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Tech it Different

NEUROATYPIE dans les entreprises du numérique

NEUROATYPIE dans les entreprises du numérique

31min |11/07/2025
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Description

đŸŽ™ïž Bienvenue dans un nouvel Ă©pisode de Tech It Different, la sĂ©rie de podcasts portĂ©e par Numeum et l’Opco Atlas, qui explore les enjeux de diversitĂ© et d’inclusion dans les entreprises du numĂ©rique.


Dans cet Ă©pisode, nous plongeons dans la rĂ©alitĂ© d’un profil encore trop souvent incompris dans le monde du travail : celui des personnes neuroatypiques. Autisme, TDAH, troubles DYS
 autant de fonctionnements diffĂ©rents, encore largement invisibles ou stigmatisĂ©s en entreprise.


🎧 ClĂ©mence Gueidant, designer et enseignante, partage son parcours, ses diagnostics tardifs, les stratĂ©gies qu’elle met en place au quotidien pour rester alignĂ©e avec son fonctionnement, mais aussi ses engagements pour rendre le monde professionnel plus inclusif. Elle Ă©voque sans dĂ©tour les dĂ©fis, les efforts invisibles, la fatigue, la force de la neurodiversité  et son rĂŽle aujourd’hui chez Autypik, une startup pensĂ©e par et pour les personnes neuroatypiques.


📌 Ce tĂ©moignage rend visibles des rĂ©alitĂ©s encore trop marginalisĂ©es. Il rappelle combien le respect des singularitĂ©s, l’adaptation des pratiques managĂ©riales et une meilleure comprĂ©hension des besoins spĂ©cifiques peuvent transformer en profondeur les environnements de travail.


🌍 Tech It Different, c’est une sĂ©rie qui donne la voix Ă  celles et ceux qui vivent la diversitĂ© au quotidien, pour mieux comprendre, mieux inclure, et mieux agir dans les entreprises du numĂ©rique.

🎧 Écoutez cet Ă©pisode sur toutes les plateformes ou sur concepteursdavenirs.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que ça a changé pour toi, l'annonce de ce diagnostic ?

  • Speaker #1

    Ça a tout changĂ© parce que ça m'a permis de mettre des mots sur mon vĂ©cu et d'avoir une nouvelle grille de lecture finalement, de comprendre pourquoi je fonctionne, comment je fonctionne, et donc de pouvoir adapter beaucoup mieux mon quotidien, tenir mieux compte de mes limites. Dans le cas de l'autisme, ça peut ĂȘtre par exemple au niveau de la communication ou socialement, je vais avoir beaucoup de difficultĂ©s Ă  comprendre le second degrĂ©. Je vais avoir des difficultĂ©s Ă  savoir quand est-ce que c'est mon tour de parler. Je vais avoir besoin de me projeter aussi, de connaĂźtre par exemple le dĂ©roulĂ© en avance d'une rĂ©union. Ce n'est plus quelque chose dont j'ai honte, je suis fiĂšre de la façon dont je fonctionne. Je ne vais pas chercher Ă  me rĂ©trĂ©cir pour rentrer dans des cases. Et en fin de compte, je sais que c'est aussi un atout, que c'est une force. Et donc, si des personnes trouvent que c'est trop pour elles, eh bien, tant pis pour elles en fait, qu'elles aillent chercher moins ailleurs.

  • Speaker #0

    DiversitĂ© et inclusion dans les entreprises de la tech, bienvenue dans Tech It Different. Selon plusieurs estimations, entre 10 et 15% de la population prĂ©senterait un profil neuroatypique, qu'il s'agisse d'un TDAH, trouble du dĂ©ficit de l'attention avec ou sans hyperactivitĂ©, d'un TSA, trouble du spectre de l'autisme, d'un trouble Dys ou d'un haut potentiel. Et pourtant, dans le monde professionnel, ces singularitĂ©s restent encore trop souvent invisibles, incomprises, voire mĂȘme parfois carrĂ©ment stigmatisĂ©es. Bonjour Ă  tous et bienvenue dans Tech It Different, le podcast e Numeum et de l'Opco Atlas, programme dĂ©diĂ© Ă  la diversitĂ© et Ă  l'inclusion dans les entreprises de la tech. Dans cet Ă©pisode, un sujet Ă  la fois intime et collectif, comment travailler, collaborer, manager quand on est neuroatypique. Et si votre collĂšgue, votre manager ou vous-mĂȘme fonctionniez diffĂ©remment sans le savoir ? Dans cet Ă©pisode, une rĂ©alitĂ©, c'est celle de ClĂ©mence Gueidant, qui nous partage son parcours, ses amĂ©nagements et ses convictions pour une tech encore plus inclusive.

  • Speaker #1

    Bonjour, je m'appelle Clémence, je suis designer associée chez Autypik et enseignante dans une école de jeux vidéo.

  • Speaker #0

    Salut Clémence !

  • Speaker #1

    Salut Jean-Baptiste !

  • Speaker #0

    Ravi de te retrouver et merci pour ton témoignage à venir.

  • Speaker #1

    Merci de m'accueillir.

  • Speaker #0

    Tu es la bienvenue. Alors tu as eu un parcours particuliÚrement riche entre journalisme, game design, enseignement design, UX, UI. Est-ce que tu peux nous retracer un petit peu les grandes étapes de ton parcours ?

  • Speaker #1

    Alors, on va faire la version courte, parce que sinon, on y est encore demain.

  • Speaker #0

    C'est vrai.

  • Speaker #1

    Donc, mon parcours, on va faire ça de maniĂšre chronologique. Initialement, j'ai une formation en psychologie et en neuropsychologie, en sciences humaines et neurosciences, on va dire. Je n'ai jamais voulu choisir dans ma vie. On m'a toujours dit, il faut choisir. Et moi, j'aime vraiment apprendre des nouvelles choses en permanence. C'est pour ça que dans une premiĂšre partie de carriĂšre, je voulais ĂȘtre journaliste. Donc Ă  la fin de mes Ă©tudes de psycho, finalement, je me suis arrĂȘtĂ©e Ă  un an du diplĂŽme pour me former au monde de la radio, parce que c'est ce qui m'intĂ©ressait vraiment le plus dans le journalisme en termes de format, c'Ă©tait le journalisme audio. Et j'ai Ă©tĂ© journaliste ensuite pendant cinq ans. Finalement, j'ai travaillĂ© sur des formats trĂšs variĂ©s, en radio, mais aussi sur des projets de web documentaire, en presse Ă©crite Ă©galement, en presse web. Et puis au bout de cinq ans, j'ai dĂ©cidĂ© d'aller tester d'autres choses et je me suis tournĂ©e vers le monde du jeu. Un petit peu par hasard au dĂ©part, par opportunitĂ© aussi, j'ai eu la possibilitĂ© de rejoindre un projet d'escape game qui se montait. J'ai Ă©tĂ© en charge de la scĂ©nographie de ce lieu. Puis Ă  son ouverture, je suis devenue manager du site. Je suis restĂ©e lĂ -bas pendant trois ans et demi. J'y ai appris plein de choses, Ă  faire tourner une entreprise, Ă  manager une Ă©quipe. Et puis, j'y ai appris aussi le game design, les bases du game design sur le terrain directement, puisqu'on avait beaucoup de demandes de clients qui voulaient des jeux sur mesure. Puis, chemin faisant, j'ai toujours eu une part trĂšs crĂ©ative. J'ai fait de nombreux jobs Ă©tudiants. Parmi eux, j'ai fait, par exemple, de la rĂ©novation d'appartements. J'ai toujours aimĂ© bricoler. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai rejoint l'Ă©quipe de l'Escape Game au dĂ©part, pour faire de la scĂ©nographie. Et donc faire du game design pour de l'immersif, pour de la crĂ©ation d'escape, forcĂ©ment c'est venu combler cette partie de moi qui aime crĂ©er, qui aime fabriquer de ses mains des choses. Et donc au bout de trois ans et demi, j'ai quittĂ© cet escape game pour me lancer comme game designer Ă  mon compte en indĂ©pendant. J'ai travaillĂ© sur principalement des projets immersifs, mais je me suis diversifiĂ©e et finalement pendant toute cette pĂ©riode, j'ai travaillĂ© sur aussi des projets de jeux de sociĂ©tĂ©, de jeux de cartes, des projets de jeux vidĂ©o. J'ai commencĂ© Ă  la mĂȘme Ă©poque Ă  enseigner en Ă©cole de game design, justement en Ă©cole de jeux vidĂ©o. Et puis, petit Ă  petit, le Covid arrivant, j'ai transitionnĂ© du game design vers du design numĂ©rique plus classique, oĂč finalement on n'est plus dans le loisir, on va ĂȘtre plus dans la rĂ©solution de problĂšmes. Et je suis devenue UX, UI designer dans un premier temps. Puis j'ai Ă©largi vraiment ma pratique jusqu'au product design.

  • Speaker #0

    Ok, alors... Une activité riche, on va dire, à travers tous ces rÎles. Est-ce qu'il y a un fil rouge ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que le fil rouge qui me porte dans ma vie depuis mes Ă©tudes, ça va ĂȘtre ma curiositĂ© et ce besoin insatiable d'apprendre en permanence, que ce soit des nouvelles connaissances, des nouvelles techniques, des nouveaux savoir-faire. Et finalement, Ă  l'Ă©poque oĂč je voulais ĂȘtre journaliste, c'Ă©tait parce que je me disais qu'il n'y a pas de statut d'Ă©tudiant professionnel. On ne peut pas ĂȘtre Ă©tudiant et ĂȘtre payĂ© pour ça. Donc je vais devenir journaliste parce que c'est ce qui s'en rapproche le plus. Ça va me permettre de continuer Ă  creuser des sujets qui m'intĂ©ressent, Ă  aller explorer en dĂ©tail et Ă  apprendre des nouvelles choses. Puis ĂȘtre designer, c'est un petit peu ça aussi, parce que dans le design, il y a deux grandes phases. Et la premiĂšre phase, la phase de recherche, elle implique qu'on s'intĂ©resse Ă  fond au sujet pour lequel on va chercher ensuite Ă  rĂ©soudre un problĂšme. Il faut vraiment devenir expert de ce sujet en comprendre les tenants, les aboutissants, pour bien concevoir ensuite des solutions.

  • Speaker #0

    Évidemment. Ă©videmment. Et parmi toutes les expĂ©riences qui sont les tiennes, est-ce qu'il y en a une comme ça, rapidement, qui t'a peut-ĂȘtre un peu plus challengĂ©e que les autres ?

  • Speaker #1

    Je pense que le fait de devenir manager de cette Escape Game, directrice, ça a Ă©tĂ© un vrai challenge pour moi parce que la vie de chef d'entreprise, c'est un rythme trĂšs soutenu. Et puis cet Escape Game, alors moi, je n'Ă©tais pas fondatrice, je n'Ă©tais pas associĂ©e de l'entreprise, mais c'Ă©tait quand mĂȘme mon bĂ©bĂ©. J'avais fabriquĂ© les salles de mes mains, j'ai recrutĂ© ensuite l'Ă©quipe avec qui on travaillait pour faire tourner cet escape. Donc c'Ă©tait un peu mon bĂ©bĂ© aussi. Et donc j'y ai mis beaucoup de ma personne, beaucoup de mon temps, beaucoup de mon Ă©nergie. Et j'ai appris Ă©normĂ©ment parce que je n'avais jamais managĂ© une Ă©quipe avant. Ça a Ă©tĂ© une occasion de dĂ©couvrir beaucoup de choses, mais ça n'a pas toujours Ă©tĂ© Ă©vident.

  • Speaker #0

    Tu as été diagnostiquée autiste et TDAH vers la trentaine. ConcrÚtement, qu'est-ce que ça a changé pour toi, l'annonce de ce diagnostic ?

  • Speaker #1

    Ça a tout changĂ©. Ça a tout changĂ© parce que ça m'a permis de mettre des mots sur mon vĂ©cu et d'avoir une nouvelle grille de lecture finalement, de comprendre pourquoi je fonctionne, comment je fonctionne et donc de pouvoir adapter beaucoup mieux mon quotidien, tenir mieux compte de mes limites, mieux me connaĂźtre.

  • Speaker #0

    Avec des mots simples comme ça, c'est quoi la neuroatypie ?

  • Speaker #1

    La neuroatypie? La dĂ©finition, ça va ĂȘtre un fonctionnement neurologique diffĂ©rent de ce qu'on retrouve dans la majoritĂ© de la population.

  • Speaker #0

    Ok, c'est-Ă -dire ?

  • Speaker #1

    Et donc, on parle aussi de trouble du neurodĂ©veloppement, TND. Ça veut dire concrĂštement qu'on n'est pas cĂąblĂ© comme la plupart des gens. Notre cerveau, il ne fonctionne pas exactement pareil. Ok. Et ça se traduit de plein de façons. Alors lĂ , je ne vais pas rentrer dans le dĂ©tail, mais on va peut-ĂȘtre y venir un peu plus tard. Mais en tout cas, on n'est pas cĂąblĂ© comme la plupart des gens.

  • Speaker #0

    Dans ton cas, justement ? Comment l'autisme et le TDAH se manifestent au quotidien ? Est-ce que tu peux nous donner des exemples concrets au travail aussi, notamment, par exemple ?

  • Speaker #1

    Alors, le TDAH, un trouble de l'attention, dans mon cas avec hyperactivitĂ©, ça se manifeste par Ă  la fois un trouble de la concentration Ă  certains moments. Si je suis dans un environnement, par exemple, qui est bruyant, dans lequel il y a du passage, dans lequel il se passe des choses, mon attention peut ĂȘtre trĂšs trĂšs facilement dĂ©tournĂ©s, dĂ©bordĂ©s. Et ça va me demander des efforts considĂ©rables pour revenir Ă  ce que je suis en train de faire. Des fois, c'est aussi mon propre cerveau qui me coupe la parole, comme j'aime dire, parce que je suis en train de penser Ă  quelque chose, d'essayer de me concentrer sur quelque chose ou mĂȘme de parler Ă  quelqu'un, d'expliquer. Et puis, j'ai une pensĂ©e qui va venir et je vais avoir des grosses difficultĂ©s lĂ  aussi pour l'inhiber, pour m'empĂȘcher de penser Ă  cette autre chose. Et ça va venir perturber mon fond de pensĂ©e. Et pour tenir face Ă  ça, il faut faire preuve d'une grande concentration. Et c'est extrĂȘmement fatigant, c'est Ă©puisant en fait sur le long terme.

  • Speaker #0

    Et c'est des troubles qui peuvent arriver comme ça n'importe quand ?

  • Speaker #1

    C'est présent en permanence. AprÚs, quand je suis bien reposée, que j'ai bien dormi, que je suis dans un cadre qui ne me stimule pas trop sensoriellement, c'est plus facile à tenir que dans un environnement bruyant quand je suis fatiguée et que j'ai sauté un repas, ça c'est certain.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi tes défis que les autres ne voit pas forcément en fait ?

  • Speaker #1

    Tous ces efforts justement qu'on doit faire pour fonctionner, pour ĂȘtre fonctionnel. Tous ces efforts qu'on doit faire pour conserver la concentration dans des moments oĂč c'est important. Alors lĂ , j'ai donnĂ© l'exemple du TDAH. Dans le cas de l'autisme, ça peut ĂȘtre par exemple au niveau de la communication ou socialement. Je vais avoir beaucoup de difficultĂ©s Ă  comprendre le second degrĂ©. Je vais avoir des difficultĂ©s Ă  savoir quand est-ce que c'est mon tour de parler. Je vais avoir besoin de me projeter aussi, de connaĂźtre par exemple le dĂ©roulĂ© en avance d'une rĂ©union. Je t'ai demandĂ© en avance les questions pour notre interview, justement pour pouvoir m'y prĂ©parer. Et tout ça, c'est des choses qui sont invisibles en fait. Si je ne le dis pas en amont, les personnes ne peuvent pas deviner et forcĂ©ment, ça rend la vie beaucoup plus compliquĂ©e pour moi et beaucoup plus fatigante.

  • Speaker #0

    Oui, et puis moi, je peux témoigner là. C'est-à-dire que j'ai l'impression que je fais une interview comme toutes les autres, que tout se passe bien. Normalement, il n'y a aucune difficulté, aucune. Eh oui,

  • Speaker #1

    mais en fait, le fait d'avoir pu lire toutes les questions en amont, ça a permis à mon cerveau de se mettre en ordre de bataille, d'anticiper un minimum.

  • Speaker #0

    Et comment est-ce que tu fais toi aujourd'hui pour reconnaĂźtre finalement tes limites et s'en culpabiliser ?

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est une vraie question chez les personnes neuroatypiques, surtout quand, dans mon cas, on a Ă©tĂ© diagnostiquĂ© sur le tard parce qu'on passe beaucoup d'annĂ©es Ă  compenser finalement. Et donc, pendant des annĂ©es, je les ai repoussĂ©es, mes limites, en fait. J'ai fait comme si elles n'existaient pas parce que, justement, je ne savais pas qu'elles Ă©taient lĂ  et je finissais trĂšs rĂ©guliĂšrement en burn-out. Aujourd'hui, je dis souvent que j'ai appris mes limites, j'ai appris les contours de mes limites en me fracassant dessus. souvent douloureusement. Et aujourd'hui, je les connais mieux, Ă©videmment, parce qu'Ă  force de me retrouver dans des situations oĂč j'Ă©tais en burn-out, j'Ă©tais Ă©puisĂ©e, oĂč simplement c'Ă©tait trĂšs difficile, que ce soit Ă©motionnellement, que ce soit physiquement pour moi, j'ai appris Ă  reconnaĂźtre les signes. C'est lĂ  oĂč le diagnostic m'a Ă©normĂ©ment aidĂ©e, parce que justement, ça m'a permis d'accepter ces limites-lĂ . Ça a Ă©tĂ© un deuil aussi. Mais aujourd'hui, je suis beaucoup plus Ă  l'Ă©coute. de mes ressentis, parce que je sais que finalement, si mes limites, je ne les respecte pas, derriĂšre, je vais m'effondrer. Donc finalement, je vais mettre plus de temps Ă  m'en remettre. Donc je ne culpabilise plus parce que je sais que Ă©couter mes limites et en avoir conscience, c'est ce qui va me permettre de fonctionner correctement sur la durĂ©e.

  • Speaker #0

    Alors tu m'excuses parce qu'effectivement, tu as dĂ» voir que je rajoutais une ou deux questions comme ça, qui n'Ă©taient pas forcĂ©ment dans le conducteur. Donc j'espĂšre que je ne te perturbe pas trop et je vais justement le faire lĂ  exactement. Tu as parlĂ© de difficultĂ©s physiques et tu parles aussi de difficultĂ©s Ă©motionnelles. Ça veut dire quoi trĂšs concrĂštement quand tu parles de difficultĂ©s Ă©motionnelles ?

  • Speaker #1

    Ça veut dire qu'Ă©motionnellement, il va y avoir un traitement de l'information. Je ne vais pas rentrer dans des considĂ©rations neuropsychologiques trop compliquĂ©es. On va dire que le cerveau va traiter les informations chez les personnes autistes plus en profondeur que chez des personnes qui ne sont pas autistes. ou alors de façon diffĂ©rentes, mais en tout cas, dans mon cas, il y a certaines choses qui se passent dans la vie qui peuvent paraĂźtre anodines pour la plupart des gens et qui, moi, vont profondĂ©ment m'affecter. Et donc, ça va avoir psychologiquement un effet, parce que je vais... Oui, c'est ça, ça va avoir un effet qui va me conduire parfois Ă ... On parle d'effondrement autistique, on parle de crise, qui vont dĂ©clencher une crise chez moi parce qu'Ă©motionnellement, ça aura Ă©tĂ© trop fort.

  • Speaker #0

    Et quelles idées aujourd'hui reçues, toi, te semblent encore super présentes quand on parle de profils neuroatypiques ?

  • Speaker #1

    Les idĂ©es reçues, il y en a beaucoup. Il y a Ă©normĂ©ment de stĂ©rĂ©otypes qui existent. Ça va ĂȘtre une personne autiste n'est pas capable de regarder dans les yeux. Une personne autiste n'est pas capable de se faire des amis. Elle est forcĂ©ment asociale. Moi, ce n'est pas vrai. J'ai plein d'amis. Simplement, ça me fatigue beaucoup d'ĂȘtre dans des interactions sociales sur une durĂ©e trop longue. C'est quelque chose qui va trop me fatiguer. Qu'est-ce qu'on peut avoir d'autre ? Les personnes autistes ne sont pas capables de s'insĂ©rer dans le monde de l'entreprise, de travailler en Ă©quipe. C'est faux.

  • Speaker #0

    T'en es la preuve.

  • Speaker #1

    La preuve. Quoi d'autre ? Pour le TDAH aussi, pour les troubles de l'attention, on a souvent une image de personnes ayant un TDAH comme un petit enfant qui va se rouler par terre, qui va courir dans tous les sens. On peut avoir un trouble de l'attention et ĂȘtre... trĂšs immobile si on n'a pas d'hyperactivitĂ© associĂ©e, par exemple. Et mĂȘme cette hyperactivitĂ©, en fait, elle est aussi psychique. On peut trĂšs bien avoir l'air parfaitement calme vu de l'extĂ©rieur et en fait qu'Ă  l'intĂ©rieur de la tĂȘte, ça soit un vĂ©ritable jukebox, que ça fuse Ă  toute vitesse et notre cerveau nous fatigue.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, tu en parles facilement de ta neuro-atypie. Alors, c'est le thÚme aussi de l'épisode. Donc, effectivement, tu en parles et tu as accepté de le faire et je te remercie. mais avec avec ton entourage, tu disais que tu étais une personne qui était sociable. Est-ce que c'est un sujet dont tu parles pour justement que les personnes autour de toi arrivent à l'appréhender ?

  • Speaker #1

    Oui, tout Ă  fait. Aujourd'hui, j'en parle. J'en parle volontiers parce que finalement, ça me permet un peu de donner le mode d'emploi aux gens que je rencontre, de comment je fonctionne. Justement, de parler de mes limites aussi, que les personnes que j'ai face Ă  moi comprennent. LĂ , si je ne te regarde pas dans les yeux quand on discute, ce n'est pas par impolitesse, ce n'est pas parce que ça ne m'intĂ©resse pas. C'est juste que si je te regarde en mĂȘme temps qu'on parle, ça va ĂȘtre extrĂȘmement compliquĂ© pour moi de me concentrer. Ou alors, si je ne viens pas Ă  cet Ă©vĂ©nement, ce n'est pas contre vous. J'adorerais ĂȘtre lĂ , ça me ferait plaisir, mais je sais que socialement, ça va vraiment trop me fatiguer.

