undefined cover
undefined cover
2/2 Pr Georges Mantion: confessions d’un chirurgien légendaire cover
2/2 Pr Georges Mantion: confessions d’un chirurgien légendaire cover
Super Docteur - médecine générale

2/2 Pr Georges Mantion: confessions d’un chirurgien légendaire

2/2 Pr Georges Mantion: confessions d’un chirurgien légendaire

31min |26/12/2024
Play
undefined cover
undefined cover
2/2 Pr Georges Mantion: confessions d’un chirurgien légendaire cover
2/2 Pr Georges Mantion: confessions d’un chirurgien légendaire cover
Super Docteur - médecine générale

2/2 Pr Georges Mantion: confessions d’un chirurgien légendaire

2/2 Pr Georges Mantion: confessions d’un chirurgien légendaire

31min |26/12/2024
Play

Description

Dans cet épisode exceptionnel, j’ai eu le privilège d’interviewer le Pr Georges Mantion, chirurgien de renommée mondiale, pionnier de la transplantation hépatique, avec plus de 600 greffes réalisées et 30 000 interventions à son actif. En 2015, son parcours exemplaire a été récompensé par la Légion d’honneur, témoignant de son engagement pour l’excellence médicale et la transmission du savoir.


Au fil de cet échange riche et inspirant, nous avons exploré :


✅ Son parcours remarquable : de ses débuts à la Faculté de Besançon à ses missions internationales, notamment en Chine, où il a formé des générations de chirurgiens et contribué à la lutte contre l’échinococcose alvéolaire.

✅ La gestion du stress en chirurgie : des astuces pour les jeunes praticiens, mettant en avant l’importance de l’authenticité, de la préparation technique et de l’introspection.

✅ Ses plus grands succès et échecs : de la transplantation d’urgence d’une jeune patiente atteinte de la maladie de Wilson à l’émotion intense liée à la perte tragique de collègues lors d’un accident d’avion.

✅ La relation patient-médecin : comment maintenir une empathie sincère tout en gérant les défis émotionnels de la pratique médicale.

✅ Les défis de la médecine actuelle : hyperspécialisation, temps médical réduit, accès aux soins, et avenir de la formation médicale.


Un épisode riche en enseignements pour tous les praticiens, à ne pas manquer !


Vous savez comme le temps nous manque en consultation: C’est là que Pulse Life Premium peut faire toute la différence, c'est mon partenaire sur cet épisode.
Cette solution pensée pour nous, médecins généralistes, intègre directement dans notre logiciel métier des outils fiables, toujours à jour, et propulsés par l’intelligence artificielle. Que ce soit pour accéder à des algorithmes interactifs, une base médicamenteuse complète, ou encore des recommandations médicales synthétiques, tout est à portée de main. C'est hyper simple: cette extension se superpose à notre logiciel métier, et ses outils couvre 100% des motifs de consultation de patients
Vous pouvez l’essayer et profiter d’une offre exclusive à moindre coût, sans engagement, en cliquant sur ce lien; Allez jeter un œil, vous ne serez pas déçus:
https://chromewebstore.google.com/detail/pulselife-premium/eooipdaghfmdpofapjlfegadjanimlpo


Rretrouvez moi sur insta:

https://www.instagram.com/dr.matthieu.cantet


Et sur linkedin:

https://www.linkedin.com/in/matthieu-cantet-4a5591294/



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Super Docteur, c'est le podcast des médecins généralistes. Le podcast qui vous transmet les recommandations de bonne pratique et les résultats des grandes études qui vont changer vos habitudes. Super Docteur, c'est la découverte de méthodes de soins innovantes et des interviews de soignants inspirants qui boosteront votre motivation. Un contenu court et pratique, chaque semaine, pour tous les médecins. Vous savez à quel point nos journées peuvent être intenses et comme le temps nous manque en consultation. C'est là que Pulse Life Premium peut faire toute la différence, c'est mon partenaire sur cet épisode. Cette solution pensée pour nous, médecins généralistes, intègre directement dans notre logiciel métier des outils fiables, toujours à jour, mais propulsés par l'intelligence artificielle. Que ce soit pour accéder à des algorithmes interactifs, une base médicamenteuse complète ou encore des recommandations médicales synthétiques, tout est à portée de main. C'est hyper simple, cette extension se superpose à notre logiciel métier. Et ces outils couvrent 100% des motifs de consultation de patients. 95% de nos confrères ayant testé Pulse Life Premium affirment gagner en sérénité et gagner du temps. Et aujourd'hui, vous pouvez l'essayer et profiter d'une offre exclusive à moindre coût, sans engagement, en cliquant sur le lien dans les notes de l'épisode. Alors reprenez la maîtrise de votre temps avec efficacité, avec Pulse Life Premium. Allez jeter un œil, vous ne serez pas déçu. Merci de me retrouver dans ce deuxième épisode de Superdocteur, au cours duquel je me suis entretenu avec le prestigieux... professeur Georges Manchion. Dans le premier épisode, mon prestigieux invité nous a décrit sa vie faite de milliers d'opérations et de voyages à l'étranger. Et dans ce deuxième et dernier épisode, je vous propose d'écouter avec moi la suite de mon entretien, au cours duquel Georges Manchion va nous donner des conseils pratiques à appliquer pour nos confrères, nos consoeurs, médecins et chirurgiens évidemment. Je vous remercie beaucoup d'être toujours plus nombreux à écouter ce podcast et si vous voulez m'aider simplement, vous pouvez parler de mon travail à vos consoeurs, vos confrères. et vous abonner à ce podcast. Excellente écoute ! Vous avez fait 600 greffes deux fois, vous m'avez rapporté en début de ce podcast 30 000 interventions chirurgicales qui ont été consignées. J'imagine que certaines d'entre elles étaient extrêmement stressantes et j'ai une question à vous poser. Est-ce que vous aviez des techniques particulières pour gérer ce stress en pratique, avant des opérations aussi périlleuses que des greffes dont vous nous avez décrites ? Est-ce que vous avez des techniques que vous pouvez nous partager, notamment pour les jeunes chirurgiens qui nous écoutent ?

  • Speaker #1

    Alors, bien sûr, du stress, il y en a dans notre métier, ça c'est sûr. Le stress, il est alimenté par quoi ? C'est la crainte de mal faire ou de faire du mal. Il ne faut pas oublier quand même que l'acte chirurgical, c'est un acte qui est très intrusif. C'est une véritable agression du corps humain, qui n'est possible d'ailleurs que par... le fait d'une dérogation du code civil. C'est une dérogation, c'est inscrit. Dérogation du code civil. Ça veut dire que si vous sortez de ce cadre, et c'est pas forcément facile de savoir, sortir du cadre, qu'est-ce que c'est ? C'est faire une variation dans une technique opératoire qui n'est pas validée. Ça risque d'être interprété comme une sortie du cadre. Donc, on comprend qu'il puisse y avoir du stress. Alors, la gestion du stress, moi j'en ai eu plus que ma dose, mais c'est difficile. Pour se préparer à ça, voilà ce que je peux dire. Ça passe d'abord par la maîtrise de la technique de l'acte opératoire. Il faut avoir une bonne maîtrise technique et la connaissance des risques. Quel risque je fais courir ? Alors ça, ça s'apprend lors de la formation, mais ça s'apprend toute la vie, toute la vie, avec l'analyse des résultats, des échecs. Alors on peut dire aussi que, là on se place à un niveau, on va dire philosophique, il y a un vrai besoin d'authenticité. C'est-à-dire, c'est quoi l'authenticité ? C'est-à-dire avoir la capacité à agir selon ses convictions. C'est-à-dire, on ne va pas faire une opération en reculant. Je ne sais pas la faire, je ne vais pas la faire, c'est tout. Bien se connaître, c'est ça, bien se connaître. Je sais faire ça, je peux faire ça. Je ne sais pas le faire, je vais avoir du stress et forcément, ça ne va pas bien se passer. Il faut trouver, en gros, garder le sens de la pratique chirurgicale, c'est-à-dire garder un sens à ce qu'on fait. C'est plus que de la chirurgie, c'est valable pour tout, garder un sens à ce qu'on fait. Il faut que ça ait du sens. C'était démontré, ça, ce que je vous dis là en ce moment par rapport à l'authenticité. Ça a été démontré dans différents papiers. Il y a un papier qui vient de sortir dans le journal de l'American College en 2024. qui montrent que cette capacité à garder son authenticité, telle que je l'ai plus ou moins définie, ça réduit l'incidence du stress et du burn-out. Les professions de chirurgie, que ce soit comme chirurgien senior ou comme interne, sont fortement impactées par les burn-out. Beaucoup plus que n'importe quelle population, on considère, c'est bien développé dans cette pratique, que c'est multiplié par trois ou quatre. C'est pour ça qu'il faut se protéger par rapport à ça en faisant cette auto-analyse. Je sais le faire, je vais le faire.

  • Speaker #0

    D'accord. Vous voulez dire que ce que vous définissez comme l'authenticité, c'est l'alignement entre les capacités techniques et le sens qu'on porte à cette tâche ?

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #0

    Ok. Et donc, vous conseillez de... de faire preuve d'introspection régulière et de se poser régulièrement cette question pour savoir est-ce qu'on est toujours à la bonne place et est-ce qu'on est toujours la bonne personne ?

  • Speaker #1

    Complètement. Je ne vais pas vous donner le détail de toute ma vie, mais tous les soirs, je me disais, c'est un asthmo, est-ce que je l'ai bien fait ? Mais ça n'a pas au moment du geste, c'est rétrospectivement, voilà.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est intéressant ça. Vous avez des ruminations, c'est-à-dire qu'après l'opération, vous repensez à cette dernière.

  • Speaker #1

    Bien sûr, parce que vous savez, quand vous faites une anastomose digestive, il y a des risques de fistules. Et puis les risques de fistules, c'est quoi ? C'est la péritonite. Et dans un certain nombre de cas, c'est la mort du malade. Il doit y avoir 3-4 dans la journée où vous dites, quand vous faites une opération où il y a 3-4 anastomoses dans la grappe de foie, les anastomoses vasculaires, ce n'est pas anodin. Bien sûr, cette introspection personnelle, mais j'engage aussi à partager ces expériences, et en particulier les expériences négatives. En un mot, si on peut dire, il faut s'enrichir de ces échecs. Ça veut dire qu'il faut les analyser. Les analyser tout seul, ce n'est pas forcément suffisant. Il faut les analyser avec les autres. Et quand on est dans une situation difficile, il ne faut pas hésiter à prendre la vie d'un. confrères, quelqu'un qui comprend de quoi on parle. Parce que c'est comme ça qu'on peut progresser. Comme ça, absolument, qu'on peut progresser. Il ne faut pas s'enferrer dans un non-dit où je ne sais pas le faire, où je ne pourrai jamais y arriver. Non, il faut progresser. Et pour ça, il faut s'analyser. Mais, alors, pour autant, il ne faut pas se gâcher la vie non plus.

  • Speaker #0

    mais analyser ses échecs et faire preuve d'introspection régulière. Merci pour ces conseils. Est-ce que vous auriez remarqué des traits de caractère qui caractériseraient des bons chirurgiens dans votre carrière ? Est-ce qu'un bon chirurgien répond à une certaine liste de critères à respecter ou alors n'importe qui peut apprendre et devenir à terme un bon chirurgien ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense plutôt pour ce que vous venez de dire là. C'est quelque chose qui est accessible, mais dans différentes conditions. Les conditions pour y accéder, c'est premièrement le courage. Il faut beaucoup de courage. Il faut beaucoup de courage pour aller dans le thorax de quelqu'un, pour aller arrêter la circulation cardiaque. Il faut beaucoup de courage pour ça. Il faut beaucoup de courage pour rentrer dans un ventre dans lequel il y a une péritonite stercoral avec une odeur insupportable. Il faut du courage. Il faut du courage physique, bien sûr. Il faut du courage physique parce que parfois, c'est long. Je ne vous en ai pas parlé, mais l'opération dont on parle chez les Chinois avec l'autotransplantation, c'est 16 heures d'opération. La transplantation hépatique, la première que j'ai faite ici à Besançon avec Michel Gillet, c'était 13 heures. Et avant ces 13 heures, moi, j'étais parti faire le prélèvement dans une autre mobile. Donc, vous voyez, on additionne les heures. Donc, il faut du courage physique, c'est sûr. Mais ça, c'est facile à acquérir. Il suffit de s'accrocher. En une semaine, c'est réglé, vous pouvez rester debout pendant des heures, il n'y a pas de problème. Il faut du courage moral aussi, il faut du courage moral. Il faut du courage moral pour accepter d'être confronté à la maladie, avec malheureusement le risque d'avoir un échec à l'arrivée. Vous voyez, quand vous passez six heures dans une crève de foie, ou huit heures, et puis qu'à la fin, malheureusement, ça ne marche pas, le foie ne marche pas, le malade va mourir, il faut beaucoup de courage. Il faut être disponible aussi. Il faut vraiment être disponible. Il faut du courage pour être disponible. Il faut être disponible pour faire les urgences. Je suis effaré de voir qu'il y a des gens qui ne veulent pas prendre d'urgence. Les urgences, ça fait partie du métier d'un médecin. Que vous soyez chirurgien, que vous soyez médecin spécialiste ou médecin généraliste à fortiori. On n'est pas là pour aider les gens aux heures ouvrables, on est là pour aider les gens quand ils sont dans la détresse, quand ils sont à besoin. Après, il y a des systèmes pour organiser. Je ne dis pas que tout le monde doit être disponible tout le temps, mais il y a des systèmes pour organiser. Alors, le deuxième élément important qui va un petit peu contrecarrer celui-là, c'est l'optimisme. Alors ça, l'optimisme, c'est mon patron qui m'a appris ça. Moi, j'ai toujours été optimiste. Mon père était très optimiste. Moi, j'ai toujours été optimiste. Alors il faut de l'optimisme pour confronter toutes ces situations, puis pour accompagner les malades. Il ne faut pas dire aux malades, comme je disais à ce pauvre abbé dont on parlait il n'y a pas longtemps, il faut être optimiste pour accompagner les familles, il faut être optimiste pour entreprendre des opérations de plus en plus complexes au fur et à mesure qu'on acquiert de la dextérité. Il faut être optimiste pour faire évoluer ces pratiques. quand vous voyez l'arrivée de la celluloscopie, l'arrivée de la robotique, il faut dire, il y en a quoi, il faut être optimiste. Puis il faut être aussi optimiste, alors ça c'est, je vous dis ça, c'est à titre personnel, mais pour espérer pouvoir faire accepter, en particulier au niveau familial, l'idée que l'année prochaine ça va aller mieux. Je me souviens de ma vie, toute ma vie, j'ai dit à ma femme l'année prochaine tu vas voir, ça va être mieux, je serai plus disponible et tout. Et d'ailleurs j'en prie pour la saluer parce que Elle a été d'une patience et d'une constance que je ne remercierai jamais assez. Donc, courage et optimisme. Alors, vous voyez, je ne vous ai pas parlé de dextérité, je ne vous ai pas parlé de… Non, je pense qu'avec ces deux éléments, et surtout l'optimisme…

  • Speaker #0

    Et la disponibilité, du coup.

  • Speaker #1

    La disponibilité, oui. La disponibilité, je l'ai mise dans le courage, parce que ça fait vraiment partie du… Il faut avoir du courage pour se rendre disponible. Et moi, je me permets de vous dire… que je ne vais pas dire médecin à jour, médecin toujours, c'est un conneté. Moi, j'ai des gens qui m'appellent régulièrement et je suis disponible pour leur expliquer. Je ne pratique plus, mais je pourrais changer par rapport à leurs problèmes. Et puis, je les oriente si je peux. Et puis, j'espère un peu, je les rassure.

  • Speaker #0

    Je ne connais pas un médecin qui a cessé son activité, qui a cessé de rendre service, d'aider ou de...

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Oui, c'est... Non, non, ce que vous dites, c'est un jour, c'est un toujours, ça se tient. Vous n'êtes pas le seul à le penser, je pense. Georges, vous avez été nommé chevalier de la Légion d'honneur en 2015. Est-ce que ça représente quelque chose pour vous, cette reconnaissance ? Qu'est-ce que ça représente ? Comment pensez-vous qu'elle reflète votre parcours, cette récompense ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un de mes très bons souvenirs. Oui, c'était en 2015, effectivement, que j'ai reçu cette décoration au titre de mes activités hospital-universitaires. C'était un honneur pour moi, bien sûr. Un honneur pour moi, mais pour ma famille aussi, en particulier ma femme et mes enfants, mais toute la famille, et puis aussi pour toute l'équipe, parce que j'ai bien compris que ce qu'on avait honoré, ce qui a été honoré par le gouvernement, c'est l'implication qu'on a mise pour la prise en charge des malades sur notre région et au-delà, et pour l'engagement qu'on a pris. et en particulier moi, c'est vrai, pour la transmission des connaissances. Donc, j'ai vraiment ressenti ça comme un honneur qui, finalement, récompensait, entre guillemets, ma carrière et puis la manière dont je l'avais guidée.

