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Carpediem

Nuit de Noël | Guy de Maupassant 🎄

Nuit de Noël | Guy de Maupassant 🎄

11min |25/12/2024
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Nuit de Noël | Guy de Maupassant 🎄

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11min |25/12/2024
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Description

En ce jour de Noël, je vous invite à découvrir une nouvelle de Guy de Maupassant intitulée "Nuit de Noël." Dans ce récit bref, l'auteur nous offre une chute inattendue, comme lui seul sait le faire, qui ne manquera pas de vous surprendre. Fidèle à son style, Maupassant construit son récit avec finesse pour nous tenir en haleine jusqu'à la dernière ligne, et, comme toujours, il ne déçoit pas. Vous allez ainsi écouter "Nuit de Noël", publiée dans le recueil Mademoiselle Fifi le 6 décembre 1882. Plongez dans l'univers riche et captivant de l'un des grands maîtres de la nouvelle française.


Bonne écoute :)🍀


Contact : xupazcarpediem@gmail.com


Musique : Once again - Musique libre de droits de https://audiohub.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Coucou tout le monde, c'est Xulia. Aujourd'hui est un jour spécial. Il va donc de soi qu'il s'accompagnera d'un épisode de lui aussi particulier. Ainsi, trêve de Charles Perrault, pour le moment du moins, car en ce jour de Noël, je souhaitais vous partager une nouvelle qui se trouve être parfaitement dans le thème.

  • Speaker #1

    C'est l'histoire d'un certain Henri Templier qui ne souhaite pas,

  • Speaker #0

    non ne veut pas, réveillonner pour Noël. Plus jamais, nous dit-il même. Vous écouterez dans cet épisode, Nuit de Noël, une nouvelle rédigée par M. Guy de Maupassant et publiée le 26 décembre 1882 dans le recueil de Mademoiselle Fifi. Je vous laisse avec la suite de l'histoire. Bonne écoute !

