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[EXTRAIT] Le Holodomor : l'Ukraine exterminé par la faim ?

[EXTRAIT] Le Holodomor : l'Ukraine exterminé par la faim ?

09min |03/11/2024
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Description

La grande famine d’Ukraine qui a fait des millions de morts de faim au début des années 30 a-t-elle été un génocide,  une extermination de masse voulue et organisée ? Zoom aujourd’hui sur un tragique évènement comparable par son ampleur au génocide arménien et à la Shoah.






Sources :

  • Nicolas Werth, Les grandes famines soviétiques, Humensis, 2020

  • Nicolas Werth, Les révolutions russes, Humensis, 2021

  • Yves Ternon, Makhno, la révolte anarchiste, Éditions Complexe, 1981

  • Iaroslav Lebedynsky, Ukraine : une histoire en questions, L’Harmattan, 2019

  • Anne Applebaum, Famine rouge : la guerre de Staline en Ukraine, Grasset, 2017

  • Nicolas Werth, Comment Staline décida d’affamer son peuple, in L’Histoire Magazine, N°384, Décembre 2013









Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    L'épisode que vous allez écouter n'en est pas vraiment un. C'est un extrait, enfin la première partie du prochain vrai épisode du podcast qui sera disponible le 17 novembre sur les principales plateformes d'écoute et de téléchargement ainsi que sur YouTube. Il sera consacré au Holodomor, la grande famine d'Ukraine du début des années 30. Extrait. La dernière grande famine d'Europe a eu lieu en Ukraine, où 4 millions de personnes sont mortes de faim en 1932 et 1933. La particularité, c'est que cette famine n'était pas due à ce que j'appellerais les causes habituelles d'une famine. Problèmes climatiques, guerres ou épidémies qui touchent les récoltes. En fait, elle faisait partie d'autres famines qui se sont produites à la même époque en URSS et qui étaient dues à la politique agricole de Staline. Et en Ukraine, cette famine a été volontairement, délibérément aggravée par le pouvoir. D'où le nom qui lui a été donné de Holodomor. Ce qui veut dire en ukrainien, extermination par la faim. Un nom qui sonne un peu comme Holocauste. Et justement... la question qui se posait, est-ce que cette famine est un génocide ? Est-ce que Staline a délibérément, volontairement fait mourir de faim des millions de personnes ? Et si oui, pourquoi ? Alors, pour essayer de comprendre le Holodomor, savoir pourquoi et comment il s'est produit, et si c'est un génocide, on va reprendre pas mal d'aimants du contexte. Remonter aux relations assez compliquées entre le pouvoir soviétique et les paysans. Déjà, ne croyez pas qu'à l'époque des Tsars, les paysans de l'Empire russe avaient la belle vie. Avant la révolution de 1917, l'agriculture russe était pas mal en retard sur celle d'autres pays d'Europe et sur celle des Etats-Unis. Pas très productive, pas ou pas beaucoup mécanisée, avec des grandes propriétés nobles qui pratiquaient une agriculture extensive et qui accaparaient pas mal de terres aux dépens des paysans. Ça ne s'est pas arrangé avec l'arrivée en masse de blé américain après 1875 qui a fait jeter les cours du blé russe et la forte hausse de la population. qui a fait réduire la taille moyenne des exploitations. Moins de revenus, moins de terres. Rien d'étonnant à ce qu'une famine touche l'Empire russe en 1891 et à ce que des révoltes paysannes éclatent en 1905. Les réformes du Premier ministre Stolipin en 1906, destinées à favoriser l'émergence d'une classe de paysans aisés, ne touchent pas au problème numéro 1. Les grandes propriét��s des nobles, qui contribuent au retard de l'agriculture et au maintien des paysans dans la misère. Avec la révolution de février 1917 et la chute du Tsar, les aspirations aux changements vont s'exprimer. A partir de septembre 1917, dans tout l'Empire russe, les paysans s'attaquent aux grandes propriétés des nobles et des paysans riches. Les bolcheviques encouragent ces mouvements et les valident après leur prise du pouvoir en octobre 1917. Les paysans de l'Empire vont alors appliquer ce qu'on appelle le partage noir La redistribution des terres aux familles paysannes. en fonction de leurs besoins. Seulement, à partir du printemps 1918, le gouvernement bolchevique impose aux paysans des grosses réquisitions de blé. En cause, le rétablissement des villes devenu difficile et les préjugés des bolcheviques vis-à-vis des paysans. Parce que les bolcheviques avaient une vision bien à eux du marxisme. Une vision où c'était les ouvriers des villes qui formaient le vrai prolétariat révolutionnaire et où les paysans étaient vus comme un groupe social un peu secondaire. Le problème du ravitaillement dans les villes est attribué aux paysans qui accaparent le blé. Lénine dit des petits propriétaires qu'ils ont encore un petit peu de discipline. Des comités chargés du ravitaillement vont dans les campagnes directement prendre le blé aux paysans. Ces mesures, vues comme du vol à grande échelle, auquel s'ajoute l'enrôlement obligatoire dans l'armée rouge, vont vite provoquer des révoltes paysannes. D'abord, dès été 1918, en Russie centrale, puis en 1919 en Ukraine. En 1920, les révoltes paysannes prennent une ampleur énorme dans les provinces de Tambov, de Saratov, dans l'Oural et en Syberie occidentale. Les paysans rebelles