- Stéphanie
Bonjour, c'est Stéphanie. Bienvenue sur le podcast « Tu joues ou quoi ? » dédié à l'univers du jeu de société. Suivez-moi, je vous emmène dans les coulisses à la rencontre des acteurs de ce monde très créatif. Cette semaine, c'est l'association AccessiJeu qui est mise à l'honneur. Fondée en 2015, AccessiJeux a pour but de rendre le loisir du jeu de société plus inclusif. En plus d'animations en festival et d'actions de sensibilisation, les salariés et bénévoles gère une ludothèque et adapte de nombreux jeux pour les déficients visuels. L'association possède aussi une branche édition. Au Festival Paris et Ludique, début juillet, j'ai rencontré Benoît Tonnelier, salarié d'AccessiJeux, en charge notamment de la ludothèque et de l'édition. Alors je suis avec Benoît, Benoît Tonnelier sur PEL, au stand AccessiJeux. Donc bienvenue sur le podcast, Benoît. Merci. Merci de bien vouloir répondre à mes questions. Donc toi, tu es salarié chez AccessiJeux. Tu t'occupes à la fois de la ludothèque et de l'édition, c'est bien ça ?
- Benoit
Oui, c'est ça. Je fais à peu près tout dans l'association, la partie ludothèque, principalement la partie édition et boutique, mais on fait un peu tout dans cette association.
- Stéphanie
Avant de parler de ce que tu fais plus particulièrement, déjà j'aimerais bien qu'on revienne sur l'histoire de cette association. L'association a 10 ans cette année. AccessiJeu, c'est né comment et pourquoi ?
- Benoit
L'association a été créée par Xavier, qui est l'actuel président de l'association. ... Xavier Mérand, qui était malvoyant, perd au fur et à mesure la vue et est joueur. Il a commencé par mettre des gros stickers bien voyants pour les chiffres qu'il n'arrivait pas à lire, puis a découpé les cartes pour qu'elles soient différentes, pour les repérer, puis à faire plein de trucs pour lui personnellement. Et puis, il s'est dit, ce que je fais, il y a peut-être moyen de le faire un peu plus pour plus de monde et que ça pourrait intéresser plus de monde. donc il a créé l'association il y a 10 ans. Comme il dit au début, il ne savait pas ce qu'il allait faire avec l'association. Est-ce qu'il allait être éditeur, boutique, ludothèque, formation ? Et puis, on fait tout ça. La seule chose qu'on ne fait pas, c'est barrageux.
- Stéphanie
L'idée de départ, de toute façon, c'était de rendre accessible le jeu. Donc, à partir de ce moment-là, c'était forcément imaginer comment le rendre accessible.
- Benoit
C'était imaginer et alors ça a vraiment tâtonné. Les premières adaptations, elles étaient faites avec des classeurs et du découpage. maintenant on a Des stickers sans relief qu'on fait directement imprimer auprès d'un imprimeur spécialisé pour le relief. Ça a amélioré sur les processus de fabrication, la façon de coller les aimants et compagnie. On a amélioré tout ça, mais au début, c'était vraiment fait à l'arrache comme on pouvait.
- Stéphanie
OK. Alors l'association aujourd'hui, c'est combien d'adhérents, de bénévoles, de salariés ?
- Benoit
C'est cinq salariés maintenant. Nous sommes cinq salariés. Nous sommes en permanence à l'association 4 services civiques qui nous accompagnent tout au long de l'année. Alors, ils changent régulièrement, mais... Ils sont là pour avec nous les animations, les adaptations, etc. Et c'est entre 10 et 15 bénévoles qui sont là avec nous sur les événements, sur les festivals, sur les adaptations qui viennent nous aider tout au long de l'année. Et en termes d'adhérents, je crois qu'on est à 150 ou 200 adhérents à l'association. Après, ce n'est pas très représentatif le nombre d'adhérents. Ce qui serait intéressant de savoir, c'est la portée de nos jeux, de notre action. C'est-à-dire que nos jeux sont présents dans des ludothèques, dans des médiathèques, dans des bars à jeux. et chez des particuliers dans toute la France, dans toute la francophonie même. Donc le nombre d'adhérents de l'association en elle-même, c'est pas...
- Stéphanie
C'est combien de personnes ça touche.
- Benoit
Oui, c'est combien de personnes ça touche. Je n'ai pas le chiffre exact, mais on touche beaucoup plus de personnes que nos 100 adhérents.
- Stéphanie
Bien sûr, à partir du moment où vous êtes présent en ludothèque ailleurs.
- Benoit
Je suis présent dans beaucoup, beaucoup de ludothèques, beaucoup de municipalités.
- Stéphanie
Quelles sont les activités d'AccessiJeu ? Parce qu'elles sont vastes. On fait tout.
- Benoit
Tout est possible. Alors à la base, on est un petit local dans le 12e arrondissement où on a plus de 2000 jeux. On est ludothèque de quartier, donc les gens peuvent venir jouer chez nous. N'importe qui peut venir chez nous. On n'est pas obligé de montrer sa carte d'handicapé pour pouvoir passer la porte. On a 2000 jeux et parmi ces 2000 jeux, on en a 500 adaptés aux déficiences visuelles. Donc ça, c'est des jeux qu'on a pris dans le commerce auprès des distributeurs ou des éditeurs ou qu'on a achetés et qu'on a adaptés. sur lequel on a rajouté des stickers, des aimants, des choses comme ça. Donc ça, on en a 500 dans la ludothèque qui sont adaptés. Donc les gens peuvent venir jouer avec, venir les emprunter. Et l'idée, c'est nous, c'est que quand un non-voyant passe la porte de la ludothèque et qu'il y a des voyants qui sont en train de jouer, on mélange tout le monde et tout le monde joue ensemble. L'idée, c'est surtout pas de faire le club de jeux de non-voyants.
- Stéphanie
Oui, bien sûr. L'idée, c'est quand on parle d'inclusion, c'est qu'on puisse jouer ensemble, les uns et les autres.
- Benoit
Beaucoup de personnes voyantes n'osent pas passer la porte de nos ludothèques Non, on ne va pas piquer la place de non-voyants. Non, au contraire, passez la porte et vous découvrez ce que c'est de jouer avec des non-voyants, travailler ensemble et voilà. Donc ça, c'est la partie ludothèque de l'association. On a aussi une partie boutique en ligne sur les 500 jeux qu'on a. Il y en a quelques-uns qui ont des coûts d'adaptation qui sont assez réduits parce que l'adapter des jeux coûte très cher. Pour certains jeux, un jeu qui coûterait 15 euros, on a 30 ou 40 euros d'adaptation. Donc ça, on ne le propose pas à la boutique. On ne va pas le mettre dans notre boutique. Mais les jeux qui ont des coûts réduits, qui sont intéressants, on les propose directement sur notre site internet. Donc les gens peuvent les acheter sur notre site internet. On en a une petite centaine de jeux qu'on a comme ça.