  • Speaker #1

    Le réveillon, le réveillon, ah mais non, je ne réveillonnerai pas ! Le gros Henri Templier disait cela d'une voix furieuse, comme si on lui eût proposé une infamie. Les autres rien s'écrièrent. Pourquoi te mets-tu en colère ? Il répondit, parce que le réveillon m'a joué le plus sale tour du monde et que j'ai gardé une insurmontable horreur pour cette nuit stup... Pide de gaieté, imbécile ! Quoi donc ? Quoi ? Vous voulez le savoir ? Eh bien, écoutez. Vous vous rappelez comme il faisait froid, voici deux ans à cette époque. Un froid a tué les pauvres dans la rue. La Seine gelait, les trottoirs glassaient les pieds à travers les semelles des bottines. Le monde semblait sur le point de crever. J'avais alors un gros travail en train et je refusais toute invitation pour le réveillon, préférant passer la nuit devant ma table. Je dînais seule, puis je me mis à l'œuvre. Mais voilà que, vers dix heures, la pensée de la gaieté courant Paris, le bruit des rues qui me parvenaient malgré tout, les préparatifs de souper de mes voisins, entendus à travers les cloisons, m'agitèrent. Je ne savais plus ce que je faisais, j'écrivais des bêtises, et je compris qu'il fallait renoncer à l'espoir de produire quelque chose de bon cette nuit-là. Je marchais un peu à travers ma chambre, je m'assis, je me relevais. Je subissais certes la mystérieuse influence de la joie du dehors, et je me résignais. Je sonnais ma bonne et je lui dis Angèle, allez m'acheter de quoi souper à deux, des huîtres, un paire de roux froids, des écrevisses, du jambon, des gâteaux. Montez-moi deux bouteilles de champagne, mettez le couvert et couchez-vous. Elle obéit, un peu surprise. Quand tout fut prêt, j'endossais mon pardessus et je sortis. Une grosse question restait à résoudre. Avec qui allais-je réveillonner ? Mes amis étaient invités partout. Pour en avoir une, il aurait fallu m'y prendre d'avance. Alors je songeais à faire en même temps une bonne action. Je me dis, Paris est plein de pauvres et belles filles qui n'ont pas un souper sur la planche et qui errent en quête d'un garçon généreux. Je veux être la providence de Noël d'une de ses déshérités. Je vais rôder et entrer dans les lieux de plaisir, questionner, chasser, choisir à mon gré. Et je me mise à parcourir la ville. Certes, je rencontrais beaucoup de pauvres filles cherchant aventure. Mais elles étaient laides à donner une indigestion, ou maigres à geler sur pied si elles s'étaient arrêtées. J'ai un faible, vous le savez, j'aime les femmes nourries. Plus elles sont en chair, plus je les préfère. Une colosse me fait perdre la raison. Soudain, en face du théâtre des variétés, j'aperçus un profil à mon gré. Une tête, puis par devant, deux bosses. Celle de la poitrine, fort belle, celle du dessous, surprenante. Un ventre-doigts grasse, orgeant frissonnet, murmurant, sacristie la belle fille. Un point me restait à éclaircir. Le visage, le visage c'est le dessert, le reste c'est, c'est le rôti. Je hâtai le pas, je rejoignis cette femme errante et sous un bec de gaz je me retournais brusquement. Elle était charmante, toute jeune, brune, avec de grands yeux noirs. Je fis ma proposition. qu'elle l'accepta sans hésiter. Un quart d'heure plus tard, nous étions attablés dans mon appartement. Elle dit en entrant : "Ah, on est bien ici !" Et elle regarda autour d'elle avec la satisfaction visible d'avoir trouvé la table et le gîte en cette nuit glaciale. Elle était superbe, tellement jolie qu'elle m'étonnait, et grosse à ravir mon cœur pour toujours. Elle ôta son manteau, son chapeau, s'assit et se mit à manger. Mais elle ne paraissait pas en train, et parfois sa figure un peu pâle tressaillait comme si elle eût souffert d'un chagrin caché. Je lui demandai Tu as des embêtements ? Elle répondit : "Ben, oublions tout". Et elle se mit à boire. Elle vidait d'un trait son verre de champagne, le remplissait et le revidait encore sans cesse. Bientôt, un peu de rougeur lui vint au joues et elle commença à rire. Moi, je l'adorais déjà, l'embrassant à pleine bouche, découvrant qu'elle n'était ni bête, ni commune, ni grossière comme les filles du trottoir. Je lui demandais des détails sur sa vie. Elle répondit : "Ah mon petit, cela ne te regarde pas." Hélas, une heure plus tard... Enfin, le moment vint de se mettre au lit. Et pendant que j'enlevais la table dressée devant le feu, elle se déshabilla vivement et se glissa sous les couvertures. Mes voisins faisaient un vacarme affreux, riant et chantant comme des fous. Et je me disais, j'ai eu rudement raison d'aller chercher cette belle fille, je n'aurais jamais pu travailler. Un profond gémissement me fit me retourner. Je demandais, qu'as-tu ma chatte ? Elle ne répondit pas, mais elle continuait à pousser des soupirs douloureux, comme si elle eût souffert. horriblement. Je repris. Est-ce que tu te trouves indisposée ? Et soudain, elle jeta un cri, un cri déchirant. Je me précipitais, une bougie à la main. Son visage était décomposé par la douleur, et elle se tordait les mains, haletante, en voyant du fond de sa gorge ces sortes de gémissements sourds qui semblent des râles et qui font défaillir le cœur. Je demandais éperdu : "Mais qu'as-tu, dis-moi, qu'as-tu ?" Elle ne répondit pas et se mit à hurler. Tout à coup, les voisins se durent. Écoutant ce qui se passait chez moi, elle balbutia : "Oh, mon ventre ! Mon ventre !" D'un seul coup, je relevais la couvertur, et j'aperçus... Elle accouchait, mes amis. Alors je perdis la tête, je me précipitais sur le mur que je heurtais à coups de poing de toute ma force en vociférant Au secours ! Au secours ! Ma porte s'ouvrit, une foule se précipita. chez moi. Des hommes en habit, des femmes décolletées, des pierrots, des turcs, des mousquétaires. Cette invasion m'avouait tellement que je ne pouvais même plus m'expliquer. Eux, ils avaient cru à quelques accidents. Un crime, peut-être. Ils ne comprenaient plus. Je dis enfin : "C’est... c’est... cette... cette femme qui... qui accouche." Alors tout le monde l'examina, dit son avis. Un capucin surtout prétendait s'y connaître et voulait aider la nature. Ils étaient gris comme des ânes. Je crus qu'ils allaient la tuer ; et je me précipitais nue tête dans l'escalier pour chercher un vieux médecin qui habitait dans une rue voisine. Quand je revins avec le docteur, toute ma maison était debout. On avait rallumé le gaz de l'escalier. Les habitants de tous les étages occupaient mon appartement. Quatre débardeurs attablés achevaient mon champagne et mes écrevisses. À ma vue, un cri formidable éclata, et une laitière me présenta dans une serviette un affreux petit morceau de chair guidée, plissée, géniante, miaulant comme un chat. Et elle me dit : "C'est une fille !" Le médecin examina la coucher, déclara douteux son état, l'accident ayant eu lieu immédiatement après un souper, et il partit en annonçant qu'il allait m'envoyer immédiatement une garde malade et une nourrice. Les deux femmes arrivèrent une heure après, apportant un paquet de médicaments. Je passais la nuit dans un fauteuil, troupe éperdue pour réfléchir aux suites. Dès le matin, le médecin revint. Il trouva la malade assez mal. Il me dit : "Votre femme, monsieur..." Je l'interrompis : "Ce n'est pas ma femme." Il reprit : "Votre maîtresse, peu importe." Et il énuméra les soins qu'il lui fallait, le régime, les remèdes. Que faire ? Envoyer cette malheureuse à l'hôpital ? J'aurais passé pour un manant dans toute la maison, dans tout le quartier. Je la gardai. Elle resta dans mon lit six semaines. L'enfant, je le voyais chez des paysans de Poissy. Il me coûte encore 50 francs par mois. Ayant payé dans le début, me voici forcé de payer jusqu'à ma mort. Et plus tard, il me croira son père. Mais pour comble de malheur, quand la fille a été guérie, elle m'aimait, elle m'aimait éperdument la gueuse. "Eh bien ?" "Eh bien, elle était devenue maigre comme un chat de gouttière. Et j'ai flanqué dehors cette carcasse qui me guette dans la rue, se cache pour me voir passer, m'arrête le soir quand je sors, pour me baiser la main, m'embête, enfin à me rendre fou. Et voilà pourquoi je ne réveillonnerai plus jamais.

