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Dans mon cours

#1 Dans mon cours - Se former, se renouveler... et garder le plaisir d'enseigner

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26min |15/05/2024
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26min |15/05/2024
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Description

Dans ce premier épisode, nous avons le plaisir d’échanger avec Dorothée BUTIGIEG, enseignante d’anglais et directrice de la vie étudiante à l’Ecole normale supérieure - PSL.


A une époque où la formation des enseignants du supérieur n’existait pas, Dorothée nous raconte son entrée dans le métier et la façon dont elle prend du recul sur ses pratiques, pour se former continuellement et s’adapter aux besoins de ses étudiantes et étudiants.


Plus concrètement, elle relate dans ce podcast comment elle cherche à rendre son cours plus accessible et inclusif pour répondre à certains besoins spécifiques, en particulier des personnes au profil neuroatypique (spectre de l'autisme,  troubles de l'attention, troubles dys, etc.)


Transcription de l'épisode ici.


Voici des ressources complémentaires ou évoquées dans l’épisode :


 

Cet épisode vous a plu 👍 ? N’hésitez pas à vous abonner et à partager ce podcast autour de vous !  


Dans mon cours est un podcast du Centre d’innovation pédagogique - PSL. A travers une conversation et de façon très concrète, chacun sera invité à partager sur ses pratiques d’enseignement, autour d’un thème. Ces épisodes s’adressent à la communauté enseignante de PSL et bien au-delà ! A retrouver sur les plus grandes plateformes d’écoute !

 


 

Production : Centre d’innovation pédagogique - PSL  

Réalisation et écriture : Estelle GOUZE, Ulrike PETZOLD 

Réalisation sonore et montage : Félix VATON 

Illustration : Antoine BOURDON 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce tout premier épisode du podcast Dans mon cours. Je suis Estelle Gouze et je suis accompagnée aujourd'hui de ma collègue Ulrike Petzold. Bonjour. Ensemble, nous travaillons au Centre d'innovation pédagogique de BSL. Grâce à notre métier, nous rencontrons régulièrement des enseignantes et des enseignants de PSL qui nous racontent des pratiques pédagogiques qu'ils ont mis en place et nous souhaitons maintenant les inviter à partager leur expérience à travers cette série de podcasts. Et alors aujourd'hui, pour ce premier épisode, on va parler du métier d'enseignant, de remise en question et d'évolution des pratiques. Pour en parler, nous sommes ravis d'accueillir Dorothée Butigier, enseignante à l'ENS. Bonjour Dorothée.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de participer à ce premier épisode. Vous allez nous raconter votre parcours, mais aussi et surtout vos questionnements et les changements que vous avez opérés petit à petit dans votre façon d'enseigner. Et plus concrètement, on parlera en fin d'émission d'une évolution de votre cours qui concerne son accessibilité, c'est-à-dire un cours plus accessible aux personnes ayant ce qu'on appelle des neuroatypies, troubles dys, troubles du spectre de l'autisme, troubles de l'attention entre autres. Mais tout d'abord, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr. Je travaille à l'ENSPSL depuis maintenant plus de 20 ans. Et quand je dis ça, je prends un coup de vieux, mais je l'assume. J'enseigne un anglais général à des étudiantes et des étudiants de l'ENS qui sont issus de tous les départements, de toutes les disciplines et de toutes les années. Je suis très libre de choisir les activités, les approches, les thèmes de mes cours.

  • Speaker #0

    On va d'abord parler de votre vision du métier et de ses représentations. Pour commencer, qu'est-ce que vous aimez dans votre métier ?

  • Speaker #1

    Alors, contrairement à ce qu'on pense souvent, je crois que le métier d'enseignant, d'enseignante est un métier où il y a énormément de diversité. Et ça, c'est extrêmement précieux pour évidemment ne pas s'ennuyer dans ses activités quotidiennes. Donc, évidemment, il y a comme dans toute activité professionnelle, des redites, des répétitions, mais en fait, assez peu. Et vraiment, des expériences renouvelées avec une diversité de tâches, de missions, d'expériences et une possibilité vraiment d'évoluer au cours de sa carrière. Ce que j'apprécie beaucoup, et c'est aussi lié à là où j'enseigne, c'est la qualité des échanges avec les étudiantes et les étudiants. C'est quelque chose qui est extrêmement enrichissant.

  • Speaker #2

    Comment se sont passées vos premières années d'enseignement ?

  • Speaker #1

    J'ai commencé à enseigner assez vite après avoir passé les concours, sans la formation habituelle des enseignants, et avec un petit peu de coaching d'enseignantes plus expérimentées. Mais globalement, je me suis un peu débrouillée toute seule. Alors ça s'est plutôt bien passé, parce qu'avec un peu de bon sens, des ressources, et puis avec l'expérience qu'on acquiert assez vite finalement. On arrive à bâtir des cours, à avoir une vraie cohérence dans ses activités, dans son approche, mais c'était quand même extrêmement angoissant. Enfin, il faut quand même le dire, être devant une classe, quand on est jeune et inexpérimenté, c'est quand même très intimidant. On prépare beaucoup, on a toujours peur du blanc. Tout d'un coup, on ne sache plus quoi faire, pour ce qui n'arrive strictement jamais, évidemment. Ce sont des premiers moments devant la classe qui sont quand même... Un petit peu compliqué à gérer, mais aussi très exaltant, très épanouissant. Et on s'habitue, on se met au fur et à mesure dans la peau de l'enseignant, toute l'enseignant.

  • Speaker #2

    Et quelle était l'image du bon prof que vous aviez quand vous avez commencé ? Quel était votre objectif à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    J'avais eu de très bons profs, évidemment, pendant ma scolarité. Et comme tous les élèves, je savais très bien distinguer les bons des moins bons. Quand on est élève, on a un ressenti, mais qui n'est pas toujours basé sur des critères très objectifs. Pour moi, un bon prof, c'était quelqu'un qui savait... Voilà, une passionnée qui avait du savoir et qui savait le transmettre, qui nourrissait ses élèves. C'était un peu cette idée d'apporter, de déverser de façon quand même assez unilatérale. Aujourd'hui, j'ai une vision assez différente du bon enseignant. Pour moi, au lieu de nourrir à la cuillère, il donne la cuillère. Voilà, peut-être pour avoir une métaphore un petit peu simpliste. Un bon prof, c'est un prof qui donne des clés, en fait, qui suscite le questionnement, qui élargit le spectre des compétences, qui n'est pas simplement dans, effectivement, une transmission de savoir brut.

  • Speaker #2

    Et le prof, le bon prof, est-ce qu'il a le droit aussi de mettre l'étudiant un peu en difficulté ? Est-ce que ça reste un bon prof du point de vue de l'étudiant quand l'étudiant doit faire des efforts ?

  • Speaker #1

    Je croîtrais beaucoup à l'effort. Et donc effectivement, il doit mettre l'étudiante et l'étudiant à contribution. Mettre en difficulté, je dirais, pourquoi pas. Si le profil de l'étudiant, tout l'étudiant le permet, ce qui n'est pas le cas pour tout le monde, il y en a qu'il faut beaucoup plus mettre en confiance, mais en tout cas, il faut le rendre actif dans son apprentissage. Ça me paraît évident maintenant, alors qu'encore une fois, quand j'étais moi-même élève, je n'avais pas du tout conscience qu'il fallait que je sois plus active pour réfléchir à comment j'apprenais. J'avais une attitude très passive que je retrouve chez mes élèves aujourd'hui.

  • Speaker #0

    On travaille avec des nouveaux enseignants qui ont cette représentation de l'enseignant sachant, donc celui qui a la connaissance, le savoir et qui doit le divulguer. Et ce qu'on remarque, c'est qu'ils peuvent parfois en souffrir, c'est-à-dire qu'ils se mettent une certaine pression. Par exemple, la peur de ne pas savoir répondre à une question d'un étudiant, peur d'avoir des temps morts comme si le cours devait être un show continu. Et la plupart entament petit à petit un glissement de posture pour être tantôt prof, tantôt accompagnateur, coach. Chez vous, est-ce que cette posture a évolué et comment ?

  • Speaker #1

    Alors, clairement, il me semble qu'il y a un équilibre à trouver entre différentes activités et ces différentes postures. On ne peut pas simplement donner des instructions aux étudiants, les laisser se débrouiller sur toute la période du cours. Ils ont besoin d'être guidés, ils ont besoin de connaissances, ils ont besoin de méthodes, mais il faut trouver quand même un certain équilibre. Alors moi, je suis prof de langue, donc c'est aussi assez spécifique. Mon but, c'est... de donner confiance, de permettre la pratique, de permettre vraiment des interactions plus libres, moins angoissées par la grammaire, le S de la troisième personne du singulier. Donc, bien sûr, je corrige des fautes, bien sûr, je fais des rappels de grammaire, bien sûr, le vocabulaire est revu, mais l'objectif, c'est surtout de favoriser des interactions les plus spontanées et libres possibles. Mes meilleurs cours, c'est souvent les cours où moi je m'ennuie un peu. Parce qu'en fait, ce sont les étudiants qui sont aux commandes, qui sont actifs. Et moi, je les écoute. C'est vrai que moi, je préfère parler. Je préfère être moi, moi active. Mais ce n'est pas l'idéal pour l'auditoire.

  • Speaker #0

    Vous passez dans les rangs, vous allez voir les différents groupes. C'est ça. Quand on a préparé ce podcast, vous avez dit, il faut désacraliser l'enseignant. Pour se sentir plus à l'aise, justement, dire qu'on ne sait pas tout. Mais qu'on va, par exemple, chercher l'information.

  • Speaker #1

    Oui, alors aujourd'hui, ça me paraît une évidence, mais j'ai dû parcourir un long chemin pour réaliser que, en effet, l'enseignant n'était pas infaillible, n'était pas omniscient, n'était pas parfait. Et que pour que les étudiants aient confiance, il fallait être honnête avec eux à ce sujet-là. C'est-à-dire qu'il y a des choses qu'on ne sait pas, on fait des erreurs, et vraiment leur faire comprendre. qu'ils doivent aussi avoir un petit peu de recul, un peu de distance par rapport à leurs enseignantes et leurs enseignants, souvent qu'ils vénèrent dans une institution comme l'ENS. Et puis, il faut aussi reconnaître que dans ce processus d'apprentissage, l'enseignant, c'est une des parties prenantes, évidemment importantes, mais l'apprentissage, il se co-construit, surtout à un niveau, dans l'enseignement supérieur, on peut vraiment associer les étudiantes et les étudiants à l'élaboration du cours, à la réflexion sur les activités, Même s'ils ont un petit peu de mal à jouer le jeu, parce qu'ils attendent beaucoup de leurs profs.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous parlez aux étudiants de vos choix pédagogiques ? Pourquoi telle activité et pas une autre ?

  • Speaker #1

    J'essaie de le faire, notamment en début de semestre, en leur distribuant un syllabus qui explicite les grands objectifs. Je leur explique pourquoi dans beaucoup de mes cours, il y a des présentations orales, il y a du public speaking, parce qu'ils vont devoir en faire. Donc c'est un peu classique, la présentation orale, tout ça, ils peuvent se dire encore. Mais en fait, c'est quelque chose qu'il faut tellement qu'ils pratiquent que c'est très utile qu'ils puissent s'entraîner dès que possible. Mais j'ai l'impression que ça ne les intéresse pas beaucoup. C'est-à-dire que tout ce que je vais leur proposer, ils vont adhérer. Que ce soit le choix des évaluations, le choix des activités. Je leur explique aussi pourquoi je présente mon matériel de cours, tout ce qui est sur papier, d'une certaine façon. C'est lié à l'accessibilité, on en parlera tout à l'heure. Je n'ai pas l'impression que ça éveille beaucoup leur curiosité. Ils pourraient peut-être s'intéresser un petit peu plus à la façon dont on leur enseigne notre discipline, quitte à être plus critiques. C'est vraiment quand on fait passer des évaluations en fin de semestre. Souvent, c'est un petit peu quand même très général. C'était bien, merci. Voilà, je suis ravie. Mais peut-être quelques suggestions, un peu plus de précision dans les activités qui ont été les plus utiles, etc. Ça, ça manque un peu.

  • Speaker #0

    On va maintenant parler de pratiques réflexives quand on enseigne. Qu'est-ce que ce terme vous évoque ?

  • Speaker #1

    On est pris, nous les profs, comme tout le monde, dans un quotidien, une sorte de tourbillon d'urgence, de préparation, de correction, etc. Et on a des automatismes, donc on est assez vite dans une sorte de répétition quasi systématique de la façon, alors pas des contenus, mais de la façon dont on les aborde. Et on a évolué au fur et à mesure de son expérience. C'est vrai qu'on atteint à un moment une sorte de plateau où on sait que ça marche et on reproduit un petit peu les mêmes recettes. Alors, recette, évidemment, qui donne plutôt un bon résultat, parce qu'on demande à ses élèves d'évaluer le cours, on a des retours. Voilà, on voit que ça marche. Donc, il est temps de s'arrêter là et de continuer jusqu'à la retraite. Bon, à la fois pour les étudiantes et les étudiants et pour soi-même, se pencher un peu sur ce qu'on fait, comment on le fait et comment on pourrait le faire mieux. Évidemment, c'est quand même le but. C'est extrêmement constructif et plaisant et motivant.

  • Speaker #0

    C'est vrai que le métier d'enseignant peut être un peu répétitif. C'est vrai qu'on voit souvent les enseignants quand ils viennent nous voir, c'est aussi parce qu'ils commencent un peu à s'ennuyer aussi, finalement.

  • Speaker #1

    Tout à fait, mais ça, ça ne tient qu'à nous. Dans certains contextes d'enseignement, les choses sont très cadrées et on a peu de marge de manœuvre. Mais on en a en fait souvent plus qu'on ne pense. En changeant même des petites choses, on peut vraiment renouveler un petit peu ses façons de faire et aussi renouveler son intérêt et son enthousiasme.

  • Speaker #0

    Et du coup, concrètement, comment vous vous y prenez ?

  • Speaker #1

    C'est facile à dire, mais plus difficile à faire. Et notamment, c'est assez difficile de le faire seul. Déjà parce qu'on manque de temps, comme tout le monde, et qu'encore une fois, on est pris un peu dans le flot, dans la succession des séances. Et puis, c'est difficile de se regarder enseigner, tout simplement. Donc, c'est pour ça qu'avoir... Une aide extérieure sous de multiples formes, ça peut être des personnes qui viennent observer le cours, ça peut être des échanges avec d'autres enseignantes et enseignants, bien sûr des formations, mais qui vont nous faire réfléchir à ce qu'on fait et ce qu'on pourrait faire.

