- Speaker #0
Mwaramutse, vous écoutez Bamboula, le podcast identitaire. Et dans cet épisode, nous allons aborder l'adoption transraciale. Et c'est avec sincérité que Clémence nous partage son récit et comment elle a réussi à garder espoir et confiance en la vie, grâce notamment à sa grand-mère adoptive. Bon, pas tueur, d'autres personnes y ont contribué, mais ça, je vous laisse le découvrir tout au long de cet échange. On se retrouve donc à la fin de cet épisode avec vos réactions et commentaires. Allez ! Bonne écoute ! Bonjour Clémence, comment vas-tu ? Bonjour, ça va et toi ? Ça va très bien. Alors pour celles et ceux qui ne te connaissent pas, est-ce que tu pourrais nous dire qui est Clémence ?
- Speaker #1
Yes, alors je me nomme Clémence, je suis parisienne depuis plus de dix ans maintenant, je suis une femme noire, c'est quelque chose qui aujourd'hui pour moi me définit clairement. et je suis coiffeuse mon métier je l'adore et je l'ai vraiment dans la peau donc c'est pour ça que dans ma présentation pour moi c'est important de le dire et t'as parlé du fait d'être noire en quoi c'est important pour toi de préciser que t'es noire et que ça a une importance pour toi aujourd'hui disons que pendant très longtemps ça a été presque un complexe pour moi du fait de l'adoption d'avoir été adoptée dans une famille blanche de ne pas avoir eu de rôle modèle etc et c'est vrai qu'il y a eu ce moment dans ma vie ... où j'ai eu un déclic et ça a changé ma vie. J'ai toujours eu un problème avec ma couleur de peau. Et en fait, toutes ces angoisses, toutes ces inquiétudes, je les ai vraiment toujours retranscrites dans mes cheveux. J'ai toujours été celle qui cachait ses cheveux, comme beaucoup de femmes noires en plus, qui ont grandi dans les années 90-2000. Mais moi, j'y mettais vraiment beaucoup d'angoisse, beaucoup de peur, beaucoup de choses que je ne les ai pas exprimées à ma famille. Donc au début, c'était les tresses, j'ai fait des tissages. Je n'avais pas le droit de me défriser les cheveux trop jeune. Et quand j'ai eu le droit de me défriser les cheveux, ça a été sans grâle. Et vient ce moment où je fais de la coiffure, je deviens coiffeuse. Je fais une formation dans laquelle on parle beaucoup de cheveux naturels et on incite les femmes à garder leurs cheveux naturels. Beaucoup de femmes blanches passent entre mes mains, mais quand même, ça fait tilt dans ma tête, ça résonne. Et je me dis, comment je peux aider ces femmes à être bien avec elles-mêmes si moi-même, je ne supporte pas ? d'être bien avec mes cheveux au naturel, tu vois. J'ai mon petit travail intérieur qui se fait déjà depuis quelques années, patati patata, et cette formation un peu déclic. Je fais mon big chop à ce moment-là, c'est-à-dire que je coupe mes cheveux très courts pour arrêter les défrisages et repartir sur une pousse naturelle. Et là, vraiment, c'est ce que je dis à tous mes potes, c'est ce que je raconte à tout le monde. Moi, je suis devenue noire à 20 ans quand j'ai arrêté les défrisages. Et vraiment, ça a changé ma vie. Parce que je me suis dit, en fait, je crois que là, je suis prête, c'est ok Ça sera toujours peut-être une petite difficulté pour moi quelque part. Mais en fait, les gens, certaines personnes ne m'aimeront pas, vont me juger, vont me critiquer pour ça. Mais moi, c'est OK, je suis en paix avec ça. Enfin, maintenant, je me rends compte que je n'étais pas vraiment en paix à ce moment-là, mais je commençais à être en paix avec ça.
- Speaker #0
C'était un début du cheminement.
- Speaker #1
Exactement.
- Speaker #0
Waouh ! Et du coup, comme ici, on parle un peu de souvenirs, est-ce que tu peux nous dire un peu dans quel contexte ton adoption s'est faite ?
- Speaker #1
Alors, ça s'est fait dans un contexte pas très joyeux. Je suis née au Rwanda en 1992. En 1992, le génocide en tant que tel n'avait pas encore commencé, mais c'était déjà très conflictuel au Rwanda. Et moi, je suis arrivée en France en 1994, vraiment un peu… Je crois d'ailleurs que je suis rentrée dans les derniers avions qui pouvaient partir du Rwanda pour arriver en France. Et j'ai été adoptée dans le contexte du génocide rwandais, en fait.
- Speaker #0
D'accord. Et tu sais pourquoi tu as été adoptée ? Du coup, où étaient tes parents ?
- Speaker #1
Alors, je ne sais pas grand-chose.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Mais ce qu'on m'a raconté, en fait, il y a un... C'est un prêtre blanc, missionnaire, qui était au Rwanda, qui a ramené un groupe d'enfants, dont moi. Et je suis toujours en contact avec cette personne, qui aujourd'hui est en maison de retraite pour prêtre. Je ne sais pas comment on appelle ça. D'accord. Ah ouais, ça existe ? Dans le 14e. Ok.
- Speaker #0
C'est marrant.
- Speaker #1
Et donc, du coup, je... Voilà, je suis toujours... Je pense que je ne prends pas assez de nouvelles, mais je suis toujours en contact avec lui.
- Speaker #0
Ça servira à un moment donné. Ouais, ouais,
- Speaker #1
ouais. Et lui ne sait pas grand-chose. C'est-à-dire que ma mère biologique... m'a ramenée un jour à lui en lui demandant vraiment très fort de me prendre parce qu'elle ne savait pas comment me gérer. C'est-à-dire qu'elle savait que je pouvais éventuellement être adoptée en France et je ne sais pas comment elle a eu son contact, lui-même ne sait pas. Mais en tout cas, elle est arrivée là avec cette demande de me faire adopter par une famille française parce qu'elle ne savait pas ce qu'il en était pour elle, pour sa vie. Elle était malade, elle avait le sida. Elle était toute scie, donc elle était en mode, en fait, à tout moment, je me fais massacrer. Il y avait tout ça derrière. Et je sais que j'ai été adoptée dans un contexte. Ça, c'est ma chance. Je pense que ma mère biologique m'aimait beaucoup. Des enfants ont raconté qu'elle venait souvent nous rapporter des bonbons à l'orphelinat. Ça devait être extrêmement dur. Moi, je n'ai pas le souvenir, mais apparemment, on pleurait toutes les deux parce que moi, je la voyais. Elle, elle me voyait. Et on ne pouvait plus se prendre dans les bras ou c'était fini. Mais elle venait toujours, jusqu'au dernier moment, elle venait à l'orphelinat pour voir s'il allait bien. Et elle venait nous apporter des bonbons à travers, apparemment, les grilles de l'orphelinat. Mais moi, ça, je n'ai pas de souvenirs. C'est des enfants qui ont rencontré ça.
- Speaker #0
Tu avais quoi, deux ans ?
- Speaker #1
J'avais deux ans.
- Speaker #0
Bah oui.
- Speaker #1
Donc, je sais que c'est quelque chose qu'on m'a toujours dit. On m'a toujours dit, c'est un acte vraiment d'amour. Elle ne t'a pas abandonné.
- Speaker #0
c'est bien ça te conforte même toi même dans ta confiance tu sais que ta maman était là avant même que tu décolles et que tu arrives en France c'est déjà une force de caractère de vraiment s'assurer je vais abandonner ma fille enfin abandonner si tu la sauves tu vas devoir la laisser c'est
- Speaker #1
pas ce qui va devenir d'elle ça je pense que c'est un truc qui dans ma vie il y a plein de trucs qu'on me déconne mais en fait le fait d'avoir grandi avec ça c'est vrai que je pense que mes deux premières années d'âge Merci. Les deux premières années de ma vie n'ont pas été faciles. En revanche, je pense que j'ai été aimée les deux premières années de ma vie. Ça peut paraître con, mais ça me donne un truc.
- Speaker #0
C'est juste incroyable. Pendant deux ans, tu restes dans un orphelinat ?
- Speaker #1
Non, je suis arrivée, je ne suis vraiment pas restée à l'orphelinat longtemps. J'ai vécu les deux premières années de ma vie avec ma mère biologique. Elle m'amène à l'orphelinat. Quelques mois plus tard, je décolle pour la France. Je ne suis vraiment pas restée quelques mois, quelques semaines. Je ne suis pas restée longtemps à l'orphelinat.
- Speaker #0
D'accord, donc ça veut dire qu'à ce moment-là, tu as déjà une famille d'accueil, enfin une famille d'adoption.
- Speaker #1
Oui, quand j'arrive en France, tout est déjà carré.
- Speaker #0
D'accord. Et tu te rappelles un peu les premiers moments au sein de cette nouvelle famille ?
- Speaker #1
Alors, oui. Pareil, l'histoire n'est pas hyper cool. C'est-à-dire que j'ai des souvenirs de « je ne les aime pas » . C'est un peu pas horrible, mais en fait, factuellement, j'ai rencontré mes parents, je ne les ai pas aimés. Je savais que ça n'allait pas le faire.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Je savais que c'était pas très bon.
- Speaker #0
C'était physique ?
- Speaker #1
Je détestais les calendes, je voulais pas qu'ils me touchent, qu'ils me fassent de bidou, il y avait un truc un peu... Et en fait, ça n'a pas... Je dis tout le temps ça depuis longtemps, ça n'a pas matché avec mes parents adoptifs. Pas du tout. Avec du recul, je me rends compte maintenant que adultes, je pense qu'au début, je pensais que c'était moins le problème, mais je pense qu'eux aussi étaient le problème, clairement. D'accord. Ils n'ont pas fait le taf. Je me rends compte aussi avec mes autres frères et sœurs qui, eux, sont les enfants biologiques de mes parents adoptifs. Ce ne sont pas des bons parents. Mais moi, ça n'a pas matché.
- Speaker #0
Ça veut dire qu'eux, ils avaient déjà deux enfants.
- Speaker #1
Moi, j'étais la première. Eux, à la base, étaient un couple dit stérile. Ils n'arrivaient pas à avoir d'enfants. Donc, ils ont adopté un enfant. Une enfant, moi, en l'occurrence. Et après, sont arrivés les autres enfants. Et je pense que, déjà, je ne connais pas vraiment... comme je m'entends pas très bien avec eux, aujourd'hui je leur parle plus, ça fait des années, ça fait plus de dix ans. Je pense qu'ils n'ont pas eu des enfants pour les bonnes raisons. Je pense que c'était des gens qui n'étaient pas non plus ensemble pour les bonnes raisons. Donc rien ne va dans leur histoire, ça c'est leur histoire. Je leur en veux pas. Je pense que c'était pas des gens heureux, c'était pas des gens... Je pense que c'était pas des gens bien non plus, mais bon, ça c'est autre chose. Et moi, la chance que j'ai eue, tu vois, par rapport à tout ça, c'est que certes, je n'ai pas été très heureuse mais enfin j'ai eu la chance d'avoir une grand-mère formidable d'accord tout je suis bien à ouais clairement ça a permis de rééquilibrer à faire ça ça ça ça a changé ma vie si elle n'avait pas été là je pense que j'aurais été malheureuse là en fait j'ai pas été heureuse à la maison mais j'avais une autre vie à côté avec d'autres personnes qui ont pu être là pour moi tu vois ça a tout changé et la chance que j'ai c'est que comme je suis la première et j'ai été adopté je pense que j'ai réussi à ne jamais m'attacher à mes parents donc à me détacher très vite de le jour où en fait on... où en fait on s'est déchiré, engueulé, où ça a été terrible, ben en fait j'ai dit ciao bye, enfin... J'ai dit bye.
- Speaker #0
Tu as quitté la maison ?
- Speaker #1
J'ai quitté la maison. Ma vie dehors, c'était un mélange des deux.
- Speaker #0
Ah oui, mais tu avais quel âge à ce moment-là ?
- Speaker #1
Alors, la première fois, j'avais 16 ans.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Je suis partie chez mes grands-parents. Donc,
- Speaker #0
ça veut dire que de 2 ans jusqu'à 16 ans, en fait, depuis le début, ça ne m'a pas... Non, ça ne m'a pas.