  • Speaker #0

    Et voilà, nous arrivons à la fin de cet épisode. C'est peut-être un peu bizarre dit comme ça, mais je vous remercie d'avoir écouté la triste mésaventure, enfin triste, à vous de le décider, d'Henri Templier jusqu'au bout, et souhaitez encore vous remercier d'avoir suivi le début des aventures de ce podcast. Je vous souhaite de belles fêtes de fin d'année, prenez soin de votre famille et de vos proches, je reviendrai l'année prochaine avec de nouveaux épisodes. C'était Xulia. et vous avez écouté Carpediem.

  • Speaker #1

    Joyeux Noël !

Description

En ce jour de Noël, je vous invite à découvrir une nouvelle de Guy de Maupassant intitulée "Nuit de Noël." Dans ce récit bref, l'auteur nous offre une chute inattendue, comme lui seul sait le faire, qui ne manquera pas de vous surprendre. Fidèle à son style, Maupassant construit son récit avec finesse pour nous tenir en haleine jusqu'à la dernière ligne, et, comme toujours, il ne déçoit pas. Vous allez ainsi écouter "Nuit de Noël", publiée dans le recueil Mademoiselle Fifi le 6 décembre 1882. Plongez dans l'univers riche et captivant de l'un des grands maîtres de la nouvelle française.


Bonne écoute :)🍀


Contact : xupazcarpediem@gmail.com


Musique : Once again - Musique libre de droits de https://audiohub.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Coucou tout le monde, c'est Xulia. Aujourd'hui est un jour spécial. Il va donc de soi qu'il s'accompagnera d'un épisode de lui aussi particulier. Ainsi, trêve de Charles Perrault, pour le moment du moins, car en ce jour de Noël, je souhaitais vous partager une nouvelle qui se trouve être parfaitement dans le thème.

  • Speaker #1

    C'est l'histoire d'un certain Henri Templier qui ne souhaite pas,

  • Speaker #0

    non ne veut pas, réveillonner pour Noël. Plus jamais, nous dit-il même. Vous écouterez dans cet épisode, Nuit de Noël, une nouvelle rédigée par M. Guy de Maupassant et publiée le 26 décembre 1882 dans le recueil de Mademoiselle Fifi. Je vous laisse avec la suite de l'histoire. Bonne écoute !

