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Vivre le diabète

51. "Mon colocataire indésirable" : William Belle raconte son diabète de type 1 | Vivre le diabète

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1h04 |06/05/2025
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51. "Mon colocataire indésirable" : William Belle raconte son diabète de type 1 | Vivre le diabète

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1h04 |06/05/2025
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Description

🎙️ Dans cet épisode, je reçois William Belle, diabétique de type 1 et auteur du livre “Mon colocataire indésirable”.

Avec beaucoup de sincérité et d’humour, William nous raconte son parcours avec le diabète, les défis du quotidien et ce qui l’a poussé à écrire ce livre original, dans lequel il compare son diabète à un "colocataire" qu’il n’a jamais invité, mais avec lequel il doit vivre.


Ensemble, nous parlons de l’annonce de la maladie, de l'acceptation, des idées reçues sur le diabète, mais aussi de l'importance de sensibiliser et de partager son expérience.


Un témoignage inspirant et plein d’humanité, à écouter sans modération !


📚 Pour suivre William Belle et découvrir son livre : 


🎧 Bonne écoute !

Prenez bien soin de vous !

“Et n’oubliez pas, plus vous apprenez sur votre maladie, mieux vous la gérez !”


Si tu souhaites partager ton expérience, je t’invite à me contacter par email, je serai ravie de partager ton récit dans l'un de mes futurs épisodes.


💬 Vous avez aimé cet épisode ? Partagez-le au moins à une personne, laissez 5⭐ et un avis sur votre plateforme d’écoute préférée !

Cela aide Vivre le diabète à grandir et à toucher plus de monde. 

Merci pour votre soutien ! 🙏


Vous pouvez soutenir financièrement mon travail grâce à la plateforme Tipee ICI https://fr.tipeee.com/vivre-le-diabete

Ou bien vous pouvez toujours être un relais en partageant mes contenus !  

Je vous remercie sincèrement !


_______________________

🔵 Me contacter par email : nathalie.vivrelediabete@gmail.com

🔵 S’abonner à ma newsletter sur : https://podcast.ausha.co/vivre-le-diabete 

🔵 Me rejoindre sur Instagram : Nathalie Paoletti et Vivre le diabète 

🔵 Ma chaîne YouTube : Vivre le diabète

🔵 Site internet : www.vivrelediabete.fr

_______________________

Crédit musique : Xavier Renucci 



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Nathalie

    Bienvenue dans Vivre le diabète à la recherche de l'équilibre, le podcast qui vous accompagne avec des conseils, des témoignages et des rencontres inspirantes autour du diabète. Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir William Belle, auteur du livre Mon colocataire indésirable. William est diabétique de type 1 et à travers son ouvrage, il partage son quotidien avec cette maladie qu'il décrit comme un colocataire qu'on n'a pas choisi. Mais avec lequel il faut apprendre à cohabiter. Nous allons parler avec lui de son parcours, de ce qui l'a poussé à écrire ce livre, des défis qu'il rencontre au quotidien et du message qu'il souhaite transmettre aux personnes vivant avec le diabète. Je suis Nathalie, diabétique de type 1 depuis février 2010. Je m'adresse à toi qui viens de déclarer un diabète, à toi qui es diabétique de type 1 ou de type 2, ou à toi qui es en pré-diabète, mais aussi à toi qui soutiens et aides que tu sois parents ou conjoints, etc. Je m'adresse également à toute personne désireuse de savoir ce qu'est le diabète vu par une patiente diabétique. Désormais, tu peux soutenir financièrement mon travail grâce à la plateforme Tipeee dont tu trouveras le lien dans les notes de l'épisode. Ou bien, tu peux toujours être un relais en partageant mes contenus. Je te remercie sincèrement. Et avant de commencer, si cet épisode vous plaît, pensez à le partager au moins à une personne. A laisser 5 étoiles et un avis sur votre plateforme d'écoute préférée. Ça m'aide énormément à faire grandir ce podcast et à toucher encore plus de monde. Bonne écoute et n'oubliez pas, plus vous apprenez sur votre maladie, mieux vous la gérez. Je vous laisse maintenant avec l'épisode du jour. Bonjour William !

  • William

    Hello Nathalie, comment ça va ?

  • Nathalie

    Ça va, ça va, j'espère que toi aussi.

  • William

    Ça va très bien, merci de m'accueillir dans ton podcast que j'écoute régulièrement. Il y a une très bonne démarche et c'est un très beau travail, bravo.

  • Nathalie

    Merci, ça me touche. William, peux-tu te présenter ?

  • William

    Ok, William, de mon prénom, je ne dirais pas mon nom de famille parce que vous n'avez qu'à acheter le livre. Alors moi, je réside dans le sud-est de la France, plus exactement en Isère au pied des montagnes. Je suis entre la Chartreuse et le Vercors et juste à côté des Alpes. Je n'ai pas le pied marin, j'ai plutôt le pied montagnard. Je suis diabétique. Étonnant, n'est-ce pas ? Très étonnant. Je suis diabétique depuis très longtemps. Je ne vais pas dire aussi le temps de ma pathologie. Il faudra faire un petit calcul. J'ai été diagnostiqué en 86 et j'avais 13 ans. Je vous laisse faire le calcul. Ça veut dire que je suis vieux, pour certains. Et je suis photographe vidéaste à mes heures perdues. Enfin, professionnellement, mais en ce moment, c'est très calme. J'en profite de ce temps alloué pour discuter un petit peu avec toi.

  • Nathalie

    Génial. Peux-tu nous raconter ton diagnostic et comment as-tu vécu l'annonce du diabète de type 1 ? Très important.

  • William

    Alors... Si tu veux bien, déjà, on va prendre une petite machine à voyager dans le temps. On va aller direction l'ère du diabète version jurassique, donc direction 1986, où les coupes mulet étaient beaucoup plus tendances socialement parlant qu'aujourd'hui. Et surtout qu'à l'époque, on pensait que le diabète, c'était juste pour les grands-mères qui avaient un petit peu abusé du coca. Moi, ma colocation avec ce fameux colocataire un petit peu indésirable, c'est fait à l'âge de 13 ans, donc en 86. Moi, j'étais un ado assez introverti. Je suis fils d'agriculteur. On vivait dans une ferme assez éloignée. Un environnement familial sympa, mais avec très peu de dialogue par contre. On ne communique pas, on ne parle pas. On est dans une génération où c'est des taiseux. Mes parents ont aussi bien entendu leur vécu et leur casserole, mais les conversations un petit peu importantes n'ont pas lieu. Donc on ne discute pas, on se tait et on subit un petit peu. Et quand tu es dans ce contexte-là, quand une maladie chronique te tombe dessus, la maladie vient encore plus clouer le cercueil du dialogue familial. Je pense que comme tout diabétique, je me suis un peu transformé en véritable fontaine ambulante. Je buvais, j'urinais, je buvais, j'urinais. Par contre, ma mère, avec son œil de lynx, a très vite décelé, qu'il y avait un truc qui n'allait pas. Donc moi, j'ai été diagnostiqué relativement tôt. Je n'ai pas fait d'acidocétose. Je suis passé par la case de prise de sang, généraliste, direction hôpital. Je ne vais rien te cacher, pour moi, ça a été un traumatisme. Aller à l'hôpital parce que je ne me sentais pas malade. Je buvais énormément, mais je ne comprenais pas pourquoi. Et quand je suis parti à l'hôpital, j'étais terrifié. Je me suis dit, c'est bon, c'est la fin, j'étais en larmes, je ne comprenais pas ce qui se passait. Ma mère ne me disait rien. Elle m'a dit, on va à l'hôpital. Elle était, bien entendu, encore plus embêtée que moi, je pense. Et quand on est arrivé à l'hôpital, comment te dire que la prise en charge était complètement catastrophique. Il n'y avait pas du tout de prise en charge de toute façon. Le maître mot qui a été vraiment, moi, qui me reste en mémoire, quand je suis resté à l'hôpital, c'est le silence et l'incompréhension. Je n'ai pas été informé de suite de ce que j'avais. Je coupe un petit peu, j'avance dans le temps. Quand je suis retourné à l'école, au collège, je ne savais toujours pas ce que j'avais. Je savais que j'étais diabétique et c'est tout. Par contre, je n'ai pas été informé de quoi que ce soit. Je n'ai pas eu souvenir d'avoir eu des cours ni une sensibilisation. On a été très vite perdus à l'hôpital devant un jargon médical qui était incompréhensible autant pour moi que pour ma mère. Puis pour mes parents, je pense aussi, ça a été très culpabilisant aussi parce qu'ils se sont dit c'est de notre faute. Je pense que moi, je ne suis pas parent, je n'imagine pas le truc, mais ça doit être un peu l'idée qu'on doit se faire de la chose. Et puis, le jargon médical, comme je te disais, c'est qu'on te parle d'insuline, de dextro, d'analyse d'urine, d'aliments interdits, de régime alimentaire. Tu te dis, mais qu'est-ce qui se passe, quoi ? Et puis, à un moment, on nous a dit, voilà, tu es diabétique. Mais diabétique, ça veut dire quoi ? Voilà, moi, je ne sais pas. Ma mère non plus. Les médecins, ils nous expliquent des trucs. Je ne sais pas, il n'y a aucune documentation, il n'y a pas une BD pour adultes, pas pour ados, pardon, il n'y a pas une brochure, il n'y a rien du tout. Moi, j'ai 13 ans, je suis encore admis au centre pédiatrique. Je ne suis pas chez les adultes, je suis encore chez les enfants, donc je suis le plus grand des enfants. Mais même là, mystère absolu, je reste pendant on va dire un peu plus de 15 jours à l'hôpital, et c'est un balai d'infirmières, d'interne, de, de gens qui passent me voir, qui me font des injections. Et pourquoi ? On ne sait pas. On ne sait pas ce qu'il se passe. Et de voir ma mère préoccupée, de toute façon, je savais très bien qu'il se jouait un truc. Je savais très bien qu'il se passait quelque chose de pas normal. Puis surtout, le diabète, pour nous, il n'y a pas d'antécédent. C'était inconnu au bataillon. On n'avait jamais entendu parler de ça. Et on ne connaissait personne qui avait ce type de maladie chronique. Et puis, il y a eu un espèce de chantage. Je le prends comme un chantage, mais si je voulais sortir de l'hôpital, il fallait que je m'apprenne à faire mes piqûres. Alors, je remets encore du contexte, parce qu'à l'époque, il n'y avait pas de stylo. J'avais deux insulines, une rapide, une lente et une seringue. Donc le matin, il fallait se faire un mélange dans la seringue d'insuline rapide que tu complètes avec de la lente. Ce qui veut dire que l'insuline rapide va jouer entre le début de ton injection jusqu'à midi, l'insuline lente, elle reprend le boulot de midi jusqu'au soir. Et le soir, même opération, tu te fais une injection avec une seringue de ce même type d'insuline. Insuline de porc à l'époque. J'ai l'impression d'être un vieux croulant du diabète. Mais à l'époque, c'était comme ça. Donc, ma mère a revêtu une espèce de blouse d'infirmière parce qu'elle aussi, elle a appris à faire des injections. Moi aussi, j'ai appris à les faire. Mais dans quelle temporalité, on ne savait pas. C'est-à-dire que, OK, je me fais des injections. Bon, OK, d'accord. Mais pourquoi, comment, jusqu'à combien de temps ? Demain, après-demain, dans un mois, qu'est-ce qui se passe ? Ah bah non, c'est pour toute la vie. Ah bon ? Ah d'accord. Si tu ne les fais pas, tu seras aveugle. On va t'imputer, puis tu vas mourir. Donc là, le choc, épée de Damoclès sur la tête. Et là, je me dis, ok, d'accord, je vais apprendre à faire mes injections. Voilà, s'en est suivi justement tout un processus comme ça. Et puis, restriction de sucre, régime alimentaire, qui a suivi, parce qu'à l'époque, c'était comme ça. Et puis, en fait, c'était restrictions et frustrations. De toute façon, au bout d'un moment, quand on est retourné à la vie civile, pour parler sortir de l'hôpital, moi, je suis revenu au collège, je ne sais plus dans quelle classe j'étais, mais je ne savais pas ce qu'ils jouaient en moi. Je ne savais pas. Comment réagir avec une hyper ? Je ne sais pas. Comment réagir avec une hypo ? Je ne sais pas. personne n'était au courant. Un seul prof était au courant, le prof principal. Je n'avais aucun passe-droit pour quoi que ce soit. Il n'y avait pas d'infirmerie à mon collège. Il n'y avait rien. Je ne me contrôlais pas pendant la journée. Il n'y avait rien du tout. C'était comme ça. Puis des fois en plus, quand je suis revenu au collège, je n'étais pas là pendant bien 15 jours. Il y a un prof qui s'est cru très sympa de me rentrer dedans parce que je n'avais pas fait le devoir, que je n'étais pas là pendant 15 jours. Donc ça aussi ça a mis un coup un petit peu au moral donc tu reviens, t'es malade tu sais pas trop pourquoi, tu connais pas les termes et puis en plus on vient te dire pourquoi t'étais pas là, ta maladie chronique, toi t'es bien gentil mais c'est les devoirs qui priment donc mon colocataire lui s'est bien installé tout doucement tranquillement et puis voilà dans une incompréhension totale dans un flou artistique bien de l'époque. Je fais un vite parallèle avec le monde hospitalier, c'est-à-dire que je ne vais pas leur jeter la pierre, mais pendant très longtemps, j'ai eu beaucoup de haine envers le système hospitalier, et surtout envers les diabétologues. C'est un corps de métier, mais ils ne sont pas bien ces gens-là. On a fréquenté trois diabétologues en sortant de l'hôpital. C'était un jugement sans appel à chaque fois qu'on allait les voir. C'était un peloton d'exécution, on se faisait tirer dessus à balles réelles, on se faisait engueuler, on se faisait infantiliser, c'était très culpabilisant, parce qu'on ne comprenait pas les termes. Qu'est-ce que c'est une hyper ? Je ne sais pas. Tu sais ce que c'est qu'un hypermarché ? Tu sais ce que c'est qu'une hyper ? Voilà, une hypo ? Je ne sais pas. On s'en est suivi des relations avec les diabétologues de l'époque, très compliquées, jusqu'à un moment où j'ai dit à ma mère, on arrête tout. On n'est pas là pour se faire engueuler. La maladie chronique te tombe dessus du jour au lendemain. On n'a pas fait médecine en diabétologie. Nous, on doit apprendre. Si les gens en face, ils n'ont pas un minimum d'empathie et un minimum de compréhension pour nous expliquer ce qui se passe, tu te retires de ces professionnels de la santé. Je n'ai plus vu de diabétologue pendant des années. Je suis allé voir mon médecin traitement, mon médecin de famille. À l'époque, il y avait des médecins de famille. Donc, on est allé les voir. Bon, elle n'était pas spécialisée dans le diabète, mais au moins, elle était à l'écoute. Ce qui a quand même beaucoup plus détendu la pathologie. Et puis, ma mère, dans ses recherches, elle a quand même trouvé un cousin lointain qui était lui aussi porteur du diabète de type 1 et qui lui a justement enseigné des choses, et qui lui a dit, ben voilà, ça se passe comme ça, l'alimentation c'est comme ça, mais lui, étant plus vieux, il avait d'autres types de protocoles. Du coup, il y a eu beaucoup plus de compréhension, et beaucoup plus de facilité à gérer la maladie au quotidien. Tout en fait, c'est bon, évidemment, moi quand je raconte ça, certains diabétologues sont là ouais, ouais, avant, avant, ouais, ouais, ok y'a pas de problème, mais moi je suis parti avec une grosse épine dans le pied en fait je me suis senti coupable d'être diabétique voilà et puis la peur de la mort, le côté, le côté, il va falloir se faire des piqûres toute la vie. Une charge, tout d'un coup, moi j'ai 13 ans, et puis tout d'un coup, dans la tête, t'évolues, et tu parais beaucoup plus vieux, entre guillemets, que tes autres camarades. Et ça, en fait, je ne l'avais jamais remarqué, mais effectivement, j'avais plus de maturité que certains de mes copains. Être attentif à ses sensations, s'écouter, ça, je ne le savais pas, mais ça faisait partie aussi de ce diabète qui est venu me rentrer dedans à l'adolescence.

  • Nathalie

    Et du coup, pourquoi avoir choisi de comparer ton diabète à un colocataire indésirable ? Comment c'est venu ça ?

  • William

    C'est venu plus en écrivant mon bouquin. En fait, je cherchais un dénominateur pour justement donner une image qui soit parlant un peu pour tout le monde. Parce qu'au début, ce n'était pas du tout mon colocataire indésirable. J'avais choisi un titre un peu plus mélodramatique, l'intrus à vie. Je ne sais plus ce que c'était. J'avais fait toute une liste de titres potentiels à mon livre. Et puis, à un moment, je me suis dit, attends, en fait, cette maladie chronique, elle a débarqué du jour au lendemain, elle a commencé à mettre des miettes de chips de partout chez moi, elle met ses pieds sur la table, elle renverse sa bière en plus elle m'attrape par le cou, elle me dit hé mec, je vais être là pour toi et puis en plus, j'ai signé un bail à vie, ça c'est cool et j'ai même mis mon nom sur la boîte aux lettres, donc ça serait impossible de te débarrasser de moi et en fait, en principe quand tu fais de la colocation, c'est pour partager des bons moments. Et là, ce n'est pas le cas. Donc là, l'autre loup, il est là. Et il va falloir faire avec. Donc du coup, je me suis dit, le colocataire indésirable que je pense que ça peut parler, même si, bien entendu, les colocations peuvent très bien se passer par moments. Mais je pense que le titre, il est adéquat.

  • Nathalie

    Et du coup, en fait, c'est venu... Parce que tu voulais écrire un livre.

  • William

    Tout à fait.

  • Nathalie

    D'accord, ce n'est pas quelque chose que tu avais déjà réfléchi. D'accord, ça, je ne savais pas, tu vois.

  • William

    Je n'avais pas réfléchi à ça avant. Je disais à mon entourage, je suis diabétique. Des fois, je précisais pour les plus intéressés, de type 1. Vraiment, c'était plus vraiment pour le côté imagerie de mon livre. Je ne l'avais pas forcément en tête depuis très longtemps. Par contre, la pochette, oui. Justement, la pochette de mon bouquin, ça, je l'avais depuis longtemps. Parce que je me disais, c'est vraiment une imagerie que j'avais en tête, que j'imaginais. Quand il a fallu la faire, je me suis dit, je vais appeler un copain, on va faire comme si on a fait un shooting un après-midi avec Hugo, que je salue d'ailleurs. Et du coup, on a fait cette espèce d'aspect fantomatique qui est derrière moi, qui m'empoigne et qui me bouche la vue. Ensuite, c'est peut-être un petit peu une imagerie artistique, peut-être un petit peu rebutante et un petit peu violente pour certains. Mais pour moi, c'est une manière d'interpeller. Je n'avais pas envie de tomber sur un dessin avec une bouteille d'insuline, une seringue, avec ma tête en train de dire « Oh là là ! » « Ah ben dis donc ! » En fait, je n'avais pas envie de ça. Je pense que ça aurait été trop téléphoné. J'avais plusieurs idées, mais cette idée vraiment très artistique et graphique, je l'avais beaucoup en tête. Et d'ailleurs, quand tu regardes la quatrième de couve, pour explication, en fait, là... Est-ce que c'est le diabète ou c'est moi qui regarde vers la lumière ? J'ai eu deux, trois petits commentaires à la sortie du livre à propos de la pochette, parce que c'était un petit peu différent. On m'a dit que ça ne donne pas trop envie. C'est vrai qu'au niveau marketing, ce n'est pas ce qu'il faudrait faire. Mais tant pis, il faut passer au-delà de l'image un petit peu forte et un petit rentre dedans. Parce que mon récit, en fait, dedans, je pense que j'y mêle aussi quand même pas mal d'humour, pas mal de choses décalées, du voyage. Je ne parle pas que du diabète, du coup.

  • Nathalie

    Mais quand on regarde le livre, par exemple, on est dans une librairie, on regarde le livre, on ne sait pas que ça parle du diabète.

  • William

    Oui, tout à fait.

  • Nathalie

    Donc, je veux dire, à la limite, ça peut être un polar, ça peut être...

  • William

    Oui, tout à fait. Ça fait plutôt polar, série noire, que finalement vie au travers du diabète de type 1.

  • Nathalie

    Et du coup, est-ce que tu as évolué ? Comment tu as évolué avec ta relation et ce colocataire au fil des années ? Comment ça va maintenant ?

  • William

    Alors maintenant, au fil des années, ma relation était plutôt graduelle parce qu'on va dire qu'aux alentours de mes 13 ans jusqu'à mes 25 ans, ça va. Je fais avec. J'assume la pathologie, je fais mes injections. Il y a un régime alimentaire qui est là, mais il y a une forte envie de vivre. L'intérêt, c'est d'être un peu plus fort. Puis, je reviens aussi sur le contexte familial. On n'en parle pas. Je gère mon truc tout seul. Je me répète un petit peu, mais le terme solitude est beaucoup présent dans moi, ce que j'ai vécu. Même si j'ai été très bien entouré, ce n'est pas du tout ce que je veux faire transmettre à mes proches. Mais étant porteur de diabète de type 1, on est très vite seul. Et je trouve que c'est... très compliqué d'expliquer ça à ses copains du même âge ou d'expliquer ça en soirée. S'il y a de l'alcool, ce n'est pas le bon moment. Il faut connaître les termes techniques, il faut que les gens s'intéressent. Tout le monde n'a pas forcément les oreilles pour expliquer, pour entendre plutot, pour entendre ce que tu vis au quotidien. Et puis certains, ils ont peur. Parce que si bien tu leur en parles, ils vont dire, moi aussi j'ai bu beaucoup d'eau, peut-être que je suis diabétique. Et puis, il y a aussi, je pense, quelque part, des réflexions qui sont un petit peu désobligeantes. Des fois, tu te livres et tu te dis, oui, c'est diabétique, machin, puis on se moque de toi. Et puis, on te dit, ah, mais William, ah ouais, le diabétique, là. Mais je n'avais pas forcément envie d'avoir une étiquette. Et puis, à cet âge-là, pendant des années, vu que je n'avais aucun dispositif visible comme aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui, on a des pompes, on a des... On a des capteurs glycémiques, ça se voit. Mais à l'époque, il n'y avait pas ce genre de système. Donc, ça ne se voyait pas. Donc, le handicap invisible, il est très facile à cacher. Et tu es comme tout le monde. Et quand tu es ado, pré-ado, jeune adulte, tu n'as pas envie d'être stigmatisé. Tu as envie d'appartenir à un groupe de copains, de copains-copines. Tu as des amis. Tu n'as pas envie qu'on vienne te parler de ça non plus. Après, on a tous des rapports différents, justement, avec le diabète. Moi, je n'avais pas envie de le laisser de côté, pas de le mettre sous le tapis, mais il était là, il était très présent, ce colocataire, je savais qu'il était là, mais je n'avais pas envie qu'il me définisse. Je n'avais pas qu'on dise William le diabétique. Oui je comprends. Puis, c'est une relation aussi qui s'est faite en dent de scie. Je n'ai pas fait une crise d'adolescence du diabète entre guillemets, attention, je mesure mes propos, je ne vais jamais arrêter mon traitement. Parce que de toute façon, on m'avait dit, tu vas mourir. Donc forcément, moi, je me suis dit, je n'ai pas spécialement envie de passer de vie à trépas. Donc, on va faire nos injections, le gentil petit soldat. Et puis, voilà, on va essayer d'en profiter pendant qu'on n'est encore pas amputé et pas aveugle. Donc voilà, moi, j'avais toujours ça en tête, qui revenait tout le temps.

  • Nathalie

    Oui, on avait bien stigmatisé les choses.

  • William

    Et merci pour l'anxiété, parce que c'est pareil, la prise en charge, elle était d'une telle manière à l'époque. Mais la prise en charge psychologique, tu peux mettre un zéro pointé dessus. Je pense que j'ai eu plein de traumas entre l'adolescence et ma vie de jeune adulte avant que je me prenne vraiment un petit peu en main psychologiquement. Et encore, je te dis, aujourd'hui, j'ai encore du travail.

  • Nathalie

    Et puis après, à partir de 25 ans, ça a changé ?

  • William

    Oui, alors du coup, en fait, aux alentours de 25-30 ans, Tous ces régimes restrictifs de sans-sucre et tout ça, sur le long terme, ça a commencé un peu à devenir complètement fou parce que j'étais tout le temps dans les restrictions. Et quand il y avait une hypoglycémie, je me jetais sur tout ce qui bougeait. J'étais très frustré au point de vue de l'alimentation. Et dès que j'avais une hypo, je me disais, chouette, je vais dégommer ce paquet de gâteaux, je vais dégommer des glaces, c'était n'importe quoi. À tel point que je n'ai rien vu venir, j'ai commencé à prendre du poids. Et ça a commencé graduellement comme ça, mais je n'ai rien vu venir. J'ai l'impression que je me suis réveillé un matin en me disant « C'est bizarre, j'ai l'impression d'avoir du ventre, j'ai l'impression d'avoir plus de pecto, j'ai l'impression d'avoir plus les cuisses un peu plus de charnus. » Alors attention, j'ai pris du poids, ce n'était pas dans l'excès non plus. Mais un jour, j'ai un ami qui se moque littéralement de moi, qui me dit « Ah bah dis donc ! » Et il me fait une petite réflexion... comme ça, en passant, je me dis que je suis en train de me rendre compte que j'ai des comportements alimentaires complètement anormaux. Et surtout, que je n'arrive pas du tout à maîtriser. Donc, je me jette sur... les hypos, ben j'y vais quoi. Donc, ça te fait des espèces de pics glycémiques de ouf. En plus, à l'époque, il fallait que je fasse mes dextros pour voir où j'en étais. Effectivement, quand j'étais un peu trop haut, je me faisais des piqûres de correction avec de l'insuline rapide, pas de stylo toujours, mes petites seringues. Et quand ça baissait, je mangeais. Donc ça faisait un espèce de système de yo-yo, des fois où je passais des journées à faire un petit peu n'importe quoi. Mais malgré tout ça, ce qui était quand même assez bizarre, c'est que mes résultats étaient très bons.

  • Nathalie

    Oui, trop haut, trop bas.

  • William

    J'avais une hémoglobine glyquée qui était pas mal. Quand je voulais bien faire mes prises de sang, bien entendu, parce que pour moi, c'était terrifiant d'aller voir mon médecin. Et les résultats, ils étaient là. Donc, ils étaient quand même relativement bons.

  • Nathalie

    Oui, à cause de ça, à cause des montagnes russes. Parce qu'en fait, la moyenne entre être trop haut et être trop bas, ça fait une bonne moyenne, en fait.

  • William

    Ce n'était pas du tout bon, ce que je faisais. Après, attention, je mesure un petit peu. C'était sur une période. Ça n'a pas duré des années, mais effectivement, il y a eu un côté, il y a eu un moment où je me suis dit, oula, mais je perds le contrôle, il y a un truc qui ne va pas. Il faut peut-être que je me remette en question. Après, qu'est-ce que j'ai fait ? J'ai fait tout l'inverse. Et du coup, je suis tombé dans la spirale du gentil petit soldat, du militaire, de l'hyper contrôle et de l'employé modèle de la fin du mois. Le côté on pèse. En plus, je n'avais même pas fait d'insulinothérapie fonctionnelle, ça fait encore un mot à dire, horrible. À une certaine époque, aux alentours de 35 ans, on va dire, je comptais mes glucides, mais avec un... au feeling en fait. J'avais fait tout plein de tests. Perso, je me suis dit, tant de grammes de riz égale ça, tant de doses d'insuline. Je fais avec mes légumes, je mange ça le matin et mes injections, elles sont de temps. La journée se passe comme ça. Tout va bien. Le soir, je mange la même chose qu'à midi et le soir, je me fais une injection avec mes seringues de tant et tout va bien.

  • Nathalie

    En fait, tu t'es fait l'insulinothérapie fonctionnelle tout seul.

  • William

    Ouais, mais avec justement un côté extrêmement contrôle. Et il ne fallait surtout pas qu'il y ait un grain de sable qui vienne au milieu de tout ce système-là. Parce que ce côté hyper contrôle t'enlève du milieu social, en fait. Tu ne vas plus au resto avec tes potes, tu ne vas plus boire un coup, tu ne te fais plus plaisir. Et tu vas même au-delà, c'est-à-dire que tu ne te fais même plus plaisir dans la vie en général. Tu veux t'acheter des fringues, tu te dis non. Moi, ça en est rendu jusqu'à là. C'est-à-dire qu'il fallait que je maîtrise tout, tant de grammes de riz à midi, tant de légumes, point, c'est tout. Puis, il n'y a rien d'autre. Ça arrive des fois de faire un petit peu des sorties de route, de se faire un petit peu plaisir, mais avec une culpabilisation derrière. Donc, en fait, quand tu vas à un dîner chez des amis, moi, j'arrivais, j'avais déjà mangé chez moi. J'arrivais chez des amis et je leur disais « Non, non, mais j'ai pas faim. C'est bon, je ne mange pas. » Et donc j'évitais d'être en difficulté socialement parlant, donc d'être entouré qu'avec des gens qui étaient un peu compréhensifs avec ma méthode de vie. À l'époque, j'étais célibataire. Quand je rencontrais des jeunes femmes, et du coup, « Ah bon, on va au resto ? » « Bah non. » « Bah pourquoi ? » « Bah parce que. » Donc tu passes pour un psychopathe, quoi. Tu passes pour un psycho rigide de l'alimentation. En plus de ça, je faisais énormément de sport, du sport à outrance. Je passais des soirées, des week-ends. Ah, mais tu pars déjà ? Ouais, ouais, parce que demain, je vais faire des pompes. Puis demain, je vais faire 15 bornes à pied. Voilà, je vais faire une rando dans la montagne d'à côté. Moi, je pensais que toutes ces choses que je faisais étaient bénéfiques. Ça a été bénéfique parce que oui, j'ai maigri, parce que je me suis musclé. Par contre, ça m'a mis des systèmes de pensée complètement déviants. Déviants, c'est peut-être un mot un petit peu fort. Mais quelque part, je m'en suis rendu compte récemment, peut-être que j'ai fait des TCA sans m'en rendre compte.

  • Nathalie

    Ouais, c'est ce que j'allais te dire.

  • William

    Voilà, ce côté ultra contrôle et attention, gestion des glucides, etc. J'avais des amis qui me disaient, oui, mais c'est très bien ce que tu fais parce que ça te convient et ça te fait du bien. Ben ouais ! Ouais, mais entre guillemets, sur le long terme, tu ne peux pas avoir des courbes plates. Sur le long terme, ce n'est pas possible. C'est même trop bizarre d'avoir ce type de comportement sur le long terme. Mais moi, Dieu sait que ça a duré.

  • Nathalie

    À quel moment tu as fait l'insulinothérapie fonctionnelle avec des professionnels de santé ?

  • William

    En 2019

  • Nathalie

    Tu avais quel âge ?

  • William

    Je ne sais pas. En 2019, c'est-à-dire récemment en fait, au niveau temporalité, j'ai été diagnostiqué 86. Jusqu'en 2019, je n'ai pas changé de protocole. J'ai toujours été mes deux seringues et mes deux insulines. Je n'ai jamais connu les stylos.

  • Nathalie

    Jusqu'en 2019, tu n'avais pas le stylo ?

  • William

    Non.

  • Nathalie

    Oh punaise.

  • William

    Un jour, je vais voir ma diabétologue parce qu'évidemment, il fallait voir peut-être une diabétologue. Je lui dis, mais bon, je suis toujours avec mes seringues et mes deux insulines. Là, je pense que l'évolution de la maladie, il y a eu un truc là. Je voyais bien qu'il y avait des gens qui avaient des stylos.

  • Nathalie

    Et des capteurs. En 2017, le capteur.

  • William

    Voilà. Et ma diabétologue de l'époque, elle me dit, non, t'inquiète pas, on ne change pas une équipe qui gagne. Donc les capteurs, j'en avais entendu parler, mais à l'époque, ils n'étaient pas encore remboursés. Donc je m'étais dit, je vais attendre.

  • Nathalie

    Remboursement, juin 2017.

  • William

    Oui, oui. Eh bien ça, j'ai eu mon premier capteur en 2019. Le Freestyle.

