- Speaker #0
Bonjour, je m'appelle Béatrice et je vous invite à plonger avec moi dans le monde des reins avec le podcast À l'écoute de ce rein. Découvrez la réalité de la maladie rénale chronique et explorez les traitements de la dialyse à la greffe. Ce podcast n'est pas seulement pour les patients, mais aussi pour leurs proches et toutes celles et ceux qui veulent comprendre l'importance de la santé rénale. Ensemble, construisons un avenir plus sain. Avec Nora, bonne écoute. Bonjour Fabrice, dans ce nouvel épisode de À l'écoute de seREIN, nous allons découvrir ton aventure et celle de la Lemur Team à l'assaut des Pyrénées. Alors Fabrice, tu nous racontes ton aventure et surtout tu as organisé cette aventure parce que tu es engagée pour une dialyse plus inclusive. qui permet aux personnes de choisir la dialyse la plus adaptée à leur quotidien. Tu t'investis pour promouvoir la dialyse longue de nuit, qui est très peu, voire pas suffisamment développée en France, et grâce à laquelle tu peux partager ton mantra, le fameux se dialyser la nuit pour revivre le jour Alors en premier lieu, je voulais te poser une question qui est celle de comment est-ce que tu as découvert ton insuffisance rénale ?
- Speaker #1
Bonjour Béatrice, ravi de partager avec toi ce podcast. Mon insuffisance rénale a été découverte lors d'une banale opération d'un genou. J'avais 18 ans, je jouais au foot le dimanche, et luxure du... luxation plutôt, du genou. Et donc, en consultant pour se faire opérer, on a fait une prise de sang, et c'est là qu'on a décelé un taux... anormalement élevée de durée de créatine dans le sang. Et donc, on m'a conseillé d'aller voir un néphrologue.
- Speaker #0
Et comment est-ce que tu as vécu ce moment, ce diagnostic ou ce début d'inquiétude par rapport à la diarrhée rénale ?
- Speaker #1
Alors, un peu d'ignorance parce que j'étais en pleine santé. Je faisais du sport, je continuais ma vie sociale normalement. Je n'avais pas de symptômes. C'est une maladie génétique qui apparaît à la puberté, qui attaque les yeux, les oreilles et les reins, qui s'appelle le syndrome d'Alleport. Et donc j'ai été suivi tous les trois mois, j'avais une analyse d'urine pour vérifier un petit peu la fonction rénale. J'avais aussi des règles diététiques, notamment éviter le sel. J'étais un peu ignorant sur cette idée-là. Je ne savais pas les conséquences. On ne m'avait pas forcément expliqué les conséquences qu'en cas d'insuffisance rénale terminale, j'aurais de toute façon besoin d'un traitement de suppléance de dialyse ou greffe. Donc je dois dire que pendant plusieurs mois, j'ai été suivi en faisant confiance à ce que me disaient les médecins sur les règles diététiques à tenir.
- Speaker #0
Dès le départ, il y a eu quand même une décision partagée par rapport au traitement que tu allais commencer par rapport à cette maladie. Est-ce que tu peux nous parler un peu de ton rapport justement avec les professionnels de santé qui se sont chargés de toi ?
- Speaker #1
Comme je te disais, le rapport au début était une visite tous les trois mois. J'avais une analyse du sang, je voyais le néphrologue, on faisait le point sur ma fonction rénale. Pour être très franc avec toi, j'ai aussi un peu perdu la mémoire de cette période-là, parce que les années qui ont suivi, ça a été assez éprouvant sur ce que j'ai vécu après. Et c'est vrai que, en fait, c'était un passage obligé tous les trois mois. Je n'appréhendais pas plus que ça. J'avais l'impression que c'était plus ma maman qui m'accompagnait bien souvent, qui faisait attention à faire du pain sans sel, à faire une soupe où au lieu d'utiliser l'eau dans laquelle les légumes ont chauffé, on remettait une eau différente pour mixer les légumes. Elle faisait attention à un certain nombre de choses. Moi, au quotidien, je ne faisais pas forcément attention. Et voilà, j'ai ce souvenir-là plutôt de l'anxiété. de mes parents avec ce souci et voilà.
- Speaker #0
Et ça a duré combien de temps cette période effectivement où tu étais donc en présuppléance comme on le dit et où tu n'as pas encore commencé un traitement de dialyse par exemple, ça a duré longtemps ?
