- Rébecca
Hello maman et bienvenue sur Balance ton accouchement, le podcast qui recense les histoires d'accouchement, qu'elles se soient bien ou mal passées, car toute histoire mérite d'être entendue. Vous écouterez ici des parcours faciles ou difficiles, des expériences uniques et surtout de la bienveillance et de la sincérité. Alors que tu sois maman, papa, future maman, futur papa ou simplement intéressé par l'accouchement et par ce qu'il fait traverser aux femmes et aux hommes, tu es le bienvenu par ici. Moi je suis Rebecca. maman de deux enfants, est complètement bouleversée par les accouchements et la maternité. Alors, sans plus attendre, voici le nouvel épisode du jour ! Bonjour tout le monde et merci de me rejoindre pour ce nouvel épisode de Balance ton accouchement. Aujourd'hui, nous allons explorer une expérience un peu particulière, celle d'un accouchement non accompagné, et même de deux, voire de trois, racontée par une maman qui a pris cette décision en toute conscience. Je tiens à préciser dès le début Que même si son témoignage offre un éclairage sur un parcours singulier et intéressant, ce choix ne constitue pas l'avoir recommandé. Il est toujours préférable de se faire accompagner par une sage-femme spécialisée dans l'accouchement à domicile si c'est votre choix, afin de bénéficier d'un suivi personnalisé et sécurisant tout au long de cette expérience unique. Alors si vous êtes prête, installez-vous confortablement et laissez-vous guider dans ce récit emprunt de partage et de bienveillance. Alors bonjour, merci à toi de me rejoindre pour ce nouvel épisode du podcast. Alors pour commencer, est-ce que tu pourrais te présenter s'il te plaît en me donnant ton prénom, en me disant combien d'enfants tu as et quel âge ils ont, et puis en ajoutant tout ce que tu aurais envie.
- Molly
Je m'appelle Molly, j'ai 31 ans, j'ai 3 filles de 11, 6 et 4 ans, et j'attends un petit garçon là pour les jours à venir.
- Rébecca
Ok, enfin le petit bonhomme.
- Molly
Ouais.
- Rébecca
Ok, donc ouais, une sacrée expérience qui nous attend.
- Molly
Un renouveau.
- Rébecca
Oui. Alors, première question que je pose à chaque fois. Est-ce que tu avais pensé accouchement dès le début de ta première grossesse ? C'est quelque chose qui t'intéressait, qui te faisait peur ou alors pas spécialement ?
- Molly
C'est une question qui m'a toujours marquée dans ma vie. Déjà parce que j'ai eu l'expérience des naissances qu'a expérimenté ma maman. Il faut savoir que j'ai à peu près 10 ans d'écart, en arrondissant un peu, avec mes deux soeurs, mes deux plus petites soeurs. Et donc j'ai pu profiter de la grossesse de ma maman, des grossesses de ma maman, et avoir cette effervescence de la naissance à venir. Et il y a une expérience que je raconte souvent parce que tout est parti de là, je pense. C'est le jour où ma première soeur devait naître. Elle est née assez rapidement, je crois à 1h45, entre la première contraction et le moment où on a bébé dans les bras. Quand ma mère est partie au bout d'une heure, une heure et quart de la maison pour aller accoucher à l'hôpital, j'ai ressenti une profonde tristesse parce que j'avais la sensation qu'on me volait un moment. Je me suis dit, il a attendu ma sœur, je l'ai désirée. Je veux dire, oui, on a voulu une sœur avant même la grossesse. Donc, l'annonce de la grossesse a été une grande joie. On a vécu la grossesse avec beaucoup d'enthousiasme. Et puis finalement, au moment où bébé arrive, c'est des inconnus qui vont l'avoir avant moi. Et là, ça m'a marquée à vie. Je me rappelle que j'ai pleuré. J'ai pleuré.
- Rébecca
Tu voulais participer, tu voulais être là.
- Molly
Mais ouais, j'étais profondément chagrinée et je me suis dit, il y a quelque chose qui ne va pas là. Mais ce n'était pas normal pour toi ? Non. Et je me suis dit, là, il y a quelque chose. Et puis, ça m'a marquée à vie. Et puis, je n'ai jamais conçu qu'on accouche à l'hôpital puisqu'on n'est pas malade. Je ne suis pas malade, je ne suis pas l'article de la mort, donc je ne vois pas pourquoi j'irais dans ce genre d'endroit. Quand j'étais à l'hôpital petite, c'était pour voir mon père en soins intensifs, mon papy qui s'est fait mal, des gens à gauche, à droite qui ne vont pas super bien. Et je me suis dit comment on peut donner la vie à un endroit où on meurt, où on est malade. Pour moi, c'était deux opposés.
- Rébecca
Ok, oui, donc pour toi,
- Molly
c'est vraiment… Maintenant, je vois les choses peut-être un peu différemment par rapport à la mort, mais… Non, pour moi, c'est inconcevable que tu vas bien et que tu vas dans un endroit où, à la base, tu vas quand tu ne vas pas bien.
- Rébecca
Oui, c'est vraiment pas lié pour toi.
- Molly
C'est ça. Et donc, pour moi, j'allais accoucher à la maison pour ma première. C'était mon souhait. Sauf que j'avais 19 ans, j'étais maman solo. À l'époque, c'était encore plus une omerta d'accoucher à la maison.
- Rébecca
Oui, il y a 11 ans, c'est ça.
- Molly
Oui, c'est ça. Mais malgré mes souhaits formulés, jamais personne ne m'a dit qu'il faut « contacter une sage-femme à AD » . Et comme j'étais toute seule, toute seule, le célibat, quoi. Je n'étais pas du tout préparée à accoucher toute seule chez moi, mais toute seule dans la solitude, en fait. Et je suis allée à l'hôpital par dépit, en espérant qu'on me tienne la main.
- Rébecca
Oui.
- Molly
Oui.
- Rébecca
Et tu avais, on avance un petit peu, mais tu avais possibilité que ta maman t'accompagne, ou que un proche t'accompagne, ou vraiment pas ?
- Molly
Non, j'avais le géniteur de ma fille, mais c'était une présence...
- Rébecca
Pas voulue quoi, c'était...
- Molly
C'était une présence, oui, par convention sociale, parce que le père, entre guillemets, se doit d'être là. Donc pour lui c'était ça, il était tout le temps sur son téléphone, à l'écouter il avait plus peur et plus mal que moi.
- Rébecca
Oui. Vous étiez plus ensemble déjà ? Ou à moitié ?
- Molly
Disons qu'on a essayé de recoller les morceaux mais que c'était pas... ouais la rupture était bien amorcée. Donc, je pense qu'à choisir, j'aurais préféré personne qu'une présence comme ça parce que quelqu'un qui n'est pas soutenant, finalement, c'est... Autant qu'on ne t'est su personne, au moins, on sait à quoi s'en tenir.
- Rébecca
C'est sûr.
- Molly
Donc, voilà. Donc, oui, c'était vraiment une solitude plutôt subie.
- Rébecca
Ok. Et ta grossesse en elle-même, comment elle s'est passée ? Plutôt bien ?
- Molly
Idyllique. Idyllique, je me suis... Je me suis épanouie dans la grossesse, j'ai découvert un monde qui m'était jusque là étranger. Plongée dans la grossesse, la maternité, la parentalité, je me suis révélée en fait. Je me suis dit, j'ai un parcours de vie assez chaotique et qui m'a fait penser qu'à tort, que les femmes étaient un sexe faible et que j'aurais eu plus de chance si j'avais porté une paire de burnes.
- Rébecca
Je pense que là, le fait de créer la vie, ça change tout.
- Molly
Je me suis dit, mon Dieu, c'est génial. En fait, la femme est un sexe privilégié. Quel privilège ! Quel état de grâce que de porter la vie, de mettre au monde. C'était génial. Je me suis éclatée. Je me suis découvert femme en devenant maman. Et je ne suis jamais revenue sur mes...
- Rébecca
Oui, ça peut révéler.
- Molly
Sur mes fausses croyances de jeune adulte en construction, je n'y suis jamais revenue. J'ai évolué, j'ai grandi et j'ai persévéré dans ce cheminement que j'expérimente encore aujourd'hui avec cette quatrième grossesse. Mais au-delà de ça, j'ai adoré ça. J'ai failli accoucher prématurément de mon aîné à cause d'une fièvre inexpliquée. Et là déjà, j'ai expérimenté le... la salle de travail. J'aurais dû l'appeler la salle de torture parce que vraiment, je suis rentrée dans cette pièce et je me suis dit, mais à aucun moment, j'ai envie d'être là. À aucun moment, j'ai envie que mon bébé naisse ici. Je trouve ça d'une... C'est même pas sobre, en fait. C'est triste à mourir. C'est-à-dire que tu vois un pauvre lit dégueulasse sur lequel t'as pas envie de t'allonger avec des étriers, tu vois, des ordinateurs. C'est impersonnel, ça pue comme un hôpital, j'ai envie de dire. Mais là, non. Je ne suis pas rentrée dans la pièce, j'ai dit, excusez-moi, j'ai envie de pisser. Je suis allée fuir deux minutes pour reprendre mes esprits, me dire, allez, là, tu n'as pas trop le choix, puisque tu risques d'accoucher prématurément. Dans ma tête, j'allais accoucher, donc je me suis dit, allez, forge ton mental, tu vas repartir avec ton bébé dans les bras, et après, on n'en parle plus.
- Rébecca
Tu étais à combien de semaines, là ?
- Molly
Je ne sais plus. Je ne sais plus. Je devais être 30,
- Rébecca
32. Oui, c'était vraiment tôt quand même.
- Molly
C'était un peu tôt quand même. Oui. Ouais, ouais, donc là, je me suis dit, bon... Puis je suis rentrée chez moi et j'étais un peu déçue de pas... Je suis rentrée chez moi et j'étais triste, en fait, de pas avoir mon bébé dans les bras parce que j'étais partie avec un mental en me disant, bon, ben, c'est pas grave qu'il naisse prématuré, c'est une joie, il va naître, donc fais-toi une joie. Bon, je me suis fait une joie, je suis repartie, brodo, lui-même.
- Rébecca
Ouais.
- Molly
Ce qui fait que c'était la grossesse pour laquelle j'avais le plus hâte d'accoucher. Ouais. En son sens, où j'avais cette déception de « Ah, j'aurais pu avoir mon bébé à ce moment-là dans les bras. » Oui,
- Rébecca
plus tôt que prévu.
- Molly
Oui, alors après, je préférais que ce bébé aille à terme, qu'il respire bien, qu'il s'alimente bien. Ce n'était pas du tout un souci de caprice ou d'inconfort. Non, c'était juste « Ah, je m'étais fait une joie et je reste sur ma faim. »
- Rébecca
Oui, forcément. Donc,
- Molly
je me préparais un petit peu en avance. Ok.