  • Nathalie

    La diabéto, mais je ne le crois pas.

  • William

    Et du coup, je suis passé à la pompe Omnipod, pas l'Omnipod Dash, celle d'avant, en 2019.

  • Nathalie

    Tu as tout fait en 2019. T'es passé des seringues à la pompe.

  • William

    Ouais, j'ai tout pété en 2019.

  • Nathalie

    Tant mieux.

  • William

    Suite à un gros accident, en fait. J'ai fait un burn-out, entre guillemets, à mon travail, qui m'a déclenché une très, très forte hypoglycémie. Et je me suis fracassé la tête par terre. Je suis allé en réanimation. Je me souviens de rien, quasi. Je pense que j'ai mal dû gérer quelque chose le matin. J'étais énormément stressé, j'en pouvais plus. Le corps a dit « Ok, on arrête tout ! » Du coup, j'ai eu en même temps une grosse hypoglycémie qui m'a fait perdre connaissance, qui m'a fait heurter la tête par terre. Je me suis retrouvé en réanimation. Ensuite, je suis allé au... au service diabéto de l'hôpital pendant un bon petit moment. Et là, je n'ai pas eu le choix. On m'a posé le capteur, donc ça, c'était cool. Et puis, on m'a dit, tiens, il y a la pompe là qui peut être pas mal. Moi, je refusais de porter des pompes à tubulure. Le cathéter moi c'est pas du tout mon truc. En plus, je suis maladroit comme ça se peut pas. Moi, tu me fais porter ce truc, on dirait un Marsupilami humain. Comme je suis sûr, je me l'arrache 5-6 fois dans la journée. Ce n'est juste pas possible. Et en fait, on me propose cette petite pompe qui est toute petite, comme une boîte d'allumettes. Je dis, ouais, autant tester. Mais quand tu passes de seringue à ça, il faut tout réapprendre. Et là, c'était la catastrophe la plus complète. Je suis resté à l'hôpital le temps d'apprendre, etc., de faire des choses comme ça. Et puis, je suis reparti chez moi. C'était la cata, quoi. Parce que les protocles de l'hôpital, sont ce qui sont. Tu arrives chez toi, c'est foutu, c'est la catastrophe. J'avais un débit basal très adapté à l'hôpital, mais après, le moindre truc que je faisais, ça me mettait en hypo. Dès que je mangeais un truc, j'étais hyper... Je n'arrivais jamais à trouver l'équilibre. C'était l'enfer sur Terre, pour moi, évidemment. Il a fallu que je réapprenne ce qui m'a coûté moralement, ce qui m'a beaucoup coûté quand même... Après

  • Nathalie

    Et là tu as fait l'insulinothérapie à ce moment-là.

  • William

    Après je me suis remis en question, je me suis dit bon avant de se taper une trop forte dépression, il va falloir que j'apprenne. J'ai demandé, j'ai changé de diabéto, j'avais demandé à ma diabéto et j'aimerais quand même avoir la connaissance de comptage de glucides pour justement me perfectionner là-dedans et pour moins être dans les choux. Parce que c'est juste pas possible, en fait, le moindre truc que je fais, ça part en sucette. Je sors de chez moi, je suis en hypo, à peine je regarde un aliment, bam, ça part pour tous les sens. C'était à s'arracher les cheveux, en plus, j'ai une calvitie, donc ça sert plus à rien. Donc je m'arrachais le peu de cheveux qui me reste. Et du coup, quand je suis arrivé à faire justement le comptage de glucides, sur les deux jours de formation, tout d'un coup, il y a un nouveau monde qui s'est ouvert à moi. Donc ça, ça a été très bénéfique. Puis je le conseille quand même pour avoir un minimum de connaissances, malgré le choix très nul en maths.

  • Nathalie

    Il y a des applications maintenant pour... La pompe, elle fait pratiquement tout, la pompe.

  • William

    Voilà, maintenant, elle fait le produit en croix. Ça va. C'est clair.

  • Nathalie

    Il suffit de lui rentrer les données, c'est tout. Et encore, maintenant que tu es en boucle fermée, tu ne rentres que les glucides. Donc, tu vois, tu es passé du rien à tout. C'est tant mieux. Je suis trop contente pour toi, en tout cas.

  • William

    Je suis passé du jurassique à l'ère moderne. Du coup, là...

  • Nathalie

    Oh punaise ! C'est trop bien ! C'est trop trop bien !

  • William

    Non, puis en fait, je pense que me remettre en question, ça a été... ça fait partie un petit peu, je pense, je pense aussi du processus de la maladie chronique. Puis, c'est peut-être un peu de la personnalité, même si j'ai encore énormément de choses à régler, énormément de choses à voir en introspection psy notamment, sur mes comportements je pense que il faut être un minimum curieux et puis il faut se remettre en question c'est pas forcément que je me suis pas mis en question toutes ces années mais c'est vrai que c'était un protocole qui m'allait tellement bien évidemment je voyais bien qu'il y avait des stylos insuline lente rapide mais je regardais les gens et je me disais mais ils piquent bien souvent ces gens en fait, c'est bizarre, moi je fais juste deux injections. En fait, c'est pas vrai. Je ne faisais pas juste deux injections. Par ce que je me contrôlais énormément. Je faisais mes dextros. Et quand je regardais un peu mon état glycémique, soit je laissais tel quel, soit je me faisais des micro-bolus.

  • Nathalie

    Mais c'est bien et c'est clair qu'il faut apprendre sa maladie pour mieux gérer. Mais c'est vrai que tu es parti de loin. Et du coup, je pense que les gens, malheureusement, qui déclarent maintenant, ils ont quand même beaucoup de choses à leur portée.

  • William

    Heureusement, il y a plus de facilité aujourd'hui. Ça n'empêche pas, effectivement, je pense qu'il y a des nouveaux types de charges mentales parce que moi, il y avait déjà la charge mentale normale d'injection. Mais quand il est arrivé le téléphone, les vibrations, les bips, les alarmes, les codes couleurs, là, ça m'a mis hors de moi. Le téléphone qui me gueule dessus qui me dit : t'es en hypo, t'es en hypo, t'es en hypo, attention, t'es en hypo. Moi, ça m'a rendu complètement fou.

  • Nathalie

    Oui, il y a les travers aussi de la nouvelle technologie, c'est clair. C'est clair.

  • William

    C'est savoir aussi interpréter tout ça. C'est-à-dire que, et ma compagne me le dit très bien, elle me dit : Le téléphone, il ne t'engueule pas. En fait, il te prévient. Moi, je le prends comme une agression.

  • Nathalie

    Oh ça je suis d'accord.

  • William

    Des fois, j'ai envie de le balancer dans la pièce. Non, mais des fois, c'est juste fou. Donc en plus, ces alarmes, elles arrivent au moment le plus opportun. C'est-à-dire que tu es au cinéma, bam, ça gueule. Tu es à l'église pour des obsèques, ça gueule. Merci.

  • Nathalie

    Après, il faut peut-être prévenir, tu vois, les choses. C'est-à-dire, tu vois, être... anticiper. Voilà, je cherchais le mot.

  • William

    Anticipation, là, c'est un mot qui me va bien.

  • Nathalie

    Anticipation, organisation, prévention ...

  • William

    Voila tout le temps, il n'y a pas d'imprévu, il n'y a pas de légèreté. Moi, ce que je trouve regrettable, c'est qu'effectivement, il y a ce côté spontané qui a un peu disparu, en fait.

  • Nathalie

    Il a pris un coup dans l'aile.

  • William

    Oui, et puis la légèreté que j'avais un peu plus jeune, elle est moins... Effectivement, il faut toujours tout prévoir, tout anticiper. Il faut toujours avoir un coup d'avance.

  • Nathalie

    Toujours sa petite sacoche. Moi, c'est ça, ça me tue. Tu ne peux pas sortir de la maison les mains vides.

  • William

    Voilà, c'est ça. Donc, pas de légèreté, quoi. C'est fou, c'est fou.

  • Nathalie

    Non, ça, c'est quand même très handicapant. Qu'est-ce qui t'a poussé à écrire ce livre ?

  • William

    Moi, ce qui m'a poussé à écrire ce livre, justement, c'est ce... C'est quand j'ai eu mon accident, en fait. Plutôt suite à mon accident, pas à partir de mon accident. Mais ça m'a mis, comme je le disais tout à l'heure, j'ai eu des nouveaux appareils, un nouveau protocole, etc. Il a fallu que je m'y fasse quand même pendant un bon petit moment. Il a fallu que je réapprenne tout. En 2023, je me suis pris encore une fois une nouvelle claque. Commence l'année avec... Une nouvelle fois, un séjour à l'hôpital parce que j'ai fait un coma hypoglycémique qui m'a déboîté l'épaule. Je me retrouve à l'hôpital, je suis complètement dans les choux. Je ne sais pas trop ce qui se passe et on me dit bah ouais, t'as fait une réaction à une hypoglycémie, je pense que j'ai dû faire un bolus beaucoup plus conséquent, je me suis endormi par-dessus, ça ne m'a pas réveillé et c'est parti en séance de tremblements, épaule déboîtée, pompier et hôpital. Je me souviens un peu d'avoir commencé l'année comme ça. Et quand je suis revenu chez moi, je pensais que je maîtrisais mon diabète, mais en fait pas du tout. C'est lui qui me contrôle. C'est lui qui prend le pas, c'est lui qui décide. C'est mon colocataire qui a pris beaucoup trop de place et qui fait bien ce qu'il veut chez moi. Et là, moi, je suis dans un coin et je subis. Je subis, je ne sais plus quoi faire. Je ne sais plus quoi faire. Je me dis qu'il faut que... il faut que je me débarrasse de ce truc c'est pas possible, je peux plus vivre avec ça ça prend une telle place dans ma tête dans ma journée que ça en devient complètement anxiogène. Je me dis, je vais peut-être devenir fou, je pense que je vais vriller il faut que ça s'arrête au moins un jour il faut qu'au moins un jour mon colloc il me foute la paix au moins une journée ne serait-ce qu'un temps, je ne me demande que ça c'est pas grand chose, mais non ça ne s'arrête pas. Et du coup, j'ai pris quand même soin de moi par la suite. En 2024, je suis sorti de ma grotte, littéralement. Parce qu'avant, je ne m'intéressais pas aux autres diabétiques. Je n'en connais pas, je n'en connais très peu. J'ai deux copains diabétiques que je ne vois pas énormément. Donc quand on se voit, on ne parle pas de ça. Et quand on en parle, c'est pas le sujet majeur. Et quand je suis sorti de ma grosse boîte, littéralement, j'ai commencé à écouter un podcast. Ah, deux podcasts. Mais j'y suis allé à tâtons, sur la pointe des pieds. Parce que moi, je me suis dit, je ne veux pas entendre des trucs qui vont me détruire le moral. Ce n'est pas le moment. Et puis, je n'ai pas envie d'entendre des trucs, des gens au travers des podcasts qui vont me dire, ouais, mais mec, en fait, tu n'as jamais accepté ta maladie. C'est pour ça qu'en fait, tu es comme ça. Alors, l'acceptation, attention, j'ai un rapport avec ce mot qui est très compliqué. J'ai une acceptation en dent de scie, j'assume parfaitement mon diabète, mes appareils sont visibles et je veux qu'ils soient visibles, on ne me pose jamais de questions là-dessus. Je pense que ce n'est pas que je suis un gars. Il y a très peu de monde qui vient me questionner là-dessus. Quand c'est fait de manière rigolote, ça va, je me fais éducateur, mais quand c'est un petit peu bête, je me mets au niveau de la bêtise. Et au point de vue de l'acceptation, autant les diabétos que certaines personnes m'ont dit « mais de toute façon, t'acceptes pas ta maladie » . Je me suis dit « mais ils ont raison en fait ces gens-là » . En fait, c'est vrai, je ne dois pas accepter ma maladie. Donc, en fait, les autres diabétiques, eux, ils l'acceptent et ils vivent mieux que moi. Moi, je ne l'accepte pas. Ils ont peut-être raison. Alors, si je ne l'accepte pas, est-ce que je serais là pour en parler ? Au final, je l'accepte un peu cette maladie quand même, je l'assume. Bon, ok. Mais bon, ça se passe plutôt bien, oui. Mais les autres diabétiques, ils font comment ? Et quand j'ai commencé à écouter des... des récits en podcast, des articles ou même des vidéos. En fait, les gens, tout d'un coup, ça a fait tilte parce qu'ils avaient le même discours que moi. Parce que j'ai entendu des échos de vie avec des gens beaucoup plus jeunes que moi qui m'ont fait dire « Mais dis-donc, il y a des gens, ils n'ont même pas trois ans de diabète, ils osent dire haut et fort. » Ben ouais, moi, ça me saoule. J'en ai marre. Et je le dis. Parce que moi, pour moi... Ça a toujours été un interdit de le dire. Ça faisait de moi quelqu'un qui se plaint entre guillemets. Je ne sais pas si je donne une bonne image, mais je n'avais pas envie de passer pour le ouin-ouin du coin qui dit « Moi, j'en ai marre de mon diabète ! » Et puis surtout, il y a toujours la comparaison avec d'autres maladies. « Mon gars, ta diabète, ça se soigne ! » Parce que là, il y a des gens qui sont sous les bombes, et puis il y en a qui sont en phase terminale. Donc toi, avec ton petit diabète, tu vas te taire. J'ai vite fermé ma bouche face à tous ces trucs-là. Et quand j'ai commencé justement à m'ouvrir, à sortir de ma grotte, là tel y un ours, tel ours alpin, quand j'ai écouté tout ça, je me suis dit « Ah ouais ! » Il y a un peu plus de sérénité qui s'est quand même opérée moi. Et puis j'ai commencé à travailler justement intérieurement et là je me suis dit « Bon... » Je vais me faire ma propre psychoanalyse. Au-delà de vouloir sortir un livre, j'ai commencé à écrire. Plus j'écrivais, plus les souvenirs revenaient. Et plus les souvenirs revenaient, plus j'écrivais. Et puis ça faisait comme ça, montagne, montagne, montagne. Et puis en plus, moi, je ne suis pas écrivain, je n'écris pas énormément. Il y a une époque, j'écrivais, mais je n'écris plus. Et l'écriture, c'est comme un muscle. Plus tu le travailles, plus ça se développe. Mais moi, il a fallu que je reparte un petit peu de zéro. Donc au début, mes récits étaient très, très, très bruts et très rentre dedans parce que j'avais des comptes à régler. Surtout avec mon passé, j'ai commencé à sortir les gants de boxe. Et bon, quand tu tapes sur ton clavier avec des gants de boxe, ce n'est pas terrible. Donc je les ai un petit peu enlevés. Et puis j'ai commencé à muscler mon écriture, à muscler le jeu. Et j'ai commencé à écrire, écrire, écrire. Puis au fil du temps, je me suis dit, je vais y rajouter des couleurs, un peu des odeurs, un peu des sensations. Il faut un peu que je décrive mon entourage, pas que le diabète. Et puis en fait, des voyages, j'en ai fait. J'ai vécu en Ukraine, j'ai vécu au Québec, je suis allé trois fois en Afrique de l'Ouest, je suis allé partout un petit peu en Europe. Il y a des choses à raconter au travers de tout ça, comment je l'ai vécu, au travers de mon diabète, comment j'ai vécu la chaleur du Cambodge avec ma pompe, parce que là, j'étais sous pompe, ça remonte à pas très longtemps. Et au fur et à mesure que j'ai construit le bouquin comme ça, il s'est posé aussi la question à savoir est-ce que j'allais mettre des chiffres sourcés ou non. Et spoiler, c'est un récit de vie, c'est pas un guide pratique pour diabétique, c'est pas un livre de médecine, c'est mon vécu à travers mes yeux. Donc forcément, il y a des choses qui peuvent plaire ou pas, ça c'est à tout un chacun de juger. Il n'y a pas de problème là-dessus. Moi, j'ai eu un vécu qui m'est propre. Ma relation avec le médecin, certes, elle a changé. Il faut que je travaille encore dessus. Mais voilà, il y a quand même dans ce récit, il y a de la colère, mais aussi il y a de l'humour. Il y a du cynisme, il y a du second degré, il y a du voyage. Et puis, je n'ai pas voulu sourcer non plus trop de choses. Il y a quelque chose que je me suis rendu compte. Je ne savais pas ce que traversaient les femmes diabétiques. J'étais au courant de rien, là dessus. Quand j'ai commencé à écouter des podcasts, j'ai entendu des choses de femmes. Mais il n'y a que les femmes qui parlent. Et en fait, je ne sais pas ce qui se jouait chez la partie féminine. Je ne savais pas que d'être pluggé avec un capteur, une pompe, ça pouvait un petit peu entraver le côté féminin. Ça, je ne m'en étais jamais rendu compte. Je ne le voyais pas comme ça, en fait. Et le même, je ne le voyais pas du tout. Et puis, j'ai commencé un petit peu à creuser, puisqu'en écoutant des podcasts où des femmes parlent, je me suis dit, ah mais ouais, mais elles vivent ça au quotidien, comme la grossesse, c'est un truc de dingue. Et puis aussi, dans mon bouquin, je parle de sexualité, mais pour certains, ça va être très effleuré, et puis pour d'autres, pas, pas assez creusé, mais je n'ai pas voulu mettre des mots et des chiffres que je ne maîtrise pas. Je n'ai pas de relation avec une diabétique féminine qui aurait pu me guider. Donc je me suis un peu orienté sur des choses que j'ai appris, mais j'en suis resté là en surface. J'ai tout de suite pris conscience des réalités féminines qui m'étaient totalement inconnues. Jusqu'à très peu de temps. Et puis surtout, au travers de ce bouquin, j'ai aussi voulu dire, moi je vis ça, j'en ai marre, je le dis, mais je n'ai pas envie que ça soit trop pathos, ni tire larme en fait. Ça, ça a été une réflexion qui m'a beaucoup hanté. Je me suis dit, il ne faut pas que ce récit soit dans la plainte. Parce qu'effectivement, il y a des choses qui m'ont un peu bousculé, étant plus jeune, qui m'ont beaucoup atteint. Il y a tout un côté qui est quand même assez rigolo. J'ai vécu des trucs assez drôles, donc il faut aussi en parler. Il faut avoir une balance assez équilibrée pour passer justement d'un sujet peut-être un petit peu dramatique, un petit peu touchant, à un sujet derrière qui va te contrebalancer avec une anecdote un petit peu débile sur ce qui a pu se passer avec ton diabète ou non.

  • Nathalie

    Et tu t'adresses à qui ?

  • William

    En fait, je m'adresse autant aux diabétiques qu'à leur entourage, qu'à un public plus large, et puis même à des professionnels de santé. En toute modestie, vraiment, attention, je pèse mes mots encore une fois. C'est quand même pour moi très bizarre d'avoir sorti un bouquin. Je le dis, il y a le syndrome de l'imposteur des fois, et tu te tais parce que je t'ai assez entendu comme ça. Tais-toi, tu te ranges dans le placard et tout. En fait, je me suis dit que peut-être que les professionnels de santé, ils avaient peut-être une curiosité de voir ce type de récits vus de l'intérieur. Puisque des récits de diabétiques de type 1, je ne pense pas qu'on en ait énormément. On a des bouquins, des fois peut-être on a des grands sportifs diabétiques, mais là, est-ce qu'on peut se calquer par rapport à leur vécu ? Alors c'est très admirable, attention, mais des fois on peut lire des choses où on est dans la performance physique et dans la performance glycémique. Moi je ne m'y reconnais pas forcément. Moi je me suis dit, je vais parler de moi et de mon vécu pour un mec lambda qui vit son diabète au quotidien. Mais très vite. Je me suis dit, mais attends, ton égo trip là, tout le monde s'en fout. Ta vie, mais tout le monde s'en fout en fait. Ton petit côté narcissique avec ton diabète, on s'en fout en fait. Puis voilà, du coup, je parlais tout à l'heure du syndrome de l'imposteur. Donc lui, il a fallu vraiment le taire, un peu le mettre de côté. Et puis me dire, bon, je vais sortir ce bouquin. Ça me fait un petit peu flipper. Je l'ai accouché au mois de février. Et puis maintenant, il fait sa vie. Et il ne m'appartient plus. Maintenant, il est disponible. On peut le lire. Il n'y a pas de soucis là-dessus. Donc, c'est très cool. Comment dire ? Pour le moment, ce qui est la mission, on va dire, est pas mal accompli. Puisque j'ai eu des retours assez positifs de personnes diabétiques ou non qui m'ont dit que c'était... assez sympas à lire et qui se sont reconnus. J'ai eu une partie de ma mission qui est quasiment accomplie, à tant de pourcents, je ne sais pas, mais le pari est gagné au moins de ce côté-là, parce que j'avais très peur des réactions. Je parle de 1986 jusqu'à ici, peut-être que des jeunes diabétiques qui ont une vingtaine d'années il s'en fout de mon récit, parce que ça parle de l'ère jurassique, ça ne leur convient pas. Des références musicales qui ne parlent peut-être pas forcément à tout le monde. Il y a des choses que je mentionne qui ne sont peut-être pas forcément intéressantes pour tout le monde. Mais au moins, avec ce petit bouquin, avec cette petite modestie, je me dis que j'apporte un peu d'une pierre à l'édifice. Dans ce côté maladie chronique, est ce qu'il y a des bouquins qui existent, oui, il y en a, et il y a le mien.

  • Nathalie

    Pour un diabétique, il va se reconnaître, ça c'est sûr. Pour un jeune diabétique, il va apprendre que c'était galère avant et que maintenant c'est mieux. Et que peut-être, quelque part, ça va lui faire du bien. Après, pour les gens qui ne connaissent pas la maladie, là on comprend bien ce que vit un diabétique et les galères, les moments... heureux, que tu as pu vivre des grands voyages, tout ce que tu as fait, qu'on peut faire beaucoup de choses avec le diabète. Et franchement, pour les diabétiques, comme je te l'ai dit, moi, ça m'a fait réfléchir. Il y a des passages qui m'ont fait réfléchir sur comment j'appréhendais mon propre diabète. Et voilà, moi, ça m'a fait du bien. Et puis en plus, c'est une lecture masculine. Et ça, c'est très important parce que des bouquins, il y en a, c'est que des féminines, c'est que des auteurs féminins donc des autrices du coup donc voilà je pense que ce bouquin fait du bien franchement il n'y a pas besoin d'avoir le syndrome de l'imposteur, maintenant il est fait donc tu peux plus c'est fait, c'est fait donc il est là et franchement j'espère j'espère qu'il va être lu.

  • William

    En fait les premières lectures ça a été mon entourage proche, bien entendu. Alors, tout de suite, déjà, mes parents, ça a été un petit un petit peu un coup, parce qu'ils se sont rendus compte de ma réalité. Ils ne se sentaient pas forcément rendus compte de tout ce qui se jouait, tout ce qui s'opérait en moi depuis ... ans. Donc, ça a mis la lumière, justement, sur mon vécu, sur ma pathologie. Je parle d'eux et ça les a grandement bousculés. Pas en mal, mais du coup, il y a un côté, ça a ouvert les vannes de la parole. Dans un contexte familial où la parole n'a jamais été primordiale, du coup, même avec mon frangin, que j'adore, on est beaucoup plus, je pense qu'on est un peu plus communicants. Et puis, ce qui m'a étonné aussi, ça a été mon entourage. Parce que j'ai été étonné de leur étonnement. En fait, les premiers retours, ils m'ont dit, c'était, mais on ne pensait pas en fait que c'était comme ça. Parce qu'à te voir, on ne se doute absolument pas de ce que tu vis. Parce que pour eux, c'est, on se contrôle le bout du doigt, on fait une analyse sanguine, on se fait peut-être une piqûre, puis voilà. Puis après, le reste de la journée, la nuit, tout va bien. Non, non. Ils se sont rendus compte que c'est H24. Et qu'il y avait... tout un univers autour de l'alimentation, autour des appareils dispositifs médicaux, qu'il fallait faire des examens, qu'on avait des choses à faire ou ne pas faire dans certains boulots, etc. Et que tout d'un coup, ça a mis un coup de projecteur sur le diabète, qui, eux, le voyaient juste à travers moi, mais par un tout petit prisme, par une toute petite meurtrière, tu vois. Et du coup, au lieu de m'expliquer en soirée avec des mots que je ne maîtrise pas forcément, ce livre apporte beaucoup plus de clarté à la maladie, au diabète, à mon diabète entre guillemets, pour des gens qui sont dans mon entourage proche, moins proche et un peu plus éloigné. Je me suis quand même un peu remis en question. Je me suis dit, mais... c'est de ma faute si on ne prend pas trop en considération ma pathologie, mon handicap c'est de ma faute parce que moi j'en parle de manière détachée, de manière très simple, du coup en face, qu'est-ce qu'ils se disent ? ça va, ils le gèrent bien en fait, donc ça va, tout va bien mais quand il se passe des trucs un petit peu difficiles, comme des grosses hypos où je suis complètement à ramasser la petite cuillère par terre tout le monde se dit, mais qu'est-ce qu'il a en fait ? qu'est-ce qu'il se passe ? À force de traiter mon diabète comme un rhume au travers de mes amis, ça n'a jamais été pris à sa juste valeur. Et puis eux, de leur côté, il y a une forme de pudeur. Ils se disent comment lui, il le vit. Si on lui pose des questions, comment il va réagir ? Comment il va nous parler ? Est-ce que ça l'embête si on pose des questions ? Est-ce qu'on peut lui poser des questions ? Parce que moi, j'ai eu des retours comme ça, en fait, de potes très proches qui m'ont dit qu'en fait, on n'osait pas t'en parler, qu'on n'avait pas ce que tu vivais.

  • Nathalie

    Tu vas nous dire, où peut-on se procurer ton livre et comment suivre ton actualité ?

  • William

    Alors, pour se procurer mon superbe livre... de 161 pages à la superbe couverture digne d'un polar de ce nom. Alors il faut se rendre sur Amazon malheureusement pour certaines personnes le diable en personne Amazon ! En fait je me suis adressé à Amazon pour la simple, c'est pour une question de praticité parce que c'est beaucoup plus simple pour moi parce que je suis en auto-édition, je suis pas du tout chez un éditeur, il y aura beaucoup à dire là-dessus mais bon ça c'est encore une autre paire de manche, je me suis dit Amazon avec tous leurs défauts qu'ils ont, il y a quand même l'avantage d'être en auto-édition et de réaliser un bouquin quand même assez facilement. Donc, il est disponible sur Amazon au doux nom de mon colocataire indésirable avec un nom d'auteur de William Belle. Donc, vous pouvez suivre plus d'actualités sur ma page Instagram, c'est mon coloc indésirable, où il y a pas mal de vidéos qui concernent l'évolution et l'écriture de ce livre. Voilà, jusqu'à sa finalité, jusqu'à sa présentation, la sortie. Le lien est bien sûr en description dans ma bio. J'ai aussi une page Facebook et TikTok, mais je suis moins présent sur ces deux plateformes.

  • Nathalie

    As-tu des projets liés au diabète ou à l'écriture en préparation ?

  • William

    Alors non, pas du tout. En fait, je pense que, pour la petite histoire, ce bouquin, je l'ai écrit d'une manière frénétique. En fait, ça a été une frénésie, ça a été une impulsion, parce que je l'ai écrit en très peu de temps. Je pense que c'était surtout pour faire un gros nettoyage de printemps et pour me vider la tête, ça a été thérapeutique. Et je pense que ça a été très libérateur. Mais après, refaire un bouquin, je ne pense pas, ce n'est pas mon domaine, ce n'est pas mon secteur. Je trouve que mon style d'écriture, il est ce qu'il est, ce n'est pas dingo, on est loin du Victor Hugo. Mais ce n'est pas le but, mon style d'écriture, il est brut et il est sincère et authentique, il me ressemble en fait. Et donc non, je n'ai pas forcément de projet lié avec le diabète, mis à part faire des imbécilités sur Instagram avec des vidéos un peu débiles, mais écrire un nouveau truc, non. Par contre, j'ai un truc qui me trotte dans la tête depuis quelques jours, mais je ne sais pas du tout ce que je peux en faire. Moi, j'habite au pied des Alpes et j'aimerais bien faire une journée soit rando, soit pique-nique pour aller sur un point de vue du Vercors, de la Chartreuse ou de Belledonne. D'être entre diabétiques et accompagnants. Pourquoi pas, je ne sais pas, se taper un bivouac, pourquoi pas. Ou une seule journée d'avoir l'occasion de parler de diabète mais pas que. D'échanger et de passer surtout un bon moment. C'est surtout ça le but. Peut-être mettre ça en place mais je ne sais pas quand, comment ? Là, je suis vraiment dans une idée très vague de la chose. Moi, je connais beaucoup le Vercors. C'est une montagne très proche de moi, c'est de la moyenne montagne. La Chartreuse aussi, c'est super intéressant, c'est assez joli. Belledonne également. Mais si, par exemple, il y a quelque chose qui s'opère pour faire une randonnée entre diabétiques et accompagnants, le choix de la rando, il s'offre à nous. Il y a énormément de coins, on n'est pas en manque du coup. On n'est pas en manque pour des gens qui n'ont peut-être pas forcément l'habitude de marcher, autant pour des gens qui sont très férus de rando. On peut faire quelque chose, un mix entre les deux. Et puis, le but, c'est de prendre du plaisir. Un peu pour clôturer notre entretien, et je t'en remercie, je dirais simplement, ne faites pas comme moi, n'attendez pas 30 ans pour vous ouvrir. Je sais que c'est parfois... Moi, j'ai eu beaucoup de mal à m'ouvrir à tout ce monde-là. Et puis, quelque part, je ne veux pas que mon quotidien soit trop là-dessus, parce que ça peut vite devenir anxiogène. Partagez, explorez, vivez, ouvrez-vous à ce qu'il y a en dehors de chez vous. Je suis bien gentil à dire des conseils comme ça. Moi, des fois, je ne le fais pas. Mais voilà je fais au mieux avec mes petits démons intérieurs que j'arrive à mieux maîtriser qu'avant même si j'ai quand même pas mal de chemin à faire, certes le diabète c'est un boulet mais il ne nous enchaîne pas il ne nous définit pas il y a beaucoup de choses qu'on peut faire donc là dessus je pense qu'il ne faut pas attendre, oui on le fera demain il faut le faire de suite. Moi, j'ai un petit peu du mal avec tout. Je ne veux pas avoir le discours du jeune entrepreneur Instagram, mais n'attendez pas le dernier moment pour vous ouvrir. Je pense qu'en plus, actuellement, il y a entre des ressources pour communiquer entre des podcasts Instagram, TikTok, Facebook ou YouTube. Il y a beaucoup de ressources et puis il y a quand même des acteurs aussi français qui sont présents et qui se bougent beaucoup et qui peuvent donner justement réponse à pas mal de questions. Quand on est un peu la tête sous l'eau, la tête dans le sable, en train de se dire « personne ne me comprend, je suis seul, je suis seul avec cette pathologie, même mes proches ne me comprennent pas, mon diabéto ne me comprend pas » , eh bien, viens, on en parle.

  • Nathalie

    Merci beaucoup William pour cet échange riche et inspirant. Ton livre, Mon colocataire indésirable, offre une belle métaphore de la vie avec le diabète et je suis sûre qu'il parlera à de nombreuses personnes concernées, mais pas seulement. Si vous souhaitez en savoir plus sur William et son ouvrage, je vous invite à le suivre sur son Instagram et à vous procurer son livre. Vous trouverez toutes ses coordonnées dans les notes de l'épisode. Au revoir à toutes et à tous et prenez bien soin de vous !

  • William

    Eh bien, à la prochaine ! Merci beaucoup !

  • Nathalie

    Je te remercie pour ton écoute. Si cet épisode t'a plu, que tu souhaites soutenir le podcast, je t'invite à le partager autour de toi, à t'abonner pour être averti du prochain épisode, à laisser 5 étoiles et un avis sur ta plateforme d'écoute. Tu as la possibilité aussi de me contacter, soit sur mon compte Instagram, soit par e-mail que tu trouveras dans les notes du podcast. Je te dis à très vite pour un nouvel épisode de Vivre le diabète à la recherche de l'équilibre. Prends bien soin de toi.

Chapters

  • Présentation

    01:49

  • Diagnostic et annonce de son diabète type 1

    03:13

  • Pourquoi un colocataire indésirable ?

