- Speaker #0
Gregocast, découverte sonore de chercheurs en gestion.
- Speaker #1
Marc,
- Speaker #0
la stratégie du nom. Ecovoiturage.fr devint Blablacar, Facebook Meta, France Télécom Orange, Bio, Activia. D'un coup de baguette magique, la marque changea de nom. Tout semblait si simple. Mais changer de nom, est-ce que c'est aussi facile que cela ? Pas certain. Il signe l'appartenance à une histoire des origines, alors changer de nom, c'est remuer cette appartenance, c'est toucher à un attachement à des racines enfouies. Une marque commence bien souvent par un nom, qui est repris, répété, partagé, ni nom propre, ni nom commun, mais bien un nom d'un domaine public, en plus d'être le reflet de sa stratégie. Alors que désigne vraiment le changement de nom ? Qu'annonce-t-il ? Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode d'Écris au Cast, Véronique Collange.
- Speaker #1
Bonjour à tous, bienvenue pour un nouvel épisode d'Ecris au Cast. J'ai le plaisir aujourd'hui d'accueillir Véronique Collange. Alors Véronique, est-ce que tu pourrais te présenter en quelques mots ?
- Speaker #2
Oui, donc je suis maître de conférence à l'IAE de Dijon, donc enseignant-chercheur, et je travaille sur la marque, ainsi que sur tout ce qui est les labels de qualité, d'éthique, et donc ce qui est du comportement du consommateur. Et en fait, si je m'intéresse à ça... C'est parce que depuis que je suis devenu enseignant-chercheur, j'essaye de répondre aux questions que je me posais quand j'étais manager. Parce qu'en fait, auparavant, j'ai travaillé 12 ans en entreprise. Et donc, quand j'ai changé de métier, je me suis dit, maintenant, je vais répondre à toutes les questions que je me posais quand j'étais chef de produit et auxquelles je n'ai pas eu de réponse.
- Speaker #1
Très intéressant. Alors justement, aujourd'hui, on va parler d'une problématique spécifique qui est celle des noms de marques. Donc, on a récemment eu un... Un changement de nom de marque qui a fait beaucoup couler d'encre, c'est celui de Twitter qui est devenu X. Alors pour toi, pourquoi est-ce que Elon Musk, le nouveau patron de Twitter, a-t-il rebaptisé son réseau social en X ?
- Speaker #2
Alors là, il y a beaucoup de théories, beaucoup de débats à ce sujet. Mais ce qu'il faut savoir, c'est qu'Elon Musk a une sorte de fétichisme pour le X. En fait, sa toute première entreprise, celle qui était Paypal, A l'origine, il s'appelait X.com. Après, il a changé de nom en Paypal, notamment lorsqu'il a revendu. Ça a beaucoup mieux marché quand il s'appelait Paypal. Il faut savoir que sa société aéronautique s'appelle X-Space. Alors, Tesla ne porte certes pas le nom de X, mais sa voiture fétiche, la plus vendue, la plus qualitative, s'appelle Tesla X. Et là, il vient juste d'annoncer le lancement d'une société d'intelligence artificielle pour concurrencer Chad GPT et deviner comment elle s'appelle, XAI.
- Speaker #1
Je crois même qu'il a un enfant qui porte le nom d'une formule mathématique où il y a X dedans.
- Speaker #2
Tout à fait, son fils. Je n'oserais pas répéter le nom, mais ça commence par X et puis toute une série de lettres à peu près imprononçables. Mais c'est pour dire à quel point c'est vraiment un sujet fétiche pour lui. Donc, il n'est pas surprenant que finalement, après avoir acheté Twitter, il change le nom de marque. Mais par expérience, je dirais qu'un changement de nom de marque cache souvent plus qu'un simple caprice de la part d'un dirigeant un peu fantasque.
- Speaker #1
Dans tes recherches, finalement, tu as beaucoup travaillé sur la marque. Et est-ce que tu as abordé, avant qu'on parle récemment du changement de nom de Twitter, est-ce que tu as abordé justement cette thématique du nom de marque ?
