- Abigaïl
Bonjour à toutes et à tous, je suis ravie de vous retrouver pour la saison 4 du podcast canc'Héros. Bienvenue à vous ! Je suis Abigail, pharmacienne d'officine, et ma mission ici est de favoriser le partage d'expérience entre patients qui ont vécu un parcours de soins cancer dans le but de les aider à devenir acteurs de leurs soins. J'invite aussi à mon micro des professionnels de santé. pour partager une information validée sans charlatanisme. Ce sont des choses qui me sont très chères, car j'ai malheureusement vu dans ma carrière des choses pas très glorieuses à ce niveau-là. Et la vocation de ce podcast, c'est vraiment d'aider au maximum les patients en parcours de soins avec une information pertinente et validée. Et surtout... un échange de témoignages qui est très très important aussi parce que dans ces moments-là, on se sent très seul. Si vous appréciez mon travail, n'hésitez pas à le faire savoir sur les plateformes d'écoute en mettant une note 5 étoiles sur Apple Podcast et Spotify. Et sur Apple Podcast, si vous pouvez, vous pouvez mettre aussi un commentaire et ça nous aide à nous faire connaître auprès d'un maximum de patients et à nous faire remonter dans les classements. Je vous remercie beaucoup et je vous souhaite une très belle écoute. Avant de démarrer l'épisode avec Stéphanie, en fait je voulais tout d'abord la remercier. La remercier pour sa... patience parce que j'ai mis beaucoup de temps à produire cet épisode et je m'en excuse auprès d'elle. Cet épisode, il est très très particulier et pour moi, c'est vraiment la mission du podcast, elle est ici. Elle est dans le partage de témoignages difficiles, des choses qu'on n'ose pas aborder dans la vie de tous les jours, des choses qui font très très peur. Et je pense que Stéphanie a vécu ce qu'un parent redoute le plus au monde, la perte de sa petite Alba. C'est un témoignage vraiment coup de poing, mais qui doit, à mon sens, exister, ne serait-ce que pour la mémoire d'Alba. et pour tous les autres parents qui vivent le cancer pédiatrique au quotidien. Ce genre de témoignage est parfois difficile à entendre, mais je suis sûre que ça aidera beaucoup de parents dans la détresse. Donc voilà, je voulais saluer le courage de Stéphanie en tout cas. d'oser partager pour aider les autres parents. Voilà, donc je vous souhaite une très belle écoute. Bonjour Stéphanie.
- Stéphanie
Bonjour Abigail.
- Abigaïl
Je suis ravie de t'accueillir sur le podcast canc'Héros. Merci beaucoup pour ton temps et merci pour tous les partages que tu vas nous transmettre aujourd'hui. Aujourd'hui, on va aborder des thématiques qui vont être très... dur, et ce pour deux raisons. Alors déjà, je n'ai jamais enregistré d'épisodes où on parlait d'un patient qui était décédé, et aujourd'hui on va parler de ta petite fille qui est décédée. Et du coup, c'est d'autant plus dur, parce qu'on parle d'oncologie pédiatrique, d'oncopédiatrie. Donc, merci pour ton courage. Merci pour ton temps et je suis sûre que c'est un sujet qui est certes très difficile mais qu'il est important d'aborder parce qu'en fait ça va beaucoup aider les autres parents. Donc merci de me recevoir chez toi. Avec plaisir. Pour commencer, est-ce que tu veux bien te présenter s'il te plaît pour les auditeurs qui nous écoutent ?
- Stéphanie
Oui, alors bonjour à tous, moi je suis Stéphanie. J'ai 35 ans, je suis maman de deux enfants, un sur terre et un dans le ciel. Tout d'abord j'ai Nathanael qui a 9 ans et Alba qui a 5 ans. Je suis une maman solo qui vit près d'Angers.
- Abigaïl
Merci. Et du coup, tu vas nous raconter le parcours de soins d'Alba. Donc ta petite fille ? Dis-moi par où tu veux commencer.
- Stéphanie
Eh bien, on va commencer par le commencement. C'est-à-dire qu'Alba est née en mars 2019 et a commencé à tousser à six mois. Et donc, on a au départ cru qu'elle était malade comme tout. comme tous les enfants de son âge, 6 mois, les poussées dentaires. Et puis finalement, le ressenti de parent, plus profond que ça, on s'est dit non, il y a quelque chose, c'est pas naturel, elle tousse pas naturellement. Et donc on a décidé d'aller aux urgences parce que sa toux était quand même de plus en plus importante. Et... on nous a gentiment fait comprendre qu'elle toussait comme tous les enfants de son âge et qu'il ne fallait pas s'inquiéter. Donc bien sûr, on a entendu, on est rentrés chez nous. Sauf que ça a continué, elle a continué à tousser. Et inconsolable, mais pas cette manière inconsolable des bébés qui ont des coliques, qui ont des problèmes dentaires, qui ont de la fièvre. Vraiment inconsolable, le besoin d'exprimer quelque chose qu'elle ne pouvait pas exprimer par la voix. Donc on a fait pédiatre, on a fait médecin, on a fait les urgences pendant un mois. Vraiment, on a cumulé les rendez-vous. Aux urgences, on leur a demandé des prises de sang, ils nous ont fait une analyse de selles. On est retournés aux urgences une troisième fois parce qu'elles ne s'alimentaient plus. On nous a dit qu'il ne fallait pas s'inquiéter, que notre enfant ne mourrait pas de faim. On nous a fait repartir comme ça. Et puis un jour, une nuit... Elle gémissait toute la nuit, de toute façon c'était ça depuis des jours. Et j'appelle mon pédiatre un samedi matin et il me dit, bon bah là elle gémit, c'est pas normal, un bébé qui gémit c'est pas normal. Vous allez aux urgences, je les contacte et ils vous feront faire une prise de sang à votre fille. Donc je suis arrivée aux urgences, je leur ai dit voilà je ne repartirai pas sans une prise de sang. J'avais dit à mon conjoint à l'époque reste avec Nathanaël à la maison, ça sert à rien qu'on soit tous les quatre là-bas, on rentrera quand on aura des résultats. Et on n'est jamais rentrés parce que la prise de sang a tout de suite révélé une anomalie sur les globules blancs et les globules rouges. Et le fait qu'elle ne s'hydratait plus depuis des jours et des jours ont abîmé ses reins. Et donc, on a été obligés d'aller à Nantes en urgence pour de la dialyse parce que son corps, déjà, ne rejetait plus les déchets des globules blancs. Et en plus, ses reins étaient abîmés à cause du fait qu'elle ne s'alimentait plus et donc elle n'allait plus faire pipi et que ses reins ne fonctionnaient plus. Donc voilà, les urgences d'Angers, ce jour-là, se sont transformées en départ en urgence à Nantes, en ambulance, pour prendre en urgence et la dialyse et la chimio, parce que finalement, la leucémie était quand même déjà bien installée. On nous a annoncé, oui, pardon. Que Alba avait une leucémie, que c'était une maladie du sang et qu'il lui fallait un service stérile et que pour ça il fallait aller à Nantes.
- Abigaïl
Et du coup tu as vécu un mois d'errance diagnostique c'est ça ?
- Stéphanie
C'est ça, à peu près un mois. C'est pas compliqué, on faisait notre crémaillère le 7 septembre à peu près chez nous, 7 ou 10 septembre et on est arrivé à Nantes le 5 octobre. Et elle a commencé à tousser ce soir-là, le soir où on a fêté notre emménagement. Et un mois plus tard, on était à Nantes. Et pendant un mois, on ne nous a pas entendus.
- Abigaïl
Et du coup, comment tu vis cette annonce ? Et comment l'entourage proche le vit ? Parce qu'il y a aussi le grand frère.
- Stéphanie
Alors, il y a plusieurs choses. C'est qu'il y a la phase où on nous propose de sortir de la chambre d'Alba des urgences d'Angers. J'étais avec ma meilleure amie qui est aussi la marraine de ma fille. On m'a demandé si cette personne pouvait surveiller ma fille pendant qu'on puisse aller s'installer ailleurs pour discuter. Ça déjà c'est très choquant. On ne se rend pas compte de ça. Sur le coup ça paraît pour eux peut-être pour le corps médical c'est pas grand chose. Mais quand on nous demande de... prendre un peu de recul pour aller discuter dans une pièce avec une boîte de mouchoirs posée à côté d'un canapé, c'est assez violent. Donc là déjà, moi, l'annonce, on annonce la leucémie, je suis toute seule, on est fatiguée, on n'a pas dormi depuis des semaines parce qu'elle ne dormait plus la nuit. Donc cette annonce est assez violente, on est parachutés, c'est assez lunaire comme ambiance. On a l'impression qu'on est face au néant. Il y a un truc qui se passe assez étrange. Et ensuite, il faut prévenir papa. qui lui est avec mon fils et qui doit me rejoindre à Nantes parce que moi je dois partir en urgence à Nantes avec ma fille et que je ne veux pas faire paniquer quand même non plus parce qu'il a une heure de route à faire et que je ne peux pas lui annoncer ça comme ça, enfin c'est pas possible.
- Abigaïl
Donc en fait l'annonce, t'étais seule au moment de l'annonce ? Oui.
- Stéphanie
D'accord. Oui j'étais seule au moment de l'annonce. Peut-être qu'ils auraient attendu que papa soit là si ça n'avait pas été vital d'être rapide. Là, clairement, c'était vraiment important qu'on aille vite. Donc, ils me l'ont annoncé rapidement pour partir rapidement. Donc, moi, j'ai fait le pari de ne pas tout dire sur le coup à son papa pour éviter qu'il fasse la route d'une manière trop agressive. Le choc était déjà assez important. Je me suis dit que ça n'allait pas être possible de lui dire par téléphone. Donc, j'ai dit le minimum. Il m'a rejoint à Nantes. Et à partir de là, on a pu poser les choses. Et puis, il a déposé mon grand chez ma maman. Donc, il leur a dit ce que moi, j'avais dit. Et voilà. Ensuite, une fois que nous, on avait tous les éléments, on a pu prévenir correctement le reste de l'entourage.
- Abigaïl
Qu'est-ce que ça signifie pour toi à ce moment-là ? Est-ce que tu réalises ou tu es dans le tourbillon de l'annonce ? Comment ça se passe ?
