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#29 Les interactions plantes / traitements de chimiothérapies, on n'interdit pas, on sécurise ! avec Bertrand Pharmacien hospitalier cover
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canc'Héros : témoignages patients parcours cancer et informations validées par des professionnels de santé spécialistes en oncologie

#29 Les interactions plantes / traitements de chimiothérapies, on n'interdit pas, on sécurise ! avec Bertrand Pharmacien hospitalier

#29 Les interactions plantes / traitements de chimiothérapies, on n'interdit pas, on sécurise ! avec Bertrand Pharmacien hospitalier

38min |30/04/2024
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Description

Dans ce nouvel épisode de la saison 3 de canc'Héros, on parle avec Bertrand, pharmacien hospitalier, des interactions plantes chimiothérapie. Vaste sujet !!


En effet, combien de patients prennent des plantes en parallèle de leur traitements, sans même avoir conscience du risque d'interaction que cela pourrait avoir.


Les interactions sont de plusieurs ordres : il peut s'agir d'une augmentation de toxicités des chimiothérapies, une diminution voire une annulation de l'effet thérapeutique du traitement. Il peut aussi s'agir d'une plante avec des effets toxiques.


On détaille avec Bertrand des cas d'interactions issus de sa pratique pharmaceutique hospitalière. Ces exemples nous montrent que les interactions peuvent provenir des plantes mais aussi de l'alimentation.


L'idée clé n'est donc pas d'interdire par principe mais plutôt de sécuriser !!

Le patient doit bénéficier d'un cadre de confiance qui permet la communication avec l'équipe de soins. Les habitudes ou la volonté de prise de phytothérapie / complément alimentaire / alimentation doivent être discutées avec le pharmacien afin de sécuriser le parcours de soins du patient.


Les fiches Oncolien constituent une source d'information fiable aussi bien pour le patient que pour le professionnel.


Vous pouvez nous retrouver sur Instagram sur la page canc.heros ou sur Facebook sur la page canc'Héros podcast.

N'oubliez pas de mettre un avis et une bonne note sur les plateformes d'écoutes, ça aide à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à le faire connaitre auprès d'un maximum de patients.

N'hésitez pas à recommander le podcast si vous connaissez dans votre entourage des patients qui pourraient en avoir besoin.


Mille mercis pour votre écoute, vos recommandations et vos messages de soutien !

Prenez bien soin de vous !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Abigaïl

    Bonjour à toutes, bonjour à tous. Je suis ravie de vous accueillir dans la saison 3 du podcast canc'Héros. Canc'Héros, c'est le podcast santé qui aide les patients atteints de cancer à devenir acteurs de leurs soins. Je suis Abigail, pharmacienne d'officine, et ma mission ici est de favoriser le partage d'expériences autour des parcours de soins cancer, le partage de témoignages entre patients, et véhiculer une information de qualité pour les patients atteints de cancer ou en rémission, ainsi que pour leur entourage, les aidants, les accompagnants. Pour ce faire, j'accueillerai à mon micro des patients qui ont pour point commun l'envie de partager leur expérience et leur histoire dans le but d'aider les autres. J'accueillerai aussi des experts, des professionnels de santé, des associations, car je suis convaincue qu'un patient bien informé est un patient qui sera plus facilement acteur de son parcours de soins dans le but d'améliorer sa qualité de vie. Si vous appréciez mon travail, n'hésitez pas à recommander le podcast canc'Héros à d'autres patients qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre un avis et une note sur les plateformes d'écoute afin de rendre canc'Héros plus visible et d'aider un maximum de patients. Mille mercis et je vous souhaite une très belle écoute. Bonjour Bertrand.

  • Bertrand

    Bonjour.

  • Abigaïl

    Je suis ravie de t'accueillir sur le podcast canc'Héros. Merci beaucoup pour ton temps et ta présence. Aujourd'hui, nous sommes ensemble aux journées d'actualité. Attends, tu vas le dire à ma place, tu le feras mieux !

  • Bertrand

    aux journées nationales d'actualité en oncologie.

  • Abigaïl

    Voilà, et tu es organisateur, et je suis ravie de participer à ce congrès, et merci beaucoup parce que je sais que tu es très pris, et là d'ailleurs on commence l'interview avant 8h, on est bien matinal, bien matinaux ! Est-ce que tu veux bien te présenter s'il te plaît pour les auditeurs qui nous écoutent ?

  • Bertrand

    Bien sûr, j'ai salué, bonjour à tous. Moi je suis Bertrand Pourroy, je suis pharmacien spécialisé en oncologie depuis maintenant presque 25 ans. J'exerce dans un centre hospitalo-universitaire. Je suis également membre de la Société Française de Pharmacie Oncologique. Et à ce titre, j'ai beaucoup travaillé sur les problématiques d'interaction potentielle entre les médecines alternatives complémentaires et notamment la phytothérapie et les médicaments anticancéreux. Avec une consoeur, Émilie Petitjean, on avait d'ailleurs rédigé des recommandations pour nos confrères pharmaciens qui exercent aussi bien à l'hôpital qu'en officine sur cette question.

  • Abigaïl

    Je suis ravie de t'accueillir parce que c'est une question qui est hyper importante pour nos patients qui sont en parcours de soins oncologiques. Souvent, les patients demandent à avoir des plantes qui peuvent atténuer les effets indésirables, des plantes qui peuvent améliorer le quotidien. Je suis ravie de t'accueillir parce que tu es la personne parfaite pour cette question-là, étant donné que tu as rédigé ces recommandations SFPO : plantes et compléments alimentaires dans la prise en charge du patient atteint de cancer. Donc encore merci.

  • Bertrand

    Merci.

  • Abigaïl

    Alors, peux-tu nous expliquer en quoi cette question des interactions plantes / compléments alimentaires avec les médicaments de chimiothérapie est importante ? Et est-ce que tu connais aussi les proportions de patients qui prennent des traitements à côté de leur chimiothérapie ?

  • Bertrand

    Alors, c'est beaucoup de questions, je vais essayer de les faire dans l'ordre. Alors, concernant la proportion de patients consommant des médecines alternatives complémentaires, dont la phytothérapie, les études sont très variables d'un pays à l'autre, d'une typologie de patient à l'autre, mais on estime, suite à différentes études dans la littérature, qu'entre 30 et 70% des patients peuvent avoir recours à ces produits au cours de leurs traitements, qu'ils soient d'ailleurs de cancérologie ou sans lien avec la cancérologie. Il n'est pas question ici de critiquer ni les patients qui prennent de ces produits, ni les produits eux-mêmes qui peuvent avoir des propriétés pharmacologiques évidentes. L'exemple typique, c'est le millepertuis qui est utilisé à visée antidépressive très largement en Allemagne, un petit peu moins en France, mais très largement malgré tout. C'est une plante qui a ses propriétés thérapeutiques, c'est certain, pour autant... C'est une plante qui n'est pas dénuée de risques par elle-même, puisque c'est une plante qui va pouvoir jouer sur ce qu'on appelle la métabolisation des médicaments. Pour faire très très simple, lorsqu'on prend un médicament, on a... une sorte d'usine dans l'organisme qui est le foie, qui va être capable de transformer ces médicaments pour que l'organisme puisse les éliminer, puisque le médicament finit par s'éliminer de l'organisme. Et en fait, beaucoup de produits, des médicaments, mais également des plantes, vont pouvoir jouer sur cette usine, soit augmenter sa cadence de production, et donc on va... dégrader un peu plus les médicaments, ou à l'inverse, vont ralentir cette usine, ce qui va avoir comme effet qu'on va être plus exposé aux médicaments, puisque ces médicaments vont être moins dégradés. Donc on voit bien que c'est un dommage collatéral de la phytothérapie, mais qui peut être très dommageable aux patients, puisqu'on peut avoir soit des toxicités trop importantes si on ralentit cette usine de dégradation, ou à l'inverse, une perte d'efficacité si on dit à l'usine de dégradation du médicament d'accélérer. C'est une question qui est très importante, qu'il faut prendre en compte. Il n'est pas question d'interdire tout produit de phytothérapie par principe ou de tout autoriser. Ce qui est intéressant, c'est de voir ce qui est bon pour le patient au moment où il prend son traitement.

  • Abigaïl

    L'exemple du millepertuis est hyper éloquent. On a une interaction avec énormément de médicaments, y compris les contraceptifs oraux par exemple. Là on est hors sujet d'oncologie, mais tout ça pour dire que les plantes interagissent avec les traitements et peuvent annuler complètement l'effet thérapeutique.

  • Bertrand

    Et annuler et augmenter la toxicité. On peut avoir les deux. C'est très important.

  • Abigaïl

    Et du coup, tu dis entre 30 et 70% des patients, en fait, la fourchette, elle est hyper large. C'est qu'on a du mal à évaluer. Comment t'expliques qu'on n'ait pas des chiffres aussi un peu plus précis ?

  • Bertrand

    La première réponse, c'est que c'est un sujet qui n'est pas forcément très étudié. La deuxième réponse, c'est que lorsqu'on regarde un petit peu dans le détail, on a... D'abord, une utilisation très large dans la population générale, cancéreuse ou non cancéreuse, de ces produits de phytothérapie. Lorsqu'on s'intéresse typiquement aux patients cancéreux, on a vraiment une grande variabilité en fonction des typologies de patients. On se rend compte que, par exemple, les femmes avec un niveau d'études élevé autour de la cinquantaine vont beaucoup plus consommer que, par exemple, des patients un peu plus âgés, masculins. Donc c'est très très variable et il y a très peu d'études parce que c'est quand même... des populations de patients qui ne sont pas énormes malgré tout. Et donc faire focus sur ces questions, c'est assez compliqué. Nous, on avait fait une étude il y a quelques années maintenant sur une plateforme participative patients et on était sur à peu près, de mémoire, 50% des patients, c'était des patients atteints de cancer du sein, qui consommaient de la phytothérapie.

  • Abigaïl

    Et après, il y a aussi des patients qui n'osent pas dire ?

  • Bertrand

    Oui, alors ça, c'est vrai que c'est une vraie question. Il y a peut-être deux raisons à cela. C'est vrai qu'un patient qui est dans un parcours de soins cancer, il est pris dans une grosse machine, on sait comment ça se passe. C'est les décisions de RCP, c'est les consultations avec les médecins, il faut prendre tel traitement, tel soin de support, etc. Et c'est vrai que la phytothérapie est un petit espace de liberté pour le patient dans sa prise en charge. Donc il faut absolument la préserver, ce n'est pas le souci. Par contre, il faut la sécuriser. La deuxième raison aussi, c'est que... les patients n'ont pas ce réflexe d'en parler aux professionnels de santé, parce que très souvent on a une image de la phytothérapie des plantes comme quelque chose de très naturel et donc sans risque, et très souvent les patients n'ont même pas l'idée d'en parler, puisque pour eux ça n'a aucun risque, alors qu'en fait on sait que ça représente des risques importants.

  • Abigaïl

    Mais ce que tu dis par rapport à cet espace de liberté à préserver, je suis totalement d'accord, et en plus je pense que le patient a besoin de ça aussi pour être acteur de ses soins. On lui impose beaucoup de choses dans les lignes de traitements. Ça ne se discute pas. Mais c'est vrai que sur les plantes, le patient peut avoir une petite liberté, une reprise en main de son traitement. Et c'est vrai que ça, il faut pouvoir le préserver. Et tu le dis très bien, il faut le sécuriser.

  • Bertrand

    C'est tout à fait ça. C'est vraiment le maître mot. Pour faire très très simple... Dans ma réflexion, on a des médicaments anticancéreux dont on connaît parfaitement le profil de toxicité et l'efficacité, puisqu'il y a eu des études cliniques menées qui ont montré scientifiquement que ces médicaments avaient des propriétés intéressantes et des toxicités certes connues mais qu'on peut maîtriser. Et puis à côté, on a de la phytothérapie qui est beaucoup moins étudiée, dont on sait que parfois on peut avoir des effets bénéfiques, mais on n'a pas forcément de détails quant au profil de toxicité de ces plantes ou d'interaction. Et donc tout l'enjeu est d'arriver à travailler avec le patient pour identifier les risques potentiels qu'il peut prendre. Et c'est toujours pareil, il n'y a pas d'imposition de conduite à tenir, mais au moins lui expliquer les risques qu'il peut rencontrer. et puis discuter éventuellement avec lui d'une stratégie thérapeutique gagnant-gagnant. Vous prenez votre traitement pendant un certain temps, et puis lorsque vous aurez terminé votre séquence de traitement, à ce moment-là, vous pourrez prendre la phytothérapie qui vous intéresse, parce qu'il n'y aura plus de risque d'interaction. Ou alors, vous arrêtez cette plante particulièrement, et vous la remplacez par éventuellement de l'homéopathie ou des choses comme ça. C'est vraiment un travail d'équipe, on est en soutien du patient.

  • Abigaïl

    C'est ça en fait, il faut créer une alliance thérapeutique et puis trouver ce qu'il y a de mieux et ce qui correspond aussi aux attentes du patient à un moment donné et que ce soit compatible avec ses traitements de chimiothérapie.

  • Bertrand

    Complètement, la sécurité et la liberté.

  • Abigaïl

    Mais en fait cet épisode c'est pour ça qu'il est très important et j'avais hâte de l'enregistrer parce que c'est vrai que... C'est important de faire prendre conscience aux patients que les plantes ne sont pas sans risques. Il y a des toxicités, il y a des interactions et que le premier réflexe quand on veut prendre quelque chose dans son parcours de soins, c'est d'en parler à son oncologue ou à l'équipe qui est en prise en charge du patient.

  • Bertrand

    Ça, c'est certain. Le maître mot, c'est vraiment la communication. Si on ne communique pas, personne ne sait rien et on peut arriver à des catastrophes de prise en charge puisqu'on va avoir des patients qui, d'un coup, vont faire des toxicités énormes avec leur traitement, qui vont devoir arrêter leur prise en charge alors que c'est simplement une interaction qui aurait pu être gérée avec l'équipe. Tout simplement parce qu'on ne sait pas qu'il y a de la phytothérapie qui est consommée par exemple, ou des patients qui vont progresser très rapidement alors qu'on ne devrait pas avoir une progression, tout simplement parce qu'on a de nouveau une interaction. Donc l'idée c'est vraiment de communiquer, il ne faut pas avoir peur de dire à son oncologue, aux pharmaciens qu'on peut voir éventuellement à l'officine ou à l'hôpital, lors d'entretiens pharmaceutiques par exemple sur les thérapies orales anticancéreuses. Il faut diffuser l'information, tout simplement pour que, très souvent, l'information arrive jusqu'à un pharmacien, puisque dans notre formation, on est quand même à la fois formé au médicament, mais également à la botanique, à ce qu'on appelle la pharmacognosie, donc l'utilisation des plantes à visée médicinale. Et donc, on a cette expertise-là, au niveau pharmaceutique, où on va pouvoir analyser le risque d'interaction.

  • Abigaïl

    Mais du coup, quand tu parlais de catastrophe, justement, Est-ce que tu as des exemples concrets tirés de ta pratique quotidienne pour illustrer ces interactions et ces toxicités entre les traitements de chimiothérapie et les plantes ?

  • Bertrand

    Oui, j'en ai quelques-uns. Je vais peut-être commencer par un cas qui nous avait marqué. C'était un patient de pédiatrie qui était traité pour ce qu'on appelle du méthotrexate haute dose, donc un médicament qui est très actif, mais qui peut provoquer des toxicités très importantes s'il est mal éliminé au niveau rénal, puisque c'est un médicament qui est d'élimination rénale. Et donc ce patient avait reçu six cures de méthotrexate haute dose sans aucune toxicité particulière. Et à sa septième cure, il a fait un tableau absolument cataclysmique, une toxicité majeure avec des retentissements rénaux, cutanés, tout une série hématologique. Et lorsqu'on a essayé de comprendre ce qui s'était passé, ses parents de toute bonne foi lui avaient donné justement des produits à base de phytothérapie. Donc on a travaillé le sujet, on a travaillé également avec le centre régional de pharmacovigilance à qui le cas avait été déclaré et donc le centre régional de pharmacovigilance a conclu à l'imputabilité réelle de cette toxicité à cette consommation de phytothérapie. Tant et si bien qu'on a évidemment conseillé aux parents d'arrêter cette consommation de plantes. L'enfant a pu faire par la suite encore six cures de méthotrexate haute dose sans aucune toxicité. Donc là, on voit très bien l'impact qu'une prise ponctuelle de phytothérapie peut avoir sur un patient. Donc ça, c'était un patient pédiatrique, mais ça marche aussi chez les adultes. J'ai d'autres exemples si tu le souhaites.

  • Abigaïl

    Et du coup, cette plante, c'était quoi ? Et qu'est-ce que les parents cherchaient à améliorer ?

  • Bertrand

    Alors cette plante c'était des extraits de feuilles d'olivier. Ce que les parents cherchaient à améliorer, je ne sais absolument pas. Mais très souvent, c'est véritablement chez les patients une recherche de contrôle, de maîtrise des effets indésirables des chimiothérapies. C'est vraiment la principale cause. Certains patients, hélas, tendent à remplacer leur traitement de chimiothérapie par des plantes. Toute la littérature le montre très bien, ça provoque des rechutes.

  • Abigaïl

    C'est une perte de chance incroyable.

  • Bertrand

    C'est une perte de chance complète. Ça a vraiment été montré dans la littérature. Des comparaisons de cohortes où les patients, souvent des patients de cancer du sein, parce qu'il y a d'énormes cohortes dans le cancer du sein, prennent de la phytothérapie à la place de leurs chimios. Clairement, on a une perte de chance. On peut avoir aussi une perte de chance à cause des interactions. Ça a été également montré. Mais là, justement, l'intérêt, c'est de pouvoir communiquer et de travailler avec le patient pour limiter ce risque.

  • Abigaïl

    Oui, en aucun cas, on le reprécise, ça ne remplace les traitements ?

  • Bertrand

    Absolument pas.

  • Abigaïl

    En aucun cas.

  • Bertrand

    Absolument pas. Les produits de phytothérapie peuvent être des alliés dans la prise en charge des toxicités, aussi tant est qu'il n'y ait aucun risque vis-à-vis du traitement anticancéreux. Ça ne peut en aucun cas remplacer un traitement anticancéreux.

  • Abigaïl

    Est-ce que tu as d'autres exemples à nous donner ?

