- Speaker #0
On me traite assez souvent de sorcière et on voit bien mon côté rebelle. Je me suis dit qu'il fallait qu'on aille porter cette parole féminine et montrer à ce patriarcat catholique masculin que ce n'était plus possible de garder le pouvoir pour eux tous seuls.
- Speaker #1
De vive voix. Le monde a besoin de votre parole.
- Speaker #0
Dire,
- Speaker #1
s'exprimer. Prendre la parole, c'est extrêmement important. Je parle en jeu.
- Speaker #0
Je me suis dit, ok,
- Speaker #1
je peux aussi parler.
- Speaker #0
On a la voix du mécontentement, on a la voix de la colère.
- Speaker #1
De vive voix.
- Speaker #0
On a plein de voix.
- Speaker #1
Un podcast de Gabriel de Sarzan pour réformer.ch
- Speaker #0
Si je devais me présenter en quelques mots, je dirais que je suis théologienne féministe, Robin.
- Speaker #1
Sylvaine Landrivon est une femme qui a écrit une dizaine de livres dont le premier s'intitule Faites les terres à propos des femmes, un livre paru en 2014. Et le dernier qu'elle a écrit s'appelle Les femmes qui ne sont pas les femmes La part des femmes relire la Bible pour repenser l'Église, elle s'est parue en janvier 2024. Cette femme pétillante est aussi connue pour avoir candidaté pour devenir évêque d'un diocèse virtuel, c'était en 2020. Mais qu'est-ce qui lui a pris ?
- Speaker #0
Eh bien, quand je me suis aperçue à la suite d'Anne Soupa, qui elle-même avait candidaté pour devenir évêque de Lyon, que cela chamboulait complètement le monde catholique, je me suis dit qu'il fallait qu'on aille avec elle porter cette parole féminine et montrer à ce patriarcat catholique masculin que ce n'était plus possible de garder le pouvoir pour eux tout seuls.
- Speaker #1
Vous mentionnez Anne Soupa, on peut peut-être juste rappeler qui c'est ?
- Speaker #0
Anne Soupa, c'est une journaliste théologienne qui a créé le comité de la jupe. En 2008, à la suite des propos de l'archevêque de Paris, qui disait à propos des femmes, c'est bien joli d'avoir une jupe, mais encore faudrait-il avoir un cerveau. Donc elle s'est fâchée et avec Christine Pedotti, elles ont monté une association qui s'appelle le Comité de la Jupe. Et aujourd'hui, à la suite d'Anne Soupa, je suis co-présidente de ce Comité de la Jupe, justement, pour promouvoir l'égalité des femmes et des hommes dans l'Église catholique.
- Speaker #1
Et donc c'était en 2020 que vous avez fait cette candidature pour devenir évêque et vous avez reçu une menace de mort assez rapidement. Sylvaine Landry-Von, comment est-ce qu'on vit une telle menace ? Comment est-ce qu'on reçoit ces mots ?
- Speaker #0
Alors c'est d'une violence incroyable, d'autant que la lettre anonyme émanait de quelqu'un qui se prétendait prêtre. Je me disais c'est curieux que dans l'église catholique qui prône l'amour du prochain, quand la moitié de l'humanité que représentent les femmes demande le droit à la parole, on les menace de mort. Et il se trouve que c'est mon petit-fils qui a ouvert cette lettre parce qu'heureusement je recevais aussi des lettres de félicitations. Il a été tellement choqué que je me suis dit qu'il faut qu'on porte plainte et qu'on alerte les médias pour expliquer que ce n'est pas acceptable, que les femmes ont le droit aussi de revendiquer le droit à la parole. Elles portent une voix qui peut s'exprimer, qui doit pouvoir s'exprimer. Donc j'ai réagi à cette violence par quelque chose d'un peu violent qui était du militantisme pur.
- Speaker #1
Donc c'était une façon pour vous de vous affirmer face à cette violence-là, c'était de continuer à militer.
- Speaker #0
Oui, parce que j'avais choisi en tant que docteur en théologie d'écrire pour expliquer l'importance de la place des femmes à côté de celle des hommes. Et ça n'avait aucune prise. Et quand j'ai vu que sur le terrain militant on pouvait se faire entendre, je me suis dit qu'il fallait porter la voix autrement que par l'écriture. Il fallait passer à un stade supérieur. donc militer.