réclament souvent le socialisme, le socialisme communiste. A ça, les bolcheviks répondent par une répression féroce. Ça, plus des famines qui touchent l'Ukraine, la province de Tambov et les régions de la Volga, achèvent de mater les révoltes paysannes. Ces famines étaient dues aux réquisitions du gouvernement bolchevique, aux révoltes et à la guerre civile qui prend fin en 1921. Suite à la ruine du pays, à la famine, aux révoltes, le gouvernement bolchevique met en place en 1921 la, attention, Novaya Economicheskaya Politika. En français, Nouvelle politique économique, abrégée en EPP. Une politique de libéralisation économique et d'encouragement au commerce. Avec cette politique, les dirigeants bolcheviques espèrent une alliance ouvrière et paysanne. Un développement mutuel de l'agriculture et de l'industrie. C'est beau de rêver ! Parce que l'agriculture reste repliée sur elle-même, avec des échanges plutôt locaux. On comptait 16 millions d'exploitations agricoles en 1914, 26 en 1928. Donc beaucoup de petites, voire de très petites exploitations, ce qui n'encourage pas la production et l'export à grande échelle. Avant 1914, le pays exportait 10 millions de tonnes de céréales par an, dans les années 1920, zéro. Sous la NEP, les paysans commercialisent 10 à 15% de leur récolte, On garde 45% pour les semences et le bétail, 40% à 45% pour leur consommation. Bon, il faut dire aussi qu'après avoir obtenu le partage des terres et être passé par des années de réquisition, de violence et par une famine, les paysans ont bien envie de profiter de leur récolte, d'en vivre. Pour ce qui est de commercialiser des excédents, on verra plus tard. Les prix agricoles bas n'encouragent pas non plus les paysans à vendre. Les prix industriels élevés n'encouragent pas. part non plus l'achat de matériel agricole. Donc la productivité stagne. C'est toute l'économie agricole qui stagne et avec elle l'ensemble de l'économie soviétique. Face à ces problèmes, les dirigeants soviétiques hésitent entre deux solutions. Certains comme Trotsky veulent donner la priorité au développement de l'industrie en pompant les revenus agricoles par des gros impôts sur les paysans les plus riches. Tandis que d'autres comme Bukharine veulent au contraire donner la priorité au développement de l'agriculture. Ils veulent encourager les paysans à se regrouper en coopérative pour avancer lentement, mais sûrement vers le socialisme. La mort de Nîmes en 1924 laisse pendant un moment un vide de pouvoir qui fait qu'entre ces deux points de vue, les choses ne sont pas tranchées. Entre temps, les relations avec les paysans se dégradent. En 1927, malgré une bonne récolte, la quantité de céréales vendues à l'État diminue. atteint le niveau le plus bas depuis 1921. La même année, les élections locales voient le succès de pas mal de candidats indépendants. Ce qui est vu comme une expression d'opposition au pouvoir soviétique. Staline, qui entre temps est devenu le nouveau leader de l'URSS, attribue le manque de céréales collectées à la volonté délibérée de certains paysans ennemis du pouvoir. Du coup, il fait réquisitionner des céréales par la force. D'abord pendant l'hiver 1928, dans l'Oural et en Sibérie occidentale, puis après dans d'autres régions. Pour les paysans qui refusent l'acquisition, amende, voire emprisonnement. En réaction, les paysans diminuent les surfaces cultivées. La quantité de céréales vendues baisse encore, à un tel point que les cartes de rationnement, qui avaient disparu en 1921, réapparaissent en février 1929. Et là, Staline accentue sa politique de répression. En octobre 1929, il décide d'une collectivisation généralisée de toute l'agriculture soviétique. Les petites exploitations individuelles vont être remplacées par des grandes exploitations collectives. Les soft-cause, fermes d'état où les travailleurs sont salariés, et les cold-cause, des fermes collectives. Concrètement, la collectivisation se fait par des brigades envoyées dans les campagnes, qui vont dans les villages pour pousser les paysans à former un cold-cause et à y adhérer. Je dis pousser, car c'est surtout les menaces et les pressions qui sont utilisées. Alors attention ! Quand je dis fermes collectives, ne pensez pas à des coopératives agricoles où l'achat de semences, de matériel, la vente des produits sont coopératifs et où chacun reste propriétaire de ses terres, ses semences, son matériel et son cheptel. Non, dans les colcauses, à part les maisons d'habitation, quasiment tout est mis en commun. Les terres, le matériel, les bâtiments d'exploitation. Et une fois entrés dans les colcauses, les paysans ont besoin d'une autorisation pour en sortir. Le but de Staline en fait, c'est mater la paysannerie, la mettre sous tutelle de l'État, lui prélever gratuitement autant de céréales que possible, pour financer l'industrialisation de l'URSS à grande échelle que Staline lance en même temps. Mais du point de vue des paysans, la collectivisation de masse, c'est la perte du grand acquis de la révolution de 1917, la terre à ceux qui la travaillent. La perte de tous leurs biens au profit de fermes collectives qui de collectifs n'ont pas. que le nom. C'est le passage à un nouveau servage, un servage d'État, un statut pire qu'avant la révolution de 1917.