- Speaker #1
Et en fait, je pense que jusqu'à mes 12 ans, il fallait quand même qu'ils s'occupent de moi parce que j'étais trop petite. mais il y a plein de trucs à l'épaisse c'est à dire que
- Speaker #0
T'as un exemple de quelque chose qui n'allait pas ? Parfois, t'as dit les câlins.
- Speaker #1
Dès le départ, je sens que je les aime pas. Je sens que je suis pas dans la bonne famille. Mais j'ai ma grand-mère. Et je sais que je vis pour elle. Ça va pas à la maison. Je m'entends pas avec mes parents. On se dispute. Enfin, ils me disputent. Je ne comprends pas pourquoi. Je me sens boulie, en fait. Je sens qu'avec du recul, maintenant adulte, et avec le background culturel que j'ai, engrangés maintenant, je me rends compte qu'ils ont reproduit des schémas hyper coloniaux avec des biais hyper racistes et je me rendais pas compte à l'époque mais maintenant je peux le dire et il y avait des différences de traitement entre moi et ma sœur qui apprennent moins que moi. Je pense que c'est directement lié au fait que j'ai été adoptée, que j'étais une enfant, une petite fille noire dans une famille blanche, mon on me demandait toujours beaucoup de choses à faire parce que j'étais l'aînée mais aussi je pense parce que j'étais noire et puis bah ils étaient pas gentils avec moi tu vois mais j'avais ma grand-mère j'avais ma grand-mère qui était là et ma grand-mère mais ma grand-mère je l'aime trop tu vois genre elle elle a toujours je dis ça je chouchoue en fait dans ses petits enfants et elle a toujours toujours toujours compensé colmaté mais d'une manière tellement exceptionnelle le manque d'amour de mes parents et même la méchanceté qu'ils avaient à mon égard tu vois et en fait ça a tout sauvé et j'ai une tant qu'il y a de la vache que moi, Adélaïde, Adèle, je t'appelle toujours Abdu.
- Speaker #0
Rien à voir.
- Speaker #1
Et en fait, clairement, ma grand-mère et Adèle, si elles n'avaient pas été là, je pense que, je ne sais pas comment ça se serait fini, mais je ne serais pas comme je suis aujourd'hui. Il y a eu plein de moments dans ma vie où j'ai eu envie et je sais que quand tu as été adoptée, adoption internationale, tu passes par des phases ... très compliqué, il y a plein de gens qui se suicident, il y a plein de gens qui se droguent, il y a plein de gens qui ont des TCA, moi je suis partie de section TCA. Trouble du comportement alimentaire.
- Speaker #0
D'accord, ok.
- Speaker #1
Tu vois, quand j'étais petite, j'étais boulimique, j'étais extrêmement grosse. Et en fait, il y a clairement des moments de vie où j'ai voulu disparaître de la terre,
- Speaker #0
tu vois.
- Speaker #1
Et s'il n'y avait pas eu ma grand-mère et Adèle, je ne sais pas comment ça se serait fini. Je ne dis pas que j'aurais fait des trucs graves, mais je ne sais pas en vrai.
- Speaker #0
Oui, tu as quand même eu la chance d'avoir eu d'autres personnes autour qui pouvaient en tout cas t'aider à mieux vivre ta vie.
- Speaker #1
Mieux vivre ma vie et m'accrocher à la vie, surtout. Parce que s'il n'y avait que mes parents, je ne me serais pas accrochée.
- Speaker #0
Et quand tu étais à l'extérieur, est-ce que les gens comprenaient que tu étais dans une famille adoptive et que tu étais différente ? Comment t'expliquer ce qu'il y a à l'école, les questions et tout ? C'est compliqué ?
- Speaker #1
C'est compliqué et en même temps, j'ai toujours été la seule noire partout. J'ai grandi dans le nord de la France, dans les... petits villages. Pas facile. Ça a toujours été clairement, évidemment, que je n'étais pas l'enfant biologique de mes parents.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Et c'est vrai que, en fait, à l'école, très rapidement, à la maternelle, viennent les questions des autres enfants. Pourquoi tes parents sont blancs ? Moi, j'ai le souvenir que... Alors, pour le coup, je ne parle plus à mes parents. Et pour moi, ce sont de très mauvais parents. Mais on m'a toujours expliqué le pourquoi du comment j'étais noire, pourquoi ils étaient blancs, l'adoption. On m'a toujours dit que j'avais une maman. d'Afrique, qui était quelqu'un qui m'aimait beaucoup. Alors là-dessus, c'est un truc, pour le coup. Je pense qu'ils ont très bien fait le travail. On m'a toujours expliqué des choses, donc j'étais en mesure de l'expliquer. Et j'avais aucun problème à expliquer le pourquoi du comment. Évidemment, les enfants ne sont pas très gentils.
- Speaker #0
Mais toi, tu l'as su très tôt, le pourquoi du comment tu as été adoptée.
- Speaker #1
Je n'ai pas de souvenir de ne pas l'avoir su. Parce que comme je voyais bien que j'étais différente, c'est arrivé très très tôt le moment où je demande pourquoi ils sont blancs et pourquoi je suis noire.
- Speaker #0
De toute façon, à un moment donné, ce sera arrivé parce que ta petite sœur a 3 ans de moins que toi. Oui, complètement. À 5 ans, en fait, 5-6 ans, tu sais déjà que tu aurais su. Même avant,
- Speaker #1
ma grand-mère, qui lisait beaucoup de livres, avait toujours des livres, je ne sais pas où elle trouvait ça, parce que c'était il y a 30 ans, tu vois. Et en fait, on m'a lu beaucoup de livres sur l'adoption.
- Speaker #0
Ah ouais, t'étais très sensibilisée là-dessus finalement. Et donc à l'école, comment ça se passe alors ?
- Speaker #1
Bah à l'école, ça se passe... Des insultes,
- Speaker #0
des agures, des petits taquins qui t'embêtent.
- Speaker #1
Un petit peu. Mais globalement, ça se passe très bien. J'ai toujours été la fille cool parce que je pense que j'ai joué la fille cool. Parce que j'ai vu que, en fait, pour ma survie, il fallait que je sois la fille cool. Il fallait que je corresponde à ce que les gens voulaient, attendaient de moi. La pop culture, à ce moment-là de ma vie, nous montrait à la télé des Noirs. Soit c'était des racailles. qui foutaient la merde, soit c'était les gens rigolos, le prince de bel air les séries, et il n'y avait pas autre chose, donc moi je me suis dit pour ma survie, vu qu'ici les gens et moi la première, ne connaissent pas les noirs il faut que je m'identifie, il faut que je sois la personne cool, donc j'ai toujours été la fille un peu sympa cool, qui parle à tout le monde, évidemment j'ai eu des salles noires, et moi ce qui, voilà des trucs comme ça, j'en ai eu très peu et en fait ma force c'est que je n'ai jamais été seule, puisque j'étais toujours avec Adèle ... On a toujours été toutes les deux. Et à l'école, dès qu'il y a quelqu'un qui m'embêtait sur ça, elle les tapait, en fait.
- Speaker #0
Donc,
- Speaker #1
en fait, je n'ai jamais été... Et puis, s'il y a des... Là-dessus, ma famille, mes parents, enfin, il y avait toujours un truc de faire blocus et de m'expliquer que c'était pas grave, qu'il y avait des gens racistes. On m'a toujours expliqué le racisme. Ah, c'est bizarre. C'est pour ça que mes parents, vraiment, il y a des trucs... Ils ne m'ont pas aimée, ils n'ont pas été gentils avec moi, mais là-dessus, je sais pas pourquoi, ils ont fait le taf tu vois
- Speaker #0
Parce que je pense qu'ils ont été préparés quand même à ça, à un moment donné.
- Speaker #1
Padilly, du coup, c'est comme ça qu'on l'appelle.
- Speaker #0
Ah, Padiri, ah, Kinyarwanda, d'accord. j'ai cru que C'était son nom ? Non, Padiri.
- Speaker #1
En fait, c'est le père Joe. Mais moi, je l'ai toujours appelé Padilly. OK. Avec un accent de merde.
- Speaker #0
T'inquiète, les rwandais te pardonneront
- Speaker #1
Et en fait, il avait donné des consignes. Et je sais que ça, ça fait partie des choses sur lesquelles il avait un peu insisté. genre qu'il fallait m'expliquer et ils ont été bien briefés là-dessus il y a plein de trucs sur lesquels ils ont pas été briefés mais là-dessus ils ont été briefés donc c'est vrai que là-dessus il y a plein de choses que j'ai intériorisées parce que le racisme ordinaire je l'ai vécu tellement de fois mais comme je voulais être la fille qui passe partout, qui fait pas d'histoire jusqu'à je pense mes 18 ans, jusqu'à mes 20 ans jusqu'à mon TikTok tout ça c'est resté très j'ai mis la poussière sous le tapis très longtemps Ouais.
- Speaker #0
Ah ouais, c'est fort.
- Speaker #1
Mais ça m'a permis de... Avec du recul, je me rends compte que si je n'avais pas fait ça, je n'aurais pas pu survivre. En fait, j'ai vraiment mis la poussière sur le tapis. On n'en a pas parlé. Quand on me parlait de l'adoption, etc., je racontais en surface. Je disais que je ne savais pas. J'étais en mode, vous me laissez tranquille. Je n'arrivais pas à en parler. J'étais pas... J'assumais tellement peu de choses à ce moment-là. Je ne voulais pas parler de ma couleur de peau. C'était trop dur. mais il y a un moment donné où les choses se sont faites et en fait ce qui m'a beaucoup aidée en fond c'est que Adèle qui a toujours été là pour moi depuis qu'on est toutes petites, elle me dit il faut que t'en parles, tu sais c'est pas facile ce que t'as vécu, mais déjà très jeune elle me disait des choses comme ça et au début je rigolais un peu et ma grand-mère aussi elles m'ont toujours incité à en parler elles m'ont toujours posé des questions à savoir comment j'allais, comment je me sentais par rapport à ça moi j'ai toujours fermé la conversation mais le fait qu'elles aient toujours parler de ça, je pense qu'en fond, ça a généré un travail qui est superposé à plein d'autres événements de ma vie qui ont fait que le jour où j'étais prête, j'étais prête.
- Speaker #0
En fait, tu as un peu évité le sujet parce que c'était aussi peut-être très dur à affronter comme histoire. Ça te remet dans ton enfance, ton vécu, potentiellement tes parents. Ça peut être intense et ça peut être aussi violent et du coup, de réveiller des choses assez difficiles. Merci Adèle et Mamie. Et du coup tu dis que tu t'entends pas bien avec tes parents et que ça fait dix ans que...
- Speaker #1
Ouais ça fait plus de dix ans que je ne l'entends plus.
- Speaker #0
Et la rupture ça s'est fait à quel moment ? Tu disais à 16 ans quand tu as fait la maison ?
- Speaker #1
La rupture ça s'est fait quand j'avais 12 ans, je me souviens très très bien. D'accord. Enfin le vrai premier moment où je me suis dit là il va falloir que je serre des dents fortes jusqu'à mes 18 ans, jusqu'au moment où je vais faire mes études et je vais partir de la maison, c'était à 12 ans. gros drama familial. Ma mère ne parle plus à sa mère, donc ma grand-mère que j'adore. Et à ce moment-là, je n'ai plus le droit de voir ma grand-mère. Là, la vie devient extrêmement difficile. Mais vraiment, à ce moment-là, c'est pour ça que je te disais tout à l'heure, là, je m'accroche à la vie. Vraiment, ça a été... Je pense que je... de toute ma vie jusqu'à il n'y a pas très longtemps, parce qu'après, on vit des choses un peu difficiles. Mais ça a été une des choses les plus difficiles de ma vie, de ne plus parler ni à ma grand-mère ni à Adèle. Et c'est là où... Et un de mes oncles, qui est aussi mon parrain, qui est mon rôle modèle masculin, tu vois. Et en fait, je ne peux plus leur parler, je n'ai plus le droit. Enfin, je n'ai plus le droit. Ma mère, qui est une personne extrêmement toxique, ne me dit pas que je n'ai pas le droit. Mais je comprends bien que je ne peux plus le faire, parce que si je leur parle, quand je rentre à la maison, je me fais défoncer. Et donc, du coup, je suis en mode, en fait, pour ma survie, il faut que j'arrête de leur parler. Et là, c'est vraiment des moments très... Enfin, tu vois, je vis enfermée dans ma chambre, en fait. Je ne vis plus avec ma famille. Enfin, je suis là, mais je ne suis pas là. Même eux, exemple de comportement hyper toxique. Donc, à ce moment-là, je suis dans ma boulimie. Je suis hyper grosse, ma chambre est nulle. Je mange tout le temps. J'ai toujours super faim. Et je suis toujours enfermée dans ma chambre. Et des fois, le soir, tu vois, je sens que... Il y a le repas du soir qui est en train de se faire, donc la soupe et les repas, ils ne me parlent pas. Ah oui, waouh. Et je me suis rendue une scène où, en fait, je ne sais pas pourquoi, je descends parce que je sens que la nourriture est fraîche, et je descends, et en fait, la table est mise, mais il n'y a pas d'acier pour moi.