- Speaker #1
Ça a duré de 18 à 20 ans. Le point positif de tout ça, c'est que j'ai pu continuer mes études normalement, même si je n'aurais pu continuer. J'ai fait un IUT, maintenance industrielle, à Saint-Malo, et tous les week-ends, je rentrais à la maison, j'avais ma maman qui faisait attention à ce que je mangeais tous les week-ends, mais la semaine, c'était compliqué pour moi de suivre les règles d'éthique, d'aller chez un boulanger pour demander un pain sans sel. C'est vrai que la diététique c'était pesant en fait. Et puis quand on est jeune, comme moi, on mange avec les copains, on ne va pas faire un repas à part. On était dans une résidence étudiante, il y avait une super ambiance, donc on était tous ensemble à partager nos repas. Les portes des appartements étaient ouvertes, on passait chez l'un chez l'autre. Donc voilà, un petit peu, ça a duré deux ans. Et puis à la fin de l'IUT, j'ai fait une saison à Saint-Malo. Et en septembre, la visite du nifrologue, c'est là qu'il m'a dit, les reins se dégradent, il va falloir se préparer au traitement de suppléance et à l'inscription à la greffe. Et donc, quand on m'a parlé de dialyse, c'est là que ça a été un choc. Je me souviens quand même du choc du fait de me dire qu'on va devoir passer par la dialyse. Et là, qu'est-ce que c'est la dialyse ? Il y a quand même beaucoup de choses qui se bousculent.
- Speaker #0
Est-ce que tu peux nous raconter, si tu te rappelles, le moment où tu as dû commencer à réfléchir avec ton équipe de soins sur la méthode de dialyse à choisir ?
- Speaker #1
C'est vrai que quand on m'a annoncé de devoir créer un abord vasculaire, soit par un cathéter ou soit par une fistule, pour réaliser le mode de dialyse lequel je choisissais, c'est vrai que je me suis tout de suite dirigé vers la fistule parce que je pratiquais beaucoup de... de sport à Saint-Malo, sport de mer et c'est vrai que j'aimais les sports outdoor et c'est vrai qu'avec la cathéter c'était quand même plus compliqué donc très rapidement je me suis orienté vers vers l'hémodialyse et la création de la fistule et la modalité c'est vrai qu'on en a pas trop parlé parce que bon c'était plutôt généralement du 3x4 heures Mais je me souviens quand même qu'on m'avait rassuré en me disant la possibilité de continuer à travailler en faisant du 3 fois 4 heures, mais après le travail en soirée. Donc voilà un petit peu comment ça s'est orienté. De toute façon, il y a tellement de questions que c'est difficile de choisir une modalité où dans le quotidien, on ne sait pas précisément comment ça se passe, comment on ressent les choses. Donc c'est vrai qu'on nous demande de faire un choix. Sauf que le choix est très difficile à faire. Je pense qu'il faut mieux proposer aux personnes d'essayer un choix, qu'il y a la possibilité peut-être de basculer d'un choix à un autre. Je ne sais pas, mais c'est vrai que c'était quand même compliqué à 20 ans de faire un choix de modalité de dialyse sans avoir testé, on va dire. C'est un petit peu ça.
- Speaker #0
Oui, c'est vrai, tu as raison. Le fait de ne pas savoir et de commencer, en fait, c'est très jeune, 20 ans. Et du coup... Par rapport à ça, tu as donc cette idée de dialyse longue de nuit. Elle est arrivée quand et comment est-ce que tu l'as commencé ?