    14:59

  • Évolution de sa relation avec son "colocataire"

    19:25

  • Pourquoi ce livre ?

    39:06

  • A qui s'adresse William ?

    49:41

  • Où se procurer le livre ?

    57:38

  • Les projets

    59:03

  • Conclusion

    01:01:28

Description

🎙️ Dans cet épisode, je reçois William Belle, diabétique de type 1 et auteur du livre “Mon colocataire indésirable”.

Avec beaucoup de sincérité et d’humour, William nous raconte son parcours avec le diabète, les défis du quotidien et ce qui l’a poussé à écrire ce livre original, dans lequel il compare son diabète à un "colocataire" qu’il n’a jamais invité, mais avec lequel il doit vivre.


Ensemble, nous parlons de l’annonce de la maladie, de l'acceptation, des idées reçues sur le diabète, mais aussi de l'importance de sensibiliser et de partager son expérience.


Un témoignage inspirant et plein d’humanité, à écouter sans modération !


📚 Pour suivre William Belle et découvrir son livre : 


🎧 Bonne écoute !

Prenez bien soin de vous !

“Et n’oubliez pas, plus vous apprenez sur votre maladie, mieux vous la gérez !”


Si tu souhaites partager ton expérience, je t’invite à me contacter par email, je serai ravie de partager ton récit dans l'un de mes futurs épisodes.


💬 Vous avez aimé cet épisode ? Partagez-le au moins à une personne, laissez 5⭐ et un avis sur votre plateforme d’écoute préférée !

Cela aide Vivre le diabète à grandir et à toucher plus de monde. 

Merci pour votre soutien ! 🙏


Vous pouvez soutenir financièrement mon travail grâce à la plateforme Tipee ICI https://fr.tipeee.com/vivre-le-diabete

Ou bien vous pouvez toujours être un relais en partageant mes contenus !  

Je vous remercie sincèrement !


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🔵 Me contacter par email : nathalie.vivrelediabete@gmail.com

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🔵 Site internet : www.vivrelediabete.fr

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Crédit musique : Xavier Renucci 



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Nathalie

    Bienvenue dans Vivre le diabète à la recherche de l'équilibre, le podcast qui vous accompagne avec des conseils, des témoignages et des rencontres inspirantes autour du diabète. Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir William Belle, auteur du livre Mon colocataire indésirable. William est diabétique de type 1 et à travers son ouvrage, il partage son quotidien avec cette maladie qu'il décrit comme un colocataire qu'on n'a pas choisi. Mais avec lequel il faut apprendre à cohabiter. Nous allons parler avec lui de son parcours, de ce qui l'a poussé à écrire ce livre, des défis qu'il rencontre au quotidien et du message qu'il souhaite transmettre aux personnes vivant avec le diabète. Je suis Nathalie, diabétique de type 1 depuis février 2010. Je m'adresse à toi qui viens de déclarer un diabète, à toi qui es diabétique de type 1 ou de type 2, ou à toi qui es en pré-diabète, mais aussi à toi qui soutiens et aides que tu sois parents ou conjoints, etc. Je m'adresse également à toute personne désireuse de savoir ce qu'est le diabète vu par une patiente diabétique. Désormais, tu peux soutenir financièrement mon travail grâce à la plateforme Tipeee dont tu trouveras le lien dans les notes de l'épisode. Ou bien, tu peux toujours être un relais en partageant mes contenus. Je te remercie sincèrement. Et avant de commencer, si cet épisode vous plaît, pensez à le partager au moins à une personne. A laisser 5 étoiles et un avis sur votre plateforme d'écoute préférée. Ça m'aide énormément à faire grandir ce podcast et à toucher encore plus de monde. Bonne écoute et n'oubliez pas, plus vous apprenez sur votre maladie, mieux vous la gérez. Je vous laisse maintenant avec l'épisode du jour. Bonjour William !

  • William

    Hello Nathalie, comment ça va ?

  • Nathalie

    Ça va, ça va, j'espère que toi aussi.

  • William

    Ça va très bien, merci de m'accueillir dans ton podcast que j'écoute régulièrement. Il y a une très bonne démarche et c'est un très beau travail, bravo.

  • Nathalie

    Merci, ça me touche. William, peux-tu te présenter ?

  • William

    Ok, William, de mon prénom, je ne dirais pas mon nom de famille parce que vous n'avez qu'à acheter le livre. Alors moi, je réside dans le sud-est de la France, plus exactement en Isère au pied des montagnes. Je suis entre la Chartreuse et le Vercors et juste à côté des Alpes. Je n'ai pas le pied marin, j'ai plutôt le pied montagnard. Je suis diabétique. Étonnant, n'est-ce pas ? Très étonnant. Je suis diabétique depuis très longtemps. Je ne vais pas dire aussi le temps de ma pathologie. Il faudra faire un petit calcul. J'ai été diagnostiqué en 86 et j'avais 13 ans. Je vous laisse faire le calcul. Ça veut dire que je suis vieux, pour certains. Et je suis photographe vidéaste à mes heures perdues. Enfin, professionnellement, mais en ce moment, c'est très calme. J'en profite de ce temps alloué pour discuter un petit peu avec toi.

  • Nathalie

    Génial. Peux-tu nous raconter ton diagnostic et comment as-tu vécu l'annonce du diabète de type 1 ? Très important.

  • William

    Alors... Si tu veux bien, déjà, on va prendre une petite machine à voyager dans le temps. On va aller direction l'ère du diabète version jurassique, donc direction 1986, où les coupes mulet étaient beaucoup plus tendances socialement parlant qu'aujourd'hui. Et surtout qu'à l'époque, on pensait que le diabète, c'était juste pour les grands-mères qui avaient un petit peu abusé du coca. Moi, ma colocation avec ce fameux colocataire un petit peu indésirable, c'est fait à l'âge de 13 ans, donc en 86. Moi, j'étais un ado assez introverti. Je suis fils d'agriculteur. On vivait dans une ferme assez éloignée. Un environnement familial sympa, mais avec très peu de dialogue par contre. On ne communique pas, on ne parle pas. On est dans une génération où c'est des taiseux. Mes parents ont aussi bien entendu leur vécu et leur casserole, mais les conversations un petit peu importantes n'ont pas lieu. Donc on ne discute pas, on se tait et on subit un petit peu. Et quand tu es dans ce contexte-là, quand une maladie chronique te tombe dessus, la maladie vient encore plus clouer le cercueil du dialogue familial. Je pense que comme tout diabétique, je me suis un peu transformé en véritable fontaine ambulante. Je buvais, j'urinais, je buvais, j'urinais. Par contre, ma mère, avec son œil de lynx, a très vite décelé, qu'il y avait un truc qui n'allait pas. Donc moi, j'ai été diagnostiqué relativement tôt. Je n'ai pas fait d'acidocétose. Je suis passé par la case de prise de sang, généraliste, direction hôpital. Je ne vais rien te cacher, pour moi, ça a été un traumatisme. Aller à l'hôpital parce que je ne me sentais pas malade. Je buvais énormément, mais je ne comprenais pas pourquoi. Et quand je suis parti à l'hôpital, j'étais terrifié. Je me suis dit, c'est bon, c'est la fin, j'étais en larmes, je ne comprenais pas ce qui se passait. Ma mère ne me disait rien. Elle m'a dit, on va à l'hôpital. Elle était, bien entendu, encore plus embêtée que moi, je pense. Et quand on est arrivé à l'hôpital, comment te dire que la prise en charge était complètement catastrophique. Il n'y avait pas du tout de prise en charge de toute façon. Le maître mot qui a été vraiment, moi, qui me reste en mémoire, quand je suis resté à l'hôpital, c'est le silence et l'incompréhension. Je n'ai pas été informé de suite de ce que j'avais. Je coupe un petit peu, j'avance dans le temps. Quand je suis retourné à l'école, au collège, je ne savais toujours pas ce que j'avais. Je savais que j'étais diabétique et c'est tout. Par contre, je n'ai pas été informé de quoi que ce soit. Je n'ai pas eu souvenir d'avoir eu des cours ni une sensibilisation. On a été très vite perdus à l'hôpital devant un jargon médical qui était incompréhensible autant pour moi que pour ma mère. Puis pour mes parents, je pense aussi, ça a été très culpabilisant aussi parce qu'ils se sont dit c'est de notre faute. Je pense que moi, je ne suis pas parent, je n'imagine pas le truc, mais ça doit être un peu l'idée qu'on doit se faire de la chose. Et puis, le jargon médical, comme je te disais, c'est qu'on te parle d'insuline, de dextro, d'analyse d'urine, d'aliments interdits, de régime alimentaire. Tu te dis, mais qu'est-ce qui se passe, quoi ? Et puis, à un moment, on nous a dit, voilà, tu es diabétique. Mais diabétique, ça veut dire quoi ? Voilà, moi, je ne sais pas. Ma mère non plus. Les médecins, ils nous expliquent des trucs. Je ne sais pas, il n'y a aucune documentation, il n'y a pas une BD pour adultes, pas pour ados, pardon, il n'y a pas une brochure, il n'y a rien du tout. Moi, j'ai 13 ans, je suis encore admis au centre pédiatrique. Je ne suis pas chez les adultes, je suis encore chez les enfants, donc je suis le plus grand des enfants. Mais même là, mystère absolu, je reste pendant on va dire un peu plus de 15 jours à l'hôpital, et c'est un balai d'infirmières, d'interne, de, de gens qui passent me voir, qui me font des injections. Et pourquoi ? On ne sait pas. On ne sait pas ce qu'il se passe. Et de voir ma mère préoccupée, de toute façon, je savais très bien qu'il se jouait un truc. Je savais très bien qu'il se passait quelque chose de pas normal. Puis surtout, le diabète, pour nous, il n'y a pas d'antécédent. C'était inconnu au bataillon. On n'avait jamais entendu parler de ça. Et on ne connaissait personne qui avait ce type de maladie chronique. Et puis, il y a eu un espèce de chantage. Je le prends comme un chantage, mais si je voulais sortir de l'hôpital, il fallait que je m'apprenne à faire mes piqûres. Alors, je remets encore du contexte, parce qu'à l'époque, il n'y avait pas de stylo. J'avais deux insulines, une rapide, une lente et une seringue. Donc le matin, il fallait se faire un mélange dans la seringue d'insuline rapide que tu complètes avec de la lente. Ce qui veut dire que l'insuline rapide va jouer entre le début de ton injection jusqu'à midi, l'insuline lente, elle reprend le boulot de midi jusqu'au soir. Et le soir, même opération, tu te fais une injection avec une seringue de ce même type d'insuline. Insuline de porc à l'époque. J'ai l'impression d'être un vieux croulant du diabète. Mais à l'époque, c'était comme ça. Donc, ma mère a revêtu une espèce de blouse d'infirmière parce qu'elle aussi, elle a appris à faire des injections. Moi aussi, j'ai appris à les faire. Mais dans quelle temporalité, on ne savait pas. C'est-à-dire que, OK, je me fais des injections. Bon, OK, d'accord. Mais pourquoi, comment, jusqu'à combien de temps ? Demain, après-demain, dans un mois, qu'est-ce qui se passe ? Ah bah non, c'est pour toute la vie. Ah bon ? Ah d'accord. Si tu ne les fais pas, tu seras aveugle. On va t'imputer, puis tu vas mourir. Donc là, le choc, épée de Damoclès sur la tête. Et là, je me dis, ok, d'accord, je vais apprendre à faire mes injections. Voilà, s'en est suivi justement tout un processus comme ça. Et puis, restriction de sucre, régime alimentaire, qui a suivi, parce qu'à l'époque, c'était comme ça. Et puis, en fait, c'était restrictions et frustrations. De toute façon, au bout d'un moment, quand on est retourné à la vie civile, pour parler sortir de l'hôpital, moi, je suis revenu au collège, je ne sais plus dans quelle classe j'étais, mais je ne savais pas ce qu'ils jouaient en moi. Je ne savais pas. Comment réagir avec une hyper ? Je ne sais pas. Comment réagir avec une hypo ? Je ne sais pas. personne n'était au courant. Un seul prof était au courant, le prof principal. Je n'avais aucun passe-droit pour quoi que ce soit. Il n'y avait pas d'infirmerie à mon collège. Il n'y avait rien. Je ne me contrôlais pas pendant la journée. Il n'y avait rien du tout. C'était comme ça. Puis des fois en plus, quand je suis revenu au collège, je n'étais pas là pendant bien 15 jours. Il y a un prof qui s'est cru très sympa de me rentrer dedans parce que je n'avais pas fait le devoir, que je n'étais pas là pendant 15 jours. Donc ça aussi ça a mis un coup un petit peu au moral donc tu reviens, t'es malade tu sais pas trop pourquoi, tu connais pas les termes et puis en plus on vient te dire pourquoi t'étais pas là, ta maladie chronique, toi t'es bien gentil mais c'est les devoirs qui priment donc mon colocataire lui s'est bien installé tout doucement tranquillement et puis voilà dans une incompréhension totale dans un flou artistique bien de l'époque. Je fais un vite parallèle avec le monde hospitalier, c'est-à-dire que je ne vais pas leur jeter la pierre, mais pendant très longtemps, j'ai eu beaucoup de haine envers le système hospitalier, et surtout envers les diabétologues. C'est un corps de métier, mais ils ne sont pas bien ces gens-là. On a fréquenté trois diabétologues en sortant de l'hôpital. C'était un jugement sans appel à chaque fois qu'on allait les voir. C'était un peloton d'exécution, on se faisait tirer dessus à balles réelles, on se faisait engueuler, on se faisait infantiliser, c'était très culpabilisant, parce qu'on ne comprenait pas les termes. Qu'est-ce que c'est une hyper ? Je ne sais pas. Tu sais ce que c'est qu'un hypermarché ? Tu sais ce que c'est qu'une hyper ? Voilà, une hypo ? Je ne sais pas. On s'en est suivi des relations avec les diabétologues de l'époque, très compliquées, jusqu'à un moment où j'ai dit à ma mère, on arrête tout. On n'est pas là pour se faire engueuler. La maladie chronique te tombe dessus du jour au lendemain. On n'a pas fait médecine en diabétologie. Nous, on doit apprendre. Si les gens en face, ils n'ont pas un minimum d'empathie et un minimum de compréhension pour nous expliquer ce qui se passe, tu te retires de ces professionnels de la santé. Je n'ai plus vu de diabétologue pendant des années. Je suis allé voir mon médecin traitement, mon médecin de famille. À l'époque, il y avait des médecins de famille. Donc, on est allé les voir. Bon, elle n'était pas spécialisée dans le diabète, mais au moins, elle était à l'écoute. Ce qui a quand même beaucoup plus détendu la pathologie. Et puis, ma mère, dans ses recherches, elle a quand même trouvé un cousin lointain qui était lui aussi porteur du diabète de type 1 et qui lui a justement enseigné des choses, et qui lui a dit, ben voilà, ça se passe comme ça, l'alimentation c'est comme ça, mais lui, étant plus vieux, il avait d'autres types de protocoles. Du coup, il y a eu beaucoup plus de compréhension, et beaucoup plus de facilité à gérer la maladie au quotidien. Tout en fait, c'est bon, évidemment, moi quand je raconte ça, certains diabétologues sont là ouais, ouais, avant, avant, ouais, ouais, ok y'a pas de problème, mais moi je suis parti avec une grosse épine dans le pied en fait je me suis senti coupable d'être diabétique voilà et puis la peur de la mort, le côté, le côté, il va falloir se faire des piqûres toute la vie. Une charge, tout d'un coup, moi j'ai 13 ans, et puis tout d'un coup, dans la tête, t'évolues, et tu parais beaucoup plus vieux, entre guillemets, que tes autres camarades. Et ça, en fait, je ne l'avais jamais remarqué, mais effectivement, j'avais plus de maturité que certains de mes copains. Être attentif à ses sensations, s'écouter, ça, je ne le savais pas, mais ça faisait partie aussi de ce diabète qui est venu me rentrer dedans à l'adolescence.

  • Nathalie

    Et du coup, pourquoi avoir choisi de comparer ton diabète à un colocataire indésirable ? Comment c'est venu ça ?

  • William

    C'est venu plus en écrivant mon bouquin. En fait, je cherchais un dénominateur pour justement donner une image qui soit parlant un peu pour tout le monde. Parce qu'au début, ce n'était pas du tout mon colocataire indésirable. J'avais choisi un titre un peu plus mélodramatique, l'intrus à vie. Je ne sais plus ce que c'était. J'avais fait toute une liste de titres potentiels à mon livre. Et puis, à un moment, je me suis dit, attends, en fait, cette maladie chronique, elle a débarqué du jour au lendemain, elle a commencé à mettre des miettes de chips de partout chez moi, elle met ses pieds sur la table, elle renverse sa bière en plus elle m'attrape par le cou, elle me dit hé mec, je vais être là pour toi et puis en plus, j'ai signé un bail à vie, ça c'est cool et j'ai même mis mon nom sur la boîte aux lettres, donc ça serait impossible de te débarrasser de moi et en fait, en principe quand tu fais de la colocation, c'est pour partager des bons moments. Et là, ce n'est pas le cas. Donc là, l'autre loup, il est là. Et il va falloir faire avec. Donc du coup, je me suis dit, le colocataire indésirable que je pense que ça peut parler, même si, bien entendu, les colocations peuvent très bien se passer par moments. Mais je pense que le titre, il est adéquat.

  • Nathalie

    Et du coup, en fait, c'est venu... Parce que tu voulais écrire un livre.

  • William

    Tout à fait.

  • Nathalie

    D'accord, ce n'est pas quelque chose que tu avais déjà réfléchi. D'accord, ça, je ne savais pas, tu vois.

  • William

    Je n'avais pas réfléchi à ça avant. Je disais à mon entourage, je suis diabétique. Des fois, je précisais pour les plus intéressés, de type 1. Vraiment, c'était plus vraiment pour le côté imagerie de mon livre. Je ne l'avais pas forcément en tête depuis très longtemps. Par contre, la pochette, oui. Justement, la pochette de mon bouquin, ça, je l'avais depuis longtemps. Parce que je me disais, c'est vraiment une imagerie que j'avais en tête, que j'imaginais. Quand il a fallu la faire, je me suis dit, je vais appeler un copain, on va faire comme si on a fait un shooting un après-midi avec Hugo, que je salue d'ailleurs. Et du coup, on a fait cette espèce d'aspect fantomatique qui est derrière moi, qui m'empoigne et qui me bouche la vue. Ensuite, c'est peut-être un petit peu une imagerie artistique, peut-être un petit peu rebutante et un petit peu violente pour certains. Mais pour moi, c'est une manière d'interpeller. Je n'avais pas envie de tomber sur un dessin avec une bouteille d'insuline, une seringue, avec ma tête en train de dire « Oh là là ! » « Ah ben dis donc ! » En fait, je n'avais pas envie de ça. Je pense que ça aurait été trop téléphoné. J'avais plusieurs idées, mais cette idée vraiment très artistique et graphique, je l'avais beaucoup en tête. Et d'ailleurs, quand tu regardes la quatrième de couve, pour explication, en fait, là... Est-ce que c'est le diabète ou c'est moi qui regarde vers la lumière ? J'ai eu deux, trois petits commentaires à la sortie du livre à propos de la pochette, parce que c'était un petit peu différent. On m'a dit que ça ne donne pas trop envie. C'est vrai qu'au niveau marketing, ce n'est pas ce qu'il faudrait faire. Mais tant pis, il faut passer au-delà de l'image un petit peu forte et un petit rentre dedans. Parce que mon récit, en fait, dedans, je pense que j'y mêle aussi quand même pas mal d'humour, pas mal de choses décalées, du voyage. Je ne parle pas que du diabète, du coup.

  • Nathalie

    Mais quand on regarde le livre, par exemple, on est dans une librairie, on regarde le livre, on ne sait pas que ça parle du diabète.

  • William

    Oui, tout à fait.

  • Nathalie

    Donc, je veux dire, à la limite, ça peut être un polar, ça peut être...

  • William

    Oui, tout à fait. Ça fait plutôt polar, série noire, que finalement vie au travers du diabète de type 1.

  • Nathalie

    Et du coup, est-ce que tu as évolué ? Comment tu as évolué avec ta relation et ce colocataire au fil des années ? Comment ça va maintenant ?

  • William

    Alors maintenant, au fil des années, ma relation était plutôt graduelle parce qu'on va dire qu'aux alentours de mes 13 ans jusqu'à mes 25 ans, ça va. Je fais avec. J'assume la pathologie, je fais mes injections. Il y a un régime alimentaire qui est là, mais il y a une forte envie de vivre. L'intérêt, c'est d'être un peu plus fort. Puis, je reviens aussi sur le contexte familial. On n'en parle pas. Je gère mon truc tout seul. Je me répète un petit peu, mais le terme solitude est beaucoup présent dans moi, ce que j'ai vécu. Même si j'ai été très bien entouré, ce n'est pas du tout ce que je veux faire transmettre à mes proches. Mais étant porteur de diabète de type 1, on est très vite seul. Et je trouve que c'est... très compliqué d'expliquer ça à ses copains du même âge ou d'expliquer ça en soirée. S'il y a de l'alcool, ce n'est pas le bon moment. Il faut connaître les termes techniques, il faut que les gens s'intéressent. Tout le monde n'a pas forcément les oreilles pour expliquer, pour entendre plutot, pour entendre ce que tu vis au quotidien. Et puis certains, ils ont peur. Parce que si bien tu leur en parles, ils vont dire, moi aussi j'ai bu beaucoup d'eau, peut-être que je suis diabétique. Et puis, il y a aussi, je pense, quelque part, des réflexions qui sont un petit peu désobligeantes. Des fois, tu te livres et tu te dis, oui, c'est diabétique, machin, puis on se moque de toi. Et puis, on te dit, ah, mais William, ah ouais, le diabétique, là. Mais je n'avais pas forcément envie d'avoir une étiquette. Et puis, à cet âge-là, pendant des années, vu que je n'avais aucun dispositif visible comme aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui, on a des pompes, on a des... On a des capteurs glycémiques, ça se voit. Mais à l'époque, il n'y avait pas ce genre de système. Donc, ça ne se voyait pas. Donc, le handicap invisible, il est très facile à cacher. Et tu es comme tout le monde. Et quand tu es ado, pré-ado, jeune adulte, tu n'as pas envie d'être stigmatisé. Tu as envie d'appartenir à un groupe de copains, de copains-copines. Tu as des amis. Tu n'as pas envie qu'on vienne te parler de ça non plus. Après, on a tous des rapports différents, justement, avec le diabète. Moi, je n'avais pas envie de le laisser de côté, pas de le mettre sous le tapis, mais il était là, il était très présent, ce colocataire, je savais qu'il était là, mais je n'avais pas envie qu'il me définisse. Je n'avais pas qu'on dise William le diabétique. Oui je comprends. Puis, c'est une relation aussi qui s'est faite en dent de scie. Je n'ai pas fait une crise d'adolescence du diabète entre guillemets, attention, je mesure mes propos, je ne vais jamais arrêter mon traitement. Parce que de toute façon, on m'avait dit, tu vas mourir. Donc forcément, moi, je me suis dit, je n'ai pas spécialement envie de passer de vie à trépas. Donc, on va faire nos injections, le gentil petit soldat. Et puis, voilà, on va essayer d'en profiter pendant qu'on n'est encore pas amputé et pas aveugle. Donc voilà, moi, j'avais toujours ça en tête, qui revenait tout le temps.

  • Nathalie

    Oui, on avait bien stigmatisé les choses.

  • William

    Et merci pour l'anxiété, parce que c'est pareil, la prise en charge, elle était d'une telle manière à l'époque. Mais la prise en charge psychologique, tu peux mettre un zéro pointé dessus. Je pense que j'ai eu plein de traumas entre l'adolescence et ma vie de jeune adulte avant que je me prenne vraiment un petit peu en main psychologiquement. Et encore, je te dis, aujourd'hui, j'ai encore du travail.

  • Nathalie

    Et puis après, à partir de 25 ans, ça a changé ?

  • William

    Oui, alors du coup, en fait, aux alentours de 25-30 ans, Tous ces régimes restrictifs de sans-sucre et tout ça, sur le long terme, ça a commencé un peu à devenir complètement fou parce que j'étais tout le temps dans les restrictions. Et quand il y avait une hypoglycémie, je me jetais sur tout ce qui bougeait. J'étais très frustré au point de vue de l'alimentation. Et dès que j'avais une hypo, je me disais, chouette, je vais dégommer ce paquet de gâteaux, je vais dégommer des glaces, c'était n'importe quoi. À tel point que je n'ai rien vu venir, j'ai commencé à prendre du poids. Et ça a commencé graduellement comme ça, mais je n'ai rien vu venir. J'ai l'impression que je me suis réveillé un matin en me disant « C'est bizarre, j'ai l'impression d'avoir du ventre, j'ai l'impression d'avoir plus de pecto, j'ai l'impression d'avoir plus les cuisses un peu plus de charnus. » Alors attention, j'ai pris du poids, ce n'était pas dans l'excès non plus. Mais un jour, j'ai un ami qui se moque littéralement de moi, qui me dit « Ah bah dis donc ! » Et il me fait une petite réflexion... comme ça, en passant, je me dis que je suis en train de me rendre compte que j'ai des comportements alimentaires complètement anormaux. Et surtout, que je n'arrive pas du tout à maîtriser. Donc, je me jette sur... les hypos, ben j'y vais quoi. Donc, ça te fait des espèces de pics glycémiques de ouf. En plus, à l'époque, il fallait que je fasse mes dextros pour voir où j'en étais. Effectivement, quand j'étais un peu trop haut, je me faisais des piqûres de correction avec de l'insuline rapide, pas de stylo toujours, mes petites seringues. Et quand ça baissait, je mangeais. Donc ça faisait un espèce de système de yo-yo, des fois où je passais des journées à faire un petit peu n'importe quoi. Mais malgré tout ça, ce qui était quand même assez bizarre, c'est que mes résultats étaient très bons.

  • Nathalie

    Oui, trop haut, trop bas.

  • William

    J'avais une hémoglobine glyquée qui était pas mal. Quand je voulais bien faire mes prises de sang, bien entendu, parce que pour moi, c'était terrifiant d'aller voir mon médecin. Et les résultats, ils étaient là. Donc, ils étaient quand même relativement bons.

  • Nathalie

    Oui, à cause de ça, à cause des montagnes russes. Parce qu'en fait, la moyenne entre être trop haut et être trop bas, ça fait une bonne moyenne, en fait.

  • William

    Ce n'était pas du tout bon, ce que je faisais. Après, attention, je mesure un petit peu. C'était sur une période. Ça n'a pas duré des années, mais effectivement, il y a eu un côté, il y a eu un moment où je me suis dit, oula, mais je perds le contrôle, il y a un truc qui ne va pas. Il faut peut-être que je me remette en question. Après, qu'est-ce que j'ai fait ? J'ai fait tout l'inverse. Et du coup, je suis tombé dans la spirale du gentil petit soldat, du militaire, de l'hyper contrôle et de l'employé modèle de la fin du mois. Le côté on pèse. En plus, je n'avais même pas fait d'insulinothérapie fonctionnelle, ça fait encore un mot à dire, horrible. À une certaine époque, aux alentours de 35 ans, on va dire, je comptais mes glucides, mais avec un... au feeling en fait. J'avais fait tout plein de tests. Perso, je me suis dit, tant de grammes de riz égale ça, tant de doses d'insuline. Je fais avec mes légumes, je mange ça le matin et mes injections, elles sont de temps. La journée se passe comme ça. Tout va bien. Le soir, je mange la même chose qu'à midi et le soir, je me fais une injection avec mes seringues de tant et tout va bien.

  • Nathalie

    En fait, tu t'es fait l'insulinothérapie fonctionnelle tout seul.

  • William

    Ouais, mais avec justement un côté extrêmement contrôle. Et il ne fallait surtout pas qu'il y ait un grain de sable qui vienne au milieu de tout ce système-là. Parce que ce côté hyper contrôle t'enlève du milieu social, en fait. Tu ne vas plus au resto avec tes potes, tu ne vas plus boire un coup, tu ne te fais plus plaisir. Et tu vas même au-delà, c'est-à-dire que tu ne te fais même plus plaisir dans la vie en général. Tu veux t'acheter des fringues, tu te dis non. Moi, ça en est rendu jusqu'à là. C'est-à-dire qu'il fallait que je maîtrise tout, tant de grammes de riz à midi, tant de légumes, point, c'est tout. Puis, il n'y a rien d'autre. Ça arrive des fois de faire un petit peu des sorties de route, de se faire un petit peu plaisir, mais avec une culpabilisation derrière. Donc, en fait, quand tu vas à un dîner chez des amis, moi, j'arrivais, j'avais déjà mangé chez moi. J'arrivais chez des amis et je leur disais « Non, non, mais j'ai pas faim. C'est bon, je ne mange pas. » Et donc j'évitais d'être en difficulté socialement parlant, donc d'être entouré qu'avec des gens qui étaient un peu compréhensifs avec ma méthode de vie. À l'époque, j'étais célibataire. Quand je rencontrais des jeunes femmes, et du coup, « Ah bon, on va au resto ? » « Bah non. » « Bah pourquoi ? » « Bah parce que. » Donc tu passes pour un psychopathe, quoi. Tu passes pour un psycho rigide de l'alimentation. En plus de ça, je faisais énormément de sport, du sport à outrance. Je passais des soirées, des week-ends. Ah, mais tu pars déjà ? Ouais, ouais, parce que demain, je vais faire des pompes. Puis demain, je vais faire 15 bornes à pied. Voilà, je vais faire une rando dans la montagne d'à côté. Moi, je pensais que toutes ces choses que je faisais étaient bénéfiques. Ça a été bénéfique parce que oui, j'ai maigri, parce que je me suis musclé. Par contre, ça m'a mis des systèmes de pensée complètement déviants. Déviants, c'est peut-être un mot un petit peu fort. Mais quelque part, je m'en suis rendu compte récemment, peut-être que j'ai fait des TCA sans m'en rendre compte.

  • Nathalie

    Ouais, c'est ce que j'allais te dire.

  • William

    Voilà, ce côté ultra contrôle et attention, gestion des glucides, etc. J'avais des amis qui me disaient, oui, mais c'est très bien ce que tu fais parce que ça te convient et ça te fait du bien. Ben ouais ! Ouais, mais entre guillemets, sur le long terme, tu ne peux pas avoir des courbes plates. Sur le long terme, ce n'est pas possible. C'est même trop bizarre d'avoir ce type de comportement sur le long terme. Mais moi, Dieu sait que ça a duré.

  • Nathalie

    À quel moment tu as fait l'insulinothérapie fonctionnelle avec des professionnels de santé ?

  • William

    En 2019

  • Nathalie

    Tu avais quel âge ?

  • William

    Je ne sais pas. En 2019, c'est-à-dire récemment en fait, au niveau temporalité, j'ai été diagnostiqué 86. Jusqu'en 2019, je n'ai pas changé de protocole. J'ai toujours été mes deux seringues et mes deux insulines. Je n'ai jamais connu les stylos.

  • Nathalie

    Jusqu'en 2019, tu n'avais pas le stylo ?

  • William

    Non.

  • Nathalie

    Oh punaise.

  • William

    Un jour, je vais voir ma diabétologue parce qu'évidemment, il fallait voir peut-être une diabétologue. Je lui dis, mais bon, je suis toujours avec mes seringues et mes deux insulines. Là, je pense que l'évolution de la maladie, il y a eu un truc là. Je voyais bien qu'il y avait des gens qui avaient des stylos.

  • Nathalie

    Et des capteurs. En 2017, le capteur.

  • William

    Voilà. Et ma diabétologue de l'époque, elle me dit, non, t'inquiète pas, on ne change pas une équipe qui gagne. Donc les capteurs, j'en avais entendu parler, mais à l'époque, ils n'étaient pas encore remboursés. Donc je m'étais dit, je vais attendre.

  • Nathalie

    Remboursement, juin 2017.

  • William

    Oui, oui. Eh bien ça, j'ai eu mon premier capteur en 2019. Le Freestyle.

  • Nathalie

    La diabéto, mais je ne le crois pas.

  • William

    Et du coup, je suis passé à la pompe Omnipod, pas l'Omnipod Dash, celle d'avant, en 2019.