- Stéphanie
Il y a une phrase qui m'a marquée, c'est quand on était installé dans cette pièce où elles m'ont annoncé, le médecin et l'infirmière, que ma fille avait une leucémie. Je pleurais et elle m'a dit « ne vous inquiétez pas, on va la sauver votre fille » . Cette phrase, je pense que... elle me marquera à vie et je pense qu'il serait tellement important qu'une médecin oncologue m'entende, ou une médecin urgentiste en tout cas m'entende, sur le fait que dans ce genre de situation, nous parents, alors moi peut-être, peut-être pas d'autres, mais moi je suis très attachée au mot. Et cette phrase pour moi, elle était tellement importante. Donc je me suis rattachée à ça. Mais je me suis dit aussi, OK, on va la sauver. Mais en attendant, là, la scène est quand même très, très violente. Je vois ma fille assise sur un brancard. Il ne faut absolument pas qu'elle soit couchée durant le trajet, alors que ça fait des semaines qu'elle souffre. Et que je me dis qu'en fait, chaque minute aurait pu être catastrophique. C'est un peu une descente aux enfers à ce moment-là quand même. On ne réalise pas ce qui est en train de se passer, mais par contre, on réalise très bien qu'on est en train de nous rouler dessus. On ne sait pas ce qui se passe, mais on a mal. C'est assez particulier. Puis on est paniqué, on est pétrifié. Moi, j'étais pétrifié. J'avais l'impression d'être dans un état second, vraiment.
- Abigaïl
Et tu es partie en ambulance avec elle ?
- Stéphanie
Oui.
- Abigaïl
D'accord.
- Stéphanie
Oui.
- Abigaïl
Et une fois sur Nantes... Qu'est-ce qui se passe ? Comment ta fille est prise en charge ?
- Stéphanie
Une fois sur Nantes, on arrive directement en réanimation. Les médecins sont déjà sur place, ils ont été prévenus parce qu'on arrive en week-end, le samedi. Donc les médecins de garde reviennent, les chirurgiens de garde reviennent. Et en fait, là, c'est le tourbillon, quoi. C'est nous avec... Donc moi, je... Je monte avec ma fille, mon conjoint arrive, je lui explique la situation, il gère ses émotions, je gère les miennes, on gère les nôtres, on gère celles de notre fille, c'est compliqué, on gère sans rien gérer du tout. On voit des blouses blanches, des blouses bleues, des masques, des charlottes, des tenues, un monde totalement inconnu jusqu'ici. Des grosses aiguilles, des bips partout, des lumières blanches, des couloirs blancs. Tout ça, on ne l'analyse qu'après, mais c'est assez...
- Abigaïl
Le milieu stérile, quand on n'y est jamais confronté,
- Stéphanie
c'est sûr que c'est un monde totalement à part.
- Abigaïl
Et c'était avant le Covid, on ne connaissait pas les masques...
- Stéphanie
Exactement, c'est ça. Donc tout était pour nous tellement nouveau. Moi, je suis... Je suis arrivée aux urgences à 11h le matin, je suis ressortie des urgences d'Angers à 20h, 23h. On était encore dans les couloirs à errer, on n'avait rien mangé de la journée, on était vide. C'était très étrange comme sentiment. Oui, très étrange. Et le fait de là me poser cette question, je trouve que c'est encore plus irréel, en fait. Je me dis même, ça a vraiment existé. On a vraiment découvert ce monde-là. C'est un autre monde.
- Abigaïl
Et du coup, qu'est-ce qui s'est passé après ? Et puis Alba, comment elle était ?
- Stéphanie
Ils ont posé la dialyse. Alors c'était un petit bébé, 6 mois c'est compliqué. Donc il y avait plus... Au mètre carré de peau, il y avait beaucoup de pansements, beaucoup de piqûres, beaucoup de...
- Abigaïl
Ça aussi on ne s'imagine pas je pense.
- Stéphanie
Ouais non, c'est pas nécessaire. Un énorme cathéter dans le cou, je pense que ça nous a beaucoup marqué parce qu'au départ elle n'avait pas de chambre. Donc tout se passait dans un cathéter auprès de la jugulaire, c'était énorme. Et puis la dialyse qui était piquée dans l'intérieur de chacune de ses cuisses pour filtrer l'eau qu'il y avait dans son corps. Parce qu'elle était pleine d'eau, sachant qu'elle ne s'hydratait plus, elle n'allait plus faire pipi. Mais à la fois, elle était sédatée, elle était calme, j'avais l'impression qu'elle était enfin soulagée de se dire « Ah punaise, il a fallu quand même pas mal de temps où je tousse pour que vous me rendiez compte que j'avais un problème. » Et je sentais qu'au fond d'elle, elle me disait « Ah bah merci, ça y est, le combat commence, mais il était temps. » Donc à partir de là, je l'ai senti un petit peu plus apaisé. Et puis nous, ça nous a laissé le temps de digérer un peu ce qui venait de se passer, de sortir, de boire un coca, de reprendre un peu de force et d'analyser la situation. Parce que c'était intense tout ce qui venait de se passer. Et puis on a eu la belle surprise, et ça c'est quelque chose qui est quand même assez important, c'est l'entourage. Et on a la marraine et le parrain qui ont débarqué à minuit à Nantes pour venir nous soutenir et manger un pseudo-kebab que j'ai pas du tout touché. Parce qu'il y avait que ça d'ouvert en face de l'hôpital à minuit. Mais pour pouvoir souffler un peu et pouvoir échanger avec d'autres personnes qui nous ont réconfortées.
- Abigaïl
Et du coup elle est restée hospitalisée sur Nantes combien de temps ?
- Stéphanie
Eh bien... Alors, elle est restée déjà en réanimation le temps que les choses se mettent un peu en place, qu'elle se stabilise. Alors, avec du recul, je ne sais pas exactement combien de temps elle est restée en réanimation, quelques jours. Et ensuite, en fait, il y a eu tout le protocole de chimio. Elle avait une leucémie aiguë myéloplastique de type B, je ne sais plus exactement. Et donc, chaque type de leucémie avait son protocole. C'est quand même d'ailleurs... Incroyable, je n'avais pas du tout conscience à quel point il pouvait y avoir un nombre incalculable de leucémies et de protocoles. Et donc, en fonction des résultats de la première chimio, soit elle allait sur une deuxième chimio du même type, puis une troisième chimio du même type, et une quatrième chimio du même type, soit après, si la première chimio ne se passait pas très bien, on descendait à un autre protocole qui allait en escalier jusqu'à la greffe. Troisième protocole, deuxième, c'est direct la greffe à la deuxième cure. Il y avait différents schémas. Et on a eu la première cure à Nantes. Donc, c'était des cures à peu près un mois et demi, un mois et demi, voire peut-être deux mois. Et la première, en fait, à chaque cure, Alba, avec la chimio, tombait en aplasie. Donc pour ceux qui ne connaissent pas l'aplasie, tous les globules blancs sont rasés et donc il n'y a plus de défense immunitaire et donc d'où la chambre stérile. Et donc à Angers c'est des chambres protégées et à Nantes c'est des chambres stériles donc on était obligé de rester à Nantes sur certains protocoles. Donc on est resté de octobre jusqu'à début novembre, mi-novembre à Nantes en première cure. Et ensuite, on a été à Angers de mi-novembre à fin décembre. Alba est sortie d'aplasie le 22 décembre, donc on a pu rentrer à la maison pour Noël. Donc on a fêté Noël ensemble. Elle a fait sa troisième cure à Angers. Et la quatrième, on est passé par la greffe, donc on est retourné sur Nantes parce que la chimio ne donnait pas les résultats escomptés pour échapper à la greffe.
- Abigaïl
Et ça, les protocoles, on t'expliquait au fur et à mesure ? Ou on t'a expliqué d'emblée les différentes possibilités ?
- Stéphanie
Alors on m'a expliqué d'emblée, parce qu'il faut signer un accord de protocole. Donc on nous a expliqué dès le début. les différentes possibilités, ce qui pouvait se passer. Et ensuite, tout au long, en fait. Je pense que j'ai posé peut-être mille fois la même question. Parce que mille fois, soit tu oublies, soit tu fais semblant d'oublier, soit tu es dans le déni, mais tu as toujours besoin qu'on te réexplique des choses alors que la veille, on te les a déjà expliquées, mais tu ne les comprends pas de la même manière le lendemain. Il y a des choses que tu as besoin de... de réajuster.
- Abigaïl
Et puis, il y a aussi un phénomène de saturation de cerveau.
- Stéphanie
Tu sais,
- Abigaïl
quand il y a un trop-plein émotionnel, ça, ça le fait pour beaucoup de patients. T'as un blackout.
- Stéphanie
C'est normal.
- Abigaïl
Tu peux pas absorber l'information. C'est totalement normal.
- Stéphanie
Bon, ben voilà. Et je pense qu'à des moments, ouais, j'écoutais plus. Ou du moins, voilà. Il fallait qu'on me le réexplique le lendemain et elles étaient là pour me le réexpliquer, c'était pas du tout problématique. Mais oui.
- Abigaïl
Et du coup, comment tu as vécu toute cette période ? T'étais la tête dans le guidon ? Et puis le grand frère aussi, comment il a vécu toute cette période ? Les allers-retours à l'hôpital, entre Angers et Nantes ? C'est vrai que c'est... Ce n'est pas votre lieu de résidence. A chaque fois, c'était des allers-retours. Au quotidien, comment ça s'organisait ?