  • Bertrand

    Alors, j'ai d'autres exemples, oui. On s'éloigne un petit peu de la plante, mais c'est quand même d'origine végétale. C'est un patient qui consommait, parce qu'il aimait ça, des litres de jus de grenade. la grenade qui est un fruit qui est plutôt à la mode, qu'on aime bien déguster actuellement. Et en fait, la grenade peut présenter des propriétés particulières, à savoir qu'elle peut, ce que je vous ai expliqué tout à l'heure, ralentir cette usine de dégradation des médicaments qu'est le foie. Et donc ce patient, son hématologue lui a prescrit une thérapie orale anticancéreuse. Et dès le début de son traitement, il a présenté des toxicités monstrueuses. Il a été à deux doigts d'arrêter son traitement. En fait, c'est une collègue pharmacienne qui l'a contactée par téléphone à l'initiation de son traitement et qui a tout de suite vu cette toxicité abominable, qui lui a posé tout plein de questions, qui a identifié ce jus de grenade comme pouvant potentiellement inhiber le métabolisme du médicament et donc être responsable d'une surexposition et d'une toxicité. Donc le patient a immédiatement arrêté de consommer son jus de grenade. et trois jours après, sa toxicité avait complètement disparu. Donc c'est un exemple qui est assez parlant. Peut-être un autre, dans une autre catégorie d'interaction, on l'a dit tout à l'heure, les plantes peuvent avoir des effets pharmacologiques, on a parlé du millepertuis qui est antidépresseur, vous avez plein de plantes qui peuvent jouer sur plein de choses dans l'organisme. Alors il y a une plante toute simple, c'est la réglisse. qu'on peut également trouver dans une boisson qui s'appelle l'anthésite. C'est une marque, mais tout le monde comprendra ce que c'est. Donc la réglisse a des propriétés. Elle-même, de base, elle a tendance à faire augmenter la tension artérielle. Alors des très petites quantités, de temps en temps, ce n'est pas très gênant, mais on a eu l'exemple d'un... d'un patient qui prenait des traitements thérapie orale également ciblés, qui avaient déjà des effets pro-hypertenseur. Et donc cette consommation de réglisse a fait fluctuer sa tension à la hausse de façon trop importante. Donc là encore, on a identifié le problème et il a stoppé sa consommation de réglisse, puisque là il n'y avait pas de volonté particulière thérapeutique, c'était juste qu'il aimait bien le goût. Mais voilà, c'est des exemples très pragmatiques, où on se rend compte qu'on peut tout de suite jouer sur des choses qui vont impacter le traitement et la santé du patient. Et donc il faut juste en discuter avec lui avant pour être sûr qu'il n'y a pas de problème.

  • Abigaïl

    Mais du coup, là, ce qui est frappant, c'est que sur trois exemples, il y a deux exemples qui sont issus de l'alimentation. En fait, on a aussi une interaction dans l'alimentation, les épices que l'on met dans les plats, au même titre que des gélules que l'on peut avaler et acheter, par exemple, en officine.

  • Bertrand

    Complètement. Très souvent, les patients ont en tête l'interaction avec le pamplemousse, qui apparaît très souvent dans les notices des médicaments. C'est exactement le même mécanisme. Le pamplemousse, c'est un fruit qui est très bon, mais qui peut parfois jouer sur le métabolisme des médicaments et donc provoquer des surexpositions aux médicaments. Donc, il y a plein de choses comme ça d'origine végétale, qui ont des effets. Une fois de plus, la question n'est pas de dire qu'on interdit tout ce qui est végétal. La question est de dire... est-ce que ce produit végétal, au moment où je prends ce traitement, est dangereux ou pas ? Pour les épices, c'est évident aussi. Il y a plein de choses qui sont décrites en termes d'interaction avec le curcuma, avec différents types de ginseng, puisqu'il y a plusieurs ginsengs qui sont commercialisés, ils n'ont pas tous les mêmes propriétés sur cette usine qu'est le foie. Il va y avoir l'ail également. Donc là, il y a en quantité raisonnable une fois par jour dans une assiette, ce n'est pas vraiment un problème, mais on connaît tous des patients qui se supplémentent avec de l'ail, de grandes quantités d'ail, en gélules notamment, et l'ail présente des propriétés également potentiellement, alors pas néfastes, mais qu'il faut prendre en compte. L'ail est anticoagulant, l'ail présente différentes propriétés. On a la même question sur le gingembre qui peut avoir également des risques d'interaction avec les médicaments. Le gingembre souvent est présenté comme pouvant être intéressant pour la maîtrise des nausées et vomissements. Donc là encore, il n'y a pas ma connaissance de vraie étude qui ait établi l'intérêt du gingembre pour cette indication-là. Il y a eu des études de fait, notamment en pédiatrie, mais qui n'avaient pas été positives. Après, une fois de plus, un patient qui considère que le gingembre lui fait du bien... Moi, j'encouragerais toujours à prendre du gingembre à condition qu'il n'y ait pas d'interaction avec son traitement.

  • Abigaïl

    Et dans l'alimentation, c'est quoi le seuil qui peut poser problème en termes de quantité ? C'est difficile à évaluer et bien sûr ça dépend des plantes.

  • Bertrand

    C'est impossible à évaluer, c'est bien la problématique. Contrairement aux médicaments, il n'y a pas d'études véritablement poussées sur les plantes par définition. Puisque ne serait-ce que, je ne sais pas si tous les gens ont ça en tête, mais lorsqu'on s'intéresse par exemple aux huiles essentielles qui sont extraites des plantes, Si vous prenez une huile essentielle de lavande cultivée dans un champ, vous étudiez son composition et puis vous allez étudier la composition d'une huile essentielle de lavande cultivée dans le champ d'à côté qui n'est pas orientée de la même manière vis-à-vis du soleil et qui n'a pas la même composition au niveau du terrain, vous allez avoir une composition d'huile essentielle différente. C'est la même chose pour les autres plantes, en fonction de la façon dont elles ont été cultivées, de où elles ont été cultivées, de comment elles ont été récoltées, comment elles ont été préparées, il peut y avoir des différences qualitatives et quantitatives très importantes. Donc on ne peut pas faire une espèce de règle comme ça en disant le curcuma c'est pas plus de temps par jour, l'ail... Ça c'est pas possible. L'idée c'est d'identifier de façon macroscopique le risque. Plus on a d'informations, mieux c'est évidemment. Souvent les pharmaciens vont embêter les patients en leur demandant quelle est la marque de la phytothérapie qu'ils ont acheté, Est-ce qu'il y a un dosage marqué sur la boîte, etc. Mais tout ça, c'est pour justement guider la réflexion pharmaceutique pour arriver à une conclusion la plus fine possible. Lorsqu'on a passé l'information... comme on dit en médecine, primum non nocere, donc on va considérer le risque le plus important. Moi, de façon générale, si je sais qu'il y a un risque d'interaction évident entre du curcuma et un traitement, je vais dire au patient, arrêtez le curcuma pendant la période de ce traitement. Ne continuez pas, on ne maîtrise pas le risque.

  • Abigaïl

    Et même dans l'alimentation.

  • Bertrand

    Ah oui, y compris dans l'alimentation. Oui, oui. Pour vous donner juste un petit exemple, on fait ce qu'on appelle des bilans de médication pour nos patients. pour certaines de nos patientes traitées par des anticancéreux injectables, et donc on appelle ces patientes avant qu'elles viennent faire leur traitement pour voir ce qu'elles prennent justement, et dans notre questionnaire type, on a certes les produits de phytothérapie, les compléments alimentaires, mais on a également les épices utilisés dans l'alimentation, on a également tout ce qui va être tisane, thé, etc., puisque le thé peut également avoir des interactions, il y a des tisanes également qui peuvent contenir des produits potentiellement ...interagissant avec les médicaments.

  • Abigaïl

    Et selon toi, quelles sont les plantes les plus utilisées par les patients en parcours de soins, si c'est possible de répondre à cette question ? Parce que c'est vrai que c'est un petit peu compliqué, mais dans ta pratique quotidienne, qu'est-ce que tu observes ? Et puis, quelles sont les interactions et les problématiques qui en découlent ?

  • Bertrand

    Là encore, c'est très difficile de répondre, tout simplement parce qu'il n'y a pas de règles. Alors c'est très dépendant de différentes choses. Ça va dépendre d'abord de l'origine du patient. C'est une évidence, mais on va la donner quand même. Il y a des patients qui sont d'origine notamment nord-africaine qui consomment énormément d'épices, ce qui n'est pas forcément le cas de patients qui ne proviennent pas de cette zone géographique. Je pense que dans le sud de la France, on a tendance à manger beaucoup plus d'ail que dans le nord. Je suis originaire du sud de la France, c'est pour ça que ça m'amuse. Donc ça, c'est déjà dans l'alimentation. Après, concernant les plantes elles-mêmes, il n'y a pas de règle, parce qu'en fait on se rend compte qu'il y a des modes. C'est par vagues, c'est très souvent des échanges entre patients. L'étude dont je parlais tout à l'heure concernant la consommation de phytothérapie par les femmes atteintes de cancer du sein avait bien montré ça, c'est-à-dire que, contrairement à ce qu'on peut penser, Les patients ne vont pas forcément chercher des choses sur internet, mais c'est vraiment de la discussion entre patients, et qui fait qu'il y a des fois des espèces de petits emballements sur des plantes en particulier. Donc c'est des modes. Il y a quelques années, il y avait une grande mode sur ce qu'on appelle le kava-kava, qui est une plante pour le coup qui présente des propriétés toxiques, donc il y avait eu des soucis à l'époque. actuellement je ne saurais dire s'il y a vraiment une mode mais c'est souvent par vague donc je pense que de façon très pragmatique une fois de plus la seule chose à faire c'est que le patient explique à son médecin à son pharmacien ce qu'il prend que ce soit une mode ou pas et puis derrière on fera l'analyse pour voir exactement ce qu'il se passe

  • Abigaïl

    Je me mets à la place du patient, et du coup j'ai envie de te poser la question, est-ce qu'il existe des plantes bénéfiques quand on est sous traitement de chimiothérapie qui permettent d'atténuer les effets secondaires et qui seraient sans interaction ?

  • Bertrand

    Alors, il peut en exister, mais je me garderais bien d'en dresser une liste, tout simplement parce que, évidemment, pour être sûr de l'inocuité d'une... d'un... d'une association entre une plante et un médicament, il faut d'un côté connaître la plante et de l'autre côté connaître le médicament. Puisque vous prenez deux médicaments, deux thérapies ciblées utilisées dans la même indication, par exemple en hématologie, ces deux médicaments ne vont pas être métabolisés exactement de la même manière dans l'organisme et peut-être que l'un des deux va interagir avec une plante et que le second n'interagira pas avec celle-là, mais interagira avec une autre. Donc il n'y a pas de réponse. C'est absolument impossible de dresser cette liste. La seule chose qu'on fait, on va dire un petit peu en miroir. C'est qu'au niveau des pharmaciens, on essaie d'identifier typiquement les associations où il y a des interactions de façon certaine pour donner des réponses rapidement aux patients pour ne pas les laisser dans l'incertitude. Mais on ne peut pas dresser de listes sans interactions, c'est absolument impossible.

  • Abigaïl

    Et à l'inverse, est-ce qu'il y a des plantes qui sont à éviter impérativement ?

  • Bertrand

    Alors oui, j'ai parlé du cava-cava tout à l'heure. Oui, il y a des plantes qu'il faut éviter impérativement. Il y a une liste de plantes qui est officielle, qu'on peut retrouver sur le site de l'Agence nationale du médicament, donc l'ANSM. C'est ce qu'on appelle la liste B des plantes médicinales. Cette liste B va lister toutes les plantes dont on sait que les propriétés toxiques l'emportent sur les propriétés thérapeutiques. C'est une liste qui est relativement longue. Mais par contre, en la consultant, on sait tout de suite si la plante est dangereuse ou pas. Donc c'est des choses comme ça qu'on peut avoir en termes de réflexes patients. On va voir cette liste. Si la plante qu'on compte prendre est sur cette liste, il vaut mieux ne pas la prendre du tout. Contexte cancérologique ou pas d'ailleurs.

  • Abigaïl

    Oui, parce que cette liste, elle est accessible à tout le monde.

  • Bertrand

    C'est sur le route de l'ANSM. Complètement. Vous tapez liste B, ANSM, normalement, ça sort sur Internet. Google est notre ami.

  • Abigaïl

    Et du coup, en tant que patient, quelle source d'information tu conseilles ? Une source d'information qui serait fiable ? Et quelle serait l'attitude pour sécuriser les parcours de soins ?

  • Bertrand

    Alors, il y a plusieurs sources d'informations concernant cette problématique. Il y a des sources d'informations qui sont quand même très tournées vers les professionnels de santé. Donc moi, je déconseille aux patients d'y aller directement parce que souvent, il faut quand même avoir des connaissances dans le domaine pour bien comprendre ce qui est rapporté dans ces bases de données. Moi, je conseillerais peut-être d'avoir recours à un outil en particulier. Comme je l'ai dit, je fais partie de la Société française de pharmacie oncologique. Et la SFPO a... créé ce qu'on appelle des fiches Oncoliens. Ces fiches Oncoliens sont tout à fait disponibles sur Internet. Vous tapez Oncolien et ça sort tout de suite. On a fait des fiches à destination des professionnels de santé pour tous les médicaments thérapie orale, anticancéreuse, mais également des fiches à destination des patients, qui vont lister des choses très simples à type de comment est-ce qu'on prend le médicament, comment est-ce qu'on prend en charge ses effets indésirables, etc. Mais à la fin de ces fiches, on a également listé, pour chacun des médicaments, les plantes pour lesquelles il peut y avoir des interactions. Alors évidemment, on ne peut pas être exhaustif sur la totalité des plantes potentiellement consommables par les patients, mais on a essayé d'être le plus exhaustif possible, et donc un patient qui voudrait prendre une thérapie orale et qui se poserait des questions peut aller consulter la fiche patient oncolien, et en bas de la fiche, il aura la liste des plantes qu'il vaut mieux éviter.

  • Abigaïl

    Et cette liste est souvent longue.

  • Bertrand

    Cette liste est souvent longue.

  • Abigaïl

    Non mais pour les utiliser à titre personnel, dans ma pratique professionnelle, ces fiches, moi j'aime bien éditer ma fiche, et puis éditer aussi la fiche du patient, et puis en sortie d'entretien, comme ça le patient a sa fiche, il repart avec sa fiche, et c'est vrai qu'on est souvent surpris de la quantité de plantes en interaction avec les traitements.

  • Bertrand

    Oui, c'est vraiment une question. Très souvent, les gens ne sont pas conscients de cette question du tout. On l'a déjà dit tout à l'heure. Et donc, si ça peut sécuriser leur prise, c'est très bien. Après, de toute façon, et ça, je pense que c'est quand même le plus important, plus le patient parlera avec son clinicien, son pharmacien, plus il sécurisera sa prise de plantes et sa prise de chimiothérapie.

  • Abigaïl

    Oui, mais ça, justement, je pense que ce sera le mot de la fin. C'est justement l'attitude à... Avoir, quand on est en parcours de soins, de communication avec son oncologue, le pharmacien à l'hôpital, le pharmacien en officine, de vraiment dire, expliquer les choses et de dire aussi j'ai envie de prendre telle chose pour soulager tel effet indésirable ou améliorer telle qualité de vie, en parler et comme ça, ça permet de voir la meilleure option pour le patient à un moment donné, en fonction de la thérapie qu'il prend.

  • Bertrand

    C'est tout à fait ça. Les recommandations dont j'ai parlé tout à l'heure, on a travaillé justement sur cette question de comment se positionner vis-à-vis du patient, vis-à-vis de toutes ces problématiques qui sont certes liées à son cancer, mais qui sont aussi d'ordre psychologique, la prise en charge de sa pathologie par lui-même et pas juste par une chimiothérapie qui vient de l'extérieur. Donc, On a beaucoup travaillé là-dessus, justement, l'idée c'est vraiment... Du côté patient, qu'il soit transparent avec les professionnels de santé, qu'il n'ait pas peur de dire qu'il prend de la phytothérapie, qu'il n'ait pas peur de dire pourquoi, parce que parfois, tout simplement, ça permet d'identifier des problèmes que le clinicien n'avait pas identifiés. Donc, d'un côté, de la transparence du côté du patient qui doit dire aux professionnels de santé ce qu'il consomme, et puis de l'autre côté, côté professionnel de santé, une écoute. On va discuter avec le patient, bien comprendre son profil, lui expliquer les risques. S'il y en a, c'est très important, être pédagogue. Après, le patient reste libre de prendre quelque chose, même si on lui dit qu'il ne vaut mieux pas. Mais par contre, ce qu'on peut faire aussi pour accompagner le patient, c'est lui dire surtout, au moindre effet indésirable, vous contactez votre oncologue, etc. Donc c'est vraiment du... Ce que je disais tout à l'heure, c'est du gagnant-gagnant, c'est un travail d'équipe. L'idée, ce n'est pas d'interdire. Souvent, les patients ont peur d'en parler, parce qu'ils ont peur qu'on leur dise, vous arrêtez tout sans réflexion. Donc l'idée, ce n'est vraiment pas ça. C'est qu'on est... Cette réflexion avec le patient pour voir ce qui est le mieux pour lui, même si on doit différer un petit peu la prise de phytothérapie, par exemple.

  • Abigaïl

    Oui, et puis des fois, je pense aussi que les patients ont peur qu'on les moralise, qu'on soit moralisateur vis-à-vis des traitements qu'ils peuvent prendre à côté. Donc c'est vrai que la posture du soignant, elle est hyper importante. Il faut pouvoir être suffisamment ouvert pour que le patient soit en confiance et nous dise les choses.

  • Bertrand

    C'est évident. Moi, en tout cas, dans ma pratique quotidienne, je ne suis jamais dans le jugement. Je n'ai pas à juger de ce que fait le patient. Moi, j'ai à protéger le patient. Ce n'est pas la même chose. Donc, j'essaie de lui dire, je lui dis s'il y a des problèmes. Après, bien sûr que c'est lui qui gère sa maladie. On est bien d'accord là-dessus.

  • Abigaïl

    En tout cas, merci beaucoup Bertrand. Est-ce que tu vois quelque chose à rajouter qu'on n'aurait pas ? qu'on n'aurait pas balayé sur ce vaste sujet.

  • Bertrand

    Je ne crois pas. Je suis très content d'avoir fait cet enregistrement parce que c'est vraiment une question qui me tient à cœur. Je travaille dessus depuis une dizaine d'années. Les choses évoluent plutôt en bien. Et pour moi, c'est vraiment très important que les professionnels de santé, et surtout les patients, aient ces notions en tête.

  • Abigaïl

    En tout cas, merci beaucoup. C'était aussi un plaisir de t'avoir au micro, Bertrand. Et puis encore merci pour ton temps, parce que je sais que tu es très pris sur ce congrès. Et c'était un véritable plaisir de discuter de ce sujet-là avec toi. Merci beaucoup en tout cas.

  • Bertrand

    Merci.

  • Abigaïl

    Merci Bertrand. Au revoir. Petite note de fin d'épisode pour vous rappeler que vous pouvez télécharger le cadeau gratuit que j'ai créé pour vous. Il s'agit d'une feuille très pratique pour les patients et qui permet la prise de notes entre deux passages dans le service hospitalier. Le but de cette ressource est de faciliter la communication avec l'équipe de soins et de ne pas oublier les choses à dire en consultation. Vous pourrez y signaler vos symptômes, vos éventuels effets indésirables et noter toutes vos questions à poser aux différents professionnels du service. J'espère que cette ressource vous aidera dans votre prise en charge et vous trouverez le lien pour la télécharger gratuitement en note de l'épisode ainsi que sur la page Instagram. Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de canc'Héros. Si le contenu vous a plu, n'hésitez surtout pas à le partager auprès de patients de votre entourage qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre 5 étoiles sur Apple Podcast et Spotify, ainsi qu'un commentaire sur Apple Podcast. Ça aide vraiment à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à aider un maximum de patients. Mille mercis à ceux qui prendront le temps de le faire. Si vous souhaitez me contacter pour me faire des retours sur les thèmes que vous aimeriez que j'aborde, me faire part de vos problématiques ou tout simplement me raconter votre histoire, c'est sur la page Instagram du podcast que ça se passe à canc.heros ou sur la page Facebook canc'Héros Podcast. Je vous souhaite une très belle journée, prenez bien soin de vous et à bientôt !

