- Speaker #0
Avec la prière et le travail, le repas est l'un des grands moments de la vie communautaire des moines. Ils descendent tous ensemble dans le grand réfectoire pour manger en silence. Pour comprendre le sens et l'importance du repas dans la vie monastique, je me suis rendu à l'abbaye Sainte-Marie de la Pierre-Kivir dans Lyon pour rencontrer Frère Xavier qui m'en a expliqué toutes les subtilités. Je suis Gilles Donada, journaliste à La Croix. Dans ce podcast, nous poussons la porte d'un monastère à la rencontre d'un moine ou d'une moniale qui témoigne de son aventure spirituelle. Vous écoutez la deuxième saison de Croix, Vides de Moines.
- Speaker #1
Béni sois-tu, Seigneur notre Dieu, en Jésus ton fils. Il vient sauver son peuple et lui donner la vie. Tegne bénir ce repas et accorde-nous de le prendre dans l'action de grâce, toi qui vis pour les siècles des siècles.
- Speaker #2
Bonjour, je suis Lisa,
- Speaker #3
je suis aussi catégiste et éditeur. Dans sa règle, Saint-Benoît fait un lien assez fort, je trouve, entre les offices à l'église et les repas. Donc il y a cette dimension communautaire, on vit ces deux événements ensemble. Il est important que tous les frères arrivent à l'heure au réfectoire, pour qu'on puisse dire à la prière de bénédicité ensemble, et de rester jusqu'à la fin du repas ensemble, de se mettre à table ensemble et de rester jusqu'à la fin de la prière. L'action de grâce, c'est vraiment un lieu, c'est comme l'église, c'est comme les offices. On est tous ensemble à l'office, on le met à l'heure à l'office, on le met à l'heure au repas aussi. C'est un lieu de communion, un lieu où la communauté, ma vie, quelque chose... de commun, on partage quelque chose de commun, c'est un moment important. Il y a dix chapitres dans la règle qui traitent des repas, donc ça montre que c'est sensible quand même. Par exemple, on voit, Saint-Benoît, il dit bien Il prévoit par exemple qu'il y ait toujours deux plats différents. Pour que si jamais un frère ne puisse pas manger d'un plat, il puisse manger un autre plat. Qu'il n'ait pas une occasion de murmurer. Ce qui est important pour Saint-Benoît, c'est d'éviter le murmure. Ça, ça revient souvent. Donc éviter que les frères aient l'occasion de se plaindre d'une chose ou d'une autre. Parce que souvent, on pense que les moines sont très détachés des choses matérielles. En fait, les questions alimentaires, ça reste une question. Ils sont très sensibles. On ne peut pas toucher à changer les habitudes aussi facilement.
- Speaker #0
Quels sont les types de fromages qui sont proposés aujourd'hui ?
- Speaker #4
Aujourd'hui, ça c'est du bleu, du bleu pain.
- Speaker #0
C'est de combien de centimètres ? Je vois que c'est millimètres près quand même les fromages.
- Speaker #5
C'est un centimètre ?
- Speaker #4
Non, le problème c'est qu'on est tout à fait sur chaque assiette. Donc il en faut suffisamment pour les gens qui ont des gros mangeurs et suffisamment pour les gens qui ne mangent pas beaucoup. La fois dernière j'avais fait à 2 centimètres, elle ne se fait pas à 5.
- Speaker #0
Vous avez eu des remarques ?
- Speaker #4
Non, ce n'est pas comme ça. Quand on ne les remarque, c'est de penser que ce sera le jour. On commence sur un percet, on n'a pas la réponse en cinq minutes. On est deux ans avant qu'il y ait un frère qui dise Ah, quand tu coupais le fromage, c'était toujours dommage, ils étaient trop petits.
- Speaker #3
Dans notre réfectoire, il y a plusieurs tables. Les places sont libres, chaque frère s'installe où il veut, c'est comme à l'église. Il y a quand même quelques places de réservées. C'est des tables de 8, et cette table est réservée à tous les frères qui vont devoir assurer le service pendant le repas. Il y a deux types de repas pour moi. Il y a les repas où je suis comme la majorité des frères, où je suis servi, et puis il y a les repas où je suis servant. Quand je suis servant de service, j'essaie de me concentrer sur mon service. Et donc de bien faire attention déjà aux frères avec lesquels je travaille, parce qu'on travaille toujours en binôme. On ne travaille pas toujours avec les mêmes frères, donc il faut s'adapter aux frères. Et puis ensuite, de faire en sorte que le service soit bien réalisé. Il faut bien faire les choses au bon moment, et puis il faut faire attention à tous les frères du réfectoire qui peuvent avoir des besoins, qui vont signaler par un geste, et donc il faut être attentif. Voilà, donc là, c'est... Dans ce cas-là, quand je suis de service, c'est vrai que je suis surtout occupé par le service. Ensuite, je ne suis pas de service, donc là je suis plus disponible pour vivre un peu plus spirituellement le repas. J'essaye aussi de faire attention aux autres frères, c'est important aussi. Pour éviter de faire du bruit, on communique par des signes. Par exemple, on a besoin d'avoir le sel, du pain ou de l'eau, on a des petits signes. Il faut faire attention, il ne faut pas garder ses yeux dans son assiette, il faut faire attention aux autres frères. pour voir s'ils n'ont pas de besoins particuliers. Une dimension importante du repas communautaire, c'est qu'on fait attention aux autres. On ne mange pas, on ne se sert pas, puis on mange, puis on s'attend. C'est important. Avant de commencer un plat, on attend que tous les frères aient fini le plat précédent. Là, en général, c'est le père abbé qui donne un peu le rythme. Il regarde un peu ce qui se passe sur les autres tables. Et puis quand il estime que tous les frères ont fini le premier plat, il commence le second plat. C'est le signal pour les frères qui peuvent aussi attaquer le second plat. Il y a une attention à l'autre, aux frères, qui est importante. C'est pour ça qu'on prend vraiment notre repas ensemble. Sinon, ce que j'aime bien aussi, c'est réfléchir à ce que je mange. Réfléchir, quand je mange du poisson, me dire d'où il vient. Il vient de la mer, de l'océan, il a été pêché, transporté, un peu transformé. Même tout ce que j'ai pour manger, c'est intéressant. Réfléchir par exemple aux couverts métalliques en acier, d'où ils viennent ? Ils viennent de la terre. Il a fallu extraire du fer, le transformer. En fait, tout ce qu'on a, c'est des choses basiques pour un repas. Un repas, c'est basique aussi. Quand on y réfléchit bien, ça met en œuvre des tas de choses. Il y a des tas de personnes qui ont travaillé pour nous en amont pour nous permettre de vivre ce repas. C'est aussi une façon de rendre grâce pour tout ce qui est fait, parce que si on n'avait pas tout ça, toutes ces personnes qui travaillent en amont, on ne pourrait pas vivre les repas comme on les vit aujourd'hui.