  • Speaker #0

    Clémence, on parle maintenant de ton job. Juste avant, c'est quoi au typique et pourquoi les avoir rejoints ?

  • Speaker #1

    Alors, Autypik, c'est une entreprise qui rĂ©volutionne le monde du travail. On aide les entreprises qui souhaitent ĂȘtre inclusives Ă  travailler autrement. Et comment ? En rendant le monde du travail plus inclusif pour les personnes autistes, TDAH ou qui ont un trouble dyslexie, dyspraxie, dyscalculie, etc.

  • Speaker #0

    Génial. Alors aujourd'hui, tu es chef product officer chez Autypik. C'est quoi ta mission trÚs concrÚtement ?

  • Speaker #1

    Ma mission, concrĂštement, ça va ĂȘtre dĂ©rouler... Toute la stratĂ©gie produit, on a toute une palette de services qu'on propose aux entreprises. Et donc, comment est-ce qu'on va articuler ces diffĂ©rents services les uns aux autres ? Comment est-ce qu'on va les prioriser ? Lesquels on va dĂ©velopper ? Dans quel ordre ? En fonction des besoins de terrain qu'on a identifiĂ©s. J'Ă©tais UX, donc je fais pas mal de recherche utilisateur, des entretiens avec nos clients et avec les candidates et les candidats. Je suis aussi responsable de la plateforme sur des aspects plus techniques. Puisque parmi nos services, on a une plateforme de recrutement qui permet Ă  la fois aux personnes neuroatypiques en recherche d'emploi de crĂ©er un profil. C'est un peu un anti-CV. Et puis qui permet aux entreprises qu'on a formĂ©es prĂ©alablement de dĂ©poser des offres d'emploi. Et donc ça permet de mettre en contact ces deux populations.

  • Speaker #0

    Et de les faire matcher. Il s'agit d'une plateforme qui est conçue donc, si j'ai bien compris, par et pour des personnes neuroatypiques. Merci. En quoi c'est, mĂȘme si ça peut paraĂźtre Ă©vident, mais je te pose quand mĂȘme la question, en quoi c'est diffĂ©rent d'un projet classique ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que la diffĂ©rence la plus importante vient du fait que c'est conçu par des personnes neuroatypiques. Au sein de l'Ă©quipe, la majeure partie de l'Ă©quipe est elle-mĂȘme neuroatypique. Tout d'abord, Mara, la fondatrice. Et ça veut dire que concrĂštement, Autypik, c'est une startup, mais on ne peut pas avoir un fonctionnement comme dans une startup classique, parce que sinon, on tiendrait pas six mois, sinon on exploserait en vol parce que justement, on a besoin de respecter nos limites.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que tu mÚnes la recherche utilisateur par rapport à ces publics qui sont aussi spécifiques ?

  • Speaker #1

    Comme n'importe quelle recherche utilisateur, vraiment. LĂ , mon travail de designer et de UX researcher, il s'est fait vraiment de la mĂȘme maniĂšre que pour n'importe quel autre public. L'idĂ©e, c'est de pouvoir comprendre les problĂ©matiques rencontrĂ©es. par ces populations-lĂ , que ça soit les managers, les recruteurs d'un cĂŽtĂ© ou les personnes neuroatypiques de l'autre. Et donc, vraiment pas de diffĂ©rence avec n'importe quelle autre population.

  • Speaker #0

    Et en quoi le fait de vivre toi-mĂȘme certains besoins t'aide finalement ou complique peut-ĂȘtre mĂȘme parfois les dĂ©cisions qui seraient Ă  prendre ?

  • Speaker #1

    Alors, on dit souvent dans le design qu'il faut prendre garde Ă  ne pas designer pour soi-mĂȘme, qu'on n'ait pas son propre public. Justement, dans ce cas-lĂ , je dirais que c'est plutĂŽt un atout. parce que ça me permet d'avoir une comprĂ©hension peut-ĂȘtre plus fine des difficultĂ©s rencontrĂ©es par des personnes autistes ou des personnes TDAH ou 10 sur le terrain, dans le monde de l'emploi. J'ai rejoint Autypik. La mission d'Autypik m'a parlĂ© parce que justement, moi-mĂȘme, j'ai Ă©tĂ© confrontĂ©e Ă  des difficultĂ©s dans le monde du travail.

  • Speaker #0

    Est-ce que le mot handicap t'a fait peur au début ou au contraire t'a permis de poser ce qu'on pourrait appeler un cadre et qu'il soit plus clair ?

  • Speaker #1

    Je pense que j'ai eu un travail de dĂ©construction Ă  faire vis-Ă -vis de ce mot-lĂ , parce qu'ayant fonctionnĂ© pendant plus de 35 ans sans savoir que j'Ă©tais neuroatypique et sans savoir que j'Ă©tais en situation de handicap, au dĂ©part, ça a Ă©tĂ© un peu difficile de l'accepter. Et en mĂȘme temps, les diagnostics m'ont apportĂ© un tel soulagement dans la comprĂ©hension de moi-mĂȘme que finalement, je ne dirais pas que ça m'a fait peur, mais il a fallu faire une sorte de travail de deuil. de la personne que je pensais ĂȘtre jusque-lĂ .

  • Speaker #0

    Dans ton parcours, est-ce qu'on t'a déjà refusé un poste ou une mission à cause de ton fonctionnement différent ?

  • Speaker #1

    Dans mon parcours, ça ne m'est jamais arrivĂ© qu'on me refuse un poste ou une mission. Mais je pense que jusque-lĂ , j'ai aussi fabriquĂ© mon propre cadre de travail pour Ă©viter ce genre de situation. J'ai toujours travaillĂ©, soit dans des milieux assez artistiques, le game design, le monde des escape games, le monde du jeu, Ou mĂȘme le monde de la radio, oĂč j'ai travaillĂ© dans des univers de radio, oĂč finalement on n'allait pas me juger, on n'allait pas me regarder de travers, parce que j'avais une façon d'ĂȘtre un peu diffĂ©rente de la norme. Je n'aime pas le mot norme, mais...

  • Speaker #0

    Moi non plus.

  • Speaker #1

    Mais que j'avais une façon d'ĂȘtre diffĂ©rente de la plupart des gens, on va dire. Et quand on travaille en radio en matinale, par exemple, on a des horaires complĂštement dĂ©calĂ©s par rapport au reste de la population. Et finalement, ça nous place un peu Ă  part. C'est vrai. Donc, j'Ă©tais toujours un peu Ă  part, mais il y avait toujours des bonnes explications dans mon mĂ©tier. Et je pense que ça aurait Ă©tĂ© beaucoup plus difficile si j'avais dĂ» travailler dans des environnements plus classiques. C'est clair. Par exemple, je ne sais pas, en banque ou... ou dans des entreprises plus classiques.

  • Speaker #0

    Je sais d'autant plus de quoi tu parles, puisque les matinales, j'en ai fait aussi. Effectivement, les horaires décalés, c'est quelque chose. Est-ce que tu penses, toi, que les métiers de la tech sont plus accueillants que d'autres pour les personnes neuroatypiques et pourquoi ?

  • Speaker #1

    Je pense que les mĂ©tiers de la tech peuvent faciliter, dans certains cas, les amĂ©nagements de postes, dans la mesure oĂč, quand on travaille derriĂšre un Ă©cran, C'est plus facile de faire du tĂ©lĂ©travail, c'est plus facile d'utiliser des outils numĂ©riques pour se simplifier la vie. Quand on travaille, par exemple, sur le terrain, quand notre mĂ©tier, c'est d'ĂȘtre dans une boutique face Ă  des gens, on va ĂȘtre en interaction avec des gens toute la journĂ©e, ça fait partie du poste. AprĂšs, chaque personne neuroatypique est diffĂ©rente. Ça fait partie des stĂ©rĂ©otypes contre lesquels on lutte chez Autypik. Il y a des personnes neuroatypiques dans tous les secteurs. Et donc, ce n'est pas parce qu'on est autiste qu'on ne peut pas ĂȘtre commercial ou qu'on ne peut pas ĂȘtre vendeuse ou qu'on ne peut pas ĂȘtre jardinier. Vraiment, on est prĂ©sent dans tous les secteurs et dans tous les mĂ©tiers.

  • Speaker #0

    Oui, sauf que maintenant, c'est diagnostiquĂ©. Donc, on en parle. On sait que c'est lĂ . Exactement. Qu'est-ce qui devrait changer selon toi dans les pratiques de recrutement, justement, pour rendre peut-ĂȘtre la tech encore un peu plus inclusive ?

  • Speaker #1

    Je pense qu'en France, on a encore une façon de voir les choses assez classique et c'est ce qu'on essaye de faire bouger justement avec Autypik en formant les recruteurs. On va avoir tendance Ă  regarder les CV, les parcours atypiques d'un Ɠil un peu suspicieux, en se disant cette personne n'a pas un parcours acadĂ©mique classique, elle ne rentre pas dans les cases, on s'en mĂ©fie. Alors que finalement, on va se priver de profils, de talents qui sont trĂšs rifs, qui peuvent apporter Ă©normĂ©ment au monde de l'entreprise, mais qui effectivement n'ont pas forcĂ©ment... Les diplĂŽmes qui vont bien parce qu'ils ont acquis leurs compĂ©tences autrement, en autodidacte ou par des projets personnels ou de maniĂšre dĂ©tournĂ©e. On est encore un petit peu trop Ă  l'ancienne, je trouve, en France.

  • Speaker #0

    Et est-ce que c'est au manager, finalement, de s'adapter au profil des collaborateurs qu'il a en face de lui ?

  • Speaker #1

    Oui, ça j'en suis convaincue et d'ailleurs au-delĂ  de la neuroatypie. Je pense que le rĂŽle du manager, c'est d'ĂȘtre lĂ  pourcoordonner et faire avancer ces Ă©quipes, leur permettre d'aller plus loin et de progresser. Et pour ça, ce n'est pas l'armĂ©e.

  • Speaker #0

    Est-ce que toi, tu as déjà bénéficié d'un accompagnement, d'un mentor ou d'un cadre, j'ai envie de dire, bienveillant qui t'a aidé quelque part à croire en toi et puis surtout à t'épanouir ?

  • Speaker #1

    Depuis que je suis chez Autypik, je suis dans le cadre le plus bienveillant qui soit et c'est un plaisir de travailler dans cette Ă©quipe. C'est aussi une nĂ©cessitĂ©, c'est ce que je disais tout Ă  l'heure. En fait, vu la composition de notre Ă©quipe, on est obligĂ© d'appliquer les mĂ©thodes qu'on enseigne Ă  nos entreprises. On est obligĂ© d'ĂȘtre inclusif avec nous, mĂȘme sinon on ne tiendrait pas le coup. Donc nĂ©cessairement, on est bien accueilli. AprĂšs, en termes de mentor, moi j'ai justement beaucoup progressĂ© en autodidacte. Je me suis beaucoup auto-formĂ©e, j'ai beaucoup appris sur le terrain et j'ai fait des rencontres formidables. je pense que La plus rĂ©cente et celle qui m'a apportĂ©, c'est cette formation justement au design UX-UI. J'ai fait un bootcamp chez Aeronac qui m'a permis de me remettre Ă  niveau et ça a Ă©tĂ© vraiment d'excellentes conditions.

  • Speaker #0

    Pour les personnes concernées qui n'osent pas se déclarer comme neuroatypiques en entreprise, toi tu dirais quoi ? Il y a un risque effectivement à le déclarer ou au contraire, ce sont de nouvelles opportunités qu'on va créer parce que les choses seront claires.

  • Speaker #1

    Je pense que ça dĂ©pend Ă©normĂ©ment de l'environnement, du cadre dans lequel on Ă©volue. Certaines entreprises vont ĂȘtre ouvertes Ă  ça, sont dans une dĂ©marche d'inclusion dĂ©jĂ , oĂč elles souhaitent ĂȘtre plus inclusives. Et c'est les entreprises avec lesquelles nous, on travaille chez Autypik, des entreprises qui veulent bien faire, qui veulent progresser, qui veulent ĂȘtre plus performantes aussi. Et donc, on les aide Ă  mettre en place concrĂštement cette diversitĂ© au sein de leurs Ă©quipes. En revanche, il y a des entreprises qui ne sont pas du tout sensibilisĂ©es Ă  ces questions. et dans lesquelles, si j'en parle Ă  mon manager, finalement, ça va ĂȘtre plus stigmatisant qu'autre chose, on va me regarder de travers. Donc, ça dĂ©pend vraiment des entreprises.

  • Speaker #0

    Évidemment, et de leur accueil. ClĂ©mence, qu'est-ce qui t'Ă©clate le plus dans ton job aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    La variété. Et je continue à apprendre. C'est trÚs différent finalement. Je n'ai aucune journée qui se ressemble. Je n'ai pas le temps de m'ennuyer.

  • Speaker #0

    Tu n'as pas le temps de t'ennuyer ? Par exemple, si je te parle d'une journée type, il n'y en a pas quoi ?

  • Speaker #1

    Non, vraiment, il n'y en a pas. On va dire que les moments oĂč je suis Ă  l'Ă©cole, peut-ĂȘtre ça va se ressembler. Les moments oĂč j'enseigne, les moments oĂč j'enregistre des Ă©missions, parce que c'est vrai qu'on n'en a pas parlĂ©, mais je fais des podcasts aussi Ă  cĂŽtĂ©, c'est encore diffĂ©rent. Et puis les moments oĂč je travaille pour Autypik, ou l'Ă©poque oĂč je faisais encore des missions de web design en indĂ©pendante, tout ça c'Ă©tait vraiment des journĂ©es Ă  chaque fois qui Ă©taient trĂšs diffĂ©rentes, parce qu'un jour tu es en recherche d'utilisateur, le jour d'aprĂšs tu vas ĂȘtre en rĂ©union stratĂ©gique, le jour d'aprĂšs tu vas ĂȘtre les mains dans Figma pour faire des maquettes, voilĂ , ça change tout le temps.

  • Speaker #0

    Et c'est ça qui est bien. donc la variĂ©tĂ© des tĂąches donc tu nous disais il y a quelques instants que peut-ĂȘtre que la journĂ©e qui se ressemble le plus c'est celle oĂč tu es Ă  l'Ă©cole et lĂ  c'est pas pour apprendre mais c'est pour enseigner puisque tu es enseignante en game design Ă  l'IM, l'institut de l'internet et du multimĂ©dia qu'est-ce que tu transmets Ă  tes Ă©tudiants ?

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que je leur transmets ? Je donne des cours ponctuels et sur des sujets bien prĂ©cis et n'ayant pas moi-mĂȘme une formation j'ai pas fait d'Ă©cole de jeux vidĂ©o Donc, je n'ai pas un savoir acadĂ©mique. Je pense que la chose principale que je leur transmets, c'est une expĂ©rience de terrain. C'est justement comment ça se passe concrĂštement dans le monde du travail. Je leur transmets Ă©videmment des compĂ©tences aussi qui concernent plus directement le game design, la narration, comment est-ce qu'on crĂ©e une expĂ©rience immersive, etc. Mais au-delĂ  de ça, je leur transmets aussi des informations plus concrĂštes sur qu'est-ce que c'est d'Ă©voluer dans le monde du travail. quand on est en entreprise, quand on est indĂ©pendant.

  • Speaker #0

    Et est-ce que là aussi, à tes étudiants, tu leur as parlé de ton profil ou pas du tout ? Oui,

  • Speaker #1

    ce n'est pas du tout quelque chose que je cache, parce que finalement, quand on est neuroatypique, ce n'est pas une maladie qu'on va attraper à un moment, on l'est depuis sa naissance. Et donc, je trouve que c'est important de l'assumer pour donner à voir aussi des modÚles différents, des stéréotypes qu'on a encore trop souvent actuellement. Et comme je sais que le profil que j'ai, ne correspond pas aux stéréotypes de personnes autistes ou de personnes TDAH qu'on peut voir dans les médias, dans les films, dans les séries. Je trouve ça important de le montrer.

  • Speaker #0

    Oui, tu as raison. Tu es aussi, tu l'as dit briÚvement, podcasteuse, et cela depuis plusieurs années, bienvenue au club. Qu'est-ce que ce média t'a apporté personnellement ?

  • Speaker #1

    J'adore parler dans un micro.

  • Speaker #0

    Et ça s'entend !

  • Speaker #1

    Et j'adore parler tout court. Quand les sujets m'intĂ©ressent, je suis quelqu'un de trĂšs bavard. Tu m'as bien fait de me dire qu'on va calibrer la taille des rĂ©ponses parce que sinon, je pense que ce podcast aurait pu durer une journĂ©e complĂšte. Mais justement, la pratique de ce mĂ©dia m'a appris aussi Ă  ĂȘtre plus concise dans ma façon de m'exprimer.

  • Speaker #0

    Ça, tu le trouves, ça ?

  • Speaker #1

    Ça, je le trouve. Ça a Ă©tĂ© pendant ma formation. Mais finalement, quand on est en radio, il faut rĂ©ussir Ă  capter l'attention, il faut rĂ©ussir Ă  la maintenir. Et puis, il y a quelque chose de plus intime aussi, je trouve, dans les formats audio, une proximitĂ© avec les auditrices, avec les auditeurs qui, moi, me plaĂźt beaucoup. Et puis, Ă©videmment, le direct qui va apporter...

  • Speaker #0

    L'adrénaline !

  • Speaker #1

    L'adrénaline !

  • Speaker #0

    Oui, c'est vrai. Je te rejoins Ă©videmment complĂštement. Si toi, tu devais crĂ©er un podcast 100% personnel aujourd'hui, peut-ĂȘtre autour de la neurodiversitĂ©, il ressemblerait Ă  quoi ?

  • Speaker #1

    figure-toi que c'est une question que je me pose assez rĂ©guliĂšrement j'ai pas le temps pour ça aujourd'hui mais peut-ĂȘtre un jour ça arrivera je pense que ça serait un podcast de conversation ça serait un podcast de discussion et d'Ă©change pour parler de nos expĂ©riences respectives avec les personnes que j'inviterais au micro parce que finalement chaque personne neuroatypique est diffĂ©rente Ă  son propre vĂ©cu et la neuroatypique ces personnes s'expriment aussi de maniĂšre diffĂ©rente Donc, je trouve ça passionnant d'explorer justement les diffĂ©rences d'une personne Ă  l'autre.

  • Speaker #0

    Tu as de nombreuses casquettes, on l'a vu dans ta vie pro. Est-ce qu'on t'a déjà dit que tu étais trop, trop quelque chose, trop rapide, trop intense, trop dispersé ? Et puis, comment est-ce que tu arrives à gérer ça si c'est le cas ? Tout le temps.

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qu'on m'a beaucoup répété, pas que dans ma vie pro, dans ma vie en général. Et trop dispersé, mais tu vois, pendant trÚs longtemps, tu as eu un aperçu de mon parcours. J'ai fait la version rapide, mais les recruteurs regardaient mon CV vraiment de travers et me disaient...

  • Speaker #0

    Vous ne savez pas ce que vous voulez dans la vie. J'ai été, mais si, justement.

  • Speaker #1

    Un CV, ça tient sur une page, Clémence. C'est ça.

  • Speaker #0

    C'est trĂšs dur pour moi de le faire tenir sur une page. Comment je gĂšre ça ? Aujourd'hui, j'en suis arrivĂ©e Ă  un stade de ma vie oĂč justement le diagnostic m'a permis d'assumer ça aussi. Et ce n'est plus quelque chose dont j'ai honte. Je suis fiĂšre de la façon dont je fonctionne parce que dĂ©jĂ , elle est comme elle est et je ne vais pas changer. Je ne vais pas chercher Ă  me rĂ©trĂ©cir pour entrer dans des cases. Et en fin de compte, je sais que c'est aussi un atout, que c'est une force. Et donc, si des personnes trouvent que c'est trop pour elles, eh bien, tant pis pour elles, en fait, qu'elles aillent chercher moins ailleurs.

  • Speaker #1

    Tu as bien raison. Si tu avais un message à faire passer à toutes les personnes neuroatypiques qui peuvent nous écouter aujourd'hui, ce serait quoi ce message ?

  • Speaker #0

    Ça serait, ayez confiance dans vos capacitĂ©s. Ce n'est pas parce qu'on vous dit que vous n'ĂȘtes pas comme tout le monde que vous ĂȘtes moins, justement. Vous ĂȘtes des personnes simplement diffĂ©rentes. et c'est une... Vraie force, c'est une vraie ressource. Ça peut ĂȘtre un vrai atout dans le monde professionnel.

  • Speaker #1

    Et tu en es la preuve vivante. Un immense merci à toi Clémence.

  • Speaker #0

    Merci Ă  toi pour ton accueil.

  • Speaker #1

    Un grand merci pour ton témoignage. Pour celles et ceux qui se reconnaissent dans ce que Clémence vient de partager, il existe aujourd'hui des ressources, des dispositifs pour mieux vivre sa singularité au travail. Des bilans, par exemple neuropsychologiques pour poser un diagnostic, c'est hyper important. Des associations comme CAPU, la maison de l'autisme, ou MTN, la maison des TDAH et neuroatypiques. Des aménagements possibles aussi avec l'aide des RH ou de la médecine du travail, des communautés de plateformes comme Otypique pour s'outiller et se sentir surtout moins seul. Et pour en savoir plus de maniÚre générale sur les métiers et les transformations du numérique, rendez-vous sur un site internet concepteurdavenir.fr. A trÚs vite pour un nouvel épisode de Tech it different. Salut Clémence !

  • Speaker #0

    Salut !

  • Speaker #2

    C'était Tech It Different, diversité et inclusion dans les entreprises de la tech.

Chapters

  • Diagnostic et Changement

    00:03

  • DiversitĂ© et Inclusion

    00:58

  • Parcours de ClĂ©mence

    01:48

  • Évolution vers le Design NumĂ©rique

    04:49

  • Comprendre la Neuroatypie

    07:00

  • DĂ©fis Invisibles des Neuroatypiques

    09:26

  • ReconnaĂźtre ses Limites

    12:16

  • Parler de NeurodiversitĂ©

    14:44

  • Mission chez Otypique

    15:24

  • Recherche Utilisateur et NeurodiversitĂ©

    18:17

  • Acceptation du Handicap

    18:49

  • RĂŽle du Manager

    23:10

  • DĂ©claration de Neuroatypie en Entreprise

    24:16

  • VarietĂ© et Épanouissement au Travail

    25:14

  • Enseignement et Partage d'ExpĂ©rience

    26:19

  • Assumer sa DiffĂ©rence

    30:03

  • Message aux Neuroatypiques

    30:33

  • Ressources et Support pour Neuroatypiques

    31:06

Description

đŸŽ™ïž Bienvenue dans un nouvel Ă©pisode de Tech It Different, la sĂ©rie de podcasts portĂ©e par Numeum et l’Opco Atlas, qui explore les enjeux de diversitĂ© et d’inclusion dans les entreprises du numĂ©rique.


