- Aurore Mayer
Bonjour et bienvenue dans l'émission À part égale, l'émission du réseau Parité 1-1 du groupe La Poste. Cette émission est l'occasion de parler de parité, de ses enjeux, de comment on va pouvoir parvenir à favoriser l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, à tous les niveaux de l'entreprise et même au-delà. Nous aurons l'occasion de recevoir des personnes issues de la société civile,
- Marie-Cécile Naves
du monde institutionnel,
- Aurore Mayer
du monde politique, sportif ou encore culturel. Et j'ai aujourd'hui la chance de recevoir parmi nous la politologue et sociologue Marie-Cécile Nave. Marie-Cécile Naves, bonjour.
- Marie-Cécile Naves
Bonjour.
- Aurore Mayer
Marie-Cécile Nave, vous êtes déléguée générale de France Université, directrice de recherche à l'IRIS, l'Institut des relations internationales et stratégiques, directrice de l'Observatoire Genre et Géopolitique. Vous êtes l'autrice de nombreux ouvrages, notamment coautrice du rapport... lutter contre les stéréotypes filles-garçons, un enjeu d'égalité et de mixité dès l'enfance, autrice de la démocratie féministe, de la géopolitique des féminismes, de calmez-vous madame, ça va bien se passer on sait à quoi ça fait référence, et vous avez réalisé de nombreuses études et chroniques sur la marginalisation du sport féminin, des droits des femmes à l'international, de l'égalité hommes-femmes, bref. Vous êtes une experte et je suis très heureuse de vous... recevoir sur ces sujets d'égalité professionnelle et de parité. Marie-Cécile, aujourd'hui, Marie-Cécile Nave, le sujet vraiment que j'ai envie d'aborder avec vous, puisque vous avez cette vision très large sur nos sujets de parité, c'est pourquoi l'entreprise a intérêt, selon vous, à favoriser la parité ?
- Marie-Cécile Naves
Alors, la parité, c'est un sujet qui intéresse de nombreux observateurs, de nombreuses observatrices, à la fois le monde politique, Le monde de la recherche qui observe ce qui se passe, quels sont les leviers pour y parvenir, quels sont les contextes dans lesquels ça s'inscrit. Et puis évidemment les acteurs et les actrices les premiers concernés dans leur travail au quotidien. Les avantages de la parité, j'en citerai trois, il y en a de multiples. Évidemment ça dépend du contexte dans lequel on s'inscrit. Le premier, c'est sans doute que c'est à la fois comme dynamique et comme résultat. C'est un moyen de lutter contre toutes les formes d'entre-soi. Et très souvent, quand on met en place des dynamiques de parité femmes-hommes, ça donne le go, ça lance une dynamique pour lutter contre toutes les formes d'entre-soi en général. Et l'entre-soi, c'est bon pour personne. Parce que quand on est entre-soi, on ne se remet pas en question. On ne va pas chercher de nouvelles compétences, on ne va pas chercher de nouvelles expertises. Et c'est très rassurant, ce n'est pas du tout challenging, mais on manque aussi de regard sur le monde, on manque d'ouverture. Le deuxième avantage peut-être pour les organisations publiques ou privées, mais les entreprises, quel que soit leur objet finalement, c'est que la parité permet de ne plus se priver de talent. Alors c'est ce que j'ai dit un petit peu précédemment, c'est lié à ce que j'ai dit un peu précédemment. C'est-à-dire qu'on va essayer d'aller dégoter des gens auxquels on ne pensait pas, parce qu'on a l'habitude de recruter ou de promouvoir toujours les mêmes types de profils, les écoles par lesquelles on est passé, parfois les mêmes promos par lesquels on est passé. Je pense qu'on a des exemples politiques en tête très actuels à ce niveau-là. Et ça permet de lutter aussi contre le turnover, parce qu'on a aujourd'hui, on est dans un contexte professionnel, en particulier depuis la Covid, mais... mais ce n'est pas spécifique à ces événements-là. C'est un peu assez structurel, notamment dans les sociétés de plein emploi ou qui approchent le plein emploi. Ce qu'on est confronté, les entreprises sont confrontées à des problèmes de turnover, notamment dans les jeunes générations, même si je généralise un peu en disant les jeunes générations, mais enfin, on choisit aussi son entreprise en fonction des conditions professionnelles, pas seulement le salaire, même si ça compte beaucoup, mais c'est aussi comment l'entreprise va prendre en compte les questions de genre, les questions de diversité, les questions de bien-être au travail. Et donc, quand on a un gros turnover, quand on a beaucoup de gens qui partent, finalement, ça coûte de l'argent, il faut les reformer, il faut relancer des procédures de recrutement. Et donc, c'est un moyen d'attirer des compétences dont on aurait tort de se priver si on était toujours dans les mêmes schémas de pensée. Et puis, le dernier avantage, mais qui est lui-même lié au... Deux autres que j'ai cités précédemment. C'est que la parité est un vecteur de performance. Et toutes les études qui ont été faites à la fois par le monde de la recherche, mais aussi par les entreprises privées elles-mêmes, ou les cabinets de conseil qui travaillent sur ces questions dans tous les pays développés, montrent que la parité, évidemment si elle est bien mise en place, si elle est bien accompagnée, si on sait en évaluer l'impact, est un facteur de performance. Reste à définir le mot performance, parce que ça n'a pas le même sens en fonction de l'organisation.