- Speaker #2
Alors oui, je travaillais en fait sur le changement de nom de marque, c'est-à-dire quand ma thèse portait sur le changement de nom de marque d'un produit. Lorsqu'un produit change de nom, comme par exemple Raider qui devient Twix, Bio de Danone qui devient Activia de Danone, moi j'ai voulu travailler sur qu'est-ce qui fait que ce changement va fonctionner ou au contraire ne va pas fonctionner. Et j'ai identifié un certain nombre de facteurs, mais cela m'a amené avant tout à travailler sur le nom. Et ce que j'ai réalisé dans cette étude, et je pense que beaucoup de gens le croient aussi, et moi je le croyais avant et j'ai compris en le faisant, en travaillant dessus, qu'en fait, les noms, d'une manière générale, sont porteurs de symbolique et de signification. Ce n'est pas des pages blanches sur lesquelles on peut écrire n'importe quoi, y compris X, y compris Twitter. Et donc, du coup, comme les noms véhiculent intrinsèquement une symbolique, lorsqu'on change le nom de marque, certains noms sont plus heureux que d'autres.
- Speaker #1
Donc en fait, finalement, on change facilement de nom. Mais derrière, il y a toute une symbolique, comme tu le dis, et on imagine aussi toute une stratégie marketing qui, finalement, découle de ce changement de nom.
- Speaker #2
Oui, ce qu'on voit, c'est que quand une société, ce qu'on appelle corporate, c'est-à-dire, en fait, le siège social d'une société change de nom, quasiment à chaque fois, c'est pour signifier qu'il va y avoir un changement de stratégie. Alors, il peut y avoir d'autres raisons, parfois des raisons juridiques. Je veux dire, Anderson Consulting est devenu Accenture de façon... à ne pas être confondue avec le cabinet comptable Arthur Andersen. Mais souvent, c'est un changement stratégique. Quand Google a changé son nom pour Alphabet en 2015, c'était pour signifier que Google n'était plus qu'une filiale et que maintenant Alphabet allait se développer dans plein de nouveaux secteurs d'activité. Et ce qu'on voit avec le changement qu'Ellen Musk fait, c'est que derrière le changement de Twitter en X, il y a la volonté de complètement changer le positionnement, l'offre du réseau social.
- Speaker #1
Alors justement, c'est quoi le changement attendu ?
- Speaker #2
Alors, on soupçonne, enfin c'est plus qu'un soupçon parce qu'Elon Musk a commencé à s'exprimer dessus. En fait, une des grosses difficultés avec les réseaux sociaux, Facebook et les autres tels qui fonctionnent actuellement, c'est qu'ils ne sont pas assez rentables, voire même qu'ils sont déficitaires. En 17 ans, je crois que Twitter n'a été rentable que deux années. Donc Elon Musk, quand il est arrivé, déjà la première chose qu'il a fait, il a licencié la moitié des gens. Celui-là lui a coûté la moitié de ses recettes publicitaires en un an. Mais il a rendu l'entreprise plus rentable. Mais ça ne suffit pas, parce que le modèle économique, en fait, n'est pas satisfaisant pour aucun de ces réseaux sociaux. Donc, ce qu'il veut faire, c'est transformer TwitterX en un simili WeChat, qui est en fait un réseau social chinois, qui non seulement est un réseau d'échange de messagerie instantanée, mais offre plein de services associés. Il offre aussi des moyens de paiement, des partages de vidéos, d'images. En fait, c'est un service complet par lequel on rentre par un portail. Et en fait, Elon Musk veut faire de Twitter le WeChat occidental.
- Speaker #1
Oui, parce qu'effectivement, aujourd'hui, les gens qui s'inscrivent sur Twitter, ils peuvent l'utiliser gratuitement. Et donc, l'idée, c'est d'utiliser cette base d'utilisateurs pour ensuite pouvoir leur vendre des services.