Dans cet Ă©pisode, nous plongeons dans la rĂ©alitĂ© d’un profil encore trop souvent incompris dans le monde du travail : celui des personnes neuroatypiques. Autisme, TDAH, troubles DYS
 autant de fonctionnements diffĂ©rents, encore largement invisibles ou stigmatisĂ©s en entreprise.


🎧 ClĂ©mence Gueidant, designer et enseignante, partage son parcours, ses diagnostics tardifs, les stratĂ©gies qu’elle met en place au quotidien pour rester alignĂ©e avec son fonctionnement, mais aussi ses engagements pour rendre le monde professionnel plus inclusif. Elle Ă©voque sans dĂ©tour les dĂ©fis, les efforts invisibles, la fatigue, la force de la neurodiversité  et son rĂŽle aujourd’hui chez Autypik, une startup pensĂ©e par et pour les personnes neuroatypiques.


📌 Ce tĂ©moignage rend visibles des rĂ©alitĂ©s encore trop marginalisĂ©es. Il rappelle combien le respect des singularitĂ©s, l’adaptation des pratiques managĂ©riales et une meilleure comprĂ©hension des besoins spĂ©cifiques peuvent transformer en profondeur les environnements de travail.


🌍 Tech It Different, c’est une sĂ©rie qui donne la voix Ă  celles et ceux qui vivent la diversitĂ© au quotidien, pour mieux comprendre, mieux inclure, et mieux agir dans les entreprises du numĂ©rique.

🎧 Écoutez cet Ă©pisode sur toutes les plateformes ou sur concepteursdavenirs.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que ça a changé pour toi, l'annonce de ce diagnostic ?

  • Speaker #1

    Ça a tout changĂ© parce que ça m'a permis de mettre des mots sur mon vĂ©cu et d'avoir une nouvelle grille de lecture finalement, de comprendre pourquoi je fonctionne, comment je fonctionne, et donc de pouvoir adapter beaucoup mieux mon quotidien, tenir mieux compte de mes limites. Dans le cas de l'autisme, ça peut ĂȘtre par exemple au niveau de la communication ou socialement, je vais avoir beaucoup de difficultĂ©s Ă  comprendre le second degrĂ©. Je vais avoir des difficultĂ©s Ă  savoir quand est-ce que c'est mon tour de parler. Je vais avoir besoin de me projeter aussi, de connaĂźtre par exemple le dĂ©roulĂ© en avance d'une rĂ©union. Ce n'est plus quelque chose dont j'ai honte, je suis fiĂšre de la façon dont je fonctionne. Je ne vais pas chercher Ă  me rĂ©trĂ©cir pour rentrer dans des cases. Et en fin de compte, je sais que c'est aussi un atout, que c'est une force. Et donc, si des personnes trouvent que c'est trop pour elles, eh bien, tant pis pour elles en fait, qu'elles aillent chercher moins ailleurs.

  • Speaker #0

    DiversitĂ© et inclusion dans les entreprises de la tech, bienvenue dans Tech It Different. Selon plusieurs estimations, entre 10 et 15% de la population prĂ©senterait un profil neuroatypique, qu'il s'agisse d'un TDAH, trouble du dĂ©ficit de l'attention avec ou sans hyperactivitĂ©, d'un TSA, trouble du spectre de l'autisme, d'un trouble Dys ou d'un haut potentiel. Et pourtant, dans le monde professionnel, ces singularitĂ©s restent encore trop souvent invisibles, incomprises, voire mĂȘme parfois carrĂ©ment stigmatisĂ©es. Bonjour Ă  tous et bienvenue dans Tech It Different, le podcast e Numeum et de l'Opco Atlas, programme dĂ©diĂ© Ă  la diversitĂ© et Ă  l'inclusion dans les entreprises de la tech. Dans cet Ă©pisode, un sujet Ă  la fois intime et collectif, comment travailler, collaborer, manager quand on est neuroatypique. Et si votre collĂšgue, votre manager ou vous-mĂȘme fonctionniez diffĂ©remment sans le savoir ? Dans cet Ă©pisode, une rĂ©alitĂ©, c'est celle de ClĂ©mence Gueidant, qui nous partage son parcours, ses amĂ©nagements et ses convictions pour une tech encore plus inclusive.

  • Speaker #1

    Bonjour, je m'appelle Clémence, je suis designer associée chez Autypik et enseignante dans une école de jeux vidéo.

  • Speaker #0

    Salut Clémence !

  • Speaker #1

    Salut Jean-Baptiste !

  • Speaker #0

    Ravi de te retrouver et merci pour ton témoignage à venir.

  • Speaker #1

    Merci de m'accueillir.

  • Speaker #0

    Tu es la bienvenue. Alors tu as eu un parcours particuliÚrement riche entre journalisme, game design, enseignement design, UX, UI. Est-ce que tu peux nous retracer un petit peu les grandes étapes de ton parcours ?

  • Speaker #1

    Alors, on va faire la version courte, parce que sinon, on y est encore demain.

  • Speaker #0

    C'est vrai.

  • Speaker #1

    Donc, mon parcours, on va faire ça de maniĂšre chronologique. Initialement, j'ai une formation en psychologie et en neuropsychologie, en sciences humaines et neurosciences, on va dire. Je n'ai jamais voulu choisir dans ma vie. On m'a toujours dit, il faut choisir. Et moi, j'aime vraiment apprendre des nouvelles choses en permanence. C'est pour ça que dans une premiĂšre partie de carriĂšre, je voulais ĂȘtre journaliste. Donc Ă  la fin de mes Ă©tudes de psycho, finalement, je me suis arrĂȘtĂ©e Ă  un an du diplĂŽme pour me former au monde de la radio, parce que c'est ce qui m'intĂ©ressait vraiment le plus dans le journalisme en termes de format, c'Ă©tait le journalisme audio. Et j'ai Ă©tĂ© journaliste ensuite pendant cinq ans. Finalement, j'ai travaillĂ© sur des formats trĂšs variĂ©s, en radio, mais aussi sur des projets de web documentaire, en presse Ă©crite Ă©galement, en presse web. Et puis au bout de cinq ans, j'ai dĂ©cidĂ© d'aller tester d'autres choses et je me suis tournĂ©e vers le monde du jeu. Un petit peu par hasard au dĂ©part, par opportunitĂ© aussi, j'ai eu la possibilitĂ© de rejoindre un projet d'escape game qui se montait. J'ai Ă©tĂ© en charge de la scĂ©nographie de ce lieu. Puis Ă  son ouverture, je suis devenue manager du site. Je suis restĂ©e lĂ -bas pendant trois ans et demi. J'y ai appris plein de choses, Ă  faire tourner une entreprise, Ă  manager une Ă©quipe. Et puis, j'y ai appris aussi le game design, les bases du game design sur le terrain directement, puisqu'on avait beaucoup de demandes de clients qui voulaient des jeux sur mesure. Puis, chemin faisant, j'ai toujours eu une part trĂšs crĂ©ative. J'ai fait de nombreux jobs Ă©tudiants. Parmi eux, j'ai fait, par exemple, de la rĂ©novation d'appartements. J'ai toujours aimĂ© bricoler. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai rejoint l'Ă©quipe de l'Escape Game au dĂ©part, pour faire de la scĂ©nographie. Et donc faire du game design pour de l'immersif, pour de la crĂ©ation d'escape, forcĂ©ment c'est venu combler cette partie de moi qui aime crĂ©er, qui aime fabriquer de ses mains des choses. Et donc au bout de trois ans et demi, j'ai quittĂ© cet escape game pour me lancer comme game designer Ă  mon compte en indĂ©pendant. J'ai travaillĂ© sur principalement des projets immersifs, mais je me suis diversifiĂ©e et finalement pendant toute cette pĂ©riode, j'ai travaillĂ© sur aussi des projets de jeux de sociĂ©tĂ©, de jeux de cartes, des projets de jeux vidĂ©o. J'ai commencĂ© Ă  la mĂȘme Ă©poque Ă  enseigner en Ă©cole de game design, justement en Ă©cole de jeux vidĂ©o. Et puis, petit Ă  petit, le Covid arrivant, j'ai transitionnĂ© du game design vers du design numĂ©rique plus classique, oĂč finalement on n'est plus dans le loisir, on va ĂȘtre plus dans la rĂ©solution de problĂšmes. Et je suis devenue UX, UI designer dans un premier temps. Puis j'ai Ă©largi vraiment ma pratique jusqu'au product design.

  • Speaker #0

    Ok, alors... Une activité riche, on va dire, à travers tous ces rÎles. Est-ce qu'il y a un fil rouge ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que le fil rouge qui me porte dans ma vie depuis mes Ă©tudes, ça va ĂȘtre ma curiositĂ© et ce besoin insatiable d'apprendre en permanence, que ce soit des nouvelles connaissances, des nouvelles techniques, des nouveaux savoir-faire. Et finalement, Ă  l'Ă©poque oĂč je voulais ĂȘtre journaliste, c'Ă©tait parce que je me disais qu'il n'y a pas de statut d'Ă©tudiant professionnel. On ne peut pas ĂȘtre Ă©tudiant et ĂȘtre payĂ© pour ça. Donc je vais devenir journaliste parce que c'est ce qui s'en rapproche le plus. Ça va me permettre de continuer Ă  creuser des sujets qui m'intĂ©ressent, Ă  aller explorer en dĂ©tail et Ă  apprendre des nouvelles choses. Puis ĂȘtre designer, c'est un petit peu ça aussi, parce que dans le design, il y a deux grandes phases. Et la premiĂšre phase, la phase de recherche, elle implique qu'on s'intĂ©resse Ă  fond au sujet pour lequel on va chercher ensuite Ă  rĂ©soudre un problĂšme. Il faut vraiment devenir expert de ce sujet en comprendre les tenants, les aboutissants, pour bien concevoir ensuite des solutions.

  • Speaker #0

    Évidemment. Ă©videmment. Et parmi toutes les expĂ©riences qui sont les tiennes, est-ce qu'il y en a une comme ça, rapidement, qui t'a peut-ĂȘtre un peu plus challengĂ©e que les autres ?

  • Speaker #1

    Je pense que le fait de devenir manager de cette Escape Game, directrice, ça a Ă©tĂ© un vrai challenge pour moi parce que la vie de chef d'entreprise, c'est un rythme trĂšs soutenu. Et puis cet Escape Game, alors moi, je n'Ă©tais pas fondatrice, je n'Ă©tais pas associĂ©e de l'entreprise, mais c'Ă©tait quand mĂȘme mon bĂ©bĂ©. J'avais fabriquĂ© les salles de mes mains, j'ai recrutĂ© ensuite l'Ă©quipe avec qui on travaillait pour faire tourner cet escape. Donc c'Ă©tait un peu mon bĂ©bĂ© aussi. Et donc j'y ai mis beaucoup de ma personne, beaucoup de mon temps, beaucoup de mon Ă©nergie. Et j'ai appris Ă©normĂ©ment parce que je n'avais jamais managĂ© une Ă©quipe avant. Ça a Ă©tĂ© une occasion de dĂ©couvrir beaucoup de choses, mais ça n'a pas toujours Ă©tĂ© Ă©vident.

  • Speaker #0

    Tu as été diagnostiquée autiste et TDAH vers la trentaine. ConcrÚtement, qu'est-ce que ça a changé pour toi, l'annonce de ce diagnostic ?

  • Speaker #1

    Ça a tout changĂ©. Ça a tout changĂ© parce que ça m'a permis de mettre des mots sur mon vĂ©cu et d'avoir une nouvelle grille de lecture finalement, de comprendre pourquoi je fonctionne, comment je fonctionne et donc de pouvoir adapter beaucoup mieux mon quotidien, tenir mieux compte de mes limites, mieux me connaĂźtre.

  • Speaker #0

    Avec des mots simples comme ça, c'est quoi la neuroatypie ?

  • Speaker #1

    La neuroatypie? La dĂ©finition, ça va ĂȘtre un fonctionnement neurologique diffĂ©rent de ce qu'on retrouve dans la majoritĂ© de la population.

  • Speaker #0

    Ok, c'est-Ă -dire ?

  • Speaker #1

    Et donc, on parle aussi de trouble du neurodĂ©veloppement, TND. Ça veut dire concrĂštement qu'on n'est pas cĂąblĂ© comme la plupart des gens. Notre cerveau, il ne fonctionne pas exactement pareil. Ok. Et ça se traduit de plein de façons. Alors lĂ , je ne vais pas rentrer dans le dĂ©tail, mais on va peut-ĂȘtre y venir un peu plus tard. Mais en tout cas, on n'est pas cĂąblĂ© comme la plupart des gens.

  • Speaker #0

    Dans ton cas, justement ? Comment l'autisme et le TDAH se manifestent au quotidien ? Est-ce que tu peux nous donner des exemples concrets au travail aussi, notamment, par exemple ?

  • Speaker #1

    Alors, le TDAH, un trouble de l'attention, dans mon cas avec hyperactivitĂ©, ça se manifeste par Ă  la fois un trouble de la concentration Ă  certains moments. Si je suis dans un environnement, par exemple, qui est bruyant, dans lequel il y a du passage, dans lequel il se passe des choses, mon attention peut ĂȘtre trĂšs trĂšs facilement dĂ©tournĂ©s, dĂ©bordĂ©s. Et ça va me demander des efforts considĂ©rables pour revenir Ă  ce que je suis en train de faire. Des fois, c'est aussi mon propre cerveau qui me coupe la parole, comme j'aime dire, parce que je suis en train de penser Ă  quelque chose, d'essayer de me concentrer sur quelque chose ou mĂȘme de parler Ă  quelqu'un, d'expliquer. Et puis, j'ai une pensĂ©e qui va venir et je vais avoir des grosses difficultĂ©s lĂ  aussi pour l'inhiber, pour m'empĂȘcher de penser Ă  cette autre chose. Et ça va venir perturber mon fond de pensĂ©e. Et pour tenir face Ă  ça, il faut faire preuve d'une grande concentration. Et c'est extrĂȘmement fatigant, c'est Ă©puisant en fait sur le long terme.

  • Speaker #0

    Et c'est des troubles qui peuvent arriver comme ça n'importe quand ?

  • Speaker #1

    C'est présent en permanence. AprÚs, quand je suis bien reposée, que j'ai bien dormi, que je suis dans un cadre qui ne me stimule pas trop sensoriellement, c'est plus facile à tenir que dans un environnement bruyant quand je suis fatiguée et que j'ai sauté un repas, ça c'est certain.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi tes défis que les autres ne voit pas forcément en fait ?

  • Speaker #1

    Tous ces efforts justement qu'on doit faire pour fonctionner, pour ĂȘtre fonctionnel. Tous ces efforts qu'on doit faire pour conserver la concentration dans des moments oĂč c'est important. Alors lĂ , j'ai donnĂ© l'exemple du TDAH. Dans le cas de l'autisme, ça peut ĂȘtre par exemple au niveau de la communication ou socialement. Je vais avoir beaucoup de difficultĂ©s Ă  comprendre le second degrĂ©. Je vais avoir des difficultĂ©s Ă  savoir quand est-ce que c'est mon tour de parler. Je vais avoir besoin de me projeter aussi, de connaĂźtre par exemple le dĂ©roulĂ© en avance d'une rĂ©union. Je t'ai demandĂ© en avance les questions pour notre interview, justement pour pouvoir m'y prĂ©parer. Et tout ça, c'est des choses qui sont invisibles en fait. Si je ne le dis pas en amont, les personnes ne peuvent pas deviner et forcĂ©ment, ça rend la vie beaucoup plus compliquĂ©e pour moi et beaucoup plus fatigante.

  • Speaker #0

    Oui, et puis moi, je peux témoigner là. C'est-à-dire que j'ai l'impression que je fais une interview comme toutes les autres, que tout se passe bien. Normalement, il n'y a aucune difficulté, aucune. Eh oui,

  • Speaker #1

    mais en fait, le fait d'avoir pu lire toutes les questions en amont, ça a permis à mon cerveau de se mettre en ordre de bataille, d'anticiper un minimum.

  • Speaker #0

    Et comment est-ce que tu fais toi aujourd'hui pour reconnaĂźtre finalement tes limites et s'en culpabiliser ?

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est une vraie question chez les personnes neuroatypiques, surtout quand, dans mon cas, on a Ă©tĂ© diagnostiquĂ© sur le tard parce qu'on passe beaucoup d'annĂ©es Ă  compenser finalement. Et donc, pendant des annĂ©es, je les ai repoussĂ©es, mes limites, en fait. J'ai fait comme si elles n'existaient pas parce que, justement, je ne savais pas qu'elles Ă©taient lĂ  et je finissais trĂšs rĂ©guliĂšrement en burn-out. Aujourd'hui, je dis souvent que j'ai appris mes limites, j'ai appris les contours de mes limites en me fracassant dessus. souvent douloureusement. Et aujourd'hui, je les connais mieux, Ă©videmment, parce qu'Ă  force de me retrouver dans des situations oĂč j'Ă©tais en burn-out, j'Ă©tais Ă©puisĂ©e, oĂč simplement c'Ă©tait trĂšs difficile, que ce soit Ă©motionnellement, que ce soit physiquement pour moi, j'ai appris Ă  reconnaĂźtre les signes. C'est lĂ  oĂč le diagnostic m'a Ă©normĂ©ment aidĂ©e, parce que justement, ça m'a permis d'accepter ces limites-lĂ . Ça a Ă©tĂ© un deuil aussi. Mais aujourd'hui, je suis beaucoup plus Ă  l'Ă©coute. de mes ressentis, parce que je sais que finalement, si mes limites, je ne les respecte pas, derriĂšre, je vais m'effondrer. Donc finalement, je vais mettre plus de temps Ă  m'en remettre. Donc je ne culpabilise plus parce que je sais que Ă©couter mes limites et en avoir conscience, c'est ce qui va me permettre de fonctionner correctement sur la durĂ©e.

  • Speaker #0

    Alors tu m'excuses parce qu'effectivement, tu as dĂ» voir que je rajoutais une ou deux questions comme ça, qui n'Ă©taient pas forcĂ©ment dans le conducteur. Donc j'espĂšre que je ne te perturbe pas trop et je vais justement le faire lĂ  exactement. Tu as parlĂ© de difficultĂ©s physiques et tu parles aussi de difficultĂ©s Ă©motionnelles. Ça veut dire quoi trĂšs concrĂštement quand tu parles de difficultĂ©s Ă©motionnelles ?

  • Speaker #1

    Ça veut dire qu'Ă©motionnellement, il va y avoir un traitement de l'information. Je ne vais pas rentrer dans des considĂ©rations neuropsychologiques trop compliquĂ©es. On va dire que le cerveau va traiter les informations chez les personnes autistes plus en profondeur que chez des personnes qui ne sont pas autistes. ou alors de façon diffĂ©rentes, mais en tout cas, dans mon cas, il y a certaines choses qui se passent dans la vie qui peuvent paraĂźtre anodines pour la plupart des gens et qui, moi, vont profondĂ©ment m'affecter. Et donc, ça va avoir psychologiquement un effet, parce que je vais... Oui, c'est ça, ça va avoir un effet qui va me conduire parfois Ă ... On parle d'effondrement autistique, on parle de crise, qui vont dĂ©clencher une crise chez moi parce qu'Ă©motionnellement, ça aura Ă©tĂ© trop fort.

  • Speaker #0

    Et quelles idées aujourd'hui reçues, toi, te semblent encore super présentes quand on parle de profils neuroatypiques ?

  • Speaker #1

    Les idĂ©es reçues, il y en a beaucoup. Il y a Ă©normĂ©ment de stĂ©rĂ©otypes qui existent. Ça va ĂȘtre une personne autiste n'est pas capable de regarder dans les yeux. Une personne autiste n'est pas capable de se faire des amis. Elle est forcĂ©ment asociale. Moi, ce n'est pas vrai. J'ai plein d'amis. Simplement, ça me fatigue beaucoup d'ĂȘtre dans des interactions sociales sur une durĂ©e trop longue. C'est quelque chose qui va trop me fatiguer. Qu'est-ce qu'on peut avoir d'autre ? Les personnes autistes ne sont pas capables de s'insĂ©rer dans le monde de l'entreprise, de travailler en Ă©quipe. C'est faux.

  • Speaker #0

    T'en es la preuve.

  • Speaker #1

    La preuve. Quoi d'autre ? Pour le TDAH aussi, pour les troubles de l'attention, on a souvent une image de personnes ayant un TDAH comme un petit enfant qui va se rouler par terre, qui va courir dans tous les sens. On peut avoir un trouble de l'attention et ĂȘtre... trĂšs immobile si on n'a pas d'hyperactivitĂ© associĂ©e, par exemple. Et mĂȘme cette hyperactivitĂ©, en fait, elle est aussi psychique. On peut trĂšs bien avoir l'air parfaitement calme vu de l'extĂ©rieur et en fait qu'Ă  l'intĂ©rieur de la tĂȘte, ça soit un vĂ©ritable jukebox, que ça fuse Ă  toute vitesse et notre cerveau nous fatigue.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, tu en parles facilement de ta neuro-atypie. Alors, c'est le thÚme aussi de l'épisode. Donc, effectivement, tu en parles et tu as accepté de le faire et je te remercie. mais avec avec ton entourage, tu disais que tu étais une personne qui était sociable. Est-ce que c'est un sujet dont tu parles pour justement que les personnes autour de toi arrivent à l'appréhender ?

  • Speaker #1

    Oui, tout Ă  fait. Aujourd'hui, j'en parle. J'en parle volontiers parce que finalement, ça me permet un peu de donner le mode d'emploi aux gens que je rencontre, de comment je fonctionne. Justement, de parler de mes limites aussi, que les personnes que j'ai face Ă  moi comprennent. LĂ , si je ne te regarde pas dans les yeux quand on discute, ce n'est pas par impolitesse, ce n'est pas parce que ça ne m'intĂ©resse pas. C'est juste que si je te regarde en mĂȘme temps qu'on parle, ça va ĂȘtre extrĂȘmement compliquĂ© pour moi de me concentrer. Ou alors, si je ne viens pas Ă  cet Ă©vĂ©nement, ce n'est pas contre vous. J'adorerais ĂȘtre lĂ , ça me ferait plaisir, mais je sais que socialement, ça va vraiment trop me fatiguer.

