- Speaker #0
Bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Au-delà du mur. Aujourd'hui, on part au Québec pour une discussion passionnante avec Guy Thibault, docteur en physiologie de l'exercice, chercheur, auteur, mais surtout grand vulgarisateur. Si tu cours depuis quelques temps, tu as sans doute déjà entendu qu'il fallait absolument attaquer médiopied, courir à 180 pas par minute, ou encore que certaines foulées étaient plus économes que d'autres. Dans cet épisode, on démonte ces idées reçues avec à la clé une réflexion claire basée sur les données scientifiques, mais toujours accessible. Guy nous parle aussi de sa fameuse méthode Tequila, une approche d'entraînement originale en trois phases qui peut vraiment faire une différence si tu veux améliorer ton efficacité sans forcément t'entraîner plus. Tu entendras parfois un peu de friture sous la ligne, c'est le charme de la distance et du direct, mais je t'assure que le fond vaut largement le détour. Très bonne écoute et n'oublie pas... Ce n'est pas la foulée la plus élégante qui est forcément la plus efficace. A toi de trouver ce qui te correspond vraiment. Bienvenue dans Au-delà du mur, le podcast pour tous les passionnés de course, qu'il s'agisse de bitume, de nature ou de piste. Que vous soyez débutant ou coureur à guéris, nous explorons ensemble la préparation physique et mentale, la nutrition et la santé pour vous aider à atteindre vos objectifs. Si vous cherchez des conseils pratiques, Des témoignages inspirants et des discussions captivantes, vous êtes au bon endroit. Préparez-vous, votre voyage au-delà du mur commence ici. Mon cher Guy, bonjour.
- Speaker #1
Bonjour.
- Speaker #0
Comment ça va ?
- Speaker #1
Journée souriante.
- Speaker #0
Journée souriante, c'est une expression à laquelle je ne suis pas habitué. Est-ce que ça veut dire que tu passes une bonne journée ou qu'il fait beau ?
- Speaker #1
C'est une journée qui s'annonce très agréable, il fait beau. au Québec. L'hiver a été très long. Mais là, on sent que c'est le moment de sortir les vélos, les godasses et profiter du beau temps.
- Speaker #0
Ça démange, ça démange, effectivement. Chez nous, c'est à peu près la même météo, à plusieurs milliers de kilomètres de distance. Donc, on alterne entre le très beau, très court, mais de la pluie, de la neige. C'est vrai que c'est un mois d'avril très, très intéressant aussi. Pour les personnes qui ne te connaissent pas, qui ne t'ont pas pas reconnu à ton visage, est-ce que tu pourrais nous dire qui tu es et d'où tu viens ? On sait que tu viens du Québec, mais qui es-tu ?
- Speaker #1
En fait, j'ai réalisé que la philosophie de Au-delà du mur, ton podcast, c'est d'aider et c'est ce qui me définit le plus. Moi, j'ai fait des études en physiologie de l'exercice, une maîtrise d'abord et ensuite un doctorat, un long doctorat, neuf ans, parce qu'en tant qu'ancien coureur cycliste et ancien coureur de demi-fonds et coureur de fonds. J'ai trouvé intéressant d'aller chercher des connaissances scientifiques et de les appliquer pour mon entraînement. Ce que j'aime faire, moi, c'est me documenter sur les récents développements scientifiques et ensuite de les rendre accessibles pour les participants sportifs eux-mêmes et le personnel d'encadrement, surtout les entraîneurs, mais aussi les équipes médicales. Donc finalement, j'ai deux sujets. qui m'intéresse particulièrement, l'activité physique et son lien avec la santé, mais surtout les méthodes d'amélioration de la performance sportive tant au très haut niveau que chez l'athlète du dimanche.
- Speaker #0
Très juste. Je m'en réjouis en tout cas de pouvoir utiliser tes connaissances, un long doctorat. J'ai d'ailleurs regardé sur Internet ton curriculum vitae. Je crois qu'on pourrait faire J'y visier où je vis, donc jusqu'au Québec, aller-retour, et on n'aurait pas encore terminé de parler de tous les récits, tous les ouvrages dans lesquels tu as publié, et puis tous les articles que tu as écrits, c'est vraiment très très impressionnant.
- Speaker #1
C'est mon hobby, donc je n'ai pas l'impression de travailler quand j'écris des livres comme celui-ci, qui est paru en Europe, ou les chroniques que j'écris par exemple dans mon site web personnel Nature Humaine, naturehumaine.ca. C'est un plaisir pour moi de faire ça.
- Speaker #0
Quand je t'ai contacté, c'était à la suite de la publication du numéro 73, donc le 73 du magazine Zatopek, auquel je suis abonné, que je dévore à chaque fois qu'il sort. Tu as publié deux articles qui sont extrêmement intéressants dans ce magazine. Le premier, c'est « La meilleure façon de courir » . Déjà, le titre est extrêmement accrocheur. Et le deuxième, c'est « La méthode tequila » . C'est vraiment deux titres. Alors, je pense qu'en termes de marketing, tu es vraiment un expert pour trouver les titres. Mais ce que j'ai trouvé extrêmement intéressant, c'est bien évidemment le contenu qu'il y avait à l'intérieur. Et si on va directement dans le vif du sujet, dans le cadre du premier article. Tu parles notamment des différentes techniques de course. Attaque-talent, médiopied, pronation et subination. Ça, c'est des termes qu'on entend partout et tout le temps, surtout quand il s'agit de choisir, par exemple, une paire de chaussures. D'où est-ce qu'elle vient, cette croyance ? D'où vient l'origine de ces croyances ? Ou en tout cas, ce qu'on définit comme des croyances ?
