- Pauline Leroux ArtEcoVert
Bonjour et bienvenue dans le podcast ArtEcoVert, le podcast qui vous parle d'art, d'écologie et de verdure. Je suis Pauline Leroux, ingénieure agronome passionnée de plantes, et je vous emmène à la découverte de la couleur végétale et de toutes ses applications. Que ce soit dans le textile, l'ameublement, l'artisanat, la décoration et dans d'autres domaines, chaque jeudi et samedi à 7h30, je vous propose des épisodes riches avec des invités passionnants pour approfondir le sujet de la couleur végétale sur toute la chaîne de valeur. Mon but, fédérer et démocratiser la couleur végétale dans le monde. Alors c'est parti, bonne écoute ! Bonjour à tous, je suis ravie d'accueillir sur le podcast Benoît de Laroussière de la Filature Fonty. Bonjour Benoît.
- Benoit de Larouzière
Bonjour Pauline.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors Benoît, je voulais qu'on commence par votre présentation. Qui êtes-vous, quel est votre parcours et comment vous en êtes arrivé à la Filature Fonty ?
- Benoit de Larouzière
Je suis père de famille, j'ai 4 enfants, j'ai dépassé la cinquantaine, j'ai une formation d'ingénieur et je viens du monde à la fois du conseil et de l'aéronautique, parce que j'ai passé 25 ans de ma vie à accompagner des grandes sociétés aéronautiques pour construire des avions. Je suis arrivé dans le monde du textile et en particulier dans la filature de laine et la teinture de laine. un peu par hasard, il y a eu 7 ans très exactement, sur une démarche volontaire que je faisais de quitter le monde du conseil et l'aéronautique en essayant de trouver une petite entreprise en difficulté, avec un enjeu social, environnemental, un peu d'esthétique, une marque, et un peu un rôle de... à essayer de mettre mon expérience et mon énergie au service de la sauvegarde de ce type d'entreprise. Je suis tombé un peu par hasard sur la filature Fonty, dont le dirigeant voulait prendre sa retraite après un âge de 70 ans dépassé. Et donc, on s'est assez vite mis d'accord sur le fait que je serais le repreneur. C'était en 2017 et depuis les choses ont un peu avancé. Je ne suis pas du tout issu du monde du textile, mais j'apprends tous les jours avec mon équipe. Et puis j'essaye d'accompagner les mutations en cours que le monde du textile et de l'ananas tricoté en particulier vivent depuis maintenant une trentaine d'années. Alors depuis 7 ans j'essaie d'accompagner tout ça, de suivre, d'essayer de trouver des nouvelles manières de fonctionner, des nouvelles propositions. Et puis... de m'adapter au temps.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
D'accord. Et alors, ce seraient quoi les grandes problématiques que rencontre la filière laine, selon vous ?
- Benoit de Larouzière
Alors, en fait, elles sont nombreuses. D'abord, nous, en tant que transformateurs, on a deux métiers. On est à la fois filateur et teinturier, c'est-à-dire que nous faisons toutes les opérations sur les fibres. et nous faisons toutes les opérations de coloration, de lavage, de teinture, etc. qui permettent de fournir au final à nos clients un fil de laine à tricoter. Alors d'abord, cette filière, on est à peu près au milieu, on est à l'étape de transformation industrielle, cette filière souffre à toutes les étapes. D'abord, l'élevage. L'élevage, d'un point de vue macro, socio-économique et macro, l'élevage c'est quand même des agriculteurs qui sont un peu étranglés entre deux injonctions contradictoires, produire plus et en même temps produire plus propre, avec des prix qui doivent être de moins en moins chers. Économiquement, faire de l'élevage, c'est à peine rentable, voire déficité. Et puis, tout ça sous les colibés et les injures de la foule qui expliquent que l'élevage, c'est polluant, on utilise des engrais pour faire pousser ce qui va nourrir les bêtes, on utilise trop d'eau. les bêtes sont polluantes elles-mêmes parce que vous savez, les vaches sont censées alimenter la couche de zone.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
La méthanisation,
- Benoit de Larouzière
oui. Voilà, donc c'est quand même un métier qui est en difficulté et qui est en pleine mutation. En aval de la filière transformation de la laine, il y a la filière vente. La filière vente de la laine, c'est soit le textile grand public, les marques, les vêtements, etc. Il ne vous a pas échappé depuis en gros 4 ans, quasiment toutes les grandes marques, grands publics de textiles font faillite ou se mettent en retracement judiciaire. Je ne veux pas citer des noms, mais l'actualité récente en a encore parlé. Quant aux plus petites boutiques qui sont le cœur de cible de nos partenaires et clients, nous on travaille essentiellement avec des merceries et des artisans. Les merceries, c'est souvent des petites boutiques de centre-ville. qui subissent de plein fouet la concurrence d'Internet et la désertification des centres-villes avec l'augmentation du prix des loyers. De toute façon, ce sont des métiers qui prennent beaucoup de temps, qui nécessitent beaucoup de place pour avoir du stock et qui sont très peu rémunérateurs. Donc, c'est quand même des métiers très en difficulté. Donc, on est, nous, au cœur de cette filière. On est exactement au milieu où on voit les éleveurs qui souffrent, quelques étapes de transformation. en amont de notre activité, qui souffrent elles aussi, et d'ailleurs qui n'existent quasiment plus en France. Je veux parler du lavage, je veux parler du peignage. Et puis, en aval, nos clients et partenaires qui eux aussi souffrent, les artisans qui trouvent que tous ces produits coûtent bien cher, les revendeurs qui sont des boutiques, des merceries, qui, pour l'essentiel d'entre elles, survivent plutôt que ne vivent. Donc on surveille toutes ces mutations, on est au cœur du système et on a la chance d'être à la fois industriel mais également une marque. Et en fait c'est un peu ça qui nous donne un point de vue un peu plus serein, c'est-à-dire que nous pouvons assumer le rôle d'une marque en plus du rôle d'industriel. Et donc nous ne sommes pas des purs industriels soumis à la pression des grandes marques, en particulier de luxe, de textile, qui font baisser les prix et essayent d'avoir tout pour moins cher.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
d'accord ok donc je comprends bien du coup votre rôle je vois bien où vous vous placez dans la filière vous parlez de métiers qui sont en difficulté donc en amont et en aval vous avez parlé du nettoyage des laines on l'avait aussi mentionné dans un ancien épisode du lavage il n'y a plus qu'un centre si j'ai bien compris de lavage en France alors
- Benoit de Larouzière
Voilà, peut-être que ça vaut le coup que je retrace en gros les étapes de transformation d'une toison de lait naturel en fils prêts à tricoter ou prêts à tisser. Donc la première étape c'est l'élevage. Une fois par an, en gros, on tond les moutons. On tond les moutons. ça se fait selon les éleveurs selon les traditions en gros une fois par an, parfois un peu plus parfois un peu moins j'en profite d'ailleurs pour dire que quand on tend un mouton c'est pour son bien c'est pas pour l'hiver et sa richesse un mouton qui n'est pas tendu assez vite il est infesté de vermine et il meurt donc c'est une mesure sanitaire de tendre un mouton certains moutons ont des toisons qui sont tout à fait adaptées pour faire du fil à tricoter D'autres ont des toisons qui sont moins adaptées, mais qui sont souvent adaptées pour faire d'autres produits utilisables par l'homme. Par exemple, des matelas, de la laine de fil à tapis, de la laine de fil à tapisserie, de l'isolation. On peut imaginer l'état d'utilisation de la laine. Chaque type de toison est adapté à un type de laine, un type d'utilisation. Une fois qu'on a tendu le mouton... En général, l'étape d'après, c'est ce qu'on appelle le tri. Ça se fait à peu près au moment de la tonte d'ailleurs. C'est-à-dire qu'on isole toutes les parties de la tonte qui sont soit un peu trop qualitatives, soit pas assez. On les met de côté, on en fait d'autres lots. Donc on trie les fibres issues de la toison initiale du mouton. et en même temps on retire les déchets, le crotin, ce qu'on appelle une partie du suin, c'est-à-dire toutes les matières qui entourent la fibre naturelle. Voilà. Ensuite vous avez ce qu'on appelle des collecteurs qui passent dans les différents élevages et qui vont récupérer cette matière en la payant le prix du marché. Je vous donne un indice en ce moment, le prix du marché c'est entre... 10 et 15 centimes d'euros le kilo de laine, c'est-à-dire rien. Il faut savoir que tondre un mouton, ça revient à peu près à entre 3 et 4 euros de frais de main-d'œuvre que demande le tondeur en général. 