- Speaker #1
Et cette menace de mort, elle vous a en fait confirmé dans ce travail de militantisme ?
- Speaker #0
Complètement. Parce que je suis plutôt universitaire, je n'avais rien de la féministe de base qu'on trouve dans les manifestations, et ça m'a donné l'élan pour justement l'exprimer autrement, et c'est là que j'ai souhaité m'impliquer davantage au comité de la jupe.
- Speaker #1
Sylvaine Landry-Von, vous dites volontiers que c'est dans la puissance des personnages féminins de la Bible que vous puisez l'énergie pour témoigner encore et encore. Mais finalement, en quoi consistent vos témoignages, votre parole ?
- Speaker #0
Je m'appuie effectivement sur la façon dont j'ai lu et relu la Bible en la dépouillant de son androcentrisme, c'est-à-dire sa façon dont les hommes se sont appropriés l'interprétation des textes. Je me suis aperçue que dès la Genèse, on triche dans la façon dont on parle de l'humain qui a été créé homme et femme. Et on triche encore quand on expose la façon dont on présente Ève, comme si c'était elle qui était porteuse du péché. attribuant aux femmes tout ce qui est mal et aux hommes tout ce qui est bien. Le texte hébreu ne dit pas ça du tout. Et puis après, j'ai poursuivi plus loin, je me suis aperçue que le personnage de Judith était un personnage extraordinaire, et voilà qu'une femme qui n'est pas mère, qui n'est pas vierge, elle a eu un mari, sauve le peuple de Dieu, sauve le nom de Dieu. On n'en parle jamais. Et Elisabeth Parmentier a bien voulu préfacer ce premier livre que j'ai écrit, qui était sur le personnage de Judith.
- Speaker #1
Donc une théologienne genevoise.
- Speaker #0
Absolument, et une grande professeure de théologie protestante. Et puis après j'ai travaillé beaucoup le personnage de Marie-Madeleine. Pour m'apercevoir que cette petite voix à l'intérieur de moi qui me disait depuis toujours Va, va vers les autres, va vers toi je l'avais déjà trouvé dans le personnage d'Abraham, quand il quitte son pays et qu'on lui dit Va, pars Je l'ai retrouvé curieusement chez Marie-Madeleine, et là ça m'a sauté aux yeux, quand le Christ ressuscité lui dit Va vers mes frères et dis-leur Et je me suis dit donc les femmes ont aussi pour mission d'aller vers les autres et de transmettre. Et c'est comme ça que j'ai créé mon diocèse virtuel qui a en devise Va vers mes frères et dis-leur à la suite de Marie-Madeleine, qui est la première des apôtres. Donc je me suis dit, on ne doit pas se taire, on doit porter le message. Et puis j'ai continué à travailler pour m'apercevoir que dans l'Évangile, il y a Marthe, qui sait aussi témoigner très bien de ce qu'est la foi et la résurrection, et il y a tout un tas de femmes qu'on dissimule. et qui sont des personnages très importants qui portent la parole de Dieu. Donc à nous les femmes d'en témoigner et de les faire connaître. Et il ne suffit pas d'écrire, il faut aussi le dire par les médias, par les journaux, par notre militantisme, puisque l'Église catholique refuse de l'entendre.
- Speaker #1
Si ce que vous entendez vous intéresse, sachez que nous avons préparé dans la description une fiche qui résume les moments forts de cet entretien ainsi que les liens utiles en rapport avec le sujet. Qu'est-ce que ces prises de parole, qui sont les vôtres aujourd'hui, disent de vous ?
