Speaker #0Nous poursuivons, après quelques temps de pause, cette série d'épisodes sur les ressentis des victimes d'inceste. Une série qui rentre dans ce que la victime d'inceste vit au plus profond d'elle-même. au-delà des chiffres. J'ai la haine, j'ai la rage, c'est le thème de l'épisode d'aujourd'hui. C'est ce que j'ai ressenti, moi aussi, la haine, ou en l'occurrence plutôt la rage. Et il m'a fallu du temps pour comprendre profondément ce à quoi ça correspond, au-delà de la colère. J'ai compris que derrière la haine, la rage, se trouvent des ressentis mélangés de détresse, d'angoisse. de désespoir, de vulnérabilité et d'impuissance. J'ai compris aussi que ces ressentis étaient trop douloureux à sentir et ressortaient sous cette forme de rage, de haine, mais sans être véritablement digérés, évacués, régulés. Et j'ai compris que finalement, cela me maintenait dans le même état, sans défense et sans reconnexion à ma puissance. Et enfin, que tout cela parle de liens, de trahison des liens les plus premiers. Et c'est ça que je vais vous partager et vous expliquer dans cet épisode. Bienvenue dans le quatrième épisode, J'ai la haine, la rage, quatrième épisode de la deuxième série sur les ressentis du traumatisme, du podcast Traumatisme et Renaissance, l'inceste, par Hélène Dujardin. j'ai la haine la rage mais de quoi ou contre qui quelle forme ça prend la haine ressentie est à la hauteur de ou des agressions qui ont été subies une façon de dire de dénoncer les violences une forme de colère viscérale face à une atteinte de son intégrité une forme de tentative de se défendre en quelque sorte la haine peut-être celle tournée contre l'agresseur lui-même après l'inceste et dans le cas de l'inceste c'est particulièrement pernicieux car il y a un mélange de sentiments un conflit insoluble entre la haine ressentie et l'amour contre l'agresseur qui est un membre de la famille C'est tellement psychiquement inconcevable que cette haine peut également prendre d'autres formes. On va le voir ensuite. La haine peut être tournée contre les parents, agresseurs ou non, selon la position qu'ils ont prise par rapport à l'agression et à l'agresseur. La parole de l'enfant a-t-elle été entendue par le parent ? A-t-il été cru, défendu, soutenu ? Comment les parents... ont-ils réagi par rapport à la famille à l'agresseur ont-ils pris position ou ont-ils choisi de ne pas prendre position sont-ils dans le déni par rapport à ce qu'il s'est passé y a-t-il un silence qui a été maintenu et cette rage haine peut se manifester se transformer en une rage contre une personne avec qui on a aujourd'hui un lien intime un compagnon une compagne elle peut se manifester aussi contre ses amis et même contre les autres en général et enfin elle peut se manifester comme un ressenti sourd sombre noir latent prêt à exploser quand l'occasion se présente une forme de sentiment de rage mais permanent d'une tension d'une lutte Et nous pouvons avoir alors une réaction vive quand quelque chose contre soi, entre guillemets, quelque chose qui semble menaçant, insécurise, ne va pas dans notre sens et qui nous donne le sentiment d'être attaqué. Alors la haine, la rage ressortent. Les autres ne me respectent pas, se dit-on. Les autres m'ennuient, pour le dire poliment. Nous pouvons sortir de nos gonds, faire preuve d'impulsivité, de crise de colère. On peut sortir cette rage, cette haine à l'extérieur contre l'autre. Ou nous pouvons fulminer intérieurement, car la colère ne peut pas sortir. Elle est très mélangée intérieurement à d'autres ressentis. Et ça, c'est très angoissant. En toile de fond, il y a un manque de confiance aux autres, une perte de confiance en l'homme, en l'humanité. Une croyance selon laquelle le genre humain est mauvais. Une forme de lutte. contre les autres ce sont là toutes les formes que peuvent prendre la haine et la rage avec dans le fond une cause qui est similaire l'inceste