undefined cover
undefined cover
La technologie voleuse de rêves - Une dystopie engagée avec Anna Vassileva cover
La technologie voleuse de rêves - Une dystopie engagée avec Anna Vassileva cover
Éclats de Voix

La technologie voleuse de rêves - Une dystopie engagée avec Anna Vassileva

La technologie voleuse de rêves - Une dystopie engagée avec Anna Vassileva

39min |07/08/2025
Play
undefined cover
undefined cover
La technologie voleuse de rêves - Une dystopie engagée avec Anna Vassileva cover
La technologie voleuse de rêves - Une dystopie engagée avec Anna Vassileva cover
Éclats de Voix

La technologie voleuse de rêves - Une dystopie engagée avec Anna Vassileva

La technologie voleuse de rêves - Une dystopie engagée avec Anna Vassileva

39min |07/08/2025
Play

Description

Dans un monde où nos nuits deviennent des données exploitables, où la santé se vend en abonnement premium et où l’humain s’optimise à coups d’algorithmes, quelle place reste-t-il pour notre libre arbitre? Pour son premier roman “Sang Sommeil”, Anna Vassileva signe une dystopie glaçante, mais profondément humaine, transformant une angoisse personnelle en une critique sociétale.


Ancienne consultante en transformation digitale, elle utilise aujourd’hui l’écriture comme une prise de parole engagée, comme une sorte de résistance poétique face aux dérives de la technologie.


Dans cet épisode, il est question de notre complicité passive face à des systèmes que nous savons défaillants, de la perte de notre instinct corporel face à la quantification de soi, et de l’importance de reprendre le temps. De lire. D’écouter. De penser.

Anna nous invite à la curiosité, à questionner ce qui nous semble normal.

**************************************************************************

Retrouvez Anna: https://www.instagram.com/sangsommeil/ ou https://www.linkedin.com/in/anna-vassileva-autrice/

Références:

Épisodes à r(é)écouter:

39 - https://smartlink.ausha.co/eclatsdevoix/entre-journalisme-fiction-et-communication-la-plume-cameleon-de-jean-michel-gaudron

12- https://smartlink.ausha.co/eclatsdevoix/ev-12-qui-ecoutera-saura-avec-jean-michel-gaudron


🎧 Éclats de Voix, le podcast des prises de parole engagées. Abonnez-vous pour ne pas manquer les voix qui font résonner les idées, les colères et les espoirs d’aujourd’hui.

Merci de le soutenir en lui mettant des ⭐️ et en le partageant sans modération!

✨ Plus d'informations:

💻 Mon site: www.anneclairedelval.com

➡️ Échanger sur LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/anneclairedelval/ 

📝 Me rejoindre sur Instagram: https://www.instagram.com/anneclaire_delval/ 

**************************************************************************

Production et montage: Anne-Claire Delval, Jean-Michel Gaudron, Cyriaque Motro

Musique: Meydän

Titre:  Synthwave Vibe

Auteur: Meydän

Source: https://meydan.bandcamp.com

Licence: https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Éclat de voix débarre !

  • Speaker #1

    Le podcast des prises de paroles engagées qui transforme vos peurs en audace vocale. Je suis Anne-Claire Delval, ancienne journaliste, rédactrice, modératrice, facilitatrice de ces prises de paroles engagées. Et oui, j'ai envie de vous prouver que chaque voix compte, y compris la vôtre. Parce que dire « plutôt que terre reste mon mantra » , parce que Merci. votre message est attendu par tout le monde. Inspirez-vous des invités. Et d'ailleurs, puisque ce podcast va vous donner des ailes, mais montrez-le. Donnez-lui 5 étoiles, commentez-le, partagez-le, ensemble, libérons toutes ces voix qui n'osent pas encore.

  • Speaker #2

    Imaginez-vous en 2054, c'est dans 30 ans, l'hémisphère nord est frappé d'un mal terrible, une pandémie d'insomnie, dont l'issue ne peut être que la folie, puis la mort. Heureusement, une société technologique a inventé les somnibules, des casques permettant de générer et réguler le sommeil. Tout est bien qui finit bien alors ? Eh bien non, évidemment, car sous couverte à l'intérêt de la santé publique, l'utilisation faite de ces somnibules dépasse largement l'objectif premier. Et c'est toute une population qui se retrouve sous le contrôle d'un pouvoir quasi dictatorial pour lequel le sommeil est devenu une ressource précieuse au cœur d'enjeux technologiques et économiques. Pour s'élever contre ces dérives, Vanilla Acevan, une jeune scientifique renommée, va s'engager dans une lutte depuis l'intérieur du système pour sauver son fils, lui aussi atteint par la pandémie. Mais jusqu'où pourra-t-elle aller ? Aura-t-elle assez de force pour faire face aux découvertes toutes plus angoissantes les unes que les autres qui jalonnent son parcours ? Voilà résumé, Sans Sommeil, un roman très prenant et plein de suspense. Une dystopie certes, mais on ne peut s'empêcher de reconnaître certaines dérives déjà présentes dans notre quotidien. Ce récit nous entraîne en tous les cas dans une aventure haletante qu'on appelle... pas envie d'arrêter de lire avant d'être arrivé à la fin. Très documenté et très plausible, ce premier roman d'Anna Vasileva mérite assurément qu'on y consacre un podcast.