- Stéphanie
Alors, déjà, on était logés à la maison des parents, McDonald's. La fondation Ronald McDonald's, je trouve qu'il faut vraiment en parler parce qu'on a toujours tendance à... Alors moi, la première, je ne mange pas au McDonald's. Je ne suis pas vraiment fan de la chaîne. Mais en l'occurrence, ils mettent des choses en place qui sont vraiment très confortables pour des parents d'enfants malades. Donc ces maisons Ronald McDonald, quand vous allez au McDo, quand on vous propose d'arrondir votre ticket au centime du dessus, ce n'est pas pour créer un nouveau concept de McDo, c'est pour soutenir des maisons McDo, pour pouvoir loger des parents d'enfants malades au plus près de l'hôpital, ce qui est le cas à Nantes. Et c'est quand même hyper confortable et réconfortant. Donc on vivait dans cette maison. Rapidement, on a réussi à trouver un rythme où Nathanaël allait à l'école. Une semaine sur deux, papa ou maman étaient avec Nathanaël. une semaine sur deux, papa ou maman étaient avec Alba. Ça permettait aux deux d'avoir les deux parents, de ne pas se sentir exclue pour Nathanael, parce qu'à 5 ans, on a absolument besoin de ses parents. Et déjà, la situation était extrêmement compliquée. Nous, déjà, en tant qu'adultes, c'était vraiment pas évident à gérer. Donc lui, à 5 ans, de se dire que du jour au lendemain, papa ou maman et sa petite sœur partent en urgence. Enfin, voilà, on a essayé de faire très attention à lui et je pense qu'on a réussi. Donc pour lui, sachant que papa était en déplacement toute la semaine avant la maladie d'Alba, on gardait quand même ce petit rythme où il était tout seul avec un parent la semaine et on se retrouvait le week-end. Et puis, il a eu cette capacité à s'effacer un peu alors que mon fils, c'est quelqu'un qui a besoin. Mais bien avant la maladie de sa sœur, qui a vraiment besoin de se sentir important, d'être au centre de l'intérêt, il a très peur qu'on oublie sa présence, qu'il a besoin d'être valorisé. Et là, durant la maladie de sa sœur, il a été très autonome. « T'inquiète pas maman, vas-y, ça va aller. » Enfin, tout ce qui peut faire pleurer avant de prendre la voiture et de partir. Mais à la fois, c'était rassurant. Donc lui, du haut de ses 5 ans, je trouve qu'il a quand même vraiment bien géré la situation. Et nous, il a fallu s'adapter. Il y avait la difficulté d'être isolée, d'être en chambre stérile, d'être sur Nantes. Donc on était seules, avec un bébé de six mois. En termes de discussion, ce n'est pas l'idéal. Les journées sont longues, on ne discute pas beaucoup, elle et moi. On n'a pas le droit aux livres en papier. Tout doit être nettoyé, tout doit être désinfecté, on doit se déshabiller, se changer, vivre avec un masque. A l'époque, encore une fois, avant Covid, on ne connaît pas le masque, donc il faut s'habituer à ça. Donc, ce n'est pas simple. Je crée rapidement des liens et heureusement avec le corps médical, infirmiers, infirmières, péricultrices, aides-soignantes. Vraiment, les clowns, les femmes de ménage, tout le monde, vraiment des personnes incroyables qui m'ont vraiment permis d'avoir en souvenir de jolis moments, vraiment. Et puis, la seule chose qu'on peut vraiment emporter avec soi, c'est son téléphone. Et donc, je commence à entretenir un... Un journal intime, pas intime, puisque je vais le partager sur les réseaux sociaux, non pas pour faire parler de moi, c'était pas du tout le programme, mais en voulant communiquer avec ma famille, j'ai communiqué avec la France entière et eux m'ont permis aussi de jamais me sentir seule et de pouvoir toujours avoir un soutien. sur 9000 personnes, tu as toujours quelqu'un qui ne dort pas la nuit ou qui ne mange pas au même sort que les autres. Et donc, j'avais toujours quelqu'un avec qui parler. Et ça m'a beaucoup, beaucoup, beaucoup aidée dans cet isolement en milieu stérile.
- Abigaïl
Oui, et puis ça aide aussi à sortir peut-être les émotions, les événements. C'est vrai que ça peut être thérapeutique aussi.
- Stéphanie
Clairement, je pense que... À cette époque-là, Radio Alba, c'était mon psychologue, clairement. Moi qui ai besoin, et j'ai toujours eu besoin depuis toute jeune, tenir un journal intime, je savais qu'exprimer mes maux par des mots, c'était pour moi essentiel. De là à les partager, je ne savais pas. Mais par contre, de l'extérioriser et d'écrire... C'était clairement thérapeutique.
- Abigaïl
Et vous avez mis votre vie professionnelle entre parenthèses. Comment ça se passe pour le travail ?
- Stéphanie
Oui, alors moi, j'avais arrêté de travailler avant la naissance d'Alba, avant la grossesse même, parce que je voulais changer d'orientation professionnelle. Et je m'étais dit, on veut un deuxième enfant, donc c'est peut-être le moment finalement, au moins je partagerais vraiment beaucoup de moments avec mon enfant. Et puis, je pourrais profiter du grand en même temps. Donc, je ne travaillais pas à cette période. Et le papa, lui, était en déplacement du lundi au vendredi. Donc, quand Alba est tombée malade, moi, il y a un des deux parents qui a le droit à une aide. J'ai mangé le nom, mais en tout cas... Vous avez le droit à une aide, enfin c'est la CAF qui met tout en place, et donc ce qui permet de survivre, je ne veux pas dire de vivre, mais de survivre. Et puis celui qui travaille, soit il continue de travailler, soit il se met en arrêt maladie, mais il n'y a pas d'autres alternatives. Donc en ce qui concerne le papa, il s'est mis en arret maladie. J'ai rencontré des parents qui ont dû faire des crédits pour ça. Parce qu'être en arrêt, avoir des aides, on vit dans une société qui est quand même, on ne va pas se mentir, c'est très confortable quand même pour nous en tant que parents. Tous les pays ne proposent pas une aide comme ça pour pouvoir être présent à côté de son enfant malade. Mais par contre, en fonction des revenus, en fonction des charges, ça peut devenir très vite compliqué. Donc nous, on a eu la chance d'avoir une famille qui nous a proposé de monter une cagnotte en ligne et de la partager sur les réseaux sociaux, sur mes réseaux sociaux. Et clairement, ça a été pour nous un énorme soutien. On a pu... vivre réellement sans se poser de questions sur le plan pécunier quoi et enfin les problèmes d'argent on sait ce que c'est quand on en a c'est très angoissant et donc on n'avait pas besoin de se soucier de ça et ça c'est une chance vraiment donc je remercie déjà ma famille d'avoir monté cette cagnotte et les gens qui y ont participé parce qu'il ya eu énormément de monde qui ont participé combien de personnes alors je sais pas Je dirais peut-être 1000 personnes, mais peut-être même plus que ça en fait. J'en ai aucune idée. Puis finalement, ça peut aller de 5 euros à 100 euros et ça peut monter très vite en fait. Donc, sachant que le combat a duré 9 mois et qu'il y a eu des obsèques en plus derrière, ça nous a vraiment permis de pouvoir tout gérer sereinement.
- Abigaïl
Et d'ailleurs, on est passé un petit peu vite, mais c'est vrai que sur la maison des parents, c'est un dispositif qui financièrement est aussi avantageux pour les parents qui en bénéficient. Est-ce que tu peux nous expliquer un petit peu le système, comment ça marche et puis qu'est-ce qui est mis à disposition des parents ? Et est-ce que c'est proposé à tous les parents aussi ?
- Stéphanie
Alors, la maison, elle est à 100 mètres. Je vais parler de celle de Nantes, parce que je n'ai pas de recul sur les autres. Elle est à 100 mètres de l'hôpital. C'est une prise en charge qui est quasiment totale par McDo. Il y a une participation, dans mes souvenirs, de 10 euros par semaine. Les mutuelles le prennent en charge. Donc finalement, on n'a rien à déboursé. Cette maison, elle nous permet d'avoir une chambre individuelle avec une salle de bain. Une chambre froide commune avec le nom de ta chambre pour pouvoir mettre tes affaires au frais, tes consommables. T'as un placard dans ta cuisine avec ton numéro de chambre également où tu peux ranger tes affaires. Les supermarchés déposent des invendus, des fins de série, des légumes, du pain, du chocolat, des pâtisseries tous les jours. Il y a des cuisines partagées avec 3-4 plaques de cuisson, 3-4 fours, 3-4 machines lave-linge, lave vaisselle, une buanderie, une salle de jeu, un réfectoire, des jeux pour enfants à l'extérieur. Vraiment, quand on rentre dans cette maison, on souffle, on est à la maison. Et ça, réellement, je pense que c'est une partie hyper importante du parcours. C'est de se sentir bien quand on coupe. Et la maison McDonald's, c'est juste incroyable pour ça. C'est proposé à tous les parents d'enfants malades. Moi, j'ai rencontré des parents d'enfants qui ont un problème cardiaque, qui ont un problème pulmonaire, qui ont un handicap lourd, qui ont des cancers, qui ont...
- Abigaïl
C'est ce que j'allais te poser comme question. C'est aussi le lieu propice aux rencontres entre parents. Et ça, ça doit être un soutien incroyable. Est-ce que, du coup, tu échangeais avec des parents qui étaient dans la même situation que toi ?
- Stéphanie
quotidiennement. Ceux qui sont à la maison des parents, c'est des gens qui n'habitent pas Nantes. Donc, c'est des gens qui n'ont pas leur famille et leur quotidien à côté d'eux, comme nous. Donc, en fait, notre quotidien, ça devient les parents de la maison. On a encore... Enfin, moi, personnellement, j'ai encore des amis que je vois toujours. Cécile et Loïc, par exemple. que je vois de façon régulière, entre guillemets. On se voit, on passe quelques jours ensemble. Et c'est hyper important en fait à ce moment-là, parce que ça nous permet de se décharger. Et puis de parler avec des gens qui sont dans la même situation. Et donc, moi, personnellement, je ne pouvais pas me permettre de parler avec ma famille comme je parlais avec ces gens de la maison. Parce que les personnes de ma famille, ils sont dans la douleur. Ils sont loin. Ils ne comprennent pas tout. Ils sont dans l'incapacité de pouvoir nous aider. Ils sont dans la frustration, dans la panique. Donc, ce n'est pas possible. Je ne peux pas. Et je ne peux pas rajouter à ça mes états d'âme, mes craintes, mes peurs, les défaillances de santé de ma fille. C'est compliqué. Et donc, le fait d'en parler avec ses parents, ils sont dans la même situation. Donc, en fait, on pouvait sans filtre parler de nos angoisses, de nos peurs, de nos doutes. Et puis, il n'y a pas que ça. C'est des anniversaires, c'est des raclettes, c'est des tartiflettes. C'est des gâteaux au chocolat, c'est de la bouffe. Clairement, à ce moment-là, il faut se le dire. Quand on rentre à la maison des parents, il y a toujours des bonbons, il y a toujours plein de choses. Mais ouais, c'est des moments conviviaux aussi qu'il ne faut pas laisser de côté. Vraiment, moi, j'ai des très, très beaux souvenirs dans cette maison. Donc ouais, cette maison est très importante.
