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#2 Dans mon cours - Évaluer ses pairs pour apprendre. Quand les étudiants intègrent le jury !

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45min |11/10/2024
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Description

Dans ce deuxième épisode, nous avons le plaisir d’échanger avec Sonia Adam-Ledunois, enseignante-chercheuse à l'Université Paris Dauphine - PSL.  


"[extrait] Parfois des contraintes ou des menaces sont le meilleur contexte pour innover, ça a été le cas pour ce cours-là". En effet, c'est lors du confinement, que Sonia a du réajuster le déroulé de son cours. Comment éviter que les étudiants ne décrochent lors des présentations orales de leurs camarades, de surcroît à distance ? Une des solutions pour Sonia, a été d'inclure les étudiants dans le jury évaluateur.  


Plus concrètement, elle relate dans ce podcast comment elle a impliqué ses étudiants dans l'évaluation des livrables attendus (un pitch par groupe, accompagné d'un business plan), à l'aide d'une grille critériée et d’une intégration au jury. Dans une seconde partie, elle revient également sur la mise en place d'un écrit réflexif où chaque étudiant est invité à analyser ses apprentissages. Ces deux modalités d'évaluation, complémentaires, ont permis aux étudiants de développer une capacité de distanciation critique et de réflexivité. Enfin, cet épisode met en avant l'importance du feedback pour renforcer les apprentissages de nos étudiants ! 


Transcription de l'épisode ici.


Voici des ressources complémentaires ou évoquées dans l’épisode :


Cet épisode vous a plu 👍 ? N’hésitez pas à vous abonner et à partager ce podcast autour de vous !  


Dans mon cours est un podcast du Centre d’innovation pédagogique - PSL. A travers une conversation et de façon très concrète, chacun sera invité à partager sur ses pratiques d’enseignement, autour d’un thème. Ces épisodes s’adressent à la communauté enseignante de PSL et bien au-delà ! A retrouver sur les plus grandes plateformes d’écoute !

 


 

Production : Centre d’innovation pédagogique - PSL  

Réalisation et écriture : Estelle GOUZE, Thomas BOULOGNE

Réalisation sonore et montage : Félix VATON 

Illustration : Antoine BOURDON 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans cet épisode du podcast Dans mon cours. Je suis Estelle Gouze et je suis accompagnée aujourd'hui de mon collègue Thomas Boulogne. Ensemble, nous travaillons au Centre d'innovation pédagogique de PSL. L'idée de ce podcast est simple, partir à la rencontre des enseignantes et enseignants de PSL afin qu'ils nous partagent des pratiques pédagogiques qu'ils ont mis en place dans leur cours.

  • Speaker #1

    Sous-titrage ST'501

  • Speaker #0

    Et alors aujourd'hui, pour cet épisode, on va s'intéresser à différentes modalités d'évaluation des étudiants. Pour en parler, nous sommes ravis d'accueillir Sonia Adam-Ledunois, qui enseigne à Paris Dauphine PSL. Bonjour Sonia.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de venir partager votre expérience. Vous allez nous décrire plus précisément deux modalités d'évaluation que vous avez développées. Alors, il y en a une sur l'évaluation par les pairs, donc des étudiants qui s'évaluent entre eux, et un écrit individuel et réflexif. où l'étudiant revient sur ses propres apprentissages et les actions qu'il a menées durant le travail de groupe. Donc on va parler de tout ça, mais tout d'abord, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Sonia Adam-Laudinois, je suis enseignante-chercheure à l'Université Paris-Dauphine. Je dirige le Master Entrepreneuriat et Projet Innovant et également la House of Entrepreneurship. Et j'enseigne centralement sur les sujets liés à l'entrepreneuriat et l'innovation.

  • Speaker #2

    Pouvez-vous nous décrire rapidement votre enseignement ?

  • Speaker #1

    Alors l'enseignement que j'assure est un enseignement en master EMEO, Management et Organisation. C'est un master spécialisé sur tous les aspects managériaux. Et moi j'assure le cours en entrepreneuriat, Initiation à l'entrepreneuriat. C'est un cours de 18 heures avec à peu près chaque année entre 24 et 30 étudiants. C'est un cours à option, donc les étudiants s'y inscrivent. Soit par curiosité, sans réellement avoir de connaissances sur la thématique, soit à l'inverse parce qu'eux-mêmes veulent créer ou travailler devant l'écosystème entrepreneurial.

  • Speaker #2

    Donc comment sont découpées vos 18 heures de cours ?

  • Speaker #1

    C'est découpé en 6 séances de 3 heures, 5 séances sur des sujets thématiques, on traite un thème lié à l'entrepreneuriat à chaque séance, et une séance à la fin qui prend la forme d'un jury. devant des pseudo-investisseurs et où les étudiants pitchent le projet qu'ils ont développé tout au long des séances, tout au long du cours.

  • Speaker #2

    Et chaque séance est-elle même découpée en trois parties, c'est bien ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Chaque séance est décomposée de la même façon. D'abord, une partie avec un invité qui vient témoigner de son expérience sur la thématique du cours du jour. C'est souvent un partage d'expériences, c'est la possibilité aussi pour les étudiants de découvrir différentes visions de l'entrepreneuriat et pas une seule. Ensuite, on a une capsule théorique qui dure à peu près une heure, une heure quinze sur le thème du jour, où là je vais développer tout ce qui est lié aux méthodologies, aux outils, aux sujets que les étudiants vont devoir travailler à partir de cette séquence-là. Et ensuite, une partie atelier où les étudiants travaillent par groupe de quatre ou cinq. sur un projet de création d'entreprise. Donc sur les cinq séances, ils vont avancer pas à pas sur le développement de leur projet et la création de leur entreprise. Et là, moi, je passe dans les différents groupes pour les coacher, pour pouvoir répondre à leurs questions, pour pouvoir m'assurer qu'ils ont bien intégré les outils et les méthodologies et qu'ils sont dans la bonne logique.

  • Speaker #0

    Du coup, quels sont les objectifs d'apprentissage du cours ? Qu'est-ce que les étudiants doivent développer comme compétences ?

  • Speaker #1

    Le but du cours, c'est un, qu'il ressorte en ayant compris la posture d'un entrepreneur. Donc, c'est d'abord orienter sur le mindset, savoir raisonner en termes de problèmes plutôt qu'en termes de solutions. C'est souvent l'erreur qu'on observe auprès des jeunes entrepreneurs. Ils ont tendance à avoir des effets de fixation, c'est-à-dire être convaincus que c'est cette solution-là qui est la bonne, sans réellement avoir exploré le besoin finalement de l'utilisateur final. Merci. Donc il y a vraiment ce premier aspect qui est rentré dans la tête d'un entrepreneur pour appréhender les besoins du marché et savoir correctement les comprendre pour les traduire ensuite sous forme de solutions adaptées. Le deuxième objectif de ce cours, c'est d'expérimenter l'erreur. En France, on a souvent tendance à considérer que l'erreur n'est pas une bonne chose, contrairement peut-être à d'autres pays comme les États-Unis. que dans le domaine entrepreneuriat, on va vraiment fonctionner par itération et on va expérimenter des choses, tester, voir ce qui fonctionne, corriger aussi ses représentations, comme je le disais, ses croyances sur ce que le marché aurait besoin, par exemple. Donc ça, c'est un but, un des principaux objectifs du cours, arriver à appréhender, à apprivoiser l'erreur comme terrain d'apprentissage et savoir rebondir. corriger sa trajectoire, son raisonnement pour ajuster petit à petit et atterrir sur une solution qui va être la mieux alignée avec les besoins du marché. Et le troisième objectif, c'est une formation en management, comme je l'ai indiqué en préambule. Donc, c'est important aussi pour eux qu'ils apprennent la démarche de management de projet, c'est-à-dire savoir travailler sur un projet en groupe, à cinq. mais pas faire tout à cinq. Donc, comment est-ce qu'on arrive petit à petit à structurer les séquences dans le temps, à identifier les sujets sur lesquels travailler, à se répartir les rôles tout en se coordonnant ? Donc, ça pose pour eux une difficulté qui est de parvenir à livrer un projet global calibré pour cinq étudiants, tout en ayant une démarche qui tienne compte des qualités et des compétences de chacun. Dans un groupe de cinq, tout le monde n'est pas capable de faire la même chose. Et il ne faut surtout pas, de toute façon, qu'ils fassent tout ensemble.

  • Speaker #0

    Et justement, par rapport au groupe, comment ils ont été constitués, ces groupes d'étudiants ? Parce qu'il y a un peu deux écoles, on peut se dire qu'ils peuvent se mettre par affinité, comme ça, ça va plus ou moins bien se passer. Ou alors, l'enseignant choisit, crée les groupes par lui-même, en se disant que dans la vraie vie, on ne choisit pas toujours avec qui on travaille. Vous, comment vous avez fait ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un cours d'entrepreneuriat. Je pars du principe qu'une des premières problématiques d'un entrepreneur, c'est de savoir s'entourer et de trouver les bonnes compétences, de construire une équipe où les compétences vont être complémentaires. Donc, dès la première séance, je leur fais faire un tour de table, mais ciblé, c'est-à-dire qu'ils ne reviennent pas sur l'intégralité de leur CV. Je leur demande de se présenter. en indiquant ce qui les passionne, parce qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs quand même qui créent d'abord par rapport à des thématiques qui les intéressent ou qui les passionnent. Donc, chacun se présente en indiquant un secteur ou une activité de loisir, ou peu importe, qu'il passionne. Et puis, de dire aussi ce sur quoi il aime travailler. Et ensuite, à l'issue de cette première séance, je leur laisse une semaine pour discuter ensemble et pour trouver le bon match, entre guillemets, pour construire une équipe qui va être bien calibrée à la fois en termes d'intérêt pour un sujet, puisqu'ils sont totalement libres de choisir le secteur dans lequel ils veulent créer leur boîte fictive, et de s'assurer que toutes les compétences vont être réunies dans l'équipe. Est-ce qu'il y a bien quelqu'un qui maîtrise un peu les chiffres, quand d'autres sont meilleurs sur la partie marketing, communication ? Et je leur indique vraiment d'être vigilant sur la composition de leur groupe pour ne pas se réunir simplement... Par affinité ou par deal, on sait que quand on demande aux étudiants de travailler sur un travail de groupe en séance, il y a d'autres cours où les collègues leur demandent la même chose et il peut y avoir des petits arrangements. Toi, tu vas plutôt travailler sur tel cours et puis moi, je vais plutôt prendre à charge ce cours-là. Donc, en réalité, ce n'est plus du travail collectif. Donc là, je les mets en garde là-dessus parce qu'ils vont vraiment avoir besoin de toutes les compétences pour pouvoir aboutir aux résultats attendus.

  • Speaker #2

    Quel est le résultat, justement ? Que doivent produire les étudiants ?

  • Speaker #1

    En termes de résultats, l'objectif, c'est qu'à la fin du semestre, alors ça passe vite, 5 séances de 3 heures, on a une séance tous les 15 jours, mais ce n'est pas le seul cours de leur semestre. On leur demande de produire deux choses. Une première version de leur projet de création sous forme de pitch vidéo, 5 minutes maximum pour pitcher son projet et convaincre le jury. à la fois de l'intérêt de la solution, de son adéquation avec les besoins et du potentiel en termes de développement de cette solution-là. Et le deuxième livrable attendu, c'est un business plan, mais en version très légère. C'est-à-dire que c'est 10-12 pages maximum, où ils doivent vraiment dérouler l'intégralité de leur projet sur les différentes facettes et là encore démontrer le potentiel de leur solution et convaincre les investisseurs. que ça vaut le coup d'investir dans leur projet.

  • Speaker #0

    Et du coup, pour ce faire, vous avez développé et mis en place plusieurs modalités d'évaluation, on l'a dit. Donc, évaluation par les pairs, écrit réflexif. On va rentrer dans le détail pour chacune d'elles. Mais avant, pourquoi ces différentes modalités d'évaluation ? C'était quoi votre but en tant qu'enseignante ?

  • Speaker #1

    Alors, ça s'est fait un peu... Par hasard, au début, comme quoi, quand on dit à nos étudiants entrepreneurs que parfois des contraintes ou des menaces sont le meilleur contexte pour innover, ça a été le cas pour ce cours-là. J'ai mis en place ce système d'évaluation au moment du Covid, puisque les étudiants devaient pitcher leur projet en classe 15 jours après le début du confinement. Donc, j'ai été obligée de rebondir et de prévoir ces pitches sous forme vidéo. Et ma crainte était... c'était que les étudiants ne se concentrent que sur le seul pitch et que je perde le reste des étudiants pendant le reste des présentations. Donc, au départ, j'ai cherché des astuces pour arriver à les engager, les impliquer tout au long de la séance de pitch. Et c'est là que j'ai eu cette idée de me dire, après tout, pourquoi ne pas intégrer sur chaque présentation de groupe un autre groupe d'étudiants qui rejoindraient le jury aux côtés des experts, qui auraient exactement la même grille d'évaluation que nous et qui pourraient ainsi challenger le groupe qu'ils présentent, notamment dans la phase de questions-réponses. Et faisant cela, j'avais aussi comme but de les sensibiliser aux questions. critères d'évaluation, c'est-à-dire ce sur quoi ils vont être évalués quand eux-mêmes vont présenter leur projet. On a souvent des difficultés en réalité en classe à les sensibiliser à toutes les rubriques d'évaluation sur lesquelles on travaille. Et là, le fait de leur partager les grilles d'évaluation avant cette séance de pitch, c'était aussi une façon pour moi d'attirer leur regard sur les critères d'évaluation. Et puis le dernier point, ce qui me semblait important aussi, c'est qu'un certain nombre d'étudiants ne souhaitent pas créer leur boîte, mais souhaitent par contre travailler dans l'accompagnement. Et dans ce cas-là, c'est important de parvenir à développer une posture d'accompagnement qui regarde le projet accompagné sous un angle bienveillant, constructif, mais critique, évidemment. Donc le fait de les intégrer dans ce jury aux côtés des experts, c'était aussi une façon pour moi d'arriver à évaluer à quel point ils sont capables. de prendre une distanciation critique pour faire grandir un projet.

  • Speaker #0

    Et ces critères d'évaluation, ils les ont dès le début du cours, dès le début du semestre ?

  • Speaker #1

    Non, je leur partage. Alors oui, ils ont les grilles d'évaluation d'emblée sur Moodle. Donc, s'ils ont la curiosité d'aller fouiller dans l'espace de cours, ils les trouvent. Moi, je leur indique qu'elles sont là. Et au fil du semestre, quand je vois que certains... certains groupes commencent à s'écarter un peu des attentes du cours. Là, je vais leur dire, attention, regardez peut-être un peu les grilles d'évaluation, parce qu'il y a certains aspects que vous ne travaillez pas suffisamment en profondeur et vous perdez peut-être du temps sur d'autres aspects qui sont moins importants. Par exemple, la vidéo du pitch, on n'est pas en formation audiovisuelle, donc les qualités audiovisuelles du pitch... pitchs ne font pas partie des critères d'évaluation. C'est peut-être pas la peine qu'ils y passent trop de temps de ce fait.

  • Speaker #2

    Tu as mis en place une grille d'évaluation pour l'évaluation par les pairs, suite au Covid, mais est-ce que cette grille existait avant, déjà ?

  • Speaker #1

    Elle existait dans une version moins précise. C'est-à-dire que comme je travaillais déjà sur cette session finale de pitch avec des invités des anciens étudiants du Master Entrepreneuriat ou des entrepreneurs que je croisais au gré des interactions via la House of Entrepreneurship. Ces personnes-là m'avaient manifesté le besoin d'avoir une grille un peu plus précise qui objective les critères sur lesquels on évaluait les étudiants. Et puis surtout, je voulais que ce soit incitatif pour les étudiants ces sessions de pitch. Donc, depuis le début, j'avais indiqué qu'il y avait un challenge à la fin. Avec la remise de deux prix, le prix du projet de création d'entreprise le plus crédible, c'est-à-dire celui où on a presque l'impression que demain les étudiants vont pouvoir se lancer, et un deuxième prix qui était plutôt le prix du projet le plus innovant, le plus en rupture avec l'existant, peut-être un peu moins abouti sur la version opérationnelle. Et donc, ce faisant, les membres du jury professionnel m'avaient demandé d'avoir des critères un peu précis pour pouvoir classer les projets. Et puis moi, je les associe à la notation du pitch, de toute façon. Donc, j'avais besoin de cette grille-là. Quand j'ai commencé à envisager l'évaluation de pair à pair, là, la difficulté était que les étudiants ne mettent pas des notes au hasard ou par amitié, ou à affinité personnelle avec les autres groupes qui présentaient qu'ils avaient à évaluer. Donc, j'ai beaucoup... plus préciser mes critères pour qu'eux, derrière, puissent justifier leur notation. C'est-à-dire qu'ils ne mettent pas juste une note sur chaque critère, ils mettent la note et ils expliquent pourquoi ils ont mis cette note-là.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu peux détailler les critères ?

  • Speaker #1

    Les critères sont différents pour l'oral et pour l'écrit. Ce que je n'ai pas précisé, c'est que le jury étudiant évalue le pitch, la session de questions et de réponses, mais aussi le livrable écrit. Et c'est une note qui est négociée au sein du groupe. C'est-à-dire que chaque étudiant ne met pas une note qu'il me remonte. C'est le groupe dans son ensemble qui discute et qui, quelque part, débat de la note sur chacun des critères. Ça se... pédagogiquement, ça m'intéressait aussi. Pour pouvoir leur montrer qu'on travaille une matière qui n'est pas une matière où forcément c'est cette note qui s'impose. Il y a une réflexion à engager, ça les oblige aussi à revenir à ce qu'on avait eu en cours. Donc ça aussi, ça a de bonnes propriétés pour développer encore plus leur compréhension et leur maîtrise des outils. Et donc, ce faisant, les étudiants vont à l'oral évidemment mettre des notes qui sont liées à la capacité d'un groupe sur cinq minutes à passer des messages clés, convaincants et engageants. Donc ça, c'est des critères à la fois de fond et de forme, non pas vidéo, mais sur la capacité à intriguer, à démontrer, à embarquer le jury dans le projet. Et donc, évidemment, il y a des critères de fond sur la pertinence du projet qui est proposé, sur l'articulation. logique des idées, au travers du pitch, sur leur capacité aussi, au travers des questions-réponses, à être à l'écoute et à s'emparer vraiment des questions que pose le jury et ne pas être dans une position défensive. Ça aussi, c'est quelque chose que je travaille en amont avec eux, être en capacité d'accueillir une critique bienveillante pour voir comment elle peut faire grandir le projet, tout en défendant ses idées quand il y a pertinence à le faire. Donc... Ça, c'est pour l'oral. Et à l'écrit, les étudiants vont là avoir une trame très précise qui va reprendre à la fois l'exploration du besoin du client final, la documentation du problème, puisque c'est un des objectifs du cours. Donc, être capable de faire la démonstration du problème et le documenter. Et ensuite, pas à pas, cheminer pour parvenir à atterrir sur une solution qui va être techniquement viable. en termes notamment de ressources, de complexité, etc. Économiquement équilibré aussi, c'est-à-dire qu'on est a priori en capacité de démontrer que les coûts correspondent à peu près aux résultats qu'on peut obtenir. Et puis, une projection à trois ans classique que les étudiants voient dans d'autres cours. Moi, je m'appuie beaucoup sur ce que les étudiants voient dans d'autres cours du Master 1, notamment en premier semestre.

  • Speaker #0

    Et comment sont les étudiants dans ce rôle d'évaluateurs ? Est-ce qu'ils ont été à l'aise ou est-ce que ça a été difficile ?

  • Speaker #1

    Alors, pas tout de suite. Disons que ça les surprend quand j'évoque cette évaluation de paire à paire. D'ailleurs, la première question qu'ils me posent, c'est est-ce que ça va vraiment compter dans la note du groupe qu'on va évaluer ? Ça, c'est une préoccupation qu'ils ont. Je pense qu'ils ne sont pas habitués à l'exercice parce qu'en France, on ne le travaille pas. C'est une démarche que j'avais découverte plutôt au Canada. J'y suis allée de façon modérée quand même. C'est-à-dire que je leur donne les critères, je leur explique la façon dont ils doivent argumenter et j'insiste beaucoup sur la bienveillance. Ça, c'est un point qui est super important. On ne critique pas pour critiquer. Si on pense qu'il y a un point qui peut être challengé sur le projet, c'est important de le dire. et de le dire de façon objective. Donc mettre de côté leur affect et leur amitié est quelque chose qui peut être un peu compliqué pour eux, mais j'ai le sentiment que la green évaluation objective beaucoup les critères et leur permet petit à petit de rentrer dans ce rôle-là. Le jour J, des pitchs, on leur propose de prendre la parole en premier parce qu'on imagine qu'ils peuvent être... peut-être un peu plus en difficulté, pour trouver une variété de questions à poser au groupe, donc on ne veut pas trop déflorer des idées que nous, on aurait pu avoir au niveau du jury d'experts. Mais en réalité, en général, ils sont très, très pertinents et ils posent des questions qui sont souvent sur la liste des questions qu'ont identifiées les experts du jury.

  • Speaker #2

    Est-ce que par rapport aux objectifs que tu nous as présentés au début, finalement, avec l'évaluation par les pertes, tu as un nouvel objectif d'apprentissage qui serait justement d'avoir le rôle d'évaluateur, donc de pouvoir faire des commentaires ?

  • Speaker #1

    Oui, ça c'est arrivé après. Si je suis honnête, c'est vraiment pas quelque chose que j'avais anticipé au départ. Et depuis 2020, donc depuis la première année où j'ai expérimenté cette version-là, j'avoue que... Petit à petit, moi-même, j'ai questionné ma posture vis-à-vis de ça. J'ai revu mes grilles d'évaluation. Ce que je raconte là, c'est la version aboutie au bout de quatre ans, mais ça s'est fait progressivement. Et effectivement, de plus en plus, je me rends compte que cette évaluation par les pairs, elle devient un levier sur le plan pédagogique pour développer certaines compétences et faire prendre conscience aussi aux étudiants que parfois, ils sont meilleurs dans un rôle que dans un autre. Par exemple, ils peuvent se rendre compte qu'ils ne sont pas très bons en réalité sur la version créativité, compréhension du besoin, création d'entreprise, mais qu'en revanche, ils sont très à l'aise sur cette posture finalement d'accompagnement de projet, puisque c'est un peu dans ce rôle-là que je les mets in fine au travers de ce jury de père à père, et qu'ils ont une très bonne capacité de distanciation critique et de prise de recul sur leur... propres cheminements. Donc là aussi, c'est quelque chose que je valorise, c'est-à-dire qu'ils peuvent arriver in fine à la fin du semestre avec un projet qui ne va pas être extraordinaire par rapport aux aspects attendus, notamment en termes d'innovation par exemple, qui peut être un point qu'on peut avoir en tête. Mais en revanche, ils sont très très bons sur cette posture réflexive et sur cette capacité à dire si c'était à refaire. Voilà ce que je pourrais modifier ou voilà ce que moi j'ai compris de mes aptitudes et des zones dans lesquelles je suis les plus à l'aise.