  • Speaker #1

    Le réveillon, le réveillon, ah mais non, je ne réveillonnerai pas ! Le gros Henri Templier disait cela d'une voix furieuse, comme si on lui eût proposé une infamie. Les autres rien s'écrièrent. Pourquoi te mets-tu en colère ? Il répondit, parce que le réveillon m'a joué le plus sale tour du monde et que j'ai gardé une insurmontable horreur pour cette nuit stup... Pide de gaieté, imbécile ! Quoi donc ? Quoi ? Vous voulez le savoir ? Eh bien, écoutez. Vous vous rappelez comme il faisait froid, voici deux ans à cette époque. Un froid a tué les pauvres dans la rue. La Seine gelait, les trottoirs glassaient les pieds à travers les semelles des bottines. Le monde semblait sur le point de crever. J'avais alors un gros travail en train et je refusais toute invitation pour le réveillon, préférant passer la nuit devant ma table. Je dînais seule, puis je me mis à l'œuvre. Mais voilà que, vers dix heures, la pensée de la gaieté courant Paris, le bruit des rues qui me parvenaient malgré tout, les préparatifs de souper de mes voisins, entendus à travers les cloisons, m'agitèrent. Je ne savais plus ce que je faisais, j'écrivais des bêtises, et je compris qu'il fallait renoncer à l'espoir de produire quelque chose de bon cette nuit-là. Je marchais un peu à travers ma chambre, je m'assis, je me relevais. Je subissais certes la mystérieuse influence de la joie du dehors, et je me résignais. Je sonnais ma bonne et je lui dis Angèle, allez m'acheter de quoi souper à deux, des huîtres, un paire de roux froids, des écrevisses, du jambon, des gâteaux. Montez-moi deux bouteilles de champagne, mettez le couvert et couchez-vous. Elle obéit, un peu surprise. Quand tout fut prêt, j'endossais mon pardessus et je sortis. Une grosse question restait à résoudre. Avec qui allais-je réveillonner ? Mes amis étaient invités partout. Pour en avoir une, il aurait fallu m'y prendre d'avance. Alors je songeais à faire en même temps une bonne action. Je me dis, Paris est plein de pauvres et belles filles qui n'ont pas un souper sur la planche et qui errent en quête d'un garçon généreux. Je veux être la providence de Noël d'une de ses déshérités. Je vais rôder et entrer dans les lieux de plaisir, questionner, chasser, choisir à mon gré. Et je me mise à parcourir la ville. Certes, je rencontrais beaucoup de pauvres filles cherchant aventure. Mais elles étaient laides à donner une indigestion, ou maigres à geler sur pied si elles s'étaient arrêtées. J'ai un faible, vous le savez, j'aime les femmes nourries. Plus elles sont en chair, plus je les préfère. Une colosse me fait perdre la raison. Soudain, en face du théâtre des variétés, j'aperçus un profil à mon gré. Une tête, puis par devant, deux bosses. Celle de la poitrine, fort belle, celle du dessous, surprenante. Un ventre-doigts grasse, orgeant frissonnet, murmurant, sacristie la belle fille. Un point me restait à éclaircir. Le visage, le visage c'est le dessert, le reste c'est, c'est le rôti. Je hâtai le pas, je rejoignis cette femme errante et sous un bec de gaz je me retournais brusquement. Elle était charmante, toute jeune, brune, avec de grands yeux noirs. Je fis ma proposition. qu'elle l'accepta sans hésiter. Un quart d'heure plus tard, nous étions attablés dans mon appartement. Elle dit en entrant : "Ah, on est bien ici !" Et elle regarda autour d'elle avec la satisfaction visible d'avoir trouvé la table et le gîte en cette nuit glaciale. Elle était superbe, tellement jolie qu'elle m'étonnait, et grosse à ravir mon cœur pour toujours. Elle ôta son manteau, son chapeau, s'assit et se mit à manger. Mais elle ne paraissait pas en train, et parfois sa figure un peu pâle tressaillait comme si elle eût souffert d'un chagrin caché. Je lui demandai Tu as des embêtements ? Elle répondit : "Ben, oublions tout". Et elle se mit à boire. Elle vidait d'un trait son verre de champagne, le remplissait et le revidait encore sans cesse. Bientôt, un peu de rougeur lui vint au joues et elle commença à rire. Moi, je l'adorais déjà, l'embrassant à pleine bouche, découvrant qu'elle n'était ni bête, ni commune, ni grossière comme les filles du trottoir. Je lui demandais des détails sur sa vie. Elle répondit : "Ah mon petit, cela ne te regarde pas." Hélas, une heure plus tard... Enfin, le moment vint de se mettre au lit. Et pendant que j'enlevais la table dressée devant le feu, elle se déshabilla vivement et se glissa sous les couvertures. Mes voisins faisaient un vacarme affreux, riant et chantant comme des fous. Et je me disais, j'ai eu rudement raison d'aller chercher cette belle fille, je n'aurais jamais pu travailler. Un profond gémissement me fit me retourner. Je demandais, qu'as-tu ma chatte ? Elle ne répondit pas, mais elle continuait à pousser des soupirs douloureux, comme si elle eût souffert. horriblement. Je repris. Est-ce que tu te trouves indisposée ? Et soudain, elle jeta un cri, un cri déchirant. Je me précipitais, une bougie à la main. Son visage était décomposé par la douleur, et elle se tordait les mains, haletante, en voyant du fond de sa gorge ces sortes de gémissements sourds qui semblent des râles et qui font défaillir le cœur. Je demandais éperdu : "Mais qu'as-tu, dis-moi, qu'as-tu ?" Elle ne répondit pas et se mit à hurler. Tout à coup, les voisins se durent. Écoutant ce qui se passait chez moi, elle balbutia : "Oh, mon ventre ! Mon ventre !" D'un seul coup, je relevais la couvertur, et j'aperçus... Elle accouchait, mes amis. Alors je perdis la tête, je me précipitais sur le mur que je heurtais à coups de poing de toute ma force en vociférant Au secours ! Au secours ! Ma porte s'ouvrit, une foule se précipita. chez moi. Des hommes en habit, des femmes décolletées, des pierrots, des turcs, des mousquétaires. Cette invasion m'avouait tellement que je ne pouvais même plus m'expliquer. Eux, ils avaient cru à quelques accidents. Un crime, peut-être. Ils ne comprenaient plus. Je dis enfin : "C’est... c’est... cette... cette femme qui... qui accouche." Alors tout le monde l'examina, dit son avis. Un capucin surtout prétendait s'y connaître et voulait aider la nature. Ils étaient gris comme des ânes. Je crus qu'ils allaient la tuer ; et je me précipitais nue tête dans l'escalier pour chercher un vieux médecin qui habitait dans une rue voisine. Quand je revins avec le docteur, toute ma maison était debout. On avait rallumé le gaz de l'escalier. Les habitants de tous les étages occupaient mon appartement. Quatre débardeurs attablés achevaient mon champagne et mes écrevisses. À ma vue, un cri formidable éclata, et une laitière me présenta dans une serviette un affreux petit morceau de chair guidée, plissée, géniante, miaulant comme un chat. Et elle me dit : "C'est une fille !" Le médecin examina la coucher, déclara douteux son état, l'accident ayant eu lieu immédiatement après un souper, et il partit en annonçant qu'il allait m'envoyer immédiatement une garde malade et une nourrice. Les deux femmes arrivèrent une heure après, apportant un paquet de médicaments. Je passais la nuit dans un fauteuil, troupe éperdue pour réfléchir aux suites. Dès le matin, le médecin revint. Il trouva la malade assez mal. Il me dit : "Votre femme, monsieur..." Je l'interrompis : "Ce n'est pas ma femme." Il reprit : "Votre maîtresse, peu importe." Et il énuméra les soins qu'il lui fallait, le régime, les remèdes. Que faire ? Envoyer cette malheureuse à l'hôpital ? J'aurais passé pour un manant dans toute la maison, dans tout le quartier. Je la gardai. Elle resta dans mon lit six semaines. L'enfant, je le voyais chez des paysans de Poissy. Il me coûte encore 50 francs par mois. Ayant payé dans le début, me voici forcé de payer jusqu'à ma mort. Et plus tard, il me croira son père. Mais pour comble de malheur, quand la fille a été guérie, elle m'aimait, elle m'aimait éperdument la gueuse. "Eh bien ?" "Eh bien, elle était devenue maigre comme un chat de gouttière. Et j'ai flanqué dehors cette carcasse qui me guette dans la rue, se cache pour me voir passer, m'arrête le soir quand je sors, pour me baiser la main, m'embête, enfin à me rendre fou. Et voilà pourquoi je ne réveillonnerai plus jamais.

