- Speaker #0
possiblement dans quelques mois, je ne sais pas la vitesse à laquelle ça va, mais peut-être qu'à un moment on pourra sortir un scénario complet en IA, mais en revanche on fera le travail avec les auteurs pour se poser non pas la question de comment on fait pour sortir le scénario, mais de qu'est-ce qu'on veut dire, parce que ça c'est comme tout, c'est le choix, il est humain, parce que c'est une prise de risque, on voit assez que les boîtes d'IA ne sont pas là pour prendre les risques à notre place.
- Speaker #1
Bienvenue dans DeepMedia, le podcast qui décrypte les médias à l'heure du numérique. Je suis Julien Bougeot, consultant social media et IA générative, mais avant tout passionné et curieux de l'univers média depuis plus de 15 ans. Dans un écosystème en perpétuelle transformation, comment les médias s'adaptent-ils ? Comment se réinventer face aux nouvelles technologies et aux géants du numérique ? Quel avenir pour l'information et ceux qui la produisent ? Si ces questions vous intriguent, alors vous êtes au bon endroit. DeepMedia, c'est un temps de réflexion et d'échange avec celles et ceux qui façonnent l'avenir du secteur. Sébastien Charbi, bonjour et merci de participer à ce podcast et d'être le sixième invité au micro de Deep Media. Vous êtes directeur général de Troisième Oeil Story, société de production spécialisée dans la fiction, qui fait partie du groupe MediaOne, si mes informations sont exactes. Ce que je vous propose pour commencer cet échange, c'est tout d'abord effectivement de vous présenter, puis de présenter un petit peu l'activité générale de Troisième Oeil Story, avant qu'on puisse plonger plus intensément dans le sujet.
- Speaker #0
Parfait, bonjour, merci de m'accueillir, je suis donc Sébastien Charbi, je dirige... Troisième œil historique est une filiale, comme vous le disiez, très justement de MediaOne. Aujourd'hui, nous travaillons sur ce qu'on appelle de la fiction de prime time, de la fiction lourde. Quand je dis aujourd'hui, c'est déjà hier, parce que jusqu'à maintenant, c'était l'activité principale des sociétés de fiction qui avaient pour vocation à développer, produire et livrer à des diffuseurs qu'on disait traditionnels, type TF1, France Télévisions. pour réunir un maximum de personnes à une heure donnée devant leur écran. Ça, ça s'est arrêté il y a quelques années. Aujourd'hui, on a un peu pivoté sur notre manière de le faire, sur notre manière de travailler avec les diffuseurs et même sur les diffuseurs avec lesquels on travaille, puisqu'il y a eu il y a quelques années la montée en puissance des plateformes étrangères et puis demain d'autres canaux de diffusion sur lesquels on est en train de réfléchir sur comment pivoter sur notre activité de production de fiction.
- Speaker #1
D'accord, donc effectivement avec une évolution du métier et donc dans ce podcast on s'interroge beaucoup aussi sur l'évolution de la manière de faire etc. des méthodes de production. Effectivement l'un des mots clés de ce podcast c'est l'IA générative alors sans le traiter de cette manière aussi abrupte, comment est-ce que le sujet au minimum est abordé de votre côté et plus généralement dans l'univers de la fiction ?
- Speaker #0
Alors il est... Il n'est pas abordé, il a percuté, comme dans plein d'endroits, en se disant de toutes les manières, c'est là . Moi, c'est quelque chose auquel je suis assez sensible, pour plein de raisons. Et aujourd'hui, ce qu'on essaye d'éviter, c'est tous les débats moraux ou philosophiques sur l'IA, ce n'est pas notre endroit, ce n'est pas notre travail. Nous, notre réflexion, elle est dans la bonne application pratique et la bonne intégration pratique de ce qu'est l'IA. Quand je dis la bonne intégration pratique, c'est dans l'intérêt de nos partenaires, que ce soit des diffuseurs ou des créateurs, et avec une utilisation qui nous permet soit dans le même temps de faire des choses qu'on ne pouvait pas faire avant, soit de faire les mêmes choses, mais en nous prenant moins de temps. Et ce qui n'est pas aussi naturel que ça, parce que beaucoup de gens qui expérimentent l'IA se rendent compte que comme on a une infinité de choix, là on en avait trois, et bien on peut passer beaucoup, beaucoup de temps. temps à ne rien faire, mais à se demander ce qu'on pourrait faire. Et c'est là où nous on a une approche un peu plus pragmatique, parce que notre travail, il n'est pas de la recherche fondamentale qu'on fait, c'est de la production. Donc comment est-ce qu'on accompagne les scénaristes pour travailler là -dedans ? Comment est-ce qu'on accompagne même nos équipes de tournage vers cette évolution-là ? Et comment est-ce qu'on envisage des projets qu'on ne pouvait pas envisager avant dans un écosystème français pour les proposer aux diffuseurs actuels ?