- Speaker #0
Oh non. Donc là, ça veut dire qu'ils ont compris et qu'ils t'ont rayé.
- Speaker #1
Ils m'ont rayé, mais ils vivent toujours. En fait, j'aurais préféré qu'ils m'aident dehors à ce moment-là.
- Speaker #0
Ça aurait été plus facile. Et là, tu avais quel âge ?
- Speaker #1
J'avais raison, en tout cas. Là, ça a été vraiment dur.
- Speaker #0
C'est une grosse claque.
- Speaker #1
Ah ouais, c'est une grosse claque. Et là, en fait, tu vois, c'est la première vague de pourquoi ils m'ont adoptée, et puis la culpabilité de pourquoi j'ai survécu à cette guerre, à ce génocide. C'était pour qu'aujourd'hui, en fait, ça soit comme ça. Je me mets la pression parce que je me dis, en fait, tu sais ce truc du survivant un peu. Si en fait, je suis là aujourd'hui, c'est que je dois remplir une mission.
- Speaker #0
Ouais, t'inquiète, je connais, tu connais en fait. Tu connais.
- Speaker #1
Tu vois, et en même temps, je me dis, mais... En fait, là, je suis dans une vie de merde. Donc, ça veut dire que c'est parce que je dois me supprimer de la vie parce que je ne sers à rien. Donc là, tu vois, j'ai des idées très noires. Et ça commence à... Là, il faut se suivre quelques années hyper compliquées. Et puis, à un moment donné, je peux commencer à reparler à ma grand-mère. Je peux commencer à retourner chez elle. Donc, tout ce que je peux prendre chez ma grand-mère avec Adèle, je le prends. Et sachant que ma grand-mère m'a quasiment élevée. Donc, à 12 ans, quand on m'empêche de lui parler... En fait, je dois vivre à la maison. Fini les vacances avec ma grand-mère, fini. Donc, en fait, ma vie change et je ne connais pas. Enfin, il y a plein de trucs. C'est hyper compliqué. Et progressivement, je peux reparler à ma grand-mère. Je renoue les liens un peu plus avec Adèle. Les choses se remettent en place, etc. Mais c'est toujours très compliqué parce qu'il faut que... En fait, je fais semblant tout le temps dans ma vie. Je fais semblant quand je suis à la maison. Quand je suis chez ma grand-mère avec Adèle, je fais semblant aussi que ça va plutôt bien parce que je ne veux pas leur faire mal au cœur en leur disant que... J'ai eu l'enfer à la maison. Je fais semblant à l'école parce que je ne veux pas qu'ils sachent que ça se passe super mal. Et là, en fait, à force de faire semblant, ça fonctionne. Je l'ai bien. Enfin, je l'ai bien.
- Speaker #0
En surface.
- Speaker #1
En surface. Mais dans ma tête, je pense que je vais très bien. Et en fait, j'ai eu, je pense, un retour de bâton. Mais c'était mon retour de bâton qui s'est passé il y a 2-3 ans, à l'approche de mes 30 ans, où en fait, j'ai pris cher. J'ai réalisé que c'était hyper dur tout ce qui s'était passé.
- Speaker #0
Tu ne te rends pas compte ?
- Speaker #1
Non, je ne me rendais pas compte. Et c'était il y a 2-3 ans où je me suis dit « Putain, en fait, c'était trop dur. » Et ce que tu fais ?
- Speaker #0
Tu en parles à quelqu'un ?
- Speaker #1
Alors, en fait, ce qui a été l'élément déclencheur, c'est vraiment la préparation de mon voyage au Rwanda. Parce qu'à un moment donné, il y a le Covid. Et je ne sais pas pourquoi, ça m'a fait réfléchir. J'ai lu « Petit pays de Gaëlle Fay » que je ne voulais pas lire. Je l'ai lu et j'étais en mode « Mais pourquoi je ne suis pas allée au Rwanda plutôt ? » Et là, il y a un truc un peu de pulsion de vie. Je serais en mode, attends, la planète, elle est fermée. Si ça se trouve, on va tous mourir. Dès que ça rouvre, il faut que j'aille au Rwanda. Si on doit mourir demain, c'est ce qu'il faut que je fasse, en fait.
- Speaker #0
C'est la top priorité, en fait, pour toi.
- Speaker #1
Exactement. Et là, je commence à me dire, attends, moi, je ne sais pas si j'ai un désir d'enfant, mais autour de moi, mes sœurs, tout ça, je commence à avoir des nouvelles nièces. Et je me dis, en fait, je ne veux pas être la tata, tu vois, folle. Je veux pouvoir…
- Speaker #0
La tata cool et riche, comme certaines disent.
- Speaker #1
je veux être la tata cool, riche et bien dans sa tête ah d'accord ok Et là, je me dis, si je veux avoir une montée centrale stable, il faut que je fasse ce truc-là. Parce qu'en fait, il y a ce truc aussi de me dire, en vieillissant, il va y avoir des trucs où je ne veux pas, à un moment donné de ma vie, faire une crise de la quarantaine parce que je n'ai pas réglé mes problèmes. Ça arrive à tout le monde et je ne vais pas y échapper. Et là, je me dis, en fait, moi, mon truc dans la vie, c'est ça, en fait. C'est cette histoire que je porte et que j'ai cachée et que, superposée à d'autres mini-histoires, d'autres mini-traumas, machin, bidule Et je me dis là, non, il faut que je fasse un truc, il faut que j'aille. je ne sais pas, j'ai ressenti un besoin d'y aller. Et... En fait, je commence à préparer mon voyage au Rwanda et tout, avec un ami qui m'a, depuis notre rencontre avec cet ami-là, il m'a toujours dit « si tu veux au Rwanda, j'aimerais vraiment venir avec toi parce que c'est un pays qui me fascine » . Et avec Cédric, on devient amis très rapidement et je me dis « c'est avec lui qu'il faut que j'y aille » . Et donc, en préparant mon voyage, je me suis dit qu'il fallait que j'aille voir une psy. C'était hyper important pour moi de faire un travail psy avant parce que j'avais trop peur. Je suis un peu contre le fric sur certaines choses. D'accord. J'avais besoin de mettre la ceinture et les bretelles sur mes éventuelles réactions. J'ai une copine, qui était une copine de fac éthiopienne, adoptée dans une famille blanche, mais elle a été adoptée à l'âge de 12 ans.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Ce n'est pas le même parcours.
- Speaker #0
Non,
- Speaker #1
c'est différent. Il y a un moment, on avait 20 ans, elle a pété un gros câble, ça a été très compliqué pour elle. Et en fait, ça m'a fait peur. Et j'ai eu peur de faire la même chose qu'elle, de... décompensé parce que j'avais jamais vraiment fait de travail. Donc, je me suis dit, ok, va voir une psy. Je fais mon voyage. Et en fait, c'est comme ça que, tu vois, j'ai commencé à en parler vraiment. Et pas juste, oui, j'ai t'adopté.
- Speaker #0
Mais je pense que le fait d'avoir voulu retourner au Rwanda aussi, c'est de... C'est comme un nouveau départ. Parce que tu vas, tu dis, ok, j'y ai été, je sais d'où je viens. Et du coup, là, maintenant, je peux parler d'où je viens. Parce que sinon, si tu parles d'un truc que tu connais pas, ça fait bizarre.
- Speaker #1
Exactement. En fait, je pense que c'est la... la trentaine.
- Speaker #0
Ah oui, il y a la trentaine aussi, bien sûr. J'ai fait ça à la trentaine. Après les Big Shop, la trentaine.
- Speaker #1
En fait, c'est ça. Moi, vraiment, j'ai des crises identitaires tous les 10 ans. 12 ans, c'est la première phase de ma vie où ça a basculé vraiment fort. Ensuite, 20 ans, Big Shop. Et ensuite, 30 ans, Voyage au Rwanda. Et vraiment, tous les 10 ans, j'ai des trucs comme ça. Et ce voyage, il a été tellement... Sur le moment, c'était un voyage à Disneyland. Mon pote m'a dit... Je t'ai vu. En fait, j'étais dissociée. parce que je voulais pas décompenser. J'étais tellement en mode, comment dire, faut pas que t'aies d'émotions. Mais ça, c'est l'histoire de ma vie depuis toujours. C'est-à-dire que moi, je pleure quasiment... Avant mon voyage, je pleurais quasiment pas. Avant mon voyage, je pense que la dernière fois que j'avais pleuré, c'était à l'enterrement de mon grand-père en 2012. J'exagère un peu, mais c'est un peu un truc comme ça, tu vois. Et j'ai plein d'amis qui... jamais, jamais vu pleurer. Et c'était hors de question pour moi. Je me suis toujours retenue. Et j'ai vu, Gadfaï en parle et il dit tout le temps que chez les rwandais, il y a ce truc où les gens disent que les larmes coulent à l'intérieur.
- Speaker #0
Ah oui, ça c'est vrai.
- Speaker #1
Et c'est vraiment ce que je ressens. Tu vois, c'est un truc que j'ai toujours ressenti. Genre, les larmes coulent à l'intérieur. Évidemment, il y a des moments de vie où t'es pas bien, mais je sais pas, il y avait ce truc-là où je me retenais vachement. Et pendant mon voyage, j'ai retenu beaucoup, beaucoup, beaucoup parce que j'avais trop peur de décompenser, tu vois. Donc, il y a eu mon voyage. Et en début d'année, janvier 2025, j'ai subi un événement raciste. Avec des potes, on n'a pas pu rentrer dans un club. C'était pour finir une soirée. Ma pote qui faisait son anniversaire y était déjà allée. Elle est noire. Donc, tu sais, quand c'est comme ça, tu te dis, bon, c'est safe, on peut y aller. En fait, on était un groupe de noirs. Et dans mes groupes de potes, c'est vrai qu'on est souvent en minorité quand on est noire. Et on est la caution cool. c'est-à-dire qu'on est des Noirs style des Parisiens. t'as l'impression que, oui, mais vous, c'est pas pareil. En fait, à la fin des fins, on est noirs.
- Speaker #0
La couleur.
- Speaker #1
Exactement. Quand on est un groupe que de noirs, même si on est ces... Parce qu'on est clairement les cautions. Mais bon, quand on est que des noirs, tu vois, cet événement arrive, et là, vraiment, je suis en mode... En fait, pendant deux semaines, tous les matins, je me réveillais en pleurant et je savais pas pourquoi. J'ai pleuré, mais j'ai jamais pleuré autant de toute ma vie. J'étais d'une tristesse et d'une colère. J'ai jamais eu... J'étais en tempête émotionnelle, mais c'était un truc de... Et là,
- Speaker #0
tu ne sais pas pourquoi ? Tu n'arrives pas à connecter dans les médias ?
- Speaker #1
Je n'arrive pas à connecter. Je n'arrive pas. En fait, je sais qu'il y a eu cet événement. Mais je pense qu'avec du recul, tu me rends compte que mon voyage au Rwanda m'a remué de malade mental.
- Speaker #0
Mais tu as gardé.
