- Speaker #0
Allez, moteur, moteur ! Vite au départ, allez,
- Speaker #1
allez !
- Speaker #0
Bienvenue dans le premier épisode de Plan Clap. Pour celui-ci, j'ai choisi de partir à la découverte d'un nouveau métier de plus en plus présent sur les plateaux de tournage. Et non, il n'est pas relié à l'intelligence artificielle. Je dirais qu'il est plutôt lié en partie à l'intelligence émotionnelle. Je veux parler du métier de coordinatrice d'intimité. J'ai donc choisi de contacter Najwa Ferreol, elle est l'une des rares qui exercent en France dans ce domaine. Elle est aussi comédienne, ce qui lui permet d'apporter une vision unique à son travail. Dans cet épisode, Najwa nous explique comment elle aide les comédiens et comédiennes à se préparer à une scène intime, les techniques utilisées, sa vision du métier, mais aussi les limites de ce poste encore très récent en France. Moteur demandé, ça tourne à l'image, ça tourne au son et action ! Plan clap ! Plan clap ! coordinatrice d'intimité, pour toi, qu'est-ce que c'est ? Résumer par exemple en une phrase.
- Speaker #1
Si je devais le résumer en une phrase, je dirais que c'est repenser l'intimité au cinéma.
- Speaker #0
À la base, tu es comédienne, c'est ça ?
- Speaker #1
Exactement. Enfin, j'ai eu mille vies, donc avant d'être comédienne, j'étais autre chose. Mais effectivement, la... Acting, la comédie, ça a été un grand, grand moment de ma vie. Avec ses hauts et ses bas. Et au moment où il y a eu des bas, je suis passée de l'autre côté de la caméra. Donc j'ai fait de la réalisation, j'ai fait de la mise en scène. Et j'ai même fait de la production. Et par la suite, tout en restant derrière la caméra... La coordination est venue à moi, je ne suis pas allée vers la coordination d'intimité, c'est vraiment, c'est venu à moi, ce sont des demandes très particulières de réalisateurs qui, parce que j'étais comédienne, m'ont demandé d'intervenir par rapport à la mise en scène de scènes dites d'intimité, et c'est ce qui a attisé ma curiosité et qui a fait que je me suis spécialisée.
- Speaker #0
Et comment justement tu as connu ce métier en France de coordinatrice d'intimité ? Parce que... Apparemment, vous êtes trois ou quatre diplômés en France à exercer ce métier. Et aux États-Unis, en revanche, c'est là où il y a les formations, où le métier est beaucoup plus développé, grâce aux séries notamment.
- Speaker #1
Alors oui, c'est grâce aux séries, c'est grâce au mouvement MeToo, c'est grâce au SAG-AFTRA. C'est aussi qu'aux États-Unis, c'est une autre façon de fonctionner, d'un point de vue financier. On appelle bien ça le business. Donc effectivement, il y a plus de... place, je pense que le syndicat est extrêmement puissant, c'est un syndicat des acteurs, et il y a aussi la coordination d'intimité, il y a aussi la direction d'intimité, à savoir pour le théâtre. Et aux Etats-Unis, c'est aussi très respecté. Alors, est-ce que c'est une question de budget ? Est-ce que c'est une question de façon de fonctionner ? D'après ce que j'avais cru comprendre, aux Etats-Unis, ils sont, puisqu'il et elle. sont à peu près 280 coordinateurs, coordinatrices d'intimité. Alors qu'en France, effectivement, si on considère par rapport aux formations américaines, eh bien, on n'est effectivement pas très nombreuses. On est quatre à être connus. Et puis, il y en a d'autres qui arrivent parce qu'ils sont en train de suivre des formations à EDICI. Je pense qu'ils vont finir par se faire connaître dans les mois qui viennent.
- Speaker #0
Et par exemple, si demain... En tant que comédienne, j'ai envie de devenir coordinatrice d'intimité. Est-ce qu'on peut s'inventer, entre guillemets, coordinatrice d'intimité du jour au lendemain ? Par exemple, sur un plateau, il y a une scène et on veut aider son camarade qui va jouer dans cette scène un peu, voilà, olé olé, je ne sais pas. Et le réalisateur, par exemple, va dire, toi, tu vas t'occuper de ça. Ou la chef électro va s'occuper en même temps d'une scène de coordination d'intimité.