- Stéphanie
Il y a quoi par exemple que vous auriez pu adapter ? Là,
- Benoit
on vend énormément, mais comme toute boutique de jeux, c'est Trio. Trio, je pense qu'il doit être entre 14 et 15 euros en boutique à peu près. Et nous, adapté, il est à 18. Sachant que si on est adhérent à l'association, chez nous, ils sont 20% de remise. Donc il est quasiment au prix normal.
- Stéphanie
Au même prix. Alors comment vous avez fait pour adapter Trio ?
- Benoit
Trio, on a rajouté des petits stickers sans relief dessus, qui ne sont pas du braille, parce qu'il n'y a que entre 5 et 10% des non-voyants qui lisent le braille. Donc malheureusement, pas assez de monde lit le braille. Donc nous, on a inventé un petit système. On a révolutionné le monde. On a inventé les chiffres romains. Un rond avec un point, c'est 5. Un carré avec un point, c'est 10. Et après, il y a des petits points en dessous. Par exemple, si j'ai un 8, j'ai un rond avec un point. Puis en dessous,
- Stéphanie
trois petits points. D'accord.
- Benoit
Et ça, c'est assez facile à mémoriser. Ils mettent un petit peu de temps sur la première partie, il faut quelques minutes pour comprendre comment ça marche. Mais une fois que c'est compris, tout le monde peut jouer à tous nos jeux.
- Stéphanie
Voilà, donc là, l'intérêt d'un jeu comme ça, c'est qu'on peut le jouer effectivement avec un voyant. Lui, il joue avec sa version traditionnelle, mais le fait qu'il y ait les stickers en plus... Voilà,
- Benoit
les stickers sont transparents, ils sont discrets. Le nombre de fois où moi je fais jouer ces jeux-là sur des festivals, et les gens me disent « Ah, mais je n'avais pas vu, à quoi ils servent les petits stickers là ? » On explique à ce moment-là. En général, on fait jouer les gens comme ça, on ne leur dit pas. Et puis, ils disent au bout d'un moment, mais à quoi ça sert les petits trucs en relief ? Et donc, à ce moment-là, on leur dit, c'est pour que les non-voyants, vous voyez, il y a un non-voyant qui arrive, il va pouvoir jouer avec vous.
- Stéphanie
Donc là, en fait, c'est pareil. C'est une activité de l'association. Finalement, il y a les bénévoles ou les salariés. Enfin, ensemble, vous travaillez sur comment on adapte ces jeux.
- Benoit
C'est ça. On a donc 500 jeux adaptés comme ça. Donc, on fait des fiches d'adaptation où on explique comment on a adapté tel jeu, comment on a adapté tel jeu, comment on a adapté tel jeu. Donc quand on a des jeux en boutique, comme Trio que je disais qu'on vend sur notre site internet, un nouveau bénévole ou un nouveau service civique qui arrive chez nous, ou un nouveau salarié même, arrive, prend la fiche d'adaptation de Trio, et regarde, on lui dit, collez un sticker ici, collez tel chiffre là, collez ça. Il suit la procédure et puis il peut du coup vendre ce jeu directement en boutique.
- Stéphanie
Ok, il y a différents types de déficiences visuelles. Ouais. Donc j'imagine qu'on n'adapte pas forcément pareil.
- Benoit
Alors nous, on part sur tous nos jeux adaptés pour les personnes non voyantes.
- Stéphanie
D'accord.
- Benoit
Donc. On a pris le pire cas. On a quelques jeux pour les malvoyants, mais c'est assez rare. On n'adapte pas de jeu pour les malvoyants. On repère des jeux, on dit, tiens, celui-là, un malvoyant peut y jouer. On a aussi quelques jeux, nous, on dit qu'il faut un voyant à la table. C'est-à-dire que des jeux comme Top Ten ou comme The Crew, où en fait, les missions au centre de la table ou les cartes textes de Top Ten, eh bien, on la lit, un voyant. Et par contre, nous, on a adapté les numéros de Top 10 et le non-voyant peut jouer totalement tout seul.
- Stéphanie
Oui, d'accord. Est-ce qu'il y a des systèmes de reconnaissance vocale où on pourrait lire des textes, justement ?
- Benoit
Là, on peut passer sur une autre partie de notre activité, qui est l'édition.
- Stéphanie
OK, oui, bien sûr. Là,
- Benoit
nous, on édite des jeux. Donc, on a quatre jeux qu'on a édités. Donc, on a édité Mo, on a édité Quarto, on a édité Lucky Numbers et TTMC. Et TTMC, c'est justement ça. TTMC, c'est un jeu de quiz où on pourrait se dire, le non-voyant, il peut totalement jouer parce qu'on lui pose la question et il répond. Simplement qu'il y a une autre partie du jeu qui est de poser la question aux autres. Cette action-là n'était pas possible avant avec le TTMC. Nous, on a redité TTMC. Et donc, dans le TTMC, il y a des puces NFC qu'on passe sur son téléphone. Donc, il n'y a même pas besoin de viser comme un QR code, qui est un peu difficile pour un non-voyant quand il doit viser le QR code avec son téléphone. J'imagine, oui. Et elle a juste à poser la puce sur son téléphone et ça va lire une question à voix haute. Et donc, il participe aussi à la partie « je pose la question à la personne » .
- Stéphanie
D'accord. Donc là, c'est adapté d'une autre manière.
- Benoit
adapté d'une autre manière et ça permet que les non-voyants joue en mode je pose la question.
- Stéphanie
Alors comment ça se passe justement de passer du côté de l'édition ? C'est-à-dire que là, vous retravaillez aussi avec les éditeurs ?
- Benoit
On va chercher des jeux qui ont du très gros succès. On ne va pas rééditer, on ne va pas éditer un jeu, un auteur qui se lance, même un auteur reconnu d'ailleurs, qui se lance et qui voudrait sortir son jeu, sa première édition avec nous, on ne fera pas. Nous, ce qu'on fait, c'est que ce sont des jeux qui sont vendus à énormément d'exemplaires et qu'on va chercher où ils viennent nous voir. Il y a eu les deux cas de figure. Pour l'instant, on a arrêté les éditions, elles sont un peu en pause actuellement. On parlera de l'avenir plus tard, mais pour l'instant, les éditions sont un peu à l'arrêt. Mais les quatre jeux qu'on a choisis, c'était des jeux qui ont eu de très gros succès et qu'on cherchait, qui étaient des cibles qui étaient demandées aussi par notre public. Parce que nous, maintenant, avec des années d'expérience, on a repéré le public qu'on avait. On n'a pas de public hardcore gamer. On ne va pas avoir un joueur de Ark Nova à la Léodotec non voyant. Ça n'existe pas.
- Stéphanie
On n'est pas sur du gros jeu expert.
- Benoit
On n'est pas sur du gros jeu expert, ça n'existe pas. Les joueurs experts de nos voyants, je les connais en France, ils sont cinq.
- Stéphanie
Oui, il faut aller vers le grand public. De toute façon, si l'idée c'est de jouer ensemble...
- Benoit
Tout à fait. Donc nos jeux qu'on a ciblés, on nous a demandé pendant des années un jeu de loto et un jeu de sous-de-coup. On a trouvé le Keynumbers, on a été voir l'éditeur qui nous disait, moi je vais faire une version Deluxe. On a dit, nous on va faire une version Access et si on la faisait ensemble. Oui,
- Stéphanie
bien sûr.