- Speaker #2
Voilà, c'est exactement le modèle de WeChat qui veut copier dans la société occidentale.
- Speaker #1
Mais alors, pourquoi avoir appelé ça finalement X ? Autant on voit bien la stratégie de développement, autant l'adossement du changement de nom à cette stratégie, ça apparaît moins lisible.
- Speaker #2
C'est un petit peu le problème de ce changement stratégique. Alors, je peux me tromper, mais mes travaux qui ont porté sur le changement de nom de marque montrent qu'il y a un certain nombre de conditions à réunir pour que ce soit réussi, un changement de nom de marque. On peut les prendre les uns après les autres, puis regarder si le changement de Twitter en X Et satisfaisant à ce titre, je vous propose cette...
- Speaker #1
Bonne idée, bonne idée.
- Speaker #2
Alors, le premier facteur clé de succès, c'est qu'il faut que le nouveau nom soit plus connu, une meilleure notoriété et une meilleure image que l'ancien. Est-ce que quelque chose comme X a intrinsèquement une meilleure image que Twitter ?
- Speaker #0
Là,
- Speaker #1
je pose un joker, mais je crois deviner la réponse.
- Speaker #2
Pas tout à fait, parce que le problème, c'est que X est extrêmement générique. C'est la variable de l'inconnu en mathématiques. C'est aussi quelque chose qui est lié à des activités en chambre. On va dire ça comme ça. Donc, c'est à la fois très connu, X, mais en même temps, pas forcément pour un réseau social. Donc là, est-ce que c'est mieux à la fois oui et à la fois non ? C'est pour ça que prendre un joker est assez... Oui,
- Speaker #1
parce que Twitter, finalement, ce n'est pas véritablement très connu comme nom. Autant X, effectivement, il y a quand même un gros imaginaire associé. Il y a une notoriété forte. Oui.
- Speaker #2
Le deuxième critère, Il faut que le nom soit en adéquation avec la catégorie de produit. Or, X, heureusement, c'est quand même... Elon Musk est beaucoup plus rationnel que ce que les médias veulent bien en donner comme image. X, comme je le disais, c'est un symbole mathématique. C'est aussi quelque part un symbole de l'infini, de l'inconnu en mathématiques. Donc, quelque part, c'est un nom qui convient très bien à tout ce qui est technologie. Et Elon Musk est dans les nouvelles technologies. Les voitures, mais... L'électrique, le spatial, donc utiliser X fait sens quand même pour une catégorie de produits techniques.
- Speaker #1
Oui, mais là, on parle d'un réseau social utilisé quand même majoritairement par des journalistes, des influenceurs, des leaders d'opinion. On est loin de l'aspect purement mathématique, autant pour les fusées, pour les automobiles électriques. Ça se comprend, mais pour un réseau social à vocation justement à propager du contenu de l'information et à favoriser la discussion, c'est plus contestable.
- Speaker #2
Oui, je suis entièrement ton raisonnement. Parce qu'il y a également un problème, c'est que le nom n'est que X. Si vous prenez, par exemple, à titre de comparaison, Tesla, la voiture s'appelle Tesla X. Donc, il y a un autre nom. Même pour la société d'aérospatial, c'est SpaceX, ce n'est pas uniquement X. Le problème, c'est que là, il faudrait quelque chose pour compléter. Et notamment pour permettre d'identifier à la catégorie de produit. Parce que si le X est technologique, le réseau social... peut-il de nos jours encore être qualifié entièrement de produit technologique ? L'aérospatial, oui. Une voiture électrique, oui. Le réseau social, c'est quand même rentré dans les mœurs. Alors, Twitter a un public spécifique, mais c'est quand même des choses qui concernent le grand public. Et du coup, le X ne semble pas particulièrement adapté, en fait, à cette catégorie de produits. Donc là, j'ai un deuxième doute. Et si je prends là où j'ai vraiment un gros doute, c'est le troisième critère qui est que... pour qu'un changement de nom de marque soit accepté, il faut que les gens ne soient pas trop attachés à l'ancien nom. C'est-à-dire qu'il y a beaucoup d'affection pour Twitter et en 17 ans, Twitter a quand même eu le temps de gagner l'attachement de ses utilisateurs, eh bien, le changement de nom de marque risque d'être refusé. Et les premiers indices que j'ai pour le moment vont dans ce sens, parce que d'après les informations qu'on réussit à obtenir sur Twitter, et on n'en a pas des masses, il semblerait que le réseau social ait perdu environ 13% de ses utilisateurs journaliers, ce qui est quand même une baisse énorme. Il semblerait que cette baisse se soit accélérée, accentuée, après l'annonce du changement de nom.
