- ArtEcoVert Pauline Leroux
Bonjour et bienvenue dans le podcast ARTECOVERT, le podcast qui vous parle d'art, d'écologie et de verdure. Je suis Pauline Leroux, ingénieure agronome passionnée de plantes, et je vous emmène à la découverte de la couleur végétale et de toutes ses applications. Que ce soit dans le textile, l'ameublement, l'artisanat, la décoration et dans d'autres domaines, chaque jeudi et samedi à 7h30, je vous propose des épisodes riches avec des invités passionnants. pour approfondir le sujet de la couleur végétale sur toute la chaîne de valeur. Mon but, fédérer et démocratiser la couleur végétale dans le monde. Alors c'est parti, bonne écoute ! Donc bonjour à tous, je suis ravie d'accueillir sur le podcast ArtEcoVert Elodie Choque. Bonjour Elodie !
- Elodie Choque
Bonjour Pauline !
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Alors Élodie, ça fait un moment qu'on voulait enregistrer ensemble. Je vous invite pour deux raisons. Je voulais parler avec vous des champignons qui donnent de la couleur et je voulais aussi vous inviter pour la série de l'été sur les biotechnologies et notamment, encore une fois, les champignons. Mais avant tout ça, j'aimerais que vous puissiez vous présenter pour les auditeurs, raconter votre parcours qui vous a amené à étudier les champignons.
- Elodie Choque
Ok. Bonjour, je me présente, je m'appelle Elodie Chocq, je suis maître de conférence à l'université de Picardie-Vulverne et j'enseigne la microbiologie et la biologie moléculaire à l'IUT d'Amiens au département génie biologique pour les options agroalimentaire et agronomie. Et même mes enseignements sont dans les thématiques du podcast Arécovert. Comment j'en suis arrivée là ? Après le bac, j'ai fait prépa parce que je ne voulais pas partir à la fac, j'étais quelqu'un qui avait besoin d'un cadre et j'aimais beaucoup apprendre. donc la prépa était quelque chose qui me correspondait bien. Et après prépa, j'ai intégré une école d'ingénieurs, j'ai intégré l'ENSAT, l'École Nationale Supérieure Agronomique de Toulouse, où je me suis spécialisée en amélioration du végétal, donc tout ce qui est biotechnologie du végétal, modification génétique, ce genre de choses. Et vraiment, ma spécialité, c'était la modification génétique du végétal, c'est sur ça que j'ai travaillé lors de mon stage de fin d'études. À l'ENSAD, j'ai travaillé sur la modification génétique de bactéries symbiotiques de plantes pour pouvoir travailler sur des options de biocontrôle au champ. Et donc c'est là que j'ai commencé à rentrer plutôt dans le monde de la microbiologie, mais toujours en interaction avec les plantes. Et dans tous les travaux que j'ai faits, il y avait toujours une interaction plantes-micro-organismes. Donc je n'ai jamais travaillé que sur l'un ou que sur l'autre, même si moi je suis plus spécialisée microbiologie, Je suis plus spécialisée. interaction plantes-micro-organismes plus exactement. Pendant que je faisais mon école d'ingénieur, à l'époque on ne pouvait pas passer de thèse avec juste le diplôme d'ingénieur, donc j'ai fait ma dernière année d'école d'ingénieur en double diplôme, avec un master 2 en parallèle. Et après ce master 2, du coup j'ai cherché une thèse pendant un petit moment, et on m'a proposé une thèse sur quelque chose qui n'avait rien à voir du tout avec la soupe, c'était sur les étapes. précoce de la biogénèse du ribosome chez Saccharomyces cerevisiae. Donc là, ça a vraiment ancré mon arrivée dans le monde des champignons avec la levure qui reste malgré tout un champignon. Saccharomyces cerevisiae, c'est plus connu sous le nom de la levure de bière. C'est celle qui sert à faire la bière, le vin, le pain. Du coup, j'ai travaillé à faire des modifications génétiques sur cette levure pendant mes trois ans et demi d'études et à essayer de comprendre. comment certaines protéines produites par la levure pouvaient intervenir dans la production des protéines. Voilà, ça c'est la partie un petit peu très fondamentale de ma thèse. Et clairement, ma thèse ne m'a pas du tout plu parce que c'était beaucoup trop fondamental. Il me manquait d'application. Moi, je venais d'une école d'ingénieur agro et du coup, je ne voyais pas où était l'applicatif dans ce que je faisais pendant ma thèse. Et c'est quelque chose qui m'a manqué. Ce qui fait que quand j'ai commencé à chercher un postdoc derrière, j'ai voulu aller dans le domaine de l'applicatif. Et j'ai trouvé un postdoc à l'époque à Toulouse, donc au laboratoire de génie chimique dans l'unité bioprocédé système micro-viens. J'ai été encadrée par Florence Mathieu pendant mon postdoc, que je remercie sincèrement pour tout ce qu'elle a fait pour moi, en profit. Et c'est Florence qui m'a mis dans le monde des champignons filamenteux. Donc on est passé de la levure, qui était un être unicellulaire. aux champignons filamenteux qui, eux, sont toujours microscopiques, c'est ce qu'on appelle les moisissures en fait, et qui, eux, vont venir faire les petits filaments, les petits sports. C'est typiquement la moisissure bleue que vous pouvez retrouver sur vos fruits si vous les laissez trop longtemps, etc. Et j'ai travaillé pendant mes 4 ans de postdoc sur un champignon merveilleux. qui restera mon préféré à tout jamais, qui s'appelle Astergillus stubingensis. Il a un nom un petit peu particulier. Et cet Astergillus avait la particularité de ne pas être toxique pour l'humain. Il avait été isolé depuis un grain de raisin. Et donc il n'est pas toxique du tout pour l'humain. Il n'y a pas de production de ce qu'on appelle des mycotoxines, donc des toxines produites par les champignons. Mais par contre, il produisait des antioxydants très très efficaces qui étaient quasi... six fois plus antioxydants que la vitamine C elle-même, qu'on essayait d'utiliser en tant que conservateur alimentaire. Donc ça, ça a été mon entrée dans le monde des champignons. À la fin de mon post-doc, j'ai passé les concours pour devenir maître de conférence et j'ai obtenu le poste à Amiens. Et je suis arrivée à Amiens dans un laboratoire qui s'appelait Biologie des plantes et innovation, Biopi, qui depuis 2020 est devenu l'UMRT Bio-Eco-Agro. Mais du coup, quand je suis arrivée en 2017, ça s'appelait Biopip, biologie des plantes et innovation. Et là, on m'a dit, ah oui, mais nous, on travaille sur les plantes, donc les champignons, ça ne va pas le faire. Donc, ce que je faisais sur les champignons, c'est-à-dire l'étude du métabolisme, je l'ai adaptée aux plantes. Et petit à petit, j'ai ramené de l'interaction plante-micro-organisme. Et du coup, maintenant, au laboratoire, je travaille sur cette interaction plante-micro-organisme. Et j'ai réussi à ramener, à faire revenir les champignons dans mon domaine d'application. Voilà,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
globalement. Génial. Alors, j'ai déjà plein de questions, Élodie. Franchement, un parcours super top. Franchement, vous êtes l'invité idéal pour démarrer la série sur les biotech. Pourquoi ? Pour ce lien entre plantes et micro-organismes, c'est exactement la transition qu'il fallait. Je ne savais pas ça de votre parcours, donc c'est encore plus génial. C'est la super découverte pour moi. Alors, j'ai plusieurs... Plusieurs questions. Si je reprends dans l'ordre, quand on reprend la couleur au niveau métabolite secondaire, donc la plante produit des métabolites secondaires pour la couleur. Moi, c'est le sujet du podcast à la base. Et en fait, oui, il y a des micro-organismes qui font la même chose, ou en tout cas qui produisent des pigments. Et ça, c'était un petit peu... Ce n'était pas la découverte, mais de voir que c'était si large et si étendu et qu'il y avait autant de sources, pour moi, ça a été la grosse claque. parce que j'avais l'impression que le sujet avec les plantes déjà était très large. Et en fait, quand j'ai commencé à m'intéresser aux champignons, je me suis dit, oh là là, c'est hyper dense, il y a plein de trucs, etc. Donc, ce que je voudrais voir avec vous, la première chose, c'est les différents types de champignons. Donc, vous avez parlé des levures, donc les champignons unicellulaires. Vous avez parlé des champignons filamenteux.
- Elodie Choque
Voilà, ce qu'on appelle les moisissures.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Voilà, c'est ça, les moisissures, c'est les filamenteux.
- Elodie Choque
C'est les filaments. C'est la famille. Si on utilise le terme scientifique exact, ça s'appelle les ascomycètes. Mais les levures font aussi partie de la famille des ascomycètes. C'est là que ça devient un peu tendancieux. En gros, les champignons filaments se développent. On part d'une spore. La spore gère et elle va produire des filaments, un petit peu comme les racines. Et les filaments vont s'étendre un petit peu partout. Ça marche comme un système racinaire.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Comme les mycorhizes. Comme les mycorhizes entre les racines.
- Elodie Choque
Les mycorhizes, effectivement, c'est exactement ça aussi. Ça fait partie des filaments teus.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
OK, d'accord.
- Elodie Choque
Pas que des filaments teus, mais du coup, ça marche comme ça quand même. Et le dernier type de champignons que vous, vous connaissez, c'est celui qu'on va cueillir dans les forêts, finalement. Et ce type-là, c'est ce qu'on appelle effectivement les macromycètes, ceux qui sont visibles à l'œil nu. Les autres sont les micromycètes, ceux qui sont visibles au microscope. Et les macromycètes sont visibles à l'œil nu. Ce n'est pas un terme consacré, c'est un terme qui est plus facile à comprendre. Et ce que vous observez finalement, c'est une structure qui se monte, cette structure elle s'appelle le carpophore, et donc du coup ce que vous cueillez dans la nature c'est le carpophore, c'est l'appareil de reproduction sexuée de champignons de la famille des Basidiomycètes. Donc quand on a un champignon de Paris, en fait ce qu'on mange c'est l'appareil reproducteur du champignon. Voilà, je préfère le dire, c'est comme ça. Après, voilà. En fait, ce qu'il faut imaginer, c'est que ce carpeau fort, c'est des millions de filaments qui sont collés ensemble et qui forment une structure. Et au bout de ces filaments vont arriver l'endroit où vont pouvoir se faire les spores pour disséminer le champignon. En gros, le champignon lance sa fructification, parce que l'arrivée du carpeau fort, c'est ce qu'on appelle la fructification. C'est comme la naissance d'un fruit sur une plante, si on fait la comparaison. Et donc, c'est parce que là où il est, il est en situation de stress, il n'a plus assez de nutriments. Donc il a besoin de se disséminer. Donc du coup, il va mettre cette fructification en place pour pouvoir produire des spores qui, elles, vont pouvoir aller ailleurs, rechercher de la nourriture. Donc ça reste quand même... défilamenteux parce qu'ils créent des filaments mais ils arrivent à créer des structures très très grandes qui vont permettre d'être visibles à l'œil nu qu'on appelle l'écart peaufort. Et donc on peut manger ou pas parce qu'il y en a des toxiques, on les mange pas tous.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est ce que j'allais dire. Alors dans les champignons comme dans les plantes, je rappelle que c'est pas parce que ça vient des plantes que c'est sans danger. Et donc sur les champignons c'est la même chose. Vous avez parlé des mycotoxines. Est-ce que c'est le terme ? donc myco pour champignons et toxine pour toxiques donc on a des macros et des micros qui peuvent être toxiques tout à fait,
- Elodie Choque
ils produisent des toxines qui sont des mycotoxines alors les mycotoxines on les étudie plus sur les micros, les mycomycètes donc les champignons filamenteux qui vont venir par exemple alors si on prend une culture simple comme la culture de maïs au moment du stockage ou même au moment de la culture des champignons filamenteux peuvent venir et donc on peut voir de la moisissure apparaître. Et cette moisissure va produire des toxines. Donc si ce n'est pas conservé dans les bonnes conditions, ces toxines peuvent être cancérigènes. Une des toxines les plus connues, c'est par exemple la flatoxine, donc dans tout ce qui va être conservation des céréales, et à une certaine dose de consommation, elle va devenir cancérigène. Donc on essaye de lutter contre ces champignons. Et il existe maintenant des moyens de biocontrôle qui font que le champignon, lui, n'est pas dangereux pour la plante. Ce qui est dangereux, c'est la toxine. Donc, on va essayer de trouver des moyens de faire en sorte que le champignon, ce n'est pas qu'il ne se développe pas, mais c'est qu'il ne produise pas la toxine.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord.
- Elodie Choque
Donc, ça, c'est quelque chose qui peut arriver.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
OK. Alors ensuite, dans mes questions par rapport à votre parcours, je voudrais revenir sur l'histoire de votre thèse, donc sur les levures de bière. levure la levure de bière qui est aussi dans le vin et dans le pain, c'est un des usages des micro-micettes.