  • Speaker #2

    Est-ce que vous avez réussi à, du coup, de façon individuelle ? Aussi d'avoir un rituel pour faire ce travail de réflexion où ce n'est tout simplement pas possible dans le quotidien.

  • Speaker #1

    C'est compliqué en cours de semestre, on fait des ajustements. C'est-à-dire qu'on va réfléchir à une façon d'améliorer ce qu'on faisait avant, mais c'est en général un peu à la marge. Je pense qu'il faut vraiment une prise de distance, un peu de recul, et c'est justement en dehors du semestre. C'est pour ça que moi je l'ai fait plutôt en fin d'année, après la fin du deuxième semestre. Alors avant l'été, alors évidemment on est un peu déconnecté de l'année suivante et de la reprise des cours, on est plutôt dans la fin d'un cycle, mais c'est quand même un bon moment justement pour avoir une distance plus radicale et des changements plus importants. Le centre d'innovation pédagogique m'a énormément aidée et ça répondait à un besoin. existentielle, j'oserais dire, que je ressentais depuis plusieurs années, de réfléchir sur ce que je faisais, d'avoir un apport un peu théorique, mais aussi pratique, pour mieux concevoir mes cours, mieux évaluer mes étudiantes et mes étudiants. Et là, vraiment, j'ai trouvé au CIP de PSL tout ce dont j'avais besoin. Alors, j'ai eu la chance d'avoir un accompagnement personnalisé, ça, c'était vraiment grandiose. J'ai travaillé avec deux ingénieurs pédagogiques sur un de mes cours, donc c'était très concret. Voilà, avoir une vision extérieure, des suggestions bien sûr, il n'y a aucune injonction d'aucune sorte, mais un vrai dialogue pour voir comment le cours est conçu, comment la progression se fait, quel est l'alignement pédagogique qui est absolument central.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on définit ce qu'est l'alignement pédagogique ?

  • Speaker #2

    Alors l'alignement pédagogique, ce n'est pas un gros mot aussi, mais en fait ça désigne tout simplement... La cohérence entre les objectifs d'apprentissage, l'évaluation qu'on propose aux étudiants et les activités qu'on fait faire pendant le cours.

  • Speaker #1

    Évidemment, il y avait un alignement pédagogique, mais qui pourrait être amélioré. Tout ça a été très utile.

  • Speaker #2

    Et peut-être que c'est aussi tout simplement un temps, par cet accompagnement qui est structuré, un temps qu'on libère et qu'on aurait peut-être plus de mal à libérer tout seul, sans partenaire.

  • Speaker #1

    On ne va pas bloquer des créneaux dans son agenda en se disant aujourd'hui, je vais réfléchir à tel cours Donc, en effet, ça force un peu à y consacrer du temps. Et encore une fois, il n'y a rien eu d'inutile, absolument rien d'inutile. Beaucoup de suggestions extrêmement pertinentes, qui m'ont paru évidentes, je me suis dit, mais effectivement, pourquoi je n'ai pas réfléchi plus tôt, rien que ça, en fait. Et des solutions concrètes pour vraiment faciliter les échanges, pour clarifier les attendus. Tout ça a été vraiment très très précieux.

  • Speaker #0

    Vous avez récemment participé au cours d'une collègue pour justement découvrir de nouvelles façons d'enseigner. Qu'est-ce que ça vous a apporté ?

  • Speaker #1

    Oui, alors j'ai participé en effet à ce dispositif que propose le CIP, qui est très simple, qui consiste à aller observer le cours d'un ou une collègue de la même discipline de préférence, qui est venu ensuite également observer un de mes cours, et évidemment l'expérience de cette observation. Rien que le fait de s'asseoir au fond de la salle, d'avoir une vision un peu générale de ce qui se passe, c'est assez intéressant d'avoir une autre approche et un regard attentif sur différentes facettes du cours. Et notamment la façon dont l'enseignante interagit avec son auditoire, c'était très très éclairant. Et j'ai retenu pas mal de petits trucs, d'activités, de façons dont certaines compétences étaient travaillées, que j'ai immédiatement réutilisées dans mes cours. C'était un cours à Dauphine avec des objectifs, un contenu et puis un public qui est un petit peu différent de mon expérience à l'ENS. Mais malgré tout, j'en ai retenu beaucoup de choses et puis l'échange avec l'enseignante a été très riche. Également, quand elle est venue observer mon cours, son retour, ses remarques ont été vraiment très utiles. Très belle expérience.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a une pratique ? Vous avez dit que vous avez mis en place des choses assez immédiatement, par exemple, c'est quoi ? S'il y avait un exemple à donner ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je fais travailler pas mal mes étudiantes et mes étudiants en petits groupes pour qu'ils fassent du travail par pair ou par trois. Et par facilité, je dirais, dans ma salle de cours, ils discutaient avec leurs voisins. Le problème, c'est que leurs voisins voisines sont souvent les gens qu'ils connaissent, ils s'assoient toujours selon le même plan, donc ils parlent toujours avec les mêmes. Ce que fait ma collègue, c'est qu'elle donne à chacun un chiffre, 1, 2, 3, 1, 2, 3, 1, 2, 3, en désignant chaque élève. Et ensuite, tous les uns se rassemblent, donc ils sont obligés de bouger. Déjà, c'est une bonne chose qu'ils puissent se lever et se regrouper. Ça crée un petit peu de chaos pendant quelques secondes, mais c'est très bien, un petit peu de chaos pendant quelques secondes. Et ça leur permet donc d'interagir avec des personnes différentes. C'est vraiment un petit truc. Tout bête, ça ne m'était jamais venu à l'esprit.

  • Speaker #0

    Mais souvent, c'est ça, c'est les retours qu'on a. C'est vraiment des petites choses qu'on ajuste après.

  • Speaker #1

    Et il y a aussi des choses beaucoup moins accessoires, comme son travail sur le vocabulaire, qui était très intéressant. Faire travailler sur les synonymes de façon assez fluide dans le cours. J'ai trouvé ça très intéressant, parce qu'ils ont besoin d'enrichir leur vocabulaire. Souvent, ils connaissent des termes qu'ils n'utilisent pas. Et au détour d'une activité de vraiment les forcer à explorer des champs lexicaux, ça se faisait de façon relativement spontanée et naturelle, et c'est je pense très efficace, quel que soit son public.

  • Speaker #0

    Alors, il y a un sujet qui est très important pour vous et dont vous aviez parlé avec cette collègue, c'est la question de l'accessibilité, c'est-à-dire ce qu'on peut faire pour rendre son cours plus accessible, plus inclusif aux personnes porteuses de handicap ou avec ce qu'on appelle des neuroatypies, troubles dys, spectre de l'autisme, troubles de l'attention. Vous, à quel moment vous vous êtes dit, il faut que j'améliore l'accessibilité de mon cours et qu'est-ce que vous avez mis en place en fait concrètement ?

  • Speaker #1

    C'est grâce à ma mission de directrice de la vie étudiante que je mène en complément de mes activités d'enseignement, que j'ai été amenée à recevoir des témoignages et à organiser des sensibilisations sur le sujet. Ce n'est pas parce que des étudiantes ou des étudiants sont venus à mon cours, se sont présentés avec des demandes d'aménagement. ou avec des demandes spécifiques. Ça, ça ne m'est jamais arrivé. Or, je sais que dans la communauté étudiante de notre établissement, comme dans celle de tout établissement d'ailleurs, certaines personnes ont des besoins particuliers ou des difficultés qui sont liées à des troubles ou des situations de handicap plus sévères. Un certain nombre de conseils ont été prodigués dans ces sessions de sensibilisation qui m'ont paru tellement faciles à mettre en place. En fait, les recommandations se recoupent. Donc ça, c'est quand même une très bonne nouvelle. C'est-à-dire que ce qu'on va faire pour améliorer l'accessibilité de son cours pour quelqu'un qui est sur le spectre de l'autisme, ça va aussi aider quelqu'un qui est dyslexique, ça va aussi aider un étudiant ou une étudiante internationale. En fait, ça va aider tout le monde. C'est-à-dire que personne ne va être pénalisé par ces adaptations. Donc la démarche que j'ai adoptée, c'est vraiment de systématiquement adapter les cours pour que, quel que soit le public, ils soient plus accessibles à une diversité de profils, sans attendre justement que quelqu'un vienne avec un certificat médical, une recommandation d'aménagement du service de médecine préventive, disant de faire ci ou ça. Et en fait, c'est un petit peu chronophage au départ, mais assez simple.

  • Speaker #0

    Et concrètement, comment on fait pour rendre son cours plus accessible ? Est-ce qu'il faut changer ses supports ? Est-ce qu'il y a une police particulière ?

  • Speaker #1

    Alors, moi évidemment, ce que j'ai fait, c'est loin d'être parfait. Et il y a encore vraiment des choses sur lesquelles il faudrait que je travaille pour que mes cours soient encore plus accessibles. Mais j'ai effectivement travaillé sur les supports pour les rendre plus structurés, plus lisibles. Il y a des polices qui sont beaucoup plus claires. Bien numéroter les pages, avoir des pieds de page et des en-têtes pour bien identifier de quoi il s'agit. C'est vraiment des choses très très simples. Avoir la même présentation pour tous les supports aide également. Alors ça m'a obligée, parce que j'avais des extraits de romans que j'avais au départ photocopiés, puis collés avec de la colle et des ciseaux. Ça m'a obligée à tout retaper. Donc c'est vrai que j'y ai passé une partie d'un été, mais maintenant j'ai des choses propres. Enfin, c'est quand même très utile. On travaille sur d'autres choses. Moodle, évidemment, aide beaucoup pour expliciter tous les attendus, pouvoir mettre sur un même espace l'ensemble des documents du cours, l'ensemble des informations. J'ai mis en place aussi un truc tout bête, des pauses. Moi, j'ai des cours de deux heures. Et puis, évidemment, j'ai toujours des tas de choses à faire. Mais je ménage une pause entre ces deux heures, même brève, parce que je sais que ça peut être pour certaines personnes. Vraiment extrêmement utile de pouvoir s'isoler quelques minutes.

  • Speaker #0

    Donc du coup, l'importance d'avoir un syllabus très clair. Il me semble que vous aviez parlé aussi de mettre le numéro des salles, parce qu'elles changent beaucoup à l'ENS et ça peut être source de stress aussi pour des étudiants qui seraient atteints de troubles de l'autisme, des choses comme ça.

  • Speaker #1

    Tout à fait. Tout ce qu'on peut faire pour clarifier. Mettre à l'écrit, ne pas compter. Moi, je comptais beaucoup sur l'oral avant. C'est-à-dire, une fois que j'avais dit quelque chose, voilà, c'était bon, c'était acquis. Maintenant, j'écris tout. Je fais des rappels grâce aux annonces sur Moodle. Ce n'est pas infantilisant, ce n'est pas abétissant. C'est utile pour absolument tout le monde. Donc, ça prend un tout petit peu plus de temps. Mais je pense que les bénéfices excèdent beaucoup les petits inconvénients que ça peut présenter. On prend très vite des automatismes, des réflexes pour le faire.

  • Speaker #0

    Ce qu'on peut dire pour conclure ce thème, c'est qu'on mettra aussi des ressources sur la prise en compte du handicap pour rendre son cours plus accessible, plus inclusif. Il y a notamment à Sciences Po, ils ont fait des fiches pratiques de choses qu'on peut mettre en place dans son cours pour le rendre plus accessible. Donc on mettra ces ressources dans la description du podcast. On arrive à la fin de cet épisode. Pour finir, quels sont vos projets à venir ?

  • Speaker #1

    L'année prochaine, je vais aller enseigner au CPES de PSL pour donner un cours de debating. Ça fait des années que j'enseigne un cours de debating à l'ENS. Je vais collaborer avec une collègue qui a mis en place un cours de debating au CPES et qui le fait de façon différente dans ses modalités d'évaluation, dans les contenus. Elle a beaucoup plus d'heures, donc c'est un petit peu différent. Et alors, je suis... enthousiaste à l'idée justement d'avoir un travail d'équipe sur un objet que je connais bien pour effectivement un petit peu me sortir de mes automatismes pour ce cours et avoir de nouvelles idées que je pourrais éventuellement appliquer à l'ENS également. Donc ce cours de debating sera donné dans le cadre de la deuxième année du CPS, de ce cycle pluridisciplinaire d'études supérieures, qui est une formation de premier cycle d'EPSL. qui mêle des enseignements en lycée, à Louis-le-Grand ou Henri IV, et dans les différents établissements de PSL, donc une formation de premier cycle pluridisciplinaire assez originale.

  • Speaker #0

    Le mot de la fin, c'est une question qu'on va poser à tous nos invités. Quel conseil auriez-vous aimé avoir quand vous avez commencé à enseigner et lequel voudriez-vous donner à quelqu'un qui débute ?

  • Speaker #1

    Ah, quelle bonne question. Alors, bien sûr, on a, je pense, un peu toutes et tous, au début de notre carrière, un syndrome de l'imposteur, où on se sent un petit peu désarmé face à l'ampleur de la tâche. Donc, effectivement, il faut prendre confiance et la confiance vient naturellement avec l'expérience, bien sûr. Mais il faut aussi que cette confiance, elle ne soit pas inébranlable et qu'elle n'empêche pas, malgré tout, des questionnements, parfois des remises en question de ce qu'on fait. Ça peut être des petites choses ou des grandes choses pour savoir se renouveler, se former, s'informer et bien sûr échanger. C'est difficile d'échanger avec ses collègues. En fait, on se croise, on parle de tas de choses, très rarement de pratiques d'enseignement, de ce qui se passe réellement dans la salle de classe. Et pourtant, c'est très riche. de pouvoir s'inspirer de ce qui se fait ailleurs, de pouvoir donner quelques idées à ses collègues. Mais on n'en a pas l'occasion, le cadre n'existe pas pour le faire. Il faut se forcer un petit peu, je pense, sortir parfois de sa zone de confort pour retrouver encore une fois l'enthousiasme et la fraîcheur de ses débuts.

  • Speaker #0

    Et bien c'est la fin de cet épisode. Merci beaucoup Dorothée pour ce partage d'expérience.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    Merci à tous de nous avoir écoutés. Vous trouverez en lien une fiche qui résume les pratiques pédagogiques que nous venons d'aborder. Merci à Félix Vatton pour la réalisation, le montage et le mixage. N'hésitez pas à partager ce podcast et si vous souhaitez faire évoluer votre cours, sachez que le Centre d'innovation pédagogique de PSL peut vous accompagner. A bientôt pour un prochain épisode.

