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Apprendre à aider

Les troubles des conduites alimentaires

Les troubles des conduites alimentaires

32min |27/12/2024|

1729

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32min |27/12/2024|

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Description

Comment aider une personne en souffrance psychique ? Que faut-il dire ou ne pas dire ?
Comment repère-t-on un trouble ? Autant de questions abordées dans Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale.
Les personnes qui souffrent d’un trouble du comportement alimentaire – ou trouble des conduites alimentaires – ou TCA, ont une relation à la nourriture qu’on qualifie de dysfonctionnelle.
Il existe trois types de TCA : l’anorexie mentale, la boulimie et l’hyperphagie boulimique.

Au-delà du rapport compliqué à l’alimentation, les personnes concernées par un trouble du comportement alimentaire peuvent également éprouver une grande souffrance psychique et des difficultés comportementales liées à leur poids. Lorsque ces troubles s’installent, ils peuvent avoir de sérieuses répercussions sur la santé mentale mais aussi physique.

Dans cet épisode, vous pourrez écouter le témoignage de Katia et de Candice. Katia, secouriste en santé mentale et mère de Candice, nous raconte comment elle a décelé les TCA de Candice et comment elle a accompagné et continue d’accompagner sa fille. Quant à Candice, elle nous livre son expérience, ses ressentis, comment elle vit et subit ces troubles au quotidien et toute l’ambivalence des sentiments qui l’envahissent.

NB : Dans cet épisode, Candice parle de « se faire interner » lorsque son père suggère une prise en charge à l’hôpital. Chez PSSM, nous recommandons à nos secouristes d’utiliser plutôt l’expression « hospitalisation faite à la demande d’un tiers ». 😊

Dans cet épisode, vous entendrez également Nathalie Godart, professeure à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines et membre de la Fédération Française Anorexie Boulimie. Les TCA touchent jusqu’à 17 % de la population, soit près d’une personne sur cinq. 1 à 2 % des jeunes femmes souffrent de boulimie mais 20 à 50% des patients soignés pour de l’hyperphagie boulimique sont des garçons.

Vous souhaitez en savoir plus sur les TCA ? Voici quelques ressources :

Cette liste n'est pas exhaustive, vous pouvez la compléter et faire vos suggestions en commentaires.

Bonne écoute ! 🎧
---
Ce podcast a été rendu possible grâce au Self-Esteem Club d'Erborian, partenaire de PSSM France.
Présentation : Oriana Dobremetz
Générique : ATS Studios
Direction éditoriale : Stéphanie Rochedix et Oriana Dobremetz
Direction de la production : Nicolas Pineau.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce podcast parle de troubles en santé mentale et de situations réellement vécues. Les témoignages que vous allez entendre peuvent heurter la sensibilité de certaines personnes. Si vous êtes en détresse psychique ou avez des pensées suicidaires, si vous pensez qu'une personne de votre entourage est en situation de crise, vous devez contacter le 112, le 15, le 18 ou le 3114, le numéro national de prévention du suicide. C'est l'histoire de Julie qui a fait une tentative de suicide, de Pierre qui boit trop. C'est aussi l'histoire de Nathalie qui rêve chaque nuit de son accident de voiture. Vous aussi vous connaissez peut-être quelqu'un qui est concerné par un problème de santé mentale. Chez PSSM, Premier Secours en Santé Mentale, nous sommes convaincus qu'engager une conversation peut tout changer. Je m'appelle Oriana et je vous souhaite la bienvenue dans cette discussion où se mêlent témoignages, histoires de vie et conseils pour tous ensemble briser les tabous autour des troubles psychiques. Vous écoutez Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale.

  • Speaker #1

    T'as un problème ? L'association d'idées c'est t'es fou, t'es folle, y'a quelque chose qui va pas chez toi, t'es dysfonctionnel en fait.

  • Speaker #2

    Nos capacités de résilience sont débordées. J'étais pas forcément bien dans ma peau et tout ça a fait que j'étais vraiment vraiment mal et qu'au lycée je faisais plus rien.

  • Speaker #0

    La personne qu'il avait eue au bout du fil lui avait conseillé de poser directement la question à sa compagne si elle avait l'intention de mettre fin à ses jours.

  • Speaker #1

    On sort de la formation déjà avec des nouveaux outils, ça donne un cadre, c'est sécurisant parce qu'on se dit qu'on ne va pas faire n'importe quoi justement parce qu'on sait qu'on va trouver les bons mots la bonne manière.

  • Speaker #0

    Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale. Un trouble des conduites alimentaires, également appelé trouble du comportement alimentaire ou TCA, se définit comme une pratique alimentaire dans laquelle la relation à la nourriture est dysfonctionnelle. Au-delà du rapport à l'alimentation, la personne concernée par un TCA peut également éprouver une grande souffrance psychique et des difficultés comportementales en lien avec son poids. Ces souffrances concernent plus généralement l'apparence corporelle et l'activité physique. Les relations à autrui, et plus généralement le quotidien, s'en trouvent fortement impactées. Lorsque ces troubles s'installent dans la durée, ils peuvent avoir de sérieuses répercussions sur la santé mentale et physique, mais aussi sur le fonctionnement psychosocial et la qualité de vie de la personne concernée. On distingue trois types de TCA, l'anorexie mentale, la boulimie et l'hyperphagie boulimique. Si le genre féminin a une plus grande propension à développer ce type de trouble, le TCA peut néanmoins se déclarer chez tout un chacun, indépendamment de l'âge, de la culture, du statut socio-économique ou encore du statut pondéral. Les personnes souffrant d'un TCA présentent par ailleurs un plus grand risque de développer une autre comorbidité psychique, comme par exemple la dépression, voire de passer à l'acte. Bien que la prévalence de ces troubles soit difficile à estimer précisément, de récentes études estiment que 4 à 9% de la population mondiale pourrait souffrir d'un TCA. En France, c'est près d'un million de personnes qui seraient concernées. La formation PSSM donne des points de repère permettant de reconnaître les signes d'alerte associée à ces troubles complexes et la façon d'appréhender la personne concernée. Elle permet également de s'informer sur les ressources utiles et les services dédiés à la prise en charge de ce type de trouble. Aujourd'hui, nous accueillons au micro d'Apprendre à aider un duo mère-fille. Bonjour Katia.

  • Speaker #3

    Bonjour Oriana.

  • Speaker #0

    Vous êtes secouriste depuis 2022. Merci d'être à notre micro. Bonjour Candice.

  • Speaker #2

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Katia, est-ce que vous voulez bien nous expliquer de quelle façon vous avez... Portez secours à votre fille et dans quelle situation ?

  • Speaker #3

    Oui, Candice présentait des troubles alimentaires, avec des périodes où elle mangeait énormément et d'autres périodes où elle s'alimentait assez peu. C'est passé relativement inaperçu dans les premiers temps et il y a eu vraiment une aggravation de ce comportement-là. Et qui nous a vraiment inquiété avec mon mari, donc je dirais moi plutôt l'année dernière. Et avec une perte de poids importante, mon mari avait un discours qui était très à la sollicité pour qu'elle mange, et moi je lui disais, ben non, laisse-la, elle cherchera, on surveille. Donc on a commencé à parler, on a dit de toute façon au pire on l'hospitalisera. Finalement, forte aussi de la formation de premier score en santé mentale, j'en ai parlé à Candice en lui disant bon ben voilà, on est inquiet pour ta perte de poids et le seul moyen pour nous de nous rassurer c'est que tu ailles voir le médecin et que tu puisses faire une prise de sang et qu'on puisse voir ce qu'il en est, que tu puisses être accompagné à ce niveau-là. Pas forcément de gaieté de cœur, mais elle a fini par accepter. Et effectivement, elle a été suivie par le médecin traitant. Et au mois de juin l'année dernière, elle a sollicité d'avoir un accompagnement par une psychologue. C'était sa demande. Alors on avait déjà proposé en amont, j'avais proposé en amont plusieurs options. Bon, ce n'était pas adapté dans un premier temps. Et puis c'est elle qui s'est emparée de la solution psychologue. Donc elle avait un duo pour l'accompagner, médecin traitant et psychologue. Et au mois de juillet 2023, elle est revenue d'un rendez-vous avec le médecin traitant sur mon lieu de travail en disant Maman, en fait, il parle de m'hospitaliser, il me menace de m'hospitaliser et je ne veux pas. Donc à partir de là, on a commencé à réfléchir ensemble, à savoir comment je pouvais l'accompagner, ce qu'on pouvait mettre en place, quelles solutions. Et on a avancé comme ça progressivement toutes les deux au fur et à mesure un petit peu de ce qu'elle acceptait de mettre en place.

  • Speaker #0

    Et vous Candice, comment vous avez reçu l'aide de vos parents et plus particulièrement celle de votre mère ?

  • Speaker #2

    Au début j'avais totalement refusé l'aide parce que j'étais pas vraiment dans le déni mais j'étais dans le refus d'accepter qu'on puisse m'aider. Et j'étais dans la perception de... pouvoir m'aider seule.

  • Speaker #0

    Vous aviez conscience, Candice, d'avoir un trouble au comportement alimentaire ?

  • Speaker #2

    Oui, j'en avais totalement conscience, mais je n'avais pas encore mis de mots dessus avant un petit moment.

  • Speaker #0

    Comment cela se traduisait ?

  • Speaker #2

    Ça se traduisait souvent par une perte d'appétit, voire des nausées lors de, soit de la vue, soit de l'odeur de la nourriture. Et même quand je me forçais à manger, surtout quand je me forçais à en manger, j'arrivais pas à en prendre en grosse quantité du moins, enfin en grosse quantité dans les périodes où je mangeais pas beaucoup, voire pas du tout. C'est vraiment à ce moment-là où je me suis rendue compte que j'avais un problème, parce que c'est quand on prend ne serait-ce qu'une bouchée et que ça nous donne la nausée, une envie... de vomir comme pas possible, c'est pas gérable et c'est ça ce qui m'a provoqué le fait de ne pas manger du tout. C'est pour éviter ça et quand je commençais à avoir faim, donc dans le cas contraire, j'avais l'impression que j'arrivais à jamais à combler cette faim et que mon ventre c'était comme un trou noir c'est sa rentrée mais ça c'est comme si j'avais rien mangé mais si vous n'aviez jamais l'impression d'être rassasié oui c'est ça c'est assez particulier comme sensation et ça a été une fois jusque on va dire au point Grave des TCA, c'est-à-dire d'en vomir. Ça m'est arrivé très très peu de fois, mais ça m'est déjà arrivé et c'est quand même assez marquant quand ça arrive. Après je sais que ça aussi c'était accompagné, c'était la vision du physique, c'était soit je me trouvais aussi trop grosse, soit trop maigre, et ça accentuait un peu cet effet-là. C'est assez particulier quand on se regarde dans un miroir qu'on n'a pas changé. Mais du jour au lendemain, on se trouve soit trop grosse, soit trop maigre. Alors que ce n'est pas forcément le cas, on est totalement normal, mais c'est cette sensation de la vision qu'on se fait de notre corps à ce moment-là.

  • Speaker #0

    Quand votre maman est venue vers vous et qu'elle a commencé à aborder le sujet, quelle a été votre réaction ? Est-ce qu'en un premier temps, vous avez commencé par la rejeter ? Ou est-ce que vous avez écouté ce qu'elle avait à vous proposer ?

  • Speaker #2

    Tout début, j'avais plutôt refusé de l'écouter. Mais au fur et à mesure, j'ai décidé de l'écouter et j'ai entendu sa parole. Et comme elle a pu le dire, j'ai accepté de l'aide à contre-cœur. Mais je voulais aussi ne pas voir mes parents souffrir de ma souffrance.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est ça qui vous a décidé à... A vous faire aider ?

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #0

    Vous n'aviez pas conscience, vous, d'être en danger ?

  • Speaker #2

    Si, mais pour être honnête, je me fichais un peu d'être en danger. Même si j'en avais conscience, pour moi, ce n'était pas nécessaire d'être accompagnée.

  • Speaker #0

    Et dans les ressources que votre maman vous a proposées, est-ce qu'il y en a une qui vous a plus particulièrement convaincue ?

  • Speaker #2

    J'étais plus convaincue par le médecin traitant, parce que c'est... C'est une personne que je connais depuis très longtemps, c'est un médecin de famille. Donc ils connaissaient déjà l'histoire de ma sœur, qui a été aussi assez compliquée, et du coup je me suis dit, pourquoi pas tenter. Et aussi avec les menaces de mon père de vouloir m'interner, ça m'a fait me dire, je préfère ça à être internée.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez dire aujourd'hui, Candice, que vous avez quand même le sentiment que l'intervention de votre mère, ou plutôt de la secouriste en santé mentale, vous a aidé avec le recul que vous avez ?

  • Speaker #2

    Je peux dire que ça m'a aidée du moins d'en avoir parlé et j'avance petit à petit et ça va mieux, enfin de mieux en mieux.

  • Speaker #0

    Justement comment vous allez Candice aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    C'est toujours compliqué de temps en temps mais c'est mieux qu'avant. Et je pense que ça va continuer à s'améliorer.

  • Speaker #0

    Je vous le souhaite. Est-ce que vous continuez à avoir des professionnels de santé ? Oui. Quel type de professionnels ?

  • Speaker #2

    Je suis sous suivi psychologique et j'ai eu un suivi psychiatrique. Et j'ai pu l'arrêter récemment pour retourner dans un autre suivi psychologique, mais spécialisé dans le traumatisme.

  • Speaker #0

    Katia, avec le recul et sur la base de l'expérience que vous venez de nous raconter toutes les deux, est-ce qu'il y a quelque chose que vous feriez différemment ?

  • Speaker #3

    Dans ma façon d'aborder les choses, je pense que la formation a été vraiment d'un grand secours parce qu'avec cette dimension affective, je n'avais pas forcément suffisamment de recul en tant que maman. Et vraiment, d'avoir eu cette formation, ça a été un soutien, ça m'a permis de... de poser les choses avec plus de distance, de façon plus objective aussi, et de pouvoir faire des propositions à des moments adaptés, et avec le consentement de Candice, tout en ayant un objectif vraiment d'aller vers le mieux. Et vraiment ça a été, je ne sais pas si sans cette formation, je ne pense pas que j'aurais pu faire cet accompagnement-là.

  • Speaker #0

    On se disait tout à l'heure que le secouriste, ce n'est pas vraiment un super héros, ni même un soignant. Et des fois, cela fonctionne, des fois un petit peu moins. Vous m'expliquiez que vous aviez fait des propositions à Candice, qu'au départ, elle avait refusé en bloc.

  • Speaker #3

    Oui.

  • Speaker #0

    Lesquelles ?

  • Speaker #3

    Alors, la proposition de départ, ça a été plutôt de faire du moment du repas quelque chose de ludique. Ça n'avait pas du tout marché. L'accompagnement médical, bon, elle n'envoyait pas forcément l'intérêt non plus au départ. Je lui avais proposé la psychologue, je lui ai proposé un certain nombre de choses, même d'aller au restaurant à des moments un peu plus festifs, mais toujours autour de la nourriture. Et puis je me suis dit, à force de lui proposer des choses, en fait, il faut que je lâche. Il faut que j'arrête de vouloir absolument la faire manger. Et que je joue plutôt le rôle de la confiance, en fait. De lui dire, bon, d'accepter que ce ne soit pas son moment, même si j'avais très envie de l'accompagner et qu'elle aille mieux. Que ce ne soit pas son moment à elle et de respecter ça aussi. Plutôt que ce soit vraiment mon envie de maman et d'aller au-delà des possibles du moment, en fait.

  • Speaker #0

    Et vous, Candice, vous avez senti la différence quand votre mère mettait sa casquette de secouriste ? ou le discours vous semblait sensiblement le même ?

  • Speaker #2

    J'ai vu une différence, mais je ne savais pas trop à quoi c'était dû à ce moment-là. Pour moi, c'était plus le fait qu'elle avait lâché l'affaire et que je pouvais être enfin tranquille. Mais au final, j'ai vu que ça l'affectait quand même beaucoup, et je me suis rendue compte de tout ça. Et ça m'a permis, on va dire, de prendre conscience de l'impact que ma santé pouvait avoir sur les autres.

  • Speaker #0

    Et sur vous ?

  • Speaker #2

    Évidemment, oui.

  • Speaker #0

    Vous en aviez conscience à ce moment-là ?

  • Speaker #2

    J'ai jamais été dans le déni pour ma santé, j'étais toujours très consciente de ce qui se passait, et c'est juste que je ne voulais pas être aidée. Pendant un moment, je voulais juste, je ne sais pas pourquoi, mais je voulais juste être dans le mal. Et au final, quand on atteint un point de, on va dire, non-retour, entre guillemets, il y a toujours un retour. Quand on se rend compte de... Du puits sans fond dans lequel on peut s'enfoncer et que d'un coup on a un espoir, une petite lueur qui apparaît. On a juste envie de la saisir et de sortir de ce trou.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que la formation PSSM vous a apporté, Katia ?

  • Speaker #3

    Alors c'est ce que je disais, vraiment, c'est des outils, des ressources. Un soutien important dans l'accompagnement, parce que c'est aussi mon métier. d'accompagner les gens. Et ça a été vraiment salvateur dans le cas de mon expérience avec Candice, parce qu'il y avait cette dimension affective. Donc de pouvoir avoir un outil, des ressources, un fil conducteur, un fil rouge auquel se raccrocher, ça a été essentiel dans ces moments-là.

  • Speaker #0

    Vous aviez une méthode, une méthodologie.

  • Speaker #3

    Exactement, c'est exactement ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que cette formation a changé votre regard sur les troubles psychiques ?

