Chantal GuillonBonjour et bienvenue dans le podcast ArtEcoVert, le podcast qui vous parle d'art, d'écologie et de verdure. Je suis Pauline Leroux, ingénieure agronome passionnée de plantes, et je vous emmène à la découverte de la couleur végétale et de toutes ses applications. Que ce soit dans le textile, l'ameublement, l'artisanat, la décoration et dans d'autres domaines, chaque jeudi et samedi à 7h30, je vous propose des épisodes riches avec des invités passionnants pour approfondir le sujet de la couleur végétale sur toute la chaîne de Valeur. Mon but, fédérer et démocratiser la couleur végétale dans le monde. Alors c'est parti, bonne écoute ! Alors bonjour à tous, je suis ravie d'accueillir sur le podcast Chantal Guillon. Bonjour Chantal. Bonjour Pauline. Alors Chantal, est-ce que vous pouvez nous raconter votre super parcours, j'ai envie de dire, et comment vous êtes arrivée à la teinture végétale ? Alors, donc je suis Chantal Guillon, je suis née dans une famille franco-suisse où très tôt la nature faisait partie de la vie de famille. J'avais une grand-mère maternelle qui était fascinée par les chapeaux, qui en faisait chez elle, et une grand-mère paternelle qui nous emmenait cueillir plein de plantes pour faire des tisanes qui séchaient dans le grunier. et une maman qui faisait de la couture. Je l'ai toujours vue par terre, découpant des patrons. Avec plaisir, elle m'a amenée au marché Saint-Pierre-en-Paris. Et très tôt, elle m'a appris à couper des jupes. Il y avait la machine à coudre ainsi qu'une machine à tricoter. Et donc, j'ai baigné dans ces deux milieux, la mode et la nature, depuis toute petite. Je pense que ça m'a beaucoup influencée. Après, j'ai fait un petit parcours par la danse. J'ai fait une petite... C'était un petit détour parce que je voulais enseigner la danse. Et finalement, je me suis dirigée vers une école de mode qui était le Studio Berceau. Faisant une réelle phobie scolaire, j'ai très vite quitté le milieu d'apprentissage. classique, et je dois dire qu'au studio Berceau, c'était Marie Rucki, la directrice, qui est une école dans les années 80, et qui reste toujours très actuelle maintenant, qui était la seule école qui prenait en compte la personnalité des étudiants. Et donc, elle regardait ce qu'elle pouvait faire émerger de nous. et très vite on s'est rendu compte toutes les deux, elle et moi, que j'avais un sens des couleurs que pas grand monde avait autour de moi, et que les tissus je les connaissais instinctivement, et que c'était une force que n'avaient pas les autres, alors que dans mes dessins de croquis de mode, j'étais pas spécialement innovatrice. Donc autant aller dans là où j'étais très à l'aise. J'ai pu faire très vite un stage chez Thierry Mugler, qui dans les années 80 était la maison de mode dont tout le monde rêvait, parce que c'était quelqu'un qui avait un fort imaginaire très très important. et tout était possible au niveau des vêtements. C'est lui, dans cette époque, qui a déclenché les épaules très larges. Son univers, c'était les étoiles et l'argent, c'était la galaxie. Il était très inspiré par les bandes dessinées, alors que de l'autre côté, en haute couture, c'était toujours les mêmes choses. Voilà, donc c'était un univers très, très, très moderne. Et j'ai travaillé 13 ans chez lui. Je dois te dire que ça a été une formation extraordinaire. Chez lui, j'étais d'abord assistante de la personne responsable des matières et des tissus. Et après, au bout de deux ans, j'étais moi-même responsable des tissus. Alors, petite parenthèse, il faut savoir qu'une collection, ça se prépare au niveau du choix des matières au minimum trois mois avant la présentation. Il faut commander les tissus. qu'une collection, c'est au moins 40 à 50 tissus différents, que chaque tissu a sa propre gamme de couleurs, parce que dans les maisons de mode, c'est une unité, donc c'est une silhouette. Donc, il y a en même temps le haut, les pantalons, les vestes, les chemises, sans compter les accessoires, ça c'est un autre département qui s'en occupe. Donc, j'ai beaucoup joué avec