- Speaker #1
D'accord. Donc effectivement, le champ est assez vaste. Effectivement, je vois le côté pratique. Dans votre approche, comment est-ce que dans ces outils-là , on va rassurer, déjà on va commencer par les diffuseurs, comment est-ce qu'on les rassure sur cet usage-là , de ces outils-là dans vos productions vis-à -vis des diffuseurs ?
- Speaker #0
Alors il y a plusieurs problématiques. Il y a la problématique juridique puisque c'est un des gros sujets. Se faire use, le sourcing de données ou la concatenation des données qui viennent d'ailleurs, c'est un des sujets. Donc déjà là ça va dépasser un petit peu le cadre de 3ème History, c'est une réflexion qu'on mène à l'échelle du groupe MediaOne. pour se garantir qu'on a un usage sourcé et sur lesquels on a les droits, puisqu'en tant que producteur, on doit garantir la bonne fin, c'est-à -dire la bonne diffusion, et donc avoir le droit sur ce qu'on diffuse. Et je pense, si vous avez fait quelques podcasts sur le sujet, que ce n'est pas aussi simple que ça de garantir toute cette chaîne de droits, et nous, c'est assez fondamental dans notre travail. Donc on est dans un environnement qu'on essaye de maîtriser autant que faire se peut, donc il y a des outils qu'on n'utilise pas, qui sont très performants, donc on ne les utilise pas parce qu'ils ne nous garantissent pas ça. Et ça, c'est la première étape. Après, dans la partie un peu plus marketing, un peu plus créative, qui est aussi un des gros axes de discussion qu'on a avec les diffuseurs, c'est vers quoi on peut aller, qu'est-ce qu'on peut désormais faire. Et là , on se heurte au fantasme du Yaka. Parce qu'à partir du moment où il y a l'IA, on a l'impression que si on prompte, faites-moi une série dans l'espace, en fait, ça va arriver. Et d'un seul coup, là , on rentre dans notre approche plus pragmatique, qui est dire, à date... de l'expérience qu'on a, et on n'est peut-être pas les plus avancés, mais en tout cas on essaye d'y travailler quotidiennement, ce qui est compliqué c'est dès qu'il y a une interaction entre du réel et du fully ad-generated. Et en fait c'est vrai dans les images comme c'est vrai dans le développement des textes. Mais il y a quand même cette petite comment dire, pédagogie qu'on doit faire auprès des diffuseurs de manière à ne pas simplifier la production en se disant aujourd'hui Aujourd'hui, c'est un métier de prompteur. Parce que ce n'est pas que ça, et que même si demain, en promptant, on va pouvoir élargir le champ des possibles, voire même substituer une partie de la production à ça, ça va se faire avec, dans l'endroit d'atterrissage, il faudra suturer du réel et du prompt, et c'est là où ça peut être très chronophage.
- Speaker #1
Oui, je comprends effectivement le fantasme de se dire que tout va passer en IA générative, voilà , on n'y est pas encore, ça reste un fantasme qui peut être assez développé, mais qui n'est pas réel. D'ailleurs, sur cette question des frontières, ou en tout cas des limites à avoir de l'un à l'autre, est-ce qu'il y a déjà des champs que vous identifiez, ou en tout cas, il y a des limites que vous vous posez, que ce soit dans le développement, la scénarisation, la post-prod, etc. ?