  • Speaker #0

    Clémence, on parle maintenant de ton job. Juste avant, c'est quoi au typique et pourquoi les avoir rejoints ?

  • Speaker #1

    Alors, Autypik, c'est une entreprise qui rĂ©volutionne le monde du travail. On aide les entreprises qui souhaitent ĂȘtre inclusives Ă  travailler autrement. Et comment ? En rendant le monde du travail plus inclusif pour les personnes autistes, TDAH ou qui ont un trouble dyslexie, dyspraxie, dyscalculie, etc.

  • Speaker #0

    Génial. Alors aujourd'hui, tu es chef product officer chez Autypik. C'est quoi ta mission trÚs concrÚtement ?

  • Speaker #1

    Ma mission, concrĂštement, ça va ĂȘtre dĂ©rouler... Toute la stratĂ©gie produit, on a toute une palette de services qu'on propose aux entreprises. Et donc, comment est-ce qu'on va articuler ces diffĂ©rents services les uns aux autres ? Comment est-ce qu'on va les prioriser ? Lesquels on va dĂ©velopper ? Dans quel ordre ? En fonction des besoins de terrain qu'on a identifiĂ©s. J'Ă©tais UX, donc je fais pas mal de recherche utilisateur, des entretiens avec nos clients et avec les candidates et les candidats. Je suis aussi responsable de la plateforme sur des aspects plus techniques. Puisque parmi nos services, on a une plateforme de recrutement qui permet Ă  la fois aux personnes neuroatypiques en recherche d'emploi de crĂ©er un profil. C'est un peu un anti-CV. Et puis qui permet aux entreprises qu'on a formĂ©es prĂ©alablement de dĂ©poser des offres d'emploi. Et donc ça permet de mettre en contact ces deux populations.

  • Speaker #0

    Et de les faire matcher. Il s'agit d'une plateforme qui est conçue donc, si j'ai bien compris, par et pour des personnes neuroatypiques. Merci. En quoi c'est, mĂȘme si ça peut paraĂźtre Ă©vident, mais je te pose quand mĂȘme la question, en quoi c'est diffĂ©rent d'un projet classique ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que la diffĂ©rence la plus importante vient du fait que c'est conçu par des personnes neuroatypiques. Au sein de l'Ă©quipe, la majeure partie de l'Ă©quipe est elle-mĂȘme neuroatypique. Tout d'abord, Mara, la fondatrice. Et ça veut dire que concrĂštement, Autypik, c'est une startup, mais on ne peut pas avoir un fonctionnement comme dans une startup classique, parce que sinon, on tiendrait pas six mois, sinon on exploserait en vol parce que justement, on a besoin de respecter nos limites.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que tu mÚnes la recherche utilisateur par rapport à ces publics qui sont aussi spécifiques ?

  • Speaker #1

    Comme n'importe quelle recherche utilisateur, vraiment. LĂ , mon travail de designer et de UX researcher, il s'est fait vraiment de la mĂȘme maniĂšre que pour n'importe quel autre public. L'idĂ©e, c'est de pouvoir comprendre les problĂ©matiques rencontrĂ©es. par ces populations-lĂ , que ça soit les managers, les recruteurs d'un cĂŽtĂ© ou les personnes neuroatypiques de l'autre. Et donc, vraiment pas de diffĂ©rence avec n'importe quelle autre population.

  • Speaker #0

    Et en quoi le fait de vivre toi-mĂȘme certains besoins t'aide finalement ou complique peut-ĂȘtre mĂȘme parfois les dĂ©cisions qui seraient Ă  prendre ?

  • Speaker #1

    Alors, on dit souvent dans le design qu'il faut prendre garde Ă  ne pas designer pour soi-mĂȘme, qu'on n'ait pas son propre public. Justement, dans ce cas-lĂ , je dirais que c'est plutĂŽt un atout. parce que ça me permet d'avoir une comprĂ©hension peut-ĂȘtre plus fine des difficultĂ©s rencontrĂ©es par des personnes autistes ou des personnes TDAH ou 10 sur le terrain, dans le monde de l'emploi. J'ai rejoint Autypik. La mission d'Autypik m'a parlĂ© parce que justement, moi-mĂȘme, j'ai Ă©tĂ© confrontĂ©e Ă  des difficultĂ©s dans le monde du travail.

  • Speaker #0

    Est-ce que le mot handicap t'a fait peur au début ou au contraire t'a permis de poser ce qu'on pourrait appeler un cadre et qu'il soit plus clair ?

  • Speaker #1

    Je pense que j'ai eu un travail de dĂ©construction Ă  faire vis-Ă -vis de ce mot-lĂ , parce qu'ayant fonctionnĂ© pendant plus de 35 ans sans savoir que j'Ă©tais neuroatypique et sans savoir que j'Ă©tais en situation de handicap, au dĂ©part, ça a Ă©tĂ© un peu difficile de l'accepter. Et en mĂȘme temps, les diagnostics m'ont apportĂ© un tel soulagement dans la comprĂ©hension de moi-mĂȘme que finalement, je ne dirais pas que ça m'a fait peur, mais il a fallu faire une sorte de travail de deuil. de la personne que je pensais ĂȘtre jusque-lĂ .

  • Speaker #0

    Dans ton parcours, est-ce qu'on t'a déjà refusé un poste ou une mission à cause de ton fonctionnement différent ?

  • Speaker #1

    Dans mon parcours, ça ne m'est jamais arrivĂ© qu'on me refuse un poste ou une mission. Mais je pense que jusque-lĂ , j'ai aussi fabriquĂ© mon propre cadre de travail pour Ă©viter ce genre de situation. J'ai toujours travaillĂ©, soit dans des milieux assez artistiques, le game design, le monde des escape games, le monde du jeu, Ou mĂȘme le monde de la radio, oĂč j'ai travaillĂ© dans des univers de radio, oĂč finalement on n'allait pas me juger, on n'allait pas me regarder de travers, parce que j'avais une façon d'ĂȘtre un peu diffĂ©rente de la norme. Je n'aime pas le mot norme, mais...

  • Speaker #0

    Moi non plus.

  • Speaker #1

    Mais que j'avais une façon d'ĂȘtre diffĂ©rente de la plupart des gens, on va dire. Et quand on travaille en radio en matinale, par exemple, on a des horaires complĂštement dĂ©calĂ©s par rapport au reste de la population. Et finalement, ça nous place un peu Ă  part. C'est vrai. Donc, j'Ă©tais toujours un peu Ă  part, mais il y avait toujours des bonnes explications dans mon mĂ©tier. Et je pense que ça aurait Ă©tĂ© beaucoup plus difficile si j'avais dĂ» travailler dans des environnements plus classiques. C'est clair. Par exemple, je ne sais pas, en banque ou... ou dans des entreprises plus classiques.

  • Speaker #0

    Je sais d'autant plus de quoi tu parles, puisque les matinales, j'en ai fait aussi. Effectivement, les horaires décalés, c'est quelque chose. Est-ce que tu penses, toi, que les métiers de la tech sont plus accueillants que d'autres pour les personnes neuroatypiques et pourquoi ?

  • Speaker #1

    Je pense que les mĂ©tiers de la tech peuvent faciliter, dans certains cas, les amĂ©nagements de postes, dans la mesure oĂč, quand on travaille derriĂšre un Ă©cran, C'est plus facile de faire du tĂ©lĂ©travail, c'est plus facile d'utiliser des outils numĂ©riques pour se simplifier la vie. Quand on travaille, par exemple, sur le terrain, quand notre mĂ©tier, c'est d'ĂȘtre dans une boutique face Ă  des gens, on va ĂȘtre en interaction avec des gens toute la journĂ©e, ça fait partie du poste. AprĂšs, chaque personne neuroatypique est diffĂ©rente. Ça fait partie des stĂ©rĂ©otypes contre lesquels on lutte chez Autypik. Il y a des personnes neuroatypiques dans tous les secteurs. Et donc, ce n'est pas parce qu'on est autiste qu'on ne peut pas ĂȘtre commercial ou qu'on ne peut pas ĂȘtre vendeuse ou qu'on ne peut pas ĂȘtre jardinier. Vraiment, on est prĂ©sent dans tous les secteurs et dans tous les mĂ©tiers.

  • Speaker #0

    Oui, sauf que maintenant, c'est diagnostiquĂ©. Donc, on en parle. On sait que c'est lĂ . Exactement. Qu'est-ce qui devrait changer selon toi dans les pratiques de recrutement, justement, pour rendre peut-ĂȘtre la tech encore un peu plus inclusive ?

  • Speaker #1

    Je pense qu'en France, on a encore une façon de voir les choses assez classique et c'est ce qu'on essaye de faire bouger justement avec Autypik en formant les recruteurs. On va avoir tendance Ă  regarder les CV, les parcours atypiques d'un Ɠil un peu suspicieux, en se disant cette personne n'a pas un parcours acadĂ©mique classique, elle ne rentre pas dans les cases, on s'en mĂ©fie. Alors que finalement, on va se priver de profils, de talents qui sont trĂšs rifs, qui peuvent apporter Ă©normĂ©ment au monde de l'entreprise, mais qui effectivement n'ont pas forcĂ©ment... Les diplĂŽmes qui vont bien parce qu'ils ont acquis leurs compĂ©tences autrement, en autodidacte ou par des projets personnels ou de maniĂšre dĂ©tournĂ©e. On est encore un petit peu trop Ă  l'ancienne, je trouve, en France.

  • Speaker #0

    Et est-ce que c'est au manager, finalement, de s'adapter au profil des collaborateurs qu'il a en face de lui ?

  • Speaker #1

    Oui, ça j'en suis convaincue et d'ailleurs au-delĂ  de la neuroatypie. Je pense que le rĂŽle du manager, c'est d'ĂȘtre lĂ  pourcoordonner et faire avancer ces Ă©quipes, leur permettre d'aller plus loin et de progresser. Et pour ça, ce n'est pas l'armĂ©e.

  • Speaker #0

    Est-ce que toi, tu as déjà bénéficié d'un accompagnement, d'un mentor ou d'un cadre, j'ai envie de dire, bienveillant qui t'a aidé quelque part à croire en toi et puis surtout à t'épanouir ?

  • Speaker #1

    Depuis que je suis chez Autypik, je suis dans le cadre le plus bienveillant qui soit et c'est un plaisir de travailler dans cette Ă©quipe. C'est aussi une nĂ©cessitĂ©, c'est ce que je disais tout Ă  l'heure. En fait, vu la composition de notre Ă©quipe, on est obligĂ© d'appliquer les mĂ©thodes qu'on enseigne Ă  nos entreprises. On est obligĂ© d'ĂȘtre inclusif avec nous, mĂȘme sinon on ne tiendrait pas le coup. Donc nĂ©cessairement, on est bien accueilli. AprĂšs, en termes de mentor, moi j'ai justement beaucoup progressĂ© en autodidacte. Je me suis beaucoup auto-formĂ©e, j'ai beaucoup appris sur le terrain et j'ai fait des rencontres formidables. je pense que La plus rĂ©cente et celle qui m'a apportĂ©, c'est cette formation justement au design UX-UI. J'ai fait un bootcamp chez Aeronac qui m'a permis de me remettre Ă  niveau et ça a Ă©tĂ© vraiment d'excellentes conditions.

  • Speaker #0

    Pour les personnes concernées qui n'osent pas se déclarer comme neuroatypiques en entreprise, toi tu dirais quoi ? Il y a un risque effectivement à le déclarer ou au contraire, ce sont de nouvelles opportunités qu'on va créer parce que les choses seront claires.

  • Speaker #1

    Je pense que ça dĂ©pend Ă©normĂ©ment de l'environnement, du cadre dans lequel on Ă©volue. Certaines entreprises vont ĂȘtre ouvertes Ă  ça, sont dans une dĂ©marche d'inclusion dĂ©jĂ , oĂč elles souhaitent ĂȘtre plus inclusives. Et c'est les entreprises avec lesquelles nous, on travaille chez Autypik, des entreprises qui veulent bien faire, qui veulent progresser, qui veulent ĂȘtre plus performantes aussi. Et donc, on les aide Ă  mettre en place concrĂštement cette diversitĂ© au sein de leurs Ă©quipes. En revanche, il y a des entreprises qui ne sont pas du tout sensibilisĂ©es Ă  ces questions. et dans lesquelles, si j'en parle Ă  mon manager, finalement, ça va ĂȘtre plus stigmatisant qu'autre chose, on va me regarder de travers. Donc, ça dĂ©pend vraiment des entreprises.

  • Speaker #0

    Évidemment, et de leur accueil. ClĂ©mence, qu'est-ce qui t'Ă©clate le plus dans ton job aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    La variété. Et je continue à apprendre. C'est trÚs différent finalement. Je n'ai aucune journée qui se ressemble. Je n'ai pas le temps de m'ennuyer.

  • Speaker #0

    Tu n'as pas le temps de t'ennuyer ? Par exemple, si je te parle d'une journée type, il n'y en a pas quoi ?

  • Speaker #1

    Non, vraiment, il n'y en a pas. On va dire que les moments oĂč je suis Ă  l'Ă©cole, peut-ĂȘtre ça va se ressembler. Les moments oĂč j'enseigne, les moments oĂč j'enregistre des Ă©missions, parce que c'est vrai qu'on n'en a pas parlĂ©, mais je fais des podcasts aussi Ă  cĂŽtĂ©, c'est encore diffĂ©rent. Et puis les moments oĂč je travaille pour Autypik, ou l'Ă©poque oĂč je faisais encore des missions de web design en indĂ©pendante, tout ça c'Ă©tait vraiment des journĂ©es Ă  chaque fois qui Ă©taient trĂšs diffĂ©rentes, parce qu'un jour tu es en recherche d'utilisateur, le jour d'aprĂšs tu vas ĂȘtre en rĂ©union stratĂ©gique, le jour d'aprĂšs tu vas ĂȘtre les mains dans Figma pour faire des maquettes, voilĂ , ça change tout le temps.

  • Speaker #0

    Et c'est ça qui est bien. donc la variĂ©tĂ© des tĂąches donc tu nous disais il y a quelques instants que peut-ĂȘtre que la journĂ©e qui se ressemble le plus c'est celle oĂč tu es Ă  l'Ă©cole et lĂ  c'est pas pour apprendre mais c'est pour enseigner puisque tu es enseignante en game design Ă  l'IM, l'institut de l'internet et du multimĂ©dia qu'est-ce que tu transmets Ă  tes Ă©tudiants ?

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que je leur transmets ? Je donne des cours ponctuels et sur des sujets bien prĂ©cis et n'ayant pas moi-mĂȘme une formation j'ai pas fait d'Ă©cole de jeux vidĂ©o Donc, je n'ai pas un savoir acadĂ©mique. Je pense que la chose principale que je leur transmets, c'est une expĂ©rience de terrain. C'est justement comment ça se passe concrĂštement dans le monde du travail. Je leur transmets Ă©videmment des compĂ©tences aussi qui concernent plus directement le game design, la narration, comment est-ce qu'on crĂ©e une expĂ©rience immersive, etc. Mais au-delĂ  de ça, je leur transmets aussi des informations plus concrĂštes sur qu'est-ce que c'est d'Ă©voluer dans le monde du travail. quand on est en entreprise, quand on est indĂ©pendant.

  • Speaker #0

    Et est-ce que là aussi, à tes étudiants, tu leur as parlé de ton profil ou pas du tout ? Oui,

  • Speaker #1

    ce n'est pas du tout quelque chose que je cache, parce que finalement, quand on est neuroatypique, ce n'est pas une maladie qu'on va attraper à un moment, on l'est depuis sa naissance. Et donc, je trouve que c'est important de l'assumer pour donner à voir aussi des modÚles différents, des stéréotypes qu'on a encore trop souvent actuellement. Et comme je sais que le profil que j'ai, ne correspond pas aux stéréotypes de personnes autistes ou de personnes TDAH qu'on peut voir dans les médias, dans les films, dans les séries. Je trouve ça important de le montrer.

  • Speaker #0

    Oui, tu as raison. Tu es aussi, tu l'as dit briÚvement, podcasteuse, et cela depuis plusieurs années, bienvenue au club. Qu'est-ce que ce média t'a apporté personnellement ?

  • Speaker #1

    J'adore parler dans un micro.

  • Speaker #0

    Et ça s'entend !

  • Speaker #1

    Et j'adore parler tout court. Quand les sujets m'intĂ©ressent, je suis quelqu'un de trĂšs bavard. Tu m'as bien fait de me dire qu'on va calibrer la taille des rĂ©ponses parce que sinon, je pense que ce podcast aurait pu durer une journĂ©e complĂšte. Mais justement, la pratique de ce mĂ©dia m'a appris aussi Ă  ĂȘtre plus concise dans ma façon de m'exprimer.

  • Speaker #0

    Ça, tu le trouves, ça ?

  • Speaker #1

    Ça, je le trouve. Ça a Ă©tĂ© pendant ma formation. Mais finalement, quand on est en radio, il faut rĂ©ussir Ă  capter l'attention, il faut rĂ©ussir Ă  la maintenir. Et puis, il y a quelque chose de plus intime aussi, je trouve, dans les formats audio, une proximitĂ© avec les auditrices, avec les auditeurs qui, moi, me plaĂźt beaucoup. Et puis, Ă©videmment, le direct qui va apporter...

  • Speaker #0

    L'adrénaline !

  • Speaker #1

    L'adrénaline !

  • Speaker #0

    Oui, c'est vrai. Je te rejoins Ă©videmment complĂštement. Si toi, tu devais crĂ©er un podcast 100% personnel aujourd'hui, peut-ĂȘtre autour de la neurodiversitĂ©, il ressemblerait Ă  quoi ?

  • Speaker #1

    figure-toi que c'est une question que je me pose assez rĂ©guliĂšrement j'ai pas le temps pour ça aujourd'hui mais peut-ĂȘtre un jour ça arrivera je pense que ça serait un podcast de conversation ça serait un podcast de discussion et d'Ă©change pour parler de nos expĂ©riences respectives avec les personnes que j'inviterais au micro parce que finalement chaque personne neuroatypique est diffĂ©rente Ă  son propre vĂ©cu et la neuroatypique ces personnes s'expriment aussi de maniĂšre diffĂ©rente Donc, je trouve ça passionnant d'explorer justement les diffĂ©rences d'une personne Ă  l'autre.

  • Speaker #0

    Tu as de nombreuses casquettes, on l'a vu dans ta vie pro. Est-ce qu'on t'a déjà dit que tu étais trop, trop quelque chose, trop rapide, trop intense, trop dispersé ? Et puis, comment est-ce que tu arrives à gérer ça si c'est le cas ? Tout le temps.

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qu'on m'a beaucoup répété, pas que dans ma vie pro, dans ma vie en général. Et trop dispersé, mais tu vois, pendant trÚs longtemps, tu as eu un aperçu de mon parcours. J'ai fait la version rapide, mais les recruteurs regardaient mon CV vraiment de travers et me disaient...

  • Speaker #0

    Vous ne savez pas ce que vous voulez dans la vie. J'ai été, mais si, justement.

  • Speaker #1

    Un CV, ça tient sur une page, Clémence. C'est ça.

  • Speaker #0

    C'est trĂšs dur pour moi de le faire tenir sur une page. Comment je gĂšre ça ? Aujourd'hui, j'en suis arrivĂ©e Ă  un stade de ma vie oĂč justement le diagnostic m'a permis d'assumer ça aussi. Et ce n'est plus quelque chose dont j'ai honte. Je suis fiĂšre de la façon dont je fonctionne parce que dĂ©jĂ , elle est comme elle est et je ne vais pas changer. Je ne vais pas chercher Ă  me rĂ©trĂ©cir pour entrer dans des cases. Et en fin de compte, je sais que c'est aussi un atout, que c'est une force. Et donc, si des personnes trouvent que c'est trop pour elles, eh bien, tant pis pour elles, en fait, qu'elles aillent chercher moins ailleurs.

  • Speaker #1

    Tu as bien raison. Si tu avais un message à faire passer à toutes les personnes neuroatypiques qui peuvent nous écouter aujourd'hui, ce serait quoi ce message ?

  • Speaker #0

    Ça serait, ayez confiance dans vos capacitĂ©s. Ce n'est pas parce qu'on vous dit que vous n'ĂȘtes pas comme tout le monde que vous ĂȘtes moins, justement. Vous ĂȘtes des personnes simplement diffĂ©rentes. et c'est une... Vraie force, c'est une vraie ressource. Ça peut ĂȘtre un vrai atout dans le monde professionnel.

  • Speaker #1

    Et tu en es la preuve vivante. Un immense merci à toi Clémence.

  • Speaker #0

    Merci Ă  toi pour ton accueil.

  • Speaker #1

    Un grand merci pour ton témoignage. Pour celles et ceux qui se reconnaissent dans ce que Clémence vient de partager, il existe aujourd'hui des ressources, des dispositifs pour mieux vivre sa singularité au travail. Des bilans, par exemple neuropsychologiques pour poser un diagnostic, c'est hyper important. Des associations comme CAPU, la maison de l'autisme, ou MTN, la maison des TDAH et neuroatypiques. Des aménagements possibles aussi avec l'aide des RH ou de la médecine du travail, des communautés de plateformes comme Otypique pour s'outiller et se sentir surtout moins seul. Et pour en savoir plus de maniÚre générale sur les métiers et les transformations du numérique, rendez-vous sur un site internet concepteurdavenir.fr. A trÚs vite pour un nouvel épisode de Tech it different. Salut Clémence !

  • Speaker #0

    Salut !

  • Speaker #2

    C'était Tech It Different, diversité et inclusion dans les entreprises de la tech.

Chapters

  • Diagnostic et Changement

    00:03

  • DiversitĂ© et Inclusion

    00:58

  • Parcours de ClĂ©mence

    01:48

  • Évolution vers le Design NumĂ©rique

    04:49

  • Comprendre la Neuroatypie

    07:00

  • DĂ©fis Invisibles des Neuroatypiques

    09:26

  • ReconnaĂźtre ses Limites

    12:16

  • Parler de NeurodiversitĂ©

    14:44

  • Mission chez Otypique

    15:24

  • Recherche Utilisateur et NeurodiversitĂ©

    18:17

  • Acceptation du Handicap

    18:49

  • RĂŽle du Manager

    23:10

  • DĂ©claration de Neuroatypie en Entreprise

    24:16

  • VarietĂ© et Épanouissement au Travail

    25:14

  • Enseignement et Partage d'ExpĂ©rience

    26:19

  • Assumer sa DiffĂ©rence

    30:03

  • Message aux Neuroatypiques

    30:33

  • Ressources et Support pour Neuroatypiques

    31:06

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Description

đŸŽ™ïž Bienvenue dans un nouvel Ă©pisode de Tech It Different, la sĂ©rie de podcasts portĂ©e par Numeum et l’Opco Atlas, qui explore les enjeux de diversitĂ© et d’inclusion dans les entreprises du numĂ©rique.