3 et 4 euros de frais pour, en gros, un mouton, il va fournir entre 2 et 4 kilos de laine pour 40 à 60 centimes de revenus. l'équation est assez vite vue, la laine n'est pas un produit rentable pour l'éleveur. C'est pour ça que je vous dis que tendre un mouton, c'est quasiment une obligation sanitaire, c'est absolument pas actuellement une source de revenus pour l'éleveur. C'est plutôt une source de coûts. Alors, je vous parlais du collecteur, il passe dans les fermes et il dit, voilà, cette année, je vous l'achète 10 centimes d'euros, votre laine. Donc, la plupart des éleveurs, d'ailleurs, disent, non, ce n'est même pas la peine, je préfère la mettre directement à la déchetterie, parce qu'à ce prix-là, ça ne paye même pas le temps que je vais passer à la charger dans votre camion. Le collecteur lui-même ensuite va souvent faire des lots homogènes, c'est-à-dire faire des mélanges d'origine d'élevage, en général des mélanges homogénéisés entre eux, mais surtout homogènes en termes de qualité. C'est-à-dire qu'on ne va pas mélanger la quarantaine de races de moutons qui existent en France pour en faire un seul tas. On va trier un petit peu. Et puis sur cette base-là, le collecteur, parfois c'est l'éleveur directement d'ailleurs, va faire laver sa laine. Des collecteurs en France, il en reste quatre à ma connaissance, en fait ce sont des grossistes, qui travaillent sur un territoire un peu plus large que la France. En général, c'est plutôt l'Europe occidentale, l'Italie, l'Espagne, la France, un peu la Belgique, un peu la Suisse. Donc ces collecteurs envoient ensuite leur laine, leur lot de laine lavé. Le lavage, ça consiste à retirer à peu près 50% du poids de la laine, qui est constitué de suin. Je vous en ai parlé tout à l'heure. En gros, c'est toute la graisse qui entoure le système pileux du... du mouton, et qui se colle à la toison. Un peu comme les cellules de notre peau, nous, humains, forment du sébum qui lui-même va entourer la graisse des cheveux, enfin les cheveux, pour les fluidifier. C'est une graisse naturelle qui est en plus imperméable, donc c'est pas mal. Simplement, ce suin, il sent très mauvais. parce qu'il a aspiré d'autres choses que juste cette graisse. Il y a aussi de la transpiration du mouton, du crotin, des chardons, tout un tas de matières plus ou moins douteuses qui se sont mélangées au suin. Et donc quand on fait le lavage, on retire à peu près 50% du poids de la fibre qu'on a apportée. Ces 50% sont constitués entre autres de déchets végétaux, mais aussi d'une matière qu'on essaie de récupérer ensuite qui s'appelle la lanoline. La lanoline, c'est cette graisse naturelle que le mouton produit pour entourer les fibres de sa toison. Des lavages en France, il y a 7 ans, il en restait 2. Il y en a un qui a fermé il y a 7 ans. dans l'allier, et il n'en reste plus qu'un aujourd'hui, qui est en Haute-Loire, à Saugues, qui est semi-industriel, et qui est soumis à pas mal de difficultés, à la fois de capacité, mais aussi de prix de revient, et de niveau qualitatif, c'est-à-dire de régularité, de ce qu'il peut produire. Donc, autant dire qu'en France, cette filière repose sur un acteur, Si on veut faire une laine 100% française, c'est très compliqué, puisque cet acteur a beaucoup d'aléas dans sa manière de fonctionner, beaucoup de demandes, ou au contraire, des demandes à des prix qu'il ne peut pas accepter parce que ça ne lui permet pas de vivre. Derrière le lavage, vous avez encore une étape qui n'est pas obligatoire, qu'on appelle le peignage, mais en fait, c'est un peu un abus de langage. On devrait appeler ça le pré-peignage. c'est-à-dire que pour préparer la laine, quelle que soit la transformation qui est faite derrière, on peut se dire, je veux avoir une belle laine lavée, homogène, mais je veux en plus qu'elle soit extrêmement régulière et sans défaut. Et donc, on passe dans une machine qu'on appelle une peigneuse à laine, une peigneuse à toison, qui va éliminer toutes les fibres courtes, tous les déchets, les petits bouts de chardon, les petits bouts végétaux, et qui va commencer à paralléliser toutes ces fibres les unes avec les autres pour qu'elles soient un peu moins un sac de nœuds, si j'ose dire. Donc, il ne faut pas confondre cette opération de pré-peignage avec le vrai peignage, ce qu'on appelle la laine peignée. Les deux se ressemblent, mais c'est deux étapes différentes et à des moments différents dans la filière, dans le process. Une fois cette laine prépeignée ou non, elle arrive chez nous, nos filatures. En France, il n'y a plus beaucoup de filatures actives, des filatures ouvertes, c'est-à-dire qui travaillent pour l'extérieur, à ma connaissance, il en reste entre 3 et 5. Il y a d'autres filatures qui sont des filatures fermées, c'est-à-dire qu'elles sont totalement intégrées. chez des fabricants de tissus par exemple. D'accord. Donc elles ne travaillent pas pour l'extérieur, ou des fabricants de vêtements, elles travaillent pour elles-mêmes. Ok. Donc des filatures de laine ouvertes, je vous dis, je pense qu'il en reste 4 ou 5, entre 3 et 5 selon la manière de compter, en tout cas des filatures qui sont avec un modèle économique qui n'est pas le modèle du musée que l'on ouvre le week-end ou de l'association qui fait fonctionner une filature avec des recherches de subventions pour que ça puisse tourner, etc. À mon avis, il y en a quatre officiellement ouvertes en France. Voilà. Donc, vous voyez les acteurs de toute cette filière industrielle. Ils sont peu nombreux et il suffit qu'il y en ait un qui s'écroule pour qu'en gros, entre 50% et 100% de la filière s'écroule en France. donc très fragile et en plus ce sont des vieux outils qui ont tous au moins 40 ans donc très peu d'investissement depuis 40 ans dans la filière donc une rentabilité de ces équipements par les gros sous qui est difficile à trouver ou en tout cas des prix de revient pour faire fonctionner ces équipements qui sont beaucoup plus élevés que si vous allez en Chine, où tout a été fait depuis 20 ans, ou en Turquie, où des investissements faramineux ont été réalisés au cours des 20 dernières années, donc avec une filière ultra moderne et très compétitive en termes de prix. D'accord. Alors derrière nous, il y a plein d'autres étapes, dont le peignage, le cardage, vous parlez également si vous voulez, mais déjà toute cette filière amont par rapport au filateur est déjà très très très abîmée et difficile à reconstituer, que ce soit les élevages, le lavage, le prépeignage, même les filatures elles-mêmes, il n'y en a plus.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
D'accord, donc vous, en fait, quand vous recevez une laine, on peut dire prépeignée, c'est ça,
- Benoit de Larouzière
grosso modo ? On reçoit soit de la laine, on reçoit trois types de matériaux. Soit de la laine brute, que nous envoyons laver. Nous allons, par exemple, chez le laveur français ou chez un laveur…
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Européen ? En Belgique,
- Benoit de Larouzière
ou en Espagne, ou en Italie.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Et il y en a encore ? Oui, il y en a encore.
- Benoit de Larouzière
Il y en a à peu près un par pays en Europe. D'accord. Un par pays. D'accord. Mais avec des capacités plus ou moins importantes. Par exemple, en Belgique, il y a un très gros laveur qui est… D'accord. Qui a des gros volumes. Ok. Donc, nous recevons soit de la laine brute que nous achetons directement en commerce équitable, ce que nous appelons du commerce équitable, avec des éleveurs. C'est-à-dire qu'au lieu de leur acheter à 10 centimes d'euros le kilo, nous leur achetons à 2 euros le kilo. L'idée étant de… faire vivre cette filière en permettant à chacun de gagner sa vie. Donc, il ne s'agit pas de... Ça a un impact, ça veut dire que cette laine que nous produisons à partir de cette toison que nous payons beaucoup, beaucoup plus cher qu'un grossiste, il faut que nous arrivions à trouver un marché pour la vendre sans faire de pertes. Donc, nous devons raconter cette histoire à nos clients. Cette laine, elle coûte relativement cher par rapport à sa qualité, mais c'est une laine, ce qu'on appelle tracée, totalement équitable, c'est-à-dire que tous les acteurs qui ont participé à sa transformation, à la gloire, mais ils ne perdent pas d'argent en le faisant, ils gagnent à peu près leur vie. Ils gagnent tout juste leur vie. Voilà, donc nous achetons cette laine brut. Nous achetons aussi de la laine à des grossistes. Comme nous sommes une marque de laine de fil à tricoter, nous avons besoin de gros volumes et des volumes assez réguliers. Donc, nous achetons aussi de la laine à des grossistes. Alors, des grossistes français, italiens, allemands, espagnols. En tout cas, pour ce qui concerne la laine de mouton. Nous achetons aussi de la laine à des grossistes. Alors, nous l'achetons sous deux formats. Soit de la laine, ce qu'on appelle de la laine en bourre, c'est-à-dire qui sort du lavage. soit de la laine en top. Alors, le top, ça veut dire la laine peignée, prépeignée. D'accord. Et dans le top, vous avez deux types de laine prépeignée. Vous avez ce qu'on appelle l'open top. L'open top, c'est-à-dire des fibres de laine un peu comme des poignées de cheveux. D'accord. Il n'y a pas de continuité. Puis, vous avez ce qu'on appelle du top tout court, c'est-à-dire en gros, ce qu'on appellerait du ruban. Bon, c'est le cas. Le ruban, c'est un ruban continu de fibres toutes alignées à l'issue du peignage. Donc nous utilisons à peu près ces quatre matières premières pour travailler nos fils.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
D'accord, ok.