  • Speaker #3

    Alors oui, en partie. Je pense qu'on a tous, à un moment ou à un autre, une part de vulnérabilité. On peut basculer, du jour au lendemain, sur quelque chose, je ne sais pas pourquoi, un déclencheur, peu importe. Je pense que la période Covid a bien accentué ce phénomène-là. Et on n'est pas au bout de nos surprises non plus. Tout le monde ne va pas décompenser à la même vitesse, à la même façon, mais ça a été une période très compliquée. Et je pense qu'effectivement, on a tous en nous peut-être une part de vulnérabilité à un moment donné, quand c'est trop, quand il y a un cumul. Et on peut effectivement basculer sur un élément déclencheur, peu importe. Donc oui, je pense que... Dans ce sens-là, on peut être soumis à la dépression, à des troubles psychiques à un moment donné de notre vie.

  • Speaker #0

    Vous connaissiez les TCA, les troubles du comportement ou des conduites alimentaires ?

  • Speaker #3

    Alors oui, mais je n'avais pas identifié ça chez ma fille dans un premier temps. Je connaissais parce que j'avais un ami qui était anorexique et vraiment très poussé, effectivement. Mais je n'avais pas du tout cette vision-là avant la formation.

  • Speaker #0

    Katia, est-ce que vous conseilleriez cette formation ?

  • Speaker #3

    Vivement ! Je pense qu'elle est pleine de sens pour tous les parents, déjà. Surtout au moment de l'adolescence, qui est une période où il y a beaucoup de vulnérabilité et de fragilité. Et je pense que ça peut être un très très bon soutien.

  • Speaker #0

    Katia, comment en êtes-vous arrivée à cette formation ? Est-ce que c'était dans un contexte professionnel ou personnel ? Est-ce que c'est parce que vous aviez décelé chez Candice un trouble ?

  • Speaker #3

    Alors à ce moment-là, non, je n'avais pas décelé le trouble chez Candice parce que j'avais effectivement conscience qu'elle avait des difficultés avec l'alimentation, mais je n'avais pas décelé ça en tant que telle. Par contre, j'avais rencontré avec ma fille aînée une problématique sur l'automutilation. Et je me suis trouvée effectivement très démunie à ce moment-là. Et en tant que maman, je me suis dit, c'est pas possible, trois enfants, trois ados, il faut que je trouve des outils, il faut que je trouve quelque chose pour pouvoir accompagner mes enfants, puis moi aussi par la même occasion. Donc j'ai cherché un petit peu ce que je pouvais avoir comme ressource. Et c'est vrai que j'ai pris connaissance de cette formation et je me suis dit, tiens, voilà, ça prenait. pas forcément beaucoup de temps et en même temps c'est tellement riche ces deux jours que c'était vraiment la formation qu'il me fallait pour accompagner ça m'a permis effectivement de pouvoir conscientiser je pense aussi la problématique de Candice derrière que je n'aurais pas forcément conscientisé autant.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup Katia, merci beaucoup Candice pour votre témoignage en duo très enrichissant et très émouvant à notre micro d'Apprendre à Aider Merci à vous. Nathalie Godard, bonjour.

  • Speaker #3

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Vous êtes professeure des universités en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines. Vous êtes également praticienne hospitalière à la Fondation Santé des étudiants de France. Et vous êtes membre de la Fédération française anorexie-boulimie. Aujourd'hui nous allons parler ensemble des TCA et justement qu'est-ce qu'un trouble des conduites alimentaires et dit-on trouble des conduites alimentaires ou trouble du comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Alors on dit les deux en fait. Historiquement on disait trouble des comportements alimentaires et aujourd'hui on dit trouble de la conduite alimentaire, ce qui sous-tend derrière quelque chose au niveau de l'idée et des émotions qui conduisent à se comporter comme cela.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que c'est plus précisément ?

  • Speaker #4

    Alors un trouble des conduites alimentaires, c'est un trouble psychiatrique, des difficultés psychologiques, qui vont se manifester au premier plan par des perturbations du comportement alimentaire. Ce peut être une restriction. Un excès d'alimentation, associé ou non à des comportements pour maintenir son poids. Vous avez des troubles tels que l'anorexie mentale, la boulimie, l'hyperphagie boulimique ou les troubles d'évitement et de restriction d'alimentation.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous aider à différencier l'anorexie mentale de la boulimie et de l'hyperphagie boulimique s'il vous plaît ?

  • Speaker #4

    L'anorexie mentale est un trouble des conduites alimentaires où il y a principalement une restriction avec une perte de poids, des préoccupations autour de l'image du corps. corps qui vont avoir des conséquences physiques. Dans la boulimie, les personnes vont souffrir de ce qu'on appelle de crise de boulimie, c'est-à-dire l'absorption extrêmement importante de nourriture dans une quantité très importante, dans une durée très limitée, plus qu'elle ne serait pour d'autres personnes pour absorber les mêmes quantités de nourriture. Dans la boulimie, les personnes ont ce qu'on appelle les stratégies de contrôle de poids, c'est-à-dire qu'elles ne veulent pas prendre du poids, donc elles vont avoir des comportements comme se faire vomir, prendre des médicaments ou faire beaucoup d'activités physiques. Dans l'hyperphagie boulimique, on a les mêmes crises de boulimie, mais sans stratégie de contrôle de poids, ce qui fait que les personnes vont prendre du poids ou être en surpoids. Il faut savoir que dans certaines formes d'anorexie mentale, on peut avoir la restriction qui est prédominante, avec en plus des crises de boulimie qui s'ajoutent, mais avec un poids très bas.

  • Speaker #0

    Vous avez quelques chiffres à nous donner sur les TCA ?

  • Speaker #4

    La difficulté des médecins, c'est qu'ils ont toujours des définitions qui sont variables. Si on s'intéresse au spectre large des TCA, on dit qu'ils peuvent toucher jusqu'à 17% de la population. Et si l'on considère des affections qui sont parmi les plus sévères, ils touchent globalement 5 à 6% de la population, avec l'anorexie mentale qui touche à peu près 1% des jeunes femmes, la boulimie à peu près 1 à 2% des jeunes femmes, l'hyperphagie boulimique 3 à 5% de la population. Alors je parle beaucoup de jeunes femmes pour l'anorexie. et pour la boulimie parce que c'est beaucoup plus fréquent dans les populations féminines. Mais néanmoins, chez les garçons, on observe ces troubles. Une personne sur dix soignée pour anorexie mentale est un garçon. Une personne sur sept soignée pour boulimie est un garçon. Et pour l'hyperphagie boulimique, selon les échantillons, on va de 20% à la moitié des personnes concernées.

  • Speaker #0

    Quels sont les signes d'alerte comportementaux, physiques puis psychologiques ?

  • Speaker #4

    Alors, les signes physiques, il n'y en a pas toujours. Pour les troubles qui sont restrictifs comme l'anorexie mentale, effectivement les personnes perdent du poids et on peut les voir s'amégrir. Pour la boulimie, très souvent il n'y a pas de signe physique et pour l'hyperphagie boulimique, le plus souvent c'est associé avec une prise de poids ou un surpoids. La difficulté, c'est que ces symptômes ne sont pas les premiers que l'on peut observer. Les premières difficultés qu'on peut observer sont souvent des difficultés à... à type de tristesse, de désinvestissement, de difficultés relationnelles avec les autres, parce qu'en fait les personnes qui souffrent de troubles des conduites alimentaires ont du mal déjà à manger en face des autres, ce qui fait qu'elles ont des difficultés dans leur relation sociale. Et puis les personnes qui souffrent de troubles des conduites alimentaires vont se manifester parfois par des comportements qui seront visibles, qui peuvent être des comportements de restriction, l'incapacité à manger de manière adaptée en quantité ou en qualité. ou à l'inverse, se trouver pris par des épisodes qu'on appelle des crises de boulimie ou crises d'hyperphagie, où ils se retrouvent à manger beaucoup. Et ces difficultés alimentaires font qu'ils ont du mal à s'exposer au regard des autres.

  • Speaker #0

    Tout à l'heure, vous nous expliquiez que les hommes et les femmes étaient autant touchés les uns que les autres, mais y a-t-il une tranche d'âge un petit peu plus vulnérable ?

  • Speaker #4

    Alors, les troubles des conduites alimentaires commencent majoritairement pendant l'adolescence et le début de l'âge adulte, puisqu'on dit... Schématiquement, à peu près 75% de ces troubles débutent avant l'âge de 25 ans. Néanmoins, des enfants peuvent être touchés par ces troubles, ou des personnes qui sont d'âge mûr, voire des personnes âgées. Ça peut exister à tout âge.

  • Speaker #0

    Quels sont les risques en matière de santé ?

  • Speaker #4

    Les risques en matière de santé sont de plusieurs ordres. Il y a déjà les conséquences physiques, qui sont liées à l'état nutritionnel qui est induit par les troubles des conduites alimentaires. Donc dans la restriction, ça va être... des problèmes liés à la dénutrition et dans les excès d'apport, ça va être des problèmes liés au surpoids ou à l'obésité. Et ces problèmes touchent tous les organes, donc on peut avoir des complications à tous les niveaux. Et puis en ce qui concerne sur le plan psychologique, souvent ces troubles des conduites alimentaires se compliquent de symptômes anxieux ou de symptômes dépressifs, de mal-être et vont avoir des conséquences et un retentissement social sur l'insertion sociale, des difficultés de relation avec les autres au travers des repas, mais pas que. Des conflits en famille, bien souvent, des difficultés d'insertion à l'école ou des difficultés professionnelles.

  • Speaker #0

    Comment un secouriste en santé mentale peut-il soutenir une personne qui souffre de troubles du comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Je pense que soutenir... C'est déjà peut-être avoir conscience que les repas sont des moments difficiles et peut-être ne pas intervenir à ce moment-là. Mais peut-être intervenir en dehors des repas, quand il s'agit de dire qu'on a vu qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas, d'essayer d'aider et de demander comment on peut aider. Parce que certaines personnes peuvent être aidées, par exemple dans un repas, s'il se sait soutenu par une personne, mais d'autres veulent se sentir agressé. Donc il faut pouvoir différencier les choses. Il faut surtout en parler avec les personnes concernées. Et je vous dis, le meilleur moment, ça n'est pas le moment du repas.

  • Speaker #0

    Et comment fait-on en tant que secouriste pour dissocier quelqu'un qui aurait tendance à faire attention à ce qu'il mange ? Peut-on peut-être parler de régime ? Ou quelqu'un qui a un vrai trouble lié au comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Je dirais que ce n'est pas forcément très simple. Mais de toute façon, les régimes, quand ils sont extrêmes, que ce soit en quantité... ou qu'ils sont exclusifs, ils sont dangereux pour la santé. Donc, qu'on se retrouve face à de vrais troubles des conduites alimentaires ou des conduites restrictives, déjà il faut s'interroger, ou des conduites qui ne sont pas adaptées. L'ensemble des éléments, avec en particulier la souffrance psychique, mais associés aussi à des préoccupations corporelles qui sont généralement déconnectées de la réalité, en particulier dans l'anorexie mentale ou dans les boulimies, où les gens se perçoivent comme démesurément gros ou avec des problèmes physiques. qui n'existent pas sont déjà quelque chose qui doit attirer en fait l'attention. C'est-à-dire ce décalage entre la perception qu'a la personne de sa situation elle-même face à la réalité. Quand c'est combiné par exemple face à quelqu'un qui est très mince, qui dit qu'il veut maigrir et qui va avoir des comportements restrictifs, ben là il faut s'interroger, il faut s'inquiéter. Même chose pour quelqu'un qui est normal et qui souhaite absolument maigrir. Après, pour des personnes qui... présente des troubles des conduites alimentaires, parfois ça va être des signes indirects qu'on va repérer. Et dans un entourage proche, par exemple, des paquets de gâteaux qui disparaissent, des choses qui sont un peu excessives, il faut pouvoir en parler, je dirais, avec délicatesse avec les personnes. Parce que très souvent, ce sont des situations, des choses dont les personnes ont honte, en fait. Et cette honte est quelque chose qui est difficile à dépasser. Et aborder ces questions peut être extrêmement blessant.

  • Speaker #0

    Comment déterminer ? temps si une situation est urgente ?

  • Speaker #4

    Une situation est urgente quand quelqu'un fait des malaises, par exemple. Quand quelqu'un va avoir des comportements dangereux. Et on sait que, par exemple, certaines stratégies pour perdre du poids sont des stratégies dangereuses. Se faire vomir est quelque chose de très dangereux. de pouvoir alerter les personnes elles-mêmes. Mais je crois que la première situation, c'est de voir des gens qui sont fatigués, par exemple, ou des gens qui font des malaises, ou des personnes qui sont effectivement manifestement en grande difficulté, mais qui ne veulent pas en entendre parler, qui ne le reconnaissent pas. Parce que ça veut dire qu'elles ne vont pas chercher d'aide potentielle.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pensez que les écrans et les réseaux sociaux ont un réel impact sur les jeunes filles et sur les troubles de la conduite alimentaire ?

  • Speaker #4

    Il est clair qu'en ce qui concerne l'estime de soi, la perception du schéma corporel, les idéaux qui sont proposés sur les réseaux, ils ont souvent en résonance avec la perception que peut avoir la personne qui souffre de troubles des conditions alimentaires de l'inéquation de son image corporelle avec les attendus de la société. On sait que ces réseaux et toutes les images qui sont véhiculées sur les médias peuvent être des facteurs d'entretien de ces troubles des conditions alimentaires. Des facteurs qui vont être la goutte d'eau qui fait déborder le vase, mais il faut savoir que ces troubles ont des racines beaucoup plus profondes et qu'elles sont liées à des difficultés, souvent émotionnelles, relationnelles, qui préexistent mais qui peuvent être amplifiées par les réseaux.

  • Speaker #0

    Et comment fait-on si une personne ne souhaite pas être aidée ? C'est toujours difficile quand quelqu'un refuse de l'aide. Alors tout dépend du contexte, l'urgence et l'entourage je dirais. C'est-à-dire que si on est face à quelqu'un qui est mineur par exemple, et qui a des adultes autour, je pense que si on a affaire à des jeunes de son âge et qu'on est soi-même mineur, alerter les adultes autour, que ce soit dans l'espace éducatif, ou la famille, ou les parents, pour leur renvoyer quelque chose que l'on perçoit, je pense que c'est très important. Mais toujours en avoir... après en avoir parlé à la personne, bien sûr. Après, quand on se retrouve face à des personnes qui sont adultes et qui ont, j'allais dire, leur autodétermination, je pense que de leur redonner un retour de la perception que l'on a, de l'inquiétude que l'on a, c'est quelque chose d'extrêmement important. Parce que je pense que d'entendre quelqu'un qui se soucie de vous, c'est quelque chose qui ouvre après une possibilité d'entendre les choses, de les écouter et de s'écouter soi-même. Et puis, peut-être qu'à force d'avoir entendu une fois, ou deux ou trois, ce sera peut-être la troisième fois où la personne entendra et pourra prendre l'aide. Et puis, les personnes ne veulent pas entendre, mais on peut leur donner quelques ressources aussi, si elles le souhaitent, et elles peuvent les utiliser plus tard.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Nathalie Godard. Vous l'avez compris dans cet épisode, on a été, on est, ou on sera peut-être tous concernés un jour par un proche qui ne va pas bien. Si vous êtes dans cette situation, vous pouvez vous appuyer sur ces ressources. Le carnet du secouriste en santé mentale, mieux comprendre les troubles du comportement alimentaire. Il est disponible en téléchargement gratuit sur le site de PSSM France. Vous pouvez également vous rendre sur le site de la Fédération Nationale des Associations liées aux troubles des conduites alimentaires, la FNA, TCA, pour trouver une association de patients et de proches dans votre région. Et enfin, vous pouvez écouter l'émission Quoi de neuf, docteur ? sur France Inter. Elle se penche sur le sujet des TCA dans un épisode intitulé Comment surmonter les troubles des comportements alimentaires L'émission est disponible gratuitement, en podcast, sur les plateformes d'écoute et sur le site de France Inter. En plus de ces ressources, sachez que venir en aide à quelqu'un atteint de troubles du comportement alimentaire, ça s'apprend. Sans pour autant se substituer au professionnel, sans pour autant devenir un soignant. Comment offrir son soutien ? Quelles sont les choses à éviter de dire ? Et au contraire, les bonnes pratiques, les bons mots à avoir. Quelles sont les ressources et les professionnels vers qui orienter ? Voici autant d'éléments qui sont abordés lors de la formation des premiers secours en santé mentale. Nous avons tous un rôle à jouer en tant que secouristes en santé mentale. Alors vous aussi, rejoignez cette démarche citoyenne et apprenez à aider en vous formant aux premiers secours en santé mentale. Pour cela, rien de plus simple. Rendez-vous sur le site de PSSM. C'était Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale. Si vous avez aimé cet épisode, laissez-nous un commentaire ou un like sur votre plateforme d'écoute. Rendez-vous dans un mois pour votre prochain épisode. Apprendre à aider est un podcast PSSM France, produit par Plus de Sens. Ce podcast a été rendu possible grâce au Self-Esteem Club d'Herborian, partenaire de PSSM France. Présentation, Oriana Dobrometz. Direction éditoriale, Stéphanie Rojdix et Oriana Dobrometz. Direction de la production, Nicolas Pinault

Chapters

  • Avertissement

    00:00

  • Présentation du podcast Apprendre à aider

    00:25

  • Générique

    01:01

  • Introduction aux troubles des conduites alimentaires

    01:48

  • Témoignages de Katia et Candice

    03:31

  • Interview de la Professeure Nathalie Godart (psychiatre)

    19:27

  • Ressources pour en savoir plus sur les TCA

    30:40

  • Conclusion

    31:31

  • Générique de fin d'Apprendre à aider

    32:09

Description

Comment aider une personne en souffrance psychique ? Que faut-il dire ou ne pas dire ?
Comment repère-t-on un trouble ? Autant de questions abordées dans Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale.
Les personnes qui souffrent d’un trouble du comportement alimentaire – ou trouble des conduites alimentaires – ou TCA, ont une relation à la nourriture qu’on qualifie de dysfonctionnelle.
Il existe trois types de TCA : l’anorexie mentale, la boulimie et l’hyperphagie boulimique.