  • Speaker #0

    D'accord. Et est-ce que vous pouvez me dire maintenant le regard que vous portez sur la médecine actuelle ? Vous m'avez parlé d'optimisme, de courage, de disponibilité. Et je suis curieux d'avoir votre point de vue sur l'état de la médecine tel que vous le voyez actuellement par rapport à celui que vous avez connu peut-être les années auparavant.

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est une vaste question que vous me posez. C'est une vaste question, mais qui est une question qui regroupe des problèmes d'actualité ? Alors, moi, je vais vous donner... On pourrait discuter aussi pendant des heures. J'ai deux points que je peux développer qui me semblent caractériser la médecine à l'heure actuelle. Ça ne veut pas dire que je vais donner des solutions. Premièrement, l'hyperspécialisation. Voilà la situation de la médecine à l'heure actuelle. Alors, ça peut être présenté comme une amélioration qualitative par rapport à des résultats qu'on souhaite obtenir dans chaque spécialité. Mais d'un autre côté, c'est une vraie dépendance de ces hyper ou hypos spécialités. les unes vis-à-vis des autres. Par exemple, si j'opère un cancer du colon sigmoïde qui envahit l'urtère, je peux enlever tout et faire l'anastomose de l'urtère. Maintenant, ce n'est même plus imaginable. Si j'ai un envahissement de l'artère, il y a que je sais la remplacer. J'ai fait de la chirurgie vasculaire pendant des années. J'ai opéré des carotides, j'ai opéré des aortes. Ce qui m'a permis d'ailleurs d'être très à l'aise pour tout ce qui est chirurgie de la transplantation hépatique. Parce que la transplantation hépatique, c'est avant tout de la chirurgie vasculaire. Et puis après, beaucoup d'immunologie. Donc, je pense que cette hyperspécialité... On le trouve d'ailleurs, pas rien qu'en chirurgie, il y a les chirurgiens de la main, les chirurgiens de la hanche, les chirurgiens du genou. Cette hyperspécialité qui correspond certainement à une amélioration du service rendu, elle est une partie d'explication des difficultés qu'on peut avoir à trouver un spécialiste. C'est une partie de l'explication. Alors, ça me permet de sauter au deuxième point que je voulais... évoquées par rapport à ce problème de l'état de la médecine actuelle, c'est qu'actuellement en France, d'après les données que j'ai, mais j'ai des bonnes informations du côté de la démographie médicale par le Conseil de l'Ordre, il n'y a jamais eu autant de médecins inscrits à l'Ordre. Je crois qu'on est entre 230 000 et 240 000. C'est assez considérable. Je crois qu'il n'y a que l'Allemagne qui nous dépasse. Mais on n'a jamais eu autant de difficultés pour accéder aux soins. Je le dis pour moi aussi, moi j'ai des difficultés pour accéder aux soins et je vois avec angoisse mes collègues plus jeunes que moi partir en retraite parce que j'aurais plus de difficultés à accéder aux soins. Alors c'est clair que plus de médecins, moins d'accès, ça veut dire qu'il y a une diminution du temps médical. Alors la diminution du temps médical, moi je ne veux pas m'étendre là-dessus, elle est multiple, ce n'est pas à vous, je vais apprendre que la Sécurité sociale a transféré ses charges administratives. aux médecins, qui leur bouffent du temps, ce qui fait qu'il y en a même à certains endroits qui préfèrent, dans notre région, partir en Suisse. Moi, je suis tout près de la Suisse, là, on est à 80 km, où il y a moins de contraintes administratives. Donc, le temps médical est réduit, et c'est ça qui est le gros problème. Le deuxième problème, bien sûr, c'est ce qu'on appelle les déserts médicaux. Mais bon, je ne veux pas trop insister là-dessus, on en parle à longueur de journée, mais on comprend bien les médecins qui sont... qui ont charge de famille, ne vont pas non plus sacrifier toute la vie de leurs épouses, de leurs enfants, en partant dans un endroit où il n'y a plus d'épicerie, il n'y a plus de bistrot, il n'y a plus de bureau de poste, il n'y a plus de gendarmerie, il n'y a plus rien. Qu'un pharmacien, si le médecin s'installe, autrement le pharmacien, il s'en va. Donc, voilà, c'est un appauvrissement qui est lié au phénomène civilisationnel qu'on connaît actuel de migration dans les villes de... Petite, moyenne ou grande importance. Voilà, donc, hyperspécialisation, temps médical, insuffisant. Mais je n'ai pas de solution.

  • Speaker #0

    C'est le constat.

  • Speaker #1

    C'est comme on l'analyse.

  • Speaker #0

    Si vous vous mettiez à la place d'un jeune médecin généraliste, est-ce que vous pouvez me dire les défis qui s'annoncent à lui dans ce contexte actuel d'hyperspécialisation, de déserts médicaux, de temps médical réduit, d'intelligence artificielle ? de démographie médicale, etc. Que faudrait-il penser ? Que faudrait-il faire quand on est un jeune médecin généraliste pour appréhender les années à venir ?

  • Speaker #1

    C'est compliqué. C'est compliqué de faire des prévisions. La prévision, c'est surtout difficile quand ça concerne l'avenir. C'est Pierre Dacq qui disait ça. Je suis posé à Éconos. On sait. J'aime bien cette formule. La prévision est surtout difficile. quand il s'agit de l'avenir. Alors, pour les défis de la médecine demain, l'élément important à garder, c'est les intérêts des patients, des malades. C'est quand même le cœur de métier. On est là pour soigner des gens. Donc, ça veut dire qu'il faut continuer à travailler sur l'accès aux soins, continuer à travailler, ça je sais que c'est fait dans toutes les spécialités, travailler sur la qualité de la prise en charge. Mais de ce côté-là, la France est loin d'être en retard. Et puis, travailler aussi sur les coûts. Les coûts, la santé, ça a un coût, ça a un prix. Les gens ne connaissent plus très bien les coûts. Donc, il y a une acceptabilité des coûts qui se fait soit directement au niveau du portefeuille des patients, soit indirectement par les impôts qu'on paye. Parce que la Sécurité sociale, ce n'est pas l'État qui le paye, c'est les Français. qui, par leur cotisation sociale et les impôts qui paient, il y a du PNFS qui fait que le budget est contraint ou non et qu'on peut soigner plus ou moins de patients. C'est vraiment le cœur de notre métier. Le deuxième point, c'est qu'il y a des évolutions technologiques qui sont aidantes. Vous les avez citées, la télémédecine, l'intelligence artificielle. Dans mon métier, il y a eu la scélioscopie, la robotique. Il y a tout un tas de choses qui sont importantes. Il y a des améliorations aussi très institutionnelles et plus simples. On parlait de l'analyse des difficultés. C'est ce qu'on a dans les réunions de mort-bimortanité, les RMM, pour lesquelles j'avais un personnel dédié et qui nous obligeait à faire tous les mois une analyse de tout ce qui s'était passé, qui était très enrichissante pour l'ensemble et pour le personnel. Alors, le troisième point, c'est qu'il faut faire face aux exigences croissantes des administrations de tutelle aussi. On en a parlé tout à l'heure, la sécurité sociale. qui, à mon avis, a des défauts, mais elle est moins pire que les compagnies privées. C'est clair, il faut que les gens aient bien compris ça. Les compagnies privées, quand elles vont arriver, ça ne va pas être de la rigolade, parce que moi j'ai des copains aux États-Unis, et je vois bien quand ils sont pris en charge comment ça se passe. Ils sont bien pris en charge, mais ça peut être très compliqué. Vous pouvez être obligé d'aller vous faire soigner à 200 kilomètres avec l'hôpital qui est conventionné avec la compagnie d'assurance. Il ne faut pas oublier ça. Le gouvernement aussi, qui contraint beaucoup des discussions. Globalement, tout l'encadrement administratif de notre métier. Alors, on peut s'attendre, pour conclure ce chapitre, on peut s'attendre quand même à une évolution prochaine de la filière de formation des médecins. C'est clair, les études de médecine, comme je les ai connues, comme vous les avez connues, elles sont dans une phase de pré-rupture. C'est une phase de clérouture. Moi, c'est mon analyse. Et je l'entends beaucoup au niveau des doyards, en France ou dans le monde. Pourquoi ? Déjà, la longueur des études. La formation en chirurgie, je suis d'accord. C'est non, parce qu'il y a tout ce phénomène d'acclimatation, s'habituer à avoir des scènes difficiles. C'est compliqué. Mais je pense quand même que les outils pédagogiques qu'on a actuellement, Je ne parle pas des leçons magistrales, mais les outils pédagogiques qu'on a maintenant permettent, à mon avis, de réduire au moins d'un an le deuxième cycle. Je pense que dans le deuxième cycle, ce qui manque beaucoup, c'est la formation à la recherche clinique. Je pense que des gens comme vous, des gens impliqués dans leur métier, ils sont un outil. extraordinaire pour l'analyse, en particulier à l'époque de l'intelligence artificielle, pour l'analyse de prise en charge des patients, pour l'optimisation bien sûr. Et donc ça, c'est vraiment mon cheval de bataille. Diminuer d'un an et mettre six mois au moins de formation à la recherche clinique et en plus reconnaissez que les étudiants en médecine ne sont pas… enfin la présence des étudiants en médecine. qu'on appelait autrefois les externes, mais qui ne sont plus du tout des externes comme moi j'ai été, où on faisait vraiment du boulot de médecin. La présence de ces étudiants, elle est méprisée. Ils venaient au bloc opératoire, on leur faisait de l'enseignement et tout, mais c'est de la main-d'œuvre presque gratuite pour la recherche clinique. Au lieu d'aller chercher des gens qui ont une formation spécialisée d'aide à la recherche clinique, les étudiants, ils sont là, ils peuvent le faire, et ils aimeront le faire, ils comprendront à quoi ça sert. Voilà, donc ça, c'est mon petit dada. Alors, la troisième chose, je pense que l'accès au troisième cycle, il doit être anticipé au niveau du deuxième cycle, c'est-à-dire que... En fonction des options, puisque maintenant, c'est un peu flou, comme on arrive dans le troisième cycle, je ne veux pas aller sur toutes les réformes qui ont été mises en place, mais je pense que pour arriver dans le troisième cycle de manière optimale, il faut avoir des prérequis qui correspondent à votre volonté. C'est-à-dire, par exemple, je prends mon cas de la chirurgie. Si vous voulez faire de la chirurgie viscérale, puisque maintenant, les filières, elles commencent tout de suite, vous allez tout de suite en chirurgie viscérale. Avant, à mon époque, moi, je suis chirurgien général, donc ça veut dire que j'ai une formation de chirurgien généraliste. Maintenant, vous vous dites tout de suite, je veux faire de la chirurgie viscérale. Eh bien, d'accord. Alors, on va regarder en anatomie, combien tu as à ton prérequis d'anatomie ? Plutôt que de faire des cours d'anatomie pendant les études de chirurgie, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas les revoir. Moi, mon patron, mon premier patron en chirurgie, tous les matins, il nous interrogeait, récite-moi la vascularisation du duodéum, récite-moi ci, récite-moi ça. Ça n'existe plus, tout ça. Je veux dire, si vous avez tous ces prérequis, ça va aller plus vite. Et puis déjà, vous allez voir les gens qui sont motivés. Un certain nombre de pauvres malheureux, on va dire, qui se retrouvent dans des impasses. Ils font ça parce qu'ils n'ont pas pu faire autre chose. Donc, je pense qu'il faut essayer de motiver les gens de manière anticipée. Surtout que le deuxième cycle, comme on a dit, il fait quatre ans. Il y a quand même le temps de pouvoir réorganiser ça. Alors, le troisième cycle, on y arrive. Le troisième cycle, il mérite. L'encadrement plus important, écoutez, ici, on était deux profs de chirurgie viscérale pour former une dizaine de gardes. Et en plus, on avait la formation de la chirurgie générale. C'est sûr qu'on ne peut pas bien les encadrer. Quand j'ai pris ma retraite, il y avait le doyen. Nous avons imposé dix internes pour mon service où on était avant deux ou trois. C'est sûr qu'à deux, honnêtement… Moi, j'étais très présent dans le service et dans les blocs. Je ne connaissais pas les prénoms des internes. J'ai honte de le dire, mais c'était la réalité. Je ne connaissais pas. Donc, il faut augmenter l'encadrement. Et augmenter l'encadrement, est-ce que ça veut dire créer des postes ? Non, non, non, non, pas du tout. Dans les hôpitaux, qu'ils soient universitaires ou non, il y a des gens qui s'appellent les praticiens hospitaliers, qu'on appelait autrefois médecins ou chirurgiens, biologistes des hôpitaux, je préfère ce titre d'ailleurs, qui sont là, mais ils sont là comme hospitaliers. donnons-leur une valance universitaire ou demandons-leur de passer et ils pourront encadrer les gens. Ils seront très compétents, il y a des gens qui sont très brillants, d'ailleurs qui n'ont pas voulu embrasser la carrière universitaire, mais qui sont capables de rendre ce service, d'avoir une activité, au moins d'enseignement dans la carrière universitaire. Voilà une ressource. Alors le quatrième point, vous êtes dans le truc là complètement. C'est le développement des carrières infirmières. Actuellement, qu'est-ce qu'on propose aux infirmières ? Ça change un peu. On leur propose éventuellement d'être spécialiste au bloc opératoire, les IBOT. On les propose d'être infirmières anesthésistes. Puis après, c'est fini. Il n'y a pas de progression valorisante. Elles vont être infirmières anesthésistes toute leur vie. Elles vont être anesthésistes ou même faire l'anesthésie. Il n'y a pas d'évolution dans ce métier. Alors, les IPA sont une approche, mais je ne suis pas sûr que ça n'en reste pas là non plus. Donc, il y a vraiment une ressource là, énorme, un potentiel énorme. Il faut l'inventer, le créer. C'est des gens comme vous qui peuvent y participer. Alors, attention, je ne dis pas qu'il faut créer des officiers de santé, c'est-à-dire un grade intermédiaire. On ne va pas retomber dans Mme Bovary. Et puis, la malheureuse expérience de son mari quand il a voulu opérer dans l'arrière-salle d'un café, un pied beau alors qu'il n'avait aucune expérience. Non, non, ce n'est pas de ça dont il s'agit. Il s'agit de trouver le moyen de valoriser et de fidéliser. Pourquoi les infirmières aient une moyenne de vie, d'activité de 15 ans ? Parce qu'elles ont fait le tour du problème au bout de 15 ans, puis elles se barrent. On ne peut pas leur en vouloir pour ça. Donc, voilà les axes qui me permettent, je suis un peu long là, mais les décisions de demain de la médecine.

  • Speaker #0

    Très bien, c'était très intéressant. Vous nous avez proposé beaucoup de pistes de réflexion qui sont très intéressantes de votre point de vue et avec l'expérience qui est la vôtre. Georges, on va arriver à la fin de cet entretien. Il me reste une question à vous poser pour conclure cet épisode. Auriez-vous des conseils à donner à la jeune génération de médecins, à un jeune ou une jeune médecin généraliste ou autre spécialiste d'organes ? C'est à vous que vous vous adressez maintenant. qu'avez-vous envie de leur dire ?

  • Speaker #1

    Alors, globalement, il y a beaucoup de choses à dire. J'en ai déjà dit, mais je vais formaliser deux conseils pour faire simple. Premièrement, garder la dimension relationnelle avec l'empathie nécessaire avec les malades. Autrement dit, ne devenez pas des techniciens. C'est le danger, ça. C'est... Surtout avec... on va dire, à stacanovisme des hyper spécialités. Je fais des carotides, je fais des carotides, je fais des carotides. Je fais des canocarpiens, je fais des canocarpiens, je fais des canocarpiens. Je suis un technicien. Le deuxième point, alors ça, c'est vraiment un conseil de vieux. Vous vous engagez dans un boulot, dans un métier. Je n'ai pas parlé d'art. Vous vous engagez dans un métier, c'est une profession, soigner les autres.

  • Speaker #0

    pour une trentaine d'années à peu près. Ça dure 30 ans un médecin, compte tenu que les études durent 12 ou 15 ans. Gardez de la ressource, gardez la possibilité de poursuivre votre formation, parce que le savoir médical, vous le savez, ça change tous les 10 ans. La demi-vie du savoir médical, c'est 5 ans, donc on peut dire que tous les 10 ans, ça change. Il faut garder de la ressource pour tout ça. Moi, j'ai le souvenir que si je n'avais pas évolué, c'est encore une anecdote, je ne saurais faire que la chirurgie des ulcères de l'estomac. Maintenant, vous ne savez même pas ce que c'est qu'un ulcère de l'estomac. Avant, on passait notre temps à faire ça. Voilà les deux conseils. Gardez la dimension relationnelle et puis surtout, vous vous engagez pour 30 ans, 35 ans. Gardez ça en tête.

  • Speaker #1

    C'est dans la boîte. Je vous remercie infiniment, Georges. C'était hyper intéressant pour moi. J'ai eu un grand plaisir à vous recevoir aujourd'hui. J'espère que l'épisode va vous plaire. Et puis, je vous remercie.

  • Speaker #2

    Au revoir.

  • Speaker #0

    Merci, Mathieu.