- Speaker #1
En fait, le propos, c'est qu'on parle de... Ce qui explique pourquoi on a voulu publier ce livre-là. En fait, c'est une discussion qu'il y a eu entre le rédacteur en chef, Gilles Guedieu-Beaer de Zatopek, que je connais parce que j'ai déjà une chronique aussi. J'ai une chronique dans Sport et Vie, un autre magazine avec le même rédacteur en chef. Puis on s'est rendu compte qu'il y a un paradoxe qui est le suivant. C'est qu'un des déterminants de la performance les plus importants en course à pied, c'est l'efficacité de la foulée. Et ce qui se discute sur les terrains, c'est pas... tant l'aspect scientifique bien documenté de l'efficacité de la foulée, qui est un principe physique, mais plutôt de ce que l'on devrait faire. Or, il se trouve qu'un peu par hasard, quand il y a plusieurs années, j'ai eu à enseigner un cours avancé en physiologie de l'exercice, on s'est amusé, mes étudiants et moi, à mesurer l'efficacité de la foulée auprès d'un grand nombre de coureurs. Parmi mes étudiants, il y avait quelqu'un qui est très naïf vis-à-vis de la course à pied. C'est un bodybuilder qui ne fait pas de course à pied, qui ne connaît pas la course à pied, qui ne s'intéresse pas à la course à pied. Alors, lui, il était d'un côté du tapis roulant, moi de l'autre côté. Et auprès des 50 sujets qui ont eu à courir à une vitesse sous-maximale, donc une vitesse pas trop élevée pendant quelques minutes, on faisait une appréciation à l'œil de l'efficacité de leur foulée parce que c'était une époque... et c'est encore vrai, où on prétend qu'une belle foulée est une foulée qui est plus efficace. Et ce qui est assez intéressant, qui est ressorti comme résultat, c'est que l'appréciation naïve de ce non-spécialiste était parfaitement corrélée avec mon appréciation, moi qui étais à l'époque entraîneur d'une des meilleures athlètes qui a même gagné le marathon de Boston, donc je me considérais comme étant un spécialiste de la foulée. Et on était d'accord, lui et moi. Ça veut dire que quiconque apprécie naïvement la qualité d'une foulée va avoir une assez bonne idée et ça va être assez consistant. Mais la corrélation entre notre évaluation de l'efficacité de la foulée et la mesure qu'on peut en faire en laboratoire, en mesurant l'efficacité, c'est très facile. Ce qu'on fait, c'est qu'on calcule, on mesure la quantité d'oxygène que le coureur... doit consommer pour couvrir à, par exemple, 5 minutes au kilo. Ou 4 minutes au kilo pour les adquêtes de plus de 2. Alors, moins on consomme d'oxygène, plus on a une foulée qui est efficace. Donc, on a une mesure objective, mathématique, de l'efficacité de la foulée. Et la corrélation entre cette mesure objective et notre appréciation subjective, elle était nulle. C'est-à-dire qu'il y avait des coureurs qui, manifestement, avaient une foulée très, très, très élégante, mais qui, finalement... se sont révélées totalement inefficaces quand on mesure de façon objective leur efficacité de fouler. Et là, ça m'a fait dire que les conseils qu'on a tendance à donner sur le terrain, par exemple ceux que tu mentionnais, peut-être qu'ils ne sont pas nécessairement fondés, peut-être qu'il y a quelque chose d'autre. Et là, depuis cette époque, je parle de quelque chose qui est arrivé il y a plusieurs décennies, les recherches ont évolué beaucoup sur le concept d'efficacité de le fouler et le rédacteur en chef de Zatopek et moi, on a censé avoir besoin de faire le point sur cette question-là et en profiter pour botter derrière un certain nombre de mythes en lien avec ce qui se dit sur le terrain pour améliorer, supposément, la qualité de la foulée ou l'efficacité de la foulée des courants.
- Speaker #0
Et ça, on peut le voir, par exemple, avec des exemples qui me viennent directement à l'esprit, celui de Paul Radcliffe, par exemple, où d'ailleurs tu... Je crois que tu l'as mentionné dans ton article. Quand elle courait, on a l'impression qu'elle faisait toujours non. Ou alors, Emil Zatopek, qui lui, t'avais l'impression qu'on était en train de lui arracher de la peau ou les ongles à chaque fois qu'il courait. Et puis, il disait d'ailleurs qu'il n'y avait aucun intérêt à sourire. Enfin, je ne sais plus comment il avait évoqué cette tournure-là. Donc, effectivement, c'est déjà un indicateur qu'une belle foulée n'est pas forcément une foulée efficace, parce que Paul Aradcliffe a détenu quand même certains records pendant longtemps. Et puis, Emil Zatopek également.
- Speaker #1
Oui, on connaît d'autres exemples comme les pressées d'acier qui avaient une attaque au socle qui n'était vraiment pas très élégante. Mais nous, en tant que scientifiques, on se méfie des cas d'espèce comme cela. Donc, ce qu'il faut, c'est regarder quand on prend un grand groupe de sujets, qu'on examine leur efficacité de la foulée, qu'est-ce qu'on découvre. Et quand on applique des méthodes censées améliorer l'efficacité de la foulée, qu'est-ce qu'on découvre ? Et là, on réalise que l'efficacité, c'est plus complexe que ce qu'on peut penser à l'origine parce que ce n'est pas une qualité intrinsèque d'un individu. Alors par exemple, j'ai un ami, quand j'entraînais Jacqueline Guéraud, qui lui entraînait la première coureuse médaillée d'or au marathon aux Jeux olympiques, qui s'appelle Jack Daniels. Jack Daniels, il me disait qu'il avait mesuré l'efficacité de 10 coureurs, mais sur 10 ergomètres. Donc, bien sûr, il les faisait courir, mais il les faisait courir aussi en montée. Il les faisait pédaler, monter des escaliers, ramer, etc., etc. Et ce qu'il a réalisé, c'est que quand on est parmi les plus efficaces sur un ergomètre donné, tôt ou tard, on va se retrouver le moins efficace sur un autre ergomètre. Donc, ça veut dire que ce n'est pas l'individu qui est... efficace, c'est l'individu qui est efficace dans une activité donnée, d'où la question comment on peut faire pour l'améliorer. Et on a la chance depuis quelques années que les connaissances en cette matière-là se sont beaucoup, beaucoup améliorées.
- Speaker #0
Et justement, ces fameux facteurs clés pour améliorer l'économie de course, maintenant, c'est lesquels ?