- Speaker #1
Alors, la bienveillance, c'est quelque chose, comme je dis, qui ne s'apprend pas. effectivement on peut se retrouver et c'est ce qui m'est arrivé c'est pour ça que je suis devenue coordinatrice d'intimité c'est parce qu'on m'a demandé moi de le faire donc je me suis improvisée coordinatrice d'intimité, j'ai fait hurler des gens, ça a fait hurler des gens dans le métier qui ont considéré qu'il ne fallait pas le faire sans avoir passé sans être passé par les formations donc en fait je l'ai fait au début parce que ça a été une demande très spécifique Et ça m'a permis après de m'interroger sur les contours de ce métier qui ne sont toujours pas définis aujourd'hui. et de partir vers des formations. Au début, j'ai commencé par des modules, et puis après, j'ai trouvé la formation qui me convenait. C'est plus une question de temps et de disponibilité. Et puis, c'est aussi réduire la coordination d'intimité juste au consentement. Si ce n'était que le consentement, je pense qu'on est tous aujourd'hui suffisamment instruits et renseignés pour pouvoir prendre de... pour pouvoir se préoccuper du consentement de chacun. Donc la coordination d'intimité, dire que si tout le monde peut le faire, ça veut dire que tout le monde peut prendre le consentement. Alors qu'en réalité, c'est un autre travail. C'est un travail beaucoup plus complexe et beaucoup plus large que juste prendre le consentement. Et puis, excusez-moi le terme, mettre garde-chambre sur un plateau. Parce que si ce n'était que ça, moi ça ne m'intéresserait pas.
- Speaker #0
Et parlons justement concrètement, qui t'appelle ? sur, par exemple, une série, un film, une pièce de théâtre, pour faire cette coordination d'intimité ? Quelles sont les étapes, en fait, à la base, qui t'appellent ? Est-ce que c'est la production ? Est-ce que c'est le réalisateur qui pense à toi ? Est-ce que, je ne sais pas, c'est une personne qui est chargée de veiller au bien-être sur le tournage qui va se dire, ah, là, il faut peut-être une coordinatrice d'intimité ?
- Speaker #1
Je dirais qu'aujourd'hui, effectivement, quand il y a des œuvres, il y a une vraie préoccupation de la production. Se dire, est-ce que... on va avoir besoin de coordination d'intimité. Donc, ils ont leur propre questionnement. Et généralement, c'est assez collégial, c'est entre la production et la mise en scène, de se dire, est-ce qu'on fait appel à une personne spécifique et qui est plus ou moins ouverte à toutes ces questions ? Donc, c'est souvent la production qui m'appelle. Aujourd'hui, je trouve, alors que les comédiens et comédiennes ont beaucoup de pouvoir, mine de rien, je trouve qu'il n'y en a pas beaucoup qui font le pas de... de dire je veux être accompagnée. En fait, quand ils sont castés, généralement dans les annonces, voire en préannonce, on leur dit il y aura de la coordination d'intimité. Mais si, par exemple, la production pense que les comédiens et comédiennes sont suffisamment habilités à faire ce rôle et ne se posent pas les questions de leur... émotionnelle ou intimité, j'ai rarement rencontré des comédiens et comédiennes qui disent moi,
- Speaker #0
je veux avoir une coordinatrice d'intimité Est-ce que tu penses que c'est parce qu'ils n'osent pas ?
- Speaker #1
Je pense que oui, ils n'osent pas. Je pense qu'ils ont peur de ne pas avoir le rôle parce qu'ils se disent si je commence à demander de la coordination d'intimité, est-ce que je ne vais pas passer pour une diva ou pour un capricieux ? ou pour quelqu'un qui ne va pas faire le métier pour lequel on le paie. Parce que moi, en tant que comédienne, je le sais et je l'entends. Et puis encore aujourd'hui, parfois, il y a des gens qui disent Oui, mais bon, s'ils ne sont pas en mesure, les comédiens et comédiennes ne sont pas en mesure de se toucher ou de s'embrasser, pourquoi ils ont choisi ce métier ? Ok, on choisit de devenir comédien et comédienne, et on connaît les tenants et les aboutissants, et on sait très bien que ça va passer. Mais parfois, c'est juste une personne ou c'est juste un contexte qui va faire qu'à ce moment-là, on va se dire, ben non, aujourd'hui, je n'ai pas envie. Et c'est en ça qu'effectivement, les accompagner, être à l'écoute, leur proposer des solutions, travailler ensemble, toujours travailler ensemble. C'est-à-dire que moi, toute seule, je ne suis personne. Mais je veux dire, un réalisateur tout seul, il n'est personne. Un comédien tout seul, il n'est personne aussi. Donc, c'est vraiment un travail. de collaboration, un travail de communication, un travail d'écoute. Et effectivement, si on n'a pas envie de faire une chose, on cherche ensemble, sans jamais imposer et sans jamais faire de chantage, comment cette même histoire, on peut la raconter différemment.