  • Speaker #2

    Félicitations, vous êtes bien arrivé à la fin de cet épisode du podcast. S'il vous a plu, si vous avez appris des choses utiles et que vous souhaitez que je poursuive ce travail, vous pouvez vous abonner à ce podcast et en parler à un de vos confrères ou une de vos consoeurs. Et si vraiment vous voulez m'aider, vous pouvez me laisser une note de 5 étoiles sur vos applis et un petit avis sympa pour référencer ce podcast. Pensez également à vous abonner à la newsletter. Je vous envoie chaque mois un mail à haute valeur ajoutée pour la médecine générale. Vous trouverez le lien dans les notes de l'épisode. A bientôt !

Description

Dans cet épisode exceptionnel, j’ai eu le privilège d’interviewer le Pr Georges Mantion, chirurgien de renommée mondiale, pionnier de la transplantation hépatique, avec plus de 600 greffes réalisées et 30 000 interventions à son actif. En 2015, son parcours exemplaire a été récompensé par la Légion d’honneur, témoignant de son engagement pour l’excellence médicale et la transmission du savoir.


Au fil de cet échange riche et inspirant, nous avons exploré :


✅ Son parcours remarquable : de ses débuts à la Faculté de Besançon à ses missions internationales, notamment en Chine, où il a formé des générations de chirurgiens et contribué à la lutte contre l’échinococcose alvéolaire.

✅ La gestion du stress en chirurgie : des astuces pour les jeunes praticiens, mettant en avant l’importance de l’authenticité, de la préparation technique et de l’introspection.

✅ Ses plus grands succès et échecs : de la transplantation d’urgence d’une jeune patiente atteinte de la maladie de Wilson à l’émotion intense liée à la perte tragique de collègues lors d’un accident d’avion.

✅ La relation patient-médecin : comment maintenir une empathie sincère tout en gérant les défis émotionnels de la pratique médicale.

✅ Les défis de la médecine actuelle : hyperspécialisation, temps médical réduit, accès aux soins, et avenir de la formation médicale.


Un épisode riche en enseignements pour tous les praticiens, à ne pas manquer !


Vous savez comme le temps nous manque en consultation: C’est là que Pulse Life Premium peut faire toute la différence, c'est mon partenaire sur cet épisode.
Cette solution pensée pour nous, médecins généralistes, intègre directement dans notre logiciel métier des outils fiables, toujours à jour, et propulsés par l’intelligence artificielle. Que ce soit pour accéder à des algorithmes interactifs, une base médicamenteuse complète, ou encore des recommandations médicales synthétiques, tout est à portée de main. C'est hyper simple: cette extension se superpose à notre logiciel métier, et ses outils couvre 100% des motifs de consultation de patients
Vous pouvez l’essayer et profiter d’une offre exclusive à moindre coût, sans engagement, en cliquant sur ce lien; Allez jeter un œil, vous ne serez pas déçus:
https://chromewebstore.google.com/detail/pulselife-premium/eooipdaghfmdpofapjlfegadjanimlpo


Rretrouvez moi sur insta:

https://www.instagram.com/dr.matthieu.cantet


Et sur linkedin:

https://www.linkedin.com/in/matthieu-cantet-4a5591294/



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Super Docteur, c'est le podcast des médecins généralistes. Le podcast qui vous transmet les recommandations de bonne pratique et les résultats des grandes études qui vont changer vos habitudes. Super Docteur, c'est la découverte de méthodes de soins innovantes et des interviews de soignants inspirants qui boosteront votre motivation. Un contenu court et pratique, chaque semaine, pour tous les médecins. Vous savez à quel point nos journées peuvent être intenses et comme le temps nous manque en consultation. C'est là que Pulse Life Premium peut faire toute la différence, c'est mon partenaire sur cet épisode. Cette solution pensée pour nous, médecins généralistes, intègre directement dans notre logiciel métier des outils fiables, toujours à jour, mais propulsés par l'intelligence artificielle. Que ce soit pour accéder à des algorithmes interactifs, une base médicamenteuse complète ou encore des recommandations médicales synthétiques, tout est à portée de main. C'est hyper simple, cette extension se superpose à notre logiciel métier. Et ces outils couvrent 100% des motifs de consultation de patients. 95% de nos confrères ayant testé Pulse Life Premium affirment gagner en sérénité et gagner du temps. Et aujourd'hui, vous pouvez l'essayer et profiter d'une offre exclusive à moindre coût, sans engagement, en cliquant sur le lien dans les notes de l'épisode. Alors reprenez la maîtrise de votre temps avec efficacité, avec Pulse Life Premium. Allez jeter un œil, vous ne serez pas déçu. Merci de me retrouver dans ce deuxième épisode de Superdocteur, au cours duquel je me suis entretenu avec le prestigieux... professeur Georges Manchion. Dans le premier épisode, mon prestigieux invité nous a décrit sa vie faite de milliers d'opérations et de voyages à l'étranger. Et dans ce deuxième et dernier épisode, je vous propose d'écouter avec moi la suite de mon entretien, au cours duquel Georges Manchion va nous donner des conseils pratiques à appliquer pour nos confrères, nos consoeurs, médecins et chirurgiens évidemment. Je vous remercie beaucoup d'être toujours plus nombreux à écouter ce podcast et si vous voulez m'aider simplement, vous pouvez parler de mon travail à vos consoeurs, vos confrères. et vous abonner à ce podcast. Excellente écoute ! Vous avez fait 600 greffes deux fois, vous m'avez rapporté en début de ce podcast 30 000 interventions chirurgicales qui ont été consignées. J'imagine que certaines d'entre elles étaient extrêmement stressantes et j'ai une question à vous poser. Est-ce que vous aviez des techniques particulières pour gérer ce stress en pratique, avant des opérations aussi périlleuses que des greffes dont vous nous avez décrites ? Est-ce que vous avez des techniques que vous pouvez nous partager, notamment pour les jeunes chirurgiens qui nous écoutent ?

  • Speaker #1

    Alors, bien sûr, du stress, il y en a dans notre métier, ça c'est sûr. Le stress, il est alimenté par quoi ? C'est la crainte de mal faire ou de faire du mal. Il ne faut pas oublier quand même que l'acte chirurgical, c'est un acte qui est très intrusif. C'est une véritable agression du corps humain, qui n'est possible d'ailleurs que par... le fait d'une dérogation du code civil. C'est une dérogation, c'est inscrit. Dérogation du code civil. Ça veut dire que si vous sortez de ce cadre, et c'est pas forcément facile de savoir, sortir du cadre, qu'est-ce que c'est ? C'est faire une variation dans une technique opératoire qui n'est pas validée. Ça risque d'être interprété comme une sortie du cadre. Donc, on comprend qu'il puisse y avoir du stress. Alors, la gestion du stress, moi j'en ai eu plus que ma dose, mais c'est difficile. Pour se préparer à ça, voilà ce que je peux dire. Ça passe d'abord par la maîtrise de la technique de l'acte opératoire. Il faut avoir une bonne maîtrise technique et la connaissance des risques. Quel risque je fais courir ? Alors ça, ça s'apprend lors de la formation, mais ça s'apprend toute la vie, toute la vie, avec l'analyse des résultats, des échecs. Alors on peut dire aussi que, là on se place à un niveau, on va dire philosophique, il y a un vrai besoin d'authenticité. C'est-à-dire, c'est quoi l'authenticité ? C'est-à-dire avoir la capacité à agir selon ses convictions. C'est-à-dire, on ne va pas faire une opération en reculant. Je ne sais pas la faire, je ne vais pas la faire, c'est tout. Bien se connaître, c'est ça, bien se connaître. Je sais faire ça, je peux faire ça. Je ne sais pas le faire, je vais avoir du stress et forcément, ça ne va pas bien se passer. Il faut trouver, en gros, garder le sens de la pratique chirurgicale, c'est-à-dire garder un sens à ce qu'on fait. C'est plus que de la chirurgie, c'est valable pour tout, garder un sens à ce qu'on fait. Il faut que ça ait du sens. C'était démontré, ça, ce que je vous dis là en ce moment par rapport à l'authenticité. Ça a été démontré dans différents papiers. Il y a un papier qui vient de sortir dans le journal de l'American College en 2024. qui montrent que cette capacité à garder son authenticité, telle que je l'ai plus ou moins définie, ça réduit l'incidence du stress et du burn-out. Les professions de chirurgie, que ce soit comme chirurgien senior ou comme interne, sont fortement impactées par les burn-out. Beaucoup plus que n'importe quelle population, on considère, c'est bien développé dans cette pratique, que c'est multiplié par trois ou quatre. C'est pour ça qu'il faut se protéger par rapport à ça en faisant cette auto-analyse. Je sais le faire, je vais le faire.

  • Speaker #0

    D'accord. Vous voulez dire que ce que vous définissez comme l'authenticité, c'est l'alignement entre les capacités techniques et le sens qu'on porte à cette tâche ?

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #0

    Ok. Et donc, vous conseillez de... de faire preuve d'introspection régulière et de se poser régulièrement cette question pour savoir est-ce qu'on est toujours à la bonne place et est-ce qu'on est toujours la bonne personne ?

  • Speaker #1

    Complètement. Je ne vais pas vous donner le détail de toute ma vie, mais tous les soirs, je me disais, c'est un asthmo, est-ce que je l'ai bien fait ? Mais ça n'a pas au moment du geste, c'est rétrospectivement, voilà.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est intéressant ça. Vous avez des ruminations, c'est-à-dire qu'après l'opération, vous repensez à cette dernière.

  • Speaker #1

    Bien sûr, parce que vous savez, quand vous faites une anastomose digestive, il y a des risques de fistules. Et puis les risques de fistules, c'est quoi ? C'est la péritonite. Et dans un certain nombre de cas, c'est la mort du malade. Il doit y avoir 3-4 dans la journée où vous dites, quand vous faites une opération où il y a 3-4 anastomoses dans la grappe de foie, les anastomoses vasculaires, ce n'est pas anodin. Bien sûr, cette introspection personnelle, mais j'engage aussi à partager ces expériences, et en particulier les expériences négatives. En un mot, si on peut dire, il faut s'enrichir de ces échecs. Ça veut dire qu'il faut les analyser. Les analyser tout seul, ce n'est pas forcément suffisant. Il faut les analyser avec les autres. Et quand on est dans une situation difficile, il ne faut pas hésiter à prendre la vie d'un. confrères, quelqu'un qui comprend de quoi on parle. Parce que c'est comme ça qu'on peut progresser. Comme ça, absolument, qu'on peut progresser. Il ne faut pas s'enferrer dans un non-dit où je ne sais pas le faire, où je ne pourrai jamais y arriver. Non, il faut progresser. Et pour ça, il faut s'analyser. Mais, alors, pour autant, il ne faut pas se gâcher la vie non plus.

  • Speaker #0

    mais analyser ses échecs et faire preuve d'introspection régulière. Merci pour ces conseils. Est-ce que vous auriez remarqué des traits de caractère qui caractériseraient des bons chirurgiens dans votre carrière ? Est-ce qu'un bon chirurgien répond à une certaine liste de critères à respecter ou alors n'importe qui peut apprendre et devenir à terme un bon chirurgien ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense plutôt pour ce que vous venez de dire là. C'est quelque chose qui est accessible, mais dans différentes conditions. Les conditions pour y accéder, c'est premièrement le courage. Il faut beaucoup de courage. Il faut beaucoup de courage pour aller dans le thorax de quelqu'un, pour aller arrêter la circulation cardiaque. Il faut beaucoup de courage pour ça. Il faut beaucoup de courage pour rentrer dans un ventre dans lequel il y a une péritonite stercoral avec une odeur insupportable. Il faut du courage. Il faut du courage physique, bien sûr. Il faut du courage physique parce que parfois, c'est long. Je ne vous en ai pas parlé, mais l'opération dont on parle chez les Chinois avec l'autotransplantation, c'est 16 heures d'opération. La transplantation hépatique, la première que j'ai faite ici à Besançon avec Michel Gillet, c'était 13 heures. Et avant ces 13 heures, moi, j'étais parti faire le prélèvement dans une autre mobile. Donc, vous voyez, on additionne les heures. Donc, il faut du courage physique, c'est sûr. Mais ça, c'est facile à acquérir. Il suffit de s'accrocher. En une semaine, c'est réglé, vous pouvez rester debout pendant des heures, il n'y a pas de problème. Il faut du courage moral aussi, il faut du courage moral. Il faut du courage moral pour accepter d'être confronté à la maladie, avec malheureusement le risque d'avoir un échec à l'arrivée. Vous voyez, quand vous passez six heures dans une crève de foie, ou huit heures, et puis qu'à la fin, malheureusement, ça ne marche pas, le foie ne marche pas, le malade va mourir, il faut beaucoup de courage. Il faut être disponible aussi. Il faut vraiment être disponible. Il faut du courage pour être disponible. Il faut être disponible pour faire les urgences. Je suis effaré de voir qu'il y a des gens qui ne veulent pas prendre d'urgence. Les urgences, ça fait partie du métier d'un médecin. Que vous soyez chirurgien, que vous soyez médecin spécialiste ou médecin généraliste à fortiori. On n'est pas là pour aider les gens aux heures ouvrables, on est là pour aider les gens quand ils sont dans la détresse, quand ils sont à besoin. Après, il y a des systèmes pour organiser. Je ne dis pas que tout le monde doit être disponible tout le temps, mais il y a des systèmes pour organiser. Alors, le deuxième élément important qui va un petit peu contrecarrer celui-là, c'est l'optimisme. Alors ça, l'optimisme, c'est mon patron qui m'a appris ça. Moi, j'ai toujours été optimiste. Mon père était très optimiste. Moi, j'ai toujours été optimiste. Alors il faut de l'optimisme pour confronter toutes ces situations, puis pour accompagner les malades. Il ne faut pas dire aux malades, comme je disais à ce pauvre abbé dont on parlait il n'y a pas longtemps, il faut être optimiste pour accompagner les familles, il faut être optimiste pour entreprendre des opérations de plus en plus complexes au fur et à mesure qu'on acquiert de la dextérité. Il faut être optimiste pour faire évoluer ces pratiques. quand vous voyez l'arrivée de la celluloscopie, l'arrivée de la robotique, il faut dire, il y en a quoi, il faut être optimiste. Puis il faut être aussi optimiste, alors ça c'est, je vous dis ça, c'est à titre personnel, mais pour espérer pouvoir faire accepter, en particulier au niveau familial, l'idée que l'année prochaine ça va aller mieux. Je me souviens de ma vie, toute ma vie, j'ai dit à ma femme l'année prochaine tu vas voir, ça va être mieux, je serai plus disponible et tout. Et d'ailleurs j'en prie pour la saluer parce que Elle a été d'une patience et d'une constance que je ne remercierai jamais assez. Donc, courage et optimisme. Alors, vous voyez, je ne vous ai pas parlé de dextérité, je ne vous ai pas parlé de… Non, je pense qu'avec ces deux éléments, et surtout l'optimisme…

  • Speaker #0

    Et la disponibilité, du coup.

  • Speaker #1

    La disponibilité, oui. La disponibilité, je l'ai mise dans le courage, parce que ça fait vraiment partie du… Il faut avoir du courage pour se rendre disponible. Et moi, je me permets de vous dire… que je ne vais pas dire médecin à jour, médecin toujours, c'est un conneté. Moi, j'ai des gens qui m'appellent régulièrement et je suis disponible pour leur expliquer. Je ne pratique plus, mais je pourrais changer par rapport à leurs problèmes. Et puis, je les oriente si je peux. Et puis, j'espère un peu, je les rassure.

  • Speaker #0

    Je ne connais pas un médecin qui a cessé son activité, qui a cessé de rendre service, d'aider ou de...

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Oui, c'est... Non, non, ce que vous dites, c'est un jour, c'est un toujours, ça se tient. Vous n'êtes pas le seul à le penser, je pense. Georges, vous avez été nommé chevalier de la Légion d'honneur en 2015. Est-ce que ça représente quelque chose pour vous, cette reconnaissance ? Qu'est-ce que ça représente ? Comment pensez-vous qu'elle reflète votre parcours, cette récompense ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un de mes très bons souvenirs. Oui, c'était en 2015, effectivement, que j'ai reçu cette décoration au titre de mes activités hospital-universitaires. C'était un honneur pour moi, bien sûr. Un honneur pour moi, mais pour ma famille aussi, en particulier ma femme et mes enfants, mais toute la famille, et puis aussi pour toute l'équipe, parce que j'ai bien compris que ce qu'on avait honoré, ce qui a été honoré par le gouvernement, c'est l'implication qu'on a mise pour la prise en charge des malades sur notre région et au-delà, et pour l'engagement qu'on a pris. et en particulier moi, c'est vrai, pour la transmission des connaissances. Donc, j'ai vraiment ressenti ça comme un honneur qui, finalement, récompensait, entre guillemets, ma carrière et puis la manière dont je l'avais guidée.

  • Speaker #0

    D'accord. Et est-ce que vous pouvez me dire maintenant le regard que vous portez sur la médecine actuelle ? Vous m'avez parlé d'optimisme, de courage, de disponibilité. Et je suis curieux d'avoir votre point de vue sur l'état de la médecine tel que vous le voyez actuellement par rapport à celui que vous avez connu peut-être les années auparavant.