  • Speaker #2

    Alors justement, par rapport aux commentaires dont tu as dit qu'ils ne mettaient pas seulement une note, mais ils devaient justifier l'appréciation. Que font les étudiants après le groupe qui est jugé, qui est évalué avec ces rétroactions, ces feedbacks ?

  • Speaker #1

    Il y a d'abord la partie jury, c'est-à-dire que la partie question-réponse. On ne va pas l'évaluer dans la capacité de l'étudiant à atterrir sur le bon projet. En fait, ce n'est pas ça le but. C'est là encore une question de posture, c'est-à-dire dans cette session de questions-réponses, ce que j'évalue le plus, c'est la posture de l'étudiant face à la critique. Est-ce qu'il parvient à se remettre en question, à challenger son projet au bon moment ? Est-ce qu'il renonce trop vite ? Ça, c'est aussi éventuellement un problème parce qu'un entrepreneur... Il doit avoir quelques convictions qu'il défend, surtout quand on a un projet très innovant. On sait très bien qu'un projet très innovant va souvent recevoir des critiques du style c'est pas possible, tu n'y arriveras jamais Donc s'il renonce vite, il n'aura pas la ténacité nécessaire. Et en même temps, s'il est fermé à toute forme de critique, il reste obtus sur ses positions, ce n'est pas bon non plus. Cette session de questions-réponses, elle est là vraiment pour évaluer à quel point l'étudiant arrive à développer le bon mindset pour parvenir à faire cheminer et grandir son projet en prenant ce qu'il faut prendre et en restant convaincu de quelques points importants à garder dans son projet. Moi, je ne leur demande pas une version bis de leur projet après ces pitchs-là.

  • Speaker #2

    Et par rapport à l'écrit ?

  • Speaker #1

    Sur l'écrit... Ce que je n'ai pas précisé, c'est que l'écrit, ils nous le remettent le jour des pitches. Ça, ça les perturbe beaucoup. Ils ont plutôt l'habitude de séquences pédagogiques où on va leur demander quelques jours avant l'oral un document que le jury ou l'enseignant aura lu. Et ils vont faire une présentation orale en sachant qu'il y a déjà cette première connaissance du projet au travers de l'écrit. La... Pour ce cours-là, je les mets aussi en situation réelle. C'est-à-dire qu'un entrepreneur qui pitche son projet devant un jury, un board d'investisseurs ou un comité de sélection pour rentrer dans un incubateur, il n'y a pas de connaissance préalable du projet. Donc le fait qu'il pitche, en gros, à l'aveugle pour le jury, c'est aussi une façon pour nous d'évaluer à quel point ils sont capables de défendre et de faire comprendre leur projet en quelques minutes de façon percutante et simple. Et de ce fait, l'écrit, on va en prendre connaissance après. Donc c'est là où on se rend compte parfois que l'oral, on n'avait pas tout bien compris. Ils n'ont pas été super clairs. Ou à l'inverse, qu'ils ont été meilleurs pour nous vendre du rêve à l'oral sur cinq minutes, mais que sur une version un peu plus longue et argumentée et étayée, là, il y a des zones un peu plus floues ou des creux. Donc l'écrit et l'oral permettent de mettre en contraste ou en parallèle différents types de compétences. Et les deux exercices sont essentiels.

  • Speaker #0

    Quels outils vous avez développés et mis à disposition des étudiants ?

  • Speaker #1

    Ils ont un espace numérique pédagogique via la plateforme Moodle où ils vont retrouver l'intégralité des supports de cours. Ça aussi, c'est une question que je me suis posée à un moment donné, de savoir s'il fallait mettre les supports de cours avant les séances. Est-ce que je n'allais pas perdre l'attention des étudiants ? En fait, je me suis rendu compte que ça me faisait gagner énormément de temps. Je ne leur demande pas de consulter les supports avant la séance parce que ça reste quand même un cours 3 crédits ECTS, 18 heures, donc il faut quand même calibrer la charge de travail. Mais sur l'espace Moodle, ils ont aussi plein de ressources complémentaires, notamment des outils d'IA génératifs. C'est-à-dire que je pars du principe qu'il faut que l'étudiant compose avec les outils qu'il pourrait avoir à disposition si à un moment donné, lui-même voulait créer son entreprise. Je les mets à disposition, je ne les traite pas en séance, je leur dis simplement que cette ressource est là. Je leur donne quelques exemples d'IA génératif, par exemple pour générer des noms de marques, générer des logos, des visuels, des mock-ups. Paradoxalement, les étudiants ne l'ont pas utilisé cette année du tout. Ils avaient l'impression que c'était triché, donc ils n'y sont pas allés, étonnamment. Et ils ont du coup... ou passer parfois beaucoup d'heures à générer des logos, puisque ça fait partie aussi des éléments attendus dans le livrable final. Et ils ont également tout un tas de ressources complémentaires, type des vidéos de pitch ou de sessions de questions-réponses de vrais entrepreneurs face à des jurys. Et sur l'écrit aussi, ils savent quels sont les grands blocs incontournables qui doivent être présentés dans leur livrable final. La... longueur de l'écrit les met en difficulté et je le fais exprès. C'est-à-dire que parfois les étudiants dans leur mémoire soupirent quand on leur dit que c'est un mémoire de 70 ou 80 pages. Ils ont peur de ne pas avoir suffisamment de matière pour alimenter un tel document et à l'inverse, quand je leur indique que leur version finale de business plan doit tenir sur une dizaine de pages, ils sont en panique. Parce qu'ils voudraient y mettre... tout le détail de l'étude de marché, de leur prévisionnel financier. Donc, certains essaient de ruser avec les annexes, par exemple. Donc, je les limite aussi en termes de volumétrie d'annexe. Et ce format-là les oblige à la synthèse et à aller se concentrer sur l'essentiel en termes de proposition de valeur, de cohérence d'ensemble. Donc, là aussi, je les contrains pour les obliger à se mettre vraiment dans la peau d'un entrepreneur tel que c'est pratiqué dans le domaine entrepreneurial.

  • Speaker #0

    Pour revenir au sujet des IA génératives, est-ce que pour l'année prochaine, vous pensez peut-être un petit peu plus les intégrer ou peut-être poser un cadre avec les étudiants pour que justement, ils n'aient pas cette impression de triche, d'en discuter avec eux pour un petit peu les rassurer aussi, parce que finalement, c'est des... Outils avec lesquels ils vont certainement, à l'avenir, devoir travailler. Est-ce que c'est prévu ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est clair. Ça fait partie des compétences qu'ils doivent développer. Ça pose aussi des questions éthiques, évidemment. Ça pose des questions en termes de confidentialité des données. Aujourd'hui, toutes les entreprises avec lesquelles on interagit, notamment au niveau de la House of Entrepreneurship, nous disent... Ça fait partie de notre quotidien, c'est un outil qui nous permet parfois de gagner en efficacité, mais il ne faut pas l'utiliser n'importe comment et pour n'importe quoi. Donc, je pense que l'an prochain, je vais un peu plus contraindre l'utilisation de ces outils-là. Je l'ai fait cette année plutôt en M2, dans le cadre du M2 Entrepreneuriat. C'est aussi, je pense, une question de temps, c'est-à-dire qu'on a vu apparaître ces outils-là un peu brutalement. On est même... nous-mêmes un petit peu démunis aussi. Il faut qu'on se familiarise en tant qu'enseignant avec ces outils-là. Je pense que ça peut être une vraie valeur ajoutée pour des entrepreneurs. Et donc, il faut que les étudiants apprennent à les utiliser à bon escient aussi dans le cadre de leurs projets.

  • Speaker #0

    On va maintenant aborder l'écrit réflexif. C'est une production que vous demandez à chacun de vos étudiants. En quoi ça consiste ? Alors d'abord, pour revenir sur ce que c'est, chaque étudiant, et ça aussi, ils le savent dès le début de l'année, ils savent qu'ils auront à produire une page de retour réflexif à la fois sur le fonctionnement de leur groupe et à la fois sur ce que ça leur a apporté à eux en termes d'enseignement à titre personnel, sur leurs compétences, sur les marges de progression, sur les aspects sur lesquels ils se sont sentis vraiment à l'aise. Ou pas. Le but de ce document réflexif, c'est qualitatif. D'abord, il faut le dire, je parlais tout à l'heure de l'évaluation qui peut être un peu inconfortable pour nous en France, d'évaluer les autres et de s'auto-évaluer. Sur cet exercice-là, je ne voulais surtout pas que ça crée de tensions au sein de mes groupes tout au long du semestre, parce qu'ils savaient que chacun allait évaluer les autres. Je trouvais que ça pouvait être un peu compliqué à gérer. Donc, d'emblée, ils savent qu'ils n'auront pas à mettre une note sur les autres, ils n'auront pas à se noter individuellement, mais par contre, ils vont faire une évaluation qualitative. Et je leur dis que c'est important, un, que chacun des membres du groupe voit cette note réflexive des autres. Donc, il faut que ce soit mutualisé pour que chacun puisse en prendre connaissance. Ça évite, un, des retours réflexifs un peu enjolivés. Parce qu'on sait que les autres ne le verront pas, donc on tient un peu la couverture à soi en donnant l'illusion qu'on a été à fond tout le temps, qu'on a lidé le projet et qu'on a été vraiment exemplaires. Il y a une petite régulation sociale que je recherche. Et la deuxième chose, c'est que ça permet de croiser les regards et de leur montrer que face à une situation donnée, il y a plein de façons de vivre, de ressentir et d'analyser cette situation-là. Et donc, c'est important. qu'ils puissent questionner leur positionnement, leur posture et voir que les autres en phase 2 ont eu soit une lecture peut-être un peu moins dure de la façon dont eux-mêmes ont fonctionné, ou une autre façon d'appréhender les choses et de se positionner au sein du collectif. Donc cette note réflexive, au départ là aussi, je vous présente la version... A bouti, hyper rationalisée, mais en réalité, au début, c'était surtout que c'était la première année que j'ai fait ce cours-là. J'avais besoin de comprendre comment les étudiants avaient vécu mon cours et ce qui avait fonctionné, pas fonctionné. Que moi-même, j'ai des éléments pour pouvoir me remettre en cause et adapter ma démarche pédagogique. Au départ, ces notes réflexives, elles n'étaient pas mutualisées parce que les étudiants, une réflexe, m'envoyaient chacun leur note par mail. Donc... C'est là où je me suis rendue compte que c'était beaucoup plus précieux que ce que je croyais, que ça mettait en avant des apprentissages sur des domaines que je n'avais pas spontanément identifiés comme étant dans mes objectifs pédagogiques, et que c'était dommage qu'ils ne les partagent pas entre eux, parce qu'il y avait là aussi matière à pouvoir, en croisant les regards, se questionner encore plus a posteriori. Donc dès la deuxième année... Je leur ai demandé que ces documents-là soient présents en annexe de leur business plan. Et pour moi, bon an, mal an, ça m'a permis, un, d'adapter ma démarche pédagogique, de réajuster des points où je voyais que finalement ça n'avait pas été bien assimilé, ou à l'inverse, des trucs qu'ils développaient pendant ce travail d'équipe, mais où ils étaient démunis, ils n'avaient pas suffisamment d'outils. Par exemple, très vite, les étudiants m'ont dit c'est génial cette autonomie que vous nous donnez, mais on se rend compte qu'on est en difficulté, par exemple, à mi-semestre, parce qu'on n'a pas su gérer notre collectif, se répartir correctement les rôles et se coordonner. On veut tellement respecter la parole des uns et des autres qu'en fait, on passe des heures et on ne sait pas, à un moment donné, trouver des méthodologies de facilitation et de négociation en groupe pour trancher quand même à un moment donné. Donc, c'est rigolo, mais un des points qui ressort beaucoup dans leur note réflexive, c'est la démocratie, la participation, c'est bien. On est super content et on était convaincus que c'était essentiel, mais on voit aussi les limites du truc quand même. Et à un moment donné, une équipe sans chef, ça ne marche pas. Donc, ça, ils m'ont demandé des outils que je leur ai fournis l'année suivante pour pouvoir réguler. Ça passe souvent par des attributions de rôle. Chaque séance, en collectif, il y en a un qui va être facilitateur, donc il va se mettre en dehors, il ne va pas donner son avis, mais il va plutôt faire en sorte que chaque point de vue puisse être exprimé à un moment donné. D'autres vont être l'avocat de l'ange, d'autres l'avocat du diable, d'autres la parole du client. Donc, le fait à tour de rôle d'occuper ces positions-là dans le groupe les aide. Et puis, je les ai outillées aussi un peu sur des méthodologies qui vont leur servir ensuite en entreprise. Par exemple, des comptes rendus, des relevés de décision, des outils de management de projet. Donc ça, c'est des points qu'ils font ressortir dans leur note réflexive. Et puis, l'autre point qui me surprenait au début, et puis maintenant, je l'ai complètement intégré comme étant un outil de pédagogie, c'est ce que je disais tout à l'heure, c'est le fait que les étudiants se rendent compte que parfois, ils n'ont pas été bons du tout dans l'itération pour atterrir sur une solution un peu innovante. Et ils disent eux-mêmes que leur projet, en fait, il est décevant, clairement, par rapport à ce qu'ils pouvaient en espérer au début du cours. Ils sont capables de dire pourquoi il est décevant. là où ils sont tombés dans certains écueils. Et ils sont aussi capables d'une très grande capacité à prendre de la distance sur le projet des autres et à se rendre compte qu'ils prennent plaisir à ça, au feedback constructif et à la capacité d'aller challenger le projet d'un autre. Donc ça, c'est plutôt chouette aussi. Et donc, il y a aussi dans ces notes réflexives-là, souvent, des développements sur voilà où il faut que je sois vigilant à l'avenir. pour moi-même me modérer et être mieux positionnée dans le collectif pour aller de l'avant ensemble.

  • Speaker #1

    Cette note est complètement libre ou tu es la guide avec des questions ?

  • Speaker #0

    Je leur donne quelques jalons quand même, mais là pour le coup je veux quand même qu'ils aient un espace de liberté. Donc je leur indique quelques points sur lesquels je les attends. En gros, faites... un retour réflexif sur votre fonctionnement collectif. Qu'est-ce qui a marché ? Qu'est-ce qui n'a pas marché ? Qu'est-ce qui vous a plu ? Qu'est-ce que vous referiez différemment si vous aviez l'opportunité de le refaire ? Et puis, un aspect plus sur qu'est-ce que j'ai compris de mon rôle à posteriori ? Comment je me suis positionnée ? Qu'est-ce qui a varié au fil du semestre ?

  • Speaker #1

    C'est écrit, tu demandes à chaque personne du groupe de lire les écrits des autres personnes du groupe, mais est-ce qu'ils sont ouverts aussi à toute la classe ?

  • Speaker #0

    Non. Et c'est rigolo d'ailleurs parce que ta question me fait penser que je leur demande de partager leur business plan avec le groupe étudiant qui va les évaluer dans le jury de père à père. Mais je me rends compte que les étudiants ont le réflexe de ne livrer que la partie BP et pas les annexes. Tu as raison, en fait, ils ne le partagent pas avec les autres groupes. Ça, c'est vrai.

  • Speaker #2

    Et finalement, cet écrit vous sert aussi à vous en tant qu'enseignante. pour faire évoluer votre cours ? Ça vous sert un peu de feedback, finalement,

  • Speaker #0

    aussi ? Oui, oui, oui. Ça fait quasiment trois ans que les étudiants me disent qu'ils sont ravis de ces temps collectifs en classe. Parce que ce que je n'ai pas dit, c'est qu'initialement, il y avait ce projet collectif, mais j'avais tendance à être finalement... Dans un schéma très orthodoxe où je me disais qu'un cours, il fallait forcément que j'ai un contenu pédagogique qui les occupe, qui alimente mes trois heures de séance, il y avait une forme de culpabilité presque à me dire que j'allais pas bien faire mon travail si j'avais une capsule théorique que d'une heure et quart. C'est rigolo, je ne m'étais pas rendue compte de ça avant qu'on en parle aujourd'hui, mais c'est vrai que j'avais l'impression que... Un bon cours, c'est un cours où il y a vraiment du contenu théorique et donc il y avait très peu de temps de travail en groupe pendant mes séances. Et au fil du temps, les étudiants m'ont demandé à avoir ce temps-là parce que problème d'options, donc problème d'arriver à se retrouver en un même temps chaque semaine pour pouvoir avancer sur le projet. Donc j'ai petit à petit aménagé un temps un peu plus long d'atelier. J'essaie aujourd'hui de vraiment me discipliner pour qu'ils aient toujours... une heure de travail en groupe à chaque séance. Et moi, je mets le chrono pour que chaque groupe ait au moins huit minutes avec moi à chaque séance. Je leur laisse un petit temps quand même pour atterrir avant de passer dans chaque groupe. Et là, je me rends compte, au travers des notes réflexives depuis deux, trois ans, que ils voudraient plus de temps avec moi en coaching. Ça donne un projet d'innovation pédagogique qu'on va mettre en place justement avec le CIP l'an prochain pour essayer de faire en sorte que ces éléments théoriques, qu'ils les assimilent et qu'ils aillent les chercher un peu plus en dehors des cours pour qu'il y ait plus de temps dédié au travail en groupe avec un accompagnement qui sera plus poussé de mon côté et avec la possibilité d'ailleurs éventuellement d'aller chercher des experts. pour les coacher au fil du semestre sur des aspects qui sont moins dans ma discipline. Et ça, c'est ressorti grâce à ces notes réflexives.

  • Speaker #1

    Avec l'évaluation par les pairs, le jury, il y a beaucoup de commentaires d'étudiants ou de professionnels pour les étudiants. Mais toi, est-ce que tu fais une rétroaction globale, un feedback global pour chaque étudiant ?

  • Speaker #0

    Alors, je fais un feedback global à chaque équipe. C'est-à-dire que chaque équipe, une fois que j'ai reçu les évaluations de pair à pair, qu'ils ont pitché, qu'on a discuté avec les membres experts du jury, que moi, j'ai aussi évalué de mon côté leurs documents écrits. Je fais à chaque groupe, par mail, un feedback écrit qui est quand même assez long, ça fait à peu près, on va dire une page, une page et demie par groupe, où je reprends les éléments sur lesquels ça a été vraiment des points de force du groupe, ils ont vraiment été bons, à la fois sur leur projet, sur le fond, sur le fonctionnement de leur équipe, sur la prise de parole, et les éléments... qui ont pu constituer des points de fragilité sur lesquels il faudra qu'ils aient une vigilance pour la suite. Et le feedback que je leur fais tient compte à la fois de mon évaluation et aussi des feedbacks et des commentaires dans le cadre de l'évaluation paire à paire, puisque chaque groupe motive et justifie sa note par critère avec un petit développement de 10-12 lignes. Donc je croise les feedbacks qualitatifs des jurys de paire à paire avec les miens. pour faire une synthèse globale de tout ça.

  • Speaker #1

    À propos du temps, donc ton cours fait 18 heures, 3 ECTS, donc on estime que c'est à peu près 75 heures de travail pour les étudiants. Donc il leur reste un peu moins de 60 heures. Est-ce que ça leur travaille en pied de beaucoup sur ces 60 heures ou est-ce qu'ils arrivent à s'y tenir ?

  • Speaker #0

    Alors ils me disent qu'ils y passent plus de temps que d'autres cours équivalents aussi. parce qu'ils se prennent au jeu, en fait. Et le fait qu'il y ait cette évaluation de pair à pair, un jury avec des experts, probablement leur met entre guillemets un petit peu la pression. Ils ont envie vraiment de présenter aux autres un projet avec un effet waouh. On sent qu'il y a cette émulation collective entre les groupes de pouvoir être sur le podium, de décrocher un des deux prix. Donc, ils y passent beaucoup de temps. de temps. Ils me disent qu'ils arrivent surtout en fin de semestre quand il y a ce goulot d'étranglement à la fin où tous les cours atterrissent sur des livrables, des soutenances et autres. Là, ils sont un peu plus en difficulté. Certains me disent qu'ils ont une frustration de ne pas avoir pu y passer plus de temps. Je pense que globalement, par rapport au calibrage que tu évoques, comme c'est quand même un travail de groupe où ils sont 4-5, s'ils se répartissent bien les rôles, on y arrive.

  • Speaker #2

    Le mot de la fin que nous posons à tous nos invités, quel conseil auriez-vous aimé avoir quand vous avez commencé à enseigner et lequel voudriez-vous donner à quelqu'un qui débute ?

  • Speaker #0

    Il y en a un premier qui est lié à la façon de se positionner vis-à-vis des étudiants. Moi, j'avais l'impression en début de carrière qu'il fallait que je maîtrise tout, que je les encadre, que je les dirige. J'étais très précise sur mes attentes. Et presque dans une logique de contrôle, quoi. Donc, il y avait une forme, finalement, à posteriori, probablement d'infantilisation des étudiants. Et au fil du temps, je me suis rendue compte qu'il fallait, en tout cas, moi, c'est comme ça que je suis à l'aise, qu'il fallait leur donner de l'autonomie, leur donner confiance dans leurs aptitudes, parce que ça, c'est un point, peut-être, dont on ne parle pas assez, mais souvent, les étudiants ont l'impression... Qu'ils n'ont rien à proposer à une entreprise quand ils recherchent un stage, ils doutent beaucoup en réalité. Leur laisser de l'autonomie et de la liberté, c'est le meilleur moyen en fait qu'eux-mêmes s'impliquent dans le cours et éventuellement nous apportent aussi des choses pour faire évoluer notre enseignement. Donc moins de contrôle, plus d'autonomie et une confiance aussi à leur accorder. Quand j'ai commencé l'évaluation de pair à pair, Je me suis vraiment demandé si les étudiants n'allaient pas tous chercher à mettre une très bonne note à leurs petits camarades. En réalité, en règle générale, il y a un point d'écart entre la note du jury expert et la note du jury étudiant. Donc comme quoi, même sur l'évaluation des autres, on peut leur faire confiance dès lors que c'est encadré. Donc l'autonomie n'exclut pas le contrôle qu'on dit en management. Et il faut savoir bien doser les deux, mais trop de contrôle. finalement abouti un peu au résultat inverse attendu, je trouve. Et si on me l'avait dit plus tôt, j'aurais gagné du temps.

  • Speaker #2

    Eh bien, c'est la fin de cet épisode. Merci beaucoup Sonia pour ce partage d'expérience. Merci à tous de nous avoir écoutés. Vous trouverez en lien des ressources sur les pratiques pédagogiques que nous venons d'aborder. Merci à Félix Vaton pour la réalisation, le montage et le mixage. N'hésitez pas à partager ce podcast et si vous souhaitez faire évoluer votre cours, sachez que le Centre d'innovation pédagogique de PSL peut vous accompagner. À bientôt pour un prochain épisode.