- Speaker #1
J'ai tout gardé. Cet événement. Et là, cet événement arrive. Et en fait, il s'est passé plein de choses dans ma vie où il y a eu plein de moments où j'ai tout gardé, gardé, gardé. Et là, c'est la goutte d'eau. parce que c'était vraiment une goutte d'eau. J'ai vécu des choses beaucoup plus graves dans ma vie. C'était une goutte d'eau, mais ça a fait déborder le vase. et là j'étais en mode en fait j'en peux plus c'est trop difficile et en fait il y a cet événement, je suis pas bien, je suis au bout de ma vie mais en fait, et ça c'est l'histoire de ma vie je pense que c'est très rwandais la résilience, c'est-à-dire que
- Speaker #0
En fait, cette histoire arrive, j'en parle aux bonnes personnes, je suis très bien accompagnée, et en fait, je me rends compte que, heureusement, il s'est passé ce qui s'est passé, parce qu'aujourd'hui, je crois que ça m'a donné une force de malade. Et là, j'ai l'impression, je ne suis qu'au début, mais j'ai l'impression que je redémarre sur un nouveau cycle. Et je suis en train de reconstruire des trucs, et notre podcast, le fait de pouvoir en parler comme ça, je pense que ça ne vient pas au hasard.
- Speaker #1
Non, je ne le crois pas au hasard.
- Speaker #0
C'est vraiment un moment de ma vie où... Là, ça y est, en fait, je pense que j'ai vraiment compris métaboliser, parce que les choses, je les ai comprises depuis très longtemps. Mais là, je crois que mon corps, je les ai métabolisées et je suis prête à vraiment repartir avec une conscience, avec une vraie détermination, avec un ancrage. J'ai vraiment senti dans mon corps que là, ces dernières semaines, ces derniers mois, il y a un truc qui a cliqué quelque part. Je ne sais pas comment t'expliquer. Mais je me suis connectée à moi-même et c'est tellement agréable. En fait, il y a un truc, au-delà d'un encrage, il y a un truc, je me sens plus légère.
- Speaker #1
Ça a débloqué un niveau. Et là, tu peux te reconnecter à ton identité réelle et avancer avec ça.
- Speaker #0
Complètement. Et je le vois dans mes rapports aux gens. Beaucoup plus facile pour moi aussi de parler à des personnes noires. Là où avant, je me sentais toujours un peu en décalage. J'avais toujours l'impression de ne pas être la bonne noire. il y a un moment quand j'étais blanche, j'étais noire donc j'étais pas comme eux je me suis jamais sentie à ma place et là de plus en plus je suis en mode, vous savez quoi je suis noire mais j'ai pas l'histoire qui va avec ma couleur de peau je suis pas blanche mais j'ai pas l'histoire qui va avec cette couleur de peau là non plus,
- Speaker #1
mais je crois que je commence à être bien là tu commences à trouver une place dans laquelle tu es à l'aise en tout cas au sein de personnes qui te ressemblent et attends là je rebondis par rapport à quand tu retournes au Rwanda, est-ce que quand tu retournes Tu as cette volonté de retrouver ta mère, tes parents, ta famille ?
- Speaker #0
Je sais qu'elle est décédée.
- Speaker #1
Ah oui, donc tu sais déjà à ce moment-là qu'elle est décédée. Donc elle décède à quel moment, si tu sais à peu près ?
- Speaker #0
Peut-être à peu près à la notion d'après ce qu'on sait, parce que je ne parle de rien. On ne sait pas si elle est décédée parce qu'elle était malade à la Vélcida, on ne sait pas si elle a été massacrée. C'est vrai que moi, on m'a toujours dit, je ne sais pas pourquoi, qu'elle était décédée dans le génocide, tu vois. D'accord. Je ne sais pas s'ils l'inventent aussi, mais j'ai l'impression que je l'ai toujours entendu ça, tu vois. au débat Mais en même temps, quand j'en parle à Padilly, il est en mode... Il ne sait pas trop. Lui, pour lui, on ne sait pas.
- Speaker #1
C'est ce qu'on voit encore.
- Speaker #0
Et je retourne au Rwanda. Non, j'étais en mode... Au début.
- Speaker #1
Tu es en mode Ismélan, t'as dit.
- Speaker #0
Au début, complètement. Au début du voyage, j'étais en mode... Non, mais moi, je vais au Rwanda. C'est surtout pour voir. Parce que j'ai besoin de voir. J'ai besoin de sentir l'énergie. Mais à aucun moment, je ne veux connecter avec des gens là-bas. Je ne veux surtout pas... Parce que je me sens encore... Et étrangères. C'est trop compliqué. Plus ça avance, plus ça va, plus ça vient. Puis les rencontres, les gens qui mettent en contact avec des gens. Et là, je suis mise en contact avec un couple. Jean-Marie, qui est rwandais, d'origine rwandaise. Et Morgane, qui est une Française qui vit maintenant au Rwanda. Et qui est mariée à Jean-Marie. Et je suis mise en contact avec eux parce qu'ils ont une agence de voyage. Jean-Marie avait un truc de voyage. Morgane l'a rejoint. Et donc, aujourd'hui, ils s'occupent d'accompagner des gens dans leur voyage. Et comme par hasard, je suis mise en contact avec eux. Par une cliente du salon. et c'est magique parce qu'en fait eux ils ont un en fait ils se sont comportés comme mes grands frères et soeurs là-bas, Jean-Marie je pense a fait un petit transfert sur moi parce qu'il a des frères et soeurs qu'on veut t'adopter en Belgique et ils ont voulu que vraiment je passe le meilleur voyage de toute ma vie, je les remercierai jamais assez, je pense vraiment tout le temps à eux encore aujourd'hui parce que grâce à eux j'ai eu un voyage de malade et en fait tout change une fois que j'arrive sur place parce qu'ils me posent des questions, est-ce que tu veux qu'on aille est-ce que tu sais où tu es née Merci. Est-ce que tu as des contacts ? Est-ce que tu veux retrouver les choses ? Moi, au début, je suis une non-non-non, surtout pas. Je ne suis pas connectée parce que je ne veux rien sentir, en fait. Là, ce voyage-là, je le fais, mais je veux vraiment être... Voilà, je veux voir, mais je ne veux pas ressentir. Et puis, en fait, tu es là et tu ressens. Donc là, les choses commencent à changer. Et en fait, la seule chose que j'ai faite, c'est que je suis allée quand même dans le village où je suis née. Et c'est vrai qu'à ce moment-là, c'est le seul moment du voyage où... parce que j'ai rien senti,
- Speaker #1
vraiment pendant mon voyage rien du tout mais t'as rien senti parce que tu ne l'as pas voulu ouais je ne l'ai pas voulu,
- Speaker #0
il y a un truc qui m'a marqué c'était je sais pas pourquoi, la lumière la lumière, la terre, la terre rouge la lumière un peu sombre qui arrive très vite et je sais pas c'est une sensation qui m'a fait je disais à mon pote, je sais pas comment t'expliquer c'est un truc que je connaissais et qui était un peu comme effrayant c'était un cri et rassurant Je sais pas pourquoi j'ai ressenti un truc... Mais ça s'explique, tu vois, je pense que... Et ça, c'est un truc que mon corps connaissait et avait intégré d'une manière rassurante et effrayante. C'était le seul truc. Le reste, j'étais en mode, oula, toute la vie, quoi. Vraiment.
- Speaker #1
Touriste,
- Speaker #0
en fait. Et là, quand on va dans le village, à Rutongo, la petite ville-village, il y a Jean-Marie qui me raconte des trucs, qui me raconte un peu sa vie, comment, lui, dans sa famille, les gens ont été tués, comment... Là, il y a un peu d'émotion quand même. On est dans le 4x4 de Jean-Marie. Cédric et moi, on ne se regarde pas. On regarde la route. Et là, il y a un truc très bizarre un peu. Tu sais, genre en mode beaucoup de lourdeur. Cédric, je sens qu'il est très dans l'émotion. Vraiment, il ne se retient pas pleurer. Et moi, je suis dans le contrôle. Contrôle, contrôle, contrôle. Il ne faut pas que je ressente. Il ne faut pas que... Et Cédric, il est dans le... Il ne faut pas que je pleure. Il ne faut pas que je pleure. Et Jean-Marie qui est là. ouais donc waouh en fait mes soeurs elles ont été retrouvées mortes et là t'es en mode waouh c'est violent atroce. Et en fait, on est tous les trois dans trois moods complètement différents. Dans ce 4x4, il faisait à peu près cette... Tu vois, là, en ce moment même, on est chez moi et on voit que la nuit commence à tomber. C'était cette ambiance. Et c'était très lourd. Et en même temps, je sais pas pourquoi, je sais pas comment t'expliquer, c'était beau quand même. Et là, c'est quand même un moment dans mon voyage un peu... Mais là, ça vacille un peu, tu vois. Et après, on rentre et Jean-Marie, exceptionnelle, tu vois, qui me dit, si jamais t'as besoin, moi, j'ai des contacts. si tu veux retrouver des choses peut-être que ta mère elle est pas vraiment morte peut-être, et là je suis en mode,
- Speaker #1
oulala on va pas aller sur le terrain là je suis pas prête donc du coup, non,
- Speaker #0
pas encore vraiment je suis pas prête à retrouver des gens de ma famille à ce moment là et même encore aujourd'hui parce que je me suis tellement construite en fait j'aurais peur de pas ressentir de choses parce que comme, tu vois si demain je rencontrais j'ai une demi-sœur aussi biologique Merci. Moi, je ne les ai pas connues, mais eux, ils m'ont connue. Tu vois ce que je veux dire ? D'accord. Et je me dis, si demain, on se retrouve, moi, je sais que je serai certainement la personne qui n'aura pas d'émotions parce que je ne les connais pas. Et eux, elles auront des souvenirs de moi, là où moi, je n'ai rien d'eux, en fait. Et ça va créer un décalage. Et ça, je crois que ça pourrait me faire beaucoup de mal parce que je serai en mode, en fait, ça reste des inconnus pour moi, mais ce n'est pas des inconnus. Et c'est trop bizarre comme... intellectuellement, je ne sais pas si j'arriverai à gérer.
- Speaker #1
Tu verras, chaque chose a son temps. Visiblement, tu prends ton temps. Il y a différentes étapes que tu es en train de passer, des niveaux que tu débloques petit à petit. Ça va se faire avec le temps, j'en suis certaine. Ça me rappelle quelque chose, souvent on entend dans les émissions ou dans les choses qu'on peut écouter sur les personnes adoptées, on a souvent un dossier où tu as tout qui est répertorié dans un dossier. Le nom de tes parents, où tu es née, etc. Est-ce que tu as ça aussi ?
- Speaker #0
Alors ouais. Et c'est drôle parce qu'en fait, ce fameux dossier, j'ai commencé à m'y intéresser après le Covid. J'ai regardé un documentaire. Jamais auparavant tu t'es... Non, le dossier, il était à la maison, dans une armoire, à laquelle j'ai maxé. Et je n'ai jamais voulu l'ouvrir, mon pochette violette. Et en fait, il y a un documentaire sur Olivier de Roustan, le mec de Balmain, qui sort. Et en fait, on voit tout. Lui a été adopté aussi.
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
Il vient du Bénin, je crois, un truc comme ça.
- Speaker #1
Je ne sais plus, mais...
- Speaker #0
Il a été adopté et... Non, enfin, non. lui c'est une pupille d'état je crois il croit que sa mère est d'origine il a un dossier et il veut y avoir accès donc il appelle la ZE je sais pas le truc l'association le premier truc sur lequel il arrive à remonter tu vois et je me dis bah si moi je vais faire pareil ça m'a donné un exemple de en fait où je pouvais commencer et là en fait donc j'ai ce petit dossier violet que j'ai là mais y'a pas grand chose y'a trois feuilles je me dis non mais c'est pas possible il peut pas y avoir que ça tu vois Et en fait, donc là, je remonte, je trouve un numéro d'une asso en Bretagne. C'est là où on est arrivé avec les enfants, quand on est arrivé, qu'on était enfant. OK, j'appelle, je tombe sur une personne absolument géniale, hyper sympa, qui me dit « Ouais, mais nous, on a repris le truc. Donnez-moi votre nom, votre prénom, à quel âge, enfin, quelle année ça s'est passé, tout ça. » Et elle me pose deux, trois questions. Puis on se rend compte qu'en fait, elle n'a pas plus de choses que ce que moi, j'ai. Donc, je me rends compte qu'en fait, mon dossier est vide. Et c'est vrai qu'au fond de moi, si je suis complètement honnête, j'aurais adoré avoir une... L'être, avoir une photo, avoir un truc, mettre un visage sur ma mère biologique. C'est grave. J'aurais adoré.