- Benoit de Larouzière
Alors un peu plus loin dans notre process de transformation, nous achetons aussi dans certains cas des fils déjà faits, en particulier pour tout ce qui est coton, nous ne sommes pas filateurs de coton. nous n'avons pas les machines qu'il faut pour faire ça, donc nous achetons du fil de coton qu'on appelle du monobrin, c'est-à-dire un fil qui a déjà été fabriqué par un de nos partenaires français, et nous lui achetons un brin très fin que nous allons ensuite assembler, retordre, teindre, mettre en pelote, et que nous allons revendre ensuite dans les merceries.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Ok.
- Benoit de Larouzière
Voilà. Comme nous sommes une filiature ouverte, nous travaillons à la fois pour la marque Fonty, donc les références que vous voyez dans notre catalogue, que ce soit en venant à la filiature sur Internet ou dans les merceries. En plus de ça, nous travaillons aussi pour d'autres. C'est-à-dire que nous travaillons à façon, comme des industriels, au moins de 50% de notre volume d'activité est fait pour les autres. D'accord.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Vous avez parlé des canaux de distribution j'ai vu votre site, il est super bien fait c'est clair, on s'y retrouve il y a les merceries, j'ai vu que vous aviez une carte interactive où on retrouve tous vos revendeurs et vous avez aussi des systèmes de portes ouvertes mais vous avez peut-être aussi un magasin
- Benoit de Larouzière
Nous avons fait le choix de nous appuyer sur nos alliés nos partenaires historiques qui sont les merceries. Parce que pour tricoter, rien ne vaut le conseil d'une mercerie qui connaît bien la laine, qui peut vous accompagner, etc., qui a le choix. Donc nous avons 90% de nos ventes de laine à tricoter fonties qui passent par des merceries. Les 10% restants, ils passent soit par nos ventes de magasins d'usines, nous avons un petit magasin d'usines qui est un peu poussiéreux, mais qui nous permet d'accueillir les gens qui viennent visiter et de leur dire que vous avez vu fabriqué, vous pouvez l'acheter ici. Alors, vous ne pouvez pas acheter tout à fait la collection avec des tarifs géniaux. Vous pouvez acheter toute la collection, mais vous n'aurez pas des tarifs géniaux sur la collection actuelle parce qu'on ne veut pas faire concurrence à notre propre réseau de mercerie. Par contre, vous pouvez trouver ce qu'on appelle des queues de l'eau, des… Du déstockage, des choses qu'on ne propose plus en mercerie parce qu'on a décidé d'arrêter cette qualité ou cette couleur. Ou parce qu'on a fait des essais, que ce n'est pas concluant, qu'on considère qu'on ne va pas lancer une gamme à partir de cette fabrication. Et donc, on vend ça à des prix, pour le coup, très, très, très compétitifs dans nos petites boutiques d'usines. Et puis, nous faisons aussi 4 ou 5 grands salons par an, que ce soit des salons de tricot ou des salons un peu plus professionnels de fils de laine. on essaye de représenter tout ce que nous faisons et surtout ce que nous sommes capables de faire et nos convictions, c'est-à-dire nous essayons d'être la laine française d'origine le plus souvent française pas toujours parce qu'on ne peut pas faire que de la laine d'origine française, mais en tout cas transformée en France avec une gamme de couleurs sur laquelle nous sommes particulièrement attentifs et nous allons un peu à contre-courant de tout ce qu'on est au, c'est-à-dire que quand nous faisons une nouvelle laine, nous faisons au moins 60 couleurs, voire 100, voire 120. Un filateur industriel, quand il fait un fil, il fait une vingtaine de couleurs et puis il dit à ses clients vous n'avez qu'à vous servir là-dedans, il y en a déjà bien assez Comme c'est notre propre marque, nous essayons de nous distinguer en faisant une gamme de couleurs. Je fais le souffle si je peux me vanter un peu. Voilà. D'accord. Puis, ensuite, nous sommes fabricants pour d'autres. Alors, nous sommes fabricants, soit nous fabriquons des fils, en gros, nous appelons, nous, notre gamme industrielle, c'est-à-dire des fils neutres, que les teinturières artisanes, ou artisans, on va dire, ou les teinturiers nous achètent en tant que base, c'est-à-dire ils... utilisent des bases pontilles d'origine fabriquées chez nous qui sont maintenant référencées et peuvent faire leur teinture végétale ou leur teinture de toutes sortes sur ces bases là soit nous fabriquons des fils sur la base de spécifiques questions Voilà, tous nos fils prêts à teindre, en gros, c'est nos bases standards, sachant qu'on peut les décliner en bases non standards. Alors, on ne les présente pas, mais en gros, à partir du moment où vous avez une matière, vous avez à peu près l'infinité de manières de tordre cette matière et d'en faire du fil, et une deuxième infinité de manières de retordre, c'est-à-dire d'assembler, de faire grossir le fil avec des torsions et des contre-torsions différentes qui vont donner du gonflant, de l'élasticité. au contraire de la raideur, de la tenue, etc.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
D'accord. Je précise parce que j'ai beaucoup de personnes qui me disent Mais où on peut acheter du fil prêt-à-teindre ? Donc, ça répond à cette question et c'est dans votre gamme. Prêt-à-teindre sur votre site, on la voit.
- Benoit de Larouzière
Et cette gamme, on l'a considérablement ouverte depuis maintenant 5 ans. Il faut être conscient qu'il y a 5 ans, je ne sais pas pourquoi, juste avant le Brexit. 90% des artisans qui faisaient de la teinture sur base achetaient la laine en Angleterre. Et le Brexit, en fait, a mis à mal cette filière. Et à peu près au même moment, un peu avant, nous, on s'était dit, il faut absolument qu'on puisse fournir au moins les teinturières francophones et françaises. Et donc, on avait ouvert cette gamme de produits à nos clientes. Et c'est vrai que maintenant, il y a beaucoup, beaucoup de... d'artisans teinturiers qui se fournissent chez nous, soit sur notre base standard, soit en nous faisant des demandes spécifiques.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
D'accord, des devis pour, comme vous disiez, amener du gonflant ?
- Benoit de Larouzière
Parce que je voudrais tel type de fil, mais je le voudrais en trois brins et pas en deux brins, ou au contraire, je voudrais une torsion un peu moins forte, soit plus gonflant, même si j'y perds en résistance, parce que vous pouvez me le fabriquer.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
d'accord ok ça c'est super ça va intéresser nos artisanes moi je les appelle comme ça les artisanes donc les fils prêts à teindre voilà oui pardon je vous écoute non mais vous m'avez dit donc fabrication de fils donc neutre prêts à teindre et ensuite vous avez des collections j'ai vu on
- Benoit de Larouzière
a tout ce qui est vendu sous la marque Fonty et puis tout ce qui est vendu sur base de devis ou de ou de de commandes industrielles. Donc, vous avez besoin de 100 T-chevaux, de tel type de fils, vous pouvez nous contacter et on vous dira, soit on sait les faire, on les a en stock, pardon, soit on les a en stock, soit on sait les faire, parce que ça fait partie de notre base de travail, soit on peut les faire, en faisant un peu de recherche. D'accord. Donc on a des quantités minimales. Dès lors qu'on commence à faire de la fabrication spécifique et pas sur une de nos bases traditionnelles, on en a quand même 60 des bases traditionnelles. Donc dès qu'on fait du spécifique, il y a des quantités minimales parce que quand on lance une fabrication, on ne peut pas faire une fabrication spéciale pour 5 kilos.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Et donc c'est quoi vos minimums de commandes ? D'accord.