Dans cet Ă©pisode, nous plongeons dans la rĂ©alitĂ© d’un profil encore trop souvent incompris dans le monde du travail : celui des personnes neuroatypiques. Autisme, TDAH, troubles DYS
 autant de fonctionnements diffĂ©rents, encore largement invisibles ou stigmatisĂ©s en entreprise.


🎧 ClĂ©mence Gueidant, designer et enseignante, partage son parcours, ses diagnostics tardifs, les stratĂ©gies qu’elle met en place au quotidien pour rester alignĂ©e avec son fonctionnement, mais aussi ses engagements pour rendre le monde professionnel plus inclusif. Elle Ă©voque sans dĂ©tour les dĂ©fis, les efforts invisibles, la fatigue, la force de la neurodiversité  et son rĂŽle aujourd’hui chez Autypik, une startup pensĂ©e par et pour les personnes neuroatypiques.


📌 Ce tĂ©moignage rend visibles des rĂ©alitĂ©s encore trop marginalisĂ©es. Il rappelle combien le respect des singularitĂ©s, l’adaptation des pratiques managĂ©riales et une meilleure comprĂ©hension des besoins spĂ©cifiques peuvent transformer en profondeur les environnements de travail.


🌍 Tech It Different, c’est une sĂ©rie qui donne la voix Ă  celles et ceux qui vivent la diversitĂ© au quotidien, pour mieux comprendre, mieux inclure, et mieux agir dans les entreprises du numĂ©rique.

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Transcription

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que ça a changé pour toi, l'annonce de ce diagnostic ?

  • Speaker #1

    Ça a tout changĂ© parce que ça m'a permis de mettre des mots sur mon vĂ©cu et d'avoir une nouvelle grille de lecture finalement, de comprendre pourquoi je fonctionne, comment je fonctionne, et donc de pouvoir adapter beaucoup mieux mon quotidien, tenir mieux compte de mes limites. Dans le cas de l'autisme, ça peut ĂȘtre par exemple au niveau de la communication ou socialement, je vais avoir beaucoup de difficultĂ©s Ă  comprendre le second degrĂ©. Je vais avoir des difficultĂ©s Ă  savoir quand est-ce que c'est mon tour de parler. Je vais avoir besoin de me projeter aussi, de connaĂźtre par exemple le dĂ©roulĂ© en avance d'une rĂ©union. Ce n'est plus quelque chose dont j'ai honte, je suis fiĂšre de la façon dont je fonctionne. Je ne vais pas chercher Ă  me rĂ©trĂ©cir pour rentrer dans des cases. Et en fin de compte, je sais que c'est aussi un atout, que c'est une force. Et donc, si des personnes trouvent que c'est trop pour elles, eh bien, tant pis pour elles en fait, qu'elles aillent chercher moins ailleurs.

  • Speaker #0

    DiversitĂ© et inclusion dans les entreprises de la tech, bienvenue dans Tech It Different. Selon plusieurs estimations, entre 10 et 15% de la population prĂ©senterait un profil neuroatypique, qu'il s'agisse d'un TDAH, trouble du dĂ©ficit de l'attention avec ou sans hyperactivitĂ©, d'un TSA, trouble du spectre de l'autisme, d'un trouble Dys ou d'un haut potentiel. Et pourtant, dans le monde professionnel, ces singularitĂ©s restent encore trop souvent invisibles, incomprises, voire mĂȘme parfois carrĂ©ment stigmatisĂ©es. Bonjour Ă  tous et bienvenue dans Tech It Different, le podcast e Numeum et de l'Opco Atlas, programme dĂ©diĂ© Ă  la diversitĂ© et Ă  l'inclusion dans les entreprises de la tech. Dans cet Ă©pisode, un sujet Ă  la fois intime et collectif, comment travailler, collaborer, manager quand on est neuroatypique. Et si votre collĂšgue, votre manager ou vous-mĂȘme fonctionniez diffĂ©remment sans le savoir ? Dans cet Ă©pisode, une rĂ©alitĂ©, c'est celle de ClĂ©mence Gueidant, qui nous partage son parcours, ses amĂ©nagements et ses convictions pour une tech encore plus inclusive.

  • Speaker #1

    Bonjour, je m'appelle Clémence, je suis designer associée chez Autypik et enseignante dans une école de jeux vidéo.

  • Speaker #0

    Salut Clémence !

  • Speaker #1

    Salut Jean-Baptiste !

  • Speaker #0

    Ravi de te retrouver et merci pour ton témoignage à venir.

  • Speaker #1

    Merci de m'accueillir.

  • Speaker #0

    Tu es la bienvenue. Alors tu as eu un parcours particuliÚrement riche entre journalisme, game design, enseignement design, UX, UI. Est-ce que tu peux nous retracer un petit peu les grandes étapes de ton parcours ?

  • Speaker #1

    Alors, on va faire la version courte, parce que sinon, on y est encore demain.

  • Speaker #0

    C'est vrai.

  • Speaker #1

    Donc, mon parcours, on va faire ça de maniĂšre chronologique. Initialement, j'ai une formation en psychologie et en neuropsychologie, en sciences humaines et neurosciences, on va dire. Je n'ai jamais voulu choisir dans ma vie. On m'a toujours dit, il faut choisir. Et moi, j'aime vraiment apprendre des nouvelles choses en permanence. C'est pour ça que dans une premiĂšre partie de carriĂšre, je voulais ĂȘtre journaliste. Donc Ă  la fin de mes Ă©tudes de psycho, finalement, je me suis arrĂȘtĂ©e Ă  un an du diplĂŽme pour me former au monde de la radio, parce que c'est ce qui m'intĂ©ressait vraiment le plus dans le journalisme en termes de format, c'Ă©tait le journalisme audio. Et j'ai Ă©tĂ© journaliste ensuite pendant cinq ans. Finalement, j'ai travaillĂ© sur des formats trĂšs variĂ©s, en radio, mais aussi sur des projets de web documentaire, en presse Ă©crite Ă©galement, en presse web. Et puis au bout de cinq ans, j'ai dĂ©cidĂ© d'aller tester d'autres choses et je me suis tournĂ©e vers le monde du jeu. Un petit peu par hasard au dĂ©part, par opportunitĂ© aussi, j'ai eu la possibilitĂ© de rejoindre un projet d'escape game qui se montait. J'ai Ă©tĂ© en charge de la scĂ©nographie de ce lieu. Puis Ă  son ouverture, je suis devenue manager du site. Je suis restĂ©e lĂ -bas pendant trois ans et demi. J'y ai appris plein de choses, Ă  faire tourner une entreprise, Ă  manager une Ă©quipe. Et puis, j'y ai appris aussi le game design, les bases du game design sur le terrain directement, puisqu'on avait beaucoup de demandes de clients qui voulaient des jeux sur mesure. Puis, chemin faisant, j'ai toujours eu une part trĂšs crĂ©ative. J'ai fait de nombreux jobs Ă©tudiants. Parmi eux, j'ai fait, par exemple, de la rĂ©novation d'appartements. J'ai toujours aimĂ© bricoler. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai rejoint l'Ă©quipe de l'Escape Game au dĂ©part, pour faire de la scĂ©nographie. Et donc faire du game design pour de l'immersif, pour de la crĂ©ation d'escape, forcĂ©ment c'est venu combler cette partie de moi qui aime crĂ©er, qui aime fabriquer de ses mains des choses. Et donc au bout de trois ans et demi, j'ai quittĂ© cet escape game pour me lancer comme game designer Ă  mon compte en indĂ©pendant. J'ai travaillĂ© sur principalement des projets immersifs, mais je me suis diversifiĂ©e et finalement pendant toute cette pĂ©riode, j'ai travaillĂ© sur aussi des projets de jeux de sociĂ©tĂ©, de jeux de cartes, des projets de jeux vidĂ©o. J'ai commencĂ© Ă  la mĂȘme Ă©poque Ă  enseigner en Ă©cole de game design, justement en Ă©cole de jeux vidĂ©o. Et puis, petit Ă  petit, le Covid arrivant, j'ai transitionnĂ© du game design vers du design numĂ©rique plus classique, oĂč finalement on n'est plus dans le loisir, on va ĂȘtre plus dans la rĂ©solution de problĂšmes. Et je suis devenue UX, UI designer dans un premier temps. Puis j'ai Ă©largi vraiment ma pratique jusqu'au product design.

  • Speaker #0

    Ok, alors... Une activité riche, on va dire, à travers tous ces rÎles. Est-ce qu'il y a un fil rouge ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que le fil rouge qui me porte dans ma vie depuis mes Ă©tudes, ça va ĂȘtre ma curiositĂ© et ce besoin insatiable d'apprendre en permanence, que ce soit des nouvelles connaissances, des nouvelles techniques, des nouveaux savoir-faire. Et finalement, Ă  l'Ă©poque oĂč je voulais ĂȘtre journaliste, c'Ă©tait parce que je me disais qu'il n'y a pas de statut d'Ă©tudiant professionnel. On ne peut pas ĂȘtre Ă©tudiant et ĂȘtre payĂ© pour ça. Donc je vais devenir journaliste parce que c'est ce qui s'en rapproche le plus. Ça va me permettre de continuer Ă  creuser des sujets qui m'intĂ©ressent, Ă  aller explorer en dĂ©tail et Ă  apprendre des nouvelles choses. Puis ĂȘtre designer, c'est un petit peu ça aussi, parce que dans le design, il y a deux grandes phases. Et la premiĂšre phase, la phase de recherche, elle implique qu'on s'intĂ©resse Ă  fond au sujet pour lequel on va chercher ensuite Ă  rĂ©soudre un problĂšme. Il faut vraiment devenir expert de ce sujet en comprendre les tenants, les aboutissants, pour bien concevoir ensuite des solutions.

  • Speaker #0

    Évidemment. Ă©videmment. Et parmi toutes les expĂ©riences qui sont les tiennes, est-ce qu'il y en a une comme ça, rapidement, qui t'a peut-ĂȘtre un peu plus challengĂ©e que les autres ?

  • Speaker #1

    Je pense que le fait de devenir manager de cette Escape Game, directrice, ça a Ă©tĂ© un vrai challenge pour moi parce que la vie de chef d'entreprise, c'est un rythme trĂšs soutenu. Et puis cet Escape Game, alors moi, je n'Ă©tais pas fondatrice, je n'Ă©tais pas associĂ©e de l'entreprise, mais c'Ă©tait quand mĂȘme mon bĂ©bĂ©. J'avais fabriquĂ© les salles de mes mains, j'ai recrutĂ© ensuite l'Ă©quipe avec qui on travaillait pour faire tourner cet escape. Donc c'Ă©tait un peu mon bĂ©bĂ© aussi. Et donc j'y ai mis beaucoup de ma personne, beaucoup de mon temps, beaucoup de mon Ă©nergie. Et j'ai appris Ă©normĂ©ment parce que je n'avais jamais managĂ© une Ă©quipe avant. Ça a Ă©tĂ© une occasion de dĂ©couvrir beaucoup de choses, mais ça n'a pas toujours Ă©tĂ© Ă©vident.

  • Speaker #0

    Tu as été diagnostiquée autiste et TDAH vers la trentaine. ConcrÚtement, qu'est-ce que ça a changé pour toi, l'annonce de ce diagnostic ?

  • Speaker #1

    Ça a tout changĂ©. Ça a tout changĂ© parce que ça m'a permis de mettre des mots sur mon vĂ©cu et d'avoir une nouvelle grille de lecture finalement, de comprendre pourquoi je fonctionne, comment je fonctionne et donc de pouvoir adapter beaucoup mieux mon quotidien, tenir mieux compte de mes limites, mieux me connaĂźtre.

  • Speaker #0

    Avec des mots simples comme ça, c'est quoi la neuroatypie ?

  • Speaker #1

    La neuroatypie? La dĂ©finition, ça va ĂȘtre un fonctionnement neurologique diffĂ©rent de ce qu'on retrouve dans la majoritĂ© de la population.

  • Speaker #0

    Ok, c'est-Ă -dire ?

  • Speaker #1

    Et donc, on parle aussi de trouble du neurodĂ©veloppement, TND. Ça veut dire concrĂštement qu'on n'est pas cĂąblĂ© comme la plupart des gens. Notre cerveau, il ne fonctionne pas exactement pareil. Ok. Et ça se traduit de plein de façons. Alors lĂ , je ne vais pas rentrer dans le dĂ©tail, mais on va peut-ĂȘtre y venir un peu plus tard. Mais en tout cas, on n'est pas cĂąblĂ© comme la plupart des gens.

  • Speaker #0

    Dans ton cas, justement ? Comment l'autisme et le TDAH se manifestent au quotidien ? Est-ce que tu peux nous donner des exemples concrets au travail aussi, notamment, par exemple ?

  • Speaker #1

    Alors, le TDAH, un trouble de l'attention, dans mon cas avec hyperactivitĂ©, ça se manifeste par Ă  la fois un trouble de la concentration Ă  certains moments. Si je suis dans un environnement, par exemple, qui est bruyant, dans lequel il y a du passage, dans lequel il se passe des choses, mon attention peut ĂȘtre trĂšs trĂšs facilement dĂ©tournĂ©s, dĂ©bordĂ©s. Et ça va me demander des efforts considĂ©rables pour revenir Ă  ce que je suis en train de faire. Des fois, c'est aussi mon propre cerveau qui me coupe la parole, comme j'aime dire, parce que je suis en train de penser Ă  quelque chose, d'essayer de me concentrer sur quelque chose ou mĂȘme de parler Ă  quelqu'un, d'expliquer. Et puis, j'ai une pensĂ©e qui va venir et je vais avoir des grosses difficultĂ©s lĂ  aussi pour l'inhiber, pour m'empĂȘcher de penser Ă  cette autre chose. Et ça va venir perturber mon fond de pensĂ©e. Et pour tenir face Ă  ça, il faut faire preuve d'une grande concentration. Et c'est extrĂȘmement fatigant, c'est Ă©puisant en fait sur le long terme.

  • Speaker #0

    Et c'est des troubles qui peuvent arriver comme ça n'importe quand ?

  • Speaker #1

    C'est présent en permanence. AprÚs, quand je suis bien reposée, que j'ai bien dormi, que je suis dans un cadre qui ne me stimule pas trop sensoriellement, c'est plus facile à tenir que dans un environnement bruyant quand je suis fatiguée et que j'ai sauté un repas, ça c'est certain.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi tes défis que les autres ne voit pas forcément en fait ?

  • Speaker #1

    Tous ces efforts justement qu'on doit faire pour fonctionner, pour ĂȘtre fonctionnel. Tous ces efforts qu'on doit faire pour conserver la concentration dans des moments oĂč c'est important. Alors lĂ , j'ai donnĂ© l'exemple du TDAH. Dans le cas de l'autisme, ça peut ĂȘtre par exemple au niveau de la communication ou socialement. Je vais avoir beaucoup de difficultĂ©s Ă  comprendre le second degrĂ©. Je vais avoir des difficultĂ©s Ă  savoir quand est-ce que c'est mon tour de parler. Je vais avoir besoin de me projeter aussi, de connaĂźtre par exemple le dĂ©roulĂ© en avance d'une rĂ©union. Je t'ai demandĂ© en avance les questions pour notre interview, justement pour pouvoir m'y prĂ©parer. Et tout ça, c'est des choses qui sont invisibles en fait. Si je ne le dis pas en amont, les personnes ne peuvent pas deviner et forcĂ©ment, ça rend la vie beaucoup plus compliquĂ©e pour moi et beaucoup plus fatigante.

  • Speaker #0

    Oui, et puis moi, je peux témoigner là. C'est-à-dire que j'ai l'impression que je fais une interview comme toutes les autres, que tout se passe bien. Normalement, il n'y a aucune difficulté, aucune. Eh oui,

  • Speaker #1

    mais en fait, le fait d'avoir pu lire toutes les questions en amont, ça a permis à mon cerveau de se mettre en ordre de bataille, d'anticiper un minimum.

  • Speaker #0

    Et comment est-ce que tu fais toi aujourd'hui pour reconnaĂźtre finalement tes limites et s'en culpabiliser ?

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est une vraie question chez les personnes neuroatypiques, surtout quand, dans mon cas, on a Ă©tĂ© diagnostiquĂ© sur le tard parce qu'on passe beaucoup d'annĂ©es Ă  compenser finalement. Et donc, pendant des annĂ©es, je les ai repoussĂ©es, mes limites, en fait. J'ai fait comme si elles n'existaient pas parce que, justement, je ne savais pas qu'elles Ă©taient lĂ  et je finissais trĂšs rĂ©guliĂšrement en burn-out. Aujourd'hui, je dis souvent que j'ai appris mes limites, j'ai appris les contours de mes limites en me fracassant dessus. souvent douloureusement. Et aujourd'hui, je les connais mieux, Ă©videmment, parce qu'Ă  force de me retrouver dans des situations oĂč j'Ă©tais en burn-out, j'Ă©tais Ă©puisĂ©e, oĂč simplement c'Ă©tait trĂšs difficile, que ce soit Ă©motionnellement, que ce soit physiquement pour moi, j'ai appris Ă  reconnaĂźtre les signes. C'est lĂ  oĂč le diagnostic m'a Ă©normĂ©ment aidĂ©e, parce que justement, ça m'a permis d'accepter ces limites-lĂ . Ça a Ă©tĂ© un deuil aussi. Mais aujourd'hui, je suis beaucoup plus Ă  l'Ă©coute. de mes ressentis, parce que je sais que finalement, si mes limites, je ne les respecte pas, derriĂšre, je vais m'effondrer. Donc finalement, je vais mettre plus de temps Ă  m'en remettre. Donc je ne culpabilise plus parce que je sais que Ă©couter mes limites et en avoir conscience, c'est ce qui va me permettre de fonctionner correctement sur la durĂ©e.

  • Speaker #0

    Alors tu m'excuses parce qu'effectivement, tu as dĂ» voir que je rajoutais une ou deux questions comme ça, qui n'Ă©taient pas forcĂ©ment dans le conducteur. Donc j'espĂšre que je ne te perturbe pas trop et je vais justement le faire lĂ  exactement. Tu as parlĂ© de difficultĂ©s physiques et tu parles aussi de difficultĂ©s Ă©motionnelles. Ça veut dire quoi trĂšs concrĂštement quand tu parles de difficultĂ©s Ă©motionnelles ?

  • Speaker #1

    Ça veut dire qu'Ă©motionnellement, il va y avoir un traitement de l'information. Je ne vais pas rentrer dans des considĂ©rations neuropsychologiques trop compliquĂ©es. On va dire que le cerveau va traiter les informations chez les personnes autistes plus en profondeur que chez des personnes qui ne sont pas autistes. ou alors de façon diffĂ©rentes, mais en tout cas, dans mon cas, il y a certaines choses qui se passent dans la vie qui peuvent paraĂźtre anodines pour la plupart des gens et qui, moi, vont profondĂ©ment m'affecter. Et donc, ça va avoir psychologiquement un effet, parce que je vais... Oui, c'est ça, ça va avoir un effet qui va me conduire parfois Ă ... On parle d'effondrement autistique, on parle de crise, qui vont dĂ©clencher une crise chez moi parce qu'Ă©motionnellement, ça aura Ă©tĂ© trop fort.

  • Speaker #0

    Et quelles idées aujourd'hui reçues, toi, te semblent encore super présentes quand on parle de profils neuroatypiques ?

  • Speaker #1

    Les idĂ©es reçues, il y en a beaucoup. Il y a Ă©normĂ©ment de stĂ©rĂ©otypes qui existent. Ça va ĂȘtre une personne autiste n'est pas capable de regarder dans les yeux. Une personne autiste n'est pas capable de se faire des amis. Elle est forcĂ©ment asociale. Moi, ce n'est pas vrai. J'ai plein d'amis. Simplement, ça me fatigue beaucoup d'ĂȘtre dans des interactions sociales sur une durĂ©e trop longue. C'est quelque chose qui va trop me fatiguer. Qu'est-ce qu'on peut avoir d'autre ? Les personnes autistes ne sont pas capables de s'insĂ©rer dans le monde de l'entreprise, de travailler en Ă©quipe. C'est faux.

  • Speaker #0

    T'en es la preuve.

  • Speaker #1

    La preuve. Quoi d'autre ? Pour le TDAH aussi, pour les troubles de l'attention, on a souvent une image de personnes ayant un TDAH comme un petit enfant qui va se rouler par terre, qui va courir dans tous les sens. On peut avoir un trouble de l'attention et ĂȘtre... trĂšs immobile si on n'a pas d'hyperactivitĂ© associĂ©e, par exemple. Et mĂȘme cette hyperactivitĂ©, en fait, elle est aussi psychique. On peut trĂšs bien avoir l'air parfaitement calme vu de l'extĂ©rieur et en fait qu'Ă  l'intĂ©rieur de la tĂȘte, ça soit un vĂ©ritable jukebox, que ça fuse Ă  toute vitesse et notre cerveau nous fatigue.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, tu en parles facilement de ta neuro-atypie. Alors, c'est le thÚme aussi de l'épisode. Donc, effectivement, tu en parles et tu as accepté de le faire et je te remercie. mais avec avec ton entourage, tu disais que tu étais une personne qui était sociable. Est-ce que c'est un sujet dont tu parles pour justement que les personnes autour de toi arrivent à l'appréhender ?

  • Speaker #1

    Oui, tout Ă  fait. Aujourd'hui, j'en parle. J'en parle volontiers parce que finalement, ça me permet un peu de donner le mode d'emploi aux gens que je rencontre, de comment je fonctionne. Justement, de parler de mes limites aussi, que les personnes que j'ai face Ă  moi comprennent. LĂ , si je ne te regarde pas dans les yeux quand on discute, ce n'est pas par impolitesse, ce n'est pas parce que ça ne m'intĂ©resse pas. C'est juste que si je te regarde en mĂȘme temps qu'on parle, ça va ĂȘtre extrĂȘmement compliquĂ© pour moi de me concentrer. Ou alors, si je ne viens pas Ă  cet Ă©vĂ©nement, ce n'est pas contre vous. J'adorerais ĂȘtre lĂ , ça me ferait plaisir, mais je sais que socialement, ça va vraiment trop me fatiguer.