- Speaker #0
Alors, principalement, ça va être, encore une fois, nous, on travaille dans un écosystème. Quand on est producteur, on travaille avec des scénaristes, avec des équipes techniques, pour des diffuseurs. Et ce qu'on délimite, c'est d'aligner les intérêts, comme toujours, parce que c'est un peu la clé. Moi, si c'est remplacer mes scénaristes par de l'IA, le jour où je suis complètement dépendant d'une société, ou en tout cas d'une IA sur laquelle je ne maîtrise pas, en fait, je me ferais sortir aussi vite que j'ai sorti les autres. Donc je pense que ce n'est pas du tout une stratégie de moyen terme qui est pérenne. En revanche, travailler avec, par exemple, les scénaristes en se disant, oui, c'est une manière augmentée de travailler, Merci. possiblement dans quelques mois, je ne sais pas la vitesse à laquelle ça va, mais peut-être qu'à un moment on pourra sortir un scénario complet en IA. Mais en revanche, on fera le travail avec les auteurs pour se poser non pas la question de comment on fait pour sortir le scénario, mais de qu'est-ce qu'on veut dire. Parce que ça, c'est comme tout, c'est le choix, il est humain, parce que c'est une prise de risque. On voit assez que les boîtes d'IA ne sont pas là pour prendre les risques à notre place. Donc à un moment, prendre les risques, c'est aussi assumer des choix. Et donc le luxe, c'est de faire des choix. Et ça, ces choix-là . On les fait dans une logique collaborative avec les auteurs, autrices, créatrices, créateurs et aussi les équipes techniques où on se dit probablement que oui, les tâches complexes à exécuter, on va essayer de les faire faire par l'IA. Mais en revanche, les choix pour le rendu, on va essayer de les réfléchir ensemble.
- Speaker #1
D'accord. Et d'ailleurs, sur ce sujet des auteurs, ça... Comment est-ce qu'ils réagissent, comment est-ce qu'ils s'impliquent, ou plutôt comment est-ce qu'ils reculent face à l'émergence de ces outils-là ? Comment est-ce que vous jouez peut-être de pédagogie ? Quel type d'accord il peut y avoir avec les auteurs pour les intégrer aussi dans un travail conjoint avec ces solutions-là ?
- Speaker #0
Il faudrait que vous en parliez avec les boîtes qui ont développé des outils de scénario assistés par IA. Je suppose que vous verrez bientôt Genario, que toutes les boîtes là -dedans ont leur discours. Nous, à l'usage, là où c'est le plus utile, c'est plus dans l'analytique. Dans le génératif, il y a un moment où si on génère une histoire sur IA, c'est un peu comme si je vous racontais une histoire en trois lignes. Je vous disais, écris-la dans ton coin, écris-la dans votre coin. Et puis après, on se revoit dans trois mois. Il y a 9999 changes sur 10 000 que vous reveniez avec une histoire qui ne me va pas du tout, qui serait peut-être très bien, mais qui ne me va pas du tout. Et l'IA fonctionne à peu près comme ça, donc il n'y a pas de problème là -dessus. Mais d'où la collaboration avec ce suivi, avec un scénariste qui garantit cette évolution-là . Et après, avec cette logique un peu augmentée, pour en revanche travailler plus vite, parce que c'est une de nos difficultés aujourd'hui, de par la disponibilité des auteurs, de par le temps que prend... La gestation d'un scénario, il y a des étapes qu'on peut en revanche accélérer. Je pense notamment dans l'entre-deux des saisons, parce que souvent quand on lance une saison, on prend une année pour savoir ce qu'on veut faire, voire plus. Quand il y a une deuxième saison qui arrive, on commence à savoir ce qu'on fait, ce qu'on cherche en tout cas. Donc ce qu'on veut, c'est qu'on puisse raccourcir les temps entre deux saisons, parce qu'en France, on se bat pour qu'il n'y ait qu'un an d'écart. Mais dans la vitesse actuelle, un an c'est déjà beaucoup. Donc une série qui était super il y a un an, est-ce que dans deux ans, si elle arrive, j'ai encore envie de me voir la deuxième saison ? Je ne suis pas sûr.
- Speaker #1
D'accord. Donc ça c'est des usages qui sont déjà concrets, qui sont déjà en place chez vous, c'est-à -dire cet entre-deux de saison, en se disant que l'IA va permettre aussi de raccourcir un petit peu ce pont ?