Description

La grande famine d’Ukraine qui a fait des millions de morts de faim au début des années 30 a-t-elle été un génocide,  une extermination de masse voulue et organisée ? Zoom aujourd’hui sur un tragique évènement comparable par son ampleur au génocide arménien et à la Shoah.






Sources :

  • Nicolas Werth, Les grandes famines soviétiques, Humensis, 2020

  • Nicolas Werth, Les révolutions russes, Humensis, 2021

  • Yves Ternon, Makhno, la révolte anarchiste, Éditions Complexe, 1981

  • Iaroslav Lebedynsky, Ukraine : une histoire en questions, L’Harmattan, 2019

  • Anne Applebaum, Famine rouge : la guerre de Staline en Ukraine, Grasset, 2017

  • Nicolas Werth, Comment Staline décida d’affamer son peuple, in L’Histoire Magazine, N°384, Décembre 2013









Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    L'épisode que vous allez écouter n'en est pas vraiment un. C'est un extrait, enfin la première partie du prochain vrai épisode du podcast qui sera disponible le 17 novembre sur les principales plateformes d'écoute et de téléchargement ainsi que sur YouTube. Il sera consacré au Holodomor, la grande famine d'Ukraine du début des années 30. Extrait. La dernière grande famine d'Europe a eu lieu en Ukraine, où 4 millions de personnes sont mortes de faim en 1932 et 1933. La particularité, c'est que cette famine n'était pas due à ce que j'appellerais les causes habituelles d'une famine. Problèmes climatiques, guerres ou épidémies qui touchent les récoltes. En fait, elle faisait partie d'autres famines qui se sont produites à la même époque en URSS et qui étaient dues à la politique agricole de Staline. Et en Ukraine, cette famine a été volontairement, délibérément aggravée par le pouvoir. D'où le nom qui lui a été donné de Holodomor. Ce qui veut dire en ukrainien, extermination par la faim. Un nom qui sonne un peu comme Holocauste. Et justement... la question qui se posait, est-ce que cette famine est un génocide ? Est-ce que Staline a délibérément, volontairement fait mourir de faim des millions de personnes ? Et si oui, pourquoi ? Alors, pour essayer de comprendre le Holodomor, savoir pourquoi et comment il s'est produit, et si c'est un génocide, on va reprendre pas mal d'aimants du contexte. Remonter aux relations assez compliquées entre le pouvoir soviétique et les paysans. Déjà, ne croyez pas qu'à l'époque des Tsars, les paysans de l'Empire russe avaient la belle vie. Avant la révolution de 1917, l'agriculture russe était pas mal en retard sur celle d'autres pays d'Europe et sur celle des Etats-Unis. Pas très productive, pas ou pas beaucoup mécanisée, avec des grandes propriétés nobles qui pratiquaient une agriculture extensive et qui accaparaient pas mal de terres aux dépens des paysans. Ça ne s'est pas arrangé avec l'arrivée en masse de blé américain après 1875 qui a fait jeter les cours du blé russe et la forte hausse de la population. qui a fait réduire la taille moyenne des exploitations. Moins de revenus, moins de terres. Rien d'étonnant à ce qu'une famine touche l'Empire russe en 1891 et à ce que des révoltes paysannes éclatent en 1905. Les réformes du Premier ministre Stolipin en 1906, destinées à favoriser l'émergence d'une classe de paysans aisés, ne touchent pas au problème numéro 1. Les grandes propriét��s des nobles, qui contribuent au retard de l'agriculture et au maintien des paysans dans la misère. Avec la révolution de février 1917 et la chute du Tsar, les aspirations aux changements vont s'exprimer. A partir de septembre 1917, dans tout l'Empire russe, les paysans s'attaquent aux grandes propriétés des nobles et des paysans riches. Les bolcheviques encouragent ces mouvements et les valident après leur prise du pouvoir en octobre 1917. Les paysans de l'Empire vont alors appliquer ce qu'on appelle le partage noir La redistribution des terres aux familles paysannes. en fonction de leurs besoins. Seulement, à partir du printemps 1918, le gouvernement bolchevique impose aux paysans des grosses réquisitions de blé. En cause, le rétablissement des villes devenu difficile et les préjugés des bolcheviques vis-à-vis des paysans. Parce que les bolcheviques avaient une vision bien à eux du marxisme. Une vision où c'était les ouvriers des villes qui formaient le vrai prolétariat révolutionnaire et où les paysans étaient vus comme un groupe social un peu secondaire. Le problème du ravitaillement dans les villes est attribué aux paysans qui accaparent le blé. Lénine dit des petits propriétaires qu'ils ont encore un petit peu de discipline. Des comités chargés du ravitaillement vont dans les campagnes directement prendre le blé aux paysans. Ces mesures, vues comme du vol à grande échelle, auquel s'ajoute l'enrôlement obligatoire dans l'armée rouge, vont vite provoquer des révoltes paysannes. D'abord, dès été 1918, en Russie centrale, puis en 1919 en Ukraine. En 1920, les révoltes paysannes prennent une ampleur énorme dans les provinces de Tambov, de Saratov, dans l'Oural et en Syberie occidentale. Les paysans rebelles réclament souvent le socialisme, le socialisme communiste. A ça, les bolcheviks répondent par une répression féroce. Ça, plus