- Speaker #0
La voix, c'est la vie pour moi. Mettre les voix en lien, c'est ça qui fait la vie. Mais aussi, il y a toujours un mais. Parce que moi, quand les gens disent quelque chose, moi j'entends ce qu'ils ne disent pas souvent. Il faut être le plus proche possible de la totale et universelle écoute. Dans la ligne de cœur, par exemple, il y a des moments où je ferme les yeux. Et c'est peut-être la voix qui exprime le mieux le cœur. La parole s'est libérée sur des domaines comme la violence domestique, les abus. Je suis tellement content que des gens qui sont bipolaires, qui savent qu'ils vont avoir des difficultés, viennent, téléphonent et disent à ma collègue, vous pouvez dire à Jean-Marc que je suis bipolaire, il faut qu'il me cadre. Bonsoir à toutes et bonsoir à tous et bienvenue dans votre ligne de cœur. De vive voix.
- Speaker #1
Le monde a besoin de votre parole.
- Speaker #0
Dire, s'exprimer.
- Speaker #1
Prendre la parole, c'est extrêmement important.
- Speaker #0
Je parle en jeu.
- Speaker #1
Je me suis dit, ok, je peux aussi parler.
- Speaker #0
On a la voix du mécontentement, on a la voix de la colère. De vive voix. On a plein de voix. Un podcast de Gabrielle de Sarzan pour réformer.ch
- Speaker #1
Homme engagé avec des valeurs de compassion et de souci de l'autre, chevillé au corps, Jean-Marc Richard est animateur radio en Suisse. Il est le visage de la chaîne du bonheur, du kiosque à musique, mais aussi de la ligne de cœur qu'il co-anime depuis 2012. La ligne de cœur qui donne la parole aux personnes qui veulent se confier, échanger et partager leur expérience de vie. Pourrait-il se qualifier comme passeur de voix ?
- Speaker #0
Ah oui, je pense que ça, c'est un peu le principe de la ligne de cœur, c'est-à-dire prendre le temps de mettre à l'aise les gens pour qu'ils puissent parler de ce qu'ils vivent. Donc, c'est un passeur de voix et passeur de vie, parce que la voix, c'est la vie pour moi. Je ne dirais pas que la vie c'est la voix, mais je dirais que la voix c'est la vie. C'est-à-dire que dès le moment où on prend le temps de dire les choses, on participe à l'évolution de sa propre vie et parfois à l'évolution de celle des autres. Ce qui fait la force pour moi de la ligne de cœur. Quand je suis arrivé comme producteur, je n'avais pas envie de faire une émission que de témoignages. Je voulais faire une émission de témoignages partagés. C'est-à-dire de personnes qui peuvent dire des choses qu'ils ont vécues ou qu'ils vivent et d'autres peuvent dire comment eux ils ont passé ce cap. Et je pense que mettre les voix en lien, c'est ça qui fait la vie et c'est ça qui fait le vivre ensemble, quand on met des voix en lien.
- Speaker #1
Communiquer, c'est d'ailleurs un maître mot pour vous. Qu'est-ce qu'il est peut-être difficile de communiquer aujourd'hui, de dire ?
