Bénédicte DelelisBonjour, je m'appelle Bénédicte Delelis et vous écoutez Tous Saints. Dans ce podcast de famille chrétienne, je vous raconte l'histoire de saints et de témoins de la foi récent qui nous donnent envie, à leur suite, de grandir en sainteté et en amour de Jésus. Dans cet épisode, je vais vous raconter l'histoire du bienheureux Frédéric Ozanam. C'est un nom bien connu, celui du fondateur des conférences Saint-Vincent de Paule. On sait moins que derrière ce nom se cache un tendre époux, un passionnant professeur d'université, qui ne se contenta pas de parler de sa foi, mais sut la mettre en acte. Ce samedi de janvier 1841, Paris recroquevillé, grelotte sous une bise glaciale. Les étudiants de la Sorbonne, rassemblés dans l'amphithéâtre bourdonnant, attendent un nouveau professeur au nom encore peu connu, Frédéric Ozanam. « Il a tenu une chaire de droit commercial à Lyon » , murmure-t-on, « et il enseigne le français au collège Stanislas » . Ce matin-là, le jeune professeur de 27 ans, docteur en droit et en lettres, tout fraîchement reçu, Au concours de l'agrégation, doit offrir sa première leçon en littérature étrangère. Derrière la porte qui le sépare de la salle bruissante de monde, il tremble. Ses mains moites réajustent sa cravate sombre, son visage est pâle comme la lune. Il a demandé à de nombreux amis de venir le soutenir, tant l'épreuve lui semble rude. Avec les étudiants, tous les professeurs de la Sorbonne seront là pour juger la nouvelle recrue. En un cours, leur opinion sera faite. À cette époque très anticléricale dans les milieux intellectuels, Ozanam veut non seulement réussir sa prestation, mais rendre visible, au sein d'une université laïque, l'apport du christianisme à la civilisation européenne. Son cœur bat violemment. Son avenir tout entier dépend du succès de cette conférence. Entrez, monsieur, c'est l'heure. Frédéric franchit la petite porte, pénètre dans l'arène, devenu silencieux en un instant. Il s'assied au fauteuil de l'enseignant et lève le regard. Dans la salle éclairée, trois cent paires d'yeux le fixent, le soupèsent, l'analysent. « Il n'a pas beaucoup d'allure » , pensent les uns. « Qu'il semble gauche et embarrassé » , songent les autres, circonspects. Il est vrai qu'Ozanam ne brille ni par une haute taille, ni par une quelconque élégance. Ses yeux myopes se perdent dans le vague, sa chevelure brune en désordre confère à son visage tendu un teint de cire. Le pauvre, devant une si grande assemblée, croit défaillir. Ses lèvres se paralysent, le silence s'étale gênant, on frétille sur les chaises. Va-t-il parler ? Et Ozanam enfin se lance. Le début est lent, légèrement poussif, mais peu à peu, le professeur fait pénétrer toute l'assistance dans le grand et beau voyage de sa pensée. Il se réchauffe, s'enflamme, la bonté transfigure ses traits. La leçon s'achève dans une verve qui déchaîne l'enthousiasme du public. À la fin, accablé de fatigue, pleurant et riant à la fois, Ozanam tombe dans les bras de ses amis. « Tu as réussi ! Tu as réussi ! » lui assure-t-on. Frédéric était né en Italie en 1813 et avait été élevé à Lyon. Son père, médecin infatigable, soignait gratuitement les pauvres. Sa mère, très chrétienne, visitait avec d'autres paroissiennes les familles indigentes. Le grand frère était prêtre, le petit frère serait bientôt médecin. Plusieurs autres frères et sœurs, dont la chère Elisa, son premier professeur, étaient morts prématurément. Frédéric, adolescent, avait connu une douloureuse crise dans sa foi. Autour de lui, au collège, très peu croyait en Dieu. Le jeune garçon, lui, voulait croire. Mais pendant de longs mois, des doutes violents l'assaillirent, plongeant son âme dans l'angoisse. À 15 ans, dans cet état de désolation intérieure, il entra en classe de philosophie où il rencontra l'abbé Noireau, un professeur-prêtre qui, selon ses dires, le sauva en mettant dans ses pensées l'ordre et la lumière. Ozanam alors fit cette promesse à Dieu, voué