- Speaker #0
Vous écoutez Au bénéfice du doute, le podcast où les personnes victimes de violences sexuelles prennent la parole. Cet épisode évoque des faits de violences sexuelles, écoutez-le dans de bonnes conditions émotionnelles. Cet épisode est un petit peu particulier à mes yeux, parce que c'est moi, Julie, qui vais témoigner au micro de Au bénéfice du doute. J'ai été agressée à l'âge de 28 ans par quelqu'un que je connaissais, et moi qui à l'époque pensais qu'une agression sexuelle arrivait toujours dans une ruelle sombre la nuit et ne risquait pas de m'arriver à moi, Julie, invincible, je me suis rendu compte que des agressions sexuelles, j'en avais vécu plein avant celle-là. Quand j'étais enfant, je me souviens plus très bien, mais c'était par un grand cousin, qui avait 10 ans de plus que moi. Quand j'étais en CM2, un copain de classe me pourchassait à travers la cour pour que je lui montre ma culotte. Quand j'étais au collège, puis même à la fac, on m'a déjà touché les fesses plein de fois, sans que je l'autorise ou que je le souhaite. À l'âge adulte, plusieurs fois, un inconnu m'a suivi dans la rue en me faisant des propositions obscènes. Un oncle m'a déjà frappé les fesses parce que j'avais mis une robe qu'il me trouvait bonne. Quand j'étais vendeuse, des clients m'ont déjà fait des propositions sexuelles sur mon lieu de travail, etc. Toutes ces petites choses-là que je cite sont en réalité des agressions sexuelles. Le fait qu'un garçon, qu'un homme pense avoir des droits sur le corps de n'importe quelle femme, que ce soit une inconnue, une cousine, une amie ou sa propre femme, c'est ce qui fait le ciment de notre société patriarcale. Le corps des femmes est à disposition des hommes. Et c'est dans ce contexte-là qu'en novembre 2019, j'ai subi l'agression sexuelle qui a donné lieu à ce podcast. Et aujourd'hui, c'est donc Aurélie,
- Speaker #1
que vous avez déjà entendue dans les épisodes 9 et 10,
- Speaker #0
qui mènera l'entretien.
- Speaker #1
Bonjour Julie.
- Speaker #0
Bonjour Aurélie. Comment vas-tu ?
- Speaker #1
Comme toi, tu vois. On va retourner,
- Speaker #0
ouais. Bah ouais, ça fait trop bizarre. Et même, tu sais, à chaque fois je dis aux gens, réfléchissez à une phrase. Maintenant je le dis parce qu'à chaque fois, quand les gens arrivent, ils ne savent pas quoi dire. Et en vrai, mais même en y réfléchissant, je ne sais toujours pas par quoi commencer. Et tu sais le truc de « bonjour, je m'appelle Julie, j'ai 33 ans et j'ai été agressée il y a 4 ans » . C'est un peu glauque. Je ne sais pas par où commencer, mais non, mais je vais peut-être commencer par ça, en vrai.
- Speaker #1
En vrai, commence par ce que tu veux.
- Speaker #0
J'ai été agressée il y a 4 ans et demi. C'était le 1er novembre 2019. Et du coup, j'ai été agressée par quelqu'un que je connaissais. À l'époque, je faisais donc du théâtre. Je faisais du stand-up, plus précisément. Mais je faisais quand même des courts-métrages. Je participais en tant que comédienne à des petits courts-métrages. Souvent, c'était des petits courts-métrages étudiants qui n'étaient pas rémunérés, qui étaient bénévoles. Parce qu'il faut bien qu'ils s'entraînent et ils n'ont pas de budget. Et puis, lui, ce mec-là, la personne qui m'a agressée, il faisait des vidéos de publicité sur Internet, sur les réseaux sociaux. Et lui, par contre, il faisait ça de façon professionnelle. Donc, je connaissais quelqu'un qui le connaissait. Je suis rentrée comme ça, dans ce petit milieu-là. Et un jour, il y avait une comédienne qui lui a foutu un lapin. Et donc, il m'a contactée pour que je puisse remplacer cette comédienne du jour au lendemain. Et donc, j'ai tourné toute une journée de tournage avec ce réalisateur, toute une équipe de tournage.
- Speaker #1
Et du coup, c'était la première fois que tu allais être payée pour un rôle.
- Speaker #0
Exactement. Donc, j'ai eu mon premier cachet d'intermittence par ce mec-là suite à ce tournage. Et je me suis dit, vas-y. c'est bon, ça y est, t'es lancé, quoi. Tu commences à être payé, en fait, pour jouer de la comédie, quoi. Deux mois plus tard, environ, il me recontacte pour me dire, « Bon, ben voilà, j'ai une vidéo que j'aimerais faire. J'ai pensé à toi pour le rôle. Donc là, par contre, il faudrait que tu passes un casting. » Bon, ben, OK, passons ce casting. Et donc, le casting s'organise le 1er novembre 2019, jour férié. Parce que du coup, ça s'est passé dans les locaux où on avait déjà fait un premier tournage. Et en fait, c'est des locaux où il y avait un centre de langue pour apprendre les langues étrangères. Donc il n'y avait personne ce jour-là. Dans un immeuble où il y avait plein de salles de classe, donc c'est quand même assez grand. On rentre dans la salle de classe où se déroulait le casting. Et c'était cette même salle où on avait tourné quelques mois auparavant. Donc ça m'était familier, tu vois, le mec, je le connaissais. La salle, on avait déjà tourné là-dedans. Même si j'étais très stressée pour le casting. Parce que bon, c'est quand même un casting. Même si c'est pas Spielberg, le réalisateur. Mais bon, ça reste un casting. C'est un peu comme un entretien d'embauche, finalement. Mais du coup, je rentre dans cette salle. Et en fait, moi, j'avais appris le scénario qu'il m'avait envoyé. Je l'avais appris par cœur. C'était une nana qui veut se suicider parce que son petit ami l'a trompée. Elle énonce fort qu'elle veut se suicider. Il y a un objet connecté, un peu comme Alexa. qui met en route et pour éviter qu'elle se suicide, hop, elle se met en relation avec un écran interposé, avec le SAV de cet objet connecté. Le gars du SAV parle anglais et elle c'est une française et qui du coup essaye de parler anglais et en fait elle fait plein de petites erreurs de prononciation qui font qu'il y a un quiproquo en fait qui s'installe où la personne dit des choses comme happiness, elle dit pénis. Et en fait, le gars croit qu'au lieu de parler de happiness, de bonheur, elle parle de pénis, d'un pénis, et donc du coup, il y a plein d'amalgames comme ça qui se font. Il y a une mauvaise interprétation du mec en face, la meuf, naïvement, elle continue de parler, et en fait, elle continue de faire des erreurs de langage, où elle dit des choses sexuelles sans s'en rendre compte. Voilà, c'était le scénario initial, que j'avais appris par cœur. Le gars me dit, le réalisateur, donc on n'était que tous les deux, et il me dit, ok, t'as pas encore saisi toute la personnalité du personnage, et donc pour pouvoir, comment dire... creuser un peu le personnage et pour que tu sois bien dans la peau de ce personnage, on va faire une improvisation. On va changer un petit peu le contexte. Tu joues toujours cette personne-là qui s'est faite tromper par son petit ami. Et moi, je vais jouer un ami qui vient te réconforter, ton meilleur ami. Et tu vas devoir me séduire. Bon, d'accord, on fait ça comme ça. Je devais le séduire pour me venger un peu de mon mec qui m'a trompé. On se met vraiment en situation d'improvisation, c'est-à-dire qu'il sort de la salle. Il frappe à la porte en mode « toc toc, c'est moi, je viens de réconforter » . Il ouvre, il me prend dans ses bras, je lui explique « mon petit ami m'a trompé » . Et puis il m'installe sur ses genoux et je me dis « bon, ok, pourquoi pas, deux amis peuvent peut-être faire ça » . Et puis il commence à vouloir me toucher les seins, me poser des questions sur ma vie intime. Mais ma vie intime personnelle, enfin... ma vie intime, de moi Julie, et pas moi le personnage, parce que je suis lesbienne. Et en fait, il le savait. Du coup, il me dit, mais du coup, c'est comment le sexe entre femmes ? Il y a vraiment ce truc-là de dissociation. J'adore ce mot, parce que c'est vraiment exactement ce qui s'est passé. C'est-à-dire que mon esprit s'est scindé en deux à ce moment-là. Donc je me dissocie. Il y a une partie de mon cerveau qui se dit, ok, c'est bizarre en fait. Pourquoi il me pose des questions sur ma vie privée, alors qu'on est censé être dans un rôle ? Mais donc moi, je continue de répondre et je dis « tu sais, tu devrais demander à ta femme » . J'essaye de lui le ramener à la réalité pour essayer de sortir de cette conversation qui me met extrêmement mal à l'aise. Et donc lui, il répond à ça « mais non, mais Julie, reste dans l'impro, s'il te plaît, moi, je n'ai pas de femme dans l'impro » . Et moi, je suis tétanisée, c'est lui qui gère l'impro. Et dans ma tête, je me dis « mais connard, moi, je ne suis pas lesbienne, en fait, dans l'impro » . Mais voilà, j'essaye tant bien que mal de me dépêtrer de ça. Lui me regarde ma poitrine, il me dit que j'ai une superbe poitrine, il commence à toucher ma poitrine d'abord à travers les vêtements, puis ensuite il met ses mains sous ma chemise. Et là il y a vraiment ce truc-là de tétanie qui s'installe. Moi je sais pas ce que ça veut dire à cette époque-là, la sidération, la tétanie, je connais pas, je comprends pas pourquoi. Je me laisse faire et puis en même temps, moi j'ai aussi ce truc-là de pas vouloir contrarier les gens, de pas arriver à dire non. Et donc, je n'y arrive pas et je m'en veux à ce moment-là. Je me dis, mais pourquoi tu ne le dis pas ? Et en même temps, je me dis, c'est l'impro. Il y a tout ça qui se... Il y a une tempête dans ma tête qui vient et je suis incapable de réagir. Et donc, l'impro se répète, c'est-à-dire qu'à chaque fois, il sort et revient dans la salle. Il m'embrasse à deux reprises. C'était juste un smack, mais en fait, si je n'avais pas enlevé ma tête, il m'aurait roulé une pelle. J'ai senti qu'il sortait sa langue pour me rouler une pelle. Et pareil, dans ma tête, je me disais, mais c'est moi qui suis censée le séduire, en fait. Pourquoi il est aussi entreprenant s'il veut faire cette impro-là, en fait ? Il ne me laisse pas justement prendre le lead et lui montrer que je sais jouer un rôle et je sais séduire quelqu'un sans avoir besoin de le tripoter, en fait. Ce n'est pas ça, la séduction, tu vois. Bref, et à chaque fois, le truc se répète. Il me réassoie sur ses genoux, il me touche la poitrine. À deux reprises, il m'a touché le sexe à travers mon pantalon. Et d'ailleurs, je me suis dit à ce moment-là, heureusement que j'ai mes règles, parce que c'est peut-être ça qui va m'éviter de me faire violer. J'ai eu ces pensées-là dans ma tête, parce que je crois que je comprenais quand même l'enjeu de ce qui était en train de se passer et que c'était grave. Et je me suis dit potentiellement, vu ce qu'il est en train de faire, il pourrait faire ça. Il pourrait me dire, vas-y, déshabille-toi. Et dans l'état dans lequel je suis, de sidération, peut-être que oui, je vais l'écouter. Parce que c'est une figure d'autorité, en fait, face à moi.