- Speaker #0
Il est difficile de parler de certains thèmes. Je pense qu'il est difficile de parler de la précarité en Suisse. Il est difficile aussi de parler de ce besoin que nous avons de cacher la haine au chat, parfois, sur certaines situations. que des gens ont vécu, que ce soit dans le domaine de la violence, que ce soit dans le domaine de la vie quotidienne, je pense que tout est assez difficile. Parce qu'on est envahi par une forme d'actualité qui est souvent une actualité internationale et on s'intéresse peu ou très peu aux gens, ou alors on parle à leur place. Et je pense que ce qui est le plus difficile aujourd'hui dans le domaine de la communication, c'est de permettre aux gens principalement concernés de s'exprimer au-delà des clichés. On va faire des micro-trottoirs pour demander aux gens ce qu'ils pensent de X ou Y. Y, ça, ça m'intéresse peu parce que je pense que les gens ont assez d'espace pour le dire. Par contre, ce qui m'intéresse, c'est que les gens parlent de pourquoi ils pensent ça, pourquoi ils vont prendre ou ne pas prendre position par rapport à une chose ou par rapport à quelque chose d'autre. Donc pour moi, c'est ça le plus difficile aujourd'hui, c'est pourquoi tu vis ça, comment tu vis ça. C'est des choses comme ça pour lesquelles il y a peu d'espace. Et quand il y a des espaces, on met, on exergue des situations, on expose des gens aussi. Et parfois, ça peut être dangereux pour les gens, mais aussi... Il y a toujours un mais. Quand on prend par exemple dans les médias un témoignage de quelqu'un qu'on met en exergue, parfois on en rajoute un peu aussi dans la façon journalistique d'aborder le sujet, il y a toujours un mais. Je prends toujours cet exemple. Parler de la précarité il y a encore 15 ou 20 ans, c'était encore plus difficile qu'aujourd'hui. On avait fait une campagne chaîne du bonheur, dont l'objectif était de récolter des fonds pour soutenir les gens qui étaient dans la précarité en Suisse. Les Suisses alémaniques avaient dit nous on ne fait pas. On avait fait nous seuls les romans avec la chaîne du bonheur. Et j'avais cherché pour l'illustrer et pour la radio un témoignage d'une famille. Parce qu'il faut savoir que la précarité ça touche les familles, principalement les familles monoparentales. Aujourd'hui on dit que plus de la 50% des gens qui sont dans la précarité sont des femmes. Et souvent des femmes qui vivent seules avec leurs enfants. J'avais trouvé une famille qui n'était pas monoparentale mais qui racontait sa précarité. Il y avait eu un article dans l'illustré et tout. Et en fait il y avait eu des lettres de lecteurs, des gens qui disaient Oui mais cette famille, il y a 4 ans elle est partie. On est partis en vacances. Et c'était complètement fou pour moi de découvrir ce mais. C'est-à-dire qu'on a tellement de peine à accepter. La souffrance de Jean, qu'on met toujours une relative. Celui qui souffre d'addiction et qui se retrouve dans la précarité, c'est sa faute parce qu'il était en addiction d'être entré dans la précarité. Celui qui, chez nous, vit dans la rue, il y a certainement une raison. pour laquelle il se retrouve dans la rue et on s'intéresse plus à la raison qu'à la situation de la personne. Donc voilà pourquoi c'est difficile aujourd'hui de communiquer. Et le travail est immense, et la ligne c'est qu'une partie de ça. Mais il y a besoin d'espace, de médias pour que les gens puissent prendre le temps de témoigner sans qu'on vienne analyser, nous journalistes, ou la population vienne analyser le pourquoi la personne est dans cette situation. Non, elle est dans cette situation, qu'est-ce qu'on peut faire pour l'aider, la soutenir et l'accompagner ? Pourquoi il y a 40% des gens ? qui auraient le droit à des prestations complémentaires qu'ils ne demandent pas, et 60% des gens qui pourraient bénéficier d'une aide en Suisse qui ne le demandent pas. Parce que justement, on va toujours penser au départ qu'ils ont une responsabilité sur la situation dans laquelle ils se trouvent, et que s'ils sont là, c'est qu'il n'y a pas de fumée sans feu. Et pour moi, cette phrase, c'est comme quand tu veux, tu peux c'est nul. C'est nul et non avenu, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de fumée sans feu, ça ne veut rien dire.
- Speaker #1
la ligne de coeur jean marc richard si ce que vous entendez vous intéresse sachez que nous avons préparé dans la description une fiche qui résume les moments forts de cet entretien ainsi que les liens utiles en rapport avec le sujet
- Speaker #0
Bonsoir, bonsoir à toutes et bonsoir à tous et bienvenue dans votre ligne de cœur. Très très heureux de vous accueillir.