- Rébecca
Et est-ce que tu avais... des enfants, c'était il y a 11 ans, donc je pense que même le projet de naissance n'était encore pas là où on en est aujourd'hui. Mais est-ce que tu avais formulé une envie de ne pas avoir de péridurale ou des choses comme ça ?
- Molly
Ah oui, oui, oui. Moi, je suis arrivée dans l'espoir qu'on me foute la paix. Je leur avais dit, foutez-moi la paix, mettez-moi dans une pièce dans le noir avec un ballon et lâchez-moi. Je leur ai dit, je crois quasiment comme ça. Je leur ai dit, je n'ai pas le pouvoir d'écouter. J'aime pas les aiguilles, donc c'est pas la peine de me mettre une épée de Damoclès dans le dos, j'en veux pas. Bon, comment vous dire ? Seule, face au système, j'ai pas lutté longtemps. J'ai pas lutté longtemps, après c'était par dépit. J'ai tellement été dépossédée petit à petit de mon accouchement qu'à la fin, j'étais à l'heure. Merci, quoi.
- Rébecca
Qu'est-ce qui s'est passé justement, si tu rentres un petit peu dans les détails de cette dépossession du moment ? Si on commence dès le départ, quand tu es arrivée à la maternité, le jour J, ou le jour où ça y est, c'était le vrai travail et c'était le bon moment, qu'est-ce qui s'est passé ?
- Molly
Moi, j'étais bien dans ma tête, j'étais bien dans mon corps. Je me suis dit super, ça va être une belle journée ensoleillée pour rencontrer mon bébé. J'ai à peu près bien dormi, c'était le petit matin. Et je n'avais pas spécialement peur, en fait. Je me suis dit, les femmes enfantent depuis que l'humanité existe, donc toi...
- Rébecca
Oui, tu avais toute confiance en ton corps de femme, là, pour le coup.
- Molly
Ben oui. Ah oui, non, pour moi, je n'étais pas malade. Je n'allais pas mourir, risquer de mourir. C'est comme ça, quoi.
- Rébecca
OK.
- Molly
C'est la vie, c'est un processus naturel.
- Rébecca
Oui, ça fait des temps, donc ça se fera aussi bien avec toi.
- Molly
Ben, c'est ça. Non, non, mais c'est ça. Je me suis dit, je ne suis pas plus bête qu'une autre. Mon corps n'est pas spécialement défaillant, donc ça va roubler, quoi. Puis déjà, j'arrive, ça me gave qu'on me pose la question, la date de mes dernières règles alors que je suis en train d'accoucher. Enfin, putain, j'en sais rien. J'en ai rien à foutre de tes questions. Je suis en train de fesser le flux. Non, mais c'est ça. Les prochaines vont arriver bientôt. Alors, pose-moi cette question-là et puis ça va plus vite. J'ai trouvé ça absurde. Mais limite débile. Et puis très... Puis très tu dois répondre tout de suite tes contractions on s'en fout faut faire les papiers quoi. Ben non mon bébé t'as très arrivé c'est le truc le plus important qui soit. Donc sa temporalité devrait primer sur la temporalité du reste du monde. Et là déjà ça m'a gavé. Donc je suis arrivée un petit peu à me dire si ça continue comme ça ils vont m'irriter rapidement les types. Bon ça n'a pas loupé. Autant la sage-femme de nuit était très gentille. Très douce, en mode super, ça avance bien. À 10h, vous avez votre bébé dans les bras. Je suis arrivée, il devait être 6h30, je crois. Donc hyper encourageante. Oui,
- Rébecca
assez rapide, du coup.
- Molly
Et puis à 8h, mes premières contractions, vers 4h du matin. OK. Et puis à 8h, changement d'équipe. Là, je me cogne. Là, je tombe très mal. Je tombe sur une nana méchante qui... qui fait des commentaires sur mon jeune âge puisque ça faisait une semaine que j'avais 20 ans parce que j'étais toute seule qui me perce la poche des os à mon consentement donc déjà la douleur la douleur du moment plus la douleur que qui te submerge oui qui avait pas d'urgence en plus à percer la jambes il y avait aucune urgence allait très bien je voulais juste comme foot la paix avec mon ballon bon j'aimais pas le ballon j'ai jamais aimé le ballon en travail en fait ça m'a gavé oui Mais c'était une possibilité autre que juste un lit dégueulasse. Un lit de malade. Ça faisait plus chaleureux.
- Rébecca
Plus indépendant.
- Molly
Oui, oui, voilà. J'avais un ballon. De mon copain. C'était le seul qui était à peu près chaleureux. C'est dire le degré de chaleurosité dans cet endroit-là. Et puis, la sage-femme, c'est quelqu'un qui s'est moqué de ma douleur, qui s'est moqué de ce à quoi je pouvais ressembler en disant « Ah, mais regardez-vous, la douleur, ça vous rend laide, on ne va quand même pas vous traumatiser avec un accouchement à 20 ans. »
- Rébecca
Elle t'a vraiment dit ça ?
- Molly
Ah ouais ouais ouais. Toi t'es là, t'es vulnérable, t'es dans une... J'étais pas encore dénudée à ce moment-là, mais je me sentais nue. Et j'ai trouvé ça odieux. En fait, j'avais pas envie d'être bonne et fraîche, j'avais juste envie de faire mon bébé. J'étais pas du tout dans une optique de rester belle, silencieuse et docile. Je voulais juste être concentrée sur faire mon bébé. Donc à quoi je ressemblais, ça me passait mille fois au-dessus.
- Rébecca
Oui, et puis comme toutes les femmes qui donnent la vie, je veux dire, c'est pas le moment où... C'est rare qu'on se fasse un petit brushing avant de donner la vie, quoi.
- Molly
Non, mais c'est ça. J'avais bien déjeuné avant de partir, j'avais pris une douche avant de partir, je me sentais bien dans mon corps. Ça s'arrête là. Ça s'arrête là. Là, à ce moment-là, j'ai commencé à perdre pied, quoi. Parce que... Parce qu'elle a commencé à insuffler la peur. Parce qu'elle m'a dit qu'on était sept ce jour-là, qu'il n'y avait qu'une ou deux sages-femmes, je ne sais plus. Et puis, puisqu'il y en avait trois en césarienne, donc l'anesthésiste n'était pas spécialement dispo, puis que c'était une chance. Moi, je n'ai jamais trouvé ma chance dans le fait d'avoir une pénalité à ce moment-là, je vous le dis.
- Rébecca
Mais le fait qu'ils viennent, en fait, c'était le bon moment et il fallait en profiter. Oui,
- Molly
c'est ça. Alors que jusque-là, je gérais bien. Franchement, jusque-là, je gérais super bien. Mais je le dis avec un recul, où pour une primie toute seule, c'était du pain béni à accompagner pour une sage-femme. Pour peu que tu avais un peu de temps à consacrer, c'était parfait. Je veux dire, je n'avais pas peur, je n'étais pas... J'étais pas spécialement terrorisée par ce qui se passait dans mon corps. Je vivais ce qu'il y avait à vivre. Tout simplement.
- Rébecca
T'étais en écoute et t'étais en réconception avec toi.
- Molly
Ouais, c'est ça. Mais mes attentes, c'était même pas entendable, tout court. Ça faisait même pas partie de la reconception des choses, en fait.
- Rébecca
Mais t'avais pas le temps.
- Molly
Oui, pas le temps, pas l'envie. Puis je pense qu'elles ne se sont pas dit que c'était une opportunité de vivre quelque chose qui doit leur changer de leurs habitudes. Donc ça n'a pas été vu comme une opportunité, dommage.
- Rébecca
Donc elles te percent la poche des os, donc toi la douleur s'intensifie. Qu'est-ce qui se passe par la suite ?
- Molly
Ma bulle est percée. Je peine à retrouver ma bulle, à me remettre dedans. Je commence à... Entre la douleur accrue et puis là, cette peur qui a insufflé cette pression, le fait qu'on m'allume la lumière, que je me sens agressée. Vraiment, je me sens agressée. Et là, je me dis, j'avais envie de partir.
- Rébecca
Tu avais envie de retourner chez toi et de faire ce que tu avais à faire à la maison.
- Molly
Ah mais exactement. Sauf que là, je me suis dit, bon putain, si tu veux partir, il faut courir vite. Il faut savoir où est la sortie, donc j'essaye de réfléchir. Ah oui,
- Rébecca
il faut courir vite, t'étais carrément dans ce...
- Molly
Ah oui, non mais là j'étais vraiment dans un esprit de fuite. Je me suis dit là t'es pas bien en fait, là t'es pas en sécurité. Et je me vois dans ma tête essayer de chercher la sortie, de me dire mais par où je suis passée, j'ai fait ce couloir. Et c'est absolument tout l'opposé de ce qu'une femme en travail devrait penser.
- Rébecca
Clairement, tu n'es pas censée penser à t'enfuir, au contraire.
- Molly
Non, mais c'est ça. Donc, je me dis, là, foutu pour foutu, en fait, tu n'as pas le choix. Tu es coincée. Là, je me suis dit, tu es coincée. Donc, je commence à être en colère. Et la colère, ce n'est pas le meilleur sentiment à ressentir à ce moment-là. Oui,
- Rébecca
ce n'est pas ouf.
- Molly
Ah, mais pas du tout. Je pense que mon corps a été très résilient parce qu'au vu de ce que j'ai ressenti à ce moment-là, j'ai été gardée. que les choses finissent plus mal que ce qu'elles ont fini en fait. Mais physiquement, j'entends en termes d'hémorragie, j'aurais pu finir en césarienne ou en hémorragie à cause de toutes ces émotions qui ont perturbé le processus hormonal. J'ai eu de la chance de tomber amoureuse de mon bébé. De ne pas faire d'hémorragie, de ne pas finir en césarienne, je pense que ça me pendait au nez. Je n'y ai jamais été aussi proche d'ailleurs.
- Rébecca
Et comment l'accouchement s'est passé ?
- Molly
J'ai eu une péridurale imposée à 9h30, où deux sages-femmes m'ont contenu les épaules pour ne pas que je bouge, pour ne pas que je parle. La pause de la période durale a été une torture, c'est-à-dire que j'ai tout senti et elle a été ratée, puisque j'ai eu une brèche de la durmère, avec une décharge électrique du rachis jusqu'au coccyx, qui a été aussi violente que douloureuse. Et suite à ça, j'ai instantanément perdu l'usage de la parole et l'équilibre, donc je penchais d'un côté. Oui,
- Rébecca
d'accord.