  • Speaker #0

    Et voilà, nous arrivons à la fin de cet épisode. C'est peut-être un peu bizarre dit comme ça, mais je vous remercie d'avoir écouté la triste mésaventure, enfin triste, à vous de le décider, d'Henri Templier jusqu'au bout, et souhaitez encore vous remercier d'avoir suivi le début des aventures de ce podcast. Je vous souhaite de belles fêtes de fin d'année, prenez soin de votre famille et de vos proches, je reviendrai l'année prochaine avec de nouveaux épisodes. C'était Xulia. et vous avez écouté Carpediem.

  • Speaker #1

    Joyeux Noël !

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Bonne écoute :)🍀


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Musique : Once again - Musique libre de droits de https://audiohub.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Coucou tout le monde, c'est Xulia. Aujourd'hui est un jour spécial. Il va donc de soi qu'il s'accompagnera d'un épisode de lui aussi particulier. Ainsi, trêve de Charles Perrault, pour le moment du moins, car en ce jour de Noël, je souhaitais vous partager une nouvelle qui se trouve être parfaitement dans le thème.

  • Speaker #1

    C'est l'histoire d'un certain Henri Templier qui ne souhaite pas,

  • Speaker #0

    non ne veut pas, réveillonner pour Noël. Plus jamais, nous dit-il même. Vous écouterez dans cet épisode, Nuit de Noël, une nouvelle rédigée par M. Guy de Maupassant et publiée le 26 décembre 1882 dans le recueil de Mademoiselle Fifi. Je vous laisse avec la suite de l'histoire. Bonne écoute !