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est une vaste question que vous me posez. C'est une vaste question, mais qui est une question qui regroupe des problèmes d'actualité ? Alors, moi, je vais vous donner... On pourrait discuter aussi pendant des heures. J'ai deux points que je peux développer qui me semblent caractériser la médecine à l'heure actuelle. Ça ne veut pas dire que je vais donner des solutions. Premièrement, l'hyperspécialisation. Voilà la situation de la médecine à l'heure actuelle. Alors, ça peut être présenté comme une amélioration qualitative par rapport à des résultats qu'on souhaite obtenir dans chaque spécialité. Mais d'un autre côté, c'est une vraie dépendance de ces hyper ou hypos spécialités. les unes vis-à-vis des autres. Par exemple, si j'opère un cancer du colon sigmoïde qui envahit l'urtère, je peux enlever tout et faire l'anastomose de l'urtère. Maintenant, ce n'est même plus imaginable. Si j'ai un envahissement de l'artère, il y a que je sais la remplacer. J'ai fait de la chirurgie vasculaire pendant des années. J'ai opéré des carotides, j'ai opéré des aortes. Ce qui m'a permis d'ailleurs d'être très à l'aise pour tout ce qui est chirurgie de la transplantation hépatique. Parce que la transplantation hépatique, c'est avant tout de la chirurgie vasculaire. Et puis après, beaucoup d'immunologie. Donc, je pense que cette hyperspécialité... On le trouve d'ailleurs, pas rien qu'en chirurgie, il y a les chirurgiens de la main, les chirurgiens de la hanche, les chirurgiens du genou. Cette hyperspécialité qui correspond certainement à une amélioration du service rendu, elle est une partie d'explication des difficultés qu'on peut avoir à trouver un spécialiste. C'est une partie de l'explication. Alors, ça me permet de sauter au deuxième point que je voulais... évoquées par rapport à ce problème de l'état de la médecine actuelle, c'est qu'actuellement en France, d'après les données que j'ai, mais j'ai des bonnes informations du côté de la démographie médicale par le Conseil de l'Ordre, il n'y a jamais eu autant de médecins inscrits à l'Ordre. Je crois qu'on est entre 230 000 et 240 000. C'est assez considérable. Je crois qu'il n'y a que l'Allemagne qui nous dépasse. Mais on n'a jamais eu autant de difficultés pour accéder aux soins. Je le dis pour moi aussi, moi j'ai des difficultés pour accéder aux soins et je vois avec angoisse mes collègues plus jeunes que moi partir en retraite parce que j'aurais plus de difficultés à accéder aux soins. Alors c'est clair que plus de médecins, moins d'accès, ça veut dire qu'il y a une diminution du temps médical. Alors la diminution du temps médical, moi je ne veux pas m'étendre là-dessus, elle est multiple, ce n'est pas à vous, je vais apprendre que la Sécurité sociale a transféré ses charges administratives. aux médecins, qui leur bouffent du temps, ce qui fait qu'il y en a même à certains endroits qui préfèrent, dans notre région, partir en Suisse. Moi, je suis tout près de la Suisse, là, on est à 80 km, où il y a moins de contraintes administratives. Donc, le temps médical est réduit, et c'est ça qui est le gros problème. Le deuxième problème, bien sûr, c'est ce qu'on appelle les déserts médicaux. Mais bon, je ne veux pas trop insister là-dessus, on en parle à longueur de journée, mais on comprend bien les médecins qui sont... qui ont charge de famille, ne vont pas non plus sacrifier toute la vie de leurs épouses, de leurs enfants, en partant dans un endroit où il n'y a plus d'épicerie, il n'y a plus de bistrot, il n'y a plus de bureau de poste, il n'y a plus de gendarmerie, il n'y a plus rien. Qu'un pharmacien, si le médecin s'installe, autrement le pharmacien, il s'en va. Donc, voilà, c'est un appauvrissement qui est lié au phénomène civilisationnel qu'on connaît actuel de migration dans les villes de... Petite, moyenne ou grande importance. Voilà, donc, hyperspécialisation, temps médical, insuffisant. Mais je n'ai pas de solution.

  • Speaker #0

    C'est le constat.

  • Speaker #1

    C'est comme on l'analyse.

  • Speaker #0

    Si vous vous mettiez à la place d'un jeune médecin généraliste, est-ce que vous pouvez me dire les défis qui s'annoncent à lui dans ce contexte actuel d'hyperspécialisation, de déserts médicaux, de temps médical réduit, d'intelligence artificielle ? de démographie médicale, etc. Que faudrait-il penser ? Que faudrait-il faire quand on est un jeune médecin généraliste pour appréhender les années à venir ?

  • Speaker #1

    C'est compliqué. C'est compliqué de faire des prévisions. La prévision, c'est surtout difficile quand ça concerne l'avenir. C'est Pierre Dacq qui disait ça. Je suis posé à Éconos. On sait. J'aime bien cette formule. La prévision est surtout difficile. quand il s'agit de l'avenir. Alors, pour les défis de la médecine demain, l'élément important à garder, c'est les intérêts des patients, des malades. C'est quand même le cœur de métier. On est là pour soigner des gens. Donc, ça veut dire qu'il faut continuer à travailler sur l'accès aux soins, continuer à travailler, ça je sais que c'est fait dans toutes les spécialités, travailler sur la qualité de la prise en charge. Mais de ce côté-là, la France est loin d'être en retard. Et puis, travailler aussi sur les coûts. Les coûts, la santé, ça a un coût, ça a un prix. Les gens ne connaissent plus très bien les coûts. Donc, il y a une acceptabilité des coûts qui se fait soit directement au niveau du portefeuille des patients, soit indirectement par les impôts qu'on paye. Parce que la Sécurité sociale, ce n'est pas l'État qui le paye, c'est les Français. qui, par leur cotisation sociale et les impôts qui paient, il y a du PNFS qui fait que le budget est contraint ou non et qu'on peut soigner plus ou moins de patients. C'est vraiment le cœur de notre métier. Le deuxième point, c'est qu'il y a des évolutions technologiques qui sont aidantes. Vous les avez citées, la télémédecine, l'intelligence artificielle. Dans mon métier, il y a eu la scélioscopie, la robotique. Il y a tout un tas de choses qui sont importantes. Il y a des améliorations aussi très institutionnelles et plus simples. On parlait de l'analyse des difficultés. C'est ce qu'on a dans les réunions de mort-bimortanité, les RMM, pour lesquelles j'avais un personnel dédié et qui nous obligeait à faire tous les mois une analyse de tout ce qui s'était passé, qui était très enrichissante pour l'ensemble et pour le personnel. Alors, le troisième point, c'est qu'il faut faire face aux exigences croissantes des administrations de tutelle aussi. On en a parlé tout à l'heure, la sécurité sociale. qui, à mon avis, a des défauts, mais elle est moins pire que les compagnies privées. C'est clair, il faut que les gens aient bien compris ça. Les compagnies privées, quand elles vont arriver, ça ne va pas être de la rigolade, parce que moi j'ai des copains aux États-Unis, et je vois bien quand ils sont pris en charge comment ça se passe. Ils sont bien pris en charge, mais ça peut être très compliqué. Vous pouvez être obligé d'aller vous faire soigner à 200 kilomètres avec l'hôpital qui est conventionné avec la compagnie d'assurance. Il ne faut pas oublier ça. Le gouvernement aussi, qui contraint beaucoup des discussions. Globalement, tout l'encadrement administratif de notre métier. Alors, on peut s'attendre, pour conclure ce chapitre, on peut s'attendre quand même à une évolution prochaine de la filière de formation des médecins. C'est clair, les études de médecine, comme je les ai connues, comme vous les avez connues, elles sont dans une phase de pré-rupture. C'est une phase de clérouture. Moi, c'est mon analyse. Et je l'entends beaucoup au niveau des doyards, en France ou dans le monde. Pourquoi ? Déjà, la longueur des études. La formation en chirurgie, je suis d'accord. C'est non, parce qu'il y a tout ce phénomène d'acclimatation, s'habituer à avoir des scènes difficiles. C'est compliqué. Mais je pense quand même que les outils pédagogiques qu'on a actuellement, Je ne parle pas des leçons magistrales, mais les outils pédagogiques qu'on a maintenant permettent, à mon avis, de réduire au moins d'un an le deuxième cycle. Je pense que dans le deuxième cycle, ce qui manque beaucoup, c'est la formation à la recherche clinique. Je pense que des gens comme vous, des gens impliqués dans leur métier, ils sont un outil. extraordinaire pour l'analyse, en particulier à l'époque de l'intelligence artificielle, pour l'analyse de prise en charge des patients, pour l'optimisation bien sûr. Et donc ça, c'est vraiment mon cheval de bataille. Diminuer d'un an et mettre six mois au moins de formation à la recherche clinique et en plus reconnaissez que les étudiants en médecine ne sont pas… enfin la présence des étudiants en médecine. qu'on appelait autrefois les externes, mais qui ne sont plus du tout des externes comme moi j'ai été, où on faisait vraiment du boulot de médecin. La présence de ces étudiants, elle est méprisée. Ils venaient au bloc opératoire, on leur faisait de l'enseignement et tout, mais c'est de la main-d'œuvre presque gratuite pour la recherche clinique. Au lieu d'aller chercher des gens qui ont une formation spécialisée d'aide à la recherche clinique, les étudiants, ils sont là, ils peuvent le faire, et ils aimeront le faire, ils comprendront à quoi ça sert. Voilà, donc ça, c'est mon petit dada. Alors, la troisième chose, je pense que l'accès au troisième cycle, il doit être anticipé au niveau du deuxième cycle, c'est-à-dire que... En fonction des options, puisque maintenant, c'est un peu flou, comme on arrive dans le troisième cycle, je ne veux pas aller sur toutes les réformes qui ont été mises en place, mais je pense que pour arriver dans le troisième cycle de manière optimale, il faut avoir des prérequis qui correspondent à votre volonté. C'est-à-dire, par exemple, je prends mon cas de la chirurgie. Si vous voulez faire de la chirurgie viscérale, puisque maintenant, les filières, elles commencent tout de suite, vous allez tout de suite en chirurgie viscérale. Avant, à mon époque, moi, je suis chirurgien général, donc ça veut dire que j'ai une formation de chirurgien généraliste. Maintenant, vous vous dites tout de suite, je veux faire de la chirurgie viscérale. Eh bien, d'accord. Alors, on va regarder en anatomie, combien tu as à ton prérequis d'anatomie ? Plutôt que de faire des cours d'anatomie pendant les études de chirurgie, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas les revoir. Moi, mon patron, mon premier patron en chirurgie, tous les matins, il nous interrogeait, récite-moi la vascularisation du duodéum, récite-moi ci, récite-moi ça. Ça n'existe plus, tout ça. Je veux dire, si vous avez tous ces prérequis, ça va aller plus vite. Et puis déjà, vous allez voir les gens qui sont motivés. Un certain nombre de pauvres malheureux, on va dire, qui se retrouvent dans des impasses. Ils font ça parce qu'ils n'ont pas pu faire autre chose. Donc, je pense qu'il faut essayer de motiver les gens de manière anticipée. Surtout que le deuxième cycle, comme on a dit, il fait quatre ans. Il y a quand même le temps de pouvoir réorganiser ça. Alors, le troisième cycle, on y arrive. Le troisième cycle, il mérite. L'encadrement plus important, écoutez, ici, on était deux profs de chirurgie viscérale pour former une dizaine de gardes. Et en plus, on avait la formation de la chirurgie générale. C'est sûr qu'on ne peut pas bien les encadrer. Quand j'ai pris ma retraite, il y avait le doyen. Nous avons imposé dix internes pour mon service où on était avant deux ou trois. C'est sûr qu'à deux, honnêtement… Moi, j'étais très présent dans le service et dans les blocs. Je ne connaissais pas les prénoms des internes. J'ai honte de le dire, mais c'était la réalité. Je ne connaissais pas. Donc, il faut augmenter l'encadrement. Et augmenter l'encadrement, est-ce que ça veut dire créer des postes ? Non, non, non, non, pas du tout. Dans les hôpitaux, qu'ils soient universitaires ou non, il y a des gens qui s'appellent les praticiens hospitaliers, qu'on appelait autrefois médecins ou chirurgiens, biologistes des hôpitaux, je préfère ce titre d'ailleurs, qui sont là, mais ils sont là comme hospitaliers. donnons-leur une valance universitaire ou demandons-leur de passer et ils pourront encadrer les gens. Ils seront très compétents, il y a des gens qui sont très brillants, d'ailleurs qui n'ont pas voulu embrasser la carrière universitaire, mais qui sont capables de rendre ce service, d'avoir une activité, au moins d'enseignement dans la carrière universitaire. Voilà une ressource. Alors le quatrième point, vous êtes dans le truc là complètement. C'est le développement des carrières infirmières. Actuellement, qu'est-ce qu'on propose aux infirmières ? Ça change un peu. On leur propose éventuellement d'être spécialiste au bloc opératoire, les IBOT. On les propose d'être infirmières anesthésistes. Puis après, c'est fini. Il n'y a pas de progression valorisante. Elles vont être infirmières anesthésistes toute leur vie. Elles vont être anesthésistes ou même faire l'anesthésie. Il n'y a pas d'évolution dans ce métier. Alors, les IPA sont une approche, mais je ne suis pas sûr que ça n'en reste pas là non plus. Donc, il y a vraiment une ressource là, énorme, un potentiel énorme. Il faut l'inventer, le créer. C'est des gens comme vous qui peuvent y participer. Alors, attention, je ne dis pas qu'il faut créer des officiers de santé, c'est-à-dire un grade intermédiaire. On ne va pas retomber dans Mme Bovary. Et puis, la malheureuse expérience de son mari quand il a voulu opérer dans l'arrière-salle d'un café, un pied beau alors qu'il n'avait aucune expérience. Non, non, ce n'est pas de ça dont il s'agit. Il s'agit de trouver le moyen de valoriser et de fidéliser. Pourquoi les infirmières aient une moyenne de vie, d'activité de 15 ans ? Parce qu'elles ont fait le tour du problème au bout de 15 ans, puis elles se barrent. On ne peut pas leur en vouloir pour ça. Donc, voilà les axes qui me permettent, je suis un peu long là, mais les décisions de demain de la médecine.

  • Speaker #0

    Très bien, c'était très intéressant. Vous nous avez proposé beaucoup de pistes de réflexion qui sont très intéressantes de votre point de vue et avec l'expérience qui est la vôtre. Georges, on va arriver à la fin de cet entretien. Il me reste une question à vous poser pour conclure cet épisode. Auriez-vous des conseils à donner à la jeune génération de médecins, à un jeune ou une jeune médecin généraliste ou autre spécialiste d'organes ? C'est à vous que vous vous adressez maintenant. qu'avez-vous envie de leur dire ?

  • Speaker #1

    Alors, globalement, il y a beaucoup de choses à dire. J'en ai déjà dit, mais je vais formaliser deux conseils pour faire simple. Premièrement, garder la dimension relationnelle avec l'empathie nécessaire avec les malades. Autrement dit, ne devenez pas des techniciens. C'est le danger, ça. C'est... Surtout avec... on va dire, à stacanovisme des hyper spécialités. Je fais des carotides, je fais des carotides, je fais des carotides. Je fais des canocarpiens, je fais des canocarpiens, je fais des canocarpiens. Je suis un technicien. Le deuxième point, alors ça, c'est vraiment un conseil de vieux. Vous vous engagez dans un boulot, dans un métier. Je n'ai pas parlé d'art. Vous vous engagez dans un métier, c'est une profession, soigner les autres.

  • Speaker #0

    pour une trentaine d'années à peu près. Ça dure 30 ans un médecin, compte tenu que les études durent 12 ou 15 ans. Gardez de la ressource, gardez la possibilité de poursuivre votre formation, parce que le savoir médical, vous le savez, ça change tous les 10 ans. La demi-vie du savoir médical, c'est 5 ans, donc on peut dire que tous les 10 ans, ça change. Il faut garder de la ressource pour tout ça. Moi, j'ai le souvenir que si je n'avais pas évolué, c'est encore une anecdote, je ne saurais faire que la chirurgie des ulcères de l'estomac. Maintenant, vous ne savez même pas ce que c'est qu'un ulcère de l'estomac. Avant, on passait notre temps à faire ça. Voilà les deux conseils. Gardez la dimension relationnelle et puis surtout, vous vous engagez pour 30 ans, 35 ans. Gardez ça en tête.

  • Speaker #1

    C'est dans la boîte. Je vous remercie infiniment, Georges. C'était hyper intéressant pour moi. J'ai eu un grand plaisir à vous recevoir aujourd'hui. J'espère que l'épisode va vous plaire. Et puis, je vous remercie.

  • Speaker #2

    Au revoir.

  • Speaker #0

    Merci, Mathieu.

