Speaker #0Coucou les enfants, découvrons ensemble le récit des malheurs de Sophie. Chapitre 3 La Chaux La petite Sophie n'était pas obéissante. Sa maman lui avait défendu d'aller seule dans la cour où les maçons bâtissaient une maison pour les poules, les pans et les pintades. Sophie aimait beaucoup à regarder travailler les maçons. Quand sa maman y allait, elle l'emmenait toujours avec elle, mais elle lui ordonnait de rester près d'elle. Sophie, qui aurait voulu courir à droite et à gauche, lui demanda un jour Maman, pourquoi ne voulez-vous pas que j'aille voir les maçons sans vous ? Et quand vous y allez, pourquoi voulez-vous que je reste toujours auprès de vous ? La maman Parce que les maçons lancent des pierres, des briques qui pourraient attraper, et puis parce qu'il y a du sable. de la chaux qui pourrait te faire glisser ou te faire mal. Sophie. Oh, maman, d'abord j'y ferai bien attention. Et puis, le sable et la chaux ne peuvent pas faire mal. La maman. Tu crois cela parce que tu es une petite fille. Mais moi qui suis grande, je sais que la chaux brûle. Sophie. Mais maman ! La maman l'interrompt pas. Voyons, ne raisonne pas tant et tais-toi. Je sais mieux que toi ce qui peut te faire mal ou non. Je ne veux pas. Que tu ailles dans la cour sans moi. Sophie baissa la tête et ne dit plus rien, mais elle prit un air maussade et se dit tout bas. J'irai tout de même. Cela m'amuse et j'irai. Elle n'attendit pas longtemps l'occasion de désobéir. Une heure après, le jardinier vint chercher Madame de Réan pour choisir des géraniums qu'on apportait à vendre. Sophie resta donc seule. Elle regarda de tous côtés si sa bonne ou la femme de chambre ne pouvaient la voir, et, se sentant bien seule, elle courut à la porte, l'ouvrit et alla dans la cour. Les maçons travaillaient et ne songeaient pas à Sophie, qui s'amusait à les regarder et à tout voir, tout examiner. Elle se trouva près d'un grand bassin à chaud, tout plein, blanc et uni comme de la crème. Comme cette chaux est blanche et jolie ! se dit-elle. Je ne l'avais jamais si bien vue. Maman ne m'en laisse jamais approcher. Comme c'est uni ! Ce doit être doux et agréable sous les pieds. Je vais traverser tout le bassin en glissant dessus comme sur la glace. Et Sophie pose à son pied sur la chaux, pensant que c'était solide comme la terre. Mais son pied enfonce. Pour ne pas tomber, elle pose l'autre pied. Et elle enfonce jusqu'à mi-jambe. Elle crie. Un maçon à cour l'enlève, la met par terre et lui dit Enlevez vite vos souliers et vos bas, mademoiselle. Ils sont déjà tous brûlés. Si vous les gardez, la chaux va vous brûler les jambes. Sophie regarde ses jambes. Malgré la chaux qui y tenait encore, elle voit que ses souliers ça veut dire chaussures, et ses bas sont noirs comme s'ils sortaient du feu. Elle crie plus fort, et d'autant plus, qu'elle commence à sentir les picotements de la chaux qui lui brûlaient les jambes. Sabonne n'était pas loin. Heureusement, elle accourt, voit sur le champ ce qui est arrivé, arrache les souliers et les bas de Sophie, lui essuie les pieds et les jambes avec son tablier, la prend dans ses bras et l'emporte à la maison. Au moment où Sophie était déposée dans sa chambre, Madame de Réan rentrait pour payer le marchand de fleurs. Qu'y a-t-il donc ? demanda Madame de Réan avec inquiétude. T'es-tu fait mal, Sophie ? Pourquoi es-tu nu-pied ? Sophie, honteuse, ne répondait pas. La bonne raconta à la maman ce qui était arrivé et comment Sophie avait manqué à voir les jambes brûlées par la chaux. Si je ne m'étais pas trouvée tout près de la cour et si je n'étais pas arrivée juste à temps, Elle aurait eu les jambes dans le même état que mon tablier, que madame voit comme il est brûlé par la chaux, il est plein de trous. Madame de Réan vit en effet que le tablier de la bonne était perdu. Se tournant vers Sophie, elle lui dit, Mademoiselle, je devrais vous fouetter pour votre désobéissance, mais Dieu vous a déjà puni par la frayeur que vous avez eue. Vous n'aurez donc pas d'autre punition que de me donner, pour acheter un tablier neuf à votre bonne, la pièce de 5 francs que vous avez dans votre bourse et que vous gardiez pour vous amuser à la fête du village. Sophie eut beau pleurer, demander grâce pour sa pièce de 5 francs, la maman la lui prit. Sophie se dit, tout en pleurant, qu'une autre fois, elle écouterait sa maman et n'irait plus où elle ne devait pas aller. Chapitre 4. Les petits poissons. Sophie était étourdie. Elle faisait souvent, sans y penser, de mauvaises choses. Voilà ce qui lui arriva un