- Speaker #1
En fait, quand j'ai commencé les dialyses en 1997, pour revenir un petit peu à mon parcours, j'ai fait la création de fistules, il a fallu faire deux fois. Après, j'ai commencé les dialyses, un entraînement en dialyse. Après, j'ai eu la greffe. Après, j'ai eu un rejet très rapide de greffe avec beaucoup de transfusions. et un retour en dialyse assez rapide. Donc en fait, c'est ce que j'explique bien souvent, c'est que j'ai eu vraiment une année, en 1997, une année noire, puisque j'ai subi de multiples opérations, en fait j'ai eu trois anesthésies générales, donc c'est vrai que le cerveau et la mémoire en a pris un petit coup. Et en fait, quand j'ai repris les dialyses après cette année noire, Je travaillais ou plutôt j'ai commencé à faire une réorientation professionnelle et donc je faisais des dialyses de 3 fois 4 heures après mon travail. Donc j'allais en dialyse à 18h30 et je ressortais à 23h pratiquement, je rentrais chez moi à 23h. Donc en fait, il n'y avait pas la dialyse longue nocturne à l'époque, en 1997 à Rennes. Et en fait, cette modalité de dialyse du 3 fois 4 heures, en travaillant en même temps, En fait, ça me mettait physiquement à plat. Et j'ai beaucoup tendance à dire que c'était vraiment un cercle vicieux parce que j'avais très peu d'envie mentale et physique avec cette dialyse et ce travail de faire autre chose. Et d'avoir une vie sociale à peu près normale avec les copains, aller boire un verre, aller au cinéma, aller au concert. Donc c'est vrai que j'ai vécu des semaines où c'était beaucoup boulot, dialyse, dodo. Et en plus du traitement qui m'éprouvait vraiment, physiquement et mentalement, et c'est vrai que mon visage parlait aussi beaucoup, j'avais le teint pâle, jaune. Mes parents, quand je rentrais le week-end, ils vivaient tout le temps. Tout le temps, quand j'arrivais le vendredi soir, ma maman me disait t'as l'air fatigué Mais oui, j'étais fatigué parce que je sortais d'une semaine éprouvante où j'avais fait ma semaine de travail, mes trois dialyses, j'avais peu de temps. pour faire autre chose. Et il n'y avait pas de dialyse longue nocturne à l'époque, on n'en avait pas parlé. Et en fait, la dialyse longue nocturne est arrivée à Rennes en 2002, parce qu'ils ont eu la possibilité de regrouper trois établissements qui faisaient de la dialyse autour de Rennes en un seul, un grand centre, avec de nouvelles installations, le traitement d'eau, un groupe électrogène. pour sécuriser aussi la dialyse, etc. Donc c'est tout un pôle qui a été construit. Et ils se sont dit, pourquoi ne pas faire des chambres individuelles pour faire de la dialyse longue-nocturne, où les patients peuvent dormir pendant leur sommeil et aller travailler le lendemain matin. Alors dans les faits, ça paraît assez délirant, parce qu'après une dialyse, on est vraiment éprouvé. Mais tout de suite, ils ont eu... des retours physiologiques sur la qualité de dialyse qui permet pratiquement en sortant de dialyse d'avoir une vie normale et d'avoir très peu de fatigue, une bonne qualité de sommeil, moins de médicaments. Il y avait beaucoup d'avantages physiologiques de cette modalité. Et on m'a proposé d'essayer quand le centre ouvrirait à Rennes. Et c'est comme ça qu'en 2002, j'ai été un des premiers patients à Rennes à par chance avoir une place dans une chambre individuelle. pour passer une dialyse longue nocturne, trois fois huit heures par semaine. Donc c'est un peu comme si vous alliez dans un hôtel dialyse dormir trois fois. Je pars de chez moi à 21h30, j'arrive là-bas à 22h, je suis branché et à 6h30, 7h, je peux sortir du stand et aller au travail. Je peux prendre une douche sur place, prendre un petit déjeuner. En fait, c'est vraiment ça. C'est un hôtel dialyse, des couches. trois fois par semaine et quand je sors de la dialyse, même en ayant perdu 3 kg, comme c'est sur un format plus long de 8 heures, le ressenti et le système de fatigue n'est pas mis à contribution. La pompe tourne moins vite et c'est vrai que le corps en ressent des effets beaucoup moins nocifs que du 3 fois 4 heures où on a tendance à parler d'une machine à laver. Là, nous, la dialyse longue nocturne, c'est une dialyse... douce et de qualité.
- Speaker #0
Et donc là, c'était vraiment une innovation, cette technique ? Et est-ce que c'était à Rennes que cette innovation a été mise en place pour la première fois, ou est-ce qu'il existait déjà ce genre de centre dans le reste de la France ?
- Speaker #1
Alors, en fait, dans le reste de la France, il y avait un établissement à la pointe sur cette modalité, c'est le centre Tassin. à Lyon. Et en Bretagne, on avait déjà, on va dire, expérimenté cette modalité à Brest. La fondation AUB Santé, qui gère les dialyses en Bretagne, avait déjà un centre à Brest, mais ça tâtonnait, en fait. Il y avait, je crois, cinq ou six chambres. Ce n'était pas forcément complet, mais ils envoyaient les bienfaits, mais ce n'était pas... il n'y avait pas beaucoup de demandes. Les patients n'étaient pas forcément demandeurs. Moi, je pense qu'en fait, il y avait peu d'informations et peu peut-être de communication sur cette modalité. Peut-être que les patients ne s'exprimaient pas autant qu'ils le ressentaient.
- Speaker #0
Oui, peut-être pas autant qu'aujourd'hui. Il n'y avait pas encore eu beaucoup de changements, peut-être, par rapport à la communication aussi entre les patients et les centres de dialyse. J'ai envie de te demander aussi, parce que tu nous as parlé des bénéfices par rapport à la fatigue, mais par rapport à l'ensemble de ton quotidien, qu'est-ce qui a changé dans ta vie après avoir commencé cette méthode ?