Au-delà du rapport compliqué à l’alimentation, les personnes concernées par un trouble du comportement alimentaire peuvent également éprouver une grande souffrance psychique et des difficultés comportementales liées à leur poids. Lorsque ces troubles s’installent, ils peuvent avoir de sérieuses répercussions sur la santé mentale mais aussi physique.

Dans cet épisode, vous pourrez écouter le témoignage de Katia et de Candice. Katia, secouriste en santé mentale et mère de Candice, nous raconte comment elle a décelé les TCA de Candice et comment elle a accompagné et continue d’accompagner sa fille. Quant à Candice, elle nous livre son expérience, ses ressentis, comment elle vit et subit ces troubles au quotidien et toute l’ambivalence des sentiments qui l’envahissent.

NB : Dans cet épisode, Candice parle de « se faire interner » lorsque son père suggère une prise en charge à l’hôpital. Chez PSSM, nous recommandons à nos secouristes d’utiliser plutôt l’expression « hospitalisation faite à la demande d’un tiers ». 😊

Dans cet épisode, vous entendrez également Nathalie Godart, professeure à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines et membre de la Fédération Française Anorexie Boulimie. Les TCA touchent jusqu’à 17 % de la population, soit près d’une personne sur cinq. 1 à 2 % des jeunes femmes souffrent de boulimie mais 20 à 50% des patients soignés pour de l’hyperphagie boulimique sont des garçons.

Vous souhaitez en savoir plus sur les TCA ? Voici quelques ressources :

Cette liste n'est pas exhaustive, vous pouvez la compléter et faire vos suggestions en commentaires.

Bonne écoute ! 🎧
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Ce podcast a été rendu possible grâce au Self-Esteem Club d'Erborian, partenaire de PSSM France.
Présentation : Oriana Dobremetz
Générique : ATS Studios
Direction éditoriale : Stéphanie Rochedix et Oriana Dobremetz
Direction de la production : Nicolas Pineau.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce podcast parle de troubles en santé mentale et de situations réellement vécues. Les témoignages que vous allez entendre peuvent heurter la sensibilité de certaines personnes. Si vous êtes en détresse psychique ou avez des pensées suicidaires, si vous pensez qu'une personne de votre entourage est en situation de crise, vous devez contacter le 112, le 15, le 18 ou le 3114, le numéro national de prévention du suicide. C'est l'histoire de Julie qui a fait une tentative de suicide, de Pierre qui boit trop. C'est aussi l'histoire de Nathalie qui rêve chaque nuit de son accident de voiture. Vous aussi vous connaissez peut-être quelqu'un qui est concerné par un problème de santé mentale. Chez PSSM, Premier Secours en Santé Mentale, nous sommes convaincus qu'engager une conversation peut tout changer. Je m'appelle Oriana et je vous souhaite la bienvenue dans cette discussion où se mêlent témoignages, histoires de vie et conseils pour tous ensemble briser les tabous autour des troubles psychiques. Vous écoutez Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale.

  • Speaker #1

    T'as un problème ? L'association d'idées c'est t'es fou, t'es folle, y'a quelque chose qui va pas chez toi, t'es dysfonctionnel en fait.

  • Speaker #2

    Nos capacités de résilience sont débordées. J'étais pas forcément bien dans ma peau et tout ça a fait que j'étais vraiment vraiment mal et qu'au lycée je faisais plus rien.

  • Speaker #0

    La personne qu'il avait eue au bout du fil lui avait conseillé de poser directement la question à sa compagne si elle avait l'intention de mettre fin à ses jours.

  • Speaker #1

    On sort de la formation déjà avec des nouveaux outils, ça donne un cadre, c'est sécurisant parce qu'on se dit qu'on ne va pas faire n'importe quoi justement parce qu'on sait qu'on va trouver les bons mots la bonne manière.

  • Speaker #0

    Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale. Un trouble des conduites alimentaires, également appelé trouble du comportement alimentaire ou TCA, se définit comme une pratique alimentaire dans laquelle la relation à la nourriture est dysfonctionnelle. Au-delà du rapport à l'alimentation, la personne concernée par un TCA peut également éprouver une grande souffrance psychique et des difficultés comportementales en lien avec son poids. Ces souffrances concernent plus généralement l'apparence corporelle et l'activité physique. Les relations à autrui, et plus généralement le quotidien, s'en trouvent fortement impactées. Lorsque ces troubles s'installent dans la durée, ils peuvent avoir de sérieuses répercussions sur la santé mentale et physique, mais aussi sur le fonctionnement psychosocial et la qualité de vie de la personne concernée. On distingue trois types de TCA, l'anorexie mentale, la boulimie et l'hyperphagie boulimique. Si le genre féminin a une plus grande propension à développer ce type de trouble, le TCA peut néanmoins se déclarer chez tout un chacun, indépendamment de l'âge, de la culture, du statut socio-économique ou encore du statut pondéral. Les personnes souffrant d'un TCA présentent par ailleurs un plus grand risque de développer une autre comorbidité psychique, comme par exemple la dépression, voire de passer à l'acte. Bien que la prévalence de ces troubles soit difficile à estimer précisément, de récentes études estiment que 4 à 9% de la population mondiale pourrait souffrir d'un TCA. En France, c'est près d'un million de personnes qui seraient concernées. La formation PSSM donne des points de repère permettant de reconnaître les signes d'alerte associée à ces troubles complexes et la façon d'appréhender la personne concernée. Elle permet également de s'informer sur les ressources utiles et les services dédiés à la prise en charge de ce type de trouble. Aujourd'hui, nous accueillons au micro d'Apprendre à aider un duo mère-fille. Bonjour Katia.

  • Speaker #3

    Bonjour Oriana.

  • Speaker #0

    Vous êtes secouriste depuis 2022. Merci d'être à notre micro. Bonjour Candice.

  • Speaker #2

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Katia, est-ce que vous voulez bien nous expliquer de quelle façon vous avez... Portez secours à votre fille et dans quelle situation ?

  • Speaker #3

    Oui, Candice présentait des troubles alimentaires, avec des périodes où elle mangeait énormément et d'autres périodes où elle s'alimentait assez peu. C'est passé relativement inaperçu dans les premiers temps et il y a eu vraiment une aggravation de ce comportement-là. Et qui nous a vraiment inquiété avec mon mari, donc je dirais moi plutôt l'année dernière. Et avec une perte de poids importante, mon mari avait un discours qui était très à la sollicité pour qu'elle mange, et moi je lui disais, ben non, laisse-la, elle cherchera, on surveille. Donc on a commencé à parler, on a dit de toute façon au pire on l'hospitalisera. Finalement, forte aussi de la formation de premier score en santé mentale, j'en ai parlé à Candice en lui disant bon ben voilà, on est inquiet pour ta perte de poids et le seul moyen pour nous de nous rassurer c'est que tu ailles voir le médecin et que tu puisses faire une prise de sang et qu'on puisse voir ce qu'il en est, que tu puisses être accompagné à ce niveau-là. Pas forcément de gaieté de cœur, mais elle a fini par accepter. Et effectivement, elle a été suivie par le médecin traitant. Et au mois de juin l'année dernière, elle a sollicité d'avoir un accompagnement par une psychologue. C'était sa demande. Alors on avait déjà proposé en amont, j'avais proposé en amont plusieurs options. Bon, ce n'était pas adapté dans un premier temps. Et puis c'est elle qui s'est emparée de la solution psychologue. Donc elle avait un duo pour l'accompagner, médecin traitant et psychologue. Et au mois de juillet 2023, elle est revenue d'un rendez-vous avec le médecin traitant sur mon lieu de travail en disant Maman, en fait, il parle de m'hospitaliser, il me menace de m'hospitaliser et je ne veux pas. Donc à partir de là, on a commencé à réfléchir ensemble, à savoir comment je pouvais l'accompagner, ce qu'on pouvait mettre en place, quelles solutions. Et on a avancé comme ça progressivement toutes les deux au fur et à mesure un petit peu de ce qu'elle acceptait de mettre en place.

  • Speaker #0

    Et vous Candice, comment vous avez reçu l'aide de vos parents et plus particulièrement celle de votre mère ?

  • Speaker #2

    Au début j'avais totalement refusé l'aide parce que j'étais pas vraiment dans le déni mais j'étais dans le refus d'accepter qu'on puisse m'aider. Et j'étais dans la perception de... pouvoir m'aider seule.

  • Speaker #0

    Vous aviez conscience, Candice, d'avoir un trouble au comportement alimentaire ?

  • Speaker #2

    Oui, j'en avais totalement conscience, mais je n'avais pas encore mis de mots dessus avant un petit moment.

  • Speaker #0

    Comment cela se traduisait ?

  • Speaker #2

    Ça se traduisait souvent par une perte d'appétit, voire des nausées lors de, soit de la vue, soit de l'odeur de la nourriture. Et même quand je me forçais à manger, surtout quand je me forçais à en manger, j'arrivais pas à en prendre en grosse quantité du moins, enfin en grosse quantité dans les périodes où je mangeais pas beaucoup, voire pas du tout. C'est vraiment à ce moment-là où je me suis rendue compte que j'avais un problème, parce que c'est quand on prend ne serait-ce qu'une bouchée et que ça nous donne la nausée, une envie... de vomir comme pas possible, c'est pas gérable et c'est ça ce qui m'a provoqué le fait de ne pas manger du tout. C'est pour éviter ça et quand je commençais à avoir faim, donc dans le cas contraire, j'avais l'impression que j'arrivais à jamais à combler cette faim et que mon ventre c'était comme un trou noir c'est sa rentrée mais ça c'est comme si j'avais rien mangé mais si vous n'aviez jamais l'impression d'être rassasié oui c'est ça c'est assez particulier comme sensation et ça a été une fois jusque on va dire au point Grave des TCA, c'est-à-dire d'en vomir. Ça m'est arrivé très très peu de fois, mais ça m'est déjà arrivé et c'est quand même assez marquant quand ça arrive. Après je sais que ça aussi c'était accompagné, c'était la vision du physique, c'était soit je me trouvais aussi trop grosse, soit trop maigre, et ça accentuait un peu cet effet-là. C'est assez particulier quand on se regarde dans un miroir qu'on n'a pas changé. Mais du jour au lendemain, on se trouve soit trop grosse, soit trop maigre. Alors que ce n'est pas forcément le cas, on est totalement normal, mais c'est cette sensation de la vision qu'on se fait de notre corps à ce moment-là.

  • Speaker #0

    Quand votre maman est venue vers vous et qu'elle a commencé à aborder le sujet, quelle a été votre réaction ? Est-ce qu'en un premier temps, vous avez commencé par la rejeter ? Ou est-ce que vous avez écouté ce qu'elle avait à vous proposer ?

  • Speaker #2

    Tout début, j'avais plutôt refusé de l'écouter. Mais au fur et à mesure, j'ai décidé de l'écouter et j'ai entendu sa parole. Et comme elle a pu le dire, j'ai accepté de l'aide à contre-cœur. Mais je voulais aussi ne pas voir mes parents souffrir de ma souffrance.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est ça qui vous a décidé à... A vous faire aider ?

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #0

    Vous n'aviez pas conscience, vous, d'être en danger ?

  • Speaker #2

    Si, mais pour être honnête, je me fichais un peu d'être en danger. Même si j'en avais conscience, pour moi, ce n'était pas nécessaire d'être accompagnée.

  • Speaker #0

    Et dans les ressources que votre maman vous a proposées, est-ce qu'il y en a une qui vous a plus particulièrement convaincue ?

  • Speaker #2

    J'étais plus convaincue par le médecin traitant, parce que c'est... C'est une personne que je connais depuis très longtemps, c'est un médecin de famille. Donc ils connaissaient déjà l'histoire de ma sœur, qui a été aussi assez compliquée, et du coup je me suis dit, pourquoi pas tenter. Et aussi avec les menaces de mon père de vouloir m'interner, ça m'a fait me dire, je préfère ça à être internée.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez dire aujourd'hui, Candice, que vous avez quand même le sentiment que l'intervention de votre mère, ou plutôt de la secouriste en santé mentale, vous a aidé avec le recul que vous avez ?

  • Speaker #2

    Je peux dire que ça m'a aidée du moins d'en avoir parlé et j'avance petit à petit et ça va mieux, enfin de mieux en mieux.

  • Speaker #0

    Justement comment vous allez Candice aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    C'est toujours compliqué de temps en temps mais c'est mieux qu'avant. Et je pense que ça va continuer à s'améliorer.

  • Speaker #0

    Je vous le souhaite. Est-ce que vous continuez à avoir des professionnels de santé ? Oui. Quel type de professionnels ?

  • Speaker #2

    Je suis sous suivi psychologique et j'ai eu un suivi psychiatrique. Et j'ai pu l'arrêter récemment pour retourner dans un autre suivi psychologique, mais spécialisé dans le traumatisme.

  • Speaker #0

    Katia, avec le recul et sur la base de l'expérience que vous venez de nous raconter toutes les deux, est-ce qu'il y a quelque chose que vous feriez différemment ?

  • Speaker #3

    Dans ma façon d'aborder les choses, je pense que la formation a été vraiment d'un grand secours parce qu'avec cette dimension affective, je n'avais pas forcément suffisamment de recul en tant que maman. Et vraiment, d'avoir eu cette formation, ça a été un soutien, ça m'a permis de... de poser les choses avec plus de distance, de façon plus objective aussi, et de pouvoir faire des propositions à des moments adaptés, et avec le consentement de Candice, tout en ayant un objectif vraiment d'aller vers le mieux. Et vraiment ça a été, je ne sais pas si sans cette formation, je ne pense pas que j'aurais pu faire cet accompagnement-là.

  • Speaker #0

    On se disait tout à l'heure que le secouriste, ce n'est pas vraiment un super héros, ni même un soignant. Et des fois, cela fonctionne, des fois un petit peu moins. Vous m'expliquiez que vous aviez fait des propositions à Candice, qu'au départ, elle avait refusé en bloc.

  • Speaker #3

    Oui.

  • Speaker #0

    Lesquelles ?

  • Speaker #3

    Alors, la proposition de départ, ça a été plutôt de faire du moment du repas quelque chose de ludique. Ça n'avait pas du tout marché. L'accompagnement médical, bon, elle n'envoyait pas forcément l'intérêt non plus au départ. Je lui avais proposé la psychologue, je lui ai proposé un certain nombre de choses, même d'aller au restaurant à des moments un peu plus festifs, mais toujours autour de la nourriture. Et puis je me suis dit, à force de lui proposer des choses, en fait, il faut que je lâche. Il faut que j'arrête de vouloir absolument la faire manger. Et que je joue plutôt le rôle de la confiance, en fait. De lui dire, bon, d'accepter que ce ne soit pas son moment, même si j'avais très envie de l'accompagner et qu'elle aille mieux. Que ce ne soit pas son moment à elle et de respecter ça aussi. Plutôt que ce soit vraiment mon envie de maman et d'aller au-delà des possibles du moment, en fait.

  • Speaker #0

    Et vous, Candice, vous avez senti la différence quand votre mère mettait sa casquette de secouriste ? ou le discours vous semblait sensiblement le même ?

  • Speaker #2

    J'ai vu une différence, mais je ne savais pas trop à quoi c'était dû à ce moment-là. Pour moi, c'était plus le fait qu'elle avait lâché l'affaire et que je pouvais être enfin tranquille. Mais au final, j'ai vu que ça l'affectait quand même beaucoup, et je me suis rendue compte de tout ça. Et ça m'a permis, on va dire, de prendre conscience de l'impact que ma santé pouvait avoir sur les autres.

  • Speaker #0

    Et sur vous ?

  • Speaker #2

    Évidemment, oui.

  • Speaker #0

    Vous en aviez conscience à ce moment-là ?

  • Speaker #2

    J'ai jamais été dans le déni pour ma santé, j'étais toujours très consciente de ce qui se passait, et c'est juste que je ne voulais pas être aidée. Pendant un moment, je voulais juste, je ne sais pas pourquoi, mais je voulais juste être dans le mal. Et au final, quand on atteint un point de, on va dire, non-retour, entre guillemets, il y a toujours un retour. Quand on se rend compte de... Du puits sans fond dans lequel on peut s'enfoncer et que d'un coup on a un espoir, une petite lueur qui apparaît. On a juste envie de la saisir et de sortir de ce trou.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que la formation PSSM vous a apporté, Katia ?

  • Speaker #3

    Alors c'est ce que je disais, vraiment, c'est des outils, des ressources. Un soutien important dans l'accompagnement, parce que c'est aussi mon métier. d'accompagner les gens. Et ça a été vraiment salvateur dans le cas de mon expérience avec Candice, parce qu'il y avait cette dimension affective. Donc de pouvoir avoir un outil, des ressources, un fil conducteur, un fil rouge auquel se raccrocher, ça a été essentiel dans ces moments-là.

  • Speaker #0

    Vous aviez une méthode, une méthodologie.

  • Speaker #3

    Exactement, c'est exactement ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que cette formation a changé votre regard sur les troubles psychiques ?