des famines qui touchent l'Ukraine, la province de Tambov et les régions de la Volga, achèvent de mater les révoltes paysannes. Ces famines étaient dues aux réquisitions du gouvernement bolchevique, aux révoltes et à la guerre civile qui prend fin en 1921. Suite à la ruine du pays, à la famine, aux révoltes, le gouvernement bolchevique met en place en 1921 la, attention, Novaya Economicheskaya Politika. En français, Nouvelle politique économique, abrégée en EPP. Une politique de libéralisation économique et d'encouragement au commerce. Avec cette politique, les dirigeants bolcheviques espèrent une alliance ouvrière et paysanne. Un développement mutuel de l'agriculture et de l'industrie. C'est beau de rêver ! Parce que l'agriculture reste repliée sur elle-même, avec des échanges plutôt locaux. On comptait 16 millions d'exploitations agricoles en 1914, 26 en 1928. Donc beaucoup de petites, voire de très petites exploitations, ce qui n'encourage pas la production et l'export à grande échelle. Avant 1914, le pays exportait 10 millions de tonnes de céréales par an, dans les années 1920, zéro. Sous la NEP, les paysans commercialisent 10 à 15% de leur récolte, On garde 45% pour les semences et le bétail, 40% à 45% pour leur consommation. Bon, il faut dire aussi qu'après avoir obtenu le partage des terres et être passé par des années de réquisition, de violence et par une famine, les paysans ont bien envie de profiter de leur récolte, d'en vivre. Pour ce qui est de commercialiser des excédents, on verra plus tard. Les prix agricoles bas n'encouragent pas non plus les paysans à vendre. Les prix industriels élevés n'encouragent pas. part non plus l'achat de matériel agricole. Donc la productivité stagne. C'est toute l'économie agricole qui stagne et avec elle l'ensemble de l'économie soviétique. Face à ces problèmes, les dirigeants soviétiques hésitent entre deux solutions. Certains comme Trotsky veulent donner la priorité au développement de l'industrie en pompant les revenus agricoles par des gros impôts sur les paysans les plus riches. Tandis que d'autres comme Bukharine veulent au contraire donner la priorité au développement de l'agriculture. Ils veulent encourager les paysans à se regrouper en coopérative pour avancer lentement, mais sûrement vers le socialisme. La mort de Nîmes en 1924 laisse pendant un moment un vide de pouvoir qui fait qu'entre ces deux points de vue, les choses ne sont pas tranchées. Entre temps, les relations avec les paysans se dégradent. En 1927, malgré une bonne récolte, la quantité de céréales vendues à l'État diminue. atteint le niveau le plus bas depuis 1921. La même année, les élections locales voient le succès de pas mal de candidats indépendants. Ce qui est vu comme une expression d'opposition au pouvoir soviétique. Staline, qui entre temps est devenu le nouveau leader de l'URSS, attribue le manque de céréales collectées à la volonté délibérée de certains paysans ennemis du pouvoir. Du coup, il fait réquisitionner des céréales par la force. D'abord pendant l'hiver 1928, dans l'Oural et en Sibérie occidentale, puis après dans d'autres régions. Pour les paysans qui refusent l'acquisition, amende, voire emprisonnement. En réaction, les paysans diminuent les surfaces cultivées. La quantité de céréales vendues baisse encore, à un tel point que les cartes de rationnement, qui avaient disparu en 1921, réapparaissent en février 1929. Et là, Staline accentue sa politique de répression. En octobre 1929, il décide d'une collectivisation généralisée de toute l'agriculture soviétique. Les petites exploitations individuelles vont être remplacées par des grandes exploitations collectives. Les soft-cause, fermes d'état où les travailleurs sont salariés, et les cold-cause, des fermes collectives. Concrètement, la collectivisation se fait par des brigades envoyées dans les campagnes, qui vont dans les villages pour pousser les paysans à former un cold-cause et à y adhérer. Je dis pousser, car c'est surtout les menaces et les pressions qui sont utilisées. Alors attention ! Quand je dis fermes collectives, ne pensez pas à des coopératives agricoles où l'achat de semences, de matériel, la vente des produits sont coopératifs et où chacun reste propriétaire de ses terres, ses semences, son matériel et son cheptel. Non, dans les colcauses, à part les maisons d'habitation, quasiment tout est mis en commun. Les terres, le matériel, les bâtiments d'exploitation. Et une fois entrés dans les colcauses, les paysans ont besoin d'une autorisation pour en sortir. Le but de Staline en fait, c'est mater la paysannerie, la mettre sous tutelle de l'État, lui prélever gratuitement autant de céréales que possible, pour financer l'industrialisation de l'URSS à grande échelle que Staline lance en même temps. Mais du point de vue des paysans, la collectivisation de masse, c'est la perte du grand acquis de la révolution de 1917, la terre à ceux qui la travaillent. La perte de tous leurs biens au profit de fermes collectives qui de collectifs n'ont pas. que le nom. C'est le passage à un nouveau servage, un servage d'État, un statut pire qu'avant la révolution de 1917.

