- Speaker #0
Codcast, podcast juridique de la Faculté de droit et de sciences politiques d'Aix-Marseille Université. Bonjour à toutes et à tous, Codcast est de retour pour un nouvel épisode consacré à la loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic adopté le 1er avril à l'Assemblée Nationale. épisode nous a été proposé sur LinkedIn par Antoine Baduel qui a répondu à nos sollicitations. Vous êtes doctorant en droit pénal et procédure pénale sous la direction de monsieur le professeur Jean-Baptiste Perrier, avec pour sujet de thèse, les droits processuels du détenu provisoire. Merci d'avoir accepté notre invitation.
- Speaker #1
Merci de votre accueil.
- Speaker #0
Mais avant tout, nous adressons nos pensées à Socayna, une étudiante d'Aix-Marseille Université de 24 ans tuée par balle, perdue le 10 septembre 2023 alors qu'elle travaillait dans sa chambre à Marseille. Elle fait partie de ces 49 personnes qui ont perdu la vie à cause du trafic de stupéfiants dans les Bouches-du-Rhône en 2023. Aujourd'hui, nous allons donc essayer d'expliquer les points principaux de ce projet de loi. Première question, comment définit-on juridiquement le narcotrafic ?
- Speaker #1
Tout d'abord, je voudrais vous remercier d'avoir rappelé ce tragique événement, que fut la mort de cette jeune étudiante, qui démontre une nécessité d'agir face à cette nouvelle forme de criminalité qu'est le narcotrafic et qui touche... même des victimes et des personnes extérieures au trafic de drogue. Et c'est une bonne question parce que pour efficacement lutter contre un phénomène, il faut pouvoir correctement le définir. Et juridiquement, le narcotrafic n'a pas de définition dans la loi ou dans la jurisprudence. Il renvoie de manière assez classique au trafic de stupéfiants qui est prévu et réprimé dans le code pénal. Et ce terme est originellement utilisé pour désigner les réseaux de stupéfiants en Colombie ou au Mexique. C'est-à-dire des trafics de stupéfiants qui ont à leur tête des barons de la drogue, comme on a pu connaître Pablo Escobar. Et en France, ce terme n'était pas utilisé, bien que le trafic de stupéfiants ne soit absolument pas une nouveauté. Historiquement, la France a même été, à compter du milieu du XXe siècle, le centre névralgique de la drogue, avec la célèbre French Connection. Et l'ultra-violence autour des réseaux de stupéfiants n'est pas non plus une nouveauté. Symboliquement, on peut penser à l'assassinat du juge Michel en 1981, qui luttait. contre ces trafics. Donc, un trafic de stupéfiants qui n'est pas une nouveauté sur notre territoire, mais ce terme de narcotrafic, bien qu'existant, n'était pas ou peu employé. Et il a pour objectif désormais de décrire non pas un phénomène nouveau, mais un nouveau stade de trafic de stupéfiants qui semble être passé dans une nouvelle ère et qui s'étend à une nouvelle échelle. La commission d'enquête du Sénat, qui a construit cette proposition de loi, a justement identifié une pluralité de facteurs. pour justifier ce terme de narcotrafic. Une augmentation de la quantité de drogue dure, une propagation des trafics à l'échelle nationale et avec, par conséquence, des revenus records. A l'occasion de la commission, le ministère de l'économie et des finances a chiffré à 3,5 milliards le bénéfice annuel du narcotrafic en France, avec environ 200 000 personnes qui vivent de ce trafic. Et puis il y a des nouvelles spécificités. D'abord, il y a ce que les spécialistes ont appelé l'ubérisation du trafic. C'est-à-dire qu'on a des narcotrafiquants qui s'adaptent sans cesse à la demande, avec un marketing poussé, des images de marques. On a vu par exemple un groupe criminel qui s'appelait Yoda, qui utilisait la petite image sympathique du personnage de Star Wars comme image de marque. On a une adaptation à la concurrence et l'utilisation des réseaux sociaux importantes. par le biais des messages récryptés, pour étendre leur commerce avec des livraisons, comme l'entreprise Uber, au pied de votre domicile. Puis une spécificité dans la généralisation de la violence. Vous l'avez rappelé, avec la fortune à Marseille, qui a été le théâtre de nombreux assassinats sous fond de trafic de stupéfiants, en 1933, en 2022, en 49, en 2023, avec comme particularité le rajeunissement tant des auteurs que des cibles. Sur ces deux années, l'ensemble des assassinats, 60% des auteurs et des cibles ont entre 17 et 28 ans. Avec une facilité déconcertante à trouver des tueurs via les réseaux sociaux, à des faibles coûts. Un assassinat, c'est 5-6 000 euros alors qu'il y a 10 ans c'était 10 fois le prix. Et des ripostes rapides, entre les gangs. A Marseille, il y a eu la nuit du 2 ou 3 avril 2023 qu'on a appelée la nuit bleue, dans laquelle les services d'enquête et de police ont été les spectateurs de ripostes. de minute en minute d'assassinats entre gangs. Enfin, le point le plus marquant du narcotrafic et de l'utilisation de ce terme, ce sont des incarcérations massives, mais inutiles. On a dit dans le cadre du projet de loi que notre arsenal répressif n'était pas totalement adapté. Force est de constater que ce qu'on appelle le haut du spectre, c'est-à-dire les individus qui sont en haut du trafic, sont incarcérés dans nos centres de détention. C'est ce que révèle la presse, parce que ces individus n'ont pas encore été jugés, Les hauts du panier de la DZ Mafia, de Yoda et de tous ces gangs sont dans nos centres de détention, mais les trafics continuent, les assassinats continuent, parce que cela semble révéler une corruption assez importante de la chaîne pénale et surtout des surveillants pénitentiaires. Et donc cette pluralité de facteurs permet de conclure un basculement du trafic de stupéfiants local vers un phénomène de narcotrafic.