- Speaker #1
Jean-Marc Richard, quel est peut-être le moment où la personne, la voix, qui vous a bouleversé ? Et peut-être si vous y pensez encore aujourd'hui, elle vous bouleverserait encore ?
- Speaker #0
C'est une histoire assez dramatique, mais qui me touche beaucoup, parce que j'ai pas senti, j'ai pas vu venir quelque chose. Et pour moi, ça, c'était lourd à porter pendant un certain temps. C'est une jeune fille, très jeune, parce qu'il faut savoir que dans la ligne de cœur, il y a plus de jeunes qui écoutent la ligne de cœur que Couleur 3. Donc c'est intéressant, c'est très écouté par les jeunes. Où parle-t-on ? des jeunes générations. La plupart des gens qui témoignent, ils ont 35 et 50. C'était une très jeune fille qui vient raconter le fait qu'elle est bipolaire et qui dit à un moment donné dans son témoignage, avec beaucoup d'honnêteté, en fait, on m'a tendu quelques mains, j'ai pas su les saisir. Mais aujourd'hui, j'ai compris tout ça et je voudrais rentrer dans les ordres. Et moi, dans ma tête, je dis rentrer dans les ordres, mais pourquoi vous avez cette envie de rentrer dans les ordres ? Elle me dit pour aider les autres. Alors moi, dans ma tête, je me dis aider les autres, alors j'imagine que ce serait rentrer dans les des ordres, plutôt pas dans un couvent refermé, etc. Donc je lui pose un peu la question, on discute de ça, elle dit non parce qu'elle était plutôt protestante, je crois donc qu'elle voulait être sœur protestante, quelque chose comme ça, parce qu'elle voulait aider les autres, compagnie et tout. Elle parle de tout ça et... À la fin, elle dit Voilà, maintenant, je crois que je suis quelqu'un de bien, je suis quelqu'un d'heureux, etc. On finit. Moi, je trouvais que dans sa voix, il n'y avait que des choses d'une force absolue. Mais le lendemain, juste avant qu'on commence l'émission, un membre de sa famille téléphone en disant Est-ce que vous pouvez ne pas reparler de la jeune fille qui a appelé hier parce qu'elle s'est jetée sous le train ? Et pour moi, ça, ça a été comme un choc. Et aujourd'hui, quand j'y repense encore, je me dis mais... Qu'est-ce que je n'ai pas entendu ? Parce que moi, quand les gens disent quelque chose, moi j'entends ce qu'ils ne disent pas souvent. Mais ce n'est pas dans le jugement. Mais je me dis, je vais les amener à peut-être les aider à dire ça qu'ils ne disent pas. Typiquement, la précarité, on en disait. Les gens ne viennent jamais dire je suis pauvre Ils parlent d'une situation, puis après on leur dit mais vous vous en sortez comment ? Et je n'avais pas senti, je n'avais pas vu. Et en fait, voilà, elle avait téléphoné pour dire je veux passer le lendemain ce qui est rare. En général, les gens, ils viennent le jour même. Et puis, elle avait annoncé à tous ses amis qu'elle allait passer dans la ligne de cœur. Donc je pense qu'elle avait, dans sa tête, il y avait quelque chose qui était prêt. Simplement, moi, je me suis beaucoup posé la question de, le passeur de voix, là, il aurait peut-être dû se rendre compte de quelque chose. Et en fait, non, en réécoutant, puis en discutant après avec les membres de sa famille et autres, c'était, voilà, il n'y avait rien. Mais c'est dire la responsabilité que moi, je pense que nous avons, nous, passeurs de voix, c'est d'aider les gens à dire des choses, mais à un moment donné aussi peut-être de détecter, voilà, j'aurais peut-être dû lui poser une question. Donc je me dis que dans ce... Le métier qui est pour moi un engagement, il faut être le plus proche possible de la totale et universelle écoute. Et il y a des moments où c'est difficile, et ça je pense que c'est encore plus compliqué que communiquer, c'est l'écoute totale, universelle, complète, sans jugement et sentir les choses.