ses jours au service de la vérité qui lui donnait la paix. À 18 ans, Frédéric arrive à Paris pour faire son droit. La capitale lui semble une effrayante Babylone païenne et débauchée. À l'université, un étudiant lui jette un jour à la figure une phrase qui lui perce le cœur. C'est vrai, le christianisme a autrefois fait des prodiges, mais aujourd'hui, le christianisme est mort. Vous qui vous vantez d'être catholique, que faites-vous ? Où sont les œuvres qui démontrent votre foi et qui peuvent nous la faire respecter et admettre ? Ozanam Tressaï. Ce jeune a raison. Au travail, secourons notre prochain comme le faisait Jésus, mettons notre foi sous la protection de la charité. Avec plusieurs amis de la paroisse Saint-Étienne-du-Mont, Ozanam participe à une réunion organisée le 28 avril 1833. Il a 20 ans. Sœur Rosalie Rendu, membre des Filles de la Charité, fondée par Saint Vincent de Paul et Sainte Louise de Marillac, sert les familles pauvres du quartier de la montagne Sainte-Geneviève. Elle les connaît bien et sait qui a besoin d'aide. Avec son conseil, la décision est prise. Ses jeunes amis, pour affermir et réchauffer leur foi qu'ils sentent fragiles et souvent menacée, se retrouveront une fois par semaine afin de visiter les pauvres. « Nous ne voyons Dieu que des yeux de la foi , écrit Frédéric. Notre foi est si faible, mais les pauvres, nous les voyons des yeux de la chair. Ils sont là et nous pouvons mettre le doigt et la main dans leur plaie, tomber à leurs pieds et leur dire « Vous êtes pour nous les images sacrées de ce Dieu que nous ne voyons pas. » Et ne sachant pas l'aimer autrement, nous l'aimerons en vos personnes. Les conférences Saint Vincent de Paul sont nées. En quelques années, elles se répandent dans toute la France, puis au-delà de ses frontières. Frédéric n'a pas conscience qu'une œuvre particulière est née. Il étudie, approfondit ses amitiés, cherche sa vocation. Il souffre de ne se sentir appelé clairement nulle part. Prêtre ? Religieux ? « Mariée ? » Il oscille. L'abbé Noiro le verrait bien mariée et lui présente Amélie sous la croix. À la première rencontre, Frédéric est extrêmement touché par la tendresse de la jeune fille envers son frère handicapé. Il se revoit. Frédéric se décide et la demande en mariage. Les amoureux se marient juste après la fameuse première leçon à la Sorbonne. En 1841. Ensuite, c'est le bonheur limpide du voyage de noces, l'idéalisation du premier amour. Amélie fait deux fausses couches, retourne chez ses parents pour se remettre, tarde à rentrer à Paris où son mari l'attend. Il se fâche, demande pardon de son impatience. Elle revient, l'amour s'approfondit. Une petite Marie naît enfin en 1845. Frédéric, pendant ce temps, écrit de nombreux articles, poursuit ses recherches, ses visites aux pauvres, prie, donne ses cours, s'épuise au travail. Il s'émerveille de sa femme, de sa fille, devient de plus en plus doux. Sa santé cependant se dégrade. Il meurt à l'âge de 40 ans, le 8 septembre 1853. C'est moi que vous demandez ? écrit-il « Je viens, Seigneur » . Cher Frédéric Ozanam, apprends-nous à rencontrer Dieu dans le visage des pauvres, des personnes âgées, des familles en difficulté. Donne du courage aux professeurs, de la tendresse aux couples et aux parents. Aide les jeunes à trouver leur vocation et à être inventifs pour tenir dans la foi et la charité. Merci pour votre écoute. Si ce podcast vous a plu, n'hésitez pas à vous abonner, à partager cet épisode sur les réseaux sociaux et à mettre 5 étoiles et des commentaires sur Apple Podcasts et Spotify. Vous pouvez aussi retrouver ces podcasts dans le livre Tous Saints, publié aux éditions Mme en librairie à partir du 12 septembre. Et puis, si ce n'est déjà fait, Courez écouter les autres épisodes de ce podcast et découvrez tous les podcasts de Famille Chrétienne. Un beau jour, Maman prie, Sexo, Prières catholiques et d'autres encore. Merci et au prochain premier mercredi du mois pour un nouvel épisode.