- Speaker #0
D'accord, merci beaucoup. Et qu'est-ce qui existe déjà contre le narcotrafic ? Et pourquoi une nouvelle loi sur le narcotrafic est-elle jugée nécessaire aujourd'hui ?
- Speaker #1
Alors, il existe déjà dans notre code pénal et notre code de procédure pénale un régime dérogatoire pour la criminalité organisée. Et donc, le narcotrafic fait partie de la criminalité organisée. Pour ce type d'infraction, les enquêteurs, les juges et les procureurs ont des pouvoirs d'enquête supplémentaires. Ils peuvent mettre en place des techniques. supplémentaires. Par exemple, la sonorisation de véhicules ou de lieux, la géolocalisation, l'infiltration des réseaux. Il y a même des techniques très particulières, par exemple ce qu'on appelle l'IMSI catcher, qui est une technique qui permet à distance d'extraire les données d'un téléphone portable. Et c'est cet ensemble d'arsenal qui est extrêmement attentatoire aux libertés individuelles, n'est possible que pour la criminalité organisée. Donc, il y a déjà une prise en compte de la spécificité de cette criminalité. Sur les juridictions de jugement, on a des juridictions spéciales, ça s'appelle les GIRS, les juridictions interrégionales spécialisées. On a même créé une super GIRS nationale, la Junalco, avec donc des magistrats spécialement formés qui jugent ces affaires-là. Et une coopération internationale accrue. On a des conventions d'extradition avec Dubaï et avec un certain nombre de pays d'Afrique du Nord pour qu'on puisse incarcérer les individus qu'on a condamnés en France mais qui avaient pris la fuite. Et en effet, ça fonctionne. Ça fonctionne plutôt bien, puisqu'il y a des interpellations massives. En décembre 2024, on a eu une vague de 40 individus interpellés à Marseille. Mais il n'en demeure pas moins qu'on n'arrive pas à endiguer le phénomène. Ça explique donc éventuellement la nécessité d'une nouvelle loi. Même si, il faut se poser la question, et c'est ce que révèlent les juges d'instruction lorsqu'ils sont interrogés dans le cadre de cette commission. Au Sénat, ils disent notre vrai problème premier, c'est un problème humain et financier. En fait, on est débordé par les dossiers, on n'arrive pas à gérer. Est-ce qu'une loi va véritablement être efficace sur ce point ? Les sénateurs qui portent le projet le pensent et ils évoquent trois justifications. Déjà, c'est ce que je vous disais, la poursuite du narcotrafic malgré les incarcérations, une corruption difficile à détecter et à réprimer au sein de la chaîne pénale, et de manière un peu plus étonnante. Il est évoqué une procédure pénale trop favorable aux trafiquants. Sur ce point, il faut un petit peu insister parce que c'est ce qui explique toute la nécessité de la loi, mais ça peut paraître choquant. Cet argument a fait l'objet de vives critiques et a cristallisé les tensions entre les magistrats et les avocats. Il ressort du rapport de la commission que le code de procédure pénale serait trop protecteur et favorable aux narcotrafiquants. C'est sur ce point que la loi a fait le plus parler. puisqu'elle semble vouloir remettre en question le principe du contradictoire et les droits de la défense. Alors en fait, l'idée première, c'est que les méthodes d'investigation spéciales dont je vous ai parlé, les sonorisations, l'imsi-catcher, apparaissent en procédure. Et donc, à l'heure actuelle, les avocats peuvent consulter en procédure ces techniques et donc les voient. Et l'idée, c'est que les narcotrafiquants, en