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La grande famine d’Ukraine qui a fait des millions de morts de faim au début des années 30 a-t-elle été un génocide,  une extermination de masse voulue et organisée ? Zoom aujourd’hui sur un tragique évènement comparable par son ampleur au génocide arménien et à la Shoah.






Sources :

  • Nicolas Werth, Les grandes famines soviétiques, Humensis, 2020

  • Nicolas Werth, Les révolutions russes, Humensis, 2021

  • Yves Ternon, Makhno, la révolte anarchiste, Éditions Complexe, 1981

  • Iaroslav Lebedynsky, Ukraine : une histoire en questions, L’Harmattan, 2019

  • Anne Applebaum, Famine rouge : la guerre de Staline en Ukraine, Grasset, 2017

  • Nicolas Werth, Comment Staline décida d’affamer son peuple, in L’Histoire Magazine, N°384, Décembre 2013









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  • Speaker #0

    L'épisode que vous allez écouter n'en est pas vraiment un. C'est un extrait, enfin la première partie du prochain vrai épisode du podcast qui sera disponible le 17 novembre sur les principales plateformes d'écoute et de téléchargement ainsi que sur YouTube. Il sera consacré au Holodomor, la grande famine d'Ukraine du début des années 30. Extrait. La dernière grande famine d'Europe a eu lieu en Ukraine, où 4 millions de personnes sont mortes de faim en 1932 et 1933. La particularité, c'est que cette famine n'était pas due à ce que j'appellerais les causes habituelles d'une famine. Problèmes climatiques, guerres ou épidémies qui touchent les récoltes. En fait, elle faisait partie d'autres famines qui se sont produites à la même époque en URSS et qui étaient dues à la politique agricole de Staline. Et en Ukraine, cette famine a été volontairement, délibérément aggravée par le pouvoir. D'où le nom qui lui a été donné de Holodomor. Ce qui veut dire en ukrainien, extermination par la faim. Un nom qui sonne un peu comme Holocauste. Et justement... la question qui se posait, est-ce que cette famine est un génocide ? Est-ce que Staline a délibérément, volontairement fait mourir de faim des millions de personnes ? Et si oui, pourquoi ? Alors, pour essayer de comprendre le Holodomor, savoir pourquoi et comment il s'est produit, et si c'est un génocide, on va reprendre pas mal d'aimants du contexte. Remonter aux relations assez compliquées entre le pouvoir soviétique et les paysans. Déjà, ne croyez pas qu'à l'époque des Tsars, les paysans de l'Empire russe avaient la belle vie. Avant la révolution de 1917, l'agriculture russe était pas mal en retard sur celle d'autres pays d'Europe et sur celle des Etats-Unis. Pas très productive, pas ou pas beaucoup mécanisée, avec des grandes propriétés nobles qui pratiquaient une agriculture extensive et qui accaparaient pas mal de terres aux dépens des paysans. Ça ne s'est pas arrangé avec l'arrivée en masse de blé américain après 1875 qui a fait jeter les cours du blé russe et la forte hausse de la population. qui a fait réduire la taille moyenne des exploitations. Moins de revenus, moins de terres. Rien d'étonnant à ce qu'une famine touche l'Empire russe en 1891 et à ce que des révoltes paysannes éclatent en 1905. Les réformes du Premier ministre Stolipin en 1906, destinées à favoriser l'émergence d'une classe de paysans aisés, ne touchent pas au problème numéro 1. Les grandes propriét��s des nobles, qui contribuent au retard de l'agriculture et au maintien des paysans dans la misère. Avec la révolution de février 1917 et la chute du Tsar, les aspirations aux changements vont s'exprimer. A partir de septembre 1917, dans tout l'Empire russe, les paysans s'attaquent aux grandes propriétés des nobles et des paysans riches. Les bolcheviques encouragent ces mouvements et les valident après leur prise du pouvoir en octobre 1917. Les paysans de l'Empire vont alors appliquer ce qu'on appelle le partage noir La redistribution des terres aux familles paysannes. en fonction de leurs besoins. Seulement, à partir du printemps 1918, le gouvernement bolchevique impose aux paysans des grosses réquisitions de blé. En cause, le rétablissement des villes devenu difficile et les préjugés des bolcheviques vis-à-vis des paysans. Parce que les bolcheviques avaient une vision bien à eux du marxisme. Une vision où c'était les ouvriers des villes qui formaient le vrai prolétariat révolutionnaire et où les paysans étaient vus comme un groupe social un peu secondaire. Le problème du ravitaillement dans les villes est attribué aux paysans qui accaparent le blé. Lénine dit des petits propriétaires qu'ils ont encore un petit peu de discipline. Des comités chargés du ravitaillement vont dans les campagnes directement prendre le blé aux paysans. Ces mesures, vues comme du vol à grande échelle, auquel s'ajoute l'enrôlement obligatoire dans l'armée rouge, vont vite provoquer des révoltes paysannes. D'abord, dès été 1918, en Russie centrale, puis en 1919 en Ukraine. En 1920, les révoltes paysannes prennent une ampleur énorme dans les provinces de Tambov, de Saratov, dans l'Oural et en Syberie occidentale. Les paysans rebelles réclament souvent le socialisme, le socialisme communiste. A ça, les bolcheviks répondent