Chapters

  • Chapitre 1 : L'entrée dans le métier

    01:54

  • Chapitre 2 : Prendre du recul sur sa pratique

    10:04

  • Chapitre 3 : Rendre son cours plus accessible et inclusif

    18:20

Description

Dans ce premier épisode, nous avons le plaisir d’échanger avec Dorothée BUTIGIEG, enseignante d’anglais et directrice de la vie étudiante à l’Ecole normale supérieure - PSL.


A une époque où la formation des enseignants du supérieur n’existait pas, Dorothée nous raconte son entrée dans le métier et la façon dont elle prend du recul sur ses pratiques, pour se former continuellement et s’adapter aux besoins de ses étudiantes et étudiants.


Plus concrètement, elle relate dans ce podcast comment elle cherche à rendre son cours plus accessible et inclusif pour répondre à certains besoins spécifiques, en particulier des personnes au profil neuroatypique (spectre de l'autisme,  troubles de l'attention, troubles dys, etc.)


Transcription de l'épisode ici.


Voici des ressources complémentaires ou évoquées dans l’épisode :


 

Cet épisode vous a plu 👍 ? N’hésitez pas à vous abonner et à partager ce podcast autour de vous !  


Dans mon cours est un podcast du Centre d’innovation pédagogique - PSL. A travers une conversation et de façon très concrète, chacun sera invité à partager sur ses pratiques d’enseignement, autour d’un thème. Ces épisodes s’adressent à la communauté enseignante de PSL et bien au-delà ! A retrouver sur les plus grandes plateformes d’écoute !

 


 

Production : Centre d’innovation pédagogique - PSL  

Réalisation et écriture : Estelle GOUZE, Ulrike PETZOLD 

Réalisation sonore et montage : Félix VATON 

Illustration : Antoine BOURDON 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce tout premier épisode du podcast Dans mon cours. Je suis Estelle Gouze et je suis accompagnée aujourd'hui de ma collègue Ulrike Petzold. Bonjour. Ensemble, nous travaillons au Centre d'innovation pédagogique de BSL. Grâce à notre métier, nous rencontrons régulièrement des enseignantes et des enseignants de PSL qui nous racontent des pratiques pédagogiques qu'ils ont mis en place et nous souhaitons maintenant les inviter à partager leur expérience à travers cette série de podcasts. Et alors aujourd'hui, pour ce premier épisode, on va parler du métier d'enseignant, de remise en question et d'évolution des pratiques. Pour en parler, nous sommes ravis d'accueillir Dorothée Butigier, enseignante à l'ENS. Bonjour Dorothée.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de participer à ce premier épisode. Vous allez nous raconter votre parcours, mais aussi et surtout vos questionnements et les changements que vous avez opérés petit à petit dans votre façon d'enseigner. Et plus concrètement, on parlera en fin d'émission d'une évolution de votre cours qui concerne son accessibilité, c'est-à-dire un cours plus accessible aux personnes ayant ce qu'on appelle des neuroatypies, troubles dys, troubles du spectre de l'autisme, troubles de l'attention entre autres. Mais tout d'abord, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr. Je travaille à l'ENSPSL depuis maintenant plus de 20 ans. Et quand je dis ça, je prends un coup de vieux, mais je l'assume. J'enseigne un anglais général à des étudiantes et des étudiants de l'ENS qui sont issus de tous les départements, de toutes les disciplines et de toutes les années. Je suis très libre de choisir les activités, les approches, les thèmes de mes cours.

  • Speaker #0

    On va d'abord parler de votre vision du métier et de ses représentations. Pour commencer, qu'est-ce que vous aimez dans votre métier ?

  • Speaker #1

    Alors, contrairement à ce qu'on pense souvent, je crois que le métier d'enseignant, d'enseignante est un métier où il y a énormément de diversité. Et ça, c'est extrêmement précieux pour évidemment ne pas s'ennuyer dans ses activités quotidiennes. Donc, évidemment, il y a comme dans toute activité professionnelle, des redites, des répétitions, mais en fait, assez peu. Et vraiment, des expériences renouvelées avec une diversité de tâches, de missions, d'expériences et une possibilité vraiment d'évoluer au cours de sa carrière. Ce que j'apprécie beaucoup, et c'est aussi lié à là où j'enseigne, c'est la qualité des échanges avec les étudiantes et les étudiants. C'est quelque chose qui est extrêmement enrichissant.

  • Speaker #2

    Comment se sont passées vos premières années d'enseignement ?

  • Speaker #1

    J'ai commencé à enseigner assez vite après avoir passé les concours, sans la formation habituelle des enseignants, et avec un petit peu de coaching d'enseignantes plus expérimentées. Mais globalement, je me suis un peu débrouillée toute seule. Alors ça s'est plutôt bien passé, parce qu'avec un peu de bon sens, des ressources, et puis avec l'expérience qu'on acquiert assez vite finalement. On arrive à bâtir des cours, à avoir une vraie cohérence dans ses activités, dans son approche, mais c'était quand même extrêmement angoissant. Enfin, il faut quand même le dire, être devant une classe, quand on est jeune et inexpérimenté, c'est quand même très intimidant. On prépare beaucoup, on a toujours peur du blanc. Tout d'un coup, on ne sache plus quoi faire, pour ce qui n'arrive strictement jamais, évidemment. Ce sont des premiers moments devant la classe qui sont quand même... Un petit peu compliqué à gérer, mais aussi très exaltant, très épanouissant. Et on s'habitue, on se met au fur et à mesure dans la peau de l'enseignant, toute l'enseignant.

  • Speaker #2

    Et quelle était l'image du bon prof que vous aviez quand vous avez commencé ? Quel était votre objectif à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    J'avais eu de très bons profs, évidemment, pendant ma scolarité. Et comme tous les élèves, je savais très bien distinguer les bons des moins bons. Quand on est élève, on a un ressenti, mais qui n'est pas toujours basé sur des critères très objectifs. Pour moi, un bon prof, c'était quelqu'un qui savait... Voilà, une passionnée qui avait du savoir et qui savait le transmettre, qui nourrissait ses élèves. C'était un peu cette idée d'apporter, de déverser de façon quand même assez unilatérale. Aujourd'hui, j'ai une vision assez différente du bon enseignant. Pour moi, au lieu de nourrir à la cuillère, il donne la cuillère. Voilà, peut-être pour avoir une métaphore un petit peu simpliste. Un bon prof, c'est un prof qui donne des clés, en fait, qui suscite le questionnement, qui élargit le spectre des compétences, qui n'est pas simplement dans, effectivement, une transmission de savoir brut.

  • Speaker #2

    Et le prof, le bon prof, est-ce qu'il a le droit aussi de mettre l'étudiant un peu en difficulté ? Est-ce que ça reste un bon prof du point de vue de l'étudiant quand l'étudiant doit faire des efforts ?

  • Speaker #1

    Je croîtrais beaucoup à l'effort. Et donc effectivement, il doit mettre l'étudiante et l'étudiant à contribution. Mettre en difficulté, je dirais, pourquoi pas. Si le profil de l'étudiant, tout l'étudiant le permet, ce qui n'est pas le cas pour tout le monde, il y en a qu'il faut beaucoup plus mettre en confiance, mais en tout cas, il faut le rendre actif dans son apprentissage. Ça me paraît évident maintenant, alors qu'encore une fois, quand j'étais moi-même élève, je n'avais pas du tout conscience qu'il fallait que je sois plus active pour réfléchir à comment j'apprenais. J'avais une attitude très passive que je retrouve chez mes élèves aujourd'hui.

  • Speaker #0

    On travaille avec des nouveaux enseignants qui ont cette représentation de l'enseignant sachant, donc celui qui a la connaissance, le savoir et qui doit le divulguer. Et ce qu'on remarque, c'est qu'ils peuvent parfois en souffrir, c'est-à-dire qu'ils se mettent une certaine pression. Par exemple, la peur de ne pas savoir répondre à une question d'un étudiant, peur d'avoir des temps morts comme si le cours devait être un show continu. Et la plupart entament petit à petit un glissement de posture pour être tantôt prof, tantôt accompagnateur, coach. Chez vous, est-ce que cette posture a évolué et comment ?

  • Speaker #1

    Alors, clairement, il me semble qu'il y a un équilibre à trouver entre différentes activités et ces différentes postures. On ne peut pas simplement donner des instructions aux étudiants, les laisser se débrouiller sur toute la période du cours. Ils ont besoin d'être guidés, ils ont besoin de connaissances, ils ont besoin de méthodes, mais il faut trouver quand même un certain équilibre. Alors moi, je suis prof de langue, donc c'est aussi assez spécifique. Mon but, c'est... de donner confiance, de permettre la pratique, de permettre vraiment des interactions plus libres, moins angoissées par la grammaire, le S de la troisième personne du singulier. Donc, bien sûr, je corrige des fautes, bien sûr, je fais des rappels de grammaire, bien sûr, le vocabulaire est revu, mais l'objectif, c'est surtout de favoriser des interactions les plus spontanées et libres possibles. Mes meilleurs cours, c'est souvent les cours où moi je m'ennuie un peu. Parce qu'en fait, ce sont les étudiants qui sont aux commandes, qui sont actifs. Et moi, je les écoute. C'est vrai que moi, je préfère parler. Je préfère être moi, moi active. Mais ce n'est pas l'idéal pour l'auditoire.

  • Speaker #0

    Vous passez dans les rangs, vous allez voir les différents groupes. C'est ça. Quand on a préparé ce podcast, vous avez dit, il faut désacraliser l'enseignant. Pour se sentir plus à l'aise, justement, dire qu'on ne sait pas tout. Mais qu'on va, par exemple, chercher l'information.

  • Speaker #1

    Oui, alors aujourd'hui, ça me paraît une évidence, mais j'ai dû parcourir un long chemin pour réaliser que, en effet, l'enseignant n'était pas infaillible, n'était pas omniscient, n'était pas parfait. Et que pour que les étudiants aient confiance, il fallait être honnête avec eux à ce sujet-là. C'est-à-dire qu'il y a des choses qu'on ne sait pas, on fait des erreurs, et vraiment leur faire comprendre. qu'ils doivent aussi avoir un petit peu de recul, un peu de distance par rapport à leurs enseignantes et leurs enseignants, souvent qu'ils vénèrent dans une institution comme l'ENS. Et puis, il faut aussi reconnaître que dans ce processus d'apprentissage, l'enseignant, c'est une des parties prenantes, évidemment importantes, mais l'apprentissage, il se co-construit, surtout à un niveau, dans l'enseignement supérieur, on peut vraiment associer les étudiantes et les étudiants à l'élaboration du cours, à la réflexion sur les activités, Même s'ils ont un petit peu de mal à jouer le jeu, parce qu'ils attendent beaucoup de leurs profs.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous parlez aux étudiants de vos choix pédagogiques ? Pourquoi telle activité et pas une autre ?

  • Speaker #1

    J'essaie de le faire, notamment en début de semestre, en leur distribuant un syllabus qui explicite les grands objectifs. Je leur explique pourquoi dans beaucoup de mes cours, il y a des présentations orales, il y a du public speaking, parce qu'ils vont devoir en faire. Donc c'est un peu classique, la présentation orale, tout ça, ils peuvent se dire encore. Mais en fait, c'est quelque chose qu'il faut tellement qu'ils pratiquent que c'est très utile qu'ils puissent s'entraîner dès que possible. Mais j'ai l'impression que ça ne les intéresse pas beaucoup. C'est-à-dire que tout ce que je vais leur proposer, ils vont adhérer. Que ce soit le choix des évaluations, le choix des activités. Je leur explique aussi pourquoi je présente mon matériel de cours, tout ce qui est sur papier, d'une certaine façon. C'est lié à l'accessibilité, on en parlera tout à l'heure. Je n'ai pas l'impression que ça éveille beaucoup leur curiosité. Ils pourraient peut-être s'intéresser un petit peu plus à la façon dont on leur enseigne notre discipline, quitte à être plus critiques. C'est vraiment quand on fait passer des évaluations en fin de semestre. Souvent, c'est un petit peu quand même très général. C'était bien, merci. Voilà, je suis ravie. Mais peut-être quelques suggestions, un peu plus de précision dans les activités qui ont été les plus utiles, etc. Ça, ça manque un peu.

  • Speaker #0

    On va maintenant parler de pratiques réflexives quand on enseigne. Qu'est-ce que ce terme vous évoque ?

  • Speaker #1

    On est pris, nous les profs, comme tout le monde, dans un quotidien, une sorte de tourbillon d'urgence, de préparation, de correction, etc. Et on a des automatismes, donc on est assez vite dans une sorte de répétition quasi systématique de la façon, alors pas des contenus, mais de la façon dont on les aborde. Et on a évolué au fur et à mesure de son expérience. C'est vrai qu'on atteint à un moment une sorte de plateau où on sait que ça marche et on reproduit un petit peu les mêmes recettes. Alors, recette, évidemment, qui donne plutôt un bon résultat, parce qu'on demande à ses élèves d'évaluer le cours, on a des retours. Voilà, on voit que ça marche. Donc, il est temps de s'arrêter là et de continuer jusqu'à la retraite. Bon, à la fois pour les étudiantes et les étudiants et pour soi-même, se pencher un peu sur ce qu'on fait, comment on le fait et comment on pourrait le faire mieux. Évidemment, c'est quand même le but. C'est extrêmement constructif et plaisant et motivant.

  • Speaker #0

    C'est vrai que le métier d'enseignant peut être un peu répétitif. C'est vrai qu'on voit souvent les enseignants quand ils viennent nous voir, c'est aussi parce qu'ils commencent un peu à s'ennuyer aussi, finalement.

  • Speaker #1

    Tout à fait, mais ça, ça ne tient qu'à nous. Dans certains contextes d'enseignement, les choses sont très cadrées et on a peu de marge de manœuvre. Mais on en a en fait souvent plus qu'on ne pense. En changeant même des petites choses, on peut vraiment renouveler un petit peu ses façons de faire et aussi renouveler son intérêt et son enthousiasme.

  • Speaker #0

    Et du coup, concrètement, comment vous vous y prenez ?

  • Speaker #1

    C'est facile à dire, mais plus difficile à faire. Et notamment, c'est assez difficile de le faire seul. Déjà parce qu'on manque de temps, comme tout le monde, et qu'encore une fois, on est pris un peu dans le flot, dans la succession des séances. Et puis, c'est difficile de se regarder enseigner, tout simplement. Donc, c'est pour ça qu'avoir... Une aide extérieure sous de multiples formes, ça peut être des personnes qui viennent observer le cours, ça peut être des échanges avec d'autres enseignantes et enseignants, bien sûr des formations, mais qui vont nous faire réfléchir à ce qu'on fait et ce qu'on pourrait faire.