- Benoit de Larouzière
Alors, nos minimums de commandes, sur tout ce qui est d'origine fontille, pas de minimum. D'accord. Sur tout ce qui est avec une fabrication spéciale, si c'est sur une base de fil fontille, de monobrin fontille, en gros, c'est 5 kilos. Et si c'est une fabrication totalement spéciale, c'est-à-dire que vous voulez une matière particulière, vous voulez une torsion particulière, là, ça va être plutôt autour des 100 kilos. ça commence à devenir des commandes c'est important, mais nous ça nous oblige à mettre en oeuvre en gros tout un process de fabrication particulièrement nos cardeuses, nos machines qui fabriquent les fils en deçà de 70 kilos on ne sait pas travailler on ne peut pas lancer une production de moins de 70 kilos d'accord et alors justement
- Pauline Leroux ArtEcoVert
justement j'allais vous dire donc j'entends bien là où vous êtes placé dans la filière vous avez bien fait de rappeler toutes les étapes parce que je pense que ça va parler et éclairer certaines personnes moi je suis quand même encore curieuse de savoir quel type de machine vous utilisez vous en fait quand on vient faire une porte ouverte chez vous, qu'est-ce qu'on peut voir encore comme machine quelles sont les étapes que vous pratiquez ou qu'elles sont enfin qu'est-ce qu'on peut voir en fait comme process et comme machine.
- Benoit de Larouzière
La filature Fonty, elle a ceci d'unique qu'elle a, je pense que c'est la dernière en France qui peut se targuer d'avoir tout ça. Elle est à la fois filature de laine, cardée, un peu peignée mais surtout cardée, et teinturerie. Alors vous me passerez, vous m'excuserez, je parle souvent de teinture au lieu de teinturerie, c'est une déformation. Je dis souvent les opérations de teinture, on devrait dire les opérations de teinture. Et on a un troisième corde à notre arc, c'est que nous sommes notre propre marque, c'est-à-dire que nous avons un client interne qui s'appelle les Lens Fonty. Et donc nous travaillons pour les Lens Fonty et puis pour le reste du monde en mettant à disposition en gros ces deux capacités de filature et de teinture.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors, si vous venez visiter lors d'une de nos portes ouvertes ou lors d'une visite, on fait des visites le plus souvent possible. On a des créneaux de visite prépositionnés tout au long de l'année, le troisième mercredi du mois, il faut juste s'inscrire. Mais on fait aussi des visites privées, si vous venez avec un groupe d'une quinzaine, d'une vingtaine de personnes, on peut vous organiser une visite à l'heure et le jour qui vous arrange. pas trop le week-end si c'est possible parce qu'on les a proposés nous avons donc des portes ouvertes 3 fois par an pendant 2 jours, on ouvre tout on montre tout, notre projet c'est de faire connaître cette filière et de montrer aux gens qui ont pris la peine de venir jusqu'à nous que c'est pas si simple de faire du fil qu'en fait il y a une vingtaine d'étapes entre la laine brute que nous recevons et le fil à tricoter qu'on trouve chez la Mercière
- Benoit de Larouzière
D'accord.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors les étapes, nous, nous les avons découpées en quatre grandes étapes. On a une grande étape qu'on appelle la préparation, qui consiste en fait à transformer la laine brute en quelque chose qu'on va pouvoir travailler pour en faire du fil. Cette étape, elle met en œuvre cinq machines. Je vais vous dire, ce n'est pas si simple que ça. Et elle prend entre 24 et 48 heures, entre le temps de process et le temps de repos. Ensuite nous avons une deuxième grande étape qui est la plus emblématique, qu'on appelle l'étape de filature ou de filage, qui réunit six machines différentes, dont la machine mère, enfin la machine reine, c'est ce qu'on appelle la cardeuse, c'est-à-dire en gros ce sont des rouleaux, une machine qui fait une trentaine de mètres de long, avec des rouleaux couverts de piques qui vont aligner les fibres de laine, les paralléliser, et les filer. pour qu'on puisse ensuite prendre des petits morceaux de cette nappe de fibres parallèles et les transformer en fils. Derrière, vous avez une deuxième étape qu'on appelle le banc continu à filer. Ensuite, une troisième étape qu'on appelle la retordeuse, l'assembleuse et la retordeuse, qui vont assembler des fils pour les faire grossir. Ensuite, vous avez une étape qui vous permet également de... mettre en écheveau ce fil, poser ce qu'on appelle des pianes, c'est-à-dire des petits rubans qui évitent que les écheveaux se mélangent entre eux, etc. Donc ça, c'est l'étape vraiment de filage ou de filature principale. Troisième étape, c'est tout ce que nous appelons la teinture. En fait, ce n'est pas que les opérations de teinture, c'est tout ce qui concerne l'eau. Tout ce qui a un rapport avec les pigments, l'eau, le lavage, l'adoucissage, le séchage. Je dis l'eau au sens large parce qu'on met beaucoup de vapeur aussi dans la fabriquée de la lettre. D'accord. Donc ça, c'est une grande étape qui prend pas mal de temps, qui est à mon avis la plus technique. parce que, en ce qui nous concerne, nous avons une gamme de fils avec une gamme de coloris. Les coloris, il faut être capable de les reproduire d'une fois sur l'autre. Donc, ça implique... Alors ça, c'est assez compliqué à décrire, il vaut mieux le voir. Mais si vous voulez voir des choses intéressantes, vous pouvez aller sur notre compte Instagram, qui est dédié vraiment au savoir-faire que nous développons, et où on divulgue un peu nos petits secrets et nos petits trucs et astuces. Donc, pour ce qui est d'un, c'est Fonty. anti-du-bas officiel. J'en fais un peu la promotion parce que c'est vraiment un compte qui cherche à vulgariser ce que nous faisons et à le fixer avec des photos et des textes pour expliquer.
- Benoit de Larouzière
Je le remettrai dans le descriptif.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Et puis, la dernière étape, c'est ce que nous appelons nous les finitions. où là, d'un échevautin, on va fabriquer une pelote. Et en fait, ça a l'air tout bête, mais pour faire une belle pelote bien régulière, ce n'est pas si simple. Et ça met en jeu trois ou quatre machines successives. Et puis, beaucoup de bonne volonté de savoir faire des ouvriers et des ouvrières qui travaillent dans ces ateliers pour que, quand vous achetez une pelote flanquille ou que nous fabriquons pour quelqu'un d'autre, vous ayez une belle pelote en main, c'est tiède. D'accord, ok. Voilà les différentes étapes.
- Benoit de Larouzière
Ok, donc ça c'est super clair. Vous êtes combien aujourd'hui à travailler à la filature Fonty, un peu pour nous donner un ordre d'idée ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
On est à... Alors, il faut que je me compte dedans, que je compte les gens qui sont un petit peu électroniques, mais aujourd'hui on est 26 ou 27, selon la manière de compter. D'accord. Alors nous venons d'une époque très difficile. Au milieu des années 2000, c'est-à-dire en 2006 en particulier, il y a eu des... Il y a eu des années noires avec des faillites successives. Donc la filature avait recommencé avec 5 ou 6 personnes en 2006. D'accord. Donc on est plutôt dans une phase de... Les anglais disent de recovery, c'est-à-dire on est en train de sortir la tête de l'eau. et on est plutôt dans une phase d'investissement, de prise de risque, en disant qu'on est un peu surdimensionné par rapport à notre marché, mais c'est le seul moyen pour nous d'assurer l'avenir, et surtout de transmettre les savoir-faire entre des équipes qui se rapprochent de la retraite, pour le dire publiquement, et des équipes qu'il faut former, des jeunes qu'il faut former, et un teinturier ça ne se forme pas en un an, ça se forme en 10 ou 15 ans.
- Benoit de Larouzière
d'accord ok donc on est un peu moins de 30 je dirais d'accord moi ce que je voulais savoir du coup c'est que maintenant qu'on a vu un peu les grandes étapes j'aimerais bien qu'on arrive à la partie teinture j'aimerais bien que sur cette partie là vous puissiez m'expliquer comment ça fonctionne est-ce que vous travaillez ou avez travaillé du végétal quels sont vos retours d'expérience, qui sont les personnes qui vous ont demandé du végétal, est-ce que cette demande augmente, diminue, et votre propre avis à vous sur la teinture végétale, objectivement, qu'est-ce qui marche, qu'est-ce qui ne marche pas, et comment pour vous ça pourrait se développer, qu'est-ce qui ferait que ce serait pertinent de développer la teinture végétale.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors que des bonnes questions, je vais commencer en déminant un peu le terrain sur d'abord ce que c'est que la teinture. Vous avez plusieurs types de teintures d'un point de vue industriel disponible. Vous pouvez teindre de la matière, c'est à dire teindre des fibres. Vous pouvez teindre des échevaux de fil, vous pouvez teindre des cônes de fil, vous pouvez aussi teindre, faire de ce qu'on appelle de la teinture sur pièce, c'est-à-dire teindre directement des bouts d'étoffes qui ont déjà été tissés ou filés. Donc nous, nous faisons essentiellement... Je pense qu'aujourd'hui les ratios sont à peu près les suivants. Nous faisons 35% en volume de la teinture sur bourre, de la teinture de matière, qui est quelque chose que plus personne ne veut faire et au contraire que nous redéveloppons. Ça nous permet d'inverser les procédés, c'est-à-dire on teint de la matière pour en faire du fil, au lieu de fabriquer du fil pour le teindre ensuite. Ça nous permet d'avoir des coloris beaucoup plus riches, beaucoup plus lumineux, profonds, que quand on teint du fil. On développe beaucoup de cette technique-là qui est économiquement la plus onéreuse parce qu'elle demande beaucoup d'étapes, c'est un peu un chien d'an comme procédé.