- Abigaïl
Et des contacts que tu gardes maintenant, non avec le temps t'as pas envie de tourner la page, tu continues ces contacts là.
- Stéphanie
Ah oui totalement oui parce que moi j'ai pas du tout envie d'oublier cette partie là de ma vie et parce que sans parler que j'ai pas envie d'oublier quand tu crées des liens avec des gens c'est parce que t'as des affinités avec eux et moi je crois vraiment en ça ... Et donc ces personnes-là, si elles ont croisé mon chemin et si ça a matché, c'est que vraiment il y a quelque chose à vivre avec eux. Et donc je n'ai pas du tout envie de les oublier, je n'ai pas du tout envie qu'on se perde de vue.
- Abigaïl
Mais c'est une question qui est difficile, mais j'imagine que ces autres parents, peut-être qu'ils ont des enfants en rémission et tant mieux. Et c'est très beau. Toi, par rapport à ton parcours, est-ce qu'à un moment donné, il y a eu un sentiment d'injustice ? C'est ça qui est terrible dans l'oncopédiatrie. On se dit, mais pourquoi ça arrive si jeune ? Même s'il n'y a pas de justice dans la maladie, est-ce que tu comprends ce que je veux dire ? Ce sentiment-là, il est assez fréquent parfois dans la maladie.
- Stéphanie
Alors moi, je n'ai jamais... Mais je réfléchis, mais je crois que je n'ai jamais pensé pourquoi ma fille plutôt que quelqu'un d'autre. Par contre, je me suis souvent demandé pourquoi ma fille tout court. J'ai réalisé surtout que la maladie, c'était la loterie. Parce que... Je me disais, mais comment on peut... Comment on peut... Comment un enfant de 6 mois peut tomber malade ? C'est pas juste, c'est pas normal, c'est pas dans l'ordre des choses. Et puis avec le temps, je me suis dit, ok, donc là je traîne en oncologie pédiatrique, des enfants malades, il y en a partout. Donc finalement, en effet, les médecins m'avaient dit au départ, t'avais plus de chances de gagner au loto que d'avoir un enfant avec une leucémie. Voilà, pas de bol. J'ai pas gagné au loto. Donc, à partir de là, soit tu combats le problème de fond et tu oublies tout ce genre de questions parasitaires qui viennent te bouffer de l'énergie pour rien. Soit tu sombres et le problème c'est que t'es pas toute seule et qu'il faut garder la tête en dehors de l'eau. Donc, bien sûr qu'il y a des parents... que je vois encore aujourd'hui qui ont leurs enfants en rémission ou qui ont leurs enfants qui ont leur malformation, qui commencent à guérir et qui commencent à vivre différemment et de mieux en mieux. Et moi, à la limite, je suis tellement... En fait, je pense que ce n'est même pas moi qui ai ce genre de question, c'est eux. C'est l'inverse qui se passe. C'est que moi, de voir des enfants vivants et qui sont en bonne santé, ça me rend... Ça me met en joie. Eux, ils ont leurs enfants vivants et ils ont vécu la maladie de ma fille et elle n'est plus là. Je pense que eux par contre ils sont un peu dans une situation un peu plus complexe qui doit pas être toujours très évidente à vivre quand on est ensemble mais mais non je suis j'ai jamais été vexée ou en colère de savoir que mon enfant à moi n'était plus là et que les autres étaient toujours vivants
- Abigaïl
Et tu disais, tu parlais de cancers rares. Comment le corps médical a abordé ces questions-là avec toi pour Alba ? Est-ce que, heureusement, c'est des cancers rares, heureusement. Mais comment on t'a expliqué et quels sont les chiffres ? Je ne sais pas si tu as des chiffres.
- Stéphanie
Alors, je ne sais pas si on m'a vraiment... exprimer que c'était un cancer rare. La seule chose, c'est que des leucémies aigues myéloblastiques, il y en a. Alors, si j'ai eu les chiffres il y a cinq ans, je les ai totalement oubliés. Et en plus, ma mère dirait que je ne suis pas du tout math et chiffres, donc je les ai oubliés très rapidement, je pense. Par contre, en effet, le pourcentage d'enfants de l'âge d'Alba qui auraient pu avoir une leucémie aiguë myélo-blastique est moindre parce que c'est une leucémie qui touche normalement les personnes âgées. Ah oui, d'accord. Donc, pourquoi un enfant de 6 mois ? Je n'ai pas les réponses à cette question. Je n'ai pas cherché les réponses non plus. Encore une fois, je suis restée focus sur la maladie. finalement, est-ce que ça va m'apporter quelque chose ? Je ne sais pas, je ne pense pas. Mais voilà, ils m'ont bien expliqué que le protocole qu'on mettait en place pour Alba, c'était un petit peu un protocole expérimental du fait de son jeune âge, du fait que cette leucémie touche plus les personnes âgées. Voilà, on était un petit peu sur un cas de figure un peu... Un peu différent.
- Abigaïl
Oui, et puis c'est vrai que du coup, les protocoles n'étaient pas forcément validés en pédiatrie. Donc, une double difficulté.
- Stéphanie
Exactement. Il a fallu qu'on signe le fait que le recul n'était pas encore assez prononcé par rapport aux protocoles qu'on allait mettre en place pour Alba. Oui.
- Abigaïl
Et du coup, Alba, elle a eu combien de lignes de traitement ? 4 lignes ?
- Stéphanie
4 lignes, oui. Oui,
- Abigaïl
d'accord.
- Stéphanie
Elle a eu 3 chimios. Et ensuite, pour la greffe, la quatrième cure, il fallait d'abord détruire sa moelle osseuse actuelle, donc la sienne, donc toutes les cellules. Parce que je reprécise parce que tout le monde se fait avoir, mais on n'est pas sur la moelle épinière, on est sur la moelle osseuse. Oui,
- Abigaïl
c'est différent.
- Stéphanie
Voilà, je ne suis pas médecin, mais... Et donc la moelle osseuse, ce sont des cellules qu'on a partout dans le corps et qu'il faut détruire. Et d'ailleurs, une grève de moelle osseuse, ce n'est pas une grève d'organe, c'est une poche, comme une poche de sang ou une poche de plaquettes, que l'on intègre dans le corps par une chambre. par une seringue. Oui,
- Abigaïl
justement, j'allais te demander comment ça se passait la greffe.
- Stéphanie
Ok, bon, je ne te dis pas tout maintenant. Mais, et donc, pour ça, il faut d'abord détruire sa moelle osseuse pour finalement avoir un groupe sanguin vierge. Et ensuite, alors peut-être que c'est pas ça l'explication réelle, mais en tout cas... Non,
- Abigaïl
non, mais c'est bien expliqué. C'est vrai qu'on fait table rase. Et puis après, on met une poche
- Stéphanie
de moelle osseuse d'une tierce personne.
- Abigaïl
Et comment les médecins t'expliquaient les chances de réussite à chaque protocole ? Est-ce qu'ils t'expliquaient ça ou pas ?
- Stéphanie
Oui, en fait, à chaque fois qu'Alba avait une cure, ils m'expliquaient que si ce résultat était comme ça, on continuait sur la même cure en cure 2 ou en cure 3. Si le résultat était moins bon que celui espéré, on passait sur l'autre cure. S'il était encore moins bon, il y avait trois lignes de cure différentes. En gros, la ligne du haut, c'est la meilleure. Ce sont quatre fois la même cure à peu près, plus ou moins. En tout cas, pas de greffe du tout. La deuxième, on finit peut-être ou pas par la greffe. Et la troisième, on finit forcément par la greffe. On a rapidement su qu'Alba irait à la greffe. C'était le moins bon cas de figure, parce qu'ils estimaient qu'en dessous de 10 kilos, quelqu'un qui reçoit une greffe de moelle osseuse, c'est quand même assez complexe. Et de toute façon, on s'en est très vite rendu compte. L'état d'Alba... Au début de cette quatrième cure où ils ont dû détruire sa moelle osseuse, on ne l'avait jamais vue comme ça. Autant c'est un bébé soleil, elle souriait. Peu importe le cas de figure, on lui mettait une sonde dans le nez, elle finissait par sourire. On lui remettait un cathéter, elle finissait par sourire. Elle avait des muqueuses dans la bouche, elle finissait par sourire. Elle souriait tout le temps. Et là, en quatrième cure, j'ai eu l'impression que mon enfant s'était transformé en monstre. On sentait que dans son corps, il se passait quelque chose de fou. La destruction des cellules, ça pourrait être le nom d'une saga de Marvel. Vraiment, on sentait la violence de la scène. Et donc oui, 10 kilos, c'était un peu léger. Il faut quand même savoir qu'un bébé, enfin un bébé, un enfant, qui a... Ce genre de, pas de pronostic, mais de protocole, est un enfant qui a une chance, qui a très peu de chances de ne pas être stérile, qui aura des problèmes de croissance, qui aura tout un tas de séquelles qu'on minimise ou qu'on ne connaît pas. Donc Alba a subi une opération pour pouvoir... congeler ses ovules si jamais elle voulait des enfants plus tard. Il y a tout un tas de choses qu'on n'estime pas au départ et qui sont quand même assez... La stérilité, on a un bébé de 10 mois, 11 mois et on nous annonce tout ça.
- Abigaïl
C'est hyper dur de se projeter.
- Stéphanie
C'est hyper dur de se projeter. Et c'est vrai que la cure de la greffe, il faut s'y préparer mentalement. Parce que ce n'est vraiment pas la plus simple.
- Abigaïl
Oui, parce que pendant tous les soins, tu avais un bébé souriant et apaisé. Tu sentais. Et par contre, sur cette dernière ligne de traitement, tu sentais que c'était très compliqué.
- Stéphanie
Bien sûr que dans les trois premières cures, il y a eu des moments un peu compliqués. Le fait que très rapidement, ton enfant ne s'alimente plus du tout par la bouche, les nausées.