- Speaker #0
Et donc, quand tu commences un travail de coordination, d'intimité sur une série ou un tournage pendant un jour, par exemple, comment ça se passe au niveau des étapes ? Tu reçois un scénario et tu le découpes un peu ?
- Speaker #1
Alors... parfois on me envoie le scénario complet parfois on m'envoie que la scène parce que ça a été décidé en amont et c'est là où effectivement pas je pense qu'il ya encore beaucoup de pédagogie à faire c'est que très souvent en tout cas en france et puis bon pas un peu partout on a cantonné la coordination d'intimité aux scènes de sexe simulé de baiser et de toucher l'intimité c'est pas seulement des baisers du toucher ou de ou du sexe simulé L'intimité, c'est ce qui est privé, c'est ce qui nous touche profondément, c'est ce qui va provoquer des vraies émotions. Et donc, ça peut être du racisme, ça peut être rejouer un deuil, ça peut être la maladie, ça peut être plein de choses. Et c'est là où, effectivement, on peut... m'envoyer le script complet et me demander de réfléchir aux questions d'intimité dans le script. Ça a toujours été plus ou moins décidé en amont et donc je me retrouve toujours sur des scènes soit de baisers passionnels, soit sur des scènes de touchés, soit des scènes d'agressions sexuelles, mais très rarement sur, par exemple, une scène d'engueulade ou une scène de racisme, alors que je pense qu'il faut que... Pour le coup, il faut vraiment être là pour préparer tout ça, parce qu'il faut aussi faire le distinguo d'un point de vue subconscient. Le subconscient ne fait pas la différence entre le réel et le joué, et que même si un comédien, une comédienne, connaît son travail, connaît sa manière de travailler, c'est très bien faire le distinguo entre ce qui est joué et ce qui ne l'est pas. Et bien peut-être qu'à un moment, durant le jeu, il va y avoir une fragilité, il va y avoir une faille, il va y avoir un trauma enfoui qui va ressurgir. Et là, on va se retrouver avec une personne qui va repartir avec un bagage supplémentaire, un bagage émotionnel, qui va s'inscrire dans le temps et qui va peut-être laisser des traces qui ne sont pas agréables. Et c'est en ça que je dis la coordination d'intimité, on est là et on repense. On repense, on requestionne. Se sentant en sécurité, les gens se sentent beaucoup plus libres. Donc c'est là où aussi je viens un petit peu taper sur les gens qui disent Oui, mais la coordination d'intimité, ça entrave, ça rajoute un stress supplémentaire, c'est des barrières supplémentaires qu'on nous installe. Non, ce ne sont pas des barrières, c'est simplement un cadre sain. Quand on est face à... surtout à un réal ou une réal qui a une aura et un succès extraordinaire, on va peut-être avoir du mal à lui dire ça, ça ne me convient pas. Donc on va se dire oui, mais il est vraiment bien, il est vraiment bien, j'ai de super confiance. Donc oui, j'accepte. Alors qu'en passant par moi, on peut se permettre de dire oui, j'accepte jusqu'à telle limite. Ça, je refuse. Moi, je suis extrêmement disponible pendant la préparation, pendant le tournage et après le tournage. Alors qu'un réal ou une réal, ou une personne à la mise en scène, le temps c'est de l'argent, tout va très vite. Souvent on doit accuser des retards, on doit accuser plein plein de choses, on doit gérer énormément de choses sur un plateau. Donc moi je pense que toucher à l'intime et toucher aux émotions, ça demande de la disponibilité et du temps.
- Speaker #0
Avant le tournage, souvent on t'appelle. Tu as des appels entre les comédiens et toi, des interactions ? Tu peux leur donner rendez-vous, en fait, pour préparer un peu cette scène ?
- Speaker #1
Oui, alors, il y a un entretien, toujours, des entretiens avec les comédiens, avec le réal, avec les intentions de mise en scène, avec le premier ou la première assistante, avec la production. Moi, je ne ferai jamais faire aux comédiens et aux comédiennes ce qu'ils n'ont pas envie de faire. Donc, il ne faut pas se tromper aussi. C'est qu'on ne se dit pas, on fait venir une coordinatrice d'intimité pour que les comédiens et comédiennes fassent...