- Speaker #1
En fait, très rapidement, quand j'ai commencé cette méthode, j'ai pu retrouver de l'envie et de l'ambition. C'était clairement ça. Moi, j'ai eu une éducation, on va dire, très humaine avec mes parents, partageuse, beaucoup en faisant les choses pour autrui, du bénévolat, de l'investissement, du partage avec les gens. Donc, en fait, c'est des choses que je pousse. pas faire quand j'avais ma dialyse 3 x 4 heures parce que j'avais peu l'envié et peu l'énergie de partager parce que l'engagement de qui soit bénévole demande quand même un investissement et quand les mots dialyse longue nocturne est arrivé en fait très rapidement j'ai pu m'engager et adhérer à des associations parce qu'en adhérant je savais que j'allais pouvoir me déplacer et participer à des événements donc je me suis inscrit à l'époque à l'association Transforme, qui est l'association des transplantés et dialysés. Et j'ai rencontré beaucoup de personnes qui sont encore mes amis aujourd'hui. Au mariage, par exemple, de Michel, un copain qui a transplanté cœur. J'ai rencontré des personnes formidables, mais il y a eu aussi des histoires tragiques ou des amis que j'ai perdus. Je pense à Olivier, greffi du foie sur Toulouse. Donc voilà, cette période-là m'a permis vraiment de retrouver le partage et les rencontres humaines. Et puis, comme j'ai eu l'envie, j'ai pu reprendre l'activité physique. Et c'est vrai que l'activité physique, telle que je l'avais connue dans ma jeunesse, où je partageais, on rigolait, pour moi c'est ça l'activité physique, c'est le plaisir, le partage, les rencontres. Et ça, j'ai pu le retrouver très rapidement avec les modalities longues de nuit, puisque après mon travail, je pouvais aller à un entraînement de badminton ou faire une petite compétition avec les copains. Et voilà, c'est vraiment ça qui... La première chose que je me souviens, c'est que dès que j'ai eu accès à cette modalité, c'est que j'ai pu m'ouvrir de nouveau aux autres et aller vers les autres, ce que je ne faisais pas sur le format 3x4 heures où j'avais tendance à m'isoler, où c'était... Dans le quotidien, c'était compliqué.
- Speaker #0
Oui, c'est ça, c'est retrouver une vie sociale. En plus, tu étais jeune, donc j'ai l'impression effectivement aussi que ce sens de la générosité dans l'engagement associatif aussi dont tu parlais, mais aussi ce sens de l'amitié qui est très fort. Et donc là, je vais arriver à te demander, parce que tu as déjà... Moi, je t'ai rencontré quand tu as... sorti le film La montagne dans le sang qui était déjà un film formidable que j'ai découvert sur ton séjour à l'île de la Réunion où tu as pu faire la diagonale des fous, c'est ça ?
- Speaker #1
Oui, c'était le trail du Bourbon, c'est 112 kilomètres.
- Speaker #0
Donc après, moi je t'ai rencontré comme ça sur le film que tu as pu sortir de cette aventure du trail du Bourbon. Mais là, récemment, tu nous as aussi fait partager une aventure entre copains. Comment tu as eu l'idée d'aller à l'assaut des Pyrénées avec Talimur Thim et tes copains ? Parce que j'ai vraiment l'impression que c'est quelque chose aussi qui est très lié à cette méthode de dialyse longue nocturne et de redécouverte de la vie sociale et de l'amitié.