  • Speaker #3

    Alors oui, en partie. Je pense qu'on a tous, à un moment ou à un autre, une part de vulnérabilité. On peut basculer, du jour au lendemain, sur quelque chose, je ne sais pas pourquoi, un déclencheur, peu importe. Je pense que la période Covid a bien accentué ce phénomène-là. Et on n'est pas au bout de nos surprises non plus. Tout le monde ne va pas décompenser à la même vitesse, à la même façon, mais ça a été une période très compliquée. Et je pense qu'effectivement, on a tous en nous peut-être une part de vulnérabilité à un moment donné, quand c'est trop, quand il y a un cumul. Et on peut effectivement basculer sur un élément déclencheur, peu importe. Donc oui, je pense que... Dans ce sens-là, on peut être soumis à la dépression, à des troubles psychiques à un moment donné de notre vie.

  • Speaker #0

    Vous connaissiez les TCA, les troubles du comportement ou des conduites alimentaires ?

  • Speaker #3

    Alors oui, mais je n'avais pas identifié ça chez ma fille dans un premier temps. Je connaissais parce que j'avais un ami qui était anorexique et vraiment très poussé, effectivement. Mais je n'avais pas du tout cette vision-là avant la formation.

  • Speaker #0

    Katia, est-ce que vous conseilleriez cette formation ?

  • Speaker #3

    Vivement ! Je pense qu'elle est pleine de sens pour tous les parents, déjà. Surtout au moment de l'adolescence, qui est une période où il y a beaucoup de vulnérabilité et de fragilité. Et je pense que ça peut être un très très bon soutien.

  • Speaker #0

    Katia, comment en êtes-vous arrivée à cette formation ? Est-ce que c'était dans un contexte professionnel ou personnel ? Est-ce que c'est parce que vous aviez décelé chez Candice un trouble ?

  • Speaker #3

    Alors à ce moment-là, non, je n'avais pas décelé le trouble chez Candice parce que j'avais effectivement conscience qu'elle avait des difficultés avec l'alimentation, mais je n'avais pas décelé ça en tant que telle. Par contre, j'avais rencontré avec ma fille aînée une problématique sur l'automutilation. Et je me suis trouvée effectivement très démunie à ce moment-là. Et en tant que maman, je me suis dit, c'est pas possible, trois enfants, trois ados, il faut que je trouve des outils, il faut que je trouve quelque chose pour pouvoir accompagner mes enfants, puis moi aussi par la même occasion. Donc j'ai cherché un petit peu ce que je pouvais avoir comme ressource. Et c'est vrai que j'ai pris connaissance de cette formation et je me suis dit, tiens, voilà, ça prenait. pas forcément beaucoup de temps et en même temps c'est tellement riche ces deux jours que c'était vraiment la formation qu'il me fallait pour accompagner ça m'a permis effectivement de pouvoir conscientiser je pense aussi la problématique de Candice derrière que je n'aurais pas forcément conscientisé autant.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup Katia, merci beaucoup Candice pour votre témoignage en duo très enrichissant et très émouvant à notre micro d'Apprendre à Aider Merci à vous. Nathalie Godard, bonjour.

  • Speaker #3

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Vous êtes professeure des universités en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines. Vous êtes également praticienne hospitalière à la Fondation Santé des étudiants de France. Et vous êtes membre de la Fédération française anorexie-boulimie. Aujourd'hui nous allons parler ensemble des TCA et justement qu'est-ce qu'un trouble des conduites alimentaires et dit-on trouble des conduites alimentaires ou trouble du comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Alors on dit les deux en fait. Historiquement on disait trouble des comportements alimentaires et aujourd'hui on dit trouble de la conduite alimentaire, ce qui sous-tend derrière quelque chose au niveau de l'idée et des émotions qui conduisent à se comporter comme cela.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que c'est plus précisément ?

  • Speaker #4

    Alors un trouble des conduites alimentaires, c'est un trouble psychiatrique, des difficultés psychologiques, qui vont se manifester au premier plan par des perturbations du comportement alimentaire. Ce peut être une restriction. Un excès d'alimentation, associé ou non à des comportements pour maintenir son poids. Vous avez des troubles tels que l'anorexie mentale, la boulimie, l'hyperphagie boulimique ou les troubles d'évitement et de restriction d'alimentation.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous aider à différencier l'anorexie mentale de la boulimie et de l'hyperphagie boulimique s'il vous plaît ?

  • Speaker #4

    L'anorexie mentale est un trouble des conduites alimentaires où il y a principalement une restriction avec une perte de poids, des préoccupations autour de l'image du corps. corps qui vont avoir des conséquences physiques. Dans la boulimie, les personnes vont souffrir de ce qu'on appelle de crise de boulimie, c'est-à-dire l'absorption extrêmement importante de nourriture dans une quantité très importante, dans une durée très limitée, plus qu'elle ne serait pour d'autres personnes pour absorber les mêmes quantités de nourriture. Dans la boulimie, les personnes ont ce qu'on appelle les stratégies de contrôle de poids, c'est-à-dire qu'elles ne veulent pas prendre du poids, donc elles vont avoir des comportements comme se faire vomir, prendre des médicaments ou faire beaucoup d'activités physiques. Dans l'hyperphagie boulimique, on a les mêmes crises de boulimie, mais sans stratégie de contrôle de poids, ce qui fait que les personnes vont prendre du poids ou être en surpoids. Il faut savoir que dans certaines formes d'anorexie mentale, on peut avoir la restriction qui est prédominante, avec en plus des crises de boulimie qui s'ajoutent, mais avec un poids très bas.

  • Speaker #0

    Vous avez quelques chiffres à nous donner sur les TCA ?

  • Speaker #4

    La difficulté des médecins, c'est qu'ils ont toujours des définitions qui sont variables. Si on s'intéresse au spectre large des TCA, on dit qu'ils peuvent toucher jusqu'à 17% de la population. Et si l'on considère des affections qui sont parmi les plus sévères, ils touchent globalement 5 à 6% de la population, avec l'anorexie mentale qui touche à peu près 1% des jeunes femmes, la boulimie à peu près 1 à 2% des jeunes femmes, l'hyperphagie boulimique 3 à 5% de la population. Alors je parle beaucoup de jeunes femmes pour l'anorexie. et pour la boulimie parce que c'est beaucoup plus fréquent dans les populations féminines. Mais néanmoins, chez les garçons, on observe ces troubles. Une personne sur dix soignée pour anorexie mentale est un garçon. Une personne sur sept soignée pour boulimie est un garçon. Et pour l'hyperphagie boulimique, selon les échantillons, on va de 20% à la moitié des personnes concernées.

  • Speaker #0

    Quels sont les signes d'alerte comportementaux, physiques puis psychologiques ?

  • Speaker #4

    Alors, les signes physiques, il n'y en a pas toujours. Pour les troubles qui sont restrictifs comme l'anorexie mentale, effectivement les personnes perdent du poids et on peut les voir s'amégrir. Pour la boulimie, très souvent il n'y a pas de signe physique et pour l'hyperphagie boulimique, le plus souvent c'est associé avec une prise de poids ou un surpoids. La difficulté, c'est que ces symptômes ne sont pas les premiers que l'on peut observer. Les premières difficultés qu'on peut observer sont souvent des difficultés à... à type de tristesse, de désinvestissement, de difficultés relationnelles avec les autres, parce qu'en fait les personnes qui souffrent de troubles des conduites alimentaires ont du mal déjà à manger en face des autres, ce qui fait qu'elles ont des difficultés dans leur relation sociale. Et puis les personnes qui souffrent de troubles des conduites alimentaires vont se manifester parfois par des comportements qui seront visibles, qui peuvent être des comportements de restriction, l'incapacité à manger de manière adaptée en quantité ou en qualité. ou à l'inverse, se trouver pris par des épisodes qu'on appelle des crises de boulimie ou crises d'hyperphagie, où ils se retrouvent à manger beaucoup. Et ces difficultés alimentaires font qu'ils ont du mal à s'exposer au regard des autres.

  • Speaker #0

    Tout à l'heure, vous nous expliquiez que les hommes et les femmes étaient autant touchés les uns que les autres, mais y a-t-il une tranche d'âge un petit peu plus vulnérable ?

  • Speaker #4

    Alors, les troubles des conduites alimentaires commencent majoritairement pendant l'adolescence et le début de l'âge adulte, puisqu'on dit... Schématiquement, à peu près 75% de ces troubles débutent avant l'âge de 25 ans. Néanmoins, des enfants peuvent être touchés par ces troubles, ou des personnes qui sont d'âge mûr, voire des personnes âgées. Ça peut exister à tout âge.

  • Speaker #0

    Quels sont les risques en matière de santé ?

  • Speaker #4

    Les risques en matière de santé sont de plusieurs ordres. Il y a déjà les conséquences physiques, qui sont liées à l'état nutritionnel qui est induit par les troubles des conduites alimentaires. Donc dans la restriction, ça va être... des problèmes liés à la dénutrition et dans les excès d'apport, ça va être des problèmes liés au surpoids ou à l'obésité. Et ces problèmes touchent tous les organes, donc on peut avoir des complications à tous les niveaux. Et puis en ce qui concerne sur le plan psychologique, souvent ces troubles des conduites alimentaires se compliquent de symptômes anxieux ou de symptômes dépressifs, de mal-être et vont avoir des conséquences et un retentissement social sur l'insertion sociale, des difficultés de relation avec les autres au travers des repas, mais pas que. Des conflits en famille, bien souvent, des difficultés d'insertion à l'école ou des difficultés professionnelles.

  • Speaker #0

    Comment un secouriste en santé mentale peut-il soutenir une personne qui souffre de troubles du comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Je pense que soutenir... C'est déjà peut-être avoir conscience que les repas sont des moments difficiles et peut-être ne pas intervenir à ce moment-là. Mais peut-être intervenir en dehors des repas, quand il s'agit de dire qu'on a vu qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas, d'essayer d'aider et de demander comment on peut aider. Parce que certaines personnes peuvent être aidées, par exemple dans un repas, s'il se sait soutenu par une personne, mais d'autres veulent se sentir agressé. Donc il faut pouvoir différencier les choses. Il faut surtout en parler avec les personnes concernées. Et je vous dis, le meilleur moment, ça n'est pas le moment du repas.

  • Speaker #0

    Et comment fait-on en tant que secouriste pour dissocier quelqu'un qui aurait tendance à faire attention à ce qu'il mange ? Peut-on peut-être parler de régime ? Ou quelqu'un qui a un vrai trouble lié au comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Je dirais que ce n'est pas forcément très simple. Mais de toute façon, les régimes, quand ils sont extrêmes, que ce soit en quantité... ou qu'ils sont exclusifs, ils sont dangereux pour la santé. Donc, qu'on se retrouve face à de vrais troubles des conduites alimentaires ou des conduites restrictives, déjà il faut s'interroger, ou des conduites qui ne sont pas adaptées. L'ensemble des éléments, avec en particulier la souffrance psychique, mais associés aussi à des préoccupations corporelles qui sont généralement déconnectées de la réalité, en particulier dans l'anorexie mentale ou dans les boulimies, où les gens se perçoivent comme démesurément gros ou avec des problèmes physiques. qui n'existent pas sont déjà quelque chose qui doit attirer en fait l'attention. C'est-à-dire ce décalage entre la perception qu'a la personne de sa situation elle-même face à la réalité. Quand c'est combiné par exemple face à quelqu'un qui est très mince, qui dit qu'il veut maigrir et qui va avoir des comportements restrictifs, ben là il faut s'interroger, il faut s'inquiéter. Même chose pour quelqu'un qui est normal et qui souhaite absolument maigrir. Après, pour des personnes qui... présente des troubles des conduites alimentaires, parfois ça va être des signes indirects qu'on va repérer. Et dans un entourage proche, par exemple, des paquets de gâteaux qui disparaissent, des choses qui sont un peu excessives, il faut pouvoir en parler, je dirais, avec délicatesse avec les personnes. Parce que très souvent, ce sont des situations, des choses dont les personnes ont honte, en fait. Et cette honte est quelque chose qui est difficile à dépasser. Et aborder ces questions peut être extrêmement blessant.

  • Speaker #0

    Comment déterminer ? temps si une situation est urgente ?

  • Speaker #4

    Une situation est urgente quand quelqu'un fait des malaises, par exemple. Quand quelqu'un va avoir des comportements dangereux. Et on sait que, par exemple, certaines stratégies pour perdre du poids sont des stratégies dangereuses. Se faire vomir est quelque chose de très dangereux. de pouvoir alerter les personnes elles-mêmes. Mais je crois que la première situation, c'est de voir des gens qui sont fatigués, par exemple, ou des gens qui font des malaises, ou des personnes qui sont effectivement manifestement en grande difficulté, mais qui ne veulent pas en entendre parler, qui ne le reconnaissent pas. Parce que ça veut dire qu'elles ne vont pas chercher d'aide potentielle.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pensez que les écrans et les réseaux sociaux ont un réel impact sur les jeunes filles et sur les troubles de la conduite alimentaire ?

  • Speaker #4

    Il est clair qu'en ce qui concerne l'estime de soi, la perception du schéma corporel, les idéaux qui sont proposés sur les réseaux, ils ont souvent en résonance avec la perception que peut avoir la personne qui souffre de troubles des conditions alimentaires de l'inéquation de son image corporelle avec les attendus de la société. On sait que ces réseaux et toutes les images qui sont véhiculées sur les médias peuvent être des facteurs d'entretien de ces troubles des conditions alimentaires. Des facteurs qui vont être la goutte d'eau qui fait déborder le vase, mais il faut savoir que ces troubles ont des racines beaucoup plus profondes et qu'elles sont liées à des difficultés, souvent émotionnelles, relationnelles, qui préexistent mais qui peuvent être amplifiées par les réseaux.

  • Speaker #0

    Et comment fait-on si une personne ne souhaite pas être aidée ? C'est toujours difficile quand quelqu'un refuse de l'aide. Alors tout dépend du contexte, l'urgence et l'entourage je dirais. C'est-à-dire que si on est face à quelqu'un qui est mineur par exemple, et qui a des adultes autour, je pense que si on a affaire à des jeunes de son âge et qu'on est soi-même mineur, alerter les adultes autour, que ce soit dans l'espace éducatif, ou la famille, ou les parents, pour leur renvoyer quelque chose que l'on perçoit, je pense que c'est très important. Mais toujours en avoir... après en avoir parlé à la personne, bien sûr. Après, quand on se retrouve face à des personnes qui sont adultes et qui ont, j'allais dire, leur autodétermination, je pense que de leur redonner un retour de la perception que l'on a, de l'inquiétude que l'on a, c'est quelque chose d'extrêmement important. Parce que je pense que d'entendre quelqu'un qui se soucie de vous, c'est quelque chose qui ouvre après une possibilité d'entendre les choses, de les écouter et de s'écouter soi-même. Et puis, peut-être qu'à force d'avoir entendu une fois, ou deux ou trois, ce sera peut-être la troisième fois où la personne entendra et pourra prendre l'aide. Et puis, les personnes ne veulent pas entendre, mais on peut leur donner quelques ressources aussi, si elles le souhaitent, et elles peuvent les utiliser plus tard.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Nathalie Godard. Vous l'avez compris dans cet épisode, on a été, on est, ou on sera peut-être tous concernés un jour par un proche qui ne va pas bien. Si vous êtes dans cette situation, vous pouvez vous appuyer sur ces ressources. Le carnet du secouriste en santé mentale, mieux comprendre les troubles du comportement alimentaire. Il est disponible en téléchargement gratuit sur le site de PSSM France. Vous pouvez également vous rendre sur le site de la Fédération Nationale des Associations liées aux troubles des conduites alimentaires, la FNA, TCA, pour trouver une association de patients et de proches dans votre région. Et enfin, vous pouvez écouter l'émission Quoi de neuf, docteur ? sur France Inter. Elle se penche sur le sujet des TCA dans un épisode intitulé Comment surmonter les troubles des comportements alimentaires L'émission est disponible gratuitement, en podcast, sur les plateformes d'écoute et sur le site de France Inter. En plus de ces ressources, sachez que venir en aide à quelqu'un atteint de troubles du comportement alimentaire, ça s'apprend. Sans pour autant se substituer au professionnel, sans pour autant devenir un soignant. Comment offrir son soutien ? Quelles sont les choses à éviter de dire ? Et au contraire, les bonnes pratiques, les bons mots à avoir. Quelles sont les ressources et les professionnels vers qui orienter ? Voici autant d'éléments qui sont abordés lors de la formation des premiers secours en santé mentale. Nous avons tous un rôle à jouer en tant que secouristes en santé mentale. Alors vous aussi, rejoignez cette démarche citoyenne et apprenez à aider en vous formant aux premiers secours en santé mentale. Pour cela, rien de plus simple. Rendez-vous sur le site de PSSM. C'était Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale. Si vous avez aimé cet épisode, laissez-nous un commentaire ou un like sur votre plateforme d'écoute. Rendez-vous dans un mois pour votre prochain épisode. Apprendre à aider est un podcast PSSM France, produit par Plus de Sens. Ce podcast a été rendu possible grâce au Self-Esteem Club d'Herborian, partenaire de PSSM France. Présentation, Oriana Dobrometz. Direction éditoriale, Stéphanie Rojdix et Oriana Dobrometz. Direction de la production, Nicolas Pinault

Chapters

  • Avertissement

    00:00

  • Présentation du podcast Apprendre à aider

    00:25

  • Générique

    01:01

  • Introduction aux troubles des conduites alimentaires

    01:48

  • Témoignages de Katia et Candice

    03:31

  • Interview de la Professeure Nathalie Godart (psychiatre)

    19:27

  • Ressources pour en savoir plus sur les TCA

    30:40

  • Conclusion

    31:31

  • Générique de fin d'Apprendre à aider

    32:09

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Description

Comment aider une personne en souffrance psychique ? Que faut-il dire ou ne pas dire ?
Comment repère-t-on un trouble ? Autant de questions abordées dans Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale.
Les personnes qui souffrent d’un trouble du comportement alimentaire – ou trouble des conduites alimentaires – ou TCA, ont une relation à la nourriture qu’on qualifie de dysfonctionnelle.
Il existe trois types de TCA : l’anorexie mentale, la boulimie et l’hyperphagie boulimique.