Chapters

  • Evaluer ses pairs pour favoriser l'apprentissage

    09:48

  • L'écrit réflexif pour analyser ses apprentissages

    29:43

Description

Dans ce deuxième épisode, nous avons le plaisir d’échanger avec Sonia Adam-Ledunois, enseignante-chercheuse à l'Université Paris Dauphine - PSL.  


"[extrait] Parfois des contraintes ou des menaces sont le meilleur contexte pour innover, ça a été le cas pour ce cours-là". En effet, c'est lors du confinement, que Sonia a du réajuster le déroulé de son cours. Comment éviter que les étudiants ne décrochent lors des présentations orales de leurs camarades, de surcroît à distance ? Une des solutions pour Sonia, a été d'inclure les étudiants dans le jury évaluateur.  


Plus concrètement, elle relate dans ce podcast comment elle a impliqué ses étudiants dans l'évaluation des livrables attendus (un pitch par groupe, accompagné d'un business plan), à l'aide d'une grille critériée et d’une intégration au jury. Dans une seconde partie, elle revient également sur la mise en place d'un écrit réflexif où chaque étudiant est invité à analyser ses apprentissages. Ces deux modalités d'évaluation, complémentaires, ont permis aux étudiants de développer une capacité de distanciation critique et de réflexivité. Enfin, cet épisode met en avant l'importance du feedback pour renforcer les apprentissages de nos étudiants ! 


Transcription de l'épisode ici.


Voici des ressources complémentaires ou évoquées dans l’épisode :


Cet épisode vous a plu 👍 ? N’hésitez pas à vous abonner et à partager ce podcast autour de vous !  


Dans mon cours est un podcast du Centre d’innovation pédagogique - PSL. A travers une conversation et de façon très concrète, chacun sera invité à partager sur ses pratiques d’enseignement, autour d’un thème. Ces épisodes s’adressent à la communauté enseignante de PSL et bien au-delà ! A retrouver sur les plus grandes plateformes d’écoute !

 


 

Production : Centre d’innovation pédagogique - PSL  

Réalisation et écriture : Estelle GOUZE, Thomas BOULOGNE

Réalisation sonore et montage : Félix VATON 

Illustration : Antoine BOURDON 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans cet épisode du podcast Dans mon cours. Je suis Estelle Gouze et je suis accompagnée aujourd'hui de mon collègue Thomas Boulogne. Ensemble, nous travaillons au Centre d'innovation pédagogique de PSL. L'idée de ce podcast est simple, partir à la rencontre des enseignantes et enseignants de PSL afin qu'ils nous partagent des pratiques pédagogiques qu'ils ont mis en place dans leur cours.

  • Speaker #1

    Sous-titrage ST'501

  • Speaker #0

    Et alors aujourd'hui, pour cet épisode, on va s'intéresser à différentes modalités d'évaluation des étudiants. Pour en parler, nous sommes ravis d'accueillir Sonia Adam-Ledunois, qui enseigne à Paris Dauphine PSL. Bonjour Sonia.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de venir partager votre expérience. Vous allez nous décrire plus précisément deux modalités d'évaluation que vous avez développées. Alors, il y en a une sur l'évaluation par les pairs, donc des étudiants qui s'évaluent entre eux, et un écrit individuel et réflexif. où l'étudiant revient sur ses propres apprentissages et les actions qu'il a menées durant le travail de groupe. Donc on va parler de tout ça, mais tout d'abord, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Sonia Adam-Laudinois, je suis enseignante-chercheure à l'Université Paris-Dauphine. Je dirige le Master Entrepreneuriat et Projet Innovant et également la House of Entrepreneurship. Et j'enseigne centralement sur les sujets liés à l'entrepreneuriat et l'innovation.

  • Speaker #2

    Pouvez-vous nous décrire rapidement votre enseignement ?

  • Speaker #1

    Alors l'enseignement que j'assure est un enseignement en master EMEO, Management et Organisation. C'est un master spécialisé sur tous les aspects managériaux. Et moi j'assure le cours en entrepreneuriat, Initiation à l'entrepreneuriat. C'est un cours de 18 heures avec à peu près chaque année entre 24 et 30 étudiants. C'est un cours à option, donc les étudiants s'y inscrivent. Soit par curiosité, sans réellement avoir de connaissances sur la thématique, soit à l'inverse parce qu'eux-mêmes veulent créer ou travailler devant l'écosystème entrepreneurial.

  • Speaker #2

    Donc comment sont découpées vos 18 heures de cours ?

  • Speaker #1

    C'est découpé en 6 séances de 3 heures, 5 séances sur des sujets thématiques, on traite un thème lié à l'entrepreneuriat à chaque séance, et une séance à la fin qui prend la forme d'un jury. devant des pseudo-investisseurs et où les étudiants pitchent le projet qu'ils ont développé tout au long des séances, tout au long du cours.

  • Speaker #2

    Et chaque séance est-elle même découpée en trois parties, c'est bien ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Chaque séance est décomposée de la même façon. D'abord, une partie avec un invité qui vient témoigner de son expérience sur la thématique du cours du jour. C'est souvent un partage d'expériences, c'est la possibilité aussi pour les étudiants de découvrir différentes visions de l'entrepreneuriat et pas une seule. Ensuite, on a une capsule théorique qui dure à peu près une heure, une heure quinze sur le thème du jour, où là je vais développer tout ce qui est lié aux méthodologies, aux outils, aux sujets que les étudiants vont devoir travailler à partir de cette séquence-là. Et ensuite, une partie atelier où les étudiants travaillent par groupe de quatre ou cinq. sur un projet de création d'entreprise. Donc sur les cinq séances, ils vont avancer pas à pas sur le développement de leur projet et la création de leur entreprise. Et là, moi, je passe dans les différents groupes pour les coacher, pour pouvoir répondre à leurs questions, pour pouvoir m'assurer qu'ils ont bien intégré les outils et les méthodologies et qu'ils sont dans la bonne logique.

  • Speaker #0

    Du coup, quels sont les objectifs d'apprentissage du cours ? Qu'est-ce que les étudiants doivent développer comme compétences ?

  • Speaker #1

    Le but du cours, c'est un, qu'il ressorte en ayant compris la posture d'un entrepreneur. Donc, c'est d'abord orienter sur le mindset, savoir raisonner en termes de problèmes plutôt qu'en termes de solutions. C'est souvent l'erreur qu'on observe auprès des jeunes entrepreneurs. Ils ont tendance à avoir des effets de fixation, c'est-à-dire être convaincus que c'est cette solution-là qui est la bonne, sans réellement avoir exploré le besoin finalement de l'utilisateur final. Merci. Donc il y a vraiment ce premier aspect qui est rentré dans la tête d'un entrepreneur pour appréhender les besoins du marché et savoir correctement les comprendre pour les traduire ensuite sous forme de solutions adaptées. Le deuxième objectif de ce cours, c'est d'expérimenter l'erreur. En France, on a souvent tendance à considérer que l'erreur n'est pas une bonne chose, contrairement peut-être à d'autres pays comme les États-Unis. que dans le domaine entrepreneuriat, on va vraiment fonctionner par itération et on va expérimenter des choses, tester, voir ce qui fonctionne, corriger aussi ses représentations, comme je le disais, ses croyances sur ce que le marché aurait besoin, par exemple. Donc ça, c'est un but, un des principaux objectifs du cours, arriver à appréhender, à apprivoiser l'erreur comme terrain d'apprentissage et savoir rebondir. corriger sa trajectoire, son raisonnement pour ajuster petit à petit et atterrir sur une solution qui va être la mieux alignée avec les besoins du marché. Et le troisième objectif, c'est une formation en management, comme je l'ai indiqué en préambule. Donc, c'est important aussi pour eux qu'ils apprennent la démarche de management de projet, c'est-à-dire savoir travailler sur un projet en groupe, à cinq. mais pas faire tout à cinq. Donc, comment est-ce qu'on arrive petit à petit à structurer les séquences dans le temps, à identifier les sujets sur lesquels travailler, à se répartir les rôles tout en se coordonnant ? Donc, ça pose pour eux une difficulté qui est de parvenir à livrer un projet global calibré pour cinq étudiants, tout en ayant une démarche qui tienne compte des qualités et des compétences de chacun. Dans un groupe de cinq, tout le monde n'est pas capable de faire la même chose. Et il ne faut surtout pas, de toute façon, qu'ils fassent tout ensemble.

  • Speaker #0

    Et justement, par rapport au groupe, comment ils ont été constitués, ces groupes d'étudiants ? Parce qu'il y a un peu deux écoles, on peut se dire qu'ils peuvent se mettre par affinité, comme ça, ça va plus ou moins bien se passer. Ou alors, l'enseignant choisit, crée les groupes par lui-même, en se disant que dans la vraie vie, on ne choisit pas toujours avec qui on travaille. Vous, comment vous avez fait ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un cours d'entrepreneuriat. Je pars du principe qu'une des premières problématiques d'un entrepreneur, c'est de savoir s'entourer et de trouver les bonnes compétences, de construire une équipe où les compétences vont être complémentaires. Donc, dès la première séance, je leur fais faire un tour de table, mais ciblé, c'est-à-dire qu'ils ne reviennent pas sur l'intégralité de leur CV. Je leur demande de se présenter. en indiquant ce qui les passionne, parce qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs quand même qui créent d'abord par rapport à des thématiques qui les intéressent ou qui les passionnent. Donc, chacun se présente en indiquant un secteur ou une activité de loisir, ou peu importe, qu'il passionne. Et puis, de dire aussi ce sur quoi il aime travailler. Et ensuite, à l'issue de cette première séance, je leur laisse une semaine pour discuter ensemble et pour trouver le bon match, entre guillemets, pour construire une équipe qui va être bien calibrée à la fois en termes d'intérêt pour un sujet, puisqu'ils sont totalement libres de choisir le secteur dans lequel ils veulent créer leur boîte fictive, et de s'assurer que toutes les compétences vont être réunies dans l'équipe. Est-ce qu'il y a bien quelqu'un qui maîtrise un peu les chiffres, quand d'autres sont meilleurs sur la partie marketing, communication ? Et je leur indique vraiment d'être vigilant sur la composition de leur groupe pour ne pas se réunir simplement... Par affinité ou par deal, on sait que quand on demande aux étudiants de travailler sur un travail de groupe en séance, il y a d'autres cours où les collègues leur demandent la même chose et il peut y avoir des petits arrangements. Toi, tu vas plutôt travailler sur tel cours et puis moi, je vais plutôt prendre à charge ce cours-là. Donc, en réalité, ce n'est plus du travail collectif. Donc là, je les mets en garde là-dessus parce qu'ils vont vraiment avoir besoin de toutes les compétences pour pouvoir aboutir aux résultats attendus.

  • Speaker #2

    Quel est le résultat, justement ? Que doivent produire les étudiants ?

  • Speaker #1

    En termes de résultats, l'objectif, c'est qu'à la fin du semestre, alors ça passe vite, 5 séances de 3 heures, on a une séance tous les 15 jours, mais ce n'est pas le seul cours de leur semestre. On leur demande de produire deux choses. Une première version de leur projet de création sous forme de pitch vidéo, 5 minutes maximum pour pitcher son projet et convaincre le jury. à la fois de l'intérêt de la solution, de son adéquation avec les besoins et du potentiel en termes de développement de cette solution-là. Et le deuxième livrable attendu, c'est un business plan, mais en version très légère. C'est-à-dire que c'est 10-12 pages maximum, où ils doivent vraiment dérouler l'intégralité de leur projet sur les différentes facettes et là encore démontrer le potentiel de leur solution et convaincre les investisseurs. que ça vaut le coup d'investir dans leur projet.

  • Speaker #0

    Et du coup, pour ce faire, vous avez développé et mis en place plusieurs modalités d'évaluation, on l'a dit. Donc, évaluation par les pairs, écrit réflexif. On va rentrer dans le détail pour chacune d'elles. Mais avant, pourquoi ces différentes modalités d'évaluation ? C'était quoi votre but en tant qu'enseignante ?

  • Speaker #1

    Alors, ça s'est fait un peu... Par hasard, au début, comme quoi, quand on dit à nos étudiants entrepreneurs que parfois des contraintes ou des menaces sont le meilleur contexte pour innover, ça a été le cas pour ce cours-là. J'ai mis en place ce système d'évaluation au moment du Covid, puisque les étudiants devaient pitcher leur projet en classe 15 jours après le début du confinement. Donc, j'ai été obligée de rebondir et de prévoir ces pitches sous forme vidéo. Et ma crainte était... c'était que les étudiants ne se concentrent que sur le seul pitch et que je perde le reste des étudiants pendant le reste des présentations. Donc, au départ, j'ai cherché des astuces pour arriver à les engager, les impliquer tout au long de la séance de pitch. Et c'est là que j'ai eu cette idée de me dire, après tout, pourquoi ne pas intégrer sur chaque présentation de groupe un autre groupe d'étudiants qui rejoindraient le jury aux côtés des experts, qui auraient exactement la même grille d'évaluation que nous et qui pourraient ainsi challenger le groupe qu'ils présentent, notamment dans la phase de questions-réponses. Et faisant cela, j'avais aussi comme but de les sensibiliser aux questions. critères d'évaluation, c'est-à-dire ce sur quoi ils vont être évalués quand eux-mêmes vont présenter leur projet. On a souvent des difficultés en réalité en classe à les sensibiliser à toutes les rubriques d'évaluation sur lesquelles on travaille. Et là, le fait de leur partager les grilles d'évaluation avant cette séance de pitch, c'était aussi une façon pour moi d'attirer leur regard sur les critères d'évaluation. Et puis le dernier point, ce qui me semblait important aussi, c'est qu'un certain nombre d'étudiants ne souhaitent pas créer leur boîte, mais souhaitent par contre travailler dans l'accompagnement. Et dans ce cas-là, c'est important de parvenir à développer une posture d'accompagnement qui regarde le projet accompagné sous un angle bienveillant, constructif, mais critique, évidemment. Donc le fait de les intégrer dans ce jury aux côtés des experts, c'était aussi une façon pour moi d'arriver à évaluer à quel point ils sont capables. de prendre une distanciation critique pour faire grandir un projet.

  • Speaker #0

    Et ces critères d'évaluation, ils les ont dès le début du cours, dès le début du semestre ?

  • Speaker #1

    Non, je leur partage. Alors oui, ils ont les grilles d'évaluation d'emblée sur Moodle. Donc, s'ils ont la curiosité d'aller fouiller dans l'espace de cours, ils les trouvent. Moi, je leur indique qu'elles sont là. Et au fil du semestre, quand je vois que certains... certains groupes commencent à s'écarter un peu des attentes du cours. Là, je vais leur dire, attention, regardez peut-être un peu les grilles d'évaluation, parce qu'il y a certains aspects que vous ne travaillez pas suffisamment en profondeur et vous perdez peut-être du temps sur d'autres aspects qui sont moins importants. Par exemple, la vidéo du pitch, on n'est pas en formation audiovisuelle, donc les qualités audiovisuelles du pitch... pitchs ne font pas partie des critères d'évaluation. C'est peut-être pas la peine qu'ils y passent trop de temps de ce fait.

  • Speaker #2

    Tu as mis en place une grille d'évaluation pour l'évaluation par les pairs, suite au Covid, mais est-ce que cette grille existait avant, déjà ?

  • Speaker #1

    Elle existait dans une version moins précise. C'est-à-dire que comme je travaillais déjà sur cette session finale de pitch avec des invités des anciens étudiants du Master Entrepreneuriat ou des entrepreneurs que je croisais au gré des interactions via la House of Entrepreneurship. Ces personnes-là m'avaient manifesté le besoin d'avoir une grille un peu plus précise qui objective les critères sur lesquels on évaluait les étudiants. Et puis surtout, je voulais que ce soit incitatif pour les étudiants ces sessions de pitch. Donc, depuis le début, j'avais indiqué qu'il y avait un challenge à la fin. Avec la remise de deux prix, le prix du projet de création d'entreprise le plus crédible, c'est-à-dire celui où on a presque l'impression que demain les étudiants vont pouvoir se lancer, et un deuxième prix qui était plutôt le prix du projet le plus innovant, le plus en rupture avec l'existant, peut-être un peu moins abouti sur la version opérationnelle. Et donc, ce faisant, les membres du jury professionnel m'avaient demandé d'avoir des critères un peu précis pour pouvoir classer les projets. Et puis moi, je les associe à la notation du pitch, de toute façon. Donc, j'avais besoin de cette grille-là. Quand j'ai commencé à envisager l'évaluation de pair à pair, là, la difficulté était que les étudiants ne mettent pas des notes au hasard ou par amitié, ou à affinité personnelle avec les autres groupes qui présentaient qu'ils avaient à évaluer. Donc, j'ai beaucoup... plus préciser mes critères pour qu'eux, derrière, puissent justifier leur notation. C'est-à-dire qu'ils ne mettent pas juste une note sur chaque critère, ils mettent la note et ils expliquent pourquoi ils ont mis cette note-là.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu peux détailler les critères ?

  • Speaker #1

    Les critères sont différents pour l'oral et pour l'écrit. Ce que je n'ai pas précisé, c'est que le jury étudiant évalue le pitch, la session de questions et de réponses, mais aussi le livrable écrit. Et c'est une note qui est négociée au sein du groupe. C'est-à-dire que chaque étudiant ne met pas une note qu'il me remonte. C'est le groupe dans son ensemble qui discute et qui, quelque part, débat de la note sur chacun des critères. Ça se... pédagogiquement, ça m'intéressait aussi. Pour pouvoir leur montrer qu'on travaille une matière qui n'est pas une matière où forcément c'est cette note qui s'impose. Il y a une réflexion à engager, ça les oblige aussi à revenir à ce qu'on avait eu en cours. Donc ça aussi, ça a de bonnes propriétés pour développer encore plus leur compréhension et leur maîtrise des outils. Et donc, ce faisant, les étudiants vont à l'oral évidemment mettre des notes qui sont liées à la capacité d'un groupe sur cinq minutes à passer des messages clés, convaincants et engageants. Donc ça, c'est des critères à la fois de fond et de forme, non pas vidéo, mais sur la capacité à intriguer, à démontrer, à embarquer le jury dans le projet. Et donc, évidemment, il y a des critères de fond sur la pertinence du projet qui est proposé, sur l'articulation. logique des idées, au travers du pitch, sur leur capacité aussi, au travers des questions-réponses, à être à l'écoute et à s'emparer vraiment des questions que pose le jury et ne pas être dans une position défensive. Ça aussi, c'est quelque chose que je travaille en amont avec eux, être en capacité d'accueillir une critique bienveillante pour voir comment elle peut faire grandir le projet, tout en défendant ses idées quand il y a pertinence à le faire. Donc... Ça, c'est pour l'oral. Et à l'écrit, les étudiants vont là avoir une trame très précise qui va reprendre à la fois l'exploration du besoin du client final, la documentation du problème, puisque c'est un des objectifs du cours. Donc, être capable de faire la démonstration du problème et le documenter. Et ensuite, pas à pas, cheminer pour parvenir à atterrir sur une solution qui va être techniquement viable. en termes notamment de ressources, de complexité, etc. Économiquement équilibré aussi, c'est-à-dire qu'on est a priori en capacité de démontrer que les coûts correspondent à peu près aux résultats qu'on peut obtenir. Et puis, une projection à trois ans classique que les étudiants voient dans d'autres cours. Moi, je m'appuie beaucoup sur ce que les étudiants voient dans d'autres cours du Master 1, notamment en premier semestre.

  • Speaker #0

    Et comment sont les étudiants dans ce rôle d'évaluateurs ? Est-ce qu'ils ont été à l'aise ou est-ce que ça a été difficile ?

  • Speaker #1

    Alors, pas tout de suite. Disons que ça les surprend quand j'évoque cette évaluation de paire à paire. D'ailleurs, la première question qu'ils me posent, c'est est-ce que ça va vraiment compter dans la note du groupe qu'on va évaluer ? Ça, c'est une préoccupation qu'ils ont. Je pense qu'ils ne sont pas habitués à l'exercice parce qu'en France, on ne le travaille pas. C'est une démarche que j'avais découverte plutôt au Canada. J'y suis allée de façon modérée quand même. C'est-à-dire que je leur donne les critères, je leur explique la façon dont ils doivent argumenter et j'insiste beaucoup sur la bienveillance. Ça, c'est un point qui est super important. On ne critique pas pour critiquer. Si on pense qu'il y a un point qui peut être challengé sur le projet, c'est important de le dire. et de le dire de façon objective. Donc mettre de côté leur affect et leur amitié est quelque chose qui peut être un peu compliqué pour eux, mais j'ai le sentiment que la green évaluation objective beaucoup les critères et leur permet petit à petit de rentrer dans ce rôle-là. Le jour J, des pitchs, on leur propose de prendre la parole en premier parce qu'on imagine qu'ils peuvent être... peut-être un peu plus en difficulté, pour trouver une variété de questions à poser au groupe, donc on ne veut pas trop déflorer des idées que nous, on aurait pu avoir au niveau du jury d'experts. Mais en réalité, en général, ils sont très, très pertinents et ils posent des questions qui sont souvent sur la liste des questions qu'ont identifiées les experts du jury.

  • Speaker #2

    Est-ce que par rapport aux objectifs que tu nous as présentés au début, finalement, avec l'évaluation par les pertes, tu as un nouvel objectif d'apprentissage qui serait justement d'avoir le rôle d'évaluateur, donc de pouvoir faire des commentaires ?

  • Speaker #1

    Oui, ça c'est arrivé après. Si je suis honnête, c'est vraiment pas quelque chose que j'avais anticipé au départ. Et depuis 2020, donc depuis la première année où j'ai expérimenté cette version-là, j'avoue que... Petit à petit, moi-même, j'ai questionné ma posture vis-à-vis de ça. J'ai revu mes grilles d'évaluation. Ce que je raconte là, c'est la version aboutie au bout de quatre ans, mais ça s'est fait progressivement. Et effectivement, de plus en plus, je me rends compte que cette évaluation par les pairs, elle devient un levier sur le plan pédagogique pour développer certaines compétences et faire prendre conscience aussi aux étudiants que parfois, ils sont meilleurs dans un rôle que dans un autre. Par exemple, ils peuvent se rendre compte qu'ils ne sont pas très bons en réalité sur la version créativité, compréhension du besoin, création d'entreprise, mais qu'en revanche, ils sont très à l'aise sur cette posture finalement d'accompagnement de projet, puisque c'est un peu dans ce rôle-là que je les mets in fine au travers de ce jury de père à père, et qu'ils ont une très bonne capacité de distanciation critique et de prise de recul sur leur... propres cheminements. Donc là aussi, c'est quelque chose que je valorise, c'est-à-dire qu'ils peuvent arriver in fine à la fin du semestre avec un projet qui ne va pas être extraordinaire par rapport aux aspects attendus, notamment en termes d'innovation par exemple, qui peut être un point qu'on peut avoir en tête. Mais en revanche, ils sont très très bons sur cette posture réflexive et sur cette capacité à dire si c'était à refaire. Voilà ce que je pourrais modifier ou voilà ce que moi j'ai compris de mes aptitudes et des zones dans lesquelles je suis les plus à l'aise.