les tissus. Comme j'étais quand même un petit peu autodidacte, on va dire, on apprend deux fois plus vite parce qu'on est obligé de regarder. Et déjà petite, je touchais. Et en fait, le secret pour connaître les tissus, c'est toucher, toucher, toucher en permanence. Se faire même des petits... acheter un tissu de coton, un tissu de soie, un tissu de laine, on les a sous les yeux, on a des petits échantillons, on ferme les yeux et on reconnaît en fermant les yeux. Tout passe par la main, le regard évidemment, parce qu'on voit assez rapidement quand on connaît à force de toucher, et les associations de couleurs, parce qu'effectivement il y a des couleurs qui sont plus belles en laine et en coton, et on le voyait même au niveau des teintures. industrielle donc voilà ça a été une formation et une découverte et Thierry je dois dire m'a appris à augmenter mon regard surtout pas le focaliser mais surtout regarder partout au niveau musique au niveau expositions, au niveau littérature, enfin à tous les niveaux. Alors lui, il avait son propre parcours aussi, c'était un ancien danseur, moi j'avais fait de la danse, donc il y a une rigueur aussi très importante qu'on a partagé tous les deux, et lui, il aimait faire la fête, donc lui, son inspiration, tu pouvais le trouver en boîte de nuit, il arrivait le lendemain, il dormait devant nous tellement il n'avait pas dormi de la nuit, mais une créativité fantastique. Et après, je suis allée travailler chez Chanel, au studio avec Karl Lagerfeld. Et là, c'était aussi complètement extraordinaire parce que c'était l'opposé. C'est une maison traditionnelle française, très, très, très ancrée dans Mademoiselle Chanel, Gabrielle Chanel, une femme qui, à l'époque, a poussé les portes, a créé... un nouveau rapport au vêtement par le jersey, où le corps était souple, ce qui à l'époque était complètement révolutionnaire. Et Karl Lagerfeld, qui est la personne la plus brillante et la plus intelligente, je dois te dire, avec qui j'ai travaillé. on s'amusait beaucoup au studio et en même temps, on travaillait énormément, sans horaire. Et là, j'avais un poste de coordination de studio dans le prêt-à-porter parce qu'il y avait deux départements, le prêt-à-porter et la haute structure. Et moi, j'étais vraiment prêt-à-porter. C'était un rôle passionnant parce que j'étais en lien avec les ateliers. Donc, il y avait l'atelier flou pour les robes et les chemisiers et l'atelier tailleur pour tout ce qui était veste, manteau, etc. Il se trouve que je suis restée même en relation avec la responsable de l'atelier tailleur qui est maintenant à la retraite. Mais on a gardé des liens tellement c'était fort et on préparait les essayages. Si vous voulez, Karl Lagerfeld dessinait tout, absolument tout. Il nous envoyait les croquis. ça passait aux ateliers on débriefait avec les ateliers les ateliers faisaient des toiles et après monsieur Lagorfel venait pour faire les essayages on avait commandé les tissus en amont il y avait déjà un peu les échantillons de tissus qui étaient là et à ce moment là on matchait quand ils voyaient le modèle, ils disaient Ah ben, Chantal, dans quel tissu on va faire ça ? Qu'est-ce que vous en pensez ? Et comme un petit supermarché, on avait le choix de choisir tel tissu plutôt que tel autre, et on construisait la collection. En fait, une collection, ça se construit, c'est comme un puzzle. Et j'étais aussi en relation, ce rôle de coordination, avec le marketing, qui, eux, avaient étudié ce qui s'était vendu, pas vendu, quelles étaient les attentes des boutiques, et... et la production, parce que la production c'est aussi très en amont. Il faut que les patrons soient au point, donc il y a des petits ajustements entre ce qui est fait, ce qui est présenté au défilé et après dans les boutiques. Léger ajustement, mais pour que la vestibilité soit le mieux, et aussi les tailles. que ce soit aussi beau en 1938 qu'en 1944. Et après, on construisait la collection comme ça. C'était un moment assez extraordinaire parce que Karl pouvait arriver avec énormément de livres. et d'envie qui