- Abigaïl
Elle avait une sonde nasale,
- Stéphanie
c'est ça ? Oui, exactement. Pendant les trois premières cures, ça fonctionnait très bien. Mais pareil, à partir de la quatrième, même passant par là, ça ne fonctionnait plus. Donc après, c'était en intraveineux. Et c'est vrai qu'on ne se rend pas compte, mais les traitements de chimio, peu importe du début à la fin, sont des traitements, des doses de cheval, vraiment. Et donc ça abîme, ça vient guérir quelque chose, ça vient détruire un cancer, mais à côté de ça, ça abîme le reste. Et finalement, Alba a eu tout un tas de complications X à côté, dues au traitement qui était fait pour soigner le cancer. Et Alba, elle a vaincu ce cancer. La greffe a pris à 97%. Elle était en rémission. Donc nous, on est arrivés à un stade en mai, début mai, fin avril. Bon ben maintenant Alba, il va falloir que tu remanges par la bouche et une fois que tu remangeras par la bouche, tu pourras rentrer chez toi. On en était là quoi. Donc on était bourrés d'espoir. Sauf qu'en fait, le traitement c'est violent et donc il faut être préparé mentalement, à vivre un enchaînement d'ascenseurs émotionnels. Ce n'est que ça, la maladie. C'est de passer d'un état à l'autre en un quart de seconde, clairement.
- Abigaïl
C'est extrêmement violent parce qu'en fait, là au final, c'était pas un échec thérapeutique. Elle était en rémission et en un mois de temps, tu passes de la rémission où ton espoir... est énorme et tu vois enfin le bout du tunnel à son décès. c'est ça la temporalité ..
- Stéphanie
La temporalité c'est ça c'est et je dirais même que je vais te donner un exemple c'est peut-être pas ça le mardi à 8h Notre médecin référent nous dit, Alba, il faut que tu manges par la bouche et tu pourras rentrer chez toi, la fièvre est tombée, tout ça, tout ça. À nous, grand smile, waouh, génial. Il est 8h. À 10h, elle est en train de faire sa sieste. Les constantes sont bizarres. Son taux d'oxygénation dans le sang, elle est un peu en galère. On se dit, ah, petit problème respiratoire. Bon, ça va le faire. Midi. « Merde, quand même, encore un peu plus, c'est bizarre. » « Bon, ben, on va lui mettre les petites lunettes d'oxygène dans le nez pour l'aider à respirer. » Et puis, plus les heures passent, plus ils augmentent le pourcentage d'air dans les lunettes. Et là, on se dit « Ben, il y a quand même un truc qui ne va pas. » Et puis, on finit par faire une écho. Et puis, on se rend compte qu'il y a de l'eau autour de son cœur et qu'elle est en train de faire un épanchement cardiaque. Donc, finalement, elle passe au bloc en urgence. On lui pose un drain. On nous dit, bon ben voilà, ça peut arriver, la chimio ça abîme les tissus, donc l'eau est passée à travers, ça s'est mis autour de son cœur, donc on va la soulager. Elle va rester quelques temps en réanimation, en observation, un ou deux jours, et elle remontera ici en onco, et on reprendra la suite, et on continuera là où on en était. Elle n'est jamais revenue en oncologie en fait, parce que... Ils ont posé le drain, l'eau s'est évacuée, ils ont retiré le drain, et puis finalement c'est ses poumons qui ont pris le relais, ils se sont gorgés d'eau, ils ont été obligés de vider ses poumons, et puis finalement de là, il s'est avéré qu'il a fallu la plonger dans le coma parce qu'elle était trop fatiguée, trop faible pour respirer toute seule, et que ça a été un enchaînement d'arrêts cardiaques, de difficultés respiratoires, d'intubations, de sédation. Et puis là, on se dit, ça s'enchaîne en fait, on ne voit pas le bout. On commence à se rendre compte qu'il y a l'entonnoir en fait. On se dit, là, les solutions commencent à diminuer. La remontée en oncologie, elle n'est pas pour demain, mais on se rend compte que... Les médecins commencent à tourner leur phrase de manière à nous faire comprendre que potentiellement ils n'ont plus de solution et que peut-être il faudrait se préparer à l'idée qu'il n'y a pas d'autres possibilités et qu'à un moment donné ça va devenir de l'acharnement thérapeutique. Donc ouais, on passe du rire aux larmes très très rapidement.
- Abigaïl
Tu sentais que les médecins, par leur tournure de phrase, te préparaient petit à petit, et puis peut-être préparaient aussi ton fils, le grand frère. Est-ce que tu as eu aussi un psychologue à disposition ? Comment ça s'est passé ?
- Stéphanie
Alors, les médecins, vraiment, je pense qu'ils ont... Bien sûr qu'ils ont adapté leur discours en fonction de la situation, mais ils ont aussi très vite compris qu'on avait tout compris. Donc, ils n'avaient pas vraiment besoin d'être très clairs. On était assez lucides. Nous-mêmes, on leur avait dit qu'on était totalement contre l'acharnement thérapeutique, qu'on ne voulait pas qu'à un moment donné... Trop, c'était trop. Et qu'on ne voulait pas que ça devienne des essais cliniques. Si à un moment donné, il fallait que ça s'arrête, il fallait que ça s'arrête, mais qu'on ne pouvait pas rester comme ça éternellement, que ce n'était pas possible pour personne. Donc, ils ont adapté leur discours, mais je pense qu'ils l'ont adapté comme à tous parents. Et je dirais même que finalement, ils n'ont peut-être pas eu besoin de l'adapter tant que ça avec nous, parce qu'ils voyaient bien que... On avait les reins solides et qu'on n'était pas dans le déni et qu'on savait que potentiellement ça pouvait s'arrêter et on était préparés à ça. On a eu un psychologue à disposition dès le début, on nous a proposé que ce soit à Angers, que ce soit à Nantes. Moi j'y suis pas beaucoup allée. Parce que je préférais écrire quand j'avais envie d'écrire que de parler quand on me proposait de parler. D'aller voir un psy, tu es obligé de prendre rendez-vous quand même, même si c'est à l'hôpital, même s'ils sont dans le même couloir que toi, il faut prendre rendez-vous. Et moi, j'aurais voulu ouvrir la porte, claquer la porte, parler, pleurer, refermer la porte et me barrer. Ce n'est pas comme ça que ça se passe. Donc, je le faisais d'une autre manière. J'écrivais, je chantais, peu importe. Mais je n'allais pas voir le psy. Le papa de ma fille, il n'y a pas été beaucoup non plus. Et pour Nathanaël, il y a quand même des choses qui sont vraiment chouettes de mis en place. Le CESAD à Angers, par exemple, c'est un organisme où il y a des psychologues qui sont mis à disposition pour les familles des malades, qui peuvent intervenir dans l'école des frères et sœurs ou même dans l'école du malade. Et Stéphanie est venue chez nous, au départ sans que Nathanaël le demande, puis Nathanaël a demandé à ce qu'elle revienne. Et donc cette personne vient chez vous, dans le quotidien de l'enfant, dans sa chambre, et se met à discuter avec le frère ou la sœur. Et en l'occurrence, je trouve que c'est un dispositif qui est quand même vraiment intéressant, parce que... L'enfant est en confiance, il est chez lui. Donc même si c'est une inconnue, il se met plus facilement à discuter, il joue dans sa chambre. Elle commence par avoir une approche, allez on joue ensemble, on joue au Lego, peu importe. Et puis finalement, il se met à parler, il avait 5 ans, donc on ne peut pas demander à un enfant de 5 ans d'exprimer ses émotions pures. Donc la méthode est quand même très bien adaptée. Et il y a quelques mois... Il m'a reparlé de cette personne et donc on l'a contactée et elle est quand même revenue. Donc tout ça se fait gratuitement. Vraiment, c'est très confortable en plus parce qu'on ne se pose pas la question si oui ou non on peut le faire. Parce qu'à ce moment-là, tout est compté. On ne paye rien, la personne se déplace chez nous. Elle est revenue voir Nathanaël, ils ont rediscuté ensemble. Vraiment un dispositif incroyable. Donc lui avait cette possibilité-là.
- Abigaïl
C'est vrai que c'est une force que la personne vienne à domicile, parce que dans les cabinets, ça peut être intimidant. On n'a pas la même parole, surtout pour les enfants.
- Stéphanie
C'est ça. Déjà, nous, en tant qu'adultes, des fois, c'est un peu malaisant. La preuve, je n'y suis pas allée. Donc, un enfant de 5 ans, clairement, ce n'était pas la meilleure solution. Donc là, vraiment, qu'elle vienne à la maison, c'était vraiment bien.
- Abigaïl
Et du coup, est-ce que tu veux bien qu'on revienne sur la fin du parcours de soins d'Alba ? Bien sûr. Donc du coup, tu la sentais décliner, et comment ça s'est passé sur les derniers jours ?
- Stéphanie
Alors, ce qu'il faut savoir déjà, pour resituer un petit peu... Quand on est arrivé en réanimation le 5 octobre 2019 au diagnostic de la maladie, on est arrivé en réanimation pédiatrique à Nantes, dans une chambre stérile, plus ou moins stérile, avec un sas, et la chambre après le sas, où là on devait mettre charlotte, tenue, etc. Et quand on est revenu en réanimation pédiatrique à la fin du parcours, On est retournés dans cette même chambre. Donc on a débuté à l'endroit où on a terminé l'histoire. Donc déjà ça, un moment un peu compliqué à gérer en se disant, merde, on est de retour. La réanimation, personne n'aime la réanimation. Bon, un peu compliqué à gérer. Et puis, comment on l'a géré ? J'ai envie de dire qu'on... Alors, à ce moment-là, quand elle est arrivée en réanimation pour les penchements cardiaques... On était convaincus que ça allait se passer comme les médecins nous l'avaient dit, c'est-à-dire le drain, on voyait que l'eau coulait du drain, que ça fonctionnait, qu'elle récupérait. On s'est dit bon ben c'est bon, enfin voilà, petit aparté, allez on laisse ça de côté, on va repartir en oncologie. Et à partir du moment où les poumons ont commencé à lâcher, on s'est dit ah ouais là ça va commencer à faire beaucoup. Il faut quand même savoir que... Durant le combat, Alba a eu des champignons au cerveau. On a eu un traitement pour ça. Ce traitement-là, du moins ce qu'elle a eu au cerveau, c'était très compliqué à traiter. Donc elle a eu plusieurs protocoles. Et je pense que c'est cette bactérie-là qui a engendré tout un tas de difficultés. Donc, encore une fois, on n'est pas sur la maladie, on est sur... d'autres choses qui viennent se rajouter et qui engendrent son lot de difficultés. Et quand elle a commencé à décliner sur le plan respiratoire, là, on passait beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps avec elle. Plus que quand elle était éveillée. Quand elle était sédatée, on était tout le temps à son chevet. Là, j'avais le droit au bouquin, donc je passais énormément de temps dans sa chambre à bouquiner. Et à la fois, c'était très compliqué à gérer parce qu'elle était intubée et donc impossible de la prendre.