mais alors que raconte cette haine cette rage Alors là, vous allez me dire, mais quand même, elle est un peu bête, comme si je vous parlais d'une évidence. Alors oui, il y a cette évidence, cette colère, cette haine évidente. Mais je veux aussi vous parler de ce qu'il y a dessous, en dessous de la haine, de ce pourquoi cette haine est aussi forte, en particulier dans l'inceste. Et ça parle du lien, du lien à l'autre et du lien à la vie. En effet, l'enfant vit dans l'inceste une succession de trahisons majeures. Parce qu'il est trahi par celui ou celle qui représente sa base de sécurité, si l'inceste a été commis par le parent. Le parent par qui la sécurité normalement se construit, permettant à l'enfant de construire sa sécurité intérieure. Ou parce qu'il est trahi par quelqu'un avec qui il se sent en sécurité, en qui il a confiance dans le noyau de la famille. Une trahison majeure parce que l'enfant est trahi dans sa croyance viscérale qu'un parent, au sens donc premier ou au sens large du terme, ne peut pas faire de mal à son enfant. Parce qu'aussi, il est trahi dans sa croyance que le monde est bon et généreux, une croyance en la vie, en l'humanité. Parce qu'enfin, il est trahi dans l'intention du lien. L'enfant recherche de l'affection, de la tendresse, de la reconnaissance. Et il se trouve en retour attaqué, utilisé et dépossédé dans son intimité. Ces trahisons entraînent chez l'enfant et chez les enfants violentés et abusés des sentiments douloureux, dont la haine, une colère viscérale à la hauteur de la trahison. D'autres ressentis, sentiments s'y mélangent. Le désespoir, la détresse, l'impuissance, la vulnérabilité, la dévalorisation. Et c'est tout cela que raconte la haine. toutes ces trahisons. Et pour aller un petit peu plus loin et comprendre un peu plus, je vais m'appuyer à présent sur les propos de Bruno Clavier, un psychanalyste qui a beaucoup écrit sur le sujet de l'inceste, et lui-même subit l'inceste. Alors voilà ce que dit Bruno dans son ouvrage l'inceste ne fait pas de bruit, répondant à la question qu'il se pose lui-même, pourquoi ces violences de l'inceste sont aussi dévastatrices. Et donc, je cite, ces abus, ces viols, viennent remettre en cause, au plus profond de l'être, la force de vie engagée dans les relations entre les êtres humains. Ils s'appuient sur leur désir fondamental de jouir, de vivre en liberté avec l'autre. Bruno précise ensuite dans le cas de l'inceste La victime est enfermée dans un conflit insoluble entre l'amour et la haine pour son agresseur. Cette violence s'empare donc de la victime et aliène. ce qu'il y a de plus précieux pour un individu, sa liberté absolue, en adéquation avec son plaisir, son besoin d'amour. Et il dit encore, les violences sexuelles remettent en cause le principe d'existence de l'être, en conséquence, elles génèrent chez les victimes une angoisse incommensurable de mort. Autrement dit, la haine parle donc au fond d'une insécurité dans le lien à l'autre brisé, d'une confiance, d'une foi, d'un lien en la vie qui a été rompu et d'une cassure profonde dans le lien à soi. Et je vois la haine, la rage à la fois comme une tentative de sortie de ces ressentis très douloureux et aussi une tentative de se garder à la surface de l'eau pour ne pas plonger. Ce que je nomme ici est extrêmement douloureux. Et si vous vous reliez à ce que je dis, j'imagine que cela peut avoir des résonances sur vous, comme victime d'inceste ou tout simplement comme être humain. Alors je vous propose de prendre soin de nous, de nos systèmes nerveux. et de faire une petite pause respiration alors là tout simplement je vous propose de lâcher le contenu de lâcher les mots de lâcher ce qui vient d'être dit et de vous concentrer sur votre respiration Vous pouvez également réajuster votre position. Vous pouvez être, au moment où vous écoutez ce podcast, debout, assis, voire allongé. C'est aussi possible. En tout cas, de