- Speaker #1
Je pense que l'assidération fait que, de toute façon, tu ne peux pas bouger, tu ne peux pas faire autrement. Il y avait quand même un gros enjeu pour toi, avec énormément de stress. Et en fait, tu t'es retrouvée coincée, parce qu'il a mis en place toutes les choses pour pas que tu puisses t'en sortir. Parce que c'était toi qui étais responsable de la séduction. Tu te retrouves dans cette dichotomie entre ce que lui t'a dit de faire, ce que lui fait. Tout ça n'a plus de sens. Et ton cerveau n'arrive pas à recoller.
- Speaker #0
Non mais complètement. Et puis après, tu sais, je me suis refait mille fois le scénario de ce qui s'est passé après ça, forcément.
- Speaker #1
Oui, j'ai vu.
- Speaker #0
Et à aucun moment, je me vois faire autre chose que ce que j'ai fait, c'est-à-dire être sidérée. Je ne m'en suis jamais voulue de ne pas avoir réagi parce que je n'arrive même pas à fantasmer une réaction où je lui dis d'arrêter ou où je m'en vais. Je n'arrive même pas à le faire, à imaginer ça. Parce que je sais que je n'aurais pas pu. Déjà, d'une part, de par mon caractère, je pense. Mais aussi, par rapport à tout ce que tu dis, en fait. Tout ce qui a été mis en place. Et ce n'est pas par hasard, je pense, qu'il a fait ça avec moi. C'est parce qu'il a senti qu'il y avait une brèche à tirer. Il a senti qu'il pouvait le faire avec moi et que je ne réagirais pas, je pense. Donc ça a duré deux heures quand même. Il y avait une horloge dans cette salle. Je n'arrêtais pas de regarder cette horloge. je voyais l'heure tourner, c'était tellement long et dans ma tête je me disais je veux rentrer chez moi, ça a été mon leitmotiv et mon truc qui m'a fait tenir en fait, c'est je veux rentrer chez moi et à un moment donné je vais rentrer chez moi et donc c'est ce qui s'est passé, suite à cette improvisation il m'a filmé deux fois après l'improvisation avec le scénario que j'avais appris par coeur je me souviens très bien de l'état dans lequel j'étais je pense que je suis rouge sur l'enregistrement je sentais que j'avais Merci. Le sang partout dans mon visage. J'ai récité le texte un peu comme une plainte. Enfin, voilà, j'ai un très mauvais souvenir aussi de ce moment-là. On s'est fait la bise,
- Speaker #1
je me souviens aussi de ça.
- Speaker #0
Et du coup, je rentre chez moi en flottant. J'étais encore dans un état de sidération, en fait, je pense, et de dissociation. Et je rentre chez moi. Et à l'époque, je vivais avec mon ex-copine. Et elle me dit « Alors, comment ça s'est passé ? » Elle savait que j'étais stressée, tu vois, et que je voulais avoir ce truc. Et je lui dis, ça s'est bien passé, mais je pense que... Comment je l'ai appelé la dernière fois ? Karl. On va l'appeler Karl. Parce que ma copine le connaissait, elle l'avait déjà vu à deux, trois reprises autour d'un verre avec d'autres personnes. Donc elle le connaissait. Je dis, Karl, je pense qu'il a profité de la situation. C'est pas cool ce qu'il a fait. J'étais plus en mode, oh là là, c'est vraiment pas bien ce qu'il a fait. Il est vraiment méchant d'avoir fait ça. Je ne réalisais pas encore ce qu'il s'était fait. passer, forcément. Et j'ai passé 48 heures. Ça, c'était un vendredi, je crois. J'ai passé tout le week-end à être un peu... Tu vois, j'ai même pas le souvenir de ce qui s'est passé juste après. Je pense que j'avais vraiment la tête dans du coton, dans les nuages. À l'époque, j'étais dans une école de théâtre. Et le lundi matin, avec tous mes copains... Enfin, tous mes copains. T'es quatre. Le lundi matin, souvent, on se faisait un petit déj avant d'aller en cours. On se demande si on a passé un bon week-end. Et moi, je leur dis... Moi je vous mets en garde parce que je vais vous... vous dire quelque chose qui m'est arrivé, et je vous le dis pour vous, pour pas que ça vous arrive. J'étais un peu en mode prévention. Et là, au moment où je le dis, je dis, bah écoutez, je crois qu'il m'est arrivé mon... Il m'est arrivé mon premier MeToo. Et là, oh ! Moi qui ne pleure jamais devant les gens, jamais. Genre, aucun de mes amis ne m'avait jamais vu pleurer. J'ai la gorge qui se serre, et là je me dis, ok, il se passe un truc. Mes potes sont là, ok, il se passe un truc, Julie, je crois que t'as vécu un truc pas cool. Prends ton temps, T'es pas obligé de nous en parler maintenant. Si t'as envie de nous en parler maintenant, tu nous en parles maintenant. Ils ont été archi présents, ils m'ont très bien accompagnée. Mais ça m'a fait réaliser que c'est grave en fait ce qui m'était arrivé. Et du coup, je suis allée porter une main courante très rapidement. 13 jours après l'effet.
- Speaker #1
Ce qui est rapide. Tu n'es pas dedans que c'est très long, mais tu regardes les statistiques, c'est extrêmement rapide.
- Speaker #0
Ouais, ouais, carrément. Pendant ces 13 jours, j'ai fait plein de recherches sur le MeToo. C'était un an après ou deux ans après, je sais plus. Mais en tout cas, j'étais pas assez renseignée, j'étais pas encore archi-féministe comme je le suis maintenant. Forcément, par la force des choses, je suis devenue... Voilà. J'étais militante pour faire de la prévention contre l'homophobie, tu vois. D'ailleurs, j'ai appelé la ligne d'écoute SOS Homophobie pendant ces 13 jours pour leur raconter ce qui s'était passé, parce que pour moi, cette agression avait un aspect lesbophobe, parce qu'il a complètement hyper-sexualisé le fait que je sois lesbienne. C'est vrai que je suis passée un peu vite sur... Ce qu'il m'a dit pendant l'agression, mais il m'a posé des questions. Quel genre de film porno tu regardes ? Est-ce que tu as déjà essayé avec un mec ? Enfin, voilà. Toutes ces questions-là qu'on m'a déjà posées, hein. Je veux dire, ces questions-là, on me les a posées mille fois. Donc, pour moi, clairement, le fait que je sois lesbienne, ça l'a excitée. C'est sûr. Ça l'a émoustillée et il a profité de cette situation-là pour un peu fantasmer sur une lesbienne. Sachant qu'à l'époque, j'avais les cheveux longs, je me maquillais. Il m'a dit plein de fois, on dirait pas que t'es lesbienne. Voilà, ça aussi, c'est des mots que j'ai entendus tellement de fois. Pendant que quelqu'un me touchait les fesses ou les seins, tu vois, là, c'était pendant l'agression. Du coup, j'ai appelé l'anime d'écoute SOS Homophobie, je me suis renseignée sur MeToo. J'ai lu plein de choses sur la sidération, l'effet de tétanie, la dissociation. Voilà, du coup, je me suis dit, ok, ce qui s'est passé, c'est grave. J'étais pas du tout prête à porter plainte, parce que, ben, je ne voulais pas qu'il soit au courant.
- Speaker #1
Voilà, course.