Au-delà du rapport compliqué à l’alimentation, les personnes concernées par un trouble du comportement alimentaire peuvent également éprouver une grande souffrance psychique et des difficultés comportementales liées à leur poids. Lorsque ces troubles s’installent, ils peuvent avoir de sérieuses répercussions sur la santé mentale mais aussi physique.

Dans cet épisode, vous pourrez écouter le témoignage de Katia et de Candice. Katia, secouriste en santé mentale et mère de Candice, nous raconte comment elle a décelé les TCA de Candice et comment elle a accompagné et continue d’accompagner sa fille. Quant à Candice, elle nous livre son expérience, ses ressentis, comment elle vit et subit ces troubles au quotidien et toute l’ambivalence des sentiments qui l’envahissent.

NB : Dans cet épisode, Candice parle de « se faire interner » lorsque son père suggère une prise en charge à l’hôpital. Chez PSSM, nous recommandons à nos secouristes d’utiliser plutôt l’expression « hospitalisation faite à la demande d’un tiers ». 😊

Dans cet épisode, vous entendrez également Nathalie Godart, professeure à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines et membre de la Fédération Française Anorexie Boulimie. Les TCA touchent jusqu’à 17 % de la population, soit près d’une personne sur cinq. 1 à 2 % des jeunes femmes souffrent de boulimie mais 20 à 50% des patients soignés pour de l’hyperphagie boulimique sont des garçons.

Vous souhaitez en savoir plus sur les TCA ? Voici quelques ressources :

Cette liste n'est pas exhaustive, vous pouvez la compléter et faire vos suggestions en commentaires.

Bonne écoute ! 🎧
---
Ce podcast a été rendu possible grâce au Self-Esteem Club d'Erborian, partenaire de PSSM France.
Présentation : Oriana Dobremetz
Générique : ATS Studios
Direction éditoriale : Stéphanie Rochedix et Oriana Dobremetz
Direction de la production : Nicolas Pineau.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce podcast parle de troubles en santé mentale et de situations réellement vécues. Les témoignages que vous allez entendre peuvent heurter la sensibilité de certaines personnes. Si vous êtes en détresse psychique ou avez des pensées suicidaires, si vous pensez qu'une personne de votre entourage est en situation de crise, vous devez contacter le 112, le 15, le 18 ou le 3114, le numéro national de prévention du suicide. C'est l'histoire de Julie qui a fait une tentative de suicide, de Pierre qui boit trop. C'est aussi l'histoire de Nathalie qui rêve chaque nuit de son accident de voiture. Vous aussi vous connaissez peut-être quelqu'un qui est concerné par un problème de santé mentale. Chez PSSM, Premier Secours en Santé Mentale, nous sommes convaincus qu'engager une conversation peut tout changer. Je m'appelle Oriana et je vous souhaite la bienvenue dans cette discussion où se mêlent témoignages, histoires de vie et conseils pour tous ensemble briser les tabous autour des troubles psychiques. Vous écoutez Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale.

  • Speaker #1

    T'as un problème ? L'association d'idées c'est t'es fou, t'es folle, y'a quelque chose qui va pas chez toi, t'es dysfonctionnel en fait.

  • Speaker #2

    Nos capacités de résilience sont débordées. J'étais pas forcément bien dans ma peau et tout ça a fait que j'étais vraiment vraiment mal et qu'au lycée je faisais plus rien.

  • Speaker #0

    La personne qu'il avait eue au bout du fil lui avait conseillé de poser directement la question à sa compagne si elle avait l'intention de mettre fin à ses jours.

  • Speaker #1

    On sort de la formation déjà avec des nouveaux outils, ça donne un cadre, c'est sécurisant parce qu'on se dit qu'on ne va pas faire n'importe quoi justement parce qu'on sait qu'on va trouver les bons mots la bonne manière.

  • Speaker #0

    Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale. Un trouble des conduites alimentaires, également appelé trouble du comportement alimentaire ou TCA, se définit comme une pratique alimentaire dans laquelle la relation à la nourriture est dysfonctionnelle. Au-delà du rapport à l'alimentation, la personne concernée par un TCA peut également éprouver une grande souffrance psychique et des difficultés comportementales en lien avec son poids. Ces souffrances concernent plus généralement l'apparence corporelle et l'activité physique. Les relations à autrui, et plus généralement le quotidien, s'en trouvent fortement impactées. Lorsque ces troubles s'installent dans la durée, ils peuvent avoir de sérieuses répercussions sur la santé mentale et physique, mais aussi sur le fonctionnement psychosocial et la qualité de vie de la personne concernée. On distingue trois types de TCA, l'anorexie mentale, la boulimie et l'hyperphagie boulimique. Si le genre féminin a une plus grande propension à développer ce type de trouble, le TCA peut néanmoins se déclarer chez tout un chacun, indépendamment de l'âge, de la culture, du statut socio-économique ou encore du statut pondéral. Les personnes souffrant d'un TCA présentent par ailleurs un plus grand risque de développer une autre comorbidité psychique, comme par exemple la dépression, voire de passer à l'acte. Bien que la prévalence de ces troubles soit difficile à estimer précisément, de récentes études estiment que 4 à 9% de la population mondiale pourrait souffrir d'un TCA. En France, c'est près d'un million de personnes qui seraient concernées. La formation PSSM donne des points de repère permettant de reconnaître les signes d'alerte associée à ces troubles complexes et la façon d'appréhender la personne concernée. Elle permet également de s'informer sur les ressources utiles et les services dédiés à la prise en charge de ce type de trouble. Aujourd'hui, nous accueillons au micro d'Apprendre à aider un duo mère-fille. Bonjour Katia.

  • Speaker #3

    Bonjour Oriana.

  • Speaker #0

    Vous êtes secouriste depuis 2022. Merci d'être à notre micro. Bonjour Candice.

  • Speaker #2

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Katia, est-ce que vous voulez bien nous expliquer de quelle façon vous avez... Portez secours à votre fille et dans quelle situation ?

  • Speaker #3

    Oui, Candice présentait des troubles alimentaires, avec des périodes où elle mangeait énormément et d'autres périodes où elle s'alimentait assez peu. C'est passé relativement inaperçu dans les premiers temps et il y a eu vraiment une aggravation de ce comportement-là. Et qui nous a vraiment inquiété avec mon mari, donc je dirais moi plutôt l'année dernière. Et avec une perte de poids importante, mon mari avait un discours qui était très à la sollicité pour qu'elle mange, et moi je lui disais, ben non, laisse-la, elle cherchera, on surveille. Donc on a commencé à parler, on a dit de toute façon au pire on l'hospitalisera. Finalement, forte aussi de la formation de premier score en santé mentale, j'en ai parlé à Candice en lui disant bon ben voilà, on est inquiet pour ta perte de poids et le seul moyen pour nous de nous rassurer c'est que tu ailles voir le médecin et que tu puisses faire une prise de sang et qu'on puisse voir ce qu'il en est, que tu puisses être accompagné à ce niveau-là. Pas forcément de gaieté de cœur, mais elle a fini par accepter. Et effectivement, elle a été suivie par le médecin traitant. Et au mois de juin l'année dernière, elle a sollicité d'avoir un accompagnement par une psychologue. C'était sa demande. Alors on avait déjà proposé en amont, j'avais proposé en amont plusieurs options. Bon, ce n'était pas adapté dans un premier temps. Et puis c'est elle qui s'est emparée de la solution psychologue. Donc elle avait un duo pour l'accompagner, médecin traitant et psychologue. Et au mois de juillet 2023, elle est revenue d'un rendez-vous avec le médecin traitant sur mon lieu de travail en disant Maman, en fait, il parle de m'hospitaliser, il me menace de m'hospitaliser et je ne veux pas. Donc à partir de là, on a commencé à réfléchir ensemble, à savoir comment je pouvais l'accompagner, ce qu'on pouvait mettre en place, quelles solutions. Et on a avancé comme ça progressivement toutes les deux au fur et à mesure un petit peu de ce qu'elle acceptait de mettre en place.

  • Speaker #0

    Et vous Candice, comment vous avez reçu l'aide de vos parents et plus particulièrement celle de votre mère ?

  • Speaker #2

    Au début j'avais totalement refusé l'aide parce que j'étais pas vraiment dans le déni mais j'étais dans le refus d'accepter qu'on puisse m'aider. Et j'étais dans la perception de... pouvoir m'aider seule.

  • Speaker #0

    Vous aviez conscience, Candice, d'avoir un trouble au comportement alimentaire ?

  • Speaker #2

    Oui, j'en avais totalement conscience, mais je n'avais pas encore mis de mots dessus avant un petit moment.

  • Speaker #0

    Comment cela se traduisait ?

  • Speaker #2

    Ça se traduisait souvent par une perte d'appétit, voire des nausées lors de, soit de la vue, soit de l'odeur de la nourriture. Et même quand je me forçais à manger, surtout quand je me forçais à en manger, j'arrivais pas à en prendre en grosse quantité du moins, enfin en grosse quantité dans les périodes où je mangeais pas beaucoup, voire pas du tout. C'est vraiment à ce moment-là où je me suis rendue compte que j'avais un problème, parce que c'est quand on prend ne serait-ce qu'une bouchée et que ça nous donne la nausée, une envie... de vomir comme pas possible, c'est pas gérable et c'est ça ce qui m'a provoqué le fait de ne pas manger du tout. C'est pour éviter ça et quand je commençais à avoir faim, donc dans le cas contraire, j'avais l'impression que j'arrivais à jamais à combler cette faim et que mon ventre c'était comme un trou noir c'est sa rentrée mais ça c'est comme si j'avais rien mangé mais si vous n'aviez jamais l'impression d'être rassasié oui c'est ça c'est assez particulier comme sensation et ça a été une fois jusque on va dire au point Grave des TCA, c'est-à-dire d'en vomir. Ça m'est arrivé très très peu de fois, mais ça m'est déjà arrivé et c'est quand même assez marquant quand ça arrive. Après je sais que ça aussi c'était accompagné, c'était la vision du physique, c'était soit je me trouvais aussi trop grosse, soit trop maigre, et ça accentuait un peu cet effet-là. C'est assez particulier quand on se regarde dans un miroir qu'on n'a pas changé. Mais du jour au lendemain, on se trouve soit trop grosse, soit trop maigre. Alors que ce n'est pas forcément le cas, on est totalement normal, mais c'est cette sensation de la vision qu'on se fait de notre corps à ce moment-là.

  • Speaker #0

    Quand votre maman est venue vers vous et qu'elle a commencé à aborder le sujet, quelle a été votre réaction ? Est-ce qu'en un premier temps, vous avez commencé par la rejeter ? Ou est-ce que vous avez écouté ce qu'elle avait à vous proposer ?

  • Speaker #2

    Tout début, j'avais plutôt refusé de l'écouter. Mais au fur et à mesure, j'ai décidé de l'écouter et j'ai entendu sa parole. Et comme elle a pu le dire, j'ai accepté de l'aide à contre-cœur. Mais je voulais aussi ne pas voir mes parents souffrir de ma souffrance.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est ça qui vous a décidé à... A vous faire aider ?

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #0

    Vous n'aviez pas conscience, vous, d'être en danger ?

  • Speaker #2

    Si, mais pour être honnête, je me fichais un peu d'être en danger. Même si j'en avais conscience, pour moi, ce n'était pas nécessaire d'être accompagnée.

  • Speaker #0

    Et dans les ressources que votre maman vous a proposées, est-ce qu'il y en a une qui vous a plus particulièrement convaincue ?

  • Speaker #2

    J'étais plus convaincue par le médecin traitant, parce que c'est... C'est une personne que je connais depuis très longtemps, c'est un médecin de famille. Donc ils connaissaient déjà l'histoire de ma sœur, qui a été aussi assez compliquée, et du coup je me suis dit, pourquoi pas tenter. Et aussi avec les menaces de mon père de vouloir m'interner, ça m'a fait me dire, je préfère ça à être internée.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez dire aujourd'hui, Candice, que vous avez quand même le sentiment que l'intervention de votre mère, ou plutôt de la secouriste en santé mentale, vous a aidé avec le recul que vous avez ?

  • Speaker #2

    Je peux dire que ça m'a aidée du moins d'en avoir parlé et j'avance petit à petit et ça va mieux, enfin de mieux en mieux.

  • Speaker #0

    Justement comment vous allez Candice aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    C'est toujours compliqué de temps en temps mais c'est mieux qu'avant. Et je pense que ça va continuer à s'améliorer.

  • Speaker #0

    Je vous le souhaite. Est-ce que vous continuez à avoir des professionnels de santé ? Oui. Quel type de professionnels ?

  • Speaker #2

    Je suis sous suivi psychologique et j'ai eu un suivi psychiatrique. Et j'ai pu l'arrêter récemment pour retourner dans un autre suivi psychologique, mais spécialisé dans le traumatisme.

  • Speaker #0

    Katia, avec le recul et sur la base de l'expérience que vous venez de nous raconter toutes les deux, est-ce qu'il y a quelque chose que vous feriez différemment ?

  • Speaker #3

    Dans ma façon d'aborder les choses, je pense que la formation a été vraiment d'un grand secours parce qu'avec cette dimension affective, je n'avais pas forcément suffisamment de recul en tant que maman. Et vraiment, d'avoir eu cette formation, ça a été un soutien, ça m'a permis de... de poser les choses avec plus de distance, de façon plus objective aussi, et de pouvoir faire des propositions à des moments adaptés, et avec le consentement de Candice, tout en ayant un objectif vraiment d'aller vers le mieux. Et vraiment ça a été, je ne sais pas si sans cette formation, je ne pense pas que j'aurais pu faire cet accompagnement-là.

  • Speaker #0

    On se disait tout à l'heure que le secouriste, ce n'est pas vraiment un super héros, ni même un soignant. Et des fois, cela fonctionne, des fois un petit peu moins. Vous m'expliquiez que vous aviez fait des propositions à Candice, qu'au départ, elle avait refusé en bloc.

  • Speaker #3

    Oui.

  • Speaker #0

    Lesquelles ?

  • Speaker #3

    Alors, la proposition de départ, ça a été plutôt de faire du moment du repas quelque chose de ludique. Ça n'avait pas du tout marché. L'accompagnement médical, bon, elle n'envoyait pas forcément l'intérêt non plus au départ. Je lui avais proposé la psychologue, je lui ai proposé un certain nombre de choses, même d'aller au restaurant à des moments un peu plus festifs, mais toujours autour de la nourriture. Et puis je me suis dit, à force de lui proposer des choses, en fait, il faut que je lâche. Il faut que j'arrête de vouloir absolument la faire manger. Et que je joue plutôt le rôle de la confiance, en fait. De lui dire, bon, d'accepter que ce ne soit pas son moment, même si j'avais très envie de l'accompagner et qu'elle aille mieux. Que ce ne soit pas son moment à elle et de respecter ça aussi. Plutôt que ce soit vraiment mon envie de maman et d'aller au-delà des possibles du moment, en fait.

  • Speaker #0

    Et vous, Candice, vous avez senti la différence quand votre mère mettait sa casquette de secouriste ? ou le discours vous semblait sensiblement le même ?

  • Speaker #2

    J'ai vu une différence, mais je ne savais pas trop à quoi c'était dû à ce moment-là. Pour moi, c'était plus le fait qu'elle avait lâché l'affaire et que je pouvais être enfin tranquille. Mais au final, j'ai vu que ça l'affectait quand même beaucoup, et je me suis rendue compte de tout ça. Et ça m'a permis, on va dire, de prendre conscience de l'impact que ma santé pouvait avoir sur les autres.

  • Speaker #0

    Et sur vous ?

  • Speaker #2

    Évidemment, oui.

  • Speaker #0

    Vous en aviez conscience à ce moment-là ?

  • Speaker #2

    J'ai jamais été dans le déni pour ma santé, j'étais toujours très consciente de ce qui se passait, et c'est juste que je ne voulais pas être aidée. Pendant un moment, je voulais juste, je ne sais pas pourquoi, mais je voulais juste être dans le mal. Et au final, quand on atteint un point de, on va dire, non-retour, entre guillemets, il y a toujours un retour. Quand on se rend compte de... Du puits sans fond dans lequel on peut s'enfoncer et que d'un coup on a un espoir, une petite lueur qui apparaît. On a juste envie de la saisir et de sortir de ce trou.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que la formation PSSM vous a apporté, Katia ?

  • Speaker #3

    Alors c'est ce que je disais, vraiment, c'est des outils, des ressources. Un soutien important dans l'accompagnement, parce que c'est aussi mon métier. d'accompagner les gens. Et ça a été vraiment salvateur dans le cas de mon expérience avec Candice, parce qu'il y avait cette dimension affective. Donc de pouvoir avoir un outil, des ressources, un fil conducteur, un fil rouge auquel se raccrocher, ça a été essentiel dans ces moments-là.

  • Speaker #0

    Vous aviez une méthode, une méthodologie.

  • Speaker #3

    Exactement, c'est exactement ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que cette formation a changé votre regard sur les troubles psychiques ?