  • Speaker #1

    Vous l'avez reconnu cette voix ? Ah oui,

  • Speaker #0

    c'est celle de Jean-Michel Gaudron,

  • Speaker #1

    un autre écrivain luxembourgeois qui connaît bien Anna et qui a été par deux fois l'invité des Cladois dans les épisodes 12 et 39. Dans l'un, il nous a expliqué comment il donnait la parole à ses... personnages et dans le deuxième, les différents types d'écriture. Mais, mais, ils n'avaient pas abordé ce style particulier,

  • Speaker #0

    la dystopie. Alors la dystopie,

  • Speaker #1

    étymologiquement, ça signifie lieu mauvais et c'est en réalité l'antithèse de l'utopie. Elle est aujourd'hui présente non seulement en littérature, mais aussi, on va la retrouver dans le cinéma, aussi dans des jeux vidéo, dans la avant de dessiner. Et pour Laurent Bazin, qui est maître de conférences en littérature à l'université de Versailles Saint-Quentin, et qui avait été interrogé au micro de ZoomZoomZen de France Inter, l'idée de dystopie et de son contraire l'utopie remonte à la Renaissance, au moment où on va quitter un système purement théologique pour prendre son destin un peu plus en main à travers notamment le voyage. Et en 1920, c'est Egvini Zamiatin, désolé j'ai du mal à prononcer, qui a écrit Nous Autres, considéré, lui, comme le tout premier roman dystopique moderne. Et Laurent Bazin ajoute que la dystopie est là pour alerter que tout projet utopique met aussi en danger l'équilibre collectif. Alors dans Sans Sommeil, Anna Vassileva nous tend un vrai miroir. Et à travers cette dystopie technologique, si on peut dire ça comme ça, elle questionne à la fois nos choix, nos habitudes, mais surtout notre complicité face à un système qui nous dépasse. Alors bien sûr, écrire un roman comme celui-là, c'est aussi un acte d'espoir, une manière de reprendre la parole, d'ouvrir un dialogue sur ce qui nous échappe. Et c'est ce dont il va être question. Bonjour.

  • Speaker #0

    Salut Anna.

  • Speaker #3

    Salut Anne-Claire.

  • Speaker #0

    Alors, il faut remettre un petit peu de contexte pour nos auditeurs, mais notre rencontre a été quelque chose de magique il y a quelque temps, une vraie étincelle, comme si on se connaissait depuis toujours. Et puis, depuis, on ne se quitte plus,

  • Speaker #1

    notamment parce que ton livre est toujours sur ma table de chevet. Il est très gros.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de venir sur le podcast, Anna.

  • Speaker #3

    Merci à toi, je suis très émue, c'est mon premier podcast et je suis vraiment enchantée de le faire avec toi.

  • Speaker #0

    Oh, ça me réjouit, ça me fait plaisir et ça me flatte. Alors, pour expliquer un petit peu à nos auditeurs, tu avais au départ une carrière que d'aucuns qualifieraient de prestigieuse chez PWC et tu l'as quittée pour embrasser celle d'écrivaine. Alors, en quoi ? Pour toi, l'écriture finalement est devenue une forme d'engagement, puisque tu sais que c'est le sujet principal d'Éclat de Voix et qui me tient tant à cœur. Et en quoi tu as l'impression que cette forme d'engagement qu'est l'écriture fait maintenant plus de sens pour toi aujourd'hui ? Pourquoi ?

  • Speaker #3

    Alors moi, c'est vraiment un engagement d'un point de vue énergie, personnel. J'avais envie de me lever le matin avec la banane. Et de faire quelque chose qui me passionne. Ma passion première, c'est la lecture. Je lis plus de 150 livres par an. J'adore ça.

  • Speaker #0

    Waouh ! Tu mets le curseur bien haut. Waouh, 150.

  • Speaker #3

    Voilà, j'adore ça. Et l'écriture, j'écrivais certaines choses comme ça, mais vraiment pas un texte structuré. Et il y a eu cette idée obsédante et passionnante, en tout cas pour moi, et qui devait sortir. Donc, c'était vraiment, j'ai voulu faire quelque chose, un métier qui est aligné à ma passion.

  • Speaker #0

    Waouh ! Mais alors ? Tu commences fort parce que tu as choisi la dystopie. Alors tu dis que ce n'est pas par pessimisme mais par optimisme. J'aimerais bien savoir comment un genre littéraire aussi sombre peut être un acte d'espoir, tu nous dis ?