- Aurore Mayer
Oui, vous avez totalement raison. Nous, on y croit beaucoup, en tout cas à La Poste. C'est pour ça qu'il y a une direction de la parité qui a été mise en place. C'est pour ça aussi qu'on met en place cette émission aujourd'hui pour pouvoir échanger, pour pouvoir se questionner. La performance économique, on en est persuadé. Ça passe effectivement, comme vous le disiez, par la mixité, par avoir des profils différents. Et comment on peut faire, en fait ? Quels sont les leviers que l'on a en tant qu'entreprise pour... favoriser la parité ? Est-ce qu'il y a des leviers ? Est-ce que vous avez des expériences dont on pourrait s'inspirer ?
- Marie-Cécile Naves
Alors, il y a plusieurs types de leviers et ça va dépendre un peu d'où on part et quels sont les objectifs que l'on peut avoir à moyen ou à long terme. Il y a des entreprises, des organisations qui partent de plus loin que d'autres en la matière. Évidemment, l'objectif de RSE, de bien-être au travail, d'éthique, de justice, c'est totalement... totalement louable et fonctionne dans de nombreux cas, mais ça ne fonctionne pas toujours, parce que dans un certain nombre de situations, vis-à-vis d'un certain nombre de collaborateurs, notamment ceux qui sont atteints par la gender fatigue. Oui,
- Aurore Mayer
on en entend beaucoup parler,
- Marie-Cécile Naves
effectivement. Il y a la marre de vos histoires, après MeToo, etc. Le féminisme va trop loin et tous ces pensums que l'on entend, mais qu'il faut quand même prendre en compte quand on est dans une organisation. Les enjeux d'éthique et de justice sociale, ça ne convaincra pas tout le monde. Donc, il faut mettre en place aussi, par rapport à ce que je disais précédemment, essayer d'objectiver ce pourquoi c'est un bien pour l'entreprise de mettre en place la parité. Donc, il y a les questions de performance, il y a les questions de ne plus se priver de compétences, la capacité à se renouveler, la capacité à générer de l'innovation. Tout un tas de choses qui font qu'on n'est pas seulement sur le registre de la justice sociale, mais on est aussi sur celui de l'efficacité économique. Et pour moi, et tout le monde n'est pas d'accord avec ça, je le sais bien, dans les cercles qui discutent de ces sujets-là, pour moi les deux objectifs ne sont pas incompatibles. Ils sont même très souvent complémentaires. Et ça suppose d'avoir un récit, un storytelling qui est adapté. au type d'objectif que l'on veut atteindre et au type de levier que l'on veut promouvoir. Ensuite, parmi les leviers, en France, mais c'est vrai, dans un certain nombre de pays développés, peut-être un peu moins dans les pays nordiques qui ont pensé ça avant nous, c'est un cliché, mais c'est une réalité aussi, en France, et notamment le législateur s'est beaucoup concentré sur les hauts niveaux de management. Que ce soit dans la haute fonction publique ou dans les entreprises du CAC 40 ou avec la loi Rixin, on est passé un peu à d'autres comités directeurs, etc. La parité ne ruisselle pas, c'est-à-dire ce qu'on peut prendre comme décision soit par la loi, soit par des règlements intérieurs, etc. sur davantage de femmes dans les postes de direction ou de très haute responsabilité. ça ne ruisselle pas dans les niveaux inférieurs de management et finalement dans l'ensemble de la force de travail pour tout un tas de raisons extrêmement complexes mais quand même connues et documentées par la recherche qui est que moins les métiers sont qualifiés, moins ils sont mixtes. Et plus c'est difficile de lutter contre eux. On va dire, c'est une sorte de stéréotype qui fait que certains métiers demeurent considérés comme particulièrement féminins et d'autres considérés comme particulièrement masculins. Et la transgression de genre est difficile à se concrétiser. Donc, il faut veiller, si on veut être dans une entreprise paritaire à tous les niveaux, à ne pas se contenter du haut management, mais à regarder aussi le management intermédiaire et puis les autres. les autres postes de travail.
