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Episode 38 - Comment tu vis la mort ? (Avec Cleophée) cover
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A Nous Deux

Episode 38 - Comment tu vis la mort ? (Avec Cleophée)

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1h21 |08/04/2025
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1h21 |08/04/2025
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Description

Avant tout attention ⚠ Cet épisode aborde le sujet sensible de la mort 🕊


Cleophée m’accompagne avec toute sa douceur pour discuter de ce sujet délicat mais ô combien important : on parle du deuil, de comment nous avons pu vivre le décès de proche autour de nous, de comment la mort est vu dans notre regard et celui de la société, est-ce qu’on a peur de mourir ? Qu’est ce qu’on imagine après ? 🐦‍⬛


En bref, c’est un sujet qui aborde beaucoup de point et qui j’espère pourra faire du bien à vos cœurs malgré son aspect très lourd 


Pauline ✨


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Salut, bienvenue sur le podcast de a nous deux. Avant de commencer cet épisode, je voulais juste prévenir que celui-ci aborde un sujet très sensible. Aujourd'hui, on va parler de la mort. Préservez-vous si vous traversez une période difficile, si vous êtes sensible en ce moment, si vous êtes en dépression, que vous avez un petit moral, que vous vivez une période de deuil ou que vous êtes en train de vivre. des choses autour de la mort, s'il vous plaît, préservez-vous et n'écoutez peut-être pas cet épisode. Ou venez peut-être l'écouter plus tard, quand cette période difficile sera passée. La mort fait partie de la vie. C'est souvent très bateau comme phrase, mais en fait c'est notre réalité. Comme beaucoup de choses vivantes sur cette planète, on est pour mourir. On peut avoir peur de cela, ou bien l'attendre avec patience. C'est souvent dur à vivre lorsqu'un proche décède. C'est souvent trop tôt, et la période de deuil est délicate. Nous avons tous un rapport différent avec la mort. que ce soit pour nous ou pour les autres. J'ai décidé d'en discuter avec Cléophée. Salut à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast. Aujourd'hui, je suis très contente de vous faire partager cet épisode avec Cléophée, qui m'accompagne pour parler de ce sujet très délicat qui est la mort. Et j'ai voulu inviter Cléophée, enfin, c'est même pas moi qui l'ai invitée forcément. Cléophée est venue à moi pour qu'on puisse notamment parler de ce sujet, parce que Cléophée travaille... dans un service soins palliatifs. Donc, elle accompagne des personnes qui sont en fin de vie. Donc, je trouvais qu'elle était très à même de venir parler de ce sujet de la mort. Cléophée, pour toi, ça fait quoi d'accompagner des personnes qui sont en fin de vie Alors,

  • Speaker #1

    bonjour Pauline. Je suis ravie déjà d'être ici. Je suis ravie qu'on ait cette discussion toutes les deux et qu'on puisse parler de ça, en effet. Alors, du coup, je travaille en tant qu'infirmière en soins palliatifs. Je me suis dit que peut-être il serait bien qu'on définisse un petit peu ce que c'est. Pour que je puisse t'expliquer ce que moi je ressens. Peut-être que tu aies une idée de ce qu'on fait réellement. Car il y a énormément d'idées reçues sur ce service-là. Et je me suis dit qu'on passerait peut-être à côté du sujet si on partait pas d'une définition commune et d'une réalité finalement. Qu'est-ce qu'on fait en soins palliatifs En soins palliatifs, il faut savoir que... On a une idée historique de l'infirmière qui est au chevet du malade, qui tient la main et qui attend que la personne meure. Ça, c'est l'idée que la plupart des gens ont et qu'on attend un cancéreux qui va rester là trois jours et qui va finir par mourir et finalement, on attend la mort. C'est, à mon sens, l'idée un peu reçue qu'ont les gens de manière générale. Sauf que c'est très loin d'être ça. En tout cas, c'est bien plus que ça. Les soins palliatifs aujourd'hui. ce sont des soins qui sont actifs et qui prennent en charge de manière globale les personnes. C'est ce qu'on appelle une prise en charge holistique, c'est-à-dire qui prend en compte la souffrance psychologique, la souffrance sociale et la souffrance spirituelle. Alors, je ne dis pas ça juste pour crâner, je dis ça parce que c'est l'essence même de la philosophie palliative. Palliative, ça veut dire pallier. Pallier, ça veut dire pallier à quoi C'est au curatif, c'est-à-dire au fait de soigner, de guérir. Aujourd'hui, la fonction des soins palliatifs, ce n'est absolument pas de guérir la personne de la pathologie pour laquelle elle vient chez nous. C'est vraiment, au départ, pallier au curatif pour finalement prendre la place du curatif et mettre la personne dans un confort, si je puis dire, un soulagement et qu'il existe soit dans la globalité de la personne. C'est la spécificité. de ce service-là. C'est-à-dire qu'on entend tout ce qu'elle a comme problème physique, comme problème émotionnel, comme problème psychologique, familiaux, et on prend point par point les choses et on essaye d'établir avec elle, et non pas juste dans l'attente de ce qu'elle veut. C'est avec elle de mettre au point un plan qui lui conviendrait pour la laisser dans la dignité de ce qui va se passer. Je ne sais pas si c'était clair.

  • Speaker #0

    Si, si. Et je trouve ça très bien que tu fasses ce point parce que c'est un point C'est vrai qu'on peut avoir un peu cette image comme dans les films de guerre, où tu as l'infirmière qui va être au chevet du soldat qui est en train de partir, où il y a toute une beauté qui n'est pas forcément réaliste, et réalisable non plus, dans ce genre de situation. Donc je trouve ça très bien que tu puisses partager ça et justement l'expliquer. Et j'ai trouvé ça hyper intéressant aussi que tu parles de philosophie palliative, je crois que c'est le terme que tu as employé.

  • Speaker #1

    Oui. Je trouve ça super.

  • Speaker #0

    Enfin super. Je vais employer des termes qui, je pense, ne sont pas appropriés au sujet. Je suis désolée.

  • Speaker #1

    Non, alors tu peux te détendre par rapport à ça, parce qu'on en reparlera plus tard, je pense. Mais les seins palliatifs, ce n'est pas du tout un endroit dans lequel... Ce n'est pas un mouroir, il n'y a pas de tabou. Et on peut sourire et être très joyeuse. Je suis très joyeuse en soins palliatifs. Après, comment dire Les soins palliatifs, il y a bien sûr un côté humain, engageant, dans lequel il faut faire preuve d'empathie. Et je n'ai pas honte de dire d'amour, parce qu'il s'agit de ça, en réalité. Mais il y a cette espèce de dualité avec une... haute technicité des soins qui sont très complets, très complexes. Et aujourd'hui, ce que ignore la plupart des gens, même dans le milieu médical d'ailleurs, c'est qu'on est l'un des services les plus performants en France, c'est-à-dire que la personne, elle vient, non pas pour une pathologie, mais pour l'ensemble de sa pathologie, c'est-à-dire qu'il faut pouvoir donner des soins à la fois cardio, à la fois pneumo, enfin bref. Il faut être prêt un peu à tout et tout gérer. Et c'est un service qui permet du coup d'ouvrir des portes. Et quand tu me parlais de philosophie, alors là, sinon je vais faire honte à mon métier, mais il y a les soins palliatifs. Donc là, le soin, c'est vraiment ce qui est concret. Il y a la médecine palliative. Donc là, c'est un peu, on commence à rentrer dans la philosophie palliative, c'est-à-dire que la médecine palliative, c'est une manière de voir la personne en face. Et aujourd'hui, d'ailleurs, il y a beaucoup de... professionnels de santé qui se disent qu'on devrait prendre la médecine palliative et la mettre à d'autres domaines. Ça veut dire prendre la personne de manière plus globale, entendre ce qu'elle a à nous dire, faire avec elle. Et donc, du coup, de ça est née un peu une philosophie palliative, on en parle aujourd'hui. C'est-à-dire vraiment cette manière de dire je fais quelque chose dans l'unicité de la personne qui est en face de moi. Ok,

  • Speaker #0

    très bien. Oui, c'est pas juste dans l'idée de traiter un point, et je trouve ça très bien que tu en parles, qu'effectivement Les personnes qui travaillent dans le genre de service dans lequel tu es, c'est vrai que vous traitez autant, comme tu disais, des problèmes cardiaques comme des problèmes peut-être psychiatriques, des amputations, enfin je n'en sais rien, tout ce qu'il peut y avoir. Peut-être aussi des personnes qui ont des cancers, des maladies orphelines ou que sais-je. Mais c'est vrai que vous pouvez traiter une personne qui a plusieurs pathologies. Et je trouve que c'est bien de rappeler que oui. effectivement je comprends que ça soit un des services les plus performants parce que vous traitez énormément de choses en fait.

  • Speaker #1

    Oui, alors pour donner une idée, parce que c'est pareil, les gens du coup ils ont du mal à s'approprier ça en se disant quand est-ce qu'on y va finalement Oui j'avoue. Non mais du coup quand est-ce qu'on y va si on a... Alors c'est des pathologies qui peuvent bien sûr être des pathologies cancéreuses, mais les gens n'y pensent pas, mais par exemple il y a 40 millions de personnes au monde qui auraient besoin de soins palliatifs. Donc, il faut se rendre compte un petit peu et des fois, comment dire, lever la tête et se dire combien de gens pourraient être concernés. Il y a une maladie qui, par exemple, est le sida. Aujourd'hui, ça a trait aux soins palliatifs et c'est quelque chose qui est complexe et qui nécessite des soins techniques également. Bien sûr, il y a le cancer, il y a toutes les maladies neurodégénératives auxquelles on pense parce que les gens pensent à Alzheimer, mais il y a Parkinson et puis on a d'autres qui sont attelés. Et puis voilà, toutes les maladies chroniques. On n'a pas besoin d'avoir quelque chose forcément de fulgurant.

  • Speaker #0

    Tu peux être amenée à avoir des patients sur de la longue, voire très longue durée

  • Speaker #1

    On peut en avoir. On va dire que le plaisir quand on est en soins palliatifs, c'est quand quelqu'un rentre dans le service, on nous dit cette personne, elle en a pour six mois. Et que finalement, par tous les soins qu'on a pu lui apporter à tous les niveaux, finalement, au bout d'un an, elle est toujours là. et elle décide de rentrer chez elle pour des raisons qui lui sont personnelles. C'est tout ce que je souhaite aux gens qui rentrent dans mon service.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que tu arrives à prendre de la distance avec justement cet aspect de mort, de perdre les personnes que tu accompagnes pendant des mois Comment est-ce que ça se passe Et aussi, question avant qui peut peut-être être intéressante, depuis combien de temps tu fais ça

  • Speaker #1

    Je fais ça depuis une dizaine d'années, ce qui est déjà un bon petit bagage dans ce service-là. Voilà, alors après, en ce qui concerne le fait d'arriver à le gérer, alors je vais donner ma définition à moi déjà de ce que moi je fais. Parce que là, j'ai fait une description qui est globale et qui concerne l'ensemble des personnes qui travaillent en soins palliatifs. Après, je crois qu'on a chacun notre manière de pratiquer le métier, de le penser. On va dire que moi, j'y mets une part d'intime de moi quand je le fais. C'est-à-dire, bien sûr, mon but, c'est de soulager la douleur, les souffrances, mais j'y mets une part d'intime de moi et en ça, j'essaye toujours d'être joyeuse et douce. Alors certes, parfois c'est une nature, mais c'est très important pour moi. D'être comme ça, ça engage une énergie importante et dans des situations qui sont intenses et bouleversantes. Donc, on peut aussi arriver à un épuisement, arriver à quelque chose auquel je pense qu'il n'est pas bien que j'arrive parce que je n'aiderai pas correctement les personnes en face de moi. Donc, pour arriver à essayer de gérer ça, je pense que je vais dire des choses très, très, très, très tartes. Mais... C'est finalement prendre soin de soi parfois. Et mon petit truc personnel, c'est vraiment d'accepter la solitude. C'est un métier, quand j'y suis, jamais je ne me sens seule. Mais ça crée une sorte de solitude à l'intérieur. Et ça m'a pris un peu de temps avant de comprendre qu'il ne fallait pas toujours foncer tête baissée, encaisser, encaisser, encaisser. Ça m'a pris du temps, mais maintenant j'ai compris ça, qu'il fallait que j'accepte la solitude en moi. Et ça va être, par exemple, le bain. partir une semaine, aller dans le désert et puis voir personne, ne parler à personne et laisser les choses en moi se vivre et je les laisse partir. Voilà. Je ne sais pas si c'était clair.

  • Speaker #0

    Moi, en tout cas, j'ai compris. Je pense que les personnes qui nous écoutent aussi, en tout cas de ce que je comprends, c'est que oui, parfois, tu as besoin peut-être aussi de faire le vide et de reprendre un peu de distance avec tout ce qui peut se passer autour de toi. Est-ce que... Le fait de faire de l'art comme tu le fais, parce qu'on n'en a pas parlé non plus, mais ça fait quand même aussi partie de toi. Est-ce que c'est aussi quelque chose qui t'aide Voir les choses peut-être autrement, prendre de la distance, t'apaiser quand les périodes sont plus compliquées, des choses comme ça Ou est-ce que ça n'a rien à voir Que c'est possible aussi

  • Speaker #1

    Ça ne peut pas avoir rien à voir. C'est impossible. C'est intrinsèque. C'est à l'intérieur, c'est dedans. L'art, en ce qui me concerne, c'est vraiment quelque chose d'intérieur. Donc, même si de l'extérieur, on a l'impression que ça n'a aucun sens, mon ressenti intérieur joue immanquablement sur ce que je suis en train de faire. Je pense que ça m'aide dans le sens où j'exprime des sentiments, des émotions et que les exprimer, ça fait toujours du bien. Après, ce n'est pas fait pour. Ça veut dire qu'il n'y a pas un message derrière, un message militant ou même victimisant en disant là, ce que je fais, c'est compliqué parce que je ne pense pas Je pense que c'est un merveilleux métier et qui offre de merveilleuses perspectives. Mais oui, bien sûr, mais l'art, de toute façon, ça aide. Enfin, ça aide toujours, je trouve. Donc, savoir, oui, parce que c'est moi, mais ça ne porte pas mon art. Voilà, on va dire ça comme ça.

  • Speaker #0

    C'est la question que je me posais un petit peu, de savoir si c'était l'échappatoire premier, entre guillemets, la source de tes créations. Mais pas forcément.

  • Speaker #1

    Non, pas forcément. Pas toutes. Voilà, exactement.

  • Speaker #0

    Ça a modifié ton rapport à la mort, en termes général de faire ton métier

  • Speaker #1

    Ça m'a permis de revenir à mon essentiel. Alors, c'est un sujet qui me tient un petit peu à cœur, parce qu'on vit dans un monde aujourd'hui qui me dépasse totalement. Et la mort, ça reste quelque chose qui nous unit. Alors, on est tous nés et on va tous mourir. J'ai un petit peu mal à me dire que certaines personnes pensent que ça va se passer autrement, ou qu'ils sont au-dessus de ça, ou voilà. Donc, ce qui m'a... fait grand bien, et j'ai une grande chance de faire ce métier-là et d'être au contact de ces gens-là, c'est que justement, ça m'a permis de comprendre qu'il fallait mettre, et là, ça fait partie aussi de la citation des soins palliatifs, mais qui est une réalité absolument pertinente, c'est qu'on met de la vie dans nos jours.

  • Speaker #0

    C'est très beau.

  • Speaker #1

    Alors en fait, la citation complète, c'est, à défaut de ne pouvoir rajouter des jours à la vie, on rajoute de la vie au jour. Et c'est Un mantra extraordinaire pour moi, parce que c'est le cas. On va de toute façon tous arriver à un moment plus ou moins facilement, plus ou moins rapidement. Nous allons y aller. Et je me suis dit, tous les jours, même les plus difficiles, il faut que j'y mette de la vie à un moment. Il faut que j'aime, il faut que j'aime très fort, beaucoup, beaucoup. Voilà, parce que quand je vais mourir, qu'est-ce qui restera derrière de ma vie si je n'ai pas mis de la vie dedans Donc, ça a forcément créé une essentialité en moi. Quelque chose de... Oui,

  • Speaker #0

    du coup, ça a aussi modifié ta vision de la vie. Après, je pense qu'on va être d'accord toutes les deux pour dire que la vie et la mort, c'est complètement lié. Parce que, comme tu disais, on est pour mourir et que la mort fait partie de la vie. Moi, je sais que c'est une phrase que j'ai mis longtemps à accepter d'entendre. Tu vois, quand j'étais petite, mon père... C'est les premiers grands-parents qui décèdent ou les premiers animaux de compagnie qui partent. Mon père me disait, bah oui, mais c'est la vie. Et je lui disais, mais arrête de me dire que c'est la vie, parce qu'on parle de mort. Donc de quoi tu me parles, en fait Ce n'est pas possible ce que tu me dis. Et j'ai mis longtemps à accepter ça. Je pense que j'ai commencé à l'accepter, d'ailleurs, quand mon propre papa est décédé, tu vois, il y a dix ans. Et en fait, ça a été tellement fort, cette perte, que là, je me suis dit, bah oui, en fait, la mort, elle fait vraiment partie de la vie. Je ne sais plus pourquoi est-ce que j'en suis venue à dire ça, mais...

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on était d'accord sur le fait que ça change le rapport à la vie Oui,

  • Speaker #0

    voilà, c'est ça. Et qu'effectivement, j'ai l'impression, en tout cas c'est très personnel, mais depuis que j'ai inclus ça dans ma tête et dans ma personne et dans ce que je suis, que je vis la vie autrement.

  • Speaker #1

    Alors, en fait, ça paraît encore une fois très bateau, mais comprendre qu'un jour ça va s'arrêter, parce qu'on peut faire un déni, il y a plein de gens qui font un déni. De ça, on se dit non, mais c'est plus tard, non, mais là, je n'ai que 45 ans, je n'ai que 60 ans, puis maintenant, c'est je n'ai que 75 ans On peut faire un déni de ça. Je pense que c'est une erreur. Je pense qu'il vaut mieux accepter que ça va arriver pour justement, contrairement à ce que pensent la plupart des gens, profiter de chaque jour. On entend souvent des gens autour de nous dire plus que quatre jours avant les vacances, c'est un classique Et je les comprends, moi aussi, j'aime partir en vacances. Mais cette petite phrase-là, elle m'embête un tout petit peu. Parce que c'est quand même quatre jours. Et il y a des tas de gens qui aimeraient avoir ces quatre jours. Donc des fois, bien sûr, je suis la première, je ne suis pas infaillible. Mais j'ai tendance à dire, attention, quatre jours, c'est énorme en fait. Ça peut aussi être énorme. Pendant ces quatre jours, on peut faire des tas de choses super bien. On peut faire plaisir à quelqu'un, on peut avoir un fourrir avec quelqu'un. Ce n'est pas des petites choses. Donc quand on accepte le fait qu'il va y avoir une fin, je pense sincèrement... que la vie n'en est que meilleure.

  • Speaker #0

    Après, effectivement, tu vois, j'ai aussi beaucoup cette façon de penser, mais on est humain, tu vois, tu l'as dit, personne n'est un faible. Oui, moi aussi, il y a des jours où je me dis, purée, allez, les vacances, c'est dans trois dodos. Allez, on y va, tu vois. Mais parce que j'ai tellement l'objectif week-end ou vacances, ou alors la semaine a été compliquée au travail ou quoi, ou qu'est-ce, ou voilà, ça arrive. Faut pas s'en vouloir aussi de... Allez, hein.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    c'est humain on est bien français aussi c'est très français de râler alors râlons mais oui par contre je suis assez d'accord de se dire et parfois c'est juste aussi de rappeler des choses simples comme tu l'as dit de se dire ouais ça sera peut-être quatre jours mais pendant ces quatre jours peut-être que on est en plein hiver il fait froid et d'avoir les rayons du soleil ça va me faire du bien ou de rigoler avec quelqu'un de faire plaisir ou qu'on me fasse plaisir aussi et j'avais fait enfin ça me fait beaucoup pensé à ça. J'avais fait un épisode sur la gratitude et je trouve que ça rentre aussi là-dedans de parfois juste avoir de la gratitude et juste avoir un plaisir de se dire Ah, c'est une petite chose, mais vraiment, je l'apprécie. Parfois, ça fait déjà beaucoup de choses, en fait.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Déjà, pas mal. Parce que, comme tu dis, il faut aussi se rappeler qu'il y a des personnes qui aimeraient pouvoir le vivre et qui ne le peuvent pas pour exoulires et craisons. Après, personne n'est là pour... porter tous les malheurs des autres, c'est pas non plus du tout ce que je dis, mais ça fait du bien de relativiser, et de se dire, c'est vrai que moi j'ai la chance de pouvoir le faire.

  • Speaker #1

    Tu sais, je vais rebondir sur ton expression de le relativiser, j'ai envie de te dire, c'est même pas le relativiser, c'est essayer de se mettre en perspective, c'est-à-dire que parfois, on n'arrive pas à justement relativiser, d'ailleurs c'est une expression qui est tellement utilisée et qui est devenue insupportable parfois, mais il faut tout relativiser maintenant de nos jours, je me dis... essayons juste des fois, bon allez, on se met en perspective on se dit juste, bon, aujourd'hui c'est très difficile c'est très compliqué, par exemple je sais pas, il y a trois patients qui vont mourir aujourd'hui, c'est très compliqué ou des gens qui se disent, oh là là, mon papa va bientôt mourir, ou mon cochon d'Inde, et je me moque pas du tout j'ai perdu des cochons d'Inde voilà, je dois l'amener chez le vétérinaire, il va se faire piquer mais ces jours-là, c'est difficile de relativiser, parce qu'on est confronté à des choses qui nous habitent et puis c'est une émotion tellement dure qui prend tellement de place

  • Speaker #0

    que c'est normal. C'est ça,

  • Speaker #1

    tout à fait. Mais du coup, j'allais dire, c'est un petit processus qu'on peut mettre en place parfois en se disant bon, cette journée, elle est un peu compliquée ou elle est un peu nulle. Il y a aussi ces journées qui sont un peu nulles. Mais il faut quand même que de cette journée, j'en sorte quelque chose d'un peu lumineux. Même si c'est tout petit, même si c'est minuscule. Moi, je pense que ça, c'est avoir une chouette vie. Je suis assez née de ça,

  • Speaker #0

    directement. Ce n'est pas toujours facile,

  • Speaker #1

    par contre. Non.

  • Speaker #0

    Mais je trouve que d'essayer de faire l'exercice, de se dire, aujourd'hui, c'est une période sombre, même pas qu'aujourd'hui. En fin d'année dernière, j'ai traversé une période compliquée et j'ai fait l'effort tous les jours de me dire... Allez, qu'est-ce qui s'est passé de bien aujourd'hui Qu'est-ce que tu as apprécié Même on s'en fout, c'est juste... Genre ton chien, il est venu te faire un câlin, tu vois. Enfin, ça peut être tout et n'importe quoi. Mais de faire cet effort-là, je pense que c'est bien d'essayer de le faire. C'est pas toujours facile, surtout quand on est dans un état dépressif ou de dépression ou des choses comme ça. Putain. Mais oui, c'est un exercice qui, je trouve, est important. Parce qu'il faut se rappeler qu'il y a toujours du bon, même dans ce qui n'est pas forcément bien dans la vie. Et la mort, on fait partie.

  • Speaker #1

    Tout à fait, mais tu sais, je crois que ça aussi, finalement, je me fais souvent cette réflexion-là, c'est un excellent exercice pour la suite. Parce que quand les choses se compliquent, parfois on se retrouve avec des personnes qui, voilà, on leur annonce qu'il y a une maladie incurable, quelque chose qui va dégénérer. Et les personnes qui ont rebondi toute leur existence, les personnes qui se sont dit tous les jours, bon là, il faut que je trouve un truc positif. Eh bien, face à la maladie, face à la chose qui va être compliquée, c'est des gens qui vont accepter déjà de l'aide. qui vont me dire, moi par exemple, ce que j'aimerais, c'est avoir un masque de réalité virtuelle pendant mes soins pour pouvoir m'évader le temps que j'ai très très mal. Et ça, c'est très très cool pour moi, d'avoir des gens qui l'ont pratiqué toute leur vie, parce que du coup, ils envisagent la mort de la même manière qu'ils l'ont fait pour la vie. Et du coup, c'est un cercle vertueux. Alors que les personnes qui ont râlé toute leur existence en disant j'ai une vie de caca bouillat et qui n'ont pas... Comment dire Même s'il y a des périodes difficiles, je l'entends, c'est parce que je suis en train de dire, moi aussi, j'ai eu des périodes où je n'arrivais pas toujours à le faire. Mais quand on travaille à ça, très fort, et qu'on y croit à la vie plus que tout, même quand parfois elle est loin, loin, je pense que quand il arrive des petits soucis derrière, c'est plus compliqué. Parce que le travail n'est pas déjà fait, donc on apprend déjà une mauvaise nouvelle, il faut encaisser les chocs, se dire je vais peut-être mourir, et là, il faut apprendre à regarder ce qui est joli. C'est plus compliqué. Oui, mais...

  • Speaker #0

    C'est une mécanique à apprendre, je pense. C'est vraiment un entraînement. C'est comme faire du cardio. J'ai l'impression que c'est un cardio pour l'âme, de se dire...

  • Speaker #1

    Oh là là,

  • Speaker #0

    vraiment une poète. Mais je le vois un peu comme ça, de me dire, entretiens ça. Parce qu'il y a forcément un jour où ça sera d'une utilité viscérale. Et encore une fois, ce n'est pas toujours facile de le faire. Je ne dis pas que tous les jours j'y arrive, ce n'est pas vrai.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Quand mon père est décédé, ce jour-là, clairement... Non, je n'ai pas trouvé de truc positif. Mais quand même, je me dis effectivement, je pense qu'il y a des choses que je prends différemment grâce à cet exercice mental et émotionnel que j'essaye de faire. Et en fait, tout ce que tu me dis, ça me fait vachement penser à un livre que j'ai terminé hier. Et je ne sais pas si tu le connais, c'est un livre qui s'appelle Les oubliés du dimanche de Valérie Perrin. Ça raconte l'histoire d'une nana d'une vingtaine d'années qui est aide-soignante dans une maison de retraite. Et donc, toute l'histoire, c'est un peu... Pourquoi est-ce qu'une nana de 20 ans travaille qu'avec des vieux, qu'elle voit mourir, qu'elle accompagne et tout Et j'ai adoré ce livre parce que je l'ai trouvé hyper poétique. Dans le sens où, elle, ce qu'elle veut, c'est justement accompagner ces personnes âgées jusqu'au bout et surtout de les écouter. Donc, elles les écoutent leur raconter leur histoire, leur vie, en fait. Je trouve ça hyper beau. Et bon, il y a aussi tout le truc de... Les personnes âgées, souvent, sont oubliées de leurs parents, leurs enfants, leurs frères, leurs sœurs et tout. Et donc, c'est pour ça que ça s'appelle les oubliés du dimanche, parce que malheureusement, il y a beaucoup de personnes âgées qui ne sont pas visitées et qui sont oubliées. Et en fait, c'est tout ce que tu disais aussi sur le fait d'être positif, de voir le bon côté des choses, évidemment, quand... quand c'est possible dans la mesure de la raisonnabilité de chacun. Ça m'a fait beaucoup penser à ce livre parce que quand je l'ai refermé, c'est vraiment ce que je me suis dit. Je me suis dit, cette nana, elle a un métier pas facile parce que c'est dur de faire les soins aux personnes âgées, des personnes qui sont malades, qui n'ont pas envie d'être là. Bon, là, il y a beaucoup de choses. En fait, elle arrive à discuter avec eux et ils leur racontent toute leur vie et ça devient leur confidente jusqu'au bout de leur jour. Et ça m'a fait beaucoup penser à ça, tout ce que tu disais préalablement. Donc, si tu ne l'as pas lu, je te le conseille.

  • Speaker #1

    Il y a beaucoup d'ouvrages. Ça a l'air très beau et très poétique, en effet. Après, il y a ça de vrai, c'est que c'est vraiment une chance quand les gens me disent Oh, ma pauvre ou Qu'est-ce que tu as du courage C'est que c'est des choses qui reviennent beaucoup. Pour autant, c'est une vraie chance parce que ça m'a permis de grandir vraiment émotionnellement. Ça ouvre des portes même de pardon, d'apprendre vraiment ce que c'est parce que... Parce qu'on voit effectivement les familles, parce qu'on n'en a pas encore parlé, mais ce qui est difficile aussi, c'est les familles. Difficile pour eux, pour la personne qui va partir, pour moi aussi des fois, pour moi quand c'est moi la famille. mais ce que je veux dire c'est que contrairement à ce qu'on pense ça ne tire pas vers le bas c'est un métier qui élève c'est un métier qui permet de nourrir son intérieur qui permet de se dire mince moi j'ai pas fait ça dans ma vie moi j'aimerais ne pas finir avec ce regret là aussi immanquablement c'est enrichissant on ne peut pas y perdre alors on peut y perdre de l'énergie mais uniquement cela et en ça effectivement ce livre dont tu parlais a l'air intéressant parce que je... Je suis convaincue que non seulement c'est bien, c'est une belle chose d'écouter l'autre dans ce qu'il a à dire, même si pour nous ça n'a pas grand sens parfois, mais pour lui ça en a, pour elle, pour la personne en tout cas. Mais surtout on peut l'utiliser, le manier, élaborer ce qui est en train de se produire pour réussir à nous en faire quelque chose d'autre. Aussi le fait de supporter, de voir l'autre souffrir, de supporter, de voir l'autre nous dire quelque chose qui nous fait du chagrin à nous. Toutes ces choses-là, je pense que ça nous fait grandir en tant que personne. On ne peut être que meilleur après ça. Même si parfois, c'est compliqué.

  • Speaker #0

    C'est ce que j'allais dire. Parfois, ça doit quand même être compliqué. Je pense que c'est peut-être dans ce sens-là que les gens te disent t'es courageuse

  • Speaker #1

    C'est dans le sens où, en effet, comme je te disais, il y a des choses qui font souffrir. C'est-à-dire que l'autre peut nous renvoyer à des choses à nous qui sont douloureuses, qu'il ne faut pas trop titiller parce que ça nous est propre. Mais, et c'est en là que je m'y remets, c'est peut-être nécessaire aussi. Parfois, il faut que ça pique un peu. parfois la vie elle nous met des grandes claques et puis parfois on rencontre une personne qui est là qui nous raconte une histoire similaire on n'a pas trop trop envie de l'écouter parce qu'on se dit ça va piquer et c'est là qu'on se dit est-ce que j'ai pardonné est-ce que j'ai pas pardonné où est-ce que j'en suis moi aussi par rapport à ça quelle personne je suis dans tout ça alors ça ça fait des petites vrilles dans le cerveau je pense normalement que ça nous fait vraiment reconnaître en nous certaines choses évoluer accepter du coup de l'autre aussi beaucoup plus de choses parce que c'est quand on se dit mince, cette personne m'a dit ça, moi ça m'a un peu piqué, le lendemain on revient différent. Il y a un tout petit quelque chose d'un millimètre qui a bougé et ça peut tout changer, ce petit millimètre.

  • Speaker #0

    Je suis encore une fois bien d'accord avec toi.

  • Speaker #1

    Je précise que je ne t'ai pas soudoyée avant.

  • Speaker #0

    Elle m'a donné plein la rumeur. C'est faux. Non mais oui, je suis d'accord avec toi et vraiment le terme d'évoluer, c'est le terme que j'allais dire et puis tu l'as dit. Justement, c'est quoi ton rapport avec la mort des personnes qui peuvent être plus ou moins proches de toi. Donc, ça peut être des proches humains comme des proches animaux. Tu as dit tout à l'heure, tu as évoqué des cochons de rinde. Oui. Comment est-ce que toi, tu vis tout ça, sachant qu'au quotidien, professionnellement, tu le vis aussi déjà Est-ce que ça change quelque chose Est-ce que tu peux nous en parler

  • Speaker #1

    Dans ce que tu dis, en fait, tu ne le dis pas, mais pour autant, c'est ce qu'on appelle le deuil en réalité. On ne va pas passer... Outre ce terme-là, quand bien même je trouve qu'en français, il est balmené. Ce n'est pas un très joli mot, il est tout petit.

  • Speaker #0

    plus, alors que le deuil, c'est grand, grand, immense. C'est long.

  • Speaker #1

    Enfin, ça peut être long.

  • Speaker #0

    Oui, alors, techniquement, alors, je mets de gros, gros guillemets, aussi immense que le deuil. Techniquement, un deuil, ça dure un an. On passe par des phases diverses et variées. Enfin, par trois grandes phases, mais ce que je veux dire, c'est que le deuil, c'est un travail et que chaque deuil est différent selon ce que l'on perd. Parce que le deuil, évidemment, là, dans nos conversations, c'est le deuil d'une personne ou d'un animal, d'un être vivant. Donc, ça engage du vivant. Et on peut aussi devoir faire le deuil d'un emploi, d'une situation.

  • Speaker #1

    Une relation.

  • Speaker #0

    Le deuil, c'est un travail en process. Après, je ne crois pas que parce qu'on voit plein de gens mourir chaque jour, on soit plus prêt à affronter le deuil d'une personne qu'on aime profondément. Le sentiment n'est pas le même et du coup, le processus n'est pas le même. De faire le deuil d'une personne même à laquelle je me suis attachée dans le cadre de mon travail, combien même je les adore. Bien sûr, il y a des fois où je pleure, où je termine la journée en pleurant, ou des fois pas, c'est comme ça. Mais toi, tu parlais de ton papa. Alors moi, c'est un peu plus... Ma situation est un peu... Alors là aussi, un peu plus bateau parce que la première fois que j'ai perdu quelqu'un, c'était ma mamie. C'est ça. Oui, j'avais cinq ans. C'était, j'allais dire, la mamie. C'était elle. Il a fallu que ce soit elle. Elle me tenait la main et j'étais la plus heureuse de la Terre. Elle me tenait la main et tout pouvait s'écoucouler, quoi. Et quand elle ne m'a plus donné la main... Le monde s'est écroulé quand elle ne faisait plus partie physiquement du mien. Et ça a été, pour la petite Cléophée, assez douloureux dedans. Même si j'ai compris que je n'avais pas de prise là-dessus. Et que, par contre, on m'autorisait à pouvoir lui parler encore. Même si peut-être elle ne m'entendrait pas. Et que je pouvais lui parler dans les nuages, au cimetière ou peu importe où. Bon, alors ça a été une première expérience, mais qui a été, j'allais dire, dans un certain sens de la vie. Je sais pas ce que tu veux dire

  • Speaker #1

    C'est la suite logique des choses

  • Speaker #0

    C'était finalement un peu précoce Mais ça restait ma mamie Donc c'était dans l'ordre des choses Je suis pas très fan de cette phrase

  • Speaker #1

    Non mais bon, on se comprend

  • Speaker #0

    Et après, j'ai dû faire le deuil De personnes qui sont toujours vivantes Et c'est aussi compliqué C'est aussi compliqué parce que Encore une fois, le deuil C'est un choc d'abord C'est une sidération Qu'on y soit préparé ou pas Et ensuite, c'est un mélange de je suis triste, j'en veux à la terre entière, pourquoi lui, pourquoi elle, pourquoi il me fait ça à moi, pourquoi il ne s'est pas accroché plus. Bref, tout un petit cafarnaum de choses dont je ne t'apprends rien, mais dont nous parlons parce que c'est la vérité.

  • Speaker #1

    Je pense que c'est bien aussi d'en parler, de se dire que c'est normal de vivre et de ressentir ça. Parfois, ça fait du bien. Il y a peut-être des personnes qui sont en train de traverser des périodes difficiles ou qui en ont envie. traversé et je vous rassure on a tous ressenti potentiellement ce genre d'émotion aussi quoi.

  • Speaker #0

    Oui alors après là je fais état d'un deuil qu'on appelle, c'est pas moi qui le dis ça s'appelle le deuil normal c'est le nom de terme plein de termes et ça s'appelle le deuil normal il se fait comme ça, il y a une sidération avec des émotions très comment dire, presque dans le refus d'entendre ce qui est en train de se passer et Il n'y a aucune information qui passe. Souvent, les yeux sont un peu vides. Les personnes, elles disent oui, oui. Puis en fait, il n'y a rien qui est imprimé. Ça, c'est une première étape qui finit souvent comme assez rapidement. Puis ensuite, arrivent les douleurs aiguës. Ces espèces de gémissements de l'intérieur, où on se dit comment je vais pouvoir faire pour vivre sans lui ou sans elle ou sans eux. Là, on parle de personnes âgées, mais il y a des personnes qui perdent des bébés, des enfants. Comment fait-on pour... Il y a ce moment-là.

  • Speaker #1

    Oui, il y a souvent ce questionnement de comment je vais survivre à ça.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Et en fait, c'est là que tout se joue, tu vois. C'est là où il y a ceux qui vont vivre un deuil normal, entre guillemets. Encore une fois, c'est pas de moi, c'est un terme qui est existant. Le deuil normal, il va être engagé avec le temps. Et c'est là où le temps joue, c'est pas un mythe. Les choses qui étaient aiguës vont devenir supportables et vont laisser place aux souvenirs joyeux avec les personnes qui nous manquent. À partir du moment où les souvenirs joyeux arrivent, on souffle un petit peu. Ça n'enlève ni la peine, ni le manque, ni rien. Mais on a fait place là, on a fait un deuil, un travail de deuil qui reste, ma foi, triste et ça ne remplace pas. Mais le travail est terminé. Puis après, il y a les personnes qui, au petit moment crucial dont on a parlé, prennent une autre direction, qui n'est plus la trajectoire normale. Je ne suis pas du tout en train de dire que ce n'est pas normal réellement. Tout à fait normal. Des personnes qui vont être un peu plus inhibées, qui ne vont pas sortir. Les choses, pas de colère, pas de dépression, pas de pleurs, pas de cris, rien. Donc ces gens-là, comme ils sont dans quelque chose de très inhibé et qu'ils ne le sortent pas, ça sortira un jour, pas tout de suite, mais le deuil n'est pas fait. Et il y a aussi ce qu'on appelle donc du coup des deuils compliqués et des gens qui, sur des années, ne vont jamais accepter. Ils n'arrivent pas à l'acceptation, la fameuse acceptation qu'on espère arriver tout de suite quand ça arrive et qu'on se dit comment je vais faire, je ne vais jamais y arriver, je ne vais jamais réussir à accepter ce qui est en train de se produire Voilà, ça arrive et il y a des solutions pour eux. pour aider ces gens-là, mais pas tous égaux. Et puis, ce n'est pas une science exacte. Parfois, on a l'impression que ça va aller. Et puis, en fait, non.

  • Speaker #1

    On repart un peu en arrière. Je le dis, il faut se faire aider, en fait. C'est vrai que c'est des phases de la vie qui peuvent être extrêmement douloureuses, extrêmement compliquées. On parle beaucoup et souvent de santé mentale sur ce podcast. Et encore une fois, je le dis et je le redis, n'hésitez surtout pas à vous faire aider. Vos proches sont là pour vous soutenir, mais avoir un professionnel de santé qui vous accompagne, C'est mieux. Si vous pouvez le faire, après je sais que ça coûte de l'argent, c'est aussi un investissement personnel et financier. Mais quand on a besoin d'aide, il ne faut vraiment pas hésiter dans la mesure du possible. Encore une fois, je sais que ce n'est pas donné à tout le monde, mais même une séance avec un psychologue, ça peut vraiment soulager, ça peut vraiment faire du bien. Psychologue ou autre thérapeute, kinésio, hypnotiseur.

  • Speaker #0

    Oui, ce qui nous convient.

  • Speaker #1

    Exactement. De ce vers quoi ça vous attire, allez-y. Parce que c'est important, ça fait du bien. Surtout dans ces moments-là, encore plus.

  • Speaker #0

    Tu sais, il y a des phrases qui sont excessivement énervantes parfois, dans ces moments-là. Et moi, il y a une phrase qui m'agace au possible, c'est les gens qui vous disent toutes mes condoléances Ce truc-là, ça m'énerve. Pourquoi Alors, ça m'énerve parce que, en fait, quand on dit ça, on n'ouvre pas la parole à l'autre. C'est-à-dire que la personne qui souffre, on lui dit tais-toi là, n'ouvre pas la bouche Condoléances, bim, hop, c'est réglé, basta, cosi. Ce genre de phrases convenues, ces espèces de choses qu'on dit à tort et à travers parce qu'on ne sait pas quoi dire d'autre, je pense qu'elles font beaucoup de mal. C'est en ça que je rejoins l'idée du professionnel de santé. Mais c'est surtout qu'on a besoin, quand c'est comme ça, d'un climat sécurisant. On a besoin que l'autre nous autorise à parler. En disant toutes mes condoléances, on n'a pas du tout envie de lui dire si tu savais comme je suis au fond du gouffre On n'a pas du tout envie de lui dire ça. On a juste envie de lui dire merci d'être venu. Et c'est ce qu'on se retrouve à dire d'ailleurs. Merci d'être venu. Alors qu'on n'est pas bien, on vit quelque chose de terrible. Je trouve ça dommage. Et c'est en ça qu'effectivement, je suis très d'accord avec toi, sans faire de publicité pour aucun professionnel, parce que je suis aussi d'accord avec toi. Il faut aller vers les professionnels avec lesquels on est à l'aise. Donc aucun jugement par rapport à ça. Mais tu sais, des fois, ça peut être les livres aussi, comme tu as évoqué tout à l'heure. Et il y a un livre qui a été écrit, je pense à ça maintenant, par Catherine Dolthorne, pas Françoise, même si j'aime beaucoup Françoise, mais là en beaucoup on ne sait pas rien pour nous, qui dit que la mort ne laisse jamais rien, que le mort ne nous laisse jamais seul. C'est quelque chose que moi j'ai reçu comme phrase et ça m'a beaucoup aidée, même si c'est un peu douloureux sur le moment. Je me suis dit, bah si, il nous a laissé tout seul. Le mort ne nous a pas laissé seul, il nous a laissé l'amour. Et cette trace, elle est en nous, et on peut et la nommer et la chérir. Donc le fait de le nommer, c'est existant, c'est là. Et si t'es existant, on n'est pas seul. Et si on n'est pas seul, la mort ne nous a pas tout enlevé. Cette petite phrase-là, je la trouve beaucoup plus intéressante que toutes mes condoléances. C'est sûr. Non, mais c'est rien. Mais je préférerais qu'on me dise à moi, ou je pense que t'aurais peut-être préféré qu'on te dise, je suis là, donc on crée un climat sécurisant. C'est... compatir à ta douleur, mais si tu as besoin d'en parler ou pas d'en parler. Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Parce que parfois, on a juste envie de pleurer.

  • Speaker #0

    On a juste envie de rien dire,

  • Speaker #1

    rien faire,

  • Speaker #0

    de regarder une émission à la télé débile. C'est ça.

  • Speaker #1

    Mais juste d'avoir quelqu'un, quoi.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Bien sûr. On a envie d'être avec quelqu'un, pas forcément au départ, en tout cas, d'élaborer des discussions avec lui. Tout à fait. Mais aussi de comprendre que la personne en face, elle sait que pour l'instant, on n'arrive pas à le voir, mais que... tout ce que la personne qui est partie nous a laissé, on pourra la nommer, on pourra la chérir et on peut la garder. Tout n'est pas parti dans la petite boîte.

  • Speaker #1

    C'est mignon dit comme ça, la petite boîte. J'aime bien. C'est très joli. Je suis complètement d'accord avec toi, mais parfois aussi, je pense qu'il y a beaucoup de maladresse de la part des personnes qui font face à la mort, en fait. Face à des morts qui ne te concernent pas directement. Moi, très clairement, tu vois, à l'enterrement de mon papa, je me disais, Il y avait beaucoup de personnes avec qui il avait travaillé. Donc forcément, moi, c'est des personnes que je ne connais pas ou très peu. Et effectivement, il y a eu beaucoup cette phrase de mes condoléances et tout. Et bon, tu sais que d'une part, c'est les convenances, que c'est une histoire de politesse, de bon, il faut dire ça. Moi, j'ai beaucoup de mal avec les trucs de il faut c'est comme ça que ça se passe. Mais bon, c'est comme ça, c'est la société, quoi. Et effectivement... Je l'accepte. Bon, voilà, les personnes ont dit ça, mais parce qu'aussi, je pense qu'il y a un malaise avec la peine de la personne en face de toi, quoi. Ça aussi, c'est quelque chose vraiment... Je comprends qu'on puisse être malaisée, qu'on ne sache pas quoi dire à une personne qui vient de perdre quelqu'un.

  • Speaker #0

    Parfois,

  • Speaker #1

    c'est délicat,

  • Speaker #0

    quoi. Je vais avoir un petit truc à dire, c'est que... Alors, à la fois, je comprends terriblement, mais je pense que là, il y a un manque de dialogue national là-dessus. C'est-à-dire qu'en fait, les gens ne sont pas éduqués à en parler. C'est un petit peu terrible de dire ça, mais je pense que si on nous apprenait à dire que dans ces moments-là, c'est normal d'être là pour l'autre, de lui dire les vrais mots à ceux qu'on nous a dit, de dire du type bon ben, c'était une personne bien, ça s'en fiche Vous voyez ça aussi. Donc pour dire, je pense qu'il y a un manque de dialogue par rapport à la mort, par rapport au deuil aujourd'hui, un réel manquement là-dessus. Si c'était un sujet national, normal, un sujet qu'on a et qui est naturel d'avoir, on aurait des réactions beaucoup plus naturelles. Et cette malaisance dont tu fais part, qui est bien sûr liée aussi à une pudeur, à la gêne et tout, mais peut-être si on expliquait dès la petite enfance que la mort fait partie de la chose, que quand une personne vit ça, elle est triste. Ça va être difficile pour elle pendant quelques temps. Justement, on va lui dire quelque chose qui sort de notre cœur. C'est très peut-être naïf ou quoi, mais... Ce que je veux dire, c'est que je pense qu'il y a un manque cruel de dialogue social là-dessus. On n'en parle jamais. C'est un tabou intégral en France. Dès qu'on en parle, ou alors c'est pour parler de l'euthanasie, on oublie des étapes tellement importantes avant de parler de ça. Déjà, si on arrivait à parler de la nôtre, de ce qu'on aimerait, de ce qui nous fait peur, on arriverait à mieux gérer aussi la peine des autres. Je pense que ce que tu décris, c'est une réalité, mais que je trouve hyper dommage aujourd'hui.