- Benoit
Donc la version Deluxe, c'est la version Access.
- Stéphanie
Donc c'est du partenariat après ?
- Benoit
C'est des partenariats. Il y a des partenariats différents sur chaque édition, mais c'est des partenariats. Tous ces jeux-là, ils ont été faits grâce à un mécène quand même. C'est-à-dire qu'il faut bien être conscient que ça coûte très cher à faire ces méthodes adaptées. Donc du coup, on a eu un mécène pour chaque édition. Alors c'était des mécènes différents, mais on a eu chaque fois un mécène en fonction des éditions pour adapter les jeux.
- Stéphanie
Qui sont ces mécénatres ?
- Benoit
C'est AG2R La Mondiale pour trois d'entre elles et c'était la Fondation de France pour le quatrième.
- Stéphanie
D'accord, ok. Donc là, il y a un travail aussi finalement de prospection.
- Benoit
De recherche de mécénat et de financement, d'appel à projet. On a une personne qui fait quasiment que ça chez nous.
- Stéphanie
Et combien ça coûte alors justement ? Par exemple, TTC, le refaire ?
- Benoit
Globalement, ça coûte 25 et 30 000 euros de plus par rapport à la production initiale.
- Stéphanie
D'accord. Ah oui, quand même. Donc c'est quand même un sacré coût. Et c'est comme ça que vous les éditez ? À combien d'exemplaires ?
- Benoit
Ça dépend desquels. TTMC, Quarto et Lucky Numbers, ils ont des portées internationales. Donc, ils sont présents dans d'autres pays. Nous, on distribue nos jeux. Donc, en fait, les partenariats avec les éditeurs sont très différents. Mais il y a un réseau de boutiques de basse vision qui existe dans le monde pour les boutiques, pour les personnes malvoyantes. Et nous, on ne se recupe que de ce réseau-là. Le réseau boutique P, boutique de jeux, tout ça, on laisse ça à l'éditeur original du jeu. D'accord. Donc, il a ces boîtes de jeux que lui, il distribue dans ses différents réseaux. Donc ça, nous, on ne s'en occupe pas. Mais Quarto et le King Numbers, eux, ils ont des portées internationales. Nous, on les a vendus en Espagne, en Angleterre, en Angleterre, en Allemagne, en Italie. Donc ceux-là, ils sont portés international. TTMC, il est franco-français. Et donc, on a fait beaucoup plus de productions.
- Stéphanie
C'est francophone,
- Benoit
bien sûr. Ce n'est même pas francophone parce que j'avais appris qu'il y a une version belge, parce que les questions sont spécifiques.
- Stéphanie
Oui, c'est sûr. Même, je pense qu'au Québec, c'est un peu différent. Oui, bien sûr. Et est-ce que justement il y a d'autres associations en Europe, ailleurs, qui font un peu le même travail que vous finalement ?
- Benoit
On est un peu les seuls, et pas les seuls, c'est pas tout à fait vrai. Déjà il y a toutes les ludothèques qui adaptent leurs propres jeux pour leur public. Donc nous on connaît plein de ludothèques qui ont adapté des jeux parce qu'elles avaient du public non voyant, et elles adaptaient avec les moyens du bord. Donc en général elles reviennent nous voir et elles disent « Waouh, c'est bien ce que vous faites, on va faire comme vous, on va adapter comme vous. » Mais il faut quand même saluer qu'il y en a qui font des super boulots. Typiquement la ludothèque en Belgique qui s'appelle Éclat. qui a une ludothèque de presque autant de jeux que nous, mais c'est des exemplaires uniques, ils sont magnifiques ce qu'ils font, c'est vraiment un travail d'enfance, c'est pas du tout la même chose que nous, c'est-à-dire que nous on a une vertu derrière pour les revendre, pour proposer au plus grand nombre. Eux ils font vraiment des exemplaires uniques.
- Stéphanie
Ah oui d'accord.
- Benoit
Voilà, donc c'est pas du tout le même coût de production, les jeux qu'ils font ils doivent coûter 6 fois le prix d'un jeu, donc voilà.
- Stéphanie
Ouais d'accord.
- Benoit
Ça c'est du cas par cas, et après il reste une entreprise au Texas qui vend des kits d'adaptation pour Brailliste. anglophone donc c'est un peu spécifique et à peu près c'est tout oui c'est ça c'est quand même il n'y a pas un grand réseau non non il n'y a pas grand monde dès qu'on se présente dans les différents pays dans le monde les gens sont impressionnés là on a des contacts avec la hollande avec enfin plein de pays voilà c'est un peu précurseur quand même il ya déjà il ya dix ans finalement pour ça ouais
- Stéphanie
parce qu'on répondait à un besoin c'est ça bien sûr et alors à quoi il faut être vigilant
- Benoit
pour rendre un jeu accessible en fait parce que nous forcément quand on y voyait on se rend pas compte c'est très facile de se piéger c'est à dire que régulièrement de moins en moins mais régulièrement pendant longtemps dans l'association on prenait un jeu et mécaniquement l'adapter et on faisait jouer et en fait la problématique c'est que un jeu qui joue en un quart d'heure normalement s'il joue en deux heures et demie parce qu'il y a de la prise d'infos toutes les trois secondes qui doivent être prises parce que qu'est ce qu'il a le joueur d'en face qu'est ce qu'il a le joueur d'à gauche qu'est ce qu'il a le joueur en face Et là, le jeu dure deux heures au lieu de durer un quart d'heure. Ce n'est plus le même jeu, ce n'est plus le même plaisir de jeu. Et du coup, c'est un échec. Nous, on a l'exemple fréquent, on l'a encore eu la semaine dernière, des jeunes qui sont venus nous voir en disant qu'on a adapté Azul. Nous aussi, on l'a adapté. On l'a adapté Azul, mais on ne le fait pas jouer. On estime qu'il n'est pas adapté chez nous. Parce que les petits pions, c'est facile à mettre des stickers dessus. Les pions, pour qu'ils ne bougent pas, c'est facile. Il y a des plateaux qui existent déjà.
- Stéphanie
Avec des cases un peu plus près.
- Benoit
Donc avec des cases, tout ça, c'est facile. La seule problématique, c'est quand c'est à toi de jouer. Il faut que tu prennes toutes les informations de toutes les usines et en plus de tous les joueurs autour, où ils en sont sur toutes les informations. Une fois qu'on t'a donné toutes les informations, ton cerveau a explosé, tu ne te souviens plus où tu en es.
- Stéphanie
Oui, je vais bien croire.
- Benoit
Donc le jeu n'a plus d'intérêt en termes d'adaptation.
- Stéphanie
Ce n'est pas fluide en fait.
- Benoit
Ce n'est pas fluide, ce n'est pas agréable. Et en fait, le non-voyant et même les voyants autour de la table ne prennent aucun plaisir au jeu.
- Stéphanie
Bien sûr, oui.