Description

Dans ce nouvel épisode de la saison 3 de canc'Héros, on parle avec Bertrand, pharmacien hospitalier, des interactions plantes chimiothérapie. Vaste sujet !!


En effet, combien de patients prennent des plantes en parallèle de leur traitements, sans même avoir conscience du risque d'interaction que cela pourrait avoir.


Les interactions sont de plusieurs ordres : il peut s'agir d'une augmentation de toxicités des chimiothérapies, une diminution voire une annulation de l'effet thérapeutique du traitement. Il peut aussi s'agir d'une plante avec des effets toxiques.


On détaille avec Bertrand des cas d'interactions issus de sa pratique pharmaceutique hospitalière. Ces exemples nous montrent que les interactions peuvent provenir des plantes mais aussi de l'alimentation.


L'idée clé n'est donc pas d'interdire par principe mais plutôt de sécuriser !!

Le patient doit bénéficier d'un cadre de confiance qui permet la communication avec l'équipe de soins. Les habitudes ou la volonté de prise de phytothérapie / complément alimentaire / alimentation doivent être discutées avec le pharmacien afin de sécuriser le parcours de soins du patient.


Les fiches Oncolien constituent une source d'information fiable aussi bien pour le patient que pour le professionnel.


Vous pouvez nous retrouver sur Instagram sur la page canc.heros ou sur Facebook sur la page canc'Héros podcast.

N'oubliez pas de mettre un avis et une bonne note sur les plateformes d'écoutes, ça aide à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à le faire connaitre auprès d'un maximum de patients.

N'hésitez pas à recommander le podcast si vous connaissez dans votre entourage des patients qui pourraient en avoir besoin.


Mille mercis pour votre écoute, vos recommandations et vos messages de soutien !

Prenez bien soin de vous !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Abigaïl

    Bonjour à toutes, bonjour à tous. Je suis ravie de vous accueillir dans la saison 3 du podcast canc'Héros. Canc'Héros, c'est le podcast santé qui aide les patients atteints de cancer à devenir acteurs de leurs soins. Je suis Abigail, pharmacienne d'officine, et ma mission ici est de favoriser le partage d'expériences autour des parcours de soins cancer, le partage de témoignages entre patients, et véhiculer une information de qualité pour les patients atteints de cancer ou en rémission, ainsi que pour leur entourage, les aidants, les accompagnants. Pour ce faire, j'accueillerai à mon micro des patients qui ont pour point commun l'envie de partager leur expérience et leur histoire dans le but d'aider les autres. J'accueillerai aussi des experts, des professionnels de santé, des associations, car je suis convaincue qu'un patient bien informé est un patient qui sera plus facilement acteur de son parcours de soins dans le but d'améliorer sa qualité de vie. Si vous appréciez mon travail, n'hésitez pas à recommander le podcast canc'Héros à d'autres patients qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre un avis et une note sur les plateformes d'écoute afin de rendre canc'Héros plus visible et d'aider un maximum de patients. Mille mercis et je vous souhaite une très belle écoute. Bonjour Bertrand.

  • Bertrand

    Bonjour.

  • Abigaïl

    Je suis ravie de t'accueillir sur le podcast canc'Héros. Merci beaucoup pour ton temps et ta présence. Aujourd'hui, nous sommes ensemble aux journées d'actualité. Attends, tu vas le dire à ma place, tu le feras mieux !

  • Bertrand

    aux journées nationales d'actualité en oncologie.

  • Abigaïl

    Voilà, et tu es organisateur, et je suis ravie de participer à ce congrès, et merci beaucoup parce que je sais que tu es très pris, et là d'ailleurs on commence l'interview avant 8h, on est bien matinal, bien matinaux ! Est-ce que tu veux bien te présenter s'il te plaît pour les auditeurs qui nous écoutent ?

  • Bertrand

    Bien sûr, j'ai salué, bonjour à tous. Moi je suis Bertrand Pourroy, je suis pharmacien spécialisé en oncologie depuis maintenant presque 25 ans. J'exerce dans un centre hospitalo-universitaire. Je suis également membre de la Société Française de Pharmacie Oncologique. Et à ce titre, j'ai beaucoup travaillé sur les problématiques d'interaction potentielle entre les médecines alternatives complémentaires et notamment la phytothérapie et les médicaments anticancéreux. Avec une consoeur, Émilie Petitjean, on avait d'ailleurs rédigé des recommandations pour nos confrères pharmaciens qui exercent aussi bien à l'hôpital qu'en officine sur cette question.

  • Abigaïl

    Je suis ravie de t'accueillir parce que c'est une question qui est hyper importante pour nos patients qui sont en parcours de soins oncologiques. Souvent, les patients demandent à avoir des plantes qui peuvent atténuer les effets indésirables, des plantes qui peuvent améliorer le quotidien. Je suis ravie de t'accueillir parce que tu es la personne parfaite pour cette question-là, étant donné que tu as rédigé ces recommandations SFPO : plantes et compléments alimentaires dans la prise en charge du patient atteint de cancer. Donc encore merci.

  • Bertrand

    Merci.

  • Abigaïl

    Alors, peux-tu nous expliquer en quoi cette question des interactions plantes / compléments alimentaires avec les médicaments de chimiothérapie est importante ? Et est-ce que tu connais aussi les proportions de patients qui prennent des traitements à côté de leur chimiothérapie ?

  • Bertrand

    Alors, c'est beaucoup de questions, je vais essayer de les faire dans l'ordre. Alors, concernant la proportion de patients consommant des médecines alternatives complémentaires, dont la phytothérapie, les études sont très variables d'un pays à l'autre, d'une typologie de patient à l'autre, mais on estime, suite à différentes études dans la littérature, qu'entre 30 et 70% des patients peuvent avoir recours à ces produits au cours de leurs traitements, qu'ils soient d'ailleurs de cancérologie ou sans lien avec la cancérologie. Il n'est pas question ici de critiquer ni les patients qui prennent de ces produits, ni les produits eux-mêmes qui peuvent avoir des propriétés pharmacologiques évidentes. L'exemple typique, c'est le millepertuis qui est utilisé à visée antidépressive très largement en Allemagne, un petit peu moins en France, mais très largement malgré tout. C'est une plante qui a ses propriétés thérapeutiques, c'est certain, pour autant... C'est une plante qui n'est pas dénuée de risques par elle-même, puisque c'est une plante qui va pouvoir jouer sur ce qu'on appelle la métabolisation des médicaments. Pour faire très très simple, lorsqu'on prend un médicament, on a... une sorte d'usine dans l'organisme qui est le foie, qui va être capable de transformer ces médicaments pour que l'organisme puisse les éliminer, puisque le médicament finit par s'éliminer de l'organisme. Et en fait, beaucoup de produits, des médicaments, mais également des plantes, vont pouvoir jouer sur cette usine, soit augmenter sa cadence de production, et donc on va... dégrader un peu plus les médicaments, ou à l'inverse, vont ralentir cette usine, ce qui va avoir comme effet qu'on va être plus exposé aux médicaments, puisque ces médicaments vont être moins dégradés. Donc on voit bien que c'est un dommage collatéral de la phytothérapie, mais qui peut être très dommageable aux patients, puisqu'on peut avoir soit des toxicités trop importantes si on ralentit cette usine de dégradation, ou à l'inverse, une perte d'efficacité si on dit à l'usine de dégradation du médicament d'accélérer. C'est une question qui est très importante, qu'il faut prendre en compte. Il n'est pas question d'interdire tout produit de phytothérapie par principe ou de tout autoriser. Ce qui est intéressant, c'est de voir ce qui est bon pour le patient au moment où il prend son traitement.

  • Abigaïl

    L'exemple du millepertuis est hyper éloquent. On a une interaction avec énormément de médicaments, y compris les contraceptifs oraux par exemple. Là on est hors sujet d'oncologie, mais tout ça pour dire que les plantes interagissent avec les traitements et peuvent annuler complètement l'effet thérapeutique.

  • Bertrand

    Et annuler et augmenter la toxicité. On peut avoir les deux. C'est très important.

  • Abigaïl

    Et du coup, tu dis entre 30 et 70% des patients, en fait, la fourchette, elle est hyper large. C'est qu'on a du mal à évaluer. Comment t'expliques qu'on n'ait pas des chiffres aussi un peu plus précis ?

  • Bertrand

    La première réponse, c'est que c'est un sujet qui n'est pas forcément très étudié. La deuxième réponse, c'est que lorsqu'on regarde un petit peu dans le détail, on a... D'abord, une utilisation très large dans la population générale, cancéreuse ou non cancéreuse, de ces produits de phytothérapie. Lorsqu'on s'intéresse typiquement aux patients cancéreux, on a vraiment une grande variabilité en fonction des typologies de patients. On se rend compte que, par exemple, les femmes avec un niveau d'études élevé autour de la cinquantaine vont beaucoup plus consommer que, par exemple, des patients un peu plus âgés, masculins. Donc c'est très très variable et il y a très peu d'études parce que c'est quand même... des populations de patients qui ne sont pas énormes malgré tout. Et donc faire focus sur ces questions, c'est assez compliqué. Nous, on avait fait une étude il y a quelques années maintenant sur une plateforme participative patients et on était sur à peu près, de mémoire, 50% des patients, c'était des patients atteints de cancer du sein, qui consommaient de la phytothérapie.

  • Abigaïl

    Et après, il y a aussi des patients qui n'osent pas dire ?

  • Bertrand

    Oui, alors ça, c'est vrai que c'est une vraie question. Il y a peut-être deux raisons à cela. C'est vrai qu'un patient qui est dans un parcours de soins cancer, il est pris dans une grosse machine, on sait comment ça se passe. C'est les décisions de RCP, c'est les consultations avec les médecins, il faut prendre tel traitement, tel soin de support, etc. Et c'est vrai que la phytothérapie est un petit espace de liberté pour le patient dans sa prise en charge. Donc il faut absolument la préserver, ce n'est pas le souci. Par contre, il faut la sécuriser. La deuxième raison aussi, c'est que... les patients n'ont pas ce réflexe d'en parler aux professionnels de santé, parce que très souvent on a une image de la phytothérapie des plantes comme quelque chose de très naturel et donc sans risque, et très souvent les patients n'ont même pas l'idée d'en parler, puisque pour eux ça n'a aucun risque, alors qu'en fait on sait que ça représente des risques importants.

  • Abigaïl

    Mais ce que tu dis par rapport à cet espace de liberté à préserver, je suis totalement d'accord, et en plus je pense que le patient a besoin de ça aussi pour être acteur de ses soins. On lui impose beaucoup de choses dans les lignes de traitements. Ça ne se discute pas. Mais c'est vrai que sur les plantes, le patient peut avoir une petite liberté, une reprise en main de son traitement. Et c'est vrai que ça, il faut pouvoir le préserver. Et tu le dis très bien, il faut le sécuriser.

  • Bertrand

    C'est tout à fait ça. C'est vraiment le maître mot. Pour faire très très simple... Dans ma réflexion, on a des médicaments anticancéreux dont on connaît parfaitement le profil de toxicité et l'efficacité, puisqu'il y a eu des études cliniques menées qui ont montré scientifiquement que ces médicaments avaient des propriétés intéressantes et des toxicités certes connues mais qu'on peut maîtriser. Et puis à côté, on a de la phytothérapie qui est beaucoup moins étudiée, dont on sait que parfois on peut avoir des effets bénéfiques, mais on n'a pas forcément de détails quant au profil de toxicité de ces plantes ou d'interaction. Et donc tout l'enjeu est d'arriver à travailler avec le patient pour identifier les risques potentiels qu'il peut prendre. Et c'est toujours pareil, il n'y a pas d'imposition de conduite à tenir, mais au moins lui expliquer les risques qu'il peut rencontrer. et puis discuter éventuellement avec lui d'une stratégie thérapeutique gagnant-gagnant. Vous prenez votre traitement pendant un certain temps, et puis lorsque vous aurez terminé votre séquence de traitement, à ce moment-là, vous pourrez prendre la phytothérapie qui vous intéresse, parce qu'il n'y aura plus de risque d'interaction. Ou alors, vous arrêtez cette plante particulièrement, et vous la remplacez par éventuellement de l'homéopathie ou des choses comme ça. C'est vraiment un travail d'équipe, on est en soutien du patient.

  • Abigaïl

    C'est ça en fait, il faut créer une alliance thérapeutique et puis trouver ce qu'il y a de mieux et ce qui correspond aussi aux attentes du patient à un moment donné et que ce soit compatible avec ses traitements de chimiothérapie.

  • Bertrand

    Complètement, la sécurité et la liberté.

  • Abigaïl

    Mais en fait cet épisode c'est pour ça qu'il est très important et j'avais hâte de l'enregistrer parce que c'est vrai que... C'est important de faire prendre conscience aux patients que les plantes ne sont pas sans risques. Il y a des toxicités, il y a des interactions et que le premier réflexe quand on veut prendre quelque chose dans son parcours de soins, c'est d'en parler à son oncologue ou à l'équipe qui est en prise en charge du patient.

  • Bertrand

    Ça, c'est certain. Le maître mot, c'est vraiment la communication. Si on ne communique pas, personne ne sait rien et on peut arriver à des catastrophes de prise en charge puisqu'on va avoir des patients qui, d'un coup, vont faire des toxicités énormes avec leur traitement, qui vont devoir arrêter leur prise en charge alors que c'est simplement une interaction qui aurait pu être gérée avec l'équipe. Tout simplement parce qu'on ne sait pas qu'il y a de la phytothérapie qui est consommée par exemple, ou des patients qui vont progresser très rapidement alors qu'on ne devrait pas avoir une progression, tout simplement parce qu'on a de nouveau une interaction. Donc l'idée c'est vraiment de communiquer, il ne faut pas avoir peur de dire à son oncologue, aux pharmaciens qu'on peut voir éventuellement à l'officine ou à l'hôpital, lors d'entretiens pharmaceutiques par exemple sur les thérapies orales anticancéreuses. Il faut diffuser l'information, tout simplement pour que, très souvent, l'information arrive jusqu'à un pharmacien, puisque dans notre formation, on est quand même à la fois formé au médicament, mais également à la botanique, à ce qu'on appelle la pharmacognosie, donc l'utilisation des plantes à visée médicinale. Et donc, on a cette expertise-là, au niveau pharmaceutique, où on va pouvoir analyser le risque d'interaction.

  • Abigaïl

    Mais du coup, quand tu parlais de catastrophe, justement, Est-ce que tu as des exemples concrets tirés de ta pratique quotidienne pour illustrer ces interactions et ces toxicités entre les traitements de chimiothérapie et les plantes ?

  • Bertrand

    Oui, j'en ai quelques-uns. Je vais peut-être commencer par un cas qui nous avait marqué. C'était un patient de pédiatrie qui était traité pour ce qu'on appelle du méthotrexate haute dose, donc un médicament qui est très actif, mais qui peut provoquer des toxicités très importantes s'il est mal éliminé au niveau rénal, puisque c'est un médicament qui est d'élimination rénale. Et donc ce patient avait reçu six cures de méthotrexate haute dose sans aucune toxicité particulière. Et à sa septième cure, il a fait un tableau absolument cataclysmique, une toxicité majeure avec des retentissements rénaux, cutanés, tout une série hématologique. Et lorsqu'on a essayé de comprendre ce qui s'était passé, ses parents de toute bonne foi lui avaient donné justement des produits à base de phytothérapie. Donc on a travaillé le sujet, on a travaillé également avec le centre régional de pharmacovigilance à qui le cas avait été déclaré et donc le centre régional de pharmacovigilance a conclu à l'imputabilité réelle de cette toxicité à cette consommation de phytothérapie. Tant et si bien qu'on a évidemment conseillé aux parents d'arrêter cette consommation de plantes. L'enfant a pu faire par la suite encore six cures de méthotrexate haute dose sans aucune toxicité. Donc là, on voit très bien l'impact qu'une prise ponctuelle de phytothérapie peut avoir sur un patient. Donc ça, c'était un patient pédiatrique, mais ça marche aussi chez les adultes. J'ai d'autres exemples si tu le souhaites.

  • Abigaïl

    Et du coup, cette plante, c'était quoi ? Et qu'est-ce que les parents cherchaient à améliorer ?

  • Bertrand

    Alors cette plante c'était des extraits de feuilles d'olivier. Ce que les parents cherchaient à améliorer, je ne sais absolument pas. Mais très souvent, c'est véritablement chez les patients une recherche de contrôle, de maîtrise des effets indésirables des chimiothérapies. C'est vraiment la principale cause. Certains patients, hélas, tendent à remplacer leur traitement de chimiothérapie par des plantes. Toute la littérature le montre très bien, ça provoque des rechutes.

  • Abigaïl

    C'est une perte de chance incroyable.

  • Bertrand

    C'est une perte de chance complète. Ça a vraiment été montré dans la littérature. Des comparaisons de cohortes où les patients, souvent des patients de cancer du sein, parce qu'il y a d'énormes cohortes dans le cancer du sein, prennent de la phytothérapie à la place de leurs chimios. Clairement, on a une perte de chance. On peut avoir aussi une perte de chance à cause des interactions. Ça a été également montré. Mais là, justement, l'intérêt, c'est de pouvoir communiquer et de travailler avec le patient pour limiter ce risque.

  • Abigaïl

    Oui, en aucun cas, on le reprécise, ça ne remplace les traitements ?

  • Bertrand

    Absolument pas.

  • Abigaïl

    En aucun cas.

  • Bertrand

    Absolument pas. Les produits de phytothérapie peuvent être des alliés dans la prise en charge des toxicités, aussi tant est qu'il n'y ait aucun risque vis-à-vis du traitement anticancéreux. Ça ne peut en aucun cas remplacer un traitement anticancéreux.

  • Abigaïl

    Est-ce que tu as d'autres exemples à nous donner ?