- Molly
Et comme une femme enceinte en plein été, en plein mois d'août, c'est quand même relativement lourd en termes de rétention d'eau, c'est pas mal. On m'a penchée, on m'a laissée allongée sur une poubelle. Parce que la douleur était tellement violente que je vomissais. Donc oui, j'étais comme ça, sur une poubelle.
- Rébecca
Ah ok,
- Molly
d'accord. Voilà, mais c'est vous dire à quel point j'étais bien traitée. Je pense qu'un animal était mieux traité que ça. La prochaine fois, je me suis dit que je vais chez un vétérinaire si jamais j'ai un doute. Là, je me suis dit que je vais mourir ici.
- Rébecca
Comment tu as ressenti ça ?
- Molly
J'ai tellement subi la douleur induite, parce que là, ce n'était même pas la douleur de l'accouchement. Je parle vraiment de la douleur qu'on m'a infligée, de la maltraitance physique et psychologique. Je me suis dit que je vais mourir ici.
- Rébecca
Tu t'es vraiment sentie au bord du gouffre là.
- Molly
Ah oui. Là, je me suis dit, tu aurais dû fuir parce que c'est terminé. Et en plus là, tu te retrouves handicapée de tes jambes. Et tu ne peux plus parler. Donc tu vas mourir. Tu vas mourir dans le silence, dans l'indifférence, dans la solitude. Sur ta poubelle. Ah mais exactement. Exactement. J'ai trouvé ça indigne. Puis il faut savoir qu'à 10h, la pédédurelle n'avait pas tout à fait fait effet. Je t'ai déjà dit, t'es à fond.
- Rébecca
C'était vraiment la fin.
- Molly
Il a fonctionné comme il fallait. En dépit de tout ça, mon corps a fonctionné comme il fallait. Comme il faut fonctionner.
- Rébecca
C'est la dernière ligne droite en plus.
- Molly
Exactement. Donc j'avais fait le plus... le plus qu'on peut appréhender de plus dur ou de plus effrayant, ou je ne sais pas comment les femmes peuvent le percevoir, mais ce que j'avais fait de plus dur, la représentation qu'on a de l'accouchement, de ce qui est de plus dur dans l'accouchement, je l'avais fait. Je l'avais fait et je me suis sentie, je me suis dit « putain, mais je suis arrivée jusque-là » . Et voilà l'état dans lequel je me retrouve au moment où mon bébé doit naître. Et je me suis dit, t'imagines la mère qui va l'accueillir, l'état dans lequel la mère est. J'ai trouvé ça indignant.
- Rébecca
Et puis la déception, c'était l'horreur.
- Molly
Ah bah oui, oui, oui. Puis les mecs, ils m'ont oublié parce qu'ils n'avaient pas que ça à faire. Donc ils m'ont laissé dans cette pièce-là. Pendant trois heures toute seule donc à 13h 13 heures je sens mon bébé naître tout seul et il n'y a personne ils ont pris le soin de m'enlever la sonnette de à disposition en fait je pouvais pas l'attraper c'était volontaire de leur part Enfin, avant de partir et de m'enlever la sonnette, ils m'ont mis « on va vous mettre un peu de pain pendant le cœur, vous supportez pas la péridurale ? » Mais je ne sais pas ce qui m'arrive. Je sais que grâce à cette injection, j'ai retrouvé l'usage de la parole.
- Rébecca
C'est déjà bien.
- Molly
C'est déjà beaucoup. C'est un handicap en moins. Mais je n'avais pas spécialement retrouvé ma dignité. Donc, je... Non, non, j'étais très en colère à ce moment-là. Et puis ce temps d'attente, ce sas qui n'aurait pas dû être entre la dilatation complète et le moment où j'ai mon bébé dans les bras, en fait, c'est toute l'ampleur de ce qu'on m'a volé. On m'a volé mon temps, on a volé la temporalité à mon bébé. On a tout cassé, en fait.
- Rébecca
Oui, ton premier accouchement a été complètement... Vous voulez, oui, c'est ça.
- Molly
Ah oui, complètement. Et puis, je sens mon bébé naître tout seul. Donc, je demande au géniteur de faire le tour du lit parce qu'il était de l'autre côté de la sonnette. Et donc, il fallait qu'il passe devant mes jambes sur les étriers. Quelle horreur ! Pour appeler quelqu'un. Et il n'a pas voulu.
- Rébecca
Ah ! Ah oui, effectivement, quel accompagnement !
- Molly
Ah oui, oui, non mais j'avais soif ! Ah non, elles ont dit que tu n'avais pas le droit de boire et pas le droit de manger, alors à la limite, je te brumise. Mais je souhaite à tout le monde de faire un marathon en plein Sahara et qu'on lui dise non, je vais te brumiser parce que tu n'as pas vraiment besoin de boire.
- Rébecca
C'est ce qui est assez absurde en général.
- Molly
Non mais complètement, autant souhaiter à quelqu'un une mort lente et douloureuse, c'est exactement la même chose. donc je vous dis j'étais au bout de ma vie heureusement que je me suis focalisée sur la rencontre avec mon bébé parce que je me suis dit bon déjà la mère elle est pas au max mais ton bébé il mérite que tu sois émotionnellement disposée à l'accueillir donc calme ta colère, essaye de occulte tout le reste, focalise toi sur ton bébé juste ton bébé, la rencontre avec le bébé et je pense que c'est ça qui m'a sauvée qui a été salvateur parce que j'avais pas envie qu'on me vole ça déjà Et parce que sans ça, je pense que c'est le truc qui aurait fait que j'aurais pu engendrer des difficultés au niveau de la création du lien, au niveau de l'allaitement, au niveau des hémorragies. Je pense que si je n'avais pas focus sur ça, vraiment, j'aurais fini le sabotage moi-même.
- Rébecca
Et comment tu fais du coup quand tu sens que mes barils et qu'il n'y a personne, il n'y a pas de...
- Molly
Par chance, vers 13h10, une sage-femme arrive précipitamment dans la pièce pour aller chercher un truc dans un placard. Et je lui dis, madame, j'ai envie de pousser. Et elle ne me prend pas au sérieux. Elle me dit, mais non, vous avez juste envie de faire caca. L'exaspération me monte subitement de nouveau. Et je lui dis, écoutez, je pense savoir ce que c'est l'envie de faire caca. Et là, j'ai quand même un petit être de 3 kilos entre les jambes qui sort, s'il vous plaît. Faites quelque chose. Prenez-moi au sérieux.
- Rébecca
Et elle est là au-dessus de moi.
- Molly
Et puis, elle voit que la tête avait déjà émergé. Et puis, je vois qu'elle panique. Surtout, ne paniquez pas. Mais moi, j'étais sereine. Si tu veux, je ne pouvais pas faire grand-chose que subir à ce moment-là. Donc, go with the flow et ramène ta fraise. Mon bébé va naître. Et donc, à ce moment-là, oui,
- Rébecca
la sette.
- Molly
Un couronnement à la 7 ? Écoute, je comprends que c'est moi. Donc là...
- Rébecca
Je suis le couronnement. C'est ça.
- Molly
Donc il y a plein de sages-femmes qui ne se présentent pas ou des gens qui déboulent dans la pièce. Je me retrouve avec 5 ou 6 personnes autour de moi qui ne se présentent pas, qui sont limite en sueur, qui mettent leur blouse précipitamment. Surtout ne poussez pas, on n'a pas mis les gants. Je n'en ai rien à foutre. Tu n'as pas mis tes gants, ma Josie. Ce n'est pas mon problème. Mon bébé est en train de naître tout seul. c'est tout ce qui m'importe et puis le gynéco arrive celui qui m'a suivi et qui m'a réconcilié un petit peu avec les gynéco à titre personnel parce que jusque là j'avais pas eu un parcours très brillant auprès d'eux et qui me fait rire en fait il me fait rire il dit ah oui mais c'est le moment il était un peu pris au dépourvu et il était arrivé à vélo donc je vous raconte pas l'état d'esprit du type il y est pas du tout ... Et il me dit, bon, on va faire une poussée test pour voir si ça fonctionne et tout. Et puis moi, je fais une poussée test et puis mon bébé arrive. Donc, bien évidemment que les sages-femmes m'engueulent parce qu'elles n'étaient pas prêtes. Voilà, mon bébé arrive. On me pose mon bébé sur moi. Moi, j'avais tout donné sur les poussées test. Oui. Oui, mais tu ne sens pas ce que tu fais. Donc, tu donnes tout.
- Rébecca
Oui, et puis bon, elle était là, donc il y a un moment...
- Molly
Disons qu'une fois que la tête est sortie, le plus dur est fait, et même ça, on ne m'a pas laissé le faire. Donc si vous voulez, il va sortir, quoi. C'est comme ça. Il est déjà à moitié dans notre monde, donc il n'y a que l'autre moitié à faire.
- Rébecca
C'est la fin.
- Molly
Et puis franchement, il fallait que ça cesse, c'est bon. J'avais qu'une envie, c'était de retrouver l'usage de mes jambes, il fallait abréger, quoi.
- Rébecca
Et partir.
- Molly
Oui, surtout. Donc, on me pose mon bébé sur moi. Je la trouve lourde. Je ne m'attends pas à avoir une aussi patate douce en termes de poids, chaude, contre moi. Je planche dans son regard. Je fends en larmes. Je tombe amoureuse de mon bébé, vraiment. Je la trouve terriblement belle. La chance, quoi. Maintenant, je réalise, plus on connaît la physiologie, plus on sait à quel point c'est de la chance, là. C'est de la résilience. C'est la résilience du corps.