ayant connaissance de ces techniques, pourraient les anticiper. Et donc, le principe du contradictoire serait un frein face à la lutte contre le narcotrafic. Le second élément qui est encore plus critiquable, ce serait que les avocats des narcotrafiquants emploieraient des stratagèmes en soulevant des irrégularités de procédure, de manière systématique. En somme, que les stratégies de la défense des avocats, ce serait de manière déloyale, voire agressive, disent les juges d'instruction, de contester la procédure et qu'elle respecte les règles. Lors de cette commission, les avocats ont alors été pointés du doigt comme étant une sorte de poids. dans la lutte contre le trafic. Et ce point est extrêmement problématique et dangereux. Le rapport va utiliser l'urgence, la peur, la nécessité d'agir pour justifier une restriction des droits de la défense. Outre les propositions, ce qui interpelle, c'est le discours et la rhétorique mises en place pour justifier cette loi. On est venu un petit peu jeter l'eau propre sur cette profession, qui est la profession d'avocat, et sur la mission qui est de défendre. Et au Sénat, pour faire adopter ce texte, on a des discours. qui peuvent être assez choquants. Par exemple, je peux citer un passage du discours de la sénatrice qui a introduit cette loi. Elle dit « Le code de procédure pénale permet par des manœuvres faites par les narcotrafiquants, enfin autant que les avocats, d'obtenir une nullité de procédure qui est une demande en liberté de façon à se soustraire de la justice. » Alors, ces propos sont d'autant plus étonnants qu'ils sont totalement faux. Parce qu'une nullité de procédure, ce n'est pas remettre quelqu'un en liberté. Une unité de procédure, qu'est-ce que c'est ? En fait, c'est ce qu'on appelle vulgairement un vice de procédure. Les enquêteurs, les policiers, lorsqu'ils veulent utiliser un acte, réaliser une perquisition, mettre en place une géolocalisation, ils doivent respecter des règles qui sont dans le code de procédure pénale. Et ces règles protègent nos garanties, nos droits. Et dès lors que les enquêteurs ne respectent pas ces règles, il faut que l'acte soit annulé. On fait comme s'il n'avait jamais existé. Mais à aucun moment... Ça entraîne une remise en liberté des individus qui sont détenus. Il y a certaines nullités qui peuvent entraîner des remises en liberté, mais ce sont des têtes d'épingle, c'est moins d'un pour cent des cas. Et donc on fait d'une exception une sorte de faiblesse de l'ensemble du code de procédure pénale pour justifier des nouvelles dispositions attentatoires. On va même plus loin, on apprend que les avocats inventeraient des nullités pour pouvoir faire libérer leurs clients. et il semble que s'il y a Un pouvoir créateur de nullité, c'est la chambre criminelle qui peut le faire de la Cour de cassation, mais pas les magistrats. Et si une nullité est inventée au bénéfice d'un narcotrafiquant, elle l'a été par un juge et uniquement par un juge. Alors, il faut admettre, ça c'est vrai, que certains avocats ont employé des stratagèmes un petit peu déloyaux. Mais la Cour de cassation les a identifiés et a refusé de reconnaître les nullités et a refusé de remettre en liberté. Donc, on prévoit des dispositions dans le seul but de museler la défense sans réel risque de dérive.
- Speaker #0
Merci beaucoup. Et vous avez déjà commencé à évoquer, mais quels sont les principaux dispositifs proposés dans cette loi et où en est-on dans son adoption ?