  • Bertrand

    Alors, j'ai d'autres exemples, oui. On s'éloigne un petit peu de la plante, mais c'est quand même d'origine végétale. C'est un patient qui consommait, parce qu'il aimait ça, des litres de jus de grenade. la grenade qui est un fruit qui est plutôt à la mode, qu'on aime bien déguster actuellement. Et en fait, la grenade peut présenter des propriétés particulières, à savoir qu'elle peut, ce que je vous ai expliqué tout à l'heure, ralentir cette usine de dégradation des médicaments qu'est le foie. Et donc ce patient, son hématologue lui a prescrit une thérapie orale anticancéreuse. Et dès le début de son traitement, il a présenté des toxicités monstrueuses. Il a été à deux doigts d'arrêter son traitement. En fait, c'est une collègue pharmacienne qui l'a contactée par téléphone à l'initiation de son traitement et qui a tout de suite vu cette toxicité abominable, qui lui a posé tout plein de questions, qui a identifié ce jus de grenade comme pouvant potentiellement inhiber le métabolisme du médicament et donc être responsable d'une surexposition et d'une toxicité. Donc le patient a immédiatement arrêté de consommer son jus de grenade. et trois jours après, sa toxicité avait complètement disparu. Donc c'est un exemple qui est assez parlant. Peut-être un autre, dans une autre catégorie d'interaction, on l'a dit tout à l'heure, les plantes peuvent avoir des effets pharmacologiques, on a parlé du millepertuis qui est antidépresseur, vous avez plein de plantes qui peuvent jouer sur plein de choses dans l'organisme. Alors il y a une plante toute simple, c'est la réglisse. qu'on peut également trouver dans une boisson qui s'appelle l'anthésite. C'est une marque, mais tout le monde comprendra ce que c'est. Donc la réglisse a des propriétés. Elle-même, de base, elle a tendance à faire augmenter la tension artérielle. Alors des très petites quantités, de temps en temps, ce n'est pas très gênant, mais on a eu l'exemple d'un... d'un patient qui prenait des traitements thérapie orale également ciblés, qui avaient déjà des effets pro-hypertenseur. Et donc cette consommation de réglisse a fait fluctuer sa tension à la hausse de façon trop importante. Donc là encore, on a identifié le problème et il a stoppé sa consommation de réglisse, puisque là il n'y avait pas de volonté particulière thérapeutique, c'était juste qu'il aimait bien le goût. Mais voilà, c'est des exemples très pragmatiques, où on se rend compte qu'on peut tout de suite jouer sur des choses qui vont impacter le traitement et la santé du patient. Et donc il faut juste en discuter avec lui avant pour être sûr qu'il n'y a pas de problème.

  • Abigaïl

    Mais du coup, là, ce qui est frappant, c'est que sur trois exemples, il y a deux exemples qui sont issus de l'alimentation. En fait, on a aussi une interaction dans l'alimentation, les épices que l'on met dans les plats, au même titre que des gélules que l'on peut avaler et acheter, par exemple, en officine.

  • Bertrand

    Complètement. Très souvent, les patients ont en tête l'interaction avec le pamplemousse, qui apparaît très souvent dans les notices des médicaments. C'est exactement le même mécanisme. Le pamplemousse, c'est un fruit qui est très bon, mais qui peut parfois jouer sur le métabolisme des médicaments et donc provoquer des surexpositions aux médicaments. Donc, il y a plein de choses comme ça d'origine végétale, qui ont des effets. Une fois de plus, la question n'est pas de dire qu'on interdit tout ce qui est végétal. La question est de dire... est-ce que ce produit végétal, au moment où je prends ce traitement, est dangereux ou pas ? Pour les épices, c'est évident aussi. Il y a plein de choses qui sont décrites en termes d'interaction avec le curcuma, avec différents types de ginseng, puisqu'il y a plusieurs ginsengs qui sont commercialisés, ils n'ont pas tous les mêmes propriétés sur cette usine qu'est le foie. Il va y avoir l'ail également. Donc là, il y a en quantité raisonnable une fois par jour dans une assiette, ce n'est pas vraiment un problème, mais on connaît tous des patients qui se supplémentent avec de l'ail, de grandes quantités d'ail, en gélules notamment, et l'ail présente des propriétés également potentiellement, alors pas néfastes, mais qu'il faut prendre en compte. L'ail est anticoagulant, l'ail présente différentes propriétés. On a la même question sur le gingembre qui peut avoir également des risques d'interaction avec les médicaments. Le gingembre souvent est présenté comme pouvant être intéressant pour la maîtrise des nausées et vomissements. Donc là encore, il n'y a pas ma connaissance de vraie étude qui ait établi l'intérêt du gingembre pour cette indication-là. Il y a eu des études de fait, notamment en pédiatrie, mais qui n'avaient pas été positives. Après, une fois de plus, un patient qui considère que le gingembre lui fait du bien... Moi, j'encouragerais toujours à prendre du gingembre à condition qu'il n'y ait pas d'interaction avec son traitement.

  • Abigaïl

    Et dans l'alimentation, c'est quoi le seuil qui peut poser problème en termes de quantité ? C'est difficile à évaluer et bien sûr ça dépend des plantes.

  • Bertrand

    C'est impossible à évaluer, c'est bien la problématique. Contrairement aux médicaments, il n'y a pas d'études véritablement poussées sur les plantes par définition. Puisque ne serait-ce que, je ne sais pas si tous les gens ont ça en tête, mais lorsqu'on s'intéresse par exemple aux huiles essentielles qui sont extraites des plantes, Si vous prenez une huile essentielle de lavande cultivée dans un champ, vous étudiez son composition et puis vous allez étudier la composition d'une huile essentielle de lavande cultivée dans le champ d'à côté qui n'est pas orientée de la même manière vis-à-vis du soleil et qui n'a pas la même composition au niveau du terrain, vous allez avoir une composition d'huile essentielle différente. C'est la même chose pour les autres plantes, en fonction de la façon dont elles ont été cultivées, de où elles ont été cultivées, de comment elles ont été récoltées, comment elles ont été préparées, il peut y avoir des différences qualitatives et quantitatives très importantes. Donc on ne peut pas faire une espèce de règle comme ça en disant le curcuma c'est pas plus de temps par jour, l'ail... Ça c'est pas possible. L'idée c'est d'identifier de façon macroscopique le risque. Plus on a d'informations, mieux c'est évidemment. Souvent les pharmaciens vont embêter les patients en leur demandant quelle est la marque de la phytothérapie qu'ils ont acheté, Est-ce qu'il y a un dosage marqué sur la boîte, etc. Mais tout ça, c'est pour justement guider la réflexion pharmaceutique pour arriver à une conclusion la plus fine possible. Lorsqu'on a passé l'information... comme on dit en médecine, primum non nocere, donc on va considérer le risque le plus important. Moi, de façon générale, si je sais qu'il y a un risque d'interaction évident entre du curcuma et un traitement, je vais dire au patient, arrêtez le curcuma pendant la période de ce traitement. Ne continuez pas, on ne maîtrise pas le risque.

  • Abigaïl

    Et même dans l'alimentation.

  • Bertrand

    Ah oui, y compris dans l'alimentation. Oui, oui. Pour vous donner juste un petit exemple, on fait ce qu'on appelle des bilans de médication pour nos patients. pour certaines de nos patientes traitées par des anticancéreux injectables, et donc on appelle ces patientes avant qu'elles viennent faire leur traitement pour voir ce qu'elles prennent justement, et dans notre questionnaire type, on a certes les produits de phytothérapie, les compléments alimentaires, mais on a également les épices utilisés dans l'alimentation, on a également tout ce qui va être tisane, thé, etc., puisque le thé peut également avoir des interactions, il y a des tisanes également qui peuvent contenir des produits potentiellement ...interagissant avec les médicaments.

  • Abigaïl

    Et selon toi, quelles sont les plantes les plus utilisées par les patients en parcours de soins, si c'est possible de répondre à cette question ? Parce que c'est vrai que c'est un petit peu compliqué, mais dans ta pratique quotidienne, qu'est-ce que tu observes ? Et puis, quelles sont les interactions et les problématiques qui en découlent ?

  • Bertrand

    Là encore, c'est très difficile de répondre, tout simplement parce qu'il n'y a pas de règles. Alors c'est très dépendant de différentes choses. Ça va dépendre d'abord de l'origine du patient. C'est une évidence, mais on va la donner quand même. Il y a des patients qui sont d'origine notamment nord-africaine qui consomment énormément d'épices, ce qui n'est pas forcément le cas de patients qui ne proviennent pas de cette zone géographique. Je pense que dans le sud de la France, on a tendance à manger beaucoup plus d'ail que dans le nord. Je suis originaire du sud de la France, c'est pour ça que ça m'amuse. Donc ça, c'est déjà dans l'alimentation. Après, concernant les plantes elles-mêmes, il n'y a pas de règle, parce qu'en fait on se rend compte qu'il y a des modes. C'est par vagues, c'est très souvent des échanges entre patients. L'étude dont je parlais tout à l'heure concernant la consommation de phytothérapie par les femmes atteintes de cancer du sein avait bien montré ça, c'est-à-dire que, contrairement à ce qu'on peut penser, Les patients ne vont pas forcément chercher des choses sur internet, mais c'est vraiment de la discussion entre patients, et qui fait qu'il y a des fois des espèces de petits emballements sur des plantes en particulier. Donc c'est des modes. Il y a quelques années, il y avait une grande mode sur ce qu'on appelle le kava-kava, qui est une plante pour le coup qui présente des propriétés toxiques, donc il y avait eu des soucis à l'époque. actuellement je ne saurais dire s'il y a vraiment une mode mais c'est souvent par vague donc je pense que de façon très pragmatique une fois de plus la seule chose à faire c'est que le patient explique à son médecin à son pharmacien ce qu'il prend que ce soit une mode ou pas et puis derrière on fera l'analyse pour voir exactement ce qu'il se passe

  • Abigaïl

    Je me mets à la place du patient, et du coup j'ai envie de te poser la question, est-ce qu'il existe des plantes bénéfiques quand on est sous traitement de chimiothérapie qui permettent d'atténuer les effets secondaires et qui seraient sans interaction ?

  • Bertrand

    Alors, il peut en exister, mais je me garderais bien d'en dresser une liste, tout simplement parce que, évidemment, pour être sûr de l'inocuité d'une... d'un... d'une association entre une plante et un médicament, il faut d'un côté connaître la plante et de l'autre côté connaître le médicament. Puisque vous prenez deux médicaments, deux thérapies ciblées utilisées dans la même indication, par exemple en hématologie, ces deux médicaments ne vont pas être métabolisés exactement de la même manière dans l'organisme et peut-être que l'un des deux va interagir avec une plante et que le second n'interagira pas avec celle-là, mais interagira avec une autre. Donc il n'y a pas de réponse. C'est absolument impossible de dresser cette liste. La seule chose qu'on fait, on va dire un petit peu en miroir. C'est qu'au niveau des pharmaciens, on essaie d'identifier typiquement les associations où il y a des interactions de façon certaine pour donner des réponses rapidement aux patients pour ne pas les laisser dans l'incertitude. Mais on ne peut pas dresser de listes sans interactions, c'est absolument impossible.

  • Abigaïl

    Et à l'inverse, est-ce qu'il y a des plantes qui sont à éviter impérativement ?

  • Bertrand

    Alors oui, j'ai parlé du cava-cava tout à l'heure. Oui, il y a des plantes qu'il faut éviter impérativement. Il y a une liste de plantes qui est officielle, qu'on peut retrouver sur le site de l'Agence nationale du médicament, donc l'ANSM. C'est ce qu'on appelle la liste B des plantes médicinales. Cette liste B va lister toutes les plantes dont on sait que les propriétés toxiques l'emportent sur les propriétés thérapeutiques. C'est une liste qui est relativement longue. Mais par contre, en la consultant, on sait tout de suite si la plante est dangereuse ou pas. Donc c'est des choses comme ça qu'on peut avoir en termes de réflexes patients. On va voir cette liste. Si la plante qu'on compte prendre est sur cette liste, il vaut mieux ne pas la prendre du tout. Contexte cancérologique ou pas d'ailleurs.

  • Abigaïl

    Oui, parce que cette liste, elle est accessible à tout le monde.

  • Bertrand

    C'est sur le route de l'ANSM. Complètement. Vous tapez liste B, ANSM, normalement, ça sort sur Internet. Google est notre ami.

  • Abigaïl

    Et du coup, en tant que patient, quelle source d'information tu conseilles ? Une source d'information qui serait fiable ? Et quelle serait l'attitude pour sécuriser les parcours de soins ?

  • Bertrand

    Alors, il y a plusieurs sources d'informations concernant cette problématique. Il y a des sources d'informations qui sont quand même très tournées vers les professionnels de santé. Donc moi, je déconseille aux patients d'y aller directement parce que souvent, il faut quand même avoir des connaissances dans le domaine pour bien comprendre ce qui est rapporté dans ces bases de données. Moi, je conseillerais peut-être d'avoir recours à un outil en particulier. Comme je l'ai dit, je fais partie de la Société française de pharmacie oncologique. Et la SFPO a... créé ce qu'on appelle des fiches Oncoliens. Ces fiches Oncoliens sont tout à fait disponibles sur Internet. Vous tapez Oncolien et ça sort tout de suite. On a fait des fiches à destination des professionnels de santé pour tous les médicaments thérapie orale, anticancéreuse, mais également des fiches à destination des patients, qui vont lister des choses très simples à type de comment est-ce qu'on prend le médicament, comment est-ce qu'on prend en charge ses effets indésirables, etc. Mais à la fin de ces fiches, on a également listé, pour chacun des médicaments, les plantes pour lesquelles il peut y avoir des interactions. Alors évidemment, on ne peut pas être exhaustif sur la totalité des plantes potentiellement consommables par les patients, mais on a essayé d'être le plus exhaustif possible, et donc un patient qui voudrait prendre une thérapie orale et qui se poserait des questions peut aller consulter la fiche patient oncolien, et en bas de la fiche, il aura la liste des plantes qu'il vaut mieux éviter.

  • Abigaïl

    Et cette liste est souvent longue.

  • Bertrand

    Cette liste est souvent longue.

  • Abigaïl

    Non mais pour les utiliser à titre personnel, dans ma pratique professionnelle, ces fiches, moi j'aime bien éditer ma fiche, et puis éditer aussi la fiche du patient, et puis en sortie d'entretien, comme ça le patient a sa fiche, il repart avec sa fiche, et c'est vrai qu'on est souvent surpris de la quantité de plantes en interaction avec les traitements.

  • Bertrand

    Oui, c'est vraiment une question. Très souvent, les gens ne sont pas conscients de cette question du tout. On l'a déjà dit tout à l'heure. Et donc, si ça peut sécuriser leur prise, c'est très bien. Après, de toute façon, et ça, je pense que c'est quand même le plus important, plus le patient parlera avec son clinicien, son pharmacien, plus il sécurisera sa prise de plantes et sa prise de chimiothérapie.

  • Abigaïl

    Oui, mais ça, justement, je pense que ce sera le mot de la fin. C'est justement l'attitude à... Avoir, quand on est en parcours de soins, de communication avec son oncologue, le pharmacien à l'hôpital, le pharmacien en officine, de vraiment dire, expliquer les choses et de dire aussi j'ai envie de prendre telle chose pour soulager tel effet indésirable ou améliorer telle qualité de vie, en parler et comme ça, ça permet de voir la meilleure option pour le patient à un moment donné, en fonction de la thérapie qu'il prend.

  • Bertrand

    C'est tout à fait ça. Les recommandations dont j'ai parlé tout à l'heure, on a travaillé justement sur cette question de comment se positionner vis-à-vis du patient, vis-à-vis de toutes ces problématiques qui sont certes liées à son cancer, mais qui sont aussi d'ordre psychologique, la prise en charge de sa pathologie par lui-même et pas juste par une chimiothérapie qui vient de l'extérieur. Donc, On a beaucoup travaillé là-dessus, justement, l'idée c'est vraiment... Du côté patient, qu'il soit transparent avec les professionnels de santé, qu'il n'ait pas peur de dire qu'il prend de la phytothérapie, qu'il n'ait pas peur de dire pourquoi, parce que parfois, tout simplement, ça permet d'identifier des problèmes que le clinicien n'avait pas identifiés. Donc, d'un côté, de la transparence du côté du patient qui doit dire aux professionnels de santé ce qu'il consomme, et puis de l'autre côté, côté professionnel de santé, une écoute. On va discuter avec le patient, bien comprendre son profil, lui expliquer les risques. S'il y en a, c'est très important, être pédagogue. Après, le patient reste libre de prendre quelque chose, même si on lui dit qu'il ne vaut mieux pas. Mais par contre, ce qu'on peut faire aussi pour accompagner le patient, c'est lui dire surtout, au moindre effet indésirable, vous contactez votre oncologue, etc. Donc c'est vraiment du... Ce que je disais tout à l'heure, c'est du gagnant-gagnant, c'est un travail d'équipe. L'idée, ce n'est pas d'interdire. Souvent, les patients ont peur d'en parler, parce qu'ils ont peur qu'on leur dise, vous arrêtez tout sans réflexion. Donc l'idée, ce n'est vraiment pas ça. C'est qu'on est... Cette réflexion avec le patient pour voir ce qui est le mieux pour lui, même si on doit différer un petit peu la prise de phytothérapie, par exemple.

  • Abigaïl

    Oui, et puis des fois, je pense aussi que les patients ont peur qu'on les moralise, qu'on soit moralisateur vis-à-vis des traitements qu'ils peuvent prendre à côté. Donc c'est vrai que la posture du soignant, elle est hyper importante. Il faut pouvoir être suffisamment ouvert pour que le patient soit en confiance et nous dise les choses.

  • Bertrand

    C'est évident. Moi, en tout cas, dans ma pratique quotidienne, je ne suis jamais dans le jugement. Je n'ai pas à juger de ce que fait le patient. Moi, j'ai à protéger le patient. Ce n'est pas la même chose. Donc, j'essaie de lui dire, je lui dis s'il y a des problèmes. Après, bien sûr que c'est lui qui gère sa maladie. On est bien d'accord là-dessus.

  • Abigaïl

    En tout cas, merci beaucoup Bertrand. Est-ce que tu vois quelque chose à rajouter qu'on n'aurait pas ? qu'on n'aurait pas balayé sur ce vaste sujet.

  • Bertrand

    Je ne crois pas. Je suis très content d'avoir fait cet enregistrement parce que c'est vraiment une question qui me tient à cœur. Je travaille dessus depuis une dizaine d'années. Les choses évoluent plutôt en bien. Et pour moi, c'est vraiment très important que les professionnels de santé, et surtout les patients, aient ces notions en tête.

  • Abigaïl

    En tout cas, merci beaucoup. C'était aussi un plaisir de t'avoir au micro, Bertrand. Et puis encore merci pour ton temps, parce que je sais que tu es très pris sur ce congrès. Et c'était un véritable plaisir de discuter de ce sujet-là avec toi. Merci beaucoup en tout cas.

  • Bertrand

    Merci.

  • Abigaïl

    Merci Bertrand. Au revoir. Petite note de fin d'épisode pour vous rappeler que vous pouvez télécharger le cadeau gratuit que j'ai créé pour vous. Il s'agit d'une feuille très pratique pour les patients et qui permet la prise de notes entre deux passages dans le service hospitalier. Le but de cette ressource est de faciliter la communication avec l'équipe de soins et de ne pas oublier les choses à dire en consultation. Vous pourrez y signaler vos symptômes, vos éventuels effets indésirables et noter toutes vos questions à poser aux différents professionnels du service. J'espère que cette ressource vous aidera dans votre prise en charge et vous trouverez le lien pour la télécharger gratuitement en note de l'épisode ainsi que sur la page Instagram. Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de canc'Héros. Si le contenu vous a plu, n'hésitez surtout pas à le partager auprès de patients de votre entourage qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre 5 étoiles sur Apple Podcast et Spotify, ainsi qu'un commentaire sur Apple Podcast. Ça aide vraiment à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à aider un maximum de patients. Mille mercis à ceux qui prendront le temps de le faire. Si vous souhaitez me contacter pour me faire des retours sur les thèmes que vous aimeriez que j'aborde, me faire part de vos problématiques ou tout simplement me raconter votre histoire, c'est sur la page Instagram du podcast que ça se passe à canc.heros ou sur la page Facebook canc'Héros Podcast. Je vous souhaite une très belle journée, prenez bien soin de vous et à bientôt !