- Speaker #0
Ils acceptent.
- Speaker #1
Non, ce n'est pas du tout ça. Pour être très clair, il y a ces entretiens. Et puis, après, il y a la disponibilité à réfléchir à des chorégraphies. Et après, il y a une mise en place, juste avant le tournage. Et dans la mise en place, on revoit un petit peu. Et très souvent... Quand les comédiens et comédiennes se connaissent et qu'ils ont confiance et qu'ils ont reçu leur consentement mutuel et qu'ils ont réfléchi ensemble, et bien parfois, les propositions sur le plateau filmé sont souvent bien plus intéressantes et bien plus poussées. Et puis après, il y a des gens qui ne se supportent pas et à qui on demande de jouer ensemble. Donc là, on essaye, on triche, on trouve des trucs et ça, c'est la magie du cinéma.
- Speaker #0
JINGLE : Plan clap, plan clap. Il y a des accessoires justement pour tricher dans ce genre de scène. Quoi par exemple ?
- Speaker #1
Alors, tout ce qui ne se voit pas à l'écran, de la nudité, personne ne le verra sur le plateau. Qu'on soit bien d'accord.
- Speaker #0
Donc par exemple ?
- Speaker #1
C'est-à-dire que si on ne voit pas les seins d'une comédienne, eh bien personne ne les verra sur le plateau. Donc il va y avoir du scotch ? Voilà, soit du sparadrap corporel, soit des caches-tétons, soit des... coques, voilà. J'envisage la coordination d'intimité qu'à partir du moment où on est dans de la fiction, ce n'est que du sexe simulé. Sinon, on passe dans le porno. Et généralement, les parties génitales sont toujours protégé et on a des accessoires des petits matelas des coques en silicone qui font que ben il n'y a pas de frottement entre les entre les parties génitales voilà c'est ça c'est ça c'est aussi un peu la règle en fait il n'y a pas de frottement dans les parties avec les parties génitales normalement ben là maintenant depuis que enfin moi comme je travaille non il n'y a pas et puis bah c'est une histoire de confort aussi quand on est en train de jouer Et qu'on doit simuler des va-et-vient, des mouvements très explicites d'une relation intime et sexuelle. Si on a besoin de jouer, il ne faut pas qu'on puisse sortir. Là, c'est la comédienne qui parle. Pas sortir de soi pour aller observer la situation. Parce que si on sort de soi, on n'est plus dans le jeu. Donc ça devient pauvre et ça devient inintéressant. Donc préparons le terrain. Et là, pour le coup, c'est très factuel. C'est très... comment dire ? très concret. Oui, concret, c'est voilà, on a des caches sexes, on a des coques en silicone, on a un petit matelas, on sait où on va être touché, on sait ce qu'on va voir à l'écran et à partir de là, ça devient extrêmement plus agréable et extrêmement plus simple de jouer. Alors que si on est là, on se pose la question du cadre, qu'est-ce qu'on va voir ? Est-ce que finalement, on m'a dit qu'on allait me prendre jusqu'aux épaules et qu'en réalité, on va me prendre jusqu'à la taille ? Donc on va voir la naissance de mes seins.
- Speaker #0
Justement, tu es là, par exemple, si un réalisateur se dit Ah non, mais là, ce serait mieux effectivement si on la filme au niveau des seins un peu topless. Nouveauté comme ça, agité.