  • Speaker #1

    Le réveillon, le réveillon, ah mais non, je ne réveillonnerai pas ! Le gros Henri Templier disait cela d'une voix furieuse, comme si on lui eût proposé une infamie. Les autres rien s'écrièrent. Pourquoi te mets-tu en colère ? Il répondit, parce que le réveillon m'a joué le plus sale tour du monde et que j'ai gardé une insurmontable horreur pour cette nuit stup... Pide de gaieté, imbécile ! Quoi donc ? Quoi ? Vous voulez le savoir ? Eh bien, écoutez. Vous vous rappelez comme il faisait froid, voici deux ans à cette époque. Un froid a tué les pauvres dans la rue. La Seine gelait, les trottoirs glassaient les pieds à travers les semelles des bottines. Le monde semblait sur le point de crever. J'avais alors un gros travail en train et je refusais toute invitation pour le réveillon, préférant passer la nuit devant ma table. Je dînais seule, puis je me mis à l'œuvre. Mais voilà que, vers dix heures, la pensée de la gaieté courant Paris, le bruit des rues qui me parvenaient malgré tout, les préparatifs de souper de mes voisins, entendus à travers les cloisons, m'agitèrent. Je ne savais plus ce que je faisais, j'écrivais des bêtises, et je compris qu'il fallait renoncer à l'espoir de produire quelque chose de bon cette nuit-là. Je marchais un peu à travers ma chambre, je m'assis, je me relevais. Je subissais certes la mystérieuse influence de la joie du dehors, et je me résignais. Je sonnais ma bonne et je lui dis Angèle, allez m'acheter de quoi souper à deux, des huîtres, un paire de roux froids, des écrevisses, du jambon, des gâteaux. Montez-moi deux bouteilles de champagne, mettez le couvert et couchez-vous. Elle obéit, un peu surprise. Quand tout fut prêt, j'endossais mon pardessus et je sortis. Une grosse question restait à résoudre. Avec qui allais-je réveillonner ? Mes amis étaient invités partout. Pour en avoir une, il aurait fallu m'y prendre d'avance. Alors je songeais à faire en même temps une bonne action. Je me dis, Paris est plein de pauvres et belles filles qui n'ont pas un souper sur la planche et qui errent en quête d'un garçon généreux. Je veux être la providence de Noël d'une de ses déshérités. Je vais rôder et entrer dans les lieux de plaisir, questionner, chasser, choisir à mon gré. Et je me mise à parcourir la ville. Certes, je rencontrais beaucoup de pauvres filles cherchant aventure. Mais elles étaient laides à donner une indigestion, ou maigres à geler sur pied si elles s'étaient arrêtées. J'ai un faible, vous le savez, j'aime les femmes nourries. Plus elles sont en chair, plus je les préfère. Une colosse me fait perdre la raison. Soudain, en face du théâtre des variétés, j'aperçus un profil à mon gré. Une tête, puis par devant, deux bosses. Celle de la poitrine, fort belle, celle du dessous, surprenante. Un ventre-doigts grasse, orgeant frissonnet, murmurant, sacristie la belle fille. Un point me restait à éclaircir. Le visage, le visage c'est le dessert, le reste c'est, c'est le rôti. Je hâtai le pas, je rejoignis cette femme errante et sous un bec de gaz je me retournais brusquement. Elle était charmante, toute jeune, brune, avec de grands yeux noirs. Je fis ma proposition. qu'elle l'accepta sans hésiter. Un quart d'heure plus tard, nous étions attablés dans mon appartement. Elle dit en entrant : "Ah, on est bien ici !" Et elle regarda autour d'elle avec la satisfaction visible d'avoir trouvé la table et le gîte en cette nuit glaciale. Elle était superbe, tellement jolie qu'elle m'étonnait, et grosse à ravir mon cœur pour toujours. Elle ôta son manteau, son chapeau, s'assit et se mit à manger. Mais elle ne paraissait pas en train, et parfois sa figure un peu pâle tressaillait comme si elle eût souffert d'un chagrin caché. Je lui demandai Tu as des embêtements ? Elle répondit : "Ben, oublions tout". Et elle se mit à boire. Elle vidait d'un trait son verre de champagne, le remplissait et le revidait encore sans cesse. Bientôt, un peu de rougeur lui vint au joues et elle commença à rire. Moi, je l'adorais déjà, l'embrassant à pleine bouche, découvrant qu'elle n'était ni bête, ni commune, ni grossière comme les filles du trottoir. Je lui demandais des détails sur sa vie. Elle répondit : "Ah mon petit, cela ne te regarde pas." Hélas, une heure plus tard... Enfin, le moment vint de se mettre au lit. Et pendant que j'enlevais la table dressée devant le feu, elle se déshabilla vivement et se glissa sous les couvertures. Mes voisins faisaient un vacarme affreux, riant et chantant comme des fous. Et je me disais, j'ai eu rudement raison d'aller chercher cette belle fille, je n'aurais jamais pu travailler. Un profond gémissement me fit me retourner. Je demandais, qu'as-tu ma chatte ? Elle ne répondit pas, mais elle continuait à pousser des soupirs douloureux, comme si elle eût souffert. horriblement. Je repris. Est-ce que tu te trouves indisposée ? Et soudain, elle jeta un cri, un cri déchirant. Je me précipitais, une bougie à la main. Son visage était décomposé par la douleur, et elle se tordait les mains, haletante, en voyant du fond de sa gorge ces sortes de gémissements sourds qui semblent des râles et qui font défaillir le cœur. Je demandais éperdu : "Mais qu'as-tu, dis-moi, qu'as-tu ?" Elle ne répondit pas et se mit à hurler. Tout à coup, les voisins se durent. Écoutant ce qui se passait chez moi, elle balbutia : "Oh, mon ventre ! Mon ventre !" D'un seul coup, je relevais la couvertur, et j'aperçus... Elle accouchait, mes amis. Alors je perdis la tête, je me précipitais sur le mur que je heurtais à coups de poing de toute ma force en vociférant Au secours ! Au secours ! Ma porte s'ouvrit, une foule se précipita. chez moi. Des hommes en habit, des femmes décolletées, des pierrots, des turcs, des mousquétaires. Cette invasion m'avouait tellement que je ne pouvais même plus m'expliquer. Eux, ils avaient cru à quelques accidents. Un crime, peut-être. Ils ne comprenaient plus. Je dis enfin : "C’est... c’est... cette... cette femme qui... qui accouche." Alors tout le monde l'examina, dit son avis. Un capucin surtout prétendait s'y connaître et voulait aider la nature. Ils étaient gris comme des ânes. Je crus qu'ils allaient la tuer ; et je me précipitais nue tête dans l'escalier pour chercher un vieux médecin qui habitait dans une rue voisine. Quand je revins avec le docteur, toute ma maison était debout. On avait rallumé le gaz de l'escalier. Les habitants de tous les étages occupaient mon appartement. Quatre débardeurs attablés achevaient mon champagne et mes écrevisses. À ma vue, un cri formidable éclata, et une laitière me présenta dans une serviette un affreux petit morceau de chair guidée, plissée, géniante, miaulant comme un chat. Et elle me dit : "C'est une fille !" Le médecin examina la coucher, déclara douteux son état, l'accident ayant eu lieu immédiatement après un souper, et il partit en annonçant qu'il allait m'envoyer immédiatement une garde malade et une nourrice. Les deux femmes arrivèrent une heure après, apportant un paquet de médicaments. Je passais la nuit dans un fauteuil, troupe éperdue pour réfléchir aux suites. Dès le matin, le médecin revint. Il trouva la malade assez mal. Il me dit : "Votre femme, monsieur..." Je l'interrompis : "Ce n'est pas ma femme." Il reprit : "Votre maîtresse, peu importe." Et il énuméra les soins qu'il lui fallait, le régime, les remèdes. Que faire ? Envoyer cette malheureuse à l'hôpital ? J'aurais passé pour un manant dans toute la maison, dans tout le quartier. Je la gardai. Elle resta dans mon lit six semaines. L'enfant, je le voyais chez des paysans de Poissy. Il me coûte encore 50 francs par mois. Ayant payé dans le début, me voici forcé de payer jusqu'à ma mort. Et plus tard, il me croira son père. Mais pour comble de malheur, quand la fille a été guérie, elle m'aimait, elle m'aimait éperdument la gueuse. "Eh bien ?" "Eh bien, elle était devenue maigre comme un chat de gouttière. Et j'ai flanqué dehors cette carcasse qui me guette dans la rue, se cache pour me voir passer, m'arrête le soir quand je sors, pour me baiser la main, m'embête, enfin à me rendre fou. Et voilà pourquoi je ne réveillonnerai plus jamais.

  • Speaker #0

    Et voilà, nous arrivons à la fin de cet épisode. C'est peut-être un peu bizarre dit comme ça, mais je vous remercie d'avoir écouté la triste mésaventure, enfin triste, à vous de le décider, d'Henri Templier jusqu'au bout, et souhaitez encore vous remercier d'avoir suivi le début des aventures de ce podcast. Je vous souhaite de belles fêtes de fin d'année, prenez soin de votre famille et de vos proches, je reviendrai l'année prochaine avec de nouveaux épisodes. C'était Xulia. et vous avez écouté Carpediem.

  • Speaker #1

    Joyeux Noël !

