Speaker #0Bienvenue dans DeepMedia, le podcast qui décrypte les médias à l'heure du numérique. Je suis Julien Bougeot, consultant en social media, IA générative et formateur depuis plusieurs années. Mais avant tout, je suis un passionné et curieux de l'univers médiatique depuis plus de 15 ans. Dans un écosystème en perpétuelle transformation, comment les médias s'adaptent-ils ? Comment se réinventer face aux nouvelles technologies et aux géants du numérique ? Quel avenir pour l'information et ceux qui la produisent ? Si ces questions vous intriguent, alors vous êtes au bon endroit. Deep Media, c'est un temps de réflexion et d'échange avec celles et ceux qui façonnent l'avenir du secteur. Deep Media, la capsule, épisode 11, c'est parti ! Aujourd'hui, pas d'invité, mais un sujet que je vous propose de mettre en perspective en quelques minutes. Depuis plusieurs semaines, un nom agite le monde du football et des médias. Zach Nani, streamer, créateur de contenu et désormais diffuseur officiel de l'équipe de France Espoir de football. Oui, vous avez bien entendu, les bleués ne seront pas sur TF1, Cana Plus ou BeinSport. mais sur la chaîne Twitch d'un créateur indépendant. Un séisme médiatique ? Peut-être pas. Mais plus qu'une curiosité, c'est un symbole, assurément. Depuis 30 ans, les droits sportifs étaient le territoire réservé des grands diffuseurs historiques. TF1, Canal, BIN, etc. Des contrats verrouillés, des montants faramineux, des grilles de programmes calibrées pour ces événements. Mais cette fois, c'est un individu épaulé par une équipe réduite qui devient détenteur d'un droit national, et ça, ça change tout. Zach Nani n'achète pas simplement un contenu, il achète une relation directe avec un public qui n'allume plus la télévision. Il parle à une génération de spectateurs qui a grandi avec Youtube, Twitch et TikTok et pour qui le sport n'est plus un rendez-vous télévisuel mais un flux permanent, commenté, partagé, vécu en direct. Ce mouvement plus globalement, il s'inscrit dans une tendance assez large, la désintermédiation du sport. Les fédérations ne s'adressent plus uniquement aux chaînes mais aux communautés. La FFF, elle teste ici une autre logique, celle d'un écosystème fluide où le match devient un contenu parmi d'autres, entre un talk, un débrief et un clip TikTok. Ce pari, c'est celui d'ouvrir la porte à une nouvelle génération de narrateurs. Des narrateurs qui ne commandent pas mais qui incarnent, qui ne diffusent pas mais qui partagent, qui ne font pas d'audience mais qui créent du lien. Derrière cette modernité, il y a tout de même une question qui surgit. Que devient la valeur du droit sportif quand il passe entre les mains des plateformes ? Sur Twitch, il n'y a pas d'audience garantie, pas de grille, pas de spot publicitaire classique. Le modèle repose sur la visibilité, la viralité, la proximité. Une économie de la confiance plus qu'une économie de diffusion. Ce basculement bouscule également les médias traditionnels. Jusqu'ici, la puissance des diffuseurs reposait sur leur capacité à rassembler des millions de téléspectateurs devant un même écran. Aujourd'hui, la puissance se mesure autrement, en taux d'engagement, en durée moyenne de visionnage, en abonnés fidèles. Le direct ne se regarde plus, il se vit. Et c'est peut-être ce que Zach Nani vient de mettre en lumière dans le sillage des GP Explorer et autres Eleven All-Star, événements pionniers du Twitch, bien qu'eux étaient organisés hors fédération sportive officielle. Pour la télévision, cette affaire sonne comme un avertissement. Si un streamer peut acheter des droits et rassembler une audience jeune, alors la frontière entre médias et créateurs s'efface. Et l'écosystème des droits sportifs, longtemps sanctuarisé, commence à se fissurer. C'est notamment le sens de la récente levée de bouclier de Ligue 1+, qui souhaite également être détenteur de ces mêmes droits pour leur offrir une autre fenêtre d'exposition. Dans le fond, ce n'est pas seulement le football qui se réinvente. C'est tout un modèle de diffusion qui vacille, un modèle où la légitimité ne vient plus d'une antenne, mais d'une communauté. Avec cet exemple, c'est la définition même du mot « média » qui change. Le média ne s'appuie plus seulement sur une fréquence, mais sur une confiance avec le public. Le match débloué sur Twitch n'est peut-être qu'un début. Celui d'une ère où les droits TV ne se négocient plus en conseil d'administration, mais dans un chat en direct. Je vous remercie d'avoir écouté cette 11ème capsule de DeepMedia. N'hésitez pas à réagir à ce sujet en commentaire. On se retrouve très bientôt pour un nouvel entretien avec celles et ceux qui font l'avenir des médias. En attendant, n'oubliez pas de vous abonner et de déposer les commentaires adéquats sur toutes les plateformes de podcast. A très bientôt !