- Rébecca
Je suis tellement reconnaissante à mon corps d'avoir été si résilient. Je me remets de mes émotions peut-être un quart d'heure, vingt minutes après. À l'époque, le pot à pot pendant deux heures, ça ne se faisait pas spécialement. Retarder, j'ai envie de dire le clampage optimal du cordon quand on laisse plus son sang à son bébé. D'ailleurs, on m'a dit, est-ce que vous voulez donner le sang du cordon pour sauver des vies ? Tu dis oui parce que tu penses que tu vas faire une... bonne action en te disant, ben, il vaut mieux que ça sauve des vies plutôt que ça soit perdu. Sauf que personne va te dire que ce qu'on donne aux autres, ça appartient d'abord à ton bébé. Ce que j'avais su, bon. Mais même ça, ça n'a pas été bien puisque la personne qui est venue récupérer mon placenta a dit que ça ne suffisait pas pour la science, non, que ça ne suffisait pas pour récupérer des cellules souches ou quoi, qu'il était trop petit. Et qu'il irait bien pour la science, quoi. Super. Donc même moi, en tant que mère, j'ai été disqualifiée sur ma capacité à faire un placenta utile à ce moment-là. Du coup, je n'ai même pas vu mon placenta. Je me suis dit, bon, mais il était peut-être ridiculement petit. Je ne sais pas. Je ne sais pas ce que j'ai fait, mais je n'ai pas bien fait. Je suis restée avec ça en me disant, bon, je fais des petits placentas. Oui. Oui. C'était nul. J'avais qu'une hâte, c'était de rentrer en chambre. Et puis, avec la brèche, j'avais super mal à la tête. Je n'avais pas l'usage de mes jambes. Donc, on m'appuyait sur le ventre pour que je fasse pipi dans un pot. Tu as 20 ans, tu as le ventre en accordéon, tu viens d'accoucher. J'ai eu 11 points. 11 points. Putain, ça fait super mal. Ça fait plus mal que l'accouchement, je trouve, parce que cette douleur, elle est aiguë, elle est constante. J'en avais plein d'eau. Vraiment, j'en avais plein d'eau. Ah ouais, le postpartum n'avait pas été cool. Je n'ai pas apprécié mon séjour à la maternité. Il faisait trop chaud. L'eau, on ne nous filait pas des boulettes à l'iso comme ça. On était rationnés sur les protections hygiéniques qu'on nous donnait. J'étais en chambre double. Non, mais il n'y avait rien qui allait. Vraiment, il n'y avait rien qui allait. J'avoue,
- Molly
tu nous dépeins un peu le tableau qu'on redoute le plus possible.
- Rébecca
et puis la bouffe, rien que la bouffe putain t'as faim, t'as fait un bébé t'as une bouffe mais dégueulasse qui fait pas envie avec des portions ridicules mais il y avait rien qui allait quoi, vraiment il n'y a pas un moment où je me suis dit waouh c'est confortable, tu te reposes non, on vient toutes les deux heures dans ta chambre, jour et nuit pour prendre ta température, la nuit on fait genre tu dors pas Et même pas on te dit bonjour, on t'allume la veilleuse, t'as ce truc dans l'oreille. Et puis c'est pas les mêmes deux heures que la femme à côté. Donc en fait t'as toujours du passage, mais c'est... Mon dieu, c'est invivable. C'est invivable. À 7h30 du matin, ça va, la nuit a été bonne, le bébé a bien têté. Mais en fait on n'a pas fini la nuit là, enfin on peut dormir. Mais non, c'est le petit-déj. Parce qu'on a décidé qu'à 8h30 t'aurais mangé. Et qu'à 9h on commence les bains, mais y'a rien qui va. J'avais qu'une hâte, c'était de rentrer.
- Molly
Des cris comme ça.
- Rébecca
Ah ouais, non, j'avais qu'une hâte, c'était de rentrer. Puis je suis rentrée un peu plus tard que prévu, parce que du coup, j'étais jeune, j'étais toute seule. Donc en termes de risques psychosociaux, j'étais là, une personne à surveiller. Et bon, ça, c'est le protocole, j'ai envie de te dire, c'est plutôt bien. Mais j'ai eu une montée de l'écarabiné. Et puis j'ai... Je pense que j'étais proche de la mastite. Si je n'allais pas me faire masser toutes les heures pour désengorger, je pense que j'aurais fait une mastite en rentrant chez moi. Donc, au moins, j'avais les plus petits seins du service, mais je peux vous dire que je ne manquais pas de lait. Donc, même là, mon corps a été étonnamment résilient. Oui,
- Molly
il a tout mis en oeuvre pour que ça aille.
- Rébecca
Oui, il a fonctionné correctement en dépit de tout le reste. C'est ce que je me dis qu'il est flou, quoi. Et ça, ça m'a affermie pour les autres naissances.
- Molly
Ok. Justement, si on saute un petit peu dans le temps, du coup, deuxième grossesse.
- Rébecca
Deuxième grossesse, cinq ans plus tard, avec un homme que j'ai épousé. Donc, complètement différent le contexte. Contexte familial, social complètement différent. Et puis moi, je reste déterminée, je ne foutrai pas un pied à l'hôpital. C'est-à-dire que...
- Molly
Cette fois, c'est sûr, tu n'iras pas.
- Rébecca
Ah mais ouais, mais là, je préfère être seule, envers et contre tout. Chez moi. Parce qu'on est mieux seul que mal accompagné. Et là, je l'ai bien compris, donc c'est non négociable. Mais non négociable, non négociable. C'est-à-dire que le seul compromis que j'ai accepté de faire, je l'ai lancé un peu comme un défi. C'est-à-dire qu'il m'a dit « Oui, mais t'es sûre que tu veux pas qu'il y ait une sage-femme ? » Et je lui ai dit « Si tu la trouves, on l'embauche. » Il l'a trouvée, on l'a embauchée, et je lui ai dit « Bon, on l'engage, mais elle aura pas le temps de venir. » Et c'est exactement ce qui s'est passé. Elle n'a pas eu le temps de venir. Parce que mon corps fonctionne très bien. Donc, l'accouchement le plus rapide que j'ai eu, en 4 heures, on n'en parlait plus. Et moi, j'ai tellement eu comme base de repère cette première expérience que j'avais eue avec la souffrance vraiment, que j'ai pas souffert du tout. J'ai eu un peu mal à la fin, genre les 20 dernières minutes. Mais j'étais sûre de moi, je me suis dit non mais j'ai pas mal là, c'est tranquille, c'est pas pour maintenant. J'étais vraiment zen. Je gérais bien quoi, j'étais dans ce qu'il fallait vivre. Puis à la fin je me suis dit ah ouais ouais, à la fin je me suis dit là quand même, peut-être il va arriver rapidement le bébé quand même. Mais j'ai pas menti, j'ai pas triché. J'ai écouté mes sensations et mes sensations me disaient que c'était pas... Voilà quoi. Donc ma fille est née et j'ai dit à mon mari, qui est partant pour un troisième tour, moi je remets ça de suite parce que franchement c'était génial. Et je me suis dit c'est tout. C'est ça l'accouchement en fait. On en fait tout un foin. Alors que c'est simple, c'est rapide, c'est facile, c'est fait pour être comme ça en fait. Et je me suis dit, ouais, ouais, ouais, bah écoute, moi des enfants comme ça, si c'est ça accoucher des enfants, j'en fais 10. Parce que je crois que j'adore accoucher quoi.
- Molly
Et toi t'adores être enceinte, t'adores accoucher finalement.
- Rébecca
Ah complètement. Complètement, ça vaut tous les petits mots, ça vaut tout. Ça veut pas dire que je vis des grossesses toujours faciles ou que... Mais je... Je... Je choisis d'être épanouie dans ce que je vis, d'être reconnaissante de ce que je vis et de profiter jusqu'au bout. Même si des fois, il y a des jours où c'est plus dur que d'autres, c'est plus éprouvant que d'autres, ça passe. Ça reste un état de grâce en fait. C'est le regard qu'on pose dessus qui influence aussi l'expérience qu'on vit.
- Molly
Et du coup, si on revient un petit peu en détail sur ce deuxième accouchement, comment ça se passe concrètement ?
- Rébecca
Concrètement, j'ai mes premières contractions à 4h du matin. Donc là, je suis contente. C'est-à-dire que les premières contractions...
- Molly
Histoire qui se répète.
- Rébecca
Mais oui ! Mais pour toutes mes filles, j'ai accouché à 40 semaines, pile poil. J'ai eu des contractions à... Oui, ma troisième à 2h du matin, mais sinon, c'était 4h. Et en général, à 8h30, c'est plié, quoi.
- Molly
Oui, c'est rapide.
- Rébecca
Oui, mais ça fonctionne bien, en fait. Moi, la seule chose que j'ai à penser quand j'accouche, c'est « Youhou, mon bébé, il arrive ! » C'est l'enthousiasme, c'est l'effervescence, c'est la joie. Je ne me dis pas, oh là là, je vais accoucher. Oh là là, ta puleur. À quelle heure je vais partir à la maternité ? Vite, une application pour compter mes contractions. Mais ça ne sert tellement à rien. Ce n'est pas parce que tu vas compter que... Écoute-toi, ton corps, il te dit les choses. Vis-les, les choses. Tu les incarnes à ce moment-là. Vis-les. Donc, moi, je suis à fond dans ça. Je marche si j'ai envie de marcher. C'est ça. Je mange si j'ai envie de manger, je me fous de l'heure, je vis mon truc. Et là, c'est exactement ce qui arrive, 4h du matin, youhou, petit déjeuner à 8h parce que ça me fait plaisir. 7h30, je me dis ouais, j'irai bien dans un bain. Non, non, non, c'est ça. Non, 7h30, je vais au bain parce que... Non, j'ai déjeuné vers 6h. Ouais, j'ai dû déjeuner vers 7h parce que ça me faisait plaisir. 7h30, je me dis qu'est-ce que je vais foutre de ma vie ? Je ne sais pas trop, je suis bien là, mais en même temps, je commence à être un peu dans l'inconfort. Mon mari me propose un bain, je me dis allez go. Je vais dans le bain, 8h, le bain me gave. La baignoire est trop dure. Le fond de la baignoire est trop dur, ça fait des frances. J'aime l'eau chaude, je suis bien dedans, mais la matière de la baignoire, j'ai envie de tout casser. J'ai envie de dire... Je suis déjà dans un état de conscience altéré à ce moment-là, donc évidemment, je ne supporte pas le moindre bruit, la lumière me gonfle, voilà. Il me faut cette bulle-là, sans être agressive. Parce que dans ma tête, je le pense comme ça. C'est-à-dire qu'un bruit va me déranger. Dans ma tête, je vais dire ta gueule. Mais ma bouche sortira jamais à ta gueule. Je vis mon truc, je le pense. Mais il n'y a pas de son qui sort de ma bouche. Et je... 8h, je dis, oui, bon, essuie-moi. Et puis mets-moi... Enfin, ferme-moi la chambre. Je vais être couchée. 8h, je me couche. Et là, j'ai une phase de quiétude. Mon Dieu, un quart d'heure de phase de quiétude. Mais je n'ai aucune notion du temps à ce moment-là. C'est mon mari qui m'a fait le récit après. Là, je dors. Je dors, je suis dans une plénitude. Je suis bien. Aucun inconfort. Aucune douleur,
- Molly
rien d'agirable du tout.