- Speaker #1
En fait, l'origine déjà, ce qu'il faut comprendre, c'est que... L'origine de la rencontre avec la Lemur Team et notamment Nico, mon copain, c'est en 2008 quand je vais faire mon premier try à La Réunion. En fait, Nico était dans le même rang que moi qui m'emmenais à La Réunion dans l'avion. Et en fait, une amitié s'est créée. Et en fait, régulièrement avec Nico, on partage des week-ends, deux ou trois week-ends par an, des week-ends montagne. C'est en week-end. Entre deux dialyses, on partage des week-ends montagne. Je descends le vendredi après ma dialyse dans les Pyrénées, et je reviens le dimanche soir pour ma dialyse du dimanche soir. C'est bien souvent comme ça que ça se passait. Ils avaient quand même une semaine de prévue, parfois en juillet, mais moi je ne pouvais pas y participer parce que... Il fallait que je trouve un centre de dialyse, il y avait une organisation vraiment compliquée, il n'y avait pas la dialyse longue de nuit, si je descendais dans les Pyrénées, ou alors à une distance pas possible. Donc voilà, j'ai partagé pendant de nombreuses années des super week-ends avec eux, mais je ne pouvais pas partager plus. Et puis, quand j'ai porté le film La montagne dans le sang, je me suis mis sur une rupture conventionnelle. Je suis allé à la rencontre des autres et tout. Et c'est là que j'ai eu la possibilité de prendre un petit peu de temps pour me former sur une méthode de dialyse un peu plus autonome, avec un format de machine réduit, sur lequel on n'a plus besoin d'arriver d'eau, mais on accroche les poches de dialysa. Et ainsi, on peut pratiquer une dialyse quotidienne ou 3 fois 4 heures ou 3 fois 8 heures. Alors ce modèle est complètement innovant, 3 fois 8 heures avec 8 poches de dialyses. Et en fait, je me suis formé il y a maintenant 5-6 ans. Et en fait, j'allais du coup faire mes vacances avec ce type de dialyse. J'ai pu pratiquer un petit peu la dialyse en vacances avec ce modèle de machine. Donc c'était encore nouveau pour moi. Et en discutant avec Nico pendant cette période Covid. Nico m'a dit Ouais, mais maintenant que tu fais ce type de délice, tu pourras peut-être venir avec nous une semaine en vacances, comme on fait tous les ans. Alors c'est vrai que c'était déjà, il y avait une ouverture de se dire Oui, c'est vrai qu'on pourrait peut-être faire ça. Et puis, comme il y a eu la période Covid, et ça faisait longtemps qu'on ne s'était pas vus avec tous les copains, on s'est dit Pourquoi pas faire quelque chose d'assez sympa, plutôt que de faire quelque chose dans les Pyrénées, comme on fait bien souvent, pourquoi pas ? On en avait discuté ensemble, pourquoi pas aller en Corse et faire le GR20 ensemble avec aussi la famille, les proches, tous ceux qui veulent se joindre à l'aventure. Et on a, pendant la période Covid, ensemble, tous les deux, en visio, organisé ça, réservé les gîtes, voir un petit peu le parcours. On a beaucoup, beaucoup discuté, on a motivé un certain nombre de personnes et on est parti du coup à l'été 2021. faire ce GR20 en 6 tours et 2 dialyses où en fait on a pu organiser tout ça avec un groupe de 25 personnes je crois dont 17 ou 18 faisaient le GR20 donc c'est le parcours complet et il y en avait 7 ou 8 qui faisaient la logistique et dont notamment ma femme donc la logistique ça consistait à à transporter les valises, les effets personnels, l'alimentation, etc. Et puis aussi toute cette partie dialyse avec la machine, les poches. Donc voilà, c'est comme ça qu'on est parti faire ce GR20 en six jours et deux dialyses. Et par chance, en fait, j'ai pu être mis en contact avec un journaliste, Pierre-Etienne Léonard. Son beau-père était dialysé, malheureusement il est décédé. Et en fait, il a voulu me suivre en caméra pendant ces six jours pour faire ce film Plus belle la nuit. Et c'est comme ça que l'aventure s'est mise en place très rapidement.
- Speaker #0
C'est assez incroyable ces rencontres justement qui permettent de pouvoir réaliser cette aventure. Tu nous as déjà répondu à une question que je voulais te poser par rapport à comment est-ce que tu as transporté des consommables mais là on voit bien que tu avais effectivement une équipe autour de toi dont ta femme tes amis des personnes qui faisaient le gr20 aussi et j'avais envie de te demander au delà du fait que bon effectivement tu étais bien entouré quelles ont été pour toi les difficultés les plus dures à surmonter et puis Et puis, comment tu faisais aussi pour choisir l'installation de ta machine quand tu devais faire ta dialyse ?