  • Speaker #0

    Clémence, on parle maintenant de ton job. Juste avant, c'est quoi au typique et pourquoi les avoir rejoints ?

  • Speaker #1

    Alors, Autypik, c'est une entreprise qui rĂ©volutionne le monde du travail. On aide les entreprises qui souhaitent ĂȘtre inclusives Ă  travailler autrement. Et comment ? En rendant le monde du travail plus inclusif pour les personnes autistes, TDAH ou qui ont un trouble dyslexie, dyspraxie, dyscalculie, etc.

  • Speaker #0

    Génial. Alors aujourd'hui, tu es chef product officer chez Autypik. C'est quoi ta mission trÚs concrÚtement ?

  • Speaker #1

    Ma mission, concrĂštement, ça va ĂȘtre dĂ©rouler... Toute la stratĂ©gie produit, on a toute une palette de services qu'on propose aux entreprises. Et donc, comment est-ce qu'on va articuler ces diffĂ©rents services les uns aux autres ? Comment est-ce qu'on va les prioriser ? Lesquels on va dĂ©velopper ? Dans quel ordre ? En fonction des besoins de terrain qu'on a identifiĂ©s. J'Ă©tais UX, donc je fais pas mal de recherche utilisateur, des entretiens avec nos clients et avec les candidates et les candidats. Je suis aussi responsable de la plateforme sur des aspects plus techniques. Puisque parmi nos services, on a une plateforme de recrutement qui permet Ă  la fois aux personnes neuroatypiques en recherche d'emploi de crĂ©er un profil. C'est un peu un anti-CV. Et puis qui permet aux entreprises qu'on a formĂ©es prĂ©alablement de dĂ©poser des offres d'emploi. Et donc ça permet de mettre en contact ces deux populations.

  • Speaker #0

    Et de les faire matcher. Il s'agit d'une plateforme qui est conçue donc, si j'ai bien compris, par et pour des personnes neuroatypiques. Merci. En quoi c'est, mĂȘme si ça peut paraĂźtre Ă©vident, mais je te pose quand mĂȘme la question, en quoi c'est diffĂ©rent d'un projet classique ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que la diffĂ©rence la plus importante vient du fait que c'est conçu par des personnes neuroatypiques. Au sein de l'Ă©quipe, la majeure partie de l'Ă©quipe est elle-mĂȘme neuroatypique. Tout d'abord, Mara, la fondatrice. Et ça veut dire que concrĂštement, Autypik, c'est une startup, mais on ne peut pas avoir un fonctionnement comme dans une startup classique, parce que sinon, on tiendrait pas six mois, sinon on exploserait en vol parce que justement, on a besoin de respecter nos limites.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que tu mÚnes la recherche utilisateur par rapport à ces publics qui sont aussi spécifiques ?

  • Speaker #1

    Comme n'importe quelle recherche utilisateur, vraiment. LĂ , mon travail de designer et de UX researcher, il s'est fait vraiment de la mĂȘme maniĂšre que pour n'importe quel autre public. L'idĂ©e, c'est de pouvoir comprendre les problĂ©matiques rencontrĂ©es. par ces populations-lĂ , que ça soit les managers, les recruteurs d'un cĂŽtĂ© ou les personnes neuroatypiques de l'autre. Et donc, vraiment pas de diffĂ©rence avec n'importe quelle autre population.

  • Speaker #0

    Et en quoi le fait de vivre toi-mĂȘme certains besoins t'aide finalement ou complique peut-ĂȘtre mĂȘme parfois les dĂ©cisions qui seraient Ă  prendre ?

  • Speaker #1

    Alors, on dit souvent dans le design qu'il faut prendre garde Ă  ne pas designer pour soi-mĂȘme, qu'on n'ait pas son propre public. Justement, dans ce cas-lĂ , je dirais que c'est plutĂŽt un atout. parce que ça me permet d'avoir une comprĂ©hension peut-ĂȘtre plus fine des difficultĂ©s rencontrĂ©es par des personnes autistes ou des personnes TDAH ou 10 sur le terrain, dans le monde de l'emploi. J'ai rejoint Autypik. La mission d'Autypik m'a parlĂ© parce que justement, moi-mĂȘme, j'ai Ă©tĂ© confrontĂ©e Ă  des difficultĂ©s dans le monde du travail.

  • Speaker #0

    Est-ce que le mot handicap t'a fait peur au début ou au contraire t'a permis de poser ce qu'on pourrait appeler un cadre et qu'il soit plus clair ?

  • Speaker #1

    Je pense que j'ai eu un travail de dĂ©construction Ă  faire vis-Ă -vis de ce mot-lĂ , parce qu'ayant fonctionnĂ© pendant plus de 35 ans sans savoir que j'Ă©tais neuroatypique et sans savoir que j'Ă©tais en situation de handicap, au dĂ©part, ça a Ă©tĂ© un peu difficile de l'accepter. Et en mĂȘme temps, les diagnostics m'ont apportĂ© un tel soulagement dans la comprĂ©hension de moi-mĂȘme que finalement, je ne dirais pas que ça m'a fait peur, mais il a fallu faire une sorte de travail de deuil. de la personne que je pensais ĂȘtre jusque-lĂ .

  • Speaker #0

    Dans ton parcours, est-ce qu'on t'a déjà refusé un poste ou une mission à cause de ton fonctionnement différent ?

  • Speaker #1

    Dans mon parcours, ça ne m'est jamais arrivĂ© qu'on me refuse un poste ou une mission. Mais je pense que jusque-lĂ , j'ai aussi fabriquĂ© mon propre cadre de travail pour Ă©viter ce genre de situation. J'ai toujours travaillĂ©, soit dans des milieux assez artistiques, le game design, le monde des escape games, le monde du jeu, Ou mĂȘme le monde de la radio, oĂč j'ai travaillĂ© dans des univers de radio, oĂč finalement on n'allait pas me juger, on n'allait pas me regarder de travers, parce que j'avais une façon d'ĂȘtre un peu diffĂ©rente de la norme. Je n'aime pas le mot norme, mais...

  • Speaker #0

    Moi non plus.

  • Speaker #1

    Mais que j'avais une façon d'ĂȘtre diffĂ©rente de la plupart des gens, on va dire. Et quand on travaille en radio en matinale, par exemple, on a des horaires complĂštement dĂ©calĂ©s par rapport au reste de la population. Et finalement, ça nous place un peu Ă  part. C'est vrai. Donc, j'Ă©tais toujours un peu Ă  part, mais il y avait toujours des bonnes explications dans mon mĂ©tier. Et je pense que ça aurait Ă©tĂ© beaucoup plus difficile si j'avais dĂ» travailler dans des environnements plus classiques. C'est clair. Par exemple, je ne sais pas, en banque ou... ou dans des entreprises plus classiques.

  • Speaker #0

    Je sais d'autant plus de quoi tu parles, puisque les matinales, j'en ai fait aussi. Effectivement, les horaires décalés, c'est quelque chose. Est-ce que tu penses, toi, que les métiers de la tech sont plus accueillants que d'autres pour les personnes neuroatypiques et pourquoi ?

  • Speaker #1

    Je pense que les mĂ©tiers de la tech peuvent faciliter, dans certains cas, les amĂ©nagements de postes, dans la mesure oĂč, quand on travaille derriĂšre un Ă©cran, C'est plus facile de faire du tĂ©lĂ©travail, c'est plus facile d'utiliser des outils numĂ©riques pour se simplifier la vie. Quand on travaille, par exemple, sur le terrain, quand notre mĂ©tier, c'est d'ĂȘtre dans une boutique face Ă  des gens, on va ĂȘtre en interaction avec des gens toute la journĂ©e, ça fait partie du poste. AprĂšs, chaque personne neuroatypique est diffĂ©rente. Ça fait partie des stĂ©rĂ©otypes contre lesquels on lutte chez Autypik. Il y a des personnes neuroatypiques dans tous les secteurs. Et donc, ce n'est pas parce qu'on est autiste qu'on ne peut pas ĂȘtre commercial ou qu'on ne peut pas ĂȘtre vendeuse ou qu'on ne peut pas ĂȘtre jardinier. Vraiment, on est prĂ©sent dans tous les secteurs et dans tous les mĂ©tiers.

  • Speaker #0

    Oui, sauf que maintenant, c'est diagnostiquĂ©. Donc, on en parle. On sait que c'est lĂ . Exactement. Qu'est-ce qui devrait changer selon toi dans les pratiques de recrutement, justement, pour rendre peut-ĂȘtre la tech encore un peu plus inclusive ?

  • Speaker #1

    Je pense qu'en France, on a encore une façon de voir les choses assez classique et c'est ce qu'on essaye de faire bouger justement avec Autypik en formant les recruteurs. On va avoir tendance Ă  regarder les CV, les parcours atypiques d'un Ɠil un peu suspicieux, en se disant cette personne n'a pas un parcours acadĂ©mique classique, elle ne rentre pas dans les cases, on s'en mĂ©fie. Alors que finalement, on va se priver de profils, de talents qui sont trĂšs rifs, qui peuvent apporter Ă©normĂ©ment au monde de l'entreprise, mais qui effectivement n'ont pas forcĂ©ment... Les diplĂŽmes qui vont bien parce qu'ils ont acquis leurs compĂ©tences autrement, en autodidacte ou par des projets personnels ou de maniĂšre dĂ©tournĂ©e. On est encore un petit peu trop Ă  l'ancienne, je trouve, en France.

  • Speaker #0

    Et est-ce que c'est au manager, finalement, de s'adapter au profil des collaborateurs qu'il a en face de lui ?

  • Speaker #1

    Oui, ça j'en suis convaincue et d'ailleurs au-delĂ  de la neuroatypie. Je pense que le rĂŽle du manager, c'est d'ĂȘtre lĂ  pourcoordonner et faire avancer ces Ă©quipes, leur permettre d'aller plus loin et de progresser. Et pour ça, ce n'est pas l'armĂ©e.

  • Speaker #0

    Est-ce que toi, tu as déjà bénéficié d'un accompagnement, d'un mentor ou d'un cadre, j'ai envie de dire, bienveillant qui t'a aidé quelque part à croire en toi et puis surtout à t'épanouir ?

  • Speaker #1

    Depuis que je suis chez Autypik, je suis dans le cadre le plus bienveillant qui soit et c'est un plaisir de travailler dans cette Ă©quipe. C'est aussi une nĂ©cessitĂ©, c'est ce que je disais tout Ă  l'heure. En fait, vu la composition de notre Ă©quipe, on est obligĂ© d'appliquer les mĂ©thodes qu'on enseigne Ă  nos entreprises. On est obligĂ© d'ĂȘtre inclusif avec nous, mĂȘme sinon on ne tiendrait pas le coup. Donc nĂ©cessairement, on est bien accueilli. AprĂšs, en termes de mentor, moi j'ai justement beaucoup progressĂ© en autodidacte. Je me suis beaucoup auto-formĂ©e, j'ai beaucoup appris sur le terrain et j'ai fait des rencontres formidables. je pense que La plus rĂ©cente et celle qui m'a apportĂ©, c'est cette formation justement au design UX-UI. J'ai fait un bootcamp chez Aeronac qui m'a permis de me remettre Ă  niveau et ça a Ă©tĂ© vraiment d'excellentes conditions.

  • Speaker #0

    Pour les personnes concernées qui n'osent pas se déclarer comme neuroatypiques en entreprise, toi tu dirais quoi ? Il y a un risque effectivement à le déclarer ou au contraire, ce sont de nouvelles opportunités qu'on va créer parce que les choses seront claires.

  • Speaker #1

    Je pense que ça dĂ©pend Ă©normĂ©ment de l'environnement, du cadre dans lequel on Ă©volue. Certaines entreprises vont ĂȘtre ouvertes Ă  ça, sont dans une dĂ©marche d'inclusion dĂ©jĂ , oĂč elles souhaitent ĂȘtre plus inclusives. Et c'est les entreprises avec lesquelles nous, on travaille chez Autypik, des entreprises qui veulent bien faire, qui veulent progresser, qui veulent ĂȘtre plus performantes aussi. Et donc, on les aide Ă  mettre en place concrĂštement cette diversitĂ© au sein de leurs Ă©quipes. En revanche, il y a des entreprises qui ne sont pas du tout sensibilisĂ©es Ă  ces questions. et dans lesquelles, si j'en parle Ă  mon manager, finalement, ça va ĂȘtre plus stigmatisant qu'autre chose, on va me regarder de travers. Donc, ça dĂ©pend vraiment des entreprises.

  • Speaker #0

    Évidemment, et de leur accueil. ClĂ©mence, qu'est-ce qui t'Ă©clate le plus dans ton job aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    La variété. Et je continue à apprendre. C'est trÚs différent finalement. Je n'ai aucune journée qui se ressemble. Je n'ai pas le temps de m'ennuyer.

  • Speaker #0

    Tu n'as pas le temps de t'ennuyer ? Par exemple, si je te parle d'une journée type, il n'y en a pas quoi ?

  • Speaker #1

    Non, vraiment, il n'y en a pas. On va dire que les moments oĂč je suis Ă  l'Ă©cole, peut-ĂȘtre ça va se ressembler. Les moments oĂč j'enseigne, les moments oĂč j'enregistre des Ă©missions, parce que c'est vrai qu'on n'en a pas parlĂ©, mais je fais des podcasts aussi Ă  cĂŽtĂ©, c'est encore diffĂ©rent. Et puis les moments oĂč je travaille pour Autypik, ou l'Ă©poque oĂč je faisais encore des missions de web design en indĂ©pendante, tout ça c'Ă©tait vraiment des journĂ©es Ă  chaque fois qui Ă©taient trĂšs diffĂ©rentes, parce qu'un jour tu es en recherche d'utilisateur, le jour d'aprĂšs tu vas ĂȘtre en rĂ©union stratĂ©gique, le jour d'aprĂšs tu vas ĂȘtre les mains dans Figma pour faire des maquettes, voilĂ , ça change tout le temps.

  • Speaker #0

    Et c'est ça qui est bien. donc la variĂ©tĂ© des tĂąches donc tu nous disais il y a quelques instants que peut-ĂȘtre que la journĂ©e qui se ressemble le plus c'est celle oĂč tu es Ă  l'Ă©cole et lĂ  c'est pas pour apprendre mais c'est pour enseigner puisque tu es enseignante en game design Ă  l'IM, l'institut de l'internet et du multimĂ©dia qu'est-ce que tu transmets Ă  tes Ă©tudiants ?

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que je leur transmets ? Je donne des cours ponctuels et sur des sujets bien prĂ©cis et n'ayant pas moi-mĂȘme une formation j'ai pas fait d'Ă©cole de jeux vidĂ©o Donc, je n'ai pas un savoir acadĂ©mique. Je pense que la chose principale que je leur transmets, c'est une expĂ©rience de terrain. C'est justement comment ça se passe concrĂštement dans le monde du travail. Je leur transmets Ă©videmment des compĂ©tences aussi qui concernent plus directement le game design, la narration, comment est-ce qu'on crĂ©e une expĂ©rience immersive, etc. Mais au-delĂ  de ça, je leur transmets aussi des informations plus concrĂštes sur qu'est-ce que c'est d'Ă©voluer dans le monde du travail. quand on est en entreprise, quand on est indĂ©pendant.

  • Speaker #0

    Et est-ce que là aussi, à tes étudiants, tu leur as parlé de ton profil ou pas du tout ? Oui,

  • Speaker #1

    ce n'est pas du tout quelque chose que je cache, parce que finalement, quand on est neuroatypique, ce n'est pas une maladie qu'on va attraper à un moment, on l'est depuis sa naissance. Et donc, je trouve que c'est important de l'assumer pour donner à voir aussi des modÚles différents, des stéréotypes qu'on a encore trop souvent actuellement. Et comme je sais que le profil que j'ai, ne correspond pas aux stéréotypes de personnes autistes ou de personnes TDAH qu'on peut voir dans les médias, dans les films, dans les séries. Je trouve ça important de le montrer.

  • Speaker #0

    Oui, tu as raison. Tu es aussi, tu l'as dit briÚvement, podcasteuse, et cela depuis plusieurs années, bienvenue au club. Qu'est-ce que ce média t'a apporté personnellement ?

  • Speaker #1

    J'adore parler dans un micro.

  • Speaker #0

    Et ça s'entend !

  • Speaker #1

    Et j'adore parler tout court. Quand les sujets m'intĂ©ressent, je suis quelqu'un de trĂšs bavard. Tu m'as bien fait de me dire qu'on va calibrer la taille des rĂ©ponses parce que sinon, je pense que ce podcast aurait pu durer une journĂ©e complĂšte. Mais justement, la pratique de ce mĂ©dia m'a appris aussi Ă  ĂȘtre plus concise dans ma façon de m'exprimer.

  • Speaker #0

    Ça, tu le trouves, ça ?

  • Speaker #1

    Ça, je le trouve. Ça a Ă©tĂ© pendant ma formation. Mais finalement, quand on est en radio, il faut rĂ©ussir Ă  capter l'attention, il faut rĂ©ussir Ă  la maintenir. Et puis, il y a quelque chose de plus intime aussi, je trouve, dans les formats audio, une proximitĂ© avec les auditrices, avec les auditeurs qui, moi, me plaĂźt beaucoup. Et puis, Ă©videmment, le direct qui va apporter...

  • Speaker #0

    L'adrénaline !

  • Speaker #1

    L'adrénaline !

  • Speaker #0

    Oui, c'est vrai. Je te rejoins Ă©videmment complĂštement. Si toi, tu devais crĂ©er un podcast 100% personnel aujourd'hui, peut-ĂȘtre autour de la neurodiversitĂ©, il ressemblerait Ă  quoi ?

  • Speaker #1

    figure-toi que c'est une question que je me pose assez rĂ©guliĂšrement j'ai pas le temps pour ça aujourd'hui mais peut-ĂȘtre un jour ça arrivera je pense que ça serait un podcast de conversation ça serait un podcast de discussion et d'Ă©change pour parler de nos expĂ©riences respectives avec les personnes que j'inviterais au micro parce que finalement chaque personne neuroatypique est diffĂ©rente Ă  son propre vĂ©cu et la neuroatypique ces personnes s'expriment aussi de maniĂšre diffĂ©rente Donc, je trouve ça passionnant d'explorer justement les diffĂ©rences d'une personne Ă  l'autre.

  • Speaker #0

    Tu as de nombreuses casquettes, on l'a vu dans ta vie pro. Est-ce qu'on t'a déjà dit que tu étais trop, trop quelque chose, trop rapide, trop intense, trop dispersé ? Et puis, comment est-ce que tu arrives à gérer ça si c'est le cas ? Tout le temps.

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qu'on m'a beaucoup répété, pas que dans ma vie pro, dans ma vie en général. Et trop dispersé, mais tu vois, pendant trÚs longtemps, tu as eu un aperçu de mon parcours. J'ai fait la version rapide, mais les recruteurs regardaient mon CV vraiment de travers et me disaient...

  • Speaker #0

    Vous ne savez pas ce que vous voulez dans la vie. J'ai été, mais si, justement.

  • Speaker #1

    Un CV, ça tient sur une page, Clémence. C'est ça.

  • Speaker #0

    C'est trĂšs dur pour moi de le faire tenir sur une page. Comment je gĂšre ça ? Aujourd'hui, j'en suis arrivĂ©e Ă  un stade de ma vie oĂč justement le diagnostic m'a permis d'assumer ça aussi. Et ce n'est plus quelque chose dont j'ai honte. Je suis fiĂšre de la façon dont je fonctionne parce que dĂ©jĂ , elle est comme elle est et je ne vais pas changer. Je ne vais pas chercher Ă  me rĂ©trĂ©cir pour entrer dans des cases. Et en fin de compte, je sais que c'est aussi un atout, que c'est une force. Et donc, si des personnes trouvent que c'est trop pour elles, eh bien, tant pis pour elles, en fait, qu'elles aillent chercher moins ailleurs.

  • Speaker #1

    Tu as bien raison. Si tu avais un message à faire passer à toutes les personnes neuroatypiques qui peuvent nous écouter aujourd'hui, ce serait quoi ce message ?

  • Speaker #0

    Ça serait, ayez confiance dans vos capacitĂ©s. Ce n'est pas parce qu'on vous dit que vous n'ĂȘtes pas comme tout le monde que vous ĂȘtes moins, justement. Vous ĂȘtes des personnes simplement diffĂ©rentes. et c'est une... Vraie force, c'est une vraie ressource. Ça peut ĂȘtre un vrai atout dans le monde professionnel.

  • Speaker #1

    Et tu en es la preuve vivante. Un immense merci à toi Clémence.

  • Speaker #0

    Merci Ă  toi pour ton accueil.

  • Speaker #1

    Un grand merci pour ton témoignage. Pour celles et ceux qui se reconnaissent dans ce que Clémence vient de partager, il existe aujourd'hui des ressources, des dispositifs pour mieux vivre sa singularité au travail. Des bilans, par exemple neuropsychologiques pour poser un diagnostic, c'est hyper important. Des associations comme CAPU, la maison de l'autisme, ou MTN, la maison des TDAH et neuroatypiques. Des aménagements possibles aussi avec l'aide des RH ou de la médecine du travail, des communautés de plateformes comme Otypique pour s'outiller et se sentir surtout moins seul. Et pour en savoir plus de maniÚre générale sur les métiers et les transformations du numérique, rendez-vous sur un site internet concepteurdavenir.fr. A trÚs vite pour un nouvel épisode de Tech it different. Salut Clémence !

  • Speaker #0

    Salut !

  • Speaker #2

    C'était Tech It Different, diversité et inclusion dans les entreprises de la tech.

Chapters

  • Diagnostic et Changement

    00:03

  • DiversitĂ© et Inclusion

    00:58

  • Parcours de ClĂ©mence

    01:48

  • Évolution vers le Design NumĂ©rique

    04:49

  • Comprendre la Neuroatypie

    07:00

  • DĂ©fis Invisibles des Neuroatypiques

    09:26

  • ReconnaĂźtre ses Limites

    12:16

  • Parler de NeurodiversitĂ©

    14:44

  • Mission chez Otypique

    15:24

  • Recherche Utilisateur et NeurodiversitĂ©

    18:17

  • Acceptation du Handicap

    18:49

  • RĂŽle du Manager

    23:10

  • DĂ©claration de Neuroatypie en Entreprise

    24:16

  • VarietĂ© et Épanouissement au Travail

    25:14

  • Enseignement et Partage d'ExpĂ©rience

    26:19

  • Assumer sa DiffĂ©rence

    30:03

  • Message aux Neuroatypiques

    30:33

  • Ressources et Support pour Neuroatypiques

    31:06

Description

đŸŽ™ïž Bienvenue dans un nouvel Ă©pisode de Tech It Different, la sĂ©rie de podcasts portĂ©e par Numeum et l’Opco Atlas, qui explore les enjeux de diversitĂ© et d’inclusion dans les entreprises du numĂ©rique.