- Rébecca
À ce moment-là, je n'ai plus de contraction. Je suis dans un état second. ou je plane, ou j'ai l'impression d'être dans la même plénitude que mon bébé, je suis de ce monde mais pas de ce monde, je dors et en même temps je suis consciente, je suis bien, je n'ai pas froid, je n'ai pas chaud, je n'ai pas faim, je n'ai pas mal, je suis parfaitement bien. Mais pendant ce temps que je ne saurais pas définir, mais qui est profondément ressourçant, mais tellement agréable à vivre. Et là, une contraction me sort de cet état-là où je sens mon bébé descendre d'un coup et la tête commence à émerger.
- Molly
Oui, à ce moment-là, ça ne t'est pas du tout venu à l'esprit d'appeler la sage-femme. Tu t'es dit, je gère.
- Rébecca
J'étais bien, moi. Mais j'étais bien, mais j'étais tellement bien. Et puis, j'avais pas mal. Oui. En fait, mon bébé, il n'allait pas naître maintenant. Oui. Dans ma tête, c'est quand tu souffres que tu as un bébé qui arrive. à peu près en termes de timing. Mais vraiment là, pas du tout. Et puis c'est quand je l'ai senti s'engager dans le bassin que j'ai dit « ah ouais ouais ouais » . Et puis c'est vers 7h30, quand j'étais dans le bain, que mon mari l'a appelé la sage-femme, il a dit « bon finalement, je pense que quand même, c'est peut-être le moment » . Ça s'approche quand même. Ouais, mais elle lui a dit « écoute, fais-moi écouter comment elle râle » . Ouais. Donc le râle et tout, elle lui a dit « Ouais, je vais me mettre en route quand même. » Elle me dit « Bon, passe-la moi. » Elle me dit « Comment tu te sens ? » Je dis « Après, je suis bien là. » Elle me dit « Écoute, je me suis engagée à amener deux gamines passer leur brevet. Est-ce que je trouve un plan B ? » Et moi, je suis très franche, très honnête. On ne peut pas être plus sincère à ce moment-là. C'était le fond de ma pensée. Je lui dis « Écoute, ces gamines, elles jouent leur vie à ce moment-là. Moi, je suis bien. Le bébé, il ne va pas arriver tout de suite. Franchement, tu as le temps. » tranquille. Puis si le bébé, il arrive avant, mais qui ne m'effleurait pas spécialement l'esprit, j'ai envie de dire normal, quoi. Oui,
- Molly
tu n'as pas peur, toi.
- Rébecca
Non, non, et puis c'est petit, là, elles passent leur brevet, tu sais qu'à cet âge-là, c'est hyper important. Tu as l'impression que si tu rates ton brevet, tu vas rater ta vie. Bon, après, tu grandis un peu et tu prends du recul sur les choses, mais à cet instant-là, cet enjeu-là, il est capital. Et moi, je me suis dit, ces petites-là, on ne va pas leur mettre un faux plan, alors que moi, il n'y a rien qui presse. Oui,
- Molly
non, toi, tu es bien, tu es tranquille, tu es chez toi.
- Rébecca
Mais complètement. Puis 7h30, 8h dans le bain, honnêtement, je n'aurais pas dit que j'avais passé une demi-heure dans le bain. Dans ma tête, c'était peut-être 5 minutes.
- Molly
Oui.
- Rébecca
Oui, oui, j'avais plus la notion du temps, j'avais mangé, j'étais bien. J'étais dans le noir dans ma baignoire. au chaud et puis jusqu'à ce que ça me gave et ça s'arrête là. Et puis je me suis levée, je suis allée dans mon lit, j'ai eu ma phase de quiétude. Je suis sortie de ma phase de quiétude, mon bébé est né en... Je ne sais pas, il y a trois minutes.
- Molly
Ok, d'accord. Tu l'as sentie arriver d'un coup et elle était là ?
- Rébecca
8h18, elle est née, je crois. Ok. Mais 8h18, quand je suis sortie de ma phase de quiétude, je me rappelle avoir crié « Elle est là ! » comme ça. Et du coup, mon mari arrive avec ma fille dans la pièce, puisque c'était un mardi. Donc, mon aîné de 5 ans était là, et elle avait compris que le bébé était en train de naître, qu'elle n'irait pas à l'école. Meilleur jour de sa vie.
- Molly
C'est la fiesta, j'ai une petite soeur, je ne vais pas à l'école, nickel.
- Rébecca
Non, mais exactement. Et puis, mon mari arrive, il était en train de jeûner avec ma grande, et puis il me dit... Il me dit à ce moment-là, je pense que la douleur te fait délirer parce que je vois rien. Donc je te dis rien pour pas te décourager, mais je crois que dans mes souvenirs, il a dû sortir un pauvre... Non, mais elle n'est pas encore là. Mais très délicat, tu vois. Moi, dans ma tête,
- Molly
je me dis...
- Rébecca
Moi, dans ma tête, je me dis... Mais putain, je sais encore ce que je sens. je saurais te dire comment il est placé mon bébé, dans quel sens, dans mon bassin, et il part, il part, il retourne à ses occupations, c'est ça qui est ouf dans la méchanceté, c'est l'extraordinaire qui se greffe à l'ordinaire, donc bébé arrive, Petit déjeuner, tranquille. Et puis il part, mais il n'a pas le temps de se rasseoir que je lui crie « Elle arrive ! » « Où elle est là ? » Et là, il y avait déjà la tête dehors.
- Molly
C'était fait.
- Rébecca
Mais là, il revient et il fait « Ah ! » J'aurais peut-être dû la croire. Et ma fille qui arrive, « Super maman, on voit la tête du bébé, on voit la tête de ma sœur, c'est génial, elle est bientôt là. » Et moi, je suis en train de me dire, « Allez, prochaine contraction, c'est terminé. » Et c'est exactement ce qui s'est passé. Prochaine contraction, c'était terminé. Tu souffles ton bébé, tu ne le pousses même pas, donc je n'ai même pas fait d'effort. J'étais en position allongée sur le côté, parce que j'étais bien dans cette position avec le... Donc j'étais sur le côté gauche, donc j'avais la jambe droite sur l'épaule de mon mari. Tout simplement, je suis rélevée sur l'épaule de mon mari. Et mon bébé est né comme ça, facilement, en trois poussées, 8h18, terminé. C'était trop bien. J'ai pris mon bébé, il était tout chaud, contre moi. À ce moment-là, il n'y avait pas d'heure, il n'y avait pas de temps, il n'y avait pas de... Je fais la rencontre avec mon bébé, c'est le plus beau, encore une fois, c'est le plus beau du monde. Il sent délicieusement bon, cette odeur de liquide amniotique, l'odeur du lait maternel, je fond d'amour. Et je commence à reprendre mes esprits, peut-être 20 minutes après, où je commence à me dire « Bon ! » C'était sympa. Je remettrai bien ça. Je suis bien là, donc je vais rester là.
- Molly
Ok.
- Rébecca
Je ne me dis pas, oh là là, la sage-femme n'est pas arrivée. Oh là là, le placenta, j'en ai rien à foutre. Je suis bien, je reste là.
- Molly
Tu es en total de toi-même.
- Rébecca
Complètement. La sage-femme arrive trois quarts d'heure après la naissance du bébé, donc vers 9h, je crois. précipitamment et puis elle dit ah bah y'a rien à faire hein faut juste péter le champagne ou quoi un café donc en fait elle a rajouté de la joie à ce moment là puis oui on a bu je sais plus si on a peut-être pété le champagne à ce moment là je ne sais plus quand même je sais plus à quelle heure puis elle m'a dit bon tout va bien oui ton bébé va bien oui le placenta on en est où je sais pas Elle m'a dit, tu me permets, je touche. Donc, elle a juste posé la main sur mon ventre. Elle m'a dit, je pense qu'il est décollé. Tu veux pousser ? Je lui ai dit, non. Elle m'a dit, est-ce que tu veux tirer sur ton cordon ? Donc, je ne sens pas trop ce qui se passe. J'ai dit, écoute, je ne sens rien. Donc, elle m'a dit, juste, si tu ne sens rien, accroupis-toi. Je me suis accroupie, le placenta est tombé dans le saladier. Simple, facile, je n'ai rien senti.
- Molly
Naturel.
- Rébecca
Ouais, bon il était entier et c'est la première fois que je découvre mon placenta, je le trouve beau. Ouais. Je me dis ah ouais c'est ça.
- Molly
C'est pas un petit placenta tout nul.
- Rébecca
Non et puis même s'il était petit en fait j'avais pas conscience qu'il était petit. Je sais pas, je l'ai trouvé parfait comme il était en fait. Je me suis dit waouh ce truc il a fonctionné, il s'est fabriqué tout seul, il a fonctionné tout seul. Il a fait son job, il s'est détaché tout seul, c'est extraordinaire, c'est beau quoi. Ça s'arrête là. J'étais émerveillée comme ça. Du coup, je me suis un petit peu levée. C'est le moment où je me suis dit, maintenant que je suis debout, je veux bien prendre une douche. Donc, j'ai laissé papa faire son pot à pot, peser, mesurer, tout ça. Je suis revenue dans mon lit, frais, moi fraîche. J'ai repris mon bébé en pot à pot, tété et on n'en parlait plus, c'était fini. J'ai pas quitté le lit de je sais pas combien de jours, peut-être 5 jours, une semaine bien tassée. Oui. J'étais bien.
- Molly
Oui, tu t'écoutais.
- Rébecca
Oui, c'était simple. C'était facile. En fait, c'est comme ça que la nature a conçu les choses. On a l'impression que c'était extraordinaire, mais pas du tout. Ce qui est extraordinaire, c'est que ça fonctionne bien dans un endroit où on va à l'encontre de ça. Et du coup, j'ai expérimenté cette facilité. Pour la troisième, j'ai dit laisse tomber, on ne va pas s'embêter avec une sage-femme. Puis mon mari m'avait dit, je n'osais pas le formuler, je me suis dit non mais la première à la fois, elle n'a pas eu le temps d'arriver. Mais la troisième, je n'ai pas envie de l'appeler. Et mon ex-mari m'a dit bon en fait c'était tellement bien que j'aimerais bien revivre la même chose. Donc il m'a dit soyons honnêtes, ne prenons pas de sage-femme. Je suis prête, je suis convaincue. Adieu, j'ai vendu mon garçon. Bon cours.
- Molly
Et ça ne te faisait pas peur du tout, toi ?