  • Speaker #2

    Alors justement, par rapport aux commentaires dont tu as dit qu'ils ne mettaient pas seulement une note, mais ils devaient justifier l'appréciation. Que font les étudiants après le groupe qui est jugé, qui est évalué avec ces rétroactions, ces feedbacks ?

  • Speaker #1

    Il y a d'abord la partie jury, c'est-à-dire que la partie question-réponse. On ne va pas l'évaluer dans la capacité de l'étudiant à atterrir sur le bon projet. En fait, ce n'est pas ça le but. C'est là encore une question de posture, c'est-à-dire dans cette session de questions-réponses, ce que j'évalue le plus, c'est la posture de l'étudiant face à la critique. Est-ce qu'il parvient à se remettre en question, à challenger son projet au bon moment ? Est-ce qu'il renonce trop vite ? Ça, c'est aussi éventuellement un problème parce qu'un entrepreneur... Il doit avoir quelques convictions qu'il défend, surtout quand on a un projet très innovant. On sait très bien qu'un projet très innovant va souvent recevoir des critiques du style c'est pas possible, tu n'y arriveras jamais Donc s'il renonce vite, il n'aura pas la ténacité nécessaire. Et en même temps, s'il est fermé à toute forme de critique, il reste obtus sur ses positions, ce n'est pas bon non plus. Cette session de questions-réponses, elle est là vraiment pour évaluer à quel point l'étudiant arrive à développer le bon mindset pour parvenir à faire cheminer et grandir son projet en prenant ce qu'il faut prendre et en restant convaincu de quelques points importants à garder dans son projet. Moi, je ne leur demande pas une version bis de leur projet après ces pitchs-là.

  • Speaker #2

    Et par rapport à l'écrit ?

  • Speaker #1

    Sur l'écrit... Ce que je n'ai pas précisé, c'est que l'écrit, ils nous le remettent le jour des pitches. Ça, ça les perturbe beaucoup. Ils ont plutôt l'habitude de séquences pédagogiques où on va leur demander quelques jours avant l'oral un document que le jury ou l'enseignant aura lu. Et ils vont faire une présentation orale en sachant qu'il y a déjà cette première connaissance du projet au travers de l'écrit. La... Pour ce cours-là, je les mets aussi en situation réelle. C'est-à-dire qu'un entrepreneur qui pitche son projet devant un jury, un board d'investisseurs ou un comité de sélection pour rentrer dans un incubateur, il n'y a pas de connaissance préalable du projet. Donc le fait qu'il pitche, en gros, à l'aveugle pour le jury, c'est aussi une façon pour nous d'évaluer à quel point ils sont capables de défendre et de faire comprendre leur projet en quelques minutes de façon percutante et simple. Et de ce fait, l'écrit, on va en prendre connaissance après. Donc c'est là où on se rend compte parfois que l'oral, on n'avait pas tout bien compris. Ils n'ont pas été super clairs. Ou à l'inverse, qu'ils ont été meilleurs pour nous vendre du rêve à l'oral sur cinq minutes, mais que sur une version un peu plus longue et argumentée et étayée, là, il y a des zones un peu plus floues ou des creux. Donc l'écrit et l'oral permettent de mettre en contraste ou en parallèle différents types de compétences. Et les deux exercices sont essentiels.

  • Speaker #0

    Quels outils vous avez développés et mis à disposition des étudiants ?

  • Speaker #1

    Ils ont un espace numérique pédagogique via la plateforme Moodle où ils vont retrouver l'intégralité des supports de cours. Ça aussi, c'est une question que je me suis posée à un moment donné, de savoir s'il fallait mettre les supports de cours avant les séances. Est-ce que je n'allais pas perdre l'attention des étudiants ? En fait, je me suis rendu compte que ça me faisait gagner énormément de temps. Je ne leur demande pas de consulter les supports avant la séance parce que ça reste quand même un cours 3 crédits ECTS, 18 heures, donc il faut quand même calibrer la charge de travail. Mais sur l'espace Moodle, ils ont aussi plein de ressources complémentaires, notamment des outils d'IA génératifs. C'est-à-dire que je pars du principe qu'il faut que l'étudiant compose avec les outils qu'il pourrait avoir à disposition si à un moment donné, lui-même voulait créer son entreprise. Je les mets à disposition, je ne les traite pas en séance, je leur dis simplement que cette ressource est là. Je leur donne quelques exemples d'IA génératif, par exemple pour générer des noms de marques, générer des logos, des visuels, des mock-ups. Paradoxalement, les étudiants ne l'ont pas utilisé cette année du tout. Ils avaient l'impression que c'était triché, donc ils n'y sont pas allés, étonnamment. Et ils ont du coup... ou passer parfois beaucoup d'heures à générer des logos, puisque ça fait partie aussi des éléments attendus dans le livrable final. Et ils ont également tout un tas de ressources complémentaires, type des vidéos de pitch ou de sessions de questions-réponses de vrais entrepreneurs face à des jurys. Et sur l'écrit aussi, ils savent quels sont les grands blocs incontournables qui doivent être présentés dans leur livrable final. La... longueur de l'écrit les met en difficulté et je le fais exprès. C'est-à-dire que parfois les étudiants dans leur mémoire soupirent quand on leur dit que c'est un mémoire de 70 ou 80 pages. Ils ont peur de ne pas avoir suffisamment de matière pour alimenter un tel document et à l'inverse, quand je leur indique que leur version finale de business plan doit tenir sur une dizaine de pages, ils sont en panique. Parce qu'ils voudraient y mettre... tout le détail de l'étude de marché, de leur prévisionnel financier. Donc, certains essaient de ruser avec les annexes, par exemple. Donc, je les limite aussi en termes de volumétrie d'annexe. Et ce format-là les oblige à la synthèse et à aller se concentrer sur l'essentiel en termes de proposition de valeur, de cohérence d'ensemble. Donc, là aussi, je les contrains pour les obliger à se mettre vraiment dans la peau d'un entrepreneur tel que c'est pratiqué dans le domaine entrepreneurial.

  • Speaker #0

    Pour revenir au sujet des IA génératives, est-ce que pour l'année prochaine, vous pensez peut-être un petit peu plus les intégrer ou peut-être poser un cadre avec les étudiants pour que justement, ils n'aient pas cette impression de triche, d'en discuter avec eux pour un petit peu les rassurer aussi, parce que finalement, c'est des... Outils avec lesquels ils vont certainement, à l'avenir, devoir travailler. Est-ce que c'est prévu ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est clair. Ça fait partie des compétences qu'ils doivent développer. Ça pose aussi des questions éthiques, évidemment. Ça pose des questions en termes de confidentialité des données. Aujourd'hui, toutes les entreprises avec lesquelles on interagit, notamment au niveau de la House of Entrepreneurship, nous disent... Ça fait partie de notre quotidien, c'est un outil qui nous permet parfois de gagner en efficacité, mais il ne faut pas l'utiliser n'importe comment et pour n'importe quoi. Donc, je pense que l'an prochain, je vais un peu plus contraindre l'utilisation de ces outils-là. Je l'ai fait cette année plutôt en M2, dans le cadre du M2 Entrepreneuriat. C'est aussi, je pense, une question de temps, c'est-à-dire qu'on a vu apparaître ces outils-là un peu brutalement. On est même... nous-mêmes un petit peu démunis aussi. Il faut qu'on se familiarise en tant qu'enseignant avec ces outils-là. Je pense que ça peut être une vraie valeur ajoutée pour des entrepreneurs. Et donc, il faut que les étudiants apprennent à les utiliser à bon escient aussi dans le cadre de leurs projets.

  • Speaker #0

    On va maintenant aborder l'écrit réflexif. C'est une production que vous demandez à chacun de vos étudiants. En quoi ça consiste ? Alors d'abord, pour revenir sur ce que c'est, chaque étudiant, et ça aussi, ils le savent dès le début de l'année, ils savent qu'ils auront à produire une page de retour réflexif à la fois sur le fonctionnement de leur groupe et à la fois sur ce que ça leur a apporté à eux en termes d'enseignement à titre personnel, sur leurs compétences, sur les marges de progression, sur les aspects sur lesquels ils se sont sentis vraiment à l'aise. Ou pas. Le but de ce document réflexif, c'est qualitatif. D'abord, il faut le dire, je parlais tout à l'heure de l'évaluation qui peut être un peu inconfortable pour nous en France, d'évaluer les autres et de s'auto-évaluer. Sur cet exercice-là, je ne voulais surtout pas que ça crée de tensions au sein de mes groupes tout au long du semestre, parce qu'ils savaient que chacun allait évaluer les autres. Je trouvais que ça pouvait être un peu compliqué à gérer. Donc, d'emblée, ils savent qu'ils n'auront pas à mettre une note sur les autres, ils n'auront pas à se noter individuellement, mais par contre, ils vont faire une évaluation qualitative. Et je leur dis que c'est important, un, que chacun des membres du groupe voit cette note réflexive des autres. Donc, il faut que ce soit mutualisé pour que chacun puisse en prendre connaissance. Ça évite, un, des retours réflexifs un peu enjolivés. Parce qu'on sait que les autres ne le verront pas, donc on tient un peu la couverture à soi en donnant l'illusion qu'on a été à fond tout le temps, qu'on a lidé le projet et qu'on a été vraiment exemplaires. Il y a une petite régulation sociale que je recherche. Et la deuxième chose, c'est que ça permet de croiser les regards et de leur montrer que face à une situation donnée, il y a plein de façons de vivre, de ressentir et d'analyser cette situation-là. Et donc, c'est important. qu'ils puissent questionner leur positionnement, leur posture et voir que les autres en phase 2 ont eu soit une lecture peut-être un peu moins dure de la façon dont eux-mêmes ont fonctionné, ou une autre façon d'appréhender les choses et de se positionner au sein du collectif. Donc cette note réflexive, au départ là aussi, je vous présente la version... A bouti, hyper rationalisée, mais en réalité, au début, c'était surtout que c'était la première année que j'ai fait ce cours-là. J'avais besoin de comprendre comment les étudiants avaient vécu mon cours et ce qui avait fonctionné, pas fonctionné. Que moi-même, j'ai des éléments pour pouvoir me remettre en cause et adapter ma démarche pédagogique. Au départ, ces notes réflexives, elles n'étaient pas mutualisées parce que les étudiants, une réflexe, m'envoyaient chacun leur note par mail. Donc... C'est là où je me suis rendue compte que c'était beaucoup plus précieux que ce que je croyais, que ça mettait en avant des apprentissages sur des domaines que je n'avais pas spontanément identifiés comme étant dans mes objectifs pédagogiques, et que c'était dommage qu'ils ne les partagent pas entre eux, parce qu'il y avait là aussi matière à pouvoir, en croisant les regards, se questionner encore plus a posteriori. Donc dès la deuxième année... Je leur ai demandé que ces documents-là soient présents en annexe de leur business plan. Et pour moi, bon an, mal an, ça m'a permis, un, d'adapter ma démarche pédagogique, de réajuster des points où je voyais que finalement ça n'avait pas été bien assimilé, ou à l'inverse, des trucs qu'ils développaient pendant ce travail d'équipe, mais où ils étaient démunis, ils n'avaient pas suffisamment d'outils. Par exemple, très vite, les étudiants m'ont dit c'est génial cette autonomie que vous nous donnez, mais on se rend compte qu'on est en difficulté, par exemple, à mi-semestre, parce qu'on n'a pas su gérer notre collectif, se répartir correctement les rôles et se coordonner. On veut tellement respecter la parole des uns et des autres qu'en fait, on passe des heures et on ne sait pas, à un moment donné, trouver des méthodologies de facilitation et de négociation en groupe pour trancher quand même à un moment donné. Donc, c'est rigolo, mais un des points qui ressort beaucoup dans leur note réflexive, c'est la démocratie, la participation, c'est bien. On est super content et on était convaincus que c'était essentiel, mais on voit aussi les limites du truc quand même. Et à un moment donné, une équipe sans chef, ça ne marche pas. Donc, ça, ils m'ont demandé des outils que je leur ai fournis l'année suivante pour pouvoir réguler. Ça passe souvent par des attributions de rôle. Chaque séance, en collectif, il y en a un qui va être facilitateur, donc il va se mettre en dehors, il ne va pas donner son avis, mais il va plutôt faire en sorte que chaque point de vue puisse être exprimé à un moment donné. D'autres vont être l'avocat de l'ange, d'autres l'avocat du diable, d'autres la parole du client. Donc, le fait à tour de rôle d'occuper ces positions-là dans le groupe les aide. Et puis, je les ai outillées aussi un peu sur des méthodologies qui vont leur servir ensuite en entreprise. Par exemple, des comptes rendus, des relevés de décision, des outils de management de projet. Donc ça, c'est des points qu'ils font ressortir dans leur note réflexive. Et puis, l'autre point qui me surprenait au début, et puis maintenant, je l'ai complètement intégré comme étant un outil de pédagogie, c'est ce que je disais tout à l'heure, c'est le fait que les étudiants se rendent compte que parfois, ils n'ont pas été bons du tout dans l'itération pour atterrir sur une solution un peu innovante. Et ils disent eux-mêmes que leur projet, en fait, il est décevant, clairement, par rapport à ce qu'ils pouvaient en espérer au début du cours. Ils sont capables de dire pourquoi il est décevant. là où ils sont tombés dans certains écueils. Et ils sont aussi capables d'une très grande capacité à prendre de la distance sur le projet des autres et à se rendre compte qu'ils prennent plaisir à ça, au feedback constructif et à la capacité d'aller challenger le projet d'un autre. Donc ça, c'est plutôt chouette aussi. Et donc, il y a aussi dans ces notes réflexives-là, souvent, des développements sur voilà où il faut que je sois vigilant à l'avenir. pour moi-même me modérer et être mieux positionnée dans le collectif pour aller de l'avant ensemble.

  • Speaker #1

    Cette note est complètement libre ou tu es la guide avec des questions ?

  • Speaker #0

    Je leur donne quelques jalons quand même, mais là pour le coup je veux quand même qu'ils aient un espace de liberté. Donc je leur indique quelques points sur lesquels je les attends. En gros, faites... un retour réflexif sur votre fonctionnement collectif. Qu'est-ce qui a marché ? Qu'est-ce qui n'a pas marché ? Qu'est-ce qui vous a plu ? Qu'est-ce que vous referiez différemment si vous aviez l'opportunité de le refaire ? Et puis, un aspect plus sur qu'est-ce que j'ai compris de mon rôle à posteriori ? Comment je me suis positionnée ? Qu'est-ce qui a varié au fil du semestre ?

  • Speaker #1

    C'est écrit, tu demandes à chaque personne du groupe de lire les écrits des autres personnes du groupe, mais est-ce qu'ils sont ouverts aussi à toute la classe ?

  • Speaker #0

    Non. Et c'est rigolo d'ailleurs parce que ta question me fait penser que je leur demande de partager leur business plan avec le groupe étudiant qui va les évaluer dans le jury de père à père. Mais je me rends compte que les étudiants ont le réflexe de ne livrer que la partie BP et pas les annexes. Tu as raison, en fait, ils ne le partagent pas avec les autres groupes. Ça, c'est vrai.

  • Speaker #2

    Et finalement, cet écrit vous sert aussi à vous en tant qu'enseignante. pour faire évoluer votre cours ? Ça vous sert un peu de feedback, finalement,

  • Speaker #0

    aussi ? Oui, oui, oui. Ça fait quasiment trois ans que les étudiants me disent qu'ils sont ravis de ces temps collectifs en classe. Parce que ce que je n'ai pas dit, c'est qu'initialement, il y avait ce projet collectif, mais j'avais tendance à être finalement... Dans un schéma très orthodoxe où je me disais qu'un cours, il fallait forcément que j'ai un contenu pédagogique qui les occupe, qui alimente mes trois heures de séance, il y avait une forme de culpabilité presque à me dire que j'allais pas bien faire mon travail si j'avais une capsule théorique que d'une heure et quart. C'est rigolo, je ne m'étais pas rendue compte de ça avant qu'on en parle aujourd'hui, mais c'est vrai que j'avais l'impression que... Un bon cours, c'est un cours où il y a vraiment du contenu théorique et donc il y avait très peu de temps de travail en groupe pendant mes séances. Et au fil du temps, les étudiants m'ont demandé à avoir ce temps-là parce que problème d'options, donc problème d'arriver à se retrouver en un même temps chaque semaine pour pouvoir avancer sur le projet. Donc j'ai petit à petit aménagé un temps un peu plus long d'atelier. J'essaie aujourd'hui de vraiment me discipliner pour qu'ils aient toujours... une heure de travail en groupe à chaque séance. Et moi, je mets le chrono pour que chaque groupe ait au moins huit minutes avec moi à chaque séance. Je leur laisse un petit temps quand même pour atterrir avant de passer dans chaque groupe. Et là, je me rends compte, au travers des notes réflexives depuis deux, trois ans, que ils voudraient plus de temps avec moi en coaching. Ça donne un projet d'innovation pédagogique qu'on va mettre en place justement avec le CIP l'an prochain pour essayer de faire en sorte que ces éléments théoriques, qu'ils les assimilent et qu'ils aillent les chercher un peu plus en dehors des cours pour qu'il y ait plus de temps dédié au travail en groupe avec un accompagnement qui sera plus poussé de mon côté et avec la possibilité d'ailleurs éventuellement d'aller chercher des experts. pour les coacher au fil du semestre sur des aspects qui sont moins dans ma discipline. Et ça, c'est ressorti grâce à ces notes réflexives.

  • Speaker #1

    Avec l'évaluation par les pairs, le jury, il y a beaucoup de commentaires d'étudiants ou de professionnels pour les étudiants. Mais toi, est-ce que tu fais une rétroaction globale, un feedback global pour chaque étudiant ?

  • Speaker #0

    Alors, je fais un feedback global à chaque équipe. C'est-à-dire que chaque équipe, une fois que j'ai reçu les évaluations de pair à pair, qu'ils ont pitché, qu'on a discuté avec les membres experts du jury, que moi, j'ai aussi évalué de mon côté leurs documents écrits. Je fais à chaque groupe, par mail, un feedback écrit qui est quand même assez long, ça fait à peu près, on va dire une page, une page et demie par groupe, où je reprends les éléments sur lesquels ça a été vraiment des points de force du groupe, ils ont vraiment été bons, à la fois sur leur projet, sur le fond, sur le fonctionnement de leur équipe, sur la prise de parole, et les éléments... qui ont pu constituer des points de fragilité sur lesquels il faudra qu'ils aient une vigilance pour la suite. Et le feedback que je leur fais tient compte à la fois de mon évaluation et aussi des feedbacks et des commentaires dans le cadre de l'évaluation paire à paire, puisque chaque groupe motive et justifie sa note par critère avec un petit développement de 10-12 lignes. Donc je croise les feedbacks qualitatifs des jurys de paire à paire avec les miens. pour faire une synthèse globale de tout ça.

  • Speaker #1

    À propos du temps, donc ton cours fait 18 heures, 3 ECTS, donc on estime que c'est à peu près 75 heures de travail pour les étudiants. Donc il leur reste un peu moins de 60 heures. Est-ce que ça leur travaille en pied de beaucoup sur ces 60 heures ou est-ce qu'ils arrivent à s'y tenir ?

  • Speaker #0

    Alors ils me disent qu'ils y passent plus de temps que d'autres cours équivalents aussi. parce qu'ils se prennent au jeu, en fait. Et le fait qu'il y ait cette évaluation de pair à pair, un jury avec des experts, probablement leur met entre guillemets un petit peu la pression. Ils ont envie vraiment de présenter aux autres un projet avec un effet waouh. On sent qu'il y a cette émulation collective entre les groupes de pouvoir être sur le podium, de décrocher un des deux prix. Donc, ils y passent beaucoup de temps. de temps. Ils me disent qu'ils arrivent surtout en fin de semestre quand il y a ce goulot d'étranglement à la fin où tous les cours atterrissent sur des livrables, des soutenances et autres. Là, ils sont un peu plus en difficulté. Certains me disent qu'ils ont une frustration de ne pas avoir pu y passer plus de temps. Je pense que globalement, par rapport au calibrage que tu évoques, comme c'est quand même un travail de groupe où ils sont 4-5, s'ils se répartissent bien les rôles, on y arrive.

  • Speaker #2

    Le mot de la fin que nous posons à tous nos invités, quel conseil auriez-vous aimé avoir quand vous avez commencé à enseigner et lequel voudriez-vous donner à quelqu'un qui débute ?

  • Speaker #0

    Il y en a un premier qui est lié à la façon de se positionner vis-à-vis des étudiants. Moi, j'avais l'impression en début de carrière qu'il fallait que je maîtrise tout, que je les encadre, que je les dirige. J'étais très précise sur mes attentes. Et presque dans une logique de contrôle, quoi. Donc, il y avait une forme, finalement, à posteriori, probablement d'infantilisation des étudiants. Et au fil du temps, je me suis rendue compte qu'il fallait, en tout cas, moi, c'est comme ça que je suis à l'aise, qu'il fallait leur donner de l'autonomie, leur donner confiance dans leurs aptitudes, parce que ça, c'est un point, peut-être, dont on ne parle pas assez, mais souvent, les étudiants ont l'impression... Qu'ils n'ont rien à proposer à une entreprise quand ils recherchent un stage, ils doutent beaucoup en réalité. Leur laisser de l'autonomie et de la liberté, c'est le meilleur moyen en fait qu'eux-mêmes s'impliquent dans le cours et éventuellement nous apportent aussi des choses pour faire évoluer notre enseignement. Donc moins de contrôle, plus d'autonomie et une confiance aussi à leur accorder. Quand j'ai commencé l'évaluation de pair à pair, Je me suis vraiment demandé si les étudiants n'allaient pas tous chercher à mettre une très bonne note à leurs petits camarades. En réalité, en règle générale, il y a un point d'écart entre la note du jury expert et la note du jury étudiant. Donc comme quoi, même sur l'évaluation des autres, on peut leur faire confiance dès lors que c'est encadré. Donc l'autonomie n'exclut pas le contrôle qu'on dit en management. Et il faut savoir bien doser les deux, mais trop de contrôle. finalement abouti un peu au résultat inverse attendu, je trouve. Et si on me l'avait dit plus tôt, j'aurais gagné du temps.

  • Speaker #2

    Eh bien, c'est la fin de cet épisode. Merci beaucoup Sonia pour ce partage d'expérience. Merci à tous de nous avoir écoutés. Vous trouverez en lien des ressources sur les pratiques pédagogiques que nous venons d'aborder. Merci à Félix Vaton pour la réalisation, le montage et le mixage. N'hésitez pas à partager ce podcast et si vous souhaitez faire évoluer votre cours, sachez que le Centre d'innovation pédagogique de PSL peut vous accompagner. À bientôt pour un prochain épisode.