Description

En ce jour de Noël, je vous invite à découvrir une nouvelle de Guy de Maupassant intitulée "Nuit de Noël." Dans ce récit bref, l'auteur nous offre une chute inattendue, comme lui seul sait le faire, qui ne manquera pas de vous surprendre. Fidèle à son style, Maupassant construit son récit avec finesse pour nous tenir en haleine jusqu'à la dernière ligne, et, comme toujours, il ne déçoit pas. Vous allez ainsi écouter "Nuit de Noël", publiée dans le recueil Mademoiselle Fifi le 6 décembre 1882. Plongez dans l'univers riche et captivant de l'un des grands maîtres de la nouvelle française.


Bonne écoute :)🍀


Contact : xupazcarpediem@gmail.com


Musique : Once again - Musique libre de droits de https://audiohub.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Coucou tout le monde, c'est Xulia. Aujourd'hui est un jour spécial. Il va donc de soi qu'il s'accompagnera d'un épisode de lui aussi particulier. Ainsi, trêve de Charles Perrault, pour le moment du moins, car en ce jour de Noël, je souhaitais vous partager une nouvelle qui se trouve être parfaitement dans le thème.

  • Speaker #1

    C'est l'histoire d'un certain Henri Templier qui ne souhaite pas,

  • Speaker #0

    non ne veut pas, réveillonner pour Noël. Plus jamais, nous dit-il même. Vous écouterez dans cet épisode, Nuit de Noël, une nouvelle rédigée par M. Guy de Maupassant et publiée le 26 décembre 1882 dans le recueil de Mademoiselle Fifi. Je vous laisse avec la suite de l'histoire. Bonne écoute !