- Rébecca
Non. Non, parce que je l'avais expérimenté. Déjà, je l'avais conceptualisé, parce que je me suis dit, je ne me ferai plus jamais avoir après la première fois. Donc là, j'ai commencé à me renseigner quand même. Je commence à lire des livres, puis j'ai eu cette chance de parler anglais, donc d'avoir cette possibilité d'aller trouver des ressources anglophones qui sont bien plus riches que ce que nous on peut avoir en français. Donc si j'avais envie de creuser un truc, je pouvais passer des heures sur mon ordinateur, aller chercher des livres, aller chercher des interviews, des podcasts. Je me suis nourrie, j'avais la connaissance et il fallait juste que j'écris. de m'en servir pour l'expérimenter. Là, j'avais la connaissance et j'avais l'expérience. Après, je n'ai pas cessé d'apprendre. Je n'ai jamais cessé d'apprendre en 12 ans. J'apprends encore, je suis encore en train de lire des livres. Je n'ai déjà pas fini ce que je suis en train de lire, que je sais déjà lequel je vais acheter ensuite pour lire et regarder des documentaires.
- Molly
Tu t'es passionnée sur le sujet.
- Rébecca
Mais exactement. Exactement, j'ai eu cette chance de me former à la physiologie. J'ai eu une bourse d'études pour ça, punaise. Je suis super fière.
- Molly
Tu as repris des études là-dedans, au final.
- Rébecca
J'ai subi une formation américaine de ce qu'on appelle True Midwifery. Aujourd'hui, on pourrait appeler ça de la véritable sage-famerie, un peu l'ancêtre de la matrone, celle qui a ce savoir empirique. savoir empirique qui s'est perdu et en même temps couplé avec ce savoir scientifique et académique qu'on a aujourd'hui parce que des études ont été faites parce que mais c'est pas dans l'ignorance au contraire en fait non non non non c'est justement c'est le fruit d'un cheminement c'est le fruit de d'un questionnement qui a mené à ce cheminement et puis qui moi je me suis formé dedans parce que j'adore ça Maintenant, il n'y a pas besoin d'avoir autant de connaissances pour faire un nana ou accoucher chez soi avec une sage-femme, pas du tout. Quelques bases, je pense, peut-être, oui, pour déconstruire. Mais il n'y a pas besoin d'en savoir autant. Moi, je le fais parce que ça me passionne, parce que j'adore ça, parce que ça me nourrit, parce que je suis un peu tous les jours dedans. Mais voilà, j'en rêve d'en faire mon métier. Je rêverais de faire des études de sage-femme et d'être justement cette sage-femme qui ne bosse surtout pas l'hôpital, qui permet aux femmes de vivre leurs annas. Qui fait tout ce que tu voudrais,
- Molly
ce que tu aurais voulu pour toi.
- Rébecca
Oui, en termes d'accompagnement comme en termes de transmission. Et puis, je pense que c'est tellement... Il y a quand même un écart entre... Faire un accouchement à la maison avec une sage-femme et faire un accouchement libre et autonome, complètement souverain. Parce que là, tu réalises que tu prends la totalité des responsabilités. Et je pense qu'on est dans une société où, outre l'anesthésie à outrance, la douleur n'a pas de place dans notre société. Elle n'a même pas de sens. On ne veut pas lui donner de sens. En fait, on est sourd à ça. Enfin, ouais. C'est une réflexion très basique mais qui mériterait d'être plus développée. Il y a aussi cette façon qu'on a de jamais prendre nos responsabilités. On fait des choix, souvent on se victimise et puis souvent on remet la faute sur l'autre aussi. Et je pense que dans l'accouchement il y a ce truc. Il y a ce truc où on préfère laisser la main à quelqu'un d'autre en se disant « c'est plus facile de dire que j'ai été victime de ça plutôt que d'avoir affirmé mon choix, d'avoir pris mes responsabilités. » Et puis, plutôt que de dire « non, ça va à l'opposé de mes valeurs, je prends mes responsabilités et je décide de vivre autre chose, d'offrir autre chose à mon bébé comme expérience de naissance. » Et moi, de vivre autre chose en tant que femme, en tant que mère, dans mon entrée dans la maternité, justement, vis-à-vis de ce bébé, je pense qu'il y a beaucoup de choses où aujourd'hui, on a le savoir beaucoup plus facilement qu'avant. Mais je pense qu'on est encore dans un discours trop lisse, à mon sens, où on dit « Ouais, le savoir, c'est le pouvoir, mais le savoir, si tu t'en sers pas, c'est pas une arme, en fait. » Ça ne sert à rien d'avoir des livres dans ta bibliothèque si ça ne change pas ta façon de vivre. Ou si tu ne les lis pas. Déjà, un livre, on te dit que ça ouvre un monde. Mais il faut déjà ouvrir le livre. Il faut le lire. Il faut te nourrir. Et puis, cette nourriture intellectuelle, spirituelle, t'en fais quoi ? Ça ne sert à rien de savoir que le McDo, ce n'est pas bon si tu continues d'aller bouffer toutes les semaines. Ça ne va pas changer ta vie de le savoir. Il faut le mettre en pratique. Et je pense qu'on a oublié, ou on a encore ce discours trop lisse, parce qu'on ne veut pas heurter, parce que c'est quand même très...
- Molly
C'est un contre-courant quand même, donc ça fait peur.
- Rébecca
Ah mais oui, mais oui. Et du coup, de dire juste, ben écoute, c'est cool si tu le sais, mais si tu ne t'en sers pas, tu ne prends pas ta responsabilité, tu ne risques pas de vivre autre chose. On n'y est pas encore. Et je trouve ça dommage. Parce que les femmes, je pense qu'elles sont capables de l'entendre, elles sont capables d'apprendre, elles sont capables de cheminer, puis elles sont capables de faire des choix. Et je pense que si on dénonce l'infantilisation de ce système dans lequel on nous tient par la coercition puis on nous veut dociles, on ne peut pas la dénoncer d'un côté et en fait continuer à avoir un discours où... Non mais c'est bon le savoir, c'est le pouvoir, si tu le sais, tu peux. Il y a encore une petite marche avant. essentielle.
- Molly
Un peu plus que ça.
- Rébecca
Exactement. Non, mais c'est vrai. Je pense que ça fait toute la crédibilité du discours aussi. Souvent, on me dit « Ah, t'es courageuse » , mais pas du tout. Je ne suis pas courageuse d'avoir choisi la facilité. La facilité, physiologiquement parlant, j'ai choisi la facilité. Ce qui a été le plus délicat, ça a été de dire « Oh putain, je le sais » . Je le sais, je l'ai compris, je l'ai conceptualisé, je sais comment ça fonctionne. Maintenant j'affirme mon choix. J'accepte de renvoyer des choses qui paraissent complètement folles. Ça me va. Et peut-être le courage il est vraiment là, de s'affirmer, de dire ouais non mais... Moi je ne me reconnais pas dans vos normes, je ne me reconnais pas dans vos pratiques, je ne sais pas ce que je veux, je veux vivre autre chose. Je ne crois pas à ce discours comme quoi mon corps est cassé, comme quoi c'est un événement médical, non. Je ne crois pas à ça. Ça demande des couilles de s'affirmer, ça demande de l'audace de le formuler. Parce qu'on peut juste dire oui, oui. et faire profil bas. Alors des fois, c'est très bien, c'est sage. Attention, je ne dis pas qu'il faut forcément enfoncer toutes les portes qu'on a devant soi. Mais je pense que le courage est surtout là. Je veux dire, ce n'est peut-être pas moi qui le dis de ma bouche. On a des Michel Audin, on a des Ruth Erhart, on a des Sarah Wickham, on a des gens connus dans le monde qui sont à l'initiative de dire « Eh les gars, Il y a autre chose à vivre, il existe autre chose. On est en train de faire quelque chose à l'échelle de l'humanité qui n'est pas bon. Et je me dis, punaise, si j'avais la chance, ne serait-ce d'avoir qu'un diplôme, juste dans l'espoir d'avoir une légitimité. Oui,
- Molly
c'est ça.
- Rébecca
mais pour peut-être avoir la possibilité d'aller toujours plus loin dans cette étude-là. Quand je vois Michel Audens qui, à son âge, la connaissance, le puits de connaissance qu'il ait, les recherches qu'il a faites et qu'il dirige, et je me dis « waouh, mais il faut un héritier, il faut des héritiers, il faut des bébés Michel Audens, il faut des gens qui reprennent ça, parce que c'est une base excellente et profondément riche, et qui aille encore plus loin. » On ne peut pas, je veux dire, le jour où ce monsieur va s'éteindre, on va perdre quelqu'un, on va perdre quelque chose. Et je me dis, il faut qu'il y ait des gens qualifiés. qualifiés peu importe leur qualification mais qui reprennent le flambeau et qui aillent plus loin et j'aimerais sans prétention aucune pouvoir en faire partie en fait pouvoir en faire partie étudier ce qui se fait dans le monde et tu dis c'était tellement beaucoup plus riche que cette façon qu'on a très aseptisé très industrialisé très ouais normalisé en fait qu'on a On a tout dénaturé, on a tout saccagé, on a tout saboté. Je trouve ça triste. Déjà pour les femmes et les bébés à plus petite échelle, mais à l'échelle de l'humanité, quand on se rend compte des conséquences sur la santé que ça a, sur la diade mère-enfant, je me dis, waouh, on ne peut pas avoir conscience de ça et dire, bon, ce n'est pas grave. Non, c'est trop précieux.
- Molly
Précieux. En tout cas, merci pour toutes ces réflexions. Merci. Si on revient un petit peu sur ton troisième accouchement, du coup, par choix de le faire non accompagné, comment ça s'est passé du coup, de la même manière que le deuxième, très naturel et presque un non-événement au final ?
- Rébecca
Plus événementiel, je dirais. Dans son sens où j'ai eu des contractions à 2h du matin, donc là, j'étais dans la joie. Et puis, le processus de naissance a été complètement anarchique. Donc c'était assez vif, assez rapproché, puis plus grand chose, tranquille. Donc je ne savais pas du tout où j'en étais, mais je savais que j'étais dans le processus qui se vivait. Il y avait ma sœur, il y avait mes filles et il y avait une photographe. Donc ça c'était... médicalement on était seules. socialement on était accompagnés. Oui. Et donc, le travail était complètement anarchique et puis de 7h à 8h, j'ai eu cette phase de quiétude, la même que pour ma première, enfin pour mon premier Anna, mais là... Ça a duré une heure. Pendant une heure, j'étais dilatée au max, je n'avais aucune contraction, j'étais dans un sommeil profond. Et mes pieds, mes pieds, mes pieds... Qu'est-ce que j'étais bien ! J'ai hâte d'accoucher une nouvelle fois, me souhaitant de revivre une phase de quiétude, parce que qu'est-ce que c'est bon, je crois que ça vaut toutes les drogues du monde.
- Molly
Oui, et ça t'est shooté en fait.