  • Nathalie

    Tu as tout fait en 2019. T'es passé des seringues à la pompe.

  • William

    Ouais, j'ai tout pété en 2019.

  • Nathalie

    Tant mieux.

  • William

    Suite à un gros accident, en fait. J'ai fait un burn-out, entre guillemets, à mon travail, qui m'a déclenché une très, très forte hypoglycémie. Et je me suis fracassé la tête par terre. Je suis allé en réanimation. Je me souviens de rien, quasi. Je pense que j'ai mal dû gérer quelque chose le matin. J'étais énormément stressé, j'en pouvais plus. Le corps a dit « Ok, on arrête tout ! » Du coup, j'ai eu en même temps une grosse hypoglycémie qui m'a fait perdre connaissance, qui m'a fait heurter la tête par terre. Je me suis retrouvé en réanimation. Ensuite, je suis allé au... au service diabéto de l'hôpital pendant un bon petit moment. Et là, je n'ai pas eu le choix. On m'a posé le capteur, donc ça, c'était cool. Et puis, on m'a dit, tiens, il y a la pompe là qui peut être pas mal. Moi, je refusais de porter des pompes à tubulure. Le cathéter moi c'est pas du tout mon truc. En plus, je suis maladroit comme ça se peut pas. Moi, tu me fais porter ce truc, on dirait un Marsupilami humain. Comme je suis sûr, je me l'arrache 5-6 fois dans la journée. Ce n'est juste pas possible. Et en fait, on me propose cette petite pompe qui est toute petite, comme une boîte d'allumettes. Je dis, ouais, autant tester. Mais quand tu passes de seringue à ça, il faut tout réapprendre. Et là, c'était la catastrophe la plus complète. Je suis resté à l'hôpital le temps d'apprendre, etc., de faire des choses comme ça. Et puis, je suis reparti chez moi. C'était la cata, quoi. Parce que les protocles de l'hôpital, sont ce qui sont. Tu arrives chez toi, c'est foutu, c'est la catastrophe. J'avais un débit basal très adapté à l'hôpital, mais après, le moindre truc que je faisais, ça me mettait en hypo. Dès que je mangeais un truc, j'étais hyper... Je n'arrivais jamais à trouver l'équilibre. C'était l'enfer sur Terre, pour moi, évidemment. Il a fallu que je réapprenne ce qui m'a coûté moralement, ce qui m'a beaucoup coûté quand même... Après

  • Nathalie

    Et là tu as fait l'insulinothérapie à ce moment-là.

  • William

    Après je me suis remis en question, je me suis dit bon avant de se taper une trop forte dépression, il va falloir que j'apprenne. J'ai demandé, j'ai changé de diabéto, j'avais demandé à ma diabéto et j'aimerais quand même avoir la connaissance de comptage de glucides pour justement me perfectionner là-dedans et pour moins être dans les choux. Parce que c'est juste pas possible, en fait, le moindre truc que je fais, ça part en sucette. Je sors de chez moi, je suis en hypo, à peine je regarde un aliment, bam, ça part pour tous les sens. C'était à s'arracher les cheveux, en plus, j'ai une calvitie, donc ça sert plus à rien. Donc je m'arrachais le peu de cheveux qui me reste. Et du coup, quand je suis arrivé à faire justement le comptage de glucides, sur les deux jours de formation, tout d'un coup, il y a un nouveau monde qui s'est ouvert à moi. Donc ça, ça a été très bénéfique. Puis je le conseille quand même pour avoir un minimum de connaissances, malgré le choix très nul en maths.

  • Nathalie

    Il y a des applications maintenant pour... La pompe, elle fait pratiquement tout, la pompe.

  • William

    Voilà, maintenant, elle fait le produit en croix. Ça va. C'est clair.

  • Nathalie

    Il suffit de lui rentrer les données, c'est tout. Et encore, maintenant que tu es en boucle fermée, tu ne rentres que les glucides. Donc, tu vois, tu es passé du rien à tout. C'est tant mieux. Je suis trop contente pour toi, en tout cas.

  • William

    Je suis passé du jurassique à l'ère moderne. Du coup, là...

  • Nathalie

    Oh punaise ! C'est trop bien ! C'est trop trop bien !

  • William

    Non, puis en fait, je pense que me remettre en question, ça a été... ça fait partie un petit peu, je pense, je pense aussi du processus de la maladie chronique. Puis, c'est peut-être un peu de la personnalité, même si j'ai encore énormément de choses à régler, énormément de choses à voir en introspection psy notamment, sur mes comportements je pense que il faut être un minimum curieux et puis il faut se remettre en question c'est pas forcément que je me suis pas mis en question toutes ces années mais c'est vrai que c'était un protocole qui m'allait tellement bien évidemment je voyais bien qu'il y avait des stylos insuline lente rapide mais je regardais les gens et je me disais mais ils piquent bien souvent ces gens en fait, c'est bizarre, moi je fais juste deux injections. En fait, c'est pas vrai. Je ne faisais pas juste deux injections. Par ce que je me contrôlais énormément. Je faisais mes dextros. Et quand je regardais un peu mon état glycémique, soit je laissais tel quel, soit je me faisais des micro-bolus.

  • Nathalie

    Mais c'est bien et c'est clair qu'il faut apprendre sa maladie pour mieux gérer. Mais c'est vrai que tu es parti de loin. Et du coup, je pense que les gens, malheureusement, qui déclarent maintenant, ils ont quand même beaucoup de choses à leur portée.

  • William

    Heureusement, il y a plus de facilité aujourd'hui. Ça n'empêche pas, effectivement, je pense qu'il y a des nouveaux types de charges mentales parce que moi, il y avait déjà la charge mentale normale d'injection. Mais quand il est arrivé le téléphone, les vibrations, les bips, les alarmes, les codes couleurs, là, ça m'a mis hors de moi. Le téléphone qui me gueule dessus qui me dit : t'es en hypo, t'es en hypo, t'es en hypo, attention, t'es en hypo. Moi, ça m'a rendu complètement fou.

  • Nathalie

    Oui, il y a les travers aussi de la nouvelle technologie, c'est clair. C'est clair.

  • William

    C'est savoir aussi interpréter tout ça. C'est-à-dire que, et ma compagne me le dit très bien, elle me dit : Le téléphone, il ne t'engueule pas. En fait, il te prévient. Moi, je le prends comme une agression.

  • Nathalie

    Oh ça je suis d'accord.

  • William

    Des fois, j'ai envie de le balancer dans la pièce. Non, mais des fois, c'est juste fou. Donc en plus, ces alarmes, elles arrivent au moment le plus opportun. C'est-à-dire que tu es au cinéma, bam, ça gueule. Tu es à l'église pour des obsèques, ça gueule. Merci.

  • Nathalie

    Après, il faut peut-être prévenir, tu vois, les choses. C'est-à-dire, tu vois, être... anticiper. Voilà, je cherchais le mot.

  • William

    Anticipation, là, c'est un mot qui me va bien.

  • Nathalie

    Anticipation, organisation, prévention ...

  • William

    Voila tout le temps, il n'y a pas d'imprévu, il n'y a pas de légèreté. Moi, ce que je trouve regrettable, c'est qu'effectivement, il y a ce côté spontané qui a un peu disparu, en fait.

  • Nathalie

    Il a pris un coup dans l'aile.

  • William

    Oui, et puis la légèreté que j'avais un peu plus jeune, elle est moins... Effectivement, il faut toujours tout prévoir, tout anticiper. Il faut toujours avoir un coup d'avance.

  • Nathalie

    Toujours sa petite sacoche. Moi, c'est ça, ça me tue. Tu ne peux pas sortir de la maison les mains vides.

  • William

    Voilà, c'est ça. Donc, pas de légèreté, quoi. C'est fou, c'est fou.

  • Nathalie

    Non, ça, c'est quand même très handicapant. Qu'est-ce qui t'a poussé à écrire ce livre ?

  • William

    Moi, ce qui m'a poussé à écrire ce livre, justement, c'est ce... C'est quand j'ai eu mon accident, en fait. Plutôt suite à mon accident, pas à partir de mon accident. Mais ça m'a mis, comme je le disais tout à l'heure, j'ai eu des nouveaux appareils, un nouveau protocole, etc. Il a fallu que je m'y fasse quand même pendant un bon petit moment. Il a fallu que je réapprenne tout. En 2023, je me suis pris encore une fois une nouvelle claque. Commence l'année avec... Une nouvelle fois, un séjour à l'hôpital parce que j'ai fait un coma hypoglycémique qui m'a déboîté l'épaule. Je me retrouve à l'hôpital, je suis complètement dans les choux. Je ne sais pas trop ce qui se passe et on me dit bah ouais, t'as fait une réaction à une hypoglycémie, je pense que j'ai dû faire un bolus beaucoup plus conséquent, je me suis endormi par-dessus, ça ne m'a pas réveillé et c'est parti en séance de tremblements, épaule déboîtée, pompier et hôpital. Je me souviens un peu d'avoir commencé l'année comme ça. Et quand je suis revenu chez moi, je pensais que je maîtrisais mon diabète, mais en fait pas du tout. C'est lui qui me contrôle. C'est lui qui prend le pas, c'est lui qui décide. C'est mon colocataire qui a pris beaucoup trop de place et qui fait bien ce qu'il veut chez moi. Et là, moi, je suis dans un coin et je subis. Je subis, je ne sais plus quoi faire. Je ne sais plus quoi faire. Je me dis qu'il faut que... il faut que je me débarrasse de ce truc c'est pas possible, je peux plus vivre avec ça ça prend une telle place dans ma tête dans ma journée que ça en devient complètement anxiogène. Je me dis, je vais peut-être devenir fou, je pense que je vais vriller il faut que ça s'arrête au moins un jour il faut qu'au moins un jour mon colloc il me foute la paix au moins une journée ne serait-ce qu'un temps, je ne me demande que ça c'est pas grand chose, mais non ça ne s'arrête pas. Et du coup, j'ai pris quand même soin de moi par la suite. En 2024, je suis sorti de ma grotte, littéralement. Parce qu'avant, je ne m'intéressais pas aux autres diabétiques. Je n'en connais pas, je n'en connais très peu. J'ai deux copains diabétiques que je ne vois pas énormément. Donc quand on se voit, on ne parle pas de ça. Et quand on en parle, c'est pas le sujet majeur. Et quand je suis sorti de ma grosse boîte, littéralement, j'ai commencé à écouter un podcast. Ah, deux podcasts. Mais j'y suis allé à tâtons, sur la pointe des pieds. Parce que moi, je me suis dit, je ne veux pas entendre des trucs qui vont me détruire le moral. Ce n'est pas le moment. Et puis, je n'ai pas envie d'entendre des trucs, des gens au travers des podcasts qui vont me dire, ouais, mais mec, en fait, tu n'as jamais accepté ta maladie. C'est pour ça qu'en fait, tu es comme ça. Alors, l'acceptation, attention, j'ai un rapport avec ce mot qui est très compliqué. J'ai une acceptation en dent de scie, j'assume parfaitement mon diabète, mes appareils sont visibles et je veux qu'ils soient visibles, on ne me pose jamais de questions là-dessus. Je pense que ce n'est pas que je suis un gars. Il y a très peu de monde qui vient me questionner là-dessus. Quand c'est fait de manière rigolote, ça va, je me fais éducateur, mais quand c'est un petit peu bête, je me mets au niveau de la bêtise. Et au point de vue de l'acceptation, autant les diabétos que certaines personnes m'ont dit « mais de toute façon, t'acceptes pas ta maladie » . Je me suis dit « mais ils ont raison en fait ces gens-là » . En fait, c'est vrai, je ne dois pas accepter ma maladie. Donc, en fait, les autres diabétiques, eux, ils l'acceptent et ils vivent mieux que moi. Moi, je ne l'accepte pas. Ils ont peut-être raison. Alors, si je ne l'accepte pas, est-ce que je serais là pour en parler ? Au final, je l'accepte un peu cette maladie quand même, je l'assume. Bon, ok. Mais bon, ça se passe plutôt bien, oui. Mais les autres diabétiques, ils font comment ? Et quand j'ai commencé à écouter des... des récits en podcast, des articles ou même des vidéos. En fait, les gens, tout d'un coup, ça a fait tilte parce qu'ils avaient le même discours que moi. Parce que j'ai entendu des échos de vie avec des gens beaucoup plus jeunes que moi qui m'ont fait dire « Mais dis-donc, il y a des gens, ils n'ont même pas trois ans de diabète, ils osent dire haut et fort. » Ben ouais, moi, ça me saoule. J'en ai marre. Et je le dis. Parce que moi, pour moi... Ça a toujours été un interdit de le dire. Ça faisait de moi quelqu'un qui se plaint entre guillemets. Je ne sais pas si je donne une bonne image, mais je n'avais pas envie de passer pour le ouin-ouin du coin qui dit « Moi, j'en ai marre de mon diabète ! » Et puis surtout, il y a toujours la comparaison avec d'autres maladies. « Mon gars, ta diabète, ça se soigne ! » Parce que là, il y a des gens qui sont sous les bombes, et puis il y en a qui sont en phase terminale. Donc toi, avec ton petit diabète, tu vas te taire. J'ai vite fermé ma bouche face à tous ces trucs-là. Et quand j'ai commencé justement à m'ouvrir, à sortir de ma grotte, là tel y un ours, tel ours alpin, quand j'ai écouté tout ça, je me suis dit « Ah ouais ! » Il y a un peu plus de sérénité qui s'est quand même opérée moi. Et puis j'ai commencé à travailler justement intérieurement et là je me suis dit « Bon... » Je vais me faire ma propre psychoanalyse. Au-delà de vouloir sortir un livre, j'ai commencé à écrire. Plus j'écrivais, plus les souvenirs revenaient. Et plus les souvenirs revenaient, plus j'écrivais. Et puis ça faisait comme ça, montagne, montagne, montagne. Et puis en plus, moi, je ne suis pas écrivain, je n'écris pas énormément. Il y a une époque, j'écrivais, mais je n'écris plus. Et l'écriture, c'est comme un muscle. Plus tu le travailles, plus ça se développe. Mais moi, il a fallu que je reparte un petit peu de zéro. Donc au début, mes récits étaient très, très, très bruts et très rentre dedans parce que j'avais des comptes à régler. Surtout avec mon passé, j'ai commencé à sortir les gants de boxe. Et bon, quand tu tapes sur ton clavier avec des gants de boxe, ce n'est pas terrible. Donc je les ai un petit peu enlevés. Et puis j'ai commencé à muscler mon écriture, à muscler le jeu. Et j'ai commencé à écrire, écrire, écrire. Puis au fil du temps, je me suis dit, je vais y rajouter des couleurs, un peu des odeurs, un peu des sensations. Il faut un peu que je décrive mon entourage, pas que le diabète. Et puis en fait, des voyages, j'en ai fait. J'ai vécu en Ukraine, j'ai vécu au Québec, je suis allé trois fois en Afrique de l'Ouest, je suis allé partout un petit peu en Europe. Il y a des choses à raconter au travers de tout ça, comment je l'ai vécu, au travers de mon diabète, comment j'ai vécu la chaleur du Cambodge avec ma pompe, parce que là, j'étais sous pompe, ça remonte à pas très longtemps. Et au fur et à mesure que j'ai construit le bouquin comme ça, il s'est posé aussi la question à savoir est-ce que j'allais mettre des chiffres sourcés ou non. Et spoiler, c'est un récit de vie, c'est pas un guide pratique pour diabétique, c'est pas un livre de médecine, c'est mon vécu à travers mes yeux. Donc forcément, il y a des choses qui peuvent plaire ou pas, ça c'est à tout un chacun de juger. Il n'y a pas de problème là-dessus. Moi, j'ai eu un vécu qui m'est propre. Ma relation avec le médecin, certes, elle a changé. Il faut que je travaille encore dessus. Mais voilà, il y a quand même dans ce récit, il y a de la colère, mais aussi il y a de l'humour. Il y a du cynisme, il y a du second degré, il y a du voyage. Et puis, je n'ai pas voulu sourcer non plus trop de choses. Il y a quelque chose que je me suis rendu compte. Je ne savais pas ce que traversaient les femmes diabétiques. J'étais au courant de rien, là dessus. Quand j'ai commencé à écouter des podcasts, j'ai entendu des choses de femmes. Mais il n'y a que les femmes qui parlent. Et en fait, je ne sais pas ce qui se jouait chez la partie féminine. Je ne savais pas que d'être pluggé avec un capteur, une pompe, ça pouvait un petit peu entraver le côté féminin. Ça, je ne m'en étais jamais rendu compte. Je ne le voyais pas comme ça, en fait. Et le même, je ne le voyais pas du tout. Et puis, j'ai commencé un petit peu à creuser, puisqu'en écoutant des podcasts où des femmes parlent, je me suis dit, ah mais ouais, mais elles vivent ça au quotidien, comme la grossesse, c'est un truc de dingue. Et puis aussi, dans mon bouquin, je parle de sexualité, mais pour certains, ça va être très effleuré, et puis pour d'autres, pas, pas assez creusé, mais je n'ai pas voulu mettre des mots et des chiffres que je ne maîtrise pas. Je n'ai pas de relation avec une diabétique féminine qui aurait pu me guider. Donc je me suis un peu orienté sur des choses que j'ai appris, mais j'en suis resté là en surface. J'ai tout de suite pris conscience des réalités féminines qui m'étaient totalement inconnues. Jusqu'à très peu de temps. Et puis surtout, au travers de ce bouquin, j'ai aussi voulu dire, moi je vis ça, j'en ai marre, je le dis, mais je n'ai pas envie que ça soit trop pathos, ni tire larme en fait. Ça, ça a été une réflexion qui m'a beaucoup hanté. Je me suis dit, il ne faut pas que ce récit soit dans la plainte. Parce qu'effectivement, il y a des choses qui m'ont un peu bousculé, étant plus jeune, qui m'ont beaucoup atteint. Il y a tout un côté qui est quand même assez rigolo. J'ai vécu des trucs assez drôles, donc il faut aussi en parler. Il faut avoir une balance assez équilibrée pour passer justement d'un sujet peut-être un petit peu dramatique, un petit peu touchant, à un sujet derrière qui va te contrebalancer avec une anecdote un petit peu débile sur ce qui a pu se passer avec ton diabète ou non.

  • Nathalie

    Et tu t'adresses à qui ?

  • William

    En fait, je m'adresse autant aux diabétiques qu'à leur entourage, qu'à un public plus large, et puis même à des professionnels de santé. En toute modestie, vraiment, attention, je pèse mes mots encore une fois. C'est quand même pour moi très bizarre d'avoir sorti un bouquin. Je le dis, il y a le syndrome de l'imposteur des fois, et tu te tais parce que je t'ai assez entendu comme ça. Tais-toi, tu te ranges dans le placard et tout. En fait, je me suis dit que peut-être que les professionnels de santé, ils avaient peut-être une curiosité de voir ce type de récits vus de l'intérieur. Puisque des récits de diabétiques de type 1, je ne pense pas qu'on en ait énormément. On a des bouquins, des fois peut-être on a des grands sportifs diabétiques, mais là, est-ce qu'on peut se calquer par rapport à leur vécu ? Alors c'est très admirable, attention, mais des fois on peut lire des choses où on est dans la performance physique et dans la performance glycémique. Moi je ne m'y reconnais pas forcément. Moi je me suis dit, je vais parler de moi et de mon vécu pour un mec lambda qui vit son diabète au quotidien. Mais très vite. Je me suis dit, mais attends, ton égo trip là, tout le monde s'en fout. Ta vie, mais tout le monde s'en fout en fait. Ton petit côté narcissique avec ton diabète, on s'en fout en fait. Puis voilà, du coup, je parlais tout à l'heure du syndrome de l'imposteur. Donc lui, il a fallu vraiment le taire, un peu le mettre de côté. Et puis me dire, bon, je vais sortir ce bouquin. Ça me fait un petit peu flipper. Je l'ai accouché au mois de février. Et puis maintenant, il fait sa vie. Et il ne m'appartient plus. Maintenant, il est disponible. On peut le lire. Il n'y a pas de soucis là-dessus. Donc, c'est très cool. Comment dire ? Pour le moment, ce qui est la mission, on va dire, est pas mal accompli. Puisque j'ai eu des retours assez positifs de personnes diabétiques ou non qui m'ont dit que c'était... assez sympas à lire et qui se sont reconnus. J'ai eu une partie de ma mission qui est quasiment accomplie, à tant de pourcents, je ne sais pas, mais le pari est gagné au moins de ce côté-là, parce que j'avais très peur des réactions. Je parle de 1986 jusqu'à ici, peut-être que des jeunes diabétiques qui ont une vingtaine d'années il s'en fout de mon récit, parce que ça parle de l'ère jurassique, ça ne leur convient pas. Des références musicales qui ne parlent peut-être pas forcément à tout le monde. Il y a des choses que je mentionne qui ne sont peut-être pas forcément intéressantes pour tout le monde. Mais au moins, avec ce petit bouquin, avec cette petite modestie, je me dis que j'apporte un peu d'une pierre à l'édifice. Dans ce côté maladie chronique, est ce qu'il y a des bouquins qui existent, oui, il y en a, et il y a le mien.

  • Nathalie

    Pour un diabétique, il va se reconnaître, ça c'est sûr. Pour un jeune diabétique, il va apprendre que c'était galère avant et que maintenant c'est mieux. Et que peut-être, quelque part, ça va lui faire du bien. Après, pour les gens qui ne connaissent pas la maladie, là on comprend bien ce que vit un diabétique et les galères, les moments... heureux, que tu as pu vivre des grands voyages, tout ce que tu as fait, qu'on peut faire beaucoup de choses avec le diabète. Et franchement, pour les diabétiques, comme je te l'ai dit, moi, ça m'a fait réfléchir. Il y a des passages qui m'ont fait réfléchir sur comment j'appréhendais mon propre diabète. Et voilà, moi, ça m'a fait du bien. Et puis en plus, c'est une lecture masculine. Et ça, c'est très important parce que des bouquins, il y en a, c'est que des féminines, c'est que des auteurs féminins donc des autrices du coup donc voilà je pense que ce bouquin fait du bien franchement il n'y a pas besoin d'avoir le syndrome de l'imposteur, maintenant il est fait donc tu peux plus c'est fait, c'est fait donc il est là et franchement j'espère j'espère qu'il va être lu.

  • William

    En fait les premières lectures ça a été mon entourage proche, bien entendu. Alors, tout de suite, déjà, mes parents, ça a été un petit un petit peu un coup, parce qu'ils se sont rendus compte de ma réalité. Ils ne se sentaient pas forcément rendus compte de tout ce qui se jouait, tout ce qui s'opérait en moi depuis ... ans. Donc, ça a mis la lumière, justement, sur mon vécu, sur ma pathologie. Je parle d'eux et ça les a grandement bousculés. Pas en mal, mais du coup, il y a un côté, ça a ouvert les vannes de la parole. Dans un contexte familial où la parole n'a jamais été primordiale, du coup, même avec mon frangin, que j'adore, on est beaucoup plus, je pense qu'on est un peu plus communicants. Et puis, ce qui m'a étonné aussi, ça a été mon entourage. Parce que j'ai été étonné de leur étonnement. En fait, les premiers retours, ils m'ont dit, c'était, mais on ne pensait pas en fait que c'était comme ça. Parce qu'à te voir, on ne se doute absolument pas de ce que tu vis. Parce que pour eux, c'est, on se contrôle le bout du doigt, on fait une analyse sanguine, on se fait peut-être une piqûre, puis voilà. Puis après, le reste de la journée, la nuit, tout va bien. Non, non. Ils se sont rendus compte que c'est H24. Et qu'il y avait... tout un univers autour de l'alimentation, autour des appareils dispositifs médicaux, qu'il fallait faire des examens, qu'on avait des choses à faire ou ne pas faire dans certains boulots, etc. Et que tout d'un coup, ça a mis un coup de projecteur sur le diabète, qui, eux, le voyaient juste à travers moi, mais par un tout petit prisme, par une toute petite meurtrière, tu vois. Et du coup, au lieu de m'expliquer en soirée avec des mots que je ne maîtrise pas forcément, ce livre apporte beaucoup plus de clarté à la maladie, au diabète, à mon diabète entre guillemets, pour des gens qui sont dans mon entourage proche, moins proche et un peu plus éloigné. Je me suis quand même un peu remis en question. Je me suis dit, mais... c'est de ma faute si on ne prend pas trop en considération ma pathologie, mon handicap c'est de ma faute parce que moi j'en parle de manière détachée, de manière très simple, du coup en face, qu'est-ce qu'ils se disent ? ça va, ils le gèrent bien en fait, donc ça va, tout va bien mais quand il se passe des trucs un petit peu difficiles, comme des grosses hypos où je suis complètement à ramasser la petite cuillère par terre tout le monde se dit, mais qu'est-ce qu'il a en fait ? qu'est-ce qu'il se passe ? À force de traiter mon diabète comme un rhume au travers de mes amis, ça n'a jamais été pris à sa juste valeur. Et puis eux, de leur côté, il y a une forme de pudeur. Ils se disent comment lui, il le vit. Si on lui pose des questions, comment il va réagir ? Comment il va nous parler ? Est-ce que ça l'embête si on pose des questions ? Est-ce qu'on peut lui poser des questions ? Parce que moi, j'ai eu des retours comme ça, en fait, de potes très proches qui m'ont dit qu'en fait, on n'osait pas t'en parler, qu'on n'avait pas ce que tu vivais.

  • Nathalie

    Tu vas nous dire, où peut-on se procurer ton livre et comment suivre ton actualité ?

  • William

    Alors, pour se procurer mon superbe livre... de 161 pages à la superbe couverture digne d'un polar de ce nom. Alors il faut se rendre sur Amazon malheureusement pour certaines personnes le diable en personne Amazon ! En fait je me suis adressé à Amazon pour la simple, c'est pour une question de praticité parce que c'est beaucoup plus simple pour moi parce que je suis en auto-édition, je suis pas du tout chez un éditeur, il y aura beaucoup à dire là-dessus mais bon ça c'est encore une autre paire de manche, je me suis dit Amazon avec tous leurs défauts qu'ils ont, il y a quand même l'avantage d'être en auto-édition et de réaliser un bouquin quand même assez facilement. Donc, il est disponible sur Amazon au doux nom de mon colocataire indésirable avec un nom d'auteur de William Belle. Donc, vous pouvez suivre plus d'actualités sur ma page Instagram, c'est mon coloc indésirable, où il y a pas mal de vidéos qui concernent l'évolution et l'écriture de ce livre. Voilà, jusqu'à sa finalité, jusqu'à sa présentation, la sortie. Le lien est bien sûr en description dans ma bio. J'ai aussi une page Facebook et TikTok, mais je suis moins présent sur ces deux plateformes.

  • Nathalie

    As-tu des projets liés au diabète ou à l'écriture en préparation ?

  • William

    Alors non, pas du tout. En fait, je pense que, pour la petite histoire, ce bouquin, je l'ai écrit d'une manière frénétique. En fait, ça a été une frénésie, ça a été une impulsion, parce que je l'ai écrit en très peu de temps. Je pense que c'était surtout pour faire un gros nettoyage de printemps et pour me vider la tête, ça a été thérapeutique. Et je pense que ça a été très libérateur. Mais après, refaire un bouquin, je ne pense pas, ce n'est pas mon domaine, ce n'est pas mon secteur. Je trouve que mon style d'écriture, il est ce qu'il est, ce n'est pas dingo, on est loin du Victor Hugo. Mais ce n'est pas le but, mon style d'écriture, il est brut et il est sincère et authentique, il me ressemble en fait. Et donc non, je n'ai pas forcément de projet lié avec le diabète, mis à part faire des imbécilités sur Instagram avec des vidéos un peu débiles, mais écrire un nouveau truc, non. Par contre, j'ai un truc qui me trotte dans la tête depuis quelques jours, mais je ne sais pas du tout ce que je peux en faire. Moi, j'habite au pied des Alpes et j'aimerais bien faire une journée soit rando, soit pique-nique pour aller sur un point de vue du Vercors, de la Chartreuse ou de Belledonne. D'être entre diabétiques et accompagnants. Pourquoi pas, je ne sais pas, se taper un bivouac, pourquoi pas. Ou une seule journée d'avoir l'occasion de parler de diabète mais pas que. D'échanger et de passer surtout un bon moment. C'est surtout ça le but. Peut-être mettre ça en place mais je ne sais pas quand, comment ? Là, je suis vraiment dans une idée très vague de la chose. Moi, je connais beaucoup le Vercors. C'est une montagne très proche de moi, c'est de la moyenne montagne. La Chartreuse aussi, c'est super intéressant, c'est assez joli. Belledonne également. Mais si, par exemple, il y a quelque chose qui s'opère pour faire une randonnée entre diabétiques et accompagnants, le choix de la rando, il s'offre à nous. Il y a énormément de coins, on n'est pas en manque du coup. On n'est pas en manque pour des gens qui n'ont peut-être pas forcément l'habitude de marcher, autant pour des gens qui sont très férus de rando. On peut faire quelque chose, un mix entre les deux. Et puis, le but, c'est de prendre du plaisir. Un peu pour clôturer notre entretien, et je t'en remercie, je dirais simplement, ne faites pas comme moi, n'attendez pas 30 ans pour vous ouvrir. Je sais que c'est parfois... Moi, j'ai eu beaucoup de mal à m'ouvrir à tout ce monde-là. Et puis, quelque part, je ne veux pas que mon quotidien soit trop là-dessus, parce que ça peut vite devenir anxiogène. Partagez, explorez, vivez, ouvrez-vous à ce qu'il y a en dehors de chez vous. Je suis bien gentil à dire des conseils comme ça. Moi, des fois, je ne le fais pas. Mais voilà je fais au mieux avec mes petits démons intérieurs que j'arrive à mieux maîtriser qu'avant même si j'ai quand même pas mal de chemin à faire, certes le diabète c'est un boulet mais il ne nous enchaîne pas il ne nous définit pas il y a beaucoup de choses qu'on peut faire donc là dessus je pense qu'il ne faut pas attendre, oui on le fera demain il faut le faire de suite. Moi, j'ai un petit peu du mal avec tout. Je ne veux pas avoir le discours du jeune entrepreneur Instagram, mais n'attendez pas le dernier moment pour vous ouvrir. Je pense qu'en plus, actuellement, il y a entre des ressources pour communiquer entre des podcasts Instagram, TikTok, Facebook ou YouTube. Il y a beaucoup de ressources et puis il y a quand même des acteurs aussi français qui sont présents et qui se bougent beaucoup et qui peuvent donner justement réponse à pas mal de questions. Quand on est un peu la tête sous l'eau, la tête dans le sable, en train de se dire « personne ne me comprend, je suis seul, je suis seul avec cette pathologie, même mes proches ne me comprennent pas, mon diabéto ne me comprend pas » , eh bien, viens, on en parle.

  • Nathalie

    Merci beaucoup William pour cet échange riche et inspirant. Ton livre, Mon colocataire indésirable, offre une belle métaphore de la vie avec le diabète et je suis sûre qu'il parlera à de nombreuses personnes concernées, mais pas seulement. Si vous souhaitez en savoir plus sur William et son ouvrage, je vous invite à le suivre sur son Instagram et à vous procurer son livre. Vous trouverez toutes ses coordonnées dans les notes de l'épisode. Au revoir à toutes et à tous et prenez bien soin de vous !

  • William

    Eh bien, à la prochaine ! Merci beaucoup !

  • Nathalie

    Je te remercie pour ton écoute. Si cet épisode t'a plu, que tu souhaites soutenir le podcast, je t'invite à le partager autour de toi, à t'abonner pour être averti du prochain épisode, à laisser 5 étoiles et un avis sur ta plateforme d'écoute. Tu as la possibilité aussi de me contacter, soit sur mon compte Instagram, soit par e-mail que tu trouveras dans les notes du podcast. Je te dis à très vite pour un nouvel épisode de Vivre le diabète à la recherche de l'équilibre. Prends bien soin de toi.

Chapters

  • Présentation

    01:49

  • Diagnostic et annonce de son diabète type 1

    03:13

  • Pourquoi un colocataire indésirable ?

    14:59

  • Évolution de sa relation avec son "colocataire"

    19:25

  • Pourquoi ce livre ?

    39:06

  • A qui s'adresse William ?