- Speaker #1
En fait, déjà pour transporter la machine et les consommables, il y a eu un partenariat de fait avec mon établissement de soins. Parce qu'en Corse, il n'y a pas de démodialise à domicile qui est développée. Donc, il n'y avait pas de moyen de faire du dépannage s'il y avait un problème sur la machine. Donc, en fait, mon établissement. a fait deux livraisons, une livraison d'une palette avec deux machines, une petite tablette pour poser la machine, le pied à perfusion, etc. Et puis une autre palette avec tout le matériel. Tout le matériel, c'est-à-dire le dialysat, le petit consommable, etc. Parce que tout ça, je ne pouvais pas le transporter dans une valise, donc c'était par avion et ça a été anticipé en amont. La grosse difficulté de la logistique, c'était de trouver un endroit où stocker ça pendant le temps que j'arrive. Parce que je ne pouvais pas arriver et me faire livrer en même temps. J'arrivais le samedi, le week-end, donc voilà. Et en fait, j'ai rencontré une personne formidable. En fait, j'ai mis un message sur le bon coin. Je cherchais un hébergement et j'expliquais ma situation, que j'étais dialysé, j'avais besoin de faire des traitements médicaux. Et donc, que le locataire ou la propriétaire réceptionne le matériel, j'expliquais ça très très rapidement. Et en fait, j'ai eu un appel. Et il y a une personne qui m'a appelé, elle a bien voulu réceptionner le matériel, louer un appartement pendant les 15 jours. garder le matériel le temps qu'on va faire la traversée du GR20 en Corse, revenir après. J'ai trouvé une personne qui a bien voulu m'accompagner dans ce projet. Et c'était vraiment ça le plus dur, de trouver quelqu'un sur place qui peut organiser la logistique en amont et en aval. Parce que quand on est parti faire le GR20, on n'a pris qu'une seule machine, on n'a pris que le matériel nécessaire, mais il restait... tout le matériel du reste de mes vacances. Et voilà, ça a été ça le plus compliqué, la logistique en amont et en aval, en gérant aussi la dialyse, puisque j'ai fait une dialyse avant d'aller faire le Gervin, donc quand est-ce que je la faisais, il a fallu organiser toute cette logistique-là. Et puis la logistique en amont avec Nico, dans l'organisation, la réservation des gîtes, la réservation des repas, parce qu'on était quand même un groupe de 25. Donc il ne fallait pas se louper, on s'était pris vraiment longtemps à l'avance. Et on essayait de réduire au maximum les imprévus, bien qu'on ne sait pas physiquement si je vais tenir, si je vais abandonner au bout de deux jours. Physiquement, je ne le savais pas du tout, c'était quand même un gros challenge physique. pas loin de 35 km par jour, 1500, 2000 de dénivelé par jour. Donc c'était un peu plus vite que de la randonnée. Donc il fallait aussi physiquement tenir dans la durée. Et bon voilà, il y avait quelques incertitudes, mais on avait organisé tout en amont pour essayer de réduire au maximum les imprévus. Et puis la principale difficulté, ça a été au bout de la deuxième journée. Et en fin de la deuxième journée, on a eu une coupure de courant totale. Sur la ville de Guizoni, mes copains étaient en haut au refuge. Il n'y avait pas d'électricité pendant la nuit au refuge. On avait loué en bas du village un appartement pour faire la dialyse. Mais malgré ces précautions, il y a eu une coupure d'électricité très longue, environ 5 heures. Je me suis dit que l'aventure s'arrête. Je vais avertir mes copains le lendemain matin. Je passais la nuit normale. Je vais avertir mes copains le lendemain matin que l'aventure, elle est finie. Puis en fait, c'est Nico. Il m'a dit, mais tu ne pourrais pas refaire juste une dialyse de 2-3 heures en redescendant rapidement ? Et puis, on se rejoint un petit peu plus loin sur le parcours. Christine, elle t'emmène sur le col de Vizavone. Et même moi, je n'avais même pas pensé à ça. Je pensais que le périple s'arrêtait et tout. Et il a fallu se remettre. dans la dynamique que je pouvais continuer l'aventure et ça a été ça la principale difficulté c'était de cette coupure de courant qui a quand même chamboulé beaucoup de choses et notre nuit et la fatigue quand même derrière faire une dialyse de trois heures rapidement et puis reprendre une randonnée de 20 ou 25 km aussi ça c'était éprouvant donc c'était vraiment ce qu'a causé la coupure de courant m'a fait surmonter un certain nombre de difficultés.
- Speaker #0
Effectivement, c'est un moment fort de reportage que tu nous as partagé aussi et je ne peux pas m'empêcher de te poser la question des aidants. Je sais que dans le film, il y a un vrai moment d'émotion lors de cette coupure d'électricité et je ne peux pas non plus m'empêcher de te poser la question par rapport à ta compagne. Voilà, et le sujet des aidants, quel est ton avis ou en tout cas, quel est ton sentiment sur cette place à la fois de la maladie, parce que j'imagine que vous la vivez au quotidien, mais de la place de ces personnes qui soutiennent en permanence, qui te soutiennent, et surtout la place de ta compagne dans ce parcours de soins.
- Speaker #1
C'est vrai que la place de ma femme a un rôle primordial dans ma vie, dans mon quotidien. Quand je l'ai rencontré, je lui ai presque annoncé aussitôt que j'étais dialysé parce que je voulais évacuer rapidement.