- Speaker #0
Je pense que plus le temps passe, plus elles révèlent mon côté rebelle et ma dénonciation de l'injustice faite aux minorités, faite aux discriminés et faite à la moitié de l'humanité, que sont les femmes. Et quand je vois qu'on est toujours, depuis 40 ans, en retard ou en train de reculer, récemment, le pape... avait convoqué un synode qui devait traiter de la place des femmes et éventuellement du diaconat féminin dans l'Église catholique. On devait en parler en octobre 2024. Et là, tout d'un coup, marche arrière encore une fois, on ne traitera pas le problème du diaconat féminin. En nous disant que ce n'est pas mûr, que c'est trop tôt. Sauf que depuis 1967, on nous dit que ce n'est pas mûr, que c'est trop tôt. On va créer une commission pour étudier la question. Et tous les dix ans, on recule. On revient, on recule, il ne se passe rien. Donc il va vraiment falloir soit contourner cette institution qui refuse notre expression, soit la bousculer vraiment. Mais on ne peut pas continuer aujourd'hui, quand toute la société civile occidentale a compris l'importance de la place des femmes, à accepter que notre voix soit interdite dans l'Église catholique.
- Speaker #1
Est-ce que ça veut dire que votre voix finalement n'est pas assez puissante, pas assez forte ?
- Speaker #0
Peut-être que notre voix n'est pas assez puissante, ou peut-être aussi que le pouvoir clérical, aujourd'hui encore, est tellement puissant, lui, qu'il réussit à nous faire taire quoi qu'il arrive. Parce que des mouvements féministes, il y en a. Il y a Maria 2.0 en Allemagne, il y a Donne per la Chiesa en Italie. En France, il y a plusieurs associations, mais il ne se passe rien. L'institution refuse de nous entendre. Et moi, dans mon dernier livre, La part des femmes, je suggère qu'on contourne l'institution. Parce que l'important, à mon avis, ce n'est pas tant l'Église catholique que le message de l'Évangile. C'est ce message qu'il faut porter. Et si la voie catholique nous empêche de transmettre la joie de l'évangile, alors peut-être qu'il faut contourner l'institution et prêcher la parole autrement. C'est ce que j'ai fait d'ailleurs, je dois le dire, pour le mariage de mon dernier fils, qui voulait une bénédiction de mariage. et j'ai proposé à Laura et Théodore de les bénir moi-même et de faire moi-même la célébration. C'est ce que nous avons fait. Alors nous ne l'avons pas fait dans une église, ils ne sont pas officiellement mariés selon le rituel catholique, mais le Seigneur était avec eux, et nous avons cité Paul et nous avons travaillé les textes bibliques.
- Speaker #1
Qu'est-ce que la voix d'une femme qui transmet l'évangile, en quoi elle est peut-être différente de la voix d'un homme ?
- Speaker #0
Elle n'est pas forcément différente, mais elle parle d'une expérience autre. Donc elle va pointer très vite tout ce que le patriarcat a instrumentalisé pour le rejeter. Quand par exemple on parle de Marie-Madeleine, jamais une femme qui relie les évangiles n'associera spontanément la pécheresse avec l'ami de Jésus. C'est une trahison faite par Grégoire Le Grand qu'aucune lecture sérieuse ne peut adopter. On sait que c'est le schéma de la rétribution qui m'est... Le péché au centre qui est à l'origine de ça, jamais les femmes ne tomberont dans ce panneau. Parce que la lecture féminine va montrer que c'est l'amour qui est premier. Que ce qui est donné c'est par grâce et qu'après par amour on suit le Christ. Et c'est pas pour se repentir d'un péché évidemment de chair quand il s'agit de femmes qu'on aurait choisi ça. Donc tout est vrillé et je crois que la parole des femmes va mesurer plus vite et mieux que la plupart des hommes. Ce genre de distorsion dans le texte, ça ne veut pas dire que des hommes ne l'ont pas vue. Je crois que ça veut simplement dire qu'il faut ouvrir toutes les possibilités de lecture de la Bible et que personne n'a le droit de la confisquer. Mais je ne crois pas à une complémentarité femmes-hommes qui ferait que les femmes seraient plus dans l'affectif ou le soin, les hommes plus dans l'intellect. Ça, je ne le crois pas du tout. Simplement, ouvrons toutes les possibilités de lecture et de transmission, à toutes et tous.
- Speaker #1
Est-ce que vous arrivez à vous faire entendre ? Et puis, quel est votre public quand vous voulez faire valoir la parole des femmes ?