    49:41

  • Où se procurer le livre ?

    57:38

  • Les projets

    59:03

  • Conclusion

    01:01:28

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Description

🎙️ Dans cet épisode, je reçois William Belle, diabétique de type 1 et auteur du livre “Mon colocataire indésirable”.

Avec beaucoup de sincérité et d’humour, William nous raconte son parcours avec le diabète, les défis du quotidien et ce qui l’a poussé à écrire ce livre original, dans lequel il compare son diabète à un "colocataire" qu’il n’a jamais invité, mais avec lequel il doit vivre.


Ensemble, nous parlons de l’annonce de la maladie, de l'acceptation, des idées reçues sur le diabète, mais aussi de l'importance de sensibiliser et de partager son expérience.


Un témoignage inspirant et plein d’humanité, à écouter sans modération !


📚 Pour suivre William Belle et découvrir son livre : 


🎧 Bonne écoute !

Prenez bien soin de vous !

“Et n’oubliez pas, plus vous apprenez sur votre maladie, mieux vous la gérez !”


Si tu souhaites partager ton expérience, je t’invite à me contacter par email, je serai ravie de partager ton récit dans l'un de mes futurs épisodes.


💬 Vous avez aimé cet épisode ? Partagez-le au moins à une personne, laissez 5⭐ et un avis sur votre plateforme d’écoute préférée !

Cela aide Vivre le diabète à grandir et à toucher plus de monde. 

Merci pour votre soutien ! 🙏


Vous pouvez soutenir financièrement mon travail grâce à la plateforme Tipee ICI https://fr.tipeee.com/vivre-le-diabete

Ou bien vous pouvez toujours être un relais en partageant mes contenus !  

Je vous remercie sincèrement !


_______________________

🔵 Me contacter par email : nathalie.vivrelediabete@gmail.com

🔵 S’abonner à ma newsletter sur : https://podcast.ausha.co/vivre-le-diabete 

🔵 Me rejoindre sur Instagram : Nathalie Paoletti et Vivre le diabète 

🔵 Ma chaîne YouTube : Vivre le diabète

🔵 Site internet : www.vivrelediabete.fr

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Crédit musique : Xavier Renucci 



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Nathalie

    Bienvenue dans Vivre le diabète à la recherche de l'équilibre, le podcast qui vous accompagne avec des conseils, des témoignages et des rencontres inspirantes autour du diabète. Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir William Belle, auteur du livre Mon colocataire indésirable. William est diabétique de type 1 et à travers son ouvrage, il partage son quotidien avec cette maladie qu'il décrit comme un colocataire qu'on n'a pas choisi. Mais avec lequel il faut apprendre à cohabiter. Nous allons parler avec lui de son parcours, de ce qui l'a poussé à écrire ce livre, des défis qu'il rencontre au quotidien et du message qu'il souhaite transmettre aux personnes vivant avec le diabète. Je suis Nathalie, diabétique de type 1 depuis février 2010. Je m'adresse à toi qui viens de déclarer un diabète, à toi qui es diabétique de type 1 ou de type 2, ou à toi qui es en pré-diabète, mais aussi à toi qui soutiens et aides que tu sois parents ou conjoints, etc. Je m'adresse également à toute personne désireuse de savoir ce qu'est le diabète vu par une patiente diabétique. Désormais, tu peux soutenir financièrement mon travail grâce à la plateforme Tipeee dont tu trouveras le lien dans les notes de l'épisode. Ou bien, tu peux toujours être un relais en partageant mes contenus. Je te remercie sincèrement. Et avant de commencer, si cet épisode vous plaît, pensez à le partager au moins à une personne. A laisser 5 étoiles et un avis sur votre plateforme d'écoute préférée. Ça m'aide énormément à faire grandir ce podcast et à toucher encore plus de monde. Bonne écoute et n'oubliez pas, plus vous apprenez sur votre maladie, mieux vous la gérez. Je vous laisse maintenant avec l'épisode du jour. Bonjour William !

  • William

    Hello Nathalie, comment ça va ?

  • Nathalie

    Ça va, ça va, j'espère que toi aussi.

  • William

    Ça va très bien, merci de m'accueillir dans ton podcast que j'écoute régulièrement. Il y a une très bonne démarche et c'est un très beau travail, bravo.

  • Nathalie

    Merci, ça me touche. William, peux-tu te présenter ?

  • William

    Ok, William, de mon prénom, je ne dirais pas mon nom de famille parce que vous n'avez qu'à acheter le livre. Alors moi, je réside dans le sud-est de la France, plus exactement en Isère au pied des montagnes. Je suis entre la Chartreuse et le Vercors et juste à côté des Alpes. Je n'ai pas le pied marin, j'ai plutôt le pied montagnard. Je suis diabétique. Étonnant, n'est-ce pas ? Très étonnant. Je suis diabétique depuis très longtemps. Je ne vais pas dire aussi le temps de ma pathologie. Il faudra faire un petit calcul. J'ai été diagnostiqué en 86 et j'avais 13 ans. Je vous laisse faire le calcul. Ça veut dire que je suis vieux, pour certains. Et je suis photographe vidéaste à mes heures perdues. Enfin, professionnellement, mais en ce moment, c'est très calme. J'en profite de ce temps alloué pour discuter un petit peu avec toi.

  • Nathalie

    Génial. Peux-tu nous raconter ton diagnostic et comment as-tu vécu l'annonce du diabète de type 1 ? Très important.

  • William

    Alors... Si tu veux bien, déjà, on va prendre une petite machine à voyager dans le temps. On va aller direction l'ère du diabète version jurassique, donc direction 1986, où les coupes mulet étaient beaucoup plus tendances socialement parlant qu'aujourd'hui. Et surtout qu'à l'époque, on pensait que le diabète, c'était juste pour les grands-mères qui avaient un petit peu abusé du coca. Moi, ma colocation avec ce fameux colocataire un petit peu indésirable, c'est fait à l'âge de 13 ans, donc en 86. Moi, j'étais un ado assez introverti. Je suis fils d'agriculteur. On vivait dans une ferme assez éloignée. Un environnement familial sympa, mais avec très peu de dialogue par contre. On ne communique pas, on ne parle pas. On est dans une génération où c'est des taiseux. Mes parents ont aussi bien entendu leur vécu et leur casserole, mais les conversations un petit peu importantes n'ont pas lieu. Donc on ne discute pas, on se tait et on subit un petit peu. Et quand tu es dans ce contexte-là, quand une maladie chronique te tombe dessus, la maladie vient encore plus clouer le cercueil du dialogue familial. Je pense que comme tout diabétique, je me suis un peu transformé en véritable fontaine ambulante. Je buvais, j'urinais, je buvais, j'urinais. Par contre, ma mère, avec son œil de lynx, a très vite décelé, qu'il y avait un truc qui n'allait pas. Donc moi, j'ai été diagnostiqué relativement tôt. Je n'ai pas fait d'acidocétose. Je suis passé par la case de prise de sang, généraliste, direction hôpital. Je ne vais rien te cacher, pour moi, ça a été un traumatisme. Aller à l'hôpital parce que je ne me sentais pas malade. Je buvais énormément, mais je ne comprenais pas pourquoi. Et quand je suis parti à l'hôpital, j'étais terrifié. Je me suis dit, c'est bon, c'est la fin, j'étais en larmes, je ne comprenais pas ce qui se passait. Ma mère ne me disait rien. Elle m'a dit, on va à l'hôpital. Elle était, bien entendu, encore plus embêtée que moi, je pense. Et quand on est arrivé à l'hôpital, comment te dire que la prise en charge était complètement catastrophique. Il n'y avait pas du tout de prise en charge de toute façon. Le maître mot qui a été vraiment, moi, qui me reste en mémoire, quand je suis resté à l'hôpital, c'est le silence et l'incompréhension. Je n'ai pas été informé de suite de ce que j'avais. Je coupe un petit peu, j'avance dans le temps. Quand je suis retourné à l'école, au collège, je ne savais toujours pas ce que j'avais. Je savais que j'étais diabétique et c'est tout. Par contre, je n'ai pas été informé de quoi que ce soit. Je n'ai pas eu souvenir d'avoir eu des cours ni une sensibilisation. On a été très vite perdus à l'hôpital devant un jargon médical qui était incompréhensible autant pour moi que pour ma mère. Puis pour mes parents, je pense aussi, ça a été très culpabilisant aussi parce qu'ils se sont dit c'est de notre faute. Je pense que moi, je ne suis pas parent, je n'imagine pas le truc, mais ça doit être un peu l'idée qu'on doit se faire de la chose. Et puis, le jargon médical, comme je te disais, c'est qu'on te parle d'insuline, de dextro, d'analyse d'urine, d'aliments interdits, de régime alimentaire. Tu te dis, mais qu'est-ce qui se passe, quoi ? Et puis, à un moment, on nous a dit, voilà, tu es diabétique. Mais diabétique, ça veut dire quoi ? Voilà, moi, je ne sais pas. Ma mère non plus. Les médecins, ils nous expliquent des trucs. Je ne sais pas, il n'y a aucune documentation, il n'y a pas une BD pour adultes, pas pour ados, pardon, il n'y a pas une brochure, il n'y a rien du tout. Moi, j'ai 13 ans, je suis encore admis au centre pédiatrique. Je ne suis pas chez les adultes, je suis encore chez les enfants, donc je suis le plus grand des enfants. Mais même là, mystère absolu, je reste pendant on va dire un peu plus de 15 jours à l'hôpital, et c'est un balai d'infirmières, d'interne, de, de gens qui passent me voir, qui me font des injections. Et pourquoi ? On ne sait pas. On ne sait pas ce qu'il se passe. Et de voir ma mère préoccupée, de toute façon, je savais très bien qu'il se jouait un truc. Je savais très bien qu'il se passait quelque chose de pas normal. Puis surtout, le diabète, pour nous, il n'y a pas d'antécédent. C'était inconnu au bataillon. On n'avait jamais entendu parler de ça. Et on ne connaissait personne qui avait ce type de maladie chronique. Et puis, il y a eu un espèce de chantage. Je le prends comme un chantage, mais si je voulais sortir de l'hôpital, il fallait que je m'apprenne à faire mes piqûres. Alors, je remets encore du contexte, parce qu'à l'époque, il n'y avait pas de stylo. J'avais deux insulines, une rapide, une lente et une seringue. Donc le matin, il fallait se faire un mélange dans la seringue d'insuline rapide que tu complètes avec de la lente. Ce qui veut dire que l'insuline rapide va jouer entre le début de ton injection jusqu'à midi, l'insuline lente, elle reprend le boulot de midi jusqu'au soir. Et le soir, même opération, tu te fais une injection avec une seringue de ce même type d'insuline. Insuline de porc à l'époque. J'ai l'impression d'être un vieux croulant du diabète. Mais à l'époque, c'était comme ça. Donc, ma mère a revêtu une espèce de blouse d'infirmière parce qu'elle aussi, elle a appris à faire des injections. Moi aussi, j'ai appris à les faire. Mais dans quelle temporalité, on ne savait pas. C'est-à-dire que, OK, je me fais des injections. Bon, OK, d'accord. Mais pourquoi, comment, jusqu'à combien de temps ? Demain, après-demain, dans un mois, qu'est-ce qui se passe ? Ah bah non, c'est pour toute la vie. Ah bon ? Ah d'accord. Si tu ne les fais pas, tu seras aveugle. On va t'imputer, puis tu vas mourir. Donc là, le choc, épée de Damoclès sur la tête. Et là, je me dis, ok, d'accord, je vais apprendre à faire mes injections. Voilà, s'en est suivi justement tout un processus comme ça. Et puis, restriction de sucre, régime alimentaire, qui a suivi, parce qu'à l'époque, c'était comme ça. Et puis, en fait, c'était restrictions et frustrations. De toute façon, au bout d'un moment, quand on est retourné à la vie civile, pour parler sortir de l'hôpital, moi, je suis revenu au collège, je ne sais plus dans quelle classe j'étais, mais je ne savais pas ce qu'ils jouaient en moi. Je ne savais pas. Comment réagir avec une hyper ? Je ne sais pas. Comment réagir avec une hypo ? Je ne sais pas. personne n'était au courant. Un seul prof était au courant, le prof principal. Je n'avais aucun passe-droit pour quoi que ce soit. Il n'y avait pas d'infirmerie à mon collège. Il n'y avait rien. Je ne me contrôlais pas pendant la journée. Il n'y avait rien du tout. C'était comme ça. Puis des fois en plus, quand je suis revenu au collège, je n'étais pas là pendant bien 15 jours. Il y a un prof qui s'est cru très sympa de me rentrer dedans parce que je n'avais pas fait le devoir, que je n'étais pas là pendant 15 jours. Donc ça aussi ça a mis un coup un petit peu au moral donc tu reviens, t'es malade tu sais pas trop pourquoi, tu connais pas les termes et puis en plus on vient te dire pourquoi t'étais pas là, ta maladie chronique, toi t'es bien gentil mais c'est les devoirs qui priment donc mon colocataire lui s'est bien installé tout doucement tranquillement et puis voilà dans une incompréhension totale dans un flou artistique bien de l'époque. Je fais un vite parallèle avec le monde hospitalier, c'est-à-dire que je ne vais pas leur jeter la pierre, mais pendant très longtemps, j'ai eu beaucoup de haine envers le système hospitalier, et surtout envers les diabétologues. C'est un corps de métier, mais ils ne sont pas bien ces gens-là. On a fréquenté trois diabétologues en sortant de l'hôpital. C'était un jugement sans appel à chaque fois qu'on allait les voir. C'était un peloton d'exécution, on se faisait tirer dessus à balles réelles, on se faisait engueuler, on se faisait infantiliser, c'était très culpabilisant, parce qu'on ne comprenait pas les termes. Qu'est-ce que c'est une hyper ? Je ne sais pas. Tu sais ce que c'est qu'un hypermarché ? Tu sais ce que c'est qu'une hyper ? Voilà, une hypo ? Je ne sais pas. On s'en est suivi des relations avec les diabétologues de l'époque, très compliquées, jusqu'à un moment où j'ai dit à ma mère, on arrête tout. On n'est pas là pour se faire engueuler. La maladie chronique te tombe dessus du jour au lendemain. On n'a pas fait médecine en diabétologie. Nous, on doit apprendre. Si les gens en face, ils n'ont pas un minimum d'empathie et un minimum de compréhension pour nous expliquer ce qui se passe, tu te retires de ces professionnels de la santé. Je n'ai plus vu de diabétologue pendant des années. Je suis allé voir mon médecin traitement, mon médecin de famille. À l'époque, il y avait des médecins de famille. Donc, on est allé les voir. Bon, elle n'était pas spécialisée dans le diabète, mais au moins, elle était à l'écoute. Ce qui a quand même beaucoup plus détendu la pathologie. Et puis, ma mère, dans ses recherches, elle a quand même trouvé un cousin lointain qui était lui aussi porteur du diabète de type 1 et qui lui a justement enseigné des choses, et qui lui a dit, ben voilà, ça se passe comme ça, l'alimentation c'est comme ça, mais lui, étant plus vieux, il avait d'autres types de protocoles. Du coup, il y a eu beaucoup plus de compréhension, et beaucoup plus de facilité à gérer la maladie au quotidien. Tout en fait, c'est bon, évidemment, moi quand je raconte ça, certains diabétologues sont là ouais, ouais, avant, avant, ouais, ouais, ok y'a pas de problème, mais moi je suis parti avec une grosse épine dans le pied en fait je me suis senti coupable d'être diabétique voilà et puis la peur de la mort, le côté, le côté, il va falloir se faire des piqûres toute la vie. Une charge, tout d'un coup, moi j'ai 13 ans, et puis tout d'un coup, dans la tête, t'évolues, et tu parais beaucoup plus vieux, entre guillemets, que tes autres camarades. Et ça, en fait, je ne l'avais jamais remarqué, mais effectivement, j'avais plus de maturité que certains de mes copains. Être attentif à ses sensations, s'écouter, ça, je ne le savais pas, mais ça faisait partie aussi de ce diabète qui est venu me rentrer dedans à l'adolescence.

  • Nathalie

    Et du coup, pourquoi avoir choisi de comparer ton diabète à un colocataire indésirable ? Comment c'est venu ça ?

  • William

    C'est venu plus en écrivant mon bouquin. En fait, je cherchais un dénominateur pour justement donner une image qui soit parlant un peu pour tout le monde. Parce qu'au début, ce n'était pas du tout mon colocataire indésirable. J'avais choisi un titre un peu plus mélodramatique, l'intrus à vie. Je ne sais plus ce que c'était. J'avais fait toute une liste de titres potentiels à mon livre. Et puis, à un moment, je me suis dit, attends, en fait, cette maladie chronique, elle a débarqué du jour au lendemain, elle a commencé à mettre des miettes de chips de partout chez moi, elle met ses pieds sur la table, elle renverse sa bière en plus elle m'attrape par le cou, elle me dit hé mec, je vais être là pour toi et puis en plus, j'ai signé un bail à vie, ça c'est cool et j'ai même mis mon nom sur la boîte aux lettres, donc ça serait impossible de te débarrasser de moi et en fait, en principe quand tu fais de la colocation, c'est pour partager des bons moments. Et là, ce n'est pas le cas. Donc là, l'autre loup, il est là. Et il va falloir faire avec. Donc du coup, je me suis dit, le colocataire indésirable que je pense que ça peut parler, même si, bien entendu, les colocations peuvent très bien se passer par moments. Mais je pense que le titre, il est adéquat.

  • Nathalie

    Et du coup, en fait, c'est venu... Parce que tu voulais écrire un livre.

  • William

    Tout à fait.

  • Nathalie

    D'accord, ce n'est pas quelque chose que tu avais déjà réfléchi. D'accord, ça, je ne savais pas, tu vois.

  • William

    Je n'avais pas réfléchi à ça avant. Je disais à mon entourage, je suis diabétique. Des fois, je précisais pour les plus intéressés, de type 1. Vraiment, c'était plus vraiment pour le côté imagerie de mon livre. Je ne l'avais pas forcément en tête depuis très longtemps. Par contre, la pochette, oui. Justement, la pochette de mon bouquin, ça, je l'avais depuis longtemps. Parce que je me disais, c'est vraiment une imagerie que j'avais en tête, que j'imaginais. Quand il a fallu la faire, je me suis dit, je vais appeler un copain, on va faire comme si on a fait un shooting un après-midi avec Hugo, que je salue d'ailleurs. Et du coup, on a fait cette espèce d'aspect fantomatique qui est derrière moi, qui m'empoigne et qui me bouche la vue. Ensuite, c'est peut-être un petit peu une imagerie artistique, peut-être un petit peu rebutante et un petit peu violente pour certains. Mais pour moi, c'est une manière d'interpeller. Je n'avais pas envie de tomber sur un dessin avec une bouteille d'insuline, une seringue, avec ma tête en train de dire « Oh là là ! » « Ah ben dis donc ! » En fait, je n'avais pas envie de ça. Je pense que ça aurait été trop téléphoné. J'avais plusieurs idées, mais cette idée vraiment très artistique et graphique, je l'avais beaucoup en tête. Et d'ailleurs, quand tu regardes la quatrième de couve, pour explication, en fait, là... Est-ce que c'est le diabète ou c'est moi qui regarde vers la lumière ? J'ai eu deux, trois petits commentaires à la sortie du livre à propos de la pochette, parce que c'était un petit peu différent. On m'a dit que ça ne donne pas trop envie. C'est vrai qu'au niveau marketing, ce n'est pas ce qu'il faudrait faire. Mais tant pis, il faut passer au-delà de l'image un petit peu forte et un petit rentre dedans. Parce que mon récit, en fait, dedans, je pense que j'y mêle aussi quand même pas mal d'humour, pas mal de choses décalées, du voyage. Je ne parle pas que du diabète, du coup.

  • Nathalie

    Mais quand on regarde le livre, par exemple, on est dans une librairie, on regarde le livre, on ne sait pas que ça parle du diabète.

  • William

    Oui, tout à fait.

  • Nathalie

    Donc, je veux dire, à la limite, ça peut être un polar, ça peut être...

  • William

    Oui, tout à fait. Ça fait plutôt polar, série noire, que finalement vie au travers du diabète de type 1.

  • Nathalie

    Et du coup, est-ce que tu as évolué ? Comment tu as évolué avec ta relation et ce colocataire au fil des années ? Comment ça va maintenant ?

  • William

    Alors maintenant, au fil des années, ma relation était plutôt graduelle parce qu'on va dire qu'aux alentours de mes 13 ans jusqu'à mes 25 ans, ça va. Je fais avec. J'assume la pathologie, je fais mes injections. Il y a un régime alimentaire qui est là, mais il y a une forte envie de vivre. L'intérêt, c'est d'être un peu plus fort. Puis, je reviens aussi sur le contexte familial. On n'en parle pas. Je gère mon truc tout seul. Je me répète un petit peu, mais le terme solitude est beaucoup présent dans moi, ce que j'ai vécu. Même si j'ai été très bien entouré, ce n'est pas du tout ce que je veux faire transmettre à mes proches. Mais étant porteur de diabète de type 1, on est très vite seul. Et je trouve que c'est... très compliqué d'expliquer ça à ses copains du même âge ou d'expliquer ça en soirée. S'il y a de l'alcool, ce n'est pas le bon moment. Il faut connaître les termes techniques, il faut que les gens s'intéressent. Tout le monde n'a pas forcément les oreilles pour expliquer, pour entendre plutot, pour entendre ce que tu vis au quotidien. Et puis certains, ils ont peur. Parce que si bien tu leur en parles, ils vont dire, moi aussi j'ai bu beaucoup d'eau, peut-être que je suis diabétique. Et puis, il y a aussi, je pense, quelque part, des réflexions qui sont un petit peu désobligeantes. Des fois, tu te livres et tu te dis, oui, c'est diabétique, machin, puis on se moque de toi. Et puis, on te dit, ah, mais William, ah ouais, le diabétique, là. Mais je n'avais pas forcément envie d'avoir une étiquette. Et puis, à cet âge-là, pendant des années, vu que je n'avais aucun dispositif visible comme aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui, on a des pompes, on a des... On a des capteurs glycémiques, ça se voit. Mais à l'époque, il n'y avait pas ce genre de système. Donc, ça ne se voyait pas. Donc, le handicap invisible, il est très facile à cacher. Et tu es comme tout le monde. Et quand tu es ado, pré-ado, jeune adulte, tu n'as pas envie d'être stigmatisé. Tu as envie d'appartenir à un groupe de copains, de copains-copines. Tu as des amis. Tu n'as pas envie qu'on vienne te parler de ça non plus. Après, on a tous des rapports différents, justement, avec le diabète. Moi, je n'avais pas envie de le laisser de côté, pas de le mettre sous le tapis, mais il était là, il était très présent, ce colocataire, je savais qu'il était là, mais je n'avais pas envie qu'il me définisse. Je n'avais pas qu'on dise William le diabétique. Oui je comprends. Puis, c'est une relation aussi qui s'est faite en dent de scie. Je n'ai pas fait une crise d'adolescence du diabète entre guillemets, attention, je mesure mes propos, je ne vais jamais arrêter mon traitement. Parce que de toute façon, on m'avait dit, tu vas mourir. Donc forcément, moi, je me suis dit, je n'ai pas spécialement envie de passer de vie à trépas. Donc, on va faire nos injections, le gentil petit soldat. Et puis, voilà, on va essayer d'en profiter pendant qu'on n'est encore pas amputé et pas aveugle. Donc voilà, moi, j'avais toujours ça en tête, qui revenait tout le temps.

  • Nathalie

    Oui, on avait bien stigmatisé les choses.

  • William

    Et merci pour l'anxiété, parce que c'est pareil, la prise en charge, elle était d'une telle manière à l'époque. Mais la prise en charge psychologique, tu peux mettre un zéro pointé dessus. Je pense que j'ai eu plein de traumas entre l'adolescence et ma vie de jeune adulte avant que je me prenne vraiment un petit peu en main psychologiquement. Et encore, je te dis, aujourd'hui, j'ai encore du travail.

  • Nathalie

    Et puis après, à partir de 25 ans, ça a changé ?

  • William

    Oui, alors du coup, en fait, aux alentours de 25-30 ans, Tous ces régimes restrictifs de sans-sucre et tout ça, sur le long terme, ça a commencé un peu à devenir complètement fou parce que j'étais tout le temps dans les restrictions. Et quand il y avait une hypoglycémie, je me jetais sur tout ce qui bougeait. J'étais très frustré au point de vue de l'alimentation. Et dès que j'avais une hypo, je me disais, chouette, je vais dégommer ce paquet de gâteaux, je vais dégommer des glaces, c'était n'importe quoi. À tel point que je n'ai rien vu venir, j'ai commencé à prendre du poids. Et ça a commencé graduellement comme ça, mais je n'ai rien vu venir. J'ai l'impression que je me suis réveillé un matin en me disant « C'est bizarre, j'ai l'impression d'avoir du ventre, j'ai l'impression d'avoir plus de pecto, j'ai l'impression d'avoir plus les cuisses un peu plus de charnus. » Alors attention, j'ai pris du poids, ce n'était pas dans l'excès non plus. Mais un jour, j'ai un ami qui se moque littéralement de moi, qui me dit « Ah bah dis donc ! » Et il me fait une petite réflexion... comme ça, en passant, je me dis que je suis en train de me rendre compte que j'ai des comportements alimentaires complètement anormaux. Et surtout, que je n'arrive pas du tout à maîtriser. Donc, je me jette sur... les hypos, ben j'y vais quoi. Donc, ça te fait des espèces de pics glycémiques de ouf. En plus, à l'époque, il fallait que je fasse mes dextros pour voir où j'en étais. Effectivement, quand j'étais un peu trop haut, je me faisais des piqûres de correction avec de l'insuline rapide, pas de stylo toujours, mes petites seringues. Et quand ça baissait, je mangeais. Donc ça faisait un espèce de système de yo-yo, des fois où je passais des journées à faire un petit peu n'importe quoi. Mais malgré tout ça, ce qui était quand même assez bizarre, c'est que mes résultats étaient très bons.

  • Nathalie

    Oui, trop haut, trop bas.

  • William

    J'avais une hémoglobine glyquée qui était pas mal. Quand je voulais bien faire mes prises de sang, bien entendu, parce que pour moi, c'était terrifiant d'aller voir mon médecin. Et les résultats, ils étaient là. Donc, ils étaient quand même relativement bons.

  • Nathalie

    Oui, à cause de ça, à cause des montagnes russes. Parce qu'en fait, la moyenne entre être trop haut et être trop bas, ça fait une bonne moyenne, en fait.

  • William

    Ce n'était pas du tout bon, ce que je faisais. Après, attention, je mesure un petit peu. C'était sur une période. Ça n'a pas duré des années, mais effectivement, il y a eu un côté, il y a eu un moment où je me suis dit, oula, mais je perds le contrôle, il y a un truc qui ne va pas. Il faut peut-être que je me remette en question. Après, qu'est-ce que j'ai fait ? J'ai fait tout l'inverse. Et du coup, je suis tombé dans la spirale du gentil petit soldat, du militaire, de l'hyper contrôle et de l'employé modèle de la fin du mois. Le côté on pèse. En plus, je n'avais même pas fait d'insulinothérapie fonctionnelle, ça fait encore un mot à dire, horrible. À une certaine époque, aux alentours de 35 ans, on va dire, je comptais mes glucides, mais avec un... au feeling en fait. J'avais fait tout plein de tests. Perso, je me suis dit, tant de grammes de riz égale ça, tant de doses d'insuline. Je fais avec mes légumes, je mange ça le matin et mes injections, elles sont de temps. La journée se passe comme ça. Tout va bien. Le soir, je mange la même chose qu'à midi et le soir, je me fais une injection avec mes seringues de tant et tout va bien.

  • Nathalie

    En fait, tu t'es fait l'insulinothérapie fonctionnelle tout seul.

  • William

    Ouais, mais avec justement un côté extrêmement contrôle. Et il ne fallait surtout pas qu'il y ait un grain de sable qui vienne au milieu de tout ce système-là. Parce que ce côté hyper contrôle t'enlève du milieu social, en fait. Tu ne vas plus au resto avec tes potes, tu ne vas plus boire un coup, tu ne te fais plus plaisir. Et tu vas même au-delà, c'est-à-dire que tu ne te fais même plus plaisir dans la vie en général. Tu veux t'acheter des fringues, tu te dis non. Moi, ça en est rendu jusqu'à là. C'est-à-dire qu'il fallait que je maîtrise tout, tant de grammes de riz à midi, tant de légumes, point, c'est tout. Puis, il n'y a rien d'autre. Ça arrive des fois de faire un petit peu des sorties de route, de se faire un petit peu plaisir, mais avec une culpabilisation derrière. Donc, en fait, quand tu vas à un dîner chez des amis, moi, j'arrivais, j'avais déjà mangé chez moi. J'arrivais chez des amis et je leur disais « Non, non, mais j'ai pas faim. C'est bon, je ne mange pas. » Et donc j'évitais d'être en difficulté socialement parlant, donc d'être entouré qu'avec des gens qui étaient un peu compréhensifs avec ma méthode de vie. À l'époque, j'étais célibataire. Quand je rencontrais des jeunes femmes, et du coup, « Ah bon, on va au resto ? » « Bah non. » « Bah pourquoi ? » « Bah parce que. » Donc tu passes pour un psychopathe, quoi. Tu passes pour un psycho rigide de l'alimentation. En plus de ça, je faisais énormément de sport, du sport à outrance. Je passais des soirées, des week-ends. Ah, mais tu pars déjà ? Ouais, ouais, parce que demain, je vais faire des pompes. Puis demain, je vais faire 15 bornes à pied. Voilà, je vais faire une rando dans la montagne d'à côté. Moi, je pensais que toutes ces choses que je faisais étaient bénéfiques. Ça a été bénéfique parce que oui, j'ai maigri, parce que je me suis musclé. Par contre, ça m'a mis des systèmes de pensée complètement déviants. Déviants, c'est peut-être un mot un petit peu fort. Mais quelque part, je m'en suis rendu compte récemment, peut-être que j'ai fait des TCA sans m'en rendre compte.

  • Nathalie

    Ouais, c'est ce que j'allais te dire.

  • William

    Voilà, ce côté ultra contrôle et attention, gestion des glucides, etc. J'avais des amis qui me disaient, oui, mais c'est très bien ce que tu fais parce que ça te convient et ça te fait du bien. Ben ouais ! Ouais, mais entre guillemets, sur le long terme, tu ne peux pas avoir des courbes plates. Sur le long terme, ce n'est pas possible. C'est même trop bizarre d'avoir ce type de comportement sur le long terme. Mais moi, Dieu sait que ça a duré.

  • Nathalie

    À quel moment tu as fait l'insulinothérapie fonctionnelle avec des professionnels de santé ?

  • William

    En 2019

  • Nathalie

    Tu avais quel âge ?

  • William

    Je ne sais pas. En 2019, c'est-à-dire récemment en fait, au niveau temporalité, j'ai été diagnostiqué 86. Jusqu'en 2019, je n'ai pas changé de protocole. J'ai toujours été mes deux seringues et mes deux insulines. Je n'ai jamais connu les stylos.

  • Nathalie

    Jusqu'en 2019, tu n'avais pas le stylo ?

  • William

    Non.

  • Nathalie

    Oh punaise.

  • William

    Un jour, je vais voir ma diabétologue parce qu'évidemment, il fallait voir peut-être une diabétologue. Je lui dis, mais bon, je suis toujours avec mes seringues et mes deux insulines. Là, je pense que l'évolution de la maladie, il y a eu un truc là. Je voyais bien qu'il y avait des gens qui avaient des stylos.

  • Nathalie

    Et des capteurs. En 2017, le capteur.

  • William

    Voilà. Et ma diabétologue de l'époque, elle me dit, non, t'inquiète pas, on ne change pas une équipe qui gagne. Donc les capteurs, j'en avais entendu parler, mais à l'époque, ils n'étaient pas encore remboursés. Donc je m'étais dit, je vais attendre.

  • Nathalie

    Remboursement, juin 2017.

  • William

    Oui, oui. Eh bien ça, j'ai eu mon premier capteur en 2019. Le Freestyle.

  • Nathalie

    La diabéto, mais je ne le crois pas.