- Elodie Choque
Oui.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
J'essaie de suivre. Est-ce que vous pouvez nous dire un petit peu aujourd'hui quels sont les différents types d'usages en balayant un peu les micro et les macro ? Quels sont les grands usages des champignons aujourd'hui et dans quel domaine on les utilise ?
- Elodie Choque
C'est l'usage technologique du coup. pas ceux qu'on étudie parce qu'ils peuvent être dangereux pour la santé, plutôt les usages technologiques. Qu'est-ce qu'on peut en faire de ceux qui sont positifs ?
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est ça que vous attendez ? On fera tout. Mais oui, les usages...
- Elodie Choque
Les usages positifs. Donc effectivement, la première chose qu'on va faire avec des champignons, alors on peut le faire aussi avec des bactéries, mais avec des champignons, on peut faire des aliments fermentés. Donc par exemple, sans champignons, vous n'auriez pas de café, vous n'auriez pas de chocolat, vous n'auriez pas de saucisson, vous n'auriez pas...
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Tristesse.
- Elodie Choque
Tristesse. Voilà. Et vous n'auriez pas de sauce soja pour les sushis.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Il y a quand même un minimum à respecter.
- Elodie Choque
Donc, tout ça, voilà.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Donc, vive les champignons.
- Elodie Choque
Sur la fermentation alimentaire, il y a beaucoup de choses.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Est-ce que vous pouvez l'expliquer un petit peu plus en détail ? Par exemple, quel est le rôle de la fermentation pour le café, par exemple ? Ou pour un autre,
- Elodie Choque
par exemple,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
que vous vous battez ? Pour le café,
- Elodie Choque
vous permettez les graines. Et les graines vont être mises à fermenter avant d'être séchées. Et donc en fait, le champignon va venir... dégrader en partie ces graines-là, et il va développer les arômes du café. Donc c'est en dégradant... En fait, le champignon produit des enzymes qui viennent casser les sucres et les protéines du végétal, et donc qui va sortir les arômes. C'est exactement ce qui se passe dans la bière aussi. Donc par exemple, on va prendre le mal ou l'orge, on va venir mettre le champignon, et du coup on va casser les molécules, et donc elles vont être plus facilement accessibles pour d'autres micro-organismes par la suite. Mais du coup, les champignons viennent là pour le développement aromatique principalement.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, génial. Et cette histoire de fermentation ? Allez-y pour le saucisson.
- Elodie Choque
Rapidement. Les bactéries vont venir faire l'intérieur du saucisson. La viande, ça va être de la fermentation lactique. Et ça, ça va être fait par des bactéries. Et derrière, vous allez venir ce qu'on appelle embosser ce saucisson. Vous allez le mettre dans un boyau. Dans un boyau, voilà. Alors, ça peut être un boyau naturel ou pas, ou artificiel. Et le champignon, lui, va venir pousser sur ce boyau. Et la poudre blanche que vous avez sur le saucisson, ce n'est pas de la farine. C'est du champignon filamenteux.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, ok. Bon, alors ça, nickel.
- Elodie Choque
Votre croûte de brie, c'est du champignon filamenteux. C'est un champignon qui s'appelle Penicillium nalvogense.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, ok. Bon, donc ça, c'est...
- Elodie Choque
Le bleu du roquefort, c'est un champignon. C'est Penicillium roqueforti.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ouais, d'accord. Donc, le champignon, il est partout dans notre quotidien, parce que café, chocolat, saucisson et on en passe, fromage, c'est vraiment les usages quotidiens. Donc, dans l'alimentation...
- Elodie Choque
C'est pour ça que je rigole toujours quand les gens me disent « Ah non, mais moi, je n'aime pas les champignons » . Oui, mais tu en manges quand même tous les jours que tu n'aimes pas.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Je vais dire ça à mon fils.
- Elodie Choque
Mais il aime les champignons quand même. Sinon, il ne mangerait pas de chocolat.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
OK. Donc, cette fermentation, ça peut se faire partout ?
- Elodie Choque
Le champignon va avoir besoin d'humidité, mais il n'a pas besoin que ce soit riche en eau, en fait. Juste l'humidité lui suffit. D'accord. Il lui faut de l'humidité et de la chaleur au champignon. Mais non, non, ça ne se fait pas du tout dans l'eau.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Parce qu'en teinture, on parle des fois de fermentation pour teindre, et ça se fait toujours dans l'eau. Et donc, je voulais savoir un petit peu. OK. enfin quoique il y a aussi d'autres techniques Donc dans l'alimentation, on a ça. Est-ce qu'il y a d'autres usages ?
- Elodie Choque
Oula, il y en a plein. Alors du coup, on va rester sur les filaments teux parce que c'est ceux qui sont le plus utilisés. Il y a de plus en plus de développement qui se font. On va avoir beaucoup de choses qui vont se faire, par exemple, pour les matériaux de construction à l'heure actuelle. J'ai des étudiants parce que je les ai fait travailler l'année dernière sur les nouvelles... les nouveaux moyens de développement des champignons. Donc ils m'ont fait plein de posters sur plein de sujets différents. Et celui que j'avais préféré, c'est des cercueils naturels faits en mycélium. Et donc du coup, comme ça, au moment où la personne est enterrée, le temps que le corps se dégrade, le cercueil se dégrade en même temps et du coup, il ne reste plus rien à la fin. Et donc c'est des cocons de mycélium qui sont créés pour ça. Il y a beaucoup de choses qui sont faites dans le laboratoire à côté d'une autre alliutée qui s'appelle le LTI. le laboratoire de technologie et d'innovation. Je pourrais vous présenter à certains collègues si vous voulez. Et là, actuellement, ils ont un sujet pour créer des matériaux composites à base de champignons, en partant de marques de café, par exemple, pour le bâtiment, qui peuvent servir d'isolant, par exemple, ce genre de choses. Il y a du cuir de champignon qui s'est développé ces dernières années aussi en option vegan pour tout ce qui va être textile. Donc ça, justement, pour essayer d'éviter les tactiques synthétiques, le cuir de champignons, c'est quelque chose qui se développe beaucoup, comme les cuirs de fruits aussi, qui se développent beaucoup. À quoi d'autre je peux penser sur l'utilisation des champignons ? C'est déjà les trois qui me viennent. Je vais avoir besoin d'un petit peu plus de temps de réflexion pour la suite, mais pour moi, c'est les grosses utilisations qu'on a. Moi, au laboratoire, par exemple, aussi, avec du mycélium de champignons, je peux faire de la formulation cosmétique, je peux faire des patches. Donc ça c'est des patchs ? Oui, des patchs ou des masques visage. En fait, ça c'est la thèse de mon doctorant à l'heure actuelle. Donc on fait du développement d'Aspergillus tubigensis, justement le champignon que j'ai utilisé pendant mon post-doc. Et donc ce champignon, on en produit juste ce qui s'appelle le mycélium, donc la partie filamenteuse. Et avec ça, on arrive à formuler des masques visage dans lesquels on vient mettre des molécules qui sont issues des plantes. les stilben de la vigne et l'objectif c'est d'être sur une formulation qui est sèche, donc on est sur quelque chose de 100% naturel. Et donc par exemple, vous mettez votre masque, il va libérer les stilben sur votre peau, on va mettre la bonne quantité du stilben, c'est-à-dire celle que votre peau est capable d'absorber, donc on n'en met pas trop, pas assez. Et comme le masque il est entièrement fait en champignons, derrière vous l'enlevez, vous le mettez dans votre compost à la maison, vous allez couvrir vos tomates et donc du coup il y a zéro déchet. C'est la thèse d'Alban Coquel au laboratoire en ce moment, qui devrait soutenir à la fin de l'année.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Génial, écoutez.
- Elodie Choque
Donc ça, c'est la première utilisation qu'on en a, et l'autre utilisation qu'on en fait aussi. Moi, j'ai travaillé avec certaines levures et certains champignons. On peut faire de l'emballage alimentaire. On est vraiment sur des équivalents de bioplastique, en fait. Et donc là, on essaye de développer des emballages alimentaires pour l'emballage des fruits et légumes par rapport à la loi AGEC qui est en train de se monter. Les fruits et légumes ne pourront plus être vendus dans des plastiques pétro-sourcés. Et donc là, les gens cherchent des solutions sur ces plastiques pétro-sourcés. Donc on essaye d'utiliser les levures et les champignons pour ce système-là. Donc là, je ne peux pas vous dire comment ça marche exactement, parce qu'on est sur un dépôt de brevets. Donc je suis désolée, je ne vous donnerai pas le détail. Mais on est sur ce genre de thématique.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
En tout cas, pour avoir bossé chez Auchan sur la partie RSE, je sais qu'effectivement, les emballages en fruits et légumes et les sachets... qui était encore autorisée avant la loi. C'était la prise de tête. Donc, d'avoir des solutions comme ça, c'est canon.
- Elodie Choque
J'ai vu hier… Je travaille avec l'APEF, je travaille avec l'Association des producteurs d'indifs de France, justement, parce que les indifs sont vendus par 6. Et 70% de leur chiffre d'affaires, c'est énorme. Et donc, la loi AGEC a reculé, parce qu'au départ, c'était à 2026. Ils ont aperçu que pour l'instant, il n'y avait pas de solution autre que le pétro-sourcé. Et donc, ils sont revenus un petit peu en arrière. Le problème, c'est qu'il y a la PP. C'est W.R., la Packaging and Packaging Waste Regulation, qui est la même régulation européenne qui arrive en force. Elle date de février de cette année. Et en 2030, ce sera fini. Donc, il faut vraiment trouver des solutions adaptées. pour les emballages des fruits et légumes. C'est pour ça qu'effectivement, au Labo, pour l'instant, on s'en centre là-dessus.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Il y avait des histoires de bagasse, d'amidon, etc. pour faire des sachets. C'est toujours d'actualité ?
- Elodie Choque
Ce que je fais, moi, en plus des champignons, je vais venir utiliser les coproduits agricoles, donc les résidus de culture. Le problème de l'amidon ou de la bagasse, c'est qu'on va venir faire la production agricole pour produire les nécessaires. Et donc du coup, on va limiter l'espace qui est là pour l'alimentaire. Donc il faut faire attention.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Donc ce n'est pas le bon plan. Voilà.
- Elodie Choque
Il faut bien utiliser les coproduits. Par exemple, là actuellement, on est en train de développer un projet sur les champignons qui viennent utiliser comme ressource la racine d'endive après forçage, donc qui est un coproduit. C'est-à-dire que du coup, quand on produit son endive, on va avoir l'endive au-dessus, la racine en dessous, comme ceci. Et donc, du coup, on va casser les deux. L'endive va être vendue pour être commercialisée, mais la racine, on n'en fait pas grand-chose. Et donc, du coup, nous, on va prendre cette racine, on va la faire fermenter par le champignon filamenteux et avec le mix racine-endive-champignon filamenteux, on va réussir à produire des bioplastiques.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Génial. Voilà. Génial. Ça, c'est canon. Ça, c'est vraiment canon. C'est le sens de l'histoire. Si je vous dis, alors je vais vous dire les domaines d'application de la couleur végétale qu'on explore, comme ça, ça vous donnera peut-être des idées. Donc l'alimentaire avec les colorants alimentaires, on en a parlé. J'ai vu là dans ma veille un fromage qui était emballé avec du petit lait, un film plastique de petit lait. Là, il n'y a aucune intervention de champignons.
- Elodie Choque
Aucune intervention de champignons du tout.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Donc c'est encore d'autres alternatives pour emballer de manière saine, etc.
- Elodie Choque
créer des bioplastiques, on va utiliser ce qu'on appelle des polymères. Et dans le petit lait, vous avez des polymères qui vont être des sucres principaux dérivés du lactose. Le lait, c'est le sucre qu'on retrouve dans le lait. Et en fait, du coup, on va modifier ces chaînes de polymères pour créer des bioplastiques. Mais là, le lactose, c'est naturel et ça vient seulement du lait, donc il n'y a pas de champignons dedans. Par contre, pour les colorants alimentaires, il y a déjà des colorants alimentaires qui existent à base de champignons. C'est plutôt développé dans les pays asiatiques, mais c'est légal et autorisé en Europe et aux Etats-Unis. Je pense notamment aux champignons monascus, qui va produire un pigment rouge, qui peut être utilisé dans l'alimentaire, pour les bonbons principalement.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Je l'ai vu celui-là, un peu colorant bordeaux, et qu'apparemment c'était une couleur assez rare. Ah génial, top. Ça veut dire que je cherche au bon endroit.
- Elodie Choque
Dans les dragibus, des machins comme ça, c'est du pigment de monascus qui est utilisé.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ok, génial, top.