  • Speaker #2

    Félicitations, vous êtes bien arrivé à la fin de cet épisode du podcast. S'il vous a plu, si vous avez appris des choses utiles et que vous souhaitez que je poursuive ce travail, vous pouvez vous abonner à ce podcast et en parler à un de vos confrères ou une de vos consoeurs. Et si vraiment vous voulez m'aider, vous pouvez me laisser une note de 5 étoiles sur vos applis et un petit avis sympa pour référencer ce podcast. Pensez également à vous abonner à la newsletter. Je vous envoie chaque mois un mail à haute valeur ajoutée pour la médecine générale. Vous trouverez le lien dans les notes de l'épisode. A bientôt !

Share

Embed

You may also like

Description

Dans cet épisode exceptionnel, j’ai eu le privilège d’interviewer le Pr Georges Mantion, chirurgien de renommée mondiale, pionnier de la transplantation hépatique, avec plus de 600 greffes réalisées et 30 000 interventions à son actif. En 2015, son parcours exemplaire a été récompensé par la Légion d’honneur, témoignant de son engagement pour l’excellence médicale et la transmission du savoir.


Au fil de cet échange riche et inspirant, nous avons exploré :


✅ Son parcours remarquable : de ses débuts à la Faculté de Besançon à ses missions internationales, notamment en Chine, où il a formé des générations de chirurgiens et contribué à la lutte contre l’échinococcose alvéolaire.

✅ La gestion du stress en chirurgie : des astuces pour les jeunes praticiens, mettant en avant l’importance de l’authenticité, de la préparation technique et de l’introspection.

✅ Ses plus grands succès et échecs : de la transplantation d’urgence d’une jeune patiente atteinte de la maladie de Wilson à l’émotion intense liée à la perte tragique de collègues lors d’un accident d’avion.

✅ La relation patient-médecin : comment maintenir une empathie sincère tout en gérant les défis émotionnels de la pratique médicale.

✅ Les défis de la médecine actuelle : hyperspécialisation, temps médical réduit, accès aux soins, et avenir de la formation médicale.


Un épisode riche en enseignements pour tous les praticiens, à ne pas manquer !


Vous savez comme le temps nous manque en consultation: C’est là que Pulse Life Premium peut faire toute la différence, c'est mon partenaire sur cet épisode.
Cette solution pensée pour nous, médecins généralistes, intègre directement dans notre logiciel métier des outils fiables, toujours à jour, et propulsés par l’intelligence artificielle. Que ce soit pour accéder à des algorithmes interactifs, une base médicamenteuse complète, ou encore des recommandations médicales synthétiques, tout est à portée de main. C'est hyper simple: cette extension se superpose à notre logiciel métier, et ses outils couvre 100% des motifs de consultation de patients
Vous pouvez l’essayer et profiter d’une offre exclusive à moindre coût, sans engagement, en cliquant sur ce lien; Allez jeter un œil, vous ne serez pas déçus:
https://chromewebstore.google.com/detail/pulselife-premium/eooipdaghfmdpofapjlfegadjanimlpo


Rretrouvez moi sur insta:

https://www.instagram.com/dr.matthieu.cantet


Et sur linkedin:

https://www.linkedin.com/in/matthieu-cantet-4a5591294/



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Super Docteur, c'est le podcast des médecins généralistes. Le podcast qui vous transmet les recommandations de bonne pratique et les résultats des grandes études qui vont changer vos habitudes. Super Docteur, c'est la découverte de méthodes de soins innovantes et des interviews de soignants inspirants qui boosteront votre motivation. Un contenu court et pratique, chaque semaine, pour tous les médecins. Vous savez à quel point nos journées peuvent être intenses et comme le temps nous manque en consultation. C'est là que Pulse Life Premium peut faire toute la différence, c'est mon partenaire sur cet épisode. Cette solution pensée pour nous, médecins généralistes, intègre directement dans notre logiciel métier des outils fiables, toujours à jour, mais propulsés par l'intelligence artificielle. Que ce soit pour accéder à des algorithmes interactifs, une base médicamenteuse complète ou encore des recommandations médicales synthétiques, tout est à portée de main. C'est hyper simple, cette extension se superpose à notre logiciel métier. Et ces outils couvrent 100% des motifs de consultation de patients. 95% de nos confrères ayant testé Pulse Life Premium affirment gagner en sérénité et gagner du temps. Et aujourd'hui, vous pouvez l'essayer et profiter d'une offre exclusive à moindre coût, sans engagement, en cliquant sur le lien dans les notes de l'épisode. Alors reprenez la maîtrise de votre temps avec efficacité, avec Pulse Life Premium. Allez jeter un œil, vous ne serez pas déçu. Merci de me retrouver dans ce deuxième épisode de Superdocteur, au cours duquel je me suis entretenu avec le prestigieux... professeur Georges Manchion. Dans le premier épisode, mon prestigieux invité nous a décrit sa vie faite de milliers d'opérations et de voyages à l'étranger. Et dans ce deuxième et dernier épisode, je vous propose d'écouter avec moi la suite de mon entretien, au cours duquel Georges Manchion va nous donner des conseils pratiques à appliquer pour nos confrères, nos consoeurs, médecins et chirurgiens évidemment. Je vous remercie beaucoup d'être toujours plus nombreux à écouter ce podcast et si vous voulez m'aider simplement, vous pouvez parler de mon travail à vos consoeurs, vos confrères. et vous abonner à ce podcast. Excellente écoute ! Vous avez fait 600 greffes deux fois, vous m'avez rapporté en début de ce podcast 30 000 interventions chirurgicales qui ont été consignées. J'imagine que certaines d'entre elles étaient extrêmement stressantes et j'ai une question à vous poser. Est-ce que vous aviez des techniques particulières pour gérer ce stress en pratique, avant des opérations aussi périlleuses que des greffes dont vous nous avez décrites ? Est-ce que vous avez des techniques que vous pouvez nous partager, notamment pour les jeunes chirurgiens qui nous écoutent ?

  • Speaker #1

    Alors, bien sûr, du stress, il y en a dans notre métier, ça c'est sûr. Le stress, il est alimenté par quoi ? C'est la crainte de mal faire ou de faire du mal. Il ne faut pas oublier quand même que l'acte chirurgical, c'est un acte qui est très intrusif. C'est une véritable agression du corps humain, qui n'est possible d'ailleurs que par... le fait d'une dérogation du code civil. C'est une dérogation, c'est inscrit. Dérogation du code civil. Ça veut dire que si vous sortez de ce cadre, et c'est pas forcément facile de savoir, sortir du cadre, qu'est-ce que c'est ? C'est faire une variation dans une technique opératoire qui n'est pas validée. Ça risque d'être interprété comme une sortie du cadre. Donc, on comprend qu'il puisse y avoir du stress. Alors, la gestion du stress, moi j'en ai eu plus que ma dose, mais c'est difficile. Pour se préparer à ça, voilà ce que je peux dire. Ça passe d'abord par la maîtrise de la technique de l'acte opératoire. Il faut avoir une bonne maîtrise technique et la connaissance des risques. Quel risque je fais courir ? Alors ça, ça s'apprend lors de la formation, mais ça s'apprend toute la vie, toute la vie, avec l'analyse des résultats, des échecs. Alors on peut dire aussi que, là on se place à un niveau, on va dire philosophique, il y a un vrai besoin d'authenticité. C'est-à-dire, c'est quoi l'authenticité ? C'est-à-dire avoir la capacité à agir selon ses convictions. C'est-à-dire, on ne va pas faire une opération en reculant. Je ne sais pas la faire, je ne vais pas la faire, c'est tout. Bien se connaître, c'est ça, bien se connaître. Je sais faire ça, je peux faire ça. Je ne sais pas le faire, je vais avoir du stress et forcément, ça ne va pas bien se passer. Il faut trouver, en gros, garder le sens de la pratique chirurgicale, c'est-à-dire garder un sens à ce qu'on fait. C'est plus que de la chirurgie, c'est valable pour tout, garder un sens à ce qu'on fait. Il faut que ça ait du sens. C'était démontré, ça, ce que je vous dis là en ce moment par rapport à l'authenticité. Ça a été démontré dans différents papiers. Il y a un papier qui vient de sortir dans le journal de l'American College en 2024. qui montrent que cette capacité à garder son authenticité, telle que je l'ai plus ou moins définie, ça réduit l'incidence du stress et du burn-out. Les professions de chirurgie, que ce soit comme chirurgien senior ou comme interne, sont fortement impactées par les burn-out. Beaucoup plus que n'importe quelle population, on considère, c'est bien développé dans cette pratique, que c'est multiplié par trois ou quatre. C'est pour ça qu'il faut se protéger par rapport à ça en faisant cette auto-analyse. Je sais le faire, je vais le faire.

  • Speaker #0

    D'accord. Vous voulez dire que ce que vous définissez comme l'authenticité, c'est l'alignement entre les capacités techniques et le sens qu'on porte à cette tâche ?

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #0

    Ok. Et donc, vous conseillez de... de faire preuve d'introspection régulière et de se poser régulièrement cette question pour savoir est-ce qu'on est toujours à la bonne place et est-ce qu'on est toujours la bonne personne ?

  • Speaker #1

    Complètement. Je ne vais pas vous donner le détail de toute ma vie, mais tous les soirs, je me disais, c'est un asthmo, est-ce que je l'ai bien fait ? Mais ça n'a pas au moment du geste, c'est rétrospectivement, voilà.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est intéressant ça. Vous avez des ruminations, c'est-à-dire qu'après l'opération, vous repensez à cette dernière.

  • Speaker #1

    Bien sûr, parce que vous savez, quand vous faites une anastomose digestive, il y a des risques de fistules. Et puis les risques de fistules, c'est quoi ? C'est la péritonite. Et dans un certain nombre de cas, c'est la mort du malade. Il doit y avoir 3-4 dans la journée où vous dites, quand vous faites une opération où il y a 3-4 anastomoses dans la grappe de foie, les anastomoses vasculaires, ce n'est pas anodin. Bien sûr, cette introspection personnelle, mais j'engage aussi à partager ces expériences, et en particulier les expériences négatives. En un mot, si on peut dire, il faut s'enrichir de ces échecs. Ça veut dire qu'il faut les analyser. Les analyser tout seul, ce n'est pas forcément suffisant. Il faut les analyser avec les autres. Et quand on est dans une situation difficile, il ne faut pas hésiter à prendre la vie d'un. confrères, quelqu'un qui comprend de quoi on parle. Parce que c'est comme ça qu'on peut progresser. Comme ça, absolument, qu'on peut progresser. Il ne faut pas s'enferrer dans un non-dit où je ne sais pas le faire, où je ne pourrai jamais y arriver. Non, il faut progresser. Et pour ça, il faut s'analyser. Mais, alors, pour autant, il ne faut pas se gâcher la vie non plus.

  • Speaker #0

    mais analyser ses échecs et faire preuve d'introspection régulière. Merci pour ces conseils. Est-ce que vous auriez remarqué des traits de caractère qui caractériseraient des bons chirurgiens dans votre carrière ? Est-ce qu'un bon chirurgien répond à une certaine liste de critères à respecter ou alors n'importe qui peut apprendre et devenir à terme un bon chirurgien ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense plutôt pour ce que vous venez de dire là. C'est quelque chose qui est accessible, mais dans différentes conditions. Les conditions pour y accéder, c'est premièrement le courage. Il faut beaucoup de courage. Il faut beaucoup de courage pour aller dans le thorax de quelqu'un, pour aller arrêter la circulation cardiaque. Il faut beaucoup de courage pour ça. Il faut beaucoup de courage pour rentrer dans un ventre dans lequel il y a une péritonite stercoral avec une odeur insupportable. Il faut du courage. Il faut du courage physique, bien sûr. Il faut du courage physique parce que parfois, c'est long. Je ne vous en ai pas parlé, mais l'opération dont on parle chez les Chinois avec l'autotransplantation, c'est 16 heures d'opération. La transplantation hépatique, la première que j'ai faite ici à Besançon avec Michel Gillet, c'était 13 heures. Et avant ces 13 heures, moi, j'étais parti faire le prélèvement dans une autre mobile. Donc, vous voyez, on additionne les heures. Donc, il faut du courage physique, c'est sûr. Mais ça, c'est facile à acquérir. Il suffit de s'accrocher. En une semaine, c'est réglé, vous pouvez rester debout pendant des heures, il n'y a pas de problème. Il faut du courage moral aussi, il faut du courage moral. Il faut du courage moral pour accepter d'être confronté à la maladie, avec malheureusement le risque d'avoir un échec à l'arrivée. Vous voyez, quand vous passez six heures dans une crève de foie, ou huit heures, et puis qu'à la fin, malheureusement, ça ne marche pas, le foie ne marche pas, le malade va mourir, il faut beaucoup de courage. Il faut être disponible aussi. Il faut vraiment être disponible. Il faut du courage pour être disponible. Il faut être disponible pour faire les urgences. Je suis effaré de voir qu'il y a des gens qui ne veulent pas prendre d'urgence. Les urgences, ça fait partie du métier d'un médecin. Que vous soyez chirurgien, que vous soyez médecin spécialiste ou médecin généraliste à fortiori. On n'est pas là pour aider les gens aux heures ouvrables, on est là pour aider les gens quand ils sont dans la détresse, quand ils sont à besoin. Après, il y a des systèmes pour organiser. Je ne dis pas que tout le monde doit être disponible tout le temps, mais il y a des systèmes pour organiser. Alors, le deuxième élément important qui va un petit peu contrecarrer celui-là, c'est l'optimisme. Alors ça, l'optimisme, c'est mon patron qui m'a appris ça. Moi, j'ai toujours été optimiste. Mon père était très optimiste. Moi, j'ai toujours été optimiste. Alors il faut de l'optimisme pour confronter toutes ces situations, puis pour accompagner les malades. Il ne faut pas dire aux malades, comme je disais à ce pauvre abbé dont on parlait il n'y a pas longtemps, il faut être optimiste pour accompagner les familles, il faut être optimiste pour entreprendre des opérations de plus en plus complexes au fur et à mesure qu'on acquiert de la dextérité. Il faut être optimiste pour faire évoluer ces pratiques. quand vous voyez l'arrivée de la celluloscopie, l'arrivée de la robotique, il faut dire, il y en a quoi, il faut être optimiste. Puis il faut être aussi optimiste, alors ça c'est, je vous dis ça, c'est à titre personnel, mais pour espérer pouvoir faire accepter, en particulier au niveau familial, l'idée que l'année prochaine ça va aller mieux. Je me souviens de ma vie, toute ma vie, j'ai dit à ma femme l'année prochaine tu vas voir, ça va être mieux, je serai plus disponible et tout. Et d'ailleurs j'en prie pour la saluer parce que Elle a été d'une patience et d'une constance que je ne remercierai jamais assez. Donc, courage et optimisme. Alors, vous voyez, je ne vous ai pas parlé de dextérité, je ne vous ai pas parlé de… Non, je pense qu'avec ces deux éléments, et surtout l'optimisme…

  • Speaker #0

    Et la disponibilité, du coup.

  • Speaker #1

    La disponibilité, oui. La disponibilité, je l'ai mise dans le courage, parce que ça fait vraiment partie du… Il faut avoir du courage pour se rendre disponible. Et moi, je me permets de vous dire… que je ne vais pas dire médecin à jour, médecin toujours, c'est un conneté. Moi, j'ai des gens qui m'appellent régulièrement et je suis disponible pour leur expliquer. Je ne pratique plus, mais je pourrais changer par rapport à leurs problèmes. Et puis, je les oriente si je peux. Et puis, j'espère un peu, je les rassure.

  • Speaker #0

    Je ne connais pas un médecin qui a cessé son activité, qui a cessé de rendre service, d'aider ou de...

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Oui, c'est... Non, non, ce que vous dites, c'est un jour, c'est un toujours, ça se tient. Vous n'êtes pas le seul à le penser, je pense. Georges, vous avez été nommé chevalier de la Légion d'honneur en 2015. Est-ce que ça représente quelque chose pour vous, cette reconnaissance ? Qu'est-ce que ça représente ? Comment pensez-vous qu'elle reflète votre parcours, cette récompense ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un de mes très bons souvenirs. Oui, c'était en 2015, effectivement, que j'ai reçu cette décoration au titre de mes activités hospital-universitaires. C'était un honneur pour moi, bien sûr. Un honneur pour moi, mais pour ma famille aussi, en particulier ma femme et mes enfants, mais toute la famille, et puis aussi pour toute l'équipe, parce que j'ai bien compris que ce qu'on avait honoré, ce qui a été honoré par le gouvernement, c'est l'implication qu'on a mise pour la prise en charge des malades sur notre région et au-delà, et pour l'engagement qu'on a pris. et en particulier moi, c'est vrai, pour la transmission des connaissances. Donc, j'ai vraiment ressenti ça comme un honneur qui, finalement, récompensait, entre guillemets, ma carrière et puis la manière dont je l'avais guidée.

  • Speaker #0

    D'accord. Et est-ce que vous pouvez me dire maintenant le regard que vous portez sur la médecine actuelle ? Vous m'avez parlé d'optimisme, de courage, de disponibilité. Et je suis curieux d'avoir votre point de vue sur l'état de la médecine tel que vous le voyez actuellement par rapport à celui que vous avez connu peut-être les années auparavant.