- Abigaïl
C'est justement ça, je voulais t'emmener sur ce terrain parce qu'il y a eu tout un moment du parcours de soins où tu la prenais dans tes bras sans difficulté, malgré tous les branchements, la sonde, sans aucun problème. Mais là, j'imagine qu'à ce moment-là, tu ne pouvais plus porter ton bébé. Ça, mais ça doit être...
- Stéphanie
Pendant tout le parcours de soins, l'équipement, c'était devenu une habitude. Donc, on gérait totalement. C'est moi qui branchais ses scopes. Elle était toujours attachée à un fil ou deux par rapport aux machines, aux pompes, aux médicaments. Sur Instagram, on nous voit en train de danser. C'était notre quotidien. Tous les jours, on mettait la musique. On dansait sur du Kassav', sur du Diam's, sur n'importe quoi. Elle adorait ça. Je l'avais tout le temps dans les bras, elle était tout le temps avec moi, sauf quand elle dormait. En réanimation, c'est vrai que je ne m'en suis pas rendue compte tout de suite. Parce qu'au départ, tu es focus sur le fait qu'il faut qu'elle aille mieux. Donc, c'est pour son bien, tu ne la prends pas dans tes bras. Puis finalement, les semaines passent, parce qu'on parle de semaines en réanimation. Et en fait, tu te rends compte qu'elle décline et qu'en plus de ça, il n'y a plus d'interaction et qu'il n'y a plus de contact. Et que les seules fois où on te dit "Vous voulez la prendre", c'est un parcours du combattant. On finit par réussir à me la mettre dans les bras. Et puis au bout de 5-10 minutes, elle est inconfortable. Donc on la remet dans son lit. Et en fait, finalement, ça a été frustrant pour moi. Ça a été douloureux pour elle. Et personne n'a pris plaisir. Et en fait, c'est bien mieux qu'elle reste allongée. Donc, ouais, c'est... Oui, c'est compliqué et je pense que c'est d'ailleurs une des choses que j'ai pas encore bien digérée. C'est que quand j'en ai vraiment profité, elle était déjà plus là, en fait. Donc, ouais, quand je l'ai repris dans les bras, c'était la fin. Donc, finalement, elle était apaisée. Et moi aussi. avec du recul. Mais oui, la réanimation, pour ça, c'est hyper frustrant. Tous les traumatismes sont en réanimation parce que finalement, en oncologie, il y a eu des hauts et des bas, bien sûr, mais la réanimation, c'est un service où il se passe tellement de choses. Je me suis vue avoir un traumatisme du réveil. C'est-à-dire que le téléphone qui sonne en pleine nuit, je l'ai eu deux fois pour me dire on doit l'intuber, elle est en détresse, ou tu sors de ton lit, tu dors à l'étage du dessus parce que c'est le confinement et que tu es dans un service où ils t'ont trouvé une chambre dispo. Tu descends, un trombe, en pyj', il n'y a plus d'intimité à l'hôpital. Tu vis avec le corps médical, ils te connaissent par cœur et ils savent très bien qu'il n'y a pas d'effort. Et t'arrives là, et maintenant mon téléphone, il sonne en pleine nuit. C'est compliqué pour moi. Ça n'est pas arrivé et je ne me le souhaite pas parce que c'est difficile à gérer. Donc oui, le contact physique avec son enfant, c'est quelque chose qui n'est pas simple quand ce n'est plus possible en tout cas.
- Abigaïl
Comment on fait en tant que parent ? Perdre son enfant, c'est vraiment ce qu'on ne peut même pas imaginer. C'est ce qu'il y a de pire. Comment on fait pour... pour avancer petit pas à petit pas, jour après jour, juste après. Qu'est-ce que tu aimerais dire à des parents qui traverseraient la même chose ?
- Stéphanie
Alors, c'est vrai que chaque personne et chaque situation est vraiment différente. Moi, je sais que ma fille... Ça a été la rencontre de ma vie. En fait, j'étais quelqu'un d'assez lucide, j'avais une vie totalement lambda, comme tout le monde. J'avais une belle maison, un conjoint, des enfants, un chien, des poules, tout ce qu'il y a de plus banal et à la fois luxueux. J'avais une belle vie. Et en fait, on ne se rend pas compte à quel point la vie, elle est... Elle est belle et à quel point on a une chance inouïe d'être en vie et d'être en bonne santé. C'est quelque chose qu'on acquiesce dès la naissance, d'être en bonne santé. On nait et on vit et c'est totalement classique et normal. Mais pas tant en fait, il faut vraiment qu'on prenne le temps de se rendre compte à quel point c'est une chance de vivre et à quel point la vie est belle. et je pense que j'avais besoin qu'on vienne réveiller ça chez moi j'avais besoin d'entendre d'une certaine manière parce qu'Alba ne m'a jamais parlée mais j'avais besoin de comprendre que bah qu'en plus de savoir que la vie est belle elle n'est pas forcément toujours longue et que et que vivre le passé quand on a Un passé compliqué où vivre le futur parce qu'on aimerait un futur meilleur, c'est pas la vie, et que la vie c'est le présent. Et moi clairement, quand Alba est partie, j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps, j'ai eu l'impression d'avoir un trou béant dans la poitrine, je... c'était... voilà, c'était... extrêmement douloureux et je souhaite ça à personne. Par contre, j'avais deux alternatives. Soit je gâchais ce qu'elle avait vécu en voulant ne plus vivre la vie que j'avais. Soit je me battais parce que j'estimais qu'elle ne s'était pas battue elle pour rien. Que si elle, elle n'avait pas gagné son combat, peut-être qu'en fait ce n'était pas ça son combat. Son combat c'était peut-être simplement de faire en sorte que moi, sa maman, je vive et pleinement et que je sois heureuse. Et donc, c'est peut-être totalement utopique comme analyse, mais moi c'est celle que j'ai décidé de choisir. Je me suis dit ok, donc c'est une âme. qui est venue se loger dans mon ventre, en se disant, je vais choisir une vie courte, dans laquelle je vais éveiller une autre âme qui a besoin d'être réveillée, et puis je partirai et j'irai éveiller quelqu'un d'autre. Et grâce à cette façon de voir les choses, je me dis que je vis pour deux, et que... Et qu'elle a eu la force de vivre tout ce qu'elle a vécu, j'ai bien la force de vivre. Et puis j'ai mon fils aussi. Nathanaël, il a besoin de sa maman. Il a besoin d'une maman en forme, il a besoin d'une maman en bonne santé, il a besoin d'une maman heureuse, il a besoin d'une maman vivante. Et clairement, je remercie ma fille tous les jours d'avoir fait de moi celle que je suis aujourd'hui. Vraiment. Donc si j'ai un conseil à donner aux parents qui vivent cette situation, qui ont un enfant malade ou qui ont un enfant décédé d'une maladie, ou d'un enfant décédé tout court, parce que finalement la finalité de l'histoire reste la même, c'est de se dire que eux, ils ont déjà perdu la vie, et que ce n'est peut-être pas nécessaire de multiplier les échecs, et qu'on peut vivre par procuration, et que s'ils ont d'autres enfants, ils ont besoin d'eux, et que s'ils n'ont pas d'autres enfants, Eh bien, il est temps de faire autrement et de profiter de la vie différemment. Et on est riches de sens, en fait, aujourd'hui, ces gens-là. C'est qu'on a la chance de se dire qu'on a conscience du coût de la vie. Moi, je me sens tellement chanceuse de savoir ce que la vie vaut. Et ce n'est pas donné à tout le monde.
- Abigaïl
Est-ce qu'il y a quelque chose que tu aurais aimé savoir dès le début et qu'est-ce qui t'a aidé à traverser l'épreuve ?
- Stéphanie
Quelque chose que j'aurais aimé savoir dès le début ? Alors non, je pense que je ne saurais pas répondre à cette question. Parce que s'il y a des choses que je... S'il y a des choses que j'avais su dès le début, peut-être que j'aurais pas appréhendé les étapes de la même façon. Là, à chaque étape, c'était l'inconnu. Et donc, on se donne à 1000% dans l'inconnu. On cherche pas, on sait rien, donc on fait confiance. Je pense qu'il est très important de faire confiance au corps médical. Et pourtant... On ne m'a pas écoutée tout de suite et c'est peut-être une des seules choses qui m'a mise en colère au départ. Mais j'ai fait confiance aux personnes qui nous ont suivies à l'hôpital. Et si j'ai quelque chose à dire, vraiment, c'est de se faire confiance et de faire confiance aux équipes et de devenir une team, vraiment d'être un acteur principal. Moi j'ai été médecin, clairement, pendant cette période. Il y a eu des fois où je me suis pris pour Docteur House, mais clairement.
- Abigaïl
Ça c'est intéressant, comment tu as été acteur ? Parce que du coup, c'est vraiment l'axe du podcast, c'est pour être acteur de ses soins. Moi je suis vraiment convaincue qu'on peut être acteur de ses soins et que ce n'est pas une bonne chose de les subir, qu'il faut y prendre part, qu'en effet on est une team et qu'à titre individuel, on a plein de choses à mettre en place. Alors du coup, c'est intéressant. Comment tu as fait pour être acteur du parcours d'Alba ?