- Speaker #1
Qu'est-ce que la voix dit qu'on ne perçoit peut-être pas autrement d'une personne ?
- Speaker #0
La fragilité. On perçoit beaucoup mieux la fragilité de quelqu'un dans sa voix, sans voir la personne, parce que beaucoup de gens ont appris à ne pas montrer ce qu'ils ressentent ou appris à ne pas montrer leur fragilité, d'abord parce que certaines sont dans le déni, ou d'autres parce que c'est une protection. Et dans la voix, on sent la fragilité. On sent celle du passé, mais on sent celle du présent aussi. Et pour moi, c'est ce qui fait la force de la voix. C'est pour ça que moi, je pense que l'essentiel... De l'écoute, c'est d'être presque avec les yeux fermés sur la personne. Les yeux fermés. Parce que quand moi je vous écoute, je perçois et je vois des choses dans votre regard qui ne sont parfois pas les mêmes que vous exprimez avec votre voix. et on ne peut pas faire ça quand on est en face des gens on ne peut pas fermer les yeux et écouter mais moi dans la ligne de coeur par exemple il y a des moments où je ferme les yeux parce que c'est ma manière à moi de me concentrer et d'être à l'écoute de la personne et c'est plus difficile quand vous êtes en face de quelqu'un mais alors quand vous êtes en face de quelqu'un d'autant plus que vous le regardez par politesse, par respect mais quand on regarde, on crée nous-mêmes quelque chose qui fait que l'autre ressent et elle se sent peut-être d'une manière ou d'une autre un peu déstabilisée par cette façon dont vous la regardez. Donc je pense que la voix, c'est l'essentiel. Je pense que c'est tout, quoi. C'est tout ce qui est exprimé, et c'est peut-être la voix qui exprime le mieux le cœur.
- Speaker #1
Jean-Marc Richard, vous travaillez à cette ligne de cœur depuis 2012, vous co-animez cette émission avec Stéphane Stouder. Qu'est-ce que disent les personnes ? Pourquoi est-ce qu'elles vous appellent ? Est-ce que vous arrivez peut-être à dégager les grands thèmes ?
- Speaker #0
Alors, vous m'auriez posé la question il y a 12 ans, au départ j'aurais pu dégager les grands thèmes, mais en fait ça s'est tellement élargi que c'est assez compliqué de dégager des termes. Une bonne partie d'entre elles viennent pour exprimer ce qu'elles ont fait de leur souffrance, de leur difficulté de vie, de leur chemin caillouteux. D'autres viennent parce qu'elles ont réellement besoin de juste trouver un espace pour dire des choses. Elles partent peut-être dans l'idée de dire une chose et puis à la fin, elles parlent d'autre chose. Donc, il n'y a pas de thèmes, par exemple, qui ne sont pas ou très peu abordés. Oui, ceux liés à la sexualité sont peu abordés, mais ça, je pense que c'est relativement logique parce que c'est quand même quelque chose de la forte intimité. Mais sinon, il n'y a pas de thèmes qui ne sont pas ou qui ne sont plus abordés dans la ligne de cœur. Donc, je n'arriverai pas à définir. Il y a des grandes... thématiques qui sont la santé mentale, la santé physique, la pauvreté, la précarité ou les fragilités en général. Et aujourd'hui, c'est intéressant de voir que dans la ligne de cœur, au moment où on a repris la ligne de cœur comme production avec Daniel Véronne, qui est mon attaché de production, et on bosse les deux vraiment très en lien sur les témoignages, on constatait qu'il y avait peut-être 10% de témoignages qui étaient liés à la précarité. Aujourd'hui, on est à 50%. Donc ça, c'est une évolution. La parole s'est libérée sur des domaines comme la