  • Speaker #3

    Alors oui, en partie. Je pense qu'on a tous, à un moment ou à un autre, une part de vulnérabilité. On peut basculer, du jour au lendemain, sur quelque chose, je ne sais pas pourquoi, un déclencheur, peu importe. Je pense que la période Covid a bien accentué ce phénomène-là. Et on n'est pas au bout de nos surprises non plus. Tout le monde ne va pas décompenser à la même vitesse, à la même façon, mais ça a été une période très compliquée. Et je pense qu'effectivement, on a tous en nous peut-être une part de vulnérabilité à un moment donné, quand c'est trop, quand il y a un cumul. Et on peut effectivement basculer sur un élément déclencheur, peu importe. Donc oui, je pense que... Dans ce sens-là, on peut être soumis à la dépression, à des troubles psychiques à un moment donné de notre vie.

  • Speaker #0

    Vous connaissiez les TCA, les troubles du comportement ou des conduites alimentaires ?

  • Speaker #3

    Alors oui, mais je n'avais pas identifié ça chez ma fille dans un premier temps. Je connaissais parce que j'avais un ami qui était anorexique et vraiment très poussé, effectivement. Mais je n'avais pas du tout cette vision-là avant la formation.

  • Speaker #0

    Katia, est-ce que vous conseilleriez cette formation ?

  • Speaker #3

    Vivement ! Je pense qu'elle est pleine de sens pour tous les parents, déjà. Surtout au moment de l'adolescence, qui est une période où il y a beaucoup de vulnérabilité et de fragilité. Et je pense que ça peut être un très très bon soutien.

  • Speaker #0

    Katia, comment en êtes-vous arrivée à cette formation ? Est-ce que c'était dans un contexte professionnel ou personnel ? Est-ce que c'est parce que vous aviez décelé chez Candice un trouble ?

  • Speaker #3

    Alors à ce moment-là, non, je n'avais pas décelé le trouble chez Candice parce que j'avais effectivement conscience qu'elle avait des difficultés avec l'alimentation, mais je n'avais pas décelé ça en tant que telle. Par contre, j'avais rencontré avec ma fille aînée une problématique sur l'automutilation. Et je me suis trouvée effectivement très démunie à ce moment-là. Et en tant que maman, je me suis dit, c'est pas possible, trois enfants, trois ados, il faut que je trouve des outils, il faut que je trouve quelque chose pour pouvoir accompagner mes enfants, puis moi aussi par la même occasion. Donc j'ai cherché un petit peu ce que je pouvais avoir comme ressource. Et c'est vrai que j'ai pris connaissance de cette formation et je me suis dit, tiens, voilà, ça prenait. pas forcément beaucoup de temps et en même temps c'est tellement riche ces deux jours que c'était vraiment la formation qu'il me fallait pour accompagner ça m'a permis effectivement de pouvoir conscientiser je pense aussi la problématique de Candice derrière que je n'aurais pas forcément conscientisé autant.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup Katia, merci beaucoup Candice pour votre témoignage en duo très enrichissant et très émouvant à notre micro d'Apprendre à Aider Merci à vous. Nathalie Godard, bonjour.

  • Speaker #3

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Vous êtes professeure des universités en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines. Vous êtes également praticienne hospitalière à la Fondation Santé des étudiants de France. Et vous êtes membre de la Fédération française anorexie-boulimie. Aujourd'hui nous allons parler ensemble des TCA et justement qu'est-ce qu'un trouble des conduites alimentaires et dit-on trouble des conduites alimentaires ou trouble du comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Alors on dit les deux en fait. Historiquement on disait trouble des comportements alimentaires et aujourd'hui on dit trouble de la conduite alimentaire, ce qui sous-tend derrière quelque chose au niveau de l'idée et des émotions qui conduisent à se comporter comme cela.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que c'est plus précisément ?

  • Speaker #4

    Alors un trouble des conduites alimentaires, c'est un trouble psychiatrique, des difficultés psychologiques, qui vont se manifester au premier plan par des perturbations du comportement alimentaire. Ce peut être une restriction. Un excès d'alimentation, associé ou non à des comportements pour maintenir son poids. Vous avez des troubles tels que l'anorexie mentale, la boulimie, l'hyperphagie boulimique ou les troubles d'évitement et de restriction d'alimentation.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous aider à différencier l'anorexie mentale de la boulimie et de l'hyperphagie boulimique s'il vous plaît ?

  • Speaker #4

    L'anorexie mentale est un trouble des conduites alimentaires où il y a principalement une restriction avec une perte de poids, des préoccupations autour de l'image du corps. corps qui vont avoir des conséquences physiques. Dans la boulimie, les personnes vont souffrir de ce qu'on appelle de crise de boulimie, c'est-à-dire l'absorption extrêmement importante de nourriture dans une quantité très importante, dans une durée très limitée, plus qu'elle ne serait pour d'autres personnes pour absorber les mêmes quantités de nourriture. Dans la boulimie, les personnes ont ce qu'on appelle les stratégies de contrôle de poids, c'est-à-dire qu'elles ne veulent pas prendre du poids, donc elles vont avoir des comportements comme se faire vomir, prendre des médicaments ou faire beaucoup d'activités physiques. Dans l'hyperphagie boulimique, on a les mêmes crises de boulimie, mais sans stratégie de contrôle de poids, ce qui fait que les personnes vont prendre du poids ou être en surpoids. Il faut savoir que dans certaines formes d'anorexie mentale, on peut avoir la restriction qui est prédominante, avec en plus des crises de boulimie qui s'ajoutent, mais avec un poids très bas.

  • Speaker #0

    Vous avez quelques chiffres à nous donner sur les TCA ?

  • Speaker #4

    La difficulté des médecins, c'est qu'ils ont toujours des définitions qui sont variables. Si on s'intéresse au spectre large des TCA, on dit qu'ils peuvent toucher jusqu'à 17% de la population. Et si l'on considère des affections qui sont parmi les plus sévères, ils touchent globalement 5 à 6% de la population, avec l'anorexie mentale qui touche à peu près 1% des jeunes femmes, la boulimie à peu près 1 à 2% des jeunes femmes, l'hyperphagie boulimique 3 à 5% de la population. Alors je parle beaucoup de jeunes femmes pour l'anorexie. et pour la boulimie parce que c'est beaucoup plus fréquent dans les populations féminines. Mais néanmoins, chez les garçons, on observe ces troubles. Une personne sur dix soignée pour anorexie mentale est un garçon. Une personne sur sept soignée pour boulimie est un garçon. Et pour l'hyperphagie boulimique, selon les échantillons, on va de 20% à la moitié des personnes concernées.

  • Speaker #0

    Quels sont les signes d'alerte comportementaux, physiques puis psychologiques ?

  • Speaker #4

    Alors, les signes physiques, il n'y en a pas toujours. Pour les troubles qui sont restrictifs comme l'anorexie mentale, effectivement les personnes perdent du poids et on peut les voir s'amégrir. Pour la boulimie, très souvent il n'y a pas de signe physique et pour l'hyperphagie boulimique, le plus souvent c'est associé avec une prise de poids ou un surpoids. La difficulté, c'est que ces symptômes ne sont pas les premiers que l'on peut observer. Les premières difficultés qu'on peut observer sont souvent des difficultés à... à type de tristesse, de désinvestissement, de difficultés relationnelles avec les autres, parce qu'en fait les personnes qui souffrent de troubles des conduites alimentaires ont du mal déjà à manger en face des autres, ce qui fait qu'elles ont des difficultés dans leur relation sociale. Et puis les personnes qui souffrent de troubles des conduites alimentaires vont se manifester parfois par des comportements qui seront visibles, qui peuvent être des comportements de restriction, l'incapacité à manger de manière adaptée en quantité ou en qualité. ou à l'inverse, se trouver pris par des épisodes qu'on appelle des crises de boulimie ou crises d'hyperphagie, où ils se retrouvent à manger beaucoup. Et ces difficultés alimentaires font qu'ils ont du mal à s'exposer au regard des autres.

  • Speaker #0

    Tout à l'heure, vous nous expliquiez que les hommes et les femmes étaient autant touchés les uns que les autres, mais y a-t-il une tranche d'âge un petit peu plus vulnérable ?

  • Speaker #4

    Alors, les troubles des conduites alimentaires commencent majoritairement pendant l'adolescence et le début de l'âge adulte, puisqu'on dit... Schématiquement, à peu près 75% de ces troubles débutent avant l'âge de 25 ans. Néanmoins, des enfants peuvent être touchés par ces troubles, ou des personnes qui sont d'âge mûr, voire des personnes âgées. Ça peut exister à tout âge.

  • Speaker #0

    Quels sont les risques en matière de santé ?

  • Speaker #4

    Les risques en matière de santé sont de plusieurs ordres. Il y a déjà les conséquences physiques, qui sont liées à l'état nutritionnel qui est induit par les troubles des conduites alimentaires. Donc dans la restriction, ça va être... des problèmes liés à la dénutrition et dans les excès d'apport, ça va être des problèmes liés au surpoids ou à l'obésité. Et ces problèmes touchent tous les organes, donc on peut avoir des complications à tous les niveaux. Et puis en ce qui concerne sur le plan psychologique, souvent ces troubles des conduites alimentaires se compliquent de symptômes anxieux ou de symptômes dépressifs, de mal-être et vont avoir des conséquences et un retentissement social sur l'insertion sociale, des difficultés de relation avec les autres au travers des repas, mais pas que. Des conflits en famille, bien souvent, des difficultés d'insertion à l'école ou des difficultés professionnelles.

  • Speaker #0

    Comment un secouriste en santé mentale peut-il soutenir une personne qui souffre de troubles du comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Je pense que soutenir... C'est déjà peut-être avoir conscience que les repas sont des moments difficiles et peut-être ne pas intervenir à ce moment-là. Mais peut-être intervenir en dehors des repas, quand il s'agit de dire qu'on a vu qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas, d'essayer d'aider et de demander comment on peut aider. Parce que certaines personnes peuvent être aidées, par exemple dans un repas, s'il se sait soutenu par une personne, mais d'autres veulent se sentir agressé. Donc il faut pouvoir différencier les choses. Il faut surtout en parler avec les personnes concernées. Et je vous dis, le meilleur moment, ça n'est pas le moment du repas.

  • Speaker #0

    Et comment fait-on en tant que secouriste pour dissocier quelqu'un qui aurait tendance à faire attention à ce qu'il mange ? Peut-on peut-être parler de régime ? Ou quelqu'un qui a un vrai trouble lié au comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Je dirais que ce n'est pas forcément très simple. Mais de toute façon, les régimes, quand ils sont extrêmes, que ce soit en quantité... ou qu'ils sont exclusifs, ils sont dangereux pour la santé. Donc, qu'on se retrouve face à de vrais troubles des conduites alimentaires ou des conduites restrictives, déjà il faut s'interroger, ou des conduites qui ne sont pas adaptées. L'ensemble des éléments, avec en particulier la souffrance psychique, mais associés aussi à des préoccupations corporelles qui sont généralement déconnectées de la réalité, en particulier dans l'anorexie mentale ou dans les boulimies, où les gens se perçoivent comme démesurément gros ou avec des problèmes physiques. qui n'existent pas sont déjà quelque chose qui doit attirer en fait l'attention. C'est-à-dire ce décalage entre la perception qu'a la personne de sa situation elle-même face à la réalité. Quand c'est combiné par exemple face à quelqu'un qui est très mince, qui dit qu'il veut maigrir et qui va avoir des comportements restrictifs, ben là il faut s'interroger, il faut s'inquiéter. Même chose pour quelqu'un qui est normal et qui souhaite absolument maigrir. Après, pour des personnes qui... présente des troubles des conduites alimentaires, parfois ça va être des signes indirects qu'on va repérer. Et dans un entourage proche, par exemple, des paquets de gâteaux qui disparaissent, des choses qui sont un peu excessives, il faut pouvoir en parler, je dirais, avec délicatesse avec les personnes. Parce que très souvent, ce sont des situations, des choses dont les personnes ont honte, en fait. Et cette honte est quelque chose qui est difficile à dépasser. Et aborder ces questions peut être extrêmement blessant.

  • Speaker #0

    Comment déterminer ? temps si une situation est urgente ?

  • Speaker #4

    Une situation est urgente quand quelqu'un fait des malaises, par exemple. Quand quelqu'un va avoir des comportements dangereux. Et on sait que, par exemple, certaines stratégies pour perdre du poids sont des stratégies dangereuses. Se faire vomir est quelque chose de très dangereux. de pouvoir alerter les personnes elles-mêmes. Mais je crois que la première situation, c'est de voir des gens qui sont fatigués, par exemple, ou des gens qui font des malaises, ou des personnes qui sont effectivement manifestement en grande difficulté, mais qui ne veulent pas en entendre parler, qui ne le reconnaissent pas. Parce que ça veut dire qu'elles ne vont pas chercher d'aide potentielle.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pensez que les écrans et les réseaux sociaux ont un réel impact sur les jeunes filles et sur les troubles de la conduite alimentaire ?

  • Speaker #4

    Il est clair qu'en ce qui concerne l'estime de soi, la perception du schéma corporel, les idéaux qui sont proposés sur les réseaux, ils ont souvent en résonance avec la perception que peut avoir la personne qui souffre de troubles des conditions alimentaires de l'inéquation de son image corporelle avec les attendus de la société. On sait que ces réseaux et toutes les images qui sont véhiculées sur les médias peuvent être des facteurs d'entretien de ces troubles des conditions alimentaires. Des facteurs qui vont être la goutte d'eau qui fait déborder le vase, mais il faut savoir que ces troubles ont des racines beaucoup plus profondes et qu'elles sont liées à des difficultés, souvent émotionnelles, relationnelles, qui préexistent mais qui peuvent être amplifiées par les réseaux.

  • Speaker #0

    Et comment fait-on si une personne ne souhaite pas être aidée ? C'est toujours difficile quand quelqu'un refuse de l'aide. Alors tout dépend du contexte, l'urgence et l'entourage je dirais. C'est-à-dire que si on est face à quelqu'un qui est mineur par exemple, et qui a des adultes autour, je pense que si on a affaire à des jeunes de son âge et qu'on est soi-même mineur, alerter les adultes autour, que ce soit dans l'espace éducatif, ou la famille, ou les parents, pour leur renvoyer quelque chose que l'on perçoit, je pense que c'est très important. Mais toujours en avoir... après en avoir parlé à la personne, bien sûr. Après, quand on se retrouve face à des personnes qui sont adultes et qui ont, j'allais dire, leur autodétermination, je pense que de leur redonner un retour de la perception que l'on a, de l'inquiétude que l'on a, c'est quelque chose d'extrêmement important. Parce que je pense que d'entendre quelqu'un qui se soucie de vous, c'est quelque chose qui ouvre après une possibilité d'entendre les choses, de les écouter et de s'écouter soi-même. Et puis, peut-être qu'à force d'avoir entendu une fois, ou deux ou trois, ce sera peut-être la troisième fois où la personne entendra et pourra prendre l'aide. Et puis, les personnes ne veulent pas entendre, mais on peut leur donner quelques ressources aussi, si elles le souhaitent, et elles peuvent les utiliser plus tard.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Nathalie Godard. Vous l'avez compris dans cet épisode, on a été, on est, ou on sera peut-être tous concernés un jour par un proche qui ne va pas bien. Si vous êtes dans cette situation, vous pouvez vous appuyer sur ces ressources. Le carnet du secouriste en santé mentale, mieux comprendre les troubles du comportement alimentaire. Il est disponible en téléchargement gratuit sur le site de PSSM France. Vous pouvez également vous rendre sur le site de la Fédération Nationale des Associations liées aux troubles des conduites alimentaires, la FNA, TCA, pour trouver une association de patients et de proches dans votre région. Et enfin, vous pouvez écouter l'émission Quoi de neuf, docteur ? sur France Inter. Elle se penche sur le sujet des TCA dans un épisode intitulé Comment surmonter les troubles des comportements alimentaires L'émission est disponible gratuitement, en podcast, sur les plateformes d'écoute et sur le site de France Inter. En plus de ces ressources, sachez que venir en aide à quelqu'un atteint de troubles du comportement alimentaire, ça s'apprend. Sans pour autant se substituer au professionnel, sans pour autant devenir un soignant. Comment offrir son soutien ? Quelles sont les choses à éviter de dire ? Et au contraire, les bonnes pratiques, les bons mots à avoir. Quelles sont les ressources et les professionnels vers qui orienter ? Voici autant d'éléments qui sont abordés lors de la formation des premiers secours en santé mentale. Nous avons tous un rôle à jouer en tant que secouristes en santé mentale. Alors vous aussi, rejoignez cette démarche citoyenne et apprenez à aider en vous formant aux premiers secours en santé mentale. Pour cela, rien de plus simple. Rendez-vous sur le site de PSSM. C'était Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale. Si vous avez aimé cet épisode, laissez-nous un commentaire ou un like sur votre plateforme d'écoute. Rendez-vous dans un mois pour votre prochain épisode. Apprendre à aider est un podcast PSSM France, produit par Plus de Sens. Ce podcast a été rendu possible grâce au Self-Esteem Club d'Herborian, partenaire de PSSM France. Présentation, Oriana Dobrometz. Direction éditoriale, Stéphanie Rojdix et Oriana Dobrometz. Direction de la production, Nicolas Pinault

Chapters

  • Avertissement

    00:00

  • Présentation du podcast Apprendre à aider

    00:25

  • Générique

    01:01

  • Introduction aux troubles des conduites alimentaires

    01:48

  • Témoignages de Katia et Candice

    03:31

  • Interview de la Professeure Nathalie Godart (psychiatre)

    19:27

  • Ressources pour en savoir plus sur les TCA

    30:40

  • Conclusion

    31:31

  • Générique de fin d'Apprendre à aider

    32:09

Description

Comment aider une personne en souffrance psychique ? Que faut-il dire ou ne pas dire ?
Comment repère-t-on un trouble ? Autant de questions abordées dans Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale.
Les personnes qui souffrent d’un trouble du comportement alimentaire – ou trouble des conduites alimentaires – ou TCA, ont une relation à la nourriture qu’on qualifie de dysfonctionnelle.
Il existe trois types de TCA : l’anorexie mentale, la boulimie et l’hyperphagie boulimique.