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est une vaste question que vous me posez. C'est une vaste question, mais qui est une question qui regroupe des problèmes d'actualité ? Alors, moi, je vais vous donner... On pourrait discuter aussi pendant des heures. J'ai deux points que je peux développer qui me semblent caractériser la médecine à l'heure actuelle. Ça ne veut pas dire que je vais donner des solutions. Premièrement, l'hyperspécialisation. Voilà la situation de la médecine à l'heure actuelle. Alors, ça peut être présenté comme une amélioration qualitative par rapport à des résultats qu'on souhaite obtenir dans chaque spécialité. Mais d'un autre côté, c'est une vraie dépendance de ces hyper ou hypos spécialités. les unes vis-à-vis des autres. Par exemple, si j'opère un cancer du colon sigmoïde qui envahit l'urtère, je peux enlever tout et faire l'anastomose de l'urtère. Maintenant, ce n'est même plus imaginable. Si j'ai un envahissement de l'artère, il y a que je sais la remplacer. J'ai fait de la chirurgie vasculaire pendant des années. J'ai opéré des carotides, j'ai opéré des aortes. Ce qui m'a permis d'ailleurs d'être très à l'aise pour tout ce qui est chirurgie de la transplantation hépatique. Parce que la transplantation hépatique, c'est avant tout de la chirurgie vasculaire. Et puis après, beaucoup d'immunologie. Donc, je pense que cette hyperspécialité... On le trouve d'ailleurs, pas rien qu'en chirurgie, il y a les chirurgiens de la main, les chirurgiens de la hanche, les chirurgiens du genou. Cette hyperspécialité qui correspond certainement à une amélioration du service rendu, elle est une partie d'explication des difficultés qu'on peut avoir à trouver un spécialiste. C'est une partie de l'explication. Alors, ça me permet de sauter au deuxième point que je voulais... évoquées par rapport à ce problème de l'état de la médecine actuelle, c'est qu'actuellement en France, d'après les données que j'ai, mais j'ai des bonnes informations du côté de la démographie médicale par le Conseil de l'Ordre, il n'y a jamais eu autant de médecins inscrits à l'Ordre. Je crois qu'on est entre 230 000 et 240 000. C'est assez considérable. Je crois qu'il n'y a que l'Allemagne qui nous dépasse. Mais on n'a jamais eu autant de difficultés pour accéder aux soins. Je le dis pour moi aussi, moi j'ai des difficultés pour accéder aux soins et je vois avec angoisse mes collègues plus jeunes que moi partir en retraite parce que j'aurais plus de difficultés à accéder aux soins. Alors c'est clair que plus de médecins, moins d'accès, ça veut dire qu'il y a une diminution du temps médical. Alors la diminution du temps médical, moi je ne veux pas m'étendre là-dessus, elle est multiple, ce n'est pas à vous, je vais apprendre que la Sécurité sociale a transféré ses charges administratives. aux médecins, qui leur bouffent du temps, ce qui fait qu'il y en a même à certains endroits qui préfèrent, dans notre région, partir en Suisse. Moi, je suis tout près de la Suisse, là, on est à 80 km, où il y a moins de contraintes administratives. Donc, le temps médical est réduit, et c'est ça qui est le gros problème. Le deuxième problème, bien sûr, c'est ce qu'on appelle les déserts médicaux. Mais bon, je ne veux pas trop insister là-dessus, on en parle à longueur de journée, mais on comprend bien les médecins qui sont... qui ont charge de famille, ne vont pas non plus sacrifier toute la vie de leurs épouses, de leurs enfants, en partant dans un endroit où il n'y a plus d'épicerie, il n'y a plus de bistrot, il n'y a plus de bureau de poste, il n'y a plus de gendarmerie, il n'y a plus rien. Qu'un pharmacien, si le médecin s'installe, autrement le pharmacien, il s'en va. Donc, voilà, c'est un appauvrissement qui est lié au phénomène civilisationnel qu'on connaît actuel de migration dans les villes de... Petite, moyenne ou grande importance. Voilà, donc, hyperspécialisation, temps médical, insuffisant. Mais je n'ai pas de solution.

  • Speaker #0

    C'est le constat.

  • Speaker #1

    C'est comme on l'analyse.

  • Speaker #0

    Si vous vous mettiez à la place d'un jeune médecin généraliste, est-ce que vous pouvez me dire les défis qui s'annoncent à lui dans ce contexte actuel d'hyperspécialisation, de déserts médicaux, de temps médical réduit, d'intelligence artificielle ? de démographie médicale, etc. Que faudrait-il penser ? Que faudrait-il faire quand on est un jeune médecin généraliste pour appréhender les années à venir ?

  • Speaker #1

    C'est compliqué. C'est compliqué de faire des prévisions. La prévision, c'est surtout difficile quand ça concerne l'avenir. C'est Pierre Dacq qui disait ça. Je suis posé à Éconos. On sait. J'aime bien cette formule. La prévision est surtout difficile. quand il s'agit de l'avenir. Alors, pour les défis de la médecine demain, l'élément important à garder, c'est les intérêts des patients, des malades. C'est quand même le cœur de métier. On est là pour soigner des gens. Donc, ça veut dire qu'il faut continuer à travailler sur l'accès aux soins, continuer à travailler, ça je sais que c'est fait dans toutes les spécialités, travailler sur la qualité de la prise en charge. Mais de ce côté-là, la France est loin d'être en retard. Et puis, travailler aussi sur les coûts. Les coûts, la santé, ça a un coût, ça a un prix. Les gens ne connaissent plus très bien les coûts. Donc, il y a une acceptabilité des coûts qui se fait soit directement au niveau du portefeuille des patients, soit indirectement par les impôts qu'on paye. Parce que la Sécurité sociale, ce n'est pas l'État qui le paye, c'est les Français. qui, par leur cotisation sociale et les impôts qui paient, il y a du PNFS qui fait que le budget est contraint ou non et qu'on peut soigner plus ou moins de patients. C'est vraiment le cœur de notre métier. Le deuxième point, c'est qu'il y a des évolutions technologiques qui sont aidantes. Vous les avez citées, la télémédecine, l'intelligence artificielle. Dans mon métier, il y a eu la scélioscopie, la robotique. Il y a tout un tas de choses qui sont importantes. Il y a des améliorations aussi très institutionnelles et plus simples. On parlait de l'analyse des difficultés. C'est ce qu'on a dans les réunions de mort-bimortanité, les RMM, pour lesquelles j'avais un personnel dédié et qui nous obligeait à faire tous les mois une analyse de tout ce qui s'était passé, qui était très enrichissante pour l'ensemble et pour le personnel. Alors, le troisième point, c'est qu'il faut faire face aux exigences croissantes des administrations de tutelle aussi. On en a parlé tout à l'heure, la sécurité sociale. qui, à mon avis, a des défauts, mais elle est moins pire que les compagnies privées. C'est clair, il faut que les gens aient bien compris ça. Les compagnies privées, quand elles vont arriver, ça ne va pas être de la rigolade, parce que moi j'ai des copains aux États-Unis, et je vois bien quand ils sont pris en charge comment ça se passe. Ils sont bien pris en charge, mais ça peut être très compliqué. Vous pouvez être obligé d'aller vous faire soigner à 200 kilomètres avec l'hôpital qui est conventionné avec la compagnie d'assurance. Il ne faut pas oublier ça. Le gouvernement aussi, qui contraint beaucoup des discussions. Globalement, tout l'encadrement administratif de notre métier. Alors, on peut s'attendre, pour conclure ce chapitre, on peut s'attendre quand même à une évolution prochaine de la filière de formation des médecins. C'est clair, les études de médecine, comme je les ai connues, comme vous les avez connues, elles sont dans une phase de pré-rupture. C'est une phase de clérouture. Moi, c'est mon analyse. Et je l'entends beaucoup au niveau des doyards, en France ou dans le monde. Pourquoi ? Déjà, la longueur des études. La formation en chirurgie, je suis d'accord. C'est non, parce qu'il y a tout ce phénomène d'acclimatation, s'habituer à avoir des scènes difficiles. C'est compliqué. Mais je pense quand même que les outils pédagogiques qu'on a actuellement, Je ne parle pas des leçons magistrales, mais les outils pédagogiques qu'on a maintenant permettent, à mon avis, de réduire au moins d'un an le deuxième cycle. Je pense que dans le deuxième cycle, ce qui manque beaucoup, c'est la formation à la recherche clinique. Je pense que des gens comme vous, des gens impliqués dans leur métier, ils sont un outil. extraordinaire pour l'analyse, en particulier à l'époque de l'intelligence artificielle, pour l'analyse de prise en charge des patients, pour l'optimisation bien sûr. Et donc ça, c'est vraiment mon cheval de bataille. Diminuer d'un an et mettre six mois au moins de formation à la recherche clinique et en plus reconnaissez que les étudiants en médecine ne sont pas… enfin la présence des étudiants en médecine. qu'on appelait autrefois les externes, mais qui ne sont plus du tout des externes comme moi j'ai été, où on faisait vraiment du boulot de médecin. La présence de ces étudiants, elle est méprisée. Ils venaient au bloc opératoire, on leur faisait de l'enseignement et tout, mais c'est de la main-d'œuvre presque gratuite pour la recherche clinique. Au lieu d'aller chercher des gens qui ont une formation spécialisée d'aide à la recherche clinique, les étudiants, ils sont là, ils peuvent le faire, et ils aimeront le faire, ils comprendront à quoi ça sert. Voilà, donc ça, c'est mon petit dada. Alors, la troisième chose, je pense que l'accès au troisième cycle, il doit être anticipé au niveau du deuxième cycle, c'est-à-dire que... En fonction des options, puisque maintenant, c'est un peu flou, comme on arrive dans le troisième cycle, je ne veux pas aller sur toutes les réformes qui ont été mises en place, mais je pense que pour arriver dans le troisième cycle de manière optimale, il faut avoir des prérequis qui correspondent à votre volonté. C'est-à-dire, par exemple, je prends mon cas de la chirurgie. Si vous voulez faire de la chirurgie viscérale, puisque maintenant, les filières, elles commencent tout de suite, vous allez tout de suite en chirurgie viscérale. Avant, à mon époque, moi, je suis chirurgien général, donc ça veut dire que j'ai une formation de chirurgien généraliste. Maintenant, vous vous dites tout de suite, je veux faire de la chirurgie viscérale. Eh bien, d'accord. Alors, on va regarder en anatomie, combien tu as à ton prérequis d'anatomie ? Plutôt que de faire des cours d'anatomie pendant les études de chirurgie, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas les revoir. Moi, mon patron, mon premier patron en chirurgie, tous les matins, il nous interrogeait, récite-moi la vascularisation du duodéum, récite-moi ci, récite-moi ça. Ça n'existe plus, tout ça. Je veux dire, si vous avez tous ces prérequis, ça va aller plus vite. Et puis déjà, vous allez voir les gens qui sont motivés. Un certain nombre de pauvres malheureux, on va dire, qui se retrouvent dans des impasses. Ils font ça parce qu'ils n'ont pas pu faire autre chose. Donc, je pense qu'il faut essayer de motiver les gens de manière anticipée. Surtout que le deuxième cycle, comme on a dit, il fait quatre ans. Il y a quand même le temps de pouvoir réorganiser ça. Alors, le troisième cycle, on y arrive. Le troisième cycle, il mérite. L'encadrement plus important, écoutez, ici, on était deux profs de chirurgie viscérale pour former une dizaine de gardes. Et en plus, on avait la formation de la chirurgie générale. C'est sûr qu'on ne peut pas bien les encadrer. Quand j'ai pris ma retraite, il y avait le doyen. Nous avons imposé dix internes pour mon service où on était avant deux ou trois. C'est sûr qu'à deux, honnêtement… Moi, j'étais très présent dans le service et dans les blocs. Je ne connaissais pas les prénoms des internes. J'ai honte de le dire, mais c'était la réalité. Je ne connaissais pas. Donc, il faut augmenter l'encadrement. Et augmenter l'encadrement, est-ce que ça veut dire créer des postes ? Non, non, non, non, pas du tout. Dans les hôpitaux, qu'ils soient universitaires ou non, il y a des gens qui s'appellent les praticiens hospitaliers, qu'on appelait autrefois médecins ou chirurgiens, biologistes des hôpitaux, je préfère ce titre d'ailleurs, qui sont là, mais ils sont là comme hospitaliers. donnons-leur une valance universitaire ou demandons-leur de passer et ils pourront encadrer les gens. Ils seront très compétents, il y a des gens qui sont très brillants, d'ailleurs qui n'ont pas voulu embrasser la carrière universitaire, mais qui sont capables de rendre ce service, d'avoir une activité, au moins d'enseignement dans la carrière universitaire. Voilà une ressource. Alors le quatrième point, vous êtes dans le truc là complètement. C'est le développement des carrières infirmières. Actuellement, qu'est-ce qu'on propose aux infirmières ? Ça change un peu. On leur propose éventuellement d'être spécialiste au bloc opératoire, les IBOT. On les propose d'être infirmières anesthésistes. Puis après, c'est fini. Il n'y a pas de progression valorisante. Elles vont être infirmières anesthésistes toute leur vie. Elles vont être anesthésistes ou même faire l'anesthésie. Il n'y a pas d'évolution dans ce métier. Alors, les IPA sont une approche, mais je ne suis pas sûr que ça n'en reste pas là non plus. Donc, il y a vraiment une ressource là, énorme, un potentiel énorme. Il faut l'inventer, le créer. C'est des gens comme vous qui peuvent y participer. Alors, attention, je ne dis pas qu'il faut créer des officiers de santé, c'est-à-dire un grade intermédiaire. On ne va pas retomber dans Mme Bovary. Et puis, la malheureuse expérience de son mari quand il a voulu opérer dans l'arrière-salle d'un café, un pied beau alors qu'il n'avait aucune expérience. Non, non, ce n'est pas de ça dont il s'agit. Il s'agit de trouver le moyen de valoriser et de fidéliser. Pourquoi les infirmières aient une moyenne de vie, d'activité de 15 ans ? Parce qu'elles ont fait le tour du problème au bout de 15 ans, puis elles se barrent. On ne peut pas leur en vouloir pour ça. Donc, voilà les axes qui me permettent, je suis un peu long là, mais les décisions de demain de la médecine.

  • Speaker #0

    Très bien, c'était très intéressant. Vous nous avez proposé beaucoup de pistes de réflexion qui sont très intéressantes de votre point de vue et avec l'expérience qui est la vôtre. Georges, on va arriver à la fin de cet entretien. Il me reste une question à vous poser pour conclure cet épisode. Auriez-vous des conseils à donner à la jeune génération de médecins, à un jeune ou une jeune médecin généraliste ou autre spécialiste d'organes ? C'est à vous que vous vous adressez maintenant. qu'avez-vous envie de leur dire ?

  • Speaker #1

    Alors, globalement, il y a beaucoup de choses à dire. J'en ai déjà dit, mais je vais formaliser deux conseils pour faire simple. Premièrement, garder la dimension relationnelle avec l'empathie nécessaire avec les malades. Autrement dit, ne devenez pas des techniciens. C'est le danger, ça. C'est... Surtout avec... on va dire, à stacanovisme des hyper spécialités. Je fais des carotides, je fais des carotides, je fais des carotides. Je fais des canocarpiens, je fais des canocarpiens, je fais des canocarpiens. Je suis un technicien. Le deuxième point, alors ça, c'est vraiment un conseil de vieux. Vous vous engagez dans un boulot, dans un métier. Je n'ai pas parlé d'art. Vous vous engagez dans un métier, c'est une profession, soigner les autres.

  • Speaker #0

    pour une trentaine d'années à peu près. Ça dure 30 ans un médecin, compte tenu que les études durent 12 ou 15 ans. Gardez de la ressource, gardez la possibilité de poursuivre votre formation, parce que le savoir médical, vous le savez, ça change tous les 10 ans. La demi-vie du savoir médical, c'est 5 ans, donc on peut dire que tous les 10 ans, ça change. Il faut garder de la ressource pour tout ça. Moi, j'ai le souvenir que si je n'avais pas évolué, c'est encore une anecdote, je ne saurais faire que la chirurgie des ulcères de l'estomac. Maintenant, vous ne savez même pas ce que c'est qu'un ulcère de l'estomac. Avant, on passait notre temps à faire ça. Voilà les deux conseils. Gardez la dimension relationnelle et puis surtout, vous vous engagez pour 30 ans, 35 ans. Gardez ça en tête.

  • Speaker #1

    C'est dans la boîte. Je vous remercie infiniment, Georges. C'était hyper intéressant pour moi. J'ai eu un grand plaisir à vous recevoir aujourd'hui. J'espère que l'épisode va vous plaire. Et puis, je vous remercie.

  • Speaker #2

    Au revoir.

  • Speaker #0

    Merci, Mathieu.

  • Speaker #2

    Félicitations, vous êtes bien arrivé à la fin de cet épisode du podcast. S'il vous a plu, si vous avez appris des choses utiles et que vous souhaitez que je poursuive ce travail, vous pouvez vous abonner à ce podcast et en parler à un de vos confrères ou une de vos consoeurs. Et si vraiment vous voulez m'aider, vous pouvez me laisser une note de 5 étoiles sur vos applis et un petit avis sympa pour référencer ce podcast. Pensez également à vous abonner à la newsletter. Je vous envoie chaque mois un mail à haute valeur ajoutée pour la médecine générale. Vous trouverez le lien dans les notes de l'épisode. A bientôt !