violence domestique, les abus. Ça s'est beaucoup libéré. Il y avait beaucoup moins par le passé. Ça s'est libéré aussi sur des thématiques liées à la santé psychique. Il y a des gens qui sont bipolaires et schizophrènes qui oeuvrent venir parler de leur bipolarité, de leur schizophrénie en direct. Parce que c'est relativement simple, entre guillemets, d'aller faire des interviews de gens qui vivent ces pathologies-là. et puis de ne pas être en direct, et ensuite de monter, de préparer, de réaliser. Mais quand vous êtes en live, la personne, elle est dans un état de déstabilisation qui peut être à la fois positive parce qu'elle est elle-même ou à la fois négative parce qu'elle se fait du mal. Donc là, on doit être très attentif à ça. Donc il y a des choses qui sont libérées. Il y a un peu moins, et ça, ça va peut-être vous étonner, de témoignages autour des maladies physiques. Je pense qu'on peut trouver beaucoup d'espace pour parler de son cancer. On peut beaucoup moins trouver d'espace pour parler du fait qu'on est HP, TDA, H, allons-y avec toutes les abréviations, schizophrène, ou qu'on a fait une dépression, ou qu'on a fait un burn-out. Ça, on trouve très peu d'espace pour en parler. On a peu d'écoute. Si vous dites à quelqu'un, j'ai un cancer, la personne qui est en face de vous... comme elle a déjà entendu d'autres ou rencontré d'autres gens qui ont eu des cancers, elle va vous écouter, elle va comprendre, elle va même avoir une certaine compassion pour vous. Mais si vous lui dites Bonjour, je suis bipolaire C'est plus compliqué. Et c'est pour ça que peut-être chez nous, on a moins de témoignages sur les problèmes physiques. Il reste quand même des choses physiques comme la fibromyalgie, par exemple, qui viennent régulièrement parce que justement, il n'y a pas la reconnaissance. Chez nous, c'est beaucoup des témoignages autour de la non-reconnaissance de certaines problématiques ou de certaines pathologies.
- Speaker #1
Et parmi tous ces thèmes, quel est peut-être celui qui vous touche actuellement le plus ?
- Speaker #0
Moi, c'est la violence et les abus, évidemment, parce que c'est des choses que je connais bien, et puis les addictions. C'est peut-être ces trois thèmes qui me touchent le plus, mais ceux qui m'interpellent le plus, c'est les maladies psychiques. Parce que c'est quelque chose que je connais beaucoup moins bien, même si dans ma famille, il y a eu, très proche de moi, une ou plusieurs maladies psychiques, et que je suis proche aidant pour des gens qui ont des démences ou Alzheimer. C'est mon quotidien, je dirais. Donc, comme c'est mon quotidien, je suis plus attentif. Mais des fois, ça me trouble un peu qu'on ait autant de maladies psychiques chez nous, et je suis tellement heureux que les gens osent venir en parler. Je suis tellement content que des gens qui sont bipolaires, qui savent qu'ils vont avoir des difficultés à être cohérents dans leurs témoignages, viennent en parler. Ils viennent, téléphonent et disent à ma collègue, vous pouvez dire à Jean-Marc que je suis bipolaire, il faut qu'il me cadre. Vous imaginez ? C'est incroyable. C'est-à-dire la conscience de ça. Et moi, ça, ça me touche beaucoup. Et ça me touche aussi tous les gens qui sont dans des addictions, qui arrivent à son sortie, qui se battent et qui osent venir en parler. Donc voilà, c'est peut-être les choses qui me troublent et me touchent le plus.
- Speaker #1
Pourquoi vous dites que les abus, l'addiction, vous connaissez ?