- Speaker #0
Alors, c'est difficile de savoir qui on touche. avec notre militantisme, mais je suis contente de voir qu'au comité de la jupe, il y a de plus en plus de jeunes, de jeunes femmes, de jeunes hommes qui nous rejoignent et qui ont envie de faire église autrement, qui veulent sortir de l'entre-soi clérical qui est hyper conservateur, qui rejette l'avortement, qui rejette les principes d'amour qui sont dans l'évangile. Donc qui sont exactement ces gens ? Je ne sais pas exactement. Ce que je sais, c'est que le nombre d'avocats... adhérent au comité de la jupe, a doublé en un an et demi, depuis qu'on milite encore plus.
- Speaker #1
Est-ce que prendre la parole, Sylvaine Landry-Von, vous donne de la force à vous ?
- Speaker #0
Oui, et j'y trouve une joie que je ne trouvais pas dans l'écriture. Parce que quand on parle, on s'adresse à quelqu'un de vivant, soit en conférence, soit à la radio, mais on sait qu'il y a des gens qui entendent ce qu'on dit. Quand on écrit, on n'est pas certain d'être lu, pas certain d'être compris. J'échange avec vous et vous pouvez m'interroger si je dis quelque chose qui n'est pas clair. Ce que j'écris, ça s'en va et je ne sais pas où, et je ne saurais jamais comment... C'est compris.
- Speaker #1
Est-ce que ça vous libère aussi cette prise de parole ou cet échange par les mots de façon audible ?
- Speaker #0
Je ne parlerai pas de libération parce que je crois que l'écrit me libère davantage que le fait de parler. Parce que c'est plus facile pour moi d'écrire que de parler. Mais je pense que c'est important de témoigner pour montrer aux femmes et aux hommes qui vivent le même constat d'incohérence que moi, qui ne sont pas... la seule. Et qu'on est de plus en plus nombreux et nombreux à porter ce message d'injustice dans l'Église catholique. Donc pour ça, c'est important pour moi de parler.
- Speaker #1
Et là, vous parlez de l'Église catholique, mais est-ce que c'est des murs à faire tomber au-delà ?
- Speaker #0
Alors, dans l'Église catholique, c'est sûr qu'il y a des murs à faire tomber. Le pape François fait ce qu'il peut, le pauvre, pour essayer d'y arriver. Il explique qu'il faut une Église Ils ont sorti, il explique que le Christ est enfermé à l'intérieur de l'Église et qu'il crie pour sortir. Il reprend un verset de l'Apocalypse au chapitre 3 qui l'inverse. Je suis dedans et je crie. Non, là c'est le Christ qui voudrait sortir et non pas entrer. Et je crois que c'est notre rôle d'aller vers les autres, de crier pour sortir en disant arrêtons ces injustices. L'Église a été capable de le faire contre la peine de mort. puisque maintenant je ne pense pas qu'il existe beaucoup de chrétiens qui soient favorables à la peine de mort, encore que... Ça revient. Pareil pour l'esclavage. Donc je pense qu'on pourrait accepter l'idée d'accueillir l'autre tel qu'il est, sans discrimination.
- Speaker #1
Et la femme ?
- Speaker #0
L'autre, c'est la femme, c'est l'étranger, c'est le migrant, c'est celui qu'on n'aime pas et qu'il faut accueillir quand même. Ça c'est important, mais je ne suis pas certaine que ce mur-là soit si facile à faire tomber, surtout dans un monde actuel occidental, où au contraire on voit tout se refermer, se densifier autour d'un entre-soi qui rejette l'autre, qui rejette la différence. Donc peut-être qu'il devient de plus en plus urgent d'élever la voix et de dire non à tout ça. pour s'ouvrir à l'amour de l'autre, au respect de l'autre.
- Speaker #1
Vous avez mentionné quelques personnages de la Bible qui vous inspirent, comme Judith, comme Marie. Qu'est-ce qu'ils vous disent, ces personnages-là ? Qu'est-ce qu'ils vous disent aujourd'hui ? En quoi ils vous nourrissent finalement ?