vous arrêter à l'endroit où vous êtes. Ensuite, vous allez poser vos deux mains à plat l'une contre l'autre sur votre ventre. Vous relâchez un petit peu les épaules. Vous pouvez, si cela est possible, fermer les yeux également. Vous sentez les mouvements de l'air dans votre corps. et ensuite je vous propose de prendre une grande inspiration, vous inspirez vous allez ensuite retenir l'air légèrement tracter tout le corps, sortir tout ce qu'il y a à l'intérieur souffler, expirer et ensuite une petite pause de récupération C'est ce qui se passe. Et une nouvelle fois, vous inspirez. Vous retenez l'air, vous couvrez légèrement tout le corps et vous lâchez, vous extériorisez tout ce qui a besoin de l'être à l'expiration. Voilà, très très bien. petite pause d'intégration à l'écoute n'hésitez pas si besoin est de prolonger cette pause avant de poursuivre votre écoute et d'ailleurs alors que vous poursuivez votre pause je vous dis également que je vais faire une version plus longue de cette respiration à la semaine prochaine dans un nouvel épisode Nous allons revenir à présent à notre podcast et à la suite. Et cela vous permet, cette pause de respiration vous permet d'évacuer, d'évacuer les maux grâce à la respiration. C'est important, ce traumatisme a été profond. Donc il s'agit à la fois de comprendre ce qui se passe, mais aussi de pouvoir vous transmettre des outils, de pouvoir vous aider à votre propre renaissance, et à l'instant T, déjà, de prendre soin de vous. On est vraiment là pour ça. Alors justement, restons sur la lecture biologique de ce qui se passe en lien avec le système nerveux. Celle-ci va donner une autre forme de compréhension et va vous amener ensuite vers le processus de voie de sortie. Je prends appui ici sur la théorie polyvagale et la lecture biologique du traumatisme. Je vous en ai expliqué les principes dans les premiers épisodes du podcast. Je vous indiquerai les références en description de cet épisode. Lors d'un traumatisme et notamment l'inceste, le système nerveux a disjoncté. basculant dans l'état du dorsal un état de figement de coupure pour nous permettre de survivre au traumatisme car à ce moment-là il nous a été impossible de nous défendre de combattre la haine est comme une tentative de voie de sortie du traumatisme et c'est ici pour moi une première lecture biologique de la haine ou de la rage à savoir Que la haine, la rage est une tentative de sortie donc du traumatisme, une tentative de retrouver l'accès au sympathique, un état de mobilisation dans lequel justement on peut se défendre. Une tentative de se défendre, de faire sortir cette colère qui n'a pas pu s'exprimer à l'époque de l'inceste ou qui n'a pas été entendue, accueillie pleinement. Et cette rage sort de façon impulsive, réactive, solitaire, même si elle implique l'autre. Elle tourne rond, sans lien avec l'autre, et elle reboucle de façon répétitive. Et c'est comme ça que la victime repasse sans cesse par les mêmes scénarios de haine, d'impulsion, de sentiments latents. Peut-être vous comprenez mieux ce qui se passe également pour vous. Alors, la haine, la rage, c'est aussi une protection par rapport à des ressentis douloureux d'angoisse, d'impuissance, de fragilité, de vulnérabilité. La haine, la rage peuvent être des remparts pour ne pas sentir ce qui, au fond, est encore plus douloureux, comme une forme d'agitation plus-plus pour éviter de se confronter à l'angoisse, l'impuissance, la fragilité, la vulnérabilité, toutes ces sensations. d'angoisse qui confinent à la mort et qui sont extrêmement effrayantes. À un niveau profond, ces ressentis douloureux nous reconfrontent même potentiellement à ce que nous avons ressenti bébé. En effet, le bébé vit régulièrement des expériences de besoin, des périodes de douleur corporelle. Il doit appeler, crier pour manifester son besoin. pour avertir l'autre. Son cerveau n'étant pas complètement mature pour accueillir