  • Speaker #1

    Je suis complètement de ton avis, parce qu'il y a un vrai problème de fond. C'est vrai que ce que tu dis est complètement vrai. On ne parle pas de la mort, c'est un sujet hyper tabou en France et même dans notre société occidentale, en fait, parce qu'il y a je ne sais combien de civilisations, que ce soit africaines, que ce soit orientales, où en fait la mort est une fête. En fait, on va fêter le fait que cette personne... passe dans un autre monde. Bon, après, chacun sa spiritualité, etc. Mais on va fêter la vie qu'a eue cette personne au moment où elle décède. Alors qu'en France, qu'est-ce que c'est austère de mourir Waouh Enfin, moi, j'ai souvent dit à mes proches et à ma famille, du coup, je vais le dire publiquement, déjà, vous donnez tous les organes que vous pouvez le jour où je pars. Mais en plus,

  • Speaker #0

    il y a eu deux masses d'organes. Oui,

  • Speaker #1

    sauf la peau et les yeux.

  • Speaker #0

    Bon, d'accord, je garderai la peau.

  • Speaker #1

    je continuerai le podcast avec le reste on donne ce qu'on peut donner mais surtout or oui les gens vont être tristes peut-être vous ne pouvez pas non plus m'en censer mais j'aimerais quand même que ça soit qu'on fête ma vie le jour où je meurs qu'on se dise c'est peut-être hyper utopique hyper bisounours tout ce que je dis mais j'aimerais vraiment qu'on se dise qu'on ne se rappelle pas en mode oui Pauline était comme ci et puis quand même c'était quelqu'un de bien et puis elle a fait ci elle a fait ça Ouais, mais en fait, Pauline aussi, c'est la meuf qui faisait parfois n'importe quoi et qu'on se rappelle, j'en sais rien, mes pires cuites, mes pires putes. Enfin, venez, on rigole, en fait. Mais après, je pense que c'est aussi très personnel. Mais ce que je veux dire, c'est que quand je vois que dans certains pays, on fête la mort de quelqu'un pendant des jours et des jours, et oui, on est triste, mais peut-être que cette personne aussi, elle va être soulagée d'être passée ailleurs. Il y a peut-être un moment aussi où c'est mieux que cette personne soit partie, même si c'est toujours trop tôt, même si c'est toujours trop triste. On est bien d'accord. Pour en revenir à mon papa, qui est le plus gros décès que j'ai pu vivre aujourd'hui, mon père est parti du jour au lendemain, il a fait un arrêt cardiaque. Donc, ça a été hyper brutal, hyper soudain, mais c'est une personne qui avait des problèmes cardiaques, qui avait un traitement pour ça, etc., depuis plusieurs années. Et ce traitement avait plein d'effets secondaires. Enfin, moi, mon père, je sais, il en avait... Désolée, je vais être vulgaire, mais il en avait... Ah La casquette, je n'ai pas été si vulgaire. Il en avait vraiment ras-le-bol de son traitement. Alors ouais, quand il est parti, ça a été terrible, ça a été horrible, mais c'est un monsieur qui a toujours aimé boire son Ricard tous les jours, qui fumait énormément, c'était son plaisir. C'est nul, ne fumez pas autant, ne buvez pas autant, mais c'était son plaisir. Et franchement, quand il est parti, je me suis dit, peut-être qu'en fait il va être mieux. Peut-être qu'il va arrêter de souffrir de ces médicaments qui avaient plein d'effets secondaires, et puis peut-être que là où il est maintenant, il peut fumer autant de gitanes qu'il a envie. Et en fait, est-ce que c'est pas mieux comme ça pour lui que d'avoir la vie qu'il... qu'il n'aimait pas. Mais c'est compliqué de dire ça, parfois de dire ça. Parce que ça voudrait dire que je suis OK avec le fait qu'il soit parti. Non. Je suis OK avec le fait que peut-être il est mieux là où il est aujourd'hui.

  • Speaker #0

    T'as dit beaucoup de choses passionnantes. Non, non, non. Tout était très pertinent. T'as dit une première chose sur laquelle je vais quand même rebondir, si tu me le permets, c'est qu'il y a en effet un... déclin du religieux en France, historiquement. Parce qu'auparavant, la religion te donnait la réponse. C'est-à-dire que tu mourrais, t'allais faire un tour du côté des angelots, ou alors carrément te faire piquer dans le Styx avec les gens qui avaient fait le mal. Mais en fait, aujourd'hui, même si on trouve ça un peu rigolo et qu'on en blague, ce déclin-là a fait qu'aujourd'hui, la représentation de la mort en France, elle n'existe pas, elle est hyper complexe et hétérogène. Du coup, les enjeux, ils sont hyper... hyper... hyper difficile à saisir. Aujourd'hui, on a l'impression qu'il faut être soit mourant, soit endeuillé pour pouvoir parler de la mort. On a l'impression que sinon, tout le reste du temps, on peut se passer d'en parler. Ça, c'est une première chose que tu as dit, qui en fait, historiquement, en France, il n'y a jamais eu un déclin du religieux à ce point-là. C'est compréhensible, et c'est un autre débat, mais pour dire que comme il n'y a pas de réponse toute faite, soit on se fait une réponse parce que toi, tu as été confronté à ça, puis que tu es quelqu'un qui réfléchit et qui a envie de se poser des questions là-dessus. Ou alors on peut faire un déni pendant 70 ans et se dire, voilà. Mais je pense qu'il y a une idée de ça avec le religieux, qui n'est pas le cas dans les autres pays que tu citais, qui ont en fait des croyances religieuses qui les portent, et au moment du deuil, ils mettent en place des protocoles qui leur permettent de faire ce travail finalement. Alors que nous aujourd'hui, c'est un peu à volo. Soit c'est à l'église, mais maintenant on peut aussi se faire brûler. Et en fait, les gens ne savent plus vers quoi aller. Pourquoi et dans quel sens Et je ne dis pas qu'il faut trouver quelqu'un qui nous donne un sens unique. Je dis juste que du coup, les personnes ne se posent pas forcément la question. Et voilà. Et ensuite, pour ce que tu disais pour ton papa, de dire c'est peut-être mal, de dire il est parti et c'est peut-être mieux comme ça. Je suis quelqu'un qui peut dire ça bien souvent. Ça ne fait pas de moi une mauvaise personne. Ça ne fait pas de toi une mauvaise personne, Pauline. Ça fait quelqu'un de toi, une bonne personne qui veut qu'il soit heureux, même. quand il n'est pas là avec toi. Donc je pense que ça fait de toi, au contraire, une grande personne. Enlève de ta tête le fait de culpabiliser, de lui souhaiter le meilleur. Parce qu'en fait, tu lui souhaites le meilleur. Et je lui souhaite aussi.

  • Speaker #1

    Je suis sûre, il est trop bien. Ça me rassure peut-être aussi de me dire ça. Mais je suis sûre, il est là où il est.

  • Speaker #0

    Ça te passionnerait Je veux dire, si tu le savais, si tu savais ce qu'il y avait après, s'il y avait quelque chose après. Est-ce que tu crois qu'il y avait quelque chose après

  • Speaker #1

    C'est le prochain sujet que je voulais aborder. La vision de sa propre mort et de ses croyances après. Mais je voulais juste revenir sur cette histoire de tabou qu'on a. Et je pense aussi qu'il y a un point hyper important que j'aimerais aborder, parce que pour l'avoir vécu, encore une fois, je suis un peu tombée des nues. Il y a deux points. C'est que le premier, la mort coûte cher. Oui. Un enterrement coûte très cher. Voilà. Déjà, moi, j'ai été... estomaqué du prix d'un cercueil en fait. Mon papa s'est fait incinérer, c'était son souhait. Du coup, on s'est dit on va prendre le moins cher étant donné que c'est un cercueil qui voulait brûler. Mais le prix...

  • Speaker #0

    Vous ne voyez pas la tête de Pauline, mais ça valait le détour.

  • Speaker #1

    Non mais le prix d'un cercueil... Je mets des guillemets, c'est horrible. C'est un cercueil bas de gamme.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    tu te dis, mais c'est pas possible, ça coûte un SMIC. Enfin, au secours. Et sans parler de tout ce qui est autour de la cérémonie, des faire-parts, des machins,

  • Speaker #0

    des fleurs.

  • Speaker #1

    Ouais, les fleurs. Bon, j'ai été fleuriste dans une autre vie, donc je le dis, les fleurs, ça coûte très cher. Mais c'est ce qui fait vivre les fleuristes. Voilà, je vous le dis. La mort coûte vraiment très cher. Donc, si vous pouvez souscrire à une assurance d'essai qui coûte 5 balles par mois, allez-y, ça fera du bien à vos proches. Attends,

  • Speaker #0

    je te coupe, mais est-ce que tu crois pas, du coup, en disant ça, que ça devrait être... Moi, je vais dire, je milite pour, mais si on en parlait davantage, est-ce que tu crois pas que ça devrait faire partie des choses qu'on devrait réclamer. On réclame des tas de trucs de notre vivant, on va dans la rue, on demande des aides pour des trucs. Je ne juge pas les gens qui demandent des aides de leur vivant. Bien sûr. Mais est-ce que ça ne serait pas normal qu'il y ait aussi des aides pour aider à mourir correctement

  • Speaker #1

    Ce n'est pas normal.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est pas normal. Quand on a beaucoup d'argent, et tant mieux, ce n'est pas la question, on voit arriver la facture, ça va. Mais quand on voit arriver 5 000 euros comme ça, on n'a pas le choix, en fait. Parce que la légalité, en plus la loi, nous oblige. à prendre une décision. Exactement, on n'a pas le choix. C'est ça. On ne nous laisse pas le choix. Ça signifie que le corps de la personne doit aller quelque part. Et donc, ce quelque part est payant. Et dans ce Ausha, il y a une petite part de moi qui me dit Pourquoi personne ne dit jamais rien Pourquoi on accepte de payer aussi cher quelque chose qui est naturel et qu'on va tous vivre Je suis entièrement d'accord.

  • Speaker #1

    Et ça me fait penser à quelque chose que j'ai vécu par procuration. J'ai perdu une amie dans un accident de voiture quand j'avais 18 ans. Et sa famille, vraiment, très peu de moyens. Et du coup, ça a été terrible, déjà, le jour de l'enterrement, d'entendre parler d'argent. Où, en fait, tout le monde autour parlait du fait qu'ils n'avaient pas pu prendre de tombe, parce qu'elle s'est fait enterrer, parce que tout l'argent est déjà parti dans le cercueil, en fait. Et d'entendre qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter la tombe tout de suite, enfin, la pierre tombale et tout. Et je me disais, mais on est en train d'enterrer une nana qui avait un pige. Et on est en train de parler d'argent. Alors, ce n'est pas la faute de sa famille. Enfin, je ne suis pas du tout en train de les blâmer. Bien sûr. Je me dis, en plus de la perte de leur fille, ils sont en plus en train de se poser des questions sur l'argent. Comment ils vont faire et tout. Je trouve ça horrible. C'est pour ça que je dis vraiment, la mort coûte cher. Et vraiment, c'est peut-être très bête ce que je dis, mais moi, quand mon père est mort, un mois après, j'ai souscrit une assurance décès. Et vraiment, ça coûte 5 euros. Ça coûte 5 euros et ça débloque 20 000 euros pour votre famille quand vous allez mourir.

  • Speaker #0

    Tu sais, c'est l'aboutissement absolu de la stupidité et de la cupidité de notre société actuelle. C'est le paroxysme. Ça veut dire que la mort, ça rapporte... Enfin, les morts rapportent plus à rien. Donc, là, il y a une brèche qui s'ouvre. On a un nombre de gens qui arrivent d'un coup et qui vous assomment. Et je trouve ça inhumain, au final. Illogique, inhumain, non naturel. Mais c'est le paroxysme de notre société actuelle. Ça doit aussi... Les gens qui se font de l'argent sur le dos d'autres qui n'en ont pas du tout, juste pour enterrer ou faire incinérer quelqu'un. Oui,

  • Speaker #1

    ça dignement, en fait.

  • Speaker #0

    Ah oui, mais c'est terrible.

  • Speaker #1

    Il y a un minimum qui devrait juste être là et qui devrait être accessible à tous.

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #1

    Et puis après, ceux qui veulent faire plus font plus, selon leurs moyens, selon leurs envies, etc. Chacun fait ce qu'il veut. Mais effectivement, je pense qu'il devrait y avoir juste un minimum.

  • Speaker #0

    Un minimum. tu sais, à une sorte de RSA de la mort.

  • Speaker #1

    Peut-être que ça existe et qu'on n'est pas au courant, mais j'ai pas l'impression. Et tu vois aussi quand on parlait du fait que ça soit tabou, donc le deuxième gros point que je voulais aborder, c'est que c'est tellement tabou qu'on n'est au courant de rien en termes de droits de succession, par exemple. Genre, qu'est-ce qui se passe après qu'un parent soit mort En fait, tu l'apprends hyper frontalement. Tu disais aussi un petit peu tout à l'heure le fait que quand une personne décède, tout ce qui vient juste après va très vite. C'est vrai que suivant où ça se passe, le corps est emmené à la maison funéraire. Je ne crois pas que ça s'appelle maison funéraire. Je pense que je n'ai pas le bon terme, mais on va dire ça comme ça. Le corps est emmené. Après, toi, tu es contacté par les ponts funèbres pour justement parler des modalités. C'est-à-dire combien ça coûte, qu'est-ce que vous voulez faire et tout. Et en fait, tout ça va très vite.

  • Speaker #0

    Et puis après,

  • Speaker #1

    genre quelques semaines après, vient tout ce qui est administratif. Et là, franchement, nous, on est tombés des nues. Donc, mes parents ont été mariés jusqu'à la mort. Et c'est vrai qu'on a appris des choses, des histoires de droits de succession sur la propriété qu'ils avaient. Et tous ces trucs-là, mais qu'est-ce qu'on n'est pas au courant Et justement, je pense qu'on n'est pas au courant et qu'on est mal au courant parce que c'est un sujet hyper tabou en France de qu'est-ce qui se passe après. Ça, tu vois, c'est un truc où, bon, du coup, nous, c'est plus du tout un sujet tabou chez nous parce qu'il a fallu mettre des choses en place pour la suite, parce que ma maman partira un jour, malheureusement. Mais on a mis des choses en place pour ça. On aurait peut-être aimé le faire avant, même que mon père parte, quoi. Ouais, je trouve que c'est... Un des trucs aussi où je me dis, mais il faut que ça cesse, ce tabou autour de la mort et sur l'après-moi. Qu'est-ce qui va se passer Qu'est-ce qui va rester Vraiment en termes pécuniers aussi.

  • Speaker #0

    Le matériel.

  • Speaker #1

    matériel exactement et ça tu vois c'est un truc où j'encourage vraiment beaucoup mon compagnon à en parler avec ses parents parce que je lui dis il faut que tu saches et il faut qu'ils vous disent aussi des choses comment ça va se passer, la mort on n'en parle pas quoi c'est tabou,

  • Speaker #0

    on préfère pas que ça existe limite si on en parle ça va l'apporter tu vois c'est exactement ce que j'allais te dire il y a énormément de gens qui vivent ça comme une superstition ouais carrément si On va en parler, ça va arriver. Et alors, tu remarqueras que si, par exemple, tu es à un repas, avec des gens vivants, évidemment, mais tu vas en parler. Ou alors, ils vont me dire, Cléophée, ça va le boulot en ce moment En fait, ils ne veulent pas vraiment la réponse. Et là, en fait, si j'évoque quelque chose en disant, là, j'ai eu un cas un peu difficile, sans parler déjà d'un cas personnel, donc une distance, les trois quarts du temps, elles me disent, bon, on va changer de sujet, ce n'est pas très gai tout ça. Effectivement, je suis d'accord. Je préfère me fendre la poire sur des choses bien plus... drôle que ça, pour autant c'est quelque chose qu'on partage avec quelqu'un et qui est vraiment puissant. Et donner cette confiance à quelqu'un, lui dire bah voilà, moi par exemple moi j'ai pas envie de me faire brûler ça dure pas des heures en fait,

  • Speaker #1

    c'est important de le dire.

  • Speaker #0

    Mais en fait on est en accord avec soi, la personne en face l'a quand même entendu que ça lui plaise ou non finalement, et il y a une connexion qui se produit et quand la personne décède L'autre personne n'est pas démunie pareil, parce qu'elle se dit je sais ce que je dois faire, je sais ce qu'elle attendait de moi C'est pareil, ça rend le travail du deuil tout autre. Quand on est perdu, moi je rencontre énormément de familles qui n'en ont aucune idée ou qui ne sont pas d'accord avec la personne ou entre eux, ce genre de choses, parce que les débats n'ont jamais eu lieu. Et là où je te rejoins, c'est qu'en plus, au-dessus de tout ce problème-là, il y a les problèmes matériels. Ça veut dire comment on va payer les trucs de maman ou papa. Moi, je ne veux pas payer ci, je ne veux pas payer ça. Et la maison, elle revient à qui et comment. Toutes ces choses-là, en réalité, sans vouloir faire la pub des soins palliatifs, c'est qu'il y a chez nous possibilité d'aider les gens qui rencontrent cette situation-là. Et il ne faut pas hésiter à nous le faire savoir quand on est perdu. Normalement, on voit les gens qui sont perdus. C'est à nous aussi d'être force de proposition là-dessus. J'essaie autant que faire se peut de le faire, mais il y a des personnes. Seulement aujourd'hui, c'est méconnu. Parce qu'en fait, on a l'impression qu'on est tous seuls. On est orphelins de la personne et orphelins tout court. C'est terrible. On est assénés de la mort, on est assénés financièrement, on est assénés et on se dit, il n'y a personne pour m'aider, comment je vais faire pour traverser tout ça Je trouve que ça fait beaucoup. Il y a des personnes qui existent et qui peuvent être ressources pour aider. On peut faire lien avec d'autres disciplines et dire, voilà. vous pouvez contacter telle personne. Il ne faut pas hésiter à demander. Je dis ça pour les personnes qui nous écouteraient et qui se diraient je suis perdue ou ça me fait peur Il ne faut pas hésiter à demander dans des services, même hospitaliers, ils peuvent vous dire de vous rapprocher de telle personne qui peut peut-être vous aider. Ce n'est pas notre travail, mais on a des contacts, on est habitués à travailler avec des personnes. Ça peut aussi soulager un petit peu, à défaut de soulager financièrement et émotionnellement. Techniquement, dans les démarches administratives,

  • Speaker #1

    on peut...

  • Speaker #0

    qui sont lourdes, j'en ai bien conscience, et qui sont les mêmes de notre côté, on va dire un petit peu soulager la chose. Mais j'ai beaucoup de compassion pour tout ce que tu viens de dire, parce que je connais la lourdeur de tout ça. Et encore une fois, je vais te redire la même chose, mais je crois à l'amour et à la parole. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, c'est plus au centre de rien. Et ça me désole, mais si on mettait au centre de tout les dîners de famille, L'amour et la parole, un jour on parlerait tous de la mort, on se dirait bah mince, j'ai pas envie que ça t'arrive Après tout, c'est vrai, on n'a pas envie que ça arrive. Bien sûr que non. Qu'est-ce que ça change de le dire Vous lui avez dit, la personne elle le reçoit, alors elle va peut-être bougonner un truc parce qu'elle est gênée, mais elle l'aura entendu. C'est vachement mieux que de l'entendre quand on est dans sa petite boîte quand même. J'ose espérer. Donc ce tabou-là, je pense que c'est quelque chose vraiment sur lequel je me bats, c'est d'arrêter avec ça. On peut en parler sans pleurer, on peut en parler juste pour en parler, on peut pleurer, évidemment,

  • Speaker #1

    bien sûr.

  • Speaker #0

    Ça peut être quelque chose aussi, finalement, de très factuel, tu vois, de dire, bon voilà, moi, toi tu m'as dit par exemple, tout sauf mes yeux et ma peau, bon,

  • Speaker #1

    comme ça je suis moi qui le sais.

  • Speaker #0

    Je l'ai noté, comme ça, ça ira toujours dans ce sens-là. Mais ce que je veux dire, c'est que quand on aime sincèrement les gens qui nous entourent, Alors moi, j'aime aussi des gens qui ne m'entourent pas parce que j'ai trop d'amour à donner. Mais je veux dire, quand on aime les gens qui nous entourent, c'est quand même... le geste ultime d'amour que de lui dire quand on ne sera plus ensemble, quand on ne vivra plus cet amour, toi et moi, comment on pourra faire au mieux pour que cet amour ne s'effrite pas parce que j'aurais fait ce que tu veux, parce que... finalement, même dans la mort, on se sera aimé. Et dire ça, je sais que peut-être des gens vont dire elle est complètement barjot cette fille mais pourtant, je pense que c'est l'essence de nos existences. C'est la petite flamme à l'intérieur. Bien sûr, elle s'est éteinte pour quelqu'un, mais qu'est-ce qu'on peut faire pour que ça soit moins difficile C'est simplement d'en parler. Alors, je sais, il y a des gens qui vont me dire moi, je ne peux pas dire ça à mes parents On peut toujours. petit à petit, une personne par une personne. Si on laissait un peu plus la parole à des gens qui croient de la mort de temps en temps, on avancerait sur le sujet. Mais on préfère avancer sur des sujets tellement plus futiles. Et c'est bien, hein Faut du futile. Mais quand même. Éluder cette question-là, éluder le qu'est-ce que je veux, qu'est-ce que j'aimerais, avec qui, dire aussi j'ai peur, peut-être. Je suis bien, je suis heureux, là. Et si d'un coup je perdais tout ça, c'est... Quand on réfléchit deux minutes, on se fait waouh, c'est terrible

  • Speaker #1

    Mais c'est dingue aussi de se dire ça.

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Parce que ça veut dire qu'on arrive à se rendre compte de ce qu'on a.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Mais ça, ça fait pas mal.

  • Speaker #1

    Mais il y a beaucoup de pudeur aussi. Je pense qu'il y a beaucoup de personnes qui sont pudiques de ça.

  • Speaker #0

    Oui, mais tu sais, avant, les gens étaient pudiques de dire je suis homosexuelle Et c'était bien dommage. C'est que ça n'a aucun sens. Là, c'est pareil. C'est quelque chose de naturel, c'est quelque chose qui est là. Et je peux le prendre pour. sur plein de sujets. Encore, je l'ai pris cet exemple-là parce qu'il est d'une évidence. Mais de dire, voilà, maintenant j'arrête, je me fous un peu à poil, pas tout le temps, mais là-dessus quand même.

  • Speaker #1

    Oui, puis en plus, on peut le faire de différentes manières.

  • Speaker #0

    On n'est pas obligé de le parler à l'oral.

  • Speaker #1

    On peut aussi l'écrire. On peut utiliser plein de formats différents. On peut faire une note vocale. On peut faire une vidéo. On peut le peindre. évidemment je pense encore à l'expression par l'art pour pallier à la pudeur parce que parfois ça aide beaucoup plutôt que de parler de communiquer ses sentiments et tout et je pense qu'il y a plein de manières différentes pour dire des choses que ça soit autour de la mort ou pas mais parfois ça peut vraiment faire du bien et puis une fois que c'est dit c'est pas un sujet sur lequel on va forcément revenir tous les jours en disant alors du coup allez on va en reparler non c'est bon une fois qu'on a abordé le sujet qu'on est clair là dessus c'est bon On passe à autre chose, on peut reparler des futilités du rouge à lèvres.

  • Speaker #0

    Ce que je veux dire, c'est que du coup, quand la mort arrive, et que tu me parlais du fait que les gens se concentrent sur l'argent, c'est un réflexe psychologique qui est tout à fait normal. C'est très rassurant, c'est très concret. Ça fait flipper parce que c'est beaucoup d'argent, mais c'est très concret. Du coup, ça nous permet d'agir concrètement sur quelque chose qu'on ne maîtrise pas du tout. C'est un côté rassurant. Au début, on se raccroche un peu au démarre, Ausha faire, parce que le faire... le faire à quelque chose de magique qui nous fait oublier que quand on va arrêter de faire,

  • Speaker #1

    ça va faire vivre la chose.

  • Speaker #0

    C'est ça, c'est tout à fait ça. Mais du coup, je maintiens fermement mes positions que peu importe la manière d'en parler, c'était pas la manière dont... Le sujet, ça n'en est pas un, parce qu'effectivement, tu as tout à fait raison, il faut le faire comme on le sent, mais il faut arrêter de faire un déni sociétal. Sur ça, il faut arrêter de cacher les gens dans des EHPAD glauques. Il faut aller, enfin, il faut aussi retrouver le sens de la vie, se dire que ce n'est pas parce qu'on a placé cette personne dans un service qu'elle est heureuse, ou que ça ne remplace pas l'amour de ses enfants, l'amour de son mari.

  • Speaker #1

    Son foyer aussi, d'être chez soi avec ses affaires, ses habitudes, ses odeurs.

  • Speaker #0

    Bien sûr, j'ai de très bonnes blagues, mais ça ne remplace pas... Rires Vous ne voyez pas la tête de Pauline, mais elle est suspicieuse.

  • Speaker #1

    J'attends comme ça.

  • Speaker #0

    C'est que la joie et tout ce que je peux mettre dedans, ça ne remplacera jamais tout ce qu'une famille, un foyer, des habitudes représentent. J'essaye, mais je ne suis pas encore sur rire et chanson. bientôt dans votre radio ici mon sketch je vous le présente allez c'est ce soir on y va tu vois je te mets un jingle et tout ah ouais tu joues quoi parce qu'il faut aller toujours plus loin Pauline promis c'est mon frère qui fait le mixage si tu veux je lui demande de le rajouter s'il vous plaît Si vous m'entendez,

  • Speaker #1

    mettez-moi un chouette jingle pour ma carrière picture. Ça permettra d'alléger cet épisode, ça peut être une bonne idée.

  • Speaker #0

    Tout à l'heure,

  • Speaker #1

    tu m'as posé une question de savoir qu'est-ce qu'il y avait pour moi après Qu'est-ce que j'imagine en tout cas Tout à fait. Du coup, si ça te va, on passe sur le parler de notre propre mort à nous, comment est-ce que on perçoit ça, comment est-ce qu'on peut le voir et tout, pour répondre à ta question. Et c'est marrant parce que j'en ai parlé il n'y a pas très longtemps avec mon copain et... et ma mère et mon frère. Moi, j'imagine que quand on meurt, on se retrouve dans un espace où je ne saurais pas l'expliquer. Genre, c'est très nuageux, très volatil et tout. Et qu'on est dans un espace où il n'y a que les trucs qu'on kiffe. Genre, pour donner une image, moi, mon père, je l'imagine accoudé à un bar et toute la journée ils papotent avec le barman ou avec des gens qui viennent aussi au bar. Et genre, il y a tous ces chiens aussi qui sont dans cet espace-là. Et ils fument ces clopes et ils boissent ces Ricards et ils papotent et ils rigolent comme ça. Et en fait, c'est comme ça que je le vois. Genre, quand je l'ai expliqué à mon copain, il m'a dit Ouais, du coup, pour toi, c'est un peu genre un espèce d'image de paradis. Et je lui dis Bah, un peu, ouais, en fait. Genre, t'es dans un lieu où tu te sens bien, où t'es apaisée et où t'es prêt à accueillir toutes les autres. de personnes qui te sont chères qui vont arriver plus tard. Et moi, je le vois comme ça. Et souvent, je me dis, le jour où je vais partir, je sais que je retrouverai les chiens que j'ai perdus, je retrouverai mon papa. Et du coup, on découle la réponse à la question de est-ce que j'ai peur de mourir Du coup, pas du tout. Moi, limite, c'est très bizarre ce que je vais dire. Limite, j'ai hâte que ça arrive. J'ai hâte de savoir ce qu'il y aura derrière. Alors, je ne dis pas du tout... dans des envies suicidaires. C'est pas du tout moi.

  • Speaker #0

    On va vous poser le numéro, discrètement.

  • Speaker #1

    Aidez-la,

  • Speaker #0

    s'il vous plaît. SOS Amitié, s'il vous plaît. Contactez, répondez.

  • Speaker #1

    Ça fait deux heures qu'on parle, elle commence à me dire des trucs bizarres.

  • Speaker #0

    C'était soit disant un podcast gentil. Elle a commencé à prendre un couteau, je crois. Faites quelque chose.

  • Speaker #1

    Attention, elle a pris la javel. Attends, non

  • Speaker #0

    Pauline,

  • Speaker #1

    nous Donc non, j'ai pas envie de mourir. Enfin, j'ai pas envie de me tuer. Je vous rassure. Raccrochez votre téléphone.

  • Speaker #0

    Elle est toujours en vie pour l'instant.

  • Speaker #1

    Si cet épisode n'est pas publié, c'est que...

  • Speaker #0

    Oh non, on aurait parlé pour rien. J'irais cracher sur ta tombe, Pauline. Yes.

  • Speaker #1

    Bref. Tout ça pour dire qu'effectivement, je n'ai pas peur de mourir. Je n'en suis pas à me dire vite demain. Mais ouais, je suis en mode, on verra ce qui se passera. Je suis déjà contente de ce que j'ai vécu aujourd'hui. Et souvent, quand je dis ça, les gens me disent, oh là là, mais arrête, t'as encore plein de belles choses à vivre. Je leur dis, oui, peut-être, mais en fait, on n'en sait rien. Laissez-moi, je me contente déjà de ce que j'ai eu jusqu'à maintenant et j'en suis déjà très contente. Peut-être qu'effectivement, je vivrai encore mieux plus tard. En fait, personne ne le sait. Donc, c'est pour ça que je suis déjà en... paix de me dire, si je pars demain, je pars demain. Le seul truc, et bon, ça, c'est mon idéal. Si je peux ne pas souffrir, ça fait super, mais on choisit pas trop, en général. Donc, moi, j'ai pas trop peur de mourir. Je me dis, pourquoi pas Ça serait une expérience. Et puis, j'ai vachement ce truc de me dire, je retrouverai sûrement tous ceux qui sont déjà partis avant moi.

  • Speaker #0

    T'imagines un petit cocoon, quoi. Plus qu'un paradis. C'est un paradis, c'est un petit peu... Ton paradis ne serait pas celui de ton papa.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Voilà, mais c'est un cocon dans lequel...

  • Speaker #1

    Ça sera doux, quoi. On dirait bien.

  • Speaker #0

    Ouais, je comprends.

  • Speaker #1

    Je le vois vraiment comme ça. Et toi, comment est-ce que tu perçois ta mort, entre guillemets Enfin, comment est-ce que tu vis ça, le fait de mourir

  • Speaker #0

    J'ai eu peur plus jeune. Je me suis retrouvée dans des situations où j'ai eu très, très peur de mourir. Et aujourd'hui, plus du tout. Aujourd'hui, vraiment plus du tout. Aujourd'hui, moi aussi, je suis en paix avec ça. Alors en fait, c'est un peu la même chose que toi, c'est que je disais, ma mort elle va arriver, c'est très bien comme ça. Elle va arriver, c'est très bien comme ça. Elle arrivera...

  • Speaker #1

    Ça arrivera quand ça arrivera.

  • Speaker #0

    Ouais, mais c'est plutôt bien. Tu sais, moi je crois à rien. C'est un petit peu bizarre à dire. Je crois à rien, j'imagine rien. Alors la seule chose que j'arrive à imaginer, c'est des espèces de fils qu'on ne voit pas nous. Comme s'il y avait plein de fils invisibles qui seraient dans l'air. Et ces fils-là, qu'on ne toucherait pas, qu'ils ne nous toucheraient pas, mais qu'ils nous entourent sans qu'on les voit, seraient le reste de l'amour qui a existé quelque part de quelqu'un à quelqu'un. J'ai du mal à croire que rien ne reste, vraiment. Et je crois vraiment que... Je crois pas que la colère, la haine, toutes ces choses-là, elles restent. Je vois trop de gens. Ce qui reste, c'est... Même quand les gens me disent mon fils n'est pas venu me voir c'est quand même l'amour qui a porté cette phrase-là à un moment donné. Donc, si je devais imaginer quelque chose, même si du coup je me visualise pas dedans comme toi ou plein de gens, Je me dis qu'il ne restera peut-être pas à moi, mais quelque part, peut-être dans un fil, quelque part, il y aura une petite vibration de ce que j'aurais été, de ce que j'aurais voulu et de tout l'amour que j'ai reçu et que j'ai donné. Je suis un peu plus dans cette idée-là. Ok,

  • Speaker #1

    je vois. Je vois complètement. Et par contre, ce que je veux dire, c'est que là aujourd'hui, je dis que je n'ai pas peur de mourir. C'est comme ça que je vois la mort, machin et tout. Je me laisse le choix aussi de changer d'avis. Peut-être que dans le vivant, je dirais que j'ai peur. Enfin, j'en sais rien. Ou peut-être que si demain, on me dit que j'ai une maladie incurable et que je me retrouve avec Cléophée qui s'occupe de moi dans mes derniers jours, je ne dis pas que là, il me dirait pire. Franchement, je pense que je serais bien.

  • Speaker #0

    Après, tu sais, là, on parle dans un absolu où on est en relative bonne santé.

  • Speaker #1

    Et voilà, exactement.

  • Speaker #0

    On va dire que se rajoute à ça la douleur. souffrir en fait. Souffrir, ça change une personne. Avoir mal, c'est-à-dire, même déjà quand on a une très grosse migraine, on n'est plus nous-mêmes, on n'a plus patience, etc. Donc, il y a des facteurs que là, dans notre discussion, qui sont manquants, qui est que il y a la grande souffrance physique ou psychique. Il y a des gens qui se disent je vais mourir et j'ai peur et j'ai peur et j'ai peur et c'est normal.

  • Speaker #1

    Oui, c'est normal.

  • Speaker #0

    J'ai vu personne ne pas avoir peur à un moment, mais j'ai vu des gens... Et alors, je vais dire un truc, alors c'est pas de la magie, mais souvent, quelques jours avant que les gens meurent, ils sont apaisés. Il y a un vrai... Alors, ça a diverses explications. Je ne prends pas de partie dans les explications. Il y a des explications très scientifiques qui expliquent que c'est chimique et qu'il y a plein de choses qui rentrent en jeu. Je pense qu'il y a de ça. Et puis, il y a aussi apparemment quelque chose de plus spirituel qui... passerait et d'un coup il y a un apaisement, un équilibre que les gens trouvent. Et je sais que quand ils en sont là, que la peur est partie, qu'ils vont y aller, tout doucement et tranquillement. Et ça se vérifie dans nombre de cas. Donc là-dessus il y a aussi quelque chose qui est titillant parce que j'ai pas de réponse à te donner, il y a des tas de spécialistes et d'éminents professeurs qui t'en parleraient de manière très cartésienne. et il y a de ça, je pense réellement mais pourquoi ce processus chimique se met en place maintenant, est-ce que la nature est tellement bien faite qu'elle nous protège juste avant ou alors est-ce qu'il y a autre chose qui nous protège ou est-ce que ça a besoin de nous protéger, ça voudrait dire aussi peut-être, je ne sais pas il y a beaucoup de questions dont je n'ai pas les réponses et ça me va de ne pas les avoir mais c'est des choses qu'on voit qu'on observe et qu'on se dit une personne qui est très stressée, très tendue d'un coup, bam il se passe quelque chose, et là, on a l'impression qu'il y a un mieux. C'est ce qu'on appelle le dernier bonjour. Souvent, c'est un bonjour éclatant qui sort de nulle part. Et souvent, la famille croit, croit à un rebondissement et en fait, pas du tout. Des fois, on appelle le lendemain et on dit, elle est partie. Voilà. Juste pour dire que parfois, les choses sont un peu étranges.

  • Speaker #1

    Pour en avoir un petit peu parlé avec des personnes qui côtoient la mort, en fait, comme toi. dont un collègue qui était avant-anatopracteur qui me disait Mais tu sais Pauline, c'est vrai qu'il y a souvent un pic des décès après les fêtes parce que souvent les personnes se disent C'est bon, j'ai vu tout le monde, je peux partir. Ou après un anniversaire, ou après un événement, un truc qui leur tient à cœur ou quoi au caisse. Et quand il m'a dit ça, je lui ai dit Purée, c'est vrai que moi mon père il est parti le lendemain où on a fêté Noël tous ensemble. Et genre vraiment le lendemain quoi. Du coup, ça rejoint carrément ce que tu expliquais, qu'il y a, je pense, une forme d'apaisement ou j'en sais rien, une sorte d'accomplissement ou d'acceptation en se disant allez, c'est bon maintenant, je suis OK, je peux y aller Mais comme tu disais, ça n'enlève rien à la peur qu'on peut avoir et je pense que c'est normal. Je disais j'ai pas peur de mourir encore une fois, je reviens dessus, mais en fait, j'en sais rien de comment est-ce que je vais partir, peut-être que ça se fera en acclapement de doigts et j'aurai pas le temps d'avoir peur. Ou peut-être que je vais flipper pendant des années et des années parce que, je ne sais pas, j'aurai une maladie. Ou voilà, en fait, on n'en sait rien. Mais ouais, je pense qu'il y a vraiment un moment où... Peut-être pas tout le monde, mais il y a peut-être certains êtres humains qui se disent là, j'accepte, c'est OK

  • Speaker #0

    Tu sais, alors ça aussi, j'aime pas le terme, mais j'arrive pas à en trouver un autre, c'est un peu une bagarre que j'ai parfois avec les accompagnants. Parce que quand tu me dis il est parti après les fêtes quelque part, il a peut-être senti qu'il pouvait. Alors tu sais, il y a beaucoup d'exemples, par exemple, tu prends, je pense à un monsieur, Il ne voulait plus manger, ce monsieur. C'était d'une douleur infinie pour lui de manger. Donc, lui nous avait fait part de ça, du fait qu'on allait dé-médicaliser tranquillement, ce qui est très différent de donner la mort. Je le place quand même pour ne pas qu'on se prenne des... Lui avait demandé qu'on arrête petit à petit les soins, parce que lui souffrait beaucoup et que nous, on était au bout de ce qu'on pouvait faire. Donc, ce monsieur, quand sa femme venait, il se forçait à manger. Parce qu'elle lui disait, il faut manger, il faut prendre des forces. Et c'est évidemment compréhensible. Et donc ce monsieur, il souffrait. Donc il vivait pour elle. Il souffrait pour elle. Et un jour, j'ai eu cette discussion très désagréable avec sa femme pour lui dire, vous savez, aussi il y a un moment, il faut lui dire, tu sais, je suis là, mais tu peux partir. Je suis là, mais tu as le droit de lâcher. Et je me suis fait... Pas incendier, mais... Et je l'entends aussi. J'entends que ça peut être pris de manière violente en me disant, mais c'est quand même mon mari, on va quand même pas le laisser mourir comme ça, comme un chien, parce que c'est ce que j'entends, comme un chien. Et je ne suis pas du tout une soignante qui laisse mourir les gens comme des chiens. Mais comme si c'est la volonté de la personne, la personne, elle n'en peut plus, en fait. Simplement, il faut l'autoriser à partir. C'est très, très compliqué, ce schéma-là, ce que je suis en train de dire. Ça va heurter beaucoup de gens. Je ne sais pas ce que ça heurte chaque jour que je travaille.

  • Speaker #1

    J'imagine bien, parce que de toute façon, c'est aussi tout un sujet dans notre pays. Alors là, effectivement, ce dont tu parles, ce n'est pas de l'euthanasie. Pas du tout. Mais ça peut aussi rejoindre ce sujet de la légalisation de l'euthanasie, etc. Je n'ai pas forcément envie qu'on rentre dans le débat.

  • Speaker #0

    Non, ça m'était inutile.

  • Speaker #1

    Je pense aussi que c'est important de dire qu'effectivement... Comme tu le disais très bien, il y a un moment, les personnes sont à bout. C'est la fin. Il n'y a plus rien à faire. Il n'y a plus rien à espérer. Il y a des questionnements qui se posent. Oui. Et les apports gagnants, je pense que c'est effectivement très difficile de lâcher prise en se disant Ok, c'est bon En fait, je reprends beaucoup l'histoire de mon papa. Désolée, c'est un peu trop omniprésent.

  • Speaker #0

    Pas du tout.

  • Speaker #1

    Mais pour moi, c'est un exemple dans le sens où, en fait, On a appris après sa mort que l'état de sa maladie était bien plus grave que ce qu'il nous disait. Et au début, on était un peu en mode, pourquoi il ne nous a pas dit Et en fait, la réponse est venue très vite, c'est qu'il voulait qu'on lui foute la paix. Et c'est son droit. Et il y a plein de gens autour de moi qui m'ont dit, ouais, mais c'est égoïste, si vous avez dit la vérité, peut-être que si. Et puis ça, vous auriez pu vous préparer. De un, t'es jamais préparé. qu'on sache ou qu'on ne sache pas, il serait mort, quoi. Et de deux, on lui a foutu la paix. Enfin, je pense que c'est très dur pour des personnes malades et qui sont transparents avec leur famille, d'avoir une famille qui, toute la journée, va dire Tu ne fais pas ci, non, fais pas ça, ah, tu ne devrais pas faire ça, parce que gna gna. Et puis, ah, migni, et ça, ce n'est pas bon pour toi. Et waouh, waouh, waouh. Il respire encore, on peut profiter de lui ou...

  • Speaker #0

    Comment ça se passe Tout à fait. Et ça, ce n'est vraiment pas une chose... Alors, c'est... C'est une des choses les plus difficiles au quotidien, au boulot. C'est que je suis là pour écouter les familles, au même titre que les personnes que je soigne. Pour autant, c'est les personnes que je soigne qui décident. Ça veut dire que c'est logique. Mais moi aussi. Mais c'est très compliqué. Encore une fois, je reviens sur cette phrase, mais j'ai entendu un nombre de fois, ma mère est morte comme un chien. Non, elle n'est pas morte. Elle a beaucoup souffert. Ça, c'est une réalité. Je sais que ça va heurter, malgré moi, des gens de dire ça. On ne sait pas à l'heure actuelle la vérité de la chose. La plus crue possible, c'est qu'on ne peut pas, on ne sait pas tout soulager. On fait de notre mieux, mais il y a des choses qui sont inévitables. Je ne palie pas à la mort, c'est-à-dire que je ne pourrais pas empêcher que ça arrive. Je ne pourrais pas... Il existe plein de moyens aujourd'hui, etc. Mais il y a des douleurs qui sont au-delà de tout, que l'on ne peut pas entièrement soulager. Il y a des personnes qui arrivent à l'épuisement de supporter ça pour faire plaisir à leur famille. Et là, c'est très compliqué quand arrive ce moment-là, qui est évidemment non seulement compréhensible. Mais je trouve que c'est beau quand quelqu'un dit bon, non, je vais manger parce que ma femme, elle va se tracasser

  • Speaker #1

    C'est une preuve d'amour.

  • Speaker #0

    Mais de l'autre côté, il faut que l'autre personne fasse le chemin et se dise je l'aime tellement Là, ça suffit. Après, il y a trois heures de soins parce que le monsieur, il n'arrive pas à déglutir. On ne peut pas infliger à quelqu'un tout ça pendant des jours et des jours et des jours. Et c'est très compliqué parce que les gens, ils arrivent et disent vous la laissez comme ça, vous avez enlevé la perfusion Je dis, oui, mais votre maman, elle souhaite qu'on m'arrête les soins. On est là pour elle. Si elle change d'avis, je remets immédiatement la perfusion. Pour l'instant, ce qu'elle souhaite, c'est qu'on m'arrête la perfusion parce qu'elle n'en peut plus. Et là, c'est très compliqué parce que tu te retrouves avec des gens qui pensent qu'on maltraite, alors qu'en fait, si on prend un tout petit peu de recul, quelque part, sans le vouloir, c'est inconscient.

  • Speaker #1

    Mais oui, c'est eux qui maltraitent. Alors que toi, tu prends en considération l'avis de la personne qui est concernée.

  • Speaker #0

    C'est mon travail. C'est beaucoup plus facile, je ne jette pas du tout la pierre, ce que je suis en train de faire, ce n'est pas du tout ça, c'est d'essayer de faire comprendre aux gens que quand on va vers eux, qu'on leur dit, vous voyez, votre maman, elle a souhaité qu'on arrête la perfusion, là, elle n'y arrive plus, il faut qu'on en parle, parce que c'est son souhait. Ou par exemple, elle nous a dit dans ses volontés que quand elle en arrivait là, elle souhaitait par exemple une sédation profonde, ce qui ne veut pas dire qu'on tue la personne, ça aussi, je reviens là-dessus. C'est juste, on amène la personne à s'endormir un peu plus tranquillement. Mais ça aussi, on en parle avec les gens. On est là pour eux. Et la famille, c'est très compliqué. Parce qu'ils ont leurs sentiments qui sont très contradictoires. Et puis, qui s'accrochent encore à de l'espoir de quelque chose. C'est dur de leur enlever ça, tu vois. Enlever l'espoir des gens, c'est terrible. Pour moi, il y a tellement d'espoir, c'est terrible. Mais la seule chose... Parfois, effectivement, on se prend un petit peu des murs, mais c'est pour leur bien aussi. Qu'ils comprennent que c'est pour leur bien à tous. Ce n'est pas évident tous les jours.

  • Speaker #1

    De toute façon, la mort est dure pour les vivants. C'est ceux qui restent qui vont vivre avec la mort. Donc, effectivement, ce n'est pas facile. Je pense qu'on a fait le tour pour cet épisode, qui est un épisode délicat, mais qu'on a essayé d'aborder avec bienveillance déjà. et aussi en essayant de montrer que la mort peut avoir de la beauté du positif, que c'est pas toujours une fatalité que de quitter ce monde en tout cas Clophe merci beaucoup mais vraiment merci pour ton intervention dans ce podcast ça a été un plaisir de te recevoir et d'en discuter

  • Speaker #0

    Merci à toi Pauline, ça a été hyper doux et hyper enrichissant pour moi de pouvoir échanger avec toi là-dessus et tu m'as fait... pensé, ça sera ma petite clôture à moi, à une phrase aussi que j'aime beaucoup qui est de dire ce qui m'intéresse c'est d'investir le cœur des gens dans le présent plutôt que d'être incomprise à jamais. Je pense que tu es quelqu'un qui touche au cœur les gens qui sont avec toi et qui sont présents. Donc c'est beaucoup plus important qu'être incomprise à jamais.

  • Speaker #1

    Et bien on va clôturer cet épisode en chialant.