  • Speaker #1

    Le réveillon, le réveillon, ah mais non, je ne réveillonnerai pas ! Le gros Henri Templier disait cela d'une voix furieuse, comme si on lui eût proposé une infamie. Les autres rien s'écrièrent. Pourquoi te mets-tu en colère ? Il répondit, parce que le réveillon m'a joué le plus sale tour du monde et que j'ai gardé une insurmontable horreur pour cette nuit stup... Pide de gaieté, imbécile ! Quoi donc ? Quoi ? Vous voulez le savoir ? Eh bien, écoutez. Vous vous rappelez comme il faisait froid, voici deux ans à cette époque. Un froid a tué les pauvres dans la rue. La Seine gelait, les trottoirs glassaient les pieds à travers les semelles des bottines. Le monde semblait sur le point de crever. J'avais alors un gros travail en train et je refusais toute invitation pour le réveillon, préférant passer la nuit devant ma table. Je dînais seule, puis je me mis à l'œuvre. Mais voilà que, vers dix heures, la pensée de la gaieté courant Paris, le bruit des rues qui me parvenaient malgré tout, les préparatifs de souper de mes voisins, entendus à travers les cloisons, m'agitèrent. Je ne savais plus ce que je faisais, j'écrivais des bêtises, et je compris qu'il fallait renoncer à l'espoir de produire quelque chose de bon cette nuit-là. Je marchais un peu à travers ma chambre, je m'assis, je me relevais. Je subissais certes la mystérieuse influence de la joie du dehors, et je me résignais. Je sonnais ma bonne et je lui dis Angèle, allez m'acheter de quoi souper à deux, des huîtres, un paire de roux froids, des écrevisses, du jambon, des gâteaux. Montez-moi deux bouteilles de champagne, mettez le couvert et couchez-vous. Elle obéit, un peu surprise. Quand tout fut prêt, j'endossais mon pardessus et je sortis. Une grosse question restait à résoudre. Avec qui allais-je réveillonner ? Mes amis étaient invités partout. Pour en avoir une, il aurait fallu m'y prendre d'avance. Alors je songeais à faire en même temps une bonne action. Je me dis, Paris est plein de pauvres et belles filles qui n'ont pas un souper sur la planche et qui errent en quête d'un garçon généreux. Je veux être la providence de Noël d'une de ses déshérités. Je vais rôder et entrer dans les lieux de plaisir, questionner, chasser, choisir à mon gré. Et je me mise à parcourir la ville. Certes, je rencontrais beaucoup de pauvres filles cherchant aventure. Mais elles étaient laides à donner une indigestion, ou maigres à geler sur pied si elles s'étaient arrêtées. J'ai un faible, vous le savez, j'aime les femmes nourries. Plus elles sont en chair, plus je les préfère. Une colosse me fait perdre la raison. Soudain, en face du théâtre des variétés, j'aperçus un profil à mon gré. Une tête, puis par devant, deux bosses. Celle de la poitrine, fort belle, celle du dessous, surprenante. Un ventre-doigts grasse, orgeant frissonnet, murmurant, sacristie la belle fille. Un point me restait à éclaircir. Le visage, le visage c'est le dessert, le reste c'est, c'est le rôti. Je hâtai le pas, je rejoignis cette femme errante et sous un bec de gaz je me retournais brusquement. Elle était charmante, toute jeune, brune, avec de grands yeux noirs. Je fis ma proposition. qu'elle l'accepta sans hésiter. Un quart d'heure plus tard, nous étions attablés dans mon appartement. Elle dit en entrant : "Ah, on est bien ici !" Et elle regarda autour d'elle avec la satisfaction visible d'avoir trouvé la table et le gîte en cette nuit glaciale. Elle était superbe, tellement jolie qu'elle m'étonnait, et grosse à ravir mon cœur pour toujours. Elle ôta son manteau, son chapeau, s'assit et se mit à manger. Mais elle ne paraissait pas en train, et parfois sa figure un peu pâle tressaillait comme si elle eût souffert d'un chagrin caché. Je lui demandai Tu as des embêtements ? Elle répondit : "Ben, oublions tout". Et elle se mit à boire. Elle vidait d'un trait son verre de champagne, le remplissait et le revidait encore sans cesse. Bientôt, un peu de rougeur lui vint au joues et elle commença à rire. Moi, je l'adorais déjà, l'embrassant à pleine bouche, découvrant qu'elle n'était ni bête, ni commune, ni grossière comme les filles du trottoir. Je lui demandais des détails sur sa vie. Elle répondit : "Ah mon petit, cela ne te regarde pas." Hélas, une heure plus tard... Enfin, le moment vint de se mettre au lit. Et pendant que j'enlevais la table dressée devant le feu, elle se déshabilla vivement et se glissa sous les couvertures. Mes voisins faisaient un vacarme affreux, riant et chantant comme des fous. Et je me disais, j'ai eu rudement raison d'aller chercher cette belle fille, je n'aurais jamais pu travailler. Un profond gémissement me fit me retourner. Je demandais, qu'as-tu ma chatte ? Elle ne répondit pas, mais elle continuait à pousser des soupirs douloureux, comme si elle eût souffert. horriblement. Je repris. Est-ce que tu te trouves indisposée ? Et soudain, elle jeta un cri, un cri déchirant. Je me précipitais, une bougie à la main. Son visage était décomposé par la douleur, et elle se tordait les mains, haletante, en voyant du fond de sa gorge ces sortes de gémissements sourds qui semblent des râles et qui font défaillir le cœur. Je demandais éperdu : "Mais qu'as-tu, dis-moi, qu'as-tu ?" Elle ne répondit pas et se mit à hurler. Tout à coup, les voisins se durent. Écoutant ce qui se passait chez moi, elle balbutia : "Oh, mon ventre ! Mon ventre !" D'un seul coup, je relevais la couvertur, et j'aperçus... Elle accouchait, mes amis. Alors je perdis la tête, je me précipitais sur le mur que je heurtais à coups de poing de toute ma force en vociférant Au secours ! Au secours ! Ma porte s'ouvrit, une foule se précipita. chez moi. Des hommes en habit, des femmes décolletées, des pierrots, des turcs, des mousquétaires. Cette invasion m'avouait tellement que je ne pouvais même plus m'expliquer. Eux, ils avaient cru à quelques accidents. Un crime, peut-être. Ils ne comprenaient plus. Je dis enfin : "C’est... c’est... cette... cette femme qui... qui accouche." Alors tout le monde l'examina, dit son avis. Un capucin surtout prétendait s'y connaître et voulait aider la nature. Ils étaient gris comme des ânes. Je crus qu'ils allaient la tuer ; et je me précipitais nue tête dans l'escalier pour chercher un vieux médecin qui habitait dans une rue voisine. Quand je revins avec le docteur, toute ma maison était debout. On avait rallumé le gaz de l'escalier. Les habitants de tous les étages occupaient mon appartement. Quatre débardeurs attablés achevaient mon champagne et mes écrevisses. À ma vue, un cri formidable éclata, et une laitière me présenta dans une serviette un affreux petit morceau de chair guidée, plissée, géniante, miaulant comme un chat. Et elle me dit : "C'est une fille !" Le médecin examina la coucher, déclara douteux son état, l'accident ayant eu lieu immédiatement après un souper, et il partit en annonçant qu'il allait m'envoyer immédiatement une garde malade et une nourrice. Les deux femmes arrivèrent une heure après, apportant un paquet de médicaments. Je passais la nuit dans un fauteuil, troupe éperdue pour réfléchir aux suites. Dès le matin, le médecin revint. Il trouva la malade assez mal. Il me dit : "Votre femme, monsieur..." Je l'interrompis : "Ce n'est pas ma femme." Il reprit : "Votre maîtresse, peu importe." Et il énuméra les soins qu'il lui fallait, le régime, les remèdes. Que faire ? Envoyer cette malheureuse à l'hôpital ? J'aurais passé pour un manant dans toute la maison, dans tout le quartier. Je la gardai. Elle resta dans mon lit six semaines. L'enfant, je le voyais chez des paysans de Poissy. Il me coûte encore 50 francs par mois. Ayant payé dans le début, me voici forcé de payer jusqu'à ma mort. Et plus tard, il me croira son père. Mais pour comble de malheur, quand la fille a été guérie, elle m'aimait, elle m'aimait éperdument la gueuse. "Eh bien ?" "Eh bien, elle était devenue maigre comme un chat de gouttière. Et j'ai flanqué dehors cette carcasse qui me guette dans la rue, se cache pour me voir passer, m'arrête le soir quand je sors, pour me baiser la main, m'embête, enfin à me rendre fou. Et voilà pourquoi je ne réveillonnerai plus jamais.

  • Speaker #0

    Et voilà, nous arrivons à la fin de cet épisode. C'est peut-être un peu bizarre dit comme ça, mais je vous remercie d'avoir écouté la triste mésaventure, enfin triste, à vous de le décider, d'Henri Templier jusqu'au bout, et souhaitez encore vous remercier d'avoir suivi le début des aventures de ce podcast. Je vous souhaite de belles fêtes de fin d'année, prenez soin de votre famille et de vos proches, je reviendrai l'année prochaine avec de nouveaux épisodes. C'était Xulia. et vous avez écouté Carpediem.

  • Speaker #1

    Joyeux Noël !

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