- Speaker #1
Très bien, parce qu'effectivement, le nom Twitter, c'est un nom... Alors, initialement, si on prend l'exemple français, ça ne veut pas dire grand-chose, mais c'est passé dans le langage courant. On parle de tweeter aujourd'hui, on a ce petit QQ d'oiseau, ce blabla, en fait, qui est ce babillage. dans notre culture qui, justement, a effectivement créé un rapprochement entre le réseau social et ses utilisateurs.
- Speaker #2
Oui, il n'y a quand même pas beaucoup de noms de marques qui sont finalement devenus des termes communs. Évidemment, on peut penser à Kleenex, à Frigidaire, qui désigne des réfrigérateurs. Et on dit effectivement couramment, quitter. Et est-ce qu'on va dire demain, xer ? Je n'en suis pas du tout certaine.
- Speaker #1
Ou alors pas pour les bonnes raisons.
- Speaker #2
Oui, voilà.
- Speaker #1
Ok, donc toi tu restes très dubitatif par rapport à ce changement de nom. Est-ce que dans les travaux que tu as fait, tu as des exemples de changements de nom qui ont été des réussites finalement au niveau stratégique ?
- Speaker #2
Oui, il y a des exemples de réussite. Plus dans les changements de nom de marque que j'ai pu voir. Mais pour revenir par exemple sur Danone, le cas Danone, lorsqu'ils ont changé bio en Activia, c'était quand même un énorme challenge parce que leurs produits probiotiques qui font du bien aux intestins, parce que c'est leur positionnement, étaient très connus. avec un packaging vert parfaitement identifié. Donc, choisir pour un nom complètement inconnu était quand même un très gros risque. Mais ils ont bien choisi, parce qu'Activia, la limite est même meilleure pour le produit, pour désigner quelque chose qui est actif, qui va vous faire du bien, que finalement Bio, qui n'était finalement pas un très bon nom, puisque ça renvoie à l'agriculture biologique, et que le produit n'était pas un produit issu de l'agriculture biologique. Donc, ils ont changé, en fait, pour un meilleur nom. Ils ont été forcés de le faire, ce n'était pas un choix. C'est la commission de Bruxelles qui les a obligés à changer de nom parce que précisément, ils n'étaient pas issus de l'agriculture biologique. Mais en fait, c'est plutôt un changement heureux.
- Speaker #1
Très bien. Et alors, comment tu fais dans tes travaux pour évaluer justement ce changement de nom ? Tu questionnes les consommateurs qui sont attachés à cette marque ? Tu fais des entretiens avec des responsables de marque ? Tu observes les signaux sur les réseaux sociaux ? Comment tu pratiques finalement de manière méthodologique cette évaluation, ces recherches sur le changement de nom de marque ?
- Speaker #2
Alors, du point de vue méthodologique, moi j'aime bien coupler deux méthodes, les méthodes qualitatives et les méthodes quantitatives. J'aime bien utiliser les méthodes qualitatives parce qu'elles permettent vraiment de répondre à la question du pourquoi. Si on se contente de poser des questions, aussi intelligentes soient-elles, le problème c'est qu'on les fait uniquement à partir de l'expérience que l'on a, ou de l'expérience que d'autres chercheurs ont. Or, à un moment donné, cette expérience peut être complètement faussée parce que le contexte a changé. Par exemple, lors de mes travaux de thèse, je vais citer un exemple très concret pour mesurer la sensibilité à la marque, c'est-à-dire voir si les gens sont attachés au fait d'acheter une marque plutôt qu'une marque de distributeur ou une marque premier prix. Je me suis aperçu que l'échelle ne fonctionnait plus du tout parce que les gens considèrent de nos jours que la marque Leclerc ou la marque Carrefour, c'est une marque.