  • Speaker #0

    Non Super. Je t'en prie, c'est moi qui te remercie Pauline.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir partagé ce moment avec nous. Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à en parler autour de vous et sur les réseaux sociaux. Et pour rappel, le podcast à nous deux, c'est un mardi sur deux.

Description

Avant tout attention ⚠ Cet épisode aborde le sujet sensible de la mort 🕊


Cleophée m’accompagne avec toute sa douceur pour discuter de ce sujet délicat mais ô combien important : on parle du deuil, de comment nous avons pu vivre le décès de proche autour de nous, de comment la mort est vu dans notre regard et celui de la société, est-ce qu’on a peur de mourir ? Qu’est ce qu’on imagine après ? 🐦‍⬛


En bref, c’est un sujet qui aborde beaucoup de point et qui j’espère pourra faire du bien à vos cœurs malgré son aspect très lourd 


Pauline ✨


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Salut, bienvenue sur le podcast de a nous deux. Avant de commencer cet épisode, je voulais juste prévenir que celui-ci aborde un sujet très sensible. Aujourd'hui, on va parler de la mort. Préservez-vous si vous traversez une période difficile, si vous êtes sensible en ce moment, si vous êtes en dépression, que vous avez un petit moral, que vous vivez une période de deuil ou que vous êtes en train de vivre. des choses autour de la mort, s'il vous plaît, préservez-vous et n'écoutez peut-être pas cet épisode. Ou venez peut-être l'écouter plus tard, quand cette période difficile sera passée. La mort fait partie de la vie. C'est souvent très bateau comme phrase, mais en fait c'est notre réalité. Comme beaucoup de choses vivantes sur cette planète, on est pour mourir. On peut avoir peur de cela, ou bien l'attendre avec patience. C'est souvent dur à vivre lorsqu'un proche décède. C'est souvent trop tôt, et la période de deuil est délicate. Nous avons tous un rapport différent avec la mort. que ce soit pour nous ou pour les autres. J'ai décidé d'en discuter avec Cléophée. Salut à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast. Aujourd'hui, je suis très contente de vous faire partager cet épisode avec Cléophée, qui m'accompagne pour parler de ce sujet très délicat qui est la mort. Et j'ai voulu inviter Cléophée, enfin, c'est même pas moi qui l'ai invitée forcément. Cléophée est venue à moi pour qu'on puisse notamment parler de ce sujet, parce que Cléophée travaille... dans un service soins palliatifs. Donc, elle accompagne des personnes qui sont en fin de vie. Donc, je trouvais qu'elle était très à même de venir parler de ce sujet de la mort. Cléophée, pour toi, ça fait quoi d'accompagner des personnes qui sont en fin de vie Alors,

  • Speaker #1

    bonjour Pauline. Je suis ravie déjà d'être ici. Je suis ravie qu'on ait cette discussion toutes les deux et qu'on puisse parler de ça, en effet. Alors, du coup, je travaille en tant qu'infirmière en soins palliatifs. Je me suis dit que peut-être il serait bien qu'on définisse un petit peu ce que c'est. Pour que je puisse t'expliquer ce que moi je ressens. Peut-être que tu aies une idée de ce qu'on fait réellement. Car il y a énormément d'idées reçues sur ce service-là. Et je me suis dit qu'on passerait peut-être à côté du sujet si on partait pas d'une définition commune et d'une réalité finalement. Qu'est-ce qu'on fait en soins palliatifs En soins palliatifs, il faut savoir que... On a une idée historique de l'infirmière qui est au chevet du malade, qui tient la main et qui attend que la personne meure. Ça, c'est l'idée que la plupart des gens ont et qu'on attend un cancéreux qui va rester là trois jours et qui va finir par mourir et finalement, on attend la mort. C'est, à mon sens, l'idée un peu reçue qu'ont les gens de manière générale. Sauf que c'est très loin d'être ça. En tout cas, c'est bien plus que ça. Les soins palliatifs aujourd'hui. ce sont des soins qui sont actifs et qui prennent en charge de manière globale les personnes. C'est ce qu'on appelle une prise en charge holistique, c'est-à-dire qui prend en compte la souffrance psychologique, la souffrance sociale et la souffrance spirituelle. Alors, je ne dis pas ça juste pour crâner, je dis ça parce que c'est l'essence même de la philosophie palliative. Palliative, ça veut dire pallier. Pallier, ça veut dire pallier à quoi C'est au curatif, c'est-à-dire au fait de soigner, de guérir. Aujourd'hui, la fonction des soins palliatifs, ce n'est absolument pas de guérir la personne de la pathologie pour laquelle elle vient chez nous. C'est vraiment, au départ, pallier au curatif pour finalement prendre la place du curatif et mettre la personne dans un confort, si je puis dire, un soulagement et qu'il existe soit dans la globalité de la personne. C'est la spécificité. de ce service-là. C'est-à-dire qu'on entend tout ce qu'elle a comme problème physique, comme problème émotionnel, comme problème psychologique, familiaux, et on prend point par point les choses et on essaye d'établir avec elle, et non pas juste dans l'attente de ce qu'elle veut. C'est avec elle de mettre au point un plan qui lui conviendrait pour la laisser dans la dignité de ce qui va se passer. Je ne sais pas si c'était clair.

  • Speaker #0

    Si, si. Et je trouve ça très bien que tu fasses ce point parce que c'est un point C'est vrai qu'on peut avoir un peu cette image comme dans les films de guerre, où tu as l'infirmière qui va être au chevet du soldat qui est en train de partir, où il y a toute une beauté qui n'est pas forcément réaliste, et réalisable non plus, dans ce genre de situation. Donc je trouve ça très bien que tu puisses partager ça et justement l'expliquer. Et j'ai trouvé ça hyper intéressant aussi que tu parles de philosophie palliative, je crois que c'est le terme que tu as employé.

  • Speaker #1

    Oui. Je trouve ça super.

  • Speaker #0

    Enfin super. Je vais employer des termes qui, je pense, ne sont pas appropriés au sujet. Je suis désolée.

  • Speaker #1

    Non, alors tu peux te détendre par rapport à ça, parce qu'on en reparlera plus tard, je pense. Mais les seins palliatifs, ce n'est pas du tout un endroit dans lequel... Ce n'est pas un mouroir, il n'y a pas de tabou. Et on peut sourire et être très joyeuse. Je suis très joyeuse en soins palliatifs. Après, comment dire Les soins palliatifs, il y a bien sûr un côté humain, engageant, dans lequel il faut faire preuve d'empathie. Et je n'ai pas honte de dire d'amour, parce qu'il s'agit de ça, en réalité. Mais il y a cette espèce de dualité avec une... haute technicité des soins qui sont très complets, très complexes. Et aujourd'hui, ce que ignore la plupart des gens, même dans le milieu médical d'ailleurs, c'est qu'on est l'un des services les plus performants en France, c'est-à-dire que la personne, elle vient, non pas pour une pathologie, mais pour l'ensemble de sa pathologie, c'est-à-dire qu'il faut pouvoir donner des soins à la fois cardio, à la fois pneumo, enfin bref. Il faut être prêt un peu à tout et tout gérer. Et c'est un service qui permet du coup d'ouvrir des portes. Et quand tu me parlais de philosophie, alors là, sinon je vais faire honte à mon métier, mais il y a les soins palliatifs. Donc là, le soin, c'est vraiment ce qui est concret. Il y a la médecine palliative. Donc là, c'est un peu, on commence à rentrer dans la philosophie palliative, c'est-à-dire que la médecine palliative, c'est une manière de voir la personne en face. Et aujourd'hui, d'ailleurs, il y a beaucoup de... professionnels de santé qui se disent qu'on devrait prendre la médecine palliative et la mettre à d'autres domaines. Ça veut dire prendre la personne de manière plus globale, entendre ce qu'elle a à nous dire, faire avec elle. Et donc, du coup, de ça est née un peu une philosophie palliative, on en parle aujourd'hui. C'est-à-dire vraiment cette manière de dire je fais quelque chose dans l'unicité de la personne qui est en face de moi. Ok,

  • Speaker #0

    très bien. Oui, c'est pas juste dans l'idée de traiter un point, et je trouve ça très bien que tu en parles, qu'effectivement Les personnes qui travaillent dans le genre de service dans lequel tu es, c'est vrai que vous traitez autant, comme tu disais, des problèmes cardiaques comme des problèmes peut-être psychiatriques, des amputations, enfin je n'en sais rien, tout ce qu'il peut y avoir. Peut-être aussi des personnes qui ont des cancers, des maladies orphelines ou que sais-je. Mais c'est vrai que vous pouvez traiter une personne qui a plusieurs pathologies. Et je trouve que c'est bien de rappeler que oui. effectivement je comprends que ça soit un des services les plus performants parce que vous traitez énormément de choses en fait.

  • Speaker #1

    Oui, alors pour donner une idée, parce que c'est pareil, les gens du coup ils ont du mal à s'approprier ça en se disant quand est-ce qu'on y va finalement Oui j'avoue. Non mais du coup quand est-ce qu'on y va si on a... Alors c'est des pathologies qui peuvent bien sûr être des pathologies cancéreuses, mais les gens n'y pensent pas, mais par exemple il y a 40 millions de personnes au monde qui auraient besoin de soins palliatifs. Donc, il faut se rendre compte un petit peu et des fois, comment dire, lever la tête et se dire combien de gens pourraient être concernés. Il y a une maladie qui, par exemple, est le sida. Aujourd'hui, ça a trait aux soins palliatifs et c'est quelque chose qui est complexe et qui nécessite des soins techniques également. Bien sûr, il y a le cancer, il y a toutes les maladies neurodégénératives auxquelles on pense parce que les gens pensent à Alzheimer, mais il y a Parkinson et puis on a d'autres qui sont attelés. Et puis voilà, toutes les maladies chroniques. On n'a pas besoin d'avoir quelque chose forcément de fulgurant.

  • Speaker #0

    Tu peux être amenée à avoir des patients sur de la longue, voire très longue durée

  • Speaker #1

    On peut en avoir. On va dire que le plaisir quand on est en soins palliatifs, c'est quand quelqu'un rentre dans le service, on nous dit cette personne, elle en a pour six mois. Et que finalement, par tous les soins qu'on a pu lui apporter à tous les niveaux, finalement, au bout d'un an, elle est toujours là. et elle décide de rentrer chez elle pour des raisons qui lui sont personnelles. C'est tout ce que je souhaite aux gens qui rentrent dans mon service.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que tu arrives à prendre de la distance avec justement cet aspect de mort, de perdre les personnes que tu accompagnes pendant des mois Comment est-ce que ça se passe Et aussi, question avant qui peut peut-être être intéressante, depuis combien de temps tu fais ça

  • Speaker #1

    Je fais ça depuis une dizaine d'années, ce qui est déjà un bon petit bagage dans ce service-là. Voilà, alors après, en ce qui concerne le fait d'arriver à le gérer, alors je vais donner ma définition à moi déjà de ce que moi je fais. Parce que là, j'ai fait une description qui est globale et qui concerne l'ensemble des personnes qui travaillent en soins palliatifs. Après, je crois qu'on a chacun notre manière de pratiquer le métier, de le penser. On va dire que moi, j'y mets une part d'intime de moi quand je le fais. C'est-à-dire, bien sûr, mon but, c'est de soulager la douleur, les souffrances, mais j'y mets une part d'intime de moi et en ça, j'essaye toujours d'être joyeuse et douce. Alors certes, parfois c'est une nature, mais c'est très important pour moi. D'être comme ça, ça engage une énergie importante et dans des situations qui sont intenses et bouleversantes. Donc, on peut aussi arriver à un épuisement, arriver à quelque chose auquel je pense qu'il n'est pas bien que j'arrive parce que je n'aiderai pas correctement les personnes en face de moi. Donc, pour arriver à essayer de gérer ça, je pense que je vais dire des choses très, très, très, très tartes. Mais... C'est finalement prendre soin de soi parfois. Et mon petit truc personnel, c'est vraiment d'accepter la solitude. C'est un métier, quand j'y suis, jamais je ne me sens seule. Mais ça crée une sorte de solitude à l'intérieur. Et ça m'a pris un peu de temps avant de comprendre qu'il ne fallait pas toujours foncer tête baissée, encaisser, encaisser, encaisser. Ça m'a pris du temps, mais maintenant j'ai compris ça, qu'il fallait que j'accepte la solitude en moi. Et ça va être, par exemple, le bain. partir une semaine, aller dans le désert et puis voir personne, ne parler à personne et laisser les choses en moi se vivre et je les laisse partir. Voilà. Je ne sais pas si c'était clair.

  • Speaker #0

    Moi, en tout cas, j'ai compris. Je pense que les personnes qui nous écoutent aussi, en tout cas de ce que je comprends, c'est que oui, parfois, tu as besoin peut-être aussi de faire le vide et de reprendre un peu de distance avec tout ce qui peut se passer autour de toi. Est-ce que... Le fait de faire de l'art comme tu le fais, parce qu'on n'en a pas parlé non plus, mais ça fait quand même aussi partie de toi. Est-ce que c'est aussi quelque chose qui t'aide Voir les choses peut-être autrement, prendre de la distance, t'apaiser quand les périodes sont plus compliquées, des choses comme ça Ou est-ce que ça n'a rien à voir Que c'est possible aussi

  • Speaker #1

    Ça ne peut pas avoir rien à voir. C'est impossible. C'est intrinsèque. C'est à l'intérieur, c'est dedans. L'art, en ce qui me concerne, c'est vraiment quelque chose d'intérieur. Donc, même si de l'extérieur, on a l'impression que ça n'a aucun sens, mon ressenti intérieur joue immanquablement sur ce que je suis en train de faire. Je pense que ça m'aide dans le sens où j'exprime des sentiments, des émotions et que les exprimer, ça fait toujours du bien. Après, ce n'est pas fait pour. Ça veut dire qu'il n'y a pas un message derrière, un message militant ou même victimisant en disant là, ce que je fais, c'est compliqué parce que je ne pense pas Je pense que c'est un merveilleux métier et qui offre de merveilleuses perspectives. Mais oui, bien sûr, mais l'art, de toute façon, ça aide. Enfin, ça aide toujours, je trouve. Donc, savoir, oui, parce que c'est moi, mais ça ne porte pas mon art. Voilà, on va dire ça comme ça.

  • Speaker #0

    C'est la question que je me posais un petit peu, de savoir si c'était l'échappatoire premier, entre guillemets, la source de tes créations. Mais pas forcément.

  • Speaker #1

    Non, pas forcément. Pas toutes. Voilà, exactement.

  • Speaker #0

    Ça a modifié ton rapport à la mort, en termes général de faire ton métier

  • Speaker #1

    Ça m'a permis de revenir à mon essentiel. Alors, c'est un sujet qui me tient un petit peu à cœur, parce qu'on vit dans un monde aujourd'hui qui me dépasse totalement. Et la mort, ça reste quelque chose qui nous unit. Alors, on est tous nés et on va tous mourir. J'ai un petit peu mal à me dire que certaines personnes pensent que ça va se passer autrement, ou qu'ils sont au-dessus de ça, ou voilà. Donc, ce qui m'a... fait grand bien, et j'ai une grande chance de faire ce métier-là et d'être au contact de ces gens-là, c'est que justement, ça m'a permis de comprendre qu'il fallait mettre, et là, ça fait partie aussi de la citation des soins palliatifs, mais qui est une réalité absolument pertinente, c'est qu'on met de la vie dans nos jours.

  • Speaker #0

    C'est très beau.

  • Speaker #1

    Alors en fait, la citation complète, c'est, à défaut de ne pouvoir rajouter des jours à la vie, on rajoute de la vie au jour. Et c'est Un mantra extraordinaire pour moi, parce que c'est le cas. On va de toute façon tous arriver à un moment plus ou moins facilement, plus ou moins rapidement. Nous allons y aller. Et je me suis dit, tous les jours, même les plus difficiles, il faut que j'y mette de la vie à un moment. Il faut que j'aime, il faut que j'aime très fort, beaucoup, beaucoup. Voilà, parce que quand je vais mourir, qu'est-ce qui restera derrière de ma vie si je n'ai pas mis de la vie dedans Donc, ça a forcément créé une essentialité en moi. Quelque chose de... Oui,

  • Speaker #0

    du coup, ça a aussi modifié ta vision de la vie. Après, je pense qu'on va être d'accord toutes les deux pour dire que la vie et la mort, c'est complètement lié. Parce que, comme tu disais, on est pour mourir et que la mort fait partie de la vie. Moi, je sais que c'est une phrase que j'ai mis longtemps à accepter d'entendre. Tu vois, quand j'étais petite, mon père... C'est les premiers grands-parents qui décèdent ou les premiers animaux de compagnie qui partent. Mon père me disait, bah oui, mais c'est la vie. Et je lui disais, mais arrête de me dire que c'est la vie, parce qu'on parle de mort. Donc de quoi tu me parles, en fait Ce n'est pas possible ce que tu me dis. Et j'ai mis longtemps à accepter ça. Je pense que j'ai commencé à l'accepter, d'ailleurs, quand mon propre papa est décédé, tu vois, il y a dix ans. Et en fait, ça a été tellement fort, cette perte, que là, je me suis dit, bah oui, en fait, la mort, elle fait vraiment partie de la vie. Je ne sais plus pourquoi est-ce que j'en suis venue à dire ça, mais...

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on était d'accord sur le fait que ça change le rapport à la vie Oui,

  • Speaker #0

    voilà, c'est ça. Et qu'effectivement, j'ai l'impression, en tout cas c'est très personnel, mais depuis que j'ai inclus ça dans ma tête et dans ma personne et dans ce que je suis, que je vis la vie autrement.

  • Speaker #1

    Alors, en fait, ça paraît encore une fois très bateau, mais comprendre qu'un jour ça va s'arrêter, parce qu'on peut faire un déni, il y a plein de gens qui font un déni. De ça, on se dit non, mais c'est plus tard, non, mais là, je n'ai que 45 ans, je n'ai que 60 ans, puis maintenant, c'est je n'ai que 75 ans On peut faire un déni de ça. Je pense que c'est une erreur. Je pense qu'il vaut mieux accepter que ça va arriver pour justement, contrairement à ce que pensent la plupart des gens, profiter de chaque jour. On entend souvent des gens autour de nous dire plus que quatre jours avant les vacances, c'est un classique Et je les comprends, moi aussi, j'aime partir en vacances. Mais cette petite phrase-là, elle m'embête un tout petit peu. Parce que c'est quand même quatre jours. Et il y a des tas de gens qui aimeraient avoir ces quatre jours. Donc des fois, bien sûr, je suis la première, je ne suis pas infaillible. Mais j'ai tendance à dire, attention, quatre jours, c'est énorme en fait. Ça peut aussi être énorme. Pendant ces quatre jours, on peut faire des tas de choses super bien. On peut faire plaisir à quelqu'un, on peut avoir un fourrir avec quelqu'un. Ce n'est pas des petites choses. Donc quand on accepte le fait qu'il va y avoir une fin, je pense sincèrement... que la vie n'en est que meilleure.

  • Speaker #0

    Après, effectivement, tu vois, j'ai aussi beaucoup cette façon de penser, mais on est humain, tu vois, tu l'as dit, personne n'est un faible. Oui, moi aussi, il y a des jours où je me dis, purée, allez, les vacances, c'est dans trois dodos. Allez, on y va, tu vois. Mais parce que j'ai tellement l'objectif week-end ou vacances, ou alors la semaine a été compliquée au travail ou quoi, ou qu'est-ce, ou voilà, ça arrive. Faut pas s'en vouloir aussi de... Allez, hein.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    c'est humain on est bien français aussi c'est très français de râler alors râlons mais oui par contre je suis assez d'accord de se dire et parfois c'est juste aussi de rappeler des choses simples comme tu l'as dit de se dire ouais ça sera peut-être quatre jours mais pendant ces quatre jours peut-être que on est en plein hiver il fait froid et d'avoir les rayons du soleil ça va me faire du bien ou de rigoler avec quelqu'un de faire plaisir ou qu'on me fasse plaisir aussi et j'avais fait enfin ça me fait beaucoup pensé à ça. J'avais fait un épisode sur la gratitude et je trouve que ça rentre aussi là-dedans de parfois juste avoir de la gratitude et juste avoir un plaisir de se dire Ah, c'est une petite chose, mais vraiment, je l'apprécie. Parfois, ça fait déjà beaucoup de choses, en fait.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Déjà, pas mal. Parce que, comme tu dis, il faut aussi se rappeler qu'il y a des personnes qui aimeraient pouvoir le vivre et qui ne le peuvent pas pour exoulires et craisons. Après, personne n'est là pour... porter tous les malheurs des autres, c'est pas non plus du tout ce que je dis, mais ça fait du bien de relativiser, et de se dire, c'est vrai que moi j'ai la chance de pouvoir le faire.

  • Speaker #1

    Tu sais, je vais rebondir sur ton expression de le relativiser, j'ai envie de te dire, c'est même pas le relativiser, c'est essayer de se mettre en perspective, c'est-à-dire que parfois, on n'arrive pas à justement relativiser, d'ailleurs c'est une expression qui est tellement utilisée et qui est devenue insupportable parfois, mais il faut tout relativiser maintenant de nos jours, je me dis... essayons juste des fois, bon allez, on se met en perspective on se dit juste, bon, aujourd'hui c'est très difficile c'est très compliqué, par exemple je sais pas, il y a trois patients qui vont mourir aujourd'hui, c'est très compliqué ou des gens qui se disent, oh là là, mon papa va bientôt mourir, ou mon cochon d'Inde, et je me moque pas du tout j'ai perdu des cochons d'Inde voilà, je dois l'amener chez le vétérinaire, il va se faire piquer mais ces jours-là, c'est difficile de relativiser, parce qu'on est confronté à des choses qui nous habitent et puis c'est une émotion tellement dure qui prend tellement de place

  • Speaker #0

    que c'est normal. C'est ça,

  • Speaker #1

    tout à fait. Mais du coup, j'allais dire, c'est un petit processus qu'on peut mettre en place parfois en se disant bon, cette journée, elle est un peu compliquée ou elle est un peu nulle. Il y a aussi ces journées qui sont un peu nulles. Mais il faut quand même que de cette journée, j'en sorte quelque chose d'un peu lumineux. Même si c'est tout petit, même si c'est minuscule. Moi, je pense que ça, c'est avoir une chouette vie. Je suis assez née de ça,

  • Speaker #0

    directement. Ce n'est pas toujours facile,

  • Speaker #1

    par contre. Non.

  • Speaker #0

    Mais je trouve que d'essayer de faire l'exercice, de se dire, aujourd'hui, c'est une période sombre, même pas qu'aujourd'hui. En fin d'année dernière, j'ai traversé une période compliquée et j'ai fait l'effort tous les jours de me dire... Allez, qu'est-ce qui s'est passé de bien aujourd'hui Qu'est-ce que tu as apprécié Même on s'en fout, c'est juste... Genre ton chien, il est venu te faire un câlin, tu vois. Enfin, ça peut être tout et n'importe quoi. Mais de faire cet effort-là, je pense que c'est bien d'essayer de le faire. C'est pas toujours facile, surtout quand on est dans un état dépressif ou de dépression ou des choses comme ça. Putain. Mais oui, c'est un exercice qui, je trouve, est important. Parce qu'il faut se rappeler qu'il y a toujours du bon, même dans ce qui n'est pas forcément bien dans la vie. Et la mort, on fait partie.

  • Speaker #1

    Tout à fait, mais tu sais, je crois que ça aussi, finalement, je me fais souvent cette réflexion-là, c'est un excellent exercice pour la suite. Parce que quand les choses se compliquent, parfois on se retrouve avec des personnes qui, voilà, on leur annonce qu'il y a une maladie incurable, quelque chose qui va dégénérer. Et les personnes qui ont rebondi toute leur existence, les personnes qui se sont dit tous les jours, bon là, il faut que je trouve un truc positif. Eh bien, face à la maladie, face à la chose qui va être compliquée, c'est des gens qui vont accepter déjà de l'aide. qui vont me dire, moi par exemple, ce que j'aimerais, c'est avoir un masque de réalité virtuelle pendant mes soins pour pouvoir m'évader le temps que j'ai très très mal. Et ça, c'est très très cool pour moi, d'avoir des gens qui l'ont pratiqué toute leur vie, parce que du coup, ils envisagent la mort de la même manière qu'ils l'ont fait pour la vie. Et du coup, c'est un cercle vertueux. Alors que les personnes qui ont râlé toute leur existence en disant j'ai une vie de caca bouillat et qui n'ont pas... Comment dire Même s'il y a des périodes difficiles, je l'entends, c'est parce que je suis en train de dire, moi aussi, j'ai eu des périodes où je n'arrivais pas toujours à le faire. Mais quand on travaille à ça, très fort, et qu'on y croit à la vie plus que tout, même quand parfois elle est loin, loin, je pense que quand il arrive des petits soucis derrière, c'est plus compliqué. Parce que le travail n'est pas déjà fait, donc on apprend déjà une mauvaise nouvelle, il faut encaisser les chocs, se dire je vais peut-être mourir, et là, il faut apprendre à regarder ce qui est joli. C'est plus compliqué. Oui, mais...

  • Speaker #0

    C'est une mécanique à apprendre, je pense. C'est vraiment un entraînement. C'est comme faire du cardio. J'ai l'impression que c'est un cardio pour l'âme, de se dire...

  • Speaker #1

    Oh là là,

  • Speaker #0

    vraiment une poète. Mais je le vois un peu comme ça, de me dire, entretiens ça. Parce qu'il y a forcément un jour où ça sera d'une utilité viscérale. Et encore une fois, ce n'est pas toujours facile de le faire. Je ne dis pas que tous les jours j'y arrive, ce n'est pas vrai.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Quand mon père est décédé, ce jour-là, clairement... Non, je n'ai pas trouvé de truc positif. Mais quand même, je me dis effectivement, je pense qu'il y a des choses que je prends différemment grâce à cet exercice mental et émotionnel que j'essaye de faire. Et en fait, tout ce que tu me dis, ça me fait vachement penser à un livre que j'ai terminé hier. Et je ne sais pas si tu le connais, c'est un livre qui s'appelle Les oubliés du dimanche de Valérie Perrin. Ça raconte l'histoire d'une nana d'une vingtaine d'années qui est aide-soignante dans une maison de retraite. Et donc, toute l'histoire, c'est un peu... Pourquoi est-ce qu'une nana de 20 ans travaille qu'avec des vieux, qu'elle voit mourir, qu'elle accompagne et tout Et j'ai adoré ce livre parce que je l'ai trouvé hyper poétique. Dans le sens où, elle, ce qu'elle veut, c'est justement accompagner ces personnes âgées jusqu'au bout et surtout de les écouter. Donc, elles les écoutent leur raconter leur histoire, leur vie, en fait. Je trouve ça hyper beau. Et bon, il y a aussi tout le truc de... Les personnes âgées, souvent, sont oubliées de leurs parents, leurs enfants, leurs frères, leurs sœurs et tout. Et donc, c'est pour ça que ça s'appelle les oubliés du dimanche, parce que malheureusement, il y a beaucoup de personnes âgées qui ne sont pas visitées et qui sont oubliées. Et en fait, c'est tout ce que tu disais aussi sur le fait d'être positif, de voir le bon côté des choses, évidemment, quand... quand c'est possible dans la mesure de la raisonnabilité de chacun. Ça m'a fait beaucoup penser à ce livre parce que quand je l'ai refermé, c'est vraiment ce que je me suis dit. Je me suis dit, cette nana, elle a un métier pas facile parce que c'est dur de faire les soins aux personnes âgées, des personnes qui sont malades, qui n'ont pas envie d'être là. Bon, là, il y a beaucoup de choses. En fait, elle arrive à discuter avec eux et ils leur racontent toute leur vie et ça devient leur confidente jusqu'au bout de leur jour. Et ça m'a fait beaucoup penser à ça, tout ce que tu disais préalablement. Donc, si tu ne l'as pas lu, je te le conseille.

  • Speaker #1

    Il y a beaucoup d'ouvrages. Ça a l'air très beau et très poétique, en effet. Après, il y a ça de vrai, c'est que c'est vraiment une chance quand les gens me disent Oh, ma pauvre ou Qu'est-ce que tu as du courage C'est que c'est des choses qui reviennent beaucoup. Pour autant, c'est une vraie chance parce que ça m'a permis de grandir vraiment émotionnellement. Ça ouvre des portes même de pardon, d'apprendre vraiment ce que c'est parce que... Parce qu'on voit effectivement les familles, parce qu'on n'en a pas encore parlé, mais ce qui est difficile aussi, c'est les familles. Difficile pour eux, pour la personne qui va partir, pour moi aussi des fois, pour moi quand c'est moi la famille. mais ce que je veux dire c'est que contrairement à ce qu'on pense ça ne tire pas vers le bas c'est un métier qui élève c'est un métier qui permet de nourrir son intérieur qui permet de se dire mince moi j'ai pas fait ça dans ma vie moi j'aimerais ne pas finir avec ce regret là aussi immanquablement c'est enrichissant on ne peut pas y perdre alors on peut y perdre de l'énergie mais uniquement cela et en ça effectivement ce livre dont tu parlais a l'air intéressant parce que je... Je suis convaincue que non seulement c'est bien, c'est une belle chose d'écouter l'autre dans ce qu'il a à dire, même si pour nous ça n'a pas grand sens parfois, mais pour lui ça en a, pour elle, pour la personne en tout cas. Mais surtout on peut l'utiliser, le manier, élaborer ce qui est en train de se produire pour réussir à nous en faire quelque chose d'autre. Aussi le fait de supporter, de voir l'autre souffrir, de supporter, de voir l'autre nous dire quelque chose qui nous fait du chagrin à nous. Toutes ces choses-là, je pense que ça nous fait grandir en tant que personne. On ne peut être que meilleur après ça. Même si parfois, c'est compliqué.

  • Speaker #0

    C'est ce que j'allais dire. Parfois, ça doit quand même être compliqué. Je pense que c'est peut-être dans ce sens-là que les gens te disent t'es courageuse

  • Speaker #1

    C'est dans le sens où, en effet, comme je te disais, il y a des choses qui font souffrir. C'est-à-dire que l'autre peut nous renvoyer à des choses à nous qui sont douloureuses, qu'il ne faut pas trop titiller parce que ça nous est propre. Mais, et c'est en là que je m'y remets, c'est peut-être nécessaire aussi. Parfois, il faut que ça pique un peu. parfois la vie elle nous met des grandes claques et puis parfois on rencontre une personne qui est là qui nous raconte une histoire similaire on n'a pas trop trop envie de l'écouter parce qu'on se dit ça va piquer et c'est là qu'on se dit est-ce que j'ai pardonné est-ce que j'ai pas pardonné où est-ce que j'en suis moi aussi par rapport à ça quelle personne je suis dans tout ça alors ça ça fait des petites vrilles dans le cerveau je pense normalement que ça nous fait vraiment reconnaître en nous certaines choses évoluer accepter du coup de l'autre aussi beaucoup plus de choses parce que c'est quand on se dit mince, cette personne m'a dit ça, moi ça m'a un peu piqué, le lendemain on revient différent. Il y a un tout petit quelque chose d'un millimètre qui a bougé et ça peut tout changer, ce petit millimètre.

  • Speaker #0

    Je suis encore une fois bien d'accord avec toi.

  • Speaker #1

    Je précise que je ne t'ai pas soudoyée avant.

  • Speaker #0

    Elle m'a donné plein la rumeur. C'est faux. Non mais oui, je suis d'accord avec toi et vraiment le terme d'évoluer, c'est le terme que j'allais dire et puis tu l'as dit. Justement, c'est quoi ton rapport avec la mort des personnes qui peuvent être plus ou moins proches de toi. Donc, ça peut être des proches humains comme des proches animaux. Tu as dit tout à l'heure, tu as évoqué des cochons de rinde. Oui. Comment est-ce que toi, tu vis tout ça, sachant qu'au quotidien, professionnellement, tu le vis aussi déjà Est-ce que ça change quelque chose Est-ce que tu peux nous en parler

  • Speaker #1

    Dans ce que tu dis, en fait, tu ne le dis pas, mais pour autant, c'est ce qu'on appelle le deuil en réalité. On ne va pas passer... Outre ce terme-là, quand bien même je trouve qu'en français, il est balmené. Ce n'est pas un très joli mot, il est tout petit.

  • Speaker #0

    plus, alors que le deuil, c'est grand, grand, immense. C'est long.

  • Speaker #1

    Enfin, ça peut être long.

  • Speaker #0

    Oui, alors, techniquement, alors, je mets de gros, gros guillemets, aussi immense que le deuil. Techniquement, un deuil, ça dure un an. On passe par des phases diverses et variées. Enfin, par trois grandes phases, mais ce que je veux dire, c'est que le deuil, c'est un travail et que chaque deuil est différent selon ce que l'on perd. Parce que le deuil, évidemment, là, dans nos conversations, c'est le deuil d'une personne ou d'un animal, d'un être vivant. Donc, ça engage du vivant. Et on peut aussi devoir faire le deuil d'un emploi, d'une situation.

  • Speaker #1

    Une relation.

  • Speaker #0

    Le deuil, c'est un travail en process. Après, je ne crois pas que parce qu'on voit plein de gens mourir chaque jour, on soit plus prêt à affronter le deuil d'une personne qu'on aime profondément. Le sentiment n'est pas le même et du coup, le processus n'est pas le même. De faire le deuil d'une personne même à laquelle je me suis attachée dans le cadre de mon travail, combien même je les adore. Bien sûr, il y a des fois où je pleure, où je termine la journée en pleurant, ou des fois pas, c'est comme ça. Mais toi, tu parlais de ton papa. Alors moi, c'est un peu plus... Ma situation est un peu... Alors là aussi, un peu plus bateau parce que la première fois que j'ai perdu quelqu'un, c'était ma mamie. C'est ça. Oui, j'avais cinq ans. C'était, j'allais dire, la mamie. C'était elle. Il a fallu que ce soit elle. Elle me tenait la main et j'étais la plus heureuse de la Terre. Elle me tenait la main et tout pouvait s'écoucouler, quoi. Et quand elle ne m'a plus donné la main... Le monde s'est écroulé quand elle ne faisait plus partie physiquement du mien. Et ça a été, pour la petite Cléophée, assez douloureux dedans. Même si j'ai compris que je n'avais pas de prise là-dessus. Et que, par contre, on m'autorisait à pouvoir lui parler encore. Même si peut-être elle ne m'entendrait pas. Et que je pouvais lui parler dans les nuages, au cimetière ou peu importe où. Bon, alors ça a été une première expérience, mais qui a été, j'allais dire, dans un certain sens de la vie. Je sais pas ce que tu veux dire

  • Speaker #1

    C'est la suite logique des choses

  • Speaker #0

    C'était finalement un peu précoce Mais ça restait ma mamie Donc c'était dans l'ordre des choses Je suis pas très fan de cette phrase

  • Speaker #1

    Non mais bon, on se comprend

  • Speaker #0

    Et après, j'ai dû faire le deuil De personnes qui sont toujours vivantes Et c'est aussi compliqué C'est aussi compliqué parce que Encore une fois, le deuil C'est un choc d'abord C'est une sidération Qu'on y soit préparé ou pas Et ensuite, c'est un mélange de je suis triste, j'en veux à la terre entière, pourquoi lui, pourquoi elle, pourquoi il me fait ça à moi, pourquoi il ne s'est pas accroché plus. Bref, tout un petit cafarnaum de choses dont je ne t'apprends rien, mais dont nous parlons parce que c'est la vérité.

  • Speaker #1

    Je pense que c'est bien aussi d'en parler, de se dire que c'est normal de vivre et de ressentir ça. Parfois, ça fait du bien. Il y a peut-être des personnes qui sont en train de traverser des périodes difficiles ou qui en ont envie. traversé et je vous rassure on a tous ressenti potentiellement ce genre d'émotion aussi quoi.

  • Speaker #0

    Oui alors après là je fais état d'un deuil qu'on appelle, c'est pas moi qui le dis ça s'appelle le deuil normal c'est le nom de terme plein de termes et ça s'appelle le deuil normal il se fait comme ça, il y a une sidération avec des émotions très comment dire, presque dans le refus d'entendre ce qui est en train de se passer et Il n'y a aucune information qui passe. Souvent, les yeux sont un peu vides. Les personnes, elles disent oui, oui. Puis en fait, il n'y a rien qui est imprimé. Ça, c'est une première étape qui finit souvent comme assez rapidement. Puis ensuite, arrivent les douleurs aiguës. Ces espèces de gémissements de l'intérieur, où on se dit comment je vais pouvoir faire pour vivre sans lui ou sans elle ou sans eux. Là, on parle de personnes âgées, mais il y a des personnes qui perdent des bébés, des enfants. Comment fait-on pour... Il y a ce moment-là.

  • Speaker #1

    Oui, il y a souvent ce questionnement de comment je vais survivre à ça.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Et en fait, c'est là que tout se joue, tu vois. C'est là où il y a ceux qui vont vivre un deuil normal, entre guillemets. Encore une fois, c'est pas de moi, c'est un terme qui est existant. Le deuil normal, il va être engagé avec le temps. Et c'est là où le temps joue, c'est pas un mythe. Les choses qui étaient aiguës vont devenir supportables et vont laisser place aux souvenirs joyeux avec les personnes qui nous manquent. À partir du moment où les souvenirs joyeux arrivent, on souffle un petit peu. Ça n'enlève ni la peine, ni le manque, ni rien. Mais on a fait place là, on a fait un deuil, un travail de deuil qui reste, ma foi, triste et ça ne remplace pas. Mais le travail est terminé. Puis après, il y a les personnes qui, au petit moment crucial dont on a parlé, prennent une autre direction, qui n'est plus la trajectoire normale. Je ne suis pas du tout en train de dire que ce n'est pas normal réellement. Tout à fait normal. Des personnes qui vont être un peu plus inhibées, qui ne vont pas sortir. Les choses, pas de colère, pas de dépression, pas de pleurs, pas de cris, rien. Donc ces gens-là, comme ils sont dans quelque chose de très inhibé et qu'ils ne le sortent pas, ça sortira un jour, pas tout de suite, mais le deuil n'est pas fait. Et il y a aussi ce qu'on appelle donc du coup des deuils compliqués et des gens qui, sur des années, ne vont jamais accepter. Ils n'arrivent pas à l'acceptation, la fameuse acceptation qu'on espère arriver tout de suite quand ça arrive et qu'on se dit comment je vais faire, je ne vais jamais y arriver, je ne vais jamais réussir à accepter ce qui est en train de se produire Voilà, ça arrive et il y a des solutions pour eux. pour aider ces gens-là, mais pas tous égaux. Et puis, ce n'est pas une science exacte. Parfois, on a l'impression que ça va aller. Et puis, en fait, non.

  • Speaker #1

    On repart un peu en arrière. Je le dis, il faut se faire aider, en fait. C'est vrai que c'est des phases de la vie qui peuvent être extrêmement douloureuses, extrêmement compliquées. On parle beaucoup et souvent de santé mentale sur ce podcast. Et encore une fois, je le dis et je le redis, n'hésitez surtout pas à vous faire aider. Vos proches sont là pour vous soutenir, mais avoir un professionnel de santé qui vous accompagne, C'est mieux. Si vous pouvez le faire, après je sais que ça coûte de l'argent, c'est aussi un investissement personnel et financier. Mais quand on a besoin d'aide, il ne faut vraiment pas hésiter dans la mesure du possible. Encore une fois, je sais que ce n'est pas donné à tout le monde, mais même une séance avec un psychologue, ça peut vraiment soulager, ça peut vraiment faire du bien. Psychologue ou autre thérapeute, kinésio, hypnotiseur.

  • Speaker #0

    Oui, ce qui nous convient.

  • Speaker #1

    Exactement. De ce vers quoi ça vous attire, allez-y. Parce que c'est important, ça fait du bien. Surtout dans ces moments-là, encore plus.

  • Speaker #0

    Tu sais, il y a des phrases qui sont excessivement énervantes parfois, dans ces moments-là. Et moi, il y a une phrase qui m'agace au possible, c'est les gens qui vous disent toutes mes condoléances Ce truc-là, ça m'énerve. Pourquoi Alors, ça m'énerve parce que, en fait, quand on dit ça, on n'ouvre pas la parole à l'autre. C'est-à-dire que la personne qui souffre, on lui dit tais-toi là, n'ouvre pas la bouche Condoléances, bim, hop, c'est réglé, basta, cosi. Ce genre de phrases convenues, ces espèces de choses qu'on dit à tort et à travers parce qu'on ne sait pas quoi dire d'autre, je pense qu'elles font beaucoup de mal. C'est en ça que je rejoins l'idée du professionnel de santé. Mais c'est surtout qu'on a besoin, quand c'est comme ça, d'un climat sécurisant. On a besoin que l'autre nous autorise à parler. En disant toutes mes condoléances, on n'a pas du tout envie de lui dire si tu savais comme je suis au fond du gouffre On n'a pas du tout envie de lui dire ça. On a juste envie de lui dire merci d'être venu. Et c'est ce qu'on se retrouve à dire d'ailleurs. Merci d'être venu. Alors qu'on n'est pas bien, on vit quelque chose de terrible. Je trouve ça dommage. Et c'est en ça qu'effectivement, je suis très d'accord avec toi, sans faire de publicité pour aucun professionnel, parce que je suis aussi d'accord avec toi. Il faut aller vers les professionnels avec lesquels on est à l'aise. Donc aucun jugement par rapport à ça. Mais tu sais, des fois, ça peut être les livres aussi, comme tu as évoqué tout à l'heure. Et il y a un livre qui a été écrit, je pense à ça maintenant, par Catherine Dolthorne, pas Françoise, même si j'aime beaucoup Françoise, mais là en beaucoup on ne sait pas rien pour nous, qui dit que la mort ne laisse jamais rien, que le mort ne nous laisse jamais seul. C'est quelque chose que moi j'ai reçu comme phrase et ça m'a beaucoup aidée, même si c'est un peu douloureux sur le moment. Je me suis dit, bah si, il nous a laissé tout seul. Le mort ne nous a pas laissé seul, il nous a laissé l'amour. Et cette trace, elle est en nous, et on peut et la nommer et la chérir. Donc le fait de le nommer, c'est existant, c'est là. Et si t'es existant, on n'est pas seul. Et si on n'est pas seul, la mort ne nous a pas tout enlevé. Cette petite phrase-là, je la trouve beaucoup plus intéressante que toutes mes condoléances. C'est sûr. Non, mais c'est rien. Mais je préférerais qu'on me dise à moi, ou je pense que t'aurais peut-être préféré qu'on te dise, je suis là, donc on crée un climat sécurisant. C'est... compatir à ta douleur, mais si tu as besoin d'en parler ou pas d'en parler. Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Parce que parfois, on a juste envie de pleurer.

  • Speaker #0

    On a juste envie de rien dire,

  • Speaker #1

    rien faire,

  • Speaker #0

    de regarder une émission à la télé débile. C'est ça.

  • Speaker #1

    Mais juste d'avoir quelqu'un, quoi.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Bien sûr. On a envie d'être avec quelqu'un, pas forcément au départ, en tout cas, d'élaborer des discussions avec lui. Tout à fait. Mais aussi de comprendre que la personne en face, elle sait que pour l'instant, on n'arrive pas à le voir, mais que... tout ce que la personne qui est partie nous a laissé, on pourra la nommer, on pourra la chérir et on peut la garder. Tout n'est pas parti dans la petite boîte.

  • Speaker #1

    C'est mignon dit comme ça, la petite boîte. J'aime bien. C'est très joli. Je suis complètement d'accord avec toi, mais parfois aussi, je pense qu'il y a beaucoup de maladresse de la part des personnes qui font face à la mort, en fait. Face à des morts qui ne te concernent pas directement. Moi, très clairement, tu vois, à l'enterrement de mon papa, je me disais, Il y avait beaucoup de personnes avec qui il avait travaillé. Donc forcément, moi, c'est des personnes que je ne connais pas ou très peu. Et effectivement, il y a eu beaucoup cette phrase de mes condoléances et tout. Et bon, tu sais que d'une part, c'est les convenances, que c'est une histoire de politesse, de bon, il faut dire ça. Moi, j'ai beaucoup de mal avec les trucs de il faut c'est comme ça que ça se passe. Mais bon, c'est comme ça, c'est la société, quoi. Et effectivement... Je l'accepte. Bon, voilà, les personnes ont dit ça, mais parce qu'aussi, je pense qu'il y a un malaise avec la peine de la personne en face de toi, quoi. Ça aussi, c'est quelque chose vraiment... Je comprends qu'on puisse être malaisée, qu'on ne sache pas quoi dire à une personne qui vient de perdre quelqu'un.

  • Speaker #0

    Parfois,

  • Speaker #1

    c'est délicat,

  • Speaker #0

    quoi. Je vais avoir un petit truc à dire, c'est que... Alors, à la fois, je comprends terriblement, mais je pense que là, il y a un manque de dialogue national là-dessus. C'est-à-dire qu'en fait, les gens ne sont pas éduqués à en parler. C'est un petit peu terrible de dire ça, mais je pense que si on nous apprenait à dire que dans ces moments-là, c'est normal d'être là pour l'autre, de lui dire les vrais mots à ceux qu'on nous a dit, de dire du type bon ben, c'était une personne bien, ça s'en fiche Vous voyez ça aussi. Donc pour dire, je pense qu'il y a un manque de dialogue par rapport à la mort, par rapport au deuil aujourd'hui, un réel manquement là-dessus. Si c'était un sujet national, normal, un sujet qu'on a et qui est naturel d'avoir, on aurait des réactions beaucoup plus naturelles. Et cette malaisance dont tu fais part, qui est bien sûr liée aussi à une pudeur, à la gêne et tout, mais peut-être si on expliquait dès la petite enfance que la mort fait partie de la chose, que quand une personne vit ça, elle est triste. Ça va être difficile pour elle pendant quelques temps. Justement, on va lui dire quelque chose qui sort de notre cœur. C'est très peut-être naïf ou quoi, mais... Ce que je veux dire, c'est que je pense qu'il y a un manque cruel de dialogue social là-dessus. On n'en parle jamais. C'est un tabou intégral en France. Dès qu'on en parle, ou alors c'est pour parler de l'euthanasie, on oublie des étapes tellement importantes avant de parler de ça. Déjà, si on arrivait à parler de la nôtre, de ce qu'on aimerait, de ce qui nous fait peur, on arriverait à mieux gérer aussi la peine des autres. Je pense que ce que tu décris, c'est une réalité, mais que je trouve hyper dommage aujourd'hui.