- Speaker #1
Ça, c'est dingue. Pas de photo, t'as rien.
- Speaker #0
J'ai rien. C'est vrai que depuis que je suis toute petite, je me suis toujours imaginée. Quand j'étais petite et que je voyais des femmes noires dans la rue ou des hommes noirs dans la rue, je me disais que j'aimerais trop que ma mère ressemble à ça. J'aimerais trop que mon père ait les souples.
- Speaker #1
Oui, l'identification, c'est important. Mais comment tu as fait en étant ici ? Est-ce que tu as eu d'autres personnes noires sur qui tu pouvais t'identifier ? Comme tu disais, tu as grandi au Nord. Oui, j'ai vu le modèle.
- Speaker #0
les premiers c'est quand j'ai fait du hip hop dans une asso à Beauveuge secteur 7 ça a changé ma life parce que j'ai rencontré la soeur de Valérie elle a fait de la danse avec moi mais un peu sur le tard et c'est drôle parce qu'il y a pas très longtemps elle m'a envoyé un message parce qu'elle voyait mes posts et mes publications et elle m'a envoyé un super beau message qui m'a trop émue pour me féliciter de la femme que j'étais devenue parce qu'elle voyait mes posts elle me dit je me souviens de l'ado que tu étais de la haine et de la détestation de toi-même qui me faisait mal au cœur. Parce qu'elle me disait, moi, j'étais dans mes combats d'afroféminisme, etc. Et toi, t'étais à un moment de ta vie où t'étais pas du tout là. Et ça lui faisait mal au cœur de me voir comme ça, parce que elle sentait que elle voulait m'apporter des choses, mais elle pouvait pas parce que j'étais pas dans un moment de réflexion. Mais mine de rien, ça a quand même fait un truc, un travail. Et c'est vrai que Valérie a été la première femme noire à laquelle je me suis identifiée, parce que je la trouvais belle. elle avait ses cheveux afro-naturels et elle était pour moi du haut de mes 14 ans je me disais c'est comme ça que je veux être à la l'air libre et en fait je ne lui avais jamais dit avant qu'on se parle là mais ça a été vraiment la première personne où je me suis dit en fait je crois que ça peut être cool d'être une femme noire c'est
- Speaker #1
marrant de dire ça comme ça c'est cool d'être une femme noire ouais ouais et comment tu parviens aujourd'hui à concilier ton histoire d'adoption et ton identité culturelle comment tu arrives à allier les deux Merci. finalement ?
- Speaker #0
En fait, je pense que ce qui m'aide, c'est toutes ces personnes que je l'ai rencontrées. Déjà, Adèle et ma grand-mère. Elles m'ont tellement toujours là-dessus empouvoirée, sans même s'en rendre compte, je pense. Puis après, il y a eu mes premières amies noires. En fait, à la fin...
- Speaker #1
Ces deux univers arrivent à se connecter à un moment donné.
- Speaker #0
Maintenant, ça se connecte par la musique. par les documentaires, par les lectures. En fait, il y a eu un travail de fond qui était là, que j'entendais, mais que je ne métabolisais pas. Et aujourd'hui, c'est vraiment le terme métaboliser, je métabolise tout. Et ça fait un joyeux mélange. Et aujourd'hui, je suis Clémence, j'ai été adoptée, je suis originaire du Rwanda, j'ai vu ce que c'était, j'ai rencontré des gens, on a parlé, ils m'ont fait comprendre que j'étais l'une des leurs. Et en fait, c'était ouf de se dire que j'appartiens à un peuple, en fait. Mais pour autant, je suis très française. Et en fait, mon identité, c'est d'être une française d'origine rwandaise. Maintenant, c'est dans ma tête, dans mon corps, c'est là.
- Speaker #1
Ouais, c'est cristallisé. Tu sais vraiment comment tu peux te présenter au lieu des autres, en fait.
- Speaker #0
Et après les lectures et tout ça, heureusement qu'il y a toutes les ressources, tu vois. Parce que ça, ça me permet vraiment Instagram. Merci, Antoine.
- Speaker #1
Vraiment. Ça permet des connexions.
- Speaker #0
Exactement. Notre discussion aujourd'hui.
- Speaker #1
Complètement.
- Speaker #0
Aujourd'hui, j'ai l'impression que les choses viennent à moi parce que je suis en mesure de les recevoir.
- Speaker #1
Oui, tu es alliée. L'univers t'envoie tout ce dont tu as besoin alors qu'avant, tu n'étais pas réceptive, donc tu ne pouvais rien recevoir. Je ne pouvais pas le voir. C'est incroyable. Et tu dis que ta relation avec tes parents est juste chaotique.
- Speaker #0
Inexistante.
- Speaker #1
Et aujourd'hui, est-ce que tu aurais envie de leur dire des choses ? Qu'est-ce qu'ils auraient fait ? pour que ta vie soit un peu plus apaisée ? Sachant que tu as dit que dès le début, c'était la cata. Oui,
- Speaker #0
c'est ça. Je pense que...
- Speaker #1
Ou même aujourd'hui, est-ce qu'il y a des choses que tu penses qu'ils pourraient faire qui feraient que votre relation prenne un nouveau tournant ?
- Speaker #0
Non, je ne pense pas. Parce que moi, je pense vraiment que c'est la meilleure chose qui me soit arrivée.
- Speaker #1
Oui, carrément ! Ok !
- Speaker #0
C'est vraiment, tu vois, dans ma vie, il y a eu plusieurs moments où j'ai eu la sensation qu'on me donnait de l'air. Et la première fois où j'ai ressenti ça, c'est quand j'ai pu parler, quand vraiment il n'était plus dans ma vie. Et la première fois où j'ai vraiment respiré, c'était un coup de fil de ma mère adoptive. Je vais passer mes épreuves des, comment on appelle ça à la fac ? Des partiels. Je suis en première ou deuxième année de fac. Première année de fac, je passe mes partiels. Non, deuxième année. Et en fait, je reçois ce coup de fil de ma mère biologique qui me dit, « Clémence, là, en gros, t'es plus sous le régime de l'assurance maladie. En gros, c'était le dernier truc qui nous liait. » Et elle avait fait tous les papiers pour plus qu'il n'y ait rien entre nous.
- Speaker #1
Ah ouais, là,
- Speaker #0
c'était le dernier truc. Et elle me dit, ce truc du style, « Maintenant, tu te débrouilles, tu verras avec ta grand-mère. » C'est genre, maintenant, en fait. Et en fait, elle me dit ça. Et d'un côté, c'est terrible parce que là, je me retrouve vraiment livrée à moi-même. En même temps, j'ai ma grand-mère, donc je sais que je suis en sécurité. Et en même temps, je suis en mode, je vais passer mes partiels. Donc, elle me dit ça vraiment, je vais prendre le métro pour passer mes partiels. Et je crois que c'est une des premières fois dans ma vie où j'ai ressenti un truc, mais genre, waouh, oh là là, la respiration.
- Speaker #1
Ah ouais, carrément.
- Speaker #0
Ah ouais. Elle t'a libérée, là, t'as débarrassée. Elle m'a libérée de... J'avais un poids sur le dos, là, et elle m'a déchargée. Vraiment. C'est dingue. Ah ouais, c'est ouf.
- Speaker #1
Mais c'est bien, au moins, elle t'a prévenu parce qu'elle aurait pu ne rien te dire.
- Speaker #0
Ouais, ouais, ouais. Mais je pense qu'elle l'a fait pour me faire mal au cœur et pour la connaissant par rapport à tout ce que...
- Speaker #1
En fait,
- Speaker #0
je pense que ce qu'elle aurait voulu, c'est que je pleure et que je sois en mode non, s'il te plaît, en fait, je suis désolée. Non, en fait. Moi, j'attendais que ça.
- Speaker #1
C'est toxique un peu comme comportement.
- Speaker #0
Ah mais c'était... en fait, et ça c'est un petit exemple de elle a fait des teint gris mais quand j'y pense moi je me dis mais s'il vient... Demain, si je vois ça à côté de moi, si je vois une femme qui agit comme ça avec sa fille, je la signale direct. À direct.
- Speaker #1
L'altraitance, du coup.
- Speaker #0
En fait, Adèle, elle m'a toujours dit ça. C'est de la maltraitance. Et les psys à qui j'en ai parlé m'ont dit c'est de la maltraitance. Et c'est vrai que je voulais pas mettre ce mot-là parce que pour moi, la maltraitance, j'ai jamais été frappée. Par contre, c'est vrai que psychologiquement, elle faisait des trucs de ouf. Ah ouais ? Ah ouais, ouais.
- Speaker #1
Mais du style, t'as pas un exemple ?
- Speaker #0
Exemple ? Je sais pas pour quelle raison. En fait, tu vois, des fois, je devais sûrement faire un truc qui ne lui plaisait pas. Mais j'étais vraiment cette enfant tellement docile, c'est le terme. J'étais un petit toutou, parce que j'avais peur qu'on m'a toujours dit que j'étais pas vraiment adoptée, j'étais adoptée de façon... T'as l'adoption plénière et l'adoption... Je sais plus comment ça s'appelle. Moi, j'ai pas été adoptée de façon plénière. Donc en gros, jusqu'à mes 21 ans ou 18 ans, si quelqu'un de ma famille biologique disait il faut qu'elle revienne, je pouvais revenir mes parents me mettaient la pression par rapport à ça ça c'est vrai qu'ils le faisaient vraiment en cachette avec des petites phrases du style, tu sais genre souviens-toi quand même que là en vrai à tout moment tu peux repartir en Rwanda ça va pas être la même vie on faisait bien comprendre ça et donc du coup j'ai toujours été extrêmement docile enfin vraiment jusqu'à...
- Speaker #1
t'avais peur ?
- Speaker #0
j'avais super peur et je savais que ma grand-mère n'aurait rien pu faire par rapport à ça donc du coup j'avais hyper peur Merci. Donc, j'étais hyper sage. Et je ne sais pas pourquoi, il y a des moments où, d'un coup, je sentais ma mère qui me prenait comme ça. Et elle m'enfermait à la cave, dans le noir. Et ça durait hyper longtemps. Dans la salle de bain, dans le noir. Et ça durait hyper longtemps. Et une fois, j'ai le souvenir d'un truc. Ça a fait ce qu'il y a allé,
- Speaker #1
madame.
- Speaker #0
Oui, oui, oui. Et un jour, ma grand-mère ne m'a jamais signalé, parce qu'en fait, comme elle me prenait beaucoup, je pense que c'est pour ça qu'elle n'a pas signalé, comme elle me prenait beaucoup, elle savait que si elle s'y allait, peut-être qu'elle ne m'aurait pas, puisque je n'étais pas adoptée de façon plénière. Donc je pense que ma grand-mère son mode d'action C'était de me prendre un maximum avec elle Pour pas juste avec ma mère Et j'ai ce souvenir de Adèle qui est derrière la porte de la cave Qui pleure, qui pleure, qui pleure Ma grand-mère qui engueule ma mère Pour lui dire de me faire sortir de là Et moi qui pleure et qui ai peur Parce qu'en fait en plus il y a les escaliers, j'ai peur de tomber Je suis dans le noir, j'ai trop peur Aujourd'hui je sais pas dormir dans le noir C'est horrible Et une fois il y a un truc qu'elle m'a fait Et ça c'était le pire truc qu'il m'a fait Mais j'ai vraiment eu mon coeur, j'ai cru que j'allais mourir Merci. Je suis petite, je suis à l'école maternelle. Ma sœur, elle ne va pas encore à l'école, donc vraiment, je suis petite. Je dois avoir 4 ans, 5 ans. Et en fait, moi, je suis très lente. J'aime bien avoir le temps. Quand j'étais petite, je suis dans la lune, tout le temps dans la lune. Vraiment, je suis cette enfant dans la lune. Et en fait, je ne vais pas assez vite. Et je ne sais pas, elle pète un câble. Et là, elle commence à faire genre, elle fait comme si. Elle devait m'emmener à l'école et on est en retard. et en fait elle fait comme si Elle m'enferme à la maison, elle ferme la grille, la porte, elle ferme tout à clé, et elle part. Elle fait comme si elle me laissait à la maison, toute seule. Et là, je me sens abandonnée. Je pleure, je pleure, je pleure, je ne sais pas combien de temps ça dure. Dans ma tête, ça dure une éternité. Et finalement, elle revient pour m'emmener à l'école. Je pense que dans cette tête, elle se dit qu'il faut que je m'emmène à l'école. Je ne sais pas ce qui se passe. Mais en tout cas, ce moment-là, je me suis dit ça y est, je vais mourir. Je pense que dans ma tête d'enfant, je suis en mode c'est déjà arrivé une fois C'est la deuxième fois. Là, c'est fini, en fait. Là, c'est mort. Tu vois, là, c'est sûr, je vais mourir. Et en fait, ça, c'est le truc qui a été le plus difficile, quand même. C'est vraiment l'événement le plus... Je ne sais pas pourquoi.