- Rébecca
Ah, t'es shooté aux hormones, c'est génial, c'est génial. Mais dans ma tête, ça n'a pas duré une heure. C'est-à-dire que je n'avais aucune idée de l'heure, du temps que ça prend. Et une... Là, c'était violent quand même. Une violente contraction m'a sortie de cet état et m'a clouée au sol. Et là, je me suis dit... Ouf ! Je me suis dit, à ce moment-là, une unité de douleur supplémentaire et je meurs.
- Molly
D'accord.
- Rébecca
C'est-à-dire que c'était la limite, je crois, de ce que je pouvais supporter. Et là, mon mari, fort d'une première expérience, il savait que c'était le moment. C'est-à-dire que là, il ne s'est pas dit, bon allez, je vais déjeuner.
- Molly
Je vais aller faire ce que j'ai à faire dans le salon.
- Rébecca
Non, non, mais c'est ça. Puis pendant que je dormais, il faut savoir que quand je me suis endormie, je me suis endormie dans le salon, sur le canapé. Tout le monde a dormi. La sage-femme, pas du tout. La photographe s'est assoupie. Ma sœur s'est assoupie. Mon mari s'est assoupi. Donc en fait, la naissance du bébé a régi l'espace-temps de la maison. Hormonalement, on était tous au diapason. Et je trouve ça fabuleux parce que moi, je n'avais aucune conscience de ce que foutaient les autres. Alors, je vous dis, j'avais l'air carrée. Je ne sais pas du tout dans ça. Quand ils m'ont dit, mais en fait, on a dormi. En fait, on a tous dormi. Et je trouve ça, mais...
- Molly
Oui, l'apaisement.
- Rébecca
Mais oui, mais en fait on dit que la peur est contagieuse. Alors de facto c'est vrai, la peur est contagieuse. Si moi j'ai peur, toi tu vas avoir une décharge de cortisol parce que tu vas voir sur mes traits qu'il y a quelque chose d'effrayant et ton cerveau va se dire, punaise, il y a peut-être un instinct de survie à déclencher, est-ce qu'il faut que je parte, est-ce qu'il faut que je fasse quelque chose ? Et la peur est contagieuse. Et là en fait... j'ai réalisé qu'il n'y avait pas que la peur qui était contagieuse, il y avait la paix aussi. La paix, l'hormone de l'ocytocine était contagieuse. Et là, je me suis dit, waouh, c'est trop beau. Mais je ne l'ai su qu'après, parce qu'à ce moment-là, je n'avais pas conscience que j'endormais.
- Molly
Oui, tu étais à toi-même complète.
- Rébecca
J'étais loin. J'étais loin, mais j'étais bien dans moi. Et donc, mon mari comprend que c'est le moment. Et il me dit, de quoi tu as besoin ? Et moi, je ne peux pas. Je ne peux pas parler. Je ne peux pas répondre. Pourtant, les réponses se précipitent dans ma tête. Ferme cette putain de fenêtre, il y a trop de lumière. Ferme ta gueule, tu fais trop de bruit. De quoi j'ai besoin ? Je ne sais pas. Mais c'est terrible parce que dans ta tête, il se passe des choses et en fait, ton corps est dans un état de conscience altéré. Et physiquement, tu mobilises des ressources pour l'événement et du coup, tu ne peux pas mobiliser de ressources pour le social.
- Molly
Oui, forcément.
- Rébecca
Mais c'est génial parce que moi, je ne le vis pas comme un handicap à ce moment-là. Je vis les choses dans ma tête. Je ne me dis pas, oh zut, tu ne lui as pas répondu. Socialement, ça ne se fait pas. Je ne me le dis pas, juste je réponds dans ma tête et puis voilà. Et donc ? Et donc je lui dis la fenêtre, mais l'effort surhumain pour dire la fenêtre. Pour qu'il comprenne, il faut faire juste un peu le volet. Parce que la lumière me dérangeait, la lumière du jour était une agression pour moi. Je crois qu'après il me dit est-ce que tu veux... Et là je crois que j'ai... Parce que je n'arrivais pas à dire autre chose, il ne me parlait pas. Et je me rappelle qu'il a mis un plaid sous mes genoux parce qu'à ce moment-là j'étais à genoux. Et heureusement qu'il a fait ça. Parce que c'est simple, mon bébé est né. Il s'est jeté dans la vie. C'est-à-dire que du haut de mon estomac jusqu'au bas de mes genoux, il s'est passé une fraction de seconde. Et elle est née. comme ça. Je n'ai pas soufflé, je n'ai pas soufflé mon bébé. Il est tombé. Il s'est jeté dans la vie comme un toboggan d'enthousiasme. Il n'y a pas eu de couronnement et la tête et les épaules. Ça a été entier. Entier en une fraction de seconde. Ma sœur a filmé le moment. On ne voit pas ma fille naître. Tellement ça a été rapide. ça a été extrêmement rapide et du coup violent aussi, physiquement j'avais l'impression que je faisais une descente d'organe de tout le buste. Et la photographe qui a fait mode rafale, où je ne sais plus comment elle a fait ça, il y a une photo où on ne la voit pas, il y a une photo où on la voit entière. Et c'est à ça qu'on sait l'heure à laquelle elle est née. Mais je vous le dis, elle est née tellement vite que je l'ai à peine rattrapée. Il a dû se passer entre la phase de quiétude et le moment où ma fille est née, elle a dû se passer trois contractions. Oui,
- Molly
c'est ultra rapide.
- Rébecca
Ultra rapide. Ultra rapide. La livraison a été éclair. Et là, donc, mon bébé et moi, on met du temps à atterrir, quoi. Parce que ça a été violent pour moi, mais ça a été violent pour elle. Donc, à ce moment-là, je ne sais pas que c'est une fille. Donc, on... Elle, elle pleure pas mal. Généralement, mes bébés étaient silencieux à la naissance. Donc là, j'ai un bébé qui pleure. J'essaie de me ressaisir, de dire « Oui, mon bébé, ta naissance, elle a été violente. Oui, mais tu l'as fait. » J'essaie de lui parler. Je ne sais pas au bout de combien de temps je reprends mes esprits. Je n'en ai aucune idée. Je suis juste couchée avec mon bébé contre moi. On se remet tranquillement. Et on a dû peut-être découvrir le sexe du bébé peut-être 40 minutes après.
- Molly
Oui, penser, regarder, c'était vraiment...
- Rébecca
Oui, une fois que tu t'es ressaisie et que tu te dis, bon, qui es-tu ?
- Molly
En fait !
- Rébecca
Oui, mes filles aînées, à l'époque 7 et 2 ans, ont assisté à la naissance. Elles ont ramené des jouets pour faire connaissance avec le bébé et tout. Et puis, c'était simple, c'était basique. Et puis, à un moment, je me suis dit, j'en ai marre un peu d'être allongée. Je crois que mon placenta a dû naître peut-être une heure et demie, deux heures après la naissance du bébé. Je me suis levée, pareil, dans le saladier. Je l'ai trouvé beau. Il était entier, tout simple. Je ne l'ai pas poussé. Je l'ai laissé faire sa vie. Et puis oui, je suis allée à la douche. Il y a eu ce moment pareil avec le papa, le pot à pot, la pesée. Et puis la première tétée en famille sur le canapé. Et puis après, on a pété le champagne avec la photographe, avec ma sœur. C'était bien comme ça. Et ouais, je crois qu'elle est née à 8h20, un truc comme ça. Donc quasiment pareil que la deuxième.
- Molly
Oui, c'est ça.
- Rébecca
Ouais. Ouais, puis ouais, on a bu le champagne vers 10h30. 10h30, 11h. Je ne sais plus, mais... C'était bien en fait, il n'y a pas de temps, tu manges quand tu as faim, tu douches quand tu vas te doucher, tu dors quand tu dors, il n'y a pas d'heure en fait. Tu fais en fonction de tes besoins et c'est parfait comme ça. C'était trop bien, c'était trop bien. Là je ne me suis pas dit qui remet ça tout de suite, là je vous avouerai que je me suis dit, là tu as expérimenté quelque chose d'extrêmement puissant et il m'a fallu du temps pour... Pas réaliser ce que j'avais vécu mais poser des mots, juste poser des mots. Parce que c'était des sensations que j'avais lues nulle part. Je lis des centaines de témoignages par mois. Et des fois il y a des mots qui m'interpellent, je me dis tiens elle a posé ce mot là. Mais là moi, le mien, je me suis dit là j'ai jamais entendu personne dire un truc pareil. Quel mot je vais poser dessus ? Et je me suis dit, ça paraît violent de dire les choses comme ça, et je pense que la naissance, parfois, elle est hyper surprenante. Peut-être que j'aurais trouvé ça moins violent si j'avais lu un témoignage d'une femme qui a vécu quelque chose comme moi. Je ne sais pas. Mais toujours est-il que dans mon corps, je me suis dit, prodigieux, prodigieux quand même. Mais ô combien déstabilisant.
- Molly
Oui. Ok, un joli moment dans tous les cas.
- Rébecca
Oui, un beau moment. Si j'avais la chance de le revivre, je le revivrais aussi. Ça ne m'a pas du tout dégoûtée, ça ne m'a pas traumatisée. C'était la naissance dans un de ces états.
- Molly
Justement, tu t'apprêtes à, d'ici quelques semaines, quelques jours, revivre cette expérience. La question ne s'est pas posée, je suppose, de faire exactement pareil.
- Rébecca
Et non. Alors, la question s'est posée différemment, puisque j'ai divorcé, je suis avec quelqu'un d'autre. Et ce quelqu'un d'autre, je crois qu'il m'aime beaucoup, parce que c'est son premier enfant. Et donc, bien évidemment qu'il a toute cette construction sociale de la naissance, de ce que ça doit être, de comment on fait socialement. Mais oui. Et j'ai dû lui expliquer, écoute, mon garçon, malheureusement, parce qu'au début, ça va te choquer, tu ne vas pas vivre le conventionnel avec moi, mais je te promets que je vais t'amener vivre des choses. ça va valoir le coup de tout déconstruire et de te confronter à tes peurs. Et j'ai de la chance que c'est quelqu'un d'intelligent, qui écoute quand je parle, qui comprend la logique, qui pose des questions, qui est curieux. Donc je peux répondre à des questions avec de la théorie, et qui comprend où est-ce que je veux en venir, et qui n'est pas fermé du tout. Qui a bien compris que je n'étais pas anti-médecine, parce que je lui ai dit, écoute, Moi, ma limite, elle est là. S'il se passe ça, on va à l'hôpital. S'il se passe ça, on appelle le SAMU. Et donc, tout est très clair.
- Molly
Oui, tu l'as rassuré.