jour. Sa maman avait des petits poissons, pas plus longs qu'une épingle et pas plus gros qu'un tuyau de plumes de pigeon. Madame de Réan aimait beaucoup ces petits poissons qui vivaient dans une cuvette pleine d'eau au fond de laquelle il y avait du sable pour qu'ils puissent s'y enfoncer et s'y cacher. Tous les matins, Madame de Réan portait du pain à ces petits poissons. Sophie s'amusait à les regarder pendant qu'ils se jetaient sur les miettes de pain et qu'ils se disputaient pour les avoir. Un jour, son papa lui donna un joli petit couteau en écaille. Sophie, enchantée de son couteau, s'en servait pour couper son pain, ses pommes, des biscuits, des fleurs, etc. Un matin, Sophie jouait avec son ménage, ce qui veut dire sa dînette. Sabonne lui avait donné du pain qu'elle avait coupé en tout petits morceaux, des amandes qu'elle coupait en tranches et des feuilles de salade. Elle demanda à Sabonne de l'huile et du vinaigre pour faire la salade. Non, répondit la bonne. Je veux bien vous donner du sel, mais pas d'huile ni de vinaigre qui pourrait tâcher votre robe. Sophie prit le sel, en mit sur sa salade. Il lui en restait beaucoup. Ah, si j'avais quelque chose à saler, se dit-elle. Voyons, je ne peux pas saler du pain, il me faudrait de la viande ou du poisson. Oh, la bonne idée ! Je sais, je vais saler les petits poissons de maman. J'en couperai quelques-uns en tranches avec mon couteau, je salerai les autres tout entier. Oh que ce sera amusant ! Quel joli plat cela fera ! Et voilà Sophie, qui ne réfléchit pas que sa maman n'aura plus ces jolis poissons qu'elle aime tant, que ses pauvres petits souffriront beaucoup d'être salés vivants ou d'être coupés en tranches. Sophie court dans le petit salon où étaient les petits poissons. Elle s'approche de la cuvette, les pêche tous, les met dans une assiette de son ménage, retourne à sa petite table, prend quelques-uns de ces pauvres poissons et les étend sur un plat. Mais les poissons, qui ne se sentaient pas à l'aise hors de l'eau, remuaient et sautaient tant qu'ils pouvaient. Pour les faire tenir tranquilles, Sophie leur verse du sel sur le dos, sur la tête et sur la queue. Ah ! En effet, ils restent immobiles. Les pauvres petits étaient morts. Quand son assiette fut pleine, elle en prit d'autres et se mit à les couper en tranches. Au premier coup de couteau, les malheureux poissons se tordaient en désespérés. Mais ils devenaient bientôt immobiles parce qu'ils mouraient. Après le second poisson, Sophie s'aperçut qu'elle les tuait en les coupant en morceaux. Elle regarda avec inquiétude les poissons salés. Ne les voyant pas remuer, elle les examina attentivement et vit qu'ils étaient tous morts. Sophie devint rouge comme une cerise. Que va dire maman ? se dit-elle. Que vais-je devenir, moi, pauvre malheureuse ? Comment faire pour cacher cela ? Elle réfléchit un moment. Son visage s'éclaircit. Elle avait trouvé un moyen excellent pour que sa maman ne s'aperçût de rien. Elle ramassa bien vite tous les poissons salés et coupés, les remit dans une petite assiette, sortit doucement de la chambre et les reporta dans leur cuvette. Maman croira, dit-elle, qu'ils se sont battus, qu'ils se sont tous entre-déchirés et tués. Je vais bien essuyer mes assiettes, mon couteau. Et ôter mon sel. Ôter veut dire retirer. Ma bonne n'a heureusement pas remarqué que j'avais été chercher les poissons. Elle est occupée de son ouvrage et ne pense pas à moi. Sophie rentra sans bruit dans sa chambre, se remit à sa petite table et continua de jouer avec son ménage. Au bout de quelques temps, elle se leva, prit un livre et se mit à regarder des images. Mais elle était inquiète. Elle ne faisait pas attention aux images. Elle croyait toujours entendre arriver sa maman. Tout d'un coup, Sophie tressaillit, rougit. Elle entend la voix de Madame de Réan qui appelait les domestiques. Elle l'entend parler haut comme si elle grondait. Les domestiques vont et viennent. Sophie tremble que sa maman appelle Sabonne, ne l'appelle elle-même. Mais tout se calme, elle n'entend plus rien. Sabonne... qui avait aussi entendu du bruit et qui était curieuse, qui avait aussi entendu du bruit et qui était curieuse, quitte son ouvrage et sort. Elle rentre un quart d'heure après. Comme c'est heureux, dit-elle à Sophie, que nous ayons été toutes deux dans notre chambre sans en sortir. Figurez-vous que votre maman vient d'aller voir ses poissons. Elle les a trouvés tous morts, les uns entiers, les autres coupés en morceaux. Elle a fait venir tous les domestiques pour leur demander