  • Speaker #1

    Je suis complètement de ton avis, parce qu'il y a un vrai problème de fond. C'est vrai que ce que tu dis est complètement vrai. On ne parle pas de la mort, c'est un sujet hyper tabou en France et même dans notre société occidentale, en fait, parce qu'il y a je ne sais combien de civilisations, que ce soit africaines, que ce soit orientales, où en fait la mort est une fête. En fait, on va fêter le fait que cette personne... passe dans un autre monde. Bon, après, chacun sa spiritualité, etc. Mais on va fêter la vie qu'a eue cette personne au moment où elle décède. Alors qu'en France, qu'est-ce que c'est austère de mourir Waouh Enfin, moi, j'ai souvent dit à mes proches et à ma famille, du coup, je vais le dire publiquement, déjà, vous donnez tous les organes que vous pouvez le jour où je pars. Mais en plus,

  • Speaker #0

    il y a eu deux masses d'organes. Oui,

  • Speaker #1

    sauf la peau et les yeux.

  • Speaker #0

    Bon, d'accord, je garderai la peau.

  • Speaker #1

    je continuerai le podcast avec le reste on donne ce qu'on peut donner mais surtout or oui les gens vont être tristes peut-être vous ne pouvez pas non plus m'en censer mais j'aimerais quand même que ça soit qu'on fête ma vie le jour où je meurs qu'on se dise c'est peut-être hyper utopique hyper bisounours tout ce que je dis mais j'aimerais vraiment qu'on se dise qu'on ne se rappelle pas en mode oui Pauline était comme ci et puis quand même c'était quelqu'un de bien et puis elle a fait ci elle a fait ça Ouais, mais en fait, Pauline aussi, c'est la meuf qui faisait parfois n'importe quoi et qu'on se rappelle, j'en sais rien, mes pires cuites, mes pires putes. Enfin, venez, on rigole, en fait. Mais après, je pense que c'est aussi très personnel. Mais ce que je veux dire, c'est que quand je vois que dans certains pays, on fête la mort de quelqu'un pendant des jours et des jours, et oui, on est triste, mais peut-être que cette personne aussi, elle va être soulagée d'être passée ailleurs. Il y a peut-être un moment aussi où c'est mieux que cette personne soit partie, même si c'est toujours trop tôt, même si c'est toujours trop triste. On est bien d'accord. Pour en revenir à mon papa, qui est le plus gros décès que j'ai pu vivre aujourd'hui, mon père est parti du jour au lendemain, il a fait un arrêt cardiaque. Donc, ça a été hyper brutal, hyper soudain, mais c'est une personne qui avait des problèmes cardiaques, qui avait un traitement pour ça, etc., depuis plusieurs années. Et ce traitement avait plein d'effets secondaires. Enfin, moi, mon père, je sais, il en avait... Désolée, je vais être vulgaire, mais il en avait... Ah La casquette, je n'ai pas été si vulgaire. Il en avait vraiment ras-le-bol de son traitement. Alors ouais, quand il est parti, ça a été terrible, ça a été horrible, mais c'est un monsieur qui a toujours aimé boire son Ricard tous les jours, qui fumait énormément, c'était son plaisir. C'est nul, ne fumez pas autant, ne buvez pas autant, mais c'était son plaisir. Et franchement, quand il est parti, je me suis dit, peut-être qu'en fait il va être mieux. Peut-être qu'il va arrêter de souffrir de ces médicaments qui avaient plein d'effets secondaires, et puis peut-être que là où il est maintenant, il peut fumer autant de gitanes qu'il a envie. Et en fait, est-ce que c'est pas mieux comme ça pour lui que d'avoir la vie qu'il... qu'il n'aimait pas. Mais c'est compliqué de dire ça, parfois de dire ça. Parce que ça voudrait dire que je suis OK avec le fait qu'il soit parti. Non. Je suis OK avec le fait que peut-être il est mieux là où il est aujourd'hui.

  • Speaker #0

    T'as dit beaucoup de choses passionnantes. Non, non, non. Tout était très pertinent. T'as dit une première chose sur laquelle je vais quand même rebondir, si tu me le permets, c'est qu'il y a en effet un... déclin du religieux en France, historiquement. Parce qu'auparavant, la religion te donnait la réponse. C'est-à-dire que tu mourrais, t'allais faire un tour du côté des angelots, ou alors carrément te faire piquer dans le Styx avec les gens qui avaient fait le mal. Mais en fait, aujourd'hui, même si on trouve ça un peu rigolo et qu'on en blague, ce déclin-là a fait qu'aujourd'hui, la représentation de la mort en France, elle n'existe pas, elle est hyper complexe et hétérogène. Du coup, les enjeux, ils sont hyper... hyper... hyper difficile à saisir. Aujourd'hui, on a l'impression qu'il faut être soit mourant, soit endeuillé pour pouvoir parler de la mort. On a l'impression que sinon, tout le reste du temps, on peut se passer d'en parler. Ça, c'est une première chose que tu as dit, qui en fait, historiquement, en France, il n'y a jamais eu un déclin du religieux à ce point-là. C'est compréhensible, et c'est un autre débat, mais pour dire que comme il n'y a pas de réponse toute faite, soit on se fait une réponse parce que toi, tu as été confronté à ça, puis que tu es quelqu'un qui réfléchit et qui a envie de se poser des questions là-dessus. Ou alors on peut faire un déni pendant 70 ans et se dire, voilà. Mais je pense qu'il y a une idée de ça avec le religieux, qui n'est pas le cas dans les autres pays que tu citais, qui ont en fait des croyances religieuses qui les portent, et au moment du deuil, ils mettent en place des protocoles qui leur permettent de faire ce travail finalement. Alors que nous aujourd'hui, c'est un peu à volo. Soit c'est à l'église, mais maintenant on peut aussi se faire brûler. Et en fait, les gens ne savent plus vers quoi aller. Pourquoi et dans quel sens Et je ne dis pas qu'il faut trouver quelqu'un qui nous donne un sens unique. Je dis juste que du coup, les personnes ne se posent pas forcément la question. Et voilà. Et ensuite, pour ce que tu disais pour ton papa, de dire c'est peut-être mal, de dire il est parti et c'est peut-être mieux comme ça. Je suis quelqu'un qui peut dire ça bien souvent. Ça ne fait pas de moi une mauvaise personne. Ça ne fait pas de toi une mauvaise personne, Pauline. Ça fait quelqu'un de toi, une bonne personne qui veut qu'il soit heureux, même. quand il n'est pas là avec toi. Donc je pense que ça fait de toi, au contraire, une grande personne. Enlève de ta tête le fait de culpabiliser, de lui souhaiter le meilleur. Parce qu'en fait, tu lui souhaites le meilleur. Et je lui souhaite aussi.

  • Speaker #1

    Je suis sûre, il est trop bien. Ça me rassure peut-être aussi de me dire ça. Mais je suis sûre, il est là où il est.

  • Speaker #0

    Ça te passionnerait Je veux dire, si tu le savais, si tu savais ce qu'il y avait après, s'il y avait quelque chose après. Est-ce que tu crois qu'il y avait quelque chose après

  • Speaker #1

    C'est le prochain sujet que je voulais aborder. La vision de sa propre mort et de ses croyances après. Mais je voulais juste revenir sur cette histoire de tabou qu'on a. Et je pense aussi qu'il y a un point hyper important que j'aimerais aborder, parce que pour l'avoir vécu, encore une fois, je suis un peu tombée des nues. Il y a deux points. C'est que le premier, la mort coûte cher. Oui. Un enterrement coûte très cher. Voilà. Déjà, moi, j'ai été... estomaqué du prix d'un cercueil en fait. Mon papa s'est fait incinérer, c'était son souhait. Du coup, on s'est dit on va prendre le moins cher étant donné que c'est un cercueil qui voulait brûler. Mais le prix...

  • Speaker #0

    Vous ne voyez pas la tête de Pauline, mais ça valait le détour.

  • Speaker #1

    Non mais le prix d'un cercueil... Je mets des guillemets, c'est horrible. C'est un cercueil bas de gamme.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    tu te dis, mais c'est pas possible, ça coûte un SMIC. Enfin, au secours. Et sans parler de tout ce qui est autour de la cérémonie, des faire-parts, des machins,

  • Speaker #0

    des fleurs.

  • Speaker #1

    Ouais, les fleurs. Bon, j'ai été fleuriste dans une autre vie, donc je le dis, les fleurs, ça coûte très cher. Mais c'est ce qui fait vivre les fleuristes. Voilà, je vous le dis. La mort coûte vraiment très cher. Donc, si vous pouvez souscrire à une assurance d'essai qui coûte 5 balles par mois, allez-y, ça fera du bien à vos proches. Attends,

  • Speaker #0

    je te coupe, mais est-ce que tu crois pas, du coup, en disant ça, que ça devrait être... Moi, je vais dire, je milite pour, mais si on en parlait davantage, est-ce que tu crois pas que ça devrait faire partie des choses qu'on devrait réclamer. On réclame des tas de trucs de notre vivant, on va dans la rue, on demande des aides pour des trucs. Je ne juge pas les gens qui demandent des aides de leur vivant. Bien sûr. Mais est-ce que ça ne serait pas normal qu'il y ait aussi des aides pour aider à mourir correctement

  • Speaker #1

    Ce n'est pas normal.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est pas normal. Quand on a beaucoup d'argent, et tant mieux, ce n'est pas la question, on voit arriver la facture, ça va. Mais quand on voit arriver 5 000 euros comme ça, on n'a pas le choix, en fait. Parce que la légalité, en plus la loi, nous oblige. à prendre une décision. Exactement, on n'a pas le choix. C'est ça. On ne nous laisse pas le choix. Ça signifie que le corps de la personne doit aller quelque part. Et donc, ce quelque part est payant. Et dans ce Ausha, il y a une petite part de moi qui me dit Pourquoi personne ne dit jamais rien Pourquoi on accepte de payer aussi cher quelque chose qui est naturel et qu'on va tous vivre Je suis entièrement d'accord.

  • Speaker #1

    Et ça me fait penser à quelque chose que j'ai vécu par procuration. J'ai perdu une amie dans un accident de voiture quand j'avais 18 ans. Et sa famille, vraiment, très peu de moyens. Et du coup, ça a été terrible, déjà, le jour de l'enterrement, d'entendre parler d'argent. Où, en fait, tout le monde autour parlait du fait qu'ils n'avaient pas pu prendre de tombe, parce qu'elle s'est fait enterrer, parce que tout l'argent est déjà parti dans le cercueil, en fait. Et d'entendre qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter la tombe tout de suite, enfin, la pierre tombale et tout. Et je me disais, mais on est en train d'enterrer une nana qui avait un pige. Et on est en train de parler d'argent. Alors, ce n'est pas la faute de sa famille. Enfin, je ne suis pas du tout en train de les blâmer. Bien sûr. Je me dis, en plus de la perte de leur fille, ils sont en plus en train de se poser des questions sur l'argent. Comment ils vont faire et tout. Je trouve ça horrible. C'est pour ça que je dis vraiment, la mort coûte cher. Et vraiment, c'est peut-être très bête ce que je dis, mais moi, quand mon père est mort, un mois après, j'ai souscrit une assurance décès. Et vraiment, ça coûte 5 euros. Ça coûte 5 euros et ça débloque 20 000 euros pour votre famille quand vous allez mourir.

  • Speaker #0

    Tu sais, c'est l'aboutissement absolu de la stupidité et de la cupidité de notre société actuelle. C'est le paroxysme. Ça veut dire que la mort, ça rapporte... Enfin, les morts rapportent plus à rien. Donc, là, il y a une brèche qui s'ouvre. On a un nombre de gens qui arrivent d'un coup et qui vous assomment. Et je trouve ça inhumain, au final. Illogique, inhumain, non naturel. Mais c'est le paroxysme de notre société actuelle. Ça doit aussi... Les gens qui se font de l'argent sur le dos d'autres qui n'en ont pas du tout, juste pour enterrer ou faire incinérer quelqu'un. Oui,

  • Speaker #1

    ça dignement, en fait.

  • Speaker #0

    Ah oui, mais c'est terrible.

  • Speaker #1

    Il y a un minimum qui devrait juste être là et qui devrait être accessible à tous.

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #1

    Et puis après, ceux qui veulent faire plus font plus, selon leurs moyens, selon leurs envies, etc. Chacun fait ce qu'il veut. Mais effectivement, je pense qu'il devrait y avoir juste un minimum.

  • Speaker #0

    Un minimum. tu sais, à une sorte de RSA de la mort.

  • Speaker #1

    Peut-être que ça existe et qu'on n'est pas au courant, mais j'ai pas l'impression. Et tu vois aussi quand on parlait du fait que ça soit tabou, donc le deuxième gros point que je voulais aborder, c'est que c'est tellement tabou qu'on n'est au courant de rien en termes de droits de succession, par exemple. Genre, qu'est-ce qui se passe après qu'un parent soit mort En fait, tu l'apprends hyper frontalement. Tu disais aussi un petit peu tout à l'heure le fait que quand une personne décède, tout ce qui vient juste après va très vite. C'est vrai que suivant où ça se passe, le corps est emmené à la maison funéraire. Je ne crois pas que ça s'appelle maison funéraire. Je pense que je n'ai pas le bon terme, mais on va dire ça comme ça. Le corps est emmené. Après, toi, tu es contacté par les ponts funèbres pour justement parler des modalités. C'est-à-dire combien ça coûte, qu'est-ce que vous voulez faire et tout. Et en fait, tout ça va très vite.

  • Speaker #0

    Et puis après,

  • Speaker #1

    genre quelques semaines après, vient tout ce qui est administratif. Et là, franchement, nous, on est tombés des nues. Donc, mes parents ont été mariés jusqu'à la mort. Et c'est vrai qu'on a appris des choses, des histoires de droits de succession sur la propriété qu'ils avaient. Et tous ces trucs-là, mais qu'est-ce qu'on n'est pas au courant Et justement, je pense qu'on n'est pas au courant et qu'on est mal au courant parce que c'est un sujet hyper tabou en France de qu'est-ce qui se passe après. Ça, tu vois, c'est un truc où, bon, du coup, nous, c'est plus du tout un sujet tabou chez nous parce qu'il a fallu mettre des choses en place pour la suite, parce que ma maman partira un jour, malheureusement. Mais on a mis des choses en place pour ça. On aurait peut-être aimé le faire avant, même que mon père parte, quoi. Ouais, je trouve que c'est... Un des trucs aussi où je me dis, mais il faut que ça cesse, ce tabou autour de la mort et sur l'après-moi. Qu'est-ce qui va se passer Qu'est-ce qui va rester Vraiment en termes pécuniers aussi.

  • Speaker #0

    Le matériel.

  • Speaker #1

    matériel exactement et ça tu vois c'est un truc où j'encourage vraiment beaucoup mon compagnon à en parler avec ses parents parce que je lui dis il faut que tu saches et il faut qu'ils vous disent aussi des choses comment ça va se passer, la mort on n'en parle pas quoi c'est tabou,

  • Speaker #0

    on préfère pas que ça existe limite si on en parle ça va l'apporter tu vois c'est exactement ce que j'allais te dire il y a énormément de gens qui vivent ça comme une superstition ouais carrément si On va en parler, ça va arriver. Et alors, tu remarqueras que si, par exemple, tu es à un repas, avec des gens vivants, évidemment, mais tu vas en parler. Ou alors, ils vont me dire, Cléophée, ça va le boulot en ce moment En fait, ils ne veulent pas vraiment la réponse. Et là, en fait, si j'évoque quelque chose en disant, là, j'ai eu un cas un peu difficile, sans parler déjà d'un cas personnel, donc une distance, les trois quarts du temps, elles me disent, bon, on va changer de sujet, ce n'est pas très gai tout ça. Effectivement, je suis d'accord. Je préfère me fendre la poire sur des choses bien plus... drôle que ça, pour autant c'est quelque chose qu'on partage avec quelqu'un et qui est vraiment puissant. Et donner cette confiance à quelqu'un, lui dire bah voilà, moi par exemple moi j'ai pas envie de me faire brûler ça dure pas des heures en fait,

  • Speaker #1

    c'est important de le dire.

  • Speaker #0

    Mais en fait on est en accord avec soi, la personne en face l'a quand même entendu que ça lui plaise ou non finalement, et il y a une connexion qui se produit et quand la personne décède L'autre personne n'est pas démunie pareil, parce qu'elle se dit je sais ce que je dois faire, je sais ce qu'elle attendait de moi C'est pareil, ça rend le travail du deuil tout autre. Quand on est perdu, moi je rencontre énormément de familles qui n'en ont aucune idée ou qui ne sont pas d'accord avec la personne ou entre eux, ce genre de choses, parce que les débats n'ont jamais eu lieu. Et là où je te rejoins, c'est qu'en plus, au-dessus de tout ce problème-là, il y a les problèmes matériels. Ça veut dire comment on va payer les trucs de maman ou papa. Moi, je ne veux pas payer ci, je ne veux pas payer ça. Et la maison, elle revient à qui et comment. Toutes ces choses-là, en réalité, sans vouloir faire la pub des soins palliatifs, c'est qu'il y a chez nous possibilité d'aider les gens qui rencontrent cette situation-là. Et il ne faut pas hésiter à nous le faire savoir quand on est perdu. Normalement, on voit les gens qui sont perdus. C'est à nous aussi d'être force de proposition là-dessus. J'essaie autant que faire se peut de le faire, mais il y a des personnes. Seulement aujourd'hui, c'est méconnu. Parce qu'en fait, on a l'impression qu'on est tous seuls. On est orphelins de la personne et orphelins tout court. C'est terrible. On est assénés de la mort, on est assénés financièrement, on est assénés et on se dit, il n'y a personne pour m'aider, comment je vais faire pour traverser tout ça Je trouve que ça fait beaucoup. Il y a des personnes qui existent et qui peuvent être ressources pour aider. On peut faire lien avec d'autres disciplines et dire, voilà. vous pouvez contacter telle personne. Il ne faut pas hésiter à demander. Je dis ça pour les personnes qui nous écouteraient et qui se diraient je suis perdue ou ça me fait peur Il ne faut pas hésiter à demander dans des services, même hospitaliers, ils peuvent vous dire de vous rapprocher de telle personne qui peut peut-être vous aider. Ce n'est pas notre travail, mais on a des contacts, on est habitués à travailler avec des personnes. Ça peut aussi soulager un petit peu, à défaut de soulager financièrement et émotionnellement. Techniquement, dans les démarches administratives,

  • Speaker #1

    on peut...

  • Speaker #0

    qui sont lourdes, j'en ai bien conscience, et qui sont les mêmes de notre côté, on va dire un petit peu soulager la chose. Mais j'ai beaucoup de compassion pour tout ce que tu viens de dire, parce que je connais la lourdeur de tout ça. Et encore une fois, je vais te redire la même chose, mais je crois à l'amour et à la parole. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, c'est plus au centre de rien. Et ça me désole, mais si on mettait au centre de tout les dîners de famille, L'amour et la parole, un jour on parlerait tous de la mort, on se dirait bah mince, j'ai pas envie que ça t'arrive Après tout, c'est vrai, on n'a pas envie que ça arrive. Bien sûr que non. Qu'est-ce que ça change de le dire Vous lui avez dit, la personne elle le reçoit, alors elle va peut-être bougonner un truc parce qu'elle est gênée, mais elle l'aura entendu. C'est vachement mieux que de l'entendre quand on est dans sa petite boîte quand même. J'ose espérer. Donc ce tabou-là, je pense que c'est quelque chose vraiment sur lequel je me bats, c'est d'arrêter avec ça. On peut en parler sans pleurer, on peut en parler juste pour en parler, on peut pleurer, évidemment,

  • Speaker #1

    bien sûr.

  • Speaker #0

    Ça peut être quelque chose aussi, finalement, de très factuel, tu vois, de dire, bon voilà, moi, toi tu m'as dit par exemple, tout sauf mes yeux et ma peau, bon,

  • Speaker #1

    comme ça je suis moi qui le sais.

  • Speaker #0

    Je l'ai noté, comme ça, ça ira toujours dans ce sens-là. Mais ce que je veux dire, c'est que quand on aime sincèrement les gens qui nous entourent, Alors moi, j'aime aussi des gens qui ne m'entourent pas parce que j'ai trop d'amour à donner. Mais je veux dire, quand on aime les gens qui nous entourent, c'est quand même... le geste ultime d'amour que de lui dire quand on ne sera plus ensemble, quand on ne vivra plus cet amour, toi et moi, comment on pourra faire au mieux pour que cet amour ne s'effrite pas parce que j'aurais fait ce que tu veux, parce que... finalement, même dans la mort, on se sera aimé. Et dire ça, je sais que peut-être des gens vont dire elle est complètement barjot cette fille mais pourtant, je pense que c'est l'essence de nos existences. C'est la petite flamme à l'intérieur. Bien sûr, elle s'est éteinte pour quelqu'un, mais qu'est-ce qu'on peut faire pour que ça soit moins difficile C'est simplement d'en parler. Alors, je sais, il y a des gens qui vont me dire moi, je ne peux pas dire ça à mes parents On peut toujours. petit à petit, une personne par une personne. Si on laissait un peu plus la parole à des gens qui croient de la mort de temps en temps, on avancerait sur le sujet. Mais on préfère avancer sur des sujets tellement plus futiles. Et c'est bien, hein Faut du futile. Mais quand même. Éluder cette question-là, éluder le qu'est-ce que je veux, qu'est-ce que j'aimerais, avec qui, dire aussi j'ai peur, peut-être. Je suis bien, je suis heureux, là. Et si d'un coup je perdais tout ça, c'est... Quand on réfléchit deux minutes, on se fait waouh, c'est terrible

  • Speaker #1

    Mais c'est dingue aussi de se dire ça.

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Parce que ça veut dire qu'on arrive à se rendre compte de ce qu'on a.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Mais ça, ça fait pas mal.

  • Speaker #1

    Mais il y a beaucoup de pudeur aussi. Je pense qu'il y a beaucoup de personnes qui sont pudiques de ça.

  • Speaker #0

    Oui, mais tu sais, avant, les gens étaient pudiques de dire je suis homosexuelle Et c'était bien dommage. C'est que ça n'a aucun sens. Là, c'est pareil. C'est quelque chose de naturel, c'est quelque chose qui est là. Et je peux le prendre pour. sur plein de sujets. Encore, je l'ai pris cet exemple-là parce qu'il est d'une évidence. Mais de dire, voilà, maintenant j'arrête, je me fous un peu à poil, pas tout le temps, mais là-dessus quand même.

  • Speaker #1

    Oui, puis en plus, on peut le faire de différentes manières.

  • Speaker #0

    On n'est pas obligé de le parler à l'oral.

  • Speaker #1

    On peut aussi l'écrire. On peut utiliser plein de formats différents. On peut faire une note vocale. On peut faire une vidéo. On peut le peindre. évidemment je pense encore à l'expression par l'art pour pallier à la pudeur parce que parfois ça aide beaucoup plutôt que de parler de communiquer ses sentiments et tout et je pense qu'il y a plein de manières différentes pour dire des choses que ça soit autour de la mort ou pas mais parfois ça peut vraiment faire du bien et puis une fois que c'est dit c'est pas un sujet sur lequel on va forcément revenir tous les jours en disant alors du coup allez on va en reparler non c'est bon une fois qu'on a abordé le sujet qu'on est clair là dessus c'est bon On passe à autre chose, on peut reparler des futilités du rouge à lèvres.

  • Speaker #0

    Ce que je veux dire, c'est que du coup, quand la mort arrive, et que tu me parlais du fait que les gens se concentrent sur l'argent, c'est un réflexe psychologique qui est tout à fait normal. C'est très rassurant, c'est très concret. Ça fait flipper parce que c'est beaucoup d'argent, mais c'est très concret. Du coup, ça nous permet d'agir concrètement sur quelque chose qu'on ne maîtrise pas du tout. C'est un côté rassurant. Au début, on se raccroche un peu au démarre, Ausha faire, parce que le faire... le faire à quelque chose de magique qui nous fait oublier que quand on va arrêter de faire,

  • Speaker #1

    ça va faire vivre la chose.

  • Speaker #0

    C'est ça, c'est tout à fait ça. Mais du coup, je maintiens fermement mes positions que peu importe la manière d'en parler, c'était pas la manière dont... Le sujet, ça n'en est pas un, parce qu'effectivement, tu as tout à fait raison, il faut le faire comme on le sent, mais il faut arrêter de faire un déni sociétal. Sur ça, il faut arrêter de cacher les gens dans des EHPAD glauques. Il faut aller, enfin, il faut aussi retrouver le sens de la vie, se dire que ce n'est pas parce qu'on a placé cette personne dans un service qu'elle est heureuse, ou que ça ne remplace pas l'amour de ses enfants, l'amour de son mari.

  • Speaker #1

    Son foyer aussi, d'être chez soi avec ses affaires, ses habitudes, ses odeurs.

  • Speaker #0

    Bien sûr, j'ai de très bonnes blagues, mais ça ne remplace pas... Rires Vous ne voyez pas la tête de Pauline, mais elle est suspicieuse.

  • Speaker #1

    J'attends comme ça.

  • Speaker #0

    C'est que la joie et tout ce que je peux mettre dedans, ça ne remplacera jamais tout ce qu'une famille, un foyer, des habitudes représentent. J'essaye, mais je ne suis pas encore sur rire et chanson. bientôt dans votre radio ici mon sketch je vous le présente allez c'est ce soir on y va tu vois je te mets un jingle et tout ah ouais tu joues quoi parce qu'il faut aller toujours plus loin Pauline promis c'est mon frère qui fait le mixage si tu veux je lui demande de le rajouter s'il vous plaît Si vous m'entendez,

  • Speaker #1

    mettez-moi un chouette jingle pour ma carrière picture. Ça permettra d'alléger cet épisode, ça peut être une bonne idée.

  • Speaker #0

    Tout à l'heure,

  • Speaker #1

    tu m'as posé une question de savoir qu'est-ce qu'il y avait pour moi après Qu'est-ce que j'imagine en tout cas Tout à fait. Du coup, si ça te va, on passe sur le parler de notre propre mort à nous, comment est-ce que on perçoit ça, comment est-ce qu'on peut le voir et tout, pour répondre à ta question. Et c'est marrant parce que j'en ai parlé il n'y a pas très longtemps avec mon copain et... et ma mère et mon frère. Moi, j'imagine que quand on meurt, on se retrouve dans un espace où je ne saurais pas l'expliquer. Genre, c'est très nuageux, très volatil et tout. Et qu'on est dans un espace où il n'y a que les trucs qu'on kiffe. Genre, pour donner une image, moi, mon père, je l'imagine accoudé à un bar et toute la journée ils papotent avec le barman ou avec des gens qui viennent aussi au bar. Et genre, il y a tous ces chiens aussi qui sont dans cet espace-là. Et ils fument ces clopes et ils boissent ces Ricards et ils papotent et ils rigolent comme ça. Et en fait, c'est comme ça que je le vois. Genre, quand je l'ai expliqué à mon copain, il m'a dit Ouais, du coup, pour toi, c'est un peu genre un espèce d'image de paradis. Et je lui dis Bah, un peu, ouais, en fait. Genre, t'es dans un lieu où tu te sens bien, où t'es apaisée et où t'es prêt à accueillir toutes les autres. de personnes qui te sont chères qui vont arriver plus tard. Et moi, je le vois comme ça. Et souvent, je me dis, le jour où je vais partir, je sais que je retrouverai les chiens que j'ai perdus, je retrouverai mon papa. Et du coup, on découle la réponse à la question de est-ce que j'ai peur de mourir Du coup, pas du tout. Moi, limite, c'est très bizarre ce que je vais dire. Limite, j'ai hâte que ça arrive. J'ai hâte de savoir ce qu'il y aura derrière. Alors, je ne dis pas du tout... dans des envies suicidaires. C'est pas du tout moi.

  • Speaker #0

    On va vous poser le numéro, discrètement.

  • Speaker #1

    Aidez-la,

  • Speaker #0

    s'il vous plaît. SOS Amitié, s'il vous plaît. Contactez, répondez.

  • Speaker #1

    Ça fait deux heures qu'on parle, elle commence à me dire des trucs bizarres.

  • Speaker #0

    C'était soit disant un podcast gentil. Elle a commencé à prendre un couteau, je crois. Faites quelque chose.

  • Speaker #1

    Attention, elle a pris la javel. Attends, non

  • Speaker #0

    Pauline,

  • Speaker #1

    nous Donc non, j'ai pas envie de mourir. Enfin, j'ai pas envie de me tuer. Je vous rassure. Raccrochez votre téléphone.

  • Speaker #0

    Elle est toujours en vie pour l'instant.

  • Speaker #1

    Si cet épisode n'est pas publié, c'est que...

  • Speaker #0

    Oh non, on aurait parlé pour rien. J'irais cracher sur ta tombe, Pauline. Yes.

  • Speaker #1

    Bref. Tout ça pour dire qu'effectivement, je n'ai pas peur de mourir. Je n'en suis pas à me dire vite demain. Mais ouais, je suis en mode, on verra ce qui se passera. Je suis déjà contente de ce que j'ai vécu aujourd'hui. Et souvent, quand je dis ça, les gens me disent, oh là là, mais arrête, t'as encore plein de belles choses à vivre. Je leur dis, oui, peut-être, mais en fait, on n'en sait rien. Laissez-moi, je me contente déjà de ce que j'ai eu jusqu'à maintenant et j'en suis déjà très contente. Peut-être qu'effectivement, je vivrai encore mieux plus tard. En fait, personne ne le sait. Donc, c'est pour ça que je suis déjà en... paix de me dire, si je pars demain, je pars demain. Le seul truc, et bon, ça, c'est mon idéal. Si je peux ne pas souffrir, ça fait super, mais on choisit pas trop, en général. Donc, moi, j'ai pas trop peur de mourir. Je me dis, pourquoi pas Ça serait une expérience. Et puis, j'ai vachement ce truc de me dire, je retrouverai sûrement tous ceux qui sont déjà partis avant moi.

  • Speaker #0

    T'imagines un petit cocoon, quoi. Plus qu'un paradis. C'est un paradis, c'est un petit peu... Ton paradis ne serait pas celui de ton papa.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Voilà, mais c'est un cocon dans lequel...

  • Speaker #1

    Ça sera doux, quoi. On dirait bien.

  • Speaker #0

    Ouais, je comprends.

  • Speaker #1

    Je le vois vraiment comme ça. Et toi, comment est-ce que tu perçois ta mort, entre guillemets Enfin, comment est-ce que tu vis ça, le fait de mourir

  • Speaker #0

    J'ai eu peur plus jeune. Je me suis retrouvée dans des situations où j'ai eu très, très peur de mourir. Et aujourd'hui, plus du tout. Aujourd'hui, vraiment plus du tout. Aujourd'hui, moi aussi, je suis en paix avec ça. Alors en fait, c'est un peu la même chose que toi, c'est que je disais, ma mort elle va arriver, c'est très bien comme ça. Elle va arriver, c'est très bien comme ça. Elle arrivera...

  • Speaker #1

    Ça arrivera quand ça arrivera.

  • Speaker #0

    Ouais, mais c'est plutôt bien. Tu sais, moi je crois à rien. C'est un petit peu bizarre à dire. Je crois à rien, j'imagine rien. Alors la seule chose que j'arrive à imaginer, c'est des espèces de fils qu'on ne voit pas nous. Comme s'il y avait plein de fils invisibles qui seraient dans l'air. Et ces fils-là, qu'on ne toucherait pas, qu'ils ne nous toucheraient pas, mais qu'ils nous entourent sans qu'on les voit, seraient le reste de l'amour qui a existé quelque part de quelqu'un à quelqu'un. J'ai du mal à croire que rien ne reste, vraiment. Et je crois vraiment que... Je crois pas que la colère, la haine, toutes ces choses-là, elles restent. Je vois trop de gens. Ce qui reste, c'est... Même quand les gens me disent mon fils n'est pas venu me voir c'est quand même l'amour qui a porté cette phrase-là à un moment donné. Donc, si je devais imaginer quelque chose, même si du coup je me visualise pas dedans comme toi ou plein de gens, Je me dis qu'il ne restera peut-être pas à moi, mais quelque part, peut-être dans un fil, quelque part, il y aura une petite vibration de ce que j'aurais été, de ce que j'aurais voulu et de tout l'amour que j'ai reçu et que j'ai donné. Je suis un peu plus dans cette idée-là. Ok,

  • Speaker #1

    je vois. Je vois complètement. Et par contre, ce que je veux dire, c'est que là aujourd'hui, je dis que je n'ai pas peur de mourir. C'est comme ça que je vois la mort, machin et tout. Je me laisse le choix aussi de changer d'avis. Peut-être que dans le vivant, je dirais que j'ai peur. Enfin, j'en sais rien. Ou peut-être que si demain, on me dit que j'ai une maladie incurable et que je me retrouve avec Cléophée qui s'occupe de moi dans mes derniers jours, je ne dis pas que là, il me dirait pire. Franchement, je pense que je serais bien.

  • Speaker #0

    Après, tu sais, là, on parle dans un absolu où on est en relative bonne santé.

  • Speaker #1

    Et voilà, exactement.

  • Speaker #0

    On va dire que se rajoute à ça la douleur. souffrir en fait. Souffrir, ça change une personne. Avoir mal, c'est-à-dire, même déjà quand on a une très grosse migraine, on n'est plus nous-mêmes, on n'a plus patience, etc. Donc, il y a des facteurs que là, dans notre discussion, qui sont manquants, qui est que il y a la grande souffrance physique ou psychique. Il y a des gens qui se disent je vais mourir et j'ai peur et j'ai peur et j'ai peur et c'est normal.

  • Speaker #1

    Oui, c'est normal.

  • Speaker #0

    J'ai vu personne ne pas avoir peur à un moment, mais j'ai vu des gens... Et alors, je vais dire un truc, alors c'est pas de la magie, mais souvent, quelques jours avant que les gens meurent, ils sont apaisés. Il y a un vrai... Alors, ça a diverses explications. Je ne prends pas de partie dans les explications. Il y a des explications très scientifiques qui expliquent que c'est chimique et qu'il y a plein de choses qui rentrent en jeu. Je pense qu'il y a de ça. Et puis, il y a aussi apparemment quelque chose de plus spirituel qui... passerait et d'un coup il y a un apaisement, un équilibre que les gens trouvent. Et je sais que quand ils en sont là, que la peur est partie, qu'ils vont y aller, tout doucement et tranquillement. Et ça se vérifie dans nombre de cas. Donc là-dessus il y a aussi quelque chose qui est titillant parce que j'ai pas de réponse à te donner, il y a des tas de spécialistes et d'éminents professeurs qui t'en parleraient de manière très cartésienne. et il y a de ça, je pense réellement mais pourquoi ce processus chimique se met en place maintenant, est-ce que la nature est tellement bien faite qu'elle nous protège juste avant ou alors est-ce qu'il y a autre chose qui nous protège ou est-ce que ça a besoin de nous protéger, ça voudrait dire aussi peut-être, je ne sais pas il y a beaucoup de questions dont je n'ai pas les réponses et ça me va de ne pas les avoir mais c'est des choses qu'on voit qu'on observe et qu'on se dit une personne qui est très stressée, très tendue d'un coup, bam il se passe quelque chose, et là, on a l'impression qu'il y a un mieux. C'est ce qu'on appelle le dernier bonjour. Souvent, c'est un bonjour éclatant qui sort de nulle part. Et souvent, la famille croit, croit à un rebondissement et en fait, pas du tout. Des fois, on appelle le lendemain et on dit, elle est partie. Voilà. Juste pour dire que parfois, les choses sont un peu étranges.

  • Speaker #1

    Pour en avoir un petit peu parlé avec des personnes qui côtoient la mort, en fait, comme toi. dont un collègue qui était avant-anatopracteur qui me disait Mais tu sais Pauline, c'est vrai qu'il y a souvent un pic des décès après les fêtes parce que souvent les personnes se disent C'est bon, j'ai vu tout le monde, je peux partir. Ou après un anniversaire, ou après un événement, un truc qui leur tient à cœur ou quoi au caisse. Et quand il m'a dit ça, je lui ai dit Purée, c'est vrai que moi mon père il est parti le lendemain où on a fêté Noël tous ensemble. Et genre vraiment le lendemain quoi. Du coup, ça rejoint carrément ce que tu expliquais, qu'il y a, je pense, une forme d'apaisement ou j'en sais rien, une sorte d'accomplissement ou d'acceptation en se disant allez, c'est bon maintenant, je suis OK, je peux y aller Mais comme tu disais, ça n'enlève rien à la peur qu'on peut avoir et je pense que c'est normal. Je disais j'ai pas peur de mourir encore une fois, je reviens dessus, mais en fait, j'en sais rien de comment est-ce que je vais partir, peut-être que ça se fera en acclapement de doigts et j'aurai pas le temps d'avoir peur. Ou peut-être que je vais flipper pendant des années et des années parce que, je ne sais pas, j'aurai une maladie. Ou voilà, en fait, on n'en sait rien. Mais ouais, je pense qu'il y a vraiment un moment où... Peut-être pas tout le monde, mais il y a peut-être certains êtres humains qui se disent là, j'accepte, c'est OK

  • Speaker #0

    Tu sais, alors ça aussi, j'aime pas le terme, mais j'arrive pas à en trouver un autre, c'est un peu une bagarre que j'ai parfois avec les accompagnants. Parce que quand tu me dis il est parti après les fêtes quelque part, il a peut-être senti qu'il pouvait. Alors tu sais, il y a beaucoup d'exemples, par exemple, tu prends, je pense à un monsieur, Il ne voulait plus manger, ce monsieur. C'était d'une douleur infinie pour lui de manger. Donc, lui nous avait fait part de ça, du fait qu'on allait dé-médicaliser tranquillement, ce qui est très différent de donner la mort. Je le place quand même pour ne pas qu'on se prenne des... Lui avait demandé qu'on arrête petit à petit les soins, parce que lui souffrait beaucoup et que nous, on était au bout de ce qu'on pouvait faire. Donc, ce monsieur, quand sa femme venait, il se forçait à manger. Parce qu'elle lui disait, il faut manger, il faut prendre des forces. Et c'est évidemment compréhensible. Et donc ce monsieur, il souffrait. Donc il vivait pour elle. Il souffrait pour elle. Et un jour, j'ai eu cette discussion très désagréable avec sa femme pour lui dire, vous savez, aussi il y a un moment, il faut lui dire, tu sais, je suis là, mais tu peux partir. Je suis là, mais tu as le droit de lâcher. Et je me suis fait... Pas incendier, mais... Et je l'entends aussi. J'entends que ça peut être pris de manière violente en me disant, mais c'est quand même mon mari, on va quand même pas le laisser mourir comme ça, comme un chien, parce que c'est ce que j'entends, comme un chien. Et je ne suis pas du tout une soignante qui laisse mourir les gens comme des chiens. Mais comme si c'est la volonté de la personne, la personne, elle n'en peut plus, en fait. Simplement, il faut l'autoriser à partir. C'est très, très compliqué, ce schéma-là, ce que je suis en train de dire. Ça va heurter beaucoup de gens. Je ne sais pas ce que ça heurte chaque jour que je travaille.

  • Speaker #1

    J'imagine bien, parce que de toute façon, c'est aussi tout un sujet dans notre pays. Alors là, effectivement, ce dont tu parles, ce n'est pas de l'euthanasie. Pas du tout. Mais ça peut aussi rejoindre ce sujet de la légalisation de l'euthanasie, etc. Je n'ai pas forcément envie qu'on rentre dans le débat.

  • Speaker #0

    Non, ça m'était inutile.

  • Speaker #1

    Je pense aussi que c'est important de dire qu'effectivement... Comme tu le disais très bien, il y a un moment, les personnes sont à bout. C'est la fin. Il n'y a plus rien à faire. Il n'y a plus rien à espérer. Il y a des questionnements qui se posent. Oui. Et les apports gagnants, je pense que c'est effectivement très difficile de lâcher prise en se disant Ok, c'est bon En fait, je reprends beaucoup l'histoire de mon papa. Désolée, c'est un peu trop omniprésent.

  • Speaker #0

    Pas du tout.

  • Speaker #1

    Mais pour moi, c'est un exemple dans le sens où, en fait, On a appris après sa mort que l'état de sa maladie était bien plus grave que ce qu'il nous disait. Et au début, on était un peu en mode, pourquoi il ne nous a pas dit Et en fait, la réponse est venue très vite, c'est qu'il voulait qu'on lui foute la paix. Et c'est son droit. Et il y a plein de gens autour de moi qui m'ont dit, ouais, mais c'est égoïste, si vous avez dit la vérité, peut-être que si. Et puis ça, vous auriez pu vous préparer. De un, t'es jamais préparé. qu'on sache ou qu'on ne sache pas, il serait mort, quoi. Et de deux, on lui a foutu la paix. Enfin, je pense que c'est très dur pour des personnes malades et qui sont transparents avec leur famille, d'avoir une famille qui, toute la journée, va dire Tu ne fais pas ci, non, fais pas ça, ah, tu ne devrais pas faire ça, parce que gna gna. Et puis, ah, migni, et ça, ce n'est pas bon pour toi. Et waouh, waouh, waouh. Il respire encore, on peut profiter de lui ou...

  • Speaker #0

    Comment ça se passe Tout à fait. Et ça, ce n'est vraiment pas une chose... Alors, c'est... C'est une des choses les plus difficiles au quotidien, au boulot. C'est que je suis là pour écouter les familles, au même titre que les personnes que je soigne. Pour autant, c'est les personnes que je soigne qui décident. Ça veut dire que c'est logique. Mais moi aussi. Mais c'est très compliqué. Encore une fois, je reviens sur cette phrase, mais j'ai entendu un nombre de fois, ma mère est morte comme un chien. Non, elle n'est pas morte. Elle a beaucoup souffert. Ça, c'est une réalité. Je sais que ça va heurter, malgré moi, des gens de dire ça. On ne sait pas à l'heure actuelle la vérité de la chose. La plus crue possible, c'est qu'on ne peut pas, on ne sait pas tout soulager. On fait de notre mieux, mais il y a des choses qui sont inévitables. Je ne palie pas à la mort, c'est-à-dire que je ne pourrais pas empêcher que ça arrive. Je ne pourrais pas... Il existe plein de moyens aujourd'hui, etc. Mais il y a des douleurs qui sont au-delà de tout, que l'on ne peut pas entièrement soulager. Il y a des personnes qui arrivent à l'épuisement de supporter ça pour faire plaisir à leur famille. Et là, c'est très compliqué quand arrive ce moment-là, qui est évidemment non seulement compréhensible. Mais je trouve que c'est beau quand quelqu'un dit bon, non, je vais manger parce que ma femme, elle va se tracasser

  • Speaker #1

    C'est une preuve d'amour.

  • Speaker #0

    Mais de l'autre côté, il faut que l'autre personne fasse le chemin et se dise je l'aime tellement Là, ça suffit. Après, il y a trois heures de soins parce que le monsieur, il n'arrive pas à déglutir. On ne peut pas infliger à quelqu'un tout ça pendant des jours et des jours et des jours. Et c'est très compliqué parce que les gens, ils arrivent et disent vous la laissez comme ça, vous avez enlevé la perfusion Je dis, oui, mais votre maman, elle souhaite qu'on m'arrête les soins. On est là pour elle. Si elle change d'avis, je remets immédiatement la perfusion. Pour l'instant, ce qu'elle souhaite, c'est qu'on m'arrête la perfusion parce qu'elle n'en peut plus. Et là, c'est très compliqué parce que tu te retrouves avec des gens qui pensent qu'on maltraite, alors qu'en fait, si on prend un tout petit peu de recul, quelque part, sans le vouloir, c'est inconscient.

  • Speaker #1

    Mais oui, c'est eux qui maltraitent. Alors que toi, tu prends en considération l'avis de la personne qui est concernée.

  • Speaker #0

    C'est mon travail. C'est beaucoup plus facile, je ne jette pas du tout la pierre, ce que je suis en train de faire, ce n'est pas du tout ça, c'est d'essayer de faire comprendre aux gens que quand on va vers eux, qu'on leur dit, vous voyez, votre maman, elle a souhaité qu'on arrête la perfusion, là, elle n'y arrive plus, il faut qu'on en parle, parce que c'est son souhait. Ou par exemple, elle nous a dit dans ses volontés que quand elle en arrivait là, elle souhaitait par exemple une sédation profonde, ce qui ne veut pas dire qu'on tue la personne, ça aussi, je reviens là-dessus. C'est juste, on amène la personne à s'endormir un peu plus tranquillement. Mais ça aussi, on en parle avec les gens. On est là pour eux. Et la famille, c'est très compliqué. Parce qu'ils ont leurs sentiments qui sont très contradictoires. Et puis, qui s'accrochent encore à de l'espoir de quelque chose. C'est dur de leur enlever ça, tu vois. Enlever l'espoir des gens, c'est terrible. Pour moi, il y a tellement d'espoir, c'est terrible. Mais la seule chose... Parfois, effectivement, on se prend un petit peu des murs, mais c'est pour leur bien aussi. Qu'ils comprennent que c'est pour leur bien à tous. Ce n'est pas évident tous les jours.

  • Speaker #1

    De toute façon, la mort est dure pour les vivants. C'est ceux qui restent qui vont vivre avec la mort. Donc, effectivement, ce n'est pas facile. Je pense qu'on a fait le tour pour cet épisode, qui est un épisode délicat, mais qu'on a essayé d'aborder avec bienveillance déjà. et aussi en essayant de montrer que la mort peut avoir de la beauté du positif, que c'est pas toujours une fatalité que de quitter ce monde en tout cas Clophe merci beaucoup mais vraiment merci pour ton intervention dans ce podcast ça a été un plaisir de te recevoir et d'en discuter

  • Speaker #0

    Merci à toi Pauline, ça a été hyper doux et hyper enrichissant pour moi de pouvoir échanger avec toi là-dessus et tu m'as fait... pensé, ça sera ma petite clôture à moi, à une phrase aussi que j'aime beaucoup qui est de dire ce qui m'intéresse c'est d'investir le cœur des gens dans le présent plutôt que d'être incomprise à jamais. Je pense que tu es quelqu'un qui touche au cœur les gens qui sont avec toi et qui sont présents. Donc c'est beaucoup plus important qu'être incomprise à jamais.

  • Speaker #1

    Et bien on va clôturer cet épisode en chialant.

  • Speaker #0

    Non Super. Je t'en prie, c'est moi qui te remercie Pauline.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir partagé ce moment avec nous. Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à en parler autour de vous et sur les réseaux sociaux. Et pour rappel, le podcast à nous deux, c'est un mardi sur deux.