- Speaker #1
Ce qu'on se rend compte, c'est que la clé de l'amélioration de l'efficacité de la foulée. elle ne réside pas tant dans l'élégance de la foulée, mais dans le contrôle neuromoteur. Et c'est ce qui nous fait dire que les méthodes d'entraînement depuis plusieurs décennies où on fait, nous au Québec, on appelle ça des drills, je ne sais pas comment, des espèces d'exercices, des genoux hauts, talons-fesses, parce que ça oblige le coureur. à développer un contrôle moteur qui est complémentaire à celui qui est propre à la foulée. Et on réalise aussi qu'il y a des formes de musculation, des méthodes de musculation, qui ont un effet assez rapide et assez important sur l'efficacité de la foulée. Et contrairement à ce qu'on pensait, ce n'est pas de la musculation avec des changes légères et un grand nombre de répétitions, ce qui ressemblerait à la tâche du coureur à pied. C'est le contraire, ce sont des charges. avec un très petit nombre de répétitions. Ce que les recherches nous indiquent, c'est que quand on fait ce genre de musculation-là, on voit que le coût en oxygène ou en calories de la course à une vitesse sous maximale donnée va diminuer beaucoup, beaucoup. C'est la méthode d'entraînement. Le hic, c'est que pour un coureur à pied qui n'a pas d'expérience en musculation, ce n'est pratiquement pas possible. d'entrer dans un programme de musculation avec des charges très élevées, avec un nombre de répétitions qui devient très faible parce que la charge est très élevée, c'est beaucoup trop dangereux, il y a un risque de blessure. Donc ce que l'on fait maintenant, nous les scientifiques qui conseillons les entraîneurs et les athlètes de haut niveau, c'est qu'on suit une longue progression dans un programme de musculation pour amener l'athlète à être capable de faire cette formule de musculation qui va avoir un effet... positif sur l'efficacité de la foulée. Et étant donné que le système neuromoteur, le système de contrôle de la foulée semble être le déterminant de l'efficacité, ça m'a donné une idée d'une méthode d'entraînement qui joue justement sur le contrôle moteur. Et c'est la fameuse méthode d'équilant qui est le second article auquel tu fais allusion, qui est parmi le même numéro de cette opèque. Alors dans ce premier article, je fais le tableau de ce que la littérature nous dit. Et dans le deuxième article, je mets en avant une idée, c'est une hypothèse, d'une méthode d'entraînement qui, théoriquement, devrait avoir de meilleurs résultats. C'est la méthode que j'appelle tequila. C'est une hypothèse qui n'a pas été bien vérifiée. Alors nous, on a fait une étude auprès d'un certain nombre d'athlètes où on a testé la méthode tequila, que je vais expliquer tout à l'heure, si tu le veux. Et on a eu des bons résultats, mais on n'avait pas de gros témoins. Donc nos résultats... On ne peut pas affirmer que les améliorations importantes de l'efficacité et de la performance et des qualités musculaires, on avait fait des théories avant et après entraînement, on ne peut pas affirmer que c'est dû au programme de tequila parce qu'on n'avait pas de gros témoins. C'était tout simplement le temps, d'autres formes d'entraînement qui étaient faites en parallèle. Donc, ce n'est pas publié. Mais c'est quand même une indication que l'hypothèse que la méthode tequila... est une bonne méthode pour améliorer l'efficacité. Ça nous encourage dans cette voie-là, mais en tant que scientifique, je suis obligé de me garder une petite gêne, comme on dit, je ne peux pas Je n'ai pas la preuve que c'est une bonne méthode. Mais la méthode Téquila, le but, c'est de jouer justement sur le système de contrôle neuromoteur en enchaînant trois formes d'activité. La première, si on travaille avec des changes très, très, très élevées en force pour créer dans le système neuromoteur une fatigue due à un travail en force. On fait ça pendant quelques répétitions. On enchaîne sans récupération avec un exercice stimulant les mêmes masses musculaires, mais avec un travail à très, très, très haute vitesse. Donc, on va créer une deuxième fatigue neuromusculaire, mais une fatigue qui est due à un travail à haute vitesse. Et quand je dis haute vitesse, ce n'est pas à haute cadence. Alors, si on fait, par exemple, des sauts sur banc, ça ne s'agit pas de faire ça, c'est de faire explosif. explosif. Donc on travaille vraiment la vitesse de contraction et non pas la cadence. Donc on a créé une fatigue en force, on a créé une fatigue en vitesse, et ensuite on demande à l'individu de courir si c'est un coureur, de pédaliste si c'est un cycliste, de patiner si c'est un patineur de vitesse. Et ce qu'on réalise c'est que courir après avoir créé une fatigue en force et en vitesse, c'est très difficile. Pourquoi ? Parce qu'il y a des unités motrices, donc qui sont tellement fatigués qu'on ne peut pas bien les recruter pour faire le travail de course. Et puis, il faut recruter d'autres unités motrices. Alors, mon hypothèse, c'est que c'est la meilleure formule pour améliorer l'efficacité de la foulée. C'est QFD, ce qu'il faut démontrer. Et ce serait d'ailleurs un très, très beau sujet de recherche pour un étudiant en master ou au doctorat.
- Speaker #0
Je m'ai compris que c'est un élément qui est assez nouveau et, comme tu le disais, il est en cours. peut-être pas suffisamment de monde qui l'ont testé mais déjà le nom donc la partie tequila forcément quand je l'ai lu je me suis dit attends est-ce que je suis vraiment en train de lire le même article mais c'est bel et bien tequila comme la boisson donc t'as parlé des trois étapes, il y a l'étape du sel, il y a l'étape de la tequila justement et puis il y a l'étape du citron donc c'est quelque chose que j'arrive tout à fait à m'imaginer mais comment est-ce que moi en tant qu'amateur je pourrais intégrer La méthode Tequila avec les précautions d'usage, bien évidemment, parce que tu disais avant que c'était un processus quand même long et qu'il fallait se faire accompagner. Mais comment est-ce que moi, je pourrais intégrer cette méthode Tequila dans la périodisation de mon entraînement, par exemple ?
- Speaker #1
Tout dépend de ton expérience en musculation. On va prendre pour équipe, tu en as très peu ou pas du tout. La première chose que je te ferais faire, c'est de travailler les muscles qui sont des stabilisateurs. Donc, je te ferais faire du pilates ou du yoga. ce qu'on appelle de la musculation fonctionnelle où les charges ne sont pas très élevées, mais on va travailler dans des positions qui ne sont pas nécessairement bien confortables, de sorte que tu vas avoir finalement plus de facilité à stabiliser chaque articulation. Et ça, comme tu n'as pas d'expérience en musculation, c'est ce qu'on a supposé, je prendrais peut-être un mois ou deux de cette formule d'entraînement. Ensuite, j'enchaînerais avec une musculation un peu plus traditionnelle, avec des... des poids, des dumbbells, des barbells, des appareils qu'on voit dans les centres de conditionnement physique. Et il y aurait une première phase qui est en endurance. Donc, ce qu'on ferait, c'est qu'on augmenterait progressivement le nombre de répétitions avec des charges qui sont finalement très tolérables. Et on augmenterait le nombre de répétitions jusqu'à ce qu'on atteigne ce qu'on appelle des répétitions maximales. Qu'est-ce qu'une répétition maximale ? Bien, si je te demande de faire 20 répétitions maximales à la 20e répétition, si je te demande d'en faire une 21e, la réponse doit être « je ne peux pas » . faire une 21e répétition sans une récupération prolongée. Tu as donc fait 20 répétitions maximales. On peut faire 20 répétitions tout en étant capable de continuer, mais on s'arrête. Ce sont des répétitions, mais des répétitions non maximales. Mais on peut faire aussi des répétitions maximales. Donc la période d'amorce muscle stabilisateur, période d'endurance, on va se rendre à des répétitions maximales, mais de façon très progressive, et on va porter une attention particulière à l'exécution technique pour être certain de ne pas générer de blessures. Après la phase d'endurance, on va passer à une phase force qui va durer quelques semaines, trois, quatre, peut-être jusqu'à six ou huit semaines. Et ensuite, on va enchaîner avec une phase vitesse. Donc, c'est un peu comme le tequila, mais sur plusieurs semaines