  • Speaker #2

    Est-ce que vous avez réussi à, du coup, de façon individuelle ? Aussi d'avoir un rituel pour faire ce travail de réflexion où ce n'est tout simplement pas possible dans le quotidien.

  • Speaker #1

    C'est compliqué en cours de semestre, on fait des ajustements. C'est-à-dire qu'on va réfléchir à une façon d'améliorer ce qu'on faisait avant, mais c'est en général un peu à la marge. Je pense qu'il faut vraiment une prise de distance, un peu de recul, et c'est justement en dehors du semestre. C'est pour ça que moi je l'ai fait plutôt en fin d'année, après la fin du deuxième semestre. Alors avant l'été, alors évidemment on est un peu déconnecté de l'année suivante et de la reprise des cours, on est plutôt dans la fin d'un cycle, mais c'est quand même un bon moment justement pour avoir une distance plus radicale et des changements plus importants. Le centre d'innovation pédagogique m'a énormément aidée et ça répondait à un besoin. existentielle, j'oserais dire, que je ressentais depuis plusieurs années, de réfléchir sur ce que je faisais, d'avoir un apport un peu théorique, mais aussi pratique, pour mieux concevoir mes cours, mieux évaluer mes étudiantes et mes étudiants. Et là, vraiment, j'ai trouvé au CIP de PSL tout ce dont j'avais besoin. Alors, j'ai eu la chance d'avoir un accompagnement personnalisé, ça, c'était vraiment grandiose. J'ai travaillé avec deux ingénieurs pédagogiques sur un de mes cours, donc c'était très concret. Voilà, avoir une vision extérieure, des suggestions bien sûr, il n'y a aucune injonction d'aucune sorte, mais un vrai dialogue pour voir comment le cours est conçu, comment la progression se fait, quel est l'alignement pédagogique qui est absolument central.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on définit ce qu'est l'alignement pédagogique ?

  • Speaker #2

    Alors l'alignement pédagogique, ce n'est pas un gros mot aussi, mais en fait ça désigne tout simplement... La cohérence entre les objectifs d'apprentissage, l'évaluation qu'on propose aux étudiants et les activités qu'on fait faire pendant le cours.

  • Speaker #1

    Évidemment, il y avait un alignement pédagogique, mais qui pourrait être amélioré. Tout ça a été très utile.

  • Speaker #2

    Et peut-être que c'est aussi tout simplement un temps, par cet accompagnement qui est structuré, un temps qu'on libère et qu'on aurait peut-être plus de mal à libérer tout seul, sans partenaire.

  • Speaker #1

    On ne va pas bloquer des créneaux dans son agenda en se disant aujourd'hui, je vais réfléchir à tel cours Donc, en effet, ça force un peu à y consacrer du temps. Et encore une fois, il n'y a rien eu d'inutile, absolument rien d'inutile. Beaucoup de suggestions extrêmement pertinentes, qui m'ont paru évidentes, je me suis dit, mais effectivement, pourquoi je n'ai pas réfléchi plus tôt, rien que ça, en fait. Et des solutions concrètes pour vraiment faciliter les échanges, pour clarifier les attendus. Tout ça a été vraiment très très précieux.

  • Speaker #0

    Vous avez récemment participé au cours d'une collègue pour justement découvrir de nouvelles façons d'enseigner. Qu'est-ce que ça vous a apporté ?

  • Speaker #1

    Oui, alors j'ai participé en effet à ce dispositif que propose le CIP, qui est très simple, qui consiste à aller observer le cours d'un ou une collègue de la même discipline de préférence, qui est venu ensuite également observer un de mes cours, et évidemment l'expérience de cette observation. Rien que le fait de s'asseoir au fond de la salle, d'avoir une vision un peu générale de ce qui se passe, c'est assez intéressant d'avoir une autre approche et un regard attentif sur différentes facettes du cours. Et notamment la façon dont l'enseignante interagit avec son auditoire, c'était très très éclairant. Et j'ai retenu pas mal de petits trucs, d'activités, de façons dont certaines compétences étaient travaillées, que j'ai immédiatement réutilisées dans mes cours. C'était un cours à Dauphine avec des objectifs, un contenu et puis un public qui est un petit peu différent de mon expérience à l'ENS. Mais malgré tout, j'en ai retenu beaucoup de choses et puis l'échange avec l'enseignante a été très riche. Également, quand elle est venue observer mon cours, son retour, ses remarques ont été vraiment très utiles. Très belle expérience.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a une pratique ? Vous avez dit que vous avez mis en place des choses assez immédiatement, par exemple, c'est quoi ? S'il y avait un exemple à donner ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je fais travailler pas mal mes étudiantes et mes étudiants en petits groupes pour qu'ils fassent du travail par pair ou par trois. Et par facilité, je dirais, dans ma salle de cours, ils discutaient avec leurs voisins. Le problème, c'est que leurs voisins voisines sont souvent les gens qu'ils connaissent, ils s'assoient toujours selon le même plan, donc ils parlent toujours avec les mêmes. Ce que fait ma collègue, c'est qu'elle donne à chacun un chiffre, 1, 2, 3, 1, 2, 3, 1, 2, 3, en désignant chaque élève. Et ensuite, tous les uns se rassemblent, donc ils sont obligés de bouger. Déjà, c'est une bonne chose qu'ils puissent se lever et se regrouper. Ça crée un petit peu de chaos pendant quelques secondes, mais c'est très bien, un petit peu de chaos pendant quelques secondes. Et ça leur permet donc d'interagir avec des personnes différentes. C'est vraiment un petit truc. Tout bête, ça ne m'était jamais venu à l'esprit.

  • Speaker #0

    Mais souvent, c'est ça, c'est les retours qu'on a. C'est vraiment des petites choses qu'on ajuste après.

  • Speaker #1

    Et il y a aussi des choses beaucoup moins accessoires, comme son travail sur le vocabulaire, qui était très intéressant. Faire travailler sur les synonymes de façon assez fluide dans le cours. J'ai trouvé ça très intéressant, parce qu'ils ont besoin d'enrichir leur vocabulaire. Souvent, ils connaissent des termes qu'ils n'utilisent pas. Et au détour d'une activité de vraiment les forcer à explorer des champs lexicaux, ça se faisait de façon relativement spontanée et naturelle, et c'est je pense très efficace, quel que soit son public.

  • Speaker #0

    Alors, il y a un sujet qui est très important pour vous et dont vous aviez parlé avec cette collègue, c'est la question de l'accessibilité, c'est-à-dire ce qu'on peut faire pour rendre son cours plus accessible, plus inclusif aux personnes porteuses de handicap ou avec ce qu'on appelle des neuroatypies, troubles dys, spectre de l'autisme, troubles de l'attention. Vous, à quel moment vous vous êtes dit, il faut que j'améliore l'accessibilité de mon cours et qu'est-ce que vous avez mis en place en fait concrètement ?

  • Speaker #1

    C'est grâce à ma mission de directrice de la vie étudiante que je mène en complément de mes activités d'enseignement, que j'ai été amenée à recevoir des témoignages et à organiser des sensibilisations sur le sujet. Ce n'est pas parce que des étudiantes ou des étudiants sont venus à mon cours, se sont présentés avec des demandes d'aménagement. ou avec des demandes spécifiques. Ça, ça ne m'est jamais arrivé. Or, je sais que dans la communauté étudiante de notre établissement, comme dans celle de tout établissement d'ailleurs, certaines personnes ont des besoins particuliers ou des difficultés qui sont liées à des troubles ou des situations de handicap plus sévères. Un certain nombre de conseils ont été prodigués dans ces sessions de sensibilisation qui m'ont paru tellement faciles à mettre en place. En fait, les recommandations se recoupent. Donc ça, c'est quand même une très bonne nouvelle. C'est-à-dire que ce qu'on va faire pour améliorer l'accessibilité de son cours pour quelqu'un qui est sur le spectre de l'autisme, ça va aussi aider quelqu'un qui est dyslexique, ça va aussi aider un étudiant ou une étudiante internationale. En fait, ça va aider tout le monde. C'est-à-dire que personne ne va être pénalisé par ces adaptations. Donc la démarche que j'ai adoptée, c'est vraiment de systématiquement adapter les cours pour que, quel que soit le public, ils soient plus accessibles à une diversité de profils, sans attendre justement que quelqu'un vienne avec un certificat médical, une recommandation d'aménagement du service de médecine préventive, disant de faire ci ou ça. Et en fait, c'est un petit peu chronophage au départ, mais assez simple.

  • Speaker #0

    Et concrètement, comment on fait pour rendre son cours plus accessible ? Est-ce qu'il faut changer ses supports ? Est-ce qu'il y a une police particulière ?

  • Speaker #1

    Alors, moi évidemment, ce que j'ai fait, c'est loin d'être parfait. Et il y a encore vraiment des choses sur lesquelles il faudrait que je travaille pour que mes cours soient encore plus accessibles. Mais j'ai effectivement travaillé sur les supports pour les rendre plus structurés, plus lisibles. Il y a des polices qui sont beaucoup plus claires. Bien numéroter les pages, avoir des pieds de page et des en-têtes pour bien identifier de quoi il s'agit. C'est vraiment des choses très très simples. Avoir la même présentation pour tous les supports aide également. Alors ça m'a obligée, parce que j'avais des extraits de romans que j'avais au départ photocopiés, puis collés avec de la colle et des ciseaux. Ça m'a obligée à tout retaper. Donc c'est vrai que j'y ai passé une partie d'un été, mais maintenant j'ai des choses propres. Enfin, c'est quand même très utile. On travaille sur d'autres choses. Moodle, évidemment, aide beaucoup pour expliciter tous les attendus, pouvoir mettre sur un même espace l'ensemble des documents du cours, l'ensemble des informations. J'ai mis en place aussi un truc tout bête, des pauses. Moi, j'ai des cours de deux heures. Et puis, évidemment, j'ai toujours des tas de choses à faire. Mais je ménage une pause entre ces deux heures, même brève, parce que je sais que ça peut être pour certaines personnes. Vraiment extrêmement utile de pouvoir s'isoler quelques minutes.

  • Speaker #0

    Donc du coup, l'importance d'avoir un syllabus très clair. Il me semble que vous aviez parlé aussi de mettre le numéro des salles, parce qu'elles changent beaucoup à l'ENS et ça peut être source de stress aussi pour des étudiants qui seraient atteints de troubles de l'autisme, des choses comme ça.

  • Speaker #1

    Tout à fait. Tout ce qu'on peut faire pour clarifier. Mettre à l'écrit, ne pas compter. Moi, je comptais beaucoup sur l'oral avant. C'est-à-dire, une fois que j'avais dit quelque chose, voilà, c'était bon, c'était acquis. Maintenant, j'écris tout. Je fais des rappels grâce aux annonces sur Moodle. Ce n'est pas infantilisant, ce n'est pas abétissant. C'est utile pour absolument tout le monde. Donc, ça prend un tout petit peu plus de temps. Mais je pense que les bénéfices excèdent beaucoup les petits inconvénients que ça peut présenter. On prend très vite des automatismes, des réflexes pour le faire.

  • Speaker #0

    Ce qu'on peut dire pour conclure ce thème, c'est qu'on mettra aussi des ressources sur la prise en compte du handicap pour rendre son cours plus accessible, plus inclusif. Il y a notamment à Sciences Po, ils ont fait des fiches pratiques de choses qu'on peut mettre en place dans son cours pour le rendre plus accessible. Donc on mettra ces ressources dans la description du podcast. On arrive à la fin de cet épisode. Pour finir, quels sont vos projets à venir ?

  • Speaker #1

    L'année prochaine, je vais aller enseigner au CPES de PSL pour donner un cours de debating. Ça fait des années que j'enseigne un cours de debating à l'ENS. Je vais collaborer avec une collègue qui a mis en place un cours de debating au CPES et qui le fait de façon différente dans ses modalités d'évaluation, dans les contenus. Elle a beaucoup plus d'heures, donc c'est un petit peu différent. Et alors, je suis... enthousiaste à l'idée justement d'avoir un travail d'équipe sur un objet que je connais bien pour effectivement un petit peu me sortir de mes automatismes pour ce cours et avoir de nouvelles idées que je pourrais éventuellement appliquer à l'ENS également. Donc ce cours de debating sera donné dans le cadre de la deuxième année du CPS, de ce cycle pluridisciplinaire d'études supérieures, qui est une formation de premier cycle d'EPSL. qui mêle des enseignements en lycée, à Louis-le-Grand ou Henri IV, et dans les différents établissements de PSL, donc une formation de premier cycle pluridisciplinaire assez originale.

  • Speaker #0

    Le mot de la fin, c'est une question qu'on va poser à tous nos invités. Quel conseil auriez-vous aimé avoir quand vous avez commencé à enseigner et lequel voudriez-vous donner à quelqu'un qui débute ?

  • Speaker #1

    Ah, quelle bonne question. Alors, bien sûr, on a, je pense, un peu toutes et tous, au début de notre carrière, un syndrome de l'imposteur, où on se sent un petit peu désarmé face à l'ampleur de la tâche. Donc, effectivement, il faut prendre confiance et la confiance vient naturellement avec l'expérience, bien sûr. Mais il faut aussi que cette confiance, elle ne soit pas inébranlable et qu'elle n'empêche pas, malgré tout, des questionnements, parfois des remises en question de ce qu'on fait. Ça peut être des petites choses ou des grandes choses pour savoir se renouveler, se former, s'informer et bien sûr échanger. C'est difficile d'échanger avec ses collègues. En fait, on se croise, on parle de tas de choses, très rarement de pratiques d'enseignement, de ce qui se passe réellement dans la salle de classe. Et pourtant, c'est très riche. de pouvoir s'inspirer de ce qui se fait ailleurs, de pouvoir donner quelques idées à ses collègues. Mais on n'en a pas l'occasion, le cadre n'existe pas pour le faire. Il faut se forcer un petit peu, je pense, sortir parfois de sa zone de confort pour retrouver encore une fois l'enthousiasme et la fraîcheur de ses débuts.

  • Speaker #0

    Et bien c'est la fin de cet épisode. Merci beaucoup Dorothée pour ce partage d'expérience.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    Merci à tous de nous avoir écoutés. Vous trouverez en lien une fiche qui résume les pratiques pédagogiques que nous venons d'aborder. Merci à Félix Vatton pour la réalisation, le montage et le mixage. N'hésitez pas à partager ce podcast et si vous souhaitez faire évoluer votre cours, sachez que le Centre d'innovation pédagogique de PSL peut vous accompagner. A bientôt pour un prochain épisode.