- Speaker #1
Ah oui, mais là, c'est fini. Ça ne marche plus. Après, bien sûr, il m'est arrivé qu'il y ait des comédiennes qui disent Mais moi, ça ne me dérange pas qu'on voit mes seins. Ou des comédiens qui disent Moi, ça ne me dérange pas qu'on voit mes fesses. Mais ça, généralement. on le sait avant le tournage. Aujourd'hui, avec la coordination d'intimité, il n'y a plus beaucoup d'improvisation. Il y a des libertés que les gens impliqués vont prendre, enfin, les comédiens et comédiennes vont prendre par la suite parce qu'ils sont dans un moment de confiance. Et parce qu'ils ont confiance, ils se disent, ok, pourquoi pas ? Parce que ça racontera plus. Alors, c'est quelque chose qu'on peut encore avoir en France, mais qu'on ne peut pas. pas vraiment avoir aux Etats-Unis, parce qu'aux Etats-Unis, il y a ce qu'on appelle les nudity riders, qui est un espèce d'avenant au contrat qu'ont signé les comédiens et comédiennes avec la production et qui est validé par les agents, dans lesquels tout est dit. Qu'est-ce qui va se passer ? Quels sont les gestes, le toucher ? Quelles sont les parties du corps que l'on va voir ? Donc tout ça, c'est bien spécifié. En France, on n'a pas, parce que la coordination d'intimité aujourd'hui en France existe. mais le poste n'existe pas. Il n'existe pas dans la convention collective. Le jour où cette ligne de coordination d'intimité existera dans la convention collective du cinéma et de l'audiovisuel, là, effectivement, peut-être que ça impliquera la rédaction de New Dirty Riders au contrat des comédiens et comédiennes. Alors, moi, il y a un truc que j'ai constaté, et je trouve ça... Très intéressant, c'est qu'effectivement, parce qu'il y a de la coordination d'intimité, souvent on se pose beaucoup plus de questions. Beaucoup plus de questions sur comment on va filmer. Mais il y a aussi des gens qui ont peur maintenant. Ont peur d'en montrer trop.
- Speaker #0
C'est-à-dire ?
- Speaker #1
C'est-à-dire que ce qui était écrit, finalement, à l'image, il y en a encore moins. Et puis peut-être parce qu'on se sent... plus du tout légitime de le faire. Je ne sais pas, je ne connais pas les vraies raisons. Mais je trouve que c'est dommage. C'est dommage parce que quand il y a quelque chose qui est écrit et que ça a été accepté et validé par les comédiens et comédiennes, eh bien, il ne faut pas que ça devienne juste un petit truc comme ça. Parce que derrière une scène d'intimité, Il y a toujours un sous-texte, et ça, en tant que comédien, tu le sais Magali, et moi je le sais, le sous-texte c'est ce qui prime. De voir deux personnes s'embrasser et s'enlacer, c'est pas pour ça qu'on regarde la scène. On la regarde et elle nous intéresse, et si elle est intégrée à la narration, c'est parce qu'elle raconte autre chose. Et cette autre chose, elle ne doit pas être négligée. Et moi ce que j'aime c'est quand les... les comédiens et comédiennes viennent me voir, me remercier et me dire Eh bien, je me suis sentie beaucoup plus libre et je me suis sentie beaucoup plus créative. Et on a montré des choses intéressantes. Et surtout, on est sortis des clichés. Parce que c'est ça aussi, moi, qui m'interpelle dans ce qu'on peut voir. C'est souvent les clichés.
- Speaker #0
Comme quoi, par exemple ?
- Speaker #1
Les scènes de sexe, souvent, sont très clichés. Moi, chaque fois qu'on me dit, voilà, Najwa, pour cette scène de sexe, c'est tel personnage qu'il y a le lead. Je fais, comment tu as envie de représenter le lead ? Et bien, pour eux, le lead, c'est... Toujours la personne qui a le lead est dessus. Le lead, c'est chacun, le personnage qui a le lead va avoir une attitude, mais c'est surtout en creux et en relief, et celui qui n'a pas le lead, dans son attitude et dans ses regards et dans son jeu, va proposer une posture inférieure, et ce n'est pas par une position sexuelle hyper clichée qu'on va... Je trouve que c'est prendre l'expectateur pour des idiots et puis finalement ne pas faire confiance aux comédiens. Aujourd'hui encore, et ça je le dis, la coordination d'intimité, comme on fait du greenwashing avec l'écologie, on fait de l'intimacywashing avec les coordinateurs et coordinatrices d'intimité. Tout le monde trouve que c'est formidable, mais bon, reste bien à ta place quand même. Donc moi, ce qui m'intéresse derrière la coordination d'activité, c'est comment tous ensemble, et surtout les comédiens et la réalisation, arrivent à mettre en forme cette espèce de curseur des émotions. Et là, moi, j'aime travailler là-dessus, en fait, vraiment. Parce que comme je disais tout à l'heure, si c'est juste pour le consentement et faire la police, ça ne m'intéresse pas. Franchement, ça ne m'intéresse pas plus que ça. Je pense que tout le monde peut le faire. Il y a d'autres gens qui peuvent le faire sur le plateau.