- Speaker #0
Non, ce n'est pas encore concret. On en est au balbutiement parce que ça pose des questions sur l'organisation. Ça pose une autre question fondamentale, comme dans toutes les industries, c'est que les premiers jobs qu'on va déléguer à l'IA, c'est les jobs des juniors. Et c'est terrible parce qu'en déléguant les jobs des juniors, on les empêche de monter en compétences. Donc nous, on essaye de réfléchir à ce que l'IA nous permet de faire qu'on ne peut pas faire, et pas comme une IA qui remplace des gens. Parce qu'on a un métier qui a vocation à être humain, dans le sens où si je raccourcis au maximum ce qu'est notre travail, C'est des humains qui racontent des histoires à des humains. Donc si à un moment c'est des machines qui racontent, enfin c'est des IA qui racontent des histoires à des humains, dans ce cas-là , les IA n'ont qu'à les regarder, et puis dans ce cas-là , nous on fait autre chose. Donc on a cette approche qui n'est pas du tout romantique, ou passéiste, ou surannée, mais qui est à un moment, pour pouvoir vendre quelque chose, si tout le monde dit que cette histoire a été générée sur IA, Un bon projet, ce n'est pas juste un bon projet, c'est qui le porte et dans quelle direction il va le porter. Donc à un moment, il faut qu'il y ait quelqu'un qui soit en responsabilité derrière. Encore une fois, une équipe créative, une équipe de production et une équipe de mise en scène et puis un partenaire qui va trouver l'endroit où le diffuser, comment le diffuser, comment le promouvoir.
- Speaker #1
D'accord. Sur ce côté-là ... Il y avait un mot-clé, c'est qu'il y a le mot équipe. Comment ça se structure chez vous ? Est-ce que vous avez des personnes qui sont référentes ? Est-ce que vous avez un plan de formation pour acculturer un petit peu tout le monde, voire pour former aussi vos collaborateurs ? Ou est-ce que c'est un apprentissage progressif et plutôt à titre personnel ?
- Speaker #0
Non, c'est encadré chez nous. C'est encadré, quand je dis chez nous, c'est à plusieurs niveaux. Au niveau de Mediawan, on noue des partenariats avec différentes boîtes, à différents endroits. On se concentre beaucoup sur l'IA en front office, c'est-à -dire sur les coeurs métiers. Mais en fait, nous, on sert beaucoup de l'IA en back office et c'est quand même assez utile sur certaines choses. Donc ça, on l'intègre dans les fonctions transverses et donc on forme les équipes à ça. Sur le front office, ou en tout cas sur le cœur business qui est le nôtre, il y a effectivement une personne qui est un peu le poisson pilote au sein de nos structures, qui va être formée assez régulièrement. quand je dis assez régulièrement, c'est de manière hebdomadaire sur des nouveaux outils, sur des nouveaux usages. Après, on ne va pas se mentir, aujourd'hui un plan de formation établi, corseté sur l'IA, la vitesse à laquelle ça bouge, les gens qui sont capables de mettre ça en place, à mon avis, ratent un pan de la révolution qui bouge en ce moment. Mais on a quelqu'un qui est notre poisson pilote, et après on a tous des niveaux de formation en fonction de ce qui nous semble le plus pertinent parce que Le problème, c'est qu'il y a une IA, il y en a une nouvelle qui sort toutes les semaines. donc on peut se former sur plein d'IA dont on ne sait pas à quoi elles servent encore
- Speaker #1
C'est la fin de la première partie de cette interview de DeepMedia avec Sébastien Charbi, directeur général de 3ème Oy Story, société de production spécialisée dans la fiction, qui fait partie du groupe MediaOne. Je vous donne rendez-vous prochainement pour la suite de cet échange où l'on va continuer d'explorer le futur des médias à l'heure du numérique. En attendant, pour ne pas manquer les prochains épisodes, abonnez-vous à ce podcast et mettez les commentaires et étoiles adéquates. DeepMedia est un podcast autoproduit par FollowMeConseil, agence de formation et conseil stratégique spécialisé en liens génératifs et social media. A très bientôt !