- Speaker #0
Eh bien, ce sont des personnages, pour le coup, qui me libèrent, parce que ces personnages montrent qu'on peut avoir de la force. dans la faiblesse, qu'on n'est pas obligé d'être héroïque. David, il était tout petit face à Goliath, il a gagné. Marie-Madeleine, elle n'était pas quelqu'un d'important, son témoignage n'allait pas être reconnu, puisque c'était une femme. Jésus l'a choisi quand même pour partir en mission. Et ça m'a conduite à aborder un personnage qui me faisait très peur, c'est celui de la mère de Jésus, Marie. Parce que dans l'Église catholique, on en fait une demi-déesse, on l'appelle Reine du Ciel, oubliant carrément que le prophète Jésus Jérémie avait déjà accusé les gens qui traitaient la compagne de Dieu à Shéra de Reine du Ciel. On oublie, on la déifie, et je ne voulais pas aborder cette femme, jusqu'à ce que je relise le Magnificat, et que je m'aperçoive que d'abord elle dit un oui très subversif, et qu'en plus, par ce texte du Magnificat, elle annonce tout le programme de son fils, et qu'elle est du côté des humiliés, elle est du côté des faibles, elle est du côté de ceux que le pouvoir en place laisse sur le bord du chemin. Et en même temps, je me suis aperçue que cette femme, Marie, est celle qui donne naissance à Jésus, non pas dans une histoire virginale qui serait de la gynécologie, mais dans l'évangile de Jean. Elle le pousse à se révéler à Cana en lui disant, regarde, ils n'ont pas de vin, tu es mon fils, le fils de Dieu aussi, tu peux faire quelque chose et donner de la joie, de la vie à ces hommes. C'est elle qui le lance dans sa mission. Et là, je me suis dit, donc... Les femmes, parce que Marie n'est pas une déesse, c'est une femme, comme moi, on peut avoir ce pouvoir d'impulser l'énergie, de donner l'envie aux autres d'avancer quand tout est contre nous. Marie, elle a risqué sa vie en annonçant qu'elle avait un fils de personne, et elle y a été quand même. Alors moi, je peux bien suivre ce modèle-là. Je suis incapable de suivre le modèle d'une vierge mère. C'est un non-sens. En revanche, les femmes de... de la Bible, qui dans leur faiblesse, dans ce qu'elles sont, sont capables de porter le nom de Dieu, alors avec mes petits moyens je peux les suivre. C'est ça que je me suis dit.
- Speaker #1
Vous mentionnez le Magnificat, c'est-à-dire ?
- Speaker #0
Le Magnificat, c'est le premier texte, le plus long texte mis dans la bouche d'une femme dans l'Évangile de Luc, où Marie apprend qu'elle attend un enfant et proclame ce texte, où elle explique que... sa joie d'attendre un enfant et qui va être ce fils et qu'est-ce qu'il va faire
- Speaker #1
Sylvain Landry qu'est-ce qui vous touche dans le quotidien des femmes aujourd'hui ?
- Speaker #0
Et ce qui me touche dans le quotidien des femmes, c'est que malgré tous les combats pour la place des femmes, pour une reconnaissance des femmes, j'ai l'impression qu'on ne parvient jamais à quelque chose de totalement acquis. Par chance, aujourd'hui en France, on vient de mettre dans la constitution française le droit à l'avortement. Au départ, je me disais, est-ce que c'est important ? Puisque le droit, on l'a. Quand je vois qu'aux États-Unis, quand je vois que de partout... Le droit des femmes recule au point qu'on leur enlève ce droit par certains endroits, qu'on apprend qu'il y a même des pays d'Afrique où on revient sur l'excision. Et je me dis que vraiment il faut faire très attention, que l'égalité femmes-hommes, même dans nos sociétés occidentales, n'est jamais acquise. Et qu'encore aujourd'hui les femmes sont moins payées que les hommes, que la répartition des tâches ne se fait pas à égalité toujours, même dans les jeunes générations. Et quand j'entends des jeunes catholiques au JMJ dire à 30% je crois des sondés que la place d'une femme ce serait d'abord d'être mère de famille et d'avoir des enfants, j'ai réagi dans une tribune de la Croix, ça m'a fait froid dans le dos en me disant mais jusqu'où est-ce qu'on va régresser ? Le droit des femmes, il est le même que le droit des hommes, et ce n'est pas plus dans la sphère privée que dans la sphère publique. Chacun doit s'exprimer où il veut, où il peut, sans discrimination.