- Speaker #5
Un univers chante, prie de toi, le Seigneur vient. Un univers chante, prie de toi, le Seigneur vient. J'ai fait la rassurance, le Seigneur m'a consacré par l'ombre du Père. à moins de c'est très gourmand donc
- Speaker #3
on a de nombreuses nourritures en fait c'est toute la Toute notre vie, nos journées sont quand même bien chargées, bien régulées. Il y a beaucoup de temps de nourriture, notamment les offices, qui sont très complets, avec le chant des psaumes, avec des lectures, avec des temps de silence où on peut ruminer la lecture ou un verset de psaume qui nous a parlé aujourd'hui. Et puis le temps de Lectio Divina aussi. On médite un texte de la Bible. On aura des temps de lecture aussi personnels. des lectures spirituelles. Et puis on retrouve la lecture même au réfectoire, parce que nos repas sont pris en silence avec une lecture. C'est aussi un temps où on ne fait pas que manger, mais on écoute et puis on essaie de se laisser nourrir par cette lecture. Et puis il y a le temps d'oraison à la fin des vêpres, après les vêpres. Merci. Il y a beaucoup de temps qu'il nous nourrisse. On a vécu deux grands tournants ces dernières années. Le premier tournant, ça a été d'embaucher un salarié cuisinier. C'était une décision qui a été longuement débattue en communauté, parce qu'il y avait beaucoup de frères qui étaient attachés au fait de faire eux-mêmes la cuisine. Et puis en fait, on s'en est rendu à l'évidence qu'on ne pouvait plus, on n'avait plus la capacité pour faire nous-mêmes la cuisine. Donc on a embauché un salarié et on en est vraiment très contents. Et voilà la cuisine. Bonjour Waddy. Bonjour. Est-ce que tu nous copars de bon aujourd'hui ?
- Speaker #6
On va faire des pochets avec un petit jus au homard et des épinards fondus avec une petite crème. Le menu du midi.
- Speaker #3
C'est une surprise tous les jours.
- Speaker #6
Exactement. Ils ont la surprise. Mais c'est marqué sur le tableau le matin. Tous les menus du jour sont marqués le matin. Comme ça les frères voient à peu près le matin ce qu'ils vont manger le midi.
- Speaker #3
Et le jeudi, donc, ils nous font des menus spéciaux.
- Speaker #6
C'est un menu végétarien pour tout le monde.
- Speaker #3
Puis le deuxième tournant, ça a été notre engagement dans l'Église verte, il y a trois ans. Un des points à étudier dans notre démarche de conversion de l'écologie intégrale, c'est l'alimentation. Donc à partir des choix d'alimentation qu'on fait, on impacte plus ou moins notre environnement. En fait, on a fait une grande information qui était centrée sur ce thème de l'alimentation responsable, pour que tous les frères aient ces informations-là, qu'ils comprennent bien que... Que manger, ça a un impact non négligeable sur notre environnement, sur notre maison commune. C'est important de réfléchir à nos achats alimentaires, à nos habitudes alimentaires, et d'essayer de voir ensemble ce qu'on pourrait changer. Et donc là, petit à petit, on essaye de corriger des choses qui ne nous semblent pas très justes pour avoir une alimentation plus responsable. On a fait l'effort d'acheter maintenant tous nos œufs frais. Ce sont des œufs qui sont issus d'élevages respectueux des poules. Ça provient de poules qui sont élevées en plein air et pas en batterie comme avant. On essaye aussi... de proposer moins de viande, donc là c'est plus pour les hôtes, et nous aussi de manger moins de poissons, donc d'avoir moins de protéines animales. Et pour ça, on a instauré tous les jeudis un régime lacto-végétarien, à la fois pour le midi et le soir, pour nous et pour les hôtes, où on ne mange pas de protéines animales, sauf les produits laitiers. Et le mardi, c'est un menu végétarien où là on peut manger quand même des œufs. C'est important de passer le pas parce que c'est aussi un témoignage qu'on donne. Donc c'est assez symbolique parce que ça ne va pas changer le monde, mais c'est une façon de dire qu'on fait ce qui est à notre portée. C'est un petit pas, une petite goutte d'eau qu'on apporte pour essayer d'avoir une alimentation plus responsable.
- Speaker #0
Nous voici arrivés au terme du sixième épisode de Vie de Moine. S'il vous a intéressé, s'il vous a touché, n'hésitez pas à le partager, à vous abonner, à laisser une étoile, un avis ou un cœur. Croire est à retrouver sur toutes les plateformes et sur le site et l'appli La Croix.