déchiraient les pages devant nous la première fois que je l'ai vu déchirer un livre en disant, mais enfin Chantal j'en ai trois, j'ai trois fois le même j'en ai un pour moi, il y en a un qui me déchire et il y en a un c'est pour les ateliers ou pour vous offrir, ou je garde chez moi et ils pouvaient s'inspirer aussi bien des bijoux étrusques qui transformaient en broderie sur des vêtements, c'était jamais tel quel c'était toujours travaillé c'est jamais je prends une image je fais la même chose et ça c'est une gymnastique assez extraordinaire et puis on écoutait de la musique en même temps qu'on travaillait c'était une très très bonne ambiance je suis restée 8 ans chez Chanel et puis il y a une nouvelle équipe qui est arrivée et je suis partie au moment où Karl commençait son régime à l'époque je l'ai connu il était comme on a pu voir certaines photos et donc il avait envie de changer aussi d'équipe ça correspondait à un tournant dans la maison et j'ai préféré partir et je suis allée chez Sonia Riquel et là c'était merveilleux de travailler avec une femme qui elle-même essayait les vêtements qui était en train elle-même de constituer une nouvelle équipe au niveau du studio, avec un directeur de studio, Tom Van Lingen, qui était un Hollandais. Et moi, je m'occupais des tissus de nouveau, et de la coordination avec la production. et le marketing, et on est restés tous très très amis. En fait, la mode peut être une famille. Si on arrive à comprendre les codes, qui sont assez obscurs, qui sont très présents, mais qui sont aussi très forts. Alors, ce sommaire Ikel, c'était assez extraordinaire, parce qu'on travaillait sur la moquette. à plat ventre. Elle adorait les imprimés. Donc, elles faisaient dessiner par des graphistes, des imprimés, ou par les usines aussi, qui avaient leur propre usine de graphique. Elles pouvaient donner des thèmes. On avait après les dessins et on faisait les couleurs sur les imprimés. Et ça, j'étais comme un poisson dans l'eau, mais c'est quand même assez compliqué. Parce que quand il y a un dessin avec... 20 couleurs, il faut que les 20 couleurs se parlent et se répondent entre elles et elles pouvaient dire ah bah non j'aime tout, mais sauf ce rose donc il faut changer ce rose, bon si on change le rose, il faut après adapter les autres couleurs donc, mais les imprimés c'était très fort donc pour ça j'allais très souvent dans les usines en Italie Oui, principalement en Italie, pour faire nos propres imprimés avec nos couleurs et aussi des tissages. On faisait faire des tissages très spécifiques et bien sûr, chaque maison fait sa propre gamme de couleurs. C'est la force de ces maisons parce que chaque maison raconte une histoire. et les histoires sont différentes. Voilà, je suis restée trois ans chez elle, et puis elle adorait lire, donc on partageait beaucoup en littérature ou en théâtre, elle était au courant de tout, et très famille. Donc il y avait sa fille Nathalie qui travaillait, qui s'occupait de la communication. Quand il y avait ses petites filles qui passaient, elle leur demandait, ça vous plaît cette robe ? Donc c'était très familial, et en même temps très ancré aussi dans la boutique. Elle habitait juste en face. le samedi on ne travaillait pas, elle allait à la boutique, voir, rencontrer les clientes, elle était vraiment très proche du produit. Après je suis allée chez Hermès, à l'époque de Jean-Paul Gaultier, alors là un monde luxe, luxe, luxe, avec une qualité… Avec mon bagage Chanel, je me disais, le luxe, je connais. Eh bien, non. Hermès, c'est encore un luxe encore plus performant, dans le sens où c'est d'abord des celliers. Donc, c'est d'abord une maison de cuir, qui sont beaucoup plus anciennes que Chanel. C'est une maison très masculine, je trouvais, où la mode a toujours été là, mais ce n'est pas leur cœur de métier. Leur cœur de métier, c'est vraiment le cuir. Et donc, la mentalité n'est pas tout à fait pareille, mais c'était extraordinaire de travailler. C'était à Pantin, où trois étages en dessous, on voyait les ouvriers. la poudre, le sac, une cantine