- Stéphanie
Les médecins, le fait qu'ils fassent les débriefs dans la chambre, c'est quand même plutôt bien. Parce que nous, même si bien sûr au départ il y a énormément de termes qu'on ne comprend pas, on finit par tous les comprendre. Ça finit, le jargon médical devient totalement logique pour nous. Et puis finalement, quand on se retrouve dans une situation comme en réanimation, où on est un peu parfois dans l'impasse de traitement, où tu les entends dire ça, ça a fait effet sur ça, oui mais ce traitement là, ça a fait effet sur ça. Et là toi, tu sais pas d'où ça sort et tu leur dis oui mais regardez ce traitement là, ça avait fait effet sur ça, est-ce qu'il n'y a pas quelque chose qui croise des molécules de ça et de ça pour faire ça ? Et là, il y a un blanc. Et on te dit, c'est pas bête. Et toi, t'es là, c'est moi qui ai dit ça ? Et en fait, cette analyse qui est totalement innocente, où nous, on sort totalement de ce cadre médical, on a une logique qui se met en place, on creuse avec eux, et finalement, ça nous amène parfois à des tests de solutions qui peuvent porter leurs fruits.
- Abigaïl
Et puis tu as une connaissance de ton enfant que les médecins n'ont pas.
- Stéphanie
Exactement.
- Abigaïl
Ça c'est une énorme force.
- Stéphanie
Exactement, et je pense même que j'ai, qu'on a régulièrement traduit ce qu'Alba avait envie d'exprimer.
- Abigaïl
Ça c'est intéressant, qu'est-ce qu'elle avait envie d'exprimer ?
- Stéphanie
Il y a eu beaucoup, beaucoup de moments où on a senti les médecins un peu paniqués, un peu... dans l'impasse et Et Alba a souvent exprimé, leur a souvent exprimé, faites-vous confiance, ça va le faire. Souvent. Il y a eu des fois où Jean-Eudes, un médecin de réanimation, est resté bloqué, le briefing était terminé, et il reste bloqué, il la regarde comme ça. Et puis à un moment donné, je lui regarde, je lui dis, ça va ? Et il relève la tête, il était là, ouais, ouais, ouais. Non, mais Alba, ça suffit maintenant. On arrête. Et donc là, je le regarde, je dis, je ne saurais pas ce que vous vous êtes dit. Il dit, non, c'est entre nous. Et en fait, elle avait cette capacité à les apaiser, à leur dire, tout va bien. On gère, ça va le faire. Et ça, c'est quelque chose que tout le monde nous a dit. Dans son regard, elle savait nous apaiser. Et je pense que ça a été aussi un élément important dans le combat. C'est qu'elle était hyper sereine, tout le temps. Et c'est pour ça que ça me pousse à penser que, finalement, elle était vraiment de passage. Je n'ai pas eu l'impression qu'elle ait, entre guillemets, souffert. Il y a eu des moments d'intense douleur, bien sûr. Mais elle avait cette vieille âme, ce regard de personne qui avait déjà vécu mille vies. Et elle savait exactement quoi dire, quoi faire. Ouais, sans jamais avoir dit un seul mot.
- Abigaïl
Oui, c'est ça, t'avais pas la connexion avec la parole, mais t'avais la connexion autrement, t'arrivais à la comprendre.
- Stéphanie
Totalement, totalement. Et je pense même que des gens qui se parlent, parfois, peuvent moins bien se comprendre que nous avec le regard, quoi. Vraiment, c'était incroyable. Et même à travers les réseaux sociaux. Moi, les personnes qui me suivaient au quotidien, j'ai des milliers de commentaires qui disent non mais ce regard Alba, même à distance, elle avait un pouvoir sur eux. C'était fou. C'était fou, vraiment.
- Abigaïl
Quelle est pour toi l'utilité et l'apport du témoignage ? Aujourd'hui, si tu es sur le podcast, c'est que tu as envie de transmettre, de partager le parcours d'Alba. Pourquoi ? Pour toi, ça signifie quoi tout ça ?
- Stéphanie
Moi aujourd'hui, cette période de ma vie, je ne veux absolument pas l'oublier parce que ça a été une renaissance. Je n'ai jamais été aussi vivante, cette phrase, je sais que ça avait marqué certaines personnes, que depuis que ma fille est décédée. C'est totalement contradictoire. Et donc, ce que j'ai ressenti et ce que je ressens encore aujourd'hui, j'aimerais que ce soit le parcours de tous parents endeuillés. Parce qu'aujourd'hui, je peux en parler, entre guillemets, facilement. Je ne pleure plus tous les jours, je ne pleure plus toutes les semaines, voire parfois je ne pleure plus tous les mois. C'est quand même une chance. et je bois le verre à moitié plein et j'ai envie que chacun et chacune puisse ressentir et boire le verre à moitié plein parce que, encore une fois, la vie, elle mérite d'être vécue et que si on est encore là aujourd'hui, c'est qu'on a des raisons et que... Et si moi on m'a apporté une âme aussi belle que celle de ma fille, c'est sans doute que j'ai un travail à faire derrière. Le travail ne s'arrête pas là pour elle. C'est que ce qu'on a vécu ensemble, il faut le transmettre. Je ne peux pas le garder pour moi, c'est trop fou ce qui s'est passé. C'est magique en fait, ma fille elle est magique. Je ne sais même pas comment l'exprimer en fait. Je suis tellement reconnaissante de l'avoir vue, de l'avoir rencontrée, de l'avoir côtoyée pendant tous ces mois, que j'espère que chaque personne qui m'écoutera, qu'ils soient parents avec des enfants en bonne santé ou non, se disent, à partir de maintenant, je vais avoir conscience que j'ai de la chance d'avoir des enfants en bonne santé, j'ai de la chance d'avoir... D'être en bonne santé, j'ai de la chance d'avoir un toit, j'ai de la chance d'avoir des amis, tout est une chance en fait. On vit dans une société où on a tellement de mal à avoir le positif. que moi, il faut que je transmette ça. Parce que sinon, on va dans le mur. Les gens s'éloignent. Et donc, je me dis, ce qu'elle a éveillé en moi, il faut absolument que je le partage. Parce que c'est trop beau. Et donc, aujourd'hui, je veux absolument continuer de transmettre ce qu'elle a pu, elle, nous transmettre. dans ces 18 mois de passage.
- Abigaïl
Et du coup, tu as envie de raconter tout ça dans un livre. Je trouve ça trop, trop beau.
- Stéphanie
Oui, clairement, j'ai envie de transmettre ça dans un livre, dans différents livres même. Non pas que je vais écrire une saga, parce que je n'en aurai pas assez à raconter. Mais j'aimerais retranscrire Radio Alba. J'aimerais pouvoir... apporter un support à des parents qui sont à l'hôpital et qui sont paniqués, qui ne savent pas comment prendre certaines situations. Et je me dis qu'en exprimant mon ressenti derrière Radio Alba, parce que tout le monde le sait, Alba n'a jamais réécrit véritablement Radio Alba. Désolée si certains le croyaient, mais c'était moi ! le suspens est levé. Et donc, je me dis, si j'exprime Radio Alba et qu'à la fois, j'exprime ce qui se passait en off pour moi, dans ma tête, à ce moment-là, peut-être que ça peut aider d'autres parents à vivre des moments. On aura forcément des moments de similitude dans le combat. Et donc, je me dis, si je peux leur apporter et des clés et un peu de gaieté, parce que finalement, mes posts étaient très légers, Pour moi, j'ai tout gagné. Et puis, j'aimerais écrire d'autres formats. J'aimerais écrire d'autres formats. Je pense que je suis... Je ne dirais pas que je suis fainéante. Ce n'est pas le cas du tout. Mais je me remets à écrire à chaque fois que je prends un petit coup de pied aux fesses. Donc, non pas que j'aime bien qu'on mette des coups de pied aux fesses, mais il faut vraiment que je trouve le courage d'être assidue là-dedans parce que j'aimerais vraiment que ça naisse. Et je sais qu'en plus, elles sont nombreuses. Je mets au féminin parce que ma communauté est principalement féminine, même si j'ai quelques potes virtuels masculins. Mais je sais qu'elles sont nombreuses. à vouloir le lire. Et parce que je pense qu'il est important que je pose ma pierre à l'édifice.
- Abigaïl
Aujourd'hui, est-ce que tu es dans des associations de parents ? Est-ce que tu as ressenti ce besoin ? Parce qu'on sent que ta volonté de transmettre est forte. Et c'est pour ça que tu es aujourd'hui à ce micro et que tu as envie d'écrire. Et d'ailleurs, je t'encourage de tout cœur, ce serait vraiment génial que ça puisse voir le jour. Est-ce que tu ressens aussi le besoin à travers des associations ?
- Stéphanie
Alors, j'ai été aidée par une association, l'association Cassandra, dont la maman de Cassandra, Cassandra est décédée d'une maladie il y a quelques années, et nous a aidées à... payer les obsèques d'Alba, donc elle a fait partie de notre cagnotte. Je m'étais dit, après le départ d'Alba, que moi aussi, à un moment donné, j'oeuvrerais pour une association, à un moment donné, je mènerais des combats également. Jusqu'à présent, la reconstruction, c'est quelque chose qui prend du temps, et avant d'aider les autres, il faut s'aider soi-même. Donc j'ai pris d'abord le pari de me sauver moi. de me retrouver, d'être une femme avant d'être une maman endeuillée, de retrouver la vie que j'avais envie de mener. Aujourd'hui, je n'œuvre toujours pas dans des associations en particulier. Par contre, j'ai un métier qui œuvre pour des associations sociales. Et donc, je me dis finalement, étant donné que... J'ai mon fils, que je suis maman solo. Que le sport, c'est ma thérapie, que je travaille, je ne peux pas tout faire.
- Abigaïl
Tu fais quoi comme sport ?
- Stéphanie
Elles vont sur Instagram et diront « bah, elle fait tout ! » Oui, je sais, je fais tout. Mais je cours, je fais du vélo et je vais à la salle de sport. Et clairement, mes baskets, c'est mon psychologue. Ça me coûte 100 balles par an et dès que j'en ai envie, j'y vais. Et donc j'ai besoin de ce temps-là et ce temps-là prend du temps.
- Abigaïl
Le pouvoir de l'activité physique, mais moi je fais que de le répéter au sein des épisodes, c'est hyper hyper important, mais qu'on soit en parcours de soins ou pas du tout.
- Stéphanie
Exactement.
- Abigaïl
En fait, c'est essentiel.