Dans cet Ă©pisode, nous plongeons dans la rĂ©alitĂ© d’un profil encore trop souvent incompris dans le monde du travail : celui des personnes neuroatypiques. Autisme, TDAH, troubles DYS
 autant de fonctionnements diffĂ©rents, encore largement invisibles ou stigmatisĂ©s en entreprise.


🎧 ClĂ©mence Gueidant, designer et enseignante, partage son parcours, ses diagnostics tardifs, les stratĂ©gies qu’elle met en place au quotidien pour rester alignĂ©e avec son fonctionnement, mais aussi ses engagements pour rendre le monde professionnel plus inclusif. Elle Ă©voque sans dĂ©tour les dĂ©fis, les efforts invisibles, la fatigue, la force de la neurodiversité  et son rĂŽle aujourd’hui chez Autypik, une startup pensĂ©e par et pour les personnes neuroatypiques.


📌 Ce tĂ©moignage rend visibles des rĂ©alitĂ©s encore trop marginalisĂ©es. Il rappelle combien le respect des singularitĂ©s, l’adaptation des pratiques managĂ©riales et une meilleure comprĂ©hension des besoins spĂ©cifiques peuvent transformer en profondeur les environnements de travail.


🌍 Tech It Different, c’est une sĂ©rie qui donne la voix Ă  celles et ceux qui vivent la diversitĂ© au quotidien, pour mieux comprendre, mieux inclure, et mieux agir dans les entreprises du numĂ©rique.

🎧 Écoutez cet Ă©pisode sur toutes les plateformes ou sur concepteursdavenirs.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que ça a changé pour toi, l'annonce de ce diagnostic ?

  • Speaker #1

    Ça a tout changĂ© parce que ça m'a permis de mettre des mots sur mon vĂ©cu et d'avoir une nouvelle grille de lecture finalement, de comprendre pourquoi je fonctionne, comment je fonctionne, et donc de pouvoir adapter beaucoup mieux mon quotidien, tenir mieux compte de mes limites. Dans le cas de l'autisme, ça peut ĂȘtre par exemple au niveau de la communication ou socialement, je vais avoir beaucoup de difficultĂ©s Ă  comprendre le second degrĂ©. Je vais avoir des difficultĂ©s Ă  savoir quand est-ce que c'est mon tour de parler. Je vais avoir besoin de me projeter aussi, de connaĂźtre par exemple le dĂ©roulĂ© en avance d'une rĂ©union. Ce n'est plus quelque chose dont j'ai honte, je suis fiĂšre de la façon dont je fonctionne. Je ne vais pas chercher Ă  me rĂ©trĂ©cir pour rentrer dans des cases. Et en fin de compte, je sais que c'est aussi un atout, que c'est une force. Et donc, si des personnes trouvent que c'est trop pour elles, eh bien, tant pis pour elles en fait, qu'elles aillent chercher moins ailleurs.

  • Speaker #0

    DiversitĂ© et inclusion dans les entreprises de la tech, bienvenue dans Tech It Different. Selon plusieurs estimations, entre 10 et 15% de la population prĂ©senterait un profil neuroatypique, qu'il s'agisse d'un TDAH, trouble du dĂ©ficit de l'attention avec ou sans hyperactivitĂ©, d'un TSA, trouble du spectre de l'autisme, d'un trouble Dys ou d'un haut potentiel. Et pourtant, dans le monde professionnel, ces singularitĂ©s restent encore trop souvent invisibles, incomprises, voire mĂȘme parfois carrĂ©ment stigmatisĂ©es. Bonjour Ă  tous et bienvenue dans Tech It Different, le podcast e Numeum et de l'Opco Atlas, programme dĂ©diĂ© Ă  la diversitĂ© et Ă  l'inclusion dans les entreprises de la tech. Dans cet Ă©pisode, un sujet Ă  la fois intime et collectif, comment travailler, collaborer, manager quand on est neuroatypique. Et si votre collĂšgue, votre manager ou vous-mĂȘme fonctionniez diffĂ©remment sans le savoir ? Dans cet Ă©pisode, une rĂ©alitĂ©, c'est celle de ClĂ©mence Gueidant, qui nous partage son parcours, ses amĂ©nagements et ses convictions pour une tech encore plus inclusive.

  • Speaker #1

    Bonjour, je m'appelle Clémence, je suis designer associée chez Autypik et enseignante dans une école de jeux vidéo.

  • Speaker #0

    Salut Clémence !

  • Speaker #1

    Salut Jean-Baptiste !

  • Speaker #0

    Ravi de te retrouver et merci pour ton témoignage à venir.

  • Speaker #1

    Merci de m'accueillir.

  • Speaker #0

    Tu es la bienvenue. Alors tu as eu un parcours particuliÚrement riche entre journalisme, game design, enseignement design, UX, UI. Est-ce que tu peux nous retracer un petit peu les grandes étapes de ton parcours ?

  • Speaker #1

    Alors, on va faire la version courte, parce que sinon, on y est encore demain.

  • Speaker #0

    C'est vrai.

  • Speaker #1

    Donc, mon parcours, on va faire ça de maniĂšre chronologique. Initialement, j'ai une formation en psychologie et en neuropsychologie, en sciences humaines et neurosciences, on va dire. Je n'ai jamais voulu choisir dans ma vie. On m'a toujours dit, il faut choisir. Et moi, j'aime vraiment apprendre des nouvelles choses en permanence. C'est pour ça que dans une premiĂšre partie de carriĂšre, je voulais ĂȘtre journaliste. Donc Ă  la fin de mes Ă©tudes de psycho, finalement, je me suis arrĂȘtĂ©e Ă  un an du diplĂŽme pour me former au monde de la radio, parce que c'est ce qui m'intĂ©ressait vraiment le plus dans le journalisme en termes de format, c'Ă©tait le journalisme audio. Et j'ai Ă©tĂ© journaliste ensuite pendant cinq ans. Finalement, j'ai travaillĂ© sur des formats trĂšs variĂ©s, en radio, mais aussi sur des projets de web documentaire, en presse Ă©crite Ă©galement, en presse web. Et puis au bout de cinq ans, j'ai dĂ©cidĂ© d'aller tester d'autres choses et je me suis tournĂ©e vers le monde du jeu. Un petit peu par hasard au dĂ©part, par opportunitĂ© aussi, j'ai eu la possibilitĂ© de rejoindre un projet d'escape game qui se montait. J'ai Ă©tĂ© en charge de la scĂ©nographie de ce lieu. Puis Ă  son ouverture, je suis devenue manager du site. Je suis restĂ©e lĂ -bas pendant trois ans et demi. J'y ai appris plein de choses, Ă  faire tourner une entreprise, Ă  manager une Ă©quipe. Et puis, j'y ai appris aussi le game design, les bases du game design sur le terrain directement, puisqu'on avait beaucoup de demandes de clients qui voulaient des jeux sur mesure. Puis, chemin faisant, j'ai toujours eu une part trĂšs crĂ©ative. J'ai fait de nombreux jobs Ă©tudiants. Parmi eux, j'ai fait, par exemple, de la rĂ©novation d'appartements. J'ai toujours aimĂ© bricoler. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai rejoint l'Ă©quipe de l'Escape Game au dĂ©part, pour faire de la scĂ©nographie. Et donc faire du game design pour de l'immersif, pour de la crĂ©ation d'escape, forcĂ©ment c'est venu combler cette partie de moi qui aime crĂ©er, qui aime fabriquer de ses mains des choses. Et donc au bout de trois ans et demi, j'ai quittĂ© cet escape game pour me lancer comme game designer Ă  mon compte en indĂ©pendant. J'ai travaillĂ© sur principalement des projets immersifs, mais je me suis diversifiĂ©e et finalement pendant toute cette pĂ©riode, j'ai travaillĂ© sur aussi des projets de jeux de sociĂ©tĂ©, de jeux de cartes, des projets de jeux vidĂ©o. J'ai commencĂ© Ă  la mĂȘme Ă©poque Ă  enseigner en Ă©cole de game design, justement en Ă©cole de jeux vidĂ©o. Et puis, petit Ă  petit, le Covid arrivant, j'ai transitionnĂ© du game design vers du design numĂ©rique plus classique, oĂč finalement on n'est plus dans le loisir, on va ĂȘtre plus dans la rĂ©solution de problĂšmes. Et je suis devenue UX, UI designer dans un premier temps. Puis j'ai Ă©largi vraiment ma pratique jusqu'au product design.

  • Speaker #0

    Ok, alors... Une activité riche, on va dire, à travers tous ces rÎles. Est-ce qu'il y a un fil rouge ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que le fil rouge qui me porte dans ma vie depuis mes Ă©tudes, ça va ĂȘtre ma curiositĂ© et ce besoin insatiable d'apprendre en permanence, que ce soit des nouvelles connaissances, des nouvelles techniques, des nouveaux savoir-faire. Et finalement, Ă  l'Ă©poque oĂč je voulais ĂȘtre journaliste, c'Ă©tait parce que je me disais qu'il n'y a pas de statut d'Ă©tudiant professionnel. On ne peut pas ĂȘtre Ă©tudiant et ĂȘtre payĂ© pour ça. Donc je vais devenir journaliste parce que c'est ce qui s'en rapproche le plus. Ça va me permettre de continuer Ă  creuser des sujets qui m'intĂ©ressent, Ă  aller explorer en dĂ©tail et Ă  apprendre des nouvelles choses. Puis ĂȘtre designer, c'est un petit peu ça aussi, parce que dans le design, il y a deux grandes phases. Et la premiĂšre phase, la phase de recherche, elle implique qu'on s'intĂ©resse Ă  fond au sujet pour lequel on va chercher ensuite Ă  rĂ©soudre un problĂšme. Il faut vraiment devenir expert de ce sujet en comprendre les tenants, les aboutissants, pour bien concevoir ensuite des solutions.

  • Speaker #0

    Évidemment. Ă©videmment. Et parmi toutes les expĂ©riences qui sont les tiennes, est-ce qu'il y en a une comme ça, rapidement, qui t'a peut-ĂȘtre un peu plus challengĂ©e que les autres ?

  • Speaker #1

    Je pense que le fait de devenir manager de cette Escape Game, directrice, ça a Ă©tĂ© un vrai challenge pour moi parce que la vie de chef d'entreprise, c'est un rythme trĂšs soutenu. Et puis cet Escape Game, alors moi, je n'Ă©tais pas fondatrice, je n'Ă©tais pas associĂ©e de l'entreprise, mais c'Ă©tait quand mĂȘme mon bĂ©bĂ©. J'avais fabriquĂ© les salles de mes mains, j'ai recrutĂ© ensuite l'Ă©quipe avec qui on travaillait pour faire tourner cet escape. Donc c'Ă©tait un peu mon bĂ©bĂ© aussi. Et donc j'y ai mis beaucoup de ma personne, beaucoup de mon temps, beaucoup de mon Ă©nergie. Et j'ai appris Ă©normĂ©ment parce que je n'avais jamais managĂ© une Ă©quipe avant. Ça a Ă©tĂ© une occasion de dĂ©couvrir beaucoup de choses, mais ça n'a pas toujours Ă©tĂ© Ă©vident.

  • Speaker #0

    Tu as été diagnostiquée autiste et TDAH vers la trentaine. ConcrÚtement, qu'est-ce que ça a changé pour toi, l'annonce de ce diagnostic ?

  • Speaker #1

    Ça a tout changĂ©. Ça a tout changĂ© parce que ça m'a permis de mettre des mots sur mon vĂ©cu et d'avoir une nouvelle grille de lecture finalement, de comprendre pourquoi je fonctionne, comment je fonctionne et donc de pouvoir adapter beaucoup mieux mon quotidien, tenir mieux compte de mes limites, mieux me connaĂźtre.

  • Speaker #0

    Avec des mots simples comme ça, c'est quoi la neuroatypie ?

  • Speaker #1

    La neuroatypie? La dĂ©finition, ça va ĂȘtre un fonctionnement neurologique diffĂ©rent de ce qu'on retrouve dans la majoritĂ© de la population.

  • Speaker #0

    Ok, c'est-Ă -dire ?

  • Speaker #1

    Et donc, on parle aussi de trouble du neurodĂ©veloppement, TND. Ça veut dire concrĂštement qu'on n'est pas cĂąblĂ© comme la plupart des gens. Notre cerveau, il ne fonctionne pas exactement pareil. Ok. Et ça se traduit de plein de façons. Alors lĂ , je ne vais pas rentrer dans le dĂ©tail, mais on va peut-ĂȘtre y venir un peu plus tard. Mais en tout cas, on n'est pas cĂąblĂ© comme la plupart des gens.

  • Speaker #0

    Dans ton cas, justement ? Comment l'autisme et le TDAH se manifestent au quotidien ? Est-ce que tu peux nous donner des exemples concrets au travail aussi, notamment, par exemple ?

  • Speaker #1

    Alors, le TDAH, un trouble de l'attention, dans mon cas avec hyperactivitĂ©, ça se manifeste par Ă  la fois un trouble de la concentration Ă  certains moments. Si je suis dans un environnement, par exemple, qui est bruyant, dans lequel il y a du passage, dans lequel il se passe des choses, mon attention peut ĂȘtre trĂšs trĂšs facilement dĂ©tournĂ©s, dĂ©bordĂ©s. Et ça va me demander des efforts considĂ©rables pour revenir Ă  ce que je suis en train de faire. Des fois, c'est aussi mon propre cerveau qui me coupe la parole, comme j'aime dire, parce que je suis en train de penser Ă  quelque chose, d'essayer de me concentrer sur quelque chose ou mĂȘme de parler Ă  quelqu'un, d'expliquer. Et puis, j'ai une pensĂ©e qui va venir et je vais avoir des grosses difficultĂ©s lĂ  aussi pour l'inhiber, pour m'empĂȘcher de penser Ă  cette autre chose. Et ça va venir perturber mon fond de pensĂ©e. Et pour tenir face Ă  ça, il faut faire preuve d'une grande concentration. Et c'est extrĂȘmement fatigant, c'est Ă©puisant en fait sur le long terme.

  • Speaker #0

    Et c'est des troubles qui peuvent arriver comme ça n'importe quand ?

  • Speaker #1

    C'est présent en permanence. AprÚs, quand je suis bien reposée, que j'ai bien dormi, que je suis dans un cadre qui ne me stimule pas trop sensoriellement, c'est plus facile à tenir que dans un environnement bruyant quand je suis fatiguée et que j'ai sauté un repas, ça c'est certain.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi tes défis que les autres ne voit pas forcément en fait ?

  • Speaker #1

    Tous ces efforts justement qu'on doit faire pour fonctionner, pour ĂȘtre fonctionnel. Tous ces efforts qu'on doit faire pour conserver la concentration dans des moments oĂč c'est important. Alors lĂ , j'ai donnĂ© l'exemple du TDAH. Dans le cas de l'autisme, ça peut ĂȘtre par exemple au niveau de la communication ou socialement. Je vais avoir beaucoup de difficultĂ©s Ă  comprendre le second degrĂ©. Je vais avoir des difficultĂ©s Ă  savoir quand est-ce que c'est mon tour de parler. Je vais avoir besoin de me projeter aussi, de connaĂźtre par exemple le dĂ©roulĂ© en avance d'une rĂ©union. Je t'ai demandĂ© en avance les questions pour notre interview, justement pour pouvoir m'y prĂ©parer. Et tout ça, c'est des choses qui sont invisibles en fait. Si je ne le dis pas en amont, les personnes ne peuvent pas deviner et forcĂ©ment, ça rend la vie beaucoup plus compliquĂ©e pour moi et beaucoup plus fatigante.

  • Speaker #0

    Oui, et puis moi, je peux témoigner là. C'est-à-dire que j'ai l'impression que je fais une interview comme toutes les autres, que tout se passe bien. Normalement, il n'y a aucune difficulté, aucune. Eh oui,

  • Speaker #1

    mais en fait, le fait d'avoir pu lire toutes les questions en amont, ça a permis à mon cerveau de se mettre en ordre de bataille, d'anticiper un minimum.

  • Speaker #0

    Et comment est-ce que tu fais toi aujourd'hui pour reconnaĂźtre finalement tes limites et s'en culpabiliser ?

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est une vraie question chez les personnes neuroatypiques, surtout quand, dans mon cas, on a Ă©tĂ© diagnostiquĂ© sur le tard parce qu'on passe beaucoup d'annĂ©es Ă  compenser finalement. Et donc, pendant des annĂ©es, je les ai repoussĂ©es, mes limites, en fait. J'ai fait comme si elles n'existaient pas parce que, justement, je ne savais pas qu'elles Ă©taient lĂ  et je finissais trĂšs rĂ©guliĂšrement en burn-out. Aujourd'hui, je dis souvent que j'ai appris mes limites, j'ai appris les contours de mes limites en me fracassant dessus. souvent douloureusement. Et aujourd'hui, je les connais mieux, Ă©videmment, parce qu'Ă  force de me retrouver dans des situations oĂč j'Ă©tais en burn-out, j'Ă©tais Ă©puisĂ©e, oĂč simplement c'Ă©tait trĂšs difficile, que ce soit Ă©motionnellement, que ce soit physiquement pour moi, j'ai appris Ă  reconnaĂźtre les signes. C'est lĂ  oĂč le diagnostic m'a Ă©normĂ©ment aidĂ©e, parce que justement, ça m'a permis d'accepter ces limites-lĂ . Ça a Ă©tĂ© un deuil aussi. Mais aujourd'hui, je suis beaucoup plus Ă  l'Ă©coute. de mes ressentis, parce que je sais que finalement, si mes limites, je ne les respecte pas, derriĂšre, je vais m'effondrer. Donc finalement, je vais mettre plus de temps Ă  m'en remettre. Donc je ne culpabilise plus parce que je sais que Ă©couter mes limites et en avoir conscience, c'est ce qui va me permettre de fonctionner correctement sur la durĂ©e.

  • Speaker #0

    Alors tu m'excuses parce qu'effectivement, tu as dĂ» voir que je rajoutais une ou deux questions comme ça, qui n'Ă©taient pas forcĂ©ment dans le conducteur. Donc j'espĂšre que je ne te perturbe pas trop et je vais justement le faire lĂ  exactement. Tu as parlĂ© de difficultĂ©s physiques et tu parles aussi de difficultĂ©s Ă©motionnelles. Ça veut dire quoi trĂšs concrĂštement quand tu parles de difficultĂ©s Ă©motionnelles ?

  • Speaker #1

    Ça veut dire qu'Ă©motionnellement, il va y avoir un traitement de l'information. Je ne vais pas rentrer dans des considĂ©rations neuropsychologiques trop compliquĂ©es. On va dire que le cerveau va traiter les informations chez les personnes autistes plus en profondeur que chez des personnes qui ne sont pas autistes. ou alors de façon diffĂ©rentes, mais en tout cas, dans mon cas, il y a certaines choses qui se passent dans la vie qui peuvent paraĂźtre anodines pour la plupart des gens et qui, moi, vont profondĂ©ment m'affecter. Et donc, ça va avoir psychologiquement un effet, parce que je vais... Oui, c'est ça, ça va avoir un effet qui va me conduire parfois Ă ... On parle d'effondrement autistique, on parle de crise, qui vont dĂ©clencher une crise chez moi parce qu'Ă©motionnellement, ça aura Ă©tĂ© trop fort.

  • Speaker #0

    Et quelles idées aujourd'hui reçues, toi, te semblent encore super présentes quand on parle de profils neuroatypiques ?

  • Speaker #1

    Les idĂ©es reçues, il y en a beaucoup. Il y a Ă©normĂ©ment de stĂ©rĂ©otypes qui existent. Ça va ĂȘtre une personne autiste n'est pas capable de regarder dans les yeux. Une personne autiste n'est pas capable de se faire des amis. Elle est forcĂ©ment asociale. Moi, ce n'est pas vrai. J'ai plein d'amis. Simplement, ça me fatigue beaucoup d'ĂȘtre dans des interactions sociales sur une durĂ©e trop longue. C'est quelque chose qui va trop me fatiguer. Qu'est-ce qu'on peut avoir d'autre ? Les personnes autistes ne sont pas capables de s'insĂ©rer dans le monde de l'entreprise, de travailler en Ă©quipe. C'est faux.

  • Speaker #0

    T'en es la preuve.

  • Speaker #1

    La preuve. Quoi d'autre ? Pour le TDAH aussi, pour les troubles de l'attention, on a souvent une image de personnes ayant un TDAH comme un petit enfant qui va se rouler par terre, qui va courir dans tous les sens. On peut avoir un trouble de l'attention et ĂȘtre... trĂšs immobile si on n'a pas d'hyperactivitĂ© associĂ©e, par exemple. Et mĂȘme cette hyperactivitĂ©, en fait, elle est aussi psychique. On peut trĂšs bien avoir l'air parfaitement calme vu de l'extĂ©rieur et en fait qu'Ă  l'intĂ©rieur de la tĂȘte, ça soit un vĂ©ritable jukebox, que ça fuse Ă  toute vitesse et notre cerveau nous fatigue.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, tu en parles facilement de ta neuro-atypie. Alors, c'est le thÚme aussi de l'épisode. Donc, effectivement, tu en parles et tu as accepté de le faire et je te remercie. mais avec avec ton entourage, tu disais que tu étais une personne qui était sociable. Est-ce que c'est un sujet dont tu parles pour justement que les personnes autour de toi arrivent à l'appréhender ?

  • Speaker #1

    Oui, tout Ă  fait. Aujourd'hui, j'en parle. J'en parle volontiers parce que finalement, ça me permet un peu de donner le mode d'emploi aux gens que je rencontre, de comment je fonctionne. Justement, de parler de mes limites aussi, que les personnes que j'ai face Ă  moi comprennent. LĂ , si je ne te regarde pas dans les yeux quand on discute, ce n'est pas par impolitesse, ce n'est pas parce que ça ne m'intĂ©resse pas. C'est juste que si je te regarde en mĂȘme temps qu'on parle, ça va ĂȘtre extrĂȘmement compliquĂ© pour moi de me concentrer. Ou alors, si je ne viens pas Ă  cet Ă©vĂ©nement, ce n'est pas contre vous. J'adorerais ĂȘtre lĂ , ça me ferait plaisir, mais je sais que socialement, ça va vraiment trop me fatiguer.