- Speaker #0
Il y a ce truc-là de... Je veux quand même... Pas trop que ça empiète lui sur sa vie. Genre toi, il t'a niqué ta vie, mais lui,
- Speaker #1
il faut le ménager. Voilà,
- Speaker #0
c'est ça. Parce que oui, ce que je n'ai pas dit, mais pendant ces 13 jours, donc quelques jours après, on s'envoie des messages, lui et moi. Il me dit, tiens Julie, je te donne des vidéos pour t'aider à trouver le personnage qu'on a évoqué ensemble. Et moi, je lui ai dit un peu tout de suite, le lendemain, il me semble. Je lui ai dit, écoute, ce qui s'est passé hier, en fait, ça m'a mis très mal à l'aise. J'ai réussi à lui verbaliser ça quand même. Ça m'a mis très mal à l'aise, voilà. Et puis lui s'est excusé. Oh oui, je suis allée trop loin, je me suis laissée emporter. J'ai pas été professionnelle. Voilà, il a employé des mots comme ça. Vu qu'on a un pote en commun, il me dit, est-ce que tu en as parlé à Oscar ? Alors je dis, non, non, je lui en ai pas parlé. il me dit ah d'accord parce que j'ai un peu trahi sa confiance en faisant ça des mots qui énoncent clairement qu'il avait pleinement conscience de ce qu'il s'est passé. Il a pleinement conscience qu'il a dépassé les bornes.
- Speaker #1
Il reconnaît et en même temps ça minimise.
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
Ouais mais tu diras pas aux potes.
- Speaker #0
Bah oui. Et puis évidemment sans mettre les termes d'agression sexuelle.
- Speaker #1
Bah non bien sûr.
- Speaker #0
Après même moi j'ai mis quelques jours avant de mettre les mots dessus et justement tu vois en y réfléchissant je me dis peut-être que j'avais peur de me confronter aussi à lui si j'employais les mots agression sexuelle qui me disent non mais attends là par contre tu vas trop loin. Et justement, être confrontée à ce discours-là, je ne voulais pas. Enfin, ça, c'est rétrospectivement que j'essayais d'imaginer pourquoi, du coup, je ne lui ai pas dit directement. Mais bref, en tout cas, quelques jours après, il me dit que j'ai eu le rôle. Il me dit, c'est bon, c'est toi qui as eu le rôle, etc. Et là, je lui dis, je crois que par rapport à ce qui s'est passé, je ne veux pas jouer dans cette vidéo. Donc ça, c'est quelques jours après, tu vois. Ça s'est fait dans les cinq jours, peut-être. Donc c'était très rapide. Je suis allée porter cette main courante. je voulais que ce soit inscrit Parce que c'était très frais. Et je sais que la mémoire, après, elle peut s'altérer. Donc je voulais que mes souvenirs, qui étaient encore intacts, et qui, quatre ans et demi après, le sont toujours finalement. Ça, je ne le savais pas. Mais du coup, je voulais que ce soit inscrit. Et je voulais faire ça si jamais il y avait eu d'autres personnes. Et si jamais, dans le futur, il y a d'autres personnes qui sont agressées. Je voulais faire ça pour ces raisons-là. Je suis allée porter cette main courante qui s'est extrêmement... bien déroulé, si on peut dire ça comme ça, parce que j'ai été bien accueillie par un officier dans le commissariat du 13e arrondissement qui était au top, qui était empathique, en tout cas je le sentais empathique, qui, à chaque fois qu'il m'a posé des questions compliquées qui auraient pu être mal reçues, en tout cas de ma part, il prenait les précautions de me dire « je suis désolée, je vais poser une question, vous pouvez penser que c'est pour vous incriminer, mais pas du tout, c'est des questions obligatoires, que je suis obligée de vous poser. En l'occurrence, Est-ce que vous aviez bu ? Il m'a expliqué que c'était pour savoir si moi j'étais dans mon état normal, si lui était dans son état normal, ou s'il y avait un effet d'alcool qui aurait pu jouer.
- Speaker #1
Parce qu'il y a des circonstances aggravantes avec l'alcool notamment.
- Speaker #0
Oui, exactement. Donc je raconte de A à Z tout ce qu'il s'est passé. A l'issue de l'entretien, il me dit qu'il y a matière à porter plainte en fait, parce que c'est une agression sexuelle, et qu'une main courante... Maintenant, on ne peut plus pour ce genre de faits, mais en tout cas, à l'époque, une main courante, c'était trop peu pour qu'il y ait une enquête après. C'était vraiment juste pour figer les faits de façon administrative. Il m'a donné un petit prospectus avec le numéro et les coordonnées de l'assistante sociale du commissariat, de la psychologue aussi. Je n'ai pas eu recours à l'assistante sociale. En revanche, la psychologue, elle m'a suivie. C'était une psychologue géniale, elle aussi. Elle m'a suivie tout au long de mon parcours, pendant deux ou trois ans, je crois. le lendemain matin Je reçois un appel en numéro privé du commissariat du 13e arrondissement, d'une nana qui me dit « Écoutez, madame Dussert, vous avez été reçue par mon collègue hier, je voudrais savoir si il vous a énoncé vos droits et si il vous a expliqué que vous étiez en droit de porter plainte. » Alors je dis « Oui, oui, il m'a tout très bien expliqué. » Elle me dit « Non, parce que nous, en fait, on se retrouve avec votre main courante entre les mains. Et en fait, les faits sont tellement graves que nous, on a envie de continuer, nous, on a envie de faire notre enquête, mais en fait, on ne peut pas parce que c'est une main courante. » Voilà, j'ai complètement conscience que c'est dur, c'est douloureux, mais il faut que vous sachiez qu'avec les faits qui vous sont arrivés, il y a matière à porter plainte. Et donc je raccroche, et voilà, comme tu disais, on a toujours tendance à minimiser ce qui nous est arrivé. Et là, je me suis dit, mais... La nana a quand même pris le temps de m'appeler pour savoir si mes droits avaient bien été énoncés. Donc voilà, il y a eu toute une série de faits comme ça qui m'ont donné envie de porter plainte. Et aussi et surtout, le fait qu'il puisse recommencer. Ça a commencé à me terrifier de me dire, mais en fait, si ça se trouve, ce mec-là, à chaque fois qu'il passe un casting, il fait ça. Et moi, du coup, je suis là dans mon coin. Peut-être que je suis la seule à avoir pu. porter une main courante, et peut-être que ma plainte peut aider d'autres personnes, en fait. J'étais terrifiée parce que j'étais pas encore prête, et le travail avec la psychologue m'a beaucoup aidée. À partir du moment de l'agression jusqu'à des mois et des mois après, j'étais en syndrome de stress post-traumatique. Je sursautais au moindre bruit. Genre là, je sais pas si t'as entendu, il y a le frigo qui s'est mis en marche à un moment donné.
- Speaker #1
Oui, je l'ai eu aussi.
- Speaker #0
Ben ça, il y a quatre ans. Mais j'aurais sursauté, je... Mon cœur se serait mis à battre la chamade. Là, je l'ai entendu. Je pense que c'est encore aussi un truc d'hypervigilance. Mais à l'époque, le moindre bruit, prendre le métro, mais oh mon Dieu, c'était un enfer. À chaque arrêt, quand la porte du métro sonnait, et pourtant je sais qu'elle sonne, tu vois, cette porte, à chaque fois, à chaque arrêt, je sais qu'elle sonne, mais je ne peux pas m'empêcher de sursauter, d'avoir de l'adrénaline dans tout mon sang et d'avoir cette sensation de, oh mon Dieu, je suis en vigilance. Il y a un danger. C'est aussi ces symptômes-là qui m'ont fait dire c'est grave ce qui t'est arrivé c'est pas possible que entre guillemets, je mets des gros guillemets mais c'est pas possible qu'une petite agression comme ça ait autant de dégâts c'est que c'est très grave après les syndromes de stress post-traumatique, tous les symptômes ont été, je pourrais en dresser une liste extrêmement longue mais il y a les problèmes du sommeil soit l'hypersomnie, soit les insomnies Le poids sur la poitrine, c'est un truc de fou. J'avais l'impression d'avoir un poids de 4 kg sur le torse en m'endormant le soir. C'est des symptômes qui deviennent physiques, en fait. C'est fou. Ah oui, un truc aussi extrêmement important, c'est que j'avais un rejet total de mon corps. Je ne pouvais plus regarder ma poitrine. Ça m'est resté pendant des mois de ne plus pouvoir regarder ma poitrine. Mais quand je me douchais... Il fallait que j'aille le plus vite possible. Quand je me lavais le corps, la poitrine, je levais la tête vers le ciel, vers le plafond. Jusqu'à il y a trois ans, jusqu'à un an et demi après l'agression, où je voulais me faire une mammectomie. Enlever ma poitrine.
- Speaker #1
C'est fou quand même, l'impact. Parce que généralement, on parle du fait qu'on se fait voler des parties de nous-mêmes. Je pense que là, ça illustre parfaitement ce point.
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
Et ça t'a mis combien de temps après pour vraiment être à nouveau à l'aise avec ton corps, si c'est encore le cas aujourd'hui ?
- Speaker #0
Là, pour le coup, je n'ai jamais été aussi à l'aise de toute façon avec mon corps qu'actuellement. Il y a eu tout un travail où, déjà, quand j'ai pris conscience de ça, que c'était l'agression qui m'avait fait détester cette partie-là de mon corps, enfin, je n'avais aucun problème avec le reste, mais mes autres parties de mon corps, j'ai rencontré ma copine actuelle, qui m'a beaucoup aidée, qui m'a beaucoup questionnée aussi, et qui m'a fait prendre conscience, en fait, de ça. que c'est mon corps et qu'au contraire, au lieu de détester cette partie-là, là, ça me fait même de la peine maintenant, quand je pense que j'ai voulu me l'enlever. Et maintenant, je suis extrêmement à l'aise avec mes seins. Il y a un peu un truc de réappropriation aussi. Et puis depuis, j'ai coupé mes cheveux. Là, j'ai les cheveux courts. Avant, j'avais les cheveux longs au milieu du dos. En tout cas, j'ai eu cet accompagnement-là avec cette psychologue du commissariat qui a été incroyable. Tout ça pour dire que... L'accompagnement avec la psy, en quelques mois seulement, m'a permis d'aller porter plainte. En février, c'était fin février 2020. La plainte, c'était pas le même officier, mais en tout cas le même accueil, avec quelqu'un qui m'a fait passer devant tout le monde, parce que j'avais plusieurs heures d'attente, je pense, mais vu que c'était une agression sexuelle, il m'a fait passer devant les personnes qui venaient porter plainte pour un vol de téléphone.