Chapters

  • Chapitre 1 : L'entrée dans le métier

    01:54

  • Chapitre 2 : Prendre du recul sur sa pratique

    10:04

  • Chapitre 3 : Rendre son cours plus accessible et inclusif

    18:20

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Description

Dans ce premier épisode, nous avons le plaisir d’échanger avec Dorothée BUTIGIEG, enseignante d’anglais et directrice de la vie étudiante à l’Ecole normale supérieure - PSL.


A une époque où la formation des enseignants du supérieur n’existait pas, Dorothée nous raconte son entrée dans le métier et la façon dont elle prend du recul sur ses pratiques, pour se former continuellement et s’adapter aux besoins de ses étudiantes et étudiants.


Plus concrètement, elle relate dans ce podcast comment elle cherche à rendre son cours plus accessible et inclusif pour répondre à certains besoins spécifiques, en particulier des personnes au profil neuroatypique (spectre de l'autisme,  troubles de l'attention, troubles dys, etc.)


Transcription de l'épisode ici.


Voici des ressources complémentaires ou évoquées dans l’épisode :


 

Cet épisode vous a plu 👍 ? N’hésitez pas à vous abonner et à partager ce podcast autour de vous !  


Dans mon cours est un podcast du Centre d’innovation pédagogique - PSL. A travers une conversation et de façon très concrète, chacun sera invité à partager sur ses pratiques d’enseignement, autour d’un thème. Ces épisodes s’adressent à la communauté enseignante de PSL et bien au-delà ! A retrouver sur les plus grandes plateformes d’écoute !

 


 

Production : Centre d’innovation pédagogique - PSL  

Réalisation et écriture : Estelle GOUZE, Ulrike PETZOLD 

Réalisation sonore et montage : Félix VATON 

Illustration : Antoine BOURDON 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce tout premier épisode du podcast Dans mon cours. Je suis Estelle Gouze et je suis accompagnée aujourd'hui de ma collègue Ulrike Petzold. Bonjour. Ensemble, nous travaillons au Centre d'innovation pédagogique de BSL. Grâce à notre métier, nous rencontrons régulièrement des enseignantes et des enseignants de PSL qui nous racontent des pratiques pédagogiques qu'ils ont mis en place et nous souhaitons maintenant les inviter à partager leur expérience à travers cette série de podcasts. Et alors aujourd'hui, pour ce premier épisode, on va parler du métier d'enseignant, de remise en question et d'évolution des pratiques. Pour en parler, nous sommes ravis d'accueillir Dorothée Butigier, enseignante à l'ENS. Bonjour Dorothée.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de participer à ce premier épisode. Vous allez nous raconter votre parcours, mais aussi et surtout vos questionnements et les changements que vous avez opérés petit à petit dans votre façon d'enseigner. Et plus concrètement, on parlera en fin d'émission d'une évolution de votre cours qui concerne son accessibilité, c'est-à-dire un cours plus accessible aux personnes ayant ce qu'on appelle des neuroatypies, troubles dys, troubles du spectre de l'autisme, troubles de l'attention entre autres. Mais tout d'abord, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr. Je travaille à l'ENSPSL depuis maintenant plus de 20 ans. Et quand je dis ça, je prends un coup de vieux, mais je l'assume. J'enseigne un anglais général à des étudiantes et des étudiants de l'ENS qui sont issus de tous les départements, de toutes les disciplines et de toutes les années. Je suis très libre de choisir les activités, les approches, les thèmes de mes cours.

  • Speaker #0

    On va d'abord parler de votre vision du métier et de ses représentations. Pour commencer, qu'est-ce que vous aimez dans votre métier ?

  • Speaker #1

    Alors, contrairement à ce qu'on pense souvent, je crois que le métier d'enseignant, d'enseignante est un métier où il y a énormément de diversité. Et ça, c'est extrêmement précieux pour évidemment ne pas s'ennuyer dans ses activités quotidiennes. Donc, évidemment, il y a comme dans toute activité professionnelle, des redites, des répétitions, mais en fait, assez peu. Et vraiment, des expériences renouvelées avec une diversité de tâches, de missions, d'expériences et une possibilité vraiment d'évoluer au cours de sa carrière. Ce que j'apprécie beaucoup, et c'est aussi lié à là où j'enseigne, c'est la qualité des échanges avec les étudiantes et les étudiants. C'est quelque chose qui est extrêmement enrichissant.

  • Speaker #2

    Comment se sont passées vos premières années d'enseignement ?

  • Speaker #1

    J'ai commencé à enseigner assez vite après avoir passé les concours, sans la formation habituelle des enseignants, et avec un petit peu de coaching d'enseignantes plus expérimentées. Mais globalement, je me suis un peu débrouillée toute seule. Alors ça s'est plutôt bien passé, parce qu'avec un peu de bon sens, des ressources, et puis avec l'expérience qu'on acquiert assez vite finalement. On arrive à bâtir des cours, à avoir une vraie cohérence dans ses activités, dans son approche, mais c'était quand même extrêmement angoissant. Enfin, il faut quand même le dire, être devant une classe, quand on est jeune et inexpérimenté, c'est quand même très intimidant. On prépare beaucoup, on a toujours peur du blanc. Tout d'un coup, on ne sache plus quoi faire, pour ce qui n'arrive strictement jamais, évidemment. Ce sont des premiers moments devant la classe qui sont quand même... Un petit peu compliqué à gérer, mais aussi très exaltant, très épanouissant. Et on s'habitue, on se met au fur et à mesure dans la peau de l'enseignant, toute l'enseignant.

  • Speaker #2

    Et quelle était l'image du bon prof que vous aviez quand vous avez commencé ? Quel était votre objectif à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    J'avais eu de très bons profs, évidemment, pendant ma scolarité. Et comme tous les élèves, je savais très bien distinguer les bons des moins bons. Quand on est élève, on a un ressenti, mais qui n'est pas toujours basé sur des critères très objectifs. Pour moi, un bon prof, c'était quelqu'un qui savait... Voilà, une passionnée qui avait du savoir et qui savait le transmettre, qui nourrissait ses élèves. C'était un peu cette idée d'apporter, de déverser de façon quand même assez unilatérale. Aujourd'hui, j'ai une vision assez différente du bon enseignant. Pour moi, au lieu de nourrir à la cuillère, il donne la cuillère. Voilà, peut-être pour avoir une métaphore un petit peu simpliste. Un bon prof, c'est un prof qui donne des clés, en fait, qui suscite le questionnement, qui élargit le spectre des compétences, qui n'est pas simplement dans, effectivement, une transmission de savoir brut.

  • Speaker #2

    Et le prof, le bon prof, est-ce qu'il a le droit aussi de mettre l'étudiant un peu en difficulté ? Est-ce que ça reste un bon prof du point de vue de l'étudiant quand l'étudiant doit faire des efforts ?

  • Speaker #1

    Je croîtrais beaucoup à l'effort. Et donc effectivement, il doit mettre l'étudiante et l'étudiant à contribution. Mettre en difficulté, je dirais, pourquoi pas. Si le profil de l'étudiant, tout l'étudiant le permet, ce qui n'est pas le cas pour tout le monde, il y en a qu'il faut beaucoup plus mettre en confiance, mais en tout cas, il faut le rendre actif dans son apprentissage. Ça me paraît évident maintenant, alors qu'encore une fois, quand j'étais moi-même élève, je n'avais pas du tout conscience qu'il fallait que je sois plus active pour réfléchir à comment j'apprenais. J'avais une attitude très passive que je retrouve chez mes élèves aujourd'hui.

  • Speaker #0

    On travaille avec des nouveaux enseignants qui ont cette représentation de l'enseignant sachant, donc celui qui a la connaissance, le savoir et qui doit le divulguer. Et ce qu'on remarque, c'est qu'ils peuvent parfois en souffrir, c'est-à-dire qu'ils se mettent une certaine pression. Par exemple, la peur de ne pas savoir répondre à une question d'un étudiant, peur d'avoir des temps morts comme si le cours devait être un show continu. Et la plupart entament petit à petit un glissement de posture pour être tantôt prof, tantôt accompagnateur, coach. Chez vous, est-ce que cette posture a évolué et comment ?

  • Speaker #1

    Alors, clairement, il me semble qu'il y a un équilibre à trouver entre différentes activités et ces différentes postures. On ne peut pas simplement donner des instructions aux étudiants, les laisser se débrouiller sur toute la période du cours. Ils ont besoin d'être guidés, ils ont besoin de connaissances, ils ont besoin de méthodes, mais il faut trouver quand même un certain équilibre. Alors moi, je suis prof de langue, donc c'est aussi assez spécifique. Mon but, c'est... de donner confiance, de permettre la pratique, de permettre vraiment des interactions plus libres, moins angoissées par la grammaire, le S de la troisième personne du singulier. Donc, bien sûr, je corrige des fautes, bien sûr, je fais des rappels de grammaire, bien sûr, le vocabulaire est revu, mais l'objectif, c'est surtout de favoriser des interactions les plus spontanées et libres possibles. Mes meilleurs cours, c'est souvent les cours où moi je m'ennuie un peu. Parce qu'en fait, ce sont les étudiants qui sont aux commandes, qui sont actifs. Et moi, je les écoute. C'est vrai que moi, je préfère parler. Je préfère être moi, moi active. Mais ce n'est pas l'idéal pour l'auditoire.

  • Speaker #0

    Vous passez dans les rangs, vous allez voir les différents groupes. C'est ça. Quand on a préparé ce podcast, vous avez dit, il faut désacraliser l'enseignant. Pour se sentir plus à l'aise, justement, dire qu'on ne sait pas tout. Mais qu'on va, par exemple, chercher l'information.

  • Speaker #1

    Oui, alors aujourd'hui, ça me paraît une évidence, mais j'ai dû parcourir un long chemin pour réaliser que, en effet, l'enseignant n'était pas infaillible, n'était pas omniscient, n'était pas parfait. Et que pour que les étudiants aient confiance, il fallait être honnête avec eux à ce sujet-là. C'est-à-dire qu'il y a des choses qu'on ne sait pas, on fait des erreurs, et vraiment leur faire comprendre. qu'ils doivent aussi avoir un petit peu de recul, un peu de distance par rapport à leurs enseignantes et leurs enseignants, souvent qu'ils vénèrent dans une institution comme l'ENS. Et puis, il faut aussi reconnaître que dans ce processus d'apprentissage, l'enseignant, c'est une des parties prenantes, évidemment importantes, mais l'apprentissage, il se co-construit, surtout à un niveau, dans l'enseignement supérieur, on peut vraiment associer les étudiantes et les étudiants à l'élaboration du cours, à la réflexion sur les activités, Même s'ils ont un petit peu de mal à jouer le jeu, parce qu'ils attendent beaucoup de leurs profs.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous parlez aux étudiants de vos choix pédagogiques ? Pourquoi telle activité et pas une autre ?

  • Speaker #1

    J'essaie de le faire, notamment en début de semestre, en leur distribuant un syllabus qui explicite les grands objectifs. Je leur explique pourquoi dans beaucoup de mes cours, il y a des présentations orales, il y a du public speaking, parce qu'ils vont devoir en faire. Donc c'est un peu classique, la présentation orale, tout ça, ils peuvent se dire encore. Mais en fait, c'est quelque chose qu'il faut tellement qu'ils pratiquent que c'est très utile qu'ils puissent s'entraîner dès que possible. Mais j'ai l'impression que ça ne les intéresse pas beaucoup. C'est-à-dire que tout ce que je vais leur proposer, ils vont adhérer. Que ce soit le choix des évaluations, le choix des activités. Je leur explique aussi pourquoi je présente mon matériel de cours, tout ce qui est sur papier, d'une certaine façon. C'est lié à l'accessibilité, on en parlera tout à l'heure. Je n'ai pas l'impression que ça éveille beaucoup leur curiosité. Ils pourraient peut-être s'intéresser un petit peu plus à la façon dont on leur enseigne notre discipline, quitte à être plus critiques. C'est vraiment quand on fait passer des évaluations en fin de semestre. Souvent, c'est un petit peu quand même très général. C'était bien, merci. Voilà, je suis ravie. Mais peut-être quelques suggestions, un peu plus de précision dans les activités qui ont été les plus utiles, etc. Ça, ça manque un peu.

  • Speaker #0

    On va maintenant parler de pratiques réflexives quand on enseigne. Qu'est-ce que ce terme vous évoque ?

  • Speaker #1

    On est pris, nous les profs, comme tout le monde, dans un quotidien, une sorte de tourbillon d'urgence, de préparation, de correction, etc. Et on a des automatismes, donc on est assez vite dans une sorte de répétition quasi systématique de la façon, alors pas des contenus, mais de la façon dont on les aborde. Et on a évolué au fur et à mesure de son expérience. C'est vrai qu'on atteint à un moment une sorte de plateau où on sait que ça marche et on reproduit un petit peu les mêmes recettes. Alors, recette, évidemment, qui donne plutôt un bon résultat, parce qu'on demande à ses élèves d'évaluer le cours, on a des retours. Voilà, on voit que ça marche. Donc, il est temps de s'arrêter là et de continuer jusqu'à la retraite. Bon, à la fois pour les étudiantes et les étudiants et pour soi-même, se pencher un peu sur ce qu'on fait, comment on le fait et comment on pourrait le faire mieux. Évidemment, c'est quand même le but. C'est extrêmement constructif et plaisant et motivant.

  • Speaker #0

    C'est vrai que le métier d'enseignant peut être un peu répétitif. C'est vrai qu'on voit souvent les enseignants quand ils viennent nous voir, c'est aussi parce qu'ils commencent un peu à s'ennuyer aussi, finalement.

  • Speaker #1

    Tout à fait, mais ça, ça ne tient qu'à nous. Dans certains contextes d'enseignement, les choses sont très cadrées et on a peu de marge de manœuvre. Mais on en a en fait souvent plus qu'on ne pense. En changeant même des petites choses, on peut vraiment renouveler un petit peu ses façons de faire et aussi renouveler son intérêt et son enthousiasme.

  • Speaker #0

    Et du coup, concrètement, comment vous vous y prenez ?

  • Speaker #1

    C'est facile à dire, mais plus difficile à faire. Et notamment, c'est assez difficile de le faire seul. Déjà parce qu'on manque de temps, comme tout le monde, et qu'encore une fois, on est pris un peu dans le flot, dans la succession des séances. Et puis, c'est difficile de se regarder enseigner, tout simplement. Donc, c'est pour ça qu'avoir... Une aide extérieure sous de multiples formes, ça peut être des personnes qui viennent observer le cours, ça peut être des échanges avec d'autres enseignantes et enseignants, bien sûr des formations, mais qui vont nous faire réfléchir à ce qu'on fait et ce qu'on pourrait faire.