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Description

Avant tout attention ⚠ Cet épisode aborde le sujet sensible de la mort 🕊


Cleophée m’accompagne avec toute sa douceur pour discuter de ce sujet délicat mais ô combien important : on parle du deuil, de comment nous avons pu vivre le décès de proche autour de nous, de comment la mort est vu dans notre regard et celui de la société, est-ce qu’on a peur de mourir ? Qu’est ce qu’on imagine après ? 🐦‍⬛


En bref, c’est un sujet qui aborde beaucoup de point et qui j’espère pourra faire du bien à vos cœurs malgré son aspect très lourd 


Pauline ✨


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Salut, bienvenue sur le podcast de a nous deux. Avant de commencer cet épisode, je voulais juste prévenir que celui-ci aborde un sujet très sensible. Aujourd'hui, on va parler de la mort. Préservez-vous si vous traversez une période difficile, si vous êtes sensible en ce moment, si vous êtes en dépression, que vous avez un petit moral, que vous vivez une période de deuil ou que vous êtes en train de vivre. des choses autour de la mort, s'il vous plaît, préservez-vous et n'écoutez peut-être pas cet épisode. Ou venez peut-être l'écouter plus tard, quand cette période difficile sera passée. La mort fait partie de la vie. C'est souvent très bateau comme phrase, mais en fait c'est notre réalité. Comme beaucoup de choses vivantes sur cette planète, on est pour mourir. On peut avoir peur de cela, ou bien l'attendre avec patience. C'est souvent dur à vivre lorsqu'un proche décède. C'est souvent trop tôt, et la période de deuil est délicate. Nous avons tous un rapport différent avec la mort. que ce soit pour nous ou pour les autres. J'ai décidé d'en discuter avec Cléophée. Salut à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast. Aujourd'hui, je suis très contente de vous faire partager cet épisode avec Cléophée, qui m'accompagne pour parler de ce sujet très délicat qui est la mort. Et j'ai voulu inviter Cléophée, enfin, c'est même pas moi qui l'ai invitée forcément. Cléophée est venue à moi pour qu'on puisse notamment parler de ce sujet, parce que Cléophée travaille... dans un service soins palliatifs. Donc, elle accompagne des personnes qui sont en fin de vie. Donc, je trouvais qu'elle était très à même de venir parler de ce sujet de la mort. Cléophée, pour toi, ça fait quoi d'accompagner des personnes qui sont en fin de vie Alors,

  • Speaker #1

    bonjour Pauline. Je suis ravie déjà d'être ici. Je suis ravie qu'on ait cette discussion toutes les deux et qu'on puisse parler de ça, en effet. Alors, du coup, je travaille en tant qu'infirmière en soins palliatifs. Je me suis dit que peut-être il serait bien qu'on définisse un petit peu ce que c'est. Pour que je puisse t'expliquer ce que moi je ressens. Peut-être que tu aies une idée de ce qu'on fait réellement. Car il y a énormément d'idées reçues sur ce service-là. Et je me suis dit qu'on passerait peut-être à côté du sujet si on partait pas d'une définition commune et d'une réalité finalement. Qu'est-ce qu'on fait en soins palliatifs En soins palliatifs, il faut savoir que... On a une idée historique de l'infirmière qui est au chevet du malade, qui tient la main et qui attend que la personne meure. Ça, c'est l'idée que la plupart des gens ont et qu'on attend un cancéreux qui va rester là trois jours et qui va finir par mourir et finalement, on attend la mort. C'est, à mon sens, l'idée un peu reçue qu'ont les gens de manière générale. Sauf que c'est très loin d'être ça. En tout cas, c'est bien plus que ça. Les soins palliatifs aujourd'hui. ce sont des soins qui sont actifs et qui prennent en charge de manière globale les personnes. C'est ce qu'on appelle une prise en charge holistique, c'est-à-dire qui prend en compte la souffrance psychologique, la souffrance sociale et la souffrance spirituelle. Alors, je ne dis pas ça juste pour crâner, je dis ça parce que c'est l'essence même de la philosophie palliative. Palliative, ça veut dire pallier. Pallier, ça veut dire pallier à quoi C'est au curatif, c'est-à-dire au fait de soigner, de guérir. Aujourd'hui, la fonction des soins palliatifs, ce n'est absolument pas de guérir la personne de la pathologie pour laquelle elle vient chez nous. C'est vraiment, au départ, pallier au curatif pour finalement prendre la place du curatif et mettre la personne dans un confort, si je puis dire, un soulagement et qu'il existe soit dans la globalité de la personne. C'est la spécificité. de ce service-là. C'est-à-dire qu'on entend tout ce qu'elle a comme problème physique, comme problème émotionnel, comme problème psychologique, familiaux, et on prend point par point les choses et on essaye d'établir avec elle, et non pas juste dans l'attente de ce qu'elle veut. C'est avec elle de mettre au point un plan qui lui conviendrait pour la laisser dans la dignité de ce qui va se passer. Je ne sais pas si c'était clair.

  • Speaker #0

    Si, si. Et je trouve ça très bien que tu fasses ce point parce que c'est un point C'est vrai qu'on peut avoir un peu cette image comme dans les films de guerre, où tu as l'infirmière qui va être au chevet du soldat qui est en train de partir, où il y a toute une beauté qui n'est pas forcément réaliste, et réalisable non plus, dans ce genre de situation. Donc je trouve ça très bien que tu puisses partager ça et justement l'expliquer. Et j'ai trouvé ça hyper intéressant aussi que tu parles de philosophie palliative, je crois que c'est le terme que tu as employé.

  • Speaker #1

    Oui. Je trouve ça super.

  • Speaker #0

    Enfin super. Je vais employer des termes qui, je pense, ne sont pas appropriés au sujet. Je suis désolée.

  • Speaker #1

    Non, alors tu peux te détendre par rapport à ça, parce qu'on en reparlera plus tard, je pense. Mais les seins palliatifs, ce n'est pas du tout un endroit dans lequel... Ce n'est pas un mouroir, il n'y a pas de tabou. Et on peut sourire et être très joyeuse. Je suis très joyeuse en soins palliatifs. Après, comment dire Les soins palliatifs, il y a bien sûr un côté humain, engageant, dans lequel il faut faire preuve d'empathie. Et je n'ai pas honte de dire d'amour, parce qu'il s'agit de ça, en réalité. Mais il y a cette espèce de dualité avec une... haute technicité des soins qui sont très complets, très complexes. Et aujourd'hui, ce que ignore la plupart des gens, même dans le milieu médical d'ailleurs, c'est qu'on est l'un des services les plus performants en France, c'est-à-dire que la personne, elle vient, non pas pour une pathologie, mais pour l'ensemble de sa pathologie, c'est-à-dire qu'il faut pouvoir donner des soins à la fois cardio, à la fois pneumo, enfin bref. Il faut être prêt un peu à tout et tout gérer. Et c'est un service qui permet du coup d'ouvrir des portes. Et quand tu me parlais de philosophie, alors là, sinon je vais faire honte à mon métier, mais il y a les soins palliatifs. Donc là, le soin, c'est vraiment ce qui est concret. Il y a la médecine palliative. Donc là, c'est un peu, on commence à rentrer dans la philosophie palliative, c'est-à-dire que la médecine palliative, c'est une manière de voir la personne en face. Et aujourd'hui, d'ailleurs, il y a beaucoup de... professionnels de santé qui se disent qu'on devrait prendre la médecine palliative et la mettre à d'autres domaines. Ça veut dire prendre la personne de manière plus globale, entendre ce qu'elle a à nous dire, faire avec elle. Et donc, du coup, de ça est née un peu une philosophie palliative, on en parle aujourd'hui. C'est-à-dire vraiment cette manière de dire je fais quelque chose dans l'unicité de la personne qui est en face de moi. Ok,

  • Speaker #0

    très bien. Oui, c'est pas juste dans l'idée de traiter un point, et je trouve ça très bien que tu en parles, qu'effectivement Les personnes qui travaillent dans le genre de service dans lequel tu es, c'est vrai que vous traitez autant, comme tu disais, des problèmes cardiaques comme des problèmes peut-être psychiatriques, des amputations, enfin je n'en sais rien, tout ce qu'il peut y avoir. Peut-être aussi des personnes qui ont des cancers, des maladies orphelines ou que sais-je. Mais c'est vrai que vous pouvez traiter une personne qui a plusieurs pathologies. Et je trouve que c'est bien de rappeler que oui. effectivement je comprends que ça soit un des services les plus performants parce que vous traitez énormément de choses en fait.

  • Speaker #1

    Oui, alors pour donner une idée, parce que c'est pareil, les gens du coup ils ont du mal à s'approprier ça en se disant quand est-ce qu'on y va finalement Oui j'avoue. Non mais du coup quand est-ce qu'on y va si on a... Alors c'est des pathologies qui peuvent bien sûr être des pathologies cancéreuses, mais les gens n'y pensent pas, mais par exemple il y a 40 millions de personnes au monde qui auraient besoin de soins palliatifs. Donc, il faut se rendre compte un petit peu et des fois, comment dire, lever la tête et se dire combien de gens pourraient être concernés. Il y a une maladie qui, par exemple, est le sida. Aujourd'hui, ça a trait aux soins palliatifs et c'est quelque chose qui est complexe et qui nécessite des soins techniques également. Bien sûr, il y a le cancer, il y a toutes les maladies neurodégénératives auxquelles on pense parce que les gens pensent à Alzheimer, mais il y a Parkinson et puis on a d'autres qui sont attelés. Et puis voilà, toutes les maladies chroniques. On n'a pas besoin d'avoir quelque chose forcément de fulgurant.

  • Speaker #0

    Tu peux être amenée à avoir des patients sur de la longue, voire très longue durée

  • Speaker #1

    On peut en avoir. On va dire que le plaisir quand on est en soins palliatifs, c'est quand quelqu'un rentre dans le service, on nous dit cette personne, elle en a pour six mois. Et que finalement, par tous les soins qu'on a pu lui apporter à tous les niveaux, finalement, au bout d'un an, elle est toujours là. et elle décide de rentrer chez elle pour des raisons qui lui sont personnelles. C'est tout ce que je souhaite aux gens qui rentrent dans mon service.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que tu arrives à prendre de la distance avec justement cet aspect de mort, de perdre les personnes que tu accompagnes pendant des mois Comment est-ce que ça se passe Et aussi, question avant qui peut peut-être être intéressante, depuis combien de temps tu fais ça

  • Speaker #1

    Je fais ça depuis une dizaine d'années, ce qui est déjà un bon petit bagage dans ce service-là. Voilà, alors après, en ce qui concerne le fait d'arriver à le gérer, alors je vais donner ma définition à moi déjà de ce que moi je fais. Parce que là, j'ai fait une description qui est globale et qui concerne l'ensemble des personnes qui travaillent en soins palliatifs. Après, je crois qu'on a chacun notre manière de pratiquer le métier, de le penser. On va dire que moi, j'y mets une part d'intime de moi quand je le fais. C'est-à-dire, bien sûr, mon but, c'est de soulager la douleur, les souffrances, mais j'y mets une part d'intime de moi et en ça, j'essaye toujours d'être joyeuse et douce. Alors certes, parfois c'est une nature, mais c'est très important pour moi. D'être comme ça, ça engage une énergie importante et dans des situations qui sont intenses et bouleversantes. Donc, on peut aussi arriver à un épuisement, arriver à quelque chose auquel je pense qu'il n'est pas bien que j'arrive parce que je n'aiderai pas correctement les personnes en face de moi. Donc, pour arriver à essayer de gérer ça, je pense que je vais dire des choses très, très, très, très tartes. Mais... C'est finalement prendre soin de soi parfois. Et mon petit truc personnel, c'est vraiment d'accepter la solitude. C'est un métier, quand j'y suis, jamais je ne me sens seule. Mais ça crée une sorte de solitude à l'intérieur. Et ça m'a pris un peu de temps avant de comprendre qu'il ne fallait pas toujours foncer tête baissée, encaisser, encaisser, encaisser. Ça m'a pris du temps, mais maintenant j'ai compris ça, qu'il fallait que j'accepte la solitude en moi. Et ça va être, par exemple, le bain. partir une semaine, aller dans le désert et puis voir personne, ne parler à personne et laisser les choses en moi se vivre et je les laisse partir. Voilà. Je ne sais pas si c'était clair.

  • Speaker #0

    Moi, en tout cas, j'ai compris. Je pense que les personnes qui nous écoutent aussi, en tout cas de ce que je comprends, c'est que oui, parfois, tu as besoin peut-être aussi de faire le vide et de reprendre un peu de distance avec tout ce qui peut se passer autour de toi. Est-ce que... Le fait de faire de l'art comme tu le fais, parce qu'on n'en a pas parlé non plus, mais ça fait quand même aussi partie de toi. Est-ce que c'est aussi quelque chose qui t'aide Voir les choses peut-être autrement, prendre de la distance, t'apaiser quand les périodes sont plus compliquées, des choses comme ça Ou est-ce que ça n'a rien à voir Que c'est possible aussi

  • Speaker #1

    Ça ne peut pas avoir rien à voir. C'est impossible. C'est intrinsèque. C'est à l'intérieur, c'est dedans. L'art, en ce qui me concerne, c'est vraiment quelque chose d'intérieur. Donc, même si de l'extérieur, on a l'impression que ça n'a aucun sens, mon ressenti intérieur joue immanquablement sur ce que je suis en train de faire. Je pense que ça m'aide dans le sens où j'exprime des sentiments, des émotions et que les exprimer, ça fait toujours du bien. Après, ce n'est pas fait pour. Ça veut dire qu'il n'y a pas un message derrière, un message militant ou même victimisant en disant là, ce que je fais, c'est compliqué parce que je ne pense pas Je pense que c'est un merveilleux métier et qui offre de merveilleuses perspectives. Mais oui, bien sûr, mais l'art, de toute façon, ça aide. Enfin, ça aide toujours, je trouve. Donc, savoir, oui, parce que c'est moi, mais ça ne porte pas mon art. Voilà, on va dire ça comme ça.

  • Speaker #0

    C'est la question que je me posais un petit peu, de savoir si c'était l'échappatoire premier, entre guillemets, la source de tes créations. Mais pas forcément.

  • Speaker #1

    Non, pas forcément. Pas toutes. Voilà, exactement.

  • Speaker #0

    Ça a modifié ton rapport à la mort, en termes général de faire ton métier

  • Speaker #1

    Ça m'a permis de revenir à mon essentiel. Alors, c'est un sujet qui me tient un petit peu à cœur, parce qu'on vit dans un monde aujourd'hui qui me dépasse totalement. Et la mort, ça reste quelque chose qui nous unit. Alors, on est tous nés et on va tous mourir. J'ai un petit peu mal à me dire que certaines personnes pensent que ça va se passer autrement, ou qu'ils sont au-dessus de ça, ou voilà. Donc, ce qui m'a... fait grand bien, et j'ai une grande chance de faire ce métier-là et d'être au contact de ces gens-là, c'est que justement, ça m'a permis de comprendre qu'il fallait mettre, et là, ça fait partie aussi de la citation des soins palliatifs, mais qui est une réalité absolument pertinente, c'est qu'on met de la vie dans nos jours.

  • Speaker #0

    C'est très beau.

  • Speaker #1

    Alors en fait, la citation complète, c'est, à défaut de ne pouvoir rajouter des jours à la vie, on rajoute de la vie au jour. Et c'est Un mantra extraordinaire pour moi, parce que c'est le cas. On va de toute façon tous arriver à un moment plus ou moins facilement, plus ou moins rapidement. Nous allons y aller. Et je me suis dit, tous les jours, même les plus difficiles, il faut que j'y mette de la vie à un moment. Il faut que j'aime, il faut que j'aime très fort, beaucoup, beaucoup. Voilà, parce que quand je vais mourir, qu'est-ce qui restera derrière de ma vie si je n'ai pas mis de la vie dedans Donc, ça a forcément créé une essentialité en moi. Quelque chose de... Oui,

  • Speaker #0

    du coup, ça a aussi modifié ta vision de la vie. Après, je pense qu'on va être d'accord toutes les deux pour dire que la vie et la mort, c'est complètement lié. Parce que, comme tu disais, on est pour mourir et que la mort fait partie de la vie. Moi, je sais que c'est une phrase que j'ai mis longtemps à accepter d'entendre. Tu vois, quand j'étais petite, mon père... C'est les premiers grands-parents qui décèdent ou les premiers animaux de compagnie qui partent. Mon père me disait, bah oui, mais c'est la vie. Et je lui disais, mais arrête de me dire que c'est la vie, parce qu'on parle de mort. Donc de quoi tu me parles, en fait Ce n'est pas possible ce que tu me dis. Et j'ai mis longtemps à accepter ça. Je pense que j'ai commencé à l'accepter, d'ailleurs, quand mon propre papa est décédé, tu vois, il y a dix ans. Et en fait, ça a été tellement fort, cette perte, que là, je me suis dit, bah oui, en fait, la mort, elle fait vraiment partie de la vie. Je ne sais plus pourquoi est-ce que j'en suis venue à dire ça, mais...

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on était d'accord sur le fait que ça change le rapport à la vie Oui,

  • Speaker #0

    voilà, c'est ça. Et qu'effectivement, j'ai l'impression, en tout cas c'est très personnel, mais depuis que j'ai inclus ça dans ma tête et dans ma personne et dans ce que je suis, que je vis la vie autrement.

  • Speaker #1

    Alors, en fait, ça paraît encore une fois très bateau, mais comprendre qu'un jour ça va s'arrêter, parce qu'on peut faire un déni, il y a plein de gens qui font un déni. De ça, on se dit non, mais c'est plus tard, non, mais là, je n'ai que 45 ans, je n'ai que 60 ans, puis maintenant, c'est je n'ai que 75 ans On peut faire un déni de ça. Je pense que c'est une erreur. Je pense qu'il vaut mieux accepter que ça va arriver pour justement, contrairement à ce que pensent la plupart des gens, profiter de chaque jour. On entend souvent des gens autour de nous dire plus que quatre jours avant les vacances, c'est un classique Et je les comprends, moi aussi, j'aime partir en vacances. Mais cette petite phrase-là, elle m'embête un tout petit peu. Parce que c'est quand même quatre jours. Et il y a des tas de gens qui aimeraient avoir ces quatre jours. Donc des fois, bien sûr, je suis la première, je ne suis pas infaillible. Mais j'ai tendance à dire, attention, quatre jours, c'est énorme en fait. Ça peut aussi être énorme. Pendant ces quatre jours, on peut faire des tas de choses super bien. On peut faire plaisir à quelqu'un, on peut avoir un fourrir avec quelqu'un. Ce n'est pas des petites choses. Donc quand on accepte le fait qu'il va y avoir une fin, je pense sincèrement... que la vie n'en est que meilleure.

  • Speaker #0

    Après, effectivement, tu vois, j'ai aussi beaucoup cette façon de penser, mais on est humain, tu vois, tu l'as dit, personne n'est un faible. Oui, moi aussi, il y a des jours où je me dis, purée, allez, les vacances, c'est dans trois dodos. Allez, on y va, tu vois. Mais parce que j'ai tellement l'objectif week-end ou vacances, ou alors la semaine a été compliquée au travail ou quoi, ou qu'est-ce, ou voilà, ça arrive. Faut pas s'en vouloir aussi de... Allez, hein.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    c'est humain on est bien français aussi c'est très français de râler alors râlons mais oui par contre je suis assez d'accord de se dire et parfois c'est juste aussi de rappeler des choses simples comme tu l'as dit de se dire ouais ça sera peut-être quatre jours mais pendant ces quatre jours peut-être que on est en plein hiver il fait froid et d'avoir les rayons du soleil ça va me faire du bien ou de rigoler avec quelqu'un de faire plaisir ou qu'on me fasse plaisir aussi et j'avais fait enfin ça me fait beaucoup pensé à ça. J'avais fait un épisode sur la gratitude et je trouve que ça rentre aussi là-dedans de parfois juste avoir de la gratitude et juste avoir un plaisir de se dire Ah, c'est une petite chose, mais vraiment, je l'apprécie. Parfois, ça fait déjà beaucoup de choses, en fait.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Déjà, pas mal. Parce que, comme tu dis, il faut aussi se rappeler qu'il y a des personnes qui aimeraient pouvoir le vivre et qui ne le peuvent pas pour exoulires et craisons. Après, personne n'est là pour... porter tous les malheurs des autres, c'est pas non plus du tout ce que je dis, mais ça fait du bien de relativiser, et de se dire, c'est vrai que moi j'ai la chance de pouvoir le faire.

  • Speaker #1

    Tu sais, je vais rebondir sur ton expression de le relativiser, j'ai envie de te dire, c'est même pas le relativiser, c'est essayer de se mettre en perspective, c'est-à-dire que parfois, on n'arrive pas à justement relativiser, d'ailleurs c'est une expression qui est tellement utilisée et qui est devenue insupportable parfois, mais il faut tout relativiser maintenant de nos jours, je me dis... essayons juste des fois, bon allez, on se met en perspective on se dit juste, bon, aujourd'hui c'est très difficile c'est très compliqué, par exemple je sais pas, il y a trois patients qui vont mourir aujourd'hui, c'est très compliqué ou des gens qui se disent, oh là là, mon papa va bientôt mourir, ou mon cochon d'Inde, et je me moque pas du tout j'ai perdu des cochons d'Inde voilà, je dois l'amener chez le vétérinaire, il va se faire piquer mais ces jours-là, c'est difficile de relativiser, parce qu'on est confronté à des choses qui nous habitent et puis c'est une émotion tellement dure qui prend tellement de place

  • Speaker #0

    que c'est normal. C'est ça,

  • Speaker #1

    tout à fait. Mais du coup, j'allais dire, c'est un petit processus qu'on peut mettre en place parfois en se disant bon, cette journée, elle est un peu compliquée ou elle est un peu nulle. Il y a aussi ces journées qui sont un peu nulles. Mais il faut quand même que de cette journée, j'en sorte quelque chose d'un peu lumineux. Même si c'est tout petit, même si c'est minuscule. Moi, je pense que ça, c'est avoir une chouette vie. Je suis assez née de ça,

  • Speaker #0

    directement. Ce n'est pas toujours facile,

  • Speaker #1

    par contre. Non.

  • Speaker #0

    Mais je trouve que d'essayer de faire l'exercice, de se dire, aujourd'hui, c'est une période sombre, même pas qu'aujourd'hui. En fin d'année dernière, j'ai traversé une période compliquée et j'ai fait l'effort tous les jours de me dire... Allez, qu'est-ce qui s'est passé de bien aujourd'hui Qu'est-ce que tu as apprécié Même on s'en fout, c'est juste... Genre ton chien, il est venu te faire un câlin, tu vois. Enfin, ça peut être tout et n'importe quoi. Mais de faire cet effort-là, je pense que c'est bien d'essayer de le faire. C'est pas toujours facile, surtout quand on est dans un état dépressif ou de dépression ou des choses comme ça. Putain. Mais oui, c'est un exercice qui, je trouve, est important. Parce qu'il faut se rappeler qu'il y a toujours du bon, même dans ce qui n'est pas forcément bien dans la vie. Et la mort, on fait partie.

  • Speaker #1

    Tout à fait, mais tu sais, je crois que ça aussi, finalement, je me fais souvent cette réflexion-là, c'est un excellent exercice pour la suite. Parce que quand les choses se compliquent, parfois on se retrouve avec des personnes qui, voilà, on leur annonce qu'il y a une maladie incurable, quelque chose qui va dégénérer. Et les personnes qui ont rebondi toute leur existence, les personnes qui se sont dit tous les jours, bon là, il faut que je trouve un truc positif. Eh bien, face à la maladie, face à la chose qui va être compliquée, c'est des gens qui vont accepter déjà de l'aide. qui vont me dire, moi par exemple, ce que j'aimerais, c'est avoir un masque de réalité virtuelle pendant mes soins pour pouvoir m'évader le temps que j'ai très très mal. Et ça, c'est très très cool pour moi, d'avoir des gens qui l'ont pratiqué toute leur vie, parce que du coup, ils envisagent la mort de la même manière qu'ils l'ont fait pour la vie. Et du coup, c'est un cercle vertueux. Alors que les personnes qui ont râlé toute leur existence en disant j'ai une vie de caca bouillat et qui n'ont pas... Comment dire Même s'il y a des périodes difficiles, je l'entends, c'est parce que je suis en train de dire, moi aussi, j'ai eu des périodes où je n'arrivais pas toujours à le faire. Mais quand on travaille à ça, très fort, et qu'on y croit à la vie plus que tout, même quand parfois elle est loin, loin, je pense que quand il arrive des petits soucis derrière, c'est plus compliqué. Parce que le travail n'est pas déjà fait, donc on apprend déjà une mauvaise nouvelle, il faut encaisser les chocs, se dire je vais peut-être mourir, et là, il faut apprendre à regarder ce qui est joli. C'est plus compliqué. Oui, mais...

  • Speaker #0

    C'est une mécanique à apprendre, je pense. C'est vraiment un entraînement. C'est comme faire du cardio. J'ai l'impression que c'est un cardio pour l'âme, de se dire...

  • Speaker #1

    Oh là là,

  • Speaker #0

    vraiment une poète. Mais je le vois un peu comme ça, de me dire, entretiens ça. Parce qu'il y a forcément un jour où ça sera d'une utilité viscérale. Et encore une fois, ce n'est pas toujours facile de le faire. Je ne dis pas que tous les jours j'y arrive, ce n'est pas vrai.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Quand mon père est décédé, ce jour-là, clairement... Non, je n'ai pas trouvé de truc positif. Mais quand même, je me dis effectivement, je pense qu'il y a des choses que je prends différemment grâce à cet exercice mental et émotionnel que j'essaye de faire. Et en fait, tout ce que tu me dis, ça me fait vachement penser à un livre que j'ai terminé hier. Et je ne sais pas si tu le connais, c'est un livre qui s'appelle Les oubliés du dimanche de Valérie Perrin. Ça raconte l'histoire d'une nana d'une vingtaine d'années qui est aide-soignante dans une maison de retraite. Et donc, toute l'histoire, c'est un peu... Pourquoi est-ce qu'une nana de 20 ans travaille qu'avec des vieux, qu'elle voit mourir, qu'elle accompagne et tout Et j'ai adoré ce livre parce que je l'ai trouvé hyper poétique. Dans le sens où, elle, ce qu'elle veut, c'est justement accompagner ces personnes âgées jusqu'au bout et surtout de les écouter. Donc, elles les écoutent leur raconter leur histoire, leur vie, en fait. Je trouve ça hyper beau. Et bon, il y a aussi tout le truc de... Les personnes âgées, souvent, sont oubliées de leurs parents, leurs enfants, leurs frères, leurs sœurs et tout. Et donc, c'est pour ça que ça s'appelle les oubliés du dimanche, parce que malheureusement, il y a beaucoup de personnes âgées qui ne sont pas visitées et qui sont oubliées. Et en fait, c'est tout ce que tu disais aussi sur le fait d'être positif, de voir le bon côté des choses, évidemment, quand... quand c'est possible dans la mesure de la raisonnabilité de chacun. Ça m'a fait beaucoup penser à ce livre parce que quand je l'ai refermé, c'est vraiment ce que je me suis dit. Je me suis dit, cette nana, elle a un métier pas facile parce que c'est dur de faire les soins aux personnes âgées, des personnes qui sont malades, qui n'ont pas envie d'être là. Bon, là, il y a beaucoup de choses. En fait, elle arrive à discuter avec eux et ils leur racontent toute leur vie et ça devient leur confidente jusqu'au bout de leur jour. Et ça m'a fait beaucoup penser à ça, tout ce que tu disais préalablement. Donc, si tu ne l'as pas lu, je te le conseille.

  • Speaker #1

    Il y a beaucoup d'ouvrages. Ça a l'air très beau et très poétique, en effet. Après, il y a ça de vrai, c'est que c'est vraiment une chance quand les gens me disent Oh, ma pauvre ou Qu'est-ce que tu as du courage C'est que c'est des choses qui reviennent beaucoup. Pour autant, c'est une vraie chance parce que ça m'a permis de grandir vraiment émotionnellement. Ça ouvre des portes même de pardon, d'apprendre vraiment ce que c'est parce que... Parce qu'on voit effectivement les familles, parce qu'on n'en a pas encore parlé, mais ce qui est difficile aussi, c'est les familles. Difficile pour eux, pour la personne qui va partir, pour moi aussi des fois, pour moi quand c'est moi la famille. mais ce que je veux dire c'est que contrairement à ce qu'on pense ça ne tire pas vers le bas c'est un métier qui élève c'est un métier qui permet de nourrir son intérieur qui permet de se dire mince moi j'ai pas fait ça dans ma vie moi j'aimerais ne pas finir avec ce regret là aussi immanquablement c'est enrichissant on ne peut pas y perdre alors on peut y perdre de l'énergie mais uniquement cela et en ça effectivement ce livre dont tu parlais a l'air intéressant parce que je... Je suis convaincue que non seulement c'est bien, c'est une belle chose d'écouter l'autre dans ce qu'il a à dire, même si pour nous ça n'a pas grand sens parfois, mais pour lui ça en a, pour elle, pour la personne en tout cas. Mais surtout on peut l'utiliser, le manier, élaborer ce qui est en train de se produire pour réussir à nous en faire quelque chose d'autre. Aussi le fait de supporter, de voir l'autre souffrir, de supporter, de voir l'autre nous dire quelque chose qui nous fait du chagrin à nous. Toutes ces choses-là, je pense que ça nous fait grandir en tant que personne. On ne peut être que meilleur après ça. Même si parfois, c'est compliqué.

  • Speaker #0

    C'est ce que j'allais dire. Parfois, ça doit quand même être compliqué. Je pense que c'est peut-être dans ce sens-là que les gens te disent t'es courageuse

  • Speaker #1

    C'est dans le sens où, en effet, comme je te disais, il y a des choses qui font souffrir. C'est-à-dire que l'autre peut nous renvoyer à des choses à nous qui sont douloureuses, qu'il ne faut pas trop titiller parce que ça nous est propre. Mais, et c'est en là que je m'y remets, c'est peut-être nécessaire aussi. Parfois, il faut que ça pique un peu. parfois la vie elle nous met des grandes claques et puis parfois on rencontre une personne qui est là qui nous raconte une histoire similaire on n'a pas trop trop envie de l'écouter parce qu'on se dit ça va piquer et c'est là qu'on se dit est-ce que j'ai pardonné est-ce que j'ai pas pardonné où est-ce que j'en suis moi aussi par rapport à ça quelle personne je suis dans tout ça alors ça ça fait des petites vrilles dans le cerveau je pense normalement que ça nous fait vraiment reconnaître en nous certaines choses évoluer accepter du coup de l'autre aussi beaucoup plus de choses parce que c'est quand on se dit mince, cette personne m'a dit ça, moi ça m'a un peu piqué, le lendemain on revient différent. Il y a un tout petit quelque chose d'un millimètre qui a bougé et ça peut tout changer, ce petit millimètre.

  • Speaker #0

    Je suis encore une fois bien d'accord avec toi.

  • Speaker #1

    Je précise que je ne t'ai pas soudoyée avant.

  • Speaker #0

    Elle m'a donné plein la rumeur. C'est faux. Non mais oui, je suis d'accord avec toi et vraiment le terme d'évoluer, c'est le terme que j'allais dire et puis tu l'as dit. Justement, c'est quoi ton rapport avec la mort des personnes qui peuvent être plus ou moins proches de toi. Donc, ça peut être des proches humains comme des proches animaux. Tu as dit tout à l'heure, tu as évoqué des cochons de rinde. Oui. Comment est-ce que toi, tu vis tout ça, sachant qu'au quotidien, professionnellement, tu le vis aussi déjà Est-ce que ça change quelque chose Est-ce que tu peux nous en parler

  • Speaker #1

    Dans ce que tu dis, en fait, tu ne le dis pas, mais pour autant, c'est ce qu'on appelle le deuil en réalité. On ne va pas passer... Outre ce terme-là, quand bien même je trouve qu'en français, il est balmené. Ce n'est pas un très joli mot, il est tout petit.

  • Speaker #0

    plus, alors que le deuil, c'est grand, grand, immense. C'est long.

  • Speaker #1

    Enfin, ça peut être long.

  • Speaker #0

    Oui, alors, techniquement, alors, je mets de gros, gros guillemets, aussi immense que le deuil. Techniquement, un deuil, ça dure un an. On passe par des phases diverses et variées. Enfin, par trois grandes phases, mais ce que je veux dire, c'est que le deuil, c'est un travail et que chaque deuil est différent selon ce que l'on perd. Parce que le deuil, évidemment, là, dans nos conversations, c'est le deuil d'une personne ou d'un animal, d'un être vivant. Donc, ça engage du vivant. Et on peut aussi devoir faire le deuil d'un emploi, d'une situation.

  • Speaker #1

    Une relation.

  • Speaker #0

    Le deuil, c'est un travail en process. Après, je ne crois pas que parce qu'on voit plein de gens mourir chaque jour, on soit plus prêt à affronter le deuil d'une personne qu'on aime profondément. Le sentiment n'est pas le même et du coup, le processus n'est pas le même. De faire le deuil d'une personne même à laquelle je me suis attachée dans le cadre de mon travail, combien même je les adore. Bien sûr, il y a des fois où je pleure, où je termine la journée en pleurant, ou des fois pas, c'est comme ça. Mais toi, tu parlais de ton papa. Alors moi, c'est un peu plus... Ma situation est un peu... Alors là aussi, un peu plus bateau parce que la première fois que j'ai perdu quelqu'un, c'était ma mamie. C'est ça. Oui, j'avais cinq ans. C'était, j'allais dire, la mamie. C'était elle. Il a fallu que ce soit elle. Elle me tenait la main et j'étais la plus heureuse de la Terre. Elle me tenait la main et tout pouvait s'écoucouler, quoi. Et quand elle ne m'a plus donné la main... Le monde s'est écroulé quand elle ne faisait plus partie physiquement du mien. Et ça a été, pour la petite Cléophée, assez douloureux dedans. Même si j'ai compris que je n'avais pas de prise là-dessus. Et que, par contre, on m'autorisait à pouvoir lui parler encore. Même si peut-être elle ne m'entendrait pas. Et que je pouvais lui parler dans les nuages, au cimetière ou peu importe où. Bon, alors ça a été une première expérience, mais qui a été, j'allais dire, dans un certain sens de la vie. Je sais pas ce que tu veux dire

  • Speaker #1

    C'est la suite logique des choses

  • Speaker #0

    C'était finalement un peu précoce Mais ça restait ma mamie Donc c'était dans l'ordre des choses Je suis pas très fan de cette phrase

  • Speaker #1

    Non mais bon, on se comprend

  • Speaker #0

    Et après, j'ai dû faire le deuil De personnes qui sont toujours vivantes Et c'est aussi compliqué C'est aussi compliqué parce que Encore une fois, le deuil C'est un choc d'abord C'est une sidération Qu'on y soit préparé ou pas Et ensuite, c'est un mélange de je suis triste, j'en veux à la terre entière, pourquoi lui, pourquoi elle, pourquoi il me fait ça à moi, pourquoi il ne s'est pas accroché plus. Bref, tout un petit cafarnaum de choses dont je ne t'apprends rien, mais dont nous parlons parce que c'est la vérité.

  • Speaker #1

    Je pense que c'est bien aussi d'en parler, de se dire que c'est normal de vivre et de ressentir ça. Parfois, ça fait du bien. Il y a peut-être des personnes qui sont en train de traverser des périodes difficiles ou qui en ont envie. traversé et je vous rassure on a tous ressenti potentiellement ce genre d'émotion aussi quoi.

  • Speaker #0

    Oui alors après là je fais état d'un deuil qu'on appelle, c'est pas moi qui le dis ça s'appelle le deuil normal c'est le nom de terme plein de termes et ça s'appelle le deuil normal il se fait comme ça, il y a une sidération avec des émotions très comment dire, presque dans le refus d'entendre ce qui est en train de se passer et Il n'y a aucune information qui passe. Souvent, les yeux sont un peu vides. Les personnes, elles disent oui, oui. Puis en fait, il n'y a rien qui est imprimé. Ça, c'est une première étape qui finit souvent comme assez rapidement. Puis ensuite, arrivent les douleurs aiguës. Ces espèces de gémissements de l'intérieur, où on se dit comment je vais pouvoir faire pour vivre sans lui ou sans elle ou sans eux. Là, on parle de personnes âgées, mais il y a des personnes qui perdent des bébés, des enfants. Comment fait-on pour... Il y a ce moment-là.

  • Speaker #1

    Oui, il y a souvent ce questionnement de comment je vais survivre à ça.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Et en fait, c'est là que tout se joue, tu vois. C'est là où il y a ceux qui vont vivre un deuil normal, entre guillemets. Encore une fois, c'est pas de moi, c'est un terme qui est existant. Le deuil normal, il va être engagé avec le temps. Et c'est là où le temps joue, c'est pas un mythe. Les choses qui étaient aiguës vont devenir supportables et vont laisser place aux souvenirs joyeux avec les personnes qui nous manquent. À partir du moment où les souvenirs joyeux arrivent, on souffle un petit peu. Ça n'enlève ni la peine, ni le manque, ni rien. Mais on a fait place là, on a fait un deuil, un travail de deuil qui reste, ma foi, triste et ça ne remplace pas. Mais le travail est terminé. Puis après, il y a les personnes qui, au petit moment crucial dont on a parlé, prennent une autre direction, qui n'est plus la trajectoire normale. Je ne suis pas du tout en train de dire que ce n'est pas normal réellement. Tout à fait normal. Des personnes qui vont être un peu plus inhibées, qui ne vont pas sortir. Les choses, pas de colère, pas de dépression, pas de pleurs, pas de cris, rien. Donc ces gens-là, comme ils sont dans quelque chose de très inhibé et qu'ils ne le sortent pas, ça sortira un jour, pas tout de suite, mais le deuil n'est pas fait. Et il y a aussi ce qu'on appelle donc du coup des deuils compliqués et des gens qui, sur des années, ne vont jamais accepter. Ils n'arrivent pas à l'acceptation, la fameuse acceptation qu'on espère arriver tout de suite quand ça arrive et qu'on se dit comment je vais faire, je ne vais jamais y arriver, je ne vais jamais réussir à accepter ce qui est en train de se produire Voilà, ça arrive et il y a des solutions pour eux. pour aider ces gens-là, mais pas tous égaux. Et puis, ce n'est pas une science exacte. Parfois, on a l'impression que ça va aller. Et puis, en fait, non.

  • Speaker #1

    On repart un peu en arrière. Je le dis, il faut se faire aider, en fait. C'est vrai que c'est des phases de la vie qui peuvent être extrêmement douloureuses, extrêmement compliquées. On parle beaucoup et souvent de santé mentale sur ce podcast. Et encore une fois, je le dis et je le redis, n'hésitez surtout pas à vous faire aider. Vos proches sont là pour vous soutenir, mais avoir un professionnel de santé qui vous accompagne, C'est mieux. Si vous pouvez le faire, après je sais que ça coûte de l'argent, c'est aussi un investissement personnel et financier. Mais quand on a besoin d'aide, il ne faut vraiment pas hésiter dans la mesure du possible. Encore une fois, je sais que ce n'est pas donné à tout le monde, mais même une séance avec un psychologue, ça peut vraiment soulager, ça peut vraiment faire du bien. Psychologue ou autre thérapeute, kinésio, hypnotiseur.

  • Speaker #0

    Oui, ce qui nous convient.

  • Speaker #1

    Exactement. De ce vers quoi ça vous attire, allez-y. Parce que c'est important, ça fait du bien. Surtout dans ces moments-là, encore plus.

  • Speaker #0

    Tu sais, il y a des phrases qui sont excessivement énervantes parfois, dans ces moments-là. Et moi, il y a une phrase qui m'agace au possible, c'est les gens qui vous disent toutes mes condoléances Ce truc-là, ça m'énerve. Pourquoi Alors, ça m'énerve parce que, en fait, quand on dit ça, on n'ouvre pas la parole à l'autre. C'est-à-dire que la personne qui souffre, on lui dit tais-toi là, n'ouvre pas la bouche Condoléances, bim, hop, c'est réglé, basta, cosi. Ce genre de phrases convenues, ces espèces de choses qu'on dit à tort et à travers parce qu'on ne sait pas quoi dire d'autre, je pense qu'elles font beaucoup de mal. C'est en ça que je rejoins l'idée du professionnel de santé. Mais c'est surtout qu'on a besoin, quand c'est comme ça, d'un climat sécurisant. On a besoin que l'autre nous autorise à parler. En disant toutes mes condoléances, on n'a pas du tout envie de lui dire si tu savais comme je suis au fond du gouffre On n'a pas du tout envie de lui dire ça. On a juste envie de lui dire merci d'être venu. Et c'est ce qu'on se retrouve à dire d'ailleurs. Merci d'être venu. Alors qu'on n'est pas bien, on vit quelque chose de terrible. Je trouve ça dommage. Et c'est en ça qu'effectivement, je suis très d'accord avec toi, sans faire de publicité pour aucun professionnel, parce que je suis aussi d'accord avec toi. Il faut aller vers les professionnels avec lesquels on est à l'aise. Donc aucun jugement par rapport à ça. Mais tu sais, des fois, ça peut être les livres aussi, comme tu as évoqué tout à l'heure. Et il y a un livre qui a été écrit, je pense à ça maintenant, par Catherine Dolthorne, pas Françoise, même si j'aime beaucoup Françoise, mais là en beaucoup on ne sait pas rien pour nous, qui dit que la mort ne laisse jamais rien, que le mort ne nous laisse jamais seul. C'est quelque chose que moi j'ai reçu comme phrase et ça m'a beaucoup aidée, même si c'est un peu douloureux sur le moment. Je me suis dit, bah si, il nous a laissé tout seul. Le mort ne nous a pas laissé seul, il nous a laissé l'amour. Et cette trace, elle est en nous, et on peut et la nommer et la chérir. Donc le fait de le nommer, c'est existant, c'est là. Et si t'es existant, on n'est pas seul. Et si on n'est pas seul, la mort ne nous a pas tout enlevé. Cette petite phrase-là, je la trouve beaucoup plus intéressante que toutes mes condoléances. C'est sûr. Non, mais c'est rien. Mais je préférerais qu'on me dise à moi, ou je pense que t'aurais peut-être préféré qu'on te dise, je suis là, donc on crée un climat sécurisant. C'est... compatir à ta douleur, mais si tu as besoin d'en parler ou pas d'en parler. Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Parce que parfois, on a juste envie de pleurer.

  • Speaker #0

    On a juste envie de rien dire,

  • Speaker #1

    rien faire,

  • Speaker #0

    de regarder une émission à la télé débile. C'est ça.

  • Speaker #1

    Mais juste d'avoir quelqu'un, quoi.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Bien sûr. On a envie d'être avec quelqu'un, pas forcément au départ, en tout cas, d'élaborer des discussions avec lui. Tout à fait. Mais aussi de comprendre que la personne en face, elle sait que pour l'instant, on n'arrive pas à le voir, mais que... tout ce que la personne qui est partie nous a laissé, on pourra la nommer, on pourra la chérir et on peut la garder. Tout n'est pas parti dans la petite boîte.

  • Speaker #1

    C'est mignon dit comme ça, la petite boîte. J'aime bien. C'est très joli. Je suis complètement d'accord avec toi, mais parfois aussi, je pense qu'il y a beaucoup de maladresse de la part des personnes qui font face à la mort, en fait. Face à des morts qui ne te concernent pas directement. Moi, très clairement, tu vois, à l'enterrement de mon papa, je me disais, Il y avait beaucoup de personnes avec qui il avait travaillé. Donc forcément, moi, c'est des personnes que je ne connais pas ou très peu. Et effectivement, il y a eu beaucoup cette phrase de mes condoléances et tout. Et bon, tu sais que d'une part, c'est les convenances, que c'est une histoire de politesse, de bon, il faut dire ça. Moi, j'ai beaucoup de mal avec les trucs de il faut c'est comme ça que ça se passe. Mais bon, c'est comme ça, c'est la société, quoi. Et effectivement... Je l'accepte. Bon, voilà, les personnes ont dit ça, mais parce qu'aussi, je pense qu'il y a un malaise avec la peine de la personne en face de toi, quoi. Ça aussi, c'est quelque chose vraiment... Je comprends qu'on puisse être malaisée, qu'on ne sache pas quoi dire à une personne qui vient de perdre quelqu'un.

  • Speaker #0

    Parfois,

  • Speaker #1

    c'est délicat,

  • Speaker #0

    quoi. Je vais avoir un petit truc à dire, c'est que... Alors, à la fois, je comprends terriblement, mais je pense que là, il y a un manque de dialogue national là-dessus. C'est-à-dire qu'en fait, les gens ne sont pas éduqués à en parler. C'est un petit peu terrible de dire ça, mais je pense que si on nous apprenait à dire que dans ces moments-là, c'est normal d'être là pour l'autre, de lui dire les vrais mots à ceux qu'on nous a dit, de dire du type bon ben, c'était une personne bien, ça s'en fiche Vous voyez ça aussi. Donc pour dire, je pense qu'il y a un manque de dialogue par rapport à la mort, par rapport au deuil aujourd'hui, un réel manquement là-dessus. Si c'était un sujet national, normal, un sujet qu'on a et qui est naturel d'avoir, on aurait des réactions beaucoup plus naturelles. Et cette malaisance dont tu fais part, qui est bien sûr liée aussi à une pudeur, à la gêne et tout, mais peut-être si on expliquait dès la petite enfance que la mort fait partie de la chose, que quand une personne vit ça, elle est triste. Ça va être difficile pour elle pendant quelques temps. Justement, on va lui dire quelque chose qui sort de notre cœur. C'est très peut-être naïf ou quoi, mais... Ce que je veux dire, c'est que je pense qu'il y a un manque cruel de dialogue social là-dessus. On n'en parle jamais. C'est un tabou intégral en France. Dès qu'on en parle, ou alors c'est pour parler de l'euthanasie, on oublie des étapes tellement importantes avant de parler de ça. Déjà, si on arrivait à parler de la nôtre, de ce qu'on aimerait, de ce qui nous fait peur, on arriverait à mieux gérer aussi la peine des autres. Je pense que ce que tu décris, c'est une réalité, mais que je trouve hyper dommage aujourd'hui.