par une répression féroce. Ça, plus des famines qui touchent l'Ukraine, la province de Tambov et les régions de la Volga, achèvent de mater les révoltes paysannes. Ces famines étaient dues aux réquisitions du gouvernement bolchevique, aux révoltes et à la guerre civile qui prend fin en 1921. Suite à la ruine du pays, à la famine, aux révoltes, le gouvernement bolchevique met en place en 1921 la, attention, Novaya Economicheskaya Politika. En français, Nouvelle politique économique, abrégée en EPP. Une politique de libéralisation économique et d'encouragement au commerce. Avec cette politique, les dirigeants bolcheviques espèrent une alliance ouvrière et paysanne. Un développement mutuel de l'agriculture et de l'industrie. C'est beau de rêver ! Parce que l'agriculture reste repliée sur elle-même, avec des échanges plutôt locaux. On comptait 16 millions d'exploitations agricoles en 1914, 26 en 1928. Donc beaucoup de petites, voire de très petites exploitations, ce qui n'encourage pas la production et l'export à grande échelle. Avant 1914, le pays exportait 10 millions de tonnes de céréales par an, dans les années 1920, zéro. Sous la NEP, les paysans commercialisent 10 à 15% de leur récolte, On garde 45% pour les semences et le bétail, 40% à 45% pour leur consommation. Bon, il faut dire aussi qu'après avoir obtenu le partage des terres et être passé par des années de réquisition, de violence et par une famine, les paysans ont bien envie de profiter de leur récolte, d'en vivre. Pour ce qui est de commercialiser des excédents, on verra plus tard. Les prix agricoles bas n'encouragent pas non plus les paysans à vendre. Les prix industriels élevés n'encouragent pas. part non plus l'achat de matériel agricole. Donc la productivité stagne. C'est toute l'économie agricole qui stagne et avec elle l'ensemble de l'économie soviétique. Face à ces problèmes, les dirigeants soviétiques hésitent entre deux solutions. Certains comme Trotsky veulent donner la priorité au développement de l'industrie en pompant les revenus agricoles par des gros impôts sur les paysans les plus riches. Tandis que d'autres comme Bukharine veulent au contraire donner la priorité au développement de l'agriculture. Ils veulent encourager les paysans à se regrouper en coopérative pour avancer lentement, mais sûrement vers le socialisme. La mort de Nîmes en 1924 laisse pendant un moment un vide de pouvoir qui fait qu'entre ces deux points de vue, les choses ne sont pas tranchées. Entre temps, les relations avec les paysans se dégradent. En 1927, malgré une bonne récolte, la quantité de céréales vendues à l'État diminue. atteint le niveau le plus bas depuis 1921. La même année, les élections locales voient le succès de pas mal de candidats indépendants. Ce qui est vu comme une expression d'opposition au pouvoir soviétique. Staline, qui entre temps est devenu le nouveau leader de l'URSS, attribue le manque de céréales collectées à la volonté délibérée de certains paysans ennemis du pouvoir. Du coup, il fait réquisitionner des céréales par la force. D'abord pendant l'hiver 1928, dans l'Oural et en Sibérie occidentale, puis après dans d'autres régions. Pour les paysans qui refusent l'acquisition, amende, voire emprisonnement. En réaction, les paysans diminuent les surfaces cultivées. La quantité de céréales vendues baisse encore, à un tel point que les cartes de rationnement, qui avaient disparu en 1921, réapparaissent en février 1929. Et là, Staline accentue sa politique de répression. En octobre 1929, il décide d'une collectivisation généralisée de toute l'agriculture soviétique. Les petites exploitations individuelles vont être remplacées par des grandes exploitations collectives. Les soft-cause, fermes d'état où les travailleurs sont salariés, et les cold-cause, des fermes collectives. Concrètement, la collectivisation se fait par des brigades envoyées dans les campagnes, qui vont dans les villages pour pousser les paysans à former un cold-cause et à y adhérer. Je dis pousser, car c'est surtout les menaces et les pressions qui sont utilisées. Alors attention ! Quand je dis fermes collectives, ne pensez pas à des coopératives agricoles où l'achat de semences, de matériel, la vente des produits sont coopératifs et où chacun reste propriétaire de ses terres, ses semences, son matériel et son cheptel. Non, dans les colcauses, à part les maisons d'habitation, quasiment tout est mis en commun. Les terres, le matériel, les bâtiments d'exploitation. Et une fois entrés dans les colcauses, les paysans ont besoin d'une autorisation pour en sortir. Le but de Staline en fait, c'est mater la paysannerie, la mettre sous tutelle de l'État, lui prélever gratuitement autant de céréales que possible, pour financer l'industrialisation de l'URSS à grande échelle que Staline lance en même temps. Mais du point de vue des paysans, la collectivisation de masse, c'est la perte du grand acquis de la révolution de 1917, la terre à ceux qui la travaillent. La perte de tous leurs biens au profit de fermes collectives qui de collectifs n'ont pas. que le nom. C'est le passage à un nouveau servage, un servage d'État, un statut pire qu'avant la révolution de 1917.