  • Speaker #2

    Est-ce que vous avez réussi à, du coup, de façon individuelle ? Aussi d'avoir un rituel pour faire ce travail de réflexion où ce n'est tout simplement pas possible dans le quotidien.

  • Speaker #1

    C'est compliqué en cours de semestre, on fait des ajustements. C'est-à-dire qu'on va réfléchir à une façon d'améliorer ce qu'on faisait avant, mais c'est en général un peu à la marge. Je pense qu'il faut vraiment une prise de distance, un peu de recul, et c'est justement en dehors du semestre. C'est pour ça que moi je l'ai fait plutôt en fin d'année, après la fin du deuxième semestre. Alors avant l'été, alors évidemment on est un peu déconnecté de l'année suivante et de la reprise des cours, on est plutôt dans la fin d'un cycle, mais c'est quand même un bon moment justement pour avoir une distance plus radicale et des changements plus importants. Le centre d'innovation pédagogique m'a énormément aidée et ça répondait à un besoin. existentielle, j'oserais dire, que je ressentais depuis plusieurs années, de réfléchir sur ce que je faisais, d'avoir un apport un peu théorique, mais aussi pratique, pour mieux concevoir mes cours, mieux évaluer mes étudiantes et mes étudiants. Et là, vraiment, j'ai trouvé au CIP de PSL tout ce dont j'avais besoin. Alors, j'ai eu la chance d'avoir un accompagnement personnalisé, ça, c'était vraiment grandiose. J'ai travaillé avec deux ingénieurs pédagogiques sur un de mes cours, donc c'était très concret. Voilà, avoir une vision extérieure, des suggestions bien sûr, il n'y a aucune injonction d'aucune sorte, mais un vrai dialogue pour voir comment le cours est conçu, comment la progression se fait, quel est l'alignement pédagogique qui est absolument central.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on définit ce qu'est l'alignement pédagogique ?

  • Speaker #2

    Alors l'alignement pédagogique, ce n'est pas un gros mot aussi, mais en fait ça désigne tout simplement... La cohérence entre les objectifs d'apprentissage, l'évaluation qu'on propose aux étudiants et les activités qu'on fait faire pendant le cours.

  • Speaker #1

    Évidemment, il y avait un alignement pédagogique, mais qui pourrait être amélioré. Tout ça a été très utile.

  • Speaker #2

    Et peut-être que c'est aussi tout simplement un temps, par cet accompagnement qui est structuré, un temps qu'on libère et qu'on aurait peut-être plus de mal à libérer tout seul, sans partenaire.

  • Speaker #1

    On ne va pas bloquer des créneaux dans son agenda en se disant aujourd'hui, je vais réfléchir à tel cours Donc, en effet, ça force un peu à y consacrer du temps. Et encore une fois, il n'y a rien eu d'inutile, absolument rien d'inutile. Beaucoup de suggestions extrêmement pertinentes, qui m'ont paru évidentes, je me suis dit, mais effectivement, pourquoi je n'ai pas réfléchi plus tôt, rien que ça, en fait. Et des solutions concrètes pour vraiment faciliter les échanges, pour clarifier les attendus. Tout ça a été vraiment très très précieux.

  • Speaker #0

    Vous avez récemment participé au cours d'une collègue pour justement découvrir de nouvelles façons d'enseigner. Qu'est-ce que ça vous a apporté ?

  • Speaker #1

    Oui, alors j'ai participé en effet à ce dispositif que propose le CIP, qui est très simple, qui consiste à aller observer le cours d'un ou une collègue de la même discipline de préférence, qui est venu ensuite également observer un de mes cours, et évidemment l'expérience de cette observation. Rien que le fait de s'asseoir au fond de la salle, d'avoir une vision un peu générale de ce qui se passe, c'est assez intéressant d'avoir une autre approche et un regard attentif sur différentes facettes du cours. Et notamment la façon dont l'enseignante interagit avec son auditoire, c'était très très éclairant. Et j'ai retenu pas mal de petits trucs, d'activités, de façons dont certaines compétences étaient travaillées, que j'ai immédiatement réutilisées dans mes cours. C'était un cours à Dauphine avec des objectifs, un contenu et puis un public qui est un petit peu différent de mon expérience à l'ENS. Mais malgré tout, j'en ai retenu beaucoup de choses et puis l'échange avec l'enseignante a été très riche. Également, quand elle est venue observer mon cours, son retour, ses remarques ont été vraiment très utiles. Très belle expérience.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a une pratique ? Vous avez dit que vous avez mis en place des choses assez immédiatement, par exemple, c'est quoi ? S'il y avait un exemple à donner ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je fais travailler pas mal mes étudiantes et mes étudiants en petits groupes pour qu'ils fassent du travail par pair ou par trois. Et par facilité, je dirais, dans ma salle de cours, ils discutaient avec leurs voisins. Le problème, c'est que leurs voisins voisines sont souvent les gens qu'ils connaissent, ils s'assoient toujours selon le même plan, donc ils parlent toujours avec les mêmes. Ce que fait ma collègue, c'est qu'elle donne à chacun un chiffre, 1, 2, 3, 1, 2, 3, 1, 2, 3, en désignant chaque élève. Et ensuite, tous les uns se rassemblent, donc ils sont obligés de bouger. Déjà, c'est une bonne chose qu'ils puissent se lever et se regrouper. Ça crée un petit peu de chaos pendant quelques secondes, mais c'est très bien, un petit peu de chaos pendant quelques secondes. Et ça leur permet donc d'interagir avec des personnes différentes. C'est vraiment un petit truc. Tout bête, ça ne m'était jamais venu à l'esprit.

  • Speaker #0

    Mais souvent, c'est ça, c'est les retours qu'on a. C'est vraiment des petites choses qu'on ajuste après.

  • Speaker #1

    Et il y a aussi des choses beaucoup moins accessoires, comme son travail sur le vocabulaire, qui était très intéressant. Faire travailler sur les synonymes de façon assez fluide dans le cours. J'ai trouvé ça très intéressant, parce qu'ils ont besoin d'enrichir leur vocabulaire. Souvent, ils connaissent des termes qu'ils n'utilisent pas. Et au détour d'une activité de vraiment les forcer à explorer des champs lexicaux, ça se faisait de façon relativement spontanée et naturelle, et c'est je pense très efficace, quel que soit son public.

  • Speaker #0

    Alors, il y a un sujet qui est très important pour vous et dont vous aviez parlé avec cette collègue, c'est la question de l'accessibilité, c'est-à-dire ce qu'on peut faire pour rendre son cours plus accessible, plus inclusif aux personnes porteuses de handicap ou avec ce qu'on appelle des neuroatypies, troubles dys, spectre de l'autisme, troubles de l'attention. Vous, à quel moment vous vous êtes dit, il faut que j'améliore l'accessibilité de mon cours et qu'est-ce que vous avez mis en place en fait concrètement ?

  • Speaker #1

    C'est grâce à ma mission de directrice de la vie étudiante que je mène en complément de mes activités d'enseignement, que j'ai été amenée à recevoir des témoignages et à organiser des sensibilisations sur le sujet. Ce n'est pas parce que des étudiantes ou des étudiants sont venus à mon cours, se sont présentés avec des demandes d'aménagement. ou avec des demandes spécifiques. Ça, ça ne m'est jamais arrivé. Or, je sais que dans la communauté étudiante de notre établissement, comme dans celle de tout établissement d'ailleurs, certaines personnes ont des besoins particuliers ou des difficultés qui sont liées à des troubles ou des situations de handicap plus sévères. Un certain nombre de conseils ont été prodigués dans ces sessions de sensibilisation qui m'ont paru tellement faciles à mettre en place. En fait, les recommandations se recoupent. Donc ça, c'est quand même une très bonne nouvelle. C'est-à-dire que ce qu'on va faire pour améliorer l'accessibilité de son cours pour quelqu'un qui est sur le spectre de l'autisme, ça va aussi aider quelqu'un qui est dyslexique, ça va aussi aider un étudiant ou une étudiante internationale. En fait, ça va aider tout le monde. C'est-à-dire que personne ne va être pénalisé par ces adaptations. Donc la démarche que j'ai adoptée, c'est vraiment de systématiquement adapter les cours pour que, quel que soit le public, ils soient plus accessibles à une diversité de profils, sans attendre justement que quelqu'un vienne avec un certificat médical, une recommandation d'aménagement du service de médecine préventive, disant de faire ci ou ça. Et en fait, c'est un petit peu chronophage au départ, mais assez simple.

  • Speaker #0

    Et concrètement, comment on fait pour rendre son cours plus accessible ? Est-ce qu'il faut changer ses supports ? Est-ce qu'il y a une police particulière ?

  • Speaker #1

    Alors, moi évidemment, ce que j'ai fait, c'est loin d'être parfait. Et il y a encore vraiment des choses sur lesquelles il faudrait que je travaille pour que mes cours soient encore plus accessibles. Mais j'ai effectivement travaillé sur les supports pour les rendre plus structurés, plus lisibles. Il y a des polices qui sont beaucoup plus claires. Bien numéroter les pages, avoir des pieds de page et des en-têtes pour bien identifier de quoi il s'agit. C'est vraiment des choses très très simples. Avoir la même présentation pour tous les supports aide également. Alors ça m'a obligée, parce que j'avais des extraits de romans que j'avais au départ photocopiés, puis collés avec de la colle et des ciseaux. Ça m'a obligée à tout retaper. Donc c'est vrai que j'y ai passé une partie d'un été, mais maintenant j'ai des choses propres. Enfin, c'est quand même très utile. On travaille sur d'autres choses. Moodle, évidemment, aide beaucoup pour expliciter tous les attendus, pouvoir mettre sur un même espace l'ensemble des documents du cours, l'ensemble des informations. J'ai mis en place aussi un truc tout bête, des pauses. Moi, j'ai des cours de deux heures. Et puis, évidemment, j'ai toujours des tas de choses à faire. Mais je ménage une pause entre ces deux heures, même brève, parce que je sais que ça peut être pour certaines personnes. Vraiment extrêmement utile de pouvoir s'isoler quelques minutes.

  • Speaker #0

    Donc du coup, l'importance d'avoir un syllabus très clair. Il me semble que vous aviez parlé aussi de mettre le numéro des salles, parce qu'elles changent beaucoup à l'ENS et ça peut être source de stress aussi pour des étudiants qui seraient atteints de troubles de l'autisme, des choses comme ça.

  • Speaker #1

    Tout à fait. Tout ce qu'on peut faire pour clarifier. Mettre à l'écrit, ne pas compter. Moi, je comptais beaucoup sur l'oral avant. C'est-à-dire, une fois que j'avais dit quelque chose, voilà, c'était bon, c'était acquis. Maintenant, j'écris tout. Je fais des rappels grâce aux annonces sur Moodle. Ce n'est pas infantilisant, ce n'est pas abétissant. C'est utile pour absolument tout le monde. Donc, ça prend un tout petit peu plus de temps. Mais je pense que les bénéfices excèdent beaucoup les petits inconvénients que ça peut présenter. On prend très vite des automatismes, des réflexes pour le faire.

  • Speaker #0

    Ce qu'on peut dire pour conclure ce thème, c'est qu'on mettra aussi des ressources sur la prise en compte du handicap pour rendre son cours plus accessible, plus inclusif. Il y a notamment à Sciences Po, ils ont fait des fiches pratiques de choses qu'on peut mettre en place dans son cours pour le rendre plus accessible. Donc on mettra ces ressources dans la description du podcast. On arrive à la fin de cet épisode. Pour finir, quels sont vos projets à venir ?

  • Speaker #1

    L'année prochaine, je vais aller enseigner au CPES de PSL pour donner un cours de debating. Ça fait des années que j'enseigne un cours de debating à l'ENS. Je vais collaborer avec une collègue qui a mis en place un cours de debating au CPES et qui le fait de façon différente dans ses modalités d'évaluation, dans les contenus. Elle a beaucoup plus d'heures, donc c'est un petit peu différent. Et alors, je suis... enthousiaste à l'idée justement d'avoir un travail d'équipe sur un objet que je connais bien pour effectivement un petit peu me sortir de mes automatismes pour ce cours et avoir de nouvelles idées que je pourrais éventuellement appliquer à l'ENS également. Donc ce cours de debating sera donné dans le cadre de la deuxième année du CPS, de ce cycle pluridisciplinaire d'études supérieures, qui est une formation de premier cycle d'EPSL. qui mêle des enseignements en lycée, à Louis-le-Grand ou Henri IV, et dans les différents établissements de PSL, donc une formation de premier cycle pluridisciplinaire assez originale.

  • Speaker #0

    Le mot de la fin, c'est une question qu'on va poser à tous nos invités. Quel conseil auriez-vous aimé avoir quand vous avez commencé à enseigner et lequel voudriez-vous donner à quelqu'un qui débute ?

  • Speaker #1

    Ah, quelle bonne question. Alors, bien sûr, on a, je pense, un peu toutes et tous, au début de notre carrière, un syndrome de l'imposteur, où on se sent un petit peu désarmé face à l'ampleur de la tâche. Donc, effectivement, il faut prendre confiance et la confiance vient naturellement avec l'expérience, bien sûr. Mais il faut aussi que cette confiance, elle ne soit pas inébranlable et qu'elle n'empêche pas, malgré tout, des questionnements, parfois des remises en question de ce qu'on fait. Ça peut être des petites choses ou des grandes choses pour savoir se renouveler, se former, s'informer et bien sûr échanger. C'est difficile d'échanger avec ses collègues. En fait, on se croise, on parle de tas de choses, très rarement de pratiques d'enseignement, de ce qui se passe réellement dans la salle de classe. Et pourtant, c'est très riche. de pouvoir s'inspirer de ce qui se fait ailleurs, de pouvoir donner quelques idées à ses collègues. Mais on n'en a pas l'occasion, le cadre n'existe pas pour le faire. Il faut se forcer un petit peu, je pense, sortir parfois de sa zone de confort pour retrouver encore une fois l'enthousiasme et la fraîcheur de ses débuts.

  • Speaker #0

    Et bien c'est la fin de cet épisode. Merci beaucoup Dorothée pour ce partage d'expérience.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    Merci à tous de nous avoir écoutés. Vous trouverez en lien une fiche qui résume les pratiques pédagogiques que nous venons d'aborder. Merci à Félix Vatton pour la réalisation, le montage et le mixage. N'hésitez pas à partager ce podcast et si vous souhaitez faire évoluer votre cours, sachez que le Centre d'innovation pédagogique de PSL peut vous accompagner. A bientôt pour un prochain épisode.