  • Speaker #1

    Je suis complètement de ton avis, parce qu'il y a un vrai problème de fond. C'est vrai que ce que tu dis est complètement vrai. On ne parle pas de la mort, c'est un sujet hyper tabou en France et même dans notre société occidentale, en fait, parce qu'il y a je ne sais combien de civilisations, que ce soit africaines, que ce soit orientales, où en fait la mort est une fête. En fait, on va fêter le fait que cette personne... passe dans un autre monde. Bon, après, chacun sa spiritualité, etc. Mais on va fêter la vie qu'a eue cette personne au moment où elle décède. Alors qu'en France, qu'est-ce que c'est austère de mourir Waouh Enfin, moi, j'ai souvent dit à mes proches et à ma famille, du coup, je vais le dire publiquement, déjà, vous donnez tous les organes que vous pouvez le jour où je pars. Mais en plus,

  • Speaker #0

    il y a eu deux masses d'organes. Oui,

  • Speaker #1

    sauf la peau et les yeux.

  • Speaker #0

    Bon, d'accord, je garderai la peau.

  • Speaker #1

    je continuerai le podcast avec le reste on donne ce qu'on peut donner mais surtout or oui les gens vont être tristes peut-être vous ne pouvez pas non plus m'en censer mais j'aimerais quand même que ça soit qu'on fête ma vie le jour où je meurs qu'on se dise c'est peut-être hyper utopique hyper bisounours tout ce que je dis mais j'aimerais vraiment qu'on se dise qu'on ne se rappelle pas en mode oui Pauline était comme ci et puis quand même c'était quelqu'un de bien et puis elle a fait ci elle a fait ça Ouais, mais en fait, Pauline aussi, c'est la meuf qui faisait parfois n'importe quoi et qu'on se rappelle, j'en sais rien, mes pires cuites, mes pires putes. Enfin, venez, on rigole, en fait. Mais après, je pense que c'est aussi très personnel. Mais ce que je veux dire, c'est que quand je vois que dans certains pays, on fête la mort de quelqu'un pendant des jours et des jours, et oui, on est triste, mais peut-être que cette personne aussi, elle va être soulagée d'être passée ailleurs. Il y a peut-être un moment aussi où c'est mieux que cette personne soit partie, même si c'est toujours trop tôt, même si c'est toujours trop triste. On est bien d'accord. Pour en revenir à mon papa, qui est le plus gros décès que j'ai pu vivre aujourd'hui, mon père est parti du jour au lendemain, il a fait un arrêt cardiaque. Donc, ça a été hyper brutal, hyper soudain, mais c'est une personne qui avait des problèmes cardiaques, qui avait un traitement pour ça, etc., depuis plusieurs années. Et ce traitement avait plein d'effets secondaires. Enfin, moi, mon père, je sais, il en avait... Désolée, je vais être vulgaire, mais il en avait... Ah La casquette, je n'ai pas été si vulgaire. Il en avait vraiment ras-le-bol de son traitement. Alors ouais, quand il est parti, ça a été terrible, ça a été horrible, mais c'est un monsieur qui a toujours aimé boire son Ricard tous les jours, qui fumait énormément, c'était son plaisir. C'est nul, ne fumez pas autant, ne buvez pas autant, mais c'était son plaisir. Et franchement, quand il est parti, je me suis dit, peut-être qu'en fait il va être mieux. Peut-être qu'il va arrêter de souffrir de ces médicaments qui avaient plein d'effets secondaires, et puis peut-être que là où il est maintenant, il peut fumer autant de gitanes qu'il a envie. Et en fait, est-ce que c'est pas mieux comme ça pour lui que d'avoir la vie qu'il... qu'il n'aimait pas. Mais c'est compliqué de dire ça, parfois de dire ça. Parce que ça voudrait dire que je suis OK avec le fait qu'il soit parti. Non. Je suis OK avec le fait que peut-être il est mieux là où il est aujourd'hui.

  • Speaker #0

    T'as dit beaucoup de choses passionnantes. Non, non, non. Tout était très pertinent. T'as dit une première chose sur laquelle je vais quand même rebondir, si tu me le permets, c'est qu'il y a en effet un... déclin du religieux en France, historiquement. Parce qu'auparavant, la religion te donnait la réponse. C'est-à-dire que tu mourrais, t'allais faire un tour du côté des angelots, ou alors carrément te faire piquer dans le Styx avec les gens qui avaient fait le mal. Mais en fait, aujourd'hui, même si on trouve ça un peu rigolo et qu'on en blague, ce déclin-là a fait qu'aujourd'hui, la représentation de la mort en France, elle n'existe pas, elle est hyper complexe et hétérogène. Du coup, les enjeux, ils sont hyper... hyper... hyper difficile à saisir. Aujourd'hui, on a l'impression qu'il faut être soit mourant, soit endeuillé pour pouvoir parler de la mort. On a l'impression que sinon, tout le reste du temps, on peut se passer d'en parler. Ça, c'est une première chose que tu as dit, qui en fait, historiquement, en France, il n'y a jamais eu un déclin du religieux à ce point-là. C'est compréhensible, et c'est un autre débat, mais pour dire que comme il n'y a pas de réponse toute faite, soit on se fait une réponse parce que toi, tu as été confronté à ça, puis que tu es quelqu'un qui réfléchit et qui a envie de se poser des questions là-dessus. Ou alors on peut faire un déni pendant 70 ans et se dire, voilà. Mais je pense qu'il y a une idée de ça avec le religieux, qui n'est pas le cas dans les autres pays que tu citais, qui ont en fait des croyances religieuses qui les portent, et au moment du deuil, ils mettent en place des protocoles qui leur permettent de faire ce travail finalement. Alors que nous aujourd'hui, c'est un peu à volo. Soit c'est à l'église, mais maintenant on peut aussi se faire brûler. Et en fait, les gens ne savent plus vers quoi aller. Pourquoi et dans quel sens Et je ne dis pas qu'il faut trouver quelqu'un qui nous donne un sens unique. Je dis juste que du coup, les personnes ne se posent pas forcément la question. Et voilà. Et ensuite, pour ce que tu disais pour ton papa, de dire c'est peut-être mal, de dire il est parti et c'est peut-être mieux comme ça. Je suis quelqu'un qui peut dire ça bien souvent. Ça ne fait pas de moi une mauvaise personne. Ça ne fait pas de toi une mauvaise personne, Pauline. Ça fait quelqu'un de toi, une bonne personne qui veut qu'il soit heureux, même. quand il n'est pas là avec toi. Donc je pense que ça fait de toi, au contraire, une grande personne. Enlève de ta tête le fait de culpabiliser, de lui souhaiter le meilleur. Parce qu'en fait, tu lui souhaites le meilleur. Et je lui souhaite aussi.

  • Speaker #1

    Je suis sûre, il est trop bien. Ça me rassure peut-être aussi de me dire ça. Mais je suis sûre, il est là où il est.

  • Speaker #0

    Ça te passionnerait Je veux dire, si tu le savais, si tu savais ce qu'il y avait après, s'il y avait quelque chose après. Est-ce que tu crois qu'il y avait quelque chose après

  • Speaker #1

    C'est le prochain sujet que je voulais aborder. La vision de sa propre mort et de ses croyances après. Mais je voulais juste revenir sur cette histoire de tabou qu'on a. Et je pense aussi qu'il y a un point hyper important que j'aimerais aborder, parce que pour l'avoir vécu, encore une fois, je suis un peu tombée des nues. Il y a deux points. C'est que le premier, la mort coûte cher. Oui. Un enterrement coûte très cher. Voilà. Déjà, moi, j'ai été... estomaqué du prix d'un cercueil en fait. Mon papa s'est fait incinérer, c'était son souhait. Du coup, on s'est dit on va prendre le moins cher étant donné que c'est un cercueil qui voulait brûler. Mais le prix...

  • Speaker #0

    Vous ne voyez pas la tête de Pauline, mais ça valait le détour.

  • Speaker #1

    Non mais le prix d'un cercueil... Je mets des guillemets, c'est horrible. C'est un cercueil bas de gamme.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    tu te dis, mais c'est pas possible, ça coûte un SMIC. Enfin, au secours. Et sans parler de tout ce qui est autour de la cérémonie, des faire-parts, des machins,

  • Speaker #0

    des fleurs.

  • Speaker #1

    Ouais, les fleurs. Bon, j'ai été fleuriste dans une autre vie, donc je le dis, les fleurs, ça coûte très cher. Mais c'est ce qui fait vivre les fleuristes. Voilà, je vous le dis. La mort coûte vraiment très cher. Donc, si vous pouvez souscrire à une assurance d'essai qui coûte 5 balles par mois, allez-y, ça fera du bien à vos proches. Attends,

  • Speaker #0

    je te coupe, mais est-ce que tu crois pas, du coup, en disant ça, que ça devrait être... Moi, je vais dire, je milite pour, mais si on en parlait davantage, est-ce que tu crois pas que ça devrait faire partie des choses qu'on devrait réclamer. On réclame des tas de trucs de notre vivant, on va dans la rue, on demande des aides pour des trucs. Je ne juge pas les gens qui demandent des aides de leur vivant. Bien sûr. Mais est-ce que ça ne serait pas normal qu'il y ait aussi des aides pour aider à mourir correctement

  • Speaker #1

    Ce n'est pas normal.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est pas normal. Quand on a beaucoup d'argent, et tant mieux, ce n'est pas la question, on voit arriver la facture, ça va. Mais quand on voit arriver 5 000 euros comme ça, on n'a pas le choix, en fait. Parce que la légalité, en plus la loi, nous oblige. à prendre une décision. Exactement, on n'a pas le choix. C'est ça. On ne nous laisse pas le choix. Ça signifie que le corps de la personne doit aller quelque part. Et donc, ce quelque part est payant. Et dans ce Ausha, il y a une petite part de moi qui me dit Pourquoi personne ne dit jamais rien Pourquoi on accepte de payer aussi cher quelque chose qui est naturel et qu'on va tous vivre Je suis entièrement d'accord.

  • Speaker #1

    Et ça me fait penser à quelque chose que j'ai vécu par procuration. J'ai perdu une amie dans un accident de voiture quand j'avais 18 ans. Et sa famille, vraiment, très peu de moyens. Et du coup, ça a été terrible, déjà, le jour de l'enterrement, d'entendre parler d'argent. Où, en fait, tout le monde autour parlait du fait qu'ils n'avaient pas pu prendre de tombe, parce qu'elle s'est fait enterrer, parce que tout l'argent est déjà parti dans le cercueil, en fait. Et d'entendre qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter la tombe tout de suite, enfin, la pierre tombale et tout. Et je me disais, mais on est en train d'enterrer une nana qui avait un pige. Et on est en train de parler d'argent. Alors, ce n'est pas la faute de sa famille. Enfin, je ne suis pas du tout en train de les blâmer. Bien sûr. Je me dis, en plus de la perte de leur fille, ils sont en plus en train de se poser des questions sur l'argent. Comment ils vont faire et tout. Je trouve ça horrible. C'est pour ça que je dis vraiment, la mort coûte cher. Et vraiment, c'est peut-être très bête ce que je dis, mais moi, quand mon père est mort, un mois après, j'ai souscrit une assurance décès. Et vraiment, ça coûte 5 euros. Ça coûte 5 euros et ça débloque 20 000 euros pour votre famille quand vous allez mourir.

  • Speaker #0

    Tu sais, c'est l'aboutissement absolu de la stupidité et de la cupidité de notre société actuelle. C'est le paroxysme. Ça veut dire que la mort, ça rapporte... Enfin, les morts rapportent plus à rien. Donc, là, il y a une brèche qui s'ouvre. On a un nombre de gens qui arrivent d'un coup et qui vous assomment. Et je trouve ça inhumain, au final. Illogique, inhumain, non naturel. Mais c'est le paroxysme de notre société actuelle. Ça doit aussi... Les gens qui se font de l'argent sur le dos d'autres qui n'en ont pas du tout, juste pour enterrer ou faire incinérer quelqu'un. Oui,

  • Speaker #1

    ça dignement, en fait.

  • Speaker #0

    Ah oui, mais c'est terrible.

  • Speaker #1

    Il y a un minimum qui devrait juste être là et qui devrait être accessible à tous.

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #1

    Et puis après, ceux qui veulent faire plus font plus, selon leurs moyens, selon leurs envies, etc. Chacun fait ce qu'il veut. Mais effectivement, je pense qu'il devrait y avoir juste un minimum.

  • Speaker #0

    Un minimum. tu sais, à une sorte de RSA de la mort.

  • Speaker #1

    Peut-être que ça existe et qu'on n'est pas au courant, mais j'ai pas l'impression. Et tu vois aussi quand on parlait du fait que ça soit tabou, donc le deuxième gros point que je voulais aborder, c'est que c'est tellement tabou qu'on n'est au courant de rien en termes de droits de succession, par exemple. Genre, qu'est-ce qui se passe après qu'un parent soit mort En fait, tu l'apprends hyper frontalement. Tu disais aussi un petit peu tout à l'heure le fait que quand une personne décède, tout ce qui vient juste après va très vite. C'est vrai que suivant où ça se passe, le corps est emmené à la maison funéraire. Je ne crois pas que ça s'appelle maison funéraire. Je pense que je n'ai pas le bon terme, mais on va dire ça comme ça. Le corps est emmené. Après, toi, tu es contacté par les ponts funèbres pour justement parler des modalités. C'est-à-dire combien ça coûte, qu'est-ce que vous voulez faire et tout. Et en fait, tout ça va très vite.

  • Speaker #0

    Et puis après,

  • Speaker #1

    genre quelques semaines après, vient tout ce qui est administratif. Et là, franchement, nous, on est tombés des nues. Donc, mes parents ont été mariés jusqu'à la mort. Et c'est vrai qu'on a appris des choses, des histoires de droits de succession sur la propriété qu'ils avaient. Et tous ces trucs-là, mais qu'est-ce qu'on n'est pas au courant Et justement, je pense qu'on n'est pas au courant et qu'on est mal au courant parce que c'est un sujet hyper tabou en France de qu'est-ce qui se passe après. Ça, tu vois, c'est un truc où, bon, du coup, nous, c'est plus du tout un sujet tabou chez nous parce qu'il a fallu mettre des choses en place pour la suite, parce que ma maman partira un jour, malheureusement. Mais on a mis des choses en place pour ça. On aurait peut-être aimé le faire avant, même que mon père parte, quoi. Ouais, je trouve que c'est... Un des trucs aussi où je me dis, mais il faut que ça cesse, ce tabou autour de la mort et sur l'après-moi. Qu'est-ce qui va se passer Qu'est-ce qui va rester Vraiment en termes pécuniers aussi.

  • Speaker #0

    Le matériel.

  • Speaker #1

    matériel exactement et ça tu vois c'est un truc où j'encourage vraiment beaucoup mon compagnon à en parler avec ses parents parce que je lui dis il faut que tu saches et il faut qu'ils vous disent aussi des choses comment ça va se passer, la mort on n'en parle pas quoi c'est tabou,

  • Speaker #0

    on préfère pas que ça existe limite si on en parle ça va l'apporter tu vois c'est exactement ce que j'allais te dire il y a énormément de gens qui vivent ça comme une superstition ouais carrément si On va en parler, ça va arriver. Et alors, tu remarqueras que si, par exemple, tu es à un repas, avec des gens vivants, évidemment, mais tu vas en parler. Ou alors, ils vont me dire, Cléophée, ça va le boulot en ce moment En fait, ils ne veulent pas vraiment la réponse. Et là, en fait, si j'évoque quelque chose en disant, là, j'ai eu un cas un peu difficile, sans parler déjà d'un cas personnel, donc une distance, les trois quarts du temps, elles me disent, bon, on va changer de sujet, ce n'est pas très gai tout ça. Effectivement, je suis d'accord. Je préfère me fendre la poire sur des choses bien plus... drôle que ça, pour autant c'est quelque chose qu'on partage avec quelqu'un et qui est vraiment puissant. Et donner cette confiance à quelqu'un, lui dire bah voilà, moi par exemple moi j'ai pas envie de me faire brûler ça dure pas des heures en fait,

  • Speaker #1

    c'est important de le dire.

  • Speaker #0

    Mais en fait on est en accord avec soi, la personne en face l'a quand même entendu que ça lui plaise ou non finalement, et il y a une connexion qui se produit et quand la personne décède L'autre personne n'est pas démunie pareil, parce qu'elle se dit je sais ce que je dois faire, je sais ce qu'elle attendait de moi C'est pareil, ça rend le travail du deuil tout autre. Quand on est perdu, moi je rencontre énormément de familles qui n'en ont aucune idée ou qui ne sont pas d'accord avec la personne ou entre eux, ce genre de choses, parce que les débats n'ont jamais eu lieu. Et là où je te rejoins, c'est qu'en plus, au-dessus de tout ce problème-là, il y a les problèmes matériels. Ça veut dire comment on va payer les trucs de maman ou papa. Moi, je ne veux pas payer ci, je ne veux pas payer ça. Et la maison, elle revient à qui et comment. Toutes ces choses-là, en réalité, sans vouloir faire la pub des soins palliatifs, c'est qu'il y a chez nous possibilité d'aider les gens qui rencontrent cette situation-là. Et il ne faut pas hésiter à nous le faire savoir quand on est perdu. Normalement, on voit les gens qui sont perdus. C'est à nous aussi d'être force de proposition là-dessus. J'essaie autant que faire se peut de le faire, mais il y a des personnes. Seulement aujourd'hui, c'est méconnu. Parce qu'en fait, on a l'impression qu'on est tous seuls. On est orphelins de la personne et orphelins tout court. C'est terrible. On est assénés de la mort, on est assénés financièrement, on est assénés et on se dit, il n'y a personne pour m'aider, comment je vais faire pour traverser tout ça Je trouve que ça fait beaucoup. Il y a des personnes qui existent et qui peuvent être ressources pour aider. On peut faire lien avec d'autres disciplines et dire, voilà. vous pouvez contacter telle personne. Il ne faut pas hésiter à demander. Je dis ça pour les personnes qui nous écouteraient et qui se diraient je suis perdue ou ça me fait peur Il ne faut pas hésiter à demander dans des services, même hospitaliers, ils peuvent vous dire de vous rapprocher de telle personne qui peut peut-être vous aider. Ce n'est pas notre travail, mais on a des contacts, on est habitués à travailler avec des personnes. Ça peut aussi soulager un petit peu, à défaut de soulager financièrement et émotionnellement. Techniquement, dans les démarches administratives,

  • Speaker #1

    on peut...

  • Speaker #0

    qui sont lourdes, j'en ai bien conscience, et qui sont les mêmes de notre côté, on va dire un petit peu soulager la chose. Mais j'ai beaucoup de compassion pour tout ce que tu viens de dire, parce que je connais la lourdeur de tout ça. Et encore une fois, je vais te redire la même chose, mais je crois à l'amour et à la parole. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, c'est plus au centre de rien. Et ça me désole, mais si on mettait au centre de tout les dîners de famille, L'amour et la parole, un jour on parlerait tous de la mort, on se dirait bah mince, j'ai pas envie que ça t'arrive Après tout, c'est vrai, on n'a pas envie que ça arrive. Bien sûr que non. Qu'est-ce que ça change de le dire Vous lui avez dit, la personne elle le reçoit, alors elle va peut-être bougonner un truc parce qu'elle est gênée, mais elle l'aura entendu. C'est vachement mieux que de l'entendre quand on est dans sa petite boîte quand même. J'ose espérer. Donc ce tabou-là, je pense que c'est quelque chose vraiment sur lequel je me bats, c'est d'arrêter avec ça. On peut en parler sans pleurer, on peut en parler juste pour en parler, on peut pleurer, évidemment,

  • Speaker #1

    bien sûr.

  • Speaker #0

    Ça peut être quelque chose aussi, finalement, de très factuel, tu vois, de dire, bon voilà, moi, toi tu m'as dit par exemple, tout sauf mes yeux et ma peau, bon,

  • Speaker #1

    comme ça je suis moi qui le sais.

  • Speaker #0

    Je l'ai noté, comme ça, ça ira toujours dans ce sens-là. Mais ce que je veux dire, c'est que quand on aime sincèrement les gens qui nous entourent, Alors moi, j'aime aussi des gens qui ne m'entourent pas parce que j'ai trop d'amour à donner. Mais je veux dire, quand on aime les gens qui nous entourent, c'est quand même... le geste ultime d'amour que de lui dire quand on ne sera plus ensemble, quand on ne vivra plus cet amour, toi et moi, comment on pourra faire au mieux pour que cet amour ne s'effrite pas parce que j'aurais fait ce que tu veux, parce que... finalement, même dans la mort, on se sera aimé. Et dire ça, je sais que peut-être des gens vont dire elle est complètement barjot cette fille mais pourtant, je pense que c'est l'essence de nos existences. C'est la petite flamme à l'intérieur. Bien sûr, elle s'est éteinte pour quelqu'un, mais qu'est-ce qu'on peut faire pour que ça soit moins difficile C'est simplement d'en parler. Alors, je sais, il y a des gens qui vont me dire moi, je ne peux pas dire ça à mes parents On peut toujours. petit à petit, une personne par une personne. Si on laissait un peu plus la parole à des gens qui croient de la mort de temps en temps, on avancerait sur le sujet. Mais on préfère avancer sur des sujets tellement plus futiles. Et c'est bien, hein Faut du futile. Mais quand même. Éluder cette question-là, éluder le qu'est-ce que je veux, qu'est-ce que j'aimerais, avec qui, dire aussi j'ai peur, peut-être. Je suis bien, je suis heureux, là. Et si d'un coup je perdais tout ça, c'est... Quand on réfléchit deux minutes, on se fait waouh, c'est terrible

  • Speaker #1

    Mais c'est dingue aussi de se dire ça.

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Parce que ça veut dire qu'on arrive à se rendre compte de ce qu'on a.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Mais ça, ça fait pas mal.

  • Speaker #1

    Mais il y a beaucoup de pudeur aussi. Je pense qu'il y a beaucoup de personnes qui sont pudiques de ça.

  • Speaker #0

    Oui, mais tu sais, avant, les gens étaient pudiques de dire je suis homosexuelle Et c'était bien dommage. C'est que ça n'a aucun sens. Là, c'est pareil. C'est quelque chose de naturel, c'est quelque chose qui est là. Et je peux le prendre pour. sur plein de sujets. Encore, je l'ai pris cet exemple-là parce qu'il est d'une évidence. Mais de dire, voilà, maintenant j'arrête, je me fous un peu à poil, pas tout le temps, mais là-dessus quand même.

  • Speaker #1

    Oui, puis en plus, on peut le faire de différentes manières.

  • Speaker #0

    On n'est pas obligé de le parler à l'oral.

  • Speaker #1

    On peut aussi l'écrire. On peut utiliser plein de formats différents. On peut faire une note vocale. On peut faire une vidéo. On peut le peindre. évidemment je pense encore à l'expression par l'art pour pallier à la pudeur parce que parfois ça aide beaucoup plutôt que de parler de communiquer ses sentiments et tout et je pense qu'il y a plein de manières différentes pour dire des choses que ça soit autour de la mort ou pas mais parfois ça peut vraiment faire du bien et puis une fois que c'est dit c'est pas un sujet sur lequel on va forcément revenir tous les jours en disant alors du coup allez on va en reparler non c'est bon une fois qu'on a abordé le sujet qu'on est clair là dessus c'est bon On passe à autre chose, on peut reparler des futilités du rouge à lèvres.

  • Speaker #0

    Ce que je veux dire, c'est que du coup, quand la mort arrive, et que tu me parlais du fait que les gens se concentrent sur l'argent, c'est un réflexe psychologique qui est tout à fait normal. C'est très rassurant, c'est très concret. Ça fait flipper parce que c'est beaucoup d'argent, mais c'est très concret. Du coup, ça nous permet d'agir concrètement sur quelque chose qu'on ne maîtrise pas du tout. C'est un côté rassurant. Au début, on se raccroche un peu au démarre, Ausha faire, parce que le faire... le faire à quelque chose de magique qui nous fait oublier que quand on va arrêter de faire,

  • Speaker #1

    ça va faire vivre la chose.

  • Speaker #0

    C'est ça, c'est tout à fait ça. Mais du coup, je maintiens fermement mes positions que peu importe la manière d'en parler, c'était pas la manière dont... Le sujet, ça n'en est pas un, parce qu'effectivement, tu as tout à fait raison, il faut le faire comme on le sent, mais il faut arrêter de faire un déni sociétal. Sur ça, il faut arrêter de cacher les gens dans des EHPAD glauques. Il faut aller, enfin, il faut aussi retrouver le sens de la vie, se dire que ce n'est pas parce qu'on a placé cette personne dans un service qu'elle est heureuse, ou que ça ne remplace pas l'amour de ses enfants, l'amour de son mari.

  • Speaker #1

    Son foyer aussi, d'être chez soi avec ses affaires, ses habitudes, ses odeurs.

  • Speaker #0

    Bien sûr, j'ai de très bonnes blagues, mais ça ne remplace pas... Rires Vous ne voyez pas la tête de Pauline, mais elle est suspicieuse.

  • Speaker #1

    J'attends comme ça.

  • Speaker #0

    C'est que la joie et tout ce que je peux mettre dedans, ça ne remplacera jamais tout ce qu'une famille, un foyer, des habitudes représentent. J'essaye, mais je ne suis pas encore sur rire et chanson. bientôt dans votre radio ici mon sketch je vous le présente allez c'est ce soir on y va tu vois je te mets un jingle et tout ah ouais tu joues quoi parce qu'il faut aller toujours plus loin Pauline promis c'est mon frère qui fait le mixage si tu veux je lui demande de le rajouter s'il vous plaît Si vous m'entendez,

  • Speaker #1

    mettez-moi un chouette jingle pour ma carrière picture. Ça permettra d'alléger cet épisode, ça peut être une bonne idée.

  • Speaker #0

    Tout à l'heure,

  • Speaker #1

    tu m'as posé une question de savoir qu'est-ce qu'il y avait pour moi après Qu'est-ce que j'imagine en tout cas Tout à fait. Du coup, si ça te va, on passe sur le parler de notre propre mort à nous, comment est-ce que on perçoit ça, comment est-ce qu'on peut le voir et tout, pour répondre à ta question. Et c'est marrant parce que j'en ai parlé il n'y a pas très longtemps avec mon copain et... et ma mère et mon frère. Moi, j'imagine que quand on meurt, on se retrouve dans un espace où je ne saurais pas l'expliquer. Genre, c'est très nuageux, très volatil et tout. Et qu'on est dans un espace où il n'y a que les trucs qu'on kiffe. Genre, pour donner une image, moi, mon père, je l'imagine accoudé à un bar et toute la journée ils papotent avec le barman ou avec des gens qui viennent aussi au bar. Et genre, il y a tous ces chiens aussi qui sont dans cet espace-là. Et ils fument ces clopes et ils boissent ces Ricards et ils papotent et ils rigolent comme ça. Et en fait, c'est comme ça que je le vois. Genre, quand je l'ai expliqué à mon copain, il m'a dit Ouais, du coup, pour toi, c'est un peu genre un espèce d'image de paradis. Et je lui dis Bah, un peu, ouais, en fait. Genre, t'es dans un lieu où tu te sens bien, où t'es apaisée et où t'es prêt à accueillir toutes les autres. de personnes qui te sont chères qui vont arriver plus tard. Et moi, je le vois comme ça. Et souvent, je me dis, le jour où je vais partir, je sais que je retrouverai les chiens que j'ai perdus, je retrouverai mon papa. Et du coup, on découle la réponse à la question de est-ce que j'ai peur de mourir Du coup, pas du tout. Moi, limite, c'est très bizarre ce que je vais dire. Limite, j'ai hâte que ça arrive. J'ai hâte de savoir ce qu'il y aura derrière. Alors, je ne dis pas du tout... dans des envies suicidaires. C'est pas du tout moi.

  • Speaker #0

    On va vous poser le numéro, discrètement.

  • Speaker #1

    Aidez-la,

  • Speaker #0

    s'il vous plaît. SOS Amitié, s'il vous plaît. Contactez, répondez.

  • Speaker #1

    Ça fait deux heures qu'on parle, elle commence à me dire des trucs bizarres.

  • Speaker #0

    C'était soit disant un podcast gentil. Elle a commencé à prendre un couteau, je crois. Faites quelque chose.

  • Speaker #1

    Attention, elle a pris la javel. Attends, non

  • Speaker #0

    Pauline,

  • Speaker #1

    nous Donc non, j'ai pas envie de mourir. Enfin, j'ai pas envie de me tuer. Je vous rassure. Raccrochez votre téléphone.

  • Speaker #0

    Elle est toujours en vie pour l'instant.

  • Speaker #1

    Si cet épisode n'est pas publié, c'est que...

  • Speaker #0

    Oh non, on aurait parlé pour rien. J'irais cracher sur ta tombe, Pauline. Yes.

  • Speaker #1

    Bref. Tout ça pour dire qu'effectivement, je n'ai pas peur de mourir. Je n'en suis pas à me dire vite demain. Mais ouais, je suis en mode, on verra ce qui se passera. Je suis déjà contente de ce que j'ai vécu aujourd'hui. Et souvent, quand je dis ça, les gens me disent, oh là là, mais arrête, t'as encore plein de belles choses à vivre. Je leur dis, oui, peut-être, mais en fait, on n'en sait rien. Laissez-moi, je me contente déjà de ce que j'ai eu jusqu'à maintenant et j'en suis déjà très contente. Peut-être qu'effectivement, je vivrai encore mieux plus tard. En fait, personne ne le sait. Donc, c'est pour ça que je suis déjà en... paix de me dire, si je pars demain, je pars demain. Le seul truc, et bon, ça, c'est mon idéal. Si je peux ne pas souffrir, ça fait super, mais on choisit pas trop, en général. Donc, moi, j'ai pas trop peur de mourir. Je me dis, pourquoi pas Ça serait une expérience. Et puis, j'ai vachement ce truc de me dire, je retrouverai sûrement tous ceux qui sont déjà partis avant moi.

  • Speaker #0

    T'imagines un petit cocoon, quoi. Plus qu'un paradis. C'est un paradis, c'est un petit peu... Ton paradis ne serait pas celui de ton papa.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Voilà, mais c'est un cocon dans lequel...

  • Speaker #1

    Ça sera doux, quoi. On dirait bien.

  • Speaker #0

    Ouais, je comprends.

  • Speaker #1

    Je le vois vraiment comme ça. Et toi, comment est-ce que tu perçois ta mort, entre guillemets Enfin, comment est-ce que tu vis ça, le fait de mourir

  • Speaker #0

    J'ai eu peur plus jeune. Je me suis retrouvée dans des situations où j'ai eu très, très peur de mourir. Et aujourd'hui, plus du tout. Aujourd'hui, vraiment plus du tout. Aujourd'hui, moi aussi, je suis en paix avec ça. Alors en fait, c'est un peu la même chose que toi, c'est que je disais, ma mort elle va arriver, c'est très bien comme ça. Elle va arriver, c'est très bien comme ça. Elle arrivera...

  • Speaker #1

    Ça arrivera quand ça arrivera.

  • Speaker #0

    Ouais, mais c'est plutôt bien. Tu sais, moi je crois à rien. C'est un petit peu bizarre à dire. Je crois à rien, j'imagine rien. Alors la seule chose que j'arrive à imaginer, c'est des espèces de fils qu'on ne voit pas nous. Comme s'il y avait plein de fils invisibles qui seraient dans l'air. Et ces fils-là, qu'on ne toucherait pas, qu'ils ne nous toucheraient pas, mais qu'ils nous entourent sans qu'on les voit, seraient le reste de l'amour qui a existé quelque part de quelqu'un à quelqu'un. J'ai du mal à croire que rien ne reste, vraiment. Et je crois vraiment que... Je crois pas que la colère, la haine, toutes ces choses-là, elles restent. Je vois trop de gens. Ce qui reste, c'est... Même quand les gens me disent mon fils n'est pas venu me voir c'est quand même l'amour qui a porté cette phrase-là à un moment donné. Donc, si je devais imaginer quelque chose, même si du coup je me visualise pas dedans comme toi ou plein de gens, Je me dis qu'il ne restera peut-être pas à moi, mais quelque part, peut-être dans un fil, quelque part, il y aura une petite vibration de ce que j'aurais été, de ce que j'aurais voulu et de tout l'amour que j'ai reçu et que j'ai donné. Je suis un peu plus dans cette idée-là. Ok,

  • Speaker #1

    je vois. Je vois complètement. Et par contre, ce que je veux dire, c'est que là aujourd'hui, je dis que je n'ai pas peur de mourir. C'est comme ça que je vois la mort, machin et tout. Je me laisse le choix aussi de changer d'avis. Peut-être que dans le vivant, je dirais que j'ai peur. Enfin, j'en sais rien. Ou peut-être que si demain, on me dit que j'ai une maladie incurable et que je me retrouve avec Cléophée qui s'occupe de moi dans mes derniers jours, je ne dis pas que là, il me dirait pire. Franchement, je pense que je serais bien.

  • Speaker #0

    Après, tu sais, là, on parle dans un absolu où on est en relative bonne santé.

  • Speaker #1

    Et voilà, exactement.

  • Speaker #0

    On va dire que se rajoute à ça la douleur. souffrir en fait. Souffrir, ça change une personne. Avoir mal, c'est-à-dire, même déjà quand on a une très grosse migraine, on n'est plus nous-mêmes, on n'a plus patience, etc. Donc, il y a des facteurs que là, dans notre discussion, qui sont manquants, qui est que il y a la grande souffrance physique ou psychique. Il y a des gens qui se disent je vais mourir et j'ai peur et j'ai peur et j'ai peur et c'est normal.

  • Speaker #1

    Oui, c'est normal.

  • Speaker #0

    J'ai vu personne ne pas avoir peur à un moment, mais j'ai vu des gens... Et alors, je vais dire un truc, alors c'est pas de la magie, mais souvent, quelques jours avant que les gens meurent, ils sont apaisés. Il y a un vrai... Alors, ça a diverses explications. Je ne prends pas de partie dans les explications. Il y a des explications très scientifiques qui expliquent que c'est chimique et qu'il y a plein de choses qui rentrent en jeu. Je pense qu'il y a de ça. Et puis, il y a aussi apparemment quelque chose de plus spirituel qui... passerait et d'un coup il y a un apaisement, un équilibre que les gens trouvent. Et je sais que quand ils en sont là, que la peur est partie, qu'ils vont y aller, tout doucement et tranquillement. Et ça se vérifie dans nombre de cas. Donc là-dessus il y a aussi quelque chose qui est titillant parce que j'ai pas de réponse à te donner, il y a des tas de spécialistes et d'éminents professeurs qui t'en parleraient de manière très cartésienne. et il y a de ça, je pense réellement mais pourquoi ce processus chimique se met en place maintenant, est-ce que la nature est tellement bien faite qu'elle nous protège juste avant ou alors est-ce qu'il y a autre chose qui nous protège ou est-ce que ça a besoin de nous protéger, ça voudrait dire aussi peut-être, je ne sais pas il y a beaucoup de questions dont je n'ai pas les réponses et ça me va de ne pas les avoir mais c'est des choses qu'on voit qu'on observe et qu'on se dit une personne qui est très stressée, très tendue d'un coup, bam il se passe quelque chose, et là, on a l'impression qu'il y a un mieux. C'est ce qu'on appelle le dernier bonjour. Souvent, c'est un bonjour éclatant qui sort de nulle part. Et souvent, la famille croit, croit à un rebondissement et en fait, pas du tout. Des fois, on appelle le lendemain et on dit, elle est partie. Voilà. Juste pour dire que parfois, les choses sont un peu étranges.

  • Speaker #1

    Pour en avoir un petit peu parlé avec des personnes qui côtoient la mort, en fait, comme toi. dont un collègue qui était avant-anatopracteur qui me disait Mais tu sais Pauline, c'est vrai qu'il y a souvent un pic des décès après les fêtes parce que souvent les personnes se disent C'est bon, j'ai vu tout le monde, je peux partir. Ou après un anniversaire, ou après un événement, un truc qui leur tient à cœur ou quoi au caisse. Et quand il m'a dit ça, je lui ai dit Purée, c'est vrai que moi mon père il est parti le lendemain où on a fêté Noël tous ensemble. Et genre vraiment le lendemain quoi. Du coup, ça rejoint carrément ce que tu expliquais, qu'il y a, je pense, une forme d'apaisement ou j'en sais rien, une sorte d'accomplissement ou d'acceptation en se disant allez, c'est bon maintenant, je suis OK, je peux y aller Mais comme tu disais, ça n'enlève rien à la peur qu'on peut avoir et je pense que c'est normal. Je disais j'ai pas peur de mourir encore une fois, je reviens dessus, mais en fait, j'en sais rien de comment est-ce que je vais partir, peut-être que ça se fera en acclapement de doigts et j'aurai pas le temps d'avoir peur. Ou peut-être que je vais flipper pendant des années et des années parce que, je ne sais pas, j'aurai une maladie. Ou voilà, en fait, on n'en sait rien. Mais ouais, je pense qu'il y a vraiment un moment où... Peut-être pas tout le monde, mais il y a peut-être certains êtres humains qui se disent là, j'accepte, c'est OK

  • Speaker #0

    Tu sais, alors ça aussi, j'aime pas le terme, mais j'arrive pas à en trouver un autre, c'est un peu une bagarre que j'ai parfois avec les accompagnants. Parce que quand tu me dis il est parti après les fêtes quelque part, il a peut-être senti qu'il pouvait. Alors tu sais, il y a beaucoup d'exemples, par exemple, tu prends, je pense à un monsieur, Il ne voulait plus manger, ce monsieur. C'était d'une douleur infinie pour lui de manger. Donc, lui nous avait fait part de ça, du fait qu'on allait dé-médicaliser tranquillement, ce qui est très différent de donner la mort. Je le place quand même pour ne pas qu'on se prenne des... Lui avait demandé qu'on arrête petit à petit les soins, parce que lui souffrait beaucoup et que nous, on était au bout de ce qu'on pouvait faire. Donc, ce monsieur, quand sa femme venait, il se forçait à manger. Parce qu'elle lui disait, il faut manger, il faut prendre des forces. Et c'est évidemment compréhensible. Et donc ce monsieur, il souffrait. Donc il vivait pour elle. Il souffrait pour elle. Et un jour, j'ai eu cette discussion très désagréable avec sa femme pour lui dire, vous savez, aussi il y a un moment, il faut lui dire, tu sais, je suis là, mais tu peux partir. Je suis là, mais tu as le droit de lâcher. Et je me suis fait... Pas incendier, mais... Et je l'entends aussi. J'entends que ça peut être pris de manière violente en me disant, mais c'est quand même mon mari, on va quand même pas le laisser mourir comme ça, comme un chien, parce que c'est ce que j'entends, comme un chien. Et je ne suis pas du tout une soignante qui laisse mourir les gens comme des chiens. Mais comme si c'est la volonté de la personne, la personne, elle n'en peut plus, en fait. Simplement, il faut l'autoriser à partir. C'est très, très compliqué, ce schéma-là, ce que je suis en train de dire. Ça va heurter beaucoup de gens. Je ne sais pas ce que ça heurte chaque jour que je travaille.

  • Speaker #1

    J'imagine bien, parce que de toute façon, c'est aussi tout un sujet dans notre pays. Alors là, effectivement, ce dont tu parles, ce n'est pas de l'euthanasie. Pas du tout. Mais ça peut aussi rejoindre ce sujet de la légalisation de l'euthanasie, etc. Je n'ai pas forcément envie qu'on rentre dans le débat.

  • Speaker #0

    Non, ça m'était inutile.

  • Speaker #1

    Je pense aussi que c'est important de dire qu'effectivement... Comme tu le disais très bien, il y a un moment, les personnes sont à bout. C'est la fin. Il n'y a plus rien à faire. Il n'y a plus rien à espérer. Il y a des questionnements qui se posent. Oui. Et les apports gagnants, je pense que c'est effectivement très difficile de lâcher prise en se disant Ok, c'est bon En fait, je reprends beaucoup l'histoire de mon papa. Désolée, c'est un peu trop omniprésent.

  • Speaker #0

    Pas du tout.

  • Speaker #1

    Mais pour moi, c'est un exemple dans le sens où, en fait, On a appris après sa mort que l'état de sa maladie était bien plus grave que ce qu'il nous disait. Et au début, on était un peu en mode, pourquoi il ne nous a pas dit Et en fait, la réponse est venue très vite, c'est qu'il voulait qu'on lui foute la paix. Et c'est son droit. Et il y a plein de gens autour de moi qui m'ont dit, ouais, mais c'est égoïste, si vous avez dit la vérité, peut-être que si. Et puis ça, vous auriez pu vous préparer. De un, t'es jamais préparé. qu'on sache ou qu'on ne sache pas, il serait mort, quoi. Et de deux, on lui a foutu la paix. Enfin, je pense que c'est très dur pour des personnes malades et qui sont transparents avec leur famille, d'avoir une famille qui, toute la journée, va dire Tu ne fais pas ci, non, fais pas ça, ah, tu ne devrais pas faire ça, parce que gna gna. Et puis, ah, migni, et ça, ce n'est pas bon pour toi. Et waouh, waouh, waouh. Il respire encore, on peut profiter de lui ou...

  • Speaker #0

    Comment ça se passe Tout à fait. Et ça, ce n'est vraiment pas une chose... Alors, c'est... C'est une des choses les plus difficiles au quotidien, au boulot. C'est que je suis là pour écouter les familles, au même titre que les personnes que je soigne. Pour autant, c'est les personnes que je soigne qui décident. Ça veut dire que c'est logique. Mais moi aussi. Mais c'est très compliqué. Encore une fois, je reviens sur cette phrase, mais j'ai entendu un nombre de fois, ma mère est morte comme un chien. Non, elle n'est pas morte. Elle a beaucoup souffert. Ça, c'est une réalité. Je sais que ça va heurter, malgré moi, des gens de dire ça. On ne sait pas à l'heure actuelle la vérité de la chose. La plus crue possible, c'est qu'on ne peut pas, on ne sait pas tout soulager. On fait de notre mieux, mais il y a des choses qui sont inévitables. Je ne palie pas à la mort, c'est-à-dire que je ne pourrais pas empêcher que ça arrive. Je ne pourrais pas... Il existe plein de moyens aujourd'hui, etc. Mais il y a des douleurs qui sont au-delà de tout, que l'on ne peut pas entièrement soulager. Il y a des personnes qui arrivent à l'épuisement de supporter ça pour faire plaisir à leur famille. Et là, c'est très compliqué quand arrive ce moment-là, qui est évidemment non seulement compréhensible. Mais je trouve que c'est beau quand quelqu'un dit bon, non, je vais manger parce que ma femme, elle va se tracasser

  • Speaker #1

    C'est une preuve d'amour.

  • Speaker #0

    Mais de l'autre côté, il faut que l'autre personne fasse le chemin et se dise je l'aime tellement Là, ça suffit. Après, il y a trois heures de soins parce que le monsieur, il n'arrive pas à déglutir. On ne peut pas infliger à quelqu'un tout ça pendant des jours et des jours et des jours. Et c'est très compliqué parce que les gens, ils arrivent et disent vous la laissez comme ça, vous avez enlevé la perfusion Je dis, oui, mais votre maman, elle souhaite qu'on m'arrête les soins. On est là pour elle. Si elle change d'avis, je remets immédiatement la perfusion. Pour l'instant, ce qu'elle souhaite, c'est qu'on m'arrête la perfusion parce qu'elle n'en peut plus. Et là, c'est très compliqué parce que tu te retrouves avec des gens qui pensent qu'on maltraite, alors qu'en fait, si on prend un tout petit peu de recul, quelque part, sans le vouloir, c'est inconscient.

  • Speaker #1

    Mais oui, c'est eux qui maltraitent. Alors que toi, tu prends en considération l'avis de la personne qui est concernée.

  • Speaker #0

    C'est mon travail. C'est beaucoup plus facile, je ne jette pas du tout la pierre, ce que je suis en train de faire, ce n'est pas du tout ça, c'est d'essayer de faire comprendre aux gens que quand on va vers eux, qu'on leur dit, vous voyez, votre maman, elle a souhaité qu'on arrête la perfusion, là, elle n'y arrive plus, il faut qu'on en parle, parce que c'est son souhait. Ou par exemple, elle nous a dit dans ses volontés que quand elle en arrivait là, elle souhaitait par exemple une sédation profonde, ce qui ne veut pas dire qu'on tue la personne, ça aussi, je reviens là-dessus. C'est juste, on amène la personne à s'endormir un peu plus tranquillement. Mais ça aussi, on en parle avec les gens. On est là pour eux. Et la famille, c'est très compliqué. Parce qu'ils ont leurs sentiments qui sont très contradictoires. Et puis, qui s'accrochent encore à de l'espoir de quelque chose. C'est dur de leur enlever ça, tu vois. Enlever l'espoir des gens, c'est terrible. Pour moi, il y a tellement d'espoir, c'est terrible. Mais la seule chose... Parfois, effectivement, on se prend un petit peu des murs, mais c'est pour leur bien aussi. Qu'ils comprennent que c'est pour leur bien à tous. Ce n'est pas évident tous les jours.

  • Speaker #1

    De toute façon, la mort est dure pour les vivants. C'est ceux qui restent qui vont vivre avec la mort. Donc, effectivement, ce n'est pas facile. Je pense qu'on a fait le tour pour cet épisode, qui est un épisode délicat, mais qu'on a essayé d'aborder avec bienveillance déjà. et aussi en essayant de montrer que la mort peut avoir de la beauté du positif, que c'est pas toujours une fatalité que de quitter ce monde en tout cas Clophe merci beaucoup mais vraiment merci pour ton intervention dans ce podcast ça a été un plaisir de te recevoir et d'en discuter

  • Speaker #0

    Merci à toi Pauline, ça a été hyper doux et hyper enrichissant pour moi de pouvoir échanger avec toi là-dessus et tu m'as fait... pensé, ça sera ma petite clôture à moi, à une phrase aussi que j'aime beaucoup qui est de dire ce qui m'intéresse c'est d'investir le cœur des gens dans le présent plutôt que d'être incomprise à jamais. Je pense que tu es quelqu'un qui touche au cœur les gens qui sont avec toi et qui sont présents. Donc c'est beaucoup plus important qu'être incomprise à jamais.

  • Speaker #1

    Et bien on va clôturer cet épisode en chialant.

  • Speaker #0

    Non Super. Je t'en prie, c'est moi qui te remercie Pauline.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir partagé ce moment avec nous. Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à en parler autour de vous et sur les réseaux sociaux. Et pour rappel, le podcast à nous deux, c'est un mardi sur deux.