  • William

    Et du coup, je suis passé à la pompe Omnipod, pas l'Omnipod Dash, celle d'avant, en 2019.

  • Nathalie

    Tu as tout fait en 2019. T'es passé des seringues à la pompe.

  • William

    Ouais, j'ai tout pété en 2019.

  • Nathalie

    Tant mieux.

  • William

    Suite à un gros accident, en fait. J'ai fait un burn-out, entre guillemets, à mon travail, qui m'a déclenché une très, très forte hypoglycémie. Et je me suis fracassé la tête par terre. Je suis allé en réanimation. Je me souviens de rien, quasi. Je pense que j'ai mal dû gérer quelque chose le matin. J'étais énormément stressé, j'en pouvais plus. Le corps a dit « Ok, on arrête tout ! » Du coup, j'ai eu en même temps une grosse hypoglycémie qui m'a fait perdre connaissance, qui m'a fait heurter la tête par terre. Je me suis retrouvé en réanimation. Ensuite, je suis allé au... au service diabéto de l'hôpital pendant un bon petit moment. Et là, je n'ai pas eu le choix. On m'a posé le capteur, donc ça, c'était cool. Et puis, on m'a dit, tiens, il y a la pompe là qui peut être pas mal. Moi, je refusais de porter des pompes à tubulure. Le cathéter moi c'est pas du tout mon truc. En plus, je suis maladroit comme ça se peut pas. Moi, tu me fais porter ce truc, on dirait un Marsupilami humain. Comme je suis sûr, je me l'arrache 5-6 fois dans la journée. Ce n'est juste pas possible. Et en fait, on me propose cette petite pompe qui est toute petite, comme une boîte d'allumettes. Je dis, ouais, autant tester. Mais quand tu passes de seringue à ça, il faut tout réapprendre. Et là, c'était la catastrophe la plus complète. Je suis resté à l'hôpital le temps d'apprendre, etc., de faire des choses comme ça. Et puis, je suis reparti chez moi. C'était la cata, quoi. Parce que les protocles de l'hôpital, sont ce qui sont. Tu arrives chez toi, c'est foutu, c'est la catastrophe. J'avais un débit basal très adapté à l'hôpital, mais après, le moindre truc que je faisais, ça me mettait en hypo. Dès que je mangeais un truc, j'étais hyper... Je n'arrivais jamais à trouver l'équilibre. C'était l'enfer sur Terre, pour moi, évidemment. Il a fallu que je réapprenne ce qui m'a coûté moralement, ce qui m'a beaucoup coûté quand même... Après

  • Nathalie

    Et là tu as fait l'insulinothérapie à ce moment-là.

  • William

    Après je me suis remis en question, je me suis dit bon avant de se taper une trop forte dépression, il va falloir que j'apprenne. J'ai demandé, j'ai changé de diabéto, j'avais demandé à ma diabéto et j'aimerais quand même avoir la connaissance de comptage de glucides pour justement me perfectionner là-dedans et pour moins être dans les choux. Parce que c'est juste pas possible, en fait, le moindre truc que je fais, ça part en sucette. Je sors de chez moi, je suis en hypo, à peine je regarde un aliment, bam, ça part pour tous les sens. C'était à s'arracher les cheveux, en plus, j'ai une calvitie, donc ça sert plus à rien. Donc je m'arrachais le peu de cheveux qui me reste. Et du coup, quand je suis arrivé à faire justement le comptage de glucides, sur les deux jours de formation, tout d'un coup, il y a un nouveau monde qui s'est ouvert à moi. Donc ça, ça a été très bénéfique. Puis je le conseille quand même pour avoir un minimum de connaissances, malgré le choix très nul en maths.

  • Nathalie

    Il y a des applications maintenant pour... La pompe, elle fait pratiquement tout, la pompe.

  • William

    Voilà, maintenant, elle fait le produit en croix. Ça va. C'est clair.

  • Nathalie

    Il suffit de lui rentrer les données, c'est tout. Et encore, maintenant que tu es en boucle fermée, tu ne rentres que les glucides. Donc, tu vois, tu es passé du rien à tout. C'est tant mieux. Je suis trop contente pour toi, en tout cas.

  • William

    Je suis passé du jurassique à l'ère moderne. Du coup, là...

  • Nathalie

    Oh punaise ! C'est trop bien ! C'est trop trop bien !

  • William

    Non, puis en fait, je pense que me remettre en question, ça a été... ça fait partie un petit peu, je pense, je pense aussi du processus de la maladie chronique. Puis, c'est peut-être un peu de la personnalité, même si j'ai encore énormément de choses à régler, énormément de choses à voir en introspection psy notamment, sur mes comportements je pense que il faut être un minimum curieux et puis il faut se remettre en question c'est pas forcément que je me suis pas mis en question toutes ces années mais c'est vrai que c'était un protocole qui m'allait tellement bien évidemment je voyais bien qu'il y avait des stylos insuline lente rapide mais je regardais les gens et je me disais mais ils piquent bien souvent ces gens en fait, c'est bizarre, moi je fais juste deux injections. En fait, c'est pas vrai. Je ne faisais pas juste deux injections. Par ce que je me contrôlais énormément. Je faisais mes dextros. Et quand je regardais un peu mon état glycémique, soit je laissais tel quel, soit je me faisais des micro-bolus.

  • Nathalie

    Mais c'est bien et c'est clair qu'il faut apprendre sa maladie pour mieux gérer. Mais c'est vrai que tu es parti de loin. Et du coup, je pense que les gens, malheureusement, qui déclarent maintenant, ils ont quand même beaucoup de choses à leur portée.

  • William

    Heureusement, il y a plus de facilité aujourd'hui. Ça n'empêche pas, effectivement, je pense qu'il y a des nouveaux types de charges mentales parce que moi, il y avait déjà la charge mentale normale d'injection. Mais quand il est arrivé le téléphone, les vibrations, les bips, les alarmes, les codes couleurs, là, ça m'a mis hors de moi. Le téléphone qui me gueule dessus qui me dit : t'es en hypo, t'es en hypo, t'es en hypo, attention, t'es en hypo. Moi, ça m'a rendu complètement fou.

  • Nathalie

    Oui, il y a les travers aussi de la nouvelle technologie, c'est clair. C'est clair.

  • William

    C'est savoir aussi interpréter tout ça. C'est-à-dire que, et ma compagne me le dit très bien, elle me dit : Le téléphone, il ne t'engueule pas. En fait, il te prévient. Moi, je le prends comme une agression.

  • Nathalie

    Oh ça je suis d'accord.

  • William

    Des fois, j'ai envie de le balancer dans la pièce. Non, mais des fois, c'est juste fou. Donc en plus, ces alarmes, elles arrivent au moment le plus opportun. C'est-à-dire que tu es au cinéma, bam, ça gueule. Tu es à l'église pour des obsèques, ça gueule. Merci.

  • Nathalie

    Après, il faut peut-être prévenir, tu vois, les choses. C'est-à-dire, tu vois, être... anticiper. Voilà, je cherchais le mot.

  • William

    Anticipation, là, c'est un mot qui me va bien.

  • Nathalie

    Anticipation, organisation, prévention ...

  • William

    Voila tout le temps, il n'y a pas d'imprévu, il n'y a pas de légèreté. Moi, ce que je trouve regrettable, c'est qu'effectivement, il y a ce côté spontané qui a un peu disparu, en fait.

  • Nathalie

    Il a pris un coup dans l'aile.

  • William

    Oui, et puis la légèreté que j'avais un peu plus jeune, elle est moins... Effectivement, il faut toujours tout prévoir, tout anticiper. Il faut toujours avoir un coup d'avance.

  • Nathalie

    Toujours sa petite sacoche. Moi, c'est ça, ça me tue. Tu ne peux pas sortir de la maison les mains vides.

  • William

    Voilà, c'est ça. Donc, pas de légèreté, quoi. C'est fou, c'est fou.

  • Nathalie

    Non, ça, c'est quand même très handicapant. Qu'est-ce qui t'a poussé à écrire ce livre ?

  • William

    Moi, ce qui m'a poussé à écrire ce livre, justement, c'est ce... C'est quand j'ai eu mon accident, en fait. Plutôt suite à mon accident, pas à partir de mon accident. Mais ça m'a mis, comme je le disais tout à l'heure, j'ai eu des nouveaux appareils, un nouveau protocole, etc. Il a fallu que je m'y fasse quand même pendant un bon petit moment. Il a fallu que je réapprenne tout. En 2023, je me suis pris encore une fois une nouvelle claque. Commence l'année avec... Une nouvelle fois, un séjour à l'hôpital parce que j'ai fait un coma hypoglycémique qui m'a déboîté l'épaule. Je me retrouve à l'hôpital, je suis complètement dans les choux. Je ne sais pas trop ce qui se passe et on me dit bah ouais, t'as fait une réaction à une hypoglycémie, je pense que j'ai dû faire un bolus beaucoup plus conséquent, je me suis endormi par-dessus, ça ne m'a pas réveillé et c'est parti en séance de tremblements, épaule déboîtée, pompier et hôpital. Je me souviens un peu d'avoir commencé l'année comme ça. Et quand je suis revenu chez moi, je pensais que je maîtrisais mon diabète, mais en fait pas du tout. C'est lui qui me contrôle. C'est lui qui prend le pas, c'est lui qui décide. C'est mon colocataire qui a pris beaucoup trop de place et qui fait bien ce qu'il veut chez moi. Et là, moi, je suis dans un coin et je subis. Je subis, je ne sais plus quoi faire. Je ne sais plus quoi faire. Je me dis qu'il faut que... il faut que je me débarrasse de ce truc c'est pas possible, je peux plus vivre avec ça ça prend une telle place dans ma tête dans ma journée que ça en devient complètement anxiogène. Je me dis, je vais peut-être devenir fou, je pense que je vais vriller il faut que ça s'arrête au moins un jour il faut qu'au moins un jour mon colloc il me foute la paix au moins une journée ne serait-ce qu'un temps, je ne me demande que ça c'est pas grand chose, mais non ça ne s'arrête pas. Et du coup, j'ai pris quand même soin de moi par la suite. En 2024, je suis sorti de ma grotte, littéralement. Parce qu'avant, je ne m'intéressais pas aux autres diabétiques. Je n'en connais pas, je n'en connais très peu. J'ai deux copains diabétiques que je ne vois pas énormément. Donc quand on se voit, on ne parle pas de ça. Et quand on en parle, c'est pas le sujet majeur. Et quand je suis sorti de ma grosse boîte, littéralement, j'ai commencé à écouter un podcast. Ah, deux podcasts. Mais j'y suis allé à tâtons, sur la pointe des pieds. Parce que moi, je me suis dit, je ne veux pas entendre des trucs qui vont me détruire le moral. Ce n'est pas le moment. Et puis, je n'ai pas envie d'entendre des trucs, des gens au travers des podcasts qui vont me dire, ouais, mais mec, en fait, tu n'as jamais accepté ta maladie. C'est pour ça qu'en fait, tu es comme ça. Alors, l'acceptation, attention, j'ai un rapport avec ce mot qui est très compliqué. J'ai une acceptation en dent de scie, j'assume parfaitement mon diabète, mes appareils sont visibles et je veux qu'ils soient visibles, on ne me pose jamais de questions là-dessus. Je pense que ce n'est pas que je suis un gars. Il y a très peu de monde qui vient me questionner là-dessus. Quand c'est fait de manière rigolote, ça va, je me fais éducateur, mais quand c'est un petit peu bête, je me mets au niveau de la bêtise. Et au point de vue de l'acceptation, autant les diabétos que certaines personnes m'ont dit « mais de toute façon, t'acceptes pas ta maladie » . Je me suis dit « mais ils ont raison en fait ces gens-là » . En fait, c'est vrai, je ne dois pas accepter ma maladie. Donc, en fait, les autres diabétiques, eux, ils l'acceptent et ils vivent mieux que moi. Moi, je ne l'accepte pas. Ils ont peut-être raison. Alors, si je ne l'accepte pas, est-ce que je serais là pour en parler ? Au final, je l'accepte un peu cette maladie quand même, je l'assume. Bon, ok. Mais bon, ça se passe plutôt bien, oui. Mais les autres diabétiques, ils font comment ? Et quand j'ai commencé à écouter des... des récits en podcast, des articles ou même des vidéos. En fait, les gens, tout d'un coup, ça a fait tilte parce qu'ils avaient le même discours que moi. Parce que j'ai entendu des échos de vie avec des gens beaucoup plus jeunes que moi qui m'ont fait dire « Mais dis-donc, il y a des gens, ils n'ont même pas trois ans de diabète, ils osent dire haut et fort. » Ben ouais, moi, ça me saoule. J'en ai marre. Et je le dis. Parce que moi, pour moi... Ça a toujours été un interdit de le dire. Ça faisait de moi quelqu'un qui se plaint entre guillemets. Je ne sais pas si je donne une bonne image, mais je n'avais pas envie de passer pour le ouin-ouin du coin qui dit « Moi, j'en ai marre de mon diabète ! » Et puis surtout, il y a toujours la comparaison avec d'autres maladies. « Mon gars, ta diabète, ça se soigne ! » Parce que là, il y a des gens qui sont sous les bombes, et puis il y en a qui sont en phase terminale. Donc toi, avec ton petit diabète, tu vas te taire. J'ai vite fermé ma bouche face à tous ces trucs-là. Et quand j'ai commencé justement à m'ouvrir, à sortir de ma grotte, là tel y un ours, tel ours alpin, quand j'ai écouté tout ça, je me suis dit « Ah ouais ! » Il y a un peu plus de sérénité qui s'est quand même opérée moi. Et puis j'ai commencé à travailler justement intérieurement et là je me suis dit « Bon... » Je vais me faire ma propre psychoanalyse. Au-delà de vouloir sortir un livre, j'ai commencé à écrire. Plus j'écrivais, plus les souvenirs revenaient. Et plus les souvenirs revenaient, plus j'écrivais. Et puis ça faisait comme ça, montagne, montagne, montagne. Et puis en plus, moi, je ne suis pas écrivain, je n'écris pas énormément. Il y a une époque, j'écrivais, mais je n'écris plus. Et l'écriture, c'est comme un muscle. Plus tu le travailles, plus ça se développe. Mais moi, il a fallu que je reparte un petit peu de zéro. Donc au début, mes récits étaient très, très, très bruts et très rentre dedans parce que j'avais des comptes à régler. Surtout avec mon passé, j'ai commencé à sortir les gants de boxe. Et bon, quand tu tapes sur ton clavier avec des gants de boxe, ce n'est pas terrible. Donc je les ai un petit peu enlevés. Et puis j'ai commencé à muscler mon écriture, à muscler le jeu. Et j'ai commencé à écrire, écrire, écrire. Puis au fil du temps, je me suis dit, je vais y rajouter des couleurs, un peu des odeurs, un peu des sensations. Il faut un peu que je décrive mon entourage, pas que le diabète. Et puis en fait, des voyages, j'en ai fait. J'ai vécu en Ukraine, j'ai vécu au Québec, je suis allé trois fois en Afrique de l'Ouest, je suis allé partout un petit peu en Europe. Il y a des choses à raconter au travers de tout ça, comment je l'ai vécu, au travers de mon diabète, comment j'ai vécu la chaleur du Cambodge avec ma pompe, parce que là, j'étais sous pompe, ça remonte à pas très longtemps. Et au fur et à mesure que j'ai construit le bouquin comme ça, il s'est posé aussi la question à savoir est-ce que j'allais mettre des chiffres sourcés ou non. Et spoiler, c'est un récit de vie, c'est pas un guide pratique pour diabétique, c'est pas un livre de médecine, c'est mon vécu à travers mes yeux. Donc forcément, il y a des choses qui peuvent plaire ou pas, ça c'est à tout un chacun de juger. Il n'y a pas de problème là-dessus. Moi, j'ai eu un vécu qui m'est propre. Ma relation avec le médecin, certes, elle a changé. Il faut que je travaille encore dessus. Mais voilà, il y a quand même dans ce récit, il y a de la colère, mais aussi il y a de l'humour. Il y a du cynisme, il y a du second degré, il y a du voyage. Et puis, je n'ai pas voulu sourcer non plus trop de choses. Il y a quelque chose que je me suis rendu compte. Je ne savais pas ce que traversaient les femmes diabétiques. J'étais au courant de rien, là dessus. Quand j'ai commencé à écouter des podcasts, j'ai entendu des choses de femmes. Mais il n'y a que les femmes qui parlent. Et en fait, je ne sais pas ce qui se jouait chez la partie féminine. Je ne savais pas que d'être pluggé avec un capteur, une pompe, ça pouvait un petit peu entraver le côté féminin. Ça, je ne m'en étais jamais rendu compte. Je ne le voyais pas comme ça, en fait. Et le même, je ne le voyais pas du tout. Et puis, j'ai commencé un petit peu à creuser, puisqu'en écoutant des podcasts où des femmes parlent, je me suis dit, ah mais ouais, mais elles vivent ça au quotidien, comme la grossesse, c'est un truc de dingue. Et puis aussi, dans mon bouquin, je parle de sexualité, mais pour certains, ça va être très effleuré, et puis pour d'autres, pas, pas assez creusé, mais je n'ai pas voulu mettre des mots et des chiffres que je ne maîtrise pas. Je n'ai pas de relation avec une diabétique féminine qui aurait pu me guider. Donc je me suis un peu orienté sur des choses que j'ai appris, mais j'en suis resté là en surface. J'ai tout de suite pris conscience des réalités féminines qui m'étaient totalement inconnues. Jusqu'à très peu de temps. Et puis surtout, au travers de ce bouquin, j'ai aussi voulu dire, moi je vis ça, j'en ai marre, je le dis, mais je n'ai pas envie que ça soit trop pathos, ni tire larme en fait. Ça, ça a été une réflexion qui m'a beaucoup hanté. Je me suis dit, il ne faut pas que ce récit soit dans la plainte. Parce qu'effectivement, il y a des choses qui m'ont un peu bousculé, étant plus jeune, qui m'ont beaucoup atteint. Il y a tout un côté qui est quand même assez rigolo. J'ai vécu des trucs assez drôles, donc il faut aussi en parler. Il faut avoir une balance assez équilibrée pour passer justement d'un sujet peut-être un petit peu dramatique, un petit peu touchant, à un sujet derrière qui va te contrebalancer avec une anecdote un petit peu débile sur ce qui a pu se passer avec ton diabète ou non.

  • Nathalie

    Et tu t'adresses à qui ?

  • William

    En fait, je m'adresse autant aux diabétiques qu'à leur entourage, qu'à un public plus large, et puis même à des professionnels de santé. En toute modestie, vraiment, attention, je pèse mes mots encore une fois. C'est quand même pour moi très bizarre d'avoir sorti un bouquin. Je le dis, il y a le syndrome de l'imposteur des fois, et tu te tais parce que je t'ai assez entendu comme ça. Tais-toi, tu te ranges dans le placard et tout. En fait, je me suis dit que peut-être que les professionnels de santé, ils avaient peut-être une curiosité de voir ce type de récits vus de l'intérieur. Puisque des récits de diabétiques de type 1, je ne pense pas qu'on en ait énormément. On a des bouquins, des fois peut-être on a des grands sportifs diabétiques, mais là, est-ce qu'on peut se calquer par rapport à leur vécu ? Alors c'est très admirable, attention, mais des fois on peut lire des choses où on est dans la performance physique et dans la performance glycémique. Moi je ne m'y reconnais pas forcément. Moi je me suis dit, je vais parler de moi et de mon vécu pour un mec lambda qui vit son diabète au quotidien. Mais très vite. Je me suis dit, mais attends, ton égo trip là, tout le monde s'en fout. Ta vie, mais tout le monde s'en fout en fait. Ton petit côté narcissique avec ton diabète, on s'en fout en fait. Puis voilà, du coup, je parlais tout à l'heure du syndrome de l'imposteur. Donc lui, il a fallu vraiment le taire, un peu le mettre de côté. Et puis me dire, bon, je vais sortir ce bouquin. Ça me fait un petit peu flipper. Je l'ai accouché au mois de février. Et puis maintenant, il fait sa vie. Et il ne m'appartient plus. Maintenant, il est disponible. On peut le lire. Il n'y a pas de soucis là-dessus. Donc, c'est très cool. Comment dire ? Pour le moment, ce qui est la mission, on va dire, est pas mal accompli. Puisque j'ai eu des retours assez positifs de personnes diabétiques ou non qui m'ont dit que c'était... assez sympas à lire et qui se sont reconnus. J'ai eu une partie de ma mission qui est quasiment accomplie, à tant de pourcents, je ne sais pas, mais le pari est gagné au moins de ce côté-là, parce que j'avais très peur des réactions. Je parle de 1986 jusqu'à ici, peut-être que des jeunes diabétiques qui ont une vingtaine d'années il s'en fout de mon récit, parce que ça parle de l'ère jurassique, ça ne leur convient pas. Des références musicales qui ne parlent peut-être pas forcément à tout le monde. Il y a des choses que je mentionne qui ne sont peut-être pas forcément intéressantes pour tout le monde. Mais au moins, avec ce petit bouquin, avec cette petite modestie, je me dis que j'apporte un peu d'une pierre à l'édifice. Dans ce côté maladie chronique, est ce qu'il y a des bouquins qui existent, oui, il y en a, et il y a le mien.

  • Nathalie

    Pour un diabétique, il va se reconnaître, ça c'est sûr. Pour un jeune diabétique, il va apprendre que c'était galère avant et que maintenant c'est mieux. Et que peut-être, quelque part, ça va lui faire du bien. Après, pour les gens qui ne connaissent pas la maladie, là on comprend bien ce que vit un diabétique et les galères, les moments... heureux, que tu as pu vivre des grands voyages, tout ce que tu as fait, qu'on peut faire beaucoup de choses avec le diabète. Et franchement, pour les diabétiques, comme je te l'ai dit, moi, ça m'a fait réfléchir. Il y a des passages qui m'ont fait réfléchir sur comment j'appréhendais mon propre diabète. Et voilà, moi, ça m'a fait du bien. Et puis en plus, c'est une lecture masculine. Et ça, c'est très important parce que des bouquins, il y en a, c'est que des féminines, c'est que des auteurs féminins donc des autrices du coup donc voilà je pense que ce bouquin fait du bien franchement il n'y a pas besoin d'avoir le syndrome de l'imposteur, maintenant il est fait donc tu peux plus c'est fait, c'est fait donc il est là et franchement j'espère j'espère qu'il va être lu.

  • William

    En fait les premières lectures ça a été mon entourage proche, bien entendu. Alors, tout de suite, déjà, mes parents, ça a été un petit un petit peu un coup, parce qu'ils se sont rendus compte de ma réalité. Ils ne se sentaient pas forcément rendus compte de tout ce qui se jouait, tout ce qui s'opérait en moi depuis ... ans. Donc, ça a mis la lumière, justement, sur mon vécu, sur ma pathologie. Je parle d'eux et ça les a grandement bousculés. Pas en mal, mais du coup, il y a un côté, ça a ouvert les vannes de la parole. Dans un contexte familial où la parole n'a jamais été primordiale, du coup, même avec mon frangin, que j'adore, on est beaucoup plus, je pense qu'on est un peu plus communicants. Et puis, ce qui m'a étonné aussi, ça a été mon entourage. Parce que j'ai été étonné de leur étonnement. En fait, les premiers retours, ils m'ont dit, c'était, mais on ne pensait pas en fait que c'était comme ça. Parce qu'à te voir, on ne se doute absolument pas de ce que tu vis. Parce que pour eux, c'est, on se contrôle le bout du doigt, on fait une analyse sanguine, on se fait peut-être une piqûre, puis voilà. Puis après, le reste de la journée, la nuit, tout va bien. Non, non. Ils se sont rendus compte que c'est H24. Et qu'il y avait... tout un univers autour de l'alimentation, autour des appareils dispositifs médicaux, qu'il fallait faire des examens, qu'on avait des choses à faire ou ne pas faire dans certains boulots, etc. Et que tout d'un coup, ça a mis un coup de projecteur sur le diabète, qui, eux, le voyaient juste à travers moi, mais par un tout petit prisme, par une toute petite meurtrière, tu vois. Et du coup, au lieu de m'expliquer en soirée avec des mots que je ne maîtrise pas forcément, ce livre apporte beaucoup plus de clarté à la maladie, au diabète, à mon diabète entre guillemets, pour des gens qui sont dans mon entourage proche, moins proche et un peu plus éloigné. Je me suis quand même un peu remis en question. Je me suis dit, mais... c'est de ma faute si on ne prend pas trop en considération ma pathologie, mon handicap c'est de ma faute parce que moi j'en parle de manière détachée, de manière très simple, du coup en face, qu'est-ce qu'ils se disent ? ça va, ils le gèrent bien en fait, donc ça va, tout va bien mais quand il se passe des trucs un petit peu difficiles, comme des grosses hypos où je suis complètement à ramasser la petite cuillère par terre tout le monde se dit, mais qu'est-ce qu'il a en fait ? qu'est-ce qu'il se passe ? À force de traiter mon diabète comme un rhume au travers de mes amis, ça n'a jamais été pris à sa juste valeur. Et puis eux, de leur côté, il y a une forme de pudeur. Ils se disent comment lui, il le vit. Si on lui pose des questions, comment il va réagir ? Comment il va nous parler ? Est-ce que ça l'embête si on pose des questions ? Est-ce qu'on peut lui poser des questions ? Parce que moi, j'ai eu des retours comme ça, en fait, de potes très proches qui m'ont dit qu'en fait, on n'osait pas t'en parler, qu'on n'avait pas ce que tu vivais.

  • Nathalie

    Tu vas nous dire, où peut-on se procurer ton livre et comment suivre ton actualité ?

  • William

    Alors, pour se procurer mon superbe livre... de 161 pages à la superbe couverture digne d'un polar de ce nom. Alors il faut se rendre sur Amazon malheureusement pour certaines personnes le diable en personne Amazon ! En fait je me suis adressé à Amazon pour la simple, c'est pour une question de praticité parce que c'est beaucoup plus simple pour moi parce que je suis en auto-édition, je suis pas du tout chez un éditeur, il y aura beaucoup à dire là-dessus mais bon ça c'est encore une autre paire de manche, je me suis dit Amazon avec tous leurs défauts qu'ils ont, il y a quand même l'avantage d'être en auto-édition et de réaliser un bouquin quand même assez facilement. Donc, il est disponible sur Amazon au doux nom de mon colocataire indésirable avec un nom d'auteur de William Belle. Donc, vous pouvez suivre plus d'actualités sur ma page Instagram, c'est mon coloc indésirable, où il y a pas mal de vidéos qui concernent l'évolution et l'écriture de ce livre. Voilà, jusqu'à sa finalité, jusqu'à sa présentation, la sortie. Le lien est bien sûr en description dans ma bio. J'ai aussi une page Facebook et TikTok, mais je suis moins présent sur ces deux plateformes.

  • Nathalie

    As-tu des projets liés au diabète ou à l'écriture en préparation ?

  • William

    Alors non, pas du tout. En fait, je pense que, pour la petite histoire, ce bouquin, je l'ai écrit d'une manière frénétique. En fait, ça a été une frénésie, ça a été une impulsion, parce que je l'ai écrit en très peu de temps. Je pense que c'était surtout pour faire un gros nettoyage de printemps et pour me vider la tête, ça a été thérapeutique. Et je pense que ça a été très libérateur. Mais après, refaire un bouquin, je ne pense pas, ce n'est pas mon domaine, ce n'est pas mon secteur. Je trouve que mon style d'écriture, il est ce qu'il est, ce n'est pas dingo, on est loin du Victor Hugo. Mais ce n'est pas le but, mon style d'écriture, il est brut et il est sincère et authentique, il me ressemble en fait. Et donc non, je n'ai pas forcément de projet lié avec le diabète, mis à part faire des imbécilités sur Instagram avec des vidéos un peu débiles, mais écrire un nouveau truc, non. Par contre, j'ai un truc qui me trotte dans la tête depuis quelques jours, mais je ne sais pas du tout ce que je peux en faire. Moi, j'habite au pied des Alpes et j'aimerais bien faire une journée soit rando, soit pique-nique pour aller sur un point de vue du Vercors, de la Chartreuse ou de Belledonne. D'être entre diabétiques et accompagnants. Pourquoi pas, je ne sais pas, se taper un bivouac, pourquoi pas. Ou une seule journée d'avoir l'occasion de parler de diabète mais pas que. D'échanger et de passer surtout un bon moment. C'est surtout ça le but. Peut-être mettre ça en place mais je ne sais pas quand, comment ? Là, je suis vraiment dans une idée très vague de la chose. Moi, je connais beaucoup le Vercors. C'est une montagne très proche de moi, c'est de la moyenne montagne. La Chartreuse aussi, c'est super intéressant, c'est assez joli. Belledonne également. Mais si, par exemple, il y a quelque chose qui s'opère pour faire une randonnée entre diabétiques et accompagnants, le choix de la rando, il s'offre à nous. Il y a énormément de coins, on n'est pas en manque du coup. On n'est pas en manque pour des gens qui n'ont peut-être pas forcément l'habitude de marcher, autant pour des gens qui sont très férus de rando. On peut faire quelque chose, un mix entre les deux. Et puis, le but, c'est de prendre du plaisir. Un peu pour clôturer notre entretien, et je t'en remercie, je dirais simplement, ne faites pas comme moi, n'attendez pas 30 ans pour vous ouvrir. Je sais que c'est parfois... Moi, j'ai eu beaucoup de mal à m'ouvrir à tout ce monde-là. Et puis, quelque part, je ne veux pas que mon quotidien soit trop là-dessus, parce que ça peut vite devenir anxiogène. Partagez, explorez, vivez, ouvrez-vous à ce qu'il y a en dehors de chez vous. Je suis bien gentil à dire des conseils comme ça. Moi, des fois, je ne le fais pas. Mais voilà je fais au mieux avec mes petits démons intérieurs que j'arrive à mieux maîtriser qu'avant même si j'ai quand même pas mal de chemin à faire, certes le diabète c'est un boulet mais il ne nous enchaîne pas il ne nous définit pas il y a beaucoup de choses qu'on peut faire donc là dessus je pense qu'il ne faut pas attendre, oui on le fera demain il faut le faire de suite. Moi, j'ai un petit peu du mal avec tout. Je ne veux pas avoir le discours du jeune entrepreneur Instagram, mais n'attendez pas le dernier moment pour vous ouvrir. Je pense qu'en plus, actuellement, il y a entre des ressources pour communiquer entre des podcasts Instagram, TikTok, Facebook ou YouTube. Il y a beaucoup de ressources et puis il y a quand même des acteurs aussi français qui sont présents et qui se bougent beaucoup et qui peuvent donner justement réponse à pas mal de questions. Quand on est un peu la tête sous l'eau, la tête dans le sable, en train de se dire « personne ne me comprend, je suis seul, je suis seul avec cette pathologie, même mes proches ne me comprennent pas, mon diabéto ne me comprend pas » , eh bien, viens, on en parle.

  • Nathalie

    Merci beaucoup William pour cet échange riche et inspirant. Ton livre, Mon colocataire indésirable, offre une belle métaphore de la vie avec le diabète et je suis sûre qu'il parlera à de nombreuses personnes concernées, mais pas seulement. Si vous souhaitez en savoir plus sur William et son ouvrage, je vous invite à le suivre sur son Instagram et à vous procurer son livre. Vous trouverez toutes ses coordonnées dans les notes de l'épisode. Au revoir à toutes et à tous et prenez bien soin de vous !

  • William

    Eh bien, à la prochaine ! Merci beaucoup !

  • Nathalie

    Je te remercie pour ton écoute. Si cet épisode t'a plu, que tu souhaites soutenir le podcast, je t'invite à le partager autour de toi, à t'abonner pour être averti du prochain épisode, à laisser 5 étoiles et un avis sur ta plateforme d'écoute. Tu as la possibilité aussi de me contacter, soit sur mon compte Instagram, soit par e-mail que tu trouveras dans les notes du podcast. Je te dis à très vite pour un nouvel épisode de Vivre le diabète à la recherche de l'équilibre. Prends bien soin de toi.

Chapters

  • Présentation

    01:49

  • Diagnostic et annonce de son diabète type 1

    03:13

  • Pourquoi un colocataire indésirable ?

    14:59

  • Évolution de sa relation avec son "colocataire"

    19:25

  • Pourquoi ce livre ?