- Benoit
On a plein de jeux, nous. où on s'est dit, tiens, c'est facile, on l'adapte, vas-y, on prend le matériel, on modifie et ça fonctionne. Non, on prend le modifié, ça fonctionne, mais pas bien.
- Stéphanie
C'est ça. Mal.
- Benoit
Donc ça ne marche pas.
- Stéphanie
Ça n'a pas d'intérêt.
- Benoit
Ça n'a pas d'intérêt, ça rallonge le jeu. On estime que si ça rallonge de 10-15%, ça va. Si ça rallonge un petit peu la prise d'information, ça va.
- Stéphanie
Ok. Donc en fait, pour rendre accessible un jeu, j'imagine que ce qu'on rend accessible, c'est l'ergonomie, c'est les contrastes aussi peut-être pour les malvoyants ?
- Benoit
Pour les malvoyants, nous on met vraiment des repères tactiles principalement.
- Stéphanie
Des repères tactiles ?
- Benoit
Ouais, repères tactiles principalement. On ne change pas les règles. En général, on essaie de ne pas changer les règles. Au pire, on modifie quelques petites choses, mais pas grand-chose.
- Stéphanie
Mais là aussi, il faut les rendre accessibles.
- Benoit
Alors les règles, pour les rendre accessibles, dans chacune de nos boîtes. Alors, pour nos jeux édités, au dos de la boîte, il y a un QR code qu'on scanne, qui va ramener vers une vidéo en audio, qui va expliquer les règles, et qui en plus, pour un autre type de handicap, est en langue des signes.
- Stéphanie
D'accord.
- Benoit
Nous aussi, on travaille pas que sur le handicap visuel, on travaille sur d'autres handicaps. Et donc nos jeux édités, ils ont des vidéos règles en langue des signes.
- Stéphanie
D'accord.
- Benoit
Pour les autres jeux, à l'intérieur de la boîte, dans la boîte, il y a un QR code qui ramène vers la règle en audio.
- Stéphanie
Ok, donc là déjà on est sûr, au moment où la règle est accessible, le tag est en degré là.
- Benoit
Donc la règle est accessible, voilà.
- Stéphanie
Donc une fois qu'on a eu ça, voilà.
- Benoit
Une fois qu'on a fait ça, après en termes de matériel, nous, la majorité de nos jeux, c'est ce que j'explique, c'est quasiment que des jeux de cartes. Je veux dire, en termes de plateau, ça doit être 5%. Parce que dès qu'on commence à avoir des plateaux, il y a de la prise d'information. Il y a des jeux, justement, ce que j'expliquais tout à l'heure avec des voyants à la table. Typiquement, les jeux de course, c'est assez facile parce que quand ça vient à ton tour, on va dire Bob, il est à quatre cases de toi, Roger, il est quatre cases derrière toi et Henri, il est six cases devant. Et donc là, c'est facile. La représentation dans sa tête, elle est facile. Par contre, si c'est un plateau où il y a quatre pistes de score et qu'il y a une roue crantée et que voilà…
- Stéphanie
Des placements de dés ou je ne sais quoi.
- Benoit
Des placements de dés, ça n'en fait pas. Merci. Donc ça on n'adapte pas et voilà c'est pas adaptable. Les jeux de cartes, dès qu'il y a des couleurs et chiffres on peut faire assez facilement. Assez facilement mais il peut y avoir l'échec que j'expliquais tout à l'heure de la prise d'informations qui compliquerait le jeu. Mais dès qu'il y a couleurs et chiffres on fait assez facilement. Et après il y a quelques jeux où on met des nomenclatures. On crée des codes avec nos stickers. Par exemple si on joue à Loup-Garou pour une nuit. Donc Loup-Garou typiquement c'est un jeu qui pour nous est totalement inaccessible pour les non-voyants. mais Loup-Garou pour une nuit est totalement accessible Et Loup-Garou pour une nuit, pour les personnages qui sont les mêmes que Loup-Garou, le voleur, on va mettre une sorte de petite fenêtre tactile, parce que le voleur passe par la fenêtre. La voyante, on va mettre deux stickers ronds pour faire des lunettes, pour celui qui voit. On va faire des stickers avec des représentations et des analogies, pour que ce soit plus facile entre le sticker et l'effet.
- Stéphanie
Ok. Il y a aussi, je te parlais de cartes, de bords arrondis, parfois c'est important aussi. Alors c'est important pour quoi, par exemple ?
- Benoit
Ça peut être important pour certains jeux où on a deux informations à gauche et à droite. qui sont à peu près la même. Et du coup, en fait, vu que le non-voyant, il ne sait pas quelle est la carte, il l'a prise à l'endroit, à l'envers. En arrondissant un coin, on lui dit la carte, elle sera à l'endroit. Si en Ausha droite, c'est arrondi. Et du coup, il prendra la carte toujours dans le bon sens. Et si on met des stickers à gauche et à droite, on lui dit à gauche, tu as telle info et à droite, tu as telle info. Si ce n'est pas arrondi, ce n'est pas différencié la gauche et la droite. Il peut prendre la carte complètement à l'envers.
- Stéphanie
Bien sûr. Donc il y a ça, il y a le côté relief, donc ça tu l'as dit, c'est important.
- Benoit
Et après, il y a quelques jeux, je disais qu'on faisait quand même quelques jeux de plateau. Il y a quelques jeux de plateau où on rajoute des aimants. On met des aimants sur le plateau, on met des chemins guidés avec des lignes en relief qui permettent de se retrouver sur le plateau.
- Stéphanie
C'est Quarto aussi, vous avez, je crois, c'est ça, des aimants.
- Benoit
Quarto, lui, on l'a réédité. Donc, lui, on l'a refait réimprimer, enfin, ressorti réimprimé. J'exagère sur Quarto, ce n'est pas tout à fait vrai. On refait fabriquer avec des aimants directement intégrés dans le plateau.
- Stéphanie
C'est ça, pour éviter que les pièces ne bougent.
- Benoit
Les pièces ne bougent pas
- Stéphanie
Est-ce que vous êtes sollicité pour amener votre expertise, votre expérience aussi à d'autres éditeurs, à différents éditeurs ? Parce qu'il y a aussi la gamme Access Plus maintenant chez Asmoday.
- Benoit
Access Plus qui est sur des jeux justement pour les troubles cognitifs. On travaille ensemble, on travaille régulièrement avec Access Plus. Mais eux travaillent sur tout ce qui est troubles cognitifs. Donc ils ont une gamme de jeux, c'est Asmoday qui a créé le studio. C'est une gamme de jeux, les succès d'Asmoday qui est refait. avec différents niveaux de difficultés, des simplifications de règles, des modifications de règles, des choses comme ça, pour les personnes qui ont des troubles cognitifs. Nous, on travaille régulièrement avec ces outils-là parce qu'on travaille avec d'autres handicaps. On ne travaille pas que la déficience visuelle. C'était la base de la création de l'association, mais l'association, comme on dit toujours, elle s'appelle AccessiJeux, pas CiciJeux.
- Stéphanie
Oui, bien sûr.