Description

Avant tout attention ⚠ Cet épisode aborde le sujet sensible de la mort 🕊


Cleophée m’accompagne avec toute sa douceur pour discuter de ce sujet délicat mais ô combien important : on parle du deuil, de comment nous avons pu vivre le décès de proche autour de nous, de comment la mort est vu dans notre regard et celui de la société, est-ce qu’on a peur de mourir ? Qu’est ce qu’on imagine après ? 🐦‍⬛


En bref, c’est un sujet qui aborde beaucoup de point et qui j’espère pourra faire du bien à vos cœurs malgré son aspect très lourd 


Pauline ✨


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Salut, bienvenue sur le podcast de a nous deux. Avant de commencer cet épisode, je voulais juste prévenir que celui-ci aborde un sujet très sensible. Aujourd'hui, on va parler de la mort. Préservez-vous si vous traversez une période difficile, si vous êtes sensible en ce moment, si vous êtes en dépression, que vous avez un petit moral, que vous vivez une période de deuil ou que vous êtes en train de vivre. des choses autour de la mort, s'il vous plaît, préservez-vous et n'écoutez peut-être pas cet épisode. Ou venez peut-être l'écouter plus tard, quand cette période difficile sera passée. La mort fait partie de la vie. C'est souvent très bateau comme phrase, mais en fait c'est notre réalité. Comme beaucoup de choses vivantes sur cette planète, on est pour mourir. On peut avoir peur de cela, ou bien l'attendre avec patience. C'est souvent dur à vivre lorsqu'un proche décède. C'est souvent trop tôt, et la période de deuil est délicate. Nous avons tous un rapport différent avec la mort. que ce soit pour nous ou pour les autres. J'ai décidé d'en discuter avec Cléophée. Salut à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast. Aujourd'hui, je suis très contente de vous faire partager cet épisode avec Cléophée, qui m'accompagne pour parler de ce sujet très délicat qui est la mort. Et j'ai voulu inviter Cléophée, enfin, c'est même pas moi qui l'ai invitée forcément. Cléophée est venue à moi pour qu'on puisse notamment parler de ce sujet, parce que Cléophée travaille... dans un service soins palliatifs. Donc, elle accompagne des personnes qui sont en fin de vie. Donc, je trouvais qu'elle était très à même de venir parler de ce sujet de la mort. Cléophée, pour toi, ça fait quoi d'accompagner des personnes qui sont en fin de vie Alors,

  • Speaker #1

    bonjour Pauline. Je suis ravie déjà d'être ici. Je suis ravie qu'on ait cette discussion toutes les deux et qu'on puisse parler de ça, en effet. Alors, du coup, je travaille en tant qu'infirmière en soins palliatifs. Je me suis dit que peut-être il serait bien qu'on définisse un petit peu ce que c'est. Pour que je puisse t'expliquer ce que moi je ressens. Peut-être que tu aies une idée de ce qu'on fait réellement. Car il y a énormément d'idées reçues sur ce service-là. Et je me suis dit qu'on passerait peut-être à côté du sujet si on partait pas d'une définition commune et d'une réalité finalement. Qu'est-ce qu'on fait en soins palliatifs En soins palliatifs, il faut savoir que... On a une idée historique de l'infirmière qui est au chevet du malade, qui tient la main et qui attend que la personne meure. Ça, c'est l'idée que la plupart des gens ont et qu'on attend un cancéreux qui va rester là trois jours et qui va finir par mourir et finalement, on attend la mort. C'est, à mon sens, l'idée un peu reçue qu'ont les gens de manière générale. Sauf que c'est très loin d'être ça. En tout cas, c'est bien plus que ça. Les soins palliatifs aujourd'hui. ce sont des soins qui sont actifs et qui prennent en charge de manière globale les personnes. C'est ce qu'on appelle une prise en charge holistique, c'est-à-dire qui prend en compte la souffrance psychologique, la souffrance sociale et la souffrance spirituelle. Alors, je ne dis pas ça juste pour crâner, je dis ça parce que c'est l'essence même de la philosophie palliative. Palliative, ça veut dire pallier. Pallier, ça veut dire pallier à quoi C'est au curatif, c'est-à-dire au fait de soigner, de guérir. Aujourd'hui, la fonction des soins palliatifs, ce n'est absolument pas de guérir la personne de la pathologie pour laquelle elle vient chez nous. C'est vraiment, au départ, pallier au curatif pour finalement prendre la place du curatif et mettre la personne dans un confort, si je puis dire, un soulagement et qu'il existe soit dans la globalité de la personne. C'est la spécificité. de ce service-là. C'est-à-dire qu'on entend tout ce qu'elle a comme problème physique, comme problème émotionnel, comme problème psychologique, familiaux, et on prend point par point les choses et on essaye d'établir avec elle, et non pas juste dans l'attente de ce qu'elle veut. C'est avec elle de mettre au point un plan qui lui conviendrait pour la laisser dans la dignité de ce qui va se passer. Je ne sais pas si c'était clair.

  • Speaker #0

    Si, si. Et je trouve ça très bien que tu fasses ce point parce que c'est un point C'est vrai qu'on peut avoir un peu cette image comme dans les films de guerre, où tu as l'infirmière qui va être au chevet du soldat qui est en train de partir, où il y a toute une beauté qui n'est pas forcément réaliste, et réalisable non plus, dans ce genre de situation. Donc je trouve ça très bien que tu puisses partager ça et justement l'expliquer. Et j'ai trouvé ça hyper intéressant aussi que tu parles de philosophie palliative, je crois que c'est le terme que tu as employé.

  • Speaker #1

    Oui. Je trouve ça super.

  • Speaker #0

    Enfin super. Je vais employer des termes qui, je pense, ne sont pas appropriés au sujet. Je suis désolée.

  • Speaker #1

    Non, alors tu peux te détendre par rapport à ça, parce qu'on en reparlera plus tard, je pense. Mais les seins palliatifs, ce n'est pas du tout un endroit dans lequel... Ce n'est pas un mouroir, il n'y a pas de tabou. Et on peut sourire et être très joyeuse. Je suis très joyeuse en soins palliatifs. Après, comment dire Les soins palliatifs, il y a bien sûr un côté humain, engageant, dans lequel il faut faire preuve d'empathie. Et je n'ai pas honte de dire d'amour, parce qu'il s'agit de ça, en réalité. Mais il y a cette espèce de dualité avec une... haute technicité des soins qui sont très complets, très complexes. Et aujourd'hui, ce que ignore la plupart des gens, même dans le milieu médical d'ailleurs, c'est qu'on est l'un des services les plus performants en France, c'est-à-dire que la personne, elle vient, non pas pour une pathologie, mais pour l'ensemble de sa pathologie, c'est-à-dire qu'il faut pouvoir donner des soins à la fois cardio, à la fois pneumo, enfin bref. Il faut être prêt un peu à tout et tout gérer. Et c'est un service qui permet du coup d'ouvrir des portes. Et quand tu me parlais de philosophie, alors là, sinon je vais faire honte à mon métier, mais il y a les soins palliatifs. Donc là, le soin, c'est vraiment ce qui est concret. Il y a la médecine palliative. Donc là, c'est un peu, on commence à rentrer dans la philosophie palliative, c'est-à-dire que la médecine palliative, c'est une manière de voir la personne en face. Et aujourd'hui, d'ailleurs, il y a beaucoup de... professionnels de santé qui se disent qu'on devrait prendre la médecine palliative et la mettre à d'autres domaines. Ça veut dire prendre la personne de manière plus globale, entendre ce qu'elle a à nous dire, faire avec elle. Et donc, du coup, de ça est née un peu une philosophie palliative, on en parle aujourd'hui. C'est-à-dire vraiment cette manière de dire je fais quelque chose dans l'unicité de la personne qui est en face de moi. Ok,

  • Speaker #0

    très bien. Oui, c'est pas juste dans l'idée de traiter un point, et je trouve ça très bien que tu en parles, qu'effectivement Les personnes qui travaillent dans le genre de service dans lequel tu es, c'est vrai que vous traitez autant, comme tu disais, des problèmes cardiaques comme des problèmes peut-être psychiatriques, des amputations, enfin je n'en sais rien, tout ce qu'il peut y avoir. Peut-être aussi des personnes qui ont des cancers, des maladies orphelines ou que sais-je. Mais c'est vrai que vous pouvez traiter une personne qui a plusieurs pathologies. Et je trouve que c'est bien de rappeler que oui. effectivement je comprends que ça soit un des services les plus performants parce que vous traitez énormément de choses en fait.

  • Speaker #1

    Oui, alors pour donner une idée, parce que c'est pareil, les gens du coup ils ont du mal à s'approprier ça en se disant quand est-ce qu'on y va finalement Oui j'avoue. Non mais du coup quand est-ce qu'on y va si on a... Alors c'est des pathologies qui peuvent bien sûr être des pathologies cancéreuses, mais les gens n'y pensent pas, mais par exemple il y a 40 millions de personnes au monde qui auraient besoin de soins palliatifs. Donc, il faut se rendre compte un petit peu et des fois, comment dire, lever la tête et se dire combien de gens pourraient être concernés. Il y a une maladie qui, par exemple, est le sida. Aujourd'hui, ça a trait aux soins palliatifs et c'est quelque chose qui est complexe et qui nécessite des soins techniques également. Bien sûr, il y a le cancer, il y a toutes les maladies neurodégénératives auxquelles on pense parce que les gens pensent à Alzheimer, mais il y a Parkinson et puis on a d'autres qui sont attelés. Et puis voilà, toutes les maladies chroniques. On n'a pas besoin d'avoir quelque chose forcément de fulgurant.

  • Speaker #0

    Tu peux être amenée à avoir des patients sur de la longue, voire très longue durée

  • Speaker #1

    On peut en avoir. On va dire que le plaisir quand on est en soins palliatifs, c'est quand quelqu'un rentre dans le service, on nous dit cette personne, elle en a pour six mois. Et que finalement, par tous les soins qu'on a pu lui apporter à tous les niveaux, finalement, au bout d'un an, elle est toujours là. et elle décide de rentrer chez elle pour des raisons qui lui sont personnelles. C'est tout ce que je souhaite aux gens qui rentrent dans mon service.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que tu arrives à prendre de la distance avec justement cet aspect de mort, de perdre les personnes que tu accompagnes pendant des mois Comment est-ce que ça se passe Et aussi, question avant qui peut peut-être être intéressante, depuis combien de temps tu fais ça

  • Speaker #1

    Je fais ça depuis une dizaine d'années, ce qui est déjà un bon petit bagage dans ce service-là. Voilà, alors après, en ce qui concerne le fait d'arriver à le gérer, alors je vais donner ma définition à moi déjà de ce que moi je fais. Parce que là, j'ai fait une description qui est globale et qui concerne l'ensemble des personnes qui travaillent en soins palliatifs. Après, je crois qu'on a chacun notre manière de pratiquer le métier, de le penser. On va dire que moi, j'y mets une part d'intime de moi quand je le fais. C'est-à-dire, bien sûr, mon but, c'est de soulager la douleur, les souffrances, mais j'y mets une part d'intime de moi et en ça, j'essaye toujours d'être joyeuse et douce. Alors certes, parfois c'est une nature, mais c'est très important pour moi. D'être comme ça, ça engage une énergie importante et dans des situations qui sont intenses et bouleversantes. Donc, on peut aussi arriver à un épuisement, arriver à quelque chose auquel je pense qu'il n'est pas bien que j'arrive parce que je n'aiderai pas correctement les personnes en face de moi. Donc, pour arriver à essayer de gérer ça, je pense que je vais dire des choses très, très, très, très tartes. Mais... C'est finalement prendre soin de soi parfois. Et mon petit truc personnel, c'est vraiment d'accepter la solitude. C'est un métier, quand j'y suis, jamais je ne me sens seule. Mais ça crée une sorte de solitude à l'intérieur. Et ça m'a pris un peu de temps avant de comprendre qu'il ne fallait pas toujours foncer tête baissée, encaisser, encaisser, encaisser. Ça m'a pris du temps, mais maintenant j'ai compris ça, qu'il fallait que j'accepte la solitude en moi. Et ça va être, par exemple, le bain. partir une semaine, aller dans le désert et puis voir personne, ne parler à personne et laisser les choses en moi se vivre et je les laisse partir. Voilà. Je ne sais pas si c'était clair.

  • Speaker #0

    Moi, en tout cas, j'ai compris. Je pense que les personnes qui nous écoutent aussi, en tout cas de ce que je comprends, c'est que oui, parfois, tu as besoin peut-être aussi de faire le vide et de reprendre un peu de distance avec tout ce qui peut se passer autour de toi. Est-ce que... Le fait de faire de l'art comme tu le fais, parce qu'on n'en a pas parlé non plus, mais ça fait quand même aussi partie de toi. Est-ce que c'est aussi quelque chose qui t'aide Voir les choses peut-être autrement, prendre de la distance, t'apaiser quand les périodes sont plus compliquées, des choses comme ça Ou est-ce que ça n'a rien à voir Que c'est possible aussi

  • Speaker #1

    Ça ne peut pas avoir rien à voir. C'est impossible. C'est intrinsèque. C'est à l'intérieur, c'est dedans. L'art, en ce qui me concerne, c'est vraiment quelque chose d'intérieur. Donc, même si de l'extérieur, on a l'impression que ça n'a aucun sens, mon ressenti intérieur joue immanquablement sur ce que je suis en train de faire. Je pense que ça m'aide dans le sens où j'exprime des sentiments, des émotions et que les exprimer, ça fait toujours du bien. Après, ce n'est pas fait pour. Ça veut dire qu'il n'y a pas un message derrière, un message militant ou même victimisant en disant là, ce que je fais, c'est compliqué parce que je ne pense pas Je pense que c'est un merveilleux métier et qui offre de merveilleuses perspectives. Mais oui, bien sûr, mais l'art, de toute façon, ça aide. Enfin, ça aide toujours, je trouve. Donc, savoir, oui, parce que c'est moi, mais ça ne porte pas mon art. Voilà, on va dire ça comme ça.

  • Speaker #0

    C'est la question que je me posais un petit peu, de savoir si c'était l'échappatoire premier, entre guillemets, la source de tes créations. Mais pas forcément.

  • Speaker #1

    Non, pas forcément. Pas toutes. Voilà, exactement.

  • Speaker #0

    Ça a modifié ton rapport à la mort, en termes général de faire ton métier

  • Speaker #1

    Ça m'a permis de revenir à mon essentiel. Alors, c'est un sujet qui me tient un petit peu à cœur, parce qu'on vit dans un monde aujourd'hui qui me dépasse totalement. Et la mort, ça reste quelque chose qui nous unit. Alors, on est tous nés et on va tous mourir. J'ai un petit peu mal à me dire que certaines personnes pensent que ça va se passer autrement, ou qu'ils sont au-dessus de ça, ou voilà. Donc, ce qui m'a... fait grand bien, et j'ai une grande chance de faire ce métier-là et d'être au contact de ces gens-là, c'est que justement, ça m'a permis de comprendre qu'il fallait mettre, et là, ça fait partie aussi de la citation des soins palliatifs, mais qui est une réalité absolument pertinente, c'est qu'on met de la vie dans nos jours.

  • Speaker #0

    C'est très beau.

  • Speaker #1

    Alors en fait, la citation complète, c'est, à défaut de ne pouvoir rajouter des jours à la vie, on rajoute de la vie au jour. Et c'est Un mantra extraordinaire pour moi, parce que c'est le cas. On va de toute façon tous arriver à un moment plus ou moins facilement, plus ou moins rapidement. Nous allons y aller. Et je me suis dit, tous les jours, même les plus difficiles, il faut que j'y mette de la vie à un moment. Il faut que j'aime, il faut que j'aime très fort, beaucoup, beaucoup. Voilà, parce que quand je vais mourir, qu'est-ce qui restera derrière de ma vie si je n'ai pas mis de la vie dedans Donc, ça a forcément créé une essentialité en moi. Quelque chose de... Oui,

  • Speaker #0

    du coup, ça a aussi modifié ta vision de la vie. Après, je pense qu'on va être d'accord toutes les deux pour dire que la vie et la mort, c'est complètement lié. Parce que, comme tu disais, on est pour mourir et que la mort fait partie de la vie. Moi, je sais que c'est une phrase que j'ai mis longtemps à accepter d'entendre. Tu vois, quand j'étais petite, mon père... C'est les premiers grands-parents qui décèdent ou les premiers animaux de compagnie qui partent. Mon père me disait, bah oui, mais c'est la vie. Et je lui disais, mais arrête de me dire que c'est la vie, parce qu'on parle de mort. Donc de quoi tu me parles, en fait Ce n'est pas possible ce que tu me dis. Et j'ai mis longtemps à accepter ça. Je pense que j'ai commencé à l'accepter, d'ailleurs, quand mon propre papa est décédé, tu vois, il y a dix ans. Et en fait, ça a été tellement fort, cette perte, que là, je me suis dit, bah oui, en fait, la mort, elle fait vraiment partie de la vie. Je ne sais plus pourquoi est-ce que j'en suis venue à dire ça, mais...

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on était d'accord sur le fait que ça change le rapport à la vie Oui,

  • Speaker #0

    voilà, c'est ça. Et qu'effectivement, j'ai l'impression, en tout cas c'est très personnel, mais depuis que j'ai inclus ça dans ma tête et dans ma personne et dans ce que je suis, que je vis la vie autrement.

  • Speaker #1

    Alors, en fait, ça paraît encore une fois très bateau, mais comprendre qu'un jour ça va s'arrêter, parce qu'on peut faire un déni, il y a plein de gens qui font un déni. De ça, on se dit non, mais c'est plus tard, non, mais là, je n'ai que 45 ans, je n'ai que 60 ans, puis maintenant, c'est je n'ai que 75 ans On peut faire un déni de ça. Je pense que c'est une erreur. Je pense qu'il vaut mieux accepter que ça va arriver pour justement, contrairement à ce que pensent la plupart des gens, profiter de chaque jour. On entend souvent des gens autour de nous dire plus que quatre jours avant les vacances, c'est un classique Et je les comprends, moi aussi, j'aime partir en vacances. Mais cette petite phrase-là, elle m'embête un tout petit peu. Parce que c'est quand même quatre jours. Et il y a des tas de gens qui aimeraient avoir ces quatre jours. Donc des fois, bien sûr, je suis la première, je ne suis pas infaillible. Mais j'ai tendance à dire, attention, quatre jours, c'est énorme en fait. Ça peut aussi être énorme. Pendant ces quatre jours, on peut faire des tas de choses super bien. On peut faire plaisir à quelqu'un, on peut avoir un fourrir avec quelqu'un. Ce n'est pas des petites choses. Donc quand on accepte le fait qu'il va y avoir une fin, je pense sincèrement... que la vie n'en est que meilleure.

  • Speaker #0

    Après, effectivement, tu vois, j'ai aussi beaucoup cette façon de penser, mais on est humain, tu vois, tu l'as dit, personne n'est un faible. Oui, moi aussi, il y a des jours où je me dis, purée, allez, les vacances, c'est dans trois dodos. Allez, on y va, tu vois. Mais parce que j'ai tellement l'objectif week-end ou vacances, ou alors la semaine a été compliquée au travail ou quoi, ou qu'est-ce, ou voilà, ça arrive. Faut pas s'en vouloir aussi de... Allez, hein.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    c'est humain on est bien français aussi c'est très français de râler alors râlons mais oui par contre je suis assez d'accord de se dire et parfois c'est juste aussi de rappeler des choses simples comme tu l'as dit de se dire ouais ça sera peut-être quatre jours mais pendant ces quatre jours peut-être que on est en plein hiver il fait froid et d'avoir les rayons du soleil ça va me faire du bien ou de rigoler avec quelqu'un de faire plaisir ou qu'on me fasse plaisir aussi et j'avais fait enfin ça me fait beaucoup pensé à ça. J'avais fait un épisode sur la gratitude et je trouve que ça rentre aussi là-dedans de parfois juste avoir de la gratitude et juste avoir un plaisir de se dire Ah, c'est une petite chose, mais vraiment, je l'apprécie. Parfois, ça fait déjà beaucoup de choses, en fait.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Déjà, pas mal. Parce que, comme tu dis, il faut aussi se rappeler qu'il y a des personnes qui aimeraient pouvoir le vivre et qui ne le peuvent pas pour exoulires et craisons. Après, personne n'est là pour... porter tous les malheurs des autres, c'est pas non plus du tout ce que je dis, mais ça fait du bien de relativiser, et de se dire, c'est vrai que moi j'ai la chance de pouvoir le faire.

  • Speaker #1

    Tu sais, je vais rebondir sur ton expression de le relativiser, j'ai envie de te dire, c'est même pas le relativiser, c'est essayer de se mettre en perspective, c'est-à-dire que parfois, on n'arrive pas à justement relativiser, d'ailleurs c'est une expression qui est tellement utilisée et qui est devenue insupportable parfois, mais il faut tout relativiser maintenant de nos jours, je me dis... essayons juste des fois, bon allez, on se met en perspective on se dit juste, bon, aujourd'hui c'est très difficile c'est très compliqué, par exemple je sais pas, il y a trois patients qui vont mourir aujourd'hui, c'est très compliqué ou des gens qui se disent, oh là là, mon papa va bientôt mourir, ou mon cochon d'Inde, et je me moque pas du tout j'ai perdu des cochons d'Inde voilà, je dois l'amener chez le vétérinaire, il va se faire piquer mais ces jours-là, c'est difficile de relativiser, parce qu'on est confronté à des choses qui nous habitent et puis c'est une émotion tellement dure qui prend tellement de place

  • Speaker #0

    que c'est normal. C'est ça,

  • Speaker #1

    tout à fait. Mais du coup, j'allais dire, c'est un petit processus qu'on peut mettre en place parfois en se disant bon, cette journée, elle est un peu compliquée ou elle est un peu nulle. Il y a aussi ces journées qui sont un peu nulles. Mais il faut quand même que de cette journée, j'en sorte quelque chose d'un peu lumineux. Même si c'est tout petit, même si c'est minuscule. Moi, je pense que ça, c'est avoir une chouette vie. Je suis assez née de ça,

  • Speaker #0

    directement. Ce n'est pas toujours facile,

  • Speaker #1

    par contre. Non.

  • Speaker #0

    Mais je trouve que d'essayer de faire l'exercice, de se dire, aujourd'hui, c'est une période sombre, même pas qu'aujourd'hui. En fin d'année dernière, j'ai traversé une période compliquée et j'ai fait l'effort tous les jours de me dire... Allez, qu'est-ce qui s'est passé de bien aujourd'hui Qu'est-ce que tu as apprécié Même on s'en fout, c'est juste... Genre ton chien, il est venu te faire un câlin, tu vois. Enfin, ça peut être tout et n'importe quoi. Mais de faire cet effort-là, je pense que c'est bien d'essayer de le faire. C'est pas toujours facile, surtout quand on est dans un état dépressif ou de dépression ou des choses comme ça. Putain. Mais oui, c'est un exercice qui, je trouve, est important. Parce qu'il faut se rappeler qu'il y a toujours du bon, même dans ce qui n'est pas forcément bien dans la vie. Et la mort, on fait partie.

  • Speaker #1

    Tout à fait, mais tu sais, je crois que ça aussi, finalement, je me fais souvent cette réflexion-là, c'est un excellent exercice pour la suite. Parce que quand les choses se compliquent, parfois on se retrouve avec des personnes qui, voilà, on leur annonce qu'il y a une maladie incurable, quelque chose qui va dégénérer. Et les personnes qui ont rebondi toute leur existence, les personnes qui se sont dit tous les jours, bon là, il faut que je trouve un truc positif. Eh bien, face à la maladie, face à la chose qui va être compliquée, c'est des gens qui vont accepter déjà de l'aide. qui vont me dire, moi par exemple, ce que j'aimerais, c'est avoir un masque de réalité virtuelle pendant mes soins pour pouvoir m'évader le temps que j'ai très très mal. Et ça, c'est très très cool pour moi, d'avoir des gens qui l'ont pratiqué toute leur vie, parce que du coup, ils envisagent la mort de la même manière qu'ils l'ont fait pour la vie. Et du coup, c'est un cercle vertueux. Alors que les personnes qui ont râlé toute leur existence en disant j'ai une vie de caca bouillat et qui n'ont pas... Comment dire Même s'il y a des périodes difficiles, je l'entends, c'est parce que je suis en train de dire, moi aussi, j'ai eu des périodes où je n'arrivais pas toujours à le faire. Mais quand on travaille à ça, très fort, et qu'on y croit à la vie plus que tout, même quand parfois elle est loin, loin, je pense que quand il arrive des petits soucis derrière, c'est plus compliqué. Parce que le travail n'est pas déjà fait, donc on apprend déjà une mauvaise nouvelle, il faut encaisser les chocs, se dire je vais peut-être mourir, et là, il faut apprendre à regarder ce qui est joli. C'est plus compliqué. Oui, mais...

  • Speaker #0

    C'est une mécanique à apprendre, je pense. C'est vraiment un entraînement. C'est comme faire du cardio. J'ai l'impression que c'est un cardio pour l'âme, de se dire...

  • Speaker #1

    Oh là là,

  • Speaker #0

    vraiment une poète. Mais je le vois un peu comme ça, de me dire, entretiens ça. Parce qu'il y a forcément un jour où ça sera d'une utilité viscérale. Et encore une fois, ce n'est pas toujours facile de le faire. Je ne dis pas que tous les jours j'y arrive, ce n'est pas vrai.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Quand mon père est décédé, ce jour-là, clairement... Non, je n'ai pas trouvé de truc positif. Mais quand même, je me dis effectivement, je pense qu'il y a des choses que je prends différemment grâce à cet exercice mental et émotionnel que j'essaye de faire. Et en fait, tout ce que tu me dis, ça me fait vachement penser à un livre que j'ai terminé hier. Et je ne sais pas si tu le connais, c'est un livre qui s'appelle Les oubliés du dimanche de Valérie Perrin. Ça raconte l'histoire d'une nana d'une vingtaine d'années qui est aide-soignante dans une maison de retraite. Et donc, toute l'histoire, c'est un peu... Pourquoi est-ce qu'une nana de 20 ans travaille qu'avec des vieux, qu'elle voit mourir, qu'elle accompagne et tout Et j'ai adoré ce livre parce que je l'ai trouvé hyper poétique. Dans le sens où, elle, ce qu'elle veut, c'est justement accompagner ces personnes âgées jusqu'au bout et surtout de les écouter. Donc, elles les écoutent leur raconter leur histoire, leur vie, en fait. Je trouve ça hyper beau. Et bon, il y a aussi tout le truc de... Les personnes âgées, souvent, sont oubliées de leurs parents, leurs enfants, leurs frères, leurs sœurs et tout. Et donc, c'est pour ça que ça s'appelle les oubliés du dimanche, parce que malheureusement, il y a beaucoup de personnes âgées qui ne sont pas visitées et qui sont oubliées. Et en fait, c'est tout ce que tu disais aussi sur le fait d'être positif, de voir le bon côté des choses, évidemment, quand... quand c'est possible dans la mesure de la raisonnabilité de chacun. Ça m'a fait beaucoup penser à ce livre parce que quand je l'ai refermé, c'est vraiment ce que je me suis dit. Je me suis dit, cette nana, elle a un métier pas facile parce que c'est dur de faire les soins aux personnes âgées, des personnes qui sont malades, qui n'ont pas envie d'être là. Bon, là, il y a beaucoup de choses. En fait, elle arrive à discuter avec eux et ils leur racontent toute leur vie et ça devient leur confidente jusqu'au bout de leur jour. Et ça m'a fait beaucoup penser à ça, tout ce que tu disais préalablement. Donc, si tu ne l'as pas lu, je te le conseille.

  • Speaker #1

    Il y a beaucoup d'ouvrages. Ça a l'air très beau et très poétique, en effet. Après, il y a ça de vrai, c'est que c'est vraiment une chance quand les gens me disent Oh, ma pauvre ou Qu'est-ce que tu as du courage C'est que c'est des choses qui reviennent beaucoup. Pour autant, c'est une vraie chance parce que ça m'a permis de grandir vraiment émotionnellement. Ça ouvre des portes même de pardon, d'apprendre vraiment ce que c'est parce que... Parce qu'on voit effectivement les familles, parce qu'on n'en a pas encore parlé, mais ce qui est difficile aussi, c'est les familles. Difficile pour eux, pour la personne qui va partir, pour moi aussi des fois, pour moi quand c'est moi la famille. mais ce que je veux dire c'est que contrairement à ce qu'on pense ça ne tire pas vers le bas c'est un métier qui élève c'est un métier qui permet de nourrir son intérieur qui permet de se dire mince moi j'ai pas fait ça dans ma vie moi j'aimerais ne pas finir avec ce regret là aussi immanquablement c'est enrichissant on ne peut pas y perdre alors on peut y perdre de l'énergie mais uniquement cela et en ça effectivement ce livre dont tu parlais a l'air intéressant parce que je... Je suis convaincue que non seulement c'est bien, c'est une belle chose d'écouter l'autre dans ce qu'il a à dire, même si pour nous ça n'a pas grand sens parfois, mais pour lui ça en a, pour elle, pour la personne en tout cas. Mais surtout on peut l'utiliser, le manier, élaborer ce qui est en train de se produire pour réussir à nous en faire quelque chose d'autre. Aussi le fait de supporter, de voir l'autre souffrir, de supporter, de voir l'autre nous dire quelque chose qui nous fait du chagrin à nous. Toutes ces choses-là, je pense que ça nous fait grandir en tant que personne. On ne peut être que meilleur après ça. Même si parfois, c'est compliqué.

  • Speaker #0

    C'est ce que j'allais dire. Parfois, ça doit quand même être compliqué. Je pense que c'est peut-être dans ce sens-là que les gens te disent t'es courageuse

  • Speaker #1

    C'est dans le sens où, en effet, comme je te disais, il y a des choses qui font souffrir. C'est-à-dire que l'autre peut nous renvoyer à des choses à nous qui sont douloureuses, qu'il ne faut pas trop titiller parce que ça nous est propre. Mais, et c'est en là que je m'y remets, c'est peut-être nécessaire aussi. Parfois, il faut que ça pique un peu. parfois la vie elle nous met des grandes claques et puis parfois on rencontre une personne qui est là qui nous raconte une histoire similaire on n'a pas trop trop envie de l'écouter parce qu'on se dit ça va piquer et c'est là qu'on se dit est-ce que j'ai pardonné est-ce que j'ai pas pardonné où est-ce que j'en suis moi aussi par rapport à ça quelle personne je suis dans tout ça alors ça ça fait des petites vrilles dans le cerveau je pense normalement que ça nous fait vraiment reconnaître en nous certaines choses évoluer accepter du coup de l'autre aussi beaucoup plus de choses parce que c'est quand on se dit mince, cette personne m'a dit ça, moi ça m'a un peu piqué, le lendemain on revient différent. Il y a un tout petit quelque chose d'un millimètre qui a bougé et ça peut tout changer, ce petit millimètre.

  • Speaker #0

    Je suis encore une fois bien d'accord avec toi.

  • Speaker #1

    Je précise que je ne t'ai pas soudoyée avant.

  • Speaker #0

    Elle m'a donné plein la rumeur. C'est faux. Non mais oui, je suis d'accord avec toi et vraiment le terme d'évoluer, c'est le terme que j'allais dire et puis tu l'as dit. Justement, c'est quoi ton rapport avec la mort des personnes qui peuvent être plus ou moins proches de toi. Donc, ça peut être des proches humains comme des proches animaux. Tu as dit tout à l'heure, tu as évoqué des cochons de rinde. Oui. Comment est-ce que toi, tu vis tout ça, sachant qu'au quotidien, professionnellement, tu le vis aussi déjà Est-ce que ça change quelque chose Est-ce que tu peux nous en parler

  • Speaker #1

    Dans ce que tu dis, en fait, tu ne le dis pas, mais pour autant, c'est ce qu'on appelle le deuil en réalité. On ne va pas passer... Outre ce terme-là, quand bien même je trouve qu'en français, il est balmené. Ce n'est pas un très joli mot, il est tout petit.

  • Speaker #0

    plus, alors que le deuil, c'est grand, grand, immense. C'est long.

  • Speaker #1

    Enfin, ça peut être long.

  • Speaker #0

    Oui, alors, techniquement, alors, je mets de gros, gros guillemets, aussi immense que le deuil. Techniquement, un deuil, ça dure un an. On passe par des phases diverses et variées. Enfin, par trois grandes phases, mais ce que je veux dire, c'est que le deuil, c'est un travail et que chaque deuil est différent selon ce que l'on perd. Parce que le deuil, évidemment, là, dans nos conversations, c'est le deuil d'une personne ou d'un animal, d'un être vivant. Donc, ça engage du vivant. Et on peut aussi devoir faire le deuil d'un emploi, d'une situation.

  • Speaker #1

    Une relation.

  • Speaker #0

    Le deuil, c'est un travail en process. Après, je ne crois pas que parce qu'on voit plein de gens mourir chaque jour, on soit plus prêt à affronter le deuil d'une personne qu'on aime profondément. Le sentiment n'est pas le même et du coup, le processus n'est pas le même. De faire le deuil d'une personne même à laquelle je me suis attachée dans le cadre de mon travail, combien même je les adore. Bien sûr, il y a des fois où je pleure, où je termine la journée en pleurant, ou des fois pas, c'est comme ça. Mais toi, tu parlais de ton papa. Alors moi, c'est un peu plus... Ma situation est un peu... Alors là aussi, un peu plus bateau parce que la première fois que j'ai perdu quelqu'un, c'était ma mamie. C'est ça. Oui, j'avais cinq ans. C'était, j'allais dire, la mamie. C'était elle. Il a fallu que ce soit elle. Elle me tenait la main et j'étais la plus heureuse de la Terre. Elle me tenait la main et tout pouvait s'écoucouler, quoi. Et quand elle ne m'a plus donné la main... Le monde s'est écroulé quand elle ne faisait plus partie physiquement du mien. Et ça a été, pour la petite Cléophée, assez douloureux dedans. Même si j'ai compris que je n'avais pas de prise là-dessus. Et que, par contre, on m'autorisait à pouvoir lui parler encore. Même si peut-être elle ne m'entendrait pas. Et que je pouvais lui parler dans les nuages, au cimetière ou peu importe où. Bon, alors ça a été une première expérience, mais qui a été, j'allais dire, dans un certain sens de la vie. Je sais pas ce que tu veux dire

  • Speaker #1

    C'est la suite logique des choses

  • Speaker #0

    C'était finalement un peu précoce Mais ça restait ma mamie Donc c'était dans l'ordre des choses Je suis pas très fan de cette phrase

  • Speaker #1

    Non mais bon, on se comprend

  • Speaker #0

    Et après, j'ai dû faire le deuil De personnes qui sont toujours vivantes Et c'est aussi compliqué C'est aussi compliqué parce que Encore une fois, le deuil C'est un choc d'abord C'est une sidération Qu'on y soit préparé ou pas Et ensuite, c'est un mélange de je suis triste, j'en veux à la terre entière, pourquoi lui, pourquoi elle, pourquoi il me fait ça à moi, pourquoi il ne s'est pas accroché plus. Bref, tout un petit cafarnaum de choses dont je ne t'apprends rien, mais dont nous parlons parce que c'est la vérité.

  • Speaker #1

    Je pense que c'est bien aussi d'en parler, de se dire que c'est normal de vivre et de ressentir ça. Parfois, ça fait du bien. Il y a peut-être des personnes qui sont en train de traverser des périodes difficiles ou qui en ont envie. traversé et je vous rassure on a tous ressenti potentiellement ce genre d'émotion aussi quoi.

  • Speaker #0

    Oui alors après là je fais état d'un deuil qu'on appelle, c'est pas moi qui le dis ça s'appelle le deuil normal c'est le nom de terme plein de termes et ça s'appelle le deuil normal il se fait comme ça, il y a une sidération avec des émotions très comment dire, presque dans le refus d'entendre ce qui est en train de se passer et Il n'y a aucune information qui passe. Souvent, les yeux sont un peu vides. Les personnes, elles disent oui, oui. Puis en fait, il n'y a rien qui est imprimé. Ça, c'est une première étape qui finit souvent comme assez rapidement. Puis ensuite, arrivent les douleurs aiguës. Ces espèces de gémissements de l'intérieur, où on se dit comment je vais pouvoir faire pour vivre sans lui ou sans elle ou sans eux. Là, on parle de personnes âgées, mais il y a des personnes qui perdent des bébés, des enfants. Comment fait-on pour... Il y a ce moment-là.

  • Speaker #1

    Oui, il y a souvent ce questionnement de comment je vais survivre à ça.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Et en fait, c'est là que tout se joue, tu vois. C'est là où il y a ceux qui vont vivre un deuil normal, entre guillemets. Encore une fois, c'est pas de moi, c'est un terme qui est existant. Le deuil normal, il va être engagé avec le temps. Et c'est là où le temps joue, c'est pas un mythe. Les choses qui étaient aiguës vont devenir supportables et vont laisser place aux souvenirs joyeux avec les personnes qui nous manquent. À partir du moment où les souvenirs joyeux arrivent, on souffle un petit peu. Ça n'enlève ni la peine, ni le manque, ni rien. Mais on a fait place là, on a fait un deuil, un travail de deuil qui reste, ma foi, triste et ça ne remplace pas. Mais le travail est terminé. Puis après, il y a les personnes qui, au petit moment crucial dont on a parlé, prennent une autre direction, qui n'est plus la trajectoire normale. Je ne suis pas du tout en train de dire que ce n'est pas normal réellement. Tout à fait normal. Des personnes qui vont être un peu plus inhibées, qui ne vont pas sortir. Les choses, pas de colère, pas de dépression, pas de pleurs, pas de cris, rien. Donc ces gens-là, comme ils sont dans quelque chose de très inhibé et qu'ils ne le sortent pas, ça sortira un jour, pas tout de suite, mais le deuil n'est pas fait. Et il y a aussi ce qu'on appelle donc du coup des deuils compliqués et des gens qui, sur des années, ne vont jamais accepter. Ils n'arrivent pas à l'acceptation, la fameuse acceptation qu'on espère arriver tout de suite quand ça arrive et qu'on se dit comment je vais faire, je ne vais jamais y arriver, je ne vais jamais réussir à accepter ce qui est en train de se produire Voilà, ça arrive et il y a des solutions pour eux. pour aider ces gens-là, mais pas tous égaux. Et puis, ce n'est pas une science exacte. Parfois, on a l'impression que ça va aller. Et puis, en fait, non.

  • Speaker #1

    On repart un peu en arrière. Je le dis, il faut se faire aider, en fait. C'est vrai que c'est des phases de la vie qui peuvent être extrêmement douloureuses, extrêmement compliquées. On parle beaucoup et souvent de santé mentale sur ce podcast. Et encore une fois, je le dis et je le redis, n'hésitez surtout pas à vous faire aider. Vos proches sont là pour vous soutenir, mais avoir un professionnel de santé qui vous accompagne, C'est mieux. Si vous pouvez le faire, après je sais que ça coûte de l'argent, c'est aussi un investissement personnel et financier. Mais quand on a besoin d'aide, il ne faut vraiment pas hésiter dans la mesure du possible. Encore une fois, je sais que ce n'est pas donné à tout le monde, mais même une séance avec un psychologue, ça peut vraiment soulager, ça peut vraiment faire du bien. Psychologue ou autre thérapeute, kinésio, hypnotiseur.

  • Speaker #0

    Oui, ce qui nous convient.

  • Speaker #1

    Exactement. De ce vers quoi ça vous attire, allez-y. Parce que c'est important, ça fait du bien. Surtout dans ces moments-là, encore plus.

  • Speaker #0

    Tu sais, il y a des phrases qui sont excessivement énervantes parfois, dans ces moments-là. Et moi, il y a une phrase qui m'agace au possible, c'est les gens qui vous disent toutes mes condoléances Ce truc-là, ça m'énerve. Pourquoi Alors, ça m'énerve parce que, en fait, quand on dit ça, on n'ouvre pas la parole à l'autre. C'est-à-dire que la personne qui souffre, on lui dit tais-toi là, n'ouvre pas la bouche Condoléances, bim, hop, c'est réglé, basta, cosi. Ce genre de phrases convenues, ces espèces de choses qu'on dit à tort et à travers parce qu'on ne sait pas quoi dire d'autre, je pense qu'elles font beaucoup de mal. C'est en ça que je rejoins l'idée du professionnel de santé. Mais c'est surtout qu'on a besoin, quand c'est comme ça, d'un climat sécurisant. On a besoin que l'autre nous autorise à parler. En disant toutes mes condoléances, on n'a pas du tout envie de lui dire si tu savais comme je suis au fond du gouffre On n'a pas du tout envie de lui dire ça. On a juste envie de lui dire merci d'être venu. Et c'est ce qu'on se retrouve à dire d'ailleurs. Merci d'être venu. Alors qu'on n'est pas bien, on vit quelque chose de terrible. Je trouve ça dommage. Et c'est en ça qu'effectivement, je suis très d'accord avec toi, sans faire de publicité pour aucun professionnel, parce que je suis aussi d'accord avec toi. Il faut aller vers les professionnels avec lesquels on est à l'aise. Donc aucun jugement par rapport à ça. Mais tu sais, des fois, ça peut être les livres aussi, comme tu as évoqué tout à l'heure. Et il y a un livre qui a été écrit, je pense à ça maintenant, par Catherine Dolthorne, pas Françoise, même si j'aime beaucoup Françoise, mais là en beaucoup on ne sait pas rien pour nous, qui dit que la mort ne laisse jamais rien, que le mort ne nous laisse jamais seul. C'est quelque chose que moi j'ai reçu comme phrase et ça m'a beaucoup aidée, même si c'est un peu douloureux sur le moment. Je me suis dit, bah si, il nous a laissé tout seul. Le mort ne nous a pas laissé seul, il nous a laissé l'amour. Et cette trace, elle est en nous, et on peut et la nommer et la chérir. Donc le fait de le nommer, c'est existant, c'est là. Et si t'es existant, on n'est pas seul. Et si on n'est pas seul, la mort ne nous a pas tout enlevé. Cette petite phrase-là, je la trouve beaucoup plus intéressante que toutes mes condoléances. C'est sûr. Non, mais c'est rien. Mais je préférerais qu'on me dise à moi, ou je pense que t'aurais peut-être préféré qu'on te dise, je suis là, donc on crée un climat sécurisant. C'est... compatir à ta douleur, mais si tu as besoin d'en parler ou pas d'en parler. Oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Parce que parfois, on a juste envie de pleurer.

  • Speaker #0

    On a juste envie de rien dire,

  • Speaker #1

    rien faire,

  • Speaker #0

    de regarder une émission à la télé débile. C'est ça.

  • Speaker #1

    Mais juste d'avoir quelqu'un, quoi.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Bien sûr. On a envie d'être avec quelqu'un, pas forcément au départ, en tout cas, d'élaborer des discussions avec lui. Tout à fait. Mais aussi de comprendre que la personne en face, elle sait que pour l'instant, on n'arrive pas à le voir, mais que... tout ce que la personne qui est partie nous a laissé, on pourra la nommer, on pourra la chérir et on peut la garder. Tout n'est pas parti dans la petite boîte.

  • Speaker #1

    C'est mignon dit comme ça, la petite boîte. J'aime bien. C'est très joli. Je suis complètement d'accord avec toi, mais parfois aussi, je pense qu'il y a beaucoup de maladresse de la part des personnes qui font face à la mort, en fait. Face à des morts qui ne te concernent pas directement. Moi, très clairement, tu vois, à l'enterrement de mon papa, je me disais, Il y avait beaucoup de personnes avec qui il avait travaillé. Donc forcément, moi, c'est des personnes que je ne connais pas ou très peu. Et effectivement, il y a eu beaucoup cette phrase de mes condoléances et tout. Et bon, tu sais que d'une part, c'est les convenances, que c'est une histoire de politesse, de bon, il faut dire ça. Moi, j'ai beaucoup de mal avec les trucs de il faut c'est comme ça que ça se passe. Mais bon, c'est comme ça, c'est la société, quoi. Et effectivement... Je l'accepte. Bon, voilà, les personnes ont dit ça, mais parce qu'aussi, je pense qu'il y a un malaise avec la peine de la personne en face de toi, quoi. Ça aussi, c'est quelque chose vraiment... Je comprends qu'on puisse être malaisée, qu'on ne sache pas quoi dire à une personne qui vient de perdre quelqu'un.

  • Speaker #0

    Parfois,

  • Speaker #1

    c'est délicat,

  • Speaker #0

    quoi. Je vais avoir un petit truc à dire, c'est que... Alors, à la fois, je comprends terriblement, mais je pense que là, il y a un manque de dialogue national là-dessus. C'est-à-dire qu'en fait, les gens ne sont pas éduqués à en parler. C'est un petit peu terrible de dire ça, mais je pense que si on nous apprenait à dire que dans ces moments-là, c'est normal d'être là pour l'autre, de lui dire les vrais mots à ceux qu'on nous a dit, de dire du type bon ben, c'était une personne bien, ça s'en fiche Vous voyez ça aussi. Donc pour dire, je pense qu'il y a un manque de dialogue par rapport à la mort, par rapport au deuil aujourd'hui, un réel manquement là-dessus. Si c'était un sujet national, normal, un sujet qu'on a et qui est naturel d'avoir, on aurait des réactions beaucoup plus naturelles. Et cette malaisance dont tu fais part, qui est bien sûr liée aussi à une pudeur, à la gêne et tout, mais peut-être si on expliquait dès la petite enfance que la mort fait partie de la chose, que quand une personne vit ça, elle est triste. Ça va être difficile pour elle pendant quelques temps. Justement, on va lui dire quelque chose qui sort de notre cœur. C'est très peut-être naïf ou quoi, mais... Ce que je veux dire, c'est que je pense qu'il y a un manque cruel de dialogue social là-dessus. On n'en parle jamais. C'est un tabou intégral en France. Dès qu'on en parle, ou alors c'est pour parler de l'euthanasie, on oublie des étapes tellement importantes avant de parler de ça. Déjà, si on arrivait à parler de la nôtre, de ce qu'on aimerait, de ce qui nous fait peur, on arriverait à mieux gérer aussi la peine des autres. Je pense que ce que tu décris, c'est une réalité, mais que je trouve hyper dommage aujourd'hui.

