a un doute et on se dit, tiens, réponds à ce questionnaire, et en fonction du score, on peut commencer à dire, il y a peut-être quelque chose derrière, il faut aller creuser.
- Speaker #1
Ouais, super intéressant. Vincent, donc ce qu'il faut savoir, mais tu le sais probablement, c'est que les médecins, ils sont parfois pris par le temps. Et puis l'accès à la prise en charge en santé mentale n'est pas évident, surtout sur certains secteurs où tu as parfois beaucoup d'attentes. Toi, avec le recul que tu as sur toutes ces prises en charge, Qu'est-ce que tu donnerais comme conseil aux soignants qui nous écoutent ?
- Speaker #0
Franchement le conseil pour y être passé, puisque moi-même j'ai souffert pendant 6 ans d'attaques de panique sévère entre mes 19 et 25 ans et on est quasiment à 90% à la même chose que ce qui se passe sur un stress post-traumatique en fait. Et c'est ce qui m'a permis justement de mieux comprendre finalement la pathologie et de mettre en place les choses, puisque c'est compliqué pour les gens de déterminer l'intensité d'une souffrance psychique, parce qu'elle est hyper subtile, elle ne se voit pas quelque part. Demain, il y a quelqu'un qui arrive avec une fracture ouverte, forcément on va se dire, forcément ça fait mal. Donc effectivement, la douleur que les gens vont subir n'est pas toujours forcément validée initialement, puisque la douleur psychique, elle est invisible, alors qu'une douleur physique, en cas de fracture ouverte, forcément ça fait mal. C'est validé, on a mal, on sait très bien ce qu'il en est, mais la douleur psychique, déjà elle est ultra personnelle, c'est-à-dire que ce qui va faire souffrir une personne ne fait pas forcément souffrir d'autres personnes. Vous allez avoir des personnes qui vont tout à fait encaisser un accident de la route grave, même en tant que témoin, et qui ne font pas de stress post-traumatique, et qui vont en faire un parce qu'ils ont divorcé, ou parce que leur père est mort, même de mort naturelle. Donc c'est excessivement complexe, et je pense que, un, quelque chose que nous on voit souvent, c'est les gens qui nous disent, on aime bien avoir des gens qui comprennent. qui peuvent se mettre un peu à notre place et surtout des gens qui ne sont pas dans le jugement et qui ne vont pas mettre un curseur sur l'événement traumatique. Ça c'est moins grave que ça, ça c'est moins grave que ça. On a tous notre tendon d'Achille et franchement c'est quelque chose d'hyper important. C'est-à-dire qu'on ne peut pas juger ce qui va faire buguer une personne. Donc il faut rester humble. Il y a des psychologues et des psychiatres qui sont très bien formés en psychotrauma et qui normalement connaissent bien le sujet et qui peuvent orienter de manière efficace.
- Speaker #1
Vincent, je te remercie mille fois pour cette intervention. C'était vraiment très intéressant. Qu'est-ce qu'on peut te souhaiter pour la suite ?
- Speaker #0
C'est une très bonne question. Je dirais beaucoup de gens aider principalement parce que c'est quelque chose qui fait vraiment sens pour nous. et on aime faire ça et puis surtout essayer de on va pas dire dispatcher la bonne parole mais faire en sorte de dire qu'il existe d'autres méthodes alternatives qui peuvent être une aide complémentaire à un cercle de soins avec les médecins et les personnels de santé et que il ne faut pas s'en priver lorsque c'est disponible Ok,
- Speaker #1
merci beaucoup Vincent on te souhaite le meilleur Merci Allez, à bientôt Merci d'avoir suivi Parole d'Expert À la semaine prochaine pour un nouvel épisode de Patients.
- Speaker #0
Ce podcast vous a été proposé par la plateforme Levy.