incroyable, un environnement extraordinaire aussi au niveau, et une équipe très étonnante avec des parcours très différents et très ouverts. Là, j'étais directrice du studio. J'arrivais après à un passage très important où Martin Margiela avait travaillé huit ans et où arrivait Jean-Paul Gaultier. Et c'était de manière très différente de travailler. Donc, c'était un rôle de fusible avec... des tensions et en même temps des moments fantastiques. Pendant les essayages, Jean-Paul Gaultier est quelqu'un, c'est un arc-en-ciel d'idées. Donc, devant un vêtement, il peut se lever, prendre un bout de tissu, le draper et en faire un pantalon. Enfin, donc, en même temps, ça partait dans tous les sens, donc il fallait essayer de recadrer, et en même temps, une imagination débordante. donc c'était et il voulait bousculer les codes et donc j'avais mon mon rôle était aussi d'expliquer à la direction que c'était peut-être intéressant de faire de la dentelle chez Hermès et la direction me disait ah mais non, il n'en est pas question c'est pas possible de la dentelle chez Hermès et on a réussi à faire une dentelle avec les calèches avec l'univers Hermès mais il fallait convaincre des deux côtés donc c'était passionnant je suis restée 3 ans et après j'ai eu besoin de souffler un peu ça faisait plus de 35 ans que je travaillais dans ce milieu et j'ai commencé, il y avait 2 collections par an et chez Hermès il y avait 4 voire 6 collections par an donc on pourra parler de ce problème de la de réguler tout ça mais c'est on est en permanence à trouver de nouvelles idées, on est en permanence à acheter des tissus, on est en permanence à toujours courir pour proposer autre chose. Donc j'ai fait une petite pause et à ce moment-là je me suis installée en Corse, je dois dire, où j'ai commencé à m'installer provisoire, enfin pas tout le temps, une partie de l'année, où ça m'a bien posée au milieu de la nature et d'un endroit absolument magique. Et en Corse, j'ai été contactée par la Maison Dior, homme. et tout d'un coup je me suis dit ah bah oui j'ai jamais travaillé pour l'homme donc c'est génial et j'ai travaillé 5 ans chez Dior Homme avec un directeur artistique belge Chris Van Hache et ça a été extraordinaire aussi parce que j'ai appris encore des nouvelles choses la construction des vêtements hommes n'a rien à voir avec les femmes, et donc j'ai appris plein de choses. Et c'était, puis Maison Dior, LVMH, M. Arnault, c'était très important de présenter la collection à M. Arnault, deux fois par saison, avec un challenge. très fort et une équipe de studio fantastique avec des gens très créatifs et c'était génial voilà en grande ligne ce que j'ai fait et au bout de 40 ans j'ai dit ben voilà je suis très contente de m'arrêter j'ai mis 6 mois à récupérer physiquement j'ai dormi pendant 6 mois de ne plus avoir de rythme, de ne plus avoir d'horaire, c'était indispensable. Et là, j'avais déjà l'idée, grâce à la Corse, de faire une petite incursion à l'école du paysage de Versailles, parce que je trouvais que, d'abord, on avait un terrain tout à fait en pente, avec une pente très importante, 18%, et je ne voulais pas faire n'importe quoi. Ah. Et donc j'ai fait un premier module, la première année, en histoire des jardins. Et ça, je dois dire que c'était assez merveilleux, parce que c'était une historienne de l'art, Chiara Santini, une italienne, et elle nous a expliqué toute l'histoire des jardins du Moyen-Âge jusqu'au XIXe, pendant trois mois, et après c'est des intervenants qui nous ont fait l'histoire des jardins du monde. donc le Japon, la Chine, avec tout ce que ça comporte, c'était, je ne voulais que de la théorie. Et la deuxième année, par contre, c'était le deuxième module, c'était connaissance des végétaux et ses utilisations. Et là, c'est pareil, chaque semaine, c'était un intervenant différent, donc entre la palette méditerranéenne et au contraire, le jardin du désert, et avec les plantes, et c'était en formation continue, et on était mélangé aux étudiants. Donc ce mélange de personnes qui avaient un parcours professionnel et