Description

La grande famine d’Ukraine qui a fait des millions de morts de faim au début des années 30 a-t-elle été un génocide,  une extermination de masse voulue et organisée ? Zoom aujourd’hui sur un tragique évènement comparable par son ampleur au génocide arménien et à la Shoah.






Sources :

  • Nicolas Werth, Les grandes famines soviétiques, Humensis, 2020

  • Nicolas Werth, Les révolutions russes, Humensis, 2021

  • Yves Ternon, Makhno, la révolte anarchiste, Éditions Complexe, 1981

  • Iaroslav Lebedynsky, Ukraine : une histoire en questions, L’Harmattan, 2019

  • Anne Applebaum, Famine rouge : la guerre de Staline en Ukraine, Grasset, 2017

  • Nicolas Werth, Comment Staline décida d’affamer son peuple, in L’Histoire Magazine, N°384, Décembre 2013









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Transcription

  • Speaker #0

    L'épisode que vous allez écouter n'en est pas vraiment un. C'est un extrait, enfin la première partie du prochain vrai épisode du podcast qui sera disponible le 17 novembre sur les principales plateformes d'écoute et de téléchargement ainsi que sur YouTube. Il sera consacré au Holodomor, la grande famine d'Ukraine du début des années 30. Extrait. La dernière grande famine d'Europe a eu lieu en Ukraine, où 4 millions de personnes sont mortes de faim en 1932 et 1933. La particularité, c'est que cette famine n'était pas due à ce que j'appellerais les causes habituelles d'une famine. Problèmes climatiques, guerres ou épidémies qui touchent les récoltes. En fait, elle faisait partie d'autres famines qui se sont produites à la même époque en URSS et qui étaient dues à la politique agricole de Staline. Et en Ukraine, cette famine a été volontairement, délibérément aggravée par le pouvoir. D'où le nom qui lui a été donné de Holodomor. Ce qui veut dire en ukrainien, extermination par la faim. Un nom qui sonne un peu comme Holocauste. Et justement... la question qui se posait, est-ce que cette famine est un génocide ? Est-ce que Staline a délibérément, volontairement fait mourir de faim des millions de personnes ? Et si oui, pourquoi ? Alors, pour essayer de comprendre le Holodomor, savoir pourquoi et comment il s'est produit, et si c'est un génocide, on va reprendre pas mal d'aimants du contexte. Remonter aux relations assez compliquées entre le pouvoir soviétique et les paysans. Déjà, ne croyez pas qu'à l'époque des Tsars, les paysans de l'Empire russe avaient la belle vie. Avant la révolution de 1917, l'agriculture russe était pas mal en retard sur celle d'autres pays d'Europe et sur celle des Etats-Unis. Pas très productive, pas ou pas beaucoup mécanisée, avec des grandes propriétés nobles qui pratiquaient une agriculture extensive et qui accaparaient pas mal de terres aux dépens des paysans. Ça ne s'est pas arrangé avec l'arrivée en masse de blé américain après 1875 qui a fait jeter les cours du blé russe et la forte hausse de la population. qui a fait réduire la taille moyenne des exploitations. Moins de revenus, moins de terres. Rien d'étonnant à ce qu'une famine touche l'Empire russe en 1891 et à ce que des révoltes paysannes éclatent en 1905. Les réformes du Premier ministre Stolipin en 1906, destinées à favoriser l'émergence d'une classe de paysans aisés, ne touchent pas au problème numéro 1. Les grandes propriét��s des nobles, qui contribuent au retard de l'agriculture et au maintien des paysans dans la misère. Avec la révolution de février 1917 et la chute du Tsar, les aspirations aux changements vont s'exprimer. A partir de septembre 1917, dans tout l'Empire russe, les paysans s'attaquent aux grandes propriétés des nobles et des paysans riches. Les bolcheviques encouragent ces mouvements et les valident après leur prise du pouvoir en octobre 1917. Les paysans de l'Empire vont alors appliquer ce qu'on appelle le partage noir La redistribution des terres aux familles paysannes. en fonction de leurs besoins. Seulement, à partir du printemps 1918, le gouvernement bolchevique impose aux paysans des grosses réquisitions de blé. En cause, le rétablissement des villes devenu difficile et les préjugés des bolcheviques vis-à-vis des paysans. Parce que les bolcheviques avaient une vision bien à eux du marxisme. Une vision où c'était les ouvriers des villes qui formaient le vrai prolétariat révolutionnaire et où les paysans étaient vus comme un groupe social un peu secondaire. Le problème du ravitaillement dans les villes est attribué aux paysans qui accaparent le blé. Lénine dit des petits propriétaires qu'ils ont encore un petit peu de discipline. Des comités chargés du ravitaillement vont dans les campagnes directement prendre le blé aux paysans. Ces mesures, vues comme du vol à grande échelle, auquel s'ajoute l'enrôlement obligatoire dans l'armée rouge, vont vite provoquer des révoltes paysannes. D'abord, dès été 1918, en Russie centrale, puis en 1919 en Ukraine. En 1920, les révoltes paysannes prennent une ampleur énorme dans les provinces de Tambov, de Saratov, dans l'Oural et en Syberie occidentale. Les paysans rebelles réclament souvent le socialisme, le socialisme communiste. A ça, les bolcheviks répondent par une répression féroce. Ça, plus des