- Speaker #0
C'est des choses que j'ai vécues moi-même. Quand j'étais abusé, quand j'étais petit ou jeune, petit, j'ai connu les addictions. Avec... avec la drogue, donc c'est des choses que je connais, mais c'est parce que je sens que la parole s'est libérée et qu'on ose parler de son alcoolisme comme une maladie et qu'on ose venir dire voilà je suis alcoolique alors qu'il y a quelques années on n'aurait pas osé parce qu'une bonne partie des gens étaient dans le déni et puis une autre partie était considérée comme des gens reclus et puis les abus c'est la même chose, que les gens osent venir en parler donc évidemment quand on a vécu quelque chose on comprend peut-être un peu mieux mais je ne suis pas sûr, moi je prends toujours... Je rigole toujours parce que des fois on fait un peu d'humour. Je dis les meilleurs commentateurs de hockey sur glace, c'est souvent ceux qui n'ont jamais fait de hockey sur glace. Donc il faut faire attention à ça aussi. Ce n'est pas parce qu'on a vécu quelque chose soi-même qu'on est meilleur dans l'écoute. Et puis le sujet qui moi me porte au-delà de mon engagement dans la ligne de cœur et pour lequel on est très attentif dans la ligne puisqu'on a une plateforme sociale, c'est la précarisation des gens. Parce que là, je pense qu'on doit lutter contre la précarisation des gens. Pour moi, la ligne de corps, c'est une façon de lutter contre ça, contre le fait qu'il y a des gens chez nous qui se précarisent de plus en plus et qu'ils ne se font rien, pratiquement rien, à part des ONG ou des associations caritatives qui font un super boulot chez nous, mais avec peu de moyens et puis avec un État qui se retire de plus en plus.
- Speaker #1
Jean-Marc Richard, je suis tombée sur un article où vous parliez de prière. Et vous disiez que prier, c'est une manière de dire merci. Merci notamment pour l'amour et la force que l'on reçoit. Jean-Marc Richard, prier, vous faites ça souvent ?
- Speaker #0
Non. Franchement, non, je ne fais pas ça souvent. Mais ça m'arrive d'être en état de méditation de prière. Et effectivement, vous me rappelez ces prières que j'avais faites pour l'illustrer. Et en fait, je suis dans le merci. Je suis... Pendant que j'étais plus jeune, quand j'étais un peu plus proche de l'Église, quand j'étais plus jeune, j'étais toujours dans la demande, comme beaucoup d'entre nous. On prie Dieu pour cœur, on prie Jésus pour cœur. Et puis je me rends compte que finalement, le remerciement, ça va à l'être supérieur, mais aussi à tous ceux qui participent à l'amour, au vivre ensemble. Parce qu'on est dans une société aujourd'hui qui m'inquiète beaucoup pour le manque de bienveillance, le manque d'emprisonnement. L'impatie est malheureusement aussi le manque de compassion pour les autres. Donc, quand il y en a qui le font, que ce soit en haut ou ici, il faut dire merci. Il ne faut pas oublier de dire merci. C'est très important. Et moi, par exemple, je remercie systématiquement les gens qui viennent témoigner. Alors que les gens qui viennent témoigner, souvent, ils ont envie de vous dire merci à vous parce que vous étiez là au moment. Non, merci. Vous avez déposé un truc. C'est tellement important pour les autres. Ce n'est pas important pour l'émission. L'émission, c'est l'émission de témoignage. On ne fait pas de... du spectacle, on ne fait pas du show avec la ligne de chœur, mais c'est important pour les autres qui ont entendu. Moi, ça m'arrive des fois, après, de leur envoyer encore un message pour leur dire merci pour votre témoignage. Et je pense qu'il faut toujours remercier les gens. On ne le fait pas assez.
- Speaker #1
D'où ça vous vient peut-être justement cette proximité avec des valeurs chrétiennes, on pourrait dire ça ?