    39:06

  • A qui s'adresse William ?

    49:41

  • Où se procurer le livre ?

    57:38

  • Les projets

    59:03

  • Conclusion

    01:01:28

Description

🎙️ Dans cet épisode, je reçois William Belle, diabétique de type 1 et auteur du livre “Mon colocataire indésirable”.

Avec beaucoup de sincérité et d’humour, William nous raconte son parcours avec le diabète, les défis du quotidien et ce qui l’a poussé à écrire ce livre original, dans lequel il compare son diabète à un "colocataire" qu’il n’a jamais invité, mais avec lequel il doit vivre.


Ensemble, nous parlons de l’annonce de la maladie, de l'acceptation, des idées reçues sur le diabète, mais aussi de l'importance de sensibiliser et de partager son expérience.


Un témoignage inspirant et plein d’humanité, à écouter sans modération !


📚 Pour suivre William Belle et découvrir son livre : 


🎧 Bonne écoute !

Prenez bien soin de vous !

“Et n’oubliez pas, plus vous apprenez sur votre maladie, mieux vous la gérez !”


Si tu souhaites partager ton expérience, je t’invite à me contacter par email, je serai ravie de partager ton récit dans l'un de mes futurs épisodes.


💬 Vous avez aimé cet épisode ? Partagez-le au moins à une personne, laissez 5⭐ et un avis sur votre plateforme d’écoute préférée !

Cela aide Vivre le diabète à grandir et à toucher plus de monde. 

Merci pour votre soutien ! 🙏


Vous pouvez soutenir financièrement mon travail grâce à la plateforme Tipee ICI https://fr.tipeee.com/vivre-le-diabete

Ou bien vous pouvez toujours être un relais en partageant mes contenus !  

Je vous remercie sincèrement !


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🔵 Me contacter par email : nathalie.vivrelediabete@gmail.com

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🔵 Site internet : www.vivrelediabete.fr

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Crédit musique : Xavier Renucci 



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Nathalie

    Bienvenue dans Vivre le diabète à la recherche de l'équilibre, le podcast qui vous accompagne avec des conseils, des témoignages et des rencontres inspirantes autour du diabète. Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir William Belle, auteur du livre Mon colocataire indésirable. William est diabétique de type 1 et à travers son ouvrage, il partage son quotidien avec cette maladie qu'il décrit comme un colocataire qu'on n'a pas choisi. Mais avec lequel il faut apprendre à cohabiter. Nous allons parler avec lui de son parcours, de ce qui l'a poussé à écrire ce livre, des défis qu'il rencontre au quotidien et du message qu'il souhaite transmettre aux personnes vivant avec le diabète. Je suis Nathalie, diabétique de type 1 depuis février 2010. Je m'adresse à toi qui viens de déclarer un diabète, à toi qui es diabétique de type 1 ou de type 2, ou à toi qui es en pré-diabète, mais aussi à toi qui soutiens et aides que tu sois parents ou conjoints, etc. Je m'adresse également à toute personne désireuse de savoir ce qu'est le diabète vu par une patiente diabétique. Désormais, tu peux soutenir financièrement mon travail grâce à la plateforme Tipeee dont tu trouveras le lien dans les notes de l'épisode. Ou bien, tu peux toujours être un relais en partageant mes contenus. Je te remercie sincèrement. Et avant de commencer, si cet épisode vous plaît, pensez à le partager au moins à une personne. A laisser 5 étoiles et un avis sur votre plateforme d'écoute préférée. Ça m'aide énormément à faire grandir ce podcast et à toucher encore plus de monde. Bonne écoute et n'oubliez pas, plus vous apprenez sur votre maladie, mieux vous la gérez. Je vous laisse maintenant avec l'épisode du jour. Bonjour William !

  • William

    Hello Nathalie, comment ça va ?

  • Nathalie

    Ça va, ça va, j'espère que toi aussi.

  • William

    Ça va très bien, merci de m'accueillir dans ton podcast que j'écoute régulièrement. Il y a une très bonne démarche et c'est un très beau travail, bravo.

  • Nathalie

    Merci, ça me touche. William, peux-tu te présenter ?

  • William

    Ok, William, de mon prénom, je ne dirais pas mon nom de famille parce que vous n'avez qu'à acheter le livre. Alors moi, je réside dans le sud-est de la France, plus exactement en Isère au pied des montagnes. Je suis entre la Chartreuse et le Vercors et juste à côté des Alpes. Je n'ai pas le pied marin, j'ai plutôt le pied montagnard. Je suis diabétique. Étonnant, n'est-ce pas ? Très étonnant. Je suis diabétique depuis très longtemps. Je ne vais pas dire aussi le temps de ma pathologie. Il faudra faire un petit calcul. J'ai été diagnostiqué en 86 et j'avais 13 ans. Je vous laisse faire le calcul. Ça veut dire que je suis vieux, pour certains. Et je suis photographe vidéaste à mes heures perdues. Enfin, professionnellement, mais en ce moment, c'est très calme. J'en profite de ce temps alloué pour discuter un petit peu avec toi.

  • Nathalie

    Génial. Peux-tu nous raconter ton diagnostic et comment as-tu vécu l'annonce du diabète de type 1 ? Très important.

  • William

    Alors... Si tu veux bien, déjà, on va prendre une petite machine à voyager dans le temps. On va aller direction l'ère du diabète version jurassique, donc direction 1986, où les coupes mulet étaient beaucoup plus tendances socialement parlant qu'aujourd'hui. Et surtout qu'à l'époque, on pensait que le diabète, c'était juste pour les grands-mères qui avaient un petit peu abusé du coca. Moi, ma colocation avec ce fameux colocataire un petit peu indésirable, c'est fait à l'âge de 13 ans, donc en 86. Moi, j'étais un ado assez introverti. Je suis fils d'agriculteur. On vivait dans une ferme assez éloignée. Un environnement familial sympa, mais avec très peu de dialogue par contre. On ne communique pas, on ne parle pas. On est dans une génération où c'est des taiseux. Mes parents ont aussi bien entendu leur vécu et leur casserole, mais les conversations un petit peu importantes n'ont pas lieu. Donc on ne discute pas, on se tait et on subit un petit peu. Et quand tu es dans ce contexte-là, quand une maladie chronique te tombe dessus, la maladie vient encore plus clouer le cercueil du dialogue familial. Je pense que comme tout diabétique, je me suis un peu transformé en véritable fontaine ambulante. Je buvais, j'urinais, je buvais, j'urinais. Par contre, ma mère, avec son œil de lynx, a très vite décelé, qu'il y avait un truc qui n'allait pas. Donc moi, j'ai été diagnostiqué relativement tôt. Je n'ai pas fait d'acidocétose. Je suis passé par la case de prise de sang, généraliste, direction hôpital. Je ne vais rien te cacher, pour moi, ça a été un traumatisme. Aller à l'hôpital parce que je ne me sentais pas malade. Je buvais énormément, mais je ne comprenais pas pourquoi. Et quand je suis parti à l'hôpital, j'étais terrifié. Je me suis dit, c'est bon, c'est la fin, j'étais en larmes, je ne comprenais pas ce qui se passait. Ma mère ne me disait rien. Elle m'a dit, on va à l'hôpital. Elle était, bien entendu, encore plus embêtée que moi, je pense. Et quand on est arrivé à l'hôpital, comment te dire que la prise en charge était complètement catastrophique. Il n'y avait pas du tout de prise en charge de toute façon. Le maître mot qui a été vraiment, moi, qui me reste en mémoire, quand je suis resté à l'hôpital, c'est le silence et l'incompréhension. Je n'ai pas été informé de suite de ce que j'avais. Je coupe un petit peu, j'avance dans le temps. Quand je suis retourné à l'école, au collège, je ne savais toujours pas ce que j'avais. Je savais que j'étais diabétique et c'est tout. Par contre, je n'ai pas été informé de quoi que ce soit. Je n'ai pas eu souvenir d'avoir eu des cours ni une sensibilisation. On a été très vite perdus à l'hôpital devant un jargon médical qui était incompréhensible autant pour moi que pour ma mère. Puis pour mes parents, je pense aussi, ça a été très culpabilisant aussi parce qu'ils se sont dit c'est de notre faute. Je pense que moi, je ne suis pas parent, je n'imagine pas le truc, mais ça doit être un peu l'idée qu'on doit se faire de la chose. Et puis, le jargon médical, comme je te disais, c'est qu'on te parle d'insuline, de dextro, d'analyse d'urine, d'aliments interdits, de régime alimentaire. Tu te dis, mais qu'est-ce qui se passe, quoi ? Et puis, à un moment, on nous a dit, voilà, tu es diabétique. Mais diabétique, ça veut dire quoi ? Voilà, moi, je ne sais pas. Ma mère non plus. Les médecins, ils nous expliquent des trucs. Je ne sais pas, il n'y a aucune documentation, il n'y a pas une BD pour adultes, pas pour ados, pardon, il n'y a pas une brochure, il n'y a rien du tout. Moi, j'ai 13 ans, je suis encore admis au centre pédiatrique. Je ne suis pas chez les adultes, je suis encore chez les enfants, donc je suis le plus grand des enfants. Mais même là, mystère absolu, je reste pendant on va dire un peu plus de 15 jours à l'hôpital, et c'est un balai d'infirmières, d'interne, de, de gens qui passent me voir, qui me font des injections. Et pourquoi ? On ne sait pas. On ne sait pas ce qu'il se passe. Et de voir ma mère préoccupée, de toute façon, je savais très bien qu'il se jouait un truc. Je savais très bien qu'il se passait quelque chose de pas normal. Puis surtout, le diabète, pour nous, il n'y a pas d'antécédent. C'était inconnu au bataillon. On n'avait jamais entendu parler de ça. Et on ne connaissait personne qui avait ce type de maladie chronique. Et puis, il y a eu un espèce de chantage. Je le prends comme un chantage, mais si je voulais sortir de l'hôpital, il fallait que je m'apprenne à faire mes piqûres. Alors, je remets encore du contexte, parce qu'à l'époque, il n'y avait pas de stylo. J'avais deux insulines, une rapide, une lente et une seringue. Donc le matin, il fallait se faire un mélange dans la seringue d'insuline rapide que tu complètes avec de la lente. Ce qui veut dire que l'insuline rapide va jouer entre le début de ton injection jusqu'à midi, l'insuline lente, elle reprend le boulot de midi jusqu'au soir. Et le soir, même opération, tu te fais une injection avec une seringue de ce même type d'insuline. Insuline de porc à l'époque. J'ai l'impression d'être un vieux croulant du diabète. Mais à l'époque, c'était comme ça. Donc, ma mère a revêtu une espèce de blouse d'infirmière parce qu'elle aussi, elle a appris à faire des injections. Moi aussi, j'ai appris à les faire. Mais dans quelle temporalité, on ne savait pas. C'est-à-dire que, OK, je me fais des injections. Bon, OK, d'accord. Mais pourquoi, comment, jusqu'à combien de temps ? Demain, après-demain, dans un mois, qu'est-ce qui se passe ? Ah bah non, c'est pour toute la vie. Ah bon ? Ah d'accord. Si tu ne les fais pas, tu seras aveugle. On va t'imputer, puis tu vas mourir. Donc là, le choc, épée de Damoclès sur la tête. Et là, je me dis, ok, d'accord, je vais apprendre à faire mes injections. Voilà, s'en est suivi justement tout un processus comme ça. Et puis, restriction de sucre, régime alimentaire, qui a suivi, parce qu'à l'époque, c'était comme ça. Et puis, en fait, c'était restrictions et frustrations. De toute façon, au bout d'un moment, quand on est retourné à la vie civile, pour parler sortir de l'hôpital, moi, je suis revenu au collège, je ne sais plus dans quelle classe j'étais, mais je ne savais pas ce qu'ils jouaient en moi. Je ne savais pas. Comment réagir avec une hyper ? Je ne sais pas. Comment réagir avec une hypo ? Je ne sais pas. personne n'était au courant. Un seul prof était au courant, le prof principal. Je n'avais aucun passe-droit pour quoi que ce soit. Il n'y avait pas d'infirmerie à mon collège. Il n'y avait rien. Je ne me contrôlais pas pendant la journée. Il n'y avait rien du tout. C'était comme ça. Puis des fois en plus, quand je suis revenu au collège, je n'étais pas là pendant bien 15 jours. Il y a un prof qui s'est cru très sympa de me rentrer dedans parce que je n'avais pas fait le devoir, que je n'étais pas là pendant 15 jours. Donc ça aussi ça a mis un coup un petit peu au moral donc tu reviens, t'es malade tu sais pas trop pourquoi, tu connais pas les termes et puis en plus on vient te dire pourquoi t'étais pas là, ta maladie chronique, toi t'es bien gentil mais c'est les devoirs qui priment donc mon colocataire lui s'est bien installé tout doucement tranquillement et puis voilà dans une incompréhension totale dans un flou artistique bien de l'époque. Je fais un vite parallèle avec le monde hospitalier, c'est-à-dire que je ne vais pas leur jeter la pierre, mais pendant très longtemps, j'ai eu beaucoup de haine envers le système hospitalier, et surtout envers les diabétologues. C'est un corps de métier, mais ils ne sont pas bien ces gens-là. On a fréquenté trois diabétologues en sortant de l'hôpital. C'était un jugement sans appel à chaque fois qu'on allait les voir. C'était un peloton d'exécution, on se faisait tirer dessus à balles réelles, on se faisait engueuler, on se faisait infantiliser, c'était très culpabilisant, parce qu'on ne comprenait pas les termes. Qu'est-ce que c'est une hyper ? Je ne sais pas. Tu sais ce que c'est qu'un hypermarché ? Tu sais ce que c'est qu'une hyper ? Voilà, une hypo ? Je ne sais pas. On s'en est suivi des relations avec les diabétologues de l'époque, très compliquées, jusqu'à un moment où j'ai dit à ma mère, on arrête tout. On n'est pas là pour se faire engueuler. La maladie chronique te tombe dessus du jour au lendemain. On n'a pas fait médecine en diabétologie. Nous, on doit apprendre. Si les gens en face, ils n'ont pas un minimum d'empathie et un minimum de compréhension pour nous expliquer ce qui se passe, tu te retires de ces professionnels de la santé. Je n'ai plus vu de diabétologue pendant des années. Je suis allé voir mon médecin traitement, mon médecin de famille. À l'époque, il y avait des médecins de famille. Donc, on est allé les voir. Bon, elle n'était pas spécialisée dans le diabète, mais au moins, elle était à l'écoute. Ce qui a quand même beaucoup plus détendu la pathologie. Et puis, ma mère, dans ses recherches, elle a quand même trouvé un cousin lointain qui était lui aussi porteur du diabète de type 1 et qui lui a justement enseigné des choses, et qui lui a dit, ben voilà, ça se passe comme ça, l'alimentation c'est comme ça, mais lui, étant plus vieux, il avait d'autres types de protocoles. Du coup, il y a eu beaucoup plus de compréhension, et beaucoup plus de facilité à gérer la maladie au quotidien. Tout en fait, c'est bon, évidemment, moi quand je raconte ça, certains diabétologues sont là ouais, ouais, avant, avant, ouais, ouais, ok y'a pas de problème, mais moi je suis parti avec une grosse épine dans le pied en fait je me suis senti coupable d'être diabétique voilà et puis la peur de la mort, le côté, le côté, il va falloir se faire des piqûres toute la vie. Une charge, tout d'un coup, moi j'ai 13 ans, et puis tout d'un coup, dans la tête, t'évolues, et tu parais beaucoup plus vieux, entre guillemets, que tes autres camarades. Et ça, en fait, je ne l'avais jamais remarqué, mais effectivement, j'avais plus de maturité que certains de mes copains. Être attentif à ses sensations, s'écouter, ça, je ne le savais pas, mais ça faisait partie aussi de ce diabète qui est venu me rentrer dedans à l'adolescence.

  • Nathalie

    Et du coup, pourquoi avoir choisi de comparer ton diabète à un colocataire indésirable ? Comment c'est venu ça ?

  • William

    C'est venu plus en écrivant mon bouquin. En fait, je cherchais un dénominateur pour justement donner une image qui soit parlant un peu pour tout le monde. Parce qu'au début, ce n'était pas du tout mon colocataire indésirable. J'avais choisi un titre un peu plus mélodramatique, l'intrus à vie. Je ne sais plus ce que c'était. J'avais fait toute une liste de titres potentiels à mon livre. Et puis, à un moment, je me suis dit, attends, en fait, cette maladie chronique, elle a débarqué du jour au lendemain, elle a commencé à mettre des miettes de chips de partout chez moi, elle met ses pieds sur la table, elle renverse sa bière en plus elle m'attrape par le cou, elle me dit hé mec, je vais être là pour toi et puis en plus, j'ai signé un bail à vie, ça c'est cool et j'ai même mis mon nom sur la boîte aux lettres, donc ça serait impossible de te débarrasser de moi et en fait, en principe quand tu fais de la colocation, c'est pour partager des bons moments. Et là, ce n'est pas le cas. Donc là, l'autre loup, il est là. Et il va falloir faire avec. Donc du coup, je me suis dit, le colocataire indésirable que je pense que ça peut parler, même si, bien entendu, les colocations peuvent très bien se passer par moments. Mais je pense que le titre, il est adéquat.

  • Nathalie

    Et du coup, en fait, c'est venu... Parce que tu voulais écrire un livre.

  • William

    Tout à fait.

  • Nathalie

    D'accord, ce n'est pas quelque chose que tu avais déjà réfléchi. D'accord, ça, je ne savais pas, tu vois.

  • William

    Je n'avais pas réfléchi à ça avant. Je disais à mon entourage, je suis diabétique. Des fois, je précisais pour les plus intéressés, de type 1. Vraiment, c'était plus vraiment pour le côté imagerie de mon livre. Je ne l'avais pas forcément en tête depuis très longtemps. Par contre, la pochette, oui. Justement, la pochette de mon bouquin, ça, je l'avais depuis longtemps. Parce que je me disais, c'est vraiment une imagerie que j'avais en tête, que j'imaginais. Quand il a fallu la faire, je me suis dit, je vais appeler un copain, on va faire comme si on a fait un shooting un après-midi avec Hugo, que je salue d'ailleurs. Et du coup, on a fait cette espèce d'aspect fantomatique qui est derrière moi, qui m'empoigne et qui me bouche la vue. Ensuite, c'est peut-être un petit peu une imagerie artistique, peut-être un petit peu rebutante et un petit peu violente pour certains. Mais pour moi, c'est une manière d'interpeller. Je n'avais pas envie de tomber sur un dessin avec une bouteille d'insuline, une seringue, avec ma tête en train de dire « Oh là là ! » « Ah ben dis donc ! » En fait, je n'avais pas envie de ça. Je pense que ça aurait été trop téléphoné. J'avais plusieurs idées, mais cette idée vraiment très artistique et graphique, je l'avais beaucoup en tête. Et d'ailleurs, quand tu regardes la quatrième de couve, pour explication, en fait, là... Est-ce que c'est le diabète ou c'est moi qui regarde vers la lumière ? J'ai eu deux, trois petits commentaires à la sortie du livre à propos de la pochette, parce que c'était un petit peu différent. On m'a dit que ça ne donne pas trop envie. C'est vrai qu'au niveau marketing, ce n'est pas ce qu'il faudrait faire. Mais tant pis, il faut passer au-delà de l'image un petit peu forte et un petit rentre dedans. Parce que mon récit, en fait, dedans, je pense que j'y mêle aussi quand même pas mal d'humour, pas mal de choses décalées, du voyage. Je ne parle pas que du diabète, du coup.

  • Nathalie

    Mais quand on regarde le livre, par exemple, on est dans une librairie, on regarde le livre, on ne sait pas que ça parle du diabète.

  • William

    Oui, tout à fait.

  • Nathalie

    Donc, je veux dire, à la limite, ça peut être un polar, ça peut être...

  • William

    Oui, tout à fait. Ça fait plutôt polar, série noire, que finalement vie au travers du diabète de type 1.

  • Nathalie

    Et du coup, est-ce que tu as évolué ? Comment tu as évolué avec ta relation et ce colocataire au fil des années ? Comment ça va maintenant ?

  • William

    Alors maintenant, au fil des années, ma relation était plutôt graduelle parce qu'on va dire qu'aux alentours de mes 13 ans jusqu'à mes 25 ans, ça va. Je fais avec. J'assume la pathologie, je fais mes injections. Il y a un régime alimentaire qui est là, mais il y a une forte envie de vivre. L'intérêt, c'est d'être un peu plus fort. Puis, je reviens aussi sur le contexte familial. On n'en parle pas. Je gère mon truc tout seul. Je me répète un petit peu, mais le terme solitude est beaucoup présent dans moi, ce que j'ai vécu. Même si j'ai été très bien entouré, ce n'est pas du tout ce que je veux faire transmettre à mes proches. Mais étant porteur de diabète de type 1, on est très vite seul. Et je trouve que c'est... très compliqué d'expliquer ça à ses copains du même âge ou d'expliquer ça en soirée. S'il y a de l'alcool, ce n'est pas le bon moment. Il faut connaître les termes techniques, il faut que les gens s'intéressent. Tout le monde n'a pas forcément les oreilles pour expliquer, pour entendre plutot, pour entendre ce que tu vis au quotidien. Et puis certains, ils ont peur. Parce que si bien tu leur en parles, ils vont dire, moi aussi j'ai bu beaucoup d'eau, peut-être que je suis diabétique. Et puis, il y a aussi, je pense, quelque part, des réflexions qui sont un petit peu désobligeantes. Des fois, tu te livres et tu te dis, oui, c'est diabétique, machin, puis on se moque de toi. Et puis, on te dit, ah, mais William, ah ouais, le diabétique, là. Mais je n'avais pas forcément envie d'avoir une étiquette. Et puis, à cet âge-là, pendant des années, vu que je n'avais aucun dispositif visible comme aujourd'hui, parce qu'aujourd'hui, on a des pompes, on a des... On a des capteurs glycémiques, ça se voit. Mais à l'époque, il n'y avait pas ce genre de système. Donc, ça ne se voyait pas. Donc, le handicap invisible, il est très facile à cacher. Et tu es comme tout le monde. Et quand tu es ado, pré-ado, jeune adulte, tu n'as pas envie d'être stigmatisé. Tu as envie d'appartenir à un groupe de copains, de copains-copines. Tu as des amis. Tu n'as pas envie qu'on vienne te parler de ça non plus. Après, on a tous des rapports différents, justement, avec le diabète. Moi, je n'avais pas envie de le laisser de côté, pas de le mettre sous le tapis, mais il était là, il était très présent, ce colocataire, je savais qu'il était là, mais je n'avais pas envie qu'il me définisse. Je n'avais pas qu'on dise William le diabétique. Oui je comprends. Puis, c'est une relation aussi qui s'est faite en dent de scie. Je n'ai pas fait une crise d'adolescence du diabète entre guillemets, attention, je mesure mes propos, je ne vais jamais arrêter mon traitement. Parce que de toute façon, on m'avait dit, tu vas mourir. Donc forcément, moi, je me suis dit, je n'ai pas spécialement envie de passer de vie à trépas. Donc, on va faire nos injections, le gentil petit soldat. Et puis, voilà, on va essayer d'en profiter pendant qu'on n'est encore pas amputé et pas aveugle. Donc voilà, moi, j'avais toujours ça en tête, qui revenait tout le temps.

  • Nathalie

    Oui, on avait bien stigmatisé les choses.

  • William

    Et merci pour l'anxiété, parce que c'est pareil, la prise en charge, elle était d'une telle manière à l'époque. Mais la prise en charge psychologique, tu peux mettre un zéro pointé dessus. Je pense que j'ai eu plein de traumas entre l'adolescence et ma vie de jeune adulte avant que je me prenne vraiment un petit peu en main psychologiquement. Et encore, je te dis, aujourd'hui, j'ai encore du travail.

  • Nathalie

    Et puis après, à partir de 25 ans, ça a changé ?

  • William

    Oui, alors du coup, en fait, aux alentours de 25-30 ans, Tous ces régimes restrictifs de sans-sucre et tout ça, sur le long terme, ça a commencé un peu à devenir complètement fou parce que j'étais tout le temps dans les restrictions. Et quand il y avait une hypoglycémie, je me jetais sur tout ce qui bougeait. J'étais très frustré au point de vue de l'alimentation. Et dès que j'avais une hypo, je me disais, chouette, je vais dégommer ce paquet de gâteaux, je vais dégommer des glaces, c'était n'importe quoi. À tel point que je n'ai rien vu venir, j'ai commencé à prendre du poids. Et ça a commencé graduellement comme ça, mais je n'ai rien vu venir. J'ai l'impression que je me suis réveillé un matin en me disant « C'est bizarre, j'ai l'impression d'avoir du ventre, j'ai l'impression d'avoir plus de pecto, j'ai l'impression d'avoir plus les cuisses un peu plus de charnus. » Alors attention, j'ai pris du poids, ce n'était pas dans l'excès non plus. Mais un jour, j'ai un ami qui se moque littéralement de moi, qui me dit « Ah bah dis donc ! » Et il me fait une petite réflexion... comme ça, en passant, je me dis que je suis en train de me rendre compte que j'ai des comportements alimentaires complètement anormaux. Et surtout, que je n'arrive pas du tout à maîtriser. Donc, je me jette sur... les hypos, ben j'y vais quoi. Donc, ça te fait des espèces de pics glycémiques de ouf. En plus, à l'époque, il fallait que je fasse mes dextros pour voir où j'en étais. Effectivement, quand j'étais un peu trop haut, je me faisais des piqûres de correction avec de l'insuline rapide, pas de stylo toujours, mes petites seringues. Et quand ça baissait, je mangeais. Donc ça faisait un espèce de système de yo-yo, des fois où je passais des journées à faire un petit peu n'importe quoi. Mais malgré tout ça, ce qui était quand même assez bizarre, c'est que mes résultats étaient très bons.

  • Nathalie

    Oui, trop haut, trop bas.

  • William

    J'avais une hémoglobine glyquée qui était pas mal. Quand je voulais bien faire mes prises de sang, bien entendu, parce que pour moi, c'était terrifiant d'aller voir mon médecin. Et les résultats, ils étaient là. Donc, ils étaient quand même relativement bons.

  • Nathalie

    Oui, à cause de ça, à cause des montagnes russes. Parce qu'en fait, la moyenne entre être trop haut et être trop bas, ça fait une bonne moyenne, en fait.

  • William

    Ce n'était pas du tout bon, ce que je faisais. Après, attention, je mesure un petit peu. C'était sur une période. Ça n'a pas duré des années, mais effectivement, il y a eu un côté, il y a eu un moment où je me suis dit, oula, mais je perds le contrôle, il y a un truc qui ne va pas. Il faut peut-être que je me remette en question. Après, qu'est-ce que j'ai fait ? J'ai fait tout l'inverse. Et du coup, je suis tombé dans la spirale du gentil petit soldat, du militaire, de l'hyper contrôle et de l'employé modèle de la fin du mois. Le côté on pèse. En plus, je n'avais même pas fait d'insulinothérapie fonctionnelle, ça fait encore un mot à dire, horrible. À une certaine époque, aux alentours de 35 ans, on va dire, je comptais mes glucides, mais avec un... au feeling en fait. J'avais fait tout plein de tests. Perso, je me suis dit, tant de grammes de riz égale ça, tant de doses d'insuline. Je fais avec mes légumes, je mange ça le matin et mes injections, elles sont de temps. La journée se passe comme ça. Tout va bien. Le soir, je mange la même chose qu'à midi et le soir, je me fais une injection avec mes seringues de tant et tout va bien.

  • Nathalie

    En fait, tu t'es fait l'insulinothérapie fonctionnelle tout seul.

  • William

    Ouais, mais avec justement un côté extrêmement contrôle. Et il ne fallait surtout pas qu'il y ait un grain de sable qui vienne au milieu de tout ce système-là. Parce que ce côté hyper contrôle t'enlève du milieu social, en fait. Tu ne vas plus au resto avec tes potes, tu ne vas plus boire un coup, tu ne te fais plus plaisir. Et tu vas même au-delà, c'est-à-dire que tu ne te fais même plus plaisir dans la vie en général. Tu veux t'acheter des fringues, tu te dis non. Moi, ça en est rendu jusqu'à là. C'est-à-dire qu'il fallait que je maîtrise tout, tant de grammes de riz à midi, tant de légumes, point, c'est tout. Puis, il n'y a rien d'autre. Ça arrive des fois de faire un petit peu des sorties de route, de se faire un petit peu plaisir, mais avec une culpabilisation derrière. Donc, en fait, quand tu vas à un dîner chez des amis, moi, j'arrivais, j'avais déjà mangé chez moi. J'arrivais chez des amis et je leur disais « Non, non, mais j'ai pas faim. C'est bon, je ne mange pas. » Et donc j'évitais d'être en difficulté socialement parlant, donc d'être entouré qu'avec des gens qui étaient un peu compréhensifs avec ma méthode de vie. À l'époque, j'étais célibataire. Quand je rencontrais des jeunes femmes, et du coup, « Ah bon, on va au resto ? » « Bah non. » « Bah pourquoi ? » « Bah parce que. » Donc tu passes pour un psychopathe, quoi. Tu passes pour un psycho rigide de l'alimentation. En plus de ça, je faisais énormément de sport, du sport à outrance. Je passais des soirées, des week-ends. Ah, mais tu pars déjà ? Ouais, ouais, parce que demain, je vais faire des pompes. Puis demain, je vais faire 15 bornes à pied. Voilà, je vais faire une rando dans la montagne d'à côté. Moi, je pensais que toutes ces choses que je faisais étaient bénéfiques. Ça a été bénéfique parce que oui, j'ai maigri, parce que je me suis musclé. Par contre, ça m'a mis des systèmes de pensée complètement déviants. Déviants, c'est peut-être un mot un petit peu fort. Mais quelque part, je m'en suis rendu compte récemment, peut-être que j'ai fait des TCA sans m'en rendre compte.

  • Nathalie

    Ouais, c'est ce que j'allais te dire.

  • William

    Voilà, ce côté ultra contrôle et attention, gestion des glucides, etc. J'avais des amis qui me disaient, oui, mais c'est très bien ce que tu fais parce que ça te convient et ça te fait du bien. Ben ouais ! Ouais, mais entre guillemets, sur le long terme, tu ne peux pas avoir des courbes plates. Sur le long terme, ce n'est pas possible. C'est même trop bizarre d'avoir ce type de comportement sur le long terme. Mais moi, Dieu sait que ça a duré.

  • Nathalie

    À quel moment tu as fait l'insulinothérapie fonctionnelle avec des professionnels de santé ?

  • William

    En 2019

  • Nathalie

    Tu avais quel âge ?

  • William

    Je ne sais pas. En 2019, c'est-à-dire récemment en fait, au niveau temporalité, j'ai été diagnostiqué 86. Jusqu'en 2019, je n'ai pas changé de protocole. J'ai toujours été mes deux seringues et mes deux insulines. Je n'ai jamais connu les stylos.

  • Nathalie

    Jusqu'en 2019, tu n'avais pas le stylo ?

  • William

    Non.

  • Nathalie

    Oh punaise.

  • William

    Un jour, je vais voir ma diabétologue parce qu'évidemment, il fallait voir peut-être une diabétologue. Je lui dis, mais bon, je suis toujours avec mes seringues et mes deux insulines. Là, je pense que l'évolution de la maladie, il y a eu un truc là. Je voyais bien qu'il y avait des gens qui avaient des stylos.

  • Nathalie

    Et des capteurs. En 2017, le capteur.

  • William

    Voilà. Et ma diabétologue de l'époque, elle me dit, non, t'inquiète pas, on ne change pas une équipe qui gagne. Donc les capteurs, j'en avais entendu parler, mais à l'époque, ils n'étaient pas encore remboursés. Donc je m'étais dit, je vais attendre.

  • Nathalie

    Remboursement, juin 2017.

  • William

    Oui, oui. Eh bien ça, j'ai eu mon premier capteur en 2019. Le Freestyle.

  • Nathalie

    La diabéto, mais je ne le crois pas.

  • William

    Et du coup, je suis passé à la pompe Omnipod, pas l'Omnipod Dash, celle d'avant, en 2019.

  • Nathalie

    Tu as tout fait en 2019. T'es passé des seringues à la pompe.