  • Speaker #1

    Je suis complètement de ton avis, parce qu'il y a un vrai problème de fond. C'est vrai que ce que tu dis est complètement vrai. On ne parle pas de la mort, c'est un sujet hyper tabou en France et même dans notre société occidentale, en fait, parce qu'il y a je ne sais combien de civilisations, que ce soit africaines, que ce soit orientales, où en fait la mort est une fête. En fait, on va fêter le fait que cette personne... passe dans un autre monde. Bon, après, chacun sa spiritualité, etc. Mais on va fêter la vie qu'a eue cette personne au moment où elle décède. Alors qu'en France, qu'est-ce que c'est austère de mourir Waouh Enfin, moi, j'ai souvent dit à mes proches et à ma famille, du coup, je vais le dire publiquement, déjà, vous donnez tous les organes que vous pouvez le jour où je pars. Mais en plus,

  • Speaker #0

    il y a eu deux masses d'organes. Oui,

  • Speaker #1

    sauf la peau et les yeux.

  • Speaker #0

    Bon, d'accord, je garderai la peau.

  • Speaker #1

    je continuerai le podcast avec le reste on donne ce qu'on peut donner mais surtout or oui les gens vont être tristes peut-être vous ne pouvez pas non plus m'en censer mais j'aimerais quand même que ça soit qu'on fête ma vie le jour où je meurs qu'on se dise c'est peut-être hyper utopique hyper bisounours tout ce que je dis mais j'aimerais vraiment qu'on se dise qu'on ne se rappelle pas en mode oui Pauline était comme ci et puis quand même c'était quelqu'un de bien et puis elle a fait ci elle a fait ça Ouais, mais en fait, Pauline aussi, c'est la meuf qui faisait parfois n'importe quoi et qu'on se rappelle, j'en sais rien, mes pires cuites, mes pires putes. Enfin, venez, on rigole, en fait. Mais après, je pense que c'est aussi très personnel. Mais ce que je veux dire, c'est que quand je vois que dans certains pays, on fête la mort de quelqu'un pendant des jours et des jours, et oui, on est triste, mais peut-être que cette personne aussi, elle va être soulagée d'être passée ailleurs. Il y a peut-être un moment aussi où c'est mieux que cette personne soit partie, même si c'est toujours trop tôt, même si c'est toujours trop triste. On est bien d'accord. Pour en revenir à mon papa, qui est le plus gros décès que j'ai pu vivre aujourd'hui, mon père est parti du jour au lendemain, il a fait un arrêt cardiaque. Donc, ça a été hyper brutal, hyper soudain, mais c'est une personne qui avait des problèmes cardiaques, qui avait un traitement pour ça, etc., depuis plusieurs années. Et ce traitement avait plein d'effets secondaires. Enfin, moi, mon père, je sais, il en avait... Désolée, je vais être vulgaire, mais il en avait... Ah La casquette, je n'ai pas été si vulgaire. Il en avait vraiment ras-le-bol de son traitement. Alors ouais, quand il est parti, ça a été terrible, ça a été horrible, mais c'est un monsieur qui a toujours aimé boire son Ricard tous les jours, qui fumait énormément, c'était son plaisir. C'est nul, ne fumez pas autant, ne buvez pas autant, mais c'était son plaisir. Et franchement, quand il est parti, je me suis dit, peut-être qu'en fait il va être mieux. Peut-être qu'il va arrêter de souffrir de ces médicaments qui avaient plein d'effets secondaires, et puis peut-être que là où il est maintenant, il peut fumer autant de gitanes qu'il a envie. Et en fait, est-ce que c'est pas mieux comme ça pour lui que d'avoir la vie qu'il... qu'il n'aimait pas. Mais c'est compliqué de dire ça, parfois de dire ça. Parce que ça voudrait dire que je suis OK avec le fait qu'il soit parti. Non. Je suis OK avec le fait que peut-être il est mieux là où il est aujourd'hui.

  • Speaker #0

    T'as dit beaucoup de choses passionnantes. Non, non, non. Tout était très pertinent. T'as dit une première chose sur laquelle je vais quand même rebondir, si tu me le permets, c'est qu'il y a en effet un... déclin du religieux en France, historiquement. Parce qu'auparavant, la religion te donnait la réponse. C'est-à-dire que tu mourrais, t'allais faire un tour du côté des angelots, ou alors carrément te faire piquer dans le Styx avec les gens qui avaient fait le mal. Mais en fait, aujourd'hui, même si on trouve ça un peu rigolo et qu'on en blague, ce déclin-là a fait qu'aujourd'hui, la représentation de la mort en France, elle n'existe pas, elle est hyper complexe et hétérogène. Du coup, les enjeux, ils sont hyper... hyper... hyper difficile à saisir. Aujourd'hui, on a l'impression qu'il faut être soit mourant, soit endeuillé pour pouvoir parler de la mort. On a l'impression que sinon, tout le reste du temps, on peut se passer d'en parler. Ça, c'est une première chose que tu as dit, qui en fait, historiquement, en France, il n'y a jamais eu un déclin du religieux à ce point-là. C'est compréhensible, et c'est un autre débat, mais pour dire que comme il n'y a pas de réponse toute faite, soit on se fait une réponse parce que toi, tu as été confronté à ça, puis que tu es quelqu'un qui réfléchit et qui a envie de se poser des questions là-dessus. Ou alors on peut faire un déni pendant 70 ans et se dire, voilà. Mais je pense qu'il y a une idée de ça avec le religieux, qui n'est pas le cas dans les autres pays que tu citais, qui ont en fait des croyances religieuses qui les portent, et au moment du deuil, ils mettent en place des protocoles qui leur permettent de faire ce travail finalement. Alors que nous aujourd'hui, c'est un peu à volo. Soit c'est à l'église, mais maintenant on peut aussi se faire brûler. Et en fait, les gens ne savent plus vers quoi aller. Pourquoi et dans quel sens Et je ne dis pas qu'il faut trouver quelqu'un qui nous donne un sens unique. Je dis juste que du coup, les personnes ne se posent pas forcément la question. Et voilà. Et ensuite, pour ce que tu disais pour ton papa, de dire c'est peut-être mal, de dire il est parti et c'est peut-être mieux comme ça. Je suis quelqu'un qui peut dire ça bien souvent. Ça ne fait pas de moi une mauvaise personne. Ça ne fait pas de toi une mauvaise personne, Pauline. Ça fait quelqu'un de toi, une bonne personne qui veut qu'il soit heureux, même. quand il n'est pas là avec toi. Donc je pense que ça fait de toi, au contraire, une grande personne. Enlève de ta tête le fait de culpabiliser, de lui souhaiter le meilleur. Parce qu'en fait, tu lui souhaites le meilleur. Et je lui souhaite aussi.

  • Speaker #1

    Je suis sûre, il est trop bien. Ça me rassure peut-être aussi de me dire ça. Mais je suis sûre, il est là où il est.

  • Speaker #0

    Ça te passionnerait Je veux dire, si tu le savais, si tu savais ce qu'il y avait après, s'il y avait quelque chose après. Est-ce que tu crois qu'il y avait quelque chose après

  • Speaker #1

    C'est le prochain sujet que je voulais aborder. La vision de sa propre mort et de ses croyances après. Mais je voulais juste revenir sur cette histoire de tabou qu'on a. Et je pense aussi qu'il y a un point hyper important que j'aimerais aborder, parce que pour l'avoir vécu, encore une fois, je suis un peu tombée des nues. Il y a deux points. C'est que le premier, la mort coûte cher. Oui. Un enterrement coûte très cher. Voilà. Déjà, moi, j'ai été... estomaqué du prix d'un cercueil en fait. Mon papa s'est fait incinérer, c'était son souhait. Du coup, on s'est dit on va prendre le moins cher étant donné que c'est un cercueil qui voulait brûler. Mais le prix...

  • Speaker #0

    Vous ne voyez pas la tête de Pauline, mais ça valait le détour.

  • Speaker #1

    Non mais le prix d'un cercueil... Je mets des guillemets, c'est horrible. C'est un cercueil bas de gamme.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    tu te dis, mais c'est pas possible, ça coûte un SMIC. Enfin, au secours. Et sans parler de tout ce qui est autour de la cérémonie, des faire-parts, des machins,

  • Speaker #0

    des fleurs.

  • Speaker #1

    Ouais, les fleurs. Bon, j'ai été fleuriste dans une autre vie, donc je le dis, les fleurs, ça coûte très cher. Mais c'est ce qui fait vivre les fleuristes. Voilà, je vous le dis. La mort coûte vraiment très cher. Donc, si vous pouvez souscrire à une assurance d'essai qui coûte 5 balles par mois, allez-y, ça fera du bien à vos proches. Attends,

  • Speaker #0

    je te coupe, mais est-ce que tu crois pas, du coup, en disant ça, que ça devrait être... Moi, je vais dire, je milite pour, mais si on en parlait davantage, est-ce que tu crois pas que ça devrait faire partie des choses qu'on devrait réclamer. On réclame des tas de trucs de notre vivant, on va dans la rue, on demande des aides pour des trucs. Je ne juge pas les gens qui demandent des aides de leur vivant. Bien sûr. Mais est-ce que ça ne serait pas normal qu'il y ait aussi des aides pour aider à mourir correctement

  • Speaker #1

    Ce n'est pas normal.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est pas normal. Quand on a beaucoup d'argent, et tant mieux, ce n'est pas la question, on voit arriver la facture, ça va. Mais quand on voit arriver 5 000 euros comme ça, on n'a pas le choix, en fait. Parce que la légalité, en plus la loi, nous oblige. à prendre une décision. Exactement, on n'a pas le choix. C'est ça. On ne nous laisse pas le choix. Ça signifie que le corps de la personne doit aller quelque part. Et donc, ce quelque part est payant. Et dans ce Ausha, il y a une petite part de moi qui me dit Pourquoi personne ne dit jamais rien Pourquoi on accepte de payer aussi cher quelque chose qui est naturel et qu'on va tous vivre Je suis entièrement d'accord.

  • Speaker #1

    Et ça me fait penser à quelque chose que j'ai vécu par procuration. J'ai perdu une amie dans un accident de voiture quand j'avais 18 ans. Et sa famille, vraiment, très peu de moyens. Et du coup, ça a été terrible, déjà, le jour de l'enterrement, d'entendre parler d'argent. Où, en fait, tout le monde autour parlait du fait qu'ils n'avaient pas pu prendre de tombe, parce qu'elle s'est fait enterrer, parce que tout l'argent est déjà parti dans le cercueil, en fait. Et d'entendre qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter la tombe tout de suite, enfin, la pierre tombale et tout. Et je me disais, mais on est en train d'enterrer une nana qui avait un pige. Et on est en train de parler d'argent. Alors, ce n'est pas la faute de sa famille. Enfin, je ne suis pas du tout en train de les blâmer. Bien sûr. Je me dis, en plus de la perte de leur fille, ils sont en plus en train de se poser des questions sur l'argent. Comment ils vont faire et tout. Je trouve ça horrible. C'est pour ça que je dis vraiment, la mort coûte cher. Et vraiment, c'est peut-être très bête ce que je dis, mais moi, quand mon père est mort, un mois après, j'ai souscrit une assurance décès. Et vraiment, ça coûte 5 euros. Ça coûte 5 euros et ça débloque 20 000 euros pour votre famille quand vous allez mourir.

  • Speaker #0

    Tu sais, c'est l'aboutissement absolu de la stupidité et de la cupidité de notre société actuelle. C'est le paroxysme. Ça veut dire que la mort, ça rapporte... Enfin, les morts rapportent plus à rien. Donc, là, il y a une brèche qui s'ouvre. On a un nombre de gens qui arrivent d'un coup et qui vous assomment. Et je trouve ça inhumain, au final. Illogique, inhumain, non naturel. Mais c'est le paroxysme de notre société actuelle. Ça doit aussi... Les gens qui se font de l'argent sur le dos d'autres qui n'en ont pas du tout, juste pour enterrer ou faire incinérer quelqu'un. Oui,

  • Speaker #1

    ça dignement, en fait.

  • Speaker #0

    Ah oui, mais c'est terrible.

  • Speaker #1

    Il y a un minimum qui devrait juste être là et qui devrait être accessible à tous.

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #1

    Et puis après, ceux qui veulent faire plus font plus, selon leurs moyens, selon leurs envies, etc. Chacun fait ce qu'il veut. Mais effectivement, je pense qu'il devrait y avoir juste un minimum.

  • Speaker #0

    Un minimum. tu sais, à une sorte de RSA de la mort.

  • Speaker #1

    Peut-être que ça existe et qu'on n'est pas au courant, mais j'ai pas l'impression. Et tu vois aussi quand on parlait du fait que ça soit tabou, donc le deuxième gros point que je voulais aborder, c'est que c'est tellement tabou qu'on n'est au courant de rien en termes de droits de succession, par exemple. Genre, qu'est-ce qui se passe après qu'un parent soit mort En fait, tu l'apprends hyper frontalement. Tu disais aussi un petit peu tout à l'heure le fait que quand une personne décède, tout ce qui vient juste après va très vite. C'est vrai que suivant où ça se passe, le corps est emmené à la maison funéraire. Je ne crois pas que ça s'appelle maison funéraire. Je pense que je n'ai pas le bon terme, mais on va dire ça comme ça. Le corps est emmené. Après, toi, tu es contacté par les ponts funèbres pour justement parler des modalités. C'est-à-dire combien ça coûte, qu'est-ce que vous voulez faire et tout. Et en fait, tout ça va très vite.

  • Speaker #0

    Et puis après,

  • Speaker #1

    genre quelques semaines après, vient tout ce qui est administratif. Et là, franchement, nous, on est tombés des nues. Donc, mes parents ont été mariés jusqu'à la mort. Et c'est vrai qu'on a appris des choses, des histoires de droits de succession sur la propriété qu'ils avaient. Et tous ces trucs-là, mais qu'est-ce qu'on n'est pas au courant Et justement, je pense qu'on n'est pas au courant et qu'on est mal au courant parce que c'est un sujet hyper tabou en France de qu'est-ce qui se passe après. Ça, tu vois, c'est un truc où, bon, du coup, nous, c'est plus du tout un sujet tabou chez nous parce qu'il a fallu mettre des choses en place pour la suite, parce que ma maman partira un jour, malheureusement. Mais on a mis des choses en place pour ça. On aurait peut-être aimé le faire avant, même que mon père parte, quoi. Ouais, je trouve que c'est... Un des trucs aussi où je me dis, mais il faut que ça cesse, ce tabou autour de la mort et sur l'après-moi. Qu'est-ce qui va se passer Qu'est-ce qui va rester Vraiment en termes pécuniers aussi.

  • Speaker #0

    Le matériel.

  • Speaker #1

    matériel exactement et ça tu vois c'est un truc où j'encourage vraiment beaucoup mon compagnon à en parler avec ses parents parce que je lui dis il faut que tu saches et il faut qu'ils vous disent aussi des choses comment ça va se passer, la mort on n'en parle pas quoi c'est tabou,

  • Speaker #0

    on préfère pas que ça existe limite si on en parle ça va l'apporter tu vois c'est exactement ce que j'allais te dire il y a énormément de gens qui vivent ça comme une superstition ouais carrément si On va en parler, ça va arriver. Et alors, tu remarqueras que si, par exemple, tu es à un repas, avec des gens vivants, évidemment, mais tu vas en parler. Ou alors, ils vont me dire, Cléophée, ça va le boulot en ce moment En fait, ils ne veulent pas vraiment la réponse. Et là, en fait, si j'évoque quelque chose en disant, là, j'ai eu un cas un peu difficile, sans parler déjà d'un cas personnel, donc une distance, les trois quarts du temps, elles me disent, bon, on va changer de sujet, ce n'est pas très gai tout ça. Effectivement, je suis d'accord. Je préfère me fendre la poire sur des choses bien plus... drôle que ça, pour autant c'est quelque chose qu'on partage avec quelqu'un et qui est vraiment puissant. Et donner cette confiance à quelqu'un, lui dire bah voilà, moi par exemple moi j'ai pas envie de me faire brûler ça dure pas des heures en fait,

  • Speaker #1

    c'est important de le dire.

  • Speaker #0

    Mais en fait on est en accord avec soi, la personne en face l'a quand même entendu que ça lui plaise ou non finalement, et il y a une connexion qui se produit et quand la personne décède L'autre personne n'est pas démunie pareil, parce qu'elle se dit je sais ce que je dois faire, je sais ce qu'elle attendait de moi C'est pareil, ça rend le travail du deuil tout autre. Quand on est perdu, moi je rencontre énormément de familles qui n'en ont aucune idée ou qui ne sont pas d'accord avec la personne ou entre eux, ce genre de choses, parce que les débats n'ont jamais eu lieu. Et là où je te rejoins, c'est qu'en plus, au-dessus de tout ce problème-là, il y a les problèmes matériels. Ça veut dire comment on va payer les trucs de maman ou papa. Moi, je ne veux pas payer ci, je ne veux pas payer ça. Et la maison, elle revient à qui et comment. Toutes ces choses-là, en réalité, sans vouloir faire la pub des soins palliatifs, c'est qu'il y a chez nous possibilité d'aider les gens qui rencontrent cette situation-là. Et il ne faut pas hésiter à nous le faire savoir quand on est perdu. Normalement, on voit les gens qui sont perdus. C'est à nous aussi d'être force de proposition là-dessus. J'essaie autant que faire se peut de le faire, mais il y a des personnes. Seulement aujourd'hui, c'est méconnu. Parce qu'en fait, on a l'impression qu'on est tous seuls. On est orphelins de la personne et orphelins tout court. C'est terrible. On est assénés de la mort, on est assénés financièrement, on est assénés et on se dit, il n'y a personne pour m'aider, comment je vais faire pour traverser tout ça Je trouve que ça fait beaucoup. Il y a des personnes qui existent et qui peuvent être ressources pour aider. On peut faire lien avec d'autres disciplines et dire, voilà. vous pouvez contacter telle personne. Il ne faut pas hésiter à demander. Je dis ça pour les personnes qui nous écouteraient et qui se diraient je suis perdue ou ça me fait peur Il ne faut pas hésiter à demander dans des services, même hospitaliers, ils peuvent vous dire de vous rapprocher de telle personne qui peut peut-être vous aider. Ce n'est pas notre travail, mais on a des contacts, on est habitués à travailler avec des personnes. Ça peut aussi soulager un petit peu, à défaut de soulager financièrement et émotionnellement. Techniquement, dans les démarches administratives,

  • Speaker #1

    on peut...

  • Speaker #0

    qui sont lourdes, j'en ai bien conscience, et qui sont les mêmes de notre côté, on va dire un petit peu soulager la chose. Mais j'ai beaucoup de compassion pour tout ce que tu viens de dire, parce que je connais la lourdeur de tout ça. Et encore une fois, je vais te redire la même chose, mais je crois à l'amour et à la parole. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, c'est plus au centre de rien. Et ça me désole, mais si on mettait au centre de tout les dîners de famille, L'amour et la parole, un jour on parlerait tous de la mort, on se dirait bah mince, j'ai pas envie que ça t'arrive Après tout, c'est vrai, on n'a pas envie que ça arrive. Bien sûr que non. Qu'est-ce que ça change de le dire Vous lui avez dit, la personne elle le reçoit, alors elle va peut-être bougonner un truc parce qu'elle est gênée, mais elle l'aura entendu. C'est vachement mieux que de l'entendre quand on est dans sa petite boîte quand même. J'ose espérer. Donc ce tabou-là, je pense que c'est quelque chose vraiment sur lequel je me bats, c'est d'arrêter avec ça. On peut en parler sans pleurer, on peut en parler juste pour en parler, on peut pleurer, évidemment,

  • Speaker #1

    bien sûr.

  • Speaker #0

    Ça peut être quelque chose aussi, finalement, de très factuel, tu vois, de dire, bon voilà, moi, toi tu m'as dit par exemple, tout sauf mes yeux et ma peau, bon,

  • Speaker #1

    comme ça je suis moi qui le sais.

  • Speaker #0

    Je l'ai noté, comme ça, ça ira toujours dans ce sens-là. Mais ce que je veux dire, c'est que quand on aime sincèrement les gens qui nous entourent, Alors moi, j'aime aussi des gens qui ne m'entourent pas parce que j'ai trop d'amour à donner. Mais je veux dire, quand on aime les gens qui nous entourent, c'est quand même... le geste ultime d'amour que de lui dire quand on ne sera plus ensemble, quand on ne vivra plus cet amour, toi et moi, comment on pourra faire au mieux pour que cet amour ne s'effrite pas parce que j'aurais fait ce que tu veux, parce que... finalement, même dans la mort, on se sera aimé. Et dire ça, je sais que peut-être des gens vont dire elle est complètement barjot cette fille mais pourtant, je pense que c'est l'essence de nos existences. C'est la petite flamme à l'intérieur. Bien sûr, elle s'est éteinte pour quelqu'un, mais qu'est-ce qu'on peut faire pour que ça soit moins difficile C'est simplement d'en parler. Alors, je sais, il y a des gens qui vont me dire moi, je ne peux pas dire ça à mes parents On peut toujours. petit à petit, une personne par une personne. Si on laissait un peu plus la parole à des gens qui croient de la mort de temps en temps, on avancerait sur le sujet. Mais on préfère avancer sur des sujets tellement plus futiles. Et c'est bien, hein Faut du futile. Mais quand même. Éluder cette question-là, éluder le qu'est-ce que je veux, qu'est-ce que j'aimerais, avec qui, dire aussi j'ai peur, peut-être. Je suis bien, je suis heureux, là. Et si d'un coup je perdais tout ça, c'est... Quand on réfléchit deux minutes, on se fait waouh, c'est terrible

  • Speaker #1

    Mais c'est dingue aussi de se dire ça.

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Parce que ça veut dire qu'on arrive à se rendre compte de ce qu'on a.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Mais ça, ça fait pas mal.

  • Speaker #1

    Mais il y a beaucoup de pudeur aussi. Je pense qu'il y a beaucoup de personnes qui sont pudiques de ça.

  • Speaker #0

    Oui, mais tu sais, avant, les gens étaient pudiques de dire je suis homosexuelle Et c'était bien dommage. C'est que ça n'a aucun sens. Là, c'est pareil. C'est quelque chose de naturel, c'est quelque chose qui est là. Et je peux le prendre pour. sur plein de sujets. Encore, je l'ai pris cet exemple-là parce qu'il est d'une évidence. Mais de dire, voilà, maintenant j'arrête, je me fous un peu à poil, pas tout le temps, mais là-dessus quand même.

  • Speaker #1

    Oui, puis en plus, on peut le faire de différentes manières.

  • Speaker #0

    On n'est pas obligé de le parler à l'oral.

  • Speaker #1

    On peut aussi l'écrire. On peut utiliser plein de formats différents. On peut faire une note vocale. On peut faire une vidéo. On peut le peindre. évidemment je pense encore à l'expression par l'art pour pallier à la pudeur parce que parfois ça aide beaucoup plutôt que de parler de communiquer ses sentiments et tout et je pense qu'il y a plein de manières différentes pour dire des choses que ça soit autour de la mort ou pas mais parfois ça peut vraiment faire du bien et puis une fois que c'est dit c'est pas un sujet sur lequel on va forcément revenir tous les jours en disant alors du coup allez on va en reparler non c'est bon une fois qu'on a abordé le sujet qu'on est clair là dessus c'est bon On passe à autre chose, on peut reparler des futilités du rouge à lèvres.

  • Speaker #0

    Ce que je veux dire, c'est que du coup, quand la mort arrive, et que tu me parlais du fait que les gens se concentrent sur l'argent, c'est un réflexe psychologique qui est tout à fait normal. C'est très rassurant, c'est très concret. Ça fait flipper parce que c'est beaucoup d'argent, mais c'est très concret. Du coup, ça nous permet d'agir concrètement sur quelque chose qu'on ne maîtrise pas du tout. C'est un côté rassurant. Au début, on se raccroche un peu au démarre, Ausha faire, parce que le faire... le faire à quelque chose de magique qui nous fait oublier que quand on va arrêter de faire,

  • Speaker #1

    ça va faire vivre la chose.

  • Speaker #0

    C'est ça, c'est tout à fait ça. Mais du coup, je maintiens fermement mes positions que peu importe la manière d'en parler, c'était pas la manière dont... Le sujet, ça n'en est pas un, parce qu'effectivement, tu as tout à fait raison, il faut le faire comme on le sent, mais il faut arrêter de faire un déni sociétal. Sur ça, il faut arrêter de cacher les gens dans des EHPAD glauques. Il faut aller, enfin, il faut aussi retrouver le sens de la vie, se dire que ce n'est pas parce qu'on a placé cette personne dans un service qu'elle est heureuse, ou que ça ne remplace pas l'amour de ses enfants, l'amour de son mari.

  • Speaker #1

    Son foyer aussi, d'être chez soi avec ses affaires, ses habitudes, ses odeurs.

  • Speaker #0

    Bien sûr, j'ai de très bonnes blagues, mais ça ne remplace pas... Rires Vous ne voyez pas la tête de Pauline, mais elle est suspicieuse.

  • Speaker #1

    J'attends comme ça.

  • Speaker #0

    C'est que la joie et tout ce que je peux mettre dedans, ça ne remplacera jamais tout ce qu'une famille, un foyer, des habitudes représentent. J'essaye, mais je ne suis pas encore sur rire et chanson. bientôt dans votre radio ici mon sketch je vous le présente allez c'est ce soir on y va tu vois je te mets un jingle et tout ah ouais tu joues quoi parce qu'il faut aller toujours plus loin Pauline promis c'est mon frère qui fait le mixage si tu veux je lui demande de le rajouter s'il vous plaît Si vous m'entendez,

  • Speaker #1

    mettez-moi un chouette jingle pour ma carrière picture. Ça permettra d'alléger cet épisode, ça peut être une bonne idée.

  • Speaker #0

    Tout à l'heure,

  • Speaker #1

    tu m'as posé une question de savoir qu'est-ce qu'il y avait pour moi après Qu'est-ce que j'imagine en tout cas Tout à fait. Du coup, si ça te va, on passe sur le parler de notre propre mort à nous, comment est-ce que on perçoit ça, comment est-ce qu'on peut le voir et tout, pour répondre à ta question. Et c'est marrant parce que j'en ai parlé il n'y a pas très longtemps avec mon copain et... et ma mère et mon frère. Moi, j'imagine que quand on meurt, on se retrouve dans un espace où je ne saurais pas l'expliquer. Genre, c'est très nuageux, très volatil et tout. Et qu'on est dans un espace où il n'y a que les trucs qu'on kiffe. Genre, pour donner une image, moi, mon père, je l'imagine accoudé à un bar et toute la journée ils papotent avec le barman ou avec des gens qui viennent aussi au bar. Et genre, il y a tous ces chiens aussi qui sont dans cet espace-là. Et ils fument ces clopes et ils boissent ces Ricards et ils papotent et ils rigolent comme ça. Et en fait, c'est comme ça que je le vois. Genre, quand je l'ai expliqué à mon copain, il m'a dit Ouais, du coup, pour toi, c'est un peu genre un espèce d'image de paradis. Et je lui dis Bah, un peu, ouais, en fait. Genre, t'es dans un lieu où tu te sens bien, où t'es apaisée et où t'es prêt à accueillir toutes les autres. de personnes qui te sont chères qui vont arriver plus tard. Et moi, je le vois comme ça. Et souvent, je me dis, le jour où je vais partir, je sais que je retrouverai les chiens que j'ai perdus, je retrouverai mon papa. Et du coup, on découle la réponse à la question de est-ce que j'ai peur de mourir Du coup, pas du tout. Moi, limite, c'est très bizarre ce que je vais dire. Limite, j'ai hâte que ça arrive. J'ai hâte de savoir ce qu'il y aura derrière. Alors, je ne dis pas du tout... dans des envies suicidaires. C'est pas du tout moi.

  • Speaker #0

    On va vous poser le numéro, discrètement.

  • Speaker #1

    Aidez-la,

  • Speaker #0

    s'il vous plaît. SOS Amitié, s'il vous plaît. Contactez, répondez.

  • Speaker #1

    Ça fait deux heures qu'on parle, elle commence à me dire des trucs bizarres.

  • Speaker #0

    C'était soit disant un podcast gentil. Elle a commencé à prendre un couteau, je crois. Faites quelque chose.

  • Speaker #1

    Attention, elle a pris la javel. Attends, non

  • Speaker #0

    Pauline,

  • Speaker #1

    nous Donc non, j'ai pas envie de mourir. Enfin, j'ai pas envie de me tuer. Je vous rassure. Raccrochez votre téléphone.

  • Speaker #0

    Elle est toujours en vie pour l'instant.

  • Speaker #1

    Si cet épisode n'est pas publié, c'est que...

  • Speaker #0

    Oh non, on aurait parlé pour rien. J'irais cracher sur ta tombe, Pauline. Yes.

  • Speaker #1

    Bref. Tout ça pour dire qu'effectivement, je n'ai pas peur de mourir. Je n'en suis pas à me dire vite demain. Mais ouais, je suis en mode, on verra ce qui se passera. Je suis déjà contente de ce que j'ai vécu aujourd'hui. Et souvent, quand je dis ça, les gens me disent, oh là là, mais arrête, t'as encore plein de belles choses à vivre. Je leur dis, oui, peut-être, mais en fait, on n'en sait rien. Laissez-moi, je me contente déjà de ce que j'ai eu jusqu'à maintenant et j'en suis déjà très contente. Peut-être qu'effectivement, je vivrai encore mieux plus tard. En fait, personne ne le sait. Donc, c'est pour ça que je suis déjà en... paix de me dire, si je pars demain, je pars demain. Le seul truc, et bon, ça, c'est mon idéal. Si je peux ne pas souffrir, ça fait super, mais on choisit pas trop, en général. Donc, moi, j'ai pas trop peur de mourir. Je me dis, pourquoi pas Ça serait une expérience. Et puis, j'ai vachement ce truc de me dire, je retrouverai sûrement tous ceux qui sont déjà partis avant moi.

  • Speaker #0

    T'imagines un petit cocoon, quoi. Plus qu'un paradis. C'est un paradis, c'est un petit peu... Ton paradis ne serait pas celui de ton papa.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Voilà, mais c'est un cocon dans lequel...

  • Speaker #1

    Ça sera doux, quoi. On dirait bien.

  • Speaker #0

    Ouais, je comprends.

  • Speaker #1

    Je le vois vraiment comme ça. Et toi, comment est-ce que tu perçois ta mort, entre guillemets Enfin, comment est-ce que tu vis ça, le fait de mourir

  • Speaker #0

    J'ai eu peur plus jeune. Je me suis retrouvée dans des situations où j'ai eu très, très peur de mourir. Et aujourd'hui, plus du tout. Aujourd'hui, vraiment plus du tout. Aujourd'hui, moi aussi, je suis en paix avec ça. Alors en fait, c'est un peu la même chose que toi, c'est que je disais, ma mort elle va arriver, c'est très bien comme ça. Elle va arriver, c'est très bien comme ça. Elle arrivera...

  • Speaker #1

    Ça arrivera quand ça arrivera.

  • Speaker #0

    Ouais, mais c'est plutôt bien. Tu sais, moi je crois à rien. C'est un petit peu bizarre à dire. Je crois à rien, j'imagine rien. Alors la seule chose que j'arrive à imaginer, c'est des espèces de fils qu'on ne voit pas nous. Comme s'il y avait plein de fils invisibles qui seraient dans l'air. Et ces fils-là, qu'on ne toucherait pas, qu'ils ne nous toucheraient pas, mais qu'ils nous entourent sans qu'on les voit, seraient le reste de l'amour qui a existé quelque part de quelqu'un à quelqu'un. J'ai du mal à croire que rien ne reste, vraiment. Et je crois vraiment que... Je crois pas que la colère, la haine, toutes ces choses-là, elles restent. Je vois trop de gens. Ce qui reste, c'est... Même quand les gens me disent mon fils n'est pas venu me voir c'est quand même l'amour qui a porté cette phrase-là à un moment donné. Donc, si je devais imaginer quelque chose, même si du coup je me visualise pas dedans comme toi ou plein de gens, Je me dis qu'il ne restera peut-être pas à moi, mais quelque part, peut-être dans un fil, quelque part, il y aura une petite vibration de ce que j'aurais été, de ce que j'aurais voulu et de tout l'amour que j'ai reçu et que j'ai donné. Je suis un peu plus dans cette idée-là. Ok,

  • Speaker #1

    je vois. Je vois complètement. Et par contre, ce que je veux dire, c'est que là aujourd'hui, je dis que je n'ai pas peur de mourir. C'est comme ça que je vois la mort, machin et tout. Je me laisse le choix aussi de changer d'avis. Peut-être que dans le vivant, je dirais que j'ai peur. Enfin, j'en sais rien. Ou peut-être que si demain, on me dit que j'ai une maladie incurable et que je me retrouve avec Cléophée qui s'occupe de moi dans mes derniers jours, je ne dis pas que là, il me dirait pire. Franchement, je pense que je serais bien.

  • Speaker #0

    Après, tu sais, là, on parle dans un absolu où on est en relative bonne santé.

  • Speaker #1

    Et voilà, exactement.

  • Speaker #0

    On va dire que se rajoute à ça la douleur. souffrir en fait. Souffrir, ça change une personne. Avoir mal, c'est-à-dire, même déjà quand on a une très grosse migraine, on n'est plus nous-mêmes, on n'a plus patience, etc. Donc, il y a des facteurs que là, dans notre discussion, qui sont manquants, qui est que il y a la grande souffrance physique ou psychique. Il y a des gens qui se disent je vais mourir et j'ai peur et j'ai peur et j'ai peur et c'est normal.

  • Speaker #1

    Oui, c'est normal.

  • Speaker #0

    J'ai vu personne ne pas avoir peur à un moment, mais j'ai vu des gens... Et alors, je vais dire un truc, alors c'est pas de la magie, mais souvent, quelques jours avant que les gens meurent, ils sont apaisés. Il y a un vrai... Alors, ça a diverses explications. Je ne prends pas de partie dans les explications. Il y a des explications très scientifiques qui expliquent que c'est chimique et qu'il y a plein de choses qui rentrent en jeu. Je pense qu'il y a de ça. Et puis, il y a aussi apparemment quelque chose de plus spirituel qui... passerait et d'un coup il y a un apaisement, un équilibre que les gens trouvent. Et je sais que quand ils en sont là, que la peur est partie, qu'ils vont y aller, tout doucement et tranquillement. Et ça se vérifie dans nombre de cas. Donc là-dessus il y a aussi quelque chose qui est titillant parce que j'ai pas de réponse à te donner, il y a des tas de spécialistes et d'éminents professeurs qui t'en parleraient de manière très cartésienne. et il y a de ça, je pense réellement mais pourquoi ce processus chimique se met en place maintenant, est-ce que la nature est tellement bien faite qu'elle nous protège juste avant ou alors est-ce qu'il y a autre chose qui nous protège ou est-ce que ça a besoin de nous protéger, ça voudrait dire aussi peut-être, je ne sais pas il y a beaucoup de questions dont je n'ai pas les réponses et ça me va de ne pas les avoir mais c'est des choses qu'on voit qu'on observe et qu'on se dit une personne qui est très stressée, très tendue d'un coup, bam il se passe quelque chose, et là, on a l'impression qu'il y a un mieux. C'est ce qu'on appelle le dernier bonjour. Souvent, c'est un bonjour éclatant qui sort de nulle part. Et souvent, la famille croit, croit à un rebondissement et en fait, pas du tout. Des fois, on appelle le lendemain et on dit, elle est partie. Voilà. Juste pour dire que parfois, les choses sont un peu étranges.

  • Speaker #1

    Pour en avoir un petit peu parlé avec des personnes qui côtoient la mort, en fait, comme toi. dont un collègue qui était avant-anatopracteur qui me disait Mais tu sais Pauline, c'est vrai qu'il y a souvent un pic des décès après les fêtes parce que souvent les personnes se disent C'est bon, j'ai vu tout le monde, je peux partir. Ou après un anniversaire, ou après un événement, un truc qui leur tient à cœur ou quoi au caisse. Et quand il m'a dit ça, je lui ai dit Purée, c'est vrai que moi mon père il est parti le lendemain où on a fêté Noël tous ensemble. Et genre vraiment le lendemain quoi. Du coup, ça rejoint carrément ce que tu expliquais, qu'il y a, je pense, une forme d'apaisement ou j'en sais rien, une sorte d'accomplissement ou d'acceptation en se disant allez, c'est bon maintenant, je suis OK, je peux y aller Mais comme tu disais, ça n'enlève rien à la peur qu'on peut avoir et je pense que c'est normal. Je disais j'ai pas peur de mourir encore une fois, je reviens dessus, mais en fait, j'en sais rien de comment est-ce que je vais partir, peut-être que ça se fera en acclapement de doigts et j'aurai pas le temps d'avoir peur. Ou peut-être que je vais flipper pendant des années et des années parce que, je ne sais pas, j'aurai une maladie. Ou voilà, en fait, on n'en sait rien. Mais ouais, je pense qu'il y a vraiment un moment où... Peut-être pas tout le monde, mais il y a peut-être certains êtres humains qui se disent là, j'accepte, c'est OK

  • Speaker #0

    Tu sais, alors ça aussi, j'aime pas le terme, mais j'arrive pas à en trouver un autre, c'est un peu une bagarre que j'ai parfois avec les accompagnants. Parce que quand tu me dis il est parti après les fêtes quelque part, il a peut-être senti qu'il pouvait. Alors tu sais, il y a beaucoup d'exemples, par exemple, tu prends, je pense à un monsieur, Il ne voulait plus manger, ce monsieur. C'était d'une douleur infinie pour lui de manger. Donc, lui nous avait fait part de ça, du fait qu'on allait dé-médicaliser tranquillement, ce qui est très différent de donner la mort. Je le place quand même pour ne pas qu'on se prenne des... Lui avait demandé qu'on arrête petit à petit les soins, parce que lui souffrait beaucoup et que nous, on était au bout de ce qu'on pouvait faire. Donc, ce monsieur, quand sa femme venait, il se forçait à manger. Parce qu'elle lui disait, il faut manger, il faut prendre des forces. Et c'est évidemment compréhensible. Et donc ce monsieur, il souffrait. Donc il vivait pour elle. Il souffrait pour elle. Et un jour, j'ai eu cette discussion très désagréable avec sa femme pour lui dire, vous savez, aussi il y a un moment, il faut lui dire, tu sais, je suis là, mais tu peux partir. Je suis là, mais tu as le droit de lâcher. Et je me suis fait... Pas incendier, mais... Et je l'entends aussi. J'entends que ça peut être pris de manière violente en me disant, mais c'est quand même mon mari, on va quand même pas le laisser mourir comme ça, comme un chien, parce que c'est ce que j'entends, comme un chien. Et je ne suis pas du tout une soignante qui laisse mourir les gens comme des chiens. Mais comme si c'est la volonté de la personne, la personne, elle n'en peut plus, en fait. Simplement, il faut l'autoriser à partir. C'est très, très compliqué, ce schéma-là, ce que je suis en train de dire. Ça va heurter beaucoup de gens. Je ne sais pas ce que ça heurte chaque jour que je travaille.

  • Speaker #1

    J'imagine bien, parce que de toute façon, c'est aussi tout un sujet dans notre pays. Alors là, effectivement, ce dont tu parles, ce n'est pas de l'euthanasie. Pas du tout. Mais ça peut aussi rejoindre ce sujet de la légalisation de l'euthanasie, etc. Je n'ai pas forcément envie qu'on rentre dans le débat.

  • Speaker #0

    Non, ça m'était inutile.

  • Speaker #1

    Je pense aussi que c'est important de dire qu'effectivement... Comme tu le disais très bien, il y a un moment, les personnes sont à bout. C'est la fin. Il n'y a plus rien à faire. Il n'y a plus rien à espérer. Il y a des questionnements qui se posent. Oui. Et les apports gagnants, je pense que c'est effectivement très difficile de lâcher prise en se disant Ok, c'est bon En fait, je reprends beaucoup l'histoire de mon papa. Désolée, c'est un peu trop omniprésent.

  • Speaker #0

    Pas du tout.

  • Speaker #1

    Mais pour moi, c'est un exemple dans le sens où, en fait, On a appris après sa mort que l'état de sa maladie était bien plus grave que ce qu'il nous disait. Et au début, on était un peu en mode, pourquoi il ne nous a pas dit Et en fait, la réponse est venue très vite, c'est qu'il voulait qu'on lui foute la paix. Et c'est son droit. Et il y a plein de gens autour de moi qui m'ont dit, ouais, mais c'est égoïste, si vous avez dit la vérité, peut-être que si. Et puis ça, vous auriez pu vous préparer. De un, t'es jamais préparé. qu'on sache ou qu'on ne sache pas, il serait mort, quoi. Et de deux, on lui a foutu la paix. Enfin, je pense que c'est très dur pour des personnes malades et qui sont transparents avec leur famille, d'avoir une famille qui, toute la journée, va dire Tu ne fais pas ci, non, fais pas ça, ah, tu ne devrais pas faire ça, parce que gna gna. Et puis, ah, migni, et ça, ce n'est pas bon pour toi. Et waouh, waouh, waouh. Il respire encore, on peut profiter de lui ou...

  • Speaker #0

    Comment ça se passe Tout à fait. Et ça, ce n'est vraiment pas une chose... Alors, c'est... C'est une des choses les plus difficiles au quotidien, au boulot. C'est que je suis là pour écouter les familles, au même titre que les personnes que je soigne. Pour autant, c'est les personnes que je soigne qui décident. Ça veut dire que c'est logique. Mais moi aussi. Mais c'est très compliqué. Encore une fois, je reviens sur cette phrase, mais j'ai entendu un nombre de fois, ma mère est morte comme un chien. Non, elle n'est pas morte. Elle a beaucoup souffert. Ça, c'est une réalité. Je sais que ça va heurter, malgré moi, des gens de dire ça. On ne sait pas à l'heure actuelle la vérité de la chose. La plus crue possible, c'est qu'on ne peut pas, on ne sait pas tout soulager. On fait de notre mieux, mais il y a des choses qui sont inévitables. Je ne palie pas à la mort, c'est-à-dire que je ne pourrais pas empêcher que ça arrive. Je ne pourrais pas... Il existe plein de moyens aujourd'hui, etc. Mais il y a des douleurs qui sont au-delà de tout, que l'on ne peut pas entièrement soulager. Il y a des personnes qui arrivent à l'épuisement de supporter ça pour faire plaisir à leur famille. Et là, c'est très compliqué quand arrive ce moment-là, qui est évidemment non seulement compréhensible. Mais je trouve que c'est beau quand quelqu'un dit bon, non, je vais manger parce que ma femme, elle va se tracasser

  • Speaker #1

    C'est une preuve d'amour.

  • Speaker #0

    Mais de l'autre côté, il faut que l'autre personne fasse le chemin et se dise je l'aime tellement Là, ça suffit. Après, il y a trois heures de soins parce que le monsieur, il n'arrive pas à déglutir. On ne peut pas infliger à quelqu'un tout ça pendant des jours et des jours et des jours. Et c'est très compliqué parce que les gens, ils arrivent et disent vous la laissez comme ça, vous avez enlevé la perfusion Je dis, oui, mais votre maman, elle souhaite qu'on m'arrête les soins. On est là pour elle. Si elle change d'avis, je remets immédiatement la perfusion. Pour l'instant, ce qu'elle souhaite, c'est qu'on m'arrête la perfusion parce qu'elle n'en peut plus. Et là, c'est très compliqué parce que tu te retrouves avec des gens qui pensent qu'on maltraite, alors qu'en fait, si on prend un tout petit peu de recul, quelque part, sans le vouloir, c'est inconscient.

  • Speaker #1

    Mais oui, c'est eux qui maltraitent. Alors que toi, tu prends en considération l'avis de la personne qui est concernée.

  • Speaker #0

    C'est mon travail. C'est beaucoup plus facile, je ne jette pas du tout la pierre, ce que je suis en train de faire, ce n'est pas du tout ça, c'est d'essayer de faire comprendre aux gens que quand on va vers eux, qu'on leur dit, vous voyez, votre maman, elle a souhaité qu'on arrête la perfusion, là, elle n'y arrive plus, il faut qu'on en parle, parce que c'est son souhait. Ou par exemple, elle nous a dit dans ses volontés que quand elle en arrivait là, elle souhaitait par exemple une sédation profonde, ce qui ne veut pas dire qu'on tue la personne, ça aussi, je reviens là-dessus. C'est juste, on amène la personne à s'endormir un peu plus tranquillement. Mais ça aussi, on en parle avec les gens. On est là pour eux. Et la famille, c'est très compliqué. Parce qu'ils ont leurs sentiments qui sont très contradictoires. Et puis, qui s'accrochent encore à de l'espoir de quelque chose. C'est dur de leur enlever ça, tu vois. Enlever l'espoir des gens, c'est terrible. Pour moi, il y a tellement d'espoir, c'est terrible. Mais la seule chose... Parfois, effectivement, on se prend un petit peu des murs, mais c'est pour leur bien aussi. Qu'ils comprennent que c'est pour leur bien à tous. Ce n'est pas évident tous les jours.

  • Speaker #1

    De toute façon, la mort est dure pour les vivants. C'est ceux qui restent qui vont vivre avec la mort. Donc, effectivement, ce n'est pas facile. Je pense qu'on a fait le tour pour cet épisode, qui est un épisode délicat, mais qu'on a essayé d'aborder avec bienveillance déjà. et aussi en essayant de montrer que la mort peut avoir de la beauté du positif, que c'est pas toujours une fatalité que de quitter ce monde en tout cas Clophe merci beaucoup mais vraiment merci pour ton intervention dans ce podcast ça a été un plaisir de te recevoir et d'en discuter

  • Speaker #0

    Merci à toi Pauline, ça a été hyper doux et hyper enrichissant pour moi de pouvoir échanger avec toi là-dessus et tu m'as fait... pensé, ça sera ma petite clôture à moi, à une phrase aussi que j'aime beaucoup qui est de dire ce qui m'intéresse c'est d'investir le cœur des gens dans le présent plutôt que d'être incomprise à jamais. Je pense que tu es quelqu'un qui touche au cœur les gens qui sont avec toi et qui sont présents. Donc c'est beaucoup plus important qu'être incomprise à jamais.

  • Speaker #1

    Et bien on va clôturer cet épisode en chialant.

  • Speaker #0

    Non Super. Je t'en prie, c'est moi qui te remercie Pauline.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir partagé ce moment avec nous. Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à en parler autour de vous et sur les réseaux sociaux. Et pour rappel, le podcast à nous deux, c'est un mardi sur deux.

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