- Speaker #1
Alors, le 1er avril 2025, l'Assemblée nationale a adopté avec modification la loi en première lecture. Et députés et sénateurs doivent désormais se réunir en commission paritaire mixte pour trouver un accord sur un texte final. Alors, il y a une pluralité de propositions, mais de manière pêle-mêle comme ça sur les éléments les plus importants, il y a d'abord la création d'un parquet national. anti-criminalité organisée qui est un petit peu calqué sur le modèle du parquet national financier. Le but c'est de traiter à l'échelle nationale et de centraliser à Paris les enquêtes. On a retravaillé le statut du repenti, c'est à dire qu'on va encourager les dénonciations des réseaux criminels par des individus qui sont à l'intérieur en leur prévoyant un régime protecteur dans la procédure. On a créé une infraction pénale spéciale qui est le seul fait d'appartenir. à une organisation criminelle, est puni de 7 ans d'emprisonnement. Sans que l'on puisse attester de quelconque matériel infraction. Le seul fait d'appartenir à un groupement. Alors il y a des techniques nouvelles avec l'expérimentation d'enquêtes algorithmiques, c'est ce qu'on voyait en matière de terrorisme. Et puis, ce qui a été l'un des fers de lance du garde des Sceaux, des quartiers hautement sécurisés, avec éventuellement une prison narcotrafique. Avec un régime strict de détention. des fouilles systématiques de ces individus, l'idée qu'il ne faut plus, même si c'est déjà le cas, mais de manière effective qu'ils puissent utiliser leur téléphone depuis la détention, et donc l'idée est de mettre des brouilleurs généralisés sur les centres de détention. Alors c'est très problématique, on a déjà eu cette idée. Il y a deux problèmes. Le premier c'est lorsque vous êtes sur des centres de détention qui sont dans des milieux ruraux, on peut penser aux Beaumet, les brouilleurs vont brouiller certes la prison, mais aussi les alentours. Et vous avez les riverains qui se plaignent de ce type de brouilleurs. Et puis un autre élément, c'est qu'on a démontré que ces brouilleurs provoquent sur la santé des risques avec des maux de tête. Alors d'aucuns pourront dire que si les narcotrafiquants ont des maux de tête, ce n'est pas bien grave. Le problème, c'est qu'il y a des surveillants pénitentiaires aussi qui travaillent dans ces centres de détention et qui se plaignent de ce genre de choses. Et l'idée de ces quartiers hautement sécurisés, c'est de couper l'individu du monde extérieur le plus possible. et de limiter ce qu'on appelle les extractions des détenus. Si vous voulez, quand un individu est détenu et que l'enquête est en cours, régulièrement le juge d'instruction va vouloir l'interroger sur l'évolution de l'enquête, sur son positionnement par rapport aux faits. Et à l'heure actuelle, ce qu'on fait, c'est qu'on extrait du centre de détention l'individu pour le présenter devant le juge d'instruction. Et puis, alors que le projet de loi était en cours de préparation, on a eu l'affaire Mohamed Amra, c'est cet individu qui, lors d'une extraction, a pris la fuite et a vu la mort de surveillants pénitentiaires. Réponse du projet de loi, on stoppe toute extraction, généralisation de la visioconférence. C'est-à-dire qu'on n'extrait plus les individus et ils verront leur juge à travers une caméra. Ça répond à une problématique qui était cette affaire Mohamed Amra. Il faut savoir que la dernière attaque comme ça d'extraction, elle remonte aux années 80. Donc en 50 ans, on n'a pas eu de problème. On a eu une extraction où on a posé problème et on fait une loi pour répondre à cette problématique. C'est un peu le leitmotiv. Et enfin, c'est la création de la procédure coffre, du dossier coffre qui interpelle.
- Speaker #0
Et bien justement sur cette question, qu'est-ce que la procédure dite coffre ? Quels sont les risques pour les droits de la défense ? Le projet de loi ne risque-t-il pas d'ouvrir la voie à un glissement général vers une justice d'exception ?
- Speaker #1
Alors, la procédure coffre, elle est inspirée par le droit belge. L'idée est la suivante, c'est que dans notre procédure pénale, on va cacher une partie de la procédure aux partis, aux avocats, pour qu'ils ne puissent pas le voir. Qu'est-ce qu'on va cacher ? C'est justement ces techniques dont je vous parlais. L'insicatcher, la géolocalisation, l'interception téléphonique. On va les cacher pour ne pas qu'ils les voient, pour ne pas qu'ils puissent les anticiper, pour ne pas qu'ils puissent comprendre comment ça marche. Et on ne va faire apparaître en procédure que les résultats de ces techniques. L'idée, en fait, c'est de protéger les investigations et les enquêteurs qui mettent en place ces dispositifs. Mais une nouvelle fois, ça va être difficilement conciliable avec les droits de la défense. Si on prend un exemple, une sonorisation d'un véhicule par exemple, c'est-à-dire qu'on place un micro dans un véhicule et c'est un micro et les policiers peuvent écouter les conversations dans le véhicule, le texte