- Elodie Choque
Oui,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
d'accord. Donc, matériaux de construction, c'est hyper intéressant parce que j'ai vu aussi des parois d'isolant, là sur LinkedIn, hier ou aujourd'hui, des parois complètement, assez rigides en plus, de champignons. Donc, j'étais hyper étonnée. Donc, dans le textile, vous avez parlé…
- Elodie Choque
Dans les champignons filamentaux, il y a deux parties. Il y a ce qu'on appelle le mycélium, qui est l'ensemble des filaments. Et ça, il faut l'imaginer comme un filet. Et c'est un filet qui, une fois traité, va être très, très solide. Parce que du coup, c'est ce qui maintient le champignon. Et il y a la partie qu'on appelle les spores, qui vont servir à la dissémination du champignon. Le champignon ne produira des spores qu'à partir du moment où il se sent en danger et donc qu'il doit aller vivre ailleurs. C'est un stress ou un manque de nutriments ou ce genre de choses. Donc son principal, c'est le mycélium. Et les spores, c'est vraiment pour la dissémination. Ce qu'on va utiliser dans les matériaux de construction, c'est ce mycélium qui va être composé principalement de chitine. La chitine, c'est quelque chose qui est hyper solide et qui va finalement servir d'exosquelette. Derrière, il va y avoir des traitements thermiques et donc on va réussir à stabiliser ce mycélium. Mais quand on l'utilise derrière dans des matériaux de construction ou comme je vous l'expliquais pour les cercueils, il est totalement désactivé et mort à cause des traitements thermiques qu'il a subis. Donc, de toute manière, le champignon ne peut pas se redévelopper par la suite.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, c'est ça que j'allais demander. Des fois, on a des très bonnes idées d'innovation, mais les traitements infligés, on va dire, pour que ce soit cohérent et que ça tienne, sont souvent soit énergivores, soit toxiques, etc. Là, les traitements, c'est uniquement de la chaleur et ça le neutralise.
- Elodie Choque
Alors, la chaleur va neutraliser le mycélium. Par contre, la chaleur ne neutralisera pas tous les sports. C'est pour ça qu'il faut faire très attention quand on conçoit ce type de matériaux, d'être sûr de ne pas être dans la sporulation. Parce que moi, par exemple, les spores de champignons, je peux les passer à l'autoclave, c'est-à-dire à 120 degrés pendant plus de 30 minutes. Je les remets sur une boîte de pétri, je peux faire repousser du champignon. Il n'y a pas plus résistant qu'une spore de champignons. Il y a des spores de champignons qui peuvent résister pendant des milliers d'années. et au moment où elles vont trouver la bonne condition, elles vont germer. Donc, il faut vraiment faire attention à ça. C'est pour ça que dans les matériaux de construction, il faut se trouver à un endroit où on est sûr qu'il n'y aura pas de sporulation et faire le traitement thermique à ce moment-là. Comme ça, on est sûr de neutraliser le champignon. Et donc, quand on le met dans la construction, il ne poussera pas derrière et ça ne viendra pas moisir par la suite. Ça, ce n'est pas possible.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Oui, parce que je crois que c'est la mérule, un énorme champignon qui attaque les maisons et c'est un fléau, ça. Donc, il faut faire gaffe. Dans les matériaux de construction, j'avais vu ça. Textile, on a parlé du cuir de champignon. Est-ce qu'il serait possible de faire un genre de dentelle avec du mycélium de champignon, si on le guide ?
- Elodie Choque
Alors, ce serait possible, mais ce ne serait pas sur le long terme. en fait ça ne tiendrait pas, ce ne serait pas assez solide par rapport à du fil. Par contre il y a des choses qui se développent beaucoup, c'est de produire des champignons pour créer certains polymères, et derrière pouvoir créer des baguettes pour l'impression 3D avec les polymères issus des champignons. Et donc là, peut-être qu'il y aurait moyen de créer une dentelle qui vient du champignon, mais pas directement, à partir de cette impression 3D. Mais le champignon tout seul en le guidant, ce ne sera pas assez solide, à un moment ça va se... ça ne marchera pas.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord.
- Elodie Choque
En tout cas, pour mes connaissances.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Alors, cosmétique, on a parlé des patches et des masques visage. Est-ce qu'il y a d'autres usages dans, par exemple, la coloration capillaire ou les vernis ou le make-up, clairement ?
- Elodie Choque
Sur les champignons, pas trop. Il faut savoir que les champignons, quand on regarde les moisissures, on va en avoir de toutes les couleurs, des roses, des vertes, des violettes, des... Voilà. Et... Le champignon ne produit pas un pigment pour produire un pigment. Contrairement à la fleur qui va produire des pigments pour intirer les insectes pollinisateurs, le champignon, lui, la couleur... Par exemple, un même champignon, je peux le mettre sur trois milieux de culture différents sur lesquels il n'y aura pas le même sucre ou les mêmes éléments de minéraux dans le milieu de culture. Il peut avoir trois couleurs différentes. En fait, la couleur du champignon va dépendre des molécules qu'il va produire. Donc du coup, ça va dépendre de ce que je vais lui donner comme nutriments. Et il va produire certaines molécules. Ces molécules, on les appelle des métabolites spécialisées. C'est des molécules qu'il ne produit qu'en cas de stress pour se défendre. Donc ça peut être des stress qu'on appelle abiotiques. Donc abiotiques, ça veut dire que ça peut être la chaleur, ça peut être la lumière. Donc c'est des stress qui ne sont pas liés à la biologie en fait. Ou ça peut être des stress qu'on appelle biotiques, donc liés aux vivants. Donc par exemple, la présence d'un autre champignon ou d'une autre bactérie. Et donc il va chercher à se défendre. Et ce sont ces métaboliques-là, ces molécules-là, qui elles sont colorées, mais indépendant de la volonté du champignon ou pas. Et ça reste des pigments. Donc on peut choisir, nous, en biotechnologie, de forcer le champignon à produire un pigment qui pour lui va être une molécule de défense, qui pour nous peut être utilisée comme pigment. Mais l'avantage des pigments des champignons, contrairement aux pigments végétaux, quoique il y en a quand même un petit peu, mais les pigments des champignons... vont avoir en plus des activités biologiques. Ils peuvent être antimicrobiens, antioxydants, et donc ils vont pouvoir ramener une activité supplémentaire.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Alors ça, c'est le cas sur les pigments végétaux, c'est-à-dire qu'elle est constatée.
- Elodie Choque
Mais du coup, dans une moindre mesure. C'est-à-dire que vraiment, les pigments des champignons sont d'abord là pour l'activité biologique, et après pour le côté pigment. Et donc, chez les champignons filamenteux, on va trouver... des activités biologiques, comme je vous le disais, le champignon sur lequel moi je bossais en post-doc, qui sont 6 à 7 fois plus importantes que ce qu'on peut retrouver chez la plante. Là, actuellement, je produis des antioxydants qui s'appellent des naphtogamma pyrone par Aspergillus tubingensis. De l'autre côté, je produis des antioxydants produits par la vigne qui s'appellent des silbènes. Mais au niveau des capacités antioxydantes, ça n'a rien d'équivalent. Je suis 3 à 4 fois plus antioxydant chez le champignon que chez la vigne.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Donc... Donc, il y a déjà cette première différence, c'est l'activité bioactive qui est… Enfin, ça se répète, mais c'est beaucoup plus…
- Elodie Choque
C'est beaucoup plus logique, bioactive.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Oui, voilà, qui est beaucoup plus forte chez les champignons, d'accord. Et alors, l'histoire des…
- Elodie Choque
C'est la première.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Et les métabolites spécialisées, donc pour la plante, c'est des métabolites secondaires. C'est la même chose.
- Elodie Choque
Alors en fait, métabolisme spécialisé, métabolisme secondaire, c'est la même chose. Tout organisme vivant, mais même nous, on va produire deux types de molécules, ce qu'on appelle le métabolisme primaire et le métabolisme secondaire. Le métabolisme primaire, c'est ce qui est essentiel à la survie d'une cellule. Donc ça va être protéines, lipides, glucides, acides nucléiques, donc ADN, ARN, ce genre de choses. Donc ça, c'est le métabolisme primaire. Le métabolisme secondaire, c'est produit dans une condition particulière. C'est soit de la défense, soit de l'adaptabilité, mais ça va être lié à une condition extérieure. En gros, c'est vraiment la différence entre primaire et secondaire.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Et par contre, si je vois bien une nuance par rapport aux plantes, en plus de la bioactivité, c'est cette histoire que le champignon va produire des couleurs différentes selon ce qu'on lui donne. Alors que ça, sur la... La plante, ce n'est pas pareil. La plante, elle donne une couleur spécifique et c'est nous qui travaillons derrière la couleur par nuançage, prémordançage, etc. Donc ça, c'est encore une autre différence qui est intéressante.
- Elodie Choque
Effectivement, moi, un même champignon filamenteux, je peux le mettre sur trois milieux de culture différents et avoir trois couleurs différentes ou trois teintes de couleurs différentes parce que des fois, ça peut être la même couleur mais dans des teintes différentes. Là, par exemple... pour relier au pigment indigo produit par Isatis cimitoria, qui a été un petit peu aussi le début d'un réouvert. Donc nous, on travaille aussi sur cette thématique. Alors c'est plutôt ma collègue Nathalie Julien qui travaille là-dessus. Mais ce qu'on a fait, nous, à notre échelle au laboratoire, c'est qu'on est venu chercher les micro-organismes qu'on appelle endophytes, c'est-à-dire qui vivent à l'intérieur de la racine d'Isatis cimitoria. Et on a isolé un champignon qui s'appelle mucor. Et ce qui nous a paru fou, et c'était la première fois que c'était vu, il existe des dizaines d'espèces de micores qui sont déjà identifiées. Et bien, sorti de la racine d'Isatis tinctoria, on a réussi à sortir un micore qui était bleu. Ça n'avait jamais été vu dans la littérature, il produisait un pigment bleu. On l'a changé de milieu de culture, le champignon est devenu gris.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Incroyable. Et alors ça, la couleur bleue, que ce soit dans les plantes, dans les minerais, dans tout ce qu'on veut, c'est la plus rare. Il y a dans les algues, ok, mais c'est la plus rare à trouver.
- Elodie Choque
En fait, ce muco, il n'y avait jamais eu de champignons muco qui avaient été caractérisés sur un pigment bleu. Et on pense qu'il y a eu un dialogue moléculaire qui a dû se passer ou peut-être un échange de gènes ou quelque chose. On ne peut pas le définir encore, mais c'est quelque chose qui nous intéresse énormément et qu'on aimerait caractériser. Et on se demande si vraiment il n'a pas réussi à capter cette capacité à produire le pigment bleu par le dialogue moléculaire qu'il a avec la plante Isatis cinctoria.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Alors ça ? Je me souviens dans ma formation avec Michel Garcia qu'il m'en a parlé de ça, de cette observation, mais qu'il ne savait pas encore l'expliquer. Mais ça, j'ai déjà entendu.
- Elodie Choque
Mais voilà, moi, c'est vraiment le petit truc pépite mystère qui m'intrigue et que c'est sûr, je vais aller chercher. Après, pour faire ce genre de recherche, il nous faut de l'argent.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Eh bien, c'est le moment de le dire.
- Elodie Choque
Mais voilà, ça, c'est vraiment le truc qui, nous, on a trouvé ça fou de se dire, la plante, si on la regarde en elle-même, elle est verte. il faut qu'il y ait tout le mécanisme d'oxydation qu'avait expliqué Romain pour derrière aller produire le pigment indigo. Et là, on sort un champignon de cette plante-là, et on obtient un champignon qui, quand il se pourrule, devient bleu, dans certaines conditions, parce que quand je le change de milieu de culture, j'obtiens du gris qui est beaucoup plus symptomatique des mucores, qui sont d'habitude, oui, dans les gris bruns, ça paraît beaucoup plus logique en fait.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Incroyable. Bon, ça, franchement, à creuser. Et s'il y a des gens qui ont envie d'investir dans cette recherche-là, on est preneurs. Donc, si on revient aux différentes applications, donc cosmétiques, on n'en a parlé pas trop dans... On a dit pas trop dans tout ce qui était coloration capillaire, le make-up non plus.
- Elodie Choque
Non, pas trop encore. En tout cas, pas à ma connaissance. C'est plus ça.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Est-ce que dans les beaux-arts, vous avez des choses ? Est-ce qu'il y a des pigments qui servent aux beaux-arts ?
- Elodie Choque
Alors, Ça se fait aussi pour la teinture de vêtements par exemple. Donc c'est des choses qui ont été développées dans les années 70. Et c'est plutôt des champignons qui sont toxiques et qui vont être non comestibles du coup, qu'on va pouvoir partir en cueillette. Et par exemple, ça va être des champignons qui vont être beige, brun, qui ne vont pas être très jolis. Et on s'est aperçu qu'en les mettant avec des liants comme de la lin ou du féritusiana, tout ce genre de choses, comme on fait avec la teinture végétale, mais quand on vient rajouter ces mordants, ce qu'on appelle des mordants, on peut obtenir des couleurs merveilleuses comme des violets, des verts électriques ou ce genre de choses. Et donc ça, c'est les travaux de, je n'ai plus le nom de la dame qui les a faits, elle a écrit deux bouquins dans les années 70, mais on peut très bien imaginer comment on fait avec les plantes.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est pas Dominique Cardon ?
- Elodie Choque
Non, c'est une américaine. Marie Marquet ?