- Benoit de Larouzière
D'accord. Merci.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Historiquement, jusqu'à il y a 5 ans, on faisait 95-98% de notre activité de la teinture sur fil en échevaux. Aujourd'hui, on est à peu près à 70% de notre activité en teinture sur fil en échevaux. Donc ça, ça met en œuvre un certain nombre de machines qu'on appelle des barques de teinture. Le procédé est assez facile à décrire. On va suspendre des échevaux dans des structures métalliques. pas les mettre en tension mais les empêcher de bouger trop, on va plonger ces structures métalliques dans des bains, et ces bains on va les faire agiter par des puissantes pompes qui changent de sens à peu près toutes les 30 secondes, et on va faire mijoter nos échevaux dans ces bains pendant 3 à 5 heures, en faisant monter tout doucement la température, moins d'un degré par minute, et en faisant baisser le pH. on descend jusqu'à des pH de 4, 4,5. La conjugaison de ces deux phénomènes physiques, c'est-à-dire montée de température et baisse du pH, en fait... on remplace ce que les teinturiers végétaux utilisent, c'est-à-dire le mordansage. En fait, en faisant baisser le pH, en montant la température successivement, on ouvre un certain nombre de parties des fibres, des écailles qui forment la fibre de la laine. Je ne vais pas rentrer dans les détails chimiques, mais grossièrement, on ouvre des petits radicaux qui vont permettre à la teinture d'aller se fixer. Le pigment de teinture, il faut vraiment se fixer chimiquement. D'accord. Et on fait monter la température jusqu'à 98 degrés, très exactement, avec différents paliers. pour éviter, même pas au-dessus de 100°C, parce que là on dénature la pime, et on monte tout doucement à moins d'un degré par minute pour éviter le feutrage. Une fois qu'on a passé nos 3, 4, 5 heures de préparation de soupe, pour ne pas parler tellement, la teinture se fixe dans la laine, et nous, nous avons pour objectif de faire ce qu'on appelle de la teinture raisonnée, c'est-à-dire que... théoriquement, 100% des pigments que nous avons mis dans la solution de teinture se sont fixés à la fibre. 100% ? Oui, 100%. C'est-à-dire que le bain de teinture, on fait par exemple une teinture noire, le bain de teinture, à la fin du procédé, c'est de l'eau claire. Vous avez un film noir, ébène, et une eau transparente. Presque l'eau d'un torrent des Alpes. Je dis presque parce que visuellement ça donne cette impression, je déconseille de boire cette eau parce qu'il y a toujours des petits reliquats de pigments et de produits qui accompagnent les pigments et puis surtout il y a un pH qui est de l'ordre de 4. Mais on a quand même utilisé 100% des pigments qui se sont fixés dans le fil. Il peut arriver qu'il soit mal fixé, c'est ce qu'on appelle le dégorgement. Ça arrive une fois sur cent. ça nous arrive aussi je ne peux pas dire le contraire et dans ce cas là c'est une erreur de notre part c'est qu'on n'a pas assez bien testé la fixation de ce pigment mais normalement le pigment est fixé une bonne fois pour toutes et si vous avez mis 25 grammes et 90 milligrammes de pigment et 25 grammes et 90 milligrammes de pigment de la solution sont fixés dans la laine à la fin du procédé Je dis ça parce que ça permet du coup de rejeter dans les eaux usées des choses qui ne sont pas polluantes ou quasiment pas polluantes. C'est un deuxième avantage, c'est que d'un point de vue économique, évidemment ça coûte très cher, on n'utilise pas plus qu'il en faut. Donc c'est ce qu'on appelle la teinture raisonnée, qu'on oppose souvent sur la teinture des chevaux à la teinture par saturation, où en gros on sature un bain d'une couleur, on plonge le fil dedans, le fil absorbe ce qu'il peut absorber, ça va très vite. Et on déverse. Et le reste de la solution, il est encore 30 ou 40% du pigment qui est encore là et qu'on va déverser dans la nature ou qu'on va essayer de dépolluer. Voilà, ça c'est l'étape principale, c'est l'étape de pigmentation du fil. Bien sûr, il y a des étapes avant et après, il y a des étapes d'abord de préparation du fil, c'est-à-dire qu'on va le dégraisser, on va le laver, on va le rincer, ensuite on va le pigmenter avec cette opération de teinture, ensuite on va le rincer à nouveau, l'essorer, le sécher et souvent le vaporiser, c'est-à-dire le plonger dans une espèce de cocotte minute géante. pour redonner au fil son gonflant et fixer définitivement les torsions du monobrin et de l'assemblage.
- Benoit de Larouzière
D'accord, ok.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Voilà. Donc tout ça pour vous dire que, en gros, le procédé de teinture que nous utilisons essentiellement, c'est de la teinture raisonnée, donc sans résidu. tellement peu que quasiment tout ce qui pourrait rester en suspens dans l'eau, de toute façon, est absorbé par notre station d'épuration des eaux, qui est couplée juste derrière. nous rendons à la rivière de l'eau plus propre que celle que nous pompons, ce qui est quand même un comble. Oui,
- Benoit de Larouzière
ce qui est quand même à signaler. J'avais lu une étude qui disait qu'il y avait aujourd'hui en teinture industrielle à peu près 15% des pigments qui n'adhéraient pas du tout à la fibre et qui partaient directement dans l'eau. C'est un chiffre de 2.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
C'est-à-dire qu'il y a 0%, donc on peut baisser la moyenne. Oui, teinture raisonnée. Oui, on a fait beaucoup d'efforts sur la formulation des teintures et la fabrication de la formule chimique qui va être utilisée pour donner une couleur recherchée. On fait beaucoup d'efforts pour éviter justement qu'il y ait des résidus. Il faut que 100% soit absorbé.
- Benoit de Larouzière
Et alors ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
On parle de plus d'ailleurs dans notre procédé de recherche.
- Benoit de Larouzière
D'accord. Et alors, moi, ce que je voulais savoir, maintenant qu'on a vu les différentes manières de teindre, les avantages que vous avez développés avec votre process, c'est quoi la répartition de la teinture végétale par rapport à la teinture synthétique ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Je vais prendre la question, évidemment, pour votre chaîne. Historiquement, nous avons fait beaucoup plus de teintures végétales il y a une dizaine d'années qu'aujourd'hui, parce que nous avions quelques petites marques de laine. Quand je dis petites, ce n'est pas péjoratif, mais au sens avec des petits volumes. Ils nous demandaient de faire de la teinture végétale pour elles, et de leur faire des gammes de couleurs en teinture végétale.