- Speaker #1
Mais tu m'avais dit que la première fois, t'avais attendu 4 heures.
- Speaker #0
Ouais, pour la main courante, j'ai attendu 4 heures.
- Speaker #1
Avant d'être prise.
- Speaker #0
Avant d'être prise, exactement. Du coup, ça rassure dès le départ. Là, il m'a dit, en fait, vous vous êtes fait agresser, c'est grave. Et les autres, ils se sont juste fait voler leur téléphone. Pareil, il y a un mec qui devait avoir mon âge, comme la première fois, je pense, qui a évité de me reposer les questions que j'avais évoquées dans ma main courante. Il a repris les faits. Il m'a quand même posé des questions un petit peu plus précises. Ensuite, très rapidement, donc ça, c'était fin février, le 13 mars 2020. Là encore, la date a son importance. Parce que c'était deux jours avant. le confinement. On m'appelle, c'est le commissariat. Elle me dit, la personne, c'était la stagiaire, elle me dit, bonjour madame Dussert, vous êtes attendue au commissariat pour une confrontation avec votre agresseur. Là j'ai... pardon, une confrontation, pour moi, ça allait prendre des mois et des mois, quoi. Là, c'était seulement deux semaines après. C'était extrêmement rapide. Moi, j'étais pas du tout préparée à ça. Elle m'appelle à midi, je lui dis, bon bah écoutez, je suis pas sûre de pouvoir me libérer, j'avais des trucs à faire avant le grand confinement. Elle rigole, elle me dit, non mais en fait, il est en garde à vue déjà depuis 24h. On peut pas le garder plus longtemps. Elle me fait comprendre que c'est maintenant ou jamais. Donc je lui demande si j'ai besoin d'un avocat, d'une avocate. Elle me dit que non. Bon, d'accord, je me libère pour 15h. Et donc à 15h, je suis au commissariat. Je suis accueillie par le premier officier qui a pris ma main courante. Il m'explique comment ça va se passer. Il me dit que vous allez être face à l'enquêtrice. Vous serez séparé de l'enquêtrice par son bureau. Vous serez assise sur une chaise. À côté de vous, il y aura l'avocate de votre agresseur, parce que lui, il en a une. Et à côté de l'avocate, il y aura votre agresseur. Vous serez séparé par son avocate. Il n'aura pas le droit de s'adresser directement à vous. Et inversement, si vous voulez vous adresser à lui, il faut vous adresser à l'enquêtrice. Donc il m'explique ça. Je rentre, sans avocate, sans rien de quoi noter, enfin je savais pas du tout comment ça allait se passer en réalité, donc j'étais comme ça sur ma petite chaise avec mon sac à dos à mes pieds. Et là la confrontation commence, donc ça commence par l'enquêtrice qui énonce les faits, mais les deux versions. Ensuite, c'est à moi de réagir. et de dire si j'ai des choses à ajouter ou pas. Quand elle énonce ma version, c'est ma version, c'est la vérité, c'est ce qui s'est passé. Et quand elle énonce sa version, là, il y a un florilège de mensonges qui vient s'accumuler, en fait. Et là, je me dis, mais what ? Il a vraiment dit ça ? Il a vraiment eu le toupet de mentir, alors qu'il sait très bien ce qui s'est passé dans cette salle ce jour-là, en fait. Donc les mensonges, c'est qu'il ne savait pas que j'étais lesbienne. C'est moi qui lui ai amené ça. C'est moi qui ai amorcé les questions sur la sexualité. Ce n'est pas lui. Et puis de toute façon, on parlait juste de sexualité. Ce n'est pas grave de parler de sexualité, selon lui. Il m'a demandé ce que je regardais comme film porno, comme il m'aurait demandé ce que j'ai mangé à midi, tu vois. Pour lui, dans sa tête. Les mensonges, c'était que c'est moi. qui ait tiré mon chemisier pour lui montrer mes seins en lui disant « Tiens, regarde, j'ai des gros seins, touche ! » Voilà, j'aurais dit ça. C'est moi qui me serais mise sur ses genoux. Il ne m'aurait jamais touché les parties intimes. Ça, j'ai menti. Enfin voilà, tout un tas de mensonges. Moi, quand elle énonce ça, donc elle est longue, la liste des choses qu'il a dites, moi qui ai parfois des troubles de l'attention, là, je peux te dire que j'étais au taquet. J'ai tout retenu, toutes les choses qu'elle a énoncées. et qui n'était pas vrai. Quand c'est venu à mon tour de parler, j'ai dit, ça, c'est pas vrai. Ça, non. Ça, il a menti. Voilà. C'est bizarre parce que moi, à ce moment-là, je suis dans un état où je tremble de la tête aux pieds. Quand j'en parle, j'ai l'air d'avoir été très sereine, etc. Mais en vrai, intérieurement, je suis liquéfiée. Enfin, dans ma tête et même physiquement.
- Speaker #1
C'est vraiment un mode survie qui s'enclenche.
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
C'est-à-dire qu'il y a toute l'adrénaline qui monte, c'est vraiment en hypervigilance. Ce qui, du coup, te permet de te souvenir de tous les trucs.
- Speaker #0
Oui. Pendant la confrontation, certains éléments d'enquête que l'enquêtrice cite, notamment, ils ont saisi son téléphone, et donc un élément extrêmement important, ce sont les textos de sa femme qui, quand elle apprend qu'il a été mis en garde à vue, des textos qui disent « tu as recommencé, tu prends les femmes pour des objets, et tu utilises tes castings pour assouvir » . tes fantasmes sexuels, tes textos comme ça.
- Speaker #1
C'est vraiment sa femme qui dit que... Oui,
- Speaker #0
que c'est un agresseur, en fait. Sa femme le dit, par texto. Donc bref, j'apprends ça pendant l'entretien, la confrontation. Il y a un truc aussi important à ce moment-là, qu'il faut que je précise, c'est que l'enquêtrice m'a quand même posé des questions un peu plus précises, mais des questions tirées par les cheveux. Par exemple... Vous dites qu'il vous a touché les seins. Quelles mains ? Avec quels seins ? Elle me dit, oui, j'ai conscience que parfois c'est des questions... Elle m'a fait comprendre plusieurs fois, parce que moi, quand je répondais, j'étais assez sèche, parce que je me disais, mais c'est quoi ces questions de merde, en fait ? Et elle me faisait comprendre que... Elle levait un peu les yeux au ciel en disant, je suis désolée, je sais que c'est des questions, mais c'est pour étoffer l'enquête, etc. Mais voilà, en tout cas, j'étais un peu dans un truc où je savais que la police était avec moi. Et puis après, ça vient à lui de rajouter des choses, alors lui, il bégaye, il vient à l'avocate de parler, et donc l'avocate, qui me faisait des regards extrêmement bienveillants tout au long de moi, ce que j'ai énoncé, des regards de compassion. Et donc elle commence à me poser des questions, elle me dit « Vous avez été bénévole à SOS Homophobie, c'est ça ? » Parce que je ne sais plus pourquoi, je l'ai évoqué à un moment donné dans l'enquête. Alors je dis « Oui, tout à fait » . Elle me dit « Mais c'est super, c'est vraiment louable comme cause, vous avez dû apprendre plein de choses, en plus vous faisiez de la prévention, c'est ça ? » Alors je dis « Oui, oui, je faisais de la prévention contre l'homophobie dans les écoles, dans les collèges, les lycées, on entend mon ventre qui gargouille. » Et elle me dit, mais c'est super d'avoir fait ça, franchement. Elle me fait mousser un petit peu, tu vois. Et elle me dit, du coup, le consentement, c'est une notion que vous connaissez ? Ben oui, c'est une notion que je connais. Mais c'est marrant parce que du coup, comment une militante qui vient parler de sexualité et donc de consentement à des élèves, comment c'est possible qu'une telle situation se mette en place, en fait ? Si vous connaissez le consentement ? C'était une question rhétorique qu'elle m'a posée. Elle n'attendait pas de réponse. En gros, elle était juste en train d'essayer de démonter mon propos. Et donc, elle me dit, attendez, mais MeToo... Vous connaissez MeToo ? Ben oui, comme tout le monde. Non mais attendez, vous êtes une militante quand même, vous faites de la prévention, vous devez connaître mieux que les autres. Et donc vous savez l'impact que ça a de porter plainte, et vous savez que porter plainte ça a une valeur militante. Donc là vous n'êtes pas un peu en train de nous faire de l'activisme, en train de porter plainte et de détruire la vie de cet homme. Donc voilà, la meuf a commencé tout doucement, et puis après hop, crescendo. Et là, bim, elle m'achève. Je me défends en disant que... Non, j'étais militante en plus contre l'homophobie, je faisais de la prévention contre l'homophobie. Il y a une différence, même si c'est lié, même quand on milite contre les violences sexuelles, on ne porte pas plainte contre des innocents en fait. On ne porte plainte contre des gens qui nous ont véritablement agressés. L'entretien se termine, je comprends qu'en fait, il va être en garde à vue une nuit de plus parce qu'il est 18h55 et que c'est trop tard pour appeler un magistrat. Et là, elle qui comprend ça... se lève, elle commence à faire des grands gestes en me disant que c'est pas possible, que je me rends pas compte de ce que je suis en train de faire.