- Speaker #1
Quand tu parles d'échelle pour nos auditeurs, qu'est-ce que tu entends par là ?
- Speaker #2
Une échelle de mesure, c'est par exemple, on va demander aux gens de se positionner en mettant par exemple une note de 0 à 5. Par rapport à une affirmation comme je suis très sensible au nom de marque que j'achète Et donc, si on met 1, c'est je ne suis pas du tout sensible 2, je ne suis plutôt pas sensible 3, je n'ai pas d'opinion 4, je suis sensible et 5, je suis très sensible
- Speaker #1
Très bien. Et donc, ces outils-là ont besoin d'être renouvelés finalement en permanence ?
- Speaker #2
Oui, il faut toujours s'assurer que même des échelles… déjà validées, déjà utilisées, peuvent parfois ne plus être adéquates parce que le contexte a changé. Donc ça, je m'en suis aperçue en les utilisant. Et même, c'est une conviction que j'avais aussi en tant que chef de produit. Personnellement, j'ai toujours considéré qu'il fallait utiliser le quali et le quanti. Ce n'était pas l'un ou l'autre, mais l'un et l'autre, parce qu'ils sont complémentaires. Le quanti permet vraiment, comme son nom l'indique, de quantifier ce qu'on souhaite observer, mesurer, et quelque part de se rassurer. Mais souvent, le qualitatif, c'est ce qui vous donne les intuitions. Ça permet d'entrer beaucoup plus en finesse, en fait, dans le mode de raisonnement des consommateurs et également de saisir les tendances à venir qui ne sont pas forcément encore discernables. C'est ce qu'on appelle l'attention aux petites choses qui vont devenir, en fait, des événements ou des tendances marquantes dans les années à venir.
- Speaker #1
Dans la catégorisation du nom de marque et de ce changement de nom, tu as beaucoup parlé de stratégie, c'est un support finalement pour un changement de stratégie. Est-ce qu'il n'y a pas aussi parfois des changements de nom de marque qui peuvent être beaucoup plus institutionnels ou pour asseoir finalement une notoriété ? Voir un autre cas où parfois on a un nom de marque qui arrive sur des choses qui n'avaient pas de marque auparavant. Je pense par exemple aux stades sportifs qui se transforment et qui deviennent des... Par exemple, on a aujourd'hui l'Alliance Riviera à Nice, qui est le nouveau nom pour le stade duré, qui était, j'imagine, l'ancien nom de ce stade, et peut-être une dénomination géographique où il y a une personne. Donc là, on a un nom de marque qui arrive, pour favoriser le sponsoring. Est-ce que cette tendance, finalement, de marquer les choses avec un nom, c'est quelque chose qu'on observe également dans nos sociétés de plus en plus marchandes ?
- Speaker #2
Oui, alors là, c'est effectivement moins strictement lié à des questions de stratégie qu'au fait qu'on observe, qu'on s'en défende ou qu'on le soutienne, une marchandisation de la société qu'on peut observer quasiment à tous les niveaux. Effectivement, des choses qui n'étaient pas nommées, comme les stades, d'un seul coup prennent des noms. Accor Hotel Areva, par exemple, qui est au lieu de Paris-Bercy, c'est un des exemples les plus connus. Et ça permet à la... marque accord de se faire connaître de manière institutionnelle. Donc c'est du sponsoring, sauf que c'est du sponsoring beaucoup plus visible que ce qui était fait auparavant. Mais c'est en fait un phénomène général. Parfois, même les écoles sont touchées, mais pas en France. Je dirais qu'en France, il n'y a à peu près que les écoles et l'université qui restent un territoire sanctuarisé, mais dans d'autres pays, ça ne l'est pas du tout. Et on peut trouver des distributions de produits marqués aux enfants dans les écoles, par exemple.