- Benoit
Donc, on travaille avec d'autres handicaps à l'association. Et donc, ces outils, c'est vraiment des très bons jeux pour les troubles cognitifs. Donc ça, on travaille avec eux. Pour tout ce qui est des éditeurs, clairement, on ne leur demande pas de nous sortir des jeux adaptés directement. pour les déficients visuels. D'accord. On le voit bien, j'ai dit tout à l'heure que ça coûtait une fortune de le faire. Par contre, on est là... Oui,
- Stéphanie
mais parfois, des stickers, ça peut suffire.
- Benoit
Ça coûte très cher, les stickers. Oui. Chaque petit sticker coûte 10 centimes.
- Stéphanie
Ah oui, d'accord.
- Benoit
Quand on a un 8, je le disais tout à l'heure, c'est un rond avec un point et trois petits stickers en dessous. Une carte 8, elle coûte 40 centimes.
- Stéphanie
D'accord, ok.
- Benoit
Ça va vite. ça va très vite donc non on ne demande pas aux éditeurs de rendre des jeux accessibles aux déficients visuels par contre on leur demande d'être attentifs au contraste aux couleurs, aux daltoniens. On travaille nous avec l'union des éditeurs de jeux, on a été missionné par l'union des éditeurs de jeux pour travailler sur un label qui s'appelle le label Colorblind, Colorblind Friendly, où on labellise des jeux. pour qu'ils soient accessibles aux daltoniens. Donc les éditeurs nous envoient des boîtes de jeux, on les check, on vérifie les contrastes, les symboles, tout ça, pour qu'ils soient accessibles aux daltoniens.
- Stéphanie
C'est quoi la différence avec ColorAds qui existe aussi ?
- Benoit
Ah, ColorAds ! Oh, on peut faire un débat là !
- Stéphanie
Ah, allez-y !
- Benoit
ColorAds est un produit qui est distribué par une entreprise portugaise, qui permet d'être licencié par les éditeurs, donc les éditeurs achètent la licence et peuvent utiliser ces symboles-là. ColorAds, donc, c'est un outil qui est intéressant. parce que ça fonctionne pas mal, les codes couleurs sont intéressants. Nous, on a des problèmes sur la latéralité. C'est-à-dire que les symboles sont orientés au bas gauche droite. Donc sur un jeu de cartes, si ta carte est devant toi ou devant un autre joueur, tu ne vas pas lire la même information de couleur.
- Stéphanie
D'accord.
- Benoit
Donc ce n'est pas impeccable. Et en plus, il n'y a pas de notion de contraste. C'est-à-dire que si tu mets le label colorade, mais que tu mets tes symboles en blanc sur du jaune...
- Stéphanie
Oui, ça ne marche pas.
- Benoit
Oui, mais t'es colorade.
- Stéphanie
Oui, d'accord. Ce que tu veux dire, c'est que ça ne pousse pas assez le truc pour être complètement accessible.
- Benoit
C'est-à-dire que ça ne va pas répondre automatiquement. Il y a des daltoniens qui ne vont pas pouvoir jouer avec des colorades.
- Stéphanie
D'accord.
- Benoit
Il y a des daltoniens qui ne vont malheureusement pas pouvoir jouer.
- Stéphanie
Parce qu'on a différentes sortes aussi de daltonisme.
- Benoit
Ben voilà. Donc nous, le label sur lequel on travaille, on essaie de travailler pour quelqu'un qui voit en or et blanc.
- Stéphanie
D'accord.
- Benoit
Que tout le monde puisse jouer avec tout.
- Stéphanie
On travaille sur des contrastes.
- Benoit
On travaille sur des contrastes, voilà. Les contrastes, c'est le plus important. C'est presque... Les symboles, bien sûr, c'est important. Mais le contraste, enfin voilà, ce que je te dis, c'est que tu peux être labellisé Colorad en mettant tes symboles blancs sur du jaune.
- Stéphanie
Oui, d'accord.
- Benoit
Et personne ne voit rien.
- Stéphanie
Personne ne s'en rend compte.
- Benoit
Il y en a. Il y a des exemples de jeux qui sont sortis avec du Colorad qu'on ne voyait pas.
- Stéphanie
D'accord. Tu veux balancer ? Non,
- Benoit
je les aime bien.
- Stéphanie
Le label, tu me disais, il s'appelle comment ?
- Benoit
Colorblind Friendly.
- Stéphanie
Colorblind Friendly. Et là, vous travaillez avec l'AEH.
- Benoit
C'est l'AEH qui a le label. C'était un label qui a été créé par Oppo Prod initialement et qui s'est dit je ne peux pas labelliser les jeux des autres éditeurs, ce qui est un peu logique. Donc il a redonné le label à l'UEJ et l'UEJ nous a missionné, nous, en tant qu'association indépendante, pour labelliser les jeux des éditeurs. Donc il y a plusieurs jeux qui ont ce logo-là, les jeux de chez Repoprod principalement, et puis il y a pas mal d'éditeurs qui ont fait la démarche de labelliser. Et après, nous, outre cette démarche de labelliser les jeux pour le Colorblind, régulièrement les éditeurs, ça fait 10 ans qu'on est dans le milieu du jeu, on arpente les festivals toute l'année, on les voit régulièrement, ils savent ce qu'on fait et ils viennent nous voir régulièrement et ils disent « Regarde ! » J'ai tel jeu qui sort. Qu'est-ce que tu en penses ? Si tu changes ça, ça corrige ça. Si tu changes ça, ça change ça. Moi, l'exemple, je le cite souvent, il est un peu ancien, mais Oka Luda avait un jour, une année, sorti un jeu avec un plateau. Il me dit, il faut que j'imprime quelque chose au dos du plateau. Qu'est-ce que je peux faire ? Le plateau était très joli. De l'autre côté, je lui dis, tu fais le même plateau, mais avec un contraste différent, plus forcé. Je lui dis, ça va peut-être servir à deux personnes, mais l'accessibilité ça se compte pas au nombre de personnes
- Stéphanie
Oui, et puis un plateau recto verso.
- Benoit
Peut-être que ça ne te coûte rien de l'imprimer. Donc, tu changes les contrastes, ça ne va pas te prendre longtemps en termes de graphisme. Et puis, de l'autre côté, au dos, tu l'imprimes. Donc, il l'a imprimé au dos. Je n'ai jamais eu personne qui est venu me voir en me disant « Super, j'ai le plateau au dos qui était contrasté. » Mais ça a peut-être servi à quelqu'un d'autre.
- Stéphanie
Ça peut faire une différence.
- Benoit
Ça peut faire une différence. Et ça ne lui coûtait pas plus. On ne demande pas justement qu'ils mettent leurs stickers en relief, des choses comme ça. mais sur du graphisme, sur des choses comme ça qui ne coûtent pas beaucoup plus cher, pensez au contraste, pensez au pic.
- Stéphanie
On doit faire passer un message sur ce qu'on peut faire de simple. En fait, c'est ça. Le truc le plus simple à mettre en œuvre, c'est ça.