ou plusieurs mois. Une fois qu'on aura franchi ces phases-là, initiation, endurance, force, vitesse, Là, on passe à la méthode d'équilibre. Est-ce que la recherche nous indique ? c'est qu'après avoir suivi un programme d'entraînement bien structuré comme celui que je propose, on peut non seulement maintenir ce qu'on a développé comme qualité neuromusculaire, mais on peut continuer à les améliorer avec une seule séance par 10 jours. Donc le coureur qui dit « moi je n'ai pas vraiment le temps de faire de la musculation parce que mes heures libres, je les consacre à faire de la course à pied, ce qui est normal pour un coureur » , je lui réponds « trouve une période de l'année » . pendant quelques mois, 3-4 mois, on va t'initier à la musculation. Et pour le reste de l'année, fais une séance par semaine ou par 10 jours. Et ça va non seulement entretenir, mais même continuer à améliorer les déterminants de la performance. Alors non seulement l'individu va mieux terminer ses compétitions parce que les muscles stabilisateurs sont plus forts, mais en plus, il va être plus fort, il va avoir une meilleure position dans sa vie quotidienne. Et en prime, l'efficacité de la foulée va changer. Et un petit changement de l'efficacité. de la foulée, c'est un grand changement de la performance. Parce que l'efficacité, en fait, ça se mesure de façon quantitative. C'est quelque chose qui varie entre 20 et 25 % selon les individus. Les plus efficaces, c'est 25 %, les moins efficaces, c'est 20 %. Un peu d'ailleurs comme un moteur automobile. Tout moteur, que ce soit un moteur humain, le corps, ou un moteur mécanique, il va transformer de l'énergie en perdant de l'énergie. Et cette perte-là, c'est à peu près 75 à 80 %. Donc l'individu qui a une efficacité de 20%, si grâce à la musculation, elle l'amène à 25%, ce n'est pas des différences subtiles de la performance, c'est des différences énormes. Je ne vais pas trop me prendre en exemple, mais ce que j'ai réalisé, c'est qu'après avoir fait une carrière de cycliste à un certain niveau, quand j'ai arrêté le vélo pour me mettre à la course à pied, mon VO2 max dans les mois qui ont suivi a diminué. Pourquoi ? Parce qu'à vélo, je m'entraînais. 5 heures par jour, je préparais des Jeux olympiques, c'était vraiment très sérieux. Donc je suis certain que mon VO2max a diminué. Mais mes performances en course à pied n'ont pas cessé d'augmenter. Au début, j'avais de la difficulté à faire un 10 km en moins de 40 minutes. Puis après 2 ou 3 ans, j'arrivais à faire 1h05 au 20 km. À l'époque, on ne faisait pas des semi-marathons, on faisait des 20 km. J'ai réussi à faire 1h05, alors que mon VO2max n'avait probablement pas diminué. il avait probablement diminué parce qu'en course à pied, je m'entraînais peut-être quatre fois moins que ce que je faisais à vélo. Pourquoi donc il y a eu cette amélioration-là ? C'est parce qu'au fil des ans, il y a eu une amélioration de l'efficacité de ma foulée. Les cyclistes qui se mettent à la course à pied sont très, très, très inefficaces, mais après quelques mois d'entraînement, ils voient leur efficacité augmenter et cette augmentation-là va être encore plus marquée s'ils font de la musculation.
- Speaker #0
Cette méthode tequila est extrêmement intéressante parce que tu disais, on peut la périodiser et la planifier sur une période spécifique de l'année et après effectuer des rappels. Et je me rappelle encore que j'étais en train de préparer un débrief de mon semi-marathon où je me disais que justement, une des grandes faiblesses de ma préparation pour ce semi-marathon, c'est l'exercice de renforcement parce que je ne trouve pas ça intéressant. C'est embêtant et puis au début, je m'étais imposé deux fois par semaine. Après, je suis passé une fois par semaine et puis ensuite, j'y pense une fois par semaine sans le réaliser. C'est vrai que c'est quelque chose d'extrêmement intéressant, tout en sachant que le renforcement musculaire, je ne suis pas persuadé que c'est quelque chose qui m'aurait apporté quelque chose. C'est vrai que la perspective est extrêmement intéressante.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. Il y a cette idée dans les terrains de sport qu'on perd rapidement ce qu'on a développé en musculation. Ce n'est pas vrai. C'est facile de maintenir. les qualités physiques. Il s'agit d'avoir un minimum de, comme je disais, une séance par digéno, c'est déjà suffisant. Et puis, il y a un autre principe aussi en entraînement. C'est mon ex-entraîneur, Éric Vandamane, qui me disait, si ton athlète, il y a quelque chose qu'il n'aime pas faire, fais-lui faire ce qu'il n'aime pas. Parce que c'est probablement son défaut, et c'est comme ça que tu vas finalement améliorer sa performance. Donc, les coureurs qui sont rebutés par la musculation. Quand on arrive à les motiver à faire un programme de musculation, on voit des changements importants, pas seulement dans leur performance, dans leur quotidien aussi.
- Speaker #0
On identifie, tu parles bien de la biomécanique, c'est quelque chose de totalement individuel. C'est vrai qu'on a des programmes d'entraînement qui fleurissent un peu partout sur Internet, qui sont totalement génériques. Et là, avec cette méthode Téquila, déjà on apporte... une dimension un peu plus particulière parce que chacun va être sensible différemment au niveau de la charge donc il va falloir encore plus individualiser cette fameuse phase tequila Comment est-ce qu'on sait qu'on peut être prêt, par exemple, à passer de la première étape à la suivante ? Est-ce que c'est par boucle itérative ? Donc, je vais essayer une fois un cycle de un mois, un mois, un mois, et puis ensuite je fais un bilan, ou il y a des marqueurs clairs qui me permettent de savoir que je suis prêt pour passer au niveau suivant ?
- Speaker #1
Ça, c'est ce qu'on appelle au Québec une question à mille piastres, une question à mille euros. Et c'est là tout l'art de... du travail de l'entraîneur. Parce que c'est très difficile de savoir si ma phase d'endurance a été suffisamment longue et je suis prêt, oui ou non, à passer à la phase force. Alors, à défaut d'avoir des règles absolues, on propose des guides. Par exemple, dans mon livre, dans ce livre-ci, il y a un tableau qui dit, si tu n'as pas l'expérience, voici le nombre de semaines à consacrer à chacune des phases. Si tu as déjà l'expérience en musculation, le nombre de semaines va être un peu plus court. Mais est-ce que j'ai raison en disant qu'une initiation, c'est trois semaines, et quelqu'un pourrait dire « non, c'est trois mois » , une autre personne pourrait dire « c'est trois séances » . On ne le sait pas. La recherche en sciences du sport évolue beaucoup et rapidement, mais la quantité de questions auxquelles on n'a pas encore de réponse, elle est gigantesque. Donc il faut, quand on travaille sur le terrain... On ne peut pas attendre d'avoir la réponse scientifique à toutes les questions. Il faut à un moment donné prendre une décision. Et là, on y va selon notre intuition. Les entraîneurs que je côtoie, quand ils me disent, moi, arbitrairement, j'ai décidé de faire ça comme ça, en général, avec mon œil scientifique, je trouve que c'est plutôt intelligent ce qu'ils font comme choix. On est obligé, tôt ou tard, de deviner si l'athlète est prêt ou non à passer à l'étape suivante. Il y a un principe fondamental en entraînement qui dit que la première qualité d'un athlète, c'est de se connaître. Et plus l'athlète a de rétroactions sur son corps, plus il a de chances de se faire une bonne intuition et une bonne compétence pour déterminer s'il est prêt à faire ceci ou cela. Plus on se connaît, plus on est bon. Et c'est pour ça que les nouvelles méthodes d'entraînement, l'entraînement moderne, en tout cas à l'Institut national du sport du Québec, où j'ai été directeur scientifique pendant cinq ans, Ce que l'on prône, nous les scientifiques, auprès des entraîneurs, c'est essayer de rendre les athlètes autonomes. Il faut leur expliquer pourquoi on leur fait faire un certain nombre de choses, parce que les micro-ajustements que l'athlète peut apporter lui-même à son entraînement deviennent finalement souvent plus importants que les macro-ajustements au plan d'entraînement. Donc il faut responsabiliser l'athlète, l'instruire et l'aider à prendre les bonnes décisions.