- Speaker #0
que peut-être quelqu'un à dialyser ce soit pas un frein à une rencontre donc on a une relation forte humainement tous les deux quand on a eu la coupure on a eu un fou rire pendant 10-15 minutes c'était assez énorme mais ça montre un petit peu la relation qu'on a tous les deux on arrive à se ressentir pleinement après pour rien te cacher sur cette aventure Je pense que j'ai mis la place de l'aidant à un niveau où j'avais un peu sous-estimé ce que je lui demandais. Et c'est vrai que c'est toujours bien ce type d'aventure parce que ça permet aussi de faire le point sur ce qui peut être renouvelé, pas fait, les difficultés qu'on a rencontrées et comment peut-être les appréhender différemment pour que tout le monde soit satisfait. Et c'est vrai que Christine, elle aime bien m'accompagner sur ces courses de trail, partager avec moi l'aventure, m'accompagner. Pour elle, ce n'est pas une contrainte, parce qu'elle trouve ce rôle d'éducatrice, d'épreuve de PS, donc elle a un vrai engagement aussi là-dessus d'accompagnement. Mais là, avec le GR20, elle ne partageait pas l'aventure en fait, elle n'avait que le mot le verrou, elle transportait la machine, elle allait... aller ranger, remettre la machine dans la voiture, reporter. C'est une machine qui pèse 35-40 kg. Et moi, j'avais complètement sous-estimé ça. C'est-à-dire la journée, je partais dans la montagne, dans le plaisir avec les copains et tout. Et le soir, la machine était installée, tous les accessoires étaient bien rangés. Elle avait même préparé sur le lit le set de branchement. Je n'avais rien à faire. Elle n'a pas vécu l'aventure comme moi j'ai pu le vivre. C'est aussi ça le retour de tout ça. Il faut quand même faire attention peut-être au rôle qu'on peut demander aux aidants et prendre soin du ressenti et du retour d'expérience qu'ils ont eu sur telle ou telle chose. En tout cas, nous on ne fera plus ce genre de choses. En tout cas, je ne demanderai pas à eux. plus autant l'investissement que je lui ai demandé. Et on en apprend encore. L'été dernier, on a fait des vacances, toujours avec ce même type de dialyse, mais sur deux endroits différents. Et c'est vrai que passer d'un endroit à un autre pour remettre la machine, remettre le dialyser, les cartons, les déchets, c'est une logistique quand même qui est importante. Et c'est vrai qu'on s'est dit que les prochaines vacances... On passera à un endroit et après on rentrera à la maison, mais on évitera de trimballer la machine d'un endroit à un autre. C'est sûr, comme ça c'est beau, mais ça demande quand même beaucoup de logistique, de stress aussi quand même, parce qu'on transporte du matériel médical. Est-ce qu'on a bien tout le matériel ? On a quand même de petits accessoires à ne pas oublier, à faire attention. Quand je pars en vacances, j'ai toute une liste. Je coche moi-même le matériel qui est mis dans les cartons. Je ne veux pas que ce soit les soignants qui préparent mes cartons pour partir en vacances parce que j'ai besoin de savoir si c'est moi qui est responsable et s'il y a un problème, c'est que mon problème à moi. C'est vrai que les soignantes veulent m'aider, mais je suis obligé de savoir dans quel carton qu'est-ce qu'il y a et est-ce que je l'ai bien pris. Et s'il y a une erreur, c'est moi qui... est fait l'erreur. Donc voilà, l'expérience de tout ça c'est les dents, ils ont effectivement une responsabilité et une action formidable pour nous, passion chronique, un vrai soulagement qui peut être au quotidien mais il faut aussi faire attention à leur place et prendre soin de leur qualité, de ce qu'ils vivent aussi dans le quotidien.
- Speaker #1
Il faut les ménager, les aidants, il faut essayer de les ménager. Et puis, c'est vrai que l'apprentissage par l'expérience, c'est aussi très important. Et je vois bien que c'est des sujets aussi qui sont très délicats. Mais tu as parlé aussi de la logistique, qui est quand même un frein assez commun aux personnes qui ont témoigné déjà sur cette dialyse mobile. Merci en tout cas de nous avoir partagé cette aventure qui est extraordinaire. J'ai vu le film, j'en suis toujours... Il y a beaucoup d'émotions et effectivement, on peut pressentir le travail qui a été effectué par toutes ces personnes que tu as rencontrées. mais aussi le plaisir, tu as parlé beaucoup de plaisir, et c'est vrai qu'on peut retenir aussi ça par rapport à la dialyse, qui est quand même un soin un peu compliqué la plupart du temps. Et j'aimerais te demander aujourd'hui, comment est-ce que tu vois l'avenir ?