- Speaker #1
Voir peut-être des noms d'écoles qui ont des noms de marques ?
- Speaker #2
Ah ça, je n'ai pas vu ça encore en France, mais c'est une question très intéressante Jean-Baptiste. Je regarderai s'il y a eu des noms de marques d'écoles. Alors des noms de marques pour des établissements d'enseignement supérieur, oui bien sûr, notamment quand il y a de la formation continue, mais pour de la formation pour des jeunes, je dirais niveau pré-bac, je ne sais pas, il faudrait que je me renseigne.
- Speaker #1
Tu as dit en introduction que tu t'étais lancé dans la recherche pour justement répondre à des questions que tu te posais quand tu étais manager. Oui. Alors quelles sont justement les prochaines questions auxquelles tu souhaiterais répondre dans tes futurs travaux ?
- Speaker #2
Ah, alors j'ai déjà essayé de répondre aux questions, changer un nom de marque, est-ce que c'est facile, comment, pourquoi, jusqu'où ? C'était en fait le premier axe de mes travaux de recherche. Ensuite, j'ai travaillé toujours sur la marque, est-ce que rajouter un label éthique ou AB ou autre, est-ce que ça apporte quelque chose véritablement à la marque ? Et on voit comme souvent, entre ce que les gens disent et ce que les gens font, il y a quand même un écart qu'on arrive à mesurer dans les expériences que je reproduis dans les recherches. Et là, j'aimerais poursuivre, mais aller... Dans quelque chose qui concerne aussi finalement Twitter X, c'est qu'on a évoqué le changement de nom. Mais Twitter, ce n'est pas qu'un changement de nom. Il y a aussi le petit oiseau bleu qui disparaît pour être remplacé par une lettre X, forte, élégante, au demeurant, mais qui n'est quand même pas identique. Et moi, quand je discute avec les gens, je me suis aperçue, par exemple, que beaucoup de gens ne sont toujours pas remis du fait que le gros Quick a disparu de la boîte Nesquik et a été remplacé par le lapin Quickie. Donc, j'aimerais travailler. sur les changements, mais d'emblèmes, d'autres types de changements. Mais je soupçonne que l'attachement au personnage soit presque encore plus fort qu'un attachement au nom de marque. Donc, j'aimerais élargir mes recherches en allant vers les personnages, vers des marques incarnées, vers des emblèmes de marques. Ça peut être aussi de la musique de marques. C'est-à-dire pas traiter que du nom, mais traiter de tout ce qui est autour de la marque.
- Speaker #1
D'accord. Et donc là-dessus, est-ce que tu pourrais faire des expérimentations ou ce sont des recherches basées sur des échelles de mesure ?
- Speaker #2
Alors, personnellement, j'ai fait un choix depuis longtemps. Je ne fais que de l'expérimentation, ce qu'on appelle plus précisément de la quasi-expérimentation. C'est-à-dire, je vais inventer des cas de figure, mais inspirés de la réalité. Je dirais que ça n'est pas extrêmement difficile à faire, vu que j'ai travaillé en entreprise. Donc, par mes connaissances antérieures, j'arrive assez facilement à identifier des catégories de produits assez pertinentes, des marques qui font sens, etc. Et je vais reconstruire des cas très proches de la réalité. Et après, je demande au consommateur de s'exprimer dessus en faisant une comparaison de type soit avant-après. Par exemple, pour ma thèse, c'était avant le changement de nom de marque et après le changement de nom de marque. Je recueille énormément d'informations, par exemple, tout le détail de l'image, l'intention d'achat. Et puis, je compare avant-après. Sachez que d'un point de vue technique, c'est assez complexe de faire une étude avant-après en termes d'échelle de mesure. Il y a des tas de vérifications à faire, mais ça se fait. Ou alors, une autre manière de faire, c'est à l'instant T, on va mesurer un produit qui n'a pas, par exemple, un label, avec un produit qui a un label. On va regarder qu'apporte le label. Alors là aussi, il y a des contraintes. Là, il faut avoir un échantillon qui est absolument similaire. Sinon, ça n'a pas de sens.