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ah, une américaine. Non,
- Elodie Choque
c'est une américaine. Vous retrouverez le nom si vous voulez pour le mettre.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ce serait chouette.
- Elodie Choque
Je me demande si je n'avais pas fait une capture d'Aix-en-Yard. En regardant ça, je vais aller le faire.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Parce qu'il y a Marie Marquet qui a écrit un livre sur teindre avec les champignons. En collaboration, je ne me souviens plus de la personne qui a écrit avec elle. C'est Marie Marquet, dans son premier épisode, qui m'avait ouvert à ce monde des champignons. Et j'avais dit, je vais d'abord aborder les plantes avant de me relancer dans les champignons. J'ai bien fait, parce que quand je vois la largeur de cet univers, c'est un nouvel univers qui s'ouvre. Et donc, je ne sais pas si Dominique Cardon a parlé des champignons. Je ne pense pas.
- Elodie Choque
Deux livres, c'était dans les années 70. Il faut que je retrouve.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Oui, on retrouvera. OK. Et la toxicité des champignons quand on les met dans la teinture, elle disparaît sur le vêtement ?
- Elodie Choque
Alors, en fait, les champignons sont toxiques quand on les consomme. Si on ne les consomme pas, ils ne sont pas toxiques. Parce que du coup, en teinture, ça ne posera pas de problème. Parce qu'en fait, la toxine ne va pas aller sur la teinture. Ce n'est pas parce qu'elle est présente dans le champignon. Il faut certaines conditions pour ressortir la toxine du champignon. Donc, c'est en consommation que c'est dangereux, mais pas du tout en teinture.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Et ça, vous allez rassurer pas mal de teinturières qui me posaient cette question-là, donc top.
- Elodie Choque
Non, non, là-dessus, il ne faut pas qu'elles s'inquiètent. Et au pire, si elles veulent, nous, au laboratoire, on fait des tests de cytotoxicité. Donc, elles peuvent nous envoyer un jus de champignon et nous, on peut le tester sur cellules de peau. Comme ça, elles sont sûres qu'il n'y a aucune incompatibilité avec la peau. Ça, c'est des choses qu'on fait au laboratoire, que c'est fait par ma collègue Rosane Ravalek.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Eh bien, ça ne s'est pas tombé dans l'oreille de sourde. Je sais qu'il y en a qui travaillent les champignons. Donc, super astuce. Donc, on était sur les beaux-arts, on disait…
- Elodie Choque
Du coup, comme on fait pour la teinture végétale, on peut très bien imaginer faire des jus de champignons avec des mordants et du coup, venir faire des toiles. Il y a des gens qui font ça, qui font de la macération de champignons et qui peignent avec de la macération de champignons comme ils le font avec de la macération d'écorces ou de feuilles. Et il y a pas mal de champignons qui sont utilisés.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Donc, nous, on appelle ça des encres. Quand elles sont condensées, quand on les condense… ça s'appelle à partir d'un moment des encres on met juste un stabilisateur genre je crois qu'il y en a qui mettent des pointes d'aspirine pour conserver l'encre ou de l'huile essentielle je crois que c'est du clou
- Elodie Choque
de girofle pour que l'encre tienne si ils veulent que l'encre tienne de ce que vous me dites aspirine clou de girofle on met des antimicrobiens pour éviter qu'il y ait une contamination par les micro-organismes bactériens plutôt.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ouais, d'accord.
- Elodie Choque
En gros, on évite que les bactéries viennent se dire « Ouh, ça ressemble à de la nourriture, ça, je peux peut-être y aller » .
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, ok. Est-ce qu'il y a des applications d'usage avec les champignons dans la médecine ?
- Elodie Choque
Bien sûr, des tonnes et des tonnes. Il y a énormément d'antibiotiques actuellement qui sont produits par les champignons. Donc ça, énormément. En fait, il y a même tout un domaine de recherche qui existe où l'objectif, c'est d'aller trouver de nouveaux antibiotiques. On isole des champignons du sol, de plantes, etc. et on vient chercher leur potentialité en termes d'antibiotiques. C'est un domaine entier de la recherche. Il y a énormément d'antibiotiques actuellement qui sont produits à partir de champignons.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Top. Est-ce que dans les usages des champignons, il y en a certains, on va dire les stars, qui sont réputés pour la couleur ? Est-ce que vous pouvez nous en citer des champignons qui sont hyper connus pour la couleur ?
- Elodie Choque
Alors, pour la couleur, il y a Monascus, qui est pour moi le plus connu. Et il y a un Basidio, je l'ai retrouvé hier. Après, il y a pas mal de pénicillium. Genre, le bleu du fromage, c'est du pénicillium roqueforti. Ça, pour le coup, effectivement, c'est quelque chose qui est très connu pour sa couleur. Dans ce livre-là, je vais en profiter, c'est un livre pour enfants. Donc,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
les champignons d'étonnants êtres vivants. Donc, on invite les auditeurs à aller écouter et à aller voir le replay sur Patreon.
- Elodie Choque
Voilà. Et du coup, dedans, il y a vraiment des champignons qui sont sélectionnés pour leur couleur. Non,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
incroyable.
- Elodie Choque
Tout est marqué dedans. Et c'est adapté à partir de 7 ans. Ça explique toute la vie des champignons. Je conseille. Et vous voyez, il y en a même un qui produit de la bioluminescence et qui est brillant.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ah, génial. Juste ici. Oui. À ça, on va en parler.
- Elodie Choque
À l'UPR, cherchant des bouquins pour mes nièces. Et en tant que mycologiste, je peux vous dire qu'il est génial parce qu'il y a la moitié des choses que j'enseigne à mes étudiants de deuxième année d'IUT. On sait ce que c'est que du mycélium, on sait ce que c'est qu'une ife. Il y a le côté construction dont on parlait tout à l'heure. Comment on produit les champignons avec, par exemple, les champignonnières pour produire les champignons de Paris. Le fromage, il y a tout dedans. Il est vraiment très bien fait et vraiment adapté aux enfants à partir de 7 ans. Je l'ai trouvé merveilleux. Je l'ai acheté 7 ans, mais je le trouve génial.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Je vais l'acheter pour mon fils, c'est une super bonne idée. Donc, on disait les monascus, les pédicillums. Est-ce que j'ai vu, moi...
- Elodie Choque
Il y en a un de Basidiomycète qui est connu pour sa couleur, c'était le seul. Je vais le retrouver aussi.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Moi, j'ai vu sur les bleus verts, alors attention à ma prononciation, le pulchericium caerulum, qui donnait un bleu apparemment.
- Elodie Choque
Oui, c'est possible.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Oui, en fait, j'ai essayé de chercher, mais alors les noms... Alors, j'arrive des fois à raccrocher aux branches avec le nom latin, mais là, j'avoue, ça part de rien, donc c'était un peu compliqué. Ils disent que c'est des fongiques indicoïdes. Et donc, je me dis qu'ils donnent de l'indigo et du coup...
- Elodie Choque
Effectivement, il y a des champignons qui produisent des molécules qui sont équivalentes à l'isotan et à l'indicant, qui sont les molécules précurseurs de l'indigo. Donc, il y a des champignons qui les produisent aussi. Par contre, ils les produisent en moindre quantité que la plante. D'accord.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Il y a un intérêt à aller sur les plantes d'indigo.
- Elodie Choque
Il va quand même falloir les modifier chimiquement. C'est-à-dire que comme pour la plante, ils ne vont pas produire du bleu directement. Il va falloir rajouter une étape de modification chimique pour pouvoir obtenir l'indigo.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord.
- Elodie Choque
Et celui que vous avez trouvé hier, moi, il s'appelle… Je l'avais là il y a deux minutes parce que c'était sur mon téléphone. Alors, j'ai retrouvé les noms parce que c'était dans le même article. des deux livres de 1974 dont on parlait sur les champignons, c'est « Essai de teinture à base de champignons » et « Mushroom for color » qui a été en 1980, qui est visiblement une traduction française. C'est une chercheuse et artiste américaine, c'est une artiste américaine, qui s'appelait Miriam Rice, R-I-C-E, qui s'est basée sur la teinture des champignons. Et donc, Donc le plus connu, c'est Faéolus. Chuenziwitsi. C'est jamais très facile à prononcer.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Oui, c'est clair.
- Elodie Choque
Là, il produit de la couleur jaune vif. D'accord. C'est un des plus connus. Après, il y a pas mal de polypores qui sont utilisés. Alors, polypores, c'est le nom commun. C'est phaeolus, c'est des polypores. Et on peut en trouver, effectivement, des qui vont aller du violet au rose aussi. Donc, les polypores, si vous cherchez à produire vraiment... des pigments, je pense que les polypores sont les plus pratiques. Ils s'appellent polypores parce que si on regarde sous le champignon, sous le chapeau du champignon, en fait, ça fait comme une mousse avec plein de petits trous. C'est l'aspect qui fait des polypores.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ok. J'avais vu aussi des champignons qui donnaient des pigments noirs et à brun foncé. Et en fait, pareil, ils disaient que c'était pour se protéger, pour protéger les champignons.
- Elodie Choque
Oui,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
la mélanine.
- Elodie Choque
La mélanine, c'est un de mes sujets préférés, c'est un des sujets sur lesquels j'aimerais bosser. Donc la mélanine, on en produit nous, et tous les organismes du règne vivant en produisent. De la bactérie à l'humain, tout le monde produit des mélanines. Par exemple, vos cheveux sont bruns parce qu'ils produisent de la mélanine. Vous bronzez en été parce que vous produisez de la mélanine pour protéger vos cellules. Donc cette mélanine, elle est produite par tout le monde. Tout le monde considère que la mélanine est un pigment. Et moi, mon hypothèse de travail, c'est que ce n'est pas le cas. Je ne suis pas d'accord avec ça. Parce que si c'était un pigment, elle aurait une voie de biosynthèse, donc un ensemble de gènes qui lui permettraient d'être produits toujours de la même manière. Or, il existe des vingtaines de différents types de mélanine et il y a plus de 41 voies de biosynthèse recensées pour la production de mélanine. Mon idée à moi, c'est que si c'est présent dans tout le règne vivant, C'est simplement parce qu'en fait, c'est un déchet qui se crée lorsque la cellule se défend de stress oxydant. C'est-à-dire que, imaginez, vous êtes une cellule, il y a un stress oxydant qui arrive, donc ça peut être... Soleil,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
chaleur, enfin...
- Elodie Choque
Du coup, il y a l'oxydation qui arrive et vous devez vous battre contre cette oxydation, parce que si vous avez ce stress oxydant, vous ne pouvez pas garantir le fonctionnement de vos protéines, de vos lipides. qui assure la sécurité de la membrane ou encore de votre ADN. Dans ce cas-là, ça peut mener à des cancers. Le stress oxydant, c'est vraiment le stress le plus grave que peut subir une cellule. Pour lutter contre ce stress oxydant, la cellule produit des antioxydants. Et ces antioxydants, ils servent de garde du corps, ils viennent se mettre entre la molécule à protéger et le stress, et ils disent non, non, c'est à moi que tu vas enlever quelque chose, mais par contre tu protèges la molécule que tu as à protéger. Et ces antioxydants, du coup, derrière, ils sont plus fonctionnels, mais ils restent dans la cellule et ils ne sont pas forcément dégradés. Et moi ce que je pense, c'est que la mélanine, en fait, c'est les antioxydants qui ont été utilisés, qui se mettent en chaîne les uns à la suite des autres. et plus la chaîne est longue et plus le pigment est foncé. Et ça expliquerait que du coup ce soit présent dans tout le règne vivant mais du coup en devenant noir comme ça, ça a permis de protéger la cellule contre la lumière, contre la sécheresse. Ça a aussi des propriétés, par exemple les mélanines pour tout ce qui est passage d'électricité, donc c'est quelque chose qui pourrait être utilisé par exemple pour tout ce qui est système est plus électrique, on pourrait très bien penser que la mélanine puisse faire passer l'électricité. Donc je pense particulièrement à si vous avez besoin de faire des capteurs pour la peau ou ce genre de choses, on pourrait très bien imaginer utiliser la mélanine pour le faire. Et du coup, je pense que évolutivement, les cellules se sont dit ce machin c'est super utile, il faut que je le garde. Mais à l'origine, c'était pas un pigment en fait.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, super intéressant. C'est une hypothèse.
- Elodie Choque
Ce n'est que mon hypothèse de travail à moi. et ce n'est pas la vraie vérité scientifique parce que pour l'instant, la vraie vérité scientifique, c'est qu'il existe plusieurs types de mélanine et qu'il y a plusieurs voies de biosynthèse pour chaque type de mélanine.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, ok. Moi, j'avais vu vraiment ces champignons sur la mélanine, ça m'intéressait vachement. Qu'est-ce que j'ai vu d'autre ? Des champignons, on l'a dit, bleu, vert, etc. En gros, j'ai vu que toutes les couleurs étaient présentes chez les champignons aussi et que par contre, c'était compliqué à... Moi, ce qui était compliqué, c'est de me dire entre champignons macro et champignons micro, mais maintenant, je viens de le comprendre, donc j'arriverai à reclarifier ça dans ma tête. On a parlé du fusarium.