- Benoit de Larouzière
Et elles ont arrêté ces marques ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
elles ont pour la plupart arrêté parce qu'elles teignent elles-mêmes maintenant. Elles ont développé leur propre atelier de teinture. quand vous... Je ne suis pas du tout à opposer la teinture végétale et la teinture de synthèse. Mais je pense que les deux ont leur raison d'être et leurs avantages. Et donc, il ne faut pas être trop manichéen. Il faut juste regarder dans quel contexte on en parle. À notre échelle, quand nous faisons des lots de teinture, le plus petit lot que nous faisons, c'est à peu près 10 kilos, même 14 kilos. Quand nous teignons 14 kilos de teinture, si nous le faisons en teinture végétale, l'avantage de la teinture végétale, c'est que c'est magnifique, c'est très satisfaisant d'un point de vue écologique, en tout cas en première réflexion. Il n'y a pas d'industrie chimique derrière. Mais l'inconvénient de la teinture végétale, c'est qu'on a beau mordre danser, on a du mal à fixer 100% de la teinture dans les films. Et donc les eaux usées vont se retrouver dans l'environnement avec tous les reliquats de teinture qui n'ont pas été fixés. de l'héroïne 4 pigments. Donc à notre échelle, quand on fait une teinture, une petite barre de teinture, c'est 14 kg, la plus grosse, c'est 250. Quand vous faites une teinture même de 25 kg, la quantité de pigments qu'on reverserait dans nos eaux usées ne serait pas digérable, entre guillemets, par notre station d'épuration. En gros, on serait beaucoup plus polluant en faisant de la teinture végétale qu'en faisant de la teinture de synthèse raisonnée. Et donc à notre échelle, vu les volumes que nous passons en teinture, ce serait une absurdité écologique de faire de la teinture végétale. Quand on fait des tout petits volumes, des toutes petites capsules de 1 kg, 2 kg, 4 kg, ça s'entend, on peut faire de la teinture végétale. Mais à l'échelle de Fonty... on tient à peu près 350 kg à 500 kg de laine par jour si on faisait tout en teinture végétale je pense que la rivière deviendrait un arc-en-ciel qui changerait de couleur tous les jours mais alors
- Benoit de Larouzière
Moi, ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi c'est plus compliqué de fixer de la teinture végétale à vos fibres si elles sont bien préparées. Normalement, moi, dans mes formations à petite échelle, on voit bien que ça accroche bien la couleur.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Parce que la teinture de synthèse, c'est vraiment de la chimie. C'est-à-dire que vous avez une formule qui s'applique, et qui s'applique, et ça marche à tous les coups. La teinture végétale, c'est un peu plus empirique. Et selon la provenance du pigment que vous utilisez, le lieu où il a été récolté, la saison où il a été récolté, la variété de la plante qui a produit ce pigment, la variété exacte, vous n'allez pas avoir les mêmes réactions. Ce qui m'amène d'ailleurs à un deuxième sujet sur la teinture végétale par rapport à ce que nous faisons nous. c'est que nous avons une marque avec une collection et donc nous garantissons nos clients une certaine tenue de couleur. C'est-à-dire que quand vous achetez le jaune 343, d'une fois sur l'autre, ça doit toujours être le même. Si nous le faisons en teinture végétale, une fois vous aurez du jaune pâle, une fois vous aurez du orange pâle, une fois vous aurez du gris pâle, vous n'aurez jamais la même pigmentation. Or nous, notre... Notre credo c'est d'offrir une richesse de couleurs inégalée sur le marché, donc avec des très subtiles variations d'un coloris à l'autre. Donc si le 313 se confond avec le 314, il n'y a plus aucun sens. à la fois pour des raisons écologiques mais aussi des raisons économiques mais également des raisons de process et de stabilité du process d'une nature sur l'autre on n'a pas vraiment le choix En tout cas pour notre marque, nous ne le faisons plus. Nous le faisons à la demande. Si vous avez besoin d'une teinture végétale pour une capsule que vous achetez chez nous, on peut vous le faire, on vous fait un devis. Mais ça ne fait pas partie de notre mode de fonctionnement standard et privilégié. encore une fois je n'oppose pas la teinture de synthèse je dis juste à notre échelle ça n'a aucun sens à l'échelle d'une teinturière d'un artisan qui fait un kilo de laine dans sa bassine oui évidemment qu'il faut faire de la teinture végétale et c'est très satisfaisant mais voilà pour nous ça manque il y a un dernier argument qui m'il contre pour nous c'est que il y a un dernier argument nous avons une marque, nous avons donc une sorte de service client auprès de nos clients et autant on a des clients très bienveillants qui comprendraient que la teinture que nos fils puissent passer un peu dans le temps, que le jaune devienne moins vif au bout d'un an, mais pour 90% de nos clients, ils ne sont pas aussi bienveillants que ça et ils vont se plaindre en disant je vous ai acheté un jaune canari et je me retrouve avec un jaune qui ressemble plutôt à du transparent et donc la tenue des pigments d'origine végétale c'est un vrai sujet pour nous on ne sait pas garantir cette tenue alors peut-être des artisans ont des recettes mais nous on ne les a pas
- Benoit de Larouzière
D'accord, donc aujourd'hui, historiquement, vous le faisiez. Maintenant, les gens, ces marques de laine, se sont créées leurs propres ateliers. On a reçu notamment, je ne sais pas si vous connaissez, ces Maisons Septembre. Et donc, elles nous expliquaient qu'elles teignaient ces laines et qu'elles ne proposaient que des laines teintes végétalement. Donc, je pense que vous pensez à des acteurs comme ça. D'accord, donc ça, historiquement, vous aviez la demande, aujourd'hui, moins, mais vous continuez à faire à façon, entre guillemets, si on vous demande. vous êtes ok pour réaliser des devis et regarder un petit peu ce que vous pouvez faire, d'ailleurs dans ce cadre là est-ce que c'est vous qui avez vos propres fournisseurs de pigments naturels de couleurs végétales on va dire, ou c'est la personne qui veut teindre, qui amène ces pigments ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors les deux si vous voulez, nous on a nos propres pigments, on en a quelques kilos si besoin mais euh... quelqu'un veut venir avec des pigments et nous dire vous utilisez tel mordant, vous utilisez tel pigment et c'est moi qui vous fournis tout pourquoi pas, on peut faire les essais et tout est possible d'accord,
- Benoit de Larouzière
tout est possible et ce que je voulais savoir c'est est-ce que vous avez eu des clients qui ont eu des demandes spéciales sur la teinture végétale est-ce que vous nous parlez un petit peu de vos partenariats sans forcément donner les noms mais de choses spéciales que vous avez pu faire sur la teinture végétale
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors, pour être totalement transparent avec vous, on n'en a quasiment pas fait, je pense, depuis trois ans. On n'a pas eu de demande. Parce que je pense que, pour une raison que j'ignore, on peut avoir l'intuition de la réponse, mais la teinture végétale est une teinture artisanale. et la plupart des gens qui souhaitent avoir des laines en teinture végétale sont en général des artisans. Et dans le mot artisan, on n'est pas très loin de l'artiste, c'est-à-dire qu'ils veulent réaliser leur propre couleur à leur manière. Oui,
- Benoit de Larouzière
d'accord.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Nous, on est plus industriels qu'artisans, même si on est semi-industriel parce qu'on n'est pas à la pointe de la modernité. Mais je pense qu'on répond mal à... même pas un besoin, c'est une envie, à l'envie des personnes qui veulent de la teinture végétale, qui voudraient venir surveiller le process et nous dire rajoutez un petit peu de jaune, remettez-moi un peu de rouge, rajoutez un petit peu de pomme de perlimpinpin, ce sera plus joli Ça, nous, on ne sait pas travailler comme ça. Oui,
- Benoit de Larouzière
d'accord.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
On a des outils qui sont très utilisés, très sollicités, c'est des outils industriels quand même, et on n'a pas cette disponibilité du… d'un atelier ouvert à un artisan qui vient faire ses essais.
- Benoit de Larouzière
Ouais, expérimental ou… Ouais, d'accord, je comprends bien.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
L'expérience, on a une espèce d'exigence de rigueur et de reproductibilité de ce qu'on fait, qui n'est pas tout à fait compatible avec les actifs naturels. D'accord, ouais, je comprends, je comprends bien. Je ne peux pas vous donner d'exemple, si j'en avais, je ne sais pas si je le citerais, mais je pense que sur la planète laine française, ou en tout cas francophone, on peut estimer que 60 à 80% des teinturières végétales utilisent, entre autres, nos fils. je ne dis pas exclusivement mais je pense que il n'y a pas beaucoup de teinturières végétales, de personnes intéressées par ces techniques qui n'utilisent pas nos fils nos bases et puis vous avez une superbe,
- Benoit de Larouzière
c'est ce que je disais tout à l'heure vous avez un super catalogue j'invite vraiment les gens à les regarder parce que c'est bien fait sur votre site on arrive tout de suite à identifier les fils prêts à teindre j'ai même vu que vous faisiez des kits de teinture c'est un peu le petit
- Pauline Leroux ArtEcoVert
bémol que j'apporte à ce que je vous ai dit sur le fait que nous ne faisons pas de teinture végétale ou quasiment pas c'est que pour répondre à toutes les objections qui disent mais pourquoi, c'est trop dommage ? L'argument que je vous ai développé sur le fait que c'était difficile de le faire à l'échelle industrielle, que c'était polluant à l'échelle industrielle, que c'était difficile de le reproduire d'une teinture sur l'autre, d'un bain sur l'autre, d'avoir la même couleur, ça tenait mal dans le temps. Par contre, on propose à nos clients qui sont intéressés de faire chez eux de la teinture végétale. Alors, on a développé des petits kits où vous achetez une boîte avec un mode d'emploi très simplifié. qui vous permet de vous initier à ce que c'est que la teinture végétale. Et un après-midi, vous avez réalisé, sur une base de laine de Merinos, la teinture de votre choix, que ce soit Sorbo, Cochny, Indigo. Alors, je vous ai cité des noms de teintures végétales qui ne sont pas tout à fait en ligne actuellement, enfin, pas tout à fait disponibles, mais qui vont l'être bientôt. Mais en gros, je crois qu'actuellement, on a six... qui quittent différents et qu'on va passer un peu plus bientôt.