- Speaker #1
Comme si c'était toi qui étais responsable de ça.
- Speaker #0
Exactement. Et elle a dit des mots du style, non mais en fait vous n'avez plus 15 ans, là il s'agit d'un casting entre deux adultes en fait. Enfin voilà. J'ai été complètement sonnée de cette confrontation. Deux jours après la confrontation, nous sommes en confinement total dans le monde entier. C'était tellement ouf ce qui se passait dans le monde que... Je n'ai quasiment pas pensé à ça pendant toute la durée du confinement. C'était incroyable. Suite au confinement, l'enquête se poursuit. Ça va en fait assez vite. Mon ex-compagne est interrogée par la police. Sauf que ça fait six mois. Je ne lui en ai parlé qu'une seule fois, le jour J de l'agression. Il y a plein d'éléments qu'elle n'avait plus en tête. Et puis elle leur a dit à la police plusieurs fois, je ne me rappelle pas. En vrai, vous me posez cette question, je ne sais pas. Je ne sais pas, ça fait six mois. Juillet 2020, convocation au tribunal judiciaire de Paris pour une audience. Ah bon, mais alors moi, moi qui dénu, est-ce qu'un procès c'est comme une audience ? Enfin, j'y connais rien moi à la base en fait, de tout ça. Tu vois, même des termes de vocabulaire comme ça, je savais pas. Donc oui, une audience, c'est un procès. Convocation, j'ai pas d'avocat, pas d'avocate. J'en parle à mes parents, mes parents qui en parlent autour d'eux. Ben voilà, du coup, mon avocat, ce sera l'avocat d'une amie d'une collègue de travail de ma mère. Mais qui est avocat pour les entreprises en général. Mais bon, voilà, il me fait un petit tarif où il me fait payer que 200 euros, et puis il va me défendre, et puis il est très gentil. Voilà. Grosse erreur.
- Speaker #1
C'est fou que ce mec-là ait accepté de te défendre. C'est pas son tape.
- Speaker #0
Ben ouais.
- Speaker #1
Qui t'ait pas juste dit, bah écoutez, attendez, j'appelle un collègue, je veux que quelqu'un... Ben oui,
- Speaker #0
voilà. qui fasse marcher son réseau à la rigueur, mais... Je pense qu'il avait l'impression de faire une bonne action. Tu vois, me faire payer rien du tout, alors que bon, en soi... Oui,
- Speaker #1
c'est pas tout taf quand même.
- Speaker #0
Exact. Et puis en soi, j'aurais eu les moyens de me payer une avocate à l'époque. Je travaillais, c'est cher, j'avais pas le droit à l'aide juridictionnelle, mais j'aurais eu les moyens. Voilà, t'es un peu dans la panique, tu sais pas comment ça marche en fait. Oui,
- Speaker #1
c'est clair.
- Speaker #0
Je me suis quand même renseignée à la maison des femmes. J'ai eu rendez-vous avec une juriste qui m'a expliqué plein de choses. qui m'a donné plein de conseils, notamment faire des attestations témoins, même s'il n'y avait pas de témoins le jour J, mais faire des attestations de ma famille, mes proches, qui certifient en fait que depuis cette agression, j'ai changé, je ne vais pas bien, je vais voir une psy, je dépense de la thune dans une psy, parce qu'au-delà de la psychologue du commissariat qui était gratuite, j'ai quand même eu aussi un suivi avec une autre psy qui coûte de l'argent, 70 euros une fois par semaine, c'est un sacré budget.
- Speaker #1
Oui, et pour calculer le montant des dommages et intérêts potentiels, il faut définir quels ont été les coûts que tu as subis derrière. Exactement. Arrêt de travail, etc. Et en termes de santé.
- Speaker #0
Sauf que du coup, la juriste de la maison des femmes me donne tous ces conseils-là. Mais moi, je suis dans un état où je ne peux pas les suivre. Je n'y arrive pas. Je suis un peu éparpillée. Il n'y a personne véritablement pour m'épauler. D'ailleurs, si ça peut être un conseil que je peux donner, le réseau des femmes agressées sexuellement, malheureusement, il existe. Preuve en est, du coup. Je te connais. Maintenant, je connais plein d'autres personnes victimes grâce au podcast qui, entre elles, parfois, se connaissaient déjà. Il y en a qui ont des comptes Instagram où elles disent ce qui leur est arrivé. Mais au-delà de libérer leurs paroles, elles donnent aussi plein de conseils. Je pense à un compte qui s'appelle Eva Futura, par exemple. Survivante, Clara. Que tu connais aussi, d'ailleurs. Donc, ce réseau-là, en fait, il existe. Il faut s'en saisir et il faut profiter parce que c'est gratuit. Parce que nous toutes, en fait, on a envie d'aider. Et moi, si j'avais eu conscience de ça à ce moment-là, je pense que j'aurais peut-être demandé, ou si ça arrive à quelqu'un que je connais, la personne, on fait un binôme, en fait. Et je lui demande, est-ce que t'as fait ci ? Est-ce que t'as fait ça ? Ok, je vais le faire pour toi, en fait, y'a pas de soucis. Parce que t'es dans un état où t'as l'impression que t'avances, et en fait, tu fais pas ce qu'il faut pour toi. t'as l'impression que tu fais ce qu'il faut pour toi mais en termes administratifs et judiciaires il faut un binôme Je trouve que c'est un truc à mettre en place et certainement qu'il y a des associations comme le collectif féministe contre le viol aussi. La maison des femmes, il a fallu que je m'y rende. Il n'y a personne qui m'a pris par la main et qui m'a donné une petite caresse dans le dos et qui dit t'inquiète, je te dis ce qu'il faut que tu fasses et si tu n'y arrives pas, je le fais à ta place. C'est ça qu'il faudrait faire.
- Speaker #1
Un truc de parent-marraine.
- Speaker #0
Exactement. Et comme les alcooliques anonymes, il y a aussi ce truc-là de parent-marraine. Donc moi du coup... J'ai cet avocat-là, qui m'a appelé une fois, je lui raconte les faits, il me dit « non mais ça va aller, puis s'il y a un texto de sa femme, bon ben oui ça va aller » . Voilà, il était un peu en mode « c'est dans la poche, il n'y a rien à faire » . Il parlait un peu comme ça cet avocat. Ah non mais je l'avais en horreur, et ça aurait dû me faire un petit red flag comme on dit maintenant, une petite sonnette d'alarme en mode « je crois que ce n'est pas un avocat qui soit fait pour toi Julie » . Bref, la première audience a été reportée. Parce que la femme de mon agresseur avait un papa malade à l'étranger. Elle a dû lui rendre visite parce qu'il était malade. Et lui, en bon père de famille, a dû garder les enfants à la maison. Premier report. Reporté un an après. C'était allé extrêmement vite. J'avais porté plainte en février, l'audience était en septembre. Enfin, un truc, pour moi, c'était la vitesse de la lumière. Avec tous les témoignages que j'avais lus, des trucs qui prennent des années, déjà j'étais extrêmement heureuse que ma plainte n'ait pas été classée sans suite. Et en plus, heureuse que ce soit allé aussi vite, tu vois. Pour moi, hop, allez, c'est bon, après, on est débarrassé de cette audience. Mais non. Entre-temps, il change d'avocat, mon agresseur. L'audience qui était censée arriver mi-septembre, je crois, est reportée parce que son avocat s'est blessé pendant l'été. Donc j'ai appris ça la veille pour le lendemain. Reportée à mars 2022. Et en mars 2022, cette fois, je me dis, j'espère que cette fois, c'est la bonne, tu vois. et donc j'arrive dans cette salle ce tribunal Je vais décrire pour que les gens puissent visualiser exactement comment tout se passe. Oui,
- Speaker #1
c'est important.
- Speaker #0
Donc on arrive dans un tribunal où il y a plein d'autres personnes, parce qu'ils jugent plein d'affaires au même moment. Ça s'enchaîne. Moi j'arrive, ma nouvelle copine, qui est toujours ma copine actuelle, m'a accompagnée. Elle ne pouvait pas rester pour toute l'audience, mais en tout cas, elle m'a accompagnée. Je ne suis pas allée seule. J'avais refusé que ma mère vienne, parce que ma mère voulait à tout prix être là, mais en plus de Marseille. C'est important de le préciser, parce qu'en fait, à la première audience, elle s'est déplacée pour rien Parce que le report, on l'a appris le jour J. Bref, donc j'arrive, donc accompagnée. Il y a plein d'autres gens qui sont accompagnés. Il y a un policier qui est là et qui place les gens. Alors il fait en sorte de mettre, là en l'occurrence, c'était du côté gauche, les victimes et les familles des victimes, et du côté droit, les prévenus. On appelle ça les prévenus. Les gens qui...
- Speaker #1
Qui se moquent. Qui se moquent contre la défense, entre guillemets.