d'étudiants, c'était hyper tonique. Et même si c'était qu'une fois par semaine, c'est ce qu'il me fallait pour réintégrer tout ce qu'on avait appris. D'accord. Après quand je suis arrivée en Corse, toute cette nature, je connaissais principalement les oliviers. bien sûr, les chaînes, le maquis, mais pas vraiment précisément. Et j'ai trouvé une formation d'une semaine qui était géniale, qui s'appelait stage sauvage jaune médicinal et comestible. Et il y avait Cécile Billard qui nous apprenait comment reconnaître les plantes et les transformer pour les manger. il y avait une naturopathe et il y avait un ethnobotaniste Grégory Lemoyne qui nous montrait toutes les plantes et qui nous les détaillait et à cette occasion je lui ai posé la question s'il connaissait quelqu'un qui faisait de la teinture végétale parce que ça me trottait dans la tête depuis un moment effectivement moi dans les années 70 j'avais 15 ans et dans ma baignoire je faisais déjà des essais avec des teintures d'ilons de l'époque donc complètement polluantes mais il y a des essais de teinture je mélangeais déjà les couleurs je faisais déjà des essais de de forme, et je teignais mes draps. Donc, j'avais quand même ça déjà depuis longtemps. Et il m'a indiqué le nom de Marie-Marie, un nom magique. Surtout, elle est venue faire une formation en Corse six mois après, en novembre. où on était une dizaine, et c'était sur la laine. Et là, j'ai su que c'était... Voilà, c'était ce que j'allais faire maintenant. Parce que Marie est extrêmement pédagogue, extrêmement... synthétique dans ses explications. Donc, première chose, on a fait de la cueillette avec elle et c'est ce que je continue de faire. Moi, ce qui m'intéresse, c'est vraiment la cueillette. Ce n'est pas d'acheter sur Internet de la poudre de chlorophylle. Ça ne m'intéresse pas. voilà parce que j'ai besoin d'avoir ce lien de savoir où je l'ai trouvé et en même temps je rencontre des gens quand je cueille donc ça fait beaucoup d'interactions qui sont importantes et avec Marie on a fait ce stage sur de la laine alors j'étais un peu déçue parce que laine j'imaginais au départ mais c'était des échevaux de laine plus pour tricoter moi j'imaginais tout de suite tissu métrage et donc j'ai pu après transposer tout ce qu'elle nous avait appris sur des métrages Et là, j'ai rencontré des personnes très intéressantes, dont Alice et Marion. Et je dois dire qu'une fois le stage fini, c'est grâce à Marion qui m'a rappelé et qui m'a dit tu ne crois pas qu'on pourrait essayer à deux ? parce qu'on habitait pas loin l'une de l'autre et ça m'a permis de me jeter à l'eau je suis pas sûre que seule j'aurais fait le pas, j'hésitais je disais demain, demain, demain et quand on est deux pour mettre le pied en tout cas ça nous a permis, on faisait chacune de notre côté on se voyait de temps en temps on s'envoyait des photos ça a accéléré beaucoup le mouvement parce qu'en fait un an après avoir fait le stage de... Avec Marie, j'ai créé ma marque Costa Flora. Costa parce que j'habite à Costa, le village de Costa. Et Flora parce que c'est la flore en Corse. Et moi, je voulais faire toutes les matières, entre guillemets. C'est-à-dire, je voulais teindre la laine et la soie. Et je voulais teindre le coton et le lin. Et je voulais faire principalement des écharpes parce que j'en porte. presque une écharpe c'est autour du cou ça peut éclairer le visage on peut être en jean et en t-shirt et on met juste un petit foulard ou une écharpe autour du cou ça transforme complètement la personne et la manière dont on est perçu. Et voilà. Et j'ai commencé en achetant... Alors, je me suis fait trois axes, c'est-à-dire j'ai acheté chez Fibre Bio, adresse extraordinaire... des écharpes toutes faites, tissées en Inde, où il y a un grand respect, elles sont déjà prêtes pour la teinture, en laine. Et leurs écharpes en laine sont absolument superbes. La qualité, le toucher, le rendu, la dimension, il n'y a rien à dire. Celles en lin aussi. et la deuxième axe c'était je vais dans des endroits où il y a des stocks dormants c'est à dire c'est des maisons