- Speaker #1
Un échantillon similaire, c'est les personnes que tu interroges.
- Speaker #2
Il faut qu'on ait le même pourcentage d'hommes et de femmes, j'allais dire de jeunes et de plus âgés, de catégories socio-professionnelles. Il faut que ce qu'on appelle les échantillons soient appariés. C'est le terme qu'on emploie. Mais moi, j'ai fait un choix qui est vraiment un choix. Je pense qu'il vaut mieux soumettre les gens, les faire réfléchir sur des situations réelles plutôt que de les faire spéculer sur des idées. Ça vient aussi de mon expérience antérieure en tant que chef de produit. Par exemple, je me suis aperçu, quand on veut tester une nouvelle idée, quelque chose de radicalement différent, le consommateur n'est pas capable de réagir. Le consommateur peut réagir à quelque chose qu'on lui soumet. Si vous arrivez, alors moi je travaillais dans le chocolat, Alors, si vous arrivez en lui disant, bon, alors un chocolat au gingembre et au piment, est-ce une bonne idée ou pas ? Il est capable de vous répondre. Il dit j'aime, j'aime pas, et on peut même le quantifier et savoir s'il faut le lancer ou pas. La réponse étant, sans surprise, non, dans ce cas de figure. Mais si vous lui posez la question, c'est quoi le chocolat que vous rêvez pour demain ? Il ne peut pas répondre. Face à ce constat qu'en fait, il est difficile à un consommateur d'élaborer sans support physique. J'ai fait le choix dans mes recherches de toujours travailler avec des supports visuels, même si parfois ça complique bien les choses. Après, quand on soumet les articles, parce qu'avoir recours à du réel est parfois très contraignant. Mais je pense que ça a plus de valeur qu'une simple élaboration intellectuelle, sans support.
- Speaker #1
Et alors, juste pour bien comprendre, tu disais que c'est compliqué de faire des expérimentations sur avant-après parce qu'il y a énormément de choses à contrôler. Est-ce que tu pourrais nous donner... Un exemple de difficulté très concrète sur qu'est-ce qu'il faut contrôler entre l'avant et l'après pour bien cerner l'expérimentation ?
- Speaker #2
Il faut contrôler que les échelles de mesure sont valables dans les deux foyers, qu'elles n'ont pas eu de distorsion dans l'espace de temps. De la même manière, quand on fait une étude temporelle, un détail qui... Alors là, c'est une difficulté au cours de l'étude, mais c'est qu'on perd des gens dans l'échantillon. Donc, vous démarrez avec 100 personnes. Au deuxième test, vous n'en avez plus que 60. Donc ça, c'est une très grosse difficulté. Et c'est d'ailleurs parce que j'ai tiré les leçons de mon expérience au cours de ma thèse. La thèse, ça vise aussi à faire un premier apprentissage. On fait des choses qu'on ne fera plus jamais après du reste de sa vie parce qu'on a compris qu'on s'était fixé un challenge un peu élevé. Et c'est pour ça qu'après, j'ai toujours fait plutôt des comparaisons à un instant T avec ou sans. Parce qu'en ce moment-là, on n'a plus tous ces problèmes. Il est plus compliqué de gérer l'évolution d'un échantillon dans le temps plutôt que d'appareiller deux échantillons au même instant.
- Speaker #1
Très bien. Merci beaucoup à tous de nous avoir écoutés. Merci beaucoup Véronique.
- Speaker #2
Merci Jean-Baptiste.
- Speaker #1
Et à bientôt pour un prochain épisode des Créocasts.
- Speaker #2
Merci.