- Speaker #0
Et parmi les prévenus... Il y a plein de gens, il y a des trafiquants de drogue, il y a juste un gars qui a conduit une voiture avec de la drogue dedans, il n'y a pas que des agresseurs sexuels en fait, il y a de tout. Dans cette salle, plus ou moins grande, tu as, tout à gauche, le ou la procureur de la République. Donc là c'est la personne qui est censée représenter l'État et qui donne son avis à la fin de l'audience, elle donne son avis sur ce qu'elle préconise comme condamnation ou pas. Ensuite tu as face à toi 3 personnes, au milieu tu as Un président, donc c'est le juge, entre guillemets, et de part et d'autre de cette personne, tu as deux magistrats qui sont un peu les conseillers de ce président qui prendra la décision. Et ces trois personnes-là font partie du délibéré à l'issue de l'audience. Voilà, ils parlent de l'audience et donc ils se disent, du coup, étant donné ce qui a été dit, étant donné ce que la procureure a dit, étant donné ce que les avocats ont dit, qu'est-ce qu'on fait ? Est-ce qu'on relaxe cette personne ou est-ce qu'on la condamne ? Et à droite, tu as ce qu'on appelle le greffier ou la greffière, qui est là pour t'accueillir et puis prendre ta pièce d'identité, bien faire en sorte que tu sois écrit dans le registre, et qui est là pour taper tout ce qui se passe, tout ce qui se dit. Donc il y a plusieurs audiences qui se passent. Arrive mon tour. L'audience, elle se déroule dans le sens où, d'abord, c'est le prévenu qui est entendu. Donc il raconte ce qui s'est passé, les mensonges, tout ce qu'il a dit dans la confrontation. Il le redit. C'est moi qui l'ai allumé, entre guillemets. C'est moi qui ai fait ci, c'est moi qui lui ai montré mes seins. Il est un peu malmené, lui. On lui pose des questions, il n'est pas confortable. Arrive le moment où moi je dois parler. Je maintiens ma version des faits aussi, étant donné en plus que c'est la vérité, c'est vraiment ce qui s'est passé. Moi à ce moment-là, j'ai encore du mal à comprendre que ce gars-là ait pu mentir. Je suis dans un état, là encore, un peu comme la confrontation, les jambes qui flageolent, je suis complètement impressionnée en plus par cette cour. Pourtant j'ai fait du théâtre, pourtant je suis à l'aise à l'oral normalement, mais c'est impressionnant en fait. Tu es jugé, c'est pas lui qui est jugé, c'est lui et toi. On est jugé tous les deux en fait. Parce que moi, les questions qu'il me pose, c'est pas des questions confortables non plus. C'est des questions du style, mais pourquoi vous avez pas réagi ? Pourquoi vous lui avez pas dit, en fait ? Et t'as-tu là, bon ben, je vais expliquer la définition de l'assidération, la dissociation, ce que j'ai appris avec ma psy. Donc j'explique tout ça. Les avocats font leur plaidoirie. Ensuite, il y a la procureure, là, c'était une procureure qui prend la parole et qui dit. Ce qui s'est passé, c'est que... Il y a en effet eu une agression sexuelle. Donc là encore, il y a une manipulation de cette définition. Une agression sexuelle, c'est une atteinte sexuelle par contrainte, violence, menace ou surprise. Elle, elle reprend cette définition en disant, bien sûr qu'il y a eu de la contrainte, parce qu'il y a un lien de subordination entre les deux parties. Il y a eu de la surprise. Quand tu vas à un casting, tu t'attends pas à te faire agresser, en fait. Je veux pas dire de bêtises, mais en tout cas, elle a demandé quelques mois de prison avec sursis. Sans doute une amende, je ne sais plus quel était le montant, et qu'ils soient inscrits au registre des prédateurs sexuels. Moi je suis soulagée quand elle demande ça. Mais elle ne fait que le demander, à la cour. La dernière personne qui prend la parole, il me semble que c'est le prévenu. Donc c'est lui qui prend la parole et qui a une dernière chance pour essayer de se défendre. On va se rasseoir, il y a d'autres audiences après moi. À un moment donné, il est 18h, on sort tous et toutes de la salle, sauf la cour, qui procède au délibéré. Au bout de je sais pas, je sais même pas, c'est un peu hors du temps ce moment où tout le monde est dans les couloirs du tribunal. Ce moment est très long et un peu hors du temps. Et puis d'un coup, il y a une petite sonnerie qui énonce la fin du délibéré. On rentre et là, un enchaînement de décisions. Paf, alors affaire untel contre untel, condamné à attendre mois de prison. Alors affaire untel contre untel, temps d'année de prison, untel contre untel, une amende. Et ça enchaîne en fait. Et tu te dis, putain, il faut vraiment que je sois attentive pour ne pas louper mon... Ma décision, tu vois. Arrive moi, Madame Dussert, contraintelle. Relaxée au bénéfice du doute. Et là, mais là, écoute, la terre s'est écroulée sous mes pieds. J'étais dans une incompréhension de me dire, mais attends, je comprends pas en fait, avec tout ce qui a été dit, avec les textos de sa femme qui ont été lus, devant tout le monde, comment est-ce que c'est possible ? Je comprends pas, je regarde la cour. désespérée et dans mes yeux, je leur dis mais pourquoi vous m'avez laissé tomber ? Je suis victime, ça fait deux ans que je galère dans ma vie, que je vais voir des psys, que j'ai des problèmes de digestion, que j'ai toujours mes symptômes post-traumatiques, vous m'avez laissé tomber, c'est ça que ça veut dire. Je sors de là, mon avocat était parti, parce qu'il est parti en vacances une fois que l'audiance a été finie, donc j'étais seule.
- Speaker #1
No comment.
- Speaker #0
Grave. Les jours qui ont suivi, je me suis dit, il faut que je fasse un truc, en fait. Je ne peux pas rester comme ça, avec cette décision entre les mains. Il faut que je fasse appel. Je change d'avocate.
- Speaker #1
Bon plan.
- Speaker #0
Je tape avocate spécialisée droits des femmes, Paris. Hop, je tombe sur une meuf. Dans les jours qui suivent, j'ai un rendez-vous. Je lui explique tout, elle me garde une heure. Une heure, c'est plus que ce que j'ai eu comme échange avec mon ancien avocat, mis bout à bout, tu vois. L'accueil n'est pas du tout le même. et elle me dit en fait, la procureure n'a pas fait appel. Donc la décision de justice, relaxée au bénéfice du doute, restera gravée dans le marbre, on ne peut pas la changer. Ce qu'on peut faire, c'est faire appel sur les intérêts civils. Les intérêts civils, c'est les dommages et intérêts. Ce qui s'est passé ce jour-là dans cette salle a eu un impact sur vous, Mme Dussert, et donc vous pouvez prétendre à des dommages et intérêts. Mais il faut qu'il y ait une faute. La faute, elle n'est pas pénale. Il n'y a pas d'agression sexuelle. En revanche, on peut dire qu'il y a une faute civile. En gros, il a fait une faute professionnelle en ne prenant pas les précautions. Voilà, c'est ça, tu vois, un peu. Il n'a pas pris soin de faire passer un casting dans les meilleures conditions. Il n'a pas été prévenant. On a monté tout le dossier en fonction de ça. J'ai fait appel, donc uniquement sur les intérêts civils. Pendant un an ou deux, en tout cas pendant longtemps, avec mon avocate, qui est géniale, c'est-à-dire qu'à l'issue du premier rendez-vous, elle m'a demandé, est-ce que vous êtes accompagnée psychologiquement ? Est-ce que vous avez autour de vous des personnes ressources à qui vous pouvez parler ? Des personnes à qui parfois vous pouvez déléguer ? Voilà. Tu vois, ces petites questions toutes bêtes, eh bien, font toute la différence, en fait. Là, on est enveloppé. La personne prend les choses en main. Elle me donne les directives que la juriste de la maison des femmes m'avait demandé de faire. Des factures de la psy, attestations de la psy, en plus des factures. Oui, Julie a toujours un syndrome de stress post-traumatique. Elle me dit, vous allez faire des attestations témoins de vos proches qui disent comment votre vie a changé depuis ça. Et donc, c'est ce que j'ai fait. Donc, il y a des gens de ma famille, mais il y a aussi des potes qui ne connaissent pas forcément ma famille, mais toutes. disent la même chose dans ces attestations. Julie, depuis ça, elle a arrêté le stand-up. Elle a arrêté la scène. Parce qu'en effet, j'en ai pas parlé, mais parmi les conséquences que ça a eues sur ma vie, cette agression, c'est que j'ai complètement arrêté ce pourquoi j'étais venue sur Paris. Moi qui ai venu de Marseille sur Paris, c'était pour faire de la scène. J'ai changé de look. Les mois qui ont suivi l'agression, je m'habillais en noir, des pieds à la tête. J'étais en deuil, en fait. Heureusement, grâce à ma copine, qui met de la couleur dans ma vie, elle en met aussi dans ma garde-robe. Du coup, je m'habille un peu autrement qu'avec du noir, du noir et du noir. On a une date d'audience, enfin. Je passe encore les détails, mais la date d'audience avait eu lieu en novembre. Normalement, elle a été reportée encore une fois à cause d'un arrêt maladie de l'avocat de mon agresseur. L'audience, on appelle. Donc, ce n'est pas le même tribunal qu'initialement, c'est le tribunal de la cour d'appel. Exactement le même format que la première audience. Moi, je suis là, à ce moment-là, dans une tension corporelle. tel que je me coince le dos, en fait, à ce moment-là. Enfin, tout ça pour dire que ça remet dans des conditions qui sont pas confortables pour les personnes victimes. Ça remet dans des conditions où tu te retrouves à côté de ton agresseur, son avocat, qui s'amuse à faire des clins d'œil et des petits poussants l'air aux autres agresseurs qui se trouvent dans la salle.
- Speaker #1
Il l'avait fait au premier, ça aussi.
- Speaker #0
Il l'avait fait au premier aussi, exactement. J'ai oublié de le mentionner, mais...
- Speaker #1
Je pense que c'est une technique d'intimidation.
- Speaker #0
Exactement. Il sait que, du coin de l'œil... forcément, mes yeux sont rivés sur lui et sur mon agresseur, même si j'essaye de penser à autre chose et de me distraire. Il sait que je le regarde quand il fait ça.
- Speaker #1
Donc ça, c'était janvier 2024, du coup.