- Speaker #0
C'est très intéressant cette notion de responsabilisation des athlètes parce que toutes les fois où j'ai fait appel à un entraîneur pour qu'il réalise mon programme d'entraînement, alors je ne sais pas si c'était moi qui ne m'y intéressais pas spécifiquement, mais je n'ai jamais forcément eu la compréhension et la science du pourquoi je réalisais les entraînements. je les faisais, parce que je me disais naïvement qui je suis pour demander pourquoi est-ce que je fais cet entraînement-là. S'il me dit que je dois le faire, c'est qu'il a une bonne raison de me le faire faire, mais... Maintenant que c'est moi qui les réalise seul, après avoir suivi une formation auprès de Swiss Athletics, maintenant je sais pourquoi je vais caler telle et telle séance, et je sais qu'est-ce qu'elle est censée m'apporter, je sais quels ajustements je vais faire sur la base du débrief. Et c'est vrai que cette notion de responsabilisation, elle est extrêmement importante. Tu es une des premières personnes que j'entends parler de cet aspect-là.
- Speaker #1
Oui, mais tu sais, il y a une chose qui est... qui est fondamental et les entraîneurs qui ne comprennent pas ce fondement-là, ce sont des mauvais entraîneurs. C'est que dans le domaine de l'entraînement sportif, il y a très très très peu de règles, il y a beaucoup de principes. Alors, si toi et moi, on a la même compréhension, la même compétence vis-à-vis du principe de spécificité de l'entraînement, le principe de progression, le principe de surcharge, le principe d'alternance, si on a la même compréhension et qu'on nous demande... à toi et à moi de faire le plan d'entraînement de monsieur ou madame X, il est normal que le plan d'entraînement soit différent, le tien soit différent du mien. C'est normal, parce qu'il y a une grande différence de manœuvre. Ce qui serait anormal, en revanche, c'est si ton plan d'entraînement ou mon plan d'entraînement violait des principes d'entraînement.
- Speaker #0
Il faut respecter les principes d'entraînement, il faut bien les comprendre. Et c'est pour ça que dans mon livre et dans mes publications, j'insiste beaucoup sur qu'est-ce que veulent dire ces principes d'entraînement-là. C'est important de comprendre que les principes sont fondamentaux, mais il y a plusieurs façons de les appliquer, les principes. Donc, c'est normal que les plans soient différents d'une personne à l'autre. Cela dit, et là je vais avoir l'air de parler contre mon travail, qui est de conseiller les athlètes, un athlète qui suit un mauvais plan d'entraînement, mais de façon assidue, va s'améliorer. Et un athlète qui a un plan d'entraînement le meilleur au monde, mais qui est mal suivi ou mal adapté au jour le jour, va moins bien s'améliorer. Donc le travail de l'entraîneur, c'est bien sûr de chercher le meilleur plan d'entraînement pour son athlète. Mais ce qui importe le plus dans le travail de l'entraîneur, dans ma perspective, c'est de donner un cadre à l'athlète. L'athlète, il sait qu'il est dans une période où il y a... tel objectif et il sait que ce qui a été planifié dans cette phase-là, c'est pour atteindre l'objectif donné et il sait qu'après il va passer à une autre phase avec un autre objectif et avec d'autres formes d'entraînement. C'est très sécurisant pour l'athlète que d'avoir un entraîneur qui donne un cadre. Moi j'ai entendu souvent des entraîneurs avec des plans d'entraînement très très bien structurés qui sécurisaient beaucoup les athlètes. la justification des fois est un peu boiteuse. Mais ce n'est pas si grave que ça. En ce sens que si l'athlète se sent bien encadré, sans sécurité, il demeure concentré sur son entraînement, et il ne va pas douter de son entraînement. Et il va éviter des progressions qui sont trop rapides. Parce que le fameux problème de la prévalence très, très, très élevée des blessures en course à pied, d'où ça vient, ce n'est pas parce que les gens s'entraînent trop, c'est parce qu'ils changent trop rapidement le stress d'entraînement. Les athlètes qui performent au niveau international font un nombre très, très, très élevé de kilomètres et d'heures d'entraînement chaque semaine sans nécessairement se blesser. Alors qu'il y a des débutants qui vont se blesser très rapidement. Pourquoi ? Parce que la progression n'a pas été suffisamment lente. Il faut laisser le temps au corps de s'adapter et les progressions dans la charge d'entraînement qui sont proposées dans les plans d'entraînement que je vois à Ausha droite. J'ai une étudiante qui a dépouillé, je pense, c'est 50 plans d'entraînement qu'on trouve sur Internet. Les progressions sont... toujours beaucoup trop rapide. Toujours. Moi, les athlètes de haut niveau que j'ai connus, ce sont des athlètes qui ont réussi à éviter les blessures parce qu'ils ne faisaient jamais plus que ce qu'on leur demandait et parce que leur entraîneur avait planifié une progression qui est ridiculement longue et lente. Donc, courir trois heures par jour, c'est possible sans se blesser, mais il faut commencer avec cinq minutes et non pas... 50 minutes la première séance. C'est le secret.
- Speaker #1
C'est très intéressant cet aspect de progression ridiculement lente. Alors peut-être que les athlètes de haut niveau, c'est leur métier. Ils fonctionnent peut-être sur des cycles olympiques, donc de 4 ans. C'est sûr que le spectre, la perspective de 4 ans pour te dire que tu as une progression est la plus intéressante que pour les malades d'aujourd'hui que nous sommes qui voulons tout tout de suite se dire... je veux un plan d'entraînement de 12 semaines pour atteindre mon premier marathon aux 3h30, parce que sinon, ça ne sert à rien du tout. Donc il y a beaucoup de défis qui se dressent sur le chemin de la personne qui essaye de progresser. Et puis, on lit très souvent aussi que les facteurs clés pour améliorer l'économie de course, en plus de la biomécanique, c'est la cadence, la posture, la force musculaire, la souplesse articulaire, c'est les trucs. à en perdre son latin. Parce qu'on se dit, je dois courir. Maintenant, tu m'as convaincu que je vais faire de la méthode tequila, et en plus, il va falloir que je travaille sur ma cadence, parce qu'il faut que j'ai une cadence de 108 ans de pas par minute, il faut que je travaille sur ma posture, il faut que je fasse de la force musculaire, en gros, il faut que je démissionne, et puis que je devienne un athlète olympique.