- Aurore Mayer
Vous avez raison, c'est vrai qu'on a la loi à Rixin qui nous fixe l'objectif d'avoir 40% des femmes parmi les cadres dirigeants à 2029. Alors à la poste, on va plus loin, on s'est dit, enfin le président a fixé cet objectif à 2025, 2025 c'est demain, donc on y travaille, et c'est à tous les niveaux, on s'en rend compte aussi sur le terrain, effectivement il y a les milieux, notamment de management intermédiaire, où on a un peu plus de mal à À identifier les femmes, parce qu'en fait, quand on les cherche, on les trouve. Et vous avez dit quelque chose que je trouve très intéressant aussi, c'est que plus on travaille sur le sujet, en tout cas nous, en interne, c'est pour ça qu'avec les équipes du réseau, on essaye vraiment de jouer aussi sur les stéréotypes de genre. C'est-à-dire qu'il y a effectivement peut-être des postes de dirigeante, mais souvent c'est sur certains types de métiers, il y en a d'autres où elles sont moins, et notamment c'est parfois les métiers qui sont le plus rémunérateurs, où on trouve le moins de femmes. Est-ce que vous avez quelque chose à nous dire à ce sujet ? Et comment on peut y travailler pour que ce soit à tous les niveaux que ça se passe ?
- Marie-Cécile Naves
Il faut aussi envisager la parité dans l'autre sens. C'est-à-dire, il faut penser en termes quantitatifs, mais il faut penser aussi en termes qualitatifs. C'est-à-dire qu'il y a des professions qu'on considère encore comme étant... ou des types de postes plutôt que des... Tout à l'heure, je parlais des niveaux de hiérarchie, mais en termes de type de postes, les fonctions que l'on exerce. sont considérées encore trop souvent comme étant typiquement destinées aux femmes ou typiquement destinées aux hommes, même au même niveau de responsabilité. Donc il faut aussi travailler dans les deux sens. Par exemple, on peut, les questions de responsabilité financière à tous les postes très techniques, techniques dans un sens très stéréotypé, parce qu'il y a aussi des postes occupés par les femmes qu'on ne considère pas comme techniques, mais comme relevant de qualité innée. ressources humaines, etc. Les femmes, elles ont plus d'empathie, les femmes, elles savent mieux faire du lien, etc. Donc, il faut aussi veiller à la parité dans les deux sens, c'est-à-dire dans les professions ou à des niveaux de responsabilité très féminisés. Il faut aussi penser à masculiniser ça, non pas par marche forcée, mais par un travail d'accompagnement des collaborateurs, des collaboratrices, et de réflexion globale de l'organisation. Donc, la parité invite aussi à revoir... La manière dont une organisation s'est construite, a perpétué un certain nombre d'habitudes, sans forcément se questionner sur le bien fondé de ces habitudes et les effets qu'elles peuvent avoir, parce que les stéréotypes se mesurent à leurs effets. Les stéréotypes sont extrêmement insidieux. Les stéréotypes les plus flagrants, c'est ce qu'on voit dans Mad Men, par exemple, dans la série. La série Mad Men qui est très parlante à cet égard, aujourd'hui ça passerait plus même si on a encore quelques résistances à ça. Mais les choses qui sont plus insidieuses comme par exemple couper la parole aux femmes en réunion, ne pas les écouter dès qu'elles prennent la parole, détourner le regard dès qu'elles ont le micro en main avant même qu'elles aient commencé à parler, ça c'est des choses qu'on vit encore aujourd'hui. leur couper la parole ou leur piquer leurs idées ou se réapproprier leur sujet alors qu'on n'est pas spécialiste. C'est ce que Rebecca Solnit, la journaliste américaine, a appelé le Mindsplaining C'est un super livre, Ces hommes qui m'expliquent la vie Ce sont des choses qui sont insidieuses, qu'on a du mal à détecter, mais dont les effets sont très concrets.