Au-delà du rapport compliqué à l’alimentation, les personnes concernées par un trouble du comportement alimentaire peuvent également éprouver une grande souffrance psychique et des difficultés comportementales liées à leur poids. Lorsque ces troubles s’installent, ils peuvent avoir de sérieuses répercussions sur la santé mentale mais aussi physique.

Dans cet épisode, vous pourrez écouter le témoignage de Katia et de Candice. Katia, secouriste en santé mentale et mère de Candice, nous raconte comment elle a décelé les TCA de Candice et comment elle a accompagné et continue d’accompagner sa fille. Quant à Candice, elle nous livre son expérience, ses ressentis, comment elle vit et subit ces troubles au quotidien et toute l’ambivalence des sentiments qui l’envahissent.

NB : Dans cet épisode, Candice parle de « se faire interner » lorsque son père suggère une prise en charge à l’hôpital. Chez PSSM, nous recommandons à nos secouristes d’utiliser plutôt l’expression « hospitalisation faite à la demande d’un tiers ». 😊

Dans cet épisode, vous entendrez également Nathalie Godart, professeure à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines et membre de la Fédération Française Anorexie Boulimie. Les TCA touchent jusqu’à 17 % de la population, soit près d’une personne sur cinq. 1 à 2 % des jeunes femmes souffrent de boulimie mais 20 à 50% des patients soignés pour de l’hyperphagie boulimique sont des garçons.

Vous souhaitez en savoir plus sur les TCA ? Voici quelques ressources :

Cette liste n'est pas exhaustive, vous pouvez la compléter et faire vos suggestions en commentaires.

Bonne écoute ! 🎧
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Ce podcast a été rendu possible grâce au Self-Esteem Club d'Erborian, partenaire de PSSM France.
Présentation : Oriana Dobremetz
Générique : ATS Studios
Direction éditoriale : Stéphanie Rochedix et Oriana Dobremetz
Direction de la production : Nicolas Pineau.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce podcast parle de troubles en santé mentale et de situations réellement vécues. Les témoignages que vous allez entendre peuvent heurter la sensibilité de certaines personnes. Si vous êtes en détresse psychique ou avez des pensées suicidaires, si vous pensez qu'une personne de votre entourage est en situation de crise, vous devez contacter le 112, le 15, le 18 ou le 3114, le numéro national de prévention du suicide. C'est l'histoire de Julie qui a fait une tentative de suicide, de Pierre qui boit trop. C'est aussi l'histoire de Nathalie qui rêve chaque nuit de son accident de voiture. Vous aussi vous connaissez peut-être quelqu'un qui est concerné par un problème de santé mentale. Chez PSSM, Premier Secours en Santé Mentale, nous sommes convaincus qu'engager une conversation peut tout changer. Je m'appelle Oriana et je vous souhaite la bienvenue dans cette discussion où se mêlent témoignages, histoires de vie et conseils pour tous ensemble briser les tabous autour des troubles psychiques. Vous écoutez Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale.

  • Speaker #1

    T'as un problème ? L'association d'idées c'est t'es fou, t'es folle, y'a quelque chose qui va pas chez toi, t'es dysfonctionnel en fait.

  • Speaker #2

    Nos capacités de résilience sont débordées. J'étais pas forcément bien dans ma peau et tout ça a fait que j'étais vraiment vraiment mal et qu'au lycée je faisais plus rien.

  • Speaker #0

    La personne qu'il avait eue au bout du fil lui avait conseillé de poser directement la question à sa compagne si elle avait l'intention de mettre fin à ses jours.

  • Speaker #1

    On sort de la formation déjà avec des nouveaux outils, ça donne un cadre, c'est sécurisant parce qu'on se dit qu'on ne va pas faire n'importe quoi justement parce qu'on sait qu'on va trouver les bons mots la bonne manière.

  • Speaker #0

    Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale. Un trouble des conduites alimentaires, également appelé trouble du comportement alimentaire ou TCA, se définit comme une pratique alimentaire dans laquelle la relation à la nourriture est dysfonctionnelle. Au-delà du rapport à l'alimentation, la personne concernée par un TCA peut également éprouver une grande souffrance psychique et des difficultés comportementales en lien avec son poids. Ces souffrances concernent plus généralement l'apparence corporelle et l'activité physique. Les relations à autrui, et plus généralement le quotidien, s'en trouvent fortement impactées. Lorsque ces troubles s'installent dans la durée, ils peuvent avoir de sérieuses répercussions sur la santé mentale et physique, mais aussi sur le fonctionnement psychosocial et la qualité de vie de la personne concernée. On distingue trois types de TCA, l'anorexie mentale, la boulimie et l'hyperphagie boulimique. Si le genre féminin a une plus grande propension à développer ce type de trouble, le TCA peut néanmoins se déclarer chez tout un chacun, indépendamment de l'âge, de la culture, du statut socio-économique ou encore du statut pondéral. Les personnes souffrant d'un TCA présentent par ailleurs un plus grand risque de développer une autre comorbidité psychique, comme par exemple la dépression, voire de passer à l'acte. Bien que la prévalence de ces troubles soit difficile à estimer précisément, de récentes études estiment que 4 à 9% de la population mondiale pourrait souffrir d'un TCA. En France, c'est près d'un million de personnes qui seraient concernées. La formation PSSM donne des points de repère permettant de reconnaître les signes d'alerte associée à ces troubles complexes et la façon d'appréhender la personne concernée. Elle permet également de s'informer sur les ressources utiles et les services dédiés à la prise en charge de ce type de trouble. Aujourd'hui, nous accueillons au micro d'Apprendre à aider un duo mère-fille. Bonjour Katia.

  • Speaker #3

    Bonjour Oriana.

  • Speaker #0

    Vous êtes secouriste depuis 2022. Merci d'être à notre micro. Bonjour Candice.

  • Speaker #2

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Katia, est-ce que vous voulez bien nous expliquer de quelle façon vous avez... Portez secours à votre fille et dans quelle situation ?

  • Speaker #3

    Oui, Candice présentait des troubles alimentaires, avec des périodes où elle mangeait énormément et d'autres périodes où elle s'alimentait assez peu. C'est passé relativement inaperçu dans les premiers temps et il y a eu vraiment une aggravation de ce comportement-là. Et qui nous a vraiment inquiété avec mon mari, donc je dirais moi plutôt l'année dernière. Et avec une perte de poids importante, mon mari avait un discours qui était très à la sollicité pour qu'elle mange, et moi je lui disais, ben non, laisse-la, elle cherchera, on surveille. Donc on a commencé à parler, on a dit de toute façon au pire on l'hospitalisera. Finalement, forte aussi de la formation de premier score en santé mentale, j'en ai parlé à Candice en lui disant bon ben voilà, on est inquiet pour ta perte de poids et le seul moyen pour nous de nous rassurer c'est que tu ailles voir le médecin et que tu puisses faire une prise de sang et qu'on puisse voir ce qu'il en est, que tu puisses être accompagné à ce niveau-là. Pas forcément de gaieté de cœur, mais elle a fini par accepter. Et effectivement, elle a été suivie par le médecin traitant. Et au mois de juin l'année dernière, elle a sollicité d'avoir un accompagnement par une psychologue. C'était sa demande. Alors on avait déjà proposé en amont, j'avais proposé en amont plusieurs options. Bon, ce n'était pas adapté dans un premier temps. Et puis c'est elle qui s'est emparée de la solution psychologue. Donc elle avait un duo pour l'accompagner, médecin traitant et psychologue. Et au mois de juillet 2023, elle est revenue d'un rendez-vous avec le médecin traitant sur mon lieu de travail en disant Maman, en fait, il parle de m'hospitaliser, il me menace de m'hospitaliser et je ne veux pas. Donc à partir de là, on a commencé à réfléchir ensemble, à savoir comment je pouvais l'accompagner, ce qu'on pouvait mettre en place, quelles solutions. Et on a avancé comme ça progressivement toutes les deux au fur et à mesure un petit peu de ce qu'elle acceptait de mettre en place.

  • Speaker #0

    Et vous Candice, comment vous avez reçu l'aide de vos parents et plus particulièrement celle de votre mère ?

  • Speaker #2

    Au début j'avais totalement refusé l'aide parce que j'étais pas vraiment dans le déni mais j'étais dans le refus d'accepter qu'on puisse m'aider. Et j'étais dans la perception de... pouvoir m'aider seule.

  • Speaker #0

    Vous aviez conscience, Candice, d'avoir un trouble au comportement alimentaire ?

  • Speaker #2

    Oui, j'en avais totalement conscience, mais je n'avais pas encore mis de mots dessus avant un petit moment.

  • Speaker #0

    Comment cela se traduisait ?

  • Speaker #2

    Ça se traduisait souvent par une perte d'appétit, voire des nausées lors de, soit de la vue, soit de l'odeur de la nourriture. Et même quand je me forçais à manger, surtout quand je me forçais à en manger, j'arrivais pas à en prendre en grosse quantité du moins, enfin en grosse quantité dans les périodes où je mangeais pas beaucoup, voire pas du tout. C'est vraiment à ce moment-là où je me suis rendue compte que j'avais un problème, parce que c'est quand on prend ne serait-ce qu'une bouchée et que ça nous donne la nausée, une envie... de vomir comme pas possible, c'est pas gérable et c'est ça ce qui m'a provoqué le fait de ne pas manger du tout. C'est pour éviter ça et quand je commençais à avoir faim, donc dans le cas contraire, j'avais l'impression que j'arrivais à jamais à combler cette faim et que mon ventre c'était comme un trou noir c'est sa rentrée mais ça c'est comme si j'avais rien mangé mais si vous n'aviez jamais l'impression d'être rassasié oui c'est ça c'est assez particulier comme sensation et ça a été une fois jusque on va dire au point Grave des TCA, c'est-à-dire d'en vomir. Ça m'est arrivé très très peu de fois, mais ça m'est déjà arrivé et c'est quand même assez marquant quand ça arrive. Après je sais que ça aussi c'était accompagné, c'était la vision du physique, c'était soit je me trouvais aussi trop grosse, soit trop maigre, et ça accentuait un peu cet effet-là. C'est assez particulier quand on se regarde dans un miroir qu'on n'a pas changé. Mais du jour au lendemain, on se trouve soit trop grosse, soit trop maigre. Alors que ce n'est pas forcément le cas, on est totalement normal, mais c'est cette sensation de la vision qu'on se fait de notre corps à ce moment-là.

  • Speaker #0

    Quand votre maman est venue vers vous et qu'elle a commencé à aborder le sujet, quelle a été votre réaction ? Est-ce qu'en un premier temps, vous avez commencé par la rejeter ? Ou est-ce que vous avez écouté ce qu'elle avait à vous proposer ?

  • Speaker #2

    Tout début, j'avais plutôt refusé de l'écouter. Mais au fur et à mesure, j'ai décidé de l'écouter et j'ai entendu sa parole. Et comme elle a pu le dire, j'ai accepté de l'aide à contre-cœur. Mais je voulais aussi ne pas voir mes parents souffrir de ma souffrance.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est ça qui vous a décidé à... A vous faire aider ?

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #0

    Vous n'aviez pas conscience, vous, d'être en danger ?

  • Speaker #2

    Si, mais pour être honnête, je me fichais un peu d'être en danger. Même si j'en avais conscience, pour moi, ce n'était pas nécessaire d'être accompagnée.

  • Speaker #0

    Et dans les ressources que votre maman vous a proposées, est-ce qu'il y en a une qui vous a plus particulièrement convaincue ?

  • Speaker #2

    J'étais plus convaincue par le médecin traitant, parce que c'est... C'est une personne que je connais depuis très longtemps, c'est un médecin de famille. Donc ils connaissaient déjà l'histoire de ma sœur, qui a été aussi assez compliquée, et du coup je me suis dit, pourquoi pas tenter. Et aussi avec les menaces de mon père de vouloir m'interner, ça m'a fait me dire, je préfère ça à être internée.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez dire aujourd'hui, Candice, que vous avez quand même le sentiment que l'intervention de votre mère, ou plutôt de la secouriste en santé mentale, vous a aidé avec le recul que vous avez ?

  • Speaker #2

    Je peux dire que ça m'a aidée du moins d'en avoir parlé et j'avance petit à petit et ça va mieux, enfin de mieux en mieux.

  • Speaker #0

    Justement comment vous allez Candice aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    C'est toujours compliqué de temps en temps mais c'est mieux qu'avant. Et je pense que ça va continuer à s'améliorer.

  • Speaker #0

    Je vous le souhaite. Est-ce que vous continuez à avoir des professionnels de santé ? Oui. Quel type de professionnels ?

  • Speaker #2

    Je suis sous suivi psychologique et j'ai eu un suivi psychiatrique. Et j'ai pu l'arrêter récemment pour retourner dans un autre suivi psychologique, mais spécialisé dans le traumatisme.

  • Speaker #0

    Katia, avec le recul et sur la base de l'expérience que vous venez de nous raconter toutes les deux, est-ce qu'il y a quelque chose que vous feriez différemment ?

  • Speaker #3

    Dans ma façon d'aborder les choses, je pense que la formation a été vraiment d'un grand secours parce qu'avec cette dimension affective, je n'avais pas forcément suffisamment de recul en tant que maman. Et vraiment, d'avoir eu cette formation, ça a été un soutien, ça m'a permis de... de poser les choses avec plus de distance, de façon plus objective aussi, et de pouvoir faire des propositions à des moments adaptés, et avec le consentement de Candice, tout en ayant un objectif vraiment d'aller vers le mieux. Et vraiment ça a été, je ne sais pas si sans cette formation, je ne pense pas que j'aurais pu faire cet accompagnement-là.

  • Speaker #0

    On se disait tout à l'heure que le secouriste, ce n'est pas vraiment un super héros, ni même un soignant. Et des fois, cela fonctionne, des fois un petit peu moins. Vous m'expliquiez que vous aviez fait des propositions à Candice, qu'au départ, elle avait refusé en bloc.

  • Speaker #3

    Oui.

  • Speaker #0

    Lesquelles ?

  • Speaker #3

    Alors, la proposition de départ, ça a été plutôt de faire du moment du repas quelque chose de ludique. Ça n'avait pas du tout marché. L'accompagnement médical, bon, elle n'envoyait pas forcément l'intérêt non plus au départ. Je lui avais proposé la psychologue, je lui ai proposé un certain nombre de choses, même d'aller au restaurant à des moments un peu plus festifs, mais toujours autour de la nourriture. Et puis je me suis dit, à force de lui proposer des choses, en fait, il faut que je lâche. Il faut que j'arrête de vouloir absolument la faire manger. Et que je joue plutôt le rôle de la confiance, en fait. De lui dire, bon, d'accepter que ce ne soit pas son moment, même si j'avais très envie de l'accompagner et qu'elle aille mieux. Que ce ne soit pas son moment à elle et de respecter ça aussi. Plutôt que ce soit vraiment mon envie de maman et d'aller au-delà des possibles du moment, en fait.

  • Speaker #0

    Et vous, Candice, vous avez senti la différence quand votre mère mettait sa casquette de secouriste ? ou le discours vous semblait sensiblement le même ?

  • Speaker #2

    J'ai vu une différence, mais je ne savais pas trop à quoi c'était dû à ce moment-là. Pour moi, c'était plus le fait qu'elle avait lâché l'affaire et que je pouvais être enfin tranquille. Mais au final, j'ai vu que ça l'affectait quand même beaucoup, et je me suis rendue compte de tout ça. Et ça m'a permis, on va dire, de prendre conscience de l'impact que ma santé pouvait avoir sur les autres.

  • Speaker #0

    Et sur vous ?

  • Speaker #2

    Évidemment, oui.

  • Speaker #0

    Vous en aviez conscience à ce moment-là ?

  • Speaker #2

    J'ai jamais été dans le déni pour ma santé, j'étais toujours très consciente de ce qui se passait, et c'est juste que je ne voulais pas être aidée. Pendant un moment, je voulais juste, je ne sais pas pourquoi, mais je voulais juste être dans le mal. Et au final, quand on atteint un point de, on va dire, non-retour, entre guillemets, il y a toujours un retour. Quand on se rend compte de... Du puits sans fond dans lequel on peut s'enfoncer et que d'un coup on a un espoir, une petite lueur qui apparaît. On a juste envie de la saisir et de sortir de ce trou.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que la formation PSSM vous a apporté, Katia ?

  • Speaker #3

    Alors c'est ce que je disais, vraiment, c'est des outils, des ressources. Un soutien important dans l'accompagnement, parce que c'est aussi mon métier. d'accompagner les gens. Et ça a été vraiment salvateur dans le cas de mon expérience avec Candice, parce qu'il y avait cette dimension affective. Donc de pouvoir avoir un outil, des ressources, un fil conducteur, un fil rouge auquel se raccrocher, ça a été essentiel dans ces moments-là.

  • Speaker #0

    Vous aviez une méthode, une méthodologie.

  • Speaker #3

    Exactement, c'est exactement ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que cette formation a changé votre regard sur les troubles psychiques ?