- Speaker #0
Oui. Il y a une observation que je voulais partager avec toi, Hugo, un complément à ce que tu viens de dire, c'est que moi, j'ai eu la chance dans ma carrière de... de croiser beaucoup d'entraîneurs. C'est surtout avec les entraîneurs que je travaille, pas vraiment avec les athlètes. Mon travail, c'est de conseiller les entraîneurs. Mais j'ai connu quand même beaucoup d'athlètes. Et j'ai connu parmi ces athlètes-là, de haut niveau, des champions. Mais il y a beaucoup d'athlètes de haut niveau qui ne sont pour moi pas des champions. Et ce qui caractérise les vrais champions et les vrais champions, ça peut sembler contre-intuitif, c'est qu'ils font le minimum demandé d'entraînement. Ce qu'ils aiment, c'est pas s'entraîner. Ils aiment pas ajouter plus de kilomètres ou se vanter d'avoir fait plus d'heures d'entraînement par semaine. Leur objectif, c'est gagner. Pour moi, la fibre du champion, ce n'est pas la personne qui est capable de se pousser pour faire encore plus d'entraînement. C'est la personne qui a confiance dans l'entraînement qu'on lui donne et qui ne va jamais exagérer. Parce que son objectif, ce n'est pas de s'entraîner, c'est de gagner. Je vais vous donner un exemple. Quand j'ai commencé à faire de la course à pied, mon entraîneur nous disait, par exemple, aujourd'hui, vous avez 18 à 20 fois 200 mètres à faire en 30 secondes. Les champions dans mon club, après 18 répétitions, ils allaient voir l'entraîneur et ils disaient « t'as dit 18 à 20 ? J'en ai fait 18, je rentre chez moi » . Parce que leur objectif, c'était pas d'être impressionné par l'entraînement, c'était de gagner. Donc il y a une différence entre un athlète de haut niveau et un athlète de haut niveau qui est un champion ou une championne.
- Speaker #1
Il y a cette notion de déficience, en tout cas, dans ce qu'ils font, et de l'économie même dans l'effort finalement. Être prêt pour l'instant T et puis en faire le minimum. C'est très bien résumé. Et puis, en ce qui concerne peut-être le volume d'entraînement, c'est un élément clé. On sait qu'on est censé faire 80% en endurance fondamentale, 20% en endurance spécifique. Il faut caler de la récupération dedans. Qu'en est-il au niveau de ces proportions-là ? Est-ce que c'est quelque chose qui est indissociable ? d'une personne à l'autre ou à nouveau est-ce que on n'est pas tous égaux à ce niveau-là ?
- Speaker #0
Il y a beaucoup à dire à propos de ce que tu viens de mentionner qu'on appelle l'entraînement polarisé. L'entraînement polarisé, c'est une forme d'entraînement où on ne reconnaît que trois zones d'entraînement. C'est bizarre parce que depuis quelques décennies, le nombre de zones d'intensité d'entraînement a augmenté. Moi, j'aime bien la nomenclature de... en cette zone, mais bon, ce qui est devenu à la mode avec les travaux de Stephen Sealer, un chercheur que je respecte, qui est très bon en Norvégie, ben lui, il a proposé trois zones en disant, ben la zone 2, c'est la zone à éviter, il faut faire 80% en zone 1, donc une intensité qui est très facile, éviter la zone 2, puis travailler 20% en zone 3. Mais il y a énormément de questions sans réponses, et je trouve ça un peu triste qu'on ait érigé en religion. l'entraînement polarisé. Mais avant de discuter, si tu veux, des questions non résolues, il y a quelque chose d'un peu spectaculaire qui s'est produit quand est arrivée la mode de l'entraînement polarisé. C'est un pied de nez à une autre méthode d'entraînement qui a été érigée en religion, malheureusement, qui est l'entraînement au seuil. L'entraînement polarisé, c'est le contraire de l'entraînement qui nous est proposé depuis que les travaux de Wasserman ont popularisé le seuil anaérobie. Alors ça fait 30-40 ans qu'on nous dit, il faut que tu connaisses ton seuil anaérobie ou ton seuil lactique, il y a plusieurs façons de l'appeler, ce qui est déjà inquiétant. Si on a 22 façons de mesurer quelque chose, c'est probablement parce que ça n'existe pas. Moi, je n'ai jamais cru. Mais toujours est-il qu'on se fait dire dans les revues populaires depuis 40 ans, « Tu trouves ton seuil en aérobie, tu t'entraînes au seuil pour le reculer, et c'est comme ça que tu t'améliores. » Ce qui donne d'ailleurs non seulement des pas très bons résultats en général, mais qui est très, très, très difficile. C'est difficile de s'entraîner au seuil en aérobie. Et là, C-Lear nous arrive en disant, « Non, non, non, il a démonisé l'entraînement au seuil, en disant qu'il faut justement l'éviter. » Est-ce que les recherches vont dans ce sens-là ? Ben oui, il y en a 7 ou 8 qui sont déjà publiées, certaines qui sont vraiment très très bonnes, qui montrent que quand on compare des athlètes qui sont entraînés au seuil en agrobidon, donc la zone 2, versus ceux qui ont fait l'entraînement polarisé, 80% en zone 1, 20% en zone 3, en évitant zone 2, ben c'est ceux qui ont fait le polarisé qui s'améliorent plus que ceux qui sont entraînés au seuil. D'où la mode de l'entraînement polarisé. Mais le problème, c'est que quand on a comparé... l'entraînement polarisé avec l'entraînement au seuil, les séances d'entraînement au seuil étaient des séances mal programmées. Alors un exemple, dans une des études, on avait fait faire trois fois 20 minutes à 80% du VO2 max. Ça, c'est typique de l'entraînement au seuil en aérobie. Mais moi, en tant que scientifique, si tu me demandes une séance d'entraînement à l'intensité correspondant à ce que les croyants du seuil en aérobie appellent le seuil en aérobie, je ne te ferais pas faire trois fois 20 minutes à 80 %. Premièrement, je ne choisirais pas 80, je choisirais 85. Ça va créer un stress plus élevé. Et je te ferais faire 30 fois une minute et demie avec seulement une minute de récupération. Là, j'aurais des résultats. Alors, actuellement, sur les terrains de sport, on a démonisé ce qui était très à la mode auparavant. Mais comme disait Scott Wilde, la preuve que la mode, c'est ridicule, c'est que ça change tout le temps. Bien là, la mode a changé. Elle est ridicule. Parce que dans mon esprit, il n'y a pas d'intensité miracle. Toutes les intensités sont payantes. À une différence près. Quand tu t'entraînes à 80% de ta vitesse maximale à l'aérobie, Tu peux faire, oui, un grand volume. Par exemple, tu pourrais accumuler plus d'une heure, même deux heures de volume à condition de le faire par intervalle. Donc, tu as un très, très grand volume. Mais chaque minute d'entraînement est moins payante que si tu es à une intensité supérieure à 80 %. Donc, dans mon esprit, s'entraîner à un grand volume à 80 % ou à un petit volume à 175 % de la vitesse maximale à l'aérobobie, tout ça, c'est payant. J'ai ce que j'appelle un modèle financier. C'est un peu comme si tu viens me voir et tu me dis, j'ai de l'argent à déposer. Je te dis, j'ai un compte qui va rapporter 2 % d'intérêt et tu peux mettre autant de millions que tu veux. 2 %, ce n'est pas très intéressant. Mais si tu déposes des millions, il va y avoir un revenu. J'ai un autre compte où tu as un retour sur ton investissement de 15 %, mais je te dis, tu ne peux pas placer plus que X dollars. C'est fermé. C'est un peu comme ça l'entraînement. L'entraînement à 115% de la VMA est plus payant que l'entraînement à 85% de la VMA, mais tu ne peux pas faire autant de volume à 115% que à 85%. D'ailleurs, dans une étude que j'ai faite avec Myriam Parkett, mon étudiante qui est devenue mon employée, d'ailleurs, lorsqu'elle était étudiante à l'Université Laval, on a soumis un groupe d'athlètes à un entraînement où toutes les séances étaient à 85% de la VMA. en fait de la puissance maximale à l'aérobie. Un autre groupe, toutes