- Speaker #0
Ça, c'était janvier 2024, c'était il y a six mois, même pas, c'était le 29 janvier. Cette audience, par contre, je suis extrêmement bien préparée par mon avocate. Vu que j'avais le dossier, je me suis préparée, en fait, à toutes les questions possibles et imaginables. C'est-à-dire qu'à un moment donné, l'avocat adverse me dit Merci. Dans l'attestation de la psychologue du commissariat, elle a choisi de mettre que ce qui faisait que vous avez un problème par rapport à votre corps et votre poitrine, c'est lié au fait que monsieur, votre agresseur, a tiré le chemisier que vous aviez pour regarder vos seins. Donc s'il vous avait vraiment touché les seins, elle aurait mis ce fait, et non pas le simple fait qu'il ait regardé votre poitrine. Donc il me dit ça. Et en effet, c'est un bon travail d'avocat. Cet avocat, l'avocat adverse, Il était très fort, pour peu de choses, je n'ai pas tout cité, mais en effet. Et je m'étais préparée à cette question. Je savais qu'il allait sortir un truc comme ça. Même si je suis tendue dans tout mon corps et que je transpire plus que jamais je n'ai transpiré auparavant. Mais du coup, je lui dis, avec tout l'aplomb que j'ai pu rassembler à ce moment-là, je lui dis écoutez, en fait elle n'a pas choisi de mettre ça, la psychologue. La psychologue, elle a surtout choisi de mettre que depuis l'agression que j'ai vécue, je vis des réminiscences le jour. J'ai un syndrome de stress post-traumatique, j'ai ci, j'ai ça, et là je lui cite toutes les autres choses qu'elle a mis dans le papier, la psychologue, dans ce papier, que la cour n'a pas lu parce que la cour n'a absolument pas préparé le dossier et n'avait pas lu le dossier en fait avant que j'arrive. Du coup j'ai dit voilà, si la psychologue en fait avait mis tout ce dont je lui avais parlé, le rapport n'aurait pas fait deux pages, mais 150, ça aurait fait un bouquin en fait. Et là je sens que je le déstabilise, et là en fait elle est là moi ma, comment dire, ma revanche. C'est que la première audience qu'on m'a volée, parce que justement j'étais pas préparée, parce que j'avais pas eu connaissance du dossier, parce que j'étais complètement démunie face à cette cour et tout ce qui se passait qui m'était inconnu. Là, même si j'étais liquéfiée intérieurement, j'étais en place quand même, tu vois.
- Speaker #1
T'étais solide sur tes appuis.
- Speaker #0
Exactement. Donc j'étais trop fière de lui avoir dit ça. Je lui ai tellement fermé son caquet qu'il a même dit « Ah, oui, maître » . Mais alors là, dans ma tête, j'étais en mode badass, tu vois. J'étais là « Ouais, vas-y ! » J'étais en mode combat de boxe, quoi, tu vois. J'étais en mode « Vas-y, frappe encore, tu vas voir, je vais te rendre une patate encore plus forte, mon gars. » Bref. Et il y a quand même, de la part de la cour... comme je te dis, une méconnaissance totale du dossier qu'ils étaient en train de traiter, de mon dossier. Mais je ne comprends pas, du coup, le scénario... Alors, attendez, mais non, mais là, on parle de... Je ne comprends pas, c'est quoi, le scénario ou l'improvisation ? Il a fallu que je réexplique des détails, en fait, des choses de contexte qui n'avaient pas lieu d'être, en fait, à ce moment-là, s'ils avaient eu connaissance du dossier. Donc je réexplique, non, ça, c'est le scénario, ça, c'est ci, ça, c'est ça. Mais je ne comprends pas les jeux de mots, du coup, parce que du coup il y avait les jeux de mots français-anglais, où la personne que je devais jouer devait dire naïvement des mots obscènes, en fait, sans le savoir en anglais, parce qu'elle a un mauvais accent, elle a un accent français. Il a fallu que je réexplique. Mais plein de fois que le personnage que je devais jouer était naïf et ne disait pas ses propos sexuels volontairement, en fait. Voilà, il y avait une incompréhension, j'avais l'impression qu'elle ne comprenait rien, c'était deux nanas et un mec, et c'était surtout elle qui m'interrogeait. Bref, en tout cas, l'audience se passe. Et puis là, le procureur n'avait pas donné son avis, étant donné qu'il ne s'agissait pas d'une procédure pénale mais civile. Il n'avait pas forcément à donner son avis, mais il a quand même choisi de le donner. Et là, ce monsieur qui dit « Écoutez, je pense que ce qui s'est passé, c'est un peu comme dans le domaine du sport ou de la musique, par exemple, où il y a ces moments de complicité et de rapprochement physique, en fait, entre un éducateur... et son élève, entre un professeur et son élève, et où il y a cette limite qui est impalpable, mais qui est franchie malgré tout, et qui donne lieu à des agressions sexuelles. Mais cette limite, elle est tellement floue que c'est vrai que c'est peut-être difficile de donner son avis là-dessus, mais là, elle a été franchie. Je comprends qu'il est de mon côté. Et avant de se rasseoir, il dit, et si avant de finir, je peux rajouter quelque chose, selon moi, la personne qui avait tout compris depuis le début, C'était sa femme. Et il se rassoit. Et là, j'avais envie de l'applaudir. Et de lui dire, mais merci, monsieur, j'ai même envie de vous faire un petit calinou. Ah, je te jure, il m'a mis du baume au cœur. Ah, je me suis sentie... Reconnue. Ah ouais, reconnue. Et puis après cette audience qui avait été tellement éprouvante, je me suis sentie un peu bercée par les paroles de ce monsieur. Et voilà, et puis ça vient autour de mon avocate de faire sa plaidoirie. Et au moment où elle fait sa plaidoirie, elle est interrompue. Au moins quatre fois, voire cinq fois, je ne les ai pas comptées. Mais par la cour ! Par les deux nanas qui regardent le dossier. Mais attendez, maître, maître, je ne comprends pas. Là, vous parlez de l'article du code pénal ou du code civil ? Ah, bon, mon avocate qui dit... Non, non, je parle bien du code civil, parce que c'est une procédure, elles n'ont pas l'habitude, en fait, de remettre en jeu seulement les intérêts civils. Elles sont un peu paumées. Et peut-être que mon avocate avait fait une erreur, mais voilà. t'attends la fin de la plaidoirie en fait, avant de demander. Mon avocate prend sur elle, recommence. Non mais attendez maître, je sais pas si j'ai compris du coup, mon avocate s'interrompt encore une fois. Bref, ça a été ça, quatre fois. Elle a tenu bon mon avocate franchement, j'étais mal pour elle et à la fois je me suis dit, putain elle a eu du courage d'y être allée, avec toujours la même énergie, la même intensité tu vois, jusqu'à la fin. Alors que, bon, moi je crois que j'aurais un peu lâché l'affaire tu vois. J'aurais dit oui bon bah du coup ça ça ça, allez merci au revoir. Vu qu'on m'interrompt, j'arrête d'ouvrir ma gueule en fait.
- Speaker #1
Ouais, et puis ça n'a pas la même puissance quand tu le dis une fois que quand tu le dis une fois.
- Speaker #0
Exact.
- Speaker #1
Et j'imagine qu'ils ne l'ont pas interrompu, lui.
- Speaker #0
Absolument pas.
- Speaker #1
Ça aurait été étonnant.
- Speaker #0
C'est ça. Cette audience se termine, donc c'était en janvier dernier. Je devais avoir une décision début avril. Parce que là, du coup, le délibéré n'est pas juste après l'audience. Là, le délibéré se fait plus tard. Mon avocate m'appelle. « Bon, je suis désolée, madame Dussert. » Il n'y a pas eu de délibéré encore, donc c'est reporté. On est le 1er avril, c'est reporté au 29 avril. Je me suis dit, vous voyez, j'avais raison. Que des reports, cette procédure judiciaire. Et donc, le 29 avril, j'ai eu la décision de justice, qui tient en cinq lignes, et qui dit que, étant donné qu'il y avait des jeux de mots grivois dans le scénario initial, je devais m'attendre à ce qu'il y ait des attouchements physiques lors du casting. Mon avocate me dit ça, elle me dit, ça prouve qu'elle n'a rien compris, en fait. Et pourtant... j'ai insisté, tu vois, pendant l'audience. J'ai insisté en disant, la personne que je dois jouer est naïve.
- Speaker #1
Ouais, et puis même si tu fais des jeux de mots ou des blagues, ça reste la parole. Il n'y a jamais eu de mention de toucher quoi que ce soit.
- Speaker #0
Exactement, bien sûr. Bien sûr qu'à la base, aucun contact physique n'a été mentionné. En plus, ça vient démonter tout le travail de mon avocate qu'elle avait fait avec son équipe, où elle avait pris le scénario, en fait, et elle avait fait des annotations partout dans le scénario. et en mettant, voilà, donc là, il y a des jeux de mots, donc elle avait mis en... en évidence tous les jeux de mots, et elle avait mis en évidence qu'il n'y avait aucun contact physique dans les didascalies en fait, parce qu'il y avait des didascalies en italique dans le texte. Le personnage fait ci, le personnage fait ça, à aucun moment le personnage a des attouchements sexuels envers quelqu'un d'autre en fait. Voilà où ça en est. Et du coup,
- Speaker #1
ça s'arrête là ?