- Aurore Mayer
Ça veut dire quoi ? Qu'il faut qu'on soit vigilant ? Tout est tous à notre niveau et dès que ça se passe, même dans l'entreprise, pouvoir le relever ou dire c'est hors jeu. Qu'est-ce qu'on peut conseiller aussi aux managers, aux équipes sur le terrain quand on constate ça ? Parce qu'en fait, on a l'impression que finalement, on ne le voit même pas, on ne le voit même plus.
- Marie-Cécile Naves
Je pense que les femmes le voient. Mais n'ose pas le dire. Alors ça, c'est une réaction à postériori, mais on peut aussi édicter des nouvelles règles d'organisation des réunions. C'est-à-dire que personne ne parle plus de deux minutes à la suite. Oui. Qu'on doit veiller, pour un organisateur ou une organisatrice de réunion, à bien répartir la parole. La manière dont on demande la parole, elle peut être... codifié. Alors c'est un peu rébarbatif au début mais finalement ça fonctionne assez bien et ça permet petit à petit de changer les habitudes. Il s'agit pas, comme la parité finalement c'est censé être un moyen pour aller vers une société, des organisations qui n'auront plus besoin d'avoir ce type de règles, ça se fera naturellement si je puis dire, mais sans doute qu'il faut mettre en place des choses un petit peu contraignantes au départ et auxquelles on s'habitue et finalement après ça se... Ça se fait tout seul.
- Aurore Mayer
Et Marie-Cécilie, vous avez déjà intervenu pas mal de fois dans vos ouvrages aussi sur cette jeune génération qui laisse moins passer les choses. Et en même temps, on voit que dans certains milieux, il y a un recul de l'égalité des femmes et des hommes, en tout cas dans le rapport de l'autorité à l'égalité entre les femmes et les hommes. Alors, qu'est-ce que vous pouvez dire à ce sujet ? Qu'est-ce qu'on observe ? Et du coup, par rapport aux jeunes générations, comment on peut... veiller à ce qu'il n'y ait pas de recul. Vous quêtez beaucoup aussi au niveau international, je pense que vous avez cette vision aussi dans l'ensemble des pays. Qu'est-ce qu'il reste à faire pour qu'on soit vigilants et pour qu'il n'y ait vraiment pas de recul ?
- Marie-Cécile Naves
Dès qu'on baisse la garde, effectivement, le sexisme revient par la petite porte et parfois par la grande porte et parfois par la loi. Oui, c'est vrai que... Quand on est chercheur ou chercheuse, on a tendance à ne pas vouloir raisonner en termes de génération, parce que c'est un peu trop global.
- Aurore Mayer
Stigmatisant peut-être aussi.
- Marie-Cécile Naves
Aussi stigmatisant, il faut croiser avec un certain nombre d'autres variables, qui est le niveau de diplôme, le territoire de vie, le background culturel, et tout un tas de choses qui vont croiser les problématiques de genre. Et en fonction des milieux sociaux, des études qu'on a faites, ou du parcours qu'on a eu, on n'aura pas le même regard. sur cette question du sexisme. Effectivement, il y a une résistance dans toutes les générations, il y a une résistance à ce programme de l'égalité homme-femme. Et tout ce qu'on pourra faire sur le plan de l'égalité, de la sensibilisation, est complètement remis en question ou cassé par les algorithmes des réseaux sociaux, de certains réseaux sociaux, qui se fondent sur le clash, le buzz, et qui perpétuent, voire qui... qui font réapparaître tout un tas de violences verbales, symboliques, sexistes dont certains peuvent s'emparer néanmoins. Je crois que dans une partie des jeunes générations très diplômées qui aujourd'hui cherchent du travail ou viennent d'entrer dans la sphère professionnelle, le seuil de tolérance au harcèlement, aux violences, quelles qu'elles soient d'ailleurs. Ce n'est pas que les violences sexistes, c'est aussi les violences racistes, homophobes, transphobes, etc. Le seuil de tolérance a considérablement baissé. Et donc, ça nous amène nécessairement à nous questionner, nous qui sommes plus anciens, plus âgés, sur nos habitudes. Et heureusement que la jeunesse bouscule les choses, parce que sinon, on serait une société qui pourrait s'inquiéter.