les séances étaient à 115%. Et dans les deux cas, les séances devaient chaque fois mener à épuisement. Donc le degré de difficulté était égal. On a obtenu des améliorations du VO2max de l'ordre de, je crois, 7%, ce qui est énorme chez les athlètes de haut niveau. Et c'était la même amélioration dans les deux cas. Donc quelqu'un pourra déduire qu'à s'entraîner à 85%, ce qui est moins intense, c'est aussi payant qu'à 115. Théoriquement, ce n'est pas faux. Mais le temps accumulé des athlètes à 115 % était deux fois plus petit que le temps accumulé à 85 %. Donc, chaque seconde, chaque minute, chaque heure accumulée à 115 % améliorait deux fois plus au point d'un nombre de secondes consacrées. Pour moi, toutes les intensités d'entraînement sont utiles. Donc, démoniser la zone 2, comme on l'a fait grâce au travaux de Stephen Saylor, ce n'est pas une bonne idée. Ériger le polarisé en religion, ce n'est pas une bonne idée. Et ce qui est encore plus amusant, c'est qu'en parallèle à la mode du polarisé, il y a une autre mode qui s'est développée à cause d'Inigo Sanmilan, le médecin qui s'occupait du champion cycliste Pogacar jusqu'à il n'y a pas longtemps. Lui, il a popularisé la zone 2. Alors, il y a une mode zone 2 avec un argumentaire. Lui qui est spécialiste du cancer a montré qu'il y aurait un intérêt particulier à s'entraîner à la zone 2. Puis, de l'autre côté, tu as une autre religion qui dit qu'il ne faut jamais s'entraîner à la zone 2. Je pense qu'il va falloir, à un moment donné, faire preuve d'esprit critique et de réaliser que quand on crée des séances d'entraînement qui sont bien planifiées, toutes les intensités supérieures à 75 % de la VMA sont... très, très, très, très payante. Il s'agit de profiter du fait que les plus intenses sont plus payantes, mais malheureusement, on ne peut pas faire un gros volume. Mais on va faire un plus gros volume étant ce qui est plus faible. Je pense que c'est l'avenir de l'entraînement dans les sports d'assurance.
- Speaker #1
C'est extrêmement intéressant les éléments que tu mentionnes, parce que je ne les ai pas entendus dans le cadre de ma formation d'entraîneur. Donc, ça veut dire que j'ai encore beaucoup à apprendre. Bon, ça, je m'imaginais bien. Mais c'est surtout que l'individualisation de l'entraînement, ce n'est pas uniquement une philosophie, c'est obligatoire. On ne peut pas se permettre de donner les préceptes qui s'appliquent à tout le monde. Je vois qu'on est obligé quand même de tester, de procéder par itération. On devrait progressivement, toutes et tous, devenir nos propres entraîneurs si on veut avoir une chance de progresser durablement sans se blesser.
- Speaker #0
Oui, c'est vrai. Je me mifle. toujours un peu quand on parle d'individualisation parce que d'un côté c'est oui, de l'autre côté c'est non. Alors, prenons le côté oui. Si j'ai des bonnes mesures de qualité physique, ça va individualiser ton plan d'entraînement et il va être meilleur. Alors, qu'est-ce que j'ai besoin comme information si tu étais mon athlète et si j'étais entraîneur ? Je te ferais faire un test sur un sprint, une épreuve de demi-fond, une épreuve de fond, une épreuve de fond très longue et j'obtiendrais ce que l'on appelle le profil. Je ferais un graphique en fait. ou en ordonnée, j'aurais l'intensité ou la vitesse de course ou la consommation de l'hygiène, peu importe, et en activité, j'aurais la durée des époques. Cette courbe-là que je veux obtenir, elle est caractéristique de l'individu, et quand on la connaît, on est pas mal meilleur pour faire des plans d'entraînement individualisés. Ça, c'est pour le oui. Mais souvent, quand on parle d'individualisés, ce sont des gens qui craignent la science, qui sont jaloux du... qui sont très possessives vis-à-vis de leurs athlètes et qui prétendent que les connaissances scientifiques n'ont pas de valeur parce que ce qui est important, c'est d'individualiser. Ce à quoi je dis, je suis bien d'accord qu'il faut individualiser, mais sur quelle mesure on se base ? Et selon que la mesure est petite, moyenne ou grande, quelle est la décision ? Il y a un principe fondamental en évaluation, c'est la première chose qu'on apprend, c'est l'évaluation est au service de la prise de décision. Alors, avant de faire une évaluation, tu dois te poser la question, si j'obtiens tel ou tel ou tel résultat, est-ce que je vais prendre une décision différente dans le cas A, dans le cas B, dans le cas C ? Si la réponse est non, je ne saurais pas quelle décision prendre. Fais pas la mesure, tu n'en as pas besoin. La mesure est au service de la prise de décision. Alors, si je fais des mesures de tes performances sur cours moyen et long, Je vais pouvoir en déduire ta capacité en aérobie, ton VO2max et ton endurance, qui sont les trois déterminants de la performance les plus importants, avec l'efficacité de l'appui, évidemment. Là, je vais pouvoir individualiser. Mais le fait que je te connaisse, que je connaisse ta vie privée, tes particularités psychologiques, peut-être que ça va m'aider à avoir une intuition. Moi, je pose toujours la question, est-ce que vous êtes capable de dire comment vous individualisez ? Alors, je vais vous donner un exemple concret d'une personne qui... a mis en avant une hypothèse d'individualisation. D'ailleurs, j'ai même écrit un article sur cette hypothèse-là dans le magazine Sport Rémi. C'est en fait l'un des meilleurs entraîneurs ou le meilleur entraîneur de demi-fonds aux États-Unis, qui s'appelle Schwartz. M. Schwartz, qui est donc un entraîneur chevronné, il a mis en avant une hypothèse qui est très, très, très à la mode actuellement aux États-Unis, mais qui n'a pas été démontrée. Lui, il dit, quand un coureur de demi-fonds qui a une... qu'une facilité en sprint fait lui faire des sprints dans l'entraînement. Quand tu as un coureur de demi-fond du même niveau, deux coureurs par exemple qui font 4 minutes au 1500 mètres, mais qu'il y a de la facilité avec les longues séances, fais lui faire des longues séances, c'est comme ça que tu vas mieux l'améliorer. C'est très contre-intuitif, parce qu'en général, on améliore beaucoup plus notre performance si on travaille nos défauts que nos qualités. Parce que si c'est un défaut, on peut encore l'améliorer. Si c'est une qualité, on est saturé. Mais Schwartz met en avant une hypothèse contraire. Et quand je repense à des athlètes que j'ai connus dans ma carrière, c'est vrai que l'entraînement avec des fractions d'efforts à très haute intensité donne de moins bons résultats chez les marathonniers qui sont très mauvais en demi-fond. Et vice-versa. Donc, il a peut-être raison. Voilà une autre question de recherche qui mérite d'être étudiée. Quand on fait preuve d'esprit critique, il ne faut pas seulement critiquer les nouvelles idées, il faut aussi être ouvert aux nouvelles idées. Alors l'hypothèse de Schwartz, il y a des gens qui y ont cru sans se poser de questions, il y en a d'autres qui n'y croient pas sans se poser de questions. Je pense qu'il faut rester ouvert et ce serait un autre sujet intéressant de trouver un groupe de coureurs de demi-fonds homogène, d'aller vérifier lesquels sont meilleurs en sprint, lesquels sont meilleurs en endurance. et vérifier si Gervard a raison en disant qu'il y a là une façon d'individualiser. Donc, il faut toujours faire attention quand on dit individualiser, parce que si ça veut dire, je ne m'occupe pas de la science, moi je connais mon athlète, oui, mais est-ce que tu connais et tu prends les bonnes décisions, il faut toujours se poser la question, est-ce qu'il y a une justification, est-ce qu'il y a une logique derrière les décisions.