Description

Dans cet épisode exceptionnel, j’ai eu le privilège d’interviewer le Pr Georges Mantion, chirurgien de renommée mondiale, pionnier de la transplantation hépatique, avec plus de 600 greffes réalisées et 30 000 interventions à son actif. En 2015, son parcours exemplaire a été récompensé par la Légion d’honneur, témoignant de son engagement pour l’excellence médicale et la transmission du savoir.


Au fil de cet échange riche et inspirant, nous avons exploré :


✅ Son parcours remarquable : de ses débuts à la Faculté de Besançon à ses missions internationales, notamment en Chine, où il a formé des générations de chirurgiens et contribué à la lutte contre l’échinococcose alvéolaire.

✅ La gestion du stress en chirurgie : des astuces pour les jeunes praticiens, mettant en avant l’importance de l’authenticité, de la préparation technique et de l’introspection.

✅ Ses plus grands succès et échecs : de la transplantation d’urgence d’une jeune patiente atteinte de la maladie de Wilson à l’émotion intense liée à la perte tragique de collègues lors d’un accident d’avion.

✅ La relation patient-médecin : comment maintenir une empathie sincère tout en gérant les défis émotionnels de la pratique médicale.

✅ Les défis de la médecine actuelle : hyperspécialisation, temps médical réduit, accès aux soins, et avenir de la formation médicale.


Un épisode riche en enseignements pour tous les praticiens, à ne pas manquer !


Vous savez comme le temps nous manque en consultation: C’est là que Pulse Life Premium peut faire toute la différence, c'est mon partenaire sur cet épisode.
Cette solution pensée pour nous, médecins généralistes, intègre directement dans notre logiciel métier des outils fiables, toujours à jour, et propulsés par l’intelligence artificielle. Que ce soit pour accéder à des algorithmes interactifs, une base médicamenteuse complète, ou encore des recommandations médicales synthétiques, tout est à portée de main. C'est hyper simple: cette extension se superpose à notre logiciel métier, et ses outils couvre 100% des motifs de consultation de patients
Vous pouvez l’essayer et profiter d’une offre exclusive à moindre coût, sans engagement, en cliquant sur ce lien; Allez jeter un œil, vous ne serez pas déçus:
https://chromewebstore.google.com/detail/pulselife-premium/eooipdaghfmdpofapjlfegadjanimlpo


Rretrouvez moi sur insta:

https://www.instagram.com/dr.matthieu.cantet


Et sur linkedin:

https://www.linkedin.com/in/matthieu-cantet-4a5591294/



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Super Docteur, c'est le podcast des médecins généralistes. Le podcast qui vous transmet les recommandations de bonne pratique et les résultats des grandes études qui vont changer vos habitudes. Super Docteur, c'est la découverte de méthodes de soins innovantes et des interviews de soignants inspirants qui boosteront votre motivation. Un contenu court et pratique, chaque semaine, pour tous les médecins. Vous savez à quel point nos journées peuvent être intenses et comme le temps nous manque en consultation. C'est là que Pulse Life Premium peut faire toute la différence, c'est mon partenaire sur cet épisode. Cette solution pensée pour nous, médecins généralistes, intègre directement dans notre logiciel métier des outils fiables, toujours à jour, mais propulsés par l'intelligence artificielle. Que ce soit pour accéder à des algorithmes interactifs, une base médicamenteuse complète ou encore des recommandations médicales synthétiques, tout est à portée de main. C'est hyper simple, cette extension se superpose à notre logiciel métier. Et ces outils couvrent 100% des motifs de consultation de patients. 95% de nos confrères ayant testé Pulse Life Premium affirment gagner en sérénité et gagner du temps. Et aujourd'hui, vous pouvez l'essayer et profiter d'une offre exclusive à moindre coût, sans engagement, en cliquant sur le lien dans les notes de l'épisode. Alors reprenez la maîtrise de votre temps avec efficacité, avec Pulse Life Premium. Allez jeter un œil, vous ne serez pas déçu. Merci de me retrouver dans ce deuxième épisode de Superdocteur, au cours duquel je me suis entretenu avec le prestigieux... professeur Georges Manchion. Dans le premier épisode, mon prestigieux invité nous a décrit sa vie faite de milliers d'opérations et de voyages à l'étranger. Et dans ce deuxième et dernier épisode, je vous propose d'écouter avec moi la suite de mon entretien, au cours duquel Georges Manchion va nous donner des conseils pratiques à appliquer pour nos confrères, nos consoeurs, médecins et chirurgiens évidemment. Je vous remercie beaucoup d'être toujours plus nombreux à écouter ce podcast et si vous voulez m'aider simplement, vous pouvez parler de mon travail à vos consoeurs, vos confrères. et vous abonner à ce podcast. Excellente écoute ! Vous avez fait 600 greffes deux fois, vous m'avez rapporté en début de ce podcast 30 000 interventions chirurgicales qui ont été consignées. J'imagine que certaines d'entre elles étaient extrêmement stressantes et j'ai une question à vous poser. Est-ce que vous aviez des techniques particulières pour gérer ce stress en pratique, avant des opérations aussi périlleuses que des greffes dont vous nous avez décrites ? Est-ce que vous avez des techniques que vous pouvez nous partager, notamment pour les jeunes chirurgiens qui nous écoutent ?

  • Speaker #1

    Alors, bien sûr, du stress, il y en a dans notre métier, ça c'est sûr. Le stress, il est alimenté par quoi ? C'est la crainte de mal faire ou de faire du mal. Il ne faut pas oublier quand même que l'acte chirurgical, c'est un acte qui est très intrusif. C'est une véritable agression du corps humain, qui n'est possible d'ailleurs que par... le fait d'une dérogation du code civil. C'est une dérogation, c'est inscrit. Dérogation du code civil. Ça veut dire que si vous sortez de ce cadre, et c'est pas forcément facile de savoir, sortir du cadre, qu'est-ce que c'est ? C'est faire une variation dans une technique opératoire qui n'est pas validée. Ça risque d'être interprété comme une sortie du cadre. Donc, on comprend qu'il puisse y avoir du stress. Alors, la gestion du stress, moi j'en ai eu plus que ma dose, mais c'est difficile. Pour se préparer à ça, voilà ce que je peux dire. Ça passe d'abord par la maîtrise de la technique de l'acte opératoire. Il faut avoir une bonne maîtrise technique et la connaissance des risques. Quel risque je fais courir ? Alors ça, ça s'apprend lors de la formation, mais ça s'apprend toute la vie, toute la vie, avec l'analyse des résultats, des échecs. Alors on peut dire aussi que, là on se place à un niveau, on va dire philosophique, il y a un vrai besoin d'authenticité. C'est-à-dire, c'est quoi l'authenticité ? C'est-à-dire avoir la capacité à agir selon ses convictions. C'est-à-dire, on ne va pas faire une opération en reculant. Je ne sais pas la faire, je ne vais pas la faire, c'est tout. Bien se connaître, c'est ça, bien se connaître. Je sais faire ça, je peux faire ça. Je ne sais pas le faire, je vais avoir du stress et forcément, ça ne va pas bien se passer. Il faut trouver, en gros, garder le sens de la pratique chirurgicale, c'est-à-dire garder un sens à ce qu'on fait. C'est plus que de la chirurgie, c'est valable pour tout, garder un sens à ce qu'on fait. Il faut que ça ait du sens. C'était démontré, ça, ce que je vous dis là en ce moment par rapport à l'authenticité. Ça a été démontré dans différents papiers. Il y a un papier qui vient de sortir dans le journal de l'American College en 2024. qui montrent que cette capacité à garder son authenticité, telle que je l'ai plus ou moins définie, ça réduit l'incidence du stress et du burn-out. Les professions de chirurgie, que ce soit comme chirurgien senior ou comme interne, sont fortement impactées par les burn-out. Beaucoup plus que n'importe quelle population, on considère, c'est bien développé dans cette pratique, que c'est multiplié par trois ou quatre. C'est pour ça qu'il faut se protéger par rapport à ça en faisant cette auto-analyse. Je sais le faire, je vais le faire.

  • Speaker #0

    D'accord. Vous voulez dire que ce que vous définissez comme l'authenticité, c'est l'alignement entre les capacités techniques et le sens qu'on porte à cette tâche ?

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #0

    Ok. Et donc, vous conseillez de... de faire preuve d'introspection régulière et de se poser régulièrement cette question pour savoir est-ce qu'on est toujours à la bonne place et est-ce qu'on est toujours la bonne personne ?

  • Speaker #1

    Complètement. Je ne vais pas vous donner le détail de toute ma vie, mais tous les soirs, je me disais, c'est un asthmo, est-ce que je l'ai bien fait ? Mais ça n'a pas au moment du geste, c'est rétrospectivement, voilà.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est intéressant ça. Vous avez des ruminations, c'est-à-dire qu'après l'opération, vous repensez à cette dernière.

  • Speaker #1

    Bien sûr, parce que vous savez, quand vous faites une anastomose digestive, il y a des risques de fistules. Et puis les risques de fistules, c'est quoi ? C'est la péritonite. Et dans un certain nombre de cas, c'est la mort du malade. Il doit y avoir 3-4 dans la journée où vous dites, quand vous faites une opération où il y a 3-4 anastomoses dans la grappe de foie, les anastomoses vasculaires, ce n'est pas anodin. Bien sûr, cette introspection personnelle, mais j'engage aussi à partager ces expériences, et en particulier les expériences négatives. En un mot, si on peut dire, il faut s'enrichir de ces échecs. Ça veut dire qu'il faut les analyser. Les analyser tout seul, ce n'est pas forcément suffisant. Il faut les analyser avec les autres. Et quand on est dans une situation difficile, il ne faut pas hésiter à prendre la vie d'un. confrères, quelqu'un qui comprend de quoi on parle. Parce que c'est comme ça qu'on peut progresser. Comme ça, absolument, qu'on peut progresser. Il ne faut pas s'enferrer dans un non-dit où je ne sais pas le faire, où je ne pourrai jamais y arriver. Non, il faut progresser. Et pour ça, il faut s'analyser. Mais, alors, pour autant, il ne faut pas se gâcher la vie non plus.

  • Speaker #0

    mais analyser ses échecs et faire preuve d'introspection régulière. Merci pour ces conseils. Est-ce que vous auriez remarqué des traits de caractère qui caractériseraient des bons chirurgiens dans votre carrière ? Est-ce qu'un bon chirurgien répond à une certaine liste de critères à respecter ou alors n'importe qui peut apprendre et devenir à terme un bon chirurgien ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense plutôt pour ce que vous venez de dire là. C'est quelque chose qui est accessible, mais dans différentes conditions. Les conditions pour y accéder, c'est premièrement le courage. Il faut beaucoup de courage. Il faut beaucoup de courage pour aller dans le thorax de quelqu'un, pour aller arrêter la circulation cardiaque. Il faut beaucoup de courage pour ça. Il faut beaucoup de courage pour rentrer dans un ventre dans lequel il y a une péritonite stercoral avec une odeur insupportable. Il faut du courage. Il faut du courage physique, bien sûr. Il faut du courage physique parce que parfois, c'est long. Je ne vous en ai pas parlé, mais l'opération dont on parle chez les Chinois avec l'autotransplantation, c'est 16 heures d'opération. La transplantation hépatique, la première que j'ai faite ici à Besançon avec Michel Gillet, c'était 13 heures. Et avant ces 13 heures, moi, j'étais parti faire le prélèvement dans une autre mobile. Donc, vous voyez, on additionne les heures. Donc, il faut du courage physique, c'est sûr. Mais ça, c'est facile à acquérir. Il suffit de s'accrocher. En une semaine, c'est réglé, vous pouvez rester debout pendant des heures, il n'y a pas de problème. Il faut du courage moral aussi, il faut du courage moral. Il faut du courage moral pour accepter d'être confronté à la maladie, avec malheureusement le risque d'avoir un échec à l'arrivée. Vous voyez, quand vous passez six heures dans une crève de foie, ou huit heures, et puis qu'à la fin, malheureusement, ça ne marche pas, le foie ne marche pas, le malade va mourir, il faut beaucoup de courage. Il faut être disponible aussi. Il faut vraiment être disponible. Il faut du courage pour être disponible. Il faut être disponible pour faire les urgences. Je suis effaré de voir qu'il y a des gens qui ne veulent pas prendre d'urgence. Les urgences, ça fait partie du métier d'un médecin. Que vous soyez chirurgien, que vous soyez médecin spécialiste ou médecin généraliste à fortiori. On n'est pas là pour aider les gens aux heures ouvrables, on est là pour aider les gens quand ils sont dans la détresse, quand ils sont à besoin. Après, il y a des systèmes pour organiser. Je ne dis pas que tout le monde doit être disponible tout le temps, mais il y a des systèmes pour organiser. Alors, le deuxième élément important qui va un petit peu contrecarrer celui-là, c'est l'optimisme. Alors ça, l'optimisme, c'est mon patron qui m'a appris ça. Moi, j'ai toujours été optimiste. Mon père était très optimiste. Moi, j'ai toujours été optimiste. Alors il faut de l'optimisme pour confronter toutes ces situations, puis pour accompagner les malades. Il ne faut pas dire aux malades, comme je disais à ce pauvre abbé dont on parlait il n'y a pas longtemps, il faut être optimiste pour accompagner les familles, il faut être optimiste pour entreprendre des opérations de plus en plus complexes au fur et à mesure qu'on acquiert de la dextérité. Il faut être optimiste pour faire évoluer ces pratiques. quand vous voyez l'arrivée de la celluloscopie, l'arrivée de la robotique, il faut dire, il y en a quoi, il faut être optimiste. Puis il faut être aussi optimiste, alors ça c'est, je vous dis ça, c'est à titre personnel, mais pour espérer pouvoir faire accepter, en particulier au niveau familial, l'idée que l'année prochaine ça va aller mieux. Je me souviens de ma vie, toute ma vie, j'ai dit à ma femme l'année prochaine tu vas voir, ça va être mieux, je serai plus disponible et tout. Et d'ailleurs j'en prie pour la saluer parce que Elle a été d'une patience et d'une constance que je ne remercierai jamais assez. Donc, courage et optimisme. Alors, vous voyez, je ne vous ai pas parlé de dextérité, je ne vous ai pas parlé de… Non, je pense qu'avec ces deux éléments, et surtout l'optimisme…

  • Speaker #0

    Et la disponibilité, du coup.

  • Speaker #1

    La disponibilité, oui. La disponibilité, je l'ai mise dans le courage, parce que ça fait vraiment partie du… Il faut avoir du courage pour se rendre disponible. Et moi, je me permets de vous dire… que je ne vais pas dire médecin à jour, médecin toujours, c'est un conneté. Moi, j'ai des gens qui m'appellent régulièrement et je suis disponible pour leur expliquer. Je ne pratique plus, mais je pourrais changer par rapport à leurs problèmes. Et puis, je les oriente si je peux. Et puis, j'espère un peu, je les rassure.

  • Speaker #0

    Je ne connais pas un médecin qui a cessé son activité, qui a cessé de rendre service, d'aider ou de...

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Oui, c'est... Non, non, ce que vous dites, c'est un jour, c'est un toujours, ça se tient. Vous n'êtes pas le seul à le penser, je pense. Georges, vous avez été nommé chevalier de la Légion d'honneur en 2015. Est-ce que ça représente quelque chose pour vous, cette reconnaissance ? Qu'est-ce que ça représente ? Comment pensez-vous qu'elle reflète votre parcours, cette récompense ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un de mes très bons souvenirs. Oui, c'était en 2015, effectivement, que j'ai reçu cette décoration au titre de mes activités hospital-universitaires. C'était un honneur pour moi, bien sûr. Un honneur pour moi, mais pour ma famille aussi, en particulier ma femme et mes enfants, mais toute la famille, et puis aussi pour toute l'équipe, parce que j'ai bien compris que ce qu'on avait honoré, ce qui a été honoré par le gouvernement, c'est l'implication qu'on a mise pour la prise en charge des malades sur notre région et au-delà, et pour l'engagement qu'on a pris. et en particulier moi, c'est vrai, pour la transmission des connaissances. Donc, j'ai vraiment ressenti ça comme un honneur qui, finalement, récompensait, entre guillemets, ma carrière et puis la manière dont je l'avais guidée.

  • Speaker #0

    D'accord. Et est-ce que vous pouvez me dire maintenant le regard que vous portez sur la médecine actuelle ? Vous m'avez parlé d'optimisme, de courage, de disponibilité. Et je suis curieux d'avoir votre point de vue sur l'état de la médecine tel que vous le voyez actuellement par rapport à celui que vous avez connu peut-être les années auparavant.