- Speaker #0
Ça ne s'arrête pas là. Mon avocate me dit ça, donc elle m'appelle, elle m'explique, elle me dit que c'est révoltant, sachant tout ce qui se passe en plus en France actuellement, avec le MeToo français qui prend de l'ampleur. que c'est une décision de justice complètement incohérente. Et donc elle me dit, il y a un dernier recours, c'est le pourvoi en cassation. Elle me dit, alors je l'ai déjà fait, parce qu'on a que quelques jours, mais vous pouvez me dire non, je peux le retirer. Et là, je lui dis, bah... Moi, je suis partagée, en fait, parce que je pense sérieusement que mon corps n'est pas fait pour vivre une nouvelle audience, clairement. Je ne supporterai pas. Mon corps ne le supporterait pas. Du coup, je lui dis, moi, je ne suis pas prête pour une nouvelle audience. Elle me dit, non, mais la Cour de cassation, c'est très administratif. Il se peut qu'on retourne en Cour d'appel. Du coup, c'est toi qui me disais ça, qui m'as expliqué ça tout à l'heure. Si la Cour de cassation estime que, oui, on remet en jeu la décision de justice sur les intérêts civils, on repart en Cour d'appel.
- Speaker #1
C'est ça.
- Speaker #0
Merci. C'est Aurélie qui a fait les recherches pour moi tout à l'heure. Et sinon, la Cour de cassation estime que oui, la décision de justice sur les intérêts civils est OK. Et il n'y a aucun problème, et bien du coup la décision s'arrête là. Voilà. Sachant que, pour la cassation, il faut un avocat spécial. Donc c'est mon avocate que j'ai qui fait le lien entre cet avocat et moi. Mais il faut que je lâche encore de la thune. Il faut que je lâche encore 2600 euros. Pour le pourvoi en cassation. Et en vrai, moi s'il y a une nouvelle audience, je n'y vais pas, c'est sûr. Je n'espère plus rien de la justice, mais plus rien. Déjà on appelle... J'ai fait cette audience en appel pour moi et pour reprendre le contrôle sur ce qui s'était passé en première instance. Là, le pourvent en cassation, c'est uniquement pour que lui, mon agresseur, se dise « elle lâchera pas l'affaire en fait » . Et qu'à chaque fois qu'il fait passer un casting à une nana et qu'il ait des idées derrière la tête, et qu'il ait la trique, mais que ça lui coupe sa putain de trique en fait, et qu'il pense à moi et qu'il se dise « ok, je vais peut-être pas recommencer, je vais peut-être pas merder, parce qu'en effet ça va me poursuivre des années » . Et voilà. Et j'ai agressé la mauvaise personne, en fait. J'ai agressé la pire des meufs, en fait. Celle qui ne lâchera pas le morceau. J'ai envie qu'il, quand il pense à moi, il s'imagine comme une chienne. J'ai envie de féminiser le mot, justement, pour reprendre à l'inverse, du coup, de ce qu'on s'imagine quand on parle d'une chienne. Mais qu'il m'imagine comme une chienne enragée, qui lui mord la cuisse et qui ne lâche pas prise. Voilà, j'ai envie qu'il s'imagine cette métaphore. Et j'espère qu'il écoutera le podcast et que du coup, il imaginera vraiment.
- Speaker #1
Pick up à toi, connard. Enfin, je pense que c'est un petit peu tout ce qu'on espère quand on se lance là-dedans. C'est de se dire que ça lui sert de leçon et que la prochaine, il n'y aille pas parce qu'ils se disent j'ai une chance de me retrouver encore dans les ambiances comme ça. Flemme.
- Speaker #0
Grave.
- Speaker #1
Pas parce qu'ils vont gagner de conscience. Juste parce que flemme.
- Speaker #0
Mais c'est exactement ça. C'est ça. Et j'espère que c'est pas... pour moi c'est mon fantasme ultime qu'il ne recommence jamais et j'espère de tout mon coeur que c'est pas juste un fantasme parce qu'on le sait la plupart des agresseurs sont des récidivistes la plupart des agresseurs ont déjà agressé j'espère juste que cette cour de cassation qui me coûte 2600 euros elle servira à ça et que ça empêchera d'autres victimes d'être la victime de ce mec voilà si je peux faire un genre de conclusion ... pour clôturer tout ça tu voudrais plus je vais reprendre ce que j'ai dit déjà tout à l'heure c'est que quand on est victime qu'on veuille rentrer dans un processus judiciaire ou pas je pense qu'il faut se faire accompagner quoi qu'il arrive et se faire accompagner ça veut pas forcément dire aller voir une psy qu'on paye 70 euros par semaine se faire accompagner c'est se servir des réseaux sociaux comme on l'a évoqué tout à l'heure rencontrer d'autres personnes qui ont été victimes Peut-être qu'on n'en a pas besoin, ou on pense qu'on n'en a pas besoin, mais en tout cas, je pense que c'est important de se faire un peu coucouner. Par des gens qui ont vécu la même chose et qui sont à un stade peut-être plus avancé dans notre processus de réparation. Et qui, comme tu l'as dit tout à l'heure, nous diront que ça va aller, qu'on s'en sort, que ça reste toujours une cicatrice qui fait mal, mais que la vie continue en fait. Et voilà. Mais en tout cas, ne pas hésiter de se servir de ces outils-là qui sont, heureusement, maintenant à portée de main en fait. Allez voir les associations, c'est gratuit les associations. Tu vas dans une association. dans un groupe de parole. Moi, j'ai essayé le groupe de parole. Bon, finalement, ça ne me correspond pas. Mais il y a plein de gens qui font partie de ces groupes de parole-là. En plus, maintenant, il y a des groupes de parole qui sont parfois de plus en plus précis. Des groupes de parole spécialisés dans l'inceste. Des groupes de parole spécialisés dans les violences conjugales. Donc comme ça, on est vraiment avec des personnes qui nous comprennent, en fait. Parce que, comme tu disais, les gens qui n'ont pas vécu ça, ils ne savent pas. Ils ne savent pas ce que c'est, et ce n'est pas de leur faute. C'est pas de leur faute, parfois, d'être des mauvais accompagnants, et parfois, il y a des gens qui n'ont pas vécu ça, et qui sont de très bons accompagnants, hein. Je dis pas le contraire, mais en tout cas, ce petit réseau de... Ce grand réseau, malheureusement, en fait, de personnes victimes de violences sexuelles, il existe. Tu sais, j'ai participé, du coup, au court-métrage, là, de Judith Godrej, dont on parle beaucoup dans les médias. Moi, je suis pas très... en lien avec ces femmes-là. En revanche, elles ont créé une communauté de fous, ces meufs-là. Il y a un groupe WhatsApp, il y a eu la projection en avant-première du film, le court-métrage auquel on a toutes participé, elles se sont fait un pique-nique après. Il y en a qui se voient régulièrement, il y en a qui sont devenues amies. Voilà, et peut-être que c'est ça la solution en fait, c'est créer du lien, créer un bloc, montrer qu'on existe aussi, au-delà du fait de se réparer, parce que là, dans ce que j'évoque, il y a de la réparation, c'est se soigner, et c'est le plus important. et c'est ce qu'il y a à faire dans un premier temps mais il y a aussi de faire un bloc le court métrage de Judith Godrej comme il peut y avoir mon podcast au bénéfice du doute c'est des petites briques Judith Godrej elle est médiatisée et en fait ce qu'elle fait il y en a plein qui le font aussi déjà des anonymes qui existent aussi et je pense qu'il faut mettre en valeur aussi et de qui il faut se rapprocher en fait pourquoi continuer de les faire exister. Moi, mon podcast, peut-être qu'un jour j'arrêterai, mais si moi j'arrête, j'espère que quelqu'un, plusieurs personnes le reprendront et le continueront. Et tu vois, là, le fait de témoigner tout à l'heure, comme je disais, j'espère que mon agresseur il entend, mais j'espère qu'il y a plein de personnes qui ont déjà agressé et qui écoutent mes mots, tes mots, les mots de toutes les autres personnes qui ont participé et qui se disent « Ah ouais, merde ! » « Merde, en fait, elle parle ! » Et j'espère que ces personnes-là, on la trouille ! que d'autres personnes participent à mon podcast, vont parler à des associations, lancent des appels à témoignages sur collectives. Moi, je n'ai pas d'espoir pour ma génération, même la génération de nos enfants. Le patriarcat et les violences sexuelles et l'ascendant des hommes sur les femmes est tellement imprégné dans notre société que ce n'est pas dans les dix années à venir qu'on va changer les choses. En revanche, on est en train de construire des bases pour les futures générations. Et j'espère que ces bases-là, ça va être un temps plein pour que... elles, mais quand je dis elles, c'est des générations, ce sera nos arrières-arrières petits-enfants, mais j'espère qu'elles auront les moyens de se défendre, et que le moyen de se défendre, c'est que les agresseurs sauront que quand on agresse une femme, elle le dit, et que c'est répréhensible par la loi, et qu'ils seront pointés du doigt, en fait. Voilà, voilà ce que c'est mon espoir pour la suite et les futures générations. Ce podcast est né d'une malheureuse décision de justice. La rage au ventre, je voulais trouver un moyen de m'exprimer sans que personne ne remette ma parole en doute. Et je voulais que d'autres personnes victimes de violences sexuelles puissent avoir cette chance. Ce podcast existe grâce à vous, qui avez voulu témoigner, mais aussi grâce à vous qui écoutez et partagez le vécu de ces guerrières. Merci encore à Aurélie, qui a su m'accompagner avec sa bienveillance innée tout au long du processus d'enregistrement. Vous venez d'écouter le 13e épisode du podcast Au bénéfice du doute. Si vous pensez qu'il peut être utile à d'autres personnes, n'hésitez pas à le partager. Ce podcast est entièrement autoproduit par Julie Dussert. La musique originale a été composée par Sandra Fabry et l'image a été dessinée par Camélia Blandot. Au bénéfice du doute, le podcast où les personnes victimes de violences sexuelles prennent la parole.