- Benoit
Oui, c'est ça. Si j'ai le choix entre une police 6 et une police 8, je mets une police 8. De toute façon, c'est ce que je dis toujours. Si ça facilite la vie d'un voyant, ça facilite encore plus la vie d'un malvoyant.
- Stéphanie
Oui, bien sûr.
- Benoit
Si ça gêne un tout petit peu un voyant, ça gêne énormément un non-voyant. Tu as la place pour mettre une police un petit peu plus grande, mais tu trouves que ça fait un petit peu moins joli, mais que ça ne change pas grand-chose, passe la police dessus ça change rien
- Stéphanie
Tout à fait. Il y a aussi un rôle important de parrain de marraine chez vous. Oui, j'étais là. Il y a eu Théo Rivière.
- Benoit
Théo Rivière, il y a eu Bruno Catala, il y a eu
- Stéphanie
Guillaume Chifoumi.
- Benoit
Guillaume Chifoumi. J'ai fait dans l'ordre inverse, alors ça va bien.
- Stéphanie
Vas-y, recommence dans le bon sens peut-être si tu veux.
- Benoit
Il y a eu Bruno Catala qui était le premier. Ensuite, il y a eu Mathieu Bonin, Mathilde de chez Gigamic à l'époque,
- Stéphanie
Guillaume Chifoumi,
- Benoit
Théo Rivière et maintenant Hervine.
- Stéphanie
Hervine, voilà. Avec qui vous aviez déjà travaillé avec Théo, notamment.
- Benoit
Voilà, sur le Black Friday.
- Stéphanie
Sur le Black Friday avec les jeux 60...
- Benoit
61 feuilles d'automne, 16 lueurs d'hiver et 66 fleurs de printemps. Voilà. Je les ai tous faits du premier coup.
- Stéphanie
Vous ne le savez pas, mais oui. J'ai confondu.
- Benoit
C'est initialement une idée de Philibert qui est venu nous voir un jour. Mais vraiment, le jour du Black Friday, il nous appelle et nous dit « Au fait, aujourd'hui, on fait une opération caritative pour vous. » Ah bon ? Pourquoi ? Non, parce qu'on n'aime pas le Black Friday et on va faire une opération. Donc pour chaque commande passée sur notre site, on vous reverse 5 euros. Donc ça, c'est l'initiative. Ça a été fait, je n'ai plus le nombre d'années, je dirais 5 ans, 6 ans. Et d'année en année, ça a grossi. Et l'année où Théo est arrivé comme parrain de l'association, il a dit, moi, ce que je veux faire, c'est un live caritatif en 24, 12 heures. On l'a fait une année 24 heures, maintenant, on fait un peu moins. On a décidé de dormir, c'était plutôt bien. Il a dit, je veux faire un live caritatif. On lui a dit, on va le faire en même temps que Philibert, Ce qui soit à Sratrapa, le Black Friday. Et donc maintenant ça fait 3 ans qu'on le fait. 4 ans ? Ça fait peut-être 4 ans.
- Stéphanie
Je dirais 4 ans.
- Benoit
Ça fait 4 ans, on a fait tous les ans. Donc le jour du Black Friday, Philibert continue son offre de jeux. Nous on participe au live pendant 12h ou 24h, ça dépend des fois, avec Erwin, Théo, Maxime de Philibert et puis l'équipe d'Amonde de Jeux qui nous accueillent très généreusement. Et on fait un live sur Twitch très sympa, où on récolte des dons grâce à une tombola, grâce à la vente de jeux parce que Théo, Erwin et Lodi créent un jeu tous les ans.
- Stéphanie
Tous les ans, voilà. Ça fait troisième année. Ça fait troisième année, oui.
- Benoit
Un jeu, un petit Roll and Write qui sont très sympas, très rigolos. Tous les bénéfices vont au profit de l'association. C'est un gros, gros, gros, gros moyen de financer l'association.
- Stéphanie
J'allais dire, ça donne de la visibilité, mais aussi…
- Benoit
La visibilité et surtout, c'est vraiment un gros apport de l'association. L'année dernière, on a récolté 65 000 euros à peu près.
- Stéphanie
Ah oui,
- Benoit
quand même. C'est vraiment énorme. Et l'élan de générosité fait vraiment chaud au cœur. On sent vraiment que les gens sont vraiment dynamiques. C'est vraiment un superbe événement. Ça fait vraiment du bien. Ça booste un peu pour l'année.
- Stéphanie
J'imagine que ça va être votre temps fort de l'année. Et puis, ça peut permettre de lancer des projets, de financer, comme vous disiez. Ça coûte cher d'adapter.
- Benoit
Ça coûte cher d'adapter. Ça va nous permettre justement de… Alors, on travaille sur un projet, je ne vais pas détailler, mais on travaille sur un projet justement d'une autre édition. Et ça nous permet de le financer. Voilà, ça nous permet d'aller moins chercher du mécénat sur ce genre d'opération-là.
- Stéphanie
D'être un peu plus autonome, peut-être.
- Benoit
Un peu plus autonome, oui.
- Stéphanie
On peut en parler des projets, peut-être. Qu'est-ce que l'association a en projet ?
- Benoit
L'association a un très gros projet, mais j'ai l'impression de me répéter, parce que si on reprend des autres podcasts d'il y a cinq ans, je vais peut-être dire le même.
- Stéphanie
Peut-être qu'on arrive plus près encore.
- Benoit
On approche. En 2026, on va déménager. L'association, actuellement, est dans un petit local. Dans une bibliothèque, je disais qu'il y avait 2000 jeux, mais ces demi-jeux sont stockés dans un local de 40 mètres carrés. Donc il y en a sur tous les murs, du sol au plafond.
- Stéphanie
Pas accessibles pour le coup.
- Benoit
Pas tous accessibles. C'est pour les grands. Les grands non-voyants ont eu accès. Donc du coup, on va déménager dans une future ludothèque, pas très loin d'ici, juste à côté de Paris Ludique. On va être la plus grande ludothèque intramuros, la plus grande ludothèque de Paris. Elle fera 350 mètres carrés. Donc ça change d'échelle. Et ça sera la ludothèque la plus accessible de France. C'est à dire que, comme je disais, on ne s'appelle pas C6 Jeux, on s'appelle AXC6 Jeux. elle sera pensée pour tout type de handicap et pour tout âge. C'est-à-dire qu'actuellement, on est spécialisé jeux de société, on ne fait que des jeux de société, mais là, on aura 75 mètres carrés de jeux enfants, petite enfance et enfance, avec des jeux adaptés pour tout type de handicap, avec des accès, avec des rampes, avec des bandes de guidage pour les non-voyants, avec des pistes de guidage, avec des personnels formés à la langue des signes, avec des plans tactiles, avec des symboliques pour les personnes qui ont des difficultés de lecture, des choses comme ça. Avec des espaces calmes, pour que les personnes qui ont des troubles TDAH puissent se mettre dans des environnements calmes et compagnie, des couvertures lestées, enfin voilà. Tout un environnement adapté pour tout type d'handicap.
- Stéphanie
Avec différentes zones de jeu,
- Benoit
tout ça en fait. Différentes zones de jeu, on aura un espace de jeu vidéo, on travaille avec les pendants d'Accessi-jeu sur le jeu vidéo, et on travaillera sur tout ce qui est manette adaptée, bouton adapté, tout ça aussi.