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est une vaste question que vous me posez. C'est une vaste question, mais qui est une question qui regroupe des problèmes d'actualité ? Alors, moi, je vais vous donner... On pourrait discuter aussi pendant des heures. J'ai deux points que je peux développer qui me semblent caractériser la médecine à l'heure actuelle. Ça ne veut pas dire que je vais donner des solutions. Premièrement, l'hyperspécialisation. Voilà la situation de la médecine à l'heure actuelle. Alors, ça peut être présenté comme une amélioration qualitative par rapport à des résultats qu'on souhaite obtenir dans chaque spécialité. Mais d'un autre côté, c'est une vraie dépendance de ces hyper ou hypos spécialités. les unes vis-à-vis des autres. Par exemple, si j'opère un cancer du colon sigmoïde qui envahit l'urtère, je peux enlever tout et faire l'anastomose de l'urtère. Maintenant, ce n'est même plus imaginable. Si j'ai un envahissement de l'artère, il y a que je sais la remplacer. J'ai fait de la chirurgie vasculaire pendant des années. J'ai opéré des carotides, j'ai opéré des aortes. Ce qui m'a permis d'ailleurs d'être très à l'aise pour tout ce qui est chirurgie de la transplantation hépatique. Parce que la transplantation hépatique, c'est avant tout de la chirurgie vasculaire. Et puis après, beaucoup d'immunologie. Donc, je pense que cette hyperspécialité... On le trouve d'ailleurs, pas rien qu'en chirurgie, il y a les chirurgiens de la main, les chirurgiens de la hanche, les chirurgiens du genou. Cette hyperspécialité qui correspond certainement à une amélioration du service rendu, elle est une partie d'explication des difficultés qu'on peut avoir à trouver un spécialiste. C'est une partie de l'explication. Alors, ça me permet de sauter au deuxième point que je voulais... évoquées par rapport à ce problème de l'état de la médecine actuelle, c'est qu'actuellement en France, d'après les données que j'ai, mais j'ai des bonnes informations du côté de la démographie médicale par le Conseil de l'Ordre, il n'y a jamais eu autant de médecins inscrits à l'Ordre. Je crois qu'on est entre 230 000 et 240 000. C'est assez considérable. Je crois qu'il n'y a que l'Allemagne qui nous dépasse. Mais on n'a jamais eu autant de difficultés pour accéder aux soins. Je le dis pour moi aussi, moi j'ai des difficultés pour accéder aux soins et je vois avec angoisse mes collègues plus jeunes que moi partir en retraite parce que j'aurais plus de difficultés à accéder aux soins. Alors c'est clair que plus de médecins, moins d'accès, ça veut dire qu'il y a une diminution du temps médical. Alors la diminution du temps médical, moi je ne veux pas m'étendre là-dessus, elle est multiple, ce n'est pas à vous, je vais apprendre que la Sécurité sociale a transféré ses charges administratives. aux médecins, qui leur bouffent du temps, ce qui fait qu'il y en a même à certains endroits qui préfèrent, dans notre région, partir en Suisse. Moi, je suis tout près de la Suisse, là, on est à 80 km, où il y a moins de contraintes administratives. Donc, le temps médical est réduit, et c'est ça qui est le gros problème. Le deuxième problème, bien sûr, c'est ce qu'on appelle les déserts médicaux. Mais bon, je ne veux pas trop insister là-dessus, on en parle à longueur de journée, mais on comprend bien les médecins qui sont... qui ont charge de famille, ne vont pas non plus sacrifier toute la vie de leurs épouses, de leurs enfants, en partant dans un endroit où il n'y a plus d'épicerie, il n'y a plus de bistrot, il n'y a plus de bureau de poste, il n'y a plus de gendarmerie, il n'y a plus rien. Qu'un pharmacien, si le médecin s'installe, autrement le pharmacien, il s'en va. Donc, voilà, c'est un appauvrissement qui est lié au phénomène civilisationnel qu'on connaît actuel de migration dans les villes de... Petite, moyenne ou grande importance. Voilà, donc, hyperspécialisation, temps médical, insuffisant. Mais je n'ai pas de solution.

  • Speaker #0

    C'est le constat.

  • Speaker #1

    C'est comme on l'analyse.

  • Speaker #0

    Si vous vous mettiez à la place d'un jeune médecin généraliste, est-ce que vous pouvez me dire les défis qui s'annoncent à lui dans ce contexte actuel d'hyperspécialisation, de déserts médicaux, de temps médical réduit, d'intelligence artificielle ? de démographie médicale, etc. Que faudrait-il penser ? Que faudrait-il faire quand on est un jeune médecin généraliste pour appréhender les années à venir ?

  • Speaker #1

    C'est compliqué. C'est compliqué de faire des prévisions. La prévision, c'est surtout difficile quand ça concerne l'avenir. C'est Pierre Dacq qui disait ça. Je suis posé à Éconos. On sait. J'aime bien cette formule. La prévision est surtout difficile. quand il s'agit de l'avenir. Alors, pour les défis de la médecine demain, l'élément important à garder, c'est les intérêts des patients, des malades. C'est quand même le cœur de métier. On est là pour soigner des gens. Donc, ça veut dire qu'il faut continuer à travailler sur l'accès aux soins, continuer à travailler, ça je sais que c'est fait dans toutes les spécialités, travailler sur la qualité de la prise en charge. Mais de ce côté-là, la France est loin d'être en retard. Et puis, travailler aussi sur les coûts. Les coûts, la santé, ça a un coût, ça a un prix. Les gens ne connaissent plus très bien les coûts. Donc, il y a une acceptabilité des coûts qui se fait soit directement au niveau du portefeuille des patients, soit indirectement par les impôts qu'on paye. Parce que la Sécurité sociale, ce n'est pas l'État qui le paye, c'est les Français. qui, par leur cotisation sociale et les impôts qui paient, il y a du PNFS qui fait que le budget est contraint ou non et qu'on peut soigner plus ou moins de patients. C'est vraiment le cœur de notre métier. Le deuxième point, c'est qu'il y a des évolutions technologiques qui sont aidantes. Vous les avez citées, la télémédecine, l'intelligence artificielle. Dans mon métier, il y a eu la scélioscopie, la robotique. Il y a tout un tas de choses qui sont importantes. Il y a des améliorations aussi très institutionnelles et plus simples. On parlait de l'analyse des difficultés. C'est ce qu'on a dans les réunions de mort-bimortanité, les RMM, pour lesquelles j'avais un personnel dédié et qui nous obligeait à faire tous les mois une analyse de tout ce qui s'était passé, qui était très enrichissante pour l'ensemble et pour le personnel. Alors, le troisième point, c'est qu'il faut faire face aux exigences croissantes des administrations de tutelle aussi. On en a parlé tout à l'heure, la sécurité sociale. qui, à mon avis, a des défauts, mais elle est moins pire que les compagnies privées. C'est clair, il faut que les gens aient bien compris ça. Les compagnies privées, quand elles vont arriver, ça ne va pas être de la rigolade, parce que moi j'ai des copains aux États-Unis, et je vois bien quand ils sont pris en charge comment ça se passe. Ils sont bien pris en charge, mais ça peut être très compliqué. Vous pouvez être obligé d'aller vous faire soigner à 200 kilomètres avec l'hôpital qui est conventionné avec la compagnie d'assurance. Il ne faut pas oublier ça. Le gouvernement aussi, qui contraint beaucoup des discussions. Globalement, tout l'encadrement administratif de notre métier. Alors, on peut s'attendre, pour conclure ce chapitre, on peut s'attendre quand même à une évolution prochaine de la filière de formation des médecins. C'est clair, les études de médecine, comme je les ai connues, comme vous les avez connues, elles sont dans une phase de pré-rupture. C'est une phase de clérouture. Moi, c'est mon analyse. Et je l'entends beaucoup au niveau des doyards, en France ou dans le monde. Pourquoi ? Déjà, la longueur des études. La formation en chirurgie, je suis d'accord. C'est non, parce qu'il y a tout ce phénomène d'acclimatation, s'habituer à avoir des scènes difficiles. C'est compliqué. Mais je pense quand même que les outils pédagogiques qu'on a actuellement, Je ne parle pas des leçons magistrales, mais les outils pédagogiques qu'on a maintenant permettent, à mon avis, de réduire au moins d'un an le deuxième cycle. Je pense que dans le deuxième cycle, ce qui manque beaucoup, c'est la formation à la recherche clinique. Je pense que des gens comme vous, des gens impliqués dans leur métier, ils sont un outil. extraordinaire pour l'analyse, en particulier à l'époque de l'intelligence artificielle, pour l'analyse de prise en charge des patients, pour l'optimisation bien sûr. Et donc ça, c'est vraiment mon cheval de bataille. Diminuer d'un an et mettre six mois au moins de formation à la recherche clinique et en plus reconnaissez que les étudiants en médecine ne sont pas… enfin la présence des étudiants en médecine. qu'on appelait autrefois les externes, mais qui ne sont plus du tout des externes comme moi j'ai été, où on faisait vraiment du boulot de médecin. La présence de ces étudiants, elle est méprisée. Ils venaient au bloc opératoire, on leur faisait de l'enseignement et tout, mais c'est de la main-d'œuvre presque gratuite pour la recherche clinique. Au lieu d'aller chercher des gens qui ont une formation spécialisée d'aide à la recherche clinique, les étudiants, ils sont là, ils peuvent le faire, et ils aimeront le faire, ils comprendront à quoi ça sert. Voilà, donc ça, c'est mon petit dada. Alors, la troisième chose, je pense que l'accès au troisième cycle, il doit être anticipé au niveau du deuxième cycle, c'est-à-dire que... En fonction des options, puisque maintenant, c'est un peu flou, comme on arrive dans le troisième cycle, je ne veux pas aller sur toutes les réformes qui ont été mises en place, mais je pense que pour arriver dans le troisième cycle de manière optimale, il faut avoir des prérequis qui correspondent à votre volonté. C'est-à-dire, par exemple, je prends mon cas de la chirurgie. Si vous voulez faire de la chirurgie viscérale, puisque maintenant, les filières, elles commencent tout de suite, vous allez tout de suite en chirurgie viscérale. Avant, à mon époque, moi, je suis chirurgien général, donc ça veut dire que j'ai une formation de chirurgien généraliste. Maintenant, vous vous dites tout de suite, je veux faire de la chirurgie viscérale. Eh bien, d'accord. Alors, on va regarder en anatomie, combien tu as à ton prérequis d'anatomie ? Plutôt que de faire des cours d'anatomie pendant les études de chirurgie, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas les revoir. Moi, mon patron, mon premier patron en chirurgie, tous les matins, il nous interrogeait, récite-moi la vascularisation du duodéum, récite-moi ci, récite-moi ça. Ça n'existe plus, tout ça. Je veux dire, si vous avez tous ces prérequis, ça va aller plus vite. Et puis déjà, vous allez voir les gens qui sont motivés. Un certain nombre de pauvres malheureux, on va dire, qui se retrouvent dans des impasses. Ils font ça parce qu'ils n'ont pas pu faire autre chose. Donc, je pense qu'il faut essayer de motiver les gens de manière anticipée. Surtout que le deuxième cycle, comme on a dit, il fait quatre ans. Il y a quand même le temps de pouvoir réorganiser ça. Alors, le troisième cycle, on y arrive. Le troisième cycle, il mérite. L'encadrement plus important, écoutez, ici, on était deux profs de chirurgie viscérale pour former une dizaine de gardes. Et en plus, on avait la formation de la chirurgie générale. C'est sûr qu'on ne peut pas bien les encadrer. Quand j'ai pris ma retraite, il y avait le doyen. Nous avons imposé dix internes pour mon service où on était avant deux ou trois. C'est sûr qu'à deux, honnêtement… Moi, j'étais très présent dans le service et dans les blocs. Je ne connaissais pas les prénoms des internes. J'ai honte de le dire, mais c'était la réalité. Je ne connaissais pas. Donc, il faut augmenter l'encadrement. Et augmenter l'encadrement, est-ce que ça veut dire créer des postes ? Non, non, non, non, pas du tout. Dans les hôpitaux, qu'ils soient universitaires ou non, il y a des gens qui s'appellent les praticiens hospitaliers, qu'on appelait autrefois médecins ou chirurgiens, biologistes des hôpitaux, je préfère ce titre d'ailleurs, qui sont là, mais ils sont là comme hospitaliers. donnons-leur une valance universitaire ou demandons-leur de passer et ils pourront encadrer les gens. Ils seront très compétents, il y a des gens qui sont très brillants, d'ailleurs qui n'ont pas voulu embrasser la carrière universitaire, mais qui sont capables de rendre ce service, d'avoir une activité, au moins d'enseignement dans la carrière universitaire. Voilà une ressource. Alors le quatrième point, vous êtes dans le truc là complètement. C'est le développement des carrières infirmières. Actuellement, qu'est-ce qu'on propose aux infirmières ? Ça change un peu. On leur propose éventuellement d'être spécialiste au bloc opératoire, les IBOT. On les propose d'être infirmières anesthésistes. Puis après, c'est fini. Il n'y a pas de progression valorisante. Elles vont être infirmières anesthésistes toute leur vie. Elles vont être anesthésistes ou même faire l'anesthésie. Il n'y a pas d'évolution dans ce métier. Alors, les IPA sont une approche, mais je ne suis pas sûr que ça n'en reste pas là non plus. Donc, il y a vraiment une ressource là, énorme, un potentiel énorme. Il faut l'inventer, le créer. C'est des gens comme vous qui peuvent y participer. Alors, attention, je ne dis pas qu'il faut créer des officiers de santé, c'est-à-dire un grade intermédiaire. On ne va pas retomber dans Mme Bovary. Et puis, la malheureuse expérience de son mari quand il a voulu opérer dans l'arrière-salle d'un café, un pied beau alors qu'il n'avait aucune expérience. Non, non, ce n'est pas de ça dont il s'agit. Il s'agit de trouver le moyen de valoriser et de fidéliser. Pourquoi les infirmières aient une moyenne de vie, d'activité de 15 ans ? Parce qu'elles ont fait le tour du problème au bout de 15 ans, puis elles se barrent. On ne peut pas leur en vouloir pour ça. Donc, voilà les axes qui me permettent, je suis un peu long là, mais les décisions de demain de la médecine.

  • Speaker #0

    Très bien, c'était très intéressant. Vous nous avez proposé beaucoup de pistes de réflexion qui sont très intéressantes de votre point de vue et avec l'expérience qui est la vôtre. Georges, on va arriver à la fin de cet entretien. Il me reste une question à vous poser pour conclure cet épisode. Auriez-vous des conseils à donner à la jeune génération de médecins, à un jeune ou une jeune médecin généraliste ou autre spécialiste d'organes ? C'est à vous que vous vous adressez maintenant. qu'avez-vous envie de leur dire ?

  • Speaker #1

    Alors, globalement, il y a beaucoup de choses à dire. J'en ai déjà dit, mais je vais formaliser deux conseils pour faire simple. Premièrement, garder la dimension relationnelle avec l'empathie nécessaire avec les malades. Autrement dit, ne devenez pas des techniciens. C'est le danger, ça. C'est... Surtout avec... on va dire, à stacanovisme des hyper spécialités. Je fais des carotides, je fais des carotides, je fais des carotides. Je fais des canocarpiens, je fais des canocarpiens, je fais des canocarpiens. Je suis un technicien. Le deuxième point, alors ça, c'est vraiment un conseil de vieux. Vous vous engagez dans un boulot, dans un métier. Je n'ai pas parlé d'art. Vous vous engagez dans un métier, c'est une profession, soigner les autres.

  • Speaker #0

    pour une trentaine d'années à peu près. Ça dure 30 ans un médecin, compte tenu que les études durent 12 ou 15 ans. Gardez de la ressource, gardez la possibilité de poursuivre votre formation, parce que le savoir médical, vous le savez, ça change tous les 10 ans. La demi-vie du savoir médical, c'est 5 ans, donc on peut dire que tous les 10 ans, ça change. Il faut garder de la ressource pour tout ça. Moi, j'ai le souvenir que si je n'avais pas évolué, c'est encore une anecdote, je ne saurais faire que la chirurgie des ulcères de l'estomac. Maintenant, vous ne savez même pas ce que c'est qu'un ulcère de l'estomac. Avant, on passait notre temps à faire ça. Voilà les deux conseils. Gardez la dimension relationnelle et puis surtout, vous vous engagez pour 30 ans, 35 ans. Gardez ça en tête.

  • Speaker #1

    C'est dans la boîte. Je vous remercie infiniment, Georges. C'était hyper intéressant pour moi. J'ai eu un grand plaisir à vous recevoir aujourd'hui. J'espère que l'épisode va vous plaire. Et puis, je vous remercie.

  • Speaker #2

    Au revoir.

  • Speaker #0

    Merci, Mathieu.

  • Speaker #2

    Félicitations, vous êtes bien arrivé à la fin de cet épisode du podcast. S'il vous a plu, si vous avez appris des choses utiles et que vous souhaitez que je poursuive ce travail, vous pouvez vous abonner à ce podcast et en parler à un de vos confrères ou une de vos consoeurs. Et si vraiment vous voulez m'aider, vous pouvez me laisser une note de 5 étoiles sur vos applis et un petit avis sympa pour référencer ce podcast. Pensez également à vous abonner à la newsletter. Je vous envoie chaque mois un mail à haute valeur ajoutée pour la médecine générale. Vous trouverez le lien dans les notes de l'épisode. A bientôt !

Share

Embed

You may also like