Chapters

  • Chapitre 1 : L'entrée dans le métier

    01:54

  • Chapitre 2 : Prendre du recul sur sa pratique

    10:04

  • Chapitre 3 : Rendre son cours plus accessible et inclusif

    18:20

Description

Dans ce premier épisode, nous avons le plaisir d’échanger avec Dorothée BUTIGIEG, enseignante d’anglais et directrice de la vie étudiante à l’Ecole normale supérieure - PSL.


A une époque où la formation des enseignants du supérieur n’existait pas, Dorothée nous raconte son entrée dans le métier et la façon dont elle prend du recul sur ses pratiques, pour se former continuellement et s’adapter aux besoins de ses étudiantes et étudiants.


Plus concrètement, elle relate dans ce podcast comment elle cherche à rendre son cours plus accessible et inclusif pour répondre à certains besoins spécifiques, en particulier des personnes au profil neuroatypique (spectre de l'autisme,  troubles de l'attention, troubles dys, etc.)


Transcription de l'épisode ici.


Voici des ressources complémentaires ou évoquées dans l’épisode :


 

Cet épisode vous a plu 👍 ? N’hésitez pas à vous abonner et à partager ce podcast autour de vous !  


Dans mon cours est un podcast du Centre d’innovation pédagogique - PSL. A travers une conversation et de façon très concrète, chacun sera invité à partager sur ses pratiques d’enseignement, autour d’un thème. Ces épisodes s’adressent à la communauté enseignante de PSL et bien au-delà ! A retrouver sur les plus grandes plateformes d’écoute !

 


 

Production : Centre d’innovation pédagogique - PSL  

Réalisation et écriture : Estelle GOUZE, Ulrike PETZOLD 

Réalisation sonore et montage : Félix VATON 

Illustration : Antoine BOURDON 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce tout premier épisode du podcast Dans mon cours. Je suis Estelle Gouze et je suis accompagnée aujourd'hui de ma collègue Ulrike Petzold. Bonjour. Ensemble, nous travaillons au Centre d'innovation pédagogique de BSL. Grâce à notre métier, nous rencontrons régulièrement des enseignantes et des enseignants de PSL qui nous racontent des pratiques pédagogiques qu'ils ont mis en place et nous souhaitons maintenant les inviter à partager leur expérience à travers cette série de podcasts. Et alors aujourd'hui, pour ce premier épisode, on va parler du métier d'enseignant, de remise en question et d'évolution des pratiques. Pour en parler, nous sommes ravis d'accueillir Dorothée Butigier, enseignante à l'ENS. Bonjour Dorothée.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de participer à ce premier épisode. Vous allez nous raconter votre parcours, mais aussi et surtout vos questionnements et les changements que vous avez opérés petit à petit dans votre façon d'enseigner. Et plus concrètement, on parlera en fin d'émission d'une évolution de votre cours qui concerne son accessibilité, c'est-à-dire un cours plus accessible aux personnes ayant ce qu'on appelle des neuroatypies, troubles dys, troubles du spectre de l'autisme, troubles de l'attention entre autres. Mais tout d'abord, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr. Je travaille à l'ENSPSL depuis maintenant plus de 20 ans. Et quand je dis ça, je prends un coup de vieux, mais je l'assume. J'enseigne un anglais général à des étudiantes et des étudiants de l'ENS qui sont issus de tous les départements, de toutes les disciplines et de toutes les années. Je suis très libre de choisir les activités, les approches, les thèmes de mes cours.

  • Speaker #0

    On va d'abord parler de votre vision du métier et de ses représentations. Pour commencer, qu'est-ce que vous aimez dans votre métier ?

  • Speaker #1

    Alors, contrairement à ce qu'on pense souvent, je crois que le métier d'enseignant, d'enseignante est un métier où il y a énormément de diversité. Et ça, c'est extrêmement précieux pour évidemment ne pas s'ennuyer dans ses activités quotidiennes. Donc, évidemment, il y a comme dans toute activité professionnelle, des redites, des répétitions, mais en fait, assez peu. Et vraiment, des expériences renouvelées avec une diversité de tâches, de missions, d'expériences et une possibilité vraiment d'évoluer au cours de sa carrière. Ce que j'apprécie beaucoup, et c'est aussi lié à là où j'enseigne, c'est la qualité des échanges avec les étudiantes et les étudiants. C'est quelque chose qui est extrêmement enrichissant.

  • Speaker #2

    Comment se sont passées vos premières années d'enseignement ?

  • Speaker #1

    J'ai commencé à enseigner assez vite après avoir passé les concours, sans la formation habituelle des enseignants, et avec un petit peu de coaching d'enseignantes plus expérimentées. Mais globalement, je me suis un peu débrouillée toute seule. Alors ça s'est plutôt bien passé, parce qu'avec un peu de bon sens, des ressources, et puis avec l'expérience qu'on acquiert assez vite finalement. On arrive à bâtir des cours, à avoir une vraie cohérence dans ses activités, dans son approche, mais c'était quand même extrêmement angoissant. Enfin, il faut quand même le dire, être devant une classe, quand on est jeune et inexpérimenté, c'est quand même très intimidant. On prépare beaucoup, on a toujours peur du blanc. Tout d'un coup, on ne sache plus quoi faire, pour ce qui n'arrive strictement jamais, évidemment. Ce sont des premiers moments devant la classe qui sont quand même... Un petit peu compliqué à gérer, mais aussi très exaltant, très épanouissant. Et on s'habitue, on se met au fur et à mesure dans la peau de l'enseignant, toute l'enseignant.

  • Speaker #2

    Et quelle était l'image du bon prof que vous aviez quand vous avez commencé ? Quel était votre objectif à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    J'avais eu de très bons profs, évidemment, pendant ma scolarité. Et comme tous les élèves, je savais très bien distinguer les bons des moins bons. Quand on est élève, on a un ressenti, mais qui n'est pas toujours basé sur des critères très objectifs. Pour moi, un bon prof, c'était quelqu'un qui savait... Voilà, une passionnée qui avait du savoir et qui savait le transmettre, qui nourrissait ses élèves. C'était un peu cette idée d'apporter, de déverser de façon quand même assez unilatérale. Aujourd'hui, j'ai une vision assez différente du bon enseignant. Pour moi, au lieu de nourrir à la cuillère, il donne la cuillère. Voilà, peut-être pour avoir une métaphore un petit peu simpliste. Un bon prof, c'est un prof qui donne des clés, en fait, qui suscite le questionnement, qui élargit le spectre des compétences, qui n'est pas simplement dans, effectivement, une transmission de savoir brut.

  • Speaker #2

    Et le prof, le bon prof, est-ce qu'il a le droit aussi de mettre l'étudiant un peu en difficulté ? Est-ce que ça reste un bon prof du point de vue de l'étudiant quand l'étudiant doit faire des efforts ?

  • Speaker #1

    Je croîtrais beaucoup à l'effort. Et donc effectivement, il doit mettre l'étudiante et l'étudiant à contribution. Mettre en difficulté, je dirais, pourquoi pas. Si le profil de l'étudiant, tout l'étudiant le permet, ce qui n'est pas le cas pour tout le monde, il y en a qu'il faut beaucoup plus mettre en confiance, mais en tout cas, il faut le rendre actif dans son apprentissage. Ça me paraît évident maintenant, alors qu'encore une fois, quand j'étais moi-même élève, je n'avais pas du tout conscience qu'il fallait que je sois plus active pour réfléchir à comment j'apprenais. J'avais une attitude très passive que je retrouve chez mes élèves aujourd'hui.

  • Speaker #0

    On travaille avec des nouveaux enseignants qui ont cette représentation de l'enseignant sachant, donc celui qui a la connaissance, le savoir et qui doit le divulguer. Et ce qu'on remarque, c'est qu'ils peuvent parfois en souffrir, c'est-à-dire qu'ils se mettent une certaine pression. Par exemple, la peur de ne pas savoir répondre à une question d'un étudiant, peur d'avoir des temps morts comme si le cours devait être un show continu. Et la plupart entament petit à petit un glissement de posture pour être tantôt prof, tantôt accompagnateur, coach. Chez vous, est-ce que cette posture a évolué et comment ?

  • Speaker #1

    Alors, clairement, il me semble qu'il y a un équilibre à trouver entre différentes activités et ces différentes postures. On ne peut pas simplement donner des instructions aux étudiants, les laisser se débrouiller sur toute la période du cours. Ils ont besoin d'être guidés, ils ont besoin de connaissances, ils ont besoin de méthodes, mais il faut trouver quand même un certain équilibre. Alors moi, je suis prof de langue, donc c'est aussi assez spécifique. Mon but, c'est... de donner confiance, de permettre la pratique, de permettre vraiment des interactions plus libres, moins angoissées par la grammaire, le S de la troisième personne du singulier. Donc, bien sûr, je corrige des fautes, bien sûr, je fais des rappels de grammaire, bien sûr, le vocabulaire est revu, mais l'objectif, c'est surtout de favoriser des interactions les plus spontanées et libres possibles. Mes meilleurs cours, c'est souvent les cours où moi je m'ennuie un peu. Parce qu'en fait, ce sont les étudiants qui sont aux commandes, qui sont actifs. Et moi, je les écoute. C'est vrai que moi, je préfère parler. Je préfère être moi, moi active. Mais ce n'est pas l'idéal pour l'auditoire.

  • Speaker #0

    Vous passez dans les rangs, vous allez voir les différents groupes. C'est ça. Quand on a préparé ce podcast, vous avez dit, il faut désacraliser l'enseignant. Pour se sentir plus à l'aise, justement, dire qu'on ne sait pas tout. Mais qu'on va, par exemple, chercher l'information.

  • Speaker #1

    Oui, alors aujourd'hui, ça me paraît une évidence, mais j'ai dû parcourir un long chemin pour réaliser que, en effet, l'enseignant n'était pas infaillible, n'était pas omniscient, n'était pas parfait. Et que pour que les étudiants aient confiance, il fallait être honnête avec eux à ce sujet-là. C'est-à-dire qu'il y a des choses qu'on ne sait pas, on fait des erreurs, et vraiment leur faire comprendre. qu'ils doivent aussi avoir un petit peu de recul, un peu de distance par rapport à leurs enseignantes et leurs enseignants, souvent qu'ils vénèrent dans une institution comme l'ENS. Et puis, il faut aussi reconnaître que dans ce processus d'apprentissage, l'enseignant, c'est une des parties prenantes, évidemment importantes, mais l'apprentissage, il se co-construit, surtout à un niveau, dans l'enseignement supérieur, on peut vraiment associer les étudiantes et les étudiants à l'élaboration du cours, à la réflexion sur les activités, Même s'ils ont un petit peu de mal à jouer le jeu, parce qu'ils attendent beaucoup de leurs profs.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous parlez aux étudiants de vos choix pédagogiques ? Pourquoi telle activité et pas une autre ?

  • Speaker #1

    J'essaie de le faire, notamment en début de semestre, en leur distribuant un syllabus qui explicite les grands objectifs. Je leur explique pourquoi dans beaucoup de mes cours, il y a des présentations orales, il y a du public speaking, parce qu'ils vont devoir en faire. Donc c'est un peu classique, la présentation orale, tout ça, ils peuvent se dire encore. Mais en fait, c'est quelque chose qu'il faut tellement qu'ils pratiquent que c'est très utile qu'ils puissent s'entraîner dès que possible. Mais j'ai l'impression que ça ne les intéresse pas beaucoup. C'est-à-dire que tout ce que je vais leur proposer, ils vont adhérer. Que ce soit le choix des évaluations, le choix des activités. Je leur explique aussi pourquoi je présente mon matériel de cours, tout ce qui est sur papier, d'une certaine façon. C'est lié à l'accessibilité, on en parlera tout à l'heure. Je n'ai pas l'impression que ça éveille beaucoup leur curiosité. Ils pourraient peut-être s'intéresser un petit peu plus à la façon dont on leur enseigne notre discipline, quitte à être plus critiques. C'est vraiment quand on fait passer des évaluations en fin de semestre. Souvent, c'est un petit peu quand même très général. C'était bien, merci. Voilà, je suis ravie. Mais peut-être quelques suggestions, un peu plus de précision dans les activités qui ont été les plus utiles, etc. Ça, ça manque un peu.

  • Speaker #0

    On va maintenant parler de pratiques réflexives quand on enseigne. Qu'est-ce que ce terme vous évoque ?

  • Speaker #1

    On est pris, nous les profs, comme tout le monde, dans un quotidien, une sorte de tourbillon d'urgence, de préparation, de correction, etc. Et on a des automatismes, donc on est assez vite dans une sorte de répétition quasi systématique de la façon, alors pas des contenus, mais de la façon dont on les aborde. Et on a évolué au fur et à mesure de son expérience. C'est vrai qu'on atteint à un moment une sorte de plateau où on sait que ça marche et on reproduit un petit peu les mêmes recettes. Alors, recette, évidemment, qui donne plutôt un bon résultat, parce qu'on demande à ses élèves d'évaluer le cours, on a des retours. Voilà, on voit que ça marche. Donc, il est temps de s'arrêter là et de continuer jusqu'à la retraite. Bon, à la fois pour les étudiantes et les étudiants et pour soi-même, se pencher un peu sur ce qu'on fait, comment on le fait et comment on pourrait le faire mieux. Évidemment, c'est quand même le but. C'est extrêmement constructif et plaisant et motivant.

  • Speaker #0

    C'est vrai que le métier d'enseignant peut être un peu répétitif. C'est vrai qu'on voit souvent les enseignants quand ils viennent nous voir, c'est aussi parce qu'ils commencent un peu à s'ennuyer aussi, finalement.

  • Speaker #1

    Tout à fait, mais ça, ça ne tient qu'à nous. Dans certains contextes d'enseignement, les choses sont très cadrées et on a peu de marge de manœuvre. Mais on en a en fait souvent plus qu'on ne pense. En changeant même des petites choses, on peut vraiment renouveler un petit peu ses façons de faire et aussi renouveler son intérêt et son enthousiasme.

  • Speaker #0

    Et du coup, concrètement, comment vous vous y prenez ?

  • Speaker #1

    C'est facile à dire, mais plus difficile à faire. Et notamment, c'est assez difficile de le faire seul. Déjà parce qu'on manque de temps, comme tout le monde, et qu'encore une fois, on est pris un peu dans le flot, dans la succession des séances. Et puis, c'est difficile de se regarder enseigner, tout simplement. Donc, c'est pour ça qu'avoir... Une aide extérieure sous de multiples formes, ça peut être des personnes qui viennent observer le cours, ça peut être des échanges avec d'autres enseignantes et enseignants, bien sûr des formations, mais qui vont nous faire réfléchir à ce qu'on fait et ce qu'on pourrait faire.

  • Speaker #2

    Est-ce que vous avez réussi à, du coup, de façon individuelle ? Aussi d'avoir un rituel pour faire ce travail de réflexion où ce n'est tout simplement pas possible dans le quotidien.