- Speaker #1
Oui, c'est un marqué, c'est sûr.
- Speaker #0
Elle m'a enfermée à la cave, à la salle de bain. J'avais peur, mais je savais que de toute façon... Mais là, à ce moment-là, je ne sais pas pourquoi, vu que j'ai vu la voiture partir, parvenir, et j'étais en mode, ça y est, c'est fini. elle revient après pour te rechercher pour m'emmener à l'école on gueule Elle ne m'a pas oublié parce que j'étais derrière la porte. Elle a fermé et elle m'a laissé exprès. Genre en mode, c'est bon, tu es trop lente. Genre elle m'a laissé. Et moi, j'étais derrière la porte en train de pleurer. Elle ferme la porte, elle ferme la grille, ferme-toi, prend la voiture, elle prend ma soeur.
- Speaker #1
Mais attends, si tu sens que ça ne marche pas avec l'enfant que tu as adopté, Est-ce qu'il n'y a pas une façon de... de la remettre dans une maison d'orphelinat ? Moi,
- Speaker #0
je suis contente qu'elle n'ait pas fait des trucs comme ça parce que vu que j'étais toujours fourrée chez ma grand-mère, en fait, l'avantage, c'est que moi, ma chance, ça a été d'avoir cette grand-mère. Pendant les vacances, ma grand-mère me prenait. Elle me prenait moi tout le temps. Ma soeur, elle voulait moins. Ma soeur, elle était bien avec mes parents. C'était leur preneur en forme de logique. Elle a été choyée. Moi, je n'ai pas eu ça. Et ma grand-mère, je ne sais pas comment ça se passait dans le monde des adultes, mais moi, ce que je ressentais, c'est que ma soeur, elle était bien avec mes parents, donc elle ne partait pas forcément en vacances. Moi, par contre, je partais avec ma grand-mère, et ma grand-mère me disait, il faut quand même que quand on part en vacances, appelle tes parents quand même, appelle-la pour donner des nouvelles. Moi, j'étais en mode, mais... Moi, je me mets là, je suis en vacances de ma vie. Donc,
- Speaker #1
quand je lui ai appris en chalet,
- Speaker #0
je lui ai appris, tu vois.
- Speaker #1
Et du coup, la relation avec tes frères, c'est quoi, tes deux frères ?
- Speaker #0
Alors j'ai... une petite sœur qui a trois ans de moins que moi avec qui je m'entends bien. Elle a un petit garçon, mon neveu, que j'adore. Donc, on a plutôt une bonne relation. Elle vit à Lille, donc on ne se voit pas tout le temps, mais on s'entend bien. Après, ma mère a toujours divisé pour mieux régner. Donc, malheureusement, je pense qu'on n'a pas les liens qu'on aurait pu développer. Puis après, j'ai deux petits frères et sœurs qui sont arrivés bien plus tard. Et eux, en fait, je n'ai plus trop de lien avec eux parce que quand je suis partie de la maison, ben eux en fait ils étaient encore petits Je me suis vraiment beaucoup, beaucoup occupée d'eux quand ils étaient bébés. Parce que je pense que ma mère se disait, c'est ma nounou gratuite. Et je suis passée à côté d'une partie de ma préadolescence, adolescence, à cause de ça. Et je pense que c'est une des raisons pour lesquelles aujourd'hui, je ne me vois pas avoir des enfants parce que je me suis occupée d'enfants.
- Speaker #1
Justement, c'est la question que j'avais posée sur la parentalité. Comment tu te vois ?
- Speaker #0
C'est compliqué parce que j'ai tellement sacrifié une partie de ma vie à l'âge où je ne devais pas le faire pour m'occuper d'enfants qui n'étaient pas les miens. Aujourd'hui, j'ai envie de kiffer. Parce que je kiffe aujourd'hui. Et aussi parce que c'est compliqué. Je ne sais pas si je serais une bonne maman avec tout ce que j'ai reçu. Je ne sais pas si... Je pense être une bonne tata. Mais en tant que maman, je suis encore un peu fucked up. Je pense que tout le monde l'est. C'est juste que j'en suis tellement consciente.
- Speaker #1
On l'est tous à des niveaux différents par rapport à l'histoire qu'on a eue.
- Speaker #0
C'est vrai que... en fait Je sais que si ça arrive parce que je rencontre potentiellement le père de mes enfants, peut-être que je le saurais et je me dirais « vas-y, let's go » . Mais il y a plein de choses qui font que, comme beaucoup de gens, mais dans l'idée comme ça, ce n'est pas une envie, ce n'est pas un…
- Speaker #1
Tu n'as pas un besoin de transmettre quelque chose ? Non,
- Speaker #0
non. Mais une veuille de nièce, ça me ferait trop plaisir, mais en tant que parent, vu la responsabilité que c'est d'être parent, et vu comment moi ça m'a… Parce que tu vois, il y a plein de trucs sur lesquels je suis extrêmement contente de mon histoire et ça me permet d'être aujourd'hui. quelqu'un finalement d'assez costaud. Aujourd'hui, je pense que j'ai... Je ne sais pas toi par rapport à ton histoire, mais en fait, le fait d'avoir conscience de cette histoire aussi, quand on remonte au Rwanda, on a échappé à un truc de dingue. Et c'est vrai qu'aujourd'hui, il n'y a pas un jour depuis que je suis toute petite où je me dis, putain, mais en fait, trop cool la vie, quoi. Tu te réveilles. En plus, je suis plutôt en bonne santé et tout. Donc, je me dis, en fait, la force que j'ai. Avant, je me mettais un poids par rapport à ça. mais aujourd'hui je vois vraiment ça comme une chance vous voyez voir mais c'est juste que Je ne sais pas si j'arriverais à vraiment être assez solide pour être une maman. Moi, on m'a trop brisée.
- Speaker #1
Ouais, franchement, t'as... Et donc,
- Speaker #0
je ne sais pas si j'arriverais à être assez solide. Parce que je vois bien ce que ça peut faire, la parentalité. Des fois, ça rend des femmes plus fortes. Mais des fois, ça vient un peu de l'indécis endroit. Et c'est vrai que comme ça, parce que je n'ai pas rencontré le père de mes enfants, c'est certainement pour ça aussi.
- Speaker #1
du coup je suis en mode là comme ça toute seule je suis en mode non j'y arriverai pas c'est bien déjà que tu le dises peut-être c'est en rencontrant la personne que ça ira c'est ça qui peut faire changer bon bah les hommes qui écoutent je commence une livre enfin je vais prendre tes livres si jamais vous voulez elle est là en tout cas elle est disponible mais sinon ouais pour te répondre au sujet de la parentalité et surtout au revoir Pour moi, quelles sont mes motivations ? D'autant plus qu'en vrai, dans un tel monde, c'est déjà, je dirais, oui, de rencontrer l'homme avec lequel j'allais décider consciemment ou non de lier nos histoires et d'avoir une vision commune ainsi que, je dirais, les mêmes valeurs. Et ensuite, en ayant des enfants et en créant la vie, il y avait aussi cette idée de passer le flambeau et pour être honnête avec toi, mon but était de donner une autre destinée à ce pays. plus largement à ce continent. Après, personnellement, je connais trop bien la transmission des peurs, notamment à travers nos parents. paroles, tu sais, les repas entre amis, etc. Et moi, personnellement, je n'ai plus envie, en fait, que les générations futures soient driveées par la peur. L'idée est de créer une autre génération d'Africains qui auront une autre volonté de bâtir un peuple souverain, fier, tu sais, instruit, ingénieux, créatif et courageux. Tu vois, des qualités, en fait, qu'on a déjà, qui sont déjà en nous. Mais voilà, cette génération doit vraiment suivre ses propres codes communautaires et par-dessus tout même, je dirais, de l'être humain. Parce qu'en vrai, ce génocide et les choses que moi j'ai vues, que certains même ont pu voir à travers les médias, les films, c'était horrible. Enfin, un même peuple qui se déchire cruellement comme s'il était dissocié de lui-même et de sa posture d'humain de Bantu. Il faut absolument rompre avec ça et donc transmettre une autre vision et la seule façon de perpétuer une telle idéologie et de créer la vie en réalité, c'est d'avoir des enfants et de leur transmettre ça avec les clés qui vont avec. Et donc éviter qu'un tel drame comme on a pu voir, se reproduise. C'est ça ma volonté.
- Speaker #0
Moi j'adore ce genre d'histoire parce que ça me permet aussi de me raconter l'histoire différemment. et ce que tu racontes ça fait, en plus par rapport à ce qu'on m'a dit quand j'étais au Rwanda, par rapport à la façon dont les gens ont l'air d'être pour la suite des choses ça ressemble vachement à leur discours en fait la vie doit continuer et la seule façon pour que la vie continue c'est qu'il y ait d'autres enfants parce que si ça s'arrête à nous,
- Speaker #1
ça s'arrête à nous on ferme le rideau et voilà exactement Le film ne peut pas s'arrêter comme ça. Il ne peut pas juste s'arrêter sur un génocide à 94 et terminer. Je pense que c'est ce que nos parents ont fait en fuyant et en arrivant en Europe. C'est continuer à vivre et essayer d'avancer et de transmettre ce qu'ils peuvent, en tout cas à leur niveau. Et Jo, tu penses quoi de l'adoption transraciale ?
- Speaker #0
J'en pensais... Quand j'étais plus jeune, j'étais en mode... Ah, mais c'est super ! En fait, moi, ça m'a sauvé la vie. Et en fait, vu que mes parents, je pense que j'ai été matrixée pendant très longtemps par ce discours un peu collant, tu vois, de « on lui a sauvé la vie » , tu vois. Ma grand-mère n'avait pas ce discours. Ma grand-mère, elle était en mode…
- Speaker #1
Mais cette grand-mère, elle est géniale. Mais la grand-mère, c'est la mère de ta mère ?
- Speaker #0
Ma grand-mère, je l'ai tout le temps entendue dire « c'est vrai qu'elle a de la chance de nous avoir, mais avant tout, on a de la chance de l'avoir » . Ma grand-mère, elle a toujours parlé comme ça, tu vois. Et ça, je pense que je l'entendais en fond. Et ça m'a fait un bien de fou, parce que le discours de mes parents, c'était plus, d'abord, elle a de la chance de nous avoir. Et puis, quand elle est sympa, enfin, quand on l'a trop sympa, nous aussi, on a de la chance. Mais avant tout, on lui a quand même sauvé la vie, tu vois. Donc, au début, j'ai été un peu matrixée par un truc de « c'est génial, ça sauve la vie des gens, c'est super, c'est machin » . Puis, j'ai commencé à grandir, à vieillir, à voir ça d'une manière moins cool, parce que j'ai commencé à sentir que ce n'était pas si cool. J'ai lu « Abandoned Gay » , j'ai lu des trucs comme ça et je me suis dit… Ah ouais, en fait, c'est un dos, c'est l'adoption transraciale, tu vois, internationale. Et en fait, aujourd'hui, je suis très... Un peu, 50% c'est bien, 50% c'est pas bien. Je pense que ça doit être fait d'une manière en pleine conscience. En fait, aujourd'hui, j'ai vraiment conscience que quand tu adoptes quelqu'un, encore plus quand c'est quelqu'un qui vient d'un autre pays, qui a une autre couleur de peau, il y a tout ça à mettre en... En fait, il faut que tu aies conscience que... C'est vraiment cette image de tu prends un arbre qui pousse dans une région du monde qui est complètement différente, avec un climat différent. Tu le déracines, tu le mets sur une autre terre. À tout moment, cet arbre meurt parce qu'en fait, il n'a pas le bon temps.
- Speaker #1
Exactement. C'est une belle image.