  • Speaker #0

    Clémence, on parle maintenant de ton job. Juste avant, c'est quoi au typique et pourquoi les avoir rejoints ?

  • Speaker #1

    Alors, Autypik, c'est une entreprise qui rĂ©volutionne le monde du travail. On aide les entreprises qui souhaitent ĂȘtre inclusives Ă  travailler autrement. Et comment ? En rendant le monde du travail plus inclusif pour les personnes autistes, TDAH ou qui ont un trouble dyslexie, dyspraxie, dyscalculie, etc.

  • Speaker #0

    Génial. Alors aujourd'hui, tu es chef product officer chez Autypik. C'est quoi ta mission trÚs concrÚtement ?

  • Speaker #1

    Ma mission, concrĂštement, ça va ĂȘtre dĂ©rouler... Toute la stratĂ©gie produit, on a toute une palette de services qu'on propose aux entreprises. Et donc, comment est-ce qu'on va articuler ces diffĂ©rents services les uns aux autres ? Comment est-ce qu'on va les prioriser ? Lesquels on va dĂ©velopper ? Dans quel ordre ? En fonction des besoins de terrain qu'on a identifiĂ©s. J'Ă©tais UX, donc je fais pas mal de recherche utilisateur, des entretiens avec nos clients et avec les candidates et les candidats. Je suis aussi responsable de la plateforme sur des aspects plus techniques. Puisque parmi nos services, on a une plateforme de recrutement qui permet Ă  la fois aux personnes neuroatypiques en recherche d'emploi de crĂ©er un profil. C'est un peu un anti-CV. Et puis qui permet aux entreprises qu'on a formĂ©es prĂ©alablement de dĂ©poser des offres d'emploi. Et donc ça permet de mettre en contact ces deux populations.

  • Speaker #0

    Et de les faire matcher. Il s'agit d'une plateforme qui est conçue donc, si j'ai bien compris, par et pour des personnes neuroatypiques. Merci. En quoi c'est, mĂȘme si ça peut paraĂźtre Ă©vident, mais je te pose quand mĂȘme la question, en quoi c'est diffĂ©rent d'un projet classique ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que la diffĂ©rence la plus importante vient du fait que c'est conçu par des personnes neuroatypiques. Au sein de l'Ă©quipe, la majeure partie de l'Ă©quipe est elle-mĂȘme neuroatypique. Tout d'abord, Mara, la fondatrice. Et ça veut dire que concrĂštement, Autypik, c'est une startup, mais on ne peut pas avoir un fonctionnement comme dans une startup classique, parce que sinon, on tiendrait pas six mois, sinon on exploserait en vol parce que justement, on a besoin de respecter nos limites.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que tu mÚnes la recherche utilisateur par rapport à ces publics qui sont aussi spécifiques ?

  • Speaker #1

    Comme n'importe quelle recherche utilisateur, vraiment. LĂ , mon travail de designer et de UX researcher, il s'est fait vraiment de la mĂȘme maniĂšre que pour n'importe quel autre public. L'idĂ©e, c'est de pouvoir comprendre les problĂ©matiques rencontrĂ©es. par ces populations-lĂ , que ça soit les managers, les recruteurs d'un cĂŽtĂ© ou les personnes neuroatypiques de l'autre. Et donc, vraiment pas de diffĂ©rence avec n'importe quelle autre population.

  • Speaker #0

    Et en quoi le fait de vivre toi-mĂȘme certains besoins t'aide finalement ou complique peut-ĂȘtre mĂȘme parfois les dĂ©cisions qui seraient Ă  prendre ?

  • Speaker #1

    Alors, on dit souvent dans le design qu'il faut prendre garde Ă  ne pas designer pour soi-mĂȘme, qu'on n'ait pas son propre public. Justement, dans ce cas-lĂ , je dirais que c'est plutĂŽt un atout. parce que ça me permet d'avoir une comprĂ©hension peut-ĂȘtre plus fine des difficultĂ©s rencontrĂ©es par des personnes autistes ou des personnes TDAH ou 10 sur le terrain, dans le monde de l'emploi. J'ai rejoint Autypik. La mission d'Autypik m'a parlĂ© parce que justement, moi-mĂȘme, j'ai Ă©tĂ© confrontĂ©e Ă  des difficultĂ©s dans le monde du travail.

  • Speaker #0

    Est-ce que le mot handicap t'a fait peur au début ou au contraire t'a permis de poser ce qu'on pourrait appeler un cadre et qu'il soit plus clair ?

  • Speaker #1

    Je pense que j'ai eu un travail de dĂ©construction Ă  faire vis-Ă -vis de ce mot-lĂ , parce qu'ayant fonctionnĂ© pendant plus de 35 ans sans savoir que j'Ă©tais neuroatypique et sans savoir que j'Ă©tais en situation de handicap, au dĂ©part, ça a Ă©tĂ© un peu difficile de l'accepter. Et en mĂȘme temps, les diagnostics m'ont apportĂ© un tel soulagement dans la comprĂ©hension de moi-mĂȘme que finalement, je ne dirais pas que ça m'a fait peur, mais il a fallu faire une sorte de travail de deuil. de la personne que je pensais ĂȘtre jusque-lĂ .

  • Speaker #0

    Dans ton parcours, est-ce qu'on t'a déjà refusé un poste ou une mission à cause de ton fonctionnement différent ?

  • Speaker #1

    Dans mon parcours, ça ne m'est jamais arrivĂ© qu'on me refuse un poste ou une mission. Mais je pense que jusque-lĂ , j'ai aussi fabriquĂ© mon propre cadre de travail pour Ă©viter ce genre de situation. J'ai toujours travaillĂ©, soit dans des milieux assez artistiques, le game design, le monde des escape games, le monde du jeu, Ou mĂȘme le monde de la radio, oĂč j'ai travaillĂ© dans des univers de radio, oĂč finalement on n'allait pas me juger, on n'allait pas me regarder de travers, parce que j'avais une façon d'ĂȘtre un peu diffĂ©rente de la norme. Je n'aime pas le mot norme, mais...

  • Speaker #0

    Moi non plus.

  • Speaker #1

    Mais que j'avais une façon d'ĂȘtre diffĂ©rente de la plupart des gens, on va dire. Et quand on travaille en radio en matinale, par exemple, on a des horaires complĂštement dĂ©calĂ©s par rapport au reste de la population. Et finalement, ça nous place un peu Ă  part. C'est vrai. Donc, j'Ă©tais toujours un peu Ă  part, mais il y avait toujours des bonnes explications dans mon mĂ©tier. Et je pense que ça aurait Ă©tĂ© beaucoup plus difficile si j'avais dĂ» travailler dans des environnements plus classiques. C'est clair. Par exemple, je ne sais pas, en banque ou... ou dans des entreprises plus classiques.

  • Speaker #0

    Je sais d'autant plus de quoi tu parles, puisque les matinales, j'en ai fait aussi. Effectivement, les horaires décalés, c'est quelque chose. Est-ce que tu penses, toi, que les métiers de la tech sont plus accueillants que d'autres pour les personnes neuroatypiques et pourquoi ?

  • Speaker #1

    Je pense que les mĂ©tiers de la tech peuvent faciliter, dans certains cas, les amĂ©nagements de postes, dans la mesure oĂč, quand on travaille derriĂšre un Ă©cran, C'est plus facile de faire du tĂ©lĂ©travail, c'est plus facile d'utiliser des outils numĂ©riques pour se simplifier la vie. Quand on travaille, par exemple, sur le terrain, quand notre mĂ©tier, c'est d'ĂȘtre dans une boutique face Ă  des gens, on va ĂȘtre en interaction avec des gens toute la journĂ©e, ça fait partie du poste. AprĂšs, chaque personne neuroatypique est diffĂ©rente. Ça fait partie des stĂ©rĂ©otypes contre lesquels on lutte chez Autypik. Il y a des personnes neuroatypiques dans tous les secteurs. Et donc, ce n'est pas parce qu'on est autiste qu'on ne peut pas ĂȘtre commercial ou qu'on ne peut pas ĂȘtre vendeuse ou qu'on ne peut pas ĂȘtre jardinier. Vraiment, on est prĂ©sent dans tous les secteurs et dans tous les mĂ©tiers.

  • Speaker #0

    Oui, sauf que maintenant, c'est diagnostiquĂ©. Donc, on en parle. On sait que c'est lĂ . Exactement. Qu'est-ce qui devrait changer selon toi dans les pratiques de recrutement, justement, pour rendre peut-ĂȘtre la tech encore un peu plus inclusive ?

  • Speaker #1

    Je pense qu'en France, on a encore une façon de voir les choses assez classique et c'est ce qu'on essaye de faire bouger justement avec Autypik en formant les recruteurs. On va avoir tendance Ă  regarder les CV, les parcours atypiques d'un Ɠil un peu suspicieux, en se disant cette personne n'a pas un parcours acadĂ©mique classique, elle ne rentre pas dans les cases, on s'en mĂ©fie. Alors que finalement, on va se priver de profils, de talents qui sont trĂšs rifs, qui peuvent apporter Ă©normĂ©ment au monde de l'entreprise, mais qui effectivement n'ont pas forcĂ©ment... Les diplĂŽmes qui vont bien parce qu'ils ont acquis leurs compĂ©tences autrement, en autodidacte ou par des projets personnels ou de maniĂšre dĂ©tournĂ©e. On est encore un petit peu trop Ă  l'ancienne, je trouve, en France.

  • Speaker #0

    Et est-ce que c'est au manager, finalement, de s'adapter au profil des collaborateurs qu'il a en face de lui ?

  • Speaker #1

    Oui, ça j'en suis convaincue et d'ailleurs au-delĂ  de la neuroatypie. Je pense que le rĂŽle du manager, c'est d'ĂȘtre lĂ  pourcoordonner et faire avancer ces Ă©quipes, leur permettre d'aller plus loin et de progresser. Et pour ça, ce n'est pas l'armĂ©e.

  • Speaker #0

    Est-ce que toi, tu as déjà bénéficié d'un accompagnement, d'un mentor ou d'un cadre, j'ai envie de dire, bienveillant qui t'a aidé quelque part à croire en toi et puis surtout à t'épanouir ?

  • Speaker #1

    Depuis que je suis chez Autypik, je suis dans le cadre le plus bienveillant qui soit et c'est un plaisir de travailler dans cette Ă©quipe. C'est aussi une nĂ©cessitĂ©, c'est ce que je disais tout Ă  l'heure. En fait, vu la composition de notre Ă©quipe, on est obligĂ© d'appliquer les mĂ©thodes qu'on enseigne Ă  nos entreprises. On est obligĂ© d'ĂȘtre inclusif avec nous, mĂȘme sinon on ne tiendrait pas le coup. Donc nĂ©cessairement, on est bien accueilli. AprĂšs, en termes de mentor, moi j'ai justement beaucoup progressĂ© en autodidacte. Je me suis beaucoup auto-formĂ©e, j'ai beaucoup appris sur le terrain et j'ai fait des rencontres formidables. je pense que La plus rĂ©cente et celle qui m'a apportĂ©, c'est cette formation justement au design UX-UI. J'ai fait un bootcamp chez Aeronac qui m'a permis de me remettre Ă  niveau et ça a Ă©tĂ© vraiment d'excellentes conditions.

  • Speaker #0

    Pour les personnes concernées qui n'osent pas se déclarer comme neuroatypiques en entreprise, toi tu dirais quoi ? Il y a un risque effectivement à le déclarer ou au contraire, ce sont de nouvelles opportunités qu'on va créer parce que les choses seront claires.

  • Speaker #1

    Je pense que ça dĂ©pend Ă©normĂ©ment de l'environnement, du cadre dans lequel on Ă©volue. Certaines entreprises vont ĂȘtre ouvertes Ă  ça, sont dans une dĂ©marche d'inclusion dĂ©jĂ , oĂč elles souhaitent ĂȘtre plus inclusives. Et c'est les entreprises avec lesquelles nous, on travaille chez Autypik, des entreprises qui veulent bien faire, qui veulent progresser, qui veulent ĂȘtre plus performantes aussi. Et donc, on les aide Ă  mettre en place concrĂštement cette diversitĂ© au sein de leurs Ă©quipes. En revanche, il y a des entreprises qui ne sont pas du tout sensibilisĂ©es Ă  ces questions. et dans lesquelles, si j'en parle Ă  mon manager, finalement, ça va ĂȘtre plus stigmatisant qu'autre chose, on va me regarder de travers. Donc, ça dĂ©pend vraiment des entreprises.

  • Speaker #0

    Évidemment, et de leur accueil. ClĂ©mence, qu'est-ce qui t'Ă©clate le plus dans ton job aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    La variété. Et je continue à apprendre. C'est trÚs différent finalement. Je n'ai aucune journée qui se ressemble. Je n'ai pas le temps de m'ennuyer.

  • Speaker #0

    Tu n'as pas le temps de t'ennuyer ? Par exemple, si je te parle d'une journée type, il n'y en a pas quoi ?

  • Speaker #1

    Non, vraiment, il n'y en a pas. On va dire que les moments oĂč je suis Ă  l'Ă©cole, peut-ĂȘtre ça va se ressembler. Les moments oĂč j'enseigne, les moments oĂč j'enregistre des Ă©missions, parce que c'est vrai qu'on n'en a pas parlĂ©, mais je fais des podcasts aussi Ă  cĂŽtĂ©, c'est encore diffĂ©rent. Et puis les moments oĂč je travaille pour Autypik, ou l'Ă©poque oĂč je faisais encore des missions de web design en indĂ©pendante, tout ça c'Ă©tait vraiment des journĂ©es Ă  chaque fois qui Ă©taient trĂšs diffĂ©rentes, parce qu'un jour tu es en recherche d'utilisateur, le jour d'aprĂšs tu vas ĂȘtre en rĂ©union stratĂ©gique, le jour d'aprĂšs tu vas ĂȘtre les mains dans Figma pour faire des maquettes, voilĂ , ça change tout le temps.

  • Speaker #0

    Et c'est ça qui est bien. donc la variĂ©tĂ© des tĂąches donc tu nous disais il y a quelques instants que peut-ĂȘtre que la journĂ©e qui se ressemble le plus c'est celle oĂč tu es Ă  l'Ă©cole et lĂ  c'est pas pour apprendre mais c'est pour enseigner puisque tu es enseignante en game design Ă  l'IM, l'institut de l'internet et du multimĂ©dia qu'est-ce que tu transmets Ă  tes Ă©tudiants ?

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que je leur transmets ? Je donne des cours ponctuels et sur des sujets bien prĂ©cis et n'ayant pas moi-mĂȘme une formation j'ai pas fait d'Ă©cole de jeux vidĂ©o Donc, je n'ai pas un savoir acadĂ©mique. Je pense que la chose principale que je leur transmets, c'est une expĂ©rience de terrain. C'est justement comment ça se passe concrĂštement dans le monde du travail. Je leur transmets Ă©videmment des compĂ©tences aussi qui concernent plus directement le game design, la narration, comment est-ce qu'on crĂ©e une expĂ©rience immersive, etc. Mais au-delĂ  de ça, je leur transmets aussi des informations plus concrĂštes sur qu'est-ce que c'est d'Ă©voluer dans le monde du travail. quand on est en entreprise, quand on est indĂ©pendant.

  • Speaker #0

    Et est-ce que là aussi, à tes étudiants, tu leur as parlé de ton profil ou pas du tout ? Oui,

  • Speaker #1

    ce n'est pas du tout quelque chose que je cache, parce que finalement, quand on est neuroatypique, ce n'est pas une maladie qu'on va attraper à un moment, on l'est depuis sa naissance. Et donc, je trouve que c'est important de l'assumer pour donner à voir aussi des modÚles différents, des stéréotypes qu'on a encore trop souvent actuellement. Et comme je sais que le profil que j'ai, ne correspond pas aux stéréotypes de personnes autistes ou de personnes TDAH qu'on peut voir dans les médias, dans les films, dans les séries. Je trouve ça important de le montrer.

  • Speaker #0

    Oui, tu as raison. Tu es aussi, tu l'as dit briÚvement, podcasteuse, et cela depuis plusieurs années, bienvenue au club. Qu'est-ce que ce média t'a apporté personnellement ?

  • Speaker #1

    J'adore parler dans un micro.

  • Speaker #0

    Et ça s'entend !

  • Speaker #1

    Et j'adore parler tout court. Quand les sujets m'intĂ©ressent, je suis quelqu'un de trĂšs bavard. Tu m'as bien fait de me dire qu'on va calibrer la taille des rĂ©ponses parce que sinon, je pense que ce podcast aurait pu durer une journĂ©e complĂšte. Mais justement, la pratique de ce mĂ©dia m'a appris aussi Ă  ĂȘtre plus concise dans ma façon de m'exprimer.

  • Speaker #0

    Ça, tu le trouves, ça ?

  • Speaker #1

    Ça, je le trouve. Ça a Ă©tĂ© pendant ma formation. Mais finalement, quand on est en radio, il faut rĂ©ussir Ă  capter l'attention, il faut rĂ©ussir Ă  la maintenir. Et puis, il y a quelque chose de plus intime aussi, je trouve, dans les formats audio, une proximitĂ© avec les auditrices, avec les auditeurs qui, moi, me plaĂźt beaucoup. Et puis, Ă©videmment, le direct qui va apporter...

  • Speaker #0

    L'adrénaline !

  • Speaker #1

    L'adrénaline !

  • Speaker #0

    Oui, c'est vrai. Je te rejoins Ă©videmment complĂštement. Si toi, tu devais crĂ©er un podcast 100% personnel aujourd'hui, peut-ĂȘtre autour de la neurodiversitĂ©, il ressemblerait Ă  quoi ?

  • Speaker #1

    figure-toi que c'est une question que je me pose assez rĂ©guliĂšrement j'ai pas le temps pour ça aujourd'hui mais peut-ĂȘtre un jour ça arrivera je pense que ça serait un podcast de conversation ça serait un podcast de discussion et d'Ă©change pour parler de nos expĂ©riences respectives avec les personnes que j'inviterais au micro parce que finalement chaque personne neuroatypique est diffĂ©rente Ă  son propre vĂ©cu et la neuroatypique ces personnes s'expriment aussi de maniĂšre diffĂ©rente Donc, je trouve ça passionnant d'explorer justement les diffĂ©rences d'une personne Ă  l'autre.

  • Speaker #0

    Tu as de nombreuses casquettes, on l'a vu dans ta vie pro. Est-ce qu'on t'a déjà dit que tu étais trop, trop quelque chose, trop rapide, trop intense, trop dispersé ? Et puis, comment est-ce que tu arrives à gérer ça si c'est le cas ? Tout le temps.

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qu'on m'a beaucoup répété, pas que dans ma vie pro, dans ma vie en général. Et trop dispersé, mais tu vois, pendant trÚs longtemps, tu as eu un aperçu de mon parcours. J'ai fait la version rapide, mais les recruteurs regardaient mon CV vraiment de travers et me disaient...

  • Speaker #0

    Vous ne savez pas ce que vous voulez dans la vie. J'ai été, mais si, justement.

  • Speaker #1

    Un CV, ça tient sur une page, Clémence. C'est ça.

  • Speaker #0

    C'est trĂšs dur pour moi de le faire tenir sur une page. Comment je gĂšre ça ? Aujourd'hui, j'en suis arrivĂ©e Ă  un stade de ma vie oĂč justement le diagnostic m'a permis d'assumer ça aussi. Et ce n'est plus quelque chose dont j'ai honte. Je suis fiĂšre de la façon dont je fonctionne parce que dĂ©jĂ , elle est comme elle est et je ne vais pas changer. Je ne vais pas chercher Ă  me rĂ©trĂ©cir pour entrer dans des cases. Et en fin de compte, je sais que c'est aussi un atout, que c'est une force. Et donc, si des personnes trouvent que c'est trop pour elles, eh bien, tant pis pour elles, en fait, qu'elles aillent chercher moins ailleurs.

  • Speaker #1

    Tu as bien raison. Si tu avais un message à faire passer à toutes les personnes neuroatypiques qui peuvent nous écouter aujourd'hui, ce serait quoi ce message ?

  • Speaker #0

    Ça serait, ayez confiance dans vos capacitĂ©s. Ce n'est pas parce qu'on vous dit que vous n'ĂȘtes pas comme tout le monde que vous ĂȘtes moins, justement. Vous ĂȘtes des personnes simplement diffĂ©rentes. et c'est une... Vraie force, c'est une vraie ressource. Ça peut ĂȘtre un vrai atout dans le monde professionnel.

  • Speaker #1

    Et tu en es la preuve vivante. Un immense merci à toi Clémence.

  • Speaker #0

    Merci Ă  toi pour ton accueil.

  • Speaker #1

    Un grand merci pour ton témoignage. Pour celles et ceux qui se reconnaissent dans ce que Clémence vient de partager, il existe aujourd'hui des ressources, des dispositifs pour mieux vivre sa singularité au travail. Des bilans, par exemple neuropsychologiques pour poser un diagnostic, c'est hyper important. Des associations comme CAPU, la maison de l'autisme, ou MTN, la maison des TDAH et neuroatypiques. Des aménagements possibles aussi avec l'aide des RH ou de la médecine du travail, des communautés de plateformes comme Otypique pour s'outiller et se sentir surtout moins seul. Et pour en savoir plus de maniÚre générale sur les métiers et les transformations du numérique, rendez-vous sur un site internet concepteurdavenir.fr. A trÚs vite pour un nouvel épisode de Tech it different. Salut Clémence !

  • Speaker #0

    Salut !

  • Speaker #2

    C'était Tech It Different, diversité et inclusion dans les entreprises de la tech.

Chapters

  • Diagnostic et Changement

    00:03

  • DiversitĂ© et Inclusion

    00:58

  • Parcours de ClĂ©mence

    01:48

  • Évolution vers le Design NumĂ©rique

    04:49

  • Comprendre la Neuroatypie

    07:00

  • DĂ©fis Invisibles des Neuroatypiques

    09:26

  • ReconnaĂźtre ses Limites

    12:16

  • Parler de NeurodiversitĂ©

    14:44

  • Mission chez Otypique

    15:24

  • Recherche Utilisateur et NeurodiversitĂ©

    18:17

  • Acceptation du Handicap

    18:49

  • RĂŽle du Manager

    23:10

  • DĂ©claration de Neuroatypie en Entreprise

    24:16

  • VarietĂ© et Épanouissement au Travail

    25:14

  • Enseignement et Partage d'ExpĂ©rience

    26:19

  • Assumer sa DiffĂ©rence

    30:03

  • Message aux Neuroatypiques

    30:33

  • Ressources et Support pour Neuroatypiques

    31:06

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