famines qui touchent l'Ukraine, la province de Tambov et les régions de la Volga, achèvent de mater les révoltes paysannes. Ces famines étaient dues aux réquisitions du gouvernement bolchevique, aux révoltes et à la guerre civile qui prend fin en 1921. Suite à la ruine du pays, à la famine, aux révoltes, le gouvernement bolchevique met en place en 1921 la, attention, Novaya Economicheskaya Politika. En français, Nouvelle politique économique, abrégée en EPP. Une politique de libéralisation économique et d'encouragement au commerce. Avec cette politique, les dirigeants bolcheviques espèrent une alliance ouvrière et paysanne. Un développement mutuel de l'agriculture et de l'industrie. C'est beau de rêver ! Parce que l'agriculture reste repliée sur elle-même, avec des échanges plutôt locaux. On comptait 16 millions d'exploitations agricoles en 1914, 26 en 1928. Donc beaucoup de petites, voire de très petites exploitations, ce qui n'encourage pas la production et l'export à grande échelle. Avant 1914, le pays exportait 10 millions de tonnes de céréales par an, dans les années 1920, zéro. Sous la NEP, les paysans commercialisent 10 à 15% de leur récolte, On garde 45% pour les semences et le bétail, 40% à 45% pour leur consommation. Bon, il faut dire aussi qu'après avoir obtenu le partage des terres et être passé par des années de réquisition, de violence et par une famine, les paysans ont bien envie de profiter de leur récolte, d'en vivre. Pour ce qui est de commercialiser des excédents, on verra plus tard. Les prix agricoles bas n'encouragent pas non plus les paysans à vendre. Les prix industriels élevés n'encouragent pas. part non plus l'achat de matériel agricole. Donc la productivité stagne. C'est toute l'économie agricole qui stagne et avec elle l'ensemble de l'économie soviétique. Face à ces problèmes, les dirigeants soviétiques hésitent entre deux solutions. Certains comme Trotsky veulent donner la priorité au développement de l'industrie en pompant les revenus agricoles par des gros impôts sur les paysans les plus riches. Tandis que d'autres comme Bukharine veulent au contraire donner la priorité au développement de l'agriculture. Ils veulent encourager les paysans à se regrouper en coopérative pour avancer lentement, mais sûrement vers le socialisme. La mort de Nîmes en 1924 laisse pendant un moment un vide de pouvoir qui fait qu'entre ces deux points de vue, les choses ne sont pas tranchées. Entre temps, les relations avec les paysans se dégradent. En 1927, malgré une bonne récolte, la quantité de céréales vendues à l'État diminue. atteint le niveau le plus bas depuis 1921. La même année, les élections locales voient le succès de pas mal de candidats indépendants. Ce qui est vu comme une expression d'opposition au pouvoir soviétique. Staline, qui entre temps est devenu le nouveau leader de l'URSS, attribue le manque de céréales collectées à la volonté délibérée de certains paysans ennemis du pouvoir. Du coup, il fait réquisitionner des céréales par la force. D'abord pendant l'hiver 1928, dans l'Oural et en Sibérie occidentale, puis après dans d'autres régions. Pour les paysans qui refusent l'acquisition, amende, voire emprisonnement. En réaction, les paysans diminuent les surfaces cultivées. La quantité de céréales vendues baisse encore, à un tel point que les cartes de rationnement, qui avaient disparu en 1921, réapparaissent en février 1929. Et là, Staline accentue sa politique de répression. En octobre 1929, il décide d'une collectivisation généralisée de toute l'agriculture soviétique. Les petites exploitations individuelles vont être remplacées par des grandes exploitations collectives. Les soft-cause, fermes d'état où les travailleurs sont salariés, et les cold-cause, des fermes collectives. Concrètement, la collectivisation se fait par des brigades envoyées dans les campagnes, qui vont dans les villages pour pousser les paysans à former un cold-cause et à y adhérer. Je dis pousser, car c'est surtout les menaces et les pressions qui sont utilisées. Alors attention ! Quand je dis fermes collectives, ne pensez pas à des coopératives agricoles où l'achat de semences, de matériel, la vente des produits sont coopératifs et où chacun reste propriétaire de ses terres, ses semences, son matériel et son cheptel. Non, dans les colcauses, à part les maisons d'habitation, quasiment tout est mis en commun. Les terres, le matériel, les bâtiments d'exploitation. Et une fois entrés dans les colcauses, les paysans ont besoin d'une autorisation pour en sortir. Le but de Staline en fait, c'est mater la paysannerie, la mettre sous tutelle de l'État, lui prélever gratuitement autant de céréales que possible, pour financer l'industrialisation de l'URSS à grande échelle que Staline lance en même temps. Mais du point de vue des paysans, la collectivisation de masse, c'est la perte du grand acquis de la révolution de 1917, la terre à ceux qui la travaillent. La perte de tous leurs biens au profit de fermes collectives qui de collectifs n'ont pas. que le nom. C'est le passage à un nouveau servage, un servage d'État, un statut pire qu'avant la révolution de 1917.

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