et supporter les émotions, et c'est vraiment ça un point très important, donc il attend que le parent soulage, contienne, mette du sens. Il apprend à supporter le froid, dur, de l'absence et le chaud de la présence, les deux polarités. Il développe ainsi sa fenêtre de... tolérance des sensations et de l'inconfort. Mais parfois petit, ce seuil a été dépassé, une attente trop longue, des sensations insupportables à supporter, une impuissance à réguler les sensations. Et c'est alors que le bébé peut ressentir cette forme de rage. L'enfant a mal au ventre, c'est comme un volcan, ils se sont détruits, ils se sont abandonnés, ils se sont perdus, il a peur, il ne se sent pas aimé, il est seul, désespéré, et il entre dans la rage. Cette construction de fenêtre de tolérance dépend, on le voit, des premières interactions, de l'état affectif et psychique de notre mère et de notre père. Et le point est que l'inceste nous reconnecte à cette rage première. Je reviendrai là-dessus, sur le sujet de la fenêtre de tolérance. dans un autre épisode. Alors comment sortir de la haine et de la rage ? Pour se défaire de la haine, on aura besoin de retraverser ces douleurs de détresse, de manque, de terreur, vécues dans la solitude, mais maintenant accompagnées d'un autre, d'un autre humain, empathique, profondément relié à vous, sincère et respectueux, pour retraverser ce qui n'a pas pu être traversé tout seul. ces douleurs cette impuissance et pour pouvoir s'ouvrir ouvrir sa vulnérabilité avec l'autre à un niveau plus profond on aura besoin de penser ses blessures dans le lien aux parents Enfant et bébé, ce sont tous ces endroits de dissociation à réassocier dans un lien de sécurité à l'autre, petit à petit, dans un goutte à goutte, et cela permettra de trouver, de retrouver un lien de sécurité à l'autre, un lien de sécurité également de soi à soi. Et cette sécurité va permettre de lâcher cette haine. Ces retraversées se font en thérapie. Elles incluent un aspect biologique, corporel et de lien avec l'autre. La parole ne suffit pas ici. Et puis, et c'est un deuxième volet, la colère, oui, aura besoin d'être exprimée, entendue. Que l'autre, et en l'occurrence le thérapeute, puisse être là, vraiment là, prenant la mesure. avec la victime d'inceste de ce qui s'est passé la colère bloquée lors du trauma pourra alors ressortir aussi physiquement mais accompagnée et en sécurité il n'est pas facile parfois que cette colère sorte tant elle est socialement et dans l'éducation parfois comprimée et non autorisée et cela permettra de sortir énergétiquement Cette facette du trauma est de se reconnecter à ce que j'appelle un bon sympathique, donc à un principe de défense et se reconnecter à toute sa puissance. Et aussi, et c'est un autre volet, on peut s'aider par des pratiques corporelles de danse, par exemple, de tantra également, quand c'est bien fait, avec un cadre respectueux, donc de faire un travail corporel. sur les limites, sur la notion d'espace, la possibilité de dire non, l'affirmation, etc. Pour moi, le travail de reconquête corporelle fait vraiment partie du processus de guérison. Ces processus sont complexes et l'idée n'est pas de se fixer sur le fait d'éradiquer la haine ou la rage, mais plutôt de réapprendre à s'aimer, à développer un nouveau lien. à soi, de devenir entre guillemets un bon parent pour soi. Vraiment respectueux. Le point est là, on sait, c'est pas évident, c'est un cheminement dans lequel on a besoin d'être accompagné. Voilà, c'est la fin de cet épisode. Si vous avez aimé cet épisode, n'hésitez pas à le partager autour de vous et à vous abonner. Et surtout, ce serait génial si vous pouviez prendre quelques minutes pour mettre un un 5 étoiles sur Apple Podcast ou Spotify ou toute autre application de podcast ça va énormément aider ce podcast merci à vous et je vous retrouve mardi prochain pour un nouvel épisode d'ici là prenez bien soin de vous