- Speaker #1
C'est un sentiment extrêmement scientifique et très limpide. Tu travailles sur quoi comme recherche spécifique maintenant ? C'est peut-être top secret, tu n'as pas le droit de me le dire.
- Speaker #0
Non, non, ce n'est pas secret du tout. Moi, j'ai comme principe que ça ne sert à rien de faire de la recherche si ça n'a pas d'application pratique. Mes collègues qui font de la recherche en sens fondamental, je les respecte, mais ce n'est pas ce que j'aime. Moi, j'aime. Alors, ce que je fais actuellement, c'est que je bonifie une application web qui s'appelle Cube 5D, qui est une application d'accès gratuit, si tu veux, de ton auditoire pour avoir le lien.
- Speaker #1
Avec plaisir.
- Speaker #0
Il est un éditeur de séances d'entraînement basé sur un modèle inédit, un modèle mathématique inédit de l'entraînement par intervalle. Alors, comment ça fonctionne ? C'est qu'on a trouvé le moyen de faire une représentation physique sous forme de cube en cinq dimensions de ce que c'est l'entraînement par intervalle. Alors, ça a l'air compliqué, mais tu vas voir que finalement c'est très simple. Sur l'application, tu vois apparaître un cube où l'axe des X... c'est la durée des fractions d'effort. L'axe des Y, c'est le nombre de répétitions qu'on peut faire. L'axe Z du cube, c'est la durée de la récupération entre les fractions d'effort. Et chaque point a une couleur qui est un indicateur de l'intensité. Alors, est-ce que c'est 80, 85, jusqu'à 150 % de la puissance que tu peux tenir sur 5 minutes ou 20 minutes, c'est toi qui décides. Et ce cube-là, l'entraîneur peut lui-même déterminer le minimum et le maximum. Minimum, maximum, X, Y, Z, intensité. Il peut même jouer sur l'intensité de la récupération. Donc ce que ça fait, c'est que l'entraîneur peut prendre conscience de l'infinité de possibilités de séances d'entraînement. Il peut repérer des séances qu'il a déjà utilisées. Et on peut lui poser la question, OK, tu as déjà fait cette séance-là, mais... Si on va un peu plus haut, à gauche, à droite, en bas, change la couleur, change la récupération, qu'est-ce que tu en penses, qu'est-ce que ça donnerait comme résultat ? Donc, cette espèce d'éditeur de séance d'entraînement ouvre les horizons de l'entraînant. Et une fois qu'il a choisi une séance d'entraînement, il y a une interprétation qui dit « voici la composante aérobie, anaérobie » . Et voici comment, au cours de la séance, le degré de difficulté va évoluer. Est-ce que tu veux télécharger la séance ? Donc, la tête va pouvoir faire la séance qui a été programmée par l'entraîneur. Donc, ça, c'est le sujet de mes recherches actuellement. À l'origine, Cube 5D a été développé pour le vélo, parce que j'avais une subvention du milieu du cyclisme. Mais là, mon équipe de recherche à l'Université de Montréal, on a une subvention d'Athlétisme Québec. Et on est en train de transformer Cube 5D pour qu'il soit applicable. À la course à pied, c'est imminent. Dans quelques semaines, on aura terminé et ça va être bilingue, le français-anglais. Et la façon qu'on le construit, même, il va devenir multilingue. On pourrait même penser allemand, portugais, espagnol, etc. Donc, pour répondre à ta question plus directement, mon chantier de travail, c'est de développer des modèles mathématiques de l'entraînement par intervalle, mais surtout des applications mobiles et des applications web qui facilitent le... le travail des entraîneurs.
- Speaker #1
C'était vraiment une mine d'or d'informations. J'ai l'impression de discuter avec une encyclopédie à chaque fois que tu réponds à une de mes questions. Et ce que je trouve extrêmement intéressant, c'est ce fameux modèle d'entraînement. D'ailleurs, merci encore d'accepter de le partager avec moi et surtout avec mes abonnés parce qu'effectivement, ça permet de progresser de manière itérative dans les différents types d'entraînement par intervalle que je propose pour moi. à ma femme également, parce que c'est moi qui réalise son programme d'entraînement. C'est vraiment très gentil d'avoir accepté de répondre en tout cas à mes questions en cette heure si tôt du Québec. J'espère qu'il fait toujours encore beau. Et puis, je te souhaite une superbe après-midi, mon cher Guy. Et puis, j'espère qu'on aura l'occasion en tout cas d'échanger encore prochainement.
- Speaker #0
Merci Hugo de m'avoir permis de faire ce que j'aime le plus dans la vie, c'est-à-dire de partager l'information scientifique aux bénéfices des coureurs et des entraîneurs.
- Speaker #1
Magnifique, à bientôt mon cher Guy A bientôt Merci d'avoir écouté cet épisode d'Au-delà du mur Si le sujet vous a inspiré ou intrigué N'oubliez pas de vous abonner pour ne rien manquer des prochains épisodes Rejoignez notre communauté sur les réseaux sociaux Et partagez vos réflexions avec nous Je serais ravi d'entendre ce que vous avez pensé de cet épisode Et si vous avez aimé Pensez à laisser un avis 5 étoiles sur votre plateforme d'écoute préférée Ça m'aide énormément à faire conduire la communauté d'au-delà du mur. A très bientôt pour une nouvelle exploration de l'autre côté du mur. Jusque là, continuez à questionner, à explorer et à repousser vos limites.