- Speaker #0
Et c'est vraiment... Aujourd'hui, je le vois comme ça. Je le vois vraiment comme ça. Par contre, il se peut que cet arbre, alors même qu'il n'est pas sur son terrain, il se peut qu'il pousse super bien parce qu'il va avoir les nutriments qu'il faut. Parce que la terre sur laquelle on va le mettre sera la bonne terre quand même.
- Speaker #1
En tout cas, qu'elle sera préparée pour recevoir ses racines.
- Speaker #0
Je pense qu'il y a un côté loterie. Je pense qu'il y a un côté hasard de tomber dans une famille qui sera vraiment consciente de l'histoire du pays, de l'histoire du monde, de la colonisation, des rapports, de l'intersectionnalité, des intersectionnalités. Si tu tombes sur une famille comme ça, il y aura toujours des bugs parce qu'être parent, c'est faire des problèmes. Mais c'est normal, c'est la vie, on est humain. Mais je pense que si les parents sont dans un truc comme ça, ça peut très bien se passer. Comme dans une famille, des rapports de parents biologiques en forme biologique, on choisit pas sa famille et des fois, ça matche pas. C'est triste, mais moi, dans mon histoire, c'est triste, ça a pas marché, mais honnêtement, je suis tellement contente d'avoir l'histoire que j'ai, d'avoir Adèle, d'avoir ma grand-mère, d'avoir ma sœur, mon oncle que j'adore. Enfin, tu vois, aujourd'hui, j'ai la vie que je rêvais d'avoir quand j'étais petite et que j'étais enfermée dans ma chambre et que je pensais à me dire, quand je serai grande, je serai coiffeuse. Quand je serai grande, je pourrai faire ce que je veux. Je serai libre, je serai indépendante. Donc, en fait, mine de rien, il y a plein de plans de ma vie que je veux améliorer. Je veux gagner de l'argent, je veux être là. La tantriche, cool ! Je garde ça en tête. Mais en fait, au final, je deviens celle que je voulais être et celle que je ne pensais pas que ça allait être comme ça. Parce que j'avais vraiment l'impression que j'étais tellement mal à ce moment-là que je me disais que c'est ce que je projette, c'est mon rêve. Mais ça n'arrivera sûrement pas. Parce que peut-être qu'avant ça, je... Il y a vraiment des moments où j'ai voulu mourir. Et en fait, aujourd'hui, je suis en mode non. Je suis trop contente que...
- Speaker #1
Que tu sois là, que tu sois en vie. Et que tu sois là à partager ton histoire avec moi. Et là, tu disais... Attends, tu parlais de quoi déjà ? On parlait de... Excuse-moi. On parlait de... Oui, de transracial. Et est-ce que tu connais des gens ? Alors, est-ce que tu connais des gens qui ont été adoptés et pour eux, ça se passe très bien ? Est-ce qu'il y a un groupe de personnes adoptées qui se réunit, qui parle un peu de leurs expériences ou est-ce que tu as déjà participé à ce type de groupe ?
- Speaker #0
Je n'ai jamais participé à ce type de groupe. J'ai eu l'opportunité avant mon voyage au Rwanda, comme par hasard, peu de temps avant mon voyage, je suis en soirée, un gars vient me voir et il me demande si je ne suis pas rwandaise ou bourrondaise. Et il me dit, ouais... Alors, là, on parle. Et en fait, là, très rapidement, il me dit que j'ai une tête de tout de suite. Là, je prends un peu peur. Je me dis, mais qu'est-ce qu'il me veut ? Si on parle, il me dit, non, mais le prend pas mal. C'est juste qu'en fait, je rencontre tellement peu de rwandais en France que quand je les reconnais, ben en fait, je vais leur parler. Et là, lui me raconte un peu son histoire. Et je sens qu'il peut m'intégrer à des groupes, mais je me sens pas. Donc,
- Speaker #1
rwandais-borondais aussi ou pas du tout ?
- Speaker #0
Rwandais... Je sais pas.
- Speaker #1
OK, d'accord.
- Speaker #0
Il a été adopté par sa tante, je crois. Il vit à Paris. On s'est vus une fois pour en parler, mais moi, je n'étais pas...
- Speaker #1
Tu n'étais pas prête ?
- Speaker #0
Non, je n'étais pas prête.
- Speaker #1
Et donc, du coup, tu as... Et donc,
- Speaker #0
c'est vrai que je n'ai pas... On reste en contact sur Insta, tu vois, on se suit, mais on ne se parle jamais. Et je crois que ces groupes-là, pour l'instant, si ça se fait parce que je rencontre des gens, oui, let's go. Mais c'est vrai que dans mon... Je n'ai pas de gens autour de moi. Dans ton cheminement,
- Speaker #1
tu n'es pas encore prête.
- Speaker #0
Sur Insta, j'en vois. Il y a Camille au Mont Carmel, qui est une fille que je suis, que j'adore. Elle en parle beaucoup. Et elle, c'est ma notion, s'est bien passée. Il y a des gens comme ça sur Insta où je vois des histoires qui te passent bien et je suis trop contente. Parce que voilà. La loterie. Des fois, ça passe bien.
- Speaker #1
C'est la loterie, comme tu disais. Du coup, tu conseilles un peu aux parents qui veulent adopter d'être préparés. Ah oui. ils veulent adopter.
- Speaker #0
Quand j'en parlais il n'y a pas très longtemps avec une cliente, je lui ai dit que c'est vraiment pas facile et qu'il faut être prêt. Je lui ai dit que je ne parle plus à mes parents adoptifs. Ce n'est pas toujours comme ça, il y a des belles histoires. Il faut savoir que c'est extrêmement compliqué de créer du lien.
- Speaker #1
Durant toute ton enfance, est-ce qu'il y a eu des moments où ils ont parlé de l'histoire du Rwanda ? Est-ce qu'on t'en parle ? Est-ce qu'il y a une histoire un peu politique de ce qui se passe ? Est-ce qu'on t'explique le conflit ?
- Speaker #0
On m'explique un peu. On m'explique un peu les O'Toole et tout de suite. On m'en parle un peu. Mais alors, pour le coup, je crois que là, c'est moi. J'ai été hyper fermée. Je ne voulais pas qu'on m'en parle. En fait, je ne voulais tellement pas qu'on me ramène au fait que j'étais adoptée, que j'étais différente. Cette différence, en fait, tu vois, j'avais... plein de moments comme ça, où quand on était à table, on était bien, on passait des moments en famille. C'est un moment où je sens que tout le monde va bien, mes parents sont pas trop fous à ce moment-là, ma mère ne m'embête pas trop, je sais pas, il y a un truc qui est bien, on n'aura pas de famille et tout ça. Et là, d'un coup d'un seul, je commence à réaliser que je suis la seule noire. Et là, d'un coup d'un seul, paf ! Mais je le montre pas, tu vois. Et en fait, j'avais des moments comme ça, j'en ai eu tout le temps, Donc en fait, j'avais tellement déjà moi, à l'intérieur de moi, cette vie intérieure qui était tellement difficile de moi avec moi, que quand on m'en parlait, j'étais en mode non, je ne veux pas savoir, c'est bon, ça va.
- Speaker #1
Oui, et puis même quand tu es dans ce type de moment, tu n'as pas forcément envie de…
- Speaker #0
sentir que t'es différente avec tout le groupe tu vois et tu voulais pas être la petite fille adoptée du Rwanda parce que quand on en parlait des fois c'était un peu ça oh la pauvre oh la la puis les gens étaient tellement désolés pour moi comme tu sais tu fais Rwanda c'était oh la la c'était je réalisais pas, bon après j'ai réalisé quand j'étais plus avec lui effectivement je comprends que les gens étaient choqués quand on disait ça mais en fait ils étaient tellement dans un truc de pitié pour moi j'étais en mode ça va Je n'avais pas envie que les gens me regardent avec ces yeux-là.
- Speaker #1
Tu n'avais pas envie en tout cas à ce moment-là ? Non. Même aujourd'hui ?
- Speaker #0
Même aujourd'hui, non. Aujourd'hui, je comprends qu'il y ait des réactions de « ah ouais, le rendage, ouais, chaud » . Mais par contre, le truc de pitié, de ceci, de ça, c'est bon.
- Speaker #1
Après, c'est normal. Moi, je comprends parce qu'en réalité, ce qui s'est passé, c'est horrible. Oui,
- Speaker #0
oui.
- Speaker #1
En fait, je pense que ce qui est le plus horrible, c'est l'image. en fait, parce que je sais que Moi, je ne le savais pas, mais c'est plus tard que je l'ai su qu'à la télé, les images qui ont été diffusées, c'était d'une violence. Mais moi, je ne le savais pas. C'est plusieurs années après que j'ai compris, en regardant des films comme Hotel Rwanda. Toi, tu en as vu un peu ?
- Speaker #0
Non. Je ne peux pas regarder dans une policier s'il y a du sang, quelqu'un qui tire. Je suis au bout de ma life. Dès que ça concernait le randage, j'étais vraiment encore plus au bout de ma life. C'est vrai que les images les plus hardcore contre ça. Quand on rentre là que j'ai vu, c'est au mémorial de Kigali. Ah oui. Et j'avoue que là, vraiment, je ne m'y attendais pas. Et en même temps, je m'y attendais. Et j'avoue que là, ouais, c'était... Enfin, tu vois, sinon, je ne regarde jamais de film, même avec autant de violence, tu vois. Et là, comme c'est des histoires vraies, j'étais en mode, je n'arrive pas à regarder, je ne peux pas.
- Speaker #1
Non, je comprends. Honnêtement, c'est compréhensible. Et du coup, je peux comprendre la pitié que certains peuvent avoir.
- Speaker #0
Je le comprends. Mais c'est vrai que quand j'étais petite, à dos et tout ça, je n'avais pas du tout envie de voir ce regard-là sur les gens. Je sentais tellement déjà tout le temps de la différence et soit du jugement ou de l'appétit. J'étais en mode encore un sentiment, encore un truc que je ressens qui ne m'est pas à l'aise à l'aise.
- Speaker #1
Sauf que moi, je comprends. Sinon, pourquoi tu as voulu témoigner aujourd'hui ?
- Speaker #0
Déjà, j'ai adoré ta façon de... Je ne sais plus comment ça s'est fait, mais je me suis dit, ah, c'est la petite, elle a l'air trop cool et tout. Je ressens que... ça va être sympa, je suis allée voir ta page et j'étais en mode ah ouais c'est cool j'aime bien, sur ta page et dans ton introduction tu le dis t'expliques en quoi c'est important de se raconter ces histoires et c'est ce que tu me disais aussi dans l'idée de laisser une trace parce que la vie on sait pas comment à tout moment, demain on peut ne plus être là et on s'est pas dit certaines choses et c'est vrai que t'en parles un peu sur ta page et j'étais en mode Je suis carrément d'accord parce que moi, ce qui m'a beaucoup aidée à libérer ma parole, bien sûr, c'est le fait de me dire vas-y, tu voyages, il faut que ceci, que cela. Mais ça a été aussi et surtout le fait d'avoir des histoires, d'écouter beaucoup les histoires des autres.
- Speaker #1
Des histoires qui se racontent leur histoire, leur passé et les difficultés qu'ils ont eues et pourquoi pas retourner aussi à leur histoire.
- Speaker #0
C'est ça, ça permet vraiment de mettre des mots M-O-T-S sur des mots M-A-M-X. et c'est vrai que ça fait trop du bien et si ça peut aider des gens si ça peut permettre à des gens de libérer la parole c'est ce que je te disais, moi j'ai un podcast qui parle de la portée politique de nos cheveux mais oui, trop cool on intervient avec des gens et on parle de leur histoire, on parle de leurs cheveux mais en fait on parle pas du tout de cheveux on parle de la société dans laquelle on vit, des comportements de chacun, de nos rapports et en fait, moi ce qui me fait plaisir c'est quand je reçois un message sur Instagram, ça n'arrive pas souvent, ou quand je suis mentionnée dans un post qui dit que elle écoutait ce podcast, ça fait du bien, moi je me suis sentie comprise en écoutant tel témoignage, et en fait, moi c'est des choses que j'ai ressenties en écoutant des témoignages, et qu'on le dise avec ce contenu que j'ai créé, je suis en mode c'est trop bien.