  • Speaker #3

    Oui, donc c'est la dystopie. Et avant une petite définition, ça fait partie de la science-fiction. Et c'est un genre littéraire qui est un récit pour mettre en valeur les dérives dans notre société, poussées à leur paroxysme. C'est une extrapolation à partir du réel. c'est de la fiction spéculative et le côté optimiste en fait il vient du fait que montrer les dérives possibles c'est croire qu'on peut ajuster agir pour que ça ne se réalise pas faire d'autres choix pour un futur différent

  • Speaker #0

    Merci beaucoup d'avoir posé ce cadre qui permet effectivement de répondre à la question et qui est très intéressant Dans ce roman Sans Sommeil tu en as profité ou tu l'as utilisé ? pour quelque part transformer une de tes angoisses personnelles dont tu parles, qui était une forme d'obsession de santé et de résultats qui était liée à cette fameuse montre connectée que plein de gens ont aujourd'hui. Tu l'as donc transformée, cette angoisse, en une critique sociétale. À ton avis, est-ce que cette expérience qui relève de l'intime peut vraiment nourrir une réflexion, voire même un engagement ? J'y reviens. qui serait plus de l'ordre du collectif.

  • Speaker #3

    Oui, je pense que toute expérience part d'abord de l'intime, et ça devient collectif quand il touche une corde universelle. Le culte de la performance, par exemple, l'obsession de la santé, la longévité, le bien-être, sont tous des sujets universels, et ils traitent finalement notre finitude, de nos angoisses les plus profondes.

  • Speaker #0

    Oui, c'est vrai.

  • Speaker #3

    Comme tu disais, c'est partie d'une angoisse personnelle, et j'ai voulu comprendre ce qui est en train de m'arriver, cette obsession un peu du bien-être. Et donc j'ai fait pendant six mois des recherches, beaucoup de lectures, des essais, des biographies, des articles scientifiques, pour voir si c'était quelque chose qui n'arrivait qu'à moi, ou alors est-ce que ça touchait d'autres personnes. Donc voilà, j'ai vraiment, je pense, l'universalité vient aussi de mes lectures et d'autres personnes qui ont écrit sur le sujet.

  • Speaker #0

    Ah oui, et tu t'es rendu compte que ce qui est finalement une sorte de th��rapie pour toi, elle le sera pour tout le monde parce qu'on est tous baignés dans le même... Dans le même jus finalement d'inquiétude par rapport à toutes ces questions.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Et surtout avec les lecteurs que j'ai de mon livre, les discussions que j'ai en ce moment, c'est vraiment ça. Beaucoup de gens me disent « mais j'ai exactement la même chose, un montre, elle me possède » . Enfin voilà, donc c'est vraiment des sujets très intéressants.

  • Speaker #1

    Je m'appelle Vanilla. Et j'ai 42 ans. Un bébé à notre époque d'humain augmenté, réparé, reconfiguré, amélioré. Lorsque la pandémie nous a frappés, j'avais 33 ans. Et Eli en avait 3. Pour pouvoir dormir, j'utilise un somnibule, un casque de sommeil fourni par Hypnos. Quand je dis « je » , il faut comprendre que les trois quarts de l'humanité dépendent de lui pour dormir. Ce n'est pas une option de le porter de temps en temps selon nos envies. Il est indispensable. pour pouvoir s'endormir et rester dans cet état pour la nuit. Sans lui, nous, les survivants, des années sans sommeil, aurions au mieux sombré dans la folie, au pire, vers une mort certaine. Jusqu'à récemment, j'étais considérée comme une chanceuse, ayant droit à 8 heures de sommeil réparateur chaque nuit. Tous les humains n'ont pas cette chance et ne bénéficient pas des mêmes privilèges en la matière. Le sommeil... est devenue une ressource précieuse, une monnaie, contrôlée par Hypnos, selon des quotas gérés par le ministère européen du sommet.

  • Speaker #0

    Dans ce roman, ton héroïne contribue à développer une technologie qu'elle va finir par questionner. Est-ce que ce n'est pas finalement ça, le dilemme de notre époque ? Parce que finalement, on se rend complice d'un système qui se développe. que certains dénoncent carrément et que beaucoup d'autres soupçonnent qu'il n'est pas si...

  • Speaker #3

    Si vertueux ?

  • Speaker #0

    Oui, si vertueux,

  • Speaker #3

    si fiable.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #3

    c'est vraiment une question difficile et je me dis, est-ce que nous ne sommes pas toujours complices par facilité, par manque de temps, par paresse intellectuelle, manque de curiosité, manque d'analyse, de comparaison, de prendre le temps de comparer les choses ? par recherche du plaisir immédiat, voilà donc beaucoup de choses. Et je me dis aussi qu'un de nos plus grands pouvoirs d'action réside dans le fait de notre choix de consommation, ou plutôt de ne pas consommer certaines choses. Et chacun participe grâce à ses choix, de façon plus ou moins grande, à tout ce qu'on fabrique et à tout ce qui arrive. Et de nouveau, rien n'est simple dans cette question, parce qu'il y a aussi des obsessions. qui peuvent se créer et qui peuvent naître. Arrêter parfois de consommer peut s'avérer très compliqué, notamment pour Meta, les grandes plateformes, ils ont des addictologues qui nous aident bien à être accros de leurs produits.

  • Speaker #0

    Ah oui, alors, redisons, reformulons ça, Meta a des addictologues dans ses équipes, ce qui est juste complètement incroyable quand on y réfléchit, mais qui nous permet aussi de nous sentir peut-être un petit