- Speaker #0
Est-ce que justement sur le plateau, tu as des règles de base ? Par exemple, quand il y a une scène d'intimité où les comédiens doivent être en nudité partielle, donc tu dis aux techniciens, donc là, il n'y a que les techniciens, on va dire, nécessaires à la scène qui doivent être sur le plateau. Comment ça se passe ? Est-ce qu'il y a des petites règles de base ?
- Speaker #1
Alors, ça, généralement... moi quand je m'entretiens avec les comédiens et comédiennes, je leur demande quelles sont leurs limites. Je recueille toutes leurs limites et puis par rapport à certaines scènes, je leur demande est-ce que ces scènes-là est-ce que ce serait préférable pour eux qu'il y ait un plateau réduit. Après, ce n'est pas moi qui fais la loi sur le plateau. Généralement, ça va être le second ou le second de là où je leur dis voilà, plateau réduit. Parfois, c'est même le premier. Puisque c'est un peu le maître sur terre, le premier pendant le tournage.
- Speaker #0
Premier assistant.
- Speaker #1
Premier assistant, oui. Donc, c'est lui ou le second, second ou troisième qui vont dire, ben voilà, là, on est en plateau réduit. Qu'est-ce qu'un plateau réduit ? Ce sont juste les personnes nécessaires au tournage. Si on a besoin d'un perchiste, on va garder le perchiste. Si on a besoin d'un pointeur, on va garder le pointeur. En tout cas, voilà, ce sont que les gens qui sont absolument nécessaires. Donc, effectivement, il y a des écrans qui ne seront pas utiles. Mais bon, il suffit que les comédiens, comédiennes sortent et puis on les regarde et on a vu les images. Et puis d'un seul coup, ça fragilise énormément et on peut se sentir extrêmement mal à l'aise.
- Speaker #0
Et donc là, on a parlé tournage, on a parlé de l'avant-tournage. On n'a pas parlé forcément du casting. Est-ce qu'aujourd'hui, il y a des règles, par exemple, un comédien, une comédienne n'a pas le droit, on n'est pas censé passer un casting en sous-vêtements ? Est-ce qu'il y a des règles claires maintenant qui ont été énoncées ? Ou par exemple, on voit des annonces où voilà, nudité partielle. Est-ce que je vais devoir me mettre en culotte ou quoi devant le direcast ?
- Speaker #1
Quand on dit sous-vêtements, ce n'est pas sous-vêtements vraiment. Ça va être des vêtements près du corps pour qu'on puisse voir la silhouette. Parce que parfois, on va chercher un certain type de personne par rapport à une certaine silhouette. Donc, il va falloir demander de venir avec des vêtements un peu serrés. Quand on passe un casting pour une scène de baiser, on n'embrasse jamais. Quand il y a un callback... c'est-à-dire un appel, deuxième ou troisième appel après le premier casting, parce que la personne est susceptible d'avoir le rôle, et bien parfois on va faire des scènes où on va tester un peu la symbiose entre les comédiens, mais on ne va pas leur demander de s'embrasser pour autant, parce que ce n'est pas le propos. On ne va pas leur demander de se mettre nu ou de montrer leur sein pour les filles, parce que... Parce que c'est pas ça, c'est pas un propos non plus. Donc au niveau des castings, il y a malheureusement, et je ne sais pas si vous avez vu la fois où nous sommes quatre coordinatrices d'intimité à être passées à l'Assemblée nationale pour la commission d'enquête contre les violences faites au cinéma, audiovisuel, publicité, spectacles vivants. Il y a une des coordinatrices d'intimité, Noémie, qui avait raconté parce qu'elle est par ailleurs directrice de casting qui disait que elle avait bien précisé dans ses annonces que Effectivement, peut-être qu'au tournage, il y aurait de la nudité, mais par rapport aux self-tapes que les gens devaient envoyer, on n'avait pas besoin de les voir. Ils disaient que dans la carte des self-tapes qu'elles avaient reçues, les femmes montraient leur poitrine, alors que la règle était qu'on ne veut pas voir votre nudité. Donc, il y a aussi à quel point on a envie d'avoir un rôle, et puis surtout... le distinguo entre la séduction professionnelle et la séduction dans la vie. Il y a cette séduction qui est souvent les réales aussi ont choisi des comédiens et des