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Description

Dans ce nouvel épisode de la saison 3 de canc'Héros, on parle avec Bertrand, pharmacien hospitalier, des interactions plantes chimiothérapie. Vaste sujet !!


En effet, combien de patients prennent des plantes en parallèle de leur traitements, sans même avoir conscience du risque d'interaction que cela pourrait avoir.


Les interactions sont de plusieurs ordres : il peut s'agir d'une augmentation de toxicités des chimiothérapies, une diminution voire une annulation de l'effet thérapeutique du traitement. Il peut aussi s'agir d'une plante avec des effets toxiques.


On détaille avec Bertrand des cas d'interactions issus de sa pratique pharmaceutique hospitalière. Ces exemples nous montrent que les interactions peuvent provenir des plantes mais aussi de l'alimentation.


L'idée clé n'est donc pas d'interdire par principe mais plutôt de sécuriser !!

Le patient doit bénéficier d'un cadre de confiance qui permet la communication avec l'équipe de soins. Les habitudes ou la volonté de prise de phytothérapie / complément alimentaire / alimentation doivent être discutées avec le pharmacien afin de sécuriser le parcours de soins du patient.


Les fiches Oncolien constituent une source d'information fiable aussi bien pour le patient que pour le professionnel.


Vous pouvez nous retrouver sur Instagram sur la page canc.heros ou sur Facebook sur la page canc'Héros podcast.

N'oubliez pas de mettre un avis et une bonne note sur les plateformes d'écoutes, ça aide à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à le faire connaitre auprès d'un maximum de patients.

N'hésitez pas à recommander le podcast si vous connaissez dans votre entourage des patients qui pourraient en avoir besoin.


Mille mercis pour votre écoute, vos recommandations et vos messages de soutien !

Prenez bien soin de vous !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Abigaïl

    Bonjour à toutes, bonjour à tous. Je suis ravie de vous accueillir dans la saison 3 du podcast canc'Héros. Canc'Héros, c'est le podcast santé qui aide les patients atteints de cancer à devenir acteurs de leurs soins. Je suis Abigail, pharmacienne d'officine, et ma mission ici est de favoriser le partage d'expériences autour des parcours de soins cancer, le partage de témoignages entre patients, et véhiculer une information de qualité pour les patients atteints de cancer ou en rémission, ainsi que pour leur entourage, les aidants, les accompagnants. Pour ce faire, j'accueillerai à mon micro des patients qui ont pour point commun l'envie de partager leur expérience et leur histoire dans le but d'aider les autres. J'accueillerai aussi des experts, des professionnels de santé, des associations, car je suis convaincue qu'un patient bien informé est un patient qui sera plus facilement acteur de son parcours de soins dans le but d'améliorer sa qualité de vie. Si vous appréciez mon travail, n'hésitez pas à recommander le podcast canc'Héros à d'autres patients qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre un avis et une note sur les plateformes d'écoute afin de rendre canc'Héros plus visible et d'aider un maximum de patients. Mille mercis et je vous souhaite une très belle écoute. Bonjour Bertrand.

  • Bertrand

    Bonjour.

  • Abigaïl

    Je suis ravie de t'accueillir sur le podcast canc'Héros. Merci beaucoup pour ton temps et ta présence. Aujourd'hui, nous sommes ensemble aux journées d'actualité. Attends, tu vas le dire à ma place, tu le feras mieux !

  • Bertrand

    aux journées nationales d'actualité en oncologie.

  • Abigaïl

    Voilà, et tu es organisateur, et je suis ravie de participer à ce congrès, et merci beaucoup parce que je sais que tu es très pris, et là d'ailleurs on commence l'interview avant 8h, on est bien matinal, bien matinaux ! Est-ce que tu veux bien te présenter s'il te plaît pour les auditeurs qui nous écoutent ?

  • Bertrand

    Bien sûr, j'ai salué, bonjour à tous. Moi je suis Bertrand Pourroy, je suis pharmacien spécialisé en oncologie depuis maintenant presque 25 ans. J'exerce dans un centre hospitalo-universitaire. Je suis également membre de la Société Française de Pharmacie Oncologique. Et à ce titre, j'ai beaucoup travaillé sur les problématiques d'interaction potentielle entre les médecines alternatives complémentaires et notamment la phytothérapie et les médicaments anticancéreux. Avec une consoeur, Émilie Petitjean, on avait d'ailleurs rédigé des recommandations pour nos confrères pharmaciens qui exercent aussi bien à l'hôpital qu'en officine sur cette question.

  • Abigaïl

    Je suis ravie de t'accueillir parce que c'est une question qui est hyper importante pour nos patients qui sont en parcours de soins oncologiques. Souvent, les patients demandent à avoir des plantes qui peuvent atténuer les effets indésirables, des plantes qui peuvent améliorer le quotidien. Je suis ravie de t'accueillir parce que tu es la personne parfaite pour cette question-là, étant donné que tu as rédigé ces recommandations SFPO : plantes et compléments alimentaires dans la prise en charge du patient atteint de cancer. Donc encore merci.

  • Bertrand

    Merci.

  • Abigaïl

    Alors, peux-tu nous expliquer en quoi cette question des interactions plantes / compléments alimentaires avec les médicaments de chimiothérapie est importante ? Et est-ce que tu connais aussi les proportions de patients qui prennent des traitements à côté de leur chimiothérapie ?

  • Bertrand

    Alors, c'est beaucoup de questions, je vais essayer de les faire dans l'ordre. Alors, concernant la proportion de patients consommant des médecines alternatives complémentaires, dont la phytothérapie, les études sont très variables d'un pays à l'autre, d'une typologie de patient à l'autre, mais on estime, suite à différentes études dans la littérature, qu'entre 30 et 70% des patients peuvent avoir recours à ces produits au cours de leurs traitements, qu'ils soient d'ailleurs de cancérologie ou sans lien avec la cancérologie. Il n'est pas question ici de critiquer ni les patients qui prennent de ces produits, ni les produits eux-mêmes qui peuvent avoir des propriétés pharmacologiques évidentes. L'exemple typique, c'est le millepertuis qui est utilisé à visée antidépressive très largement en Allemagne, un petit peu moins en France, mais très largement malgré tout. C'est une plante qui a ses propriétés thérapeutiques, c'est certain, pour autant... C'est une plante qui n'est pas dénuée de risques par elle-même, puisque c'est une plante qui va pouvoir jouer sur ce qu'on appelle la métabolisation des médicaments. Pour faire très très simple, lorsqu'on prend un médicament, on a... une sorte d'usine dans l'organisme qui est le foie, qui va être capable de transformer ces médicaments pour que l'organisme puisse les éliminer, puisque le médicament finit par s'éliminer de l'organisme. Et en fait, beaucoup de produits, des médicaments, mais également des plantes, vont pouvoir jouer sur cette usine, soit augmenter sa cadence de production, et donc on va... dégrader un peu plus les médicaments, ou à l'inverse, vont ralentir cette usine, ce qui va avoir comme effet qu'on va être plus exposé aux médicaments, puisque ces médicaments vont être moins dégradés. Donc on voit bien que c'est un dommage collatéral de la phytothérapie, mais qui peut être très dommageable aux patients, puisqu'on peut avoir soit des toxicités trop importantes si on ralentit cette usine de dégradation, ou à l'inverse, une perte d'efficacité si on dit à l'usine de dégradation du médicament d'accélérer. C'est une question qui est très importante, qu'il faut prendre en compte. Il n'est pas question d'interdire tout produit de phytothérapie par principe ou de tout autoriser. Ce qui est intéressant, c'est de voir ce qui est bon pour le patient au moment où il prend son traitement.

  • Abigaïl

    L'exemple du millepertuis est hyper éloquent. On a une interaction avec énormément de médicaments, y compris les contraceptifs oraux par exemple. Là on est hors sujet d'oncologie, mais tout ça pour dire que les plantes interagissent avec les traitements et peuvent annuler complètement l'effet thérapeutique.

  • Bertrand

    Et annuler et augmenter la toxicité. On peut avoir les deux. C'est très important.

  • Abigaïl

    Et du coup, tu dis entre 30 et 70% des patients, en fait, la fourchette, elle est hyper large. C'est qu'on a du mal à évaluer. Comment t'expliques qu'on n'ait pas des chiffres aussi un peu plus précis ?

  • Bertrand

    La première réponse, c'est que c'est un sujet qui n'est pas forcément très étudié. La deuxième réponse, c'est que lorsqu'on regarde un petit peu dans le détail, on a... D'abord, une utilisation très large dans la population générale, cancéreuse ou non cancéreuse, de ces produits de phytothérapie. Lorsqu'on s'intéresse typiquement aux patients cancéreux, on a vraiment une grande variabilité en fonction des typologies de patients. On se rend compte que, par exemple, les femmes avec un niveau d'études élevé autour de la cinquantaine vont beaucoup plus consommer que, par exemple, des patients un peu plus âgés, masculins. Donc c'est très très variable et il y a très peu d'études parce que c'est quand même... des populations de patients qui ne sont pas énormes malgré tout. Et donc faire focus sur ces questions, c'est assez compliqué. Nous, on avait fait une étude il y a quelques années maintenant sur une plateforme participative patients et on était sur à peu près, de mémoire, 50% des patients, c'était des patients atteints de cancer du sein, qui consommaient de la phytothérapie.

  • Abigaïl

    Et après, il y a aussi des patients qui n'osent pas dire ?

  • Bertrand

    Oui, alors ça, c'est vrai que c'est une vraie question. Il y a peut-être deux raisons à cela. C'est vrai qu'un patient qui est dans un parcours de soins cancer, il est pris dans une grosse machine, on sait comment ça se passe. C'est les décisions de RCP, c'est les consultations avec les médecins, il faut prendre tel traitement, tel soin de support, etc. Et c'est vrai que la phytothérapie est un petit espace de liberté pour le patient dans sa prise en charge. Donc il faut absolument la préserver, ce n'est pas le souci. Par contre, il faut la sécuriser. La deuxième raison aussi, c'est que... les patients n'ont pas ce réflexe d'en parler aux professionnels de santé, parce que très souvent on a une image de la phytothérapie des plantes comme quelque chose de très naturel et donc sans risque, et très souvent les patients n'ont même pas l'idée d'en parler, puisque pour eux ça n'a aucun risque, alors qu'en fait on sait que ça représente des risques importants.

  • Abigaïl

    Mais ce que tu dis par rapport à cet espace de liberté à préserver, je suis totalement d'accord, et en plus je pense que le patient a besoin de ça aussi pour être acteur de ses soins. On lui impose beaucoup de choses dans les lignes de traitements. Ça ne se discute pas. Mais c'est vrai que sur les plantes, le patient peut avoir une petite liberté, une reprise en main de son traitement. Et c'est vrai que ça, il faut pouvoir le préserver. Et tu le dis très bien, il faut le sécuriser.

  • Bertrand

    C'est tout à fait ça. C'est vraiment le maître mot. Pour faire très très simple... Dans ma réflexion, on a des médicaments anticancéreux dont on connaît parfaitement le profil de toxicité et l'efficacité, puisqu'il y a eu des études cliniques menées qui ont montré scientifiquement que ces médicaments avaient des propriétés intéressantes et des toxicités certes connues mais qu'on peut maîtriser. Et puis à côté, on a de la phytothérapie qui est beaucoup moins étudiée, dont on sait que parfois on peut avoir des effets bénéfiques, mais on n'a pas forcément de détails quant au profil de toxicité de ces plantes ou d'interaction. Et donc tout l'enjeu est d'arriver à travailler avec le patient pour identifier les risques potentiels qu'il peut prendre. Et c'est toujours pareil, il n'y a pas d'imposition de conduite à tenir, mais au moins lui expliquer les risques qu'il peut rencontrer. et puis discuter éventuellement avec lui d'une stratégie thérapeutique gagnant-gagnant. Vous prenez votre traitement pendant un certain temps, et puis lorsque vous aurez terminé votre séquence de traitement, à ce moment-là, vous pourrez prendre la phytothérapie qui vous intéresse, parce qu'il n'y aura plus de risque d'interaction. Ou alors, vous arrêtez cette plante particulièrement, et vous la remplacez par éventuellement de l'homéopathie ou des choses comme ça. C'est vraiment un travail d'équipe, on est en soutien du patient.

  • Abigaïl

    C'est ça en fait, il faut créer une alliance thérapeutique et puis trouver ce qu'il y a de mieux et ce qui correspond aussi aux attentes du patient à un moment donné et que ce soit compatible avec ses traitements de chimiothérapie.

  • Bertrand

    Complètement, la sécurité et la liberté.

  • Abigaïl

    Mais en fait cet épisode c'est pour ça qu'il est très important et j'avais hâte de l'enregistrer parce que c'est vrai que... C'est important de faire prendre conscience aux patients que les plantes ne sont pas sans risques. Il y a des toxicités, il y a des interactions et que le premier réflexe quand on veut prendre quelque chose dans son parcours de soins, c'est d'en parler à son oncologue ou à l'équipe qui est en prise en charge du patient.

  • Bertrand

    Ça, c'est certain. Le maître mot, c'est vraiment la communication. Si on ne communique pas, personne ne sait rien et on peut arriver à des catastrophes de prise en charge puisqu'on va avoir des patients qui, d'un coup, vont faire des toxicités énormes avec leur traitement, qui vont devoir arrêter leur prise en charge alors que c'est simplement une interaction qui aurait pu être gérée avec l'équipe. Tout simplement parce qu'on ne sait pas qu'il y a de la phytothérapie qui est consommée par exemple, ou des patients qui vont progresser très rapidement alors qu'on ne devrait pas avoir une progression, tout simplement parce qu'on a de nouveau une interaction. Donc l'idée c'est vraiment de communiquer, il ne faut pas avoir peur de dire à son oncologue, aux pharmaciens qu'on peut voir éventuellement à l'officine ou à l'hôpital, lors d'entretiens pharmaceutiques par exemple sur les thérapies orales anticancéreuses. Il faut diffuser l'information, tout simplement pour que, très souvent, l'information arrive jusqu'à un pharmacien, puisque dans notre formation, on est quand même à la fois formé au médicament, mais également à la botanique, à ce qu'on appelle la pharmacognosie, donc l'utilisation des plantes à visée médicinale. Et donc, on a cette expertise-là, au niveau pharmaceutique, où on va pouvoir analyser le risque d'interaction.

  • Abigaïl

    Mais du coup, quand tu parlais de catastrophe, justement, Est-ce que tu as des exemples concrets tirés de ta pratique quotidienne pour illustrer ces interactions et ces toxicités entre les traitements de chimiothérapie et les plantes ?

  • Bertrand

    Oui, j'en ai quelques-uns. Je vais peut-être commencer par un cas qui nous avait marqué. C'était un patient de pédiatrie qui était traité pour ce qu'on appelle du méthotrexate haute dose, donc un médicament qui est très actif, mais qui peut provoquer des toxicités très importantes s'il est mal éliminé au niveau rénal, puisque c'est un médicament qui est d'élimination rénale. Et donc ce patient avait reçu six cures de méthotrexate haute dose sans aucune toxicité particulière. Et à sa septième cure, il a fait un tableau absolument cataclysmique, une toxicité majeure avec des retentissements rénaux, cutanés, tout une série hématologique. Et lorsqu'on a essayé de comprendre ce qui s'était passé, ses parents de toute bonne foi lui avaient donné justement des produits à base de phytothérapie. Donc on a travaillé le sujet, on a travaillé également avec le centre régional de pharmacovigilance à qui le cas avait été déclaré et donc le centre régional de pharmacovigilance a conclu à l'imputabilité réelle de cette toxicité à cette consommation de phytothérapie. Tant et si bien qu'on a évidemment conseillé aux parents d'arrêter cette consommation de plantes. L'enfant a pu faire par la suite encore six cures de méthotrexate haute dose sans aucune toxicité. Donc là, on voit très bien l'impact qu'une prise ponctuelle de phytothérapie peut avoir sur un patient. Donc ça, c'était un patient pédiatrique, mais ça marche aussi chez les adultes. J'ai d'autres exemples si tu le souhaites.

  • Abigaïl

    Et du coup, cette plante, c'était quoi ? Et qu'est-ce que les parents cherchaient à améliorer ?

  • Bertrand

    Alors cette plante c'était des extraits de feuilles d'olivier. Ce que les parents cherchaient à améliorer, je ne sais absolument pas. Mais très souvent, c'est véritablement chez les patients une recherche de contrôle, de maîtrise des effets indésirables des chimiothérapies. C'est vraiment la principale cause. Certains patients, hélas, tendent à remplacer leur traitement de chimiothérapie par des plantes. Toute la littérature le montre très bien, ça provoque des rechutes.

  • Abigaïl

    C'est une perte de chance incroyable.

  • Bertrand

    C'est une perte de chance complète. Ça a vraiment été montré dans la littérature. Des comparaisons de cohortes où les patients, souvent des patients de cancer du sein, parce qu'il y a d'énormes cohortes dans le cancer du sein, prennent de la phytothérapie à la place de leurs chimios. Clairement, on a une perte de chance. On peut avoir aussi une perte de chance à cause des interactions. Ça a été également montré. Mais là, justement, l'intérêt, c'est de pouvoir communiquer et de travailler avec le patient pour limiter ce risque.

  • Abigaïl

    Oui, en aucun cas, on le reprécise, ça ne remplace les traitements ?

  • Bertrand

    Absolument pas.

  • Abigaïl

    En aucun cas.

  • Bertrand

    Absolument pas. Les produits de phytothérapie peuvent être des alliés dans la prise en charge des toxicités, aussi tant est qu'il n'y ait aucun risque vis-à-vis du traitement anticancéreux. Ça ne peut en aucun cas remplacer un traitement anticancéreux.

  • Abigaïl

    Est-ce que tu as d'autres exemples à nous donner ?