quel était le méchant qui avait fait mourir ces pauvres petites bêtes. Personne n'a pu ou n'a voulu rien dire. Je viens de la rencontrer en venant ici. Elle m'a demandé si vous aviez été dans le salon. J'ai heureusement pu lui répondre que vous n'aviez pas bougé d'ici, que vous vous étiez amusé à faire la dînette dans votre petit ménage. C'est singulier, dit-elle. J'aurais parié que c'est Sophie qui a fait ce coup. Oh, madame, ai-je répondu, Sophie n'est pas capable d'avoir fait une chose si méchante. Tant mieux ! a dit votre maman, car je l'aurais sévèrement punie. C'est heureux pour elle que vous ne l'ayez pas quittée et que vous m'assuriez qu'elle ne peut pas avoir fait mourir mes pauvres poissons. Oh, quant à cela, madame, j'en suis bien certaine, ai-je répondu. Sophie ne disait rien. Elle restait immobile, rouge, la tête baissée, les yeux pleins de larmes. Elle eut envie, un instant, d'avouer à sa bonne que c'était elle qui avait tout fait. Mais le courage lui manqua. Sabonne, la voyant triste, crut que c'était la mort des pauvres petits poissons qui l'affligeaient. J'étais bien sûr, dit-elle, que vous seriez triste, comme votre maman, du malheur arrivé à ces pauvres petites bêtes. Mais il faut se dire que ces poissons n'étaient pas heureux dans leur prison, car enfin, cette cuvette était une prison pour eux. À présent que les voilà morts, ils ne souffrent plus. Allez, n'y pensez donc plus, et venez que je vous arrange pour aller au salon, on va bientôt dîner. Sophie se laissa peigner, laver, sans dire un mot. Elle entra au salon. Sa maman y était. Sophie, lui dit-elle, ta bonne t'a-t-elle raconté ce qui est arrivé à mes petits poissons ? Oui, maman. Madame de Réan. Si ta bonne ne m'avait assuré que tu étais restée avec elle dans ta chambre, alors... depuis que tu m'avais quitté, j'aurais cru que c'est toi qui les as fait mourir. Tous les domestiques disent que ce n'est aucun d'eux, mais je crois que le domestique Simon, qui était chargé de changer tous les matins l'eau et le sable de la cuvette, a peut-être voulu se débarrasser de cet ennui, et qu'il a tué mes pauvres poissons pour ne plus avoir à les soigner. Aussi, je vais devoir le renvoyer demain. Sophie effrayée. Oh maman, ce pauvre homme ! Que deviendra-t-il avec sa femme et ses enfants ? Madame de Réan. Tant pis pour lui. Il ne devait pas tuer mes petits poissons, qu'il ne lui avait fait aucun mal, et qu'il a fait souffrir en les coupant en morceaux. Sophie. Mais ce n'est pas lui, maman. Je vous assure que ce n'est pas lui. Madame de Réan. Comment sais-tu que ce n'est pas lui ? Sophie. Moi, je crois que c'est lui. Que ce ne peut être que lui. Et dès demain, je le ferai partir. Sophie, pleurant et joignant les mains, Oh non, maman, ne le faites pas ! C'est moi qui ai pris les petits poissons et qui les ai tués. Madame de Réan avec surprise, Toi ? Quelle folie ! Toi qui aimais ces petits poissons, tu ne les aurais pas fait souffrir et mourir. Je vois bien que tu dis cela pour excuser Simon. sophie non maman je vous assure que c'est moi oui c'est moi je ne voulais pas les tuer je voulais seulement les saler et je croyais que le sel ne leur ferait pas de mal je ne croyais pas non plus que de les couper leur fit mal parce qu'ils ne criaient pas mais quand je les ai vus morts je les ai reportés dans leur cuvette sans que ma bonne qui travaillait m'ait vu sortir ni rentrer Madame de Réan reste à quelques instants si étonnée de l'aveu de Sophie qu'elle ne lui répondit pas. Sophie leva timidement les yeux et vit ceux de sa mère fixés sur elle, mais sans colère ni sévérité. Sophie, dit enfin Madame de Réan, si j'avais appris par hasard, c'est-à-dire par la permission de Dieu qui punit toujours les méchants, ce que tu viens de me raconter, Je t'aurais puni sans pitié et avec sévérité. Mais le bon sentiment qui t'a fait avouer ta faute pour excuser Simon te vaudra ton pardon. Je ne te ferai donc pas de reproche, car je suis bien sûr que tu sens combien tu as été cruel pour ces pauvres poissons en ne réfléchissant pas d'abord que le sel devait les tuer, ensuite qu'il est impossible de couper et de tuer n'importe quelle bête sans qu'elle souffre. En voyant que Sophie pleurait, elle ajouta Ne pleure pas Sophie et n'oublie pas qu'avouer tes fautes, c'est te les faire pardonner. Sophie essuya ses yeux, elle remercia sa maman mais elle resta toute la journée un peu triste d'avoir causé la mort de ses petits amis les poissons. Au revoir les enfants ! Vous me retrouverez si vous le voulez en écoutant la suite de ce récit.