- Stéphanie
C'est un super projet.
- Benoit
Donc c'est un énorme projet, on est dessus depuis au moins 4 ans. Donc c'est pour ça que je disais, on répète souvent ça. Oui,
- Stéphanie
mais le déménagement est imminent. Le déménagement,
- Benoit
les travaux commencent en septembre normalement. Et on espère emménager en 2026.
- Stéphanie
D'accord. Bon, ça se concrétise quand même.
- Benoit
Ça approche, ça approche, ça approche. Mais ça n'a jamais été, c'est toujours de quatre canons.
- Stéphanie
Je veux bien croire. Puis là, c'est vrai qu'en plus, c'est un challenge de rendre accessible à tous. Oui,
- Benoit
c'est un gros challenge. Il a fallu trouver les financements pour faire les travaux. On a embauché une personne spécialement pour... pour trouver les financements, ça a été un gros challenge.
- Stéphanie
Et alors j'imagine qu'après, effectivement, les usagers, ça pourrait être aussi des associations ou des instituts ?
- Benoit
Oui, tout à fait. On travaille déjà. On a déjà commencé à contacter les associations, les instituts du coin et même un peu plus loin pour faire des ateliers, des découvertes, des choses comme ça chez nous. On a aussi contacté parce que ça sera un lieu qui sera quand même accessible à tout le monde du jeu, donc aussi les éditeurs pour venir créer des présentations, des choses comme ça aussi. On veut que le lieu vive.
- Stéphanie
Il pourrait y avoir des événements ludiques peut-être aussi ?
- Benoit
Tout à fait, il y aura sûrement des événements ludiques qui auront lieu là-bas.
- Stéphanie
Un festival spécial avec ces six jeux ?
- Benoit
Alors oui, on peut bloquer 3-4 rues, parce qu'en fait, dans le quartier, on est déjà un peu présent, donc on a moyen de bloquer quelques rues, il y a peut-être moyen de faire quelques rues.
- Stéphanie
Il y a moyen.
- Benoit
La rue va être piétonne dans quelques années, donc voilà. Pas tout de suite, mais on va faire ça après, mais oui, il y a moyen de faire des choses intéressantes.
- Stéphanie
Super, ça c'est des belles perspectives. En 10 ans d'association, toi tu as vu les choses évoluer ? Quelles sont les avancées majeures en final en accessibilité depuis une dizaine d'années ? Ou pas d'ailleurs. Qu'est-ce qui reste à améliorer ? On pourra en parler.
- Benoit
On pourra toujours améliorer. Moi je trouve que quand même maintenant les éditeurs se posent des questions. C'est-à-dire que je suis assez content, on est là, surtout les éditeurs français parce que nous on est français et ça correspond bien, il y a quand même un gros marché français donc c'est plutôt bien, mais les éditeurs savent qu'on est là. Parce que nous, on est membre de Lyon des Heures de Jeux, donc on est présent à leurs conventions, à leurs séminaires, etc. Donc ils nous voient, ils savent qu'on existe, donc ils se posent des questions. Alors, des fois, il y a des raisons économiques, et je le comprends totalement. Je comprends totalement qu'un éditeur me dise « Non, je ne peux pas mettre trois pions différents pour les joueurs parce que ça coûte trop cher. » Et voilà. Et il y en a d'autres qui me disent « Ouais, finalement, ça ne me coûte rien, je n'y avais pas pensé, et je le fais. » Et puis maintenant, ils y pensent même d'eux-mêmes. Ils viennent me voir et ils ont « J'ai pensé à ça ! » Est-ce que ça marche ? Vas-y, go. Imprime ton jeu comme ça et tu auras amélioré ta...
- Stéphanie
Donc, il y a des réflexes que tu veux dire. Oui, il y a des réflexes. Il y a des réflexes.
- Benoit
Je ne sais pas du tout ça. Et il y en a qui me font pester. En général, j'y vais assez frangeux. Je lui dis, écoute, là, c'était facile de faire quelque chose. Parce que les gens qui me disent, non, mais là, je ne peux pas faire les couleurs, ça ne marche pas. Je dis, oui, mais il y avait une petite façon de faire.
- Stéphanie
ah bah oui j'y ai pas pensé et vous avez créé une espèce de guide justement où Comme je vois l'AES qui peut proposer des contrats types, par exemple, pour travailler avec un auteur, j'en sais rien. Est-ce qu'il y a une espèce de charte ?
- Benoit
Pour la partie colorblind d'Altonien, quand on télécharge le formulaire d'inscription pour labelliser un de ses jeux, avant, il y a 4-5 pages qui donnent des guides, qui expliquent comment rendre le jeu accessible aux Altoniens. Après, c'est ces 4-5 pages qui expliquent rapidement. Après, sur l'ensemble de l'accessibilité aux défis en visuel, voilà. Et après, les autres handicaps, c'est pris en charge aussi. Ça commence à avancer. Pour nous, on restera toujours à dire que c'est la déficience visuelle où il y a le plus de matériel d'adaptation à faire. Ce n'est pas vrai sur les autres handicaps, il y a aussi des choses à adapter. Mais la déficience visuelle, c'est là où il y a vraiment le plus de travail à faire d'adaptation. Pour les autres handicaps, il faut trouver le bon jeu pour la bonne personne, je vais dire.
- Stéphanie
Oui. Presque.
- Benoit
Ce n'est pas tout à fait vrai, j'exagère un peu. Il faut des fois adapter, rajouter ne serait-ce qu'un porte-cartes, ne serait-ce que... Enlever une règle sur une personne qui a des troubles cognitifs et ça fluidifie le jeu. Il y a des choses quand même à faire aussi avec les autres handicaps. Mais la majorité des jeux, la déficience visuelle, c'est là où il y a le plus d'adaptations à faire.
- Stéphanie
D'accord. Tu m'as parlé des avancées mais est-ce qu'il y a vraiment aussi des améliorations, des axes où il y a vraiment de quoi faire et on en est loin ?
- Benoit
Alors, il y a un truc qui est très difficile. On fait plein de jeux mais les gens dans le monde de la déficience visuelle ne savent pas qu'on existe. Dans le monde du jeu, c'est bon. Les gens savent qu'on est là, ce qui est plutôt bien. Il y en a encore d'autres qui vont nous découvrir et c'est très très bien. Mais dans le monde de la déficience visuelle, c'est très très difficile. C'est ce que je racontais tout à l'heure à une personne qui est venue me voir, qui me dit « moi j'organise un petit festival et j'aurais que les donvoyants viennent dans mon festival » . C'est très long de faire venir les déficiences visuelles sur les festivals parce qu'ils se disent « j'ai rien à y faire » . Il faut qu'on vienne les chercher presque un par un, main par la main, pour aller leur dire « viens au festival, tu vas découvrir déjà le strand d'accès si jeu » . Et moi ce que je dis toujours, je me souviens toujours, le festival de jeux de reines, ou ce que je fais tous les ans. On a fait rentrer des non-voyants dans le festival et ils sont revenus trois heures après en disant « Mais en fait, j'ai trouvé tel autre jeu là-bas, je peux y jouer, il va très bien, bravo ! » On ne l'avait pas référencé, nous, comme jeu accessible, mais tu as trouvé un autre jeu et tu as profité du jeu et c'était super. Il dit « En fait, j'ai pu faire des choses dans le festival de jeux et c'était très bien, j'ai passé une très bonne journée. » Donc voilà, faire venir, mais même à l'association, nous, on est présent à Paris, donc ça va, Mais les médiathèques, les ludothèques, les barrageux aussi qui nous disent « Bah oui, mais moi, je... » Je n'ai pas de déficients visuels qui vont passer la porte. Et je dis oui, il faut aller les chercher un par un. Mais déjà, ayez des jeux accessibles. Si vous n'avez pas de jeux accessibles, ça ne marchera pas.