  • Speaker #1

    C'est compliqué en cours de semestre, on fait des ajustements. C'est-à-dire qu'on va réfléchir à une façon d'améliorer ce qu'on faisait avant, mais c'est en général un peu à la marge. Je pense qu'il faut vraiment une prise de distance, un peu de recul, et c'est justement en dehors du semestre. C'est pour ça que moi je l'ai fait plutôt en fin d'année, après la fin du deuxième semestre. Alors avant l'été, alors évidemment on est un peu déconnecté de l'année suivante et de la reprise des cours, on est plutôt dans la fin d'un cycle, mais c'est quand même un bon moment justement pour avoir une distance plus radicale et des changements plus importants. Le centre d'innovation pédagogique m'a énormément aidée et ça répondait à un besoin. existentielle, j'oserais dire, que je ressentais depuis plusieurs années, de réfléchir sur ce que je faisais, d'avoir un apport un peu théorique, mais aussi pratique, pour mieux concevoir mes cours, mieux évaluer mes étudiantes et mes étudiants. Et là, vraiment, j'ai trouvé au CIP de PSL tout ce dont j'avais besoin. Alors, j'ai eu la chance d'avoir un accompagnement personnalisé, ça, c'était vraiment grandiose. J'ai travaillé avec deux ingénieurs pédagogiques sur un de mes cours, donc c'était très concret. Voilà, avoir une vision extérieure, des suggestions bien sûr, il n'y a aucune injonction d'aucune sorte, mais un vrai dialogue pour voir comment le cours est conçu, comment la progression se fait, quel est l'alignement pédagogique qui est absolument central.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on définit ce qu'est l'alignement pédagogique ?

  • Speaker #2

    Alors l'alignement pédagogique, ce n'est pas un gros mot aussi, mais en fait ça désigne tout simplement... La cohérence entre les objectifs d'apprentissage, l'évaluation qu'on propose aux étudiants et les activités qu'on fait faire pendant le cours.

  • Speaker #1

    Évidemment, il y avait un alignement pédagogique, mais qui pourrait être amélioré. Tout ça a été très utile.

  • Speaker #2

    Et peut-être que c'est aussi tout simplement un temps, par cet accompagnement qui est structuré, un temps qu'on libère et qu'on aurait peut-être plus de mal à libérer tout seul, sans partenaire.

  • Speaker #1

    On ne va pas bloquer des créneaux dans son agenda en se disant aujourd'hui, je vais réfléchir à tel cours Donc, en effet, ça force un peu à y consacrer du temps. Et encore une fois, il n'y a rien eu d'inutile, absolument rien d'inutile. Beaucoup de suggestions extrêmement pertinentes, qui m'ont paru évidentes, je me suis dit, mais effectivement, pourquoi je n'ai pas réfléchi plus tôt, rien que ça, en fait. Et des solutions concrètes pour vraiment faciliter les échanges, pour clarifier les attendus. Tout ça a été vraiment très très précieux.

  • Speaker #0

    Vous avez récemment participé au cours d'une collègue pour justement découvrir de nouvelles façons d'enseigner. Qu'est-ce que ça vous a apporté ?

  • Speaker #1

    Oui, alors j'ai participé en effet à ce dispositif que propose le CIP, qui est très simple, qui consiste à aller observer le cours d'un ou une collègue de la même discipline de préférence, qui est venu ensuite également observer un de mes cours, et évidemment l'expérience de cette observation. Rien que le fait de s'asseoir au fond de la salle, d'avoir une vision un peu générale de ce qui se passe, c'est assez intéressant d'avoir une autre approche et un regard attentif sur différentes facettes du cours. Et notamment la façon dont l'enseignante interagit avec son auditoire, c'était très très éclairant. Et j'ai retenu pas mal de petits trucs, d'activités, de façons dont certaines compétences étaient travaillées, que j'ai immédiatement réutilisées dans mes cours. C'était un cours à Dauphine avec des objectifs, un contenu et puis un public qui est un petit peu différent de mon expérience à l'ENS. Mais malgré tout, j'en ai retenu beaucoup de choses et puis l'échange avec l'enseignante a été très riche. Également, quand elle est venue observer mon cours, son retour, ses remarques ont été vraiment très utiles. Très belle expérience.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a une pratique ? Vous avez dit que vous avez mis en place des choses assez immédiatement, par exemple, c'est quoi ? S'il y avait un exemple à donner ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je fais travailler pas mal mes étudiantes et mes étudiants en petits groupes pour qu'ils fassent du travail par pair ou par trois. Et par facilité, je dirais, dans ma salle de cours, ils discutaient avec leurs voisins. Le problème, c'est que leurs voisins voisines sont souvent les gens qu'ils connaissent, ils s'assoient toujours selon le même plan, donc ils parlent toujours avec les mêmes. Ce que fait ma collègue, c'est qu'elle donne à chacun un chiffre, 1, 2, 3, 1, 2, 3, 1, 2, 3, en désignant chaque élève. Et ensuite, tous les uns se rassemblent, donc ils sont obligés de bouger. Déjà, c'est une bonne chose qu'ils puissent se lever et se regrouper. Ça crée un petit peu de chaos pendant quelques secondes, mais c'est très bien, un petit peu de chaos pendant quelques secondes. Et ça leur permet donc d'interagir avec des personnes différentes. C'est vraiment un petit truc. Tout bête, ça ne m'était jamais venu à l'esprit.

  • Speaker #0

    Mais souvent, c'est ça, c'est les retours qu'on a. C'est vraiment des petites choses qu'on ajuste après.

  • Speaker #1

    Et il y a aussi des choses beaucoup moins accessoires, comme son travail sur le vocabulaire, qui était très intéressant. Faire travailler sur les synonymes de façon assez fluide dans le cours. J'ai trouvé ça très intéressant, parce qu'ils ont besoin d'enrichir leur vocabulaire. Souvent, ils connaissent des termes qu'ils n'utilisent pas. Et au détour d'une activité de vraiment les forcer à explorer des champs lexicaux, ça se faisait de façon relativement spontanée et naturelle, et c'est je pense très efficace, quel que soit son public.

  • Speaker #0

    Alors, il y a un sujet qui est très important pour vous et dont vous aviez parlé avec cette collègue, c'est la question de l'accessibilité, c'est-à-dire ce qu'on peut faire pour rendre son cours plus accessible, plus inclusif aux personnes porteuses de handicap ou avec ce qu'on appelle des neuroatypies, troubles dys, spectre de l'autisme, troubles de l'attention. Vous, à quel moment vous vous êtes dit, il faut que j'améliore l'accessibilité de mon cours et qu'est-ce que vous avez mis en place en fait concrètement ?

  • Speaker #1

    C'est grâce à ma mission de directrice de la vie étudiante que je mène en complément de mes activités d'enseignement, que j'ai été amenée à recevoir des témoignages et à organiser des sensibilisations sur le sujet. Ce n'est pas parce que des étudiantes ou des étudiants sont venus à mon cours, se sont présentés avec des demandes d'aménagement. ou avec des demandes spécifiques. Ça, ça ne m'est jamais arrivé. Or, je sais que dans la communauté étudiante de notre établissement, comme dans celle de tout établissement d'ailleurs, certaines personnes ont des besoins particuliers ou des difficultés qui sont liées à des troubles ou des situations de handicap plus sévères. Un certain nombre de conseils ont été prodigués dans ces sessions de sensibilisation qui m'ont paru tellement faciles à mettre en place. En fait, les recommandations se recoupent. Donc ça, c'est quand même une très bonne nouvelle. C'est-à-dire que ce qu'on va faire pour améliorer l'accessibilité de son cours pour quelqu'un qui est sur le spectre de l'autisme, ça va aussi aider quelqu'un qui est dyslexique, ça va aussi aider un étudiant ou une étudiante internationale. En fait, ça va aider tout le monde. C'est-à-dire que personne ne va être pénalisé par ces adaptations. Donc la démarche que j'ai adoptée, c'est vraiment de systématiquement adapter les cours pour que, quel que soit le public, ils soient plus accessibles à une diversité de profils, sans attendre justement que quelqu'un vienne avec un certificat médical, une recommandation d'aménagement du service de médecine préventive, disant de faire ci ou ça. Et en fait, c'est un petit peu chronophage au départ, mais assez simple.

  • Speaker #0

    Et concrètement, comment on fait pour rendre son cours plus accessible ? Est-ce qu'il faut changer ses supports ? Est-ce qu'il y a une police particulière ?

  • Speaker #1

    Alors, moi évidemment, ce que j'ai fait, c'est loin d'être parfait. Et il y a encore vraiment des choses sur lesquelles il faudrait que je travaille pour que mes cours soient encore plus accessibles. Mais j'ai effectivement travaillé sur les supports pour les rendre plus structurés, plus lisibles. Il y a des polices qui sont beaucoup plus claires. Bien numéroter les pages, avoir des pieds de page et des en-têtes pour bien identifier de quoi il s'agit. C'est vraiment des choses très très simples. Avoir la même présentation pour tous les supports aide également. Alors ça m'a obligée, parce que j'avais des extraits de romans que j'avais au départ photocopiés, puis collés avec de la colle et des ciseaux. Ça m'a obligée à tout retaper. Donc c'est vrai que j'y ai passé une partie d'un été, mais maintenant j'ai des choses propres. Enfin, c'est quand même très utile. On travaille sur d'autres choses. Moodle, évidemment, aide beaucoup pour expliciter tous les attendus, pouvoir mettre sur un même espace l'ensemble des documents du cours, l'ensemble des informations. J'ai mis en place aussi un truc tout bête, des pauses. Moi, j'ai des cours de deux heures. Et puis, évidemment, j'ai toujours des tas de choses à faire. Mais je ménage une pause entre ces deux heures, même brève, parce que je sais que ça peut être pour certaines personnes. Vraiment extrêmement utile de pouvoir s'isoler quelques minutes.

  • Speaker #0

    Donc du coup, l'importance d'avoir un syllabus très clair. Il me semble que vous aviez parlé aussi de mettre le numéro des salles, parce qu'elles changent beaucoup à l'ENS et ça peut être source de stress aussi pour des étudiants qui seraient atteints de troubles de l'autisme, des choses comme ça.

  • Speaker #1

    Tout à fait. Tout ce qu'on peut faire pour clarifier. Mettre à l'écrit, ne pas compter. Moi, je comptais beaucoup sur l'oral avant. C'est-à-dire, une fois que j'avais dit quelque chose, voilà, c'était bon, c'était acquis. Maintenant, j'écris tout. Je fais des rappels grâce aux annonces sur Moodle. Ce n'est pas infantilisant, ce n'est pas abétissant. C'est utile pour absolument tout le monde. Donc, ça prend un tout petit peu plus de temps. Mais je pense que les bénéfices excèdent beaucoup les petits inconvénients que ça peut présenter. On prend très vite des automatismes, des réflexes pour le faire.

  • Speaker #0

    Ce qu'on peut dire pour conclure ce thème, c'est qu'on mettra aussi des ressources sur la prise en compte du handicap pour rendre son cours plus accessible, plus inclusif. Il y a notamment à Sciences Po, ils ont fait des fiches pratiques de choses qu'on peut mettre en place dans son cours pour le rendre plus accessible. Donc on mettra ces ressources dans la description du podcast. On arrive à la fin de cet épisode. Pour finir, quels sont vos projets à venir ?

  • Speaker #1

    L'année prochaine, je vais aller enseigner au CPES de PSL pour donner un cours de debating. Ça fait des années que j'enseigne un cours de debating à l'ENS. Je vais collaborer avec une collègue qui a mis en place un cours de debating au CPES et qui le fait de façon différente dans ses modalités d'évaluation, dans les contenus. Elle a beaucoup plus d'heures, donc c'est un petit peu différent. Et alors, je suis... enthousiaste à l'idée justement d'avoir un travail d'équipe sur un objet que je connais bien pour effectivement un petit peu me sortir de mes automatismes pour ce cours et avoir de nouvelles idées que je pourrais éventuellement appliquer à l'ENS également. Donc ce cours de debating sera donné dans le cadre de la deuxième année du CPS, de ce cycle pluridisciplinaire d'études supérieures, qui est une formation de premier cycle d'EPSL. qui mêle des enseignements en lycée, à Louis-le-Grand ou Henri IV, et dans les différents établissements de PSL, donc une formation de premier cycle pluridisciplinaire assez originale.

  • Speaker #0

    Le mot de la fin, c'est une question qu'on va poser à tous nos invités. Quel conseil auriez-vous aimé avoir quand vous avez commencé à enseigner et lequel voudriez-vous donner à quelqu'un qui débute ?

  • Speaker #1

    Ah, quelle bonne question. Alors, bien sûr, on a, je pense, un peu toutes et tous, au début de notre carrière, un syndrome de l'imposteur, où on se sent un petit peu désarmé face à l'ampleur de la tâche. Donc, effectivement, il faut prendre confiance et la confiance vient naturellement avec l'expérience, bien sûr. Mais il faut aussi que cette confiance, elle ne soit pas inébranlable et qu'elle n'empêche pas, malgré tout, des questionnements, parfois des remises en question de ce qu'on fait. Ça peut être des petites choses ou des grandes choses pour savoir se renouveler, se former, s'informer et bien sûr échanger. C'est difficile d'échanger avec ses collègues. En fait, on se croise, on parle de tas de choses, très rarement de pratiques d'enseignement, de ce qui se passe réellement dans la salle de classe. Et pourtant, c'est très riche. de pouvoir s'inspirer de ce qui se fait ailleurs, de pouvoir donner quelques idées à ses collègues. Mais on n'en a pas l'occasion, le cadre n'existe pas pour le faire. Il faut se forcer un petit peu, je pense, sortir parfois de sa zone de confort pour retrouver encore une fois l'enthousiasme et la fraîcheur de ses débuts.

  • Speaker #0

    Et bien c'est la fin de cet épisode. Merci beaucoup Dorothée pour ce partage d'expérience.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    Merci à tous de nous avoir écoutés. Vous trouverez en lien une fiche qui résume les pratiques pédagogiques que nous venons d'aborder. Merci à Félix Vatton pour la réalisation, le montage et le mixage. N'hésitez pas à partager ce podcast et si vous souhaitez faire évoluer votre cours, sachez que le Centre d'innovation pédagogique de PSL peut vous accompagner. A bientôt pour un prochain épisode.

Chapters

  • Chapitre 1 : L'entrée dans le métier

    01:54

  • Chapitre 2 : Prendre du recul sur sa pratique

    10:04

  • Chapitre 3 : Rendre son cours plus accessible et inclusif

    18:20

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