Chapters

  • Evaluer ses pairs pour favoriser l'apprentissage

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  • L'écrit réflexif pour analyser ses apprentissages

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Description

Dans ce deuxième épisode, nous avons le plaisir d’échanger avec Sonia Adam-Ledunois, enseignante-chercheuse à l'Université Paris Dauphine - PSL.  


"[extrait] Parfois des contraintes ou des menaces sont le meilleur contexte pour innover, ça a été le cas pour ce cours-là". En effet, c'est lors du confinement, que Sonia a du réajuster le déroulé de son cours. Comment éviter que les étudiants ne décrochent lors des présentations orales de leurs camarades, de surcroît à distance ? Une des solutions pour Sonia, a été d'inclure les étudiants dans le jury évaluateur.  


Plus concrètement, elle relate dans ce podcast comment elle a impliqué ses étudiants dans l'évaluation des livrables attendus (un pitch par groupe, accompagné d'un business plan), à l'aide d'une grille critériée et d’une intégration au jury. Dans une seconde partie, elle revient également sur la mise en place d'un écrit réflexif où chaque étudiant est invité à analyser ses apprentissages. Ces deux modalités d'évaluation, complémentaires, ont permis aux étudiants de développer une capacité de distanciation critique et de réflexivité. Enfin, cet épisode met en avant l'importance du feedback pour renforcer les apprentissages de nos étudiants ! 


Transcription de l'épisode ici.


Voici des ressources complémentaires ou évoquées dans l’épisode :


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Dans mon cours est un podcast du Centre d’innovation pédagogique - PSL. A travers une conversation et de façon très concrète, chacun sera invité à partager sur ses pratiques d’enseignement, autour d’un thème. Ces épisodes s’adressent à la communauté enseignante de PSL et bien au-delà ! A retrouver sur les plus grandes plateformes d’écoute !

 


 

Production : Centre d’innovation pédagogique - PSL  

Réalisation et écriture : Estelle GOUZE, Thomas BOULOGNE

Réalisation sonore et montage : Félix VATON 

Illustration : Antoine BOURDON 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans cet épisode du podcast Dans mon cours. Je suis Estelle Gouze et je suis accompagnée aujourd'hui de mon collègue Thomas Boulogne. Ensemble, nous travaillons au Centre d'innovation pédagogique de PSL. L'idée de ce podcast est simple, partir à la rencontre des enseignantes et enseignants de PSL afin qu'ils nous partagent des pratiques pédagogiques qu'ils ont mis en place dans leur cours.

  • Speaker #1

    Sous-titrage ST'501

  • Speaker #0

    Et alors aujourd'hui, pour cet épisode, on va s'intéresser à différentes modalités d'évaluation des étudiants. Pour en parler, nous sommes ravis d'accueillir Sonia Adam-Ledunois, qui enseigne à Paris Dauphine PSL. Bonjour Sonia.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de venir partager votre expérience. Vous allez nous décrire plus précisément deux modalités d'évaluation que vous avez développées. Alors, il y en a une sur l'évaluation par les pairs, donc des étudiants qui s'évaluent entre eux, et un écrit individuel et réflexif. où l'étudiant revient sur ses propres apprentissages et les actions qu'il a menées durant le travail de groupe. Donc on va parler de tout ça, mais tout d'abord, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Sonia Adam-Laudinois, je suis enseignante-chercheure à l'Université Paris-Dauphine. Je dirige le Master Entrepreneuriat et Projet Innovant et également la House of Entrepreneurship. Et j'enseigne centralement sur les sujets liés à l'entrepreneuriat et l'innovation.

  • Speaker #2

    Pouvez-vous nous décrire rapidement votre enseignement ?

  • Speaker #1

    Alors l'enseignement que j'assure est un enseignement en master EMEO, Management et Organisation. C'est un master spécialisé sur tous les aspects managériaux. Et moi j'assure le cours en entrepreneuriat, Initiation à l'entrepreneuriat. C'est un cours de 18 heures avec à peu près chaque année entre 24 et 30 étudiants. C'est un cours à option, donc les étudiants s'y inscrivent. Soit par curiosité, sans réellement avoir de connaissances sur la thématique, soit à l'inverse parce qu'eux-mêmes veulent créer ou travailler devant l'écosystème entrepreneurial.

  • Speaker #2

    Donc comment sont découpées vos 18 heures de cours ?

  • Speaker #1

    C'est découpé en 6 séances de 3 heures, 5 séances sur des sujets thématiques, on traite un thème lié à l'entrepreneuriat à chaque séance, et une séance à la fin qui prend la forme d'un jury. devant des pseudo-investisseurs et où les étudiants pitchent le projet qu'ils ont développé tout au long des séances, tout au long du cours.

  • Speaker #2

    Et chaque séance est-elle même découpée en trois parties, c'est bien ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Chaque séance est décomposée de la même façon. D'abord, une partie avec un invité qui vient témoigner de son expérience sur la thématique du cours du jour. C'est souvent un partage d'expériences, c'est la possibilité aussi pour les étudiants de découvrir différentes visions de l'entrepreneuriat et pas une seule. Ensuite, on a une capsule théorique qui dure à peu près une heure, une heure quinze sur le thème du jour, où là je vais développer tout ce qui est lié aux méthodologies, aux outils, aux sujets que les étudiants vont devoir travailler à partir de cette séquence-là. Et ensuite, une partie atelier où les étudiants travaillent par groupe de quatre ou cinq. sur un projet de création d'entreprise. Donc sur les cinq séances, ils vont avancer pas à pas sur le développement de leur projet et la création de leur entreprise. Et là, moi, je passe dans les différents groupes pour les coacher, pour pouvoir répondre à leurs questions, pour pouvoir m'assurer qu'ils ont bien intégré les outils et les méthodologies et qu'ils sont dans la bonne logique.

  • Speaker #0

    Du coup, quels sont les objectifs d'apprentissage du cours ? Qu'est-ce que les étudiants doivent développer comme compétences ?

  • Speaker #1

    Le but du cours, c'est un, qu'il ressorte en ayant compris la posture d'un entrepreneur. Donc, c'est d'abord orienter sur le mindset, savoir raisonner en termes de problèmes plutôt qu'en termes de solutions. C'est souvent l'erreur qu'on observe auprès des jeunes entrepreneurs. Ils ont tendance à avoir des effets de fixation, c'est-à-dire être convaincus que c'est cette solution-là qui est la bonne, sans réellement avoir exploré le besoin finalement de l'utilisateur final. Merci. Donc il y a vraiment ce premier aspect qui est rentré dans la tête d'un entrepreneur pour appréhender les besoins du marché et savoir correctement les comprendre pour les traduire ensuite sous forme de solutions adaptées. Le deuxième objectif de ce cours, c'est d'expérimenter l'erreur. En France, on a souvent tendance à considérer que l'erreur n'est pas une bonne chose, contrairement peut-être à d'autres pays comme les États-Unis. que dans le domaine entrepreneuriat, on va vraiment fonctionner par itération et on va expérimenter des choses, tester, voir ce qui fonctionne, corriger aussi ses représentations, comme je le disais, ses croyances sur ce que le marché aurait besoin, par exemple. Donc ça, c'est un but, un des principaux objectifs du cours, arriver à appréhender, à apprivoiser l'erreur comme terrain d'apprentissage et savoir rebondir. corriger sa trajectoire, son raisonnement pour ajuster petit à petit et atterrir sur une solution qui va être la mieux alignée avec les besoins du marché. Et le troisième objectif, c'est une formation en management, comme je l'ai indiqué en préambule. Donc, c'est important aussi pour eux qu'ils apprennent la démarche de management de projet, c'est-à-dire savoir travailler sur un projet en groupe, à cinq. mais pas faire tout à cinq. Donc, comment est-ce qu'on arrive petit à petit à structurer les séquences dans le temps, à identifier les sujets sur lesquels travailler, à se répartir les rôles tout en se coordonnant ? Donc, ça pose pour eux une difficulté qui est de parvenir à livrer un projet global calibré pour cinq étudiants, tout en ayant une démarche qui tienne compte des qualités et des compétences de chacun. Dans un groupe de cinq, tout le monde n'est pas capable de faire la même chose. Et il ne faut surtout pas, de toute façon, qu'ils fassent tout ensemble.

  • Speaker #0

    Et justement, par rapport au groupe, comment ils ont été constitués, ces groupes d'étudiants ? Parce qu'il y a un peu deux écoles, on peut se dire qu'ils peuvent se mettre par affinité, comme ça, ça va plus ou moins bien se passer. Ou alors, l'enseignant choisit, crée les groupes par lui-même, en se disant que dans la vraie vie, on ne choisit pas toujours avec qui on travaille. Vous, comment vous avez fait ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un cours d'entrepreneuriat. Je pars du principe qu'une des premières problématiques d'un entrepreneur, c'est de savoir s'entourer et de trouver les bonnes compétences, de construire une équipe où les compétences vont être complémentaires. Donc, dès la première séance, je leur fais faire un tour de table, mais ciblé, c'est-à-dire qu'ils ne reviennent pas sur l'intégralité de leur CV. Je leur demande de se présenter. en indiquant ce qui les passionne, parce qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs quand même qui créent d'abord par rapport à des thématiques qui les intéressent ou qui les passionnent. Donc, chacun se présente en indiquant un secteur ou une activité de loisir, ou peu importe, qu'il passionne. Et puis, de dire aussi ce sur quoi il aime travailler. Et ensuite, à l'issue de cette première séance, je leur laisse une semaine pour discuter ensemble et pour trouver le bon match, entre guillemets, pour construire une équipe qui va être bien calibrée à la fois en termes d'intérêt pour un sujet, puisqu'ils sont totalement libres de choisir le secteur dans lequel ils veulent créer leur boîte fictive, et de s'assurer que toutes les compétences vont être réunies dans l'équipe. Est-ce qu'il y a bien quelqu'un qui maîtrise un peu les chiffres, quand d'autres sont meilleurs sur la partie marketing, communication ? Et je leur indique vraiment d'être vigilant sur la composition de leur groupe pour ne pas se réunir simplement... Par affinité ou par deal, on sait que quand on demande aux étudiants de travailler sur un travail de groupe en séance, il y a d'autres cours où les collègues leur demandent la même chose et il peut y avoir des petits arrangements. Toi, tu vas plutôt travailler sur tel cours et puis moi, je vais plutôt prendre à charge ce cours-là. Donc, en réalité, ce n'est plus du travail collectif. Donc là, je les mets en garde là-dessus parce qu'ils vont vraiment avoir besoin de toutes les compétences pour pouvoir aboutir aux résultats attendus.

  • Speaker #2

    Quel est le résultat, justement ? Que doivent produire les étudiants ?

  • Speaker #1

    En termes de résultats, l'objectif, c'est qu'à la fin du semestre, alors ça passe vite, 5 séances de 3 heures, on a une séance tous les 15 jours, mais ce n'est pas le seul cours de leur semestre. On leur demande de produire deux choses. Une première version de leur projet de création sous forme de pitch vidéo, 5 minutes maximum pour pitcher son projet et convaincre le jury. à la fois de l'intérêt de la solution, de son adéquation avec les besoins et du potentiel en termes de développement de cette solution-là. Et le deuxième livrable attendu, c'est un business plan, mais en version très légère. C'est-à-dire que c'est 10-12 pages maximum, où ils doivent vraiment dérouler l'intégralité de leur projet sur les différentes facettes et là encore démontrer le potentiel de leur solution et convaincre les investisseurs. que ça vaut le coup d'investir dans leur projet.

  • Speaker #0

    Et du coup, pour ce faire, vous avez développé et mis en place plusieurs modalités d'évaluation, on l'a dit. Donc, évaluation par les pairs, écrit réflexif. On va rentrer dans le détail pour chacune d'elles. Mais avant, pourquoi ces différentes modalités d'évaluation ? C'était quoi votre but en tant qu'enseignante ?

  • Speaker #1

    Alors, ça s'est fait un peu... Par hasard, au début, comme quoi, quand on dit à nos étudiants entrepreneurs que parfois des contraintes ou des menaces sont le meilleur contexte pour innover, ça a été le cas pour ce cours-là. J'ai mis en place ce système d'évaluation au moment du Covid, puisque les étudiants devaient pitcher leur projet en classe 15 jours après le début du confinement. Donc, j'ai été obligée de rebondir et de prévoir ces pitches sous forme vidéo. Et ma crainte était... c'était que les étudiants ne se concentrent que sur le seul pitch et que je perde le reste des étudiants pendant le reste des présentations. Donc, au départ, j'ai cherché des astuces pour arriver à les engager, les impliquer tout au long de la séance de pitch. Et c'est là que j'ai eu cette idée de me dire, après tout, pourquoi ne pas intégrer sur chaque présentation de groupe un autre groupe d'étudiants qui rejoindraient le jury aux côtés des experts, qui auraient exactement la même grille d'évaluation que nous et qui pourraient ainsi challenger le groupe qu'ils présentent, notamment dans la phase de questions-réponses. Et faisant cela, j'avais aussi comme but de les sensibiliser aux questions. critères d'évaluation, c'est-à-dire ce sur quoi ils vont être évalués quand eux-mêmes vont présenter leur projet. On a souvent des difficultés en réalité en classe à les sensibiliser à toutes les rubriques d'évaluation sur lesquelles on travaille. Et là, le fait de leur partager les grilles d'évaluation avant cette séance de pitch, c'était aussi une façon pour moi d'attirer leur regard sur les critères d'évaluation. Et puis le dernier point, ce qui me semblait important aussi, c'est qu'un certain nombre d'étudiants ne souhaitent pas créer leur boîte, mais souhaitent par contre travailler dans l'accompagnement. Et dans ce cas-là, c'est important de parvenir à développer une posture d'accompagnement qui regarde le projet accompagné sous un angle bienveillant, constructif, mais critique, évidemment. Donc le fait de les intégrer dans ce jury aux côtés des experts, c'était aussi une façon pour moi d'arriver à évaluer à quel point ils sont capables. de prendre une distanciation critique pour faire grandir un projet.

  • Speaker #0

    Et ces critères d'évaluation, ils les ont dès le début du cours, dès le début du semestre ?

  • Speaker #1

    Non, je leur partage. Alors oui, ils ont les grilles d'évaluation d'emblée sur Moodle. Donc, s'ils ont la curiosité d'aller fouiller dans l'espace de cours, ils les trouvent. Moi, je leur indique qu'elles sont là. Et au fil du semestre, quand je vois que certains... certains groupes commencent à s'écarter un peu des attentes du cours. Là, je vais leur dire, attention, regardez peut-être un peu les grilles d'évaluation, parce qu'il y a certains aspects que vous ne travaillez pas suffisamment en profondeur et vous perdez peut-être du temps sur d'autres aspects qui sont moins importants. Par exemple, la vidéo du pitch, on n'est pas en formation audiovisuelle, donc les qualités audiovisuelles du pitch... pitchs ne font pas partie des critères d'évaluation. C'est peut-être pas la peine qu'ils y passent trop de temps de ce fait.

  • Speaker #2

    Tu as mis en place une grille d'évaluation pour l'évaluation par les pairs, suite au Covid, mais est-ce que cette grille existait avant, déjà ?

  • Speaker #1

    Elle existait dans une version moins précise. C'est-à-dire que comme je travaillais déjà sur cette session finale de pitch avec des invités des anciens étudiants du Master Entrepreneuriat ou des entrepreneurs que je croisais au gré des interactions via la House of Entrepreneurship. Ces personnes-là m'avaient manifesté le besoin d'avoir une grille un peu plus précise qui objective les critères sur lesquels on évaluait les étudiants. Et puis surtout, je voulais que ce soit incitatif pour les étudiants ces sessions de pitch. Donc, depuis le début, j'avais indiqué qu'il y avait un challenge à la fin. Avec la remise de deux prix, le prix du projet de création d'entreprise le plus crédible, c'est-à-dire celui où on a presque l'impression que demain les étudiants vont pouvoir se lancer, et un deuxième prix qui était plutôt le prix du projet le plus innovant, le plus en rupture avec l'existant, peut-être un peu moins abouti sur la version opérationnelle. Et donc, ce faisant, les membres du jury professionnel m'avaient demandé d'avoir des critères un peu précis pour pouvoir classer les projets. Et puis moi, je les associe à la notation du pitch, de toute façon. Donc, j'avais besoin de cette grille-là. Quand j'ai commencé à envisager l'évaluation de pair à pair, là, la difficulté était que les étudiants ne mettent pas des notes au hasard ou par amitié, ou à affinité personnelle avec les autres groupes qui présentaient qu'ils avaient à évaluer. Donc, j'ai beaucoup... plus préciser mes critères pour qu'eux, derrière, puissent justifier leur notation. C'est-à-dire qu'ils ne mettent pas juste une note sur chaque critère, ils mettent la note et ils expliquent pourquoi ils ont mis cette note-là.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu peux détailler les critères ?

  • Speaker #1

    Les critères sont différents pour l'oral et pour l'écrit. Ce que je n'ai pas précisé, c'est que le jury étudiant évalue le pitch, la session de questions et de réponses, mais aussi le livrable écrit. Et c'est une note qui est négociée au sein du groupe. C'est-à-dire que chaque étudiant ne met pas une note qu'il me remonte. C'est le groupe dans son ensemble qui discute et qui, quelque part, débat de la note sur chacun des critères. Ça se... pédagogiquement, ça m'intéressait aussi. Pour pouvoir leur montrer qu'on travaille une matière qui n'est pas une matière où forcément c'est cette note qui s'impose. Il y a une réflexion à engager, ça les oblige aussi à revenir à ce qu'on avait eu en cours. Donc ça aussi, ça a de bonnes propriétés pour développer encore plus leur compréhension et leur maîtrise des outils. Et donc, ce faisant, les étudiants vont à l'oral évidemment mettre des notes qui sont liées à la capacité d'un groupe sur cinq minutes à passer des messages clés, convaincants et engageants. Donc ça, c'est des critères à la fois de fond et de forme, non pas vidéo, mais sur la capacité à intriguer, à démontrer, à embarquer le jury dans le projet. Et donc, évidemment, il y a des critères de fond sur la pertinence du projet qui est proposé, sur l'articulation. logique des idées, au travers du pitch, sur leur capacité aussi, au travers des questions-réponses, à être à l'écoute et à s'emparer vraiment des questions que pose le jury et ne pas être dans une position défensive. Ça aussi, c'est quelque chose que je travaille en amont avec eux, être en capacité d'accueillir une critique bienveillante pour voir comment elle peut faire grandir le projet, tout en défendant ses idées quand il y a pertinence à le faire. Donc... Ça, c'est pour l'oral. Et à l'écrit, les étudiants vont là avoir une trame très précise qui va reprendre à la fois l'exploration du besoin du client final, la documentation du problème, puisque c'est un des objectifs du cours. Donc, être capable de faire la démonstration du problème et le documenter. Et ensuite, pas à pas, cheminer pour parvenir à atterrir sur une solution qui va être techniquement viable. en termes notamment de ressources, de complexité, etc. Économiquement équilibré aussi, c'est-à-dire qu'on est a priori en capacité de démontrer que les coûts correspondent à peu près aux résultats qu'on peut obtenir. Et puis, une projection à trois ans classique que les étudiants voient dans d'autres cours. Moi, je m'appuie beaucoup sur ce que les étudiants voient dans d'autres cours du Master 1, notamment en premier semestre.

  • Speaker #0

    Et comment sont les étudiants dans ce rôle d'évaluateurs ? Est-ce qu'ils ont été à l'aise ou est-ce que ça a été difficile ?

  • Speaker #1

    Alors, pas tout de suite. Disons que ça les surprend quand j'évoque cette évaluation de paire à paire. D'ailleurs, la première question qu'ils me posent, c'est est-ce que ça va vraiment compter dans la note du groupe qu'on va évaluer ? Ça, c'est une préoccupation qu'ils ont. Je pense qu'ils ne sont pas habitués à l'exercice parce qu'en France, on ne le travaille pas. C'est une démarche que j'avais découverte plutôt au Canada. J'y suis allée de façon modérée quand même. C'est-à-dire que je leur donne les critères, je leur explique la façon dont ils doivent argumenter et j'insiste beaucoup sur la bienveillance. Ça, c'est un point qui est super important. On ne critique pas pour critiquer. Si on pense qu'il y a un point qui peut être challengé sur le projet, c'est important de le dire. et de le dire de façon objective. Donc mettre de côté leur affect et leur amitié est quelque chose qui peut être un peu compliqué pour eux, mais j'ai le sentiment que la green évaluation objective beaucoup les critères et leur permet petit à petit de rentrer dans ce rôle-là. Le jour J, des pitchs, on leur propose de prendre la parole en premier parce qu'on imagine qu'ils peuvent être... peut-être un peu plus en difficulté, pour trouver une variété de questions à poser au groupe, donc on ne veut pas trop déflorer des idées que nous, on aurait pu avoir au niveau du jury d'experts. Mais en réalité, en général, ils sont très, très pertinents et ils posent des questions qui sont souvent sur la liste des questions qu'ont identifiées les experts du jury.

  • Speaker #2

    Est-ce que par rapport aux objectifs que tu nous as présentés au début, finalement, avec l'évaluation par les pertes, tu as un nouvel objectif d'apprentissage qui serait justement d'avoir le rôle d'évaluateur, donc de pouvoir faire des commentaires ?

  • Speaker #1

    Oui, ça c'est arrivé après. Si je suis honnête, c'est vraiment pas quelque chose que j'avais anticipé au départ. Et depuis 2020, donc depuis la première année où j'ai expérimenté cette version-là, j'avoue que... Petit à petit, moi-même, j'ai questionné ma posture vis-à-vis de ça. J'ai revu mes grilles d'évaluation. Ce que je raconte là, c'est la version aboutie au bout de quatre ans, mais ça s'est fait progressivement. Et effectivement, de plus en plus, je me rends compte que cette évaluation par les pairs, elle devient un levier sur le plan pédagogique pour développer certaines compétences et faire prendre conscience aussi aux étudiants que parfois, ils sont meilleurs dans un rôle que dans un autre. Par exemple, ils peuvent se rendre compte qu'ils ne sont pas très bons en réalité sur la version créativité, compréhension du besoin, création d'entreprise, mais qu'en revanche, ils sont très à l'aise sur cette posture finalement d'accompagnement de projet, puisque c'est un peu dans ce rôle-là que je les mets in fine au travers de ce jury de père à père, et qu'ils ont une très bonne capacité de distanciation critique et de prise de recul sur leur... propres cheminements. Donc là aussi, c'est quelque chose que je valorise, c'est-à-dire qu'ils peuvent arriver in fine à la fin du semestre avec un projet qui ne va pas être extraordinaire par rapport aux aspects attendus, notamment en termes d'innovation par exemple, qui peut être un point qu'on peut avoir en tête. Mais en revanche, ils sont très très bons sur cette posture réflexive et sur cette capacité à dire si c'était à refaire. Voilà ce que je pourrais modifier ou voilà ce que moi j'ai compris de mes aptitudes et des zones dans lesquelles je suis les plus à l'aise.