- Stéphanie
Tout à fait. C'est essentiel. Et moi je sais que c'est quotidien, c'est mon échappatoire, j'en ai besoin. Et donc, si je veux gérer tout ça, j'ai pas le temps. Et je veux pas que de devoir oeuvrer pour une association devienne compliqué. et handicapant. Donc mon métier me permet de le faire sur mon temps de travail et de pouvoir faire tout le reste à côté. Donc je trouve que c'est déjà très bien.
- Abigaïl
Est-ce que tu vois quelque chose dont on n'aurait pas parlé et dont tu aurais aimé parler ? Je ne sais pas si on a fait le tour de la question.
- Stéphanie
Je pense qu'on a fait le tour de la question. Moi j'ai beaucoup été sur les réseaux sociaux, ce qui m'a permis de faire beaucoup de photos et de vidéos. C'est quelque chose qui après coup a une valeur inestimable. Quand on est dans le combat, dans l'euphorie de l'action, on n'y pense peut-être pas. Ça peut paraître glauque de faire des photos et des vidéos quand un enfant dort, sondé, intubé, peu importe. Mais en termes de process derrière, c'est hyper important. Donc si j'ai un conseil à donner aux parents, immortaliser chaque moment. Même s'ils peuvent paraître un peu glauques à certains passages, il faut les immortaliser quand même. Parce que... Aujourd'hui, cinq ans plus tard, je suis toujours à la recherche d'une photo ou d'une vidéo que j'ai oubliée, que je ne me souviens plus, et plus vous en faites, et plus vous aurez la possibilité de retomber sur ce genre de souvenirs. Donc, moi je sais que c'est quelque chose qui, pour moi, a été important, c'est d'avoir ce nombre incalculable de photos et de vidéos à revisualiser, et c'est génial. Et puis peut-être aussi prendre soin du corps médical, vraiment. L'équipe d'oncologie pédiatrique, on va pas se mentir, c'est hardcore. Et vraiment, ils sont incroyables. Et l'erreur est humaine. Malheureusement, on parle d'enfants malades. C'est sûr que si un garagiste fait une erreur, c'est pas la même chose, mais malheureusement tout le monde peut faire des erreurs. On a tous nos humeurs, on a tous nos lots de difficultés quand on rentre à la maison, eux aussi. Et donc parfois, on n'est pas en forme, on est mal luné, que ce soit le corps médical ou les patients ou les parents des patients. Et vraiment, je mets un point d'honneur à dire qu'ils en chient, pas autant que nous, mais presque, parce qu'ils s'attachent aussi à ces enfants. Moi, je leur laissais Alba la nuit, je leur laissais Alba au sieste. Il y a eu des journées entières où elles nous disaient, allez, papa et maman, vous partez, vous faites une journée ensemble et on s'occupe d'Alba toute la journée. Enfin, voilà, on ne s'en rend pas compte, mais ils encaissent. Nous, on a perdu une infirmière en réanimation, Edwige, qui s'en était occupée à l'aller. et qui était incapable de s'en occuper au retour parce qu'elle avait conscience qu'on allait droit dans le mur et qu'en fait elle se protégeait parce qu'elle savait qu'elle aussi allait droit dans le mur si elle restait avec nous. Donc c'est des êtres humains avec un cœur et vraiment c'est des super héros. Ils sont blindés, mais nous c'était les tatas et les tontons, ils sont incroyables. Donc voilà, je voulais juste les mettre un peu en lumière parce que... Ils ne sont pas là par obligation, ils sont là par conviction. Et donc, si vous voulez que l'expérience se passe bien, il faut en prendre soin.
Merci pour les soignants. Ce n'est pas souvent qu'on entend des choses aussi fortes. Mais merci parce que oui, c'est 10 000 fois vrai. C'est très dur. Et puis oui, je voulais revenir sur ce que tu disais juste avant sur les réseaux sociaux. C'est vrai que toi, ça a été ton moyen de donner des nouvelles à tout le monde. Parce que ça, c'est vrai qu'on en a parlé avant que je mette en route l'enregistreur. Mais c'est vrai qu'au début, tu étais assaillie d'appels. Et en fait, on ne se rend pas compte. Mais c'est vrai que de donner des nouvelles à chaque personne de l'entourage par téléphone, c'est une charge mentale et un temps pas possible. Et en même temps, c'est normal, tu es l'entourage proche, tu as envie d'avoir des nouvelles, d'être au plus proche, de soutenir. Et c'est vrai qu'il faut trouver des parades pour informer tout le monde sans que... toi qui es la tête dans le guidon, ça te prenne beaucoup trop de temps. Et c'est vrai que moi, une astuce que j'avais partagée sur un autre épisode, c'était les groupes WhatsApp. Et c'est vrai que ça peut être les réseaux sociaux, ça peut être un groupe Instagram, peu importe, il faut trouver sa manière de faire et sa manière qui convienne. Et en effet, c'est des mines d'or, toutes ces photos, toutes ces vidéos, et il n'y a rien de glauque. C'était ta vie à ce moment-là.
- Abigaïl
C'était ta vie à ce moment-là, voilà. C'était la tienne à ce moment-là. Et c'est vrai qu'il ne faut pas oublier. Et c'est chouette le témoignage que tu nous partages aujourd'hui parce que c'est la mémoire d'Alba.
- Stéphanie
Exactement. C'est sa mémoire. Et à travers ce podcast, je la refais vivre encore un peu. Et même si aujourd'hui, j'ai bien conscience que je ne peux pas la faire vivre comme ça au quotidien, je ne pourrais pas, et encore que, si j'étais amenée à devoir faire des séminaires ou parler de la maladie, j'en parlerais peut-être tous les jours, mais le fait de faire des podcasts comme ça ponctuellement, ça me permet, moi, de me replonger un peu dans ces souvenirs que, mine de rien, je n'ai pas du tout envie d'oublier, même s'ils sont douloureux. Et puis, c'est un peu aussi une manière de... Voilà. de la faire revivre le temps d'une heure de podcast ? Eh bien,
- Abigaïl
1h30, pour préciser.
- Stéphanie
Zit ! On en a peut-être perdu en cours de route ?
- Abigaïl
Non, je ne pense pas.
- Stéphanie
Non.
- Abigaïl
Non, non, non. Mais en tout cas, mille merci pour ton partage, Stéphanie. C'était vraiment super que tu puisses nous partager tout ça. Et je suis persuadée que ça va aider beaucoup de parents qui sont dans la difficulté, dans les parcours de soins. Et voilà, c'est important de montrer qu'on peut s'en relever aussi.
- Stéphanie
On peut se relever de tout, c'est ce que je dis souvent, mais c'est vrai. C'est une phrase un peu bateau, mais...
- Abigaïl
Et ça paraît impossible sur le moment, et pourtant...
- Stéphanie
Et pourtant c'est faisable. Et j'ai une amie qui m'avait dit, « Non mais là Steph, t'as l'impression que t'y arriveras pas, mais d'ici quelques temps, tu te rendras compte que finalement, c'était pas si loin.." Et elle avait tellement raison. Parce que quand on veut, on peut. Et il faut vraiment se dire qu'on a tout ce qu'il faut à l'intérieur de nous pour y arriver. Il suffit juste d'être attentif aux détails, au sens des choses. Rien n'arrive par hasard, c'est ma façon de penser. Mais croyez mon expérience, j'en suis là où j'en suis. Donc vraiment, parfois, il suffit d'un rien. Et puis quand on a l'impression que finalement ça s'acharne, c'est qu'on n'a pas répondu à toutes les questions. Et donc au lieu de se dire, c'est pas possible, le sort s'acharne, essayez de vous dire, ok, qu'est-ce qu'il faut que je comprenne ? Prenez le problème dans l'autre sens, prenez le problème comme une solution. Et à partir de là, je pense que vous irez sur le bon chemin.
- Abigaïl
En tout cas, mille merci Stéphanie.
- Stéphanie
Avec plaisir.
- Abigaïl
Mille merci pour ton partage, la mémoire d'Alba qu'on a fait vivre à travers cet épisode et merci pour son accueil et puis pour cette discussion très enrichissante et très plaisante..
- Stéphanie
C'était un vrai plaisir et n'hésitez pas sur les réseaux moi je ne suis pas quelqu'un qui estsur les réseaux juste pour avoir des abonnés donc si vous avez envie de discuter de votre parcours de combat c'est avec plaisir que je pourrais échanger avec vous si vous voulez plus de détails tu veux dire le nom de ton compte peut-être ? Mlle Stéphanie, on identifiera ça sur les réseaux.
- Abigaïl
Oui, ça marche. En tout cas, mille merci. Et puis, merci pour ton temps. Merci pour cet épisode très riche et pour l'aide que tu vas apporter aux autres parents. Merci Stéphanie. Petite note de fin d'épisode pour vous rappeler que vous pouvez télécharger le cadeau gratuit que j'ai créé pour vous. Il s'agit d'une feuille très pratique pour les patients et qui permet la prise de notes entre deux passages dans le service hospitalier. Le but de cette ressource est de faciliter la communication avec l'équipe de soins et de ne pas oublier les choses à dire en consultation. Vous pourrez y signaler vos symptômes, vos éventuels effets indésirables et notez toutes vos questions à poser aux différents professionnels du service. J'espère que cette ressource vous aidera dans votre prise en charge et vous trouverez le lien pour la télécharger gratuitement en note de l'épisode ainsi que sur la page Instagram. Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de canc'Héros. Si le contenu vous a plu, n'hésitez surtout pas à le partager auprès de patients de votre entourage qui pourraient en avoir besoin. Vous pouvez aussi mettre 5 étoiles sur Apple Podcast et Spotify, ainsi qu'un commentaire sur Apple Podcast. Ça aide vraiment à rendre le podcast canc'Héros plus visible et à aider un maximum de patients. Mille merci à ceux qui prendront le temps de le faire. Si vous souhaitez me contacter pour me faire des retours sur les thèmes que vous aimeriez que j'aborde, me faire part de vos problématiques ou tout simplement me raconter votre histoire, c'est sur la page Instagram du podcast que ça se passe, à canc.heros, c-a-n-c.h-e-r-o-s, ou sur la page Facebook canc'Héros Podcast. Je vous souhaite une très belle journée, prenez bien soin de vous et à bientôt !