- Stéphanie
C'est ça. Donc voilà, avoir les jeux et après, peut-être communiquer, mieux communiquer sur le fait qu'on a aussi des jeux pour tous. Et dans ces enseignes-là.
- Benoit
C'est ça.
- Stéphanie
Est-ce que tu veux rajouter autre chose sur des projets ? Alors peut-être on peut parler du future Black Friday qui viendra vite.
- Benoit
Oui, je viens de croiser Théo tout à l'heure. Je lui ai dit qu'il faut qu'on se parle, qu'on en prépare. Voilà où on en est.
- Stéphanie
D'accord. C'est bien. Il y aura quelque chose.
- Benoit
Tu as un scoop, je sais que j'ai croisé Théo, il faut qu'on en parle. On est au mois de juillet.
- Stéphanie
On est bon. On est bon, il y a encore un peu de temps.
- Benoit
Non, mais ça va venir vite, mais on va s'en occuper.
- Stéphanie
Il y a Erwin dans un toujours qu'il y a là.
- Benoit
Il y a Erwin et Théo qui seront là. Erwin, Théo, Maxime, on va refaire la même équipe. On a au moins un quatrième jeu à faire cette année.
- Stéphanie
On attend ça alors.
- Benoit
Il faut qu'on fasse l'été cette année.
- Stéphanie
Oui, il y a encore une saison. Si tu devais choisir un jeu, lequel serais-tu en fait ?
- Benoit
Alors moi je réponds souvent Puerto Rico. Ce sera Puerto Rico.
- Stéphanie
Et pourquoi ?
- Benoit
Parce que c'est un des premiers jeux, il y a des années, qui m'a foutu une claque de simplicité et de complexité en même temps. C'est-à-dire que je trouve que les règles s'expliquent en deux minutes. C'est ce que j'aime dans les jeux experts. Les jeux experts en général, quand il y a trop de règles de base, ça ne marche pas. Là je trouve qu'en deux minutes on a expliqué tu prends un personnage tu fais l'action les autres ils ont une action moindre Voilà, je vais expliquer le jeu. Soulkin, c'est le même genre. Tu poses ou tu enlèves. Et après, il y a plein de petites choses à côté, mais ça va assez vite à expliquer derrière. Donc, Puerto Rico, c'est un vraiment jeu... Ce qui est intéressant, c'est que Xavier, qui est le président de l'association qui aime la voyant, il te répondra la même chose.
- Stéphanie
OK.
- Benoit
C'est-à-dire qu'il répondra à Puerto Rico. C'est-à-dire que c'est un des rares jeux experts qui est accessible aux déficients visuels.
- Stéphanie
Ah oui ? Et comment ça se fait ?
- Benoit
Rien n'est caché. Tout est en autodescription.
- Stéphanie
Ouais, OK.
- Benoit
Bien sûr, tu ne joues pas avec n'importe quel non-voyant, mais un non-voyant qui a envie de se pencher dessus, on lui décrit tout, et à son tour de jeu, on a... pas trop de choses à lui décrire. Et donc ça va assez vite.
- Stéphanie
Ça reste fluide.
- Benoit
Ça reste un jeu très fluide. Il ne faut pas jouer contre Xavier, qui est non voyant, mais en général il a un bon niveau.
- Stéphanie
Si tu devais être un univers de jeu de société, qu'est-ce que tu serais ?
- Benoit
Pas le monde de Puerto Rico,
- Stéphanie
c'est pas cool.
- Benoit
Un univers ? Dans ce type de catégorie de jeu ?
- Stéphanie
Pas une catégorie, plus un univers fantastique, futuriste, nature.
- Benoit
Plus de la SF, mais c'est rarement les jeux qui m'emballent le plus, mais la thématique m'intéresse plus.
- Stéphanie
Si tu étais une mécanique de jeu ?
- Benoit
Une mécanique de jeu, je suis un grand fan de jeux de pli. Il y en a des très bons, il y en a des très mauvais.
- Stéphanie
Oui, c'est comme tout. Si tu étais un auteur de jeu, lequel serais-tu ?
- Benoit
Alex Randolph. Le papa, quoi. Oui, très bien. Grâce à lui qu'on a tout ça.
- Stéphanie
Ok, c'est cool. Si tu étais un mode de jeu, tu serais plutôt solo, compétitif, coop ?
- Benoit
À la maison, c'est très coop.
- Stéphanie
Ok, très coop. Je te remercie. Est-ce que tu aurais quelqu'un d'autre à me proposer pour une interview dans le monde ludique ?
- Benoit
Quelqu'un à proposer dans le monde ludique ? Je vais essayer de réfléchir. Tu m'as posé la question au début, mais j'ai réfléchi et je n'arrive pas à...
- Stéphanie
Oui, parce qu'il faut savoir que je suis chez vous aujourd'hui avec ces six jeux. C'était la suggestion de Cédric Boucher, Capitaine Meeple, qui m'avait dit de venir vous voir.
- Benoit
Oui, si. Moi, j'adore l'écouter. Il est toujours très, très bonne idée. C'est Roberto Fraga.
- Stéphanie
Ah, OK.
- Benoit
Roberto Fraga, un très grand auteur de jeux. Voilà.
- Stéphanie
Oui, ce serait très bien de le faire, effectivement. Je note.
- Benoit
Très bon, très, très bon. Et puis, il ne parle pas souvent, donc il faut le préparer.
- Stéphanie
C'est vrai qu'on ne l'entend pas beaucoup, c'est vrai. OK. Eh bien, je note. Je te propose qu'on termine le podcast comme on fait habituellement. Alors, Benoît, au jeu signé FC6 Jeux. Tu joues ou quoi ? Merci d'avoir pris le temps d'écouter cette interview jusqu'au bout. Si vous avez aimé cet épisode, je vous invite à laisser un commentaire sur Instagram, la chaîne YouTube ou sur votre plateforme d'écoute préférée. Pensez aussi à vous abonner pour ne louper aucun épisode. Dans deux semaines, je serai avec l'illustratrice Seppyo. Avec son univers coloré et poétique, la jeune femme a déjà une belle ludographie. Je vous souhaite un bel été et profitez bien de la route des vacances pour rester à l'écoute.