- Speaker #1
Est-ce que vous avez le sentiment que c'est plus difficile d'être une femme aujourd'hui que précédemment ?
- Speaker #0
Ça non, je crois que c'est quand même plus facile aujourd'hui. Aujourd'hui, en Occident, en Europe, je crois que les combats menés depuis le MLF, depuis les années 60-70, ont quand même obtenu des acquis. Une jeune fille aujourd'hui peut faire des études, elle peut presque être autonome, on n'a plus besoin de demander la permission à un mari pour faire un chèque, on peut voter depuis 1940 et quelques ans. En France, il y a quand même des acquis. Mais en voyant monter tous les populismes, je me dis que ces acquis sont fragiles. Et que c'est le devoir des femmes de tout faire pour les préserver.
- Speaker #1
Et qu'est-ce que vous aimeriez leur dire à ces femmes ?
- Speaker #0
J'aimerais leur dire ne relâchez rien. Ne rendez rien de ce qui vous a été donné. Attention au renoncement. Attention à ce que la bienveillance pourrait faire. au détriment de ce qui a été donné aux femmes.
- Speaker #1
Et le fait qu'elles ont une parole à faire valoir, c'est important ?
- Speaker #0
Bien sûr, et on le voit bien au niveau de la religion. C'est vital que les femmes puissent s'exprimer. Ce sont des hommes dans l'Église catholique qui donnent les consignes de contraception, de loi sur la famille. Mais à quel titre ? Puisqu'ils sont célibataires, qu'ils n'ont aucune connaissance, aucune compétence, les femmes doivent s'exprimer, doivent relire les textes. sans androcentrisme, doivent intervenir en morale sociale et familiale, elles ont leur place, elles ont leur mot à dire, elles ont les compétences pour accéder à la gouvernance, à la transmission, à l'enseignement. Donc il faut que leur parole revendique toutes ces charges. C'est important. on me traite assez souvent de sorcière et on voit bien mon côté rebelle mais je pense que Ce que je dis peut peut-être être entendu dans le sens où quand même je suis portée par mon envie de partager la joie de l'évangile, la force de l'évangile et que je ne crois pas trahir ce message. Donc peut-être ça s'entend et que peut-être on peut l'intégrer à une démarche chrétienne.
- Speaker #1
Et c'est quoi le message de l'évangile fondamental pour vous ?
- Speaker #0
Que tout réside dans la relation avec l'autre, avec autrui, quel qu'il soit. Et que l'important, c'est de respecter l'autre et de partager avec lui, de partager son amour, mais de partager aussi ses contradictions, ses dysfonctionnements, pour avancer ensemble. Depuis la Genèse jusqu'à la Pentecôte, tout nous dit que l'amour du Christ se dit dans la relation avec l'autre, dans l'échange, en toute sororité, fraternité, sans hiérarchie, sans barrière. Donc il faut... laisser ce courant passer, s'offrir à l'autre, se recevoir d'un autre, et l'écouter et lui dire qu'on l'aime. C'est ça pour moi l'évangile.
- Speaker #1
Et après la Pentecôte, qui signifie donc l'esprit saint qui vient sur terre ?
- Speaker #0
Après la Pentecôte, à nous de jouer. Et c'est là où on se dit qu'on a commencé à monter des barrières. Et mon vœu, ma prière, c'est de casser les barrières qui empêchent les hommes et les femmes de vivre cette fraternité-sororité où tout le monde s'entend, tout le monde se comprend.
- Speaker #1
Vous pouvez retrouver un nouvel épisode de ce podcast toutes les deux semaines sur reformer.ch ou sur les différentes plateformes d'écoute Spotify, Apple Podcast ou Deezer. Et si cet épisode vous a touché ou apporté quelque chose de spécial, montrez-nous votre soutien en nous attribuant 5 étoiles. Thierry Châtel était à la réalisation et Maxi J à la production.
- Speaker #0
Merci.
- Speaker #1
De vive voix.