comédiennes et eux aussi ont envie de leur plaire par la narration, par la façon de faire des images, par les choix de lumière, par les choix de mise en scène et souvent ben ça peut être perçu fois de manière très mal perçue. Peut-être qu'un comédien ou une comédienne va dire, mais pourquoi il me drague ? C'est là où il faut vraiment être vigilant. Qu'est-ce que c'est ? Est-ce qu'on a envie de te plaire artistiquement ou est-ce qu'on a envie de te plaire relationnellement ? Voilà. Et puis bon, c'est vrai qu'il y a beaucoup d'égo mais il y a aussi beaucoup de charme dans ce monde-là. Dans ce monde-là, il y a beaucoup... beaucoup de gens extrêmement charismatiques, des comédiens, des comédiennes qui sont extrêmement troublants, des réals qui sont troublants. Il y a des tas de gens qui sont... Tout le monde joue un peu de sa séduction, mais comme dans tous les milieux, tous les milieux professionnels. Donc, il faut vraiment être... En fait, je ne travaille que par rapport aux scènes, aux textes et au contexte pour lequel on m'a fait venir. personne ne viendra me raconter en me disant Moi, je craque pour le réel et il peut me demander ce qu'il veut. Ça n'est jamais arrivé. Je pense que ça n'arrivera jamais. Ce n'est pas à moi qu'on viendra le dire, en tout cas. Je pense que ça restera extrêmement secret. Mais ce qu'il y a, c'est que ce sont surtout des nouvelles pratiques pour un cadre sain, pour que les gens qui font du cinéma aient toujours envie d'en faire, sans jamais le quitter. que perte ses fracas, comme ont pu le faire certaines comédiennes dont on a beaucoup parlé ces derniers temps, et des comédiens aussi, et des directeurs de casting, des gens qui ont vécu des choses extrêmement douloureuses dans leur parcours professionnel. Donc oui, la coordination d'intimité aujourd'hui, c'est de savoir dans quelle mesure c'est pérenne, et comment ça va être perçu dans un an. En me disant, est-ce que ça aura disparu ? Est-ce que ça existera toujours ? Ça, je suis incapable de le dire aujourd'hui. Parce que si les bonnes pratiques deviennent normales et évidentes, après, qu'est-ce que la coordination d'intimité apportera ? Moi, c'est ce que je dis, ça apporte une façon de réfléchir et de penser les narrations autrement. En tout cas, la narration de l'intimité.
- Speaker #0
En France, des formations vont se développer, justement ?
- Speaker #1
Alors, il y a plusieurs formations. Il y en a qui existent, qui sont non-certifiantes. Et moi-même, je vais en donner deux, là, dans les mois qui viennent. Donc, des formations qui sont non-certifiantes, qui sont plus là pour...
- Speaker #0
de la pédagogie pour sensibiliser les gens et puis pour voir s'il y a des vocations qui se créent.
- Speaker #1
Merci, Najwa.
- Speaker #0
Merci beaucoup, Magali.
- Speaker #1
Une dernière question, la question plan-clappe. Dans quel film tu voudrais vivre ?
- Speaker #0
Ah, la question de fou ! La question de fou. Est-ce que c'est un film que j'ai vu et qui m'a bouleversée ?
- Speaker #1
Un film où tu te vois, où tu te dis, j'aurais bien aimé soit avoir ce rôle, ou soit me projeter en fait dans la vie réelle, mais dans ce film, dans le scénario. Je te dis un exemple, Charlie et la chocolaterie, moi j'adorerais. La fontaine au chocolat, le monde idéal.
- Speaker #0
Moi, j'aurais adoré jouer le rôle d'une mafiosa. Je ne suis pas super, super fan de ce qui a été fait, mais par exemple, la Reine du Sud, Reina del Sur, moi j'aurais. adoré avoir ce Ausha. Mais vraiment. Mais jusqu'au bout. Après, il y a sur la route de Madison. Bon, après, ça fait très, très l'or bleu, mais je trouve ça... Je trouve que c'est... Voilà. Le choix de Sophie, aussi. Parce que là... Parce que je pense que quelque chose d'incroyable. Mais bon, ouais, je reste quand même sur mon idée de Mafiosa. Merci. Merci beaucoup. À bientôt.
- Speaker #1
Et coupé ! Plan Clap, c'est fini pour aujourd'hui. A défaut d'avoir une étoile sur Hollywood Boulevard, n'hésitez pas à en mettre 5 sur les plateformes d'écoute si vous avez aimé l'épisode. C'était Plan Clap, un podcast présenté par Magali Butault, Création Sonore, Clément Lombart.