  • Speaker #2

    Alors justement, par rapport aux commentaires dont tu as dit qu'ils ne mettaient pas seulement une note, mais ils devaient justifier l'appréciation. Que font les étudiants après le groupe qui est jugé, qui est évalué avec ces rétroactions, ces feedbacks ?

  • Speaker #1

    Il y a d'abord la partie jury, c'est-à-dire que la partie question-réponse. On ne va pas l'évaluer dans la capacité de l'étudiant à atterrir sur le bon projet. En fait, ce n'est pas ça le but. C'est là encore une question de posture, c'est-à-dire dans cette session de questions-réponses, ce que j'évalue le plus, c'est la posture de l'étudiant face à la critique. Est-ce qu'il parvient à se remettre en question, à challenger son projet au bon moment ? Est-ce qu'il renonce trop vite ? Ça, c'est aussi éventuellement un problème parce qu'un entrepreneur... Il doit avoir quelques convictions qu'il défend, surtout quand on a un projet très innovant. On sait très bien qu'un projet très innovant va souvent recevoir des critiques du style c'est pas possible, tu n'y arriveras jamais Donc s'il renonce vite, il n'aura pas la ténacité nécessaire. Et en même temps, s'il est fermé à toute forme de critique, il reste obtus sur ses positions, ce n'est pas bon non plus. Cette session de questions-réponses, elle est là vraiment pour évaluer à quel point l'étudiant arrive à développer le bon mindset pour parvenir à faire cheminer et grandir son projet en prenant ce qu'il faut prendre et en restant convaincu de quelques points importants à garder dans son projet. Moi, je ne leur demande pas une version bis de leur projet après ces pitchs-là.

  • Speaker #2

    Et par rapport à l'écrit ?

  • Speaker #1

    Sur l'écrit... Ce que je n'ai pas précisé, c'est que l'écrit, ils nous le remettent le jour des pitches. Ça, ça les perturbe beaucoup. Ils ont plutôt l'habitude de séquences pédagogiques où on va leur demander quelques jours avant l'oral un document que le jury ou l'enseignant aura lu. Et ils vont faire une présentation orale en sachant qu'il y a déjà cette première connaissance du projet au travers de l'écrit. La... Pour ce cours-là, je les mets aussi en situation réelle. C'est-à-dire qu'un entrepreneur qui pitche son projet devant un jury, un board d'investisseurs ou un comité de sélection pour rentrer dans un incubateur, il n'y a pas de connaissance préalable du projet. Donc le fait qu'il pitche, en gros, à l'aveugle pour le jury, c'est aussi une façon pour nous d'évaluer à quel point ils sont capables de défendre et de faire comprendre leur projet en quelques minutes de façon percutante et simple. Et de ce fait, l'écrit, on va en prendre connaissance après. Donc c'est là où on se rend compte parfois que l'oral, on n'avait pas tout bien compris. Ils n'ont pas été super clairs. Ou à l'inverse, qu'ils ont été meilleurs pour nous vendre du rêve à l'oral sur cinq minutes, mais que sur une version un peu plus longue et argumentée et étayée, là, il y a des zones un peu plus floues ou des creux. Donc l'écrit et l'oral permettent de mettre en contraste ou en parallèle différents types de compétences. Et les deux exercices sont essentiels.

  • Speaker #0

    Quels outils vous avez développés et mis à disposition des étudiants ?

  • Speaker #1

    Ils ont un espace numérique pédagogique via la plateforme Moodle où ils vont retrouver l'intégralité des supports de cours. Ça aussi, c'est une question que je me suis posée à un moment donné, de savoir s'il fallait mettre les supports de cours avant les séances. Est-ce que je n'allais pas perdre l'attention des étudiants ? En fait, je me suis rendu compte que ça me faisait gagner énormément de temps. Je ne leur demande pas de consulter les supports avant la séance parce que ça reste quand même un cours 3 crédits ECTS, 18 heures, donc il faut quand même calibrer la charge de travail. Mais sur l'espace Moodle, ils ont aussi plein de ressources complémentaires, notamment des outils d'IA génératifs. C'est-à-dire que je pars du principe qu'il faut que l'étudiant compose avec les outils qu'il pourrait avoir à disposition si à un moment donné, lui-même voulait créer son entreprise. Je les mets à disposition, je ne les traite pas en séance, je leur dis simplement que cette ressource est là. Je leur donne quelques exemples d'IA génératif, par exemple pour générer des noms de marques, générer des logos, des visuels, des mock-ups. Paradoxalement, les étudiants ne l'ont pas utilisé cette année du tout. Ils avaient l'impression que c'était triché, donc ils n'y sont pas allés, étonnamment. Et ils ont du coup... ou passer parfois beaucoup d'heures à générer des logos, puisque ça fait partie aussi des éléments attendus dans le livrable final. Et ils ont également tout un tas de ressources complémentaires, type des vidéos de pitch ou de sessions de questions-réponses de vrais entrepreneurs face à des jurys. Et sur l'écrit aussi, ils savent quels sont les grands blocs incontournables qui doivent être présentés dans leur livrable final. La... longueur de l'écrit les met en difficulté et je le fais exprès. C'est-à-dire que parfois les étudiants dans leur mémoire soupirent quand on leur dit que c'est un mémoire de 70 ou 80 pages. Ils ont peur de ne pas avoir suffisamment de matière pour alimenter un tel document et à l'inverse, quand je leur indique que leur version finale de business plan doit tenir sur une dizaine de pages, ils sont en panique. Parce qu'ils voudraient y mettre... tout le détail de l'étude de marché, de leur prévisionnel financier. Donc, certains essaient de ruser avec les annexes, par exemple. Donc, je les limite aussi en termes de volumétrie d'annexe. Et ce format-là les oblige à la synthèse et à aller se concentrer sur l'essentiel en termes de proposition de valeur, de cohérence d'ensemble. Donc, là aussi, je les contrains pour les obliger à se mettre vraiment dans la peau d'un entrepreneur tel que c'est pratiqué dans le domaine entrepreneurial.

  • Speaker #0

    Pour revenir au sujet des IA génératives, est-ce que pour l'année prochaine, vous pensez peut-être un petit peu plus les intégrer ou peut-être poser un cadre avec les étudiants pour que justement, ils n'aient pas cette impression de triche, d'en discuter avec eux pour un petit peu les rassurer aussi, parce que finalement, c'est des... Outils avec lesquels ils vont certainement, à l'avenir, devoir travailler. Est-ce que c'est prévu ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est clair. Ça fait partie des compétences qu'ils doivent développer. Ça pose aussi des questions éthiques, évidemment. Ça pose des questions en termes de confidentialité des données. Aujourd'hui, toutes les entreprises avec lesquelles on interagit, notamment au niveau de la House of Entrepreneurship, nous disent... Ça fait partie de notre quotidien, c'est un outil qui nous permet parfois de gagner en efficacité, mais il ne faut pas l'utiliser n'importe comment et pour n'importe quoi. Donc, je pense que l'an prochain, je vais un peu plus contraindre l'utilisation de ces outils-là. Je l'ai fait cette année plutôt en M2, dans le cadre du M2 Entrepreneuriat. C'est aussi, je pense, une question de temps, c'est-à-dire qu'on a vu apparaître ces outils-là un peu brutalement. On est même... nous-mêmes un petit peu démunis aussi. Il faut qu'on se familiarise en tant qu'enseignant avec ces outils-là. Je pense que ça peut être une vraie valeur ajoutée pour des entrepreneurs. Et donc, il faut que les étudiants apprennent à les utiliser à bon escient aussi dans le cadre de leurs projets.

  • Speaker #0

    On va maintenant aborder l'écrit réflexif. C'est une production que vous demandez à chacun de vos étudiants. En quoi ça consiste ? Alors d'abord, pour revenir sur ce que c'est, chaque étudiant, et ça aussi, ils le savent dès le début de l'année, ils savent qu'ils auront à produire une page de retour réflexif à la fois sur le fonctionnement de leur groupe et à la fois sur ce que ça leur a apporté à eux en termes d'enseignement à titre personnel, sur leurs compétences, sur les marges de progression, sur les aspects sur lesquels ils se sont sentis vraiment à l'aise. Ou pas. Le but de ce document réflexif, c'est qualitatif. D'abord, il faut le dire, je parlais tout à l'heure de l'évaluation qui peut être un peu inconfortable pour nous en France, d'évaluer les autres et de s'auto-évaluer. Sur cet exercice-là, je ne voulais surtout pas que ça crée de tensions au sein de mes groupes tout au long du semestre, parce qu'ils savaient que chacun allait évaluer les autres. Je trouvais que ça pouvait être un peu compliqué à gérer. Donc, d'emblée, ils savent qu'ils n'auront pas à mettre une note sur les autres, ils n'auront pas à se noter individuellement, mais par contre, ils vont faire une évaluation qualitative. Et je leur dis que c'est important, un, que chacun des membres du groupe voit cette note réflexive des autres. Donc, il faut que ce soit mutualisé pour que chacun puisse en prendre connaissance. Ça évite, un, des retours réflexifs un peu enjolivés. Parce qu'on sait que les autres ne le verront pas, donc on tient un peu la couverture à soi en donnant l'illusion qu'on a été à fond tout le temps, qu'on a lidé le projet et qu'on a été vraiment exemplaires. Il y a une petite régulation sociale que je recherche. Et la deuxième chose, c'est que ça permet de croiser les regards et de leur montrer que face à une situation donnée, il y a plein de façons de vivre, de ressentir et d'analyser cette situation-là. Et donc, c'est important. qu'ils puissent questionner leur positionnement, leur posture et voir que les autres en phase 2 ont eu soit une lecture peut-être un peu moins dure de la façon dont eux-mêmes ont fonctionné, ou une autre façon d'appréhender les choses et de se positionner au sein du collectif. Donc cette note réflexive, au départ là aussi, je vous présente la version... A bouti, hyper rationalisée, mais en réalité, au début, c'était surtout que c'était la première année que j'ai fait ce cours-là. J'avais besoin de comprendre comment les étudiants avaient vécu mon cours et ce qui avait fonctionné, pas fonctionné. Que moi-même, j'ai des éléments pour pouvoir me remettre en cause et adapter ma démarche pédagogique. Au départ, ces notes réflexives, elles n'étaient pas mutualisées parce que les étudiants, une réflexe, m'envoyaient chacun leur note par mail. Donc... C'est là où je me suis rendue compte que c'était beaucoup plus précieux que ce que je croyais, que ça mettait en avant des apprentissages sur des domaines que je n'avais pas spontanément identifiés comme étant dans mes objectifs pédagogiques, et que c'était dommage qu'ils ne les partagent pas entre eux, parce qu'il y avait là aussi matière à pouvoir, en croisant les regards, se questionner encore plus a posteriori. Donc dès la deuxième année... Je leur ai demandé que ces documents-là soient présents en annexe de leur business plan. Et pour moi, bon an, mal an, ça m'a permis, un, d'adapter ma démarche pédagogique, de réajuster des points où je voyais que finalement ça n'avait pas été bien assimilé, ou à l'inverse, des trucs qu'ils développaient pendant ce travail d'équipe, mais où ils étaient démunis, ils n'avaient pas suffisamment d'outils. Par exemple, très vite, les étudiants m'ont dit c'est génial cette autonomie que vous nous donnez, mais on se rend compte qu'on est en difficulté, par exemple, à mi-semestre, parce qu'on n'a pas su gérer notre collectif, se répartir correctement les rôles et se coordonner. On veut tellement respecter la parole des uns et des autres qu'en fait, on passe des heures et on ne sait pas, à un moment donné, trouver des méthodologies de facilitation et de négociation en groupe pour trancher quand même à un moment donné. Donc, c'est rigolo, mais un des points qui ressort beaucoup dans leur note réflexive, c'est la démocratie, la participation, c'est bien. On est super content et on était convaincus que c'était essentiel, mais on voit aussi les limites du truc quand même. Et à un moment donné, une équipe sans chef, ça ne marche pas. Donc, ça, ils m'ont demandé des outils que je leur ai fournis l'année suivante pour pouvoir réguler. Ça passe souvent par des attributions de rôle. Chaque séance, en collectif, il y en a un qui va être facilitateur, donc il va se mettre en dehors, il ne va pas donner son avis, mais il va plutôt faire en sorte que chaque point de vue puisse être exprimé à un moment donné. D'autres vont être l'avocat de l'ange, d'autres l'avocat du diable, d'autres la parole du client. Donc, le fait à tour de rôle d'occuper ces positions-là dans le groupe les aide. Et puis, je les ai outillées aussi un peu sur des méthodologies qui vont leur servir ensuite en entreprise. Par exemple, des comptes rendus, des relevés de décision, des outils de management de projet. Donc ça, c'est des points qu'ils font ressortir dans leur note réflexive. Et puis, l'autre point qui me surprenait au début, et puis maintenant, je l'ai complètement intégré comme étant un outil de pédagogie, c'est ce que je disais tout à l'heure, c'est le fait que les étudiants se rendent compte que parfois, ils n'ont pas été bons du tout dans l'itération pour atterrir sur une solution un peu innovante. Et ils disent eux-mêmes que leur projet, en fait, il est décevant, clairement, par rapport à ce qu'ils pouvaient en espérer au début du cours. Ils sont capables de dire pourquoi il est décevant. là où ils sont tombés dans certains écueils. Et ils sont aussi capables d'une très grande capacité à prendre de la distance sur le projet des autres et à se rendre compte qu'ils prennent plaisir à ça, au feedback constructif et à la capacité d'aller challenger le projet d'un autre. Donc ça, c'est plutôt chouette aussi. Et donc, il y a aussi dans ces notes réflexives-là, souvent, des développements sur voilà où il faut que je sois vigilant à l'avenir. pour moi-même me modérer et être mieux positionnée dans le collectif pour aller de l'avant ensemble.

  • Speaker #1

    Cette note est complètement libre ou tu es la guide avec des questions ?

  • Speaker #0

    Je leur donne quelques jalons quand même, mais là pour le coup je veux quand même qu'ils aient un espace de liberté. Donc je leur indique quelques points sur lesquels je les attends. En gros, faites... un retour réflexif sur votre fonctionnement collectif. Qu'est-ce qui a marché ? Qu'est-ce qui n'a pas marché ? Qu'est-ce qui vous a plu ? Qu'est-ce que vous referiez différemment si vous aviez l'opportunité de le refaire ? Et puis, un aspect plus sur qu'est-ce que j'ai compris de mon rôle à posteriori ? Comment je me suis positionnée ? Qu'est-ce qui a varié au fil du semestre ?

  • Speaker #1

    C'est écrit, tu demandes à chaque personne du groupe de lire les écrits des autres personnes du groupe, mais est-ce qu'ils sont ouverts aussi à toute la classe ?

  • Speaker #0

    Non. Et c'est rigolo d'ailleurs parce que ta question me fait penser que je leur demande de partager leur business plan avec le groupe étudiant qui va les évaluer dans le jury de père à père. Mais je me rends compte que les étudiants ont le réflexe de ne livrer que la partie BP et pas les annexes. Tu as raison, en fait, ils ne le partagent pas avec les autres groupes. Ça, c'est vrai.

  • Speaker #2

    Et finalement, cet écrit vous sert aussi à vous en tant qu'enseignante. pour faire évoluer votre cours ? Ça vous sert un peu de feedback, finalement,

  • Speaker #0

    aussi ? Oui, oui, oui. Ça fait quasiment trois ans que les étudiants me disent qu'ils sont ravis de ces temps collectifs en classe. Parce que ce que je n'ai pas dit, c'est qu'initialement, il y avait ce projet collectif, mais j'avais tendance à être finalement... Dans un schéma très orthodoxe où je me disais qu'un cours, il fallait forcément que j'ai un contenu pédagogique qui les occupe, qui alimente mes trois heures de séance, il y avait une forme de culpabilité presque à me dire que j'allais pas bien faire mon travail si j'avais une capsule théorique que d'une heure et quart. C'est rigolo, je ne m'étais pas rendue compte de ça avant qu'on en parle aujourd'hui, mais c'est vrai que j'avais l'impression que... Un bon cours, c'est un cours où il y a vraiment du contenu théorique et donc il y avait très peu de temps de travail en groupe pendant mes séances. Et au fil du temps, les étudiants m'ont demandé à avoir ce temps-là parce que problème d'options, donc problème d'arriver à se retrouver en un même temps chaque semaine pour pouvoir avancer sur le projet. Donc j'ai petit à petit aménagé un temps un peu plus long d'atelier. J'essaie aujourd'hui de vraiment me discipliner pour qu'ils aient toujours... une heure de travail en groupe à chaque séance. Et moi, je mets le chrono pour que chaque groupe ait au moins huit minutes avec moi à chaque séance. Je leur laisse un petit temps quand même pour atterrir avant de passer dans chaque groupe. Et là, je me rends compte, au travers des notes réflexives depuis deux, trois ans, que ils voudraient plus de temps avec moi en coaching. Ça donne un projet d'innovation pédagogique qu'on va mettre en place justement avec le CIP l'an prochain pour essayer de faire en sorte que ces éléments théoriques, qu'ils les assimilent et qu'ils aillent les chercher un peu plus en dehors des cours pour qu'il y ait plus de temps dédié au travail en groupe avec un accompagnement qui sera plus poussé de mon côté et avec la possibilité d'ailleurs éventuellement d'aller chercher des experts. pour les coacher au fil du semestre sur des aspects qui sont moins dans ma discipline. Et ça, c'est ressorti grâce à ces notes réflexives.

  • Speaker #1

    Avec l'évaluation par les pairs, le jury, il y a beaucoup de commentaires d'étudiants ou de professionnels pour les étudiants. Mais toi, est-ce que tu fais une rétroaction globale, un feedback global pour chaque étudiant ?

  • Speaker #0

    Alors, je fais un feedback global à chaque équipe. C'est-à-dire que chaque équipe, une fois que j'ai reçu les évaluations de pair à pair, qu'ils ont pitché, qu'on a discuté avec les membres experts du jury, que moi, j'ai aussi évalué de mon côté leurs documents écrits. Je fais à chaque groupe, par mail, un feedback écrit qui est quand même assez long, ça fait à peu près, on va dire une page, une page et demie par groupe, où je reprends les éléments sur lesquels ça a été vraiment des points de force du groupe, ils ont vraiment été bons, à la fois sur leur projet, sur le fond, sur le fonctionnement de leur équipe, sur la prise de parole, et les éléments... qui ont pu constituer des points de fragilité sur lesquels il faudra qu'ils aient une vigilance pour la suite. Et le feedback que je leur fais tient compte à la fois de mon évaluation et aussi des feedbacks et des commentaires dans le cadre de l'évaluation paire à paire, puisque chaque groupe motive et justifie sa note par critère avec un petit développement de 10-12 lignes. Donc je croise les feedbacks qualitatifs des jurys de paire à paire avec les miens. pour faire une synthèse globale de tout ça.

  • Speaker #1

    À propos du temps, donc ton cours fait 18 heures, 3 ECTS, donc on estime que c'est à peu près 75 heures de travail pour les étudiants. Donc il leur reste un peu moins de 60 heures. Est-ce que ça leur travaille en pied de beaucoup sur ces 60 heures ou est-ce qu'ils arrivent à s'y tenir ?

  • Speaker #0

    Alors ils me disent qu'ils y passent plus de temps que d'autres cours équivalents aussi. parce qu'ils se prennent au jeu, en fait. Et le fait qu'il y ait cette évaluation de pair à pair, un jury avec des experts, probablement leur met entre guillemets un petit peu la pression. Ils ont envie vraiment de présenter aux autres un projet avec un effet waouh. On sent qu'il y a cette émulation collective entre les groupes de pouvoir être sur le podium, de décrocher un des deux prix. Donc, ils y passent beaucoup de temps. de temps. Ils me disent qu'ils arrivent surtout en fin de semestre quand il y a ce goulot d'étranglement à la fin où tous les cours atterrissent sur des livrables, des soutenances et autres. Là, ils sont un peu plus en difficulté. Certains me disent qu'ils ont une frustration de ne pas avoir pu y passer plus de temps. Je pense que globalement, par rapport au calibrage que tu évoques, comme c'est quand même un travail de groupe où ils sont 4-5, s'ils se répartissent bien les rôles, on y arrive.

  • Speaker #2

    Le mot de la fin que nous posons à tous nos invités, quel conseil auriez-vous aimé avoir quand vous avez commencé à enseigner et lequel voudriez-vous donner à quelqu'un qui débute ?

  • Speaker #0

    Il y en a un premier qui est lié à la façon de se positionner vis-à-vis des étudiants. Moi, j'avais l'impression en début de carrière qu'il fallait que je maîtrise tout, que je les encadre, que je les dirige. J'étais très précise sur mes attentes. Et presque dans une logique de contrôle, quoi. Donc, il y avait une forme, finalement, à posteriori, probablement d'infantilisation des étudiants. Et au fil du temps, je me suis rendue compte qu'il fallait, en tout cas, moi, c'est comme ça que je suis à l'aise, qu'il fallait leur donner de l'autonomie, leur donner confiance dans leurs aptitudes, parce que ça, c'est un point, peut-être, dont on ne parle pas assez, mais souvent, les étudiants ont l'impression... Qu'ils n'ont rien à proposer à une entreprise quand ils recherchent un stage, ils doutent beaucoup en réalité. Leur laisser de l'autonomie et de la liberté, c'est le meilleur moyen en fait qu'eux-mêmes s'impliquent dans le cours et éventuellement nous apportent aussi des choses pour faire évoluer notre enseignement. Donc moins de contrôle, plus d'autonomie et une confiance aussi à leur accorder. Quand j'ai commencé l'évaluation de pair à pair, Je me suis vraiment demandé si les étudiants n'allaient pas tous chercher à mettre une très bonne note à leurs petits camarades. En réalité, en règle générale, il y a un point d'écart entre la note du jury expert et la note du jury étudiant. Donc comme quoi, même sur l'évaluation des autres, on peut leur faire confiance dès lors que c'est encadré. Donc l'autonomie n'exclut pas le contrôle qu'on dit en management. Et il faut savoir bien doser les deux, mais trop de contrôle. finalement abouti un peu au résultat inverse attendu, je trouve. Et si on me l'avait dit plus tôt, j'aurais gagné du temps.

  • Speaker #2

    Eh bien, c'est la fin de cet épisode. Merci beaucoup Sonia pour ce partage d'expérience. Merci à tous de nous avoir écoutés. Vous trouverez en lien des ressources sur les pratiques pédagogiques que nous venons d'aborder. Merci à Félix Vaton pour la réalisation, le montage et le mixage. N'hésitez pas à partager ce podcast et si vous souhaitez faire évoluer votre cours, sachez que le Centre d'innovation pédagogique de PSL peut vous accompagner. À bientôt pour un prochain épisode.