- Elodie Choque
Ils sont dans les rouges. Vous pouvez aller chercher des rouges roses. Faites attention sur les fusariums parce que c'est des gros producteurs de mycotoxines quand même. Donc, il faut faire attention à ça. En fait, les fusariums sont connus à la base pour être… des... Il faut que je retrouve le mot en français. C'est des polyhides, des... des contamineurs de culture. Par exemple, ils vont créer une maladie qui s'appelle la fusariose.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Donc, il faut faire gaffe.
- Elodie Choque
Et donc, la fusariose, pendant que ça se produit, il y a contamination avec des mycotoxines qui sont cancérigènes.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ok, donc on fait gaffe.
- Elodie Choque
Donc,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
on a vu les différents domaines d'application dans lesquels on pouvait utiliser les champignons. On a vu les stars des champignons et les stars des couleurs qu'ils pouvaient donner. J'avais une question sur la partie biotech. La première question qu'on m'a posée, c'est toi Pauline qui défends la couleur végétale, comment tu perçois la biotechnologie ? Donc, c'est ce que je vous disais avant de démarrer cet épisode. Pour moi, on répond. que ce soit la couleur végétale ou la biotech, a le même objectif, qui est d'être une alternative aux colorants de synthèse dérivés du pétrole.
- Elodie Choque
Tout à fait.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Par contre, je pense que dans les biotech, il y a des avantages versus les plantes. Notamment, vous en avez cité quelques-uns, la bioactivité qui est, pour certains champignons, plus active. On a vu que ce n'était pas le cas pour l'indigo, où la plante se défend bien. J'avais d'autres questions, c'était quels sont les autres avantages à travailler le champignon plutôt qu'autre chose ? En termes de culture, en termes de tout ça, est-ce qu'on pourrait balayer un peu les points positifs du champignon ?
- Elodie Choque
On peut faire avantages et inconvénients, parce que moi, le premier gros inconvénient que je vois quand même au biotech, c'est l'utilisation d'électricité qui n'est pas forcément nécessaire dans tout ce qui est production de plantes. Et savoir que voilà, pour pouvoir faire du champignon, il va falloir aller sur des bioréacteurs, il va falloir aller sur ce genre de choses. et donc... Du coup, ça veut dire nécessité d'électricité, nécessité d'entretien. Et il y a un coût qui va se calculer. C'est les nouvelles problématiques qu'on appelle l'analyse du cycle de vie, la CV. Et donc, du coup, il faut faire attention à ce que ça n'ait pas forcément un impact environnemental qui soit supérieur quand on utilise les biotechnologies. Donc, il faut faire cette balance-là de se dire, est-ce que ça vaut le coup de le produire comme ça ou est-ce que l'impact environnemental ne va pas être supérieur à celui d'un produit pétro-sourcé ? Donc, il faut faire attention à ça. Après, au niveau des avantages, les champignons représentent un avantage conséquent par rapport aux plantes, qui est leur adaptabilité génétique. Je peux modifier une cellule de champignons et je peux très bien venir mettre, on appelait ça la voie de biosynthèse tout à l'heure, donc c'est-à-dire... l'ensemble des protéines nécessaires pour la production d'un pigment chez la plante, dans un champignon, et me dire, mon pigment de plante, plutôt que de produire un champ qui fait 10 000 hectares, je vais venir faire un bioréacteur de 100 litres qui prendra beaucoup moins de place et produire autant de molécules à partir du champignon. Donc je peux utiliser le champignon pour produire des pigments de manière biotechnologique et je peux produire des pigments végétaux avec un champignon par exemple. Je ne pourrais pas faire l'inverse.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Alors j'ai deux questions là-dessus. un bioréacteur est-ce que vous pouvez nous illustrer ce que c'est parce que bioréacteur moi je vois un truc énorme mais en fait est-ce que ça se définit un bioréacteur est-ce qu'il en existe de différents types il y en a des milliers de types différents ça
- Elodie Choque
dépend le type de culture qu'on veut faire en fait un bioréacteur ce qu'on appelle un bioréacteur c'est un comment dire ça je vais essayer de simplifier parce qu'on peut avoir globalement c'est là où on va faire pousser le champignon ... mais on peut avoir des cuves qui font 100 hectolitres. Nous, on en a à l'IUT qu'on utilise avec les étudiants, c'est 3 litres. On peut avoir vraiment toutes les échelles possibles. On peut utiliser un bioréacteur qui va être un sac en plastique dans lequel on va faire pousser notre champignon. Ou alors, ça peut être une cuve en verre ultra sophistiquée. Il y en a de plein de types. Il faut imaginer un contenant dans lequel je vais mettre un milieu de culture, liquide, solide ou semi-solide, c'est-à-dire un mélange liquide-solide. dans lequel mon champignon va pouvoir se développer de manière finée. C'est-à-dire que je vais maîtriser la dissémination. Je confine et je suis en condition qu'on appelle de stérilité, l'asepsie. C'est-à-dire que je confine et je m'assure que seul mon champignon pousse et donc que je ne peux pas faire venir d'autres micro-organismes sur les nutriments que je lui donne. C'est ce qu'on appelle du milieu contrôlé et confiné. Le bioréacteur, c'est simplement ça, c'est que je confine. je suis stérile et donc du coup je l'évite la dissémination. Donc il faut imaginer un contenant comme ça.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ça c'est génial parce que ça clarifie plein de questions. Donc le bioréacteur. Ma deuxième question, l'adaptabilité génétique, la voie génétique, etc. Ma question qui vient, c'est des raccourcis qui peuvent être faits avec les OGM.
- Elodie Choque
Exactement, des OGM. Quand on parle de modification génétique, L'OGM, c'est un organisme génétique modifié. Mais il faut savoir que, par exemple, actuellement, les patients qui sont diabétiques prennent de l'insuline qui a été produite par des bactéries qui sont modifiées de manière OGM. Mais il y a quand même une grosse différence. Et alors, c'est ce qu'on va appeler les OGM de type 1 et les OGM de type 2. On ne parle pas d'OGM qu'on met dans la nature, c'est-à-dire que je ne suis pas au champ, je ne suis pas sur quelque chose qui va pouvoir se disséminer, parce que, comme je vous l'expliquais, on est dans du confiné. Donc du coup, je peux détruire mon champignon et je peux éviter la dissémination de mon OGM. Je ne vais pas vendre l'OGM, je vais vendre le produit issu de l'OGM. Donc je vais vendre le pigment. Mais du coup, dans le pigment, il n'y a pas d'ADN, donc il n'y a pas la génétique. Donc je ne peux pas contaminer ou je ne peux pas emmener cet ADN ailleurs. Donc je limite et je contrôle ça. Je vends un produit issu d'eux. Et ce n'est pas du tout la même chose.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Parce que le problème des OGM, c'est quand par accident, ils se retrouvent dans la nature et qu'on…
- Elodie Choque
En fait, c'est ça. C'est exactement ça. Le problème des OGM actuellement, c'est l'impact qu'ils peuvent avoir sur la biodiversité. On ne peut pas contrôler cet impact sur la biodiversité de l'OGM. Et donc, c'était le problème sur les OGM végétaux, par exemple, tous les blés, les maïs, c'était les débats de Monsanto à l'époque. On n'avait aucun contrôle sur la biodiversité et on ne savait pas ce que ça allait donner. Après, il y a eu des études tendancieuses qui ont été faites, comme les études de Serralini sur les OGM et le cancer, sur lesquelles je ne suis pas du tout d'accord, mais c'est mon avis à moi de scientifique, parce qu'il y a eu beaucoup de biais dans ces études qui ont été décriées par toute la communauté scientifique. C'est-à-dire que quand je mange de la salade, on va le faire simplement, mais quand je mange de la salade, j'avale aussi l'ADN de la salade. ne va pas venir dans mon ADN à moi pour se modifier. Donc il n'y a pas de raison que si je mange un légume qui est OGM, ça vienne dans mon ADN à moi pour se modifier. Si ça ne se fait pas avec quelque chose qui n'est pas OGM, je ne vois pas pourquoi ça se fait avec quelque chose qui est OGM. Le petit clip, la petite modification génétique qu'on fait, elle n'a pas de raison de sauter d'une cellule pour aller dans une autre cellule qui n'est pas celle à qui on l'a confiée. Et de toute manière, on met suffisamment, nous, en tant que scientifiques, de barrières pour s'assurer que ce ne soit pas possible, pour que ça arrive. Ce n'est pas possible.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord.
- Elodie Choque
Il y a un petit souci là.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Vous parliez des OGM de type 1 et de type 2. Du coup, l'OGM de type 1 et 2, vous pouvez définir un petit peu ?
- Elodie Choque
Ça, c'est des définitions qui ne sont encore pas totalement officielles. C'est plus pour donner… En gros, c'est OGM de première génération et OGM de seconde génération. Donc les types 1, c'est première génération, c'est les OGM de départ, les premiers qu'on a fait, ceux qu'on a voulu mettre au champ et pour lesquels on a cassé des McDo à l'époque, globalement. Et les OGM de type 2, c'est ceux qu'on est en train de faire maintenant, qui sont plutôt justement là à vocation d'aller créer des produits autour de ces OGM. Donc comme je vous le disais, on peut produire de l'insuline pour soigner des diabétiques. Je peux venir produire des biodiesels, par exemple, pour les voitures, pour ce genre de choses. Je peux venir produire des compléments alimentaires, je peux venir produire des additifs, je peux venir produire ce genre de choses. Et donc, ce que je vais finalement vendre, c'est le produit issu de la culture OGM, mais pas l'OGM en lui-même.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Ça, c'est beaucoup plus clair. Ça, c'est hyper intéressant parce que c'est un des points d'anxiété, c'est cette histoire de génétiquement modifier. J'ai une autre question. Est-ce qu'il a... Est-ce qu'il y a déjà eu, je vais y arriver, des accidents de bioréacteurs ? Imaginons, je comprends bien que vous ayez tout cadré, etc. On a eu des fuites de labos, de virus, de trucs, on passera des détails, mais est-ce que c'est déjà arrivé sur des bioréacteurs qu'il y ait une fuite, qu'il y ait un problème ? Ou est-ce qu'en gros, aujourd'hui, non, c'est hyper sécurisé et c'est vraiment risque zéro ?
- Elodie Choque
Alors, le risque zéro n'existe pas, sinon il n'y a pas de notion de risque. mais on est quand même dans des entreprises qui maîtrisent ce qu'elles font et pour le coup pour moi c'est pas un problème. Il peut arriver un accident, on sera jamais à l'abri de l'accident, mais il y a une démarche qui est une démarche très très importante qui est mise en place dans toutes les entreprises c'est ce qu'on appelle l'HACCP et du coup ça prend en compte aussi sur la discrimination des bactéries ou des micro-organismes OGM qui sont créés et donc ça c'est pris en compte dans le protocole HACCP. Donc on a des moyens de traitement, par exemple le milieu de culture, il ne va pas être jeté comme ça après. Il y a des destructions de micro-organismes, il y a des protocoles qui sont faits. S'il y a des limites qui dépassent ou des protocoles qui ne sont pas respectés, il y a toujours des moyens de mesures applicables, préventives, ou si c'est la prévention où justement le problème arrive, je peux le régler ensuite, donc curative. Les deux existent. Donc il y a des démarches HACCP qui sont montées dans toutes ces entreprises. et elles sont régulièrement auditées pour s'assurer que tout est fait dans les bonnes conditions. C'est vraiment comme dans l'alimentaire, c'est des normes qui existent, donc il y a les normes ISO et il y a des normes ISO de la même manière. Donc c'est des choses qui sont régulièrement contrôlées, auditées, et il faut savoir qu'eux doivent remplir des rapports annuels, aussi pour assurer qu'il n'y a pas eu d'accident ou ce genre de choses. Donc c'est très très réglementé. Oui, d'accord. Il y a quand même peu de chances que ça arrive, mais le risque zéro n'existe pas.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Donc, l'inconvénient pour l'instant qu'on a identifié pour utiliser les champignons comme source de couleur ou autre, c'était cet usage d'électricité et faire attention aux analyses de cycle de vie, bilan carbone et tutti quanti, tout ce qui va avec. Par contre, les deux avantages déjà cités, c'est l'histoire de l'adaptabilité génétique. Vous qui avez fait aussi de la biotech végétale, vous comparez et ça n'est pas aussi facile.
- Elodie Choque
Alors, ce n'est pas comparable. C'est beaucoup plus facile de modifier génétiquement un champignon, particulièrement une levure. Mettre un gène dans une levure, c'est quelque chose qui est hyper facile à faire. Modifier génétiquement une plante, ça se fait, mais ce ne sont pas les mêmes délais. On va dire que je peux obtenir une levure OGM en trois semaines. Pour obtenir un plan OGM de plantes qui est stabilisé, etc., il faut compter deux à quatre ans.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ok, donc ça c'est hyper clair.