- Benoit de Larouzière
Donc, ça veut dire quand même qu'il y a...
- Pauline Leroux ArtEcoVert
C'est vraiment de l'initiation. Oui. C'est vraiment de l'initiation. C'est-à-dire qu'un puriste, un artisan un peu puriste, dirait, mais Fonty, il marche sur la tête. ils ne font pas un bain de mordansage, ils font le mordansage en même temps que la teinture. Ce qui est, j'en conviens, n'est pas forcément la doxa, ce type de pratique, mais en tout cas, ça marche et ça donne envie d'aller un peu plus loin.
- Benoit de Larouzière
Oui, c'est pour titiller les créatifs et s'essayer. Et alors, du coup, vous dites que vous avez six kits et que vous allez augmenter. C'est qu'il y a quand même une demande, mais c'est une demande plutôt artisanale. Oui.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Je pense que c'est moins artisanal que ce qu'on appelle les arts créatifs. Vous savez, en gros, au moment du premier confinement du Covid. Le confinement a failli définitivement tuer notre activité, notre filature en particulier, pour des raisons économiques, parce qu'il n'y avait plus un sou en caisse, on ne vendait plus rien, on ne pouvait plus payer les gens, etc. Mais le Covid a quand même donné envie à des tas de gens qui étaient bloqués chez eux de se remettre à tricoter, à bricoler. Et donc dans ce cadre-là, il y a beaucoup de gens qui se sont mis à la ceinture végétale, et qui nous disent j'aimerais m'y mettre, comment je fais ? Donc on s'est dit au fond qu'on pourrait développer des kits un peu plus variés. pour répondre un peu plus largement à cette demande. En plus, on a un deuxième... Un gros défaut, c'est que quand on fait quelque chose, comme je vous l'ai dit sur les couleurs, on ne le fait pas à moitié.
- Benoit de Larouzière
Vous voulez avoir une large gamme.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
On veut avoir une large palette. Donc, il y a beaucoup de noms de plantes teintoriales avec des noms qu'il faut rêver. et donc on se dit c'est quand même trop bête de ne pas les avoir donc on les développe super, donc à suivre il y aura des nouveaux kits sur votre site dans les merceries dans les merceries c'est vrai d'accord c'est un peu de catalogue de démonstrateurs pour tous ceux qui s'intéressent aux belles laines françaises voilà
- Benoit de Larouzière
d'accord j'avais ok J'avais des questions sur la transmission donc comment vous transmettez votre savoir vous en avez parlé un petit peu avec votre compte Instagram en plus de vos portes ouvertes est-ce que vous faites des interventions dans des formations je pense à un enregistrement qu'on a fait avec l'ENAMAC est-ce que vous avez des liens avec des écoles des écoles de design des écoles d'agriculture d'ingénieurs agro est-ce que Vous pouvez nous parler un petit peu de votre transmission, parce que comme vous le dites, vous n'êtes plus que 3 à 5 filateurs de laine ouvertes en France, il ne faudrait vraiment pas que ça se perde, comment vous faites pour transmettre tout ça ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors c'est une excellente question, d'ailleurs c'est quasiment la principale préoccupation de... du chef d'entreprise, c'était ma responsabilité aussi de faire attention à ça. Donc, c'est très compliqué. D'abord, il n'y a plus de formation en France sur tous ces métiers, que ce soit les métiers de teinture ou les métiers même de filature. il n'y a plus assez d'acteurs pour que les pouvoirs publics s'intéressent à ces métiers-là. Donc en gros, les formations, elles sont internes. Donc on embauche les gens sur des critères du goût et de l'appétence qu'ils montrent pour s'intégrer dans l'équipe et pour travailler. Et puis on les forme sur classe. Alors la teinture, un teinturier, ça... L'expérience et les intéressés disent qu'il faut entre 10 et 15 ans pour devenir autonome en teinture, en teinture dans ce cadre industriel. En filature, il y a des métiers plus compliqués que d'autres, il y en a qui demandent beaucoup de technicité, de connaissances, d'expérience, puis d'autres se forment beaucoup plus vite. Il n'empêche qu'on a beau se former vite, il faut du temps quand même pour apprendre les gestes, pour que ça devienne naturel, pour avoir les bons réflexes, pour repérer une anomalie sur un fil ou un bruit qui n'est pas normal sur une machine et qui laisse présager qu'une anomalie sur tous les fils va se déployer. Donc ça prend un peu de temps. Ça c'est le premier truc, on forme les gens en interne, c'est du tutorat interne et on fait des choses. et ça fait partie de la proposition d'embauche, c'est qu'on espère que les gens vont rester un peu longtemps parce que ça prend du temps de les former.
- Benoit de Larouzière
Oui.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
La deuxième chaise, c'est qu'on essaye de faire connaître tous ces métiers à travers les portes ouvertes, pour donner une existence, si vous voulez, quelque chose qui n'existe pas dans la tête des gens, disparaît petit à petit. donc voilà intéresser le grand public à ces métiers, les faire rêver en leur disant, vous voyez quand vous tricotez un fil de laine c'est passé par ces mains là par ces personnes là qui ont touché qui ont mis du savoir-faire à chaque fois on a essayé de développer je vous l'ai dit ce compte Instagram sur un concept un peu original qui est de bien sûr, parler de Fonty, mais c'est surtout de parler de Fonty pour montrer le savoir-faire, montrer les machines, les trucs, la complexité de toutes les étapes qui amènent à faire un beau film. Et sans en faire de pub intempestive, je pense que ça vaut le coup d'aller regarder sur notre compte Instagram, Fonty underscore Ophitel, l'historique, parce qu'il y a plein de trucs et astuces. Je ne sais pas, il y a 600 posts depuis 4 ans. Il y a plein de photos qui expliquent à chaque fois les problématiques qui se posent à telle ou telle étape de transformation. On essaie de déminer le terrain et l'expliciter. On travaille avec évidemment beaucoup d'écoles, mais plutôt qu'en tant que fournisseurs. On est rarement associé à un programme de... transmission de savoir sur le tissage, le tricot, etc. On est plutôt le fournisseur ou le compagnon de route. D'accord. Évidemment, il y a beaucoup d'écoles qui ont pignon sur rue, soit des écoles type Arleco, Beaux-Arts ou d'autres, je ne sais pas, l'école Boum, des choses comme ça. Il y a aussi des écoles plus... de grandes marques, vous savez que vous avez de plus en plus d'ateliers de confection qui utilisent des matières premières et qui forment elles-mêmes leurs équipes. Donc vous avez des écoles de grandes marques qui font appel à nous, ou même des musées qui font appel à nous, en disant voilà on voudrait parler de ça, est-ce que vous avez des exemples à nous donner, est-ce qu'on peut développer des choses. On est assez content et fier aussi de travailler pour des institutions un peu emblématiques. que sont des musées, des conservatoires ou des grandes institutions de l'État, que je ne vais pas nommer, mais qui sont ce que la France fait de mieux en matière de conservation de mobilier, de tapisserie, de choses comme ça. Voilà, on fait partie de cet écosystème, ce n'est pas tout à fait un écosystème, mais de tout cet ensemble de... de gens qui se préoccupent de cette filière, et on y est forcément. Et puis enfin, on a un rôle associatif assez poussé, vous avez parlé de l'ENAMAC tout à l'heure, l'ENAMAC a été créé par FONTI en 2007 ou 2008, et donc FONTI est évidemment partie prenante de l'ENAMAC, même si nous ne sommes pas au cœur du réacteur. Les namaques, c'est plutôt autour de la valorisation de la laine et non pas la transformation. C'est plutôt les métiers de l'aval, le tissage, la tapisserie, la haute lisse, la basse lisse, la fabrication de tapis, la teinture éventuellement d'ailleurs. L'ENAMAC c'est une très belle association qui à la fois dispense des formations assez poussées et même maintenant diplomate et reconnue par l'État, et en même temps se préoccupe de la filière, de lancer des actions pour essayer de dynamiser la filière, trouver de nouveaux débouchés, valoriser certains métiers, etc. Donc évidemment on est très actif chez l'ENAMAC aussi, pas assez certainement, mais ça fait partie quand même de notre... de nos extensions entre guillemets naturelles.
- Benoit de Larouzière
D'accord, alors j'ai des petites questions.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Tout le monde est sociétique en général.
- Benoit de Larouzière
Ok. Les petites questions rapides de la fin, on va dire. Si vous étiez une plante teintoriale ou un kit d'initiation à la teinture, quelle plante teintoriale vous choisiriez et pourquoi ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Je vais faire dans la simplité, j'aime beaucoup le murier. Vous savez que le murier, c'est aussi la plante qui nourrit le ver à soi. C'est un arbre assez... Une ombre poussée, très marquée. C'est l'arbre qui fait de l'ombre, en gros, dans tout l'arc méditerranéen, le murier. C'est une plante que j'aime bien. Il se trouve que ça fait une couleur assez jolie aussi.