  • Bertrand

    Alors, j'ai d'autres exemples, oui. On s'éloigne un petit peu de la plante, mais c'est quand même d'origine végétale. C'est un patient qui consommait, parce qu'il aimait ça, des litres de jus de grenade. la grenade qui est un fruit qui est plutôt à la mode, qu'on aime bien déguster actuellement. Et en fait, la grenade peut présenter des propriétés particulières, à savoir qu'elle peut, ce que je vous ai expliqué tout à l'heure, ralentir cette usine de dégradation des médicaments qu'est le foie. Et donc ce patient, son hématologue lui a prescrit une thérapie orale anticancéreuse. Et dès le début de son traitement, il a présenté des toxicités monstrueuses. Il a été à deux doigts d'arrêter son traitement. En fait, c'est une collègue pharmacienne qui l'a contactée par téléphone à l'initiation de son traitement et qui a tout de suite vu cette toxicité abominable, qui lui a posé tout plein de questions, qui a identifié ce jus de grenade comme pouvant potentiellement inhiber le métabolisme du médicament et donc être responsable d'une surexposition et d'une toxicité. Donc le patient a immédiatement arrêté de consommer son jus de grenade. et trois jours après, sa toxicité avait complètement disparu. Donc c'est un exemple qui est assez parlant. Peut-être un autre, dans une autre catégorie d'interaction, on l'a dit tout à l'heure, les plantes peuvent avoir des effets pharmacologiques, on a parlé du millepertuis qui est antidépresseur, vous avez plein de plantes qui peuvent jouer sur plein de choses dans l'organisme. Alors il y a une plante toute simple, c'est la réglisse. qu'on peut également trouver dans une boisson qui s'appelle l'anthésite. C'est une marque, mais tout le monde comprendra ce que c'est. Donc la réglisse a des propriétés. Elle-même, de base, elle a tendance à faire augmenter la tension artérielle. Alors des très petites quantités, de temps en temps, ce n'est pas très gênant, mais on a eu l'exemple d'un... d'un patient qui prenait des traitements thérapie orale également ciblés, qui avaient déjà des effets pro-hypertenseur. Et donc cette consommation de réglisse a fait fluctuer sa tension à la hausse de façon trop importante. Donc là encore, on a identifié le problème et il a stoppé sa consommation de réglisse, puisque là il n'y avait pas de volonté particulière thérapeutique, c'était juste qu'il aimait bien le goût. Mais voilà, c'est des exemples très pragmatiques, où on se rend compte qu'on peut tout de suite jouer sur des choses qui vont impacter le traitement et la santé du patient. Et donc il faut juste en discuter avec lui avant pour être sûr qu'il n'y a pas de problème.

  • Abigaïl

    Mais du coup, là, ce qui est frappant, c'est que sur trois exemples, il y a deux exemples qui sont issus de l'alimentation. En fait, on a aussi une interaction dans l'alimentation, les épices que l'on met dans les plats, au même titre que des gélules que l'on peut avaler et acheter, par exemple, en officine.

  • Bertrand

    Complètement. Très souvent, les patients ont en tête l'interaction avec le pamplemousse, qui apparaît très souvent dans les notices des médicaments. C'est exactement le même mécanisme. Le pamplemousse, c'est un fruit qui est très bon, mais qui peut parfois jouer sur le métabolisme des médicaments et donc provoquer des surexpositions aux médicaments. Donc, il y a plein de choses comme ça d'origine végétale, qui ont des effets. Une fois de plus, la question n'est pas de dire qu'on interdit tout ce qui est végétal. La question est de dire... est-ce que ce produit végétal, au moment où je prends ce traitement, est dangereux ou pas ? Pour les épices, c'est évident aussi. Il y a plein de choses qui sont décrites en termes d'interaction avec le curcuma, avec différents types de ginseng, puisqu'il y a plusieurs ginsengs qui sont commercialisés, ils n'ont pas tous les mêmes propriétés sur cette usine qu'est le foie. Il va y avoir l'ail également. Donc là, il y a en quantité raisonnable une fois par jour dans une assiette, ce n'est pas vraiment un problème, mais on connaît tous des patients qui se supplémentent avec de l'ail, de grandes quantités d'ail, en gélules notamment, et l'ail présente des propriétés également potentiellement, alors pas néfastes, mais qu'il faut prendre en compte. L'ail est anticoagulant, l'ail présente différentes propriétés. On a la même question sur le gingembre qui peut avoir également des risques d'interaction avec les médicaments. Le gingembre souvent est présenté comme pouvant être intéressant pour la maîtrise des nausées et vomissements. Donc là encore, il n'y a pas ma connaissance de vraie étude qui ait établi l'intérêt du gingembre pour cette indication-là. Il y a eu des études de fait, notamment en pédiatrie, mais qui n'avaient pas été positives. Après, une fois de plus, un patient qui considère que le gingembre lui fait du bien... Moi, j'encouragerais toujours à prendre du gingembre à condition qu'il n'y ait pas d'interaction avec son traitement.

  • Abigaïl

    Et dans l'alimentation, c'est quoi le seuil qui peut poser problème en termes de quantité ? C'est difficile à évaluer et bien sûr ça dépend des plantes.

  • Bertrand

    C'est impossible à évaluer, c'est bien la problématique. Contrairement aux médicaments, il n'y a pas d'études véritablement poussées sur les plantes par définition. Puisque ne serait-ce que, je ne sais pas si tous les gens ont ça en tête, mais lorsqu'on s'intéresse par exemple aux huiles essentielles qui sont extraites des plantes, Si vous prenez une huile essentielle de lavande cultivée dans un champ, vous étudiez son composition et puis vous allez étudier la composition d'une huile essentielle de lavande cultivée dans le champ d'à côté qui n'est pas orientée de la même manière vis-à-vis du soleil et qui n'a pas la même composition au niveau du terrain, vous allez avoir une composition d'huile essentielle différente. C'est la même chose pour les autres plantes, en fonction de la façon dont elles ont été cultivées, de où elles ont été cultivées, de comment elles ont été récoltées, comment elles ont été préparées, il peut y avoir des différences qualitatives et quantitatives très importantes. Donc on ne peut pas faire une espèce de règle comme ça en disant le curcuma c'est pas plus de temps par jour, l'ail... Ça c'est pas possible. L'idée c'est d'identifier de façon macroscopique le risque. Plus on a d'informations, mieux c'est évidemment. Souvent les pharmaciens vont embêter les patients en leur demandant quelle est la marque de la phytothérapie qu'ils ont acheté, Est-ce qu'il y a un dosage marqué sur la boîte, etc. Mais tout ça, c'est pour justement guider la réflexion pharmaceutique pour arriver à une conclusion la plus fine possible. Lorsqu'on a passé l'information... comme on dit en médecine, primum non nocere, donc on va considérer le risque le plus important. Moi, de façon générale, si je sais qu'il y a un risque d'interaction évident entre du curcuma et un traitement, je vais dire au patient, arrêtez le curcuma pendant la période de ce traitement. Ne continuez pas, on ne maîtrise pas le risque.

  • Abigaïl

    Et même dans l'alimentation.

  • Bertrand

    Ah oui, y compris dans l'alimentation. Oui, oui. Pour vous donner juste un petit exemple, on fait ce qu'on appelle des bilans de médication pour nos patients. pour certaines de nos patientes traitées par des anticancéreux injectables, et donc on appelle ces patientes avant qu'elles viennent faire leur traitement pour voir ce qu'elles prennent justement, et dans notre questionnaire type, on a certes les produits de phytothérapie, les compléments alimentaires, mais on a également les épices utilisés dans l'alimentation, on a également tout ce qui va être tisane, thé, etc., puisque le thé peut également avoir des interactions, il y a des tisanes également qui peuvent contenir des produits potentiellement ...interagissant avec les médicaments.

  • Abigaïl

    Et selon toi, quelles sont les plantes les plus utilisées par les patients en parcours de soins, si c'est possible de répondre à cette question ? Parce que c'est vrai que c'est un petit peu compliqué, mais dans ta pratique quotidienne, qu'est-ce que tu observes ? Et puis, quelles sont les interactions et les problématiques qui en découlent ?

  • Bertrand

    Là encore, c'est très difficile de répondre, tout simplement parce qu'il n'y a pas de règles. Alors c'est très dépendant de différentes choses. Ça va dépendre d'abord de l'origine du patient. C'est une évidence, mais on va la donner quand même. Il y a des patients qui sont d'origine notamment nord-africaine qui consomment énormément d'épices, ce qui n'est pas forcément le cas de patients qui ne proviennent pas de cette zone géographique. Je pense que dans le sud de la France, on a tendance à manger beaucoup plus d'ail que dans le nord. Je suis originaire du sud de la France, c'est pour ça que ça m'amuse. Donc ça, c'est déjà dans l'alimentation. Après, concernant les plantes elles-mêmes, il n'y a pas de règle, parce qu'en fait on se rend compte qu'il y a des modes. C'est par vagues, c'est très souvent des échanges entre patients. L'étude dont je parlais tout à l'heure concernant la consommation de phytothérapie par les femmes atteintes de cancer du sein avait bien montré ça, c'est-à-dire que, contrairement à ce qu'on peut penser, Les patients ne vont pas forcément chercher des choses sur internet, mais c'est vraiment de la discussion entre patients, et qui fait qu'il y a des fois des espèces de petits emballements sur des plantes en particulier. Donc c'est des modes. Il y a quelques années, il y avait une grande mode sur ce qu'on appelle le kava-kava, qui est une plante pour le coup qui présente des propriétés toxiques, donc il y avait eu des soucis à l'époque. actuellement je ne saurais dire s'il y a vraiment une mode mais c'est souvent par vague donc je pense que de façon très pragmatique une fois de plus la seule chose à faire c'est que le patient explique à son médecin à son pharmacien ce qu'il prend que ce soit une mode ou pas et puis derrière on fera l'analyse pour voir exactement ce qu'il se passe

  • Abigaïl

    Je me mets à la place du patient, et du coup j'ai envie de te poser la question, est-ce qu'il existe des plantes bénéfiques quand on est sous traitement de chimiothérapie qui permettent d'atténuer les effets secondaires et qui seraient sans interaction ?

  • Bertrand

    Alors, il peut en exister, mais je me garderais bien d'en dresser une liste, tout simplement parce que, évidemment, pour être sûr de l'inocuité d'une... d'un... d'une association entre une plante et un médicament, il faut d'un côté connaître la plante et de l'autre côté connaître le médicament. Puisque vous prenez deux médicaments, deux thérapies ciblées utilisées dans la même indication, par exemple en hématologie, ces deux médicaments ne vont pas être métabolisés exactement de la même manière dans l'organisme et peut-être que l'un des deux va interagir avec une plante et que le second n'interagira pas avec celle-là, mais interagira avec une autre. Donc il n'y a pas de réponse. C'est absolument impossible de dresser cette liste. La seule chose qu'on fait, on va dire un petit peu en miroir. C'est qu'au niveau des pharmaciens, on essaie d'identifier typiquement les associations où il y a des interactions de façon certaine pour donner des réponses rapidement aux patients pour ne pas les laisser dans l'incertitude. Mais on ne peut pas dresser de listes sans interactions, c'est absolument impossible.

  • Abigaïl

    Et à l'inverse, est-ce qu'il y a des plantes qui sont à éviter impérativement ?

  • Bertrand

    Alors oui, j'ai parlé du cava-cava tout à l'heure. Oui, il y a des plantes qu'il faut éviter impérativement. Il y a une liste de plantes qui est officielle, qu'on peut retrouver sur le site de l'Agence nationale du médicament, donc l'ANSM. C'est ce qu'on appelle la liste B des plantes médicinales. Cette liste B va lister toutes les plantes dont on sait que les propriétés toxiques l'emportent sur les propriétés thérapeutiques. C'est une liste qui est relativement longue. Mais par contre, en la consultant, on sait tout de suite si la plante est dangereuse ou pas. Donc c'est des choses comme ça qu'on peut avoir en termes de réflexes patients. On va voir cette liste. Si la plante qu'on compte prendre est sur cette liste, il vaut mieux ne pas la prendre du tout. Contexte cancérologique ou pas d'ailleurs.

  • Abigaïl

    Oui, parce que cette liste, elle est accessible à tout le monde.

  • Bertrand

    C'est sur le route de l'ANSM. Complètement. Vous tapez liste B, ANSM, normalement, ça sort sur Internet. Google est notre ami.

  • Abigaïl

    Et du coup, en tant que patient, quelle source d'information tu conseilles ? Une source d'information qui serait fiable ? Et quelle serait l'attitude pour sécuriser les parcours de soins ?

  • Bertrand

    Alors, il y a plusieurs sources d'informations concernant cette problématique. Il y a des sources d'informations qui sont quand même très tournées vers les professionnels de santé. Donc moi, je déconseille aux patients d'y aller directement parce que souvent, il faut quand même avoir des connaissances dans le domaine pour bien comprendre ce qui est rapporté dans ces bases de données. Moi, je conseillerais peut-être d'avoir recours à un outil en particulier. Comme je l'ai dit, je fais partie de la Société française de pharmacie oncologique. Et la SFPO a... créé ce qu'on appelle des fiches Oncoliens. Ces fiches Oncoliens sont tout à fait disponibles sur Internet. Vous tapez Oncolien et ça sort tout de suite. On a fait des fiches à destination des professionnels de santé pour tous les médicaments thérapie orale, anticancéreuse, mais également des fiches à destination des patients, qui vont lister des choses très simples à type de comment est-ce qu'on prend le médicament, comment est-ce qu'on prend en charge ses effets indésirables, etc. Mais à la fin de ces fiches, on a également listé, pour chacun des médicaments, les plantes pour lesquelles il peut y avoir des interactions. Alors évidemment, on ne peut pas être exhaustif sur la totalité des plantes potentiellement consommables par les patients, mais on a essayé d'être le plus exhaustif possible, et donc un patient qui voudrait prendre une thérapie orale et qui se poserait des questions peut aller consulter la fiche patient oncolien, et en bas de la fiche, il aura la liste des plantes qu'il vaut mieux éviter.

  • Abigaïl

    Et cette liste est souvent longue.

  • Bertrand

    Cette liste est souvent longue.

  • Abigaïl

    Non mais pour les utiliser à titre personnel, dans ma pratique professionnelle, ces fiches, moi j'aime bien éditer ma fiche, et puis éditer aussi la fiche du patient, et puis en sortie d'entretien, comme ça le patient a sa fiche, il repart avec sa fiche, et c'est vrai qu'on est souvent surpris de la quantité de plantes en interaction avec les traitements.

  • Bertrand

    Oui, c'est vraiment une question. Très souvent, les gens ne sont pas conscients de cette question du tout. On l'a déjà dit tout à l'heure. Et donc, si ça peut sécuriser leur prise, c'est très bien. Après, de toute façon, et ça, je pense que c'est quand même le plus important, plus le patient parlera avec son clinicien, son pharmacien, plus il sécurisera sa prise de plantes et sa prise de chimiothérapie.

  • Abigaïl

    Oui, mais ça, justement, je pense que ce sera le mot de la fin. C'est justement l'attitude à... Avoir, quand on est en parcours de soins, de communication avec son oncologue, le pharmacien à l'hôpital, le pharmacien en officine, de vraiment dire, expliquer les choses et de dire aussi j'ai envie de prendre telle chose pour soulager tel effet indésirable ou améliorer telle qualité de vie, en parler et comme ça, ça permet de voir la meilleure option pour le patient à un moment donné, en fonction de la thérapie qu'il prend.

  • Bertrand

    C'est tout à fait ça. Les recommandations dont j'ai parlé tout à l'heure, on a travaillé justement sur cette question de comment se positionner vis-à-vis du patient, vis-à-vis de toutes ces problématiques qui sont certes liées à son cancer, mais qui sont aussi d'ordre psychologique, la prise en charge de sa pathologie par lui-même et pas juste par une chimiothérapie qui vient de l'extérieur. Donc, On a beaucoup travaillé là-dessus, justement, l'idée c'est vraiment... Du côté patient, qu'il soit transparent avec les professionnels de santé, qu'il n'ait pas peur de dire qu'il prend de la phytothérapie, qu'il n'ait pas peur de dire pourquoi, parce que parfois, tout simplement, ça permet d'identifier des problèmes que le clinicien n'avait pas identifiés. Donc, d'un côté, de la transparence du côté du patient qui doit dire aux professionnels de santé ce qu'il consomme, et puis de l'autre côté, côté professionnel de santé, une écoute. On va discuter avec le patient, bien comprendre son profil, lui expliquer les risques. S'il y en a, c'est très important, être pédagogue. Après, le patient reste libre de prendre quelque chose, même si on lui dit qu'il ne vaut mieux pas. Mais par contre, ce qu'on peut faire aussi pour accompagner le patient, c'est lui dire surtout, au moindre effet indésirable, vous contactez votre oncologue, etc. Donc c'est vraiment du... Ce que je disais tout à l'heure, c'est du gagnant-gagnant, c'est un travail d'équipe. L'idée, ce n'est pas d'interdire. Souvent, les patients ont peur d'en parler, parce qu'ils ont peur qu'on leur dise, vous arrêtez tout sans réflexion. Donc l'idée, ce n'est vraiment pas ça. C'est qu'on est... Cette réflexion avec le patient pour voir ce qui est le mieux pour lui, même si on doit différer un petit peu la prise de phytothérapie, par exemple.

  • Abigaïl

    Oui, et puis des fois, je pense aussi que les patients ont peur qu'on les moralise, qu'on soit moralisateur vis-à-vis des traitements qu'ils peuvent prendre à côté. Donc c'est vrai que la posture du soignant, elle est hyper importante. Il faut pouvoir être suffisamment ouvert pour que le patient soit en confiance et nous dise les choses.

  • Bertrand

    C'est évident. Moi, en tout cas, dans ma pratique quotidienne, je ne suis jamais dans le jugement. Je n'ai pas à juger de ce que fait le patient. Moi, j'ai à protéger le patient. Ce n'est pas la même chose. Donc, j'essaie de lui dire, je lui dis s'il y a des problèmes. Après, bien sûr que c'est lui qui gère sa maladie. On est bien d'accord là-dessus.

  • Abigaïl

    En tout cas, merci beaucoup Bertrand. Est-ce que tu vois quelque chose à rajouter qu'on n'aurait pas ? qu'on n'aurait pas balayé sur ce vaste sujet.

  • Bertrand

    Je ne crois pas. Je suis très content d'avoir fait cet enregistrement parce que c'est vraiment une question qui me tient à cœur. Je travaille dessus depuis une dizaine d'années. Les choses évoluent plutôt en bien. Et pour moi, c'est vraiment très important que les professionnels de santé, et surtout les patients, aient ces notions en tête.

  • Abigaïl

    En tout cas, merci beaucoup. C'était aussi un plaisir de t'avoir au micro, Bertrand. Et puis encore merci pour ton temps, parce que je sais que tu es très pris sur ce congrès. Et c'était un véritable plaisir de discuter de ce sujet-là avec toi. Merci beaucoup en tout cas.

  • Bertrand

    Merci.

  • Abigaïl

    Merci Bertrand. Au revoir. Petite note de fin d'épisode pour vous rappeler que vous pouvez télécharger le cadeau gratuit que j'ai créé pour vous. Il s'agit d'une feuille très pratique pour les patients et qui permet la prise de notes entre deux passages dans le service hospitalier. Le but de cette ressource est de faciliter la communication avec l'équipe de soins et de ne pas oublier les choses à dire en consultation. Vous pourrez y signaler vos symptômes, vos éventuels effets indésirables et noter toutes vos questions à poser aux différents professionnels du service. J'espère que cette ressource vous aidera dans votre prise en charge et vous trouverez le lien pour la télécharger gratuitement en note de l'épisode ainsi que sur la page Instagram. Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de canc'Héros. Si le contenu vous a plu, n'hésitez surtout pas à le partager auprès de patients de votre entourage qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre 5 étoiles sur Apple Podcast et Spotify, ainsi qu'un commentaire sur Apple Podcast. Ça aide vraiment à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à aider un maximum de patients. Mille mercis à ceux qui prendront le temps de le faire. Si vous souhaitez me contacter pour me faire des retours sur les thèmes que vous aimeriez que j'aborde, me faire part de vos problématiques ou tout simplement me raconter votre histoire, c'est sur la page Instagram du podcast que ça se passe à canc.heros ou sur la page Facebook canc'Héros Podcast. Je vous souhaite une très belle journée, prenez bien soin de vous et à bientôt !