- Elodie Choque
On n'est pas du tout sur les mêmes délais et ça dépend ce qu'on veut faire. Et oui, obtenir une plante OGM, il y a aussi beaucoup moins de chances. C'est-à-dire que moi, quand je vais modifier une levure, je vais prendre tout un tas de levures. On va dire que 70% de mes levures vont être modifiées à la fin. J'aurai juste à sélectionner un clone qui est celui qui m'intéresse. Mais quand je vais modifier une plante, si j'essaye d'en modifier plein, il y en a peut-être trois à la fin. Donc vous voyez, on est sur du 3% et du 75% d'un côté. Donc ce n'est pas du tout la même facilité de choses. Alors, ça dépend aussi de ce qu'on veut faire. Ce n'est pas si facile que ça et ce n'est pas toujours en trois semaines chez la levure. Mais le temps d'adaptation sera nettement moins chez la levure, effectivement.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Un autre avantage que moi, j'avais identifié, c'est la place prise. Ça,
- Elodie Choque
je suis d'accord. Parce que du coup, on le sol. Effectivement. Un bâtiment d'entreprise suffit largement. Un bâtiment d'entreprise.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Est-ce qu'il faut forcément, du coup, pour les champignons, de la lumière ? Ça n'a pas d'intérêt.
- Elodie Choque
Ça dépend, ça dépend lesquels, mais pour un champignon filamenteux, non, pas forcément.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Est-ce que, alors attention je vais peut-être dire une grosse bêtise mais pour moi les champignons ils sont pas dépendants comme les plantes de la lumière pour faire leur leur métabolisme etc on est d'accord ?
- Elodie Choque
Oui je suis d'accord avec vous, ils sont pas dépendants de la lumière ils sont plutôt dépendants de la température
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Voilà donc on a pas besoin d'avoir des bâtiments avec fenêtres avec apport de lumière etc ça peut être fait même en sous-sol ça peut être fait dans les hangars etc
- Elodie Choque
On peut ramener une source de lumière quand c'est nécessaire, j'avoue que la lumière Pour moi, c'est plutôt quelque chose, si on parle de micro-organismes, que je vais associer aux algues.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Oui, voilà. Plutôt qu'aux champignons, on est d'accord. Qu'est-ce que vous voyez d'autre comme avantage à travailler le champignon ? Alors, plutôt que la plante ou plutôt qu'autre chose, parce qu'on va aussi aborder les algues cet été, on va aussi aborder d'autres micro-organismes par rapport à d'autres organismes vivants ou modifiés. Pourquoi les champignons plutôt que le reste ?
- Elodie Choque
Parce que pour moi, les champignons, c'est une diversité folle. En fait, ils évoluent tellement vite qu'on en découvre quasiment 200 nouvelles espèces par an. On n'a pas découvert 80% des champignons qui existent sur cette planète. Il y a une telle diversité. Et comme ils s'adaptent en permanence, ils évoluent en permanence. Il y a une étude qui a été faite que je trouvais hyper intéressante. C'est quelque chose que j'avais découvert pendant ma thèse. Donc, ça date quand même d'il y a un moment. Et je trouvais ça hyper fou. fou, c'est un monsieur qui a pris une levure pendant ses 25 ans de carrière, il l'a mise à moins 80 et tous les ans il la ressortait. Et donc il a regardé, il a séquencé génétiquement sa levure pendant 25 ans et il a regardé l'évolution du génome de la levure et il s'est aperçu qu'entre le moment où il a commencé son étude et la fin de son étude, il y a eu quasiment 7 générations différentes, 7 types de levures, 7 grosses modifications génétiques qui ont eu lieu en 25 ans à peine. Donc, ça veut dire qu'en 25 ans, il y a eu 7 générations, alors que nous, 25 ans, ça ne représente même pas une génération.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Donc, ça veut dire qu'ils ont…
- Elodie Choque
Ça, c'est ce que j'ai dit pendant ma thèse, ce que j'avais trouvé folle.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ça veut dire qu'ils ont une capacité d'adaptation beaucoup plus rapide que la nôtre.
- Elodie Choque
Ah bah, c'est sûr.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Et beaucoup plus rapide que d'autres. Du coup, ils pourraient être des solutions… Enfin, comment dire ? Ça pourrait être des solutions rapidement trouvées.
- Elodie Choque
Mais exactement. Il faut imaginer que, par exemple… Et c'est le cas des bactéries aussi. Donc, bactéries, champignons, pour le coup… Là, même combat, ils sont beaucoup plus adaptables que nous, c'est-à-dire qu'ils vont se sacrifier pour qu'il y en ait un qui survive. Donc s'ils arrivent dans une condition qui n'est pas idéale, imaginons que je prends un champignon et je le mets à 4 degrés. Et il n'a pas l'habitude d'être à 4 degrés parce que lui, sa température, c'est 25 degrés. Eh bien, il va se multiplier et il va faire des modifications génétiques un petit peu partout au petit bonheur à la chance, totalement au hasard. jusqu'à ce qu'il y en ait un qui survive. En fait, ils vont tous se sacrifier pour qu'il y en ait un qui survive. Et celui qui arrivera à s'adapter à la condition sera celui qui survive. Donc, le seul objectif d'un micro-organisme, c'est la survie. Donc, ils sont capables de se sacrifier. Et comme ils sont unicellulaires, quasiment, c'est beaucoup plus facile pour eux de s'adapter que nous qui sommes pluricellulaires. Parce qu'on ne peut pas faire ça. Moi, on me met à 4 degrés et j'ai froid. Je ne vais pas muter et je vais reproduire plusieurs mois parce qu'il y en a un qui survive à 4 degrés, ce n'est pas possible. Donc clairement par rapport à ça. Et pour les plantes, c'est pareil, les plantes sont des êtres pluricellulaires, donc ce n'est pas quelque chose qu'elles sont capables de faire.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ok, c'est hyper intéressant. Et du coup, est-ce que vous voyez d'autres avantages ou inconvénients pour les champignons qu'on n'aurait pas mentionnés ?
- Elodie Choque
Alors, je ne sais pas, moi j'ai une passion aux champignons, j'en ai même un qui est tatoué sur mon corps pour vous dire à quel point vraiment c'est quelque chose qui est prononcé moi. C'est sur ma cheville, donc je n'irai pas jusqu'à vous montrer ma cheville quand même. Mais pour moi, c'est vraiment une grande passion, les champignons, parce que même moi qui fais ça depuis 20 ans maintenant, j'en découvre tous les jours et je trouve ça merveilleux. Et j'étudie des choses et je me dis, on peut faire ça, mais il y a ce potentiel-là, mais il y a ça aussi. Et je suis toujours surprise et je suis toujours impressionnée de voir ce que font mes collègues aussi quand je fais de la bibliographie scientifique, en me disant, mais je n'y avais pas pensé. Il y a un tel potentiel chez des champignons, la passion champignon. Allez-y tranquille là-dessus.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
J'avais une question un peu bizarre. Pendant les vacances, j'avais regardé une émission E égale M6 sur le bolt.
- Elodie Choque
Est-ce que le bolt,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
le blob, chaque fois je me plante, je m'étais dit redis-le avant l'épisode. Le blob. Est-ce que le blob, c'est un champignon ou pas ?
- Elodie Choque
Alors, c'est pas... C'est pas vraiment un champignon, c'est pas vraiment une plante et c'est pas vraiment un animal. C'est un petit peu, voilà, c'est ce qu'on appelle une amybe. Donc c'est plus ou moins classé dans les champignons, moi je suis pas trop d'accord. c'est ce qu'on appelle un pseudo champignon en fait.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord.
- Elodie Choque
Le truc du blob, c'est qu'il se nourrit comme un animal, il produit des pigments comme un végétal et il se reproduit comme un champignon.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est ça.
- Elodie Choque
À l'interface entre les trois.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Et donc, j'ai vu qu'on pouvait en acheter pour ses enfants, que ça se reproduisait, que ça faisait des couleurs incroyables.
- Elodie Choque
Ça dépend de beaucoup de choses. Ce qui est très, très drôle à faire, C'est un projet de recherche participative qui a été fait par une scientifique de Paris. Elle a écrit des bouquins et tout. Elle est vraiment géniale, je ne me souviens plus de son nom. Mais oui, c'est un projet de recherche collaborative pour lequel elle a été financée par l'ANR. Donc ça, c'était hyper cool. Et il est possible d'en acheter. Il est aussi possible de partir en forêt et d'en isoler soi-même et de faire ça à la maison. Et ce qui est très, très drôle, c'est de créer des labyrinthes. C'est ça. Avec du sel. et du coup de mettre du flocon d'avoine, parce qu'ils sont absolument fans de flocons d'avoine.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Fans de ça, oui.
- Elodie Choque
Donc vous créez des petits labyrinthes en sel, parce qu'ils n'aiment pas le sel, et du coup vous mettez des flocons d'avoine à certains endroits, et vous allez voir qu'ils vont trouver le chemin pour rejoindre le flocon d'avoine en passant par le sel.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est incroyable, j'ai serré. Je vais essayer de retrouver le E égale M6 qui était juste génialissime. Franchement, c'était hyper passionnant.
- Elodie Choque
C'est pas scientifique en question.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est possible.
- Elodie Choque
Quand on va dans les bois, on va en trouver des jaunes, des roses, des bleus, des verts, des noirs. Il y en a vraiment de toutes les couleurs des blobs. Donc, c'est vraiment de la famille des Alibs. Mais par contre, celui qui est vendu, je pense qu'il est plutôt dans les tons jaunes. J'avais des étudiants qui avaient fait ça sur un projet tutoriel qui s'était amusé. Et ce qui est très, très drôle, c'est qu'on l'étudie actuellement justement parce que c'est un champignon qui, une fois qu'il a fait un chemin, est capable de le refaire.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Apparemment, ils avaient une intelligence de…
- Elodie Choque
Ils sont en train d'étudier ce champignon pour des potentiels traitements sur la maladie d'Alzheimer.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ils le disent dans le reportage.
- Elodie Choque
Ce qui est très facile avec le blob, c'est que vous avez un blob, il suffit de le couper en deux, de le mettre dans deux boîtes différentes et ça fait deux blobs.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est incroyable.
- Elodie Choque
C'est vraiment quelque chose… En fait, comme c'est une structure qui est polynucléée, ça veut dire qu'elle a plusieurs noyaux, si je la coupe en deux, du moment qu'il y a un noyau, ça peut… repartir. S'il n'y a pas de noyau, ça ne peut pas repartir. Mais du moment qu'il y a au moins un noyau, ça peut repartir.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Donc, dans mon petit classement, je suis très visuelle, donc j'essaye de faire un arbre. Dans les micro-organismes, j'avais mis les champignons plutôt microscopiques. J'avais mis le blob à cet endroit-là. J'avais mis les bactéries, du coup. Attendez, je regarde en même temps, comme ça, je ne dis pas de bêtises. Qu'est-ce que j'avais mis d'autre ? qui nous concernent. Les levures, je me suis plantée, je les ai mises à part, alors que les levures sont des champignons.
- Elodie Choque
C'est des ascomycètes, c'est comme les moisissures. Elles sont unicellulaires, mais ça reste des ascomycètes, donc c'est des champignons.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ça, ça va clarifier mon arbre. J'essaye d'essayer de rendre ça un peu plus digeste pour les auditeurs, etc. Qu'est-ce que vous pourriez nous dire encore sur tout ce qui est biotech végétale et biotech micro, comment on dit ? Biotech micro-ridienne, enfin avec les champignons.
- Elodie Choque
Biotech fongique.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Oui, je suis bête. Biotech fongique, je cherche compliqué.
- Elodie Choque
Qu'est-ce qu'on a l'habitude quand même. Oui,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
voilà. Qu'est-ce qui... Est-ce qu'il y a un élan ? Est-ce que les biotech en France, sur ces sujets-là, ça se développe ? Est-ce que c'est en train de stagner ? Est-ce qu'il y a de l'investissement dans la recherche ? Est-ce que vous pouvez nous faire un petit retour là-dessus ?
- Elodie Choque
Alors, ce qui se développe de plus en plus en biotech fongique, c'est la valorisation des coproduits, des cultures agricoles. C'est ce dont on parlait tout à l'heure. C'est ce que je fais moi au laboratoire, mais clairement, je ne suis pas la seule. Et en fait, c'est le fait d'utiliser les coproduits, les résidus agricoles, pour faire se développer les champignons, les faire. fermenter et créer de nouvelles molécules ou de nouveaux produits qui pourraient exister à partir de ça. En gros, c'est venir ramener des sous-filières aux filières agricoles actuelles pour ramener de la rentabilité. C'est-à-dire qu'un agriculteur ne vendrait pas que le produit de la culture, il pourrait aussi vendre ses résidus pour en faire quelque chose. Et les domaines d'application, comme on le disait, sont fous. Ça peut aller du bâtiment au textile, à l'alimentaire. ça peut aller dans plein d'autres choses, donc moi je l'ai dit, les cosmétiques, etc. Et il y a plein de choses qui se développent là-dessus. Il faut savoir que tous les champignons ne sont pas adaptés à toutes les cultures. Un truc que là je commence à développer et que j'essaye de faire au laboratoire, c'est d'utiliser les champignons pour dégrader les plastiques pétrosourcés. On essaie de trouver des consortiums de champignons à l'heure actuelle. Consortium, ça veut dire un ensemble de champignons, c'est-à-dire qu'il n'y en a pas qu'un, mais il y en a plusieurs. Les champignons sont capables de produire des enzymes qui pourraient dégrader certains plastiques pétrosourcés. Je pense aux polystyrènes, aux polypropylènes, à ce genre de choses. On pourrait se dire qu'on pourrait utiliser les champignons et peut-être ensemencer ou faire des bioréacteurs dans lesquels on mettrait des plastiques et on pourrait les dégrader par les champignons. Alors on n'arriverait jamais à une dégradation à 100%. Oui,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
mais déjà bien avancée.