qui rachètent des stocks des maisons de couture parce qu'il y a des déchets gigantesques et il y a trois, quatre adresses à Paris où là soit c'est des ponts qui sont déjà préparés de trois mètres mais si on va au fond du magasin c'est des rouleaux et là on prend les métrages que l'on veut et le troisième axe c'est de la seconde main donc sur des sites spécialisés de seconde main j'achète des écharpes avec soit des carreaux des écossais, des tissés teints plutôt et que je surteins donc il y a toujours un peu de blanc dans ce que je commande et ça transforme complètement du noir et blanc je passe du beige au noir ou du rouge je ne fais pas vraiment de rouge mais il y a d'autres couleurs qui sortent et ça me fait mes trois axes super bon Chantal c'était comme je disais un super parcours donc je vous ai laissé vraiment tirer le fil c'est le cas de le dire de toutes ces maisons de mode et l'arrivée vers la couleur végétale moi ce qui me fascine et ce que je retire de tout ce parcours là et du lien avec la couleur végétale c'est votre rapport à la matière alors j'ai une question qui est euh Donc la teinture végétale ne se pratique que sur fibres naturelles. Et en fait, dans votre parcours dans les maisons de luxe, vous avez beaucoup travaillé des matières qui étaient plutôt quand même, enfin aussi des matières synthétiques. Est-ce que ce n'est pas frustrant quand on veut soi-même apposer de la couleur, être entre guillemets un peu plus restreinte dans le choix des fibres qu'on a à disposition ? Alors... Pour moi, non maintenant dans la teinture végétale, parce que de la viscose, teindre de la viscose on pourrait, puisque c'est une belle viscose, c'est cellulosique, donc si c'est vraiment tiré de la fibre du bois, on pourrait la teindre. Maintenant, trouver des belles viscoses, c'est très compliqué. voilà, mais c'est vrai qu'en faisant vos écouteurs rentrent très bien alors chez Thierry Mugler on avait une spécialité, on a été les premiers à utiliser le polyester c'est un terme qui fait fuir tout le monde mais pas chez nous parce que c'était un gage de modernité dans le sens où ça ne se froisse pas et surtout on avait trouvé des fabricants au Japon qui, à l'époque, dans les années 80, le polyester était aussi cher que la laine, j'allais dire, parce que c'était des fils extrêmement fins et très bien travaillés, et on faisait faire des crêpes de polyester. Et la crêpe de polyester, c'est un fibre qui est retordu plein, plein de fois, et ça donne une fluidité dans la matière, ce qui faisait que, quand on bougeait, la jupe bougeait autour de nous. Donc ça c'était fascinant, mais c'était effectivement un partenariat avec le Japon, où j'ai fait faire des tissus très spécifiques en polyester. Alors par contre en polyester, le noir par exemple, ça ne fait jamais un beau noir. ça sera toujours un noir un peu gris par contre les couleurs, oui les autres couleurs, oui, mais ça ne faisait pas un très beau noir ce qui nous arrangeait parce qu'on était dans des coloris plutôt vifs donc ça moi je garde un très beau souvenir des très beaux polyesters du reste, à la même époque Issey Miyake a lancé son concept Please Please avec des plissés C'était une ligne qui existe toujours et lui-même il a fait aussi faire son propre tissu parce que le polyester du coup reste plissé, ça ne se déplisse pas. Donc ça a donné une ouverture au niveau des formes. On peut avoir encore dans nos armoires des tissus plissés de Miyake, 40 ans après. Du reste, souvent les mères le redonnent à leurs filles, parce que c'est des vêtements qui vieillissent très bien quand le polyester est de très bonne qualité. Ce qui n'est plus le cas du tout maintenant. même dans les maisons de luxe le polyester c'est plus d'excellente qualité ? non maintenant ils n'en utilisent pas ils n'en utilisent plus ils n'en utilisent plus ils utiliseront encore un peu de viscose ou ils la mélangeront viscose coton ou viscose laine mais en polyester non parce que la connotation est devenue tellement mauvaise que voilà alors peut-être un peu encore au Japon mais plus en Europe