Description

Dans ce nouvel épisode de la saison 3 de canc'Héros, on parle avec Bertrand, pharmacien hospitalier, des interactions plantes chimiothérapie. Vaste sujet !!


En effet, combien de patients prennent des plantes en parallèle de leur traitements, sans même avoir conscience du risque d'interaction que cela pourrait avoir.


Les interactions sont de plusieurs ordres : il peut s'agir d'une augmentation de toxicités des chimiothérapies, une diminution voire une annulation de l'effet thérapeutique du traitement. Il peut aussi s'agir d'une plante avec des effets toxiques.


On détaille avec Bertrand des cas d'interactions issus de sa pratique pharmaceutique hospitalière. Ces exemples nous montrent que les interactions peuvent provenir des plantes mais aussi de l'alimentation.


L'idée clé n'est donc pas d'interdire par principe mais plutôt de sécuriser !!

Le patient doit bénéficier d'un cadre de confiance qui permet la communication avec l'équipe de soins. Les habitudes ou la volonté de prise de phytothérapie / complément alimentaire / alimentation doivent être discutées avec le pharmacien afin de sécuriser le parcours de soins du patient.


Les fiches Oncolien constituent une source d'information fiable aussi bien pour le patient que pour le professionnel.


Vous pouvez nous retrouver sur Instagram sur la page canc.heros ou sur Facebook sur la page canc'Héros podcast.

N'oubliez pas de mettre un avis et une bonne note sur les plateformes d'écoutes, ça aide à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à le faire connaitre auprès d'un maximum de patients.

N'hésitez pas à recommander le podcast si vous connaissez dans votre entourage des patients qui pourraient en avoir besoin.


Mille mercis pour votre écoute, vos recommandations et vos messages de soutien !

Prenez bien soin de vous !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Abigaïl

    Bonjour à toutes, bonjour à tous. Je suis ravie de vous accueillir dans la saison 3 du podcast canc'Héros. Canc'Héros, c'est le podcast santé qui aide les patients atteints de cancer à devenir acteurs de leurs soins. Je suis Abigail, pharmacienne d'officine, et ma mission ici est de favoriser le partage d'expériences autour des parcours de soins cancer, le partage de témoignages entre patients, et véhiculer une information de qualité pour les patients atteints de cancer ou en rémission, ainsi que pour leur entourage, les aidants, les accompagnants. Pour ce faire, j'accueillerai à mon micro des patients qui ont pour point commun l'envie de partager leur expérience et leur histoire dans le but d'aider les autres. J'accueillerai aussi des experts, des professionnels de santé, des associations, car je suis convaincue qu'un patient bien informé est un patient qui sera plus facilement acteur de son parcours de soins dans le but d'améliorer sa qualité de vie. Si vous appréciez mon travail, n'hésitez pas à recommander le podcast canc'Héros à d'autres patients qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre un avis et une note sur les plateformes d'écoute afin de rendre canc'Héros plus visible et d'aider un maximum de patients. Mille mercis et je vous souhaite une très belle écoute. Bonjour Bertrand.

  • Bertrand

    Bonjour.

  • Abigaïl

    Je suis ravie de t'accueillir sur le podcast canc'Héros. Merci beaucoup pour ton temps et ta présence. Aujourd'hui, nous sommes ensemble aux journées d'actualité. Attends, tu vas le dire à ma place, tu le feras mieux !

  • Bertrand

    aux journées nationales d'actualité en oncologie.

  • Abigaïl

    Voilà, et tu es organisateur, et je suis ravie de participer à ce congrès, et merci beaucoup parce que je sais que tu es très pris, et là d'ailleurs on commence l'interview avant 8h, on est bien matinal, bien matinaux ! Est-ce que tu veux bien te présenter s'il te plaît pour les auditeurs qui nous écoutent ?

  • Bertrand

    Bien sûr, j'ai salué, bonjour à tous. Moi je suis Bertrand Pourroy, je suis pharmacien spécialisé en oncologie depuis maintenant presque 25 ans. J'exerce dans un centre hospitalo-universitaire. Je suis également membre de la Société Française de Pharmacie Oncologique. Et à ce titre, j'ai beaucoup travaillé sur les problématiques d'interaction potentielle entre les médecines alternatives complémentaires et notamment la phytothérapie et les médicaments anticancéreux. Avec une consoeur, Émilie Petitjean, on avait d'ailleurs rédigé des recommandations pour nos confrères pharmaciens qui exercent aussi bien à l'hôpital qu'en officine sur cette question.

  • Abigaïl

    Je suis ravie de t'accueillir parce que c'est une question qui est hyper importante pour nos patients qui sont en parcours de soins oncologiques. Souvent, les patients demandent à avoir des plantes qui peuvent atténuer les effets indésirables, des plantes qui peuvent améliorer le quotidien. Je suis ravie de t'accueillir parce que tu es la personne parfaite pour cette question-là, étant donné que tu as rédigé ces recommandations SFPO : plantes et compléments alimentaires dans la prise en charge du patient atteint de cancer. Donc encore merci.

  • Bertrand

    Merci.

  • Abigaïl

    Alors, peux-tu nous expliquer en quoi cette question des interactions plantes / compléments alimentaires avec les médicaments de chimiothérapie est importante ? Et est-ce que tu connais aussi les proportions de patients qui prennent des traitements à côté de leur chimiothérapie ?

  • Bertrand

    Alors, c'est beaucoup de questions, je vais essayer de les faire dans l'ordre. Alors, concernant la proportion de patients consommant des médecines alternatives complémentaires, dont la phytothérapie, les études sont très variables d'un pays à l'autre, d'une typologie de patient à l'autre, mais on estime, suite à différentes études dans la littérature, qu'entre 30 et 70% des patients peuvent avoir recours à ces produits au cours de leurs traitements, qu'ils soient d'ailleurs de cancérologie ou sans lien avec la cancérologie. Il n'est pas question ici de critiquer ni les patients qui prennent de ces produits, ni les produits eux-mêmes qui peuvent avoir des propriétés pharmacologiques évidentes. L'exemple typique, c'est le millepertuis qui est utilisé à visée antidépressive très largement en Allemagne, un petit peu moins en France, mais très largement malgré tout. C'est une plante qui a ses propriétés thérapeutiques, c'est certain, pour autant... C'est une plante qui n'est pas dénuée de risques par elle-même, puisque c'est une plante qui va pouvoir jouer sur ce qu'on appelle la métabolisation des médicaments. Pour faire très très simple, lorsqu'on prend un médicament, on a... une sorte d'usine dans l'organisme qui est le foie, qui va être capable de transformer ces médicaments pour que l'organisme puisse les éliminer, puisque le médicament finit par s'éliminer de l'organisme. Et en fait, beaucoup de produits, des médicaments, mais également des plantes, vont pouvoir jouer sur cette usine, soit augmenter sa cadence de production, et donc on va... dégrader un peu plus les médicaments, ou à l'inverse, vont ralentir cette usine, ce qui va avoir comme effet qu'on va être plus exposé aux médicaments, puisque ces médicaments vont être moins dégradés. Donc on voit bien que c'est un dommage collatéral de la phytothérapie, mais qui peut être très dommageable aux patients, puisqu'on peut avoir soit des toxicités trop importantes si on ralentit cette usine de dégradation, ou à l'inverse, une perte d'efficacité si on dit à l'usine de dégradation du médicament d'accélérer. C'est une question qui est très importante, qu'il faut prendre en compte. Il n'est pas question d'interdire tout produit de phytothérapie par principe ou de tout autoriser. Ce qui est intéressant, c'est de voir ce qui est bon pour le patient au moment où il prend son traitement.

  • Abigaïl

    L'exemple du millepertuis est hyper éloquent. On a une interaction avec énormément de médicaments, y compris les contraceptifs oraux par exemple. Là on est hors sujet d'oncologie, mais tout ça pour dire que les plantes interagissent avec les traitements et peuvent annuler complètement l'effet thérapeutique.

  • Bertrand

    Et annuler et augmenter la toxicité. On peut avoir les deux. C'est très important.

  • Abigaïl

    Et du coup, tu dis entre 30 et 70% des patients, en fait, la fourchette, elle est hyper large. C'est qu'on a du mal à évaluer. Comment t'expliques qu'on n'ait pas des chiffres aussi un peu plus précis ?

  • Bertrand

    La première réponse, c'est que c'est un sujet qui n'est pas forcément très étudié. La deuxième réponse, c'est que lorsqu'on regarde un petit peu dans le détail, on a... D'abord, une utilisation très large dans la population générale, cancéreuse ou non cancéreuse, de ces produits de phytothérapie. Lorsqu'on s'intéresse typiquement aux patients cancéreux, on a vraiment une grande variabilité en fonction des typologies de patients. On se rend compte que, par exemple, les femmes avec un niveau d'études élevé autour de la cinquantaine vont beaucoup plus consommer que, par exemple, des patients un peu plus âgés, masculins. Donc c'est très très variable et il y a très peu d'études parce que c'est quand même... des populations de patients qui ne sont pas énormes malgré tout. Et donc faire focus sur ces questions, c'est assez compliqué. Nous, on avait fait une étude il y a quelques années maintenant sur une plateforme participative patients et on était sur à peu près, de mémoire, 50% des patients, c'était des patients atteints de cancer du sein, qui consommaient de la phytothérapie.

  • Abigaïl

    Et après, il y a aussi des patients qui n'osent pas dire ?

  • Bertrand

    Oui, alors ça, c'est vrai que c'est une vraie question. Il y a peut-être deux raisons à cela. C'est vrai qu'un patient qui est dans un parcours de soins cancer, il est pris dans une grosse machine, on sait comment ça se passe. C'est les décisions de RCP, c'est les consultations avec les médecins, il faut prendre tel traitement, tel soin de support, etc. Et c'est vrai que la phytothérapie est un petit espace de liberté pour le patient dans sa prise en charge. Donc il faut absolument la préserver, ce n'est pas le souci. Par contre, il faut la sécuriser. La deuxième raison aussi, c'est que... les patients n'ont pas ce réflexe d'en parler aux professionnels de santé, parce que très souvent on a une image de la phytothérapie des plantes comme quelque chose de très naturel et donc sans risque, et très souvent les patients n'ont même pas l'idée d'en parler, puisque pour eux ça n'a aucun risque, alors qu'en fait on sait que ça représente des risques importants.

  • Abigaïl

    Mais ce que tu dis par rapport à cet espace de liberté à préserver, je suis totalement d'accord, et en plus je pense que le patient a besoin de ça aussi pour être acteur de ses soins. On lui impose beaucoup de choses dans les lignes de traitements. Ça ne se discute pas. Mais c'est vrai que sur les plantes, le patient peut avoir une petite liberté, une reprise en main de son traitement. Et c'est vrai que ça, il faut pouvoir le préserver. Et tu le dis très bien, il faut le sécuriser.

  • Bertrand

    C'est tout à fait ça. C'est vraiment le maître mot. Pour faire très très simple... Dans ma réflexion, on a des médicaments anticancéreux dont on connaît parfaitement le profil de toxicité et l'efficacité, puisqu'il y a eu des études cliniques menées qui ont montré scientifiquement que ces médicaments avaient des propriétés intéressantes et des toxicités certes connues mais qu'on peut maîtriser. Et puis à côté, on a de la phytothérapie qui est beaucoup moins étudiée, dont on sait que parfois on peut avoir des effets bénéfiques, mais on n'a pas forcément de détails quant au profil de toxicité de ces plantes ou d'interaction. Et donc tout l'enjeu est d'arriver à travailler avec le patient pour identifier les risques potentiels qu'il peut prendre. Et c'est toujours pareil, il n'y a pas d'imposition de conduite à tenir, mais au moins lui expliquer les risques qu'il peut rencontrer. et puis discuter éventuellement avec lui d'une stratégie thérapeutique gagnant-gagnant. Vous prenez votre traitement pendant un certain temps, et puis lorsque vous aurez terminé votre séquence de traitement, à ce moment-là, vous pourrez prendre la phytothérapie qui vous intéresse, parce qu'il n'y aura plus de risque d'interaction. Ou alors, vous arrêtez cette plante particulièrement, et vous la remplacez par éventuellement de l'homéopathie ou des choses comme ça. C'est vraiment un travail d'équipe, on est en soutien du patient.

  • Abigaïl

    C'est ça en fait, il faut créer une alliance thérapeutique et puis trouver ce qu'il y a de mieux et ce qui correspond aussi aux attentes du patient à un moment donné et que ce soit compatible avec ses traitements de chimiothérapie.

  • Bertrand

    Complètement, la sécurité et la liberté.

  • Abigaïl

    Mais en fait cet épisode c'est pour ça qu'il est très important et j'avais hâte de l'enregistrer parce que c'est vrai que... C'est important de faire prendre conscience aux patients que les plantes ne sont pas sans risques. Il y a des toxicités, il y a des interactions et que le premier réflexe quand on veut prendre quelque chose dans son parcours de soins, c'est d'en parler à son oncologue ou à l'équipe qui est en prise en charge du patient.

  • Bertrand

    Ça, c'est certain. Le maître mot, c'est vraiment la communication. Si on ne communique pas, personne ne sait rien et on peut arriver à des catastrophes de prise en charge puisqu'on va avoir des patients qui, d'un coup, vont faire des toxicités énormes avec leur traitement, qui vont devoir arrêter leur prise en charge alors que c'est simplement une interaction qui aurait pu être gérée avec l'équipe. Tout simplement parce qu'on ne sait pas qu'il y a de la phytothérapie qui est consommée par exemple, ou des patients qui vont progresser très rapidement alors qu'on ne devrait pas avoir une progression, tout simplement parce qu'on a de nouveau une interaction. Donc l'idée c'est vraiment de communiquer, il ne faut pas avoir peur de dire à son oncologue, aux pharmaciens qu'on peut voir éventuellement à l'officine ou à l'hôpital, lors d'entretiens pharmaceutiques par exemple sur les thérapies orales anticancéreuses. Il faut diffuser l'information, tout simplement pour que, très souvent, l'information arrive jusqu'à un pharmacien, puisque dans notre formation, on est quand même à la fois formé au médicament, mais également à la botanique, à ce qu'on appelle la pharmacognosie, donc l'utilisation des plantes à visée médicinale. Et donc, on a cette expertise-là, au niveau pharmaceutique, où on va pouvoir analyser le risque d'interaction.

  • Abigaïl

    Mais du coup, quand tu parlais de catastrophe, justement, Est-ce que tu as des exemples concrets tirés de ta pratique quotidienne pour illustrer ces interactions et ces toxicités entre les traitements de chimiothérapie et les plantes ?

  • Bertrand

    Oui, j'en ai quelques-uns. Je vais peut-être commencer par un cas qui nous avait marqué. C'était un patient de pédiatrie qui était traité pour ce qu'on appelle du méthotrexate haute dose, donc un médicament qui est très actif, mais qui peut provoquer des toxicités très importantes s'il est mal éliminé au niveau rénal, puisque c'est un médicament qui est d'élimination rénale. Et donc ce patient avait reçu six cures de méthotrexate haute dose sans aucune toxicité particulière. Et à sa septième cure, il a fait un tableau absolument cataclysmique, une toxicité majeure avec des retentissements rénaux, cutanés, tout une série hématologique. Et lorsqu'on a essayé de comprendre ce qui s'était passé, ses parents de toute bonne foi lui avaient donné justement des produits à base de phytothérapie. Donc on a travaillé le sujet, on a travaillé également avec le centre régional de pharmacovigilance à qui le cas avait été déclaré et donc le centre régional de pharmacovigilance a conclu à l'imputabilité réelle de cette toxicité à cette consommation de phytothérapie. Tant et si bien qu'on a évidemment conseillé aux parents d'arrêter cette consommation de plantes. L'enfant a pu faire par la suite encore six cures de méthotrexate haute dose sans aucune toxicité. Donc là, on voit très bien l'impact qu'une prise ponctuelle de phytothérapie peut avoir sur un patient. Donc ça, c'était un patient pédiatrique, mais ça marche aussi chez les adultes. J'ai d'autres exemples si tu le souhaites.

  • Abigaïl

    Et du coup, cette plante, c'était quoi ? Et qu'est-ce que les parents cherchaient à améliorer ?

  • Bertrand

    Alors cette plante c'était des extraits de feuilles d'olivier. Ce que les parents cherchaient à améliorer, je ne sais absolument pas. Mais très souvent, c'est véritablement chez les patients une recherche de contrôle, de maîtrise des effets indésirables des chimiothérapies. C'est vraiment la principale cause. Certains patients, hélas, tendent à remplacer leur traitement de chimiothérapie par des plantes. Toute la littérature le montre très bien, ça provoque des rechutes.

  • Abigaïl

    C'est une perte de chance incroyable.

  • Bertrand

    C'est une perte de chance complète. Ça a vraiment été montré dans la littérature. Des comparaisons de cohortes où les patients, souvent des patients de cancer du sein, parce qu'il y a d'énormes cohortes dans le cancer du sein, prennent de la phytothérapie à la place de leurs chimios. Clairement, on a une perte de chance. On peut avoir aussi une perte de chance à cause des interactions. Ça a été également montré. Mais là, justement, l'intérêt, c'est de pouvoir communiquer et de travailler avec le patient pour limiter ce risque.

  • Abigaïl

    Oui, en aucun cas, on le reprécise, ça ne remplace les traitements ?

  • Bertrand

    Absolument pas.

  • Abigaïl

    En aucun cas.

  • Bertrand

    Absolument pas. Les produits de phytothérapie peuvent être des alliés dans la prise en charge des toxicités, aussi tant est qu'il n'y ait aucun risque vis-à-vis du traitement anticancéreux. Ça ne peut en aucun cas remplacer un traitement anticancéreux.

  • Abigaïl

    Est-ce que tu as d'autres exemples à nous donner ?