- Speaker #0
C'est une question compliquée, parce qu'au bout de 26 ans en dialyse, c'est quand même dingue des fois de se dire, je commence à avoir beaucoup l'âge de raison. C'est quand même dingue de se dire que depuis 26 ans, je vis avec ce traitement de suppléance et avec cette dialyse. Comment je vois l'avenir ? Je le vois toujours avec de l'espoir, avec l'espoir peut-être de l'évolution des techniques de greffe pour enlever les anticorps, des techniques de xénogreffe, greffe de rein de cochon. Moi, ça ne me dérangera pas. J'espère en fait, mon rêve c'est d'avoir une greffe durable et de qualité quand j'arriverai à l'âge de la retraite où je me serai quand même beaucoup investi professionnellement pour les autres. Et j'espère en fait aspirer à une retraite paisible où je pourrais en fait prendre un maximum de plaisir. voyager au gré de mes jambes ou du vélo.
- Speaker #1
Moi, je te souhaite vraiment cette greffe et puis, alors pas forcément la retraite parce que peut-être que si tu as une greffe, du coup, tu vas encore prolonger ton engagement en tout cas, puisque tu as une belle énergie. Donc, est-ce que pour le mot de la fin, tu aurais un message à faire passer aux auditeurs qui te tient à cœur ?
- Speaker #0
Mon message, c'est oser. Oser peut-être dépasser, ouvrir chaque porte pour voir ce qu'il y a derrière, ne pas avoir peur de dire les choses, de s'exprimer avec les soignants sur le ressenti de ce qu'on vit au quotidien. Ne pas hésiter en fait d'oser parler du projet de vie, et ce qu'on veut vivre et ce qu'on n'arrive pas à vivre, avec peut-être une offre de soins qui ne serait pas adaptée. Donc voilà, je sais qu'il y a un cercle vicieux sur l'accessibilité des offres de soins en France. Et c'est bien souvent quand l'offre n'est pas accessible, il n'y a pas d'information. Du coup, le patient, il n'est pas demandeur. Et comme le patient n'est pas demandeur, les soignants, ils peuvent dire pourquoi mettre une offre en place alors que le patient n'est pas demandeur. Donc il faut vraiment s'informer auprès des associations de ce qui peut exister. comme offre, parce qu'on a une disparité d'offres en France, et se rapprocher d'associations, notamment comme Inforain ou d'autres associations. Il est important, moi ce que je vois, c'est que la dialyse longue nocturne, effectivement elle est peu développée, parce qu'elle n'est pas reconnue, on va dire, par les instances, et voire par aussi beaucoup de personnes. Il ne faut pas hésiter à en parler, à exprimer aussi les difficultés de l'établissement. Nos difficultés en tant que patients se conduisent au quotidien. Il faut oser, partager, échanger pour essayer de comprendre pourquoi on n'arrive pas peut-être à vivre une vie sociale normale comme Fabrice peut essayer de le vivre au quotidien. Je pense que mon témoignage doit faire prendre conscience que... Malgré la dialyse, c'est un traitement de suppléance qui permet de continuer à vivre. Malgré la dialyse, une vie sociale normale est possible, même au bout de 20 ans de dialyse. Moi je suis un privilégié parce que j'ai accès à une dialysion nocturne, mais d'autres patients qui sont en âge de travailler doivent pouvoir avoir accès à une modalité de dialyse qui leur permet de vivre une vie... social ou professionnel normal. C'est un petit peu ça mon message, c'est oser exprimer nos problématiques dans le quotidien.
- Speaker #1
Je te remercie infiniment Fabrice d'avoir accepté de participer à ce podcast et à donner tous tes témoignages, tes aventures et aussi tes engagements. Et vraiment, je suis très heureuse de t'avoir eu aujourd'hui. Merci beaucoup.
- Speaker #0
Merci Béatrice. Bonne continuation. à tous et à l'association.
- Speaker #1
Alors, comment avez-vous trouvé votre plongée dans l'univers captivant des reins ?
- Speaker #2
Vous avez aimé ? Vous en voulez encore ? Et c'est la nouvelle ! Une nouvelle aventure vous attend bientôt. Rejoignez-nous sur Ocha et toutes les plateformes de podcast pour explorer à nouveau le monde de à l'écoute de seREIN et d'exprimer nos prochains épouseuses. A très bientôt !