Chapters

  • Evaluer ses pairs pour favoriser l'apprentissage

    09:48

  • L'écrit réflexif pour analyser ses apprentissages

    29:43

Description

Dans ce deuxième épisode, nous avons le plaisir d’échanger avec Sonia Adam-Ledunois, enseignante-chercheuse à l'Université Paris Dauphine - PSL.  


"[extrait] Parfois des contraintes ou des menaces sont le meilleur contexte pour innover, ça a été le cas pour ce cours-là". En effet, c'est lors du confinement, que Sonia a du réajuster le déroulé de son cours. Comment éviter que les étudiants ne décrochent lors des présentations orales de leurs camarades, de surcroît à distance ? Une des solutions pour Sonia, a été d'inclure les étudiants dans le jury évaluateur.  


Plus concrètement, elle relate dans ce podcast comment elle a impliqué ses étudiants dans l'évaluation des livrables attendus (un pitch par groupe, accompagné d'un business plan), à l'aide d'une grille critériée et d’une intégration au jury. Dans une seconde partie, elle revient également sur la mise en place d'un écrit réflexif où chaque étudiant est invité à analyser ses apprentissages. Ces deux modalités d'évaluation, complémentaires, ont permis aux étudiants de développer une capacité de distanciation critique et de réflexivité. Enfin, cet épisode met en avant l'importance du feedback pour renforcer les apprentissages de nos étudiants ! 


Transcription de l'épisode ici.


Voici des ressources complémentaires ou évoquées dans l’épisode :


Cet épisode vous a plu 👍 ? N’hésitez pas à vous abonner et à partager ce podcast autour de vous !  


Dans mon cours est un podcast du Centre d’innovation pédagogique - PSL. A travers une conversation et de façon très concrète, chacun sera invité à partager sur ses pratiques d’enseignement, autour d’un thème. Ces épisodes s’adressent à la communauté enseignante de PSL et bien au-delà ! A retrouver sur les plus grandes plateformes d’écoute !

 


 

Production : Centre d’innovation pédagogique - PSL  

Réalisation et écriture : Estelle GOUZE, Thomas BOULOGNE

Réalisation sonore et montage : Félix VATON 

Illustration : Antoine BOURDON 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans cet épisode du podcast Dans mon cours. Je suis Estelle Gouze et je suis accompagnée aujourd'hui de mon collègue Thomas Boulogne. Ensemble, nous travaillons au Centre d'innovation pédagogique de PSL. L'idée de ce podcast est simple, partir à la rencontre des enseignantes et enseignants de PSL afin qu'ils nous partagent des pratiques pédagogiques qu'ils ont mis en place dans leur cours.

  • Speaker #1

    Sous-titrage ST'501

  • Speaker #0

    Et alors aujourd'hui, pour cet épisode, on va s'intéresser à différentes modalités d'évaluation des étudiants. Pour en parler, nous sommes ravis d'accueillir Sonia Adam-Ledunois, qui enseigne à Paris Dauphine PSL. Bonjour Sonia.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de venir partager votre expérience. Vous allez nous décrire plus précisément deux modalités d'évaluation que vous avez développées. Alors, il y en a une sur l'évaluation par les pairs, donc des étudiants qui s'évaluent entre eux, et un écrit individuel et réflexif. où l'étudiant revient sur ses propres apprentissages et les actions qu'il a menées durant le travail de groupe. Donc on va parler de tout ça, mais tout d'abord, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Sonia Adam-Laudinois, je suis enseignante-chercheure à l'Université Paris-Dauphine. Je dirige le Master Entrepreneuriat et Projet Innovant et également la House of Entrepreneurship. Et j'enseigne centralement sur les sujets liés à l'entrepreneuriat et l'innovation.

  • Speaker #2

    Pouvez-vous nous décrire rapidement votre enseignement ?

  • Speaker #1

    Alors l'enseignement que j'assure est un enseignement en master EMEO, Management et Organisation. C'est un master spécialisé sur tous les aspects managériaux. Et moi j'assure le cours en entrepreneuriat, Initiation à l'entrepreneuriat. C'est un cours de 18 heures avec à peu près chaque année entre 24 et 30 étudiants. C'est un cours à option, donc les étudiants s'y inscrivent. Soit par curiosité, sans réellement avoir de connaissances sur la thématique, soit à l'inverse parce qu'eux-mêmes veulent créer ou travailler devant l'écosystème entrepreneurial.

  • Speaker #2

    Donc comment sont découpées vos 18 heures de cours ?

  • Speaker #1

    C'est découpé en 6 séances de 3 heures, 5 séances sur des sujets thématiques, on traite un thème lié à l'entrepreneuriat à chaque séance, et une séance à la fin qui prend la forme d'un jury. devant des pseudo-investisseurs et où les étudiants pitchent le projet qu'ils ont développé tout au long des séances, tout au long du cours.

  • Speaker #2

    Et chaque séance est-elle même découpée en trois parties, c'est bien ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Chaque séance est décomposée de la même façon. D'abord, une partie avec un invité qui vient témoigner de son expérience sur la thématique du cours du jour. C'est souvent un partage d'expériences, c'est la possibilité aussi pour les étudiants de découvrir différentes visions de l'entrepreneuriat et pas une seule. Ensuite, on a une capsule théorique qui dure à peu près une heure, une heure quinze sur le thème du jour, où là je vais développer tout ce qui est lié aux méthodologies, aux outils, aux sujets que les étudiants vont devoir travailler à partir de cette séquence-là. Et ensuite, une partie atelier où les étudiants travaillent par groupe de quatre ou cinq. sur un projet de création d'entreprise. Donc sur les cinq séances, ils vont avancer pas à pas sur le développement de leur projet et la création de leur entreprise. Et là, moi, je passe dans les différents groupes pour les coacher, pour pouvoir répondre à leurs questions, pour pouvoir m'assurer qu'ils ont bien intégré les outils et les méthodologies et qu'ils sont dans la bonne logique.

  • Speaker #0

    Du coup, quels sont les objectifs d'apprentissage du cours ? Qu'est-ce que les étudiants doivent développer comme compétences ?

  • Speaker #1

    Le but du cours, c'est un, qu'il ressorte en ayant compris la posture d'un entrepreneur. Donc, c'est d'abord orienter sur le mindset, savoir raisonner en termes de problèmes plutôt qu'en termes de solutions. C'est souvent l'erreur qu'on observe auprès des jeunes entrepreneurs. Ils ont tendance à avoir des effets de fixation, c'est-à-dire être convaincus que c'est cette solution-là qui est la bonne, sans réellement avoir exploré le besoin finalement de l'utilisateur final. Merci. Donc il y a vraiment ce premier aspect qui est rentré dans la tête d'un entrepreneur pour appréhender les besoins du marché et savoir correctement les comprendre pour les traduire ensuite sous forme de solutions adaptées. Le deuxième objectif de ce cours, c'est d'expérimenter l'erreur. En France, on a souvent tendance à considérer que l'erreur n'est pas une bonne chose, contrairement peut-être à d'autres pays comme les États-Unis. que dans le domaine entrepreneuriat, on va vraiment fonctionner par itération et on va expérimenter des choses, tester, voir ce qui fonctionne, corriger aussi ses représentations, comme je le disais, ses croyances sur ce que le marché aurait besoin, par exemple. Donc ça, c'est un but, un des principaux objectifs du cours, arriver à appréhender, à apprivoiser l'erreur comme terrain d'apprentissage et savoir rebondir. corriger sa trajectoire, son raisonnement pour ajuster petit à petit et atterrir sur une solution qui va être la mieux alignée avec les besoins du marché. Et le troisième objectif, c'est une formation en management, comme je l'ai indiqué en préambule. Donc, c'est important aussi pour eux qu'ils apprennent la démarche de management de projet, c'est-à-dire savoir travailler sur un projet en groupe, à cinq. mais pas faire tout à cinq. Donc, comment est-ce qu'on arrive petit à petit à structurer les séquences dans le temps, à identifier les sujets sur lesquels travailler, à se répartir les rôles tout en se coordonnant ? Donc, ça pose pour eux une difficulté qui est de parvenir à livrer un projet global calibré pour cinq étudiants, tout en ayant une démarche qui tienne compte des qualités et des compétences de chacun. Dans un groupe de cinq, tout le monde n'est pas capable de faire la même chose. Et il ne faut surtout pas, de toute façon, qu'ils fassent tout ensemble.

  • Speaker #0

    Et justement, par rapport au groupe, comment ils ont été constitués, ces groupes d'étudiants ? Parce qu'il y a un peu deux écoles, on peut se dire qu'ils peuvent se mettre par affinité, comme ça, ça va plus ou moins bien se passer. Ou alors, l'enseignant choisit, crée les groupes par lui-même, en se disant que dans la vraie vie, on ne choisit pas toujours avec qui on travaille. Vous, comment vous avez fait ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un cours d'entrepreneuriat. Je pars du principe qu'une des premières problématiques d'un entrepreneur, c'est de savoir s'entourer et de trouver les bonnes compétences, de construire une équipe où les compétences vont être complémentaires. Donc, dès la première séance, je leur fais faire un tour de table, mais ciblé, c'est-à-dire qu'ils ne reviennent pas sur l'intégralité de leur CV. Je leur demande de se présenter. en indiquant ce qui les passionne, parce qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs quand même qui créent d'abord par rapport à des thématiques qui les intéressent ou qui les passionnent. Donc, chacun se présente en indiquant un secteur ou une activité de loisir, ou peu importe, qu'il passionne. Et puis, de dire aussi ce sur quoi il aime travailler. Et ensuite, à l'issue de cette première séance, je leur laisse une semaine pour discuter ensemble et pour trouver le bon match, entre guillemets, pour construire une équipe qui va être bien calibrée à la fois en termes d'intérêt pour un sujet, puisqu'ils sont totalement libres de choisir le secteur dans lequel ils veulent créer leur boîte fictive, et de s'assurer que toutes les compétences vont être réunies dans l'équipe. Est-ce qu'il y a bien quelqu'un qui maîtrise un peu les chiffres, quand d'autres sont meilleurs sur la partie marketing, communication ? Et je leur indique vraiment d'être vigilant sur la composition de leur groupe pour ne pas se réunir simplement... Par affinité ou par deal, on sait que quand on demande aux étudiants de travailler sur un travail de groupe en séance, il y a d'autres cours où les collègues leur demandent la même chose et il peut y avoir des petits arrangements. Toi, tu vas plutôt travailler sur tel cours et puis moi, je vais plutôt prendre à charge ce cours-là. Donc, en réalité, ce n'est plus du travail collectif. Donc là, je les mets en garde là-dessus parce qu'ils vont vraiment avoir besoin de toutes les compétences pour pouvoir aboutir aux résultats attendus.

  • Speaker #2

    Quel est le résultat, justement ? Que doivent produire les étudiants ?

  • Speaker #1

    En termes de résultats, l'objectif, c'est qu'à la fin du semestre, alors ça passe vite, 5 séances de 3 heures, on a une séance tous les 15 jours, mais ce n'est pas le seul cours de leur semestre. On leur demande de produire deux choses. Une première version de leur projet de création sous forme de pitch vidéo, 5 minutes maximum pour pitcher son projet et convaincre le jury. à la fois de l'intérêt de la solution, de son adéquation avec les besoins et du potentiel en termes de développement de cette solution-là. Et le deuxième livrable attendu, c'est un business plan, mais en version très légère. C'est-à-dire que c'est 10-12 pages maximum, où ils doivent vraiment dérouler l'intégralité de leur projet sur les différentes facettes et là encore démontrer le potentiel de leur solution et convaincre les investisseurs. que ça vaut le coup d'investir dans leur projet.

  • Speaker #0

    Et du coup, pour ce faire, vous avez développé et mis en place plusieurs modalités d'évaluation, on l'a dit. Donc, évaluation par les pairs, écrit réflexif. On va rentrer dans le détail pour chacune d'elles. Mais avant, pourquoi ces différentes modalités d'évaluation ? C'était quoi votre but en tant qu'enseignante ?

  • Speaker #1

    Alors, ça s'est fait un peu... Par hasard, au début, comme quoi, quand on dit à nos étudiants entrepreneurs que parfois des contraintes ou des menaces sont le meilleur contexte pour innover, ça a été le cas pour ce cours-là. J'ai mis en place ce système d'évaluation au moment du Covid, puisque les étudiants devaient pitcher leur projet en classe 15 jours après le début du confinement. Donc, j'ai été obligée de rebondir et de prévoir ces pitches sous forme vidéo. Et ma crainte était... c'était que les étudiants ne se concentrent que sur le seul pitch et que je perde le reste des étudiants pendant le reste des présentations. Donc, au départ, j'ai cherché des astuces pour arriver à les engager, les impliquer tout au long de la séance de pitch. Et c'est là que j'ai eu cette idée de me dire, après tout, pourquoi ne pas intégrer sur chaque présentation de groupe un autre groupe d'étudiants qui rejoindraient le jury aux côtés des experts, qui auraient exactement la même grille d'évaluation que nous et qui pourraient ainsi challenger le groupe qu'ils présentent, notamment dans la phase de questions-réponses. Et faisant cela, j'avais aussi comme but de les sensibiliser aux questions. critères d'évaluation, c'est-à-dire ce sur quoi ils vont être évalués quand eux-mêmes vont présenter leur projet. On a souvent des difficultés en réalité en classe à les sensibiliser à toutes les rubriques d'évaluation sur lesquelles on travaille. Et là, le fait de leur partager les grilles d'évaluation avant cette séance de pitch, c'était aussi une façon pour moi d'attirer leur regard sur les critères d'évaluation. Et puis le dernier point, ce qui me semblait important aussi, c'est qu'un certain nombre d'étudiants ne souhaitent pas créer leur boîte, mais souhaitent par contre travailler dans l'accompagnement. Et dans ce cas-là, c'est important de parvenir à développer une posture d'accompagnement qui regarde le projet accompagné sous un angle bienveillant, constructif, mais critique, évidemment. Donc le fait de les intégrer dans ce jury aux côtés des experts, c'était aussi une façon pour moi d'arriver à évaluer à quel point ils sont capables. de prendre une distanciation critique pour faire grandir un projet.

  • Speaker #0

    Et ces critères d'évaluation, ils les ont dès le début du cours, dès le début du semestre ?

  • Speaker #1

    Non, je leur partage. Alors oui, ils ont les grilles d'évaluation d'emblée sur Moodle. Donc, s'ils ont la curiosité d'aller fouiller dans l'espace de cours, ils les trouvent. Moi, je leur indique qu'elles sont là. Et au fil du semestre, quand je vois que certains... certains groupes commencent à s'écarter un peu des attentes du cours. Là, je vais leur dire, attention, regardez peut-être un peu les grilles d'évaluation, parce qu'il y a certains aspects que vous ne travaillez pas suffisamment en profondeur et vous perdez peut-être du temps sur d'autres aspects qui sont moins importants. Par exemple, la vidéo du pitch, on n'est pas en formation audiovisuelle, donc les qualités audiovisuelles du pitch... pitchs ne font pas partie des critères d'évaluation. C'est peut-être pas la peine qu'ils y passent trop de temps de ce fait.

  • Speaker #2

    Tu as mis en place une grille d'évaluation pour l'évaluation par les pairs, suite au Covid, mais est-ce que cette grille existait avant, déjà ?

  • Speaker #1

    Elle existait dans une version moins précise. C'est-à-dire que comme je travaillais déjà sur cette session finale de pitch avec des invités des anciens étudiants du Master Entrepreneuriat ou des entrepreneurs que je croisais au gré des interactions via la House of Entrepreneurship. Ces personnes-là m'avaient manifesté le besoin d'avoir une grille un peu plus précise qui objective les critères sur lesquels on évaluait les étudiants. Et puis surtout, je voulais que ce soit incitatif pour les étudiants ces sessions de pitch. Donc, depuis le début, j'avais indiqué qu'il y avait un challenge à la fin. Avec la remise de deux prix, le prix du projet de création d'entreprise le plus crédible, c'est-à-dire celui où on a presque l'impression que demain les étudiants vont pouvoir se lancer, et un deuxième prix qui était plutôt le prix du projet le plus innovant, le plus en rupture avec l'existant, peut-être un peu moins abouti sur la version opérationnelle. Et donc, ce faisant, les membres du jury professionnel m'avaient demandé d'avoir des critères un peu précis pour pouvoir classer les projets. Et puis moi, je les associe à la notation du pitch, de toute façon. Donc, j'avais besoin de cette grille-là. Quand j'ai commencé à envisager l'évaluation de pair à pair, là, la difficulté était que les étudiants ne mettent pas des notes au hasard ou par amitié, ou à affinité personnelle avec les autres groupes qui présentaient qu'ils avaient à évaluer. Donc, j'ai beaucoup... plus préciser mes critères pour qu'eux, derrière, puissent justifier leur notation. C'est-à-dire qu'ils ne mettent pas juste une note sur chaque critère, ils mettent la note et ils expliquent pourquoi ils ont mis cette note-là.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu peux détailler les critères ?

  • Speaker #1

    Les critères sont différents pour l'oral et pour l'écrit. Ce que je n'ai pas précisé, c'est que le jury étudiant évalue le pitch, la session de questions et de réponses, mais aussi le livrable écrit. Et c'est une note qui est négociée au sein du groupe. C'est-à-dire que chaque étudiant ne met pas une note qu'il me remonte. C'est le groupe dans son ensemble qui discute et qui, quelque part, débat de la note sur chacun des critères. Ça se... pédagogiquement, ça m'intéressait aussi. Pour pouvoir leur montrer qu'on travaille une matière qui n'est pas une matière où forcément c'est cette note qui s'impose. Il y a une réflexion à engager, ça les oblige aussi à revenir à ce qu'on avait eu en cours. Donc ça aussi, ça a de bonnes propriétés pour développer encore plus leur compréhension et leur maîtrise des outils. Et donc, ce faisant, les étudiants vont à l'oral évidemment mettre des notes qui sont liées à la capacité d'un groupe sur cinq minutes à passer des messages clés, convaincants et engageants. Donc ça, c'est des critères à la fois de fond et de forme, non pas vidéo, mais sur la capacité à intriguer, à démontrer, à embarquer le jury dans le projet. Et donc, évidemment, il y a des critères de fond sur la pertinence du projet qui est proposé, sur l'articulation. logique des idées, au travers du pitch, sur leur capacité aussi, au travers des questions-réponses, à être à l'écoute et à s'emparer vraiment des questions que pose le jury et ne pas être dans une position défensive. Ça aussi, c'est quelque chose que je travaille en amont avec eux, être en capacité d'accueillir une critique bienveillante pour voir comment elle peut faire grandir le projet, tout en défendant ses idées quand il y a pertinence à le faire. Donc... Ça, c'est pour l'oral. Et à l'écrit, les étudiants vont là avoir une trame très précise qui va reprendre à la fois l'exploration du besoin du client final, la documentation du problème, puisque c'est un des objectifs du cours. Donc, être capable de faire la démonstration du problème et le documenter. Et ensuite, pas à pas, cheminer pour parvenir à atterrir sur une solution qui va être techniquement viable. en termes notamment de ressources, de complexité, etc. Économiquement équilibré aussi, c'est-à-dire qu'on est a priori en capacité de démontrer que les coûts correspondent à peu près aux résultats qu'on peut obtenir. Et puis, une projection à trois ans classique que les étudiants voient dans d'autres cours. Moi, je m'appuie beaucoup sur ce que les étudiants voient dans d'autres cours du Master 1, notamment en premier semestre.

  • Speaker #0

    Et comment sont les étudiants dans ce rôle d'évaluateurs ? Est-ce qu'ils ont été à l'aise ou est-ce que ça a été difficile ?

  • Speaker #1

    Alors, pas tout de suite. Disons que ça les surprend quand j'évoque cette évaluation de paire à paire. D'ailleurs, la première question qu'ils me posent, c'est est-ce que ça va vraiment compter dans la note du groupe qu'on va évaluer ? Ça, c'est une préoccupation qu'ils ont. Je pense qu'ils ne sont pas habitués à l'exercice parce qu'en France, on ne le travaille pas. C'est une démarche que j'avais découverte plutôt au Canada. J'y suis allée de façon modérée quand même. C'est-à-dire que je leur donne les critères, je leur explique la façon dont ils doivent argumenter et j'insiste beaucoup sur la bienveillance. Ça, c'est un point qui est super important. On ne critique pas pour critiquer. Si on pense qu'il y a un point qui peut être challengé sur le projet, c'est important de le dire. et de le dire de façon objective. Donc mettre de côté leur affect et leur amitié est quelque chose qui peut être un peu compliqué pour eux, mais j'ai le sentiment que la green évaluation objective beaucoup les critères et leur permet petit à petit de rentrer dans ce rôle-là. Le jour J, des pitchs, on leur propose de prendre la parole en premier parce qu'on imagine qu'ils peuvent être... peut-être un peu plus en difficulté, pour trouver une variété de questions à poser au groupe, donc on ne veut pas trop déflorer des idées que nous, on aurait pu avoir au niveau du jury d'experts. Mais en réalité, en général, ils sont très, très pertinents et ils posent des questions qui sont souvent sur la liste des questions qu'ont identifiées les experts du jury.

  • Speaker #2

    Est-ce que par rapport aux objectifs que tu nous as présentés au début, finalement, avec l'évaluation par les pertes, tu as un nouvel objectif d'apprentissage qui serait justement d'avoir le rôle d'évaluateur, donc de pouvoir faire des commentaires ?

  • Speaker #1

    Oui, ça c'est arrivé après. Si je suis honnête, c'est vraiment pas quelque chose que j'avais anticipé au départ. Et depuis 2020, donc depuis la première année où j'ai expérimenté cette version-là, j'avoue que... Petit à petit, moi-même, j'ai questionné ma posture vis-à-vis de ça. J'ai revu mes grilles d'évaluation. Ce que je raconte là, c'est la version aboutie au bout de quatre ans, mais ça s'est fait progressivement. Et effectivement, de plus en plus, je me rends compte que cette évaluation par les pairs, elle devient un levier sur le plan pédagogique pour développer certaines compétences et faire prendre conscience aussi aux étudiants que parfois, ils sont meilleurs dans un rôle que dans un autre. Par exemple, ils peuvent se rendre compte qu'ils ne sont pas très bons en réalité sur la version créativité, compréhension du besoin, création d'entreprise, mais qu'en revanche, ils sont très à l'aise sur cette posture finalement d'accompagnement de projet, puisque c'est un peu dans ce rôle-là que je les mets in fine au travers de ce jury de père à père, et qu'ils ont une très bonne capacité de distanciation critique et de prise de recul sur leur... propres cheminements. Donc là aussi, c'est quelque chose que je valorise, c'est-à-dire qu'ils peuvent arriver in fine à la fin du semestre avec un projet qui ne va pas être extraordinaire par rapport aux aspects attendus, notamment en termes d'innovation par exemple, qui peut être un point qu'on peut avoir en tête. Mais en revanche, ils sont très très bons sur cette posture réflexive et sur cette capacité à dire si c'était à refaire. Voilà ce que je pourrais modifier ou voilà ce que moi j'ai compris de mes aptitudes et des zones dans lesquelles je suis les plus à l'aise.