  • Bertrand

    Alors, j'ai d'autres exemples, oui. On s'éloigne un petit peu de la plante, mais c'est quand même d'origine végétale. C'est un patient qui consommait, parce qu'il aimait ça, des litres de jus de grenade. la grenade qui est un fruit qui est plutôt à la mode, qu'on aime bien déguster actuellement. Et en fait, la grenade peut présenter des propriétés particulières, à savoir qu'elle peut, ce que je vous ai expliqué tout à l'heure, ralentir cette usine de dégradation des médicaments qu'est le foie. Et donc ce patient, son hématologue lui a prescrit une thérapie orale anticancéreuse. Et dès le début de son traitement, il a présenté des toxicités monstrueuses. Il a été à deux doigts d'arrêter son traitement. En fait, c'est une collègue pharmacienne qui l'a contactée par téléphone à l'initiation de son traitement et qui a tout de suite vu cette toxicité abominable, qui lui a posé tout plein de questions, qui a identifié ce jus de grenade comme pouvant potentiellement inhiber le métabolisme du médicament et donc être responsable d'une surexposition et d'une toxicité. Donc le patient a immédiatement arrêté de consommer son jus de grenade. et trois jours après, sa toxicité avait complètement disparu. Donc c'est un exemple qui est assez parlant. Peut-être un autre, dans une autre catégorie d'interaction, on l'a dit tout à l'heure, les plantes peuvent avoir des effets pharmacologiques, on a parlé du millepertuis qui est antidépresseur, vous avez plein de plantes qui peuvent jouer sur plein de choses dans l'organisme. Alors il y a une plante toute simple, c'est la réglisse. qu'on peut également trouver dans une boisson qui s'appelle l'anthésite. C'est une marque, mais tout le monde comprendra ce que c'est. Donc la réglisse a des propriétés. Elle-même, de base, elle a tendance à faire augmenter la tension artérielle. Alors des très petites quantités, de temps en temps, ce n'est pas très gênant, mais on a eu l'exemple d'un... d'un patient qui prenait des traitements thérapie orale également ciblés, qui avaient déjà des effets pro-hypertenseur. Et donc cette consommation de réglisse a fait fluctuer sa tension à la hausse de façon trop importante. Donc là encore, on a identifié le problème et il a stoppé sa consommation de réglisse, puisque là il n'y avait pas de volonté particulière thérapeutique, c'était juste qu'il aimait bien le goût. Mais voilà, c'est des exemples très pragmatiques, où on se rend compte qu'on peut tout de suite jouer sur des choses qui vont impacter le traitement et la santé du patient. Et donc il faut juste en discuter avec lui avant pour être sûr qu'il n'y a pas de problème.

  • Abigaïl

    Mais du coup, là, ce qui est frappant, c'est que sur trois exemples, il y a deux exemples qui sont issus de l'alimentation. En fait, on a aussi une interaction dans l'alimentation, les épices que l'on met dans les plats, au même titre que des gélules que l'on peut avaler et acheter, par exemple, en officine.

  • Bertrand

    Complètement. Très souvent, les patients ont en tête l'interaction avec le pamplemousse, qui apparaît très souvent dans les notices des médicaments. C'est exactement le même mécanisme. Le pamplemousse, c'est un fruit qui est très bon, mais qui peut parfois jouer sur le métabolisme des médicaments et donc provoquer des surexpositions aux médicaments. Donc, il y a plein de choses comme ça d'origine végétale, qui ont des effets. Une fois de plus, la question n'est pas de dire qu'on interdit tout ce qui est végétal. La question est de dire... est-ce que ce produit végétal, au moment où je prends ce traitement, est dangereux ou pas ? Pour les épices, c'est évident aussi. Il y a plein de choses qui sont décrites en termes d'interaction avec le curcuma, avec différents types de ginseng, puisqu'il y a plusieurs ginsengs qui sont commercialisés, ils n'ont pas tous les mêmes propriétés sur cette usine qu'est le foie. Il va y avoir l'ail également. Donc là, il y a en quantité raisonnable une fois par jour dans une assiette, ce n'est pas vraiment un problème, mais on connaît tous des patients qui se supplémentent avec de l'ail, de grandes quantités d'ail, en gélules notamment, et l'ail présente des propriétés également potentiellement, alors pas néfastes, mais qu'il faut prendre en compte. L'ail est anticoagulant, l'ail présente différentes propriétés. On a la même question sur le gingembre qui peut avoir également des risques d'interaction avec les médicaments. Le gingembre souvent est présenté comme pouvant être intéressant pour la maîtrise des nausées et vomissements. Donc là encore, il n'y a pas ma connaissance de vraie étude qui ait établi l'intérêt du gingembre pour cette indication-là. Il y a eu des études de fait, notamment en pédiatrie, mais qui n'avaient pas été positives. Après, une fois de plus, un patient qui considère que le gingembre lui fait du bien... Moi, j'encouragerais toujours à prendre du gingembre à condition qu'il n'y ait pas d'interaction avec son traitement.

  • Abigaïl

    Et dans l'alimentation, c'est quoi le seuil qui peut poser problème en termes de quantité ? C'est difficile à évaluer et bien sûr ça dépend des plantes.

  • Bertrand

    C'est impossible à évaluer, c'est bien la problématique. Contrairement aux médicaments, il n'y a pas d'études véritablement poussées sur les plantes par définition. Puisque ne serait-ce que, je ne sais pas si tous les gens ont ça en tête, mais lorsqu'on s'intéresse par exemple aux huiles essentielles qui sont extraites des plantes, Si vous prenez une huile essentielle de lavande cultivée dans un champ, vous étudiez son composition et puis vous allez étudier la composition d'une huile essentielle de lavande cultivée dans le champ d'à côté qui n'est pas orientée de la même manière vis-à-vis du soleil et qui n'a pas la même composition au niveau du terrain, vous allez avoir une composition d'huile essentielle différente. C'est la même chose pour les autres plantes, en fonction de la façon dont elles ont été cultivées, de où elles ont été cultivées, de comment elles ont été récoltées, comment elles ont été préparées, il peut y avoir des différences qualitatives et quantitatives très importantes. Donc on ne peut pas faire une espèce de règle comme ça en disant le curcuma c'est pas plus de temps par jour, l'ail... Ça c'est pas possible. L'idée c'est d'identifier de façon macroscopique le risque. Plus on a d'informations, mieux c'est évidemment. Souvent les pharmaciens vont embêter les patients en leur demandant quelle est la marque de la phytothérapie qu'ils ont acheté, Est-ce qu'il y a un dosage marqué sur la boîte, etc. Mais tout ça, c'est pour justement guider la réflexion pharmaceutique pour arriver à une conclusion la plus fine possible. Lorsqu'on a passé l'information... comme on dit en médecine, primum non nocere, donc on va considérer le risque le plus important. Moi, de façon générale, si je sais qu'il y a un risque d'interaction évident entre du curcuma et un traitement, je vais dire au patient, arrêtez le curcuma pendant la période de ce traitement. Ne continuez pas, on ne maîtrise pas le risque.

  • Abigaïl

    Et même dans l'alimentation.

  • Bertrand

    Ah oui, y compris dans l'alimentation. Oui, oui. Pour vous donner juste un petit exemple, on fait ce qu'on appelle des bilans de médication pour nos patients. pour certaines de nos patientes traitées par des anticancéreux injectables, et donc on appelle ces patientes avant qu'elles viennent faire leur traitement pour voir ce qu'elles prennent justement, et dans notre questionnaire type, on a certes les produits de phytothérapie, les compléments alimentaires, mais on a également les épices utilisés dans l'alimentation, on a également tout ce qui va être tisane, thé, etc., puisque le thé peut également avoir des interactions, il y a des tisanes également qui peuvent contenir des produits potentiellement ...interagissant avec les médicaments.

  • Abigaïl

    Et selon toi, quelles sont les plantes les plus utilisées par les patients en parcours de soins, si c'est possible de répondre à cette question ? Parce que c'est vrai que c'est un petit peu compliqué, mais dans ta pratique quotidienne, qu'est-ce que tu observes ? Et puis, quelles sont les interactions et les problématiques qui en découlent ?

  • Bertrand

    Là encore, c'est très difficile de répondre, tout simplement parce qu'il n'y a pas de règles. Alors c'est très dépendant de différentes choses. Ça va dépendre d'abord de l'origine du patient. C'est une évidence, mais on va la donner quand même. Il y a des patients qui sont d'origine notamment nord-africaine qui consomment énormément d'épices, ce qui n'est pas forcément le cas de patients qui ne proviennent pas de cette zone géographique. Je pense que dans le sud de la France, on a tendance à manger beaucoup plus d'ail que dans le nord. Je suis originaire du sud de la France, c'est pour ça que ça m'amuse. Donc ça, c'est déjà dans l'alimentation. Après, concernant les plantes elles-mêmes, il n'y a pas de règle, parce qu'en fait on se rend compte qu'il y a des modes. C'est par vagues, c'est très souvent des échanges entre patients. L'étude dont je parlais tout à l'heure concernant la consommation de phytothérapie par les femmes atteintes de cancer du sein avait bien montré ça, c'est-à-dire que, contrairement à ce qu'on peut penser, Les patients ne vont pas forcément chercher des choses sur internet, mais c'est vraiment de la discussion entre patients, et qui fait qu'il y a des fois des espèces de petits emballements sur des plantes en particulier. Donc c'est des modes. Il y a quelques années, il y avait une grande mode sur ce qu'on appelle le kava-kava, qui est une plante pour le coup qui présente des propriétés toxiques, donc il y avait eu des soucis à l'époque. actuellement je ne saurais dire s'il y a vraiment une mode mais c'est souvent par vague donc je pense que de façon très pragmatique une fois de plus la seule chose à faire c'est que le patient explique à son médecin à son pharmacien ce qu'il prend que ce soit une mode ou pas et puis derrière on fera l'analyse pour voir exactement ce qu'il se passe

  • Abigaïl

    Je me mets à la place du patient, et du coup j'ai envie de te poser la question, est-ce qu'il existe des plantes bénéfiques quand on est sous traitement de chimiothérapie qui permettent d'atténuer les effets secondaires et qui seraient sans interaction ?

  • Bertrand

    Alors, il peut en exister, mais je me garderais bien d'en dresser une liste, tout simplement parce que, évidemment, pour être sûr de l'inocuité d'une... d'un... d'une association entre une plante et un médicament, il faut d'un côté connaître la plante et de l'autre côté connaître le médicament. Puisque vous prenez deux médicaments, deux thérapies ciblées utilisées dans la même indication, par exemple en hématologie, ces deux médicaments ne vont pas être métabolisés exactement de la même manière dans l'organisme et peut-être que l'un des deux va interagir avec une plante et que le second n'interagira pas avec celle-là, mais interagira avec une autre. Donc il n'y a pas de réponse. C'est absolument impossible de dresser cette liste. La seule chose qu'on fait, on va dire un petit peu en miroir. C'est qu'au niveau des pharmaciens, on essaie d'identifier typiquement les associations où il y a des interactions de façon certaine pour donner des réponses rapidement aux patients pour ne pas les laisser dans l'incertitude. Mais on ne peut pas dresser de listes sans interactions, c'est absolument impossible.

  • Abigaïl

    Et à l'inverse, est-ce qu'il y a des plantes qui sont à éviter impérativement ?

  • Bertrand

    Alors oui, j'ai parlé du cava-cava tout à l'heure. Oui, il y a des plantes qu'il faut éviter impérativement. Il y a une liste de plantes qui est officielle, qu'on peut retrouver sur le site de l'Agence nationale du médicament, donc l'ANSM. C'est ce qu'on appelle la liste B des plantes médicinales. Cette liste B va lister toutes les plantes dont on sait que les propriétés toxiques l'emportent sur les propriétés thérapeutiques. C'est une liste qui est relativement longue. Mais par contre, en la consultant, on sait tout de suite si la plante est dangereuse ou pas. Donc c'est des choses comme ça qu'on peut avoir en termes de réflexes patients. On va voir cette liste. Si la plante qu'on compte prendre est sur cette liste, il vaut mieux ne pas la prendre du tout. Contexte cancérologique ou pas d'ailleurs.

  • Abigaïl

    Oui, parce que cette liste, elle est accessible à tout le monde.

  • Bertrand

    C'est sur le route de l'ANSM. Complètement. Vous tapez liste B, ANSM, normalement, ça sort sur Internet. Google est notre ami.

  • Abigaïl

    Et du coup, en tant que patient, quelle source d'information tu conseilles ? Une source d'information qui serait fiable ? Et quelle serait l'attitude pour sécuriser les parcours de soins ?

  • Bertrand

    Alors, il y a plusieurs sources d'informations concernant cette problématique. Il y a des sources d'informations qui sont quand même très tournées vers les professionnels de santé. Donc moi, je déconseille aux patients d'y aller directement parce que souvent, il faut quand même avoir des connaissances dans le domaine pour bien comprendre ce qui est rapporté dans ces bases de données. Moi, je conseillerais peut-être d'avoir recours à un outil en particulier. Comme je l'ai dit, je fais partie de la Société française de pharmacie oncologique. Et la SFPO a... créé ce qu'on appelle des fiches Oncoliens. Ces fiches Oncoliens sont tout à fait disponibles sur Internet. Vous tapez Oncolien et ça sort tout de suite. On a fait des fiches à destination des professionnels de santé pour tous les médicaments thérapie orale, anticancéreuse, mais également des fiches à destination des patients, qui vont lister des choses très simples à type de comment est-ce qu'on prend le médicament, comment est-ce qu'on prend en charge ses effets indésirables, etc. Mais à la fin de ces fiches, on a également listé, pour chacun des médicaments, les plantes pour lesquelles il peut y avoir des interactions. Alors évidemment, on ne peut pas être exhaustif sur la totalité des plantes potentiellement consommables par les patients, mais on a essayé d'être le plus exhaustif possible, et donc un patient qui voudrait prendre une thérapie orale et qui se poserait des questions peut aller consulter la fiche patient oncolien, et en bas de la fiche, il aura la liste des plantes qu'il vaut mieux éviter.

  • Abigaïl

    Et cette liste est souvent longue.

  • Bertrand

    Cette liste est souvent longue.

  • Abigaïl

    Non mais pour les utiliser à titre personnel, dans ma pratique professionnelle, ces fiches, moi j'aime bien éditer ma fiche, et puis éditer aussi la fiche du patient, et puis en sortie d'entretien, comme ça le patient a sa fiche, il repart avec sa fiche, et c'est vrai qu'on est souvent surpris de la quantité de plantes en interaction avec les traitements.

  • Bertrand

    Oui, c'est vraiment une question. Très souvent, les gens ne sont pas conscients de cette question du tout. On l'a déjà dit tout à l'heure. Et donc, si ça peut sécuriser leur prise, c'est très bien. Après, de toute façon, et ça, je pense que c'est quand même le plus important, plus le patient parlera avec son clinicien, son pharmacien, plus il sécurisera sa prise de plantes et sa prise de chimiothérapie.

  • Abigaïl

    Oui, mais ça, justement, je pense que ce sera le mot de la fin. C'est justement l'attitude à... Avoir, quand on est en parcours de soins, de communication avec son oncologue, le pharmacien à l'hôpital, le pharmacien en officine, de vraiment dire, expliquer les choses et de dire aussi j'ai envie de prendre telle chose pour soulager tel effet indésirable ou améliorer telle qualité de vie, en parler et comme ça, ça permet de voir la meilleure option pour le patient à un moment donné, en fonction de la thérapie qu'il prend.

  • Bertrand

    C'est tout à fait ça. Les recommandations dont j'ai parlé tout à l'heure, on a travaillé justement sur cette question de comment se positionner vis-à-vis du patient, vis-à-vis de toutes ces problématiques qui sont certes liées à son cancer, mais qui sont aussi d'ordre psychologique, la prise en charge de sa pathologie par lui-même et pas juste par une chimiothérapie qui vient de l'extérieur. Donc, On a beaucoup travaillé là-dessus, justement, l'idée c'est vraiment... Du côté patient, qu'il soit transparent avec les professionnels de santé, qu'il n'ait pas peur de dire qu'il prend de la phytothérapie, qu'il n'ait pas peur de dire pourquoi, parce que parfois, tout simplement, ça permet d'identifier des problèmes que le clinicien n'avait pas identifiés. Donc, d'un côté, de la transparence du côté du patient qui doit dire aux professionnels de santé ce qu'il consomme, et puis de l'autre côté, côté professionnel de santé, une écoute. On va discuter avec le patient, bien comprendre son profil, lui expliquer les risques. S'il y en a, c'est très important, être pédagogue. Après, le patient reste libre de prendre quelque chose, même si on lui dit qu'il ne vaut mieux pas. Mais par contre, ce qu'on peut faire aussi pour accompagner le patient, c'est lui dire surtout, au moindre effet indésirable, vous contactez votre oncologue, etc. Donc c'est vraiment du... Ce que je disais tout à l'heure, c'est du gagnant-gagnant, c'est un travail d'équipe. L'idée, ce n'est pas d'interdire. Souvent, les patients ont peur d'en parler, parce qu'ils ont peur qu'on leur dise, vous arrêtez tout sans réflexion. Donc l'idée, ce n'est vraiment pas ça. C'est qu'on est... Cette réflexion avec le patient pour voir ce qui est le mieux pour lui, même si on doit différer un petit peu la prise de phytothérapie, par exemple.

  • Abigaïl

    Oui, et puis des fois, je pense aussi que les patients ont peur qu'on les moralise, qu'on soit moralisateur vis-à-vis des traitements qu'ils peuvent prendre à côté. Donc c'est vrai que la posture du soignant, elle est hyper importante. Il faut pouvoir être suffisamment ouvert pour que le patient soit en confiance et nous dise les choses.

  • Bertrand

    C'est évident. Moi, en tout cas, dans ma pratique quotidienne, je ne suis jamais dans le jugement. Je n'ai pas à juger de ce que fait le patient. Moi, j'ai à protéger le patient. Ce n'est pas la même chose. Donc, j'essaie de lui dire, je lui dis s'il y a des problèmes. Après, bien sûr que c'est lui qui gère sa maladie. On est bien d'accord là-dessus.

  • Abigaïl

    En tout cas, merci beaucoup Bertrand. Est-ce que tu vois quelque chose à rajouter qu'on n'aurait pas ? qu'on n'aurait pas balayé sur ce vaste sujet.

  • Bertrand

    Je ne crois pas. Je suis très content d'avoir fait cet enregistrement parce que c'est vraiment une question qui me tient à cœur. Je travaille dessus depuis une dizaine d'années. Les choses évoluent plutôt en bien. Et pour moi, c'est vraiment très important que les professionnels de santé, et surtout les patients, aient ces notions en tête.

  • Abigaïl

    En tout cas, merci beaucoup. C'était aussi un plaisir de t'avoir au micro, Bertrand. Et puis encore merci pour ton temps, parce que je sais que tu es très pris sur ce congrès. Et c'était un véritable plaisir de discuter de ce sujet-là avec toi. Merci beaucoup en tout cas.

  • Bertrand

    Merci.

  • Abigaïl

    Merci Bertrand. Au revoir. Petite note de fin d'épisode pour vous rappeler que vous pouvez télécharger le cadeau gratuit que j'ai créé pour vous. Il s'agit d'une feuille très pratique pour les patients et qui permet la prise de notes entre deux passages dans le service hospitalier. Le but de cette ressource est de faciliter la communication avec l'équipe de soins et de ne pas oublier les choses à dire en consultation. Vous pourrez y signaler vos symptômes, vos éventuels effets indésirables et noter toutes vos questions à poser aux différents professionnels du service. J'espère que cette ressource vous aidera dans votre prise en charge et vous trouverez le lien pour la télécharger gratuitement en note de l'épisode ainsi que sur la page Instagram. Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de canc'Héros. Si le contenu vous a plu, n'hésitez surtout pas à le partager auprès de patients de votre entourage qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre 5 étoiles sur Apple Podcast et Spotify, ainsi qu'un commentaire sur Apple Podcast. Ça aide vraiment à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à aider un maximum de patients. Mille mercis à ceux qui prendront le temps de le faire. Si vous souhaitez me contacter pour me faire des retours sur les thèmes que vous aimeriez que j'aborde, me faire part de vos problématiques ou tout simplement me raconter votre histoire, c'est sur la page Instagram du podcast que ça se passe à canc.heros ou sur la page Facebook canc'Héros Podcast. Je vous souhaite une très belle journée, prenez bien soin de vous et à bientôt !

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