- Elodie Choque
Et je pense particulièrement au sixième continent, qui est le continent de plastique, qui se déplace un petit peu partout en mer. Si là-dedans, on arrivait peut-être à venir injecter des champignons ou ce genre de choses pour essayer d'en réduire la masse. Après, il faut faire attention à ce genre d'études, parce que peut-être en dégradant, on va produire des molécules qui sont toxiques. Donc il faut faire aussi attention à ça. Je pense qu'il faut rester confiné à l'échelle du laboratoire pour pouvoir l'étudier, pour s'assurer de la non-toxicité du truc. Mais je pense que ce qui doit se développer maintenant, c'est vraiment cette espèce d'engouement d'essayer de chercher des champignons qui pourraient lutter contre ces plastiques-là, parce que finalement, ce sont des plastiques qui sont non-biodégradables. Biodégradables, ça veut dire dégradés par le vivant. En général, c'est dégradés par les bactéries et les champignons. Donc, c'est aller chercher des bactéries et des champignons qui soient capables de dégrader le non-dégradable.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Oui, le risque.
- Elodie Choque
Voilà. On a fait les premiers tests avec deux stagiaires que j'ai eus cette année, avec Aspergillus subingensis qui était justement connu pour ça. Et on a eu des premiers résultats qui me semblent assez intéressants. Là, j'ai un stagiaire qui a fait ça sur polypropylène. J'avais pris des intercalaires de couleurs. Il y avait des roses, des bleus, des verts en polypropylène que j'avais achetés chez Cultura, un truc de base. Et en fait, avec le pigment jaune, les intercalaires jaunes sont non dégradables. Ils inhibent la croissance du champignon. Donc, il y a quelque chose dans ce pigment jaune, dans ce pigment-là, qui est un pigment pétrosourcé, c'est quasiment sûr, du coup, ça inhibe le champignon. Donc, je peux dégrader des feuilles roses, mais je ne peux pas dégrader des feuilles jaunes.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est hyper intéressant. Ça voudrait peut-être dire qu'il y a des colorants qui sécrètent quelque chose qui est… C'est hyper passionnant. Qu'est-ce que j'allais dire, du coup ? Oui, est-ce que le risque de faire intervenir les champignons, ce ne serait pas de faire encore des microplastiques ? puisqu'il le dégrade mais il ne le dégrade pas complètement, du coup on coupe en petits morceaux.
- Elodie Choque
On en est effectivement là, après moi je me dis on en est au microplastique, mais peut-être que justement on peut raisonner cette taille en se disant l'objectif ce n'est pas de faire du nanoplastique, c'est du microplastique, quelque chose que je sois capable de venir filtrer et récupérer, je réduis la masse, et derrière peut-être je peux incinérer parce que là la masse est trop importante pour incinérer, et donc du coup il faut peut-être justement se dire mon process, je le contrôle pour arriver à telle taille, parce qu'à partir de telle taille, je peux le traiter différemment. Et donc du coup, c'est associer finalement le biologique à quelque chose qui sera peut-être chimique ou mécanique derrière.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Oui, d'accord. C'est une étape.
- Elodie Choque
Voilà. Pour l'instant, effectivement, ce que va faire le champignon, c'est qu'il va enlever certaines choses qui derrière vont permettre de faire un traitement chimique qui n'est pas possible pour l'instant parce que trop toxique. Donc peut-être qu'avec le champignon, la toxicité du traitement chimique derrière va partir. C'est vraiment des pistes exploratoires, mais qui sont hyper importantes à l'heure actuelle.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est génial. C'est génial. Je vois aussi qu'ils utilisent des plantes ou des colorants naturels pour essayer de traiter les eaux polluées par les colorants synthétiques. Je voulais aussi savoir, par rapport aux sols, nos sols contaminés, aux métaux lourds ou autres, est-ce que le champignon pourrait avoir un rôle de dépollution là-dedans ?
- Elodie Choque
Pas qu'un peu, même. Donc il y a justement ça, c'est les travaux qui ont été menés dans le cadre d'un projet avec Patrick Martin, Anissa Lounès de Loulouco et du coup Nathalie Julien chez nous. Et c'est de là qu'on a isolé les champignons filamenteux. En fait, le mucor bleu dont je vous parlais a été isolé d'un sol qui était contaminé au cadmium.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ah oui, elle en a parlé.
- Elodie Choque
On a poussé Isatis sur des sols au cadmium. Et il y a des publications, parce que du coup on a regardé un petit peu du lieu, il a été montré en fait que c'était l'association champignons-plantes qui permettaient la dépollution du sol au cadmium. La plante toute seule n'y arrive pas, le champignon tout seul n'y arrive pas, mais ensemble ils arrivent à dépolluer le sol au cadmium.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est un épisode... J'avais pas fait le lien, mais en fait c'est un des épisodes qui arrivent là, dans les séries de l'été. Il y a aussi tous les intervenants de l'UTA avec Patrick Martin et les 15 personnes qui sont venues pour la troisième journée des plantes teintoriales. Et il y a justement ce...
- Elodie Choque
Bien. Vous deviez avoir Estelle sur la journée des plantes. C'est ça,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
elle n'était pas présente, mais elle était en distanciel. C'est pour ça que je n'ai pas fait le lien tout de suite. Donc top, ça nous donne un teaser pour un autre épisode sur la dépollution des sols. J'avais envie de vous poser une question qui filtre un peu les usages des champignons. Qu'est-ce qui fait, quel est l'environnement qui est... alors je ne sais pas l'inverse, de non propice, mais qui n'est pas propice aux champignons. Qu'est-ce qui fait que… Voilà, donc c'est, comment je vais dire, avec tout ce réchauffement climatique et tout ça, c'est un des risques pour les champignons ou pas ?
- Elodie Choque
Non, ce ne sera pas un risque parce que du coup, avec la chaleur, c'est positif, mais chaleur plus humidité. En fait, le champignon n'a pas besoin de l'eau en elle-même, il ne faut pas qu'il soit immergé. Par contre, il a besoin d'énormément d'humidité. Il faut qu'il y ait de l'eau disponible. Et dans l'atmosphère, il y a de l'eau disponible, il y a un taux d'humidité. Et effectivement, si c'est trop sec, le champignon ne pourra pas se développer. Ce qui est vraiment problématique pour le champignon, c'est la sécheresse.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Est-ce qu'il y a des champignons ?
- Elodie Choque
Il se met en forme de sport et il attend que l'humidité revienne.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Comme une graine avec la dormance.
- Elodie Choque
Exactement.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Est-ce qu'il y a des champignons dans le désert ?
- Elodie Choque
Bien sûr, qui travaille toujours au LGC, Bioprocédé Système Microbien. Ils ont une collaboration avec l'Algérie depuis des années et ils vont chercher dans les sols algériens des... Ce n'est pas des champignons, c'est des bactéries, mais ça s'appelle des streptomycès. C'est des bactéries filamenteuses, donc ça a été défini comme des champignons au départ, sauf que génétiquement, derrière, quand on a fait le séquençage, on s'est aperçu que c'était des bactéries, mais elles sont filamenteuses et elles sont à la source de la production. de quasiment tous les antibiotiques qui peuvent se développer sur le marché à l'heure actuelle. Et donc ça, c'est des produits qu'on va chercher dans des sols désertiques.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Et donc, à part la sécheresse, que craint le champignon ?
- Elodie Choque
Le feu, il n'aime pas trop ça non plus. Il ne peut pas se brûler. Donc,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
le feu ou les hautes températures ? Non, le feu.
- Elodie Choque
Le feu, les hautes températures, ça ne lui fait pas peur. En fait, le champignon, à partir du moment où il va être en danger, il va se pourruler. Et comme je le disais au départ, il n'y a rien qui peut plus résister qu'une spore de champignon. Ça peut résister des millions d'années. Parce que du coup, une graine, chez une plante, au fur et à mesure des années, elle a son potentiel germinatif qui va diminuer. Donc elle va finir par mourir. Une spore de champignon, on pourrait très bien récupérer des spores de champignon dans des fouilles archéologiques, par exemple dans des ampharas ou ce genre de choses, et qu'on peut pousser le champignon. C'est des choses qui se sont faites en Égypte et on peut faire repartir des champignons des milliers d'années après.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Donc c'est hyper résilient comme…
- Elodie Choque
Il y a tout ce qui peut lutter contre un champignon, clairement.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, incroyable. Alors, j'ai envie de…
- Elodie Choque
Il y a une autre chose qui est sortie, je ne sais plus comment elle s'appelle. Justement, c'est à partir d'un champignon qui s'appelle le cordyceps. Je vous retrouve ça. où justement c'est les cerveaux des hommes qui sont manipulés par le champignon. The Last of Us, ça s'appelle. D'accord. La série The Last of Us. En fait, c'est basé sur un champignon qui s'appelle le Cordyceps. Le Cordyceps, c'est un champignon qui va venir infecter un autre qui va être un insecte, qui va faire pousser le mycélium dans son cerveau et qui va manipuler l'insecte pour pouvoir l'emmener où il veut, pour pouvoir disséminer comme il veut. Et ils ont créé cette série US qui s'appelle The Last of Us sur un champignon qui est capable de manipuler le cerveau humain. Justement, elle est assez bien faite. Et c'est le principe même de Cordyceps avec les insectes. Ça détourne le cerveau des insectes et comme ça, il le fait aller où lui, il veut aller. Et donc, du coup, c'est lui qui incite l'insecte. Et vraiment, vous pouvez voir cette super jolie photo. On voit le Cordyceps qui tord. de la cuticule de l'insecte et l'insecte continue à bouger alors qu'il est mort.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est dingue.
- Elodie Choque
C'est vraiment un truc de mort vivant.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
C'est ça, c'est un zombie.
- Elodie Choque
Regardez pas ça avec des enfants, par contre. Oui,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
bien sûr. Non, on fait gaffe. Alors, je voudrais venir... Franchement, on pourrait parler encore des heures parce que je trouve ça vraiment tellement incroyable. Vous m'avez encore... dit quelque chose d'incroyable et j'aimerais vraiment qu'on en parle aux auditeurs parce qu'on a beaucoup dans les auditeurs d'artisans, d'artistes, bon, comme je vous l'ai dit, on a beaucoup de scientifiques aussi, d'entreprises, mais vous m'avez parlé de l'agar art. Est-ce que vous pouvez nous raconter un petit peu ce que c'est pour les auditeurs et puis pour moi aussi parce que c'est intéressant.
- Elodie Choque
Alors, l'agar art... C'est vraiment un gros fun de microbiologiste. Alors ça se fait avec des champignons, mais aussi avec des bactéries. Et c'est de produire de l'art sur des boîtes de pétri. Et en gros, ce qu'on va faire, c'est qu'on va mélanger des bactéries et des champignons pour créer de la couleur, comme si on créait un tableau. Et donc on va venir, on va prendre une boîte de pétri vierge, on va choisir ses micro-organismes, celui-là parce qu'il est jaune, celui-là parce qu'il est rose, celui-là parce qu'il va me faire comme de l'herbe ou comme une petite mousse parce que c'est un champignon justement. et je vais venir peindre sur ma boîte avec mes bactéries. Et ça va pousser pendant deux ou trois jours, et c'est seulement au bout de deux ou trois jours que je vais voir apparaître le dessin. Et il y a des compétitions mondiales d'Agar Art. Il y en a une qui est créée au niveau des IUT, qui s'appelle le concours Agar Art pour les étudiants de l'IUT, qui est créé chaque année. Nous, on a des étudiants qui ont participé pendant quelques années, c'est plus le cas maintenant, mais du coup ça existe aussi. Mais il y a des compétitions mondiales d'Agar Art. Il y a des gens qui font des choses folles. Et en fait, ce qui est vraiment bien avec la gare, c'est que le dessin n'apparaît pas tout de suite. Il faut que le micro-organisme se développe pour voir apparaître le dessin. Et en fonction de quand est-ce qu'on met le micro-organisme ou du temps que met le micro-organisme à se développer, on peut même faire un dessin qui se modifie avec le temps. Parce qu'on sait que celui-là va pousser en deux jours, mais que celui-là va pousser en quatre jours. Et que celui-là, il va être bleu au départ, puis après derrière, il va devenir gris ou violet. Du coup, on peut faire évoluer un dessin comme ça sur le temps avec de l'agar. Il y a des choses merveilleuses. Tapez agar art en Google Images et vous trouverez des choses sublimes.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Alors, c'est ce que j'ai fait quand on a eu notre premier échange. Je suis tombée sur une fée clochette comme dans Peter Pan, toute faite comme ça et j'ai débloqué. Je me suis dit, mais… Donc, en fait, il y a la couleur, la texture et la durée d'évolution qui jouent là-dedans. Oui, ça crée.