- Aurore Mayer
Et on se rend compte, moi, je vois à la Poste, que... On parle beaucoup de ces jeunes générations, effectivement, éduquées, comme vous le disiez. Et c'est vrai qu'en même temps, la parole se libère de plus en plus, et ça pousse aussi les générations plus anciennes, plus expérimentées que nous sommes. Et donc, ça pousse ces générations à aussi oser parler, oser dire des choses, mettre en place des mesures, et en fait, tout le monde en profite. Quand on parle de gêne, d'or, fatigue aussi. Finalement, quand on parle de bien-être et d'équilibre de vie, en tout cas, nous, au Réseau Parité, on fait en sorte qu'il y ait aussi des hommes. Que ce ne soit pas qu'un sujet de femmes, et pour nous, c'est important. C'est quelque chose que vous partagez ? Ou est-ce que les hommes ont quelque chose aussi à retirer de cette montée de la parité de femmes sur certains types de postes ?
- Marie-Cécile Naves
À moyen terme, oui. À court terme, bien sûr, il y a un coût pour les hommes. Il ne faut pas occulter ça. C'est quand même un certain nombre de privilèges qu'il faut accepter. De mettre de côté, auquel il faut accepter de renoncer, pas tous les hommes, parce qu'encore une fois, il faut croiser avec le type d'emploi, le type de diplôme, le niveau de qualification. Il y a aussi des hommes qui souffrent de la non-parité, qui souffrent de la non-progression possible dans une organisation, des faibles salaires, de l'exploitation. Évidemment, tout ça, ça existe. Mais quand même, pour ceux dont il est question dans la dynamique de parité en faveur des femmes, bien sûr il y a un coût à court terme, mais à moyen et à long terme, tout le monde a gagné. L'organisation en termes d'innovation, en termes d'ouverture, en termes de capacité à s'adapter aux nouvelles exigences du monde, c'est dit de manière un peu abstraite, formule comme ça, mais enfin c'est la réalité. Par exemple, le savoir s'adapter aux énormes crises. auxquelles on a fait face ces dernières années et auxquelles on fera face sans doute demain. La transition qu'il faut mettre en place en termes d'égalité de gens est tout aussi importante que la transition écologique, la transition sanitaire, la transition numérique. Ce sont des choses auxquelles on n'échappera pas. Et puis en termes de relations humaines, en termes de bien-être, en termes de... Avoir envie de travailler, lutter contre les problèmes de santé mentale qui nous... d'anxiété. qui prennent du terrain dans les pays développés et même ailleurs, c'est majeur. Mais je voudrais ajouter peut-être un petit point, enfin deux petits points, puisque vous avez parlé de la parole qui se libère, etc. La parole, elle se libère, il faut l'écouter. Il faut mettre en place aussi des dispositifs pour la prendre au sérieux, pour voir comment ça se concrétise par des mesures qui tiennent compte de la lutte contre les violences, parce que ça continue, les VSS, les violences sexistes et sexuelles, c'est aussi un moyen. pour écarter un certain nombre de personnes de certains écosystèmes professionnels. C'est très clairement ça aussi le but des VSS, c'est d'écarter les femmes, et parfois certains hommes, parce qu'ils ne correspondent pas à une masculinité, on va dire, hégémonique, etc., de rester entre soi. Et la deuxième chose que je voulais dire, c'est qu'on entend beaucoup, notamment dans le monde professionnel, que c'est aux femmes d'oser. J'entendais encore la présidente de l'Assemblée nationale, ça récemment, dire c'est aux femmes d'oser prendre leur place Ok, les femmes peuvent oser prendre leur place si les conditions d'accueil ne sont pas là, si on ne cesse de leur répéter par différents moyens que ce n'est pas leur problème. place, qu'elles n'ont pas de légitimité, qu'on leur coupe la parole, qu'on ne les écoute pas. Elles peuvent oser tout ce qu'elles voudront, les barrières seront toujours là. Donc il ne faut pas toujours mettre la responsabilité sur celles et ceux qu'on a envie de promouvoir. C'est aussi les conditions d'accueil, les conditions de promotion, les conditions d'évolution dans une organisation qui doivent être exemplaires.
- Aurore Mayer
Je trouve ça intéressant parce que c'est vrai que souvent on fait aussi des formations, on se dit il faut qu'on aide les femmes, on met... être plus assertive, avoir plus confiance en elle, à faire du leadership au féminin, etc. Effectivement, la responsabilité est souvent mise sur la femme. C'est donc la femme qui doit mettre en place des choses pour arriver. Et effectivement, je pense que vous avez raison, et en tout cas, à La Poste, on fait très attention à ça. C'est-à-dire qu'il y a tout le contexte autour, il y a tout l'environnement, on essaye vraiment de former aussi les managers, hommes comme femmes. pour que l'environnement soit propice, et peut-être qu'il faut aussi former d'ailleurs les hommes. Qu'en pensez-vous ?