  • Speaker #2

    Alors justement, par rapport aux commentaires dont tu as dit qu'ils ne mettaient pas seulement une note, mais ils devaient justifier l'appréciation. Que font les étudiants après le groupe qui est jugé, qui est évalué avec ces rétroactions, ces feedbacks ?

  • Speaker #1

    Il y a d'abord la partie jury, c'est-à-dire que la partie question-réponse. On ne va pas l'évaluer dans la capacité de l'étudiant à atterrir sur le bon projet. En fait, ce n'est pas ça le but. C'est là encore une question de posture, c'est-à-dire dans cette session de questions-réponses, ce que j'évalue le plus, c'est la posture de l'étudiant face à la critique. Est-ce qu'il parvient à se remettre en question, à challenger son projet au bon moment ? Est-ce qu'il renonce trop vite ? Ça, c'est aussi éventuellement un problème parce qu'un entrepreneur... Il doit avoir quelques convictions qu'il défend, surtout quand on a un projet très innovant. On sait très bien qu'un projet très innovant va souvent recevoir des critiques du style c'est pas possible, tu n'y arriveras jamais Donc s'il renonce vite, il n'aura pas la ténacité nécessaire. Et en même temps, s'il est fermé à toute forme de critique, il reste obtus sur ses positions, ce n'est pas bon non plus. Cette session de questions-réponses, elle est là vraiment pour évaluer à quel point l'étudiant arrive à développer le bon mindset pour parvenir à faire cheminer et grandir son projet en prenant ce qu'il faut prendre et en restant convaincu de quelques points importants à garder dans son projet. Moi, je ne leur demande pas une version bis de leur projet après ces pitchs-là.

  • Speaker #2

    Et par rapport à l'écrit ?

  • Speaker #1

    Sur l'écrit... Ce que je n'ai pas précisé, c'est que l'écrit, ils nous le remettent le jour des pitches. Ça, ça les perturbe beaucoup. Ils ont plutôt l'habitude de séquences pédagogiques où on va leur demander quelques jours avant l'oral un document que le jury ou l'enseignant aura lu. Et ils vont faire une présentation orale en sachant qu'il y a déjà cette première connaissance du projet au travers de l'écrit. La... Pour ce cours-là, je les mets aussi en situation réelle. C'est-à-dire qu'un entrepreneur qui pitche son projet devant un jury, un board d'investisseurs ou un comité de sélection pour rentrer dans un incubateur, il n'y a pas de connaissance préalable du projet. Donc le fait qu'il pitche, en gros, à l'aveugle pour le jury, c'est aussi une façon pour nous d'évaluer à quel point ils sont capables de défendre et de faire comprendre leur projet en quelques minutes de façon percutante et simple. Et de ce fait, l'écrit, on va en prendre connaissance après. Donc c'est là où on se rend compte parfois que l'oral, on n'avait pas tout bien compris. Ils n'ont pas été super clairs. Ou à l'inverse, qu'ils ont été meilleurs pour nous vendre du rêve à l'oral sur cinq minutes, mais que sur une version un peu plus longue et argumentée et étayée, là, il y a des zones un peu plus floues ou des creux. Donc l'écrit et l'oral permettent de mettre en contraste ou en parallèle différents types de compétences. Et les deux exercices sont essentiels.

  • Speaker #0

    Quels outils vous avez développés et mis à disposition des étudiants ?

  • Speaker #1

    Ils ont un espace numérique pédagogique via la plateforme Moodle où ils vont retrouver l'intégralité des supports de cours. Ça aussi, c'est une question que je me suis posée à un moment donné, de savoir s'il fallait mettre les supports de cours avant les séances. Est-ce que je n'allais pas perdre l'attention des étudiants ? En fait, je me suis rendu compte que ça me faisait gagner énormément de temps. Je ne leur demande pas de consulter les supports avant la séance parce que ça reste quand même un cours 3 crédits ECTS, 18 heures, donc il faut quand même calibrer la charge de travail. Mais sur l'espace Moodle, ils ont aussi plein de ressources complémentaires, notamment des outils d'IA génératifs. C'est-à-dire que je pars du principe qu'il faut que l'étudiant compose avec les outils qu'il pourrait avoir à disposition si à un moment donné, lui-même voulait créer son entreprise. Je les mets à disposition, je ne les traite pas en séance, je leur dis simplement que cette ressource est là. Je leur donne quelques exemples d'IA génératif, par exemple pour générer des noms de marques, générer des logos, des visuels, des mock-ups. Paradoxalement, les étudiants ne l'ont pas utilisé cette année du tout. Ils avaient l'impression que c'était triché, donc ils n'y sont pas allés, étonnamment. Et ils ont du coup... ou passer parfois beaucoup d'heures à générer des logos, puisque ça fait partie aussi des éléments attendus dans le livrable final. Et ils ont également tout un tas de ressources complémentaires, type des vidéos de pitch ou de sessions de questions-réponses de vrais entrepreneurs face à des jurys. Et sur l'écrit aussi, ils savent quels sont les grands blocs incontournables qui doivent être présentés dans leur livrable final. La... longueur de l'écrit les met en difficulté et je le fais exprès. C'est-à-dire que parfois les étudiants dans leur mémoire soupirent quand on leur dit que c'est un mémoire de 70 ou 80 pages. Ils ont peur de ne pas avoir suffisamment de matière pour alimenter un tel document et à l'inverse, quand je leur indique que leur version finale de business plan doit tenir sur une dizaine de pages, ils sont en panique. Parce qu'ils voudraient y mettre... tout le détail de l'étude de marché, de leur prévisionnel financier. Donc, certains essaient de ruser avec les annexes, par exemple. Donc, je les limite aussi en termes de volumétrie d'annexe. Et ce format-là les oblige à la synthèse et à aller se concentrer sur l'essentiel en termes de proposition de valeur, de cohérence d'ensemble. Donc, là aussi, je les contrains pour les obliger à se mettre vraiment dans la peau d'un entrepreneur tel que c'est pratiqué dans le domaine entrepreneurial.

  • Speaker #0

    Pour revenir au sujet des IA génératives, est-ce que pour l'année prochaine, vous pensez peut-être un petit peu plus les intégrer ou peut-être poser un cadre avec les étudiants pour que justement, ils n'aient pas cette impression de triche, d'en discuter avec eux pour un petit peu les rassurer aussi, parce que finalement, c'est des... Outils avec lesquels ils vont certainement, à l'avenir, devoir travailler. Est-ce que c'est prévu ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est clair. Ça fait partie des compétences qu'ils doivent développer. Ça pose aussi des questions éthiques, évidemment. Ça pose des questions en termes de confidentialité des données. Aujourd'hui, toutes les entreprises avec lesquelles on interagit, notamment au niveau de la House of Entrepreneurship, nous disent... Ça fait partie de notre quotidien, c'est un outil qui nous permet parfois de gagner en efficacité, mais il ne faut pas l'utiliser n'importe comment et pour n'importe quoi. Donc, je pense que l'an prochain, je vais un peu plus contraindre l'utilisation de ces outils-là. Je l'ai fait cette année plutôt en M2, dans le cadre du M2 Entrepreneuriat. C'est aussi, je pense, une question de temps, c'est-à-dire qu'on a vu apparaître ces outils-là un peu brutalement. On est même... nous-mêmes un petit peu démunis aussi. Il faut qu'on se familiarise en tant qu'enseignant avec ces outils-là. Je pense que ça peut être une vraie valeur ajoutée pour des entrepreneurs. Et donc, il faut que les étudiants apprennent à les utiliser à bon escient aussi dans le cadre de leurs projets.

  • Speaker #0

    On va maintenant aborder l'écrit réflexif. C'est une production que vous demandez à chacun de vos étudiants. En quoi ça consiste ? Alors d'abord, pour revenir sur ce que c'est, chaque étudiant, et ça aussi, ils le savent dès le début de l'année, ils savent qu'ils auront à produire une page de retour réflexif à la fois sur le fonctionnement de leur groupe et à la fois sur ce que ça leur a apporté à eux en termes d'enseignement à titre personnel, sur leurs compétences, sur les marges de progression, sur les aspects sur lesquels ils se sont sentis vraiment à l'aise. Ou pas. Le but de ce document réflexif, c'est qualitatif. D'abord, il faut le dire, je parlais tout à l'heure de l'évaluation qui peut être un peu inconfortable pour nous en France, d'évaluer les autres et de s'auto-évaluer. Sur cet exercice-là, je ne voulais surtout pas que ça crée de tensions au sein de mes groupes tout au long du semestre, parce qu'ils savaient que chacun allait évaluer les autres. Je trouvais que ça pouvait être un peu compliqué à gérer. Donc, d'emblée, ils savent qu'ils n'auront pas à mettre une note sur les autres, ils n'auront pas à se noter individuellement, mais par contre, ils vont faire une évaluation qualitative. Et je leur dis que c'est important, un, que chacun des membres du groupe voit cette note réflexive des autres. Donc, il faut que ce soit mutualisé pour que chacun puisse en prendre connaissance. Ça évite, un, des retours réflexifs un peu enjolivés. Parce qu'on sait que les autres ne le verront pas, donc on tient un peu la couverture à soi en donnant l'illusion qu'on a été à fond tout le temps, qu'on a lidé le projet et qu'on a été vraiment exemplaires. Il y a une petite régulation sociale que je recherche. Et la deuxième chose, c'est que ça permet de croiser les regards et de leur montrer que face à une situation donnée, il y a plein de façons de vivre, de ressentir et d'analyser cette situation-là. Et donc, c'est important. qu'ils puissent questionner leur positionnement, leur posture et voir que les autres en phase 2 ont eu soit une lecture peut-être un peu moins dure de la façon dont eux-mêmes ont fonctionné, ou une autre façon d'appréhender les choses et de se positionner au sein du collectif. Donc cette note réflexive, au départ là aussi, je vous présente la version... A bouti, hyper rationalisée, mais en réalité, au début, c'était surtout que c'était la première année que j'ai fait ce cours-là. J'avais besoin de comprendre comment les étudiants avaient vécu mon cours et ce qui avait fonctionné, pas fonctionné. Que moi-même, j'ai des éléments pour pouvoir me remettre en cause et adapter ma démarche pédagogique. Au départ, ces notes réflexives, elles n'étaient pas mutualisées parce que les étudiants, une réflexe, m'envoyaient chacun leur note par mail. Donc... C'est là où je me suis rendue compte que c'était beaucoup plus précieux que ce que je croyais, que ça mettait en avant des apprentissages sur des domaines que je n'avais pas spontanément identifiés comme étant dans mes objectifs pédagogiques, et que c'était dommage qu'ils ne les partagent pas entre eux, parce qu'il y avait là aussi matière à pouvoir, en croisant les regards, se questionner encore plus a posteriori. Donc dès la deuxième année... Je leur ai demandé que ces documents-là soient présents en annexe de leur business plan. Et pour moi, bon an, mal an, ça m'a permis, un, d'adapter ma démarche pédagogique, de réajuster des points où je voyais que finalement ça n'avait pas été bien assimilé, ou à l'inverse, des trucs qu'ils développaient pendant ce travail d'équipe, mais où ils étaient démunis, ils n'avaient pas suffisamment d'outils. Par exemple, très vite, les étudiants m'ont dit c'est génial cette autonomie que vous nous donnez, mais on se rend compte qu'on est en difficulté, par exemple, à mi-semestre, parce qu'on n'a pas su gérer notre collectif, se répartir correctement les rôles et se coordonner. On veut tellement respecter la parole des uns et des autres qu'en fait, on passe des heures et on ne sait pas, à un moment donné, trouver des méthodologies de facilitation et de négociation en groupe pour trancher quand même à un moment donné. Donc, c'est rigolo, mais un des points qui ressort beaucoup dans leur note réflexive, c'est la démocratie, la participation, c'est bien. On est super content et on était convaincus que c'était essentiel, mais on voit aussi les limites du truc quand même. Et à un moment donné, une équipe sans chef, ça ne marche pas. Donc, ça, ils m'ont demandé des outils que je leur ai fournis l'année suivante pour pouvoir réguler. Ça passe souvent par des attributions de rôle. Chaque séance, en collectif, il y en a un qui va être facilitateur, donc il va se mettre en dehors, il ne va pas donner son avis, mais il va plutôt faire en sorte que chaque point de vue puisse être exprimé à un moment donné. D'autres vont être l'avocat de l'ange, d'autres l'avocat du diable, d'autres la parole du client. Donc, le fait à tour de rôle d'occuper ces positions-là dans le groupe les aide. Et puis, je les ai outillées aussi un peu sur des méthodologies qui vont leur servir ensuite en entreprise. Par exemple, des comptes rendus, des relevés de décision, des outils de management de projet. Donc ça, c'est des points qu'ils font ressortir dans leur note réflexive. Et puis, l'autre point qui me surprenait au début, et puis maintenant, je l'ai complètement intégré comme étant un outil de pédagogie, c'est ce que je disais tout à l'heure, c'est le fait que les étudiants se rendent compte que parfois, ils n'ont pas été bons du tout dans l'itération pour atterrir sur une solution un peu innovante. Et ils disent eux-mêmes que leur projet, en fait, il est décevant, clairement, par rapport à ce qu'ils pouvaient en espérer au début du cours. Ils sont capables de dire pourquoi il est décevant. là où ils sont tombés dans certains écueils. Et ils sont aussi capables d'une très grande capacité à prendre de la distance sur le projet des autres et à se rendre compte qu'ils prennent plaisir à ça, au feedback constructif et à la capacité d'aller challenger le projet d'un autre. Donc ça, c'est plutôt chouette aussi. Et donc, il y a aussi dans ces notes réflexives-là, souvent, des développements sur voilà où il faut que je sois vigilant à l'avenir. pour moi-même me modérer et être mieux positionnée dans le collectif pour aller de l'avant ensemble.

  • Speaker #1

    Cette note est complètement libre ou tu es la guide avec des questions ?

  • Speaker #0

    Je leur donne quelques jalons quand même, mais là pour le coup je veux quand même qu'ils aient un espace de liberté. Donc je leur indique quelques points sur lesquels je les attends. En gros, faites... un retour réflexif sur votre fonctionnement collectif. Qu'est-ce qui a marché ? Qu'est-ce qui n'a pas marché ? Qu'est-ce qui vous a plu ? Qu'est-ce que vous referiez différemment si vous aviez l'opportunité de le refaire ? Et puis, un aspect plus sur qu'est-ce que j'ai compris de mon rôle à posteriori ? Comment je me suis positionnée ? Qu'est-ce qui a varié au fil du semestre ?

  • Speaker #1

    C'est écrit, tu demandes à chaque personne du groupe de lire les écrits des autres personnes du groupe, mais est-ce qu'ils sont ouverts aussi à toute la classe ?

  • Speaker #0

    Non. Et c'est rigolo d'ailleurs parce que ta question me fait penser que je leur demande de partager leur business plan avec le groupe étudiant qui va les évaluer dans le jury de père à père. Mais je me rends compte que les étudiants ont le réflexe de ne livrer que la partie BP et pas les annexes. Tu as raison, en fait, ils ne le partagent pas avec les autres groupes. Ça, c'est vrai.

  • Speaker #2

    Et finalement, cet écrit vous sert aussi à vous en tant qu'enseignante. pour faire évoluer votre cours ? Ça vous sert un peu de feedback, finalement,

  • Speaker #0

    aussi ? Oui, oui, oui. Ça fait quasiment trois ans que les étudiants me disent qu'ils sont ravis de ces temps collectifs en classe. Parce que ce que je n'ai pas dit, c'est qu'initialement, il y avait ce projet collectif, mais j'avais tendance à être finalement... Dans un schéma très orthodoxe où je me disais qu'un cours, il fallait forcément que j'ai un contenu pédagogique qui les occupe, qui alimente mes trois heures de séance, il y avait une forme de culpabilité presque à me dire que j'allais pas bien faire mon travail si j'avais une capsule théorique que d'une heure et quart. C'est rigolo, je ne m'étais pas rendue compte de ça avant qu'on en parle aujourd'hui, mais c'est vrai que j'avais l'impression que... Un bon cours, c'est un cours où il y a vraiment du contenu théorique et donc il y avait très peu de temps de travail en groupe pendant mes séances. Et au fil du temps, les étudiants m'ont demandé à avoir ce temps-là parce que problème d'options, donc problème d'arriver à se retrouver en un même temps chaque semaine pour pouvoir avancer sur le projet. Donc j'ai petit à petit aménagé un temps un peu plus long d'atelier. J'essaie aujourd'hui de vraiment me discipliner pour qu'ils aient toujours... une heure de travail en groupe à chaque séance. Et moi, je mets le chrono pour que chaque groupe ait au moins huit minutes avec moi à chaque séance. Je leur laisse un petit temps quand même pour atterrir avant de passer dans chaque groupe. Et là, je me rends compte, au travers des notes réflexives depuis deux, trois ans, que ils voudraient plus de temps avec moi en coaching. Ça donne un projet d'innovation pédagogique qu'on va mettre en place justement avec le CIP l'an prochain pour essayer de faire en sorte que ces éléments théoriques, qu'ils les assimilent et qu'ils aillent les chercher un peu plus en dehors des cours pour qu'il y ait plus de temps dédié au travail en groupe avec un accompagnement qui sera plus poussé de mon côté et avec la possibilité d'ailleurs éventuellement d'aller chercher des experts. pour les coacher au fil du semestre sur des aspects qui sont moins dans ma discipline. Et ça, c'est ressorti grâce à ces notes réflexives.

  • Speaker #1

    Avec l'évaluation par les pairs, le jury, il y a beaucoup de commentaires d'étudiants ou de professionnels pour les étudiants. Mais toi, est-ce que tu fais une rétroaction globale, un feedback global pour chaque étudiant ?

  • Speaker #0

    Alors, je fais un feedback global à chaque équipe. C'est-à-dire que chaque équipe, une fois que j'ai reçu les évaluations de pair à pair, qu'ils ont pitché, qu'on a discuté avec les membres experts du jury, que moi, j'ai aussi évalué de mon côté leurs documents écrits. Je fais à chaque groupe, par mail, un feedback écrit qui est quand même assez long, ça fait à peu près, on va dire une page, une page et demie par groupe, où je reprends les éléments sur lesquels ça a été vraiment des points de force du groupe, ils ont vraiment été bons, à la fois sur leur projet, sur le fond, sur le fonctionnement de leur équipe, sur la prise de parole, et les éléments... qui ont pu constituer des points de fragilité sur lesquels il faudra qu'ils aient une vigilance pour la suite. Et le feedback que je leur fais tient compte à la fois de mon évaluation et aussi des feedbacks et des commentaires dans le cadre de l'évaluation paire à paire, puisque chaque groupe motive et justifie sa note par critère avec un petit développement de 10-12 lignes. Donc je croise les feedbacks qualitatifs des jurys de paire à paire avec les miens. pour faire une synthèse globale de tout ça.

  • Speaker #1

    À propos du temps, donc ton cours fait 18 heures, 3 ECTS, donc on estime que c'est à peu près 75 heures de travail pour les étudiants. Donc il leur reste un peu moins de 60 heures. Est-ce que ça leur travaille en pied de beaucoup sur ces 60 heures ou est-ce qu'ils arrivent à s'y tenir ?

  • Speaker #0

    Alors ils me disent qu'ils y passent plus de temps que d'autres cours équivalents aussi. parce qu'ils se prennent au jeu, en fait. Et le fait qu'il y ait cette évaluation de pair à pair, un jury avec des experts, probablement leur met entre guillemets un petit peu la pression. Ils ont envie vraiment de présenter aux autres un projet avec un effet waouh. On sent qu'il y a cette émulation collective entre les groupes de pouvoir être sur le podium, de décrocher un des deux prix. Donc, ils y passent beaucoup de temps. de temps. Ils me disent qu'ils arrivent surtout en fin de semestre quand il y a ce goulot d'étranglement à la fin où tous les cours atterrissent sur des livrables, des soutenances et autres. Là, ils sont un peu plus en difficulté. Certains me disent qu'ils ont une frustration de ne pas avoir pu y passer plus de temps. Je pense que globalement, par rapport au calibrage que tu évoques, comme c'est quand même un travail de groupe où ils sont 4-5, s'ils se répartissent bien les rôles, on y arrive.

  • Speaker #2

    Le mot de la fin que nous posons à tous nos invités, quel conseil auriez-vous aimé avoir quand vous avez commencé à enseigner et lequel voudriez-vous donner à quelqu'un qui débute ?

  • Speaker #0

    Il y en a un premier qui est lié à la façon de se positionner vis-à-vis des étudiants. Moi, j'avais l'impression en début de carrière qu'il fallait que je maîtrise tout, que je les encadre, que je les dirige. J'étais très précise sur mes attentes. Et presque dans une logique de contrôle, quoi. Donc, il y avait une forme, finalement, à posteriori, probablement d'infantilisation des étudiants. Et au fil du temps, je me suis rendue compte qu'il fallait, en tout cas, moi, c'est comme ça que je suis à l'aise, qu'il fallait leur donner de l'autonomie, leur donner confiance dans leurs aptitudes, parce que ça, c'est un point, peut-être, dont on ne parle pas assez, mais souvent, les étudiants ont l'impression... Qu'ils n'ont rien à proposer à une entreprise quand ils recherchent un stage, ils doutent beaucoup en réalité. Leur laisser de l'autonomie et de la liberté, c'est le meilleur moyen en fait qu'eux-mêmes s'impliquent dans le cours et éventuellement nous apportent aussi des choses pour faire évoluer notre enseignement. Donc moins de contrôle, plus d'autonomie et une confiance aussi à leur accorder. Quand j'ai commencé l'évaluation de pair à pair, Je me suis vraiment demandé si les étudiants n'allaient pas tous chercher à mettre une très bonne note à leurs petits camarades. En réalité, en règle générale, il y a un point d'écart entre la note du jury expert et la note du jury étudiant. Donc comme quoi, même sur l'évaluation des autres, on peut leur faire confiance dès lors que c'est encadré. Donc l'autonomie n'exclut pas le contrôle qu'on dit en management. Et il faut savoir bien doser les deux, mais trop de contrôle. finalement abouti un peu au résultat inverse attendu, je trouve. Et si on me l'avait dit plus tôt, j'aurais gagné du temps.

  • Speaker #2

    Eh bien, c'est la fin de cet épisode. Merci beaucoup Sonia pour ce partage d'expérience. Merci à tous de nous avoir écoutés. Vous trouverez en lien des ressources sur les pratiques pédagogiques que nous venons d'aborder. Merci à Félix Vaton pour la réalisation, le montage et le mixage. N'hésitez pas à partager ce podcast et si vous souhaitez faire évoluer votre cours, sachez que le Centre d'innovation pédagogique de PSL peut vous accompagner. À bientôt pour un prochain épisode.

Chapters

  • Evaluer ses pairs pour favoriser l'apprentissage

    09:48

  • L'écrit réflexif pour analyser ses apprentissages

    29:43

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