- Speaker #0
L'histoire est rigolote. J'ai eu une enfance plutôt heureuse. Avec des fragilités du côté de ma maman qui m'ont beaucoup ouvert, par exemple, à toutes les problématiques de dépression ou autre. Mais j'ai eu une enfance plutôt heureuse et j'étais assez proche de l'église de Chahy à Lausanne. Parce que j'habitais le quartier et en fait, c'était lieu de rendez-vous. Parce que dans les années 70, il n'y avait pas beaucoup d'autres lieux de rendez-vous. Et on se retrouvait à un certain nombre autour de cette église de Chahy. Parfois, c'était le culte du vendredi soir, c'était le culte des jeunes. Puis c'était plutôt pour aller rencontrer des filles et compagnie et tout. Mais dans le fond... Moi, j'ai tout de suite voulu m'impliquer. C'est-à-dire, par exemple, des fois, je menais le culte avec des gens qui sont devenus pasteurs. C'est très drôle. Je pense qu'on avait un peu cette fibre. Et moi, ça m'intéressait très fort le message de Jésus, si vous voulez, qui, pour moi, est un message absolument révolutionnaire aujourd'hui, dans une tendance, disons, sociale et politique qui nous mène à l'extrême, quand même, de plus en plus. Et son message, il est quand même hyper clair. C'est-à-dire que ce n'est pas ce qui m'a sculpté ma sensibilité, mais c'est ce qui a participé à mon engagement, au fait que je m'implique. Je ne pouvais pas aller, moi, écouter un culte et puis juste écouter. Il fallait que je participe. Alors avec les copains, on faisait des cultes. Moi, je faisais le message et puis les autres, ils faisaient le rock. Il y avait un groupe de rock qu'on avait appelé Dove, du reste. Et en fait, je crois que c'est cette envie de faire à passer par l'Église.
- Speaker #1
Vous parliez de Jésus comme quelqu'un qui vous inspirait, c'est toujours le cas aujourd'hui ?
- Speaker #0
Oui, alors bien sûr. On n'a pas trouvé beaucoup d'autres gens. Moi, je ne suis pas dans la tendance marxiste-léniniste, ni dans la tendance Trotsky ou autre, ça n'a jamais été mon truc, le rouge, etc., ou le côté politique clivant, etc. Mais le côté... tolérant, ouvert, respectueux des autres. C'est ça. Moi, je porte en moi très fortement cet engagement de Jésus à mettre les gens ensemble, à ne pas condamner, à ne pas juger et à être le plus à l'écoute des besoins des gens. Ça, je le porte. C'est-à-dire qu'il y a quelque chose de fort dans le symbole de la croix dans l'Église protestante ou dans l'Église catholique qui peut parfois me... dérangé un peu parce que j'ai l'impression qu'il y a un côté un peu dogmatique dans l'utilisation qu'on en fait. Jésus a donné sa vie, ou Dieu a sacrifié son fils pour les hommes et les humains. Oui, j'entends bien ça. Mais le temps qu'il était là, les 30 ans qu'il était là, enfin un peu moins parce qu'au début peut-être un peu moins, mais en tout cas pendant 20 ans, il a ouvert le monde comme aucun autre a ouvert le monde. Aucun. Gandhi a fait peut-être en Inde, on a eu des porteurs de tout ça, Mandela contre l'apartheid, mais lui il a complètement ouvert en quoi ? en moins de 20 ans et c'est cette période là qui moi me touche le plus, plus que celle de sa crucifixion voire même de sa résurrection, c'est vraiment cette période où avec ses disciples où seul il voyage et il change le monde
- Speaker #1
Vous pouvez retrouver un nouvel épisode de ce podcast toutes les deux semaines sur reformer.ch ou sur les différentes plateformes d'écoute Spotify, Apple Podcasts ou Deezer. Et si cet épisode vous a touché ou apporté quelque chose de spécial, montrez-nous votre soutien en nous attribuant 5 étoiles. Dans le prochain volet, on vous propose un entretien avec Marie-Jo Héby, cofondatrice du groupe Sapec, l'association de soutien aux personnes abusées dans une relation d'autorité religieuse. Elle interviendra en écho à Ella, notre invitée du premier épisode de ce podcast, toujours disponible sur les plateformes. Thierry Châtel était à la réalisation et Maxi G à la production.
- Speaker #0
De vive voix.