  • William

    Ouais, j'ai tout pété en 2019.

  • Nathalie

    Tant mieux.

  • William

    Suite à un gros accident, en fait. J'ai fait un burn-out, entre guillemets, à mon travail, qui m'a déclenché une très, très forte hypoglycémie. Et je me suis fracassé la tête par terre. Je suis allé en réanimation. Je me souviens de rien, quasi. Je pense que j'ai mal dû gérer quelque chose le matin. J'étais énormément stressé, j'en pouvais plus. Le corps a dit « Ok, on arrête tout ! » Du coup, j'ai eu en même temps une grosse hypoglycémie qui m'a fait perdre connaissance, qui m'a fait heurter la tête par terre. Je me suis retrouvé en réanimation. Ensuite, je suis allé au... au service diabéto de l'hôpital pendant un bon petit moment. Et là, je n'ai pas eu le choix. On m'a posé le capteur, donc ça, c'était cool. Et puis, on m'a dit, tiens, il y a la pompe là qui peut être pas mal. Moi, je refusais de porter des pompes à tubulure. Le cathéter moi c'est pas du tout mon truc. En plus, je suis maladroit comme ça se peut pas. Moi, tu me fais porter ce truc, on dirait un Marsupilami humain. Comme je suis sûr, je me l'arrache 5-6 fois dans la journée. Ce n'est juste pas possible. Et en fait, on me propose cette petite pompe qui est toute petite, comme une boîte d'allumettes. Je dis, ouais, autant tester. Mais quand tu passes de seringue à ça, il faut tout réapprendre. Et là, c'était la catastrophe la plus complète. Je suis resté à l'hôpital le temps d'apprendre, etc., de faire des choses comme ça. Et puis, je suis reparti chez moi. C'était la cata, quoi. Parce que les protocles de l'hôpital, sont ce qui sont. Tu arrives chez toi, c'est foutu, c'est la catastrophe. J'avais un débit basal très adapté à l'hôpital, mais après, le moindre truc que je faisais, ça me mettait en hypo. Dès que je mangeais un truc, j'étais hyper... Je n'arrivais jamais à trouver l'équilibre. C'était l'enfer sur Terre, pour moi, évidemment. Il a fallu que je réapprenne ce qui m'a coûté moralement, ce qui m'a beaucoup coûté quand même... Après

  • Nathalie

    Et là tu as fait l'insulinothérapie à ce moment-là.

  • William

    Après je me suis remis en question, je me suis dit bon avant de se taper une trop forte dépression, il va falloir que j'apprenne. J'ai demandé, j'ai changé de diabéto, j'avais demandé à ma diabéto et j'aimerais quand même avoir la connaissance de comptage de glucides pour justement me perfectionner là-dedans et pour moins être dans les choux. Parce que c'est juste pas possible, en fait, le moindre truc que je fais, ça part en sucette. Je sors de chez moi, je suis en hypo, à peine je regarde un aliment, bam, ça part pour tous les sens. C'était à s'arracher les cheveux, en plus, j'ai une calvitie, donc ça sert plus à rien. Donc je m'arrachais le peu de cheveux qui me reste. Et du coup, quand je suis arrivé à faire justement le comptage de glucides, sur les deux jours de formation, tout d'un coup, il y a un nouveau monde qui s'est ouvert à moi. Donc ça, ça a été très bénéfique. Puis je le conseille quand même pour avoir un minimum de connaissances, malgré le choix très nul en maths.

  • Nathalie

    Il y a des applications maintenant pour... La pompe, elle fait pratiquement tout, la pompe.

  • William

    Voilà, maintenant, elle fait le produit en croix. Ça va. C'est clair.

  • Nathalie

    Il suffit de lui rentrer les données, c'est tout. Et encore, maintenant que tu es en boucle fermée, tu ne rentres que les glucides. Donc, tu vois, tu es passé du rien à tout. C'est tant mieux. Je suis trop contente pour toi, en tout cas.

  • William

    Je suis passé du jurassique à l'ère moderne. Du coup, là...

  • Nathalie

    Oh punaise ! C'est trop bien ! C'est trop trop bien !

  • William

    Non, puis en fait, je pense que me remettre en question, ça a été... ça fait partie un petit peu, je pense, je pense aussi du processus de la maladie chronique. Puis, c'est peut-être un peu de la personnalité, même si j'ai encore énormément de choses à régler, énormément de choses à voir en introspection psy notamment, sur mes comportements je pense que il faut être un minimum curieux et puis il faut se remettre en question c'est pas forcément que je me suis pas mis en question toutes ces années mais c'est vrai que c'était un protocole qui m'allait tellement bien évidemment je voyais bien qu'il y avait des stylos insuline lente rapide mais je regardais les gens et je me disais mais ils piquent bien souvent ces gens en fait, c'est bizarre, moi je fais juste deux injections. En fait, c'est pas vrai. Je ne faisais pas juste deux injections. Par ce que je me contrôlais énormément. Je faisais mes dextros. Et quand je regardais un peu mon état glycémique, soit je laissais tel quel, soit je me faisais des micro-bolus.

  • Nathalie

    Mais c'est bien et c'est clair qu'il faut apprendre sa maladie pour mieux gérer. Mais c'est vrai que tu es parti de loin. Et du coup, je pense que les gens, malheureusement, qui déclarent maintenant, ils ont quand même beaucoup de choses à leur portée.

  • William

    Heureusement, il y a plus de facilité aujourd'hui. Ça n'empêche pas, effectivement, je pense qu'il y a des nouveaux types de charges mentales parce que moi, il y avait déjà la charge mentale normale d'injection. Mais quand il est arrivé le téléphone, les vibrations, les bips, les alarmes, les codes couleurs, là, ça m'a mis hors de moi. Le téléphone qui me gueule dessus qui me dit : t'es en hypo, t'es en hypo, t'es en hypo, attention, t'es en hypo. Moi, ça m'a rendu complètement fou.

  • Nathalie

    Oui, il y a les travers aussi de la nouvelle technologie, c'est clair. C'est clair.

  • William

    C'est savoir aussi interpréter tout ça. C'est-à-dire que, et ma compagne me le dit très bien, elle me dit : Le téléphone, il ne t'engueule pas. En fait, il te prévient. Moi, je le prends comme une agression.

  • Nathalie

    Oh ça je suis d'accord.

  • William

    Des fois, j'ai envie de le balancer dans la pièce. Non, mais des fois, c'est juste fou. Donc en plus, ces alarmes, elles arrivent au moment le plus opportun. C'est-à-dire que tu es au cinéma, bam, ça gueule. Tu es à l'église pour des obsèques, ça gueule. Merci.

  • Nathalie

    Après, il faut peut-être prévenir, tu vois, les choses. C'est-à-dire, tu vois, être... anticiper. Voilà, je cherchais le mot.

  • William

    Anticipation, là, c'est un mot qui me va bien.

  • Nathalie

    Anticipation, organisation, prévention ...

  • William

    Voila tout le temps, il n'y a pas d'imprévu, il n'y a pas de légèreté. Moi, ce que je trouve regrettable, c'est qu'effectivement, il y a ce côté spontané qui a un peu disparu, en fait.

  • Nathalie

    Il a pris un coup dans l'aile.

  • William

    Oui, et puis la légèreté que j'avais un peu plus jeune, elle est moins... Effectivement, il faut toujours tout prévoir, tout anticiper. Il faut toujours avoir un coup d'avance.

  • Nathalie

    Toujours sa petite sacoche. Moi, c'est ça, ça me tue. Tu ne peux pas sortir de la maison les mains vides.

  • William

    Voilà, c'est ça. Donc, pas de légèreté, quoi. C'est fou, c'est fou.

  • Nathalie

    Non, ça, c'est quand même très handicapant. Qu'est-ce qui t'a poussé à écrire ce livre ?

  • William

    Moi, ce qui m'a poussé à écrire ce livre, justement, c'est ce... C'est quand j'ai eu mon accident, en fait. Plutôt suite à mon accident, pas à partir de mon accident. Mais ça m'a mis, comme je le disais tout à l'heure, j'ai eu des nouveaux appareils, un nouveau protocole, etc. Il a fallu que je m'y fasse quand même pendant un bon petit moment. Il a fallu que je réapprenne tout. En 2023, je me suis pris encore une fois une nouvelle claque. Commence l'année avec... Une nouvelle fois, un séjour à l'hôpital parce que j'ai fait un coma hypoglycémique qui m'a déboîté l'épaule. Je me retrouve à l'hôpital, je suis complètement dans les choux. Je ne sais pas trop ce qui se passe et on me dit bah ouais, t'as fait une réaction à une hypoglycémie, je pense que j'ai dû faire un bolus beaucoup plus conséquent, je me suis endormi par-dessus, ça ne m'a pas réveillé et c'est parti en séance de tremblements, épaule déboîtée, pompier et hôpital. Je me souviens un peu d'avoir commencé l'année comme ça. Et quand je suis revenu chez moi, je pensais que je maîtrisais mon diabète, mais en fait pas du tout. C'est lui qui me contrôle. C'est lui qui prend le pas, c'est lui qui décide. C'est mon colocataire qui a pris beaucoup trop de place et qui fait bien ce qu'il veut chez moi. Et là, moi, je suis dans un coin et je subis. Je subis, je ne sais plus quoi faire. Je ne sais plus quoi faire. Je me dis qu'il faut que... il faut que je me débarrasse de ce truc c'est pas possible, je peux plus vivre avec ça ça prend une telle place dans ma tête dans ma journée que ça en devient complètement anxiogène. Je me dis, je vais peut-être devenir fou, je pense que je vais vriller il faut que ça s'arrête au moins un jour il faut qu'au moins un jour mon colloc il me foute la paix au moins une journée ne serait-ce qu'un temps, je ne me demande que ça c'est pas grand chose, mais non ça ne s'arrête pas. Et du coup, j'ai pris quand même soin de moi par la suite. En 2024, je suis sorti de ma grotte, littéralement. Parce qu'avant, je ne m'intéressais pas aux autres diabétiques. Je n'en connais pas, je n'en connais très peu. J'ai deux copains diabétiques que je ne vois pas énormément. Donc quand on se voit, on ne parle pas de ça. Et quand on en parle, c'est pas le sujet majeur. Et quand je suis sorti de ma grosse boîte, littéralement, j'ai commencé à écouter un podcast. Ah, deux podcasts. Mais j'y suis allé à tâtons, sur la pointe des pieds. Parce que moi, je me suis dit, je ne veux pas entendre des trucs qui vont me détruire le moral. Ce n'est pas le moment. Et puis, je n'ai pas envie d'entendre des trucs, des gens au travers des podcasts qui vont me dire, ouais, mais mec, en fait, tu n'as jamais accepté ta maladie. C'est pour ça qu'en fait, tu es comme ça. Alors, l'acceptation, attention, j'ai un rapport avec ce mot qui est très compliqué. J'ai une acceptation en dent de scie, j'assume parfaitement mon diabète, mes appareils sont visibles et je veux qu'ils soient visibles, on ne me pose jamais de questions là-dessus. Je pense que ce n'est pas que je suis un gars. Il y a très peu de monde qui vient me questionner là-dessus. Quand c'est fait de manière rigolote, ça va, je me fais éducateur, mais quand c'est un petit peu bête, je me mets au niveau de la bêtise. Et au point de vue de l'acceptation, autant les diabétos que certaines personnes m'ont dit « mais de toute façon, t'acceptes pas ta maladie » . Je me suis dit « mais ils ont raison en fait ces gens-là » . En fait, c'est vrai, je ne dois pas accepter ma maladie. Donc, en fait, les autres diabétiques, eux, ils l'acceptent et ils vivent mieux que moi. Moi, je ne l'accepte pas. Ils ont peut-être raison. Alors, si je ne l'accepte pas, est-ce que je serais là pour en parler ? Au final, je l'accepte un peu cette maladie quand même, je l'assume. Bon, ok. Mais bon, ça se passe plutôt bien, oui. Mais les autres diabétiques, ils font comment ? Et quand j'ai commencé à écouter des... des récits en podcast, des articles ou même des vidéos. En fait, les gens, tout d'un coup, ça a fait tilte parce qu'ils avaient le même discours que moi. Parce que j'ai entendu des échos de vie avec des gens beaucoup plus jeunes que moi qui m'ont fait dire « Mais dis-donc, il y a des gens, ils n'ont même pas trois ans de diabète, ils osent dire haut et fort. » Ben ouais, moi, ça me saoule. J'en ai marre. Et je le dis. Parce que moi, pour moi... Ça a toujours été un interdit de le dire. Ça faisait de moi quelqu'un qui se plaint entre guillemets. Je ne sais pas si je donne une bonne image, mais je n'avais pas envie de passer pour le ouin-ouin du coin qui dit « Moi, j'en ai marre de mon diabète ! » Et puis surtout, il y a toujours la comparaison avec d'autres maladies. « Mon gars, ta diabète, ça se soigne ! » Parce que là, il y a des gens qui sont sous les bombes, et puis il y en a qui sont en phase terminale. Donc toi, avec ton petit diabète, tu vas te taire. J'ai vite fermé ma bouche face à tous ces trucs-là. Et quand j'ai commencé justement à m'ouvrir, à sortir de ma grotte, là tel y un ours, tel ours alpin, quand j'ai écouté tout ça, je me suis dit « Ah ouais ! » Il y a un peu plus de sérénité qui s'est quand même opérée moi. Et puis j'ai commencé à travailler justement intérieurement et là je me suis dit « Bon... » Je vais me faire ma propre psychoanalyse. Au-delà de vouloir sortir un livre, j'ai commencé à écrire. Plus j'écrivais, plus les souvenirs revenaient. Et plus les souvenirs revenaient, plus j'écrivais. Et puis ça faisait comme ça, montagne, montagne, montagne. Et puis en plus, moi, je ne suis pas écrivain, je n'écris pas énormément. Il y a une époque, j'écrivais, mais je n'écris plus. Et l'écriture, c'est comme un muscle. Plus tu le travailles, plus ça se développe. Mais moi, il a fallu que je reparte un petit peu de zéro. Donc au début, mes récits étaient très, très, très bruts et très rentre dedans parce que j'avais des comptes à régler. Surtout avec mon passé, j'ai commencé à sortir les gants de boxe. Et bon, quand tu tapes sur ton clavier avec des gants de boxe, ce n'est pas terrible. Donc je les ai un petit peu enlevés. Et puis j'ai commencé à muscler mon écriture, à muscler le jeu. Et j'ai commencé à écrire, écrire, écrire. Puis au fil du temps, je me suis dit, je vais y rajouter des couleurs, un peu des odeurs, un peu des sensations. Il faut un peu que je décrive mon entourage, pas que le diabète. Et puis en fait, des voyages, j'en ai fait. J'ai vécu en Ukraine, j'ai vécu au Québec, je suis allé trois fois en Afrique de l'Ouest, je suis allé partout un petit peu en Europe. Il y a des choses à raconter au travers de tout ça, comment je l'ai vécu, au travers de mon diabète, comment j'ai vécu la chaleur du Cambodge avec ma pompe, parce que là, j'étais sous pompe, ça remonte à pas très longtemps. Et au fur et à mesure que j'ai construit le bouquin comme ça, il s'est posé aussi la question à savoir est-ce que j'allais mettre des chiffres sourcés ou non. Et spoiler, c'est un récit de vie, c'est pas un guide pratique pour diabétique, c'est pas un livre de médecine, c'est mon vécu à travers mes yeux. Donc forcément, il y a des choses qui peuvent plaire ou pas, ça c'est à tout un chacun de juger. Il n'y a pas de problème là-dessus. Moi, j'ai eu un vécu qui m'est propre. Ma relation avec le médecin, certes, elle a changé. Il faut que je travaille encore dessus. Mais voilà, il y a quand même dans ce récit, il y a de la colère, mais aussi il y a de l'humour. Il y a du cynisme, il y a du second degré, il y a du voyage. Et puis, je n'ai pas voulu sourcer non plus trop de choses. Il y a quelque chose que je me suis rendu compte. Je ne savais pas ce que traversaient les femmes diabétiques. J'étais au courant de rien, là dessus. Quand j'ai commencé à écouter des podcasts, j'ai entendu des choses de femmes. Mais il n'y a que les femmes qui parlent. Et en fait, je ne sais pas ce qui se jouait chez la partie féminine. Je ne savais pas que d'être pluggé avec un capteur, une pompe, ça pouvait un petit peu entraver le côté féminin. Ça, je ne m'en étais jamais rendu compte. Je ne le voyais pas comme ça, en fait. Et le même, je ne le voyais pas du tout. Et puis, j'ai commencé un petit peu à creuser, puisqu'en écoutant des podcasts où des femmes parlent, je me suis dit, ah mais ouais, mais elles vivent ça au quotidien, comme la grossesse, c'est un truc de dingue. Et puis aussi, dans mon bouquin, je parle de sexualité, mais pour certains, ça va être très effleuré, et puis pour d'autres, pas, pas assez creusé, mais je n'ai pas voulu mettre des mots et des chiffres que je ne maîtrise pas. Je n'ai pas de relation avec une diabétique féminine qui aurait pu me guider. Donc je me suis un peu orienté sur des choses que j'ai appris, mais j'en suis resté là en surface. J'ai tout de suite pris conscience des réalités féminines qui m'étaient totalement inconnues. Jusqu'à très peu de temps. Et puis surtout, au travers de ce bouquin, j'ai aussi voulu dire, moi je vis ça, j'en ai marre, je le dis, mais je n'ai pas envie que ça soit trop pathos, ni tire larme en fait. Ça, ça a été une réflexion qui m'a beaucoup hanté. Je me suis dit, il ne faut pas que ce récit soit dans la plainte. Parce qu'effectivement, il y a des choses qui m'ont un peu bousculé, étant plus jeune, qui m'ont beaucoup atteint. Il y a tout un côté qui est quand même assez rigolo. J'ai vécu des trucs assez drôles, donc il faut aussi en parler. Il faut avoir une balance assez équilibrée pour passer justement d'un sujet peut-être un petit peu dramatique, un petit peu touchant, à un sujet derrière qui va te contrebalancer avec une anecdote un petit peu débile sur ce qui a pu se passer avec ton diabète ou non.

  • Nathalie

    Et tu t'adresses à qui ?

  • William

    En fait, je m'adresse autant aux diabétiques qu'à leur entourage, qu'à un public plus large, et puis même à des professionnels de santé. En toute modestie, vraiment, attention, je pèse mes mots encore une fois. C'est quand même pour moi très bizarre d'avoir sorti un bouquin. Je le dis, il y a le syndrome de l'imposteur des fois, et tu te tais parce que je t'ai assez entendu comme ça. Tais-toi, tu te ranges dans le placard et tout. En fait, je me suis dit que peut-être que les professionnels de santé, ils avaient peut-être une curiosité de voir ce type de récits vus de l'intérieur. Puisque des récits de diabétiques de type 1, je ne pense pas qu'on en ait énormément. On a des bouquins, des fois peut-être on a des grands sportifs diabétiques, mais là, est-ce qu'on peut se calquer par rapport à leur vécu ? Alors c'est très admirable, attention, mais des fois on peut lire des choses où on est dans la performance physique et dans la performance glycémique. Moi je ne m'y reconnais pas forcément. Moi je me suis dit, je vais parler de moi et de mon vécu pour un mec lambda qui vit son diabète au quotidien. Mais très vite. Je me suis dit, mais attends, ton égo trip là, tout le monde s'en fout. Ta vie, mais tout le monde s'en fout en fait. Ton petit côté narcissique avec ton diabète, on s'en fout en fait. Puis voilà, du coup, je parlais tout à l'heure du syndrome de l'imposteur. Donc lui, il a fallu vraiment le taire, un peu le mettre de côté. Et puis me dire, bon, je vais sortir ce bouquin. Ça me fait un petit peu flipper. Je l'ai accouché au mois de février. Et puis maintenant, il fait sa vie. Et il ne m'appartient plus. Maintenant, il est disponible. On peut le lire. Il n'y a pas de soucis là-dessus. Donc, c'est très cool. Comment dire ? Pour le moment, ce qui est la mission, on va dire, est pas mal accompli. Puisque j'ai eu des retours assez positifs de personnes diabétiques ou non qui m'ont dit que c'était... assez sympas à lire et qui se sont reconnus. J'ai eu une partie de ma mission qui est quasiment accomplie, à tant de pourcents, je ne sais pas, mais le pari est gagné au moins de ce côté-là, parce que j'avais très peur des réactions. Je parle de 1986 jusqu'à ici, peut-être que des jeunes diabétiques qui ont une vingtaine d'années il s'en fout de mon récit, parce que ça parle de l'ère jurassique, ça ne leur convient pas. Des références musicales qui ne parlent peut-être pas forcément à tout le monde. Il y a des choses que je mentionne qui ne sont peut-être pas forcément intéressantes pour tout le monde. Mais au moins, avec ce petit bouquin, avec cette petite modestie, je me dis que j'apporte un peu d'une pierre à l'édifice. Dans ce côté maladie chronique, est ce qu'il y a des bouquins qui existent, oui, il y en a, et il y a le mien.

  • Nathalie

    Pour un diabétique, il va se reconnaître, ça c'est sûr. Pour un jeune diabétique, il va apprendre que c'était galère avant et que maintenant c'est mieux. Et que peut-être, quelque part, ça va lui faire du bien. Après, pour les gens qui ne connaissent pas la maladie, là on comprend bien ce que vit un diabétique et les galères, les moments... heureux, que tu as pu vivre des grands voyages, tout ce que tu as fait, qu'on peut faire beaucoup de choses avec le diabète. Et franchement, pour les diabétiques, comme je te l'ai dit, moi, ça m'a fait réfléchir. Il y a des passages qui m'ont fait réfléchir sur comment j'appréhendais mon propre diabète. Et voilà, moi, ça m'a fait du bien. Et puis en plus, c'est une lecture masculine. Et ça, c'est très important parce que des bouquins, il y en a, c'est que des féminines, c'est que des auteurs féminins donc des autrices du coup donc voilà je pense que ce bouquin fait du bien franchement il n'y a pas besoin d'avoir le syndrome de l'imposteur, maintenant il est fait donc tu peux plus c'est fait, c'est fait donc il est là et franchement j'espère j'espère qu'il va être lu.

  • William

    En fait les premières lectures ça a été mon entourage proche, bien entendu. Alors, tout de suite, déjà, mes parents, ça a été un petit un petit peu un coup, parce qu'ils se sont rendus compte de ma réalité. Ils ne se sentaient pas forcément rendus compte de tout ce qui se jouait, tout ce qui s'opérait en moi depuis ... ans. Donc, ça a mis la lumière, justement, sur mon vécu, sur ma pathologie. Je parle d'eux et ça les a grandement bousculés. Pas en mal, mais du coup, il y a un côté, ça a ouvert les vannes de la parole. Dans un contexte familial où la parole n'a jamais été primordiale, du coup, même avec mon frangin, que j'adore, on est beaucoup plus, je pense qu'on est un peu plus communicants. Et puis, ce qui m'a étonné aussi, ça a été mon entourage. Parce que j'ai été étonné de leur étonnement. En fait, les premiers retours, ils m'ont dit, c'était, mais on ne pensait pas en fait que c'était comme ça. Parce qu'à te voir, on ne se doute absolument pas de ce que tu vis. Parce que pour eux, c'est, on se contrôle le bout du doigt, on fait une analyse sanguine, on se fait peut-être une piqûre, puis voilà. Puis après, le reste de la journée, la nuit, tout va bien. Non, non. Ils se sont rendus compte que c'est H24. Et qu'il y avait... tout un univers autour de l'alimentation, autour des appareils dispositifs médicaux, qu'il fallait faire des examens, qu'on avait des choses à faire ou ne pas faire dans certains boulots, etc. Et que tout d'un coup, ça a mis un coup de projecteur sur le diabète, qui, eux, le voyaient juste à travers moi, mais par un tout petit prisme, par une toute petite meurtrière, tu vois. Et du coup, au lieu de m'expliquer en soirée avec des mots que je ne maîtrise pas forcément, ce livre apporte beaucoup plus de clarté à la maladie, au diabète, à mon diabète entre guillemets, pour des gens qui sont dans mon entourage proche, moins proche et un peu plus éloigné. Je me suis quand même un peu remis en question. Je me suis dit, mais... c'est de ma faute si on ne prend pas trop en considération ma pathologie, mon handicap c'est de ma faute parce que moi j'en parle de manière détachée, de manière très simple, du coup en face, qu'est-ce qu'ils se disent ? ça va, ils le gèrent bien en fait, donc ça va, tout va bien mais quand il se passe des trucs un petit peu difficiles, comme des grosses hypos où je suis complètement à ramasser la petite cuillère par terre tout le monde se dit, mais qu'est-ce qu'il a en fait ? qu'est-ce qu'il se passe ? À force de traiter mon diabète comme un rhume au travers de mes amis, ça n'a jamais été pris à sa juste valeur. Et puis eux, de leur côté, il y a une forme de pudeur. Ils se disent comment lui, il le vit. Si on lui pose des questions, comment il va réagir ? Comment il va nous parler ? Est-ce que ça l'embête si on pose des questions ? Est-ce qu'on peut lui poser des questions ? Parce que moi, j'ai eu des retours comme ça, en fait, de potes très proches qui m'ont dit qu'en fait, on n'osait pas t'en parler, qu'on n'avait pas ce que tu vivais.

  • Nathalie

    Tu vas nous dire, où peut-on se procurer ton livre et comment suivre ton actualité ?

  • William

    Alors, pour se procurer mon superbe livre... de 161 pages à la superbe couverture digne d'un polar de ce nom. Alors il faut se rendre sur Amazon malheureusement pour certaines personnes le diable en personne Amazon ! En fait je me suis adressé à Amazon pour la simple, c'est pour une question de praticité parce que c'est beaucoup plus simple pour moi parce que je suis en auto-édition, je suis pas du tout chez un éditeur, il y aura beaucoup à dire là-dessus mais bon ça c'est encore une autre paire de manche, je me suis dit Amazon avec tous leurs défauts qu'ils ont, il y a quand même l'avantage d'être en auto-édition et de réaliser un bouquin quand même assez facilement. Donc, il est disponible sur Amazon au doux nom de mon colocataire indésirable avec un nom d'auteur de William Belle. Donc, vous pouvez suivre plus d'actualités sur ma page Instagram, c'est mon coloc indésirable, où il y a pas mal de vidéos qui concernent l'évolution et l'écriture de ce livre. Voilà, jusqu'à sa finalité, jusqu'à sa présentation, la sortie. Le lien est bien sûr en description dans ma bio. J'ai aussi une page Facebook et TikTok, mais je suis moins présent sur ces deux plateformes.

  • Nathalie

    As-tu des projets liés au diabète ou à l'écriture en préparation ?

  • William

    Alors non, pas du tout. En fait, je pense que, pour la petite histoire, ce bouquin, je l'ai écrit d'une manière frénétique. En fait, ça a été une frénésie, ça a été une impulsion, parce que je l'ai écrit en très peu de temps. Je pense que c'était surtout pour faire un gros nettoyage de printemps et pour me vider la tête, ça a été thérapeutique. Et je pense que ça a été très libérateur. Mais après, refaire un bouquin, je ne pense pas, ce n'est pas mon domaine, ce n'est pas mon secteur. Je trouve que mon style d'écriture, il est ce qu'il est, ce n'est pas dingo, on est loin du Victor Hugo. Mais ce n'est pas le but, mon style d'écriture, il est brut et il est sincère et authentique, il me ressemble en fait. Et donc non, je n'ai pas forcément de projet lié avec le diabète, mis à part faire des imbécilités sur Instagram avec des vidéos un peu débiles, mais écrire un nouveau truc, non. Par contre, j'ai un truc qui me trotte dans la tête depuis quelques jours, mais je ne sais pas du tout ce que je peux en faire. Moi, j'habite au pied des Alpes et j'aimerais bien faire une journée soit rando, soit pique-nique pour aller sur un point de vue du Vercors, de la Chartreuse ou de Belledonne. D'être entre diabétiques et accompagnants. Pourquoi pas, je ne sais pas, se taper un bivouac, pourquoi pas. Ou une seule journée d'avoir l'occasion de parler de diabète mais pas que. D'échanger et de passer surtout un bon moment. C'est surtout ça le but. Peut-être mettre ça en place mais je ne sais pas quand, comment ? Là, je suis vraiment dans une idée très vague de la chose. Moi, je connais beaucoup le Vercors. C'est une montagne très proche de moi, c'est de la moyenne montagne. La Chartreuse aussi, c'est super intéressant, c'est assez joli. Belledonne également. Mais si, par exemple, il y a quelque chose qui s'opère pour faire une randonnée entre diabétiques et accompagnants, le choix de la rando, il s'offre à nous. Il y a énormément de coins, on n'est pas en manque du coup. On n'est pas en manque pour des gens qui n'ont peut-être pas forcément l'habitude de marcher, autant pour des gens qui sont très férus de rando. On peut faire quelque chose, un mix entre les deux. Et puis, le but, c'est de prendre du plaisir. Un peu pour clôturer notre entretien, et je t'en remercie, je dirais simplement, ne faites pas comme moi, n'attendez pas 30 ans pour vous ouvrir. Je sais que c'est parfois... Moi, j'ai eu beaucoup de mal à m'ouvrir à tout ce monde-là. Et puis, quelque part, je ne veux pas que mon quotidien soit trop là-dessus, parce que ça peut vite devenir anxiogène. Partagez, explorez, vivez, ouvrez-vous à ce qu'il y a en dehors de chez vous. Je suis bien gentil à dire des conseils comme ça. Moi, des fois, je ne le fais pas. Mais voilà je fais au mieux avec mes petits démons intérieurs que j'arrive à mieux maîtriser qu'avant même si j'ai quand même pas mal de chemin à faire, certes le diabète c'est un boulet mais il ne nous enchaîne pas il ne nous définit pas il y a beaucoup de choses qu'on peut faire donc là dessus je pense qu'il ne faut pas attendre, oui on le fera demain il faut le faire de suite. Moi, j'ai un petit peu du mal avec tout. Je ne veux pas avoir le discours du jeune entrepreneur Instagram, mais n'attendez pas le dernier moment pour vous ouvrir. Je pense qu'en plus, actuellement, il y a entre des ressources pour communiquer entre des podcasts Instagram, TikTok, Facebook ou YouTube. Il y a beaucoup de ressources et puis il y a quand même des acteurs aussi français qui sont présents et qui se bougent beaucoup et qui peuvent donner justement réponse à pas mal de questions. Quand on est un peu la tête sous l'eau, la tête dans le sable, en train de se dire « personne ne me comprend, je suis seul, je suis seul avec cette pathologie, même mes proches ne me comprennent pas, mon diabéto ne me comprend pas » , eh bien, viens, on en parle.

  • Nathalie

    Merci beaucoup William pour cet échange riche et inspirant. Ton livre, Mon colocataire indésirable, offre une belle métaphore de la vie avec le diabète et je suis sûre qu'il parlera à de nombreuses personnes concernées, mais pas seulement. Si vous souhaitez en savoir plus sur William et son ouvrage, je vous invite à le suivre sur son Instagram et à vous procurer son livre. Vous trouverez toutes ses coordonnées dans les notes de l'épisode. Au revoir à toutes et à tous et prenez bien soin de vous !

  • William

    Eh bien, à la prochaine ! Merci beaucoup !

  • Nathalie

    Je te remercie pour ton écoute. Si cet épisode t'a plu, que tu souhaites soutenir le podcast, je t'invite à le partager autour de toi, à t'abonner pour être averti du prochain épisode, à laisser 5 étoiles et un avis sur ta plateforme d'écoute. Tu as la possibilité aussi de me contacter, soit sur mon compte Instagram, soit par e-mail que tu trouveras dans les notes du podcast. Je te dis à très vite pour un nouvel épisode de Vivre le diabète à la recherche de l'équilibre. Prends bien soin de toi.

Chapters

  • Présentation

    01:49

  • Diagnostic et annonce de son diabète type 1

    03:13

  • Pourquoi un colocataire indésirable ?

    14:59

  • Évolution de sa relation avec son "colocataire"

    19:25

  • Pourquoi ce livre ?

    39:06

  • A qui s'adresse William ?

    49:41

  • Où se procurer le livre ?

    57:38

  • Les projets

    59:03

  • Conclusion

    01:01:28

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