- Benoit de Larouzière
d'accord top votre fibre de prédilection ou votre laine de prédilection que j'ai vu, vous en proposiez beaucoup sur votre site, celle que vous préférez alors,
- Pauline Leroux ArtEcoVert
personnellement j'aurais mauvaise grâce à vous dire autre chose que la laine évidemment, Fonty a éliminé tout ce qui n'est pas fibre naturelle de ses productions Et quand même, 70% de nos approvisionnements, c'est de la laine vierge, de la laine de mouton. Bien sûr, on fait aussi de la laine de chèvre, c'est-à-dire du mohair, on fait de la laine de lapin.
- Benoit de Larouzière
Du yac, j'ai vu.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
On fait du yac, absolument, du chameau, on fait aussi des fibres végétales, du coton, du lin. on a tenté une lortie, on a fait des choses comme ça. Mais je ne peux pas vous dire autre chose que l'haleine. J'ai peur de la filière laine.
- Benoit de Larouzière
Est-ce que vous auriez un livre à recommander sur la filature, les métiers de la filature ? Un livre qui vous a plu ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Oui. Vous avez récemment, il y a deux ou peut-être trois ouvrages intéressants à mon avis sur le sujet. Il y en a un qui a été écrit par une créatrice de modèles de tricot qui s'appelle Alice Hammer, qui est assez connue du tricot en France et un peu en Europe. Elle a écrit un livre qui s'appelle French Tricot, où elle explore en gros la filière laine française, où elle va voir chacun des acteurs de cette filière en essayant de trouver l'inspiration et de créer des modèles de tricot autour de ce qui est dit. Donc ça c'est un livre à mon avis assez complet sur l'état de la filière. Vous avez une autre créatrice qui s'appelle Mylène Delarue, qui a écrit un assez joli livre qui s'appelle L'ayette pour les tout-petits et dans lequel elle essaie de décortiquer aussi les difficultés de la filière laine dans sa préface et ses pages d'introduction. Et puis, vous avez une créatrice assez engagée sur tout ce qui est laine éthique, laine écologique, qui s'appelle Charlotte Vannier, qui a écrit un ouvrage qui s'appelle Tricoter éthique et responsable qui est un joli livre d'abord sur les modèles qu'elle propose, mais surtout sur les sources d'approvisionnement pour avoir des fils d'origine contrôlée, éthique, responsable, engagée. D'accord. Il y a évidemment trois ouvrages qui parlent d'Hélène Ponty, c'est pour ça que je l'écoute.
- Benoit de Larouzière
Oui. ça va plaire à nos amis artisanes qui sont fans de tricot quels sont vos prochains projets vous avez parlé Benoît de vos différenciations avec notamment une gamme de couleurs très variée, un process qui permet de ne pas dégager dans l'eau des polluants ou des colorants vous vous développez aussi sur les kits prêts à teindre Quels sont vos projets futurs, vos prochains défis et vos singularités ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors, nos prochains défis, au-delà de la transmission du savoir-faire, qui est quand même le cœur de nos préoccupations, on a quand même une équipe, une partie de l'équipe qui… tient le savoir-faire dans sa tête et dans ses doigts qui va partir dans les prochaines années en retraite. Au-delà de tout ça, le grand défi actuel, c'est se battre simultanément sur... les ressources alors quand je dis les ressources on est des gros consommateurs d'eau et on est des gros consommateurs d'énergie ça a l'air de rien mais notre facture de gaz qui nous permet de faire les teintures elle a été multipliée par 4 en l'espace de 3 ans je parle à volume constant elle a été beaucoup plus importante que ça parce qu'il se trouve qu'en plus on a fait un peu de croissance depuis 3 ans mais en gros nos prix unitaires d'acquisition de gaz et je vous parle même pas de l'électricité. Donc le grand défi des trois prochaines années c'est d'acquérir l'autonomie énergétique maximale. Donc on est en train de déployer un projet avec deux facettes. D'abord générer de l'énergie photovoltaïque sur nos toitures et ensuite de générer de l'énergie hydraulique en utilisant Tout l'hiver, l'eau de la petite rivière dans laquelle on a les pieds s'appelle le Cher. qui est une source d'inquiétude aussi, parce que depuis cinq ans, le chair, à trois reprises, a été totalement sec, ce qui n'était jamais arrivé de mémoire d'homme, enfin depuis des millénaires. Donc le chair lui-même commence à être une source d'inquiétude, c'est lui qui nous fournit en partie dans l'eau dont nous avons besoin. Donc il faut qu'on réfléchisse aussi à l'autonomie sur le plan de l'eau, la récupération des eaux de pluie, le stockage de l'eau. il ne s'agit pas de faire des méga-vaccines, mais il s'agit de pouvoir continuer de travailler quand il commence à y avoir des pénuries d'eau.
- Benoit de Larouzière
D'accord.
- Pauline Leroux ArtEcoVert
C'est ça, Louis.
- Benoit de Larouzière
Vous avez peut-être entendu parler des... Je ne sais pas si on dit le terme teinture à sec, mais les teintures sans eau, etc. Vous avez testé ?
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Je n'ai jamais testé, et pour tout vous dire, je suis assez dubitatif. Mais je ne vais pas m'étendre là-dessus parce que je ne suis absolument pas légitime pour en parler.
- Benoit de Larouzière
mais je ne connais pas bien c'est un sujet que j'aimerais bien creuser parce qu'on me parle souvent on était là avec un ennoblisseur en Angleterre, Pinkcroft qui me parlait justement du même défi que vous sur l'énergie etc et qui me parlait que il se renseignait sur notamment d'autres manières de teindre pour faire des compromis et des poids différents donc c'est pour ça que je vous me posais la question j'ai une dernière question à vous poser Benoît c'est à qui vous aimeriez passer le micro à qui vous aimeriez qu'on fasse le même exercice qu'on a fait aujourd'hui c'est à dire discuter sur un sujet essayer de l'approfondir et donner encore de la visibilité à des acteurs donc si possible en lien avec la teinture végétale et les fibres comme je vous dis qui est aussi un sujet qu'on essaye de bien traiter sur le podcast n'hésitez pas à me dire à qui vous pensez
- Pauline Leroux ArtEcoVert
Alors, il y a plein de gens auxquels je penserais. Il y en a un auquel je pense en particulier qui n'est pas tout à fait dans le périmètre que vous venez de citer, mais qui peut vous intéresser. Ce serait un garçon qui s'appelle Stéphane Assolari, qui a repris un peu dans les mêmes conditions que moi il y a 7 ans. Lui, il l'a fait il y a 5 ans. Il a repris une entreprise absolument extraordinaire qui s'appelle la Corderie Palu. D'accord. Et... dans le nord du Périgord, et qui est une des dernières entreprises qui fabrique des cordes en chanvre. Et c'est absolument extraordinaire ce qu'il fait. Et puis c'est une entreprise qui a beaucoup souffert, donc il essaye de la remettre d'aplomb. Mais je pense qu'il aurait des tas de choses à dire sur le chanvre, l'utilisation du chanvre, les procédés qu'il utilise pour valoriser ce chanvre et en faire des belles cordes.
- Benoit de Larouzière
top ouais en plus on a eu un accord c'est un peu le chien de la peinture et voilà ok top donc Stéphane Assolari la corderie pas lue ok est-ce que Benoît il y a une question que je ne vous ai pas posée et que vous auriez aimé que je vous pose non
- Pauline Leroux ArtEcoVert
non écoutez je vous ai trouvé très pertinente dans vos questions et puis ça s'est passé tout à fait comme Je pense qu'on a fait le tour essentiel. Je pense qu'on a bien. C'est dommage, j'aurais dû dire ça à Pauline, mais pour le moment, ça va.
- Benoit de Larouzière
Ok, super. En tout cas, Benoît, je vous remercie pour votre précision parce que vous nous avez vachement éclairé sur les différentes étapes. Moi, personnellement, ça m'a appris plein de choses. Je suis aussi contente que vous nous ayez donné votre avis objectif sur la teinture végétale parce que le but, ce n'est pas de mentir et c'est bien aussi de se poser des questions pour relever des défis et trouver des solutions. donc je voulais vraiment vous remercier et je mettrai en lien et votre compte Instagram pour que les gens aillent voir et votre site internet pour les personnes qui cherchent et qui me demandent à chaque fois où elles peuvent trouver du fil et donc je vous remercie vraiment beaucoup merci Benoît et
- Pauline Leroux ArtEcoVert
bien merci de votre écoute et de vos questions très pertinentes Pauline à bientôt