prévoit que c'est possible pour une durée de 4 mois, renouvelable. Or, la procédure COF qui est proposée propose de cacher aux avocats la date, le lieu et l'heure de la mise en place du dispositif. Donc comment est-ce qu'un avocat va pouvoir vérifier ? Si ce dispositif a été correctement utilisé dans la durée. Alors, le texte apporte une garantie. Elle dit que cette procédure coffre, elle sera supervisée par un juge des libertés de la détention. Un magistrat, ce qu'on appelle le JLD, qui sera tiers à l'enquête et qui sera un peu le garant de la régularité de cette procédure coffre. Mais ça reste quand même problématique parce que l'idée est de dire que le droit belge l'accepte et la CEDH l'a confirmé. en admettant que la procédure Coff était conforme à la Convention européenne des droits de l'homme. Sauf que, en droit belge, ce n'est pas un magistrat, mais trois magistrats qui contrôlent cette procédure. Donc déjà, le fait qu'il y ait une collégialité, ça apporte une garantie supplémentaire. Mais surtout, en fait, j'avoue que je mets à mal un petit peu l'idée de cette procédure, surtout regarde son efficacité. Est-ce qu'on pense sincèrement que les narcotrafiquants sont des lecteurs assidus et attentifs de leur procédure pénale ? et qu'ils lisent en détail comment fonctionne une géolocalisation d'un MC Catcher. Déjà, à l'heure actuelle, on ne sait pas grand-chose. Lorsqu'on lit une procédure, on n'a que peu d'éléments. Puis surtout, il faut l'avouer, les narcotrafiquants utilisent eux-mêmes ces méthodes, et ils ont les déconnaissances de ces méthodes ailleurs que dans la procédure pénale. Donc finalement, on sent que l'idée, c'est d'aveugler la défense pour qu'elle puisse plus soulever de nullité. Et vous posez la question d'une dérive de l'exception. vers une généralisation de ce régime ? Si vous voulez, cette loi, outre les dispositions attentatoires au droit de la défense, elle participe d'un mouvement plus général. Dénoncé par la doctrine et certains avocats, c'est celle d'un glissement d'un régime d'exception pour des infractions très graves, où on justifie les règles attentatoires, vers un droit commun par accoutumance. Donc elle consiste à prévoir un régime uniquement pour certaines infractions, et puis petit à petit, l'élargir, l'élargir, pour qu'on arrive à ce que ces techniques très attentatoires soit du droit commun. Et c'est presque déjà le cas dans la loi narcotrafic. Parce que, déjà, l'ensemble des dispositions seront prévues pour toute la criminalité organisée, pas que pour le narcotrafic, et il y a certaines dispositions qui seront prévues pour toute infraction, peu importe criminalité organisée ou pas. Il est prévu que, lorsque un avocat voudra soulever des conclusions en nullité devant un tribunal, habituellement il peut le faire à tout moment, jusqu'au jour de l'audience. Désormais. Il devra déposer ses conclusions 5 jours avant le début de l'audience. Ça, c'est prévu dans la loi de narcotrafic. Sauf que ça va s'appliquer à toutes les infractions. Donc on a déjà cette généralisation.
- Speaker #0
D'accord, merci beaucoup. Et donc, selon vous, quelles seraient les autres solutions qui pourraient être envisagées ? Quels sont les besoins pour y répondre ?
- Speaker #1
Alors, c'est vrai que c'est toujours facile de critiquer, plus difficile de trouver des réponses. Je pense que l'axe premier, c'est rendre hermétiques les prisons pour que les individus ne puissent plus communiquer à l'extérieur. Et peut-être que l'impossible, et c'est à mon sens la seule solution qui est le remède, Merci. des moyens financiers humains supplémentaires pour les juges et pour les enquêteurs. Mais surtout de ne pas tomber dans le piège que nous tendent les narcotrafiquants. Et c'est un petit peu l'idée. Et ici, le nom de la proposition, c'est « loi visant à sortir la France du piège du narcotrafique » . Et cette utilisation de ce terme de piège, ça me fait penser à ce que disait Robert Badinter, non pas sur le narcotrafique, mais sur le terrorisme. Il disait que les terroristes nous tendent un piège. Et c'est les propos qu'il tient à cet égard. se transpose parfaitement en narcotrafic. Ce piège, il le décrit en indiquant que la justice doit décider du sort de ses individus en toute indépendance et dans le respect de l'état de droit. Ce n'est pas par des lois et des juridictions d'exception qu'on défend la liberté contre ses ennemis. Ce serait là un piège que l'histoire a déjà tendu aux démocraties. Il conclut en disant que celles qui y ont cédé n'ont rien gagné en efficacité répressive, mais beaucoup ont perdu en termes de liberté et parfois d'honneur.
- Speaker #0
Merci beaucoup sur ces belles paroles, M. Baduel, pour vos analyses. Nous espérons que cet épisode vous aura intéressé. N'hésitez pas à le partager autour de vous, à nous faire part de vos retours et pourquoi pas à nous suggérer des thématiques futures. A très bientôt pour un nouvel épisode de Codecast. Merci à toutes et à tous. Au revoir.
- Speaker #1
Au revoir.