  • Speaker #3

    Alors oui, en partie. Je pense qu'on a tous, à un moment ou à un autre, une part de vulnérabilité. On peut basculer, du jour au lendemain, sur quelque chose, je ne sais pas pourquoi, un déclencheur, peu importe. Je pense que la période Covid a bien accentué ce phénomène-là. Et on n'est pas au bout de nos surprises non plus. Tout le monde ne va pas décompenser à la même vitesse, à la même façon, mais ça a été une période très compliquée. Et je pense qu'effectivement, on a tous en nous peut-être une part de vulnérabilité à un moment donné, quand c'est trop, quand il y a un cumul. Et on peut effectivement basculer sur un élément déclencheur, peu importe. Donc oui, je pense que... Dans ce sens-là, on peut être soumis à la dépression, à des troubles psychiques à un moment donné de notre vie.

  • Speaker #0

    Vous connaissiez les TCA, les troubles du comportement ou des conduites alimentaires ?

  • Speaker #3

    Alors oui, mais je n'avais pas identifié ça chez ma fille dans un premier temps. Je connaissais parce que j'avais un ami qui était anorexique et vraiment très poussé, effectivement. Mais je n'avais pas du tout cette vision-là avant la formation.

  • Speaker #0

    Katia, est-ce que vous conseilleriez cette formation ?

  • Speaker #3

    Vivement ! Je pense qu'elle est pleine de sens pour tous les parents, déjà. Surtout au moment de l'adolescence, qui est une période où il y a beaucoup de vulnérabilité et de fragilité. Et je pense que ça peut être un très très bon soutien.

  • Speaker #0

    Katia, comment en êtes-vous arrivée à cette formation ? Est-ce que c'était dans un contexte professionnel ou personnel ? Est-ce que c'est parce que vous aviez décelé chez Candice un trouble ?

  • Speaker #3

    Alors à ce moment-là, non, je n'avais pas décelé le trouble chez Candice parce que j'avais effectivement conscience qu'elle avait des difficultés avec l'alimentation, mais je n'avais pas décelé ça en tant que telle. Par contre, j'avais rencontré avec ma fille aînée une problématique sur l'automutilation. Et je me suis trouvée effectivement très démunie à ce moment-là. Et en tant que maman, je me suis dit, c'est pas possible, trois enfants, trois ados, il faut que je trouve des outils, il faut que je trouve quelque chose pour pouvoir accompagner mes enfants, puis moi aussi par la même occasion. Donc j'ai cherché un petit peu ce que je pouvais avoir comme ressource. Et c'est vrai que j'ai pris connaissance de cette formation et je me suis dit, tiens, voilà, ça prenait. pas forcément beaucoup de temps et en même temps c'est tellement riche ces deux jours que c'était vraiment la formation qu'il me fallait pour accompagner ça m'a permis effectivement de pouvoir conscientiser je pense aussi la problématique de Candice derrière que je n'aurais pas forcément conscientisé autant.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup Katia, merci beaucoup Candice pour votre témoignage en duo très enrichissant et très émouvant à notre micro d'Apprendre à Aider Merci à vous. Nathalie Godard, bonjour.

  • Speaker #3

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Vous êtes professeure des universités en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines. Vous êtes également praticienne hospitalière à la Fondation Santé des étudiants de France. Et vous êtes membre de la Fédération française anorexie-boulimie. Aujourd'hui nous allons parler ensemble des TCA et justement qu'est-ce qu'un trouble des conduites alimentaires et dit-on trouble des conduites alimentaires ou trouble du comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Alors on dit les deux en fait. Historiquement on disait trouble des comportements alimentaires et aujourd'hui on dit trouble de la conduite alimentaire, ce qui sous-tend derrière quelque chose au niveau de l'idée et des émotions qui conduisent à se comporter comme cela.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que c'est plus précisément ?

  • Speaker #4

    Alors un trouble des conduites alimentaires, c'est un trouble psychiatrique, des difficultés psychologiques, qui vont se manifester au premier plan par des perturbations du comportement alimentaire. Ce peut être une restriction. Un excès d'alimentation, associé ou non à des comportements pour maintenir son poids. Vous avez des troubles tels que l'anorexie mentale, la boulimie, l'hyperphagie boulimique ou les troubles d'évitement et de restriction d'alimentation.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous aider à différencier l'anorexie mentale de la boulimie et de l'hyperphagie boulimique s'il vous plaît ?

  • Speaker #4

    L'anorexie mentale est un trouble des conduites alimentaires où il y a principalement une restriction avec une perte de poids, des préoccupations autour de l'image du corps. corps qui vont avoir des conséquences physiques. Dans la boulimie, les personnes vont souffrir de ce qu'on appelle de crise de boulimie, c'est-à-dire l'absorption extrêmement importante de nourriture dans une quantité très importante, dans une durée très limitée, plus qu'elle ne serait pour d'autres personnes pour absorber les mêmes quantités de nourriture. Dans la boulimie, les personnes ont ce qu'on appelle les stratégies de contrôle de poids, c'est-à-dire qu'elles ne veulent pas prendre du poids, donc elles vont avoir des comportements comme se faire vomir, prendre des médicaments ou faire beaucoup d'activités physiques. Dans l'hyperphagie boulimique, on a les mêmes crises de boulimie, mais sans stratégie de contrôle de poids, ce qui fait que les personnes vont prendre du poids ou être en surpoids. Il faut savoir que dans certaines formes d'anorexie mentale, on peut avoir la restriction qui est prédominante, avec en plus des crises de boulimie qui s'ajoutent, mais avec un poids très bas.

  • Speaker #0

    Vous avez quelques chiffres à nous donner sur les TCA ?

  • Speaker #4

    La difficulté des médecins, c'est qu'ils ont toujours des définitions qui sont variables. Si on s'intéresse au spectre large des TCA, on dit qu'ils peuvent toucher jusqu'à 17% de la population. Et si l'on considère des affections qui sont parmi les plus sévères, ils touchent globalement 5 à 6% de la population, avec l'anorexie mentale qui touche à peu près 1% des jeunes femmes, la boulimie à peu près 1 à 2% des jeunes femmes, l'hyperphagie boulimique 3 à 5% de la population. Alors je parle beaucoup de jeunes femmes pour l'anorexie. et pour la boulimie parce que c'est beaucoup plus fréquent dans les populations féminines. Mais néanmoins, chez les garçons, on observe ces troubles. Une personne sur dix soignée pour anorexie mentale est un garçon. Une personne sur sept soignée pour boulimie est un garçon. Et pour l'hyperphagie boulimique, selon les échantillons, on va de 20% à la moitié des personnes concernées.

  • Speaker #0

    Quels sont les signes d'alerte comportementaux, physiques puis psychologiques ?

  • Speaker #4

    Alors, les signes physiques, il n'y en a pas toujours. Pour les troubles qui sont restrictifs comme l'anorexie mentale, effectivement les personnes perdent du poids et on peut les voir s'amégrir. Pour la boulimie, très souvent il n'y a pas de signe physique et pour l'hyperphagie boulimique, le plus souvent c'est associé avec une prise de poids ou un surpoids. La difficulté, c'est que ces symptômes ne sont pas les premiers que l'on peut observer. Les premières difficultés qu'on peut observer sont souvent des difficultés à... à type de tristesse, de désinvestissement, de difficultés relationnelles avec les autres, parce qu'en fait les personnes qui souffrent de troubles des conduites alimentaires ont du mal déjà à manger en face des autres, ce qui fait qu'elles ont des difficultés dans leur relation sociale. Et puis les personnes qui souffrent de troubles des conduites alimentaires vont se manifester parfois par des comportements qui seront visibles, qui peuvent être des comportements de restriction, l'incapacité à manger de manière adaptée en quantité ou en qualité. ou à l'inverse, se trouver pris par des épisodes qu'on appelle des crises de boulimie ou crises d'hyperphagie, où ils se retrouvent à manger beaucoup. Et ces difficultés alimentaires font qu'ils ont du mal à s'exposer au regard des autres.

  • Speaker #0

    Tout à l'heure, vous nous expliquiez que les hommes et les femmes étaient autant touchés les uns que les autres, mais y a-t-il une tranche d'âge un petit peu plus vulnérable ?

  • Speaker #4

    Alors, les troubles des conduites alimentaires commencent majoritairement pendant l'adolescence et le début de l'âge adulte, puisqu'on dit... Schématiquement, à peu près 75% de ces troubles débutent avant l'âge de 25 ans. Néanmoins, des enfants peuvent être touchés par ces troubles, ou des personnes qui sont d'âge mûr, voire des personnes âgées. Ça peut exister à tout âge.

  • Speaker #0

    Quels sont les risques en matière de santé ?

  • Speaker #4

    Les risques en matière de santé sont de plusieurs ordres. Il y a déjà les conséquences physiques, qui sont liées à l'état nutritionnel qui est induit par les troubles des conduites alimentaires. Donc dans la restriction, ça va être... des problèmes liés à la dénutrition et dans les excès d'apport, ça va être des problèmes liés au surpoids ou à l'obésité. Et ces problèmes touchent tous les organes, donc on peut avoir des complications à tous les niveaux. Et puis en ce qui concerne sur le plan psychologique, souvent ces troubles des conduites alimentaires se compliquent de symptômes anxieux ou de symptômes dépressifs, de mal-être et vont avoir des conséquences et un retentissement social sur l'insertion sociale, des difficultés de relation avec les autres au travers des repas, mais pas que. Des conflits en famille, bien souvent, des difficultés d'insertion à l'école ou des difficultés professionnelles.

  • Speaker #0

    Comment un secouriste en santé mentale peut-il soutenir une personne qui souffre de troubles du comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Je pense que soutenir... C'est déjà peut-être avoir conscience que les repas sont des moments difficiles et peut-être ne pas intervenir à ce moment-là. Mais peut-être intervenir en dehors des repas, quand il s'agit de dire qu'on a vu qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas, d'essayer d'aider et de demander comment on peut aider. Parce que certaines personnes peuvent être aidées, par exemple dans un repas, s'il se sait soutenu par une personne, mais d'autres veulent se sentir agressé. Donc il faut pouvoir différencier les choses. Il faut surtout en parler avec les personnes concernées. Et je vous dis, le meilleur moment, ça n'est pas le moment du repas.

  • Speaker #0

    Et comment fait-on en tant que secouriste pour dissocier quelqu'un qui aurait tendance à faire attention à ce qu'il mange ? Peut-on peut-être parler de régime ? Ou quelqu'un qui a un vrai trouble lié au comportement alimentaire ?

  • Speaker #4

    Je dirais que ce n'est pas forcément très simple. Mais de toute façon, les régimes, quand ils sont extrêmes, que ce soit en quantité... ou qu'ils sont exclusifs, ils sont dangereux pour la santé. Donc, qu'on se retrouve face à de vrais troubles des conduites alimentaires ou des conduites restrictives, déjà il faut s'interroger, ou des conduites qui ne sont pas adaptées. L'ensemble des éléments, avec en particulier la souffrance psychique, mais associés aussi à des préoccupations corporelles qui sont généralement déconnectées de la réalité, en particulier dans l'anorexie mentale ou dans les boulimies, où les gens se perçoivent comme démesurément gros ou avec des problèmes physiques. qui n'existent pas sont déjà quelque chose qui doit attirer en fait l'attention. C'est-à-dire ce décalage entre la perception qu'a la personne de sa situation elle-même face à la réalité. Quand c'est combiné par exemple face à quelqu'un qui est très mince, qui dit qu'il veut maigrir et qui va avoir des comportements restrictifs, ben là il faut s'interroger, il faut s'inquiéter. Même chose pour quelqu'un qui est normal et qui souhaite absolument maigrir. Après, pour des personnes qui... présente des troubles des conduites alimentaires, parfois ça va être des signes indirects qu'on va repérer. Et dans un entourage proche, par exemple, des paquets de gâteaux qui disparaissent, des choses qui sont un peu excessives, il faut pouvoir en parler, je dirais, avec délicatesse avec les personnes. Parce que très souvent, ce sont des situations, des choses dont les personnes ont honte, en fait. Et cette honte est quelque chose qui est difficile à dépasser. Et aborder ces questions peut être extrêmement blessant.

  • Speaker #0

    Comment déterminer ? temps si une situation est urgente ?

  • Speaker #4

    Une situation est urgente quand quelqu'un fait des malaises, par exemple. Quand quelqu'un va avoir des comportements dangereux. Et on sait que, par exemple, certaines stratégies pour perdre du poids sont des stratégies dangereuses. Se faire vomir est quelque chose de très dangereux. de pouvoir alerter les personnes elles-mêmes. Mais je crois que la première situation, c'est de voir des gens qui sont fatigués, par exemple, ou des gens qui font des malaises, ou des personnes qui sont effectivement manifestement en grande difficulté, mais qui ne veulent pas en entendre parler, qui ne le reconnaissent pas. Parce que ça veut dire qu'elles ne vont pas chercher d'aide potentielle.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pensez que les écrans et les réseaux sociaux ont un réel impact sur les jeunes filles et sur les troubles de la conduite alimentaire ?

  • Speaker #4

    Il est clair qu'en ce qui concerne l'estime de soi, la perception du schéma corporel, les idéaux qui sont proposés sur les réseaux, ils ont souvent en résonance avec la perception que peut avoir la personne qui souffre de troubles des conditions alimentaires de l'inéquation de son image corporelle avec les attendus de la société. On sait que ces réseaux et toutes les images qui sont véhiculées sur les médias peuvent être des facteurs d'entretien de ces troubles des conditions alimentaires. Des facteurs qui vont être la goutte d'eau qui fait déborder le vase, mais il faut savoir que ces troubles ont des racines beaucoup plus profondes et qu'elles sont liées à des difficultés, souvent émotionnelles, relationnelles, qui préexistent mais qui peuvent être amplifiées par les réseaux.

  • Speaker #0

    Et comment fait-on si une personne ne souhaite pas être aidée ? C'est toujours difficile quand quelqu'un refuse de l'aide. Alors tout dépend du contexte, l'urgence et l'entourage je dirais. C'est-à-dire que si on est face à quelqu'un qui est mineur par exemple, et qui a des adultes autour, je pense que si on a affaire à des jeunes de son âge et qu'on est soi-même mineur, alerter les adultes autour, que ce soit dans l'espace éducatif, ou la famille, ou les parents, pour leur renvoyer quelque chose que l'on perçoit, je pense que c'est très important. Mais toujours en avoir... après en avoir parlé à la personne, bien sûr. Après, quand on se retrouve face à des personnes qui sont adultes et qui ont, j'allais dire, leur autodétermination, je pense que de leur redonner un retour de la perception que l'on a, de l'inquiétude que l'on a, c'est quelque chose d'extrêmement important. Parce que je pense que d'entendre quelqu'un qui se soucie de vous, c'est quelque chose qui ouvre après une possibilité d'entendre les choses, de les écouter et de s'écouter soi-même. Et puis, peut-être qu'à force d'avoir entendu une fois, ou deux ou trois, ce sera peut-être la troisième fois où la personne entendra et pourra prendre l'aide. Et puis, les personnes ne veulent pas entendre, mais on peut leur donner quelques ressources aussi, si elles le souhaitent, et elles peuvent les utiliser plus tard.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Nathalie Godard. Vous l'avez compris dans cet épisode, on a été, on est, ou on sera peut-être tous concernés un jour par un proche qui ne va pas bien. Si vous êtes dans cette situation, vous pouvez vous appuyer sur ces ressources. Le carnet du secouriste en santé mentale, mieux comprendre les troubles du comportement alimentaire. Il est disponible en téléchargement gratuit sur le site de PSSM France. Vous pouvez également vous rendre sur le site de la Fédération Nationale des Associations liées aux troubles des conduites alimentaires, la FNA, TCA, pour trouver une association de patients et de proches dans votre région. Et enfin, vous pouvez écouter l'émission Quoi de neuf, docteur ? sur France Inter. Elle se penche sur le sujet des TCA dans un épisode intitulé Comment surmonter les troubles des comportements alimentaires L'émission est disponible gratuitement, en podcast, sur les plateformes d'écoute et sur le site de France Inter. En plus de ces ressources, sachez que venir en aide à quelqu'un atteint de troubles du comportement alimentaire, ça s'apprend. Sans pour autant se substituer au professionnel, sans pour autant devenir un soignant. Comment offrir son soutien ? Quelles sont les choses à éviter de dire ? Et au contraire, les bonnes pratiques, les bons mots à avoir. Quelles sont les ressources et les professionnels vers qui orienter ? Voici autant d'éléments qui sont abordés lors de la formation des premiers secours en santé mentale. Nous avons tous un rôle à jouer en tant que secouristes en santé mentale. Alors vous aussi, rejoignez cette démarche citoyenne et apprenez à aider en vous formant aux premiers secours en santé mentale. Pour cela, rien de plus simple. Rendez-vous sur le site de PSSM. C'était Apprendre à aider, le podcast sur le secourisme en santé mentale. Si vous avez aimé cet épisode, laissez-nous un commentaire ou un like sur votre plateforme d'écoute. Rendez-vous dans un mois pour votre prochain épisode. Apprendre à aider est un podcast PSSM France, produit par Plus de Sens. Ce podcast a été rendu possible grâce au Self-Esteem Club d'Herborian, partenaire de PSSM France. Présentation, Oriana Dobrometz. Direction éditoriale, Stéphanie Rojdix et Oriana Dobrometz. Direction de la production, Nicolas Pinault

Chapters

  • Avertissement

    00:00

  • Présentation du podcast Apprendre à aider

    00:25

  • Générique

    01:01

  • Introduction aux troubles des conduites alimentaires

    01:48

  • Témoignages de Katia et Candice

    03:31

  • Interview de la Professeure Nathalie Godart (psychiatre)

    19:27

  • Ressources pour en savoir plus sur les TCA

    30:40

  • Conclusion

    31:31

  • Générique de fin d'Apprendre à aider

    32:09

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