- Marie-Cécile Naves
Oui, accepter que les femmes prennent la parole, que les femmes parlent parfois fort, que ce qui est considéré comme de l'agressivité, c'est juste d'affirmer la légitimité que l'on ressent ou que l'on a d'être là. Donc oui, bien sûr, il ne faut pas faire tout. tout reposer sur la responsabilité individuelle, mais aussi voir les choses de manière plus structurelle et plus collective. Effectivement, impliquer les hommes, ça me semble important. Dans les conférences qu'on peut faire sur ces questions-là, que ce soit quand on parle de l'international ou de la France ou de géopolitique, du féminisme, il y a de plus en plus d'hommes, mais quand même pas beaucoup. C'est comme si ces sujets ne les concernaient pas, alors qu'au contraire, ça les... Ça les concerne au premier plan, bien entendu.
- Aurore Mayer
Bien sûr. Ou il y a des hommes qui arrivent un peu parce qu'il faut y être, parfois, et qui ont des prises de parole. Ou des femmes aussi, sans avoir les vraies convictions. Et on voit de plus en plus d'hommes quand même qui ont... Je vais exprès un peu faire le poil à gratter, mais on voit ça aussi, l'opportunisme un peu parfois. Et nous, on essaye en tout cas, et on le voit, moi je trouve, et je tiens à le dire très sincèrement... Dans le groupe La Poste, on a des hommes qui s'engagent et qui s'engagent très sincèrement, parce que j'ai rencontré pas mal de monde et ils s'engagent très sincèrement. Mais on voit aussi, et partout, des personnes qui vont sur ces sujets parce que c'est bien d'y être et qui, au fond, ne sont pas sincères dans leur démarche.
- Marie-Cécile Naves
Je pense que c'est un peu inévitable dans les différentes phases d'avancement des sujets. Ça prouve que le sujet progresse, parce que s'il n'y avait pas de comportement opportuniste, Ça voudrait dire qu'on s'en moque un peu. Donc là, c'est un sujet qui est bankable.
- Aurore Mayer
C'est ça.
- Marie-Cécile Naves
Et même s'il y a du... Bankable.
- Aurore Mayer
En image.
- Marie-Cécile Naves
Même s'il y a du féminisme washing, même s'il y a de l'instrumentalisation, c'est un peu un passage obligé et qui montre que le sujet prend de l'emploi. En tout cas, qu'on est contraint quand même de le prendre en considération. On ne peut pas le balayer d'un revers de main.
- Aurore Mayer
Marie-Cécile Nave, souvent on parle de rôle modèle. Est-ce que vous, vous avez un rôle modèle ?
- Marie-Cécile Naves
Moi j'aime beaucoup, il y a des femmes qui m'ont beaucoup inspirée dans mon parcours, soit parce que je les ai côtoyées et que j'ai travaillé avec elles, soit parce que je les ai lues ou que je les ai écoutées. Alors moi j'aime énormément Michelle Obama. Je suis une grande fan de Michelle Obama que je ne connais pas personnellement malheureusement. Mais que je trouve très intéressante dans la manière dont elle parle, à la fois des questions de féminisme, mais aussi des questions de racisme, de politique. Faire de la politique autrement, les livres qu'elle a rédigés, comment elle s'engage aujourd'hui pour encourager les jeunes à aller voter, à s'engager dans la société américaine. Je trouve ça très intéressant. Et puis la manière dont elle parle en public, c'est une leçon de Mediatraining à chaque fois qu'on la... à chaque fois qu'on la voit et puis je rendrai un hommage personnel à Anna Jadwelo Belkacem, avec qui j'ai travaillé et qui m'a énormément appris. J'espère lui avoir apporté aussi un certain nombre de choses, notamment le rapport qu'on avait fait pour elle, que vous avez cité en introduction.
- Aurore Mayer
Bien sûr, merci beaucoup en tout cas pour ces éclairages, cet échange passionnant. Et puis en tout cas, nous, ça nous inspire. On va prendre beaucoup, il y a beaucoup de choses très concrètes que vous avez citées qui vont nous permettre d'avoir des leviers. C'est ça qui est intéressant. Et merci pour ces cadeaux, ces pépites dont on va s'inspirer pour essayer d'aller plus loin. Au réseau Parité, un une du groupe La Poste pour favoriser la parité à tous les niveaux de l'entreprise et on espère dans la société plus largement.
- Marie-Cécile Naves
Merci pour votre invitation.
- Aurore Mayer
Merci Marie-Cécile.