- Rébecca
Exactement. Et donc, il est en paix parce qu'il se dit, elle sait ce qu'elle fait. Elle en a eu trois. Elle n'est pas dangereuse. Elle n'est pas passionnée par la mort. Elle aime ses enfants. Elle veut qu'ils vivent. Donc, jusqu'à présent, j'ai affaire en face à quelqu'un de censé. Et puis, je pense qu'il a... Il a aussi entendu mes récits de naissance et ce que j'ai vécu. Et puis, il voit la sollicitude de mes filles pour revivre des moments comme ça, qui n'ont pas du tout été traumatisés. Et à côté de ça, il a entendu ses potes qui ont vécu une naissance à la maternité de façon tout à fait conventionnelle. Et tu te rends compte qu'il y a des choses qui les ont marquées, pas forcément dans le bon sens, que ça n'a pas été une super expérience pour eux.
- Molly
Les papas sont souvent dépossédés encore plus du moment.
- Rébecca
Et complètement. Et du coup, il s'est dit, en fait, entre ce que elle, ses filles racontent et ce que mes potes racontent, je crois que je préfère vivre ça. Donc, il entend qu'il y a une différence, il sait qu'il y a autre chose à vivre et il pense que tout ce cheminement qu'il fait... Il le fait avec enthousiasme et facilité, attention, il le fait avec une curiosité saine. Il sait que ça va être un passeport pour lui pour vivre autre chose. Donc il le fait avec encore plus d'enthousiasme, mais il ne le vit pas du tout comme une contrainte. Et je trouve ça beau, j'ai vraiment de la chance. Pour lui, c'est une chance d'être avec quelqu'un qui accueille son quatrième enfant. Parce qu'il estime qu'il se laisse porter par l'expérience et le recul. Et du coup, il dit, en fait, mes inquiétudes de jeune papa, elles ne vont pas tenir face à ton expérience, en fait. Et du coup, moi, je trouve que c'est une chance d'avoir quelqu'un d'aussi enseignable. Oui,
- Molly
d'être un cadavre qui est à ton écoute, quoi.
- Rébecca
Mais c'est ça. Puis avec l'humilité qu'il faut pour avoir ce savoir-être. C'est génial, je m'estime chanceuse.
- Molly
Oui.
- Rébecca
Oui. Et puis en plus, il me suit dans mes cheminements. C'est-à-dire que j'étudie toujours la naissance, je lis toujours des témoignages, des fois je lui fais part de ce que j'apprends. Puis il y a des infos qui me marquent, qui m'amènent à d'autres réflexions. C'est un puissant fond. Honnêtement, c'est un puissant fond. Et là, je suis en train de lire un livre, celui de Yolande Norris-Clark. Je ne sais pas si tu le vois.
- Molly
Ok, oui, en anglais.
- Rébecca
Oui, c'est ça. Et c'est l'art de choisir une naissance extatique, sans douleur, orgasmique. Ok. Alors, je n'ai pas pour objectif, attention, de vivre une naissance orgasmique, mais je vois... l'opportunité de vivre, d'expérimenter quelque chose que je n'ai pas encore expérimenté. Et donc là, je conceptualise les réflexions, ô combien pertinentes de Yolande, mais appuyée aussi de son expérience, 10 enfants, 10 accouchements à la maison, 9 Anna, je pense qu'elle sait de quoi elle parle, d'expérimenter pourquoi l'accouchement est douloureux. pourquoi on le conçoit comme soi, on le construit comme ça et du coup on le vit comme ça, et pourquoi à l'inverse certaines éprouvent non seulement aucune douleur mais éprouvent du plaisir, c'est à dire qu'elles peuvent dire que c'était des vagues d'enthousiasme, de plaisir, que c'était une sensation plaisante pas forcément un orgasme à chaque vague attention mais Et du coup, j'en suis là dans ma réflexion. Je suis encore en train de lire des trucs dessus. Ce week-end, je vais regarder Orgasmic Birth. Et je lui ai dit, écoute, je pense qu'il y a des choses que j'ai compris, que j'ai compris la logique, que j'ai compris le fondement. Et je me dis, pourquoi pas ? Oui. Lui, il est ouvert à tout. Il me dit, OK. OK. Mais écoute, je suis claire. Il a hâte, quoi. Il me dit, écoute, je te souhaite de vivre ce que tu veux. Et moi, je ne lui partage pas tout, parce que sinon, je pense, je le noierais.
- Molly
Oui, tu as tellement acquis de connaissances au final que...
- Rébecca
Mais c'est terrible, mais oui. Mais je n'ai pas fini. En fait, je passerai ma vie à ça, je pense, tellement. Je vais dire,
- Molly
est-ce que tu auras vraiment fini un jour ?
- Rébecca
Mais c'est ça, je crois que je ne suis pas sûre. S'il y a bien un domaine qui nous pousse à l'humilité, c'est la naissance. Parce qu'il y a la théorie, on connaît la physiologie, et puis en même temps, il y a ce qui s'expérimente dans la singularité même de la femme concernée en question qui vit ce moment-là. Et je trouve ça génial, quoi. Et moi, je dis, écoute, je n'ai pas peur. Je me souhaite de vivre un accouchement sans douleur. Et il ne me prend pas pour une tarée, il me dit « Ok, d'accord » . Je lui ai dit, moi, la naissance de mes rêves, si je devais, ce serait d'accoucher dans l'eau d'un bébé né coiffé, mais du coup, pas du tout, pas exprimer, pas ressentir de la douleur, ressentir du plaisir, me dire « Waouh, j'ai une intensité qui me traverse et c'est hyper plaisant » . J'aimerais expérimenter ça. Et du coup, sortir mon bébé de l'eau et l'avoir dans sa poche des os et pouvoir rompre la poche des os avec mes propres mains comme un cadeau qu'on ouvre.
- Molly
Ok,
- Rébecca
d'accord. Ce serait l'accouchement de mes rêves. Je ne me dis pas que je veux absolument vivre ça, au risque d'être déçue, parce que déjà, je n'ai pas de piscine, donc je dis qu'on va être pragmatique. Mais admettant que ce soit dans ma douche, ce serait l'accouchement de mes rêves. Je lui ai dit, je lui ai formulé, je lui ai expliqué pourquoi. Et puis après, je vivrai ce que j'aurai à vivre.
- Molly
Ce serait l'étape au-dessus.
- Rébecca
Ouais, ouais, ouais, ouais, ouais. Je me dis, il faut rêver, il faut rêver, il faut aspirer à autre chose. C'est en se disant qu'il y a autre chose à vivre et qu'on veut vivre autre chose qu'on peut aussi se l'autoriser, se l'autoriser mentalement. Et que du coup, il y a peut-être plus de probabilités que ça arrive. Mais après ça, je vivrai ce qu'il y aura à vivre, je ne serai pas déçue, je pense que je vais quand même apprendre.
- Molly
Oui, forcément, de toute façon, je pense que tu apprends un peu plus à chaque naissance.
- Rébecca
Mais oui, c'est juste que là, je me dis que c'est potentiellement la dernière, alors profite, savoure, jubile, ça va être encore magnifique, j'en doute pas une seconde.
- Molly
Oui,
- Rébecca
c'est sûr.
- Molly
En tout cas, je te souhaite de vivre encore une expérience aussi satisfaisante.
- Rébecca
Merci beaucoup, ma chère Rebecca.
- Molly
Et puis j'attends avec impatience la petite mise à jour, de savoir comment ça s'est passé.
- Rébecca
Mais évidemment que tu recevras un petit message et sûrement une petite photo pour annoncer la naissance de mon bébé. Et puis si ça intéresse certains, je suis toute disposée à raconter mon expérience. On verra bien ce que j'aurai à raconter cette fois-ci.
- Molly
Ouais. Avec grand plaisir. En tout cas, merci beaucoup à toi d'avoir partagé aussi bien tes expériences que tes réflexions et que ton point de vue. Parce que je trouve qu'il est super intéressant. Après, on apprécie, on n'apprécie pas. C'est autre chose. Mais en tout cas, ça me donne vraiment ton point de vue et ce que tu en penses et ce qui t'a donné à ça. Donc, merci d'avoir bien voulu partager ça.
- Rébecca
Merci pour cet espace de parole, Rebecca. Merci pour l'ouverture d'esprit aussi. Je sais que moi, je ne réalise pas trop. Mais je sais que ça peut énormément bouleverser, voire choquer ce que je dis. Et souvent, ça amène de vives réactions. Mais ça fait partie du jeu. Et je les accueille et je les entends. Et c'est OK. Peut-être qu'il y a 12 ans, quand je découlerai la maternité, je me serai moi-même prise pour une grosse tarée. J'admets.
- Molly
Dans 12 ans, ça sera la normalité, on ne sait pas. Mais quand même !
- Rébecca
Ah là là ! Je pense qu'individuellement, on chemine beaucoup plus vite que sociétalement. Alors dans un idéal, pourquoi pas ? Peut-être quand mes filles, à leur tour, auront des enfants. Donc potentiellement dans bien 20 ans. C'est tout jamais, espérons-le. Mais je crois que c'est aussi un sement des graines, comme ça, de génération en génération. Oui,
- Molly
forcément.
- Rébecca
Mais oui, donc là j'espère que j'aurai le privilège d'avoir mes filles auprès de moi pour cette naissance-là à venir. Je leur souhaite, elles, en tant que sœurs, en tant que femmes à devenir, et puis je me le souhaite moi en tant que maman et puis en tant que semeuse dans leur vie. Qu'il y ait autre chose de semer dans leur vie et qu'elles soient fortes de mon expérience et de ce qu'elles ont vécu enfant. pour aller encore plus loin, elles, dans leur maternité. Ce serait une très belle continuité, je serais très très fière. Après, si ça ne chemine pas, ça ne chemine pas, ce n'est pas grave, chacun ses choix, on n'a pas la même sensibilité, ni les mêmes combats, mais je pense que ça part bien. Oui.
- Molly
En tout cas, encore merci à toi.
- Rébecca
Merci, Rebecca.
- Molly
Merci d'être arrivé jusqu'ici, j'espère que cet épisode et que les récits d'accouchement de Molly vous ont intéressé. Je voulais juste ajouter, en cette fin d'épisode, que depuis l'enregistrement, Molly avait eu son dernier enfant. Un petit garçon arrivé dans la douceur, une expérience un peu différente des autres, mais toujours dans le confort de son domicile. Alors, félicitations Molly, et bienvenue à toi petit bébé ! Merci beaucoup d'avoir écouté cet épisode jusqu'au bout. S'il t'a plu, ou si le podcast de manière générale te plaît, n'hésite pas à me laisser une petite note. surtout en application des coups de préférés. 5 étoiles, ce serait l'idéal. Et pour découvrir d'autres histoires aussi passionnantes qu'intéressantes, rendez-vous mercredi prochain. A très vite !