- Speaker #1
Ça sert au moins à une personne, à partir du moment où on a touché une personne, moi... J'ai gagné. J'ai dit que j'ai gagné.
- Speaker #0
Absolument.
- Speaker #1
Non, mais ouais, mais c'est ça. Mais du coup, la rencontre, elle s'est faite grâce à Christelle qui nous a mis en relation parce que j'ai posté une fois en story que j'aimerais bien parler du coup de l'adoption et d'autant plus transraciale. Et donc, elle a pensé à toi parce que du coup, t'es rwandaise et que je suis rwandaise et elle a dit la connexion, ça peut se faire et machi machi, ça a matché.
- Speaker #0
Merci Kiki.
- Speaker #1
Complètement, ouais. Avant même qu'on arrive à la fin. Comme tu as compris, le podcast s'appelle Bamboula. est-ce que tu sais ce que ça veut dire le mot bamboula ?
- Speaker #0
ah là là tu l'as dit, je l'ai vu sur ta page mais je ne me souviens plus c'est pas grave mais est-ce que déjà,
- Speaker #1
parce que quand même au nord je pense que c'est un endroit où il y a eu pas mal justement de propos racistes à ton égard est-ce que tu l'as déjà eu à ton égard ?
- Speaker #0
quand j'étais petite, ma famille, mes parents ils m'ont toujours dit quand ils m'expliquaient le racisme etc on m'a toujours dit bah voilà, peut-être qu'on va dire ces mots-là, bamboula, machin, bidule on va toujours...
- Speaker #1
Et on t'a dit le mot « bamboula » . Ouais. Énorme.
- Speaker #0
Et je savais que ce n'était pas un mot gentil. Parce qu'on m'avait dit que, en gros, si on me disait ça, c'est que ce n'était pas gentil. mais par contre c'est vrai que je l'ai toujours entendu d'une manière très négative. Et quand j'ai vu le nom de ton podcast, c'est quand je suis allée sur ta page et que tu l'as expliqué, j'étais en mode « Ah, mais pourquoi on ne raconte pas ça ? »
- Speaker #1
Voilà, je suis là pour raconter. Non, mais voilà, brèvement, de toute façon, je l'explique un peu dans la première saison du podcast, c'est que ça veut dire « pluie » . Ça veut dire « se souvenir » aussi en langue kikongo. C'est un historien à Congo qui le dit, qui s'appelle Laskoni, qui en fait a parcouru, c'est un globe-trotter qui a parcouru le monde afro, le Brésil, en tout cas là où il y a des afrodescendants. Et en fait, il dit que simplement ça veut dire se souvenir, se rappeler. Et c'est des afrodescendants, des Africains qui ont été déportés qui scandaient ce mot-là en Louisiane sur une place Congo pour justement se rappeler d'où ils venaient et ne pas oublier en fait leurs racines. Et puis même plus tard, l'autre définition que j'ai trouvée, enfin plus tard en fait, c'est dans la continuité, mais cette définition, je voulais la raconter lorsque j'aurais Merci. une femme en face de moi, parce que finalement, c'est une femme qui l'a évoquée. Je dis « Ah ben, c'est parfait ! » En fait, ça veut dire « l'appareil reproducteur féminin en Lingala » . Et en fait, on dit « Mbula » . C'est ça que ça veut dire. Et du coup, je dis « Ah, mais c'est en lien avec le mot et avec la signification originale du mot. » Ça veut dire « les pluies » , du coup. Et pourquoi « l'appareil reproducteur féminin » ? Parce que c'est là où sort les os, c'est là où sort la citrine. lorsque on est dans l'excitation pendant une relation sexuelle. La poche des os, c'est à ce moment là aussi que ça se brise lorsque tu es sur le point d'accoucher. Voilà et donc du coup c'est un retour un peu aux sources via ce mot là, via le mot mbula et et aussi l'autre connexion c'est parce que mbula, mbula en kiawanda ça veut dire les pluies. Et donc le kiawanda c'est aussi cette connexion.
- Speaker #0
Tu parles toi ?
- Speaker #1
Ouais je parle kiawanda en tout cas. Dans ma reconnexion aussi à un moment donné avec mes racines, j'ai voulu en fait aussi réapprendre. Donc je regardais des documentaires ou des vidéos en kiawanda pour l'apprendre.
- Speaker #0
Tu l'entendais à la maison ou pas ?
- Speaker #1
Oui, oui, oui. Moi, mes parents parlent le kiawanda. J'ai toujours compris le kiawanda.
- Speaker #0
Parce que tu ne le fais pas forcément.
- Speaker #1
Non, non. Parce que déjà, nous, on a une histoire compliquée. Enfin, compliquée, non, ce n'est pas compliqué. c'est parce qu'au Rwanda, on allait à l'école... aéroises et du coup on parlait français et en fait bizarrement un jour je raconte à mon père que je me rappelle même pas avoir parlé qui en rwanda j'ai pas souvenir de me voir parler qui en rwanda tu vois mais pourtant je le comprends et tout mais mais c'est avec le temps qu'en fait un moment donné je dis non mais je vais le parler quoi et il n'y a pas de problème et du coup je l'apprends aussi à mes enfants c'est important en fait et je me dis si un jour je retourne comment je fais pour parler avec les gens, ça va être compliqué, tu vois. Et donc voilà la notion de bambou là. Et comme tu disais, c'est important de raconter cette histoire parce que finalement, c'est celle-là la vraie histoire et non pas celle qui est négative, qui est un mot négrophobe envers nous. C'est même plus une insulte finalement. Oui,
- Speaker #0
c'est bien d'en faire... Ça va très bien avec la vibe un peu... C'est vraiment d'en faire quelque chose de positif.
- Speaker #1
C'était l'idée. Est-ce que tu veux ajouter un dernier mot pour les personnes qui vont écouter ton témoignage, ton récit ? Qu'est-ce que tu as envie de dire aux gens ?
- Speaker #0
Tu as déjà dit beaucoup de choses,
- Speaker #1
mais tu as un truc qui va leur dire « Ah ouais, elle est incroyable, Clémence ! » Est-ce que tu l'es ?
- Speaker #0
Déjà, j'espère qu'ils vont aimer l'épisode. Je leur dirais d'aller écouter les autres épisodes de ton podcast, c'est très intéressant. Et c'est vrai que moi, un truc que j'aime beaucoup dans le fait d'écouter des histoires et de raconter des histoires, c'est que plus on ouvre ce spectre, plus en fait, on ne comprend pas forcément l'autre, mais en tout cas, plus on peut être dans la tolérance et dans l'acceptation de l'autre. Et c'est vrai que c'est un truc vraiment, c'est hyper idéaliste, mais moi, dans mon monde idéal, on ne s'entend pas forcément tous, on ne se comprend pas forcément tous, mais on se réflecte, parce qu'on a l'intelligence d'écouter les histoires des autres. et c'est vraiment le message que je veux faire passer on est pas obligé de tous aimer mais juste chacun a son histoire et respectons nous et en fait ce que je trouve intéressant et tu le dis aussi c'est plantons des graines c'est ça sans mettre l'étentiel au cerveau j'adore je savais pas il faut planter des graines exactement
- Speaker #1
Et je pense que c'est comme ça qu'on va pouvoir... Se soigner, ouais, et vivre ensemble. C'est vrai, véritablement.
- Speaker #0
Il y a vraiment ce truc de parler, de communiquer. Et encore une fois, c'est pas grave si on s'aime pas, c'est ok. Mais juste, ayons l'intelligence de faire ça bien, de faire du mal, tu vois. Et écouter les histoires des uns et des autres, je trouve que ça permet de ne pas être bête et de ne pas avoir des mots, des paroles vexantes, méchantes, tu vois.
- Speaker #1
C'est ça, c'est l'idée. Parce que, comme je dis souvent, le podcast, il n'est pas forcément dirigé pour les afro-descendants. Il est vraiment pour tout le monde parce que en fait, on doit participer à cette compréhension et à cette bienveillance. Comme tu le dis, on doit tous être bienveillants malgré qu'on ne soit pas tous pareils. On ne peut pas tous être pareils. C'est sûr, en fait. Donc, ouais, écoute, merci d'avoir témoigné. Ah oui, tu n'as pas dit, c'est quoi le nom de ton podcast ?
- Speaker #0
Ah, alors, le nom de mon podcast, c'est Mèche à Mèche. il se trouve sur toutes les plateformes Deezer, Spotify, l'application de l'iPhone toutes les plateformes d'écoute et ben voilà n'hésitez pas à aller écouter Meshamech je partagerai dans la bio de cet épisode et puis n'hésitez pas à aller la suivre du coup sur Meshamech, il y a un compte Instagram Instagram c'est Clémence Flamme c'est mon Instagram de coiffeuse d'histoire de vie super,
- Speaker #1
ben pareil je partagerai donc allez contacter Clémence si jamais Ça nous a parlé de son récit et vous voulez interagir ou poser d'autres questions peut-être que je n'ai pas posées. Mais voilà. En tout cas,
- Speaker #0
merci à tous. Et puis, à bientôt Clémence. À bientôt avec plaisir. Merci beaucoup. Bon alors, que dire de cet échange et de ce témoignage ?
- Speaker #1
Déjà, moi ce que je retiens, c'est que l'adoption transraciale, c'est manifestement une question de chance. Et comme vous l'avez entendu, pour Clémence, c'était affreux, clairement, avec de la maltraitance en plus. Et pour d'autres, Ça se passe extrêmement bien et l'adulte même qui est adopté a une très bonne relation avec ses parents. Ensuite, moi, pour avoir écouté plusieurs témoignages là-dessus, je crois qu'il faut qu'on s'interroge sur les dynamiques raciales qui ont souvent lieu dans des pays qui ont été colonisés par des pays occidentaux. Et on connaît tous le mythe du sauveur blanc. Et avec ça, moi, j'ai envie de souligner que les parents adoptifs doivent s'éduquer sur la négrophobie, par exemple, et plus globalement. le racisme systémique. Ils doivent connaître l'histoire de l'enfant, la culture du pays, les rapports que le pays d'origine peut avoir avec le pays des parents adoptants et tout ça pour mieux comprendre les vécus de ces enfants non-blancs. Et s'il vous plaît, s'il vous plaît, il faut absolument arrêter de renier l'origine de l'enfant et sortir la carte du colorblind en disant oui, on ne voit pas les couleurs. On a simplement de l'amour à donner à un enfant dans le besoin. Et peu importe sa couleur en réalité. Non, il faut être réaliste. Tout le monde voit les couleurs, tout le monde. Et donc pourquoi ces exigences en réalité ? Parce que simplement, les dégâts à l'âge adulte sont divers, comme la peur de l'abandon, la peur du rejet. Et donc certains font tout pour se faire aimer des autres. Et le manque de confiance en plus en eux et d'estime de soi s'accroît. Parce qu'en réalité, leur environnement est essentiellement blanc. Et donc, ces enfants grandissent avec personne autour d'eux vers qui s'identifier véritablement. Moi, ce que j'ai envie de rajouter, c'est aussi l'absence de légitimité au sein de sa communauté d'origine. Et oui, moi, j'ai beaucoup entendu des personnes dire « je ne suis pas assez noire, je ne suis pas assez asiatique » . Et parce que certains jeunes ne connaissent pas leur culture, leur pays d'origine. Et donc, par la suite, ils éprouvent des difficultés à côtoyer leur groupe communautaire. Bon, après... Je ne sais pas si vous avez déjà vu le film qui est très intéressant d'ailleurs, qui s'appelle « Il a déjà tes yeux » avec Lucien, Jean-Baptiste et Aïssa Maga, où là, le prisme est inversé et je trouve ça pertinent. Dans l'histoire, c'est un couple noir pour qui leur dossier d'adoption est accepté et le centre va leur confier un bébé blanc de six mois environ. Et dans l'imaginaire collectif, on n'a tellement pas l'habitude de voir ce type d'adoption qu'on va y retrouver tous les préjugés ratios. Bref. Je n'ai pas envie de vous spoiler. Dites-moi ce que vous en pensez, ce que ça vous évoque et surtout, est-ce que vous êtes pour ou contre l'adoption transraciale ? Voilà. En tout cas, je mets les informations de Clémence dans la description de cet épisode. Et puis, je vous dis à la prochaine. C'était Joie pour le podcast Bâmbula. Allez, bye !