- Elodie Choque
Et c'est vraiment un fun chez les microbiologistes, c'est vraiment ça, c'est que du coup, il faut connaître suffisamment les micro-organismes pour savoir ce qui va donner le dessin à la fin. Et donc, du coup, c'est des années d'entraînement, des années de tests, des années d'utilisation pour réussir à faire des trucs. C'est dingue. Il y a ceux qui trichent, parce qu'il y a ceux qui mettent des colorants alimentaires dans la gélose, mais ça, c'est du faux. Il faut travailler avec les micro-organismes pour faire du vrai agarard, il faut faire attention à ça.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Bon, écoutez, ça,
- Elodie Choque
c'est passionnant. qui est connu quasiment que des microbiologistes, on ne va pas se mentir.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Alors, moi j'avais envie de vous demander maintenant, pour les questions, encore d'ouverture. Alors franchement, vous venez de nous ouvrir un univers à vous toutes seules. Non mais franchement Élodie, c'est génial, j'ai hâte de venir vous voir. Donc on a prévu ça.
- Elodie Choque
Vous ferez de la gare, comme ça vous pourrez aussi le faire par vous-même, je vous prendrai les poteaux sur la mesure.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Trop bien. Donc vous venez de nous ouvrir un univers à vous toutes seules. Je pense que ça va en passionner plus d'un. Il y en a plein qui vont aller regarder. Franchement, je trouve ça génial. Je voulais savoir, sur les projets des champignons, quels sont les projets dans le monde qui vous passionnent le plus ? Si vous deviez en garder un, quel est le projet que vous regardez vraiment évoluer parce que vous trouvez que c'est hyper prometteur ?
- Elodie Choque
Alors moi, celui que je regarde, c'est l'utilisation des champignons pour les bioplastiques et les alternatives au plastique à l'heure actuelle. Parce que c'est vraiment une de mes thématiques de recherche. Et je ne suis pas toute seule et on est en train de monter un consortium international là-dessus. Et il y a plein de collègues que moi, je ne connais pas et que je découvre. Et en fait, l'avantage avec les champignons, c'est qu'on peut aller un petit peu plus loin que de l'emballage alimentaire. On peut aller sur ce qu'on appelle du smart packaging. Et smart packaging, donc packaging intelligent, c'est-à-dire que par exemple, en mettant des éléments fongiques ou pas forcément fongiques, mais en mettant certains éléments dans les packagings, on peut faire évoluer la couleur et donc du coup indiquer aux consommateurs si l'aliment peut être consommable ou pas. Parce que l'emballage va changer de couleur, par exemple.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Alors ça, c'est dingue, parce que j'ai vu ça dans ma veille en Chine, sur les emballages alimentaires de viande, de porc, pour aider les gens en magasin, et c'était, à mon sens, c'était des anthocyanes qui viraient de couleur en fonction du pH pour indiquer... Il n'y a pas que les anthocyanes.
- Elodie Choque
Les molécules qui peuvent être utilisées. Mais globalement, le Smart Packaging, c'est un packaging intelligent. Il y a un autre type de Smart Packaging qui existe, que moi je trouve hyper intéressant. C'est par exemple, je peux très bien faire un packaging avec des prébiotiques et que les prébiotiques, au contact de l'aliment, soient distribués à l'aliment. Ce qui fait que derrière, je vais pouvoir consommer un aliment qui sera enrichi en prébiotiques.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord, ok.
- Elodie Choque
Il y a plein de types et plein d'idées de Smart Packaging. Et c'est vrai que moi, ce qui m'intéresse actuellement en recherche, c'est ça. Et on s'aperçoit que clairement, les champignons sur le Smart Packaging vont jouer un enjeu parce que justement, on va pouvoir contrôler la biomasse qu'on va pouvoir produire. Ce n'est pas forcément le cas avec les agro-ressources à l'heure actuelle. Il faut savoir qu'une agro-ressource, ça va dépendre de la chaleur qu'il aura fait dans l'année, ça va dépendre de toutes les conditions environnementales, mais je ne vais jamais avoir la même composition d'agro-ressources. Alors, quand je... produire un champignon de manière biotechnologique, j'ai toujours la même chose et je peux le produire toute l'année en fait. Donc je ne suis pas dépendante de ça. Et donc je pense que les champignons représentent un vrai enjeu dans tout ce développement de packaging biosourcé et de smart packaging. C'est vrai que c'est parce que c'est ma thématique de recherche mais c'est ce que je regarde le plus.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
D'accord. Est-ce que vous avez un événement dans le domaine du champignon français ? Je ne sais pas s'il y a un rassemblement ?
- Elodie Choque
Du coup, il y a ma collègue, justement, Rosane Ravalek. La première réunion aura lieu lundi prochain. Donc, ce n'est pas pour tout de suite, mais en 2026, il me semble que c'est 2026, aura lieu un congrès qui s'appellera Fermentation. Et donc, du coup, il va y avoir un congrès sur le monde des champignons et des bactéries qui va se développer, et sur la fermentation en particulier. Je devrais certainement déposer quelque chose pour présenter mes recherches.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Top. Est-ce que vous avez des bouquins sur les champignons ? On a vu le bouquin que vous nous aviez montré pour les enfants.
- Elodie Choque
Je le remets une fois, parce que je le trouvais formidable.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Les petits docs plus et les champignons d'étonnants êtres vivants. Pour ceux qui sont en audio, allez sur Patreon pour voir les vidéos des podcasts. Un livre pour adultes ? Qu'est-ce qu'on pourrait recommander ?
- Elodie Choque
Essayez de faire des pleurotes vous-même chez vous à partir de votre marbre de café. Le guide de culture des champignons maison. Et donc, vous pouvez reproduire. Et donc, ça, c'est quelque chose que j'ai essayé avec mes étudiants il y a deux ans. Et ça marche super bien. Donc, on peut partir d'une pleurote qu'on achète à l'intermarché et refaire de la pleurote derrière et avoir son stock de pleurotes maison qu'on peut manger à la main. Sans problème. Une belle omelette. et ce livre m'a appris énormément de choses et il est très bien vulgarisé c'est un livre d'Eliott Webb et je le conseille fortement je l'ai dévoré génial,
- ArtEcoVert Pauline Leroux
franchement top alors d'habitude je pose la question si vous étiez une plante teintoriale laquelle seriez-vous ? si vous deviez choisir un champignon qui vous ressemble le plus lequel ce serait et pourquoi ?
- Elodie Choque
Alors. qui me ressemble le plus. On va rester sur Aspergillus tubingensis. Ça reste mon bébé. C'est vraiment le champignon monpozox. C'est celui qui m'a mis aux champignons filamenteux. J'avoue que j'hésiterais entre celui-là et la levure parce que j'aime quand même beaucoup le pain et la bière. Mais du coup, on va rester sur Aspergillus tubingensis. Il est antioxydant et du coup, j'ai l'impression de ne pas vieillir. Comme ça, ça me va très bien.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Ok. Est-ce qu'il y a quelque chose, Élodie, qu'on a... Alors, c'est sûr que vous avez... qu'on a oublié des choses, c'est sûr. Mais est-ce qu'il y a un sujet que vous voulez... C'est ça, quand je viendrai vous voir, on en fera en direct au labo, ce sera hyper intéressant si on oublie des choses. Est-ce que là, pour cet épisode, qui va arriver dans le cadre de cette série sur l'ouverture à la biotech, est-ce que vous avez encore des choses à nous dire qu'on aurait pu oublier, sachant qu'on complétera en septembre quand on se verra ?
- Elodie Choque
Je pense qu'on a fait pas mal le tour, donc je dirais que non. Par contre, si les gens ont des questions qu'ils n'hésitent pas, j'y répondrai avec plaisir. ou justement pour...
- ArtEcoVert Pauline Leroux
créer un deuxième épisode que les gens posent leurs questions comme ça on aura déjà les questions des gens et je pourrais les préparer à l'avance trop bien donc toutes nos curieuses et curieuses du podcast à récover n'hésitez pas sous les posts qui paraîtront et là où vous pouvez mettre des commentaires mettez vos questions pour Elodie parce qu'en septembre je vais au labo et on va continuer à explorer le monde des champignons franchement Elodie je j'ai pas vu le temps passer je vois que là je n'ai pas du temps on les a ratés de loin non ça va franchement c'était hyper passionnant vraiment c'est un monde qui s'ouvre qui a beaucoup de points communs dans le sens enfin moi j'y vois beaucoup de points communs avec ce que je travaille depuis deux ans et demi mais j'ai l'impression que ça va encore plus loin dans l'agilité du travail j'ai l'impression que c'est encore plus il y a plus de potentialité en fait c'est beaucoup plus il y a encore plus c'est encore plus grand
- Elodie Choque
C'est encore plus grand. C'est un vaste monde, c'est un univers entier les champignons.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Et ce qui me plaît beaucoup, c'est cette enquête qu'il va falloir encore mener sur le lien entre ce que la plante a pu transmettre aux champignons, comme vous l'expliquiez tout à l'heure, de se dire qu'est-ce qui a fait qu'ils se communiquent entre eux ou se passent des infos. Ça, ce serait hyper intéressant de cruiser.
- Elodie Choque
Si on parle pigments et champignons, moi, les deux choses que je veux faire dans ma carrière, alors en fonction des financements que j'arriverai à obtenir, parce qu'on en est toujours là aussi quand on est chercheur, c'est justement de réussir à prouver mon hypothèse sur la mélanine et le fait que ce ne soit pas un pigment. Ça, c'est vraiment quelque chose qui me tient à cœur depuis que je suis en postdoc, parce qu'aspergillus tubingensis, en fait, il fait partie des black aspergillis. C'est un des champignons filamenteux qui produit le plus de mélanine, vraiment.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Donc, c'est pour ça que je suis aussi partie sur ce champignon-là. Et oui, la petite découverte qu'on a faite avec le mucor bleu et l'isatis, et l'échange, le dialogue moléculaire entre la plante et le champignon. Mais ça, c'est tellement… On a tellement envie de partir là-dedans. Mais encore une fois, il faut trouver les financements.
- Elodie Choque
Alors, je le rappelle, parce que ça se fait naturellement sur les épisodes teinture, plantes teintoriales, etc. Mais s'il y a des experts, d'autres chercheurs, des gens qui ont lu des choses, etc. que c'est comme d'hab un épisode interactif et que les gens qui ont des infos ou qui ont étudié ce sujet-là sont les bienvenus pour rebondir, pour venir sur le podcast, etc. Parce que l'objectif, c'est vraiment qu'on vienne parler de tout ça. Franchement, je suis hyper contente.
- ArtEcoVert Pauline Leroux
Moi, je suis quelqu'un qui collabore facilement. Donc, si les gens veulent me contacter pour des collaborations de recherche, ce sera avec plaisir. Je considère que la science, ça se partage et qu'on est plus fort à plusieurs que tout seul. Donc, surtout, il ne faut pas hésiter.
- Elodie Choque
Canon. écoutez franchement Elodie vous êtes mon premier épisode sur l'ouverture aux biotechnologies je ne suis pas déçue donc je remercie Romain Vauclin qui m'a passé votre contact clairement il m'a dit tu vas voir il ne s'est pas trompé franchement je ne suis vraiment pas déçue en plus il y a eu plein de surprises aussi sur la biotech végétale je ne savais pas que vous aviez travaillé aussi là dessus franchement Elodie un grand merci et on se donne nous rendez-vous en septembre pour continuer ça mais au
- ArtEcoVert Pauline Leroux
labo ok ? voilà parfaitement.
- Speaker #2
Merci beaucoup Elodie Je vous invite à me rejoindre sur ma page Instagram ARTECOVERT pour y découvrir le nom des prochains invités. Je me permets de vous rappeler que la seule manière de soutenir ce podcast est de le noter et le commenter sur la plateforme d'écoute de votre choix c'est ainsi qu'on arrivera à faire porter la voix de ces passionnés de la couleur végétale. Merci à tous
Savoir si vous allez aimer, les mots clés du podcast ArtEcoVert : teinture végétale plantes tinctoriales indigo garance encre végétale couleur végétale colorants végétaux pigments végétaux coloration capillaire végétale fibres naturelles colorants biosourcés tanins teinture naturelle plantes artecovert couleurs de plantes design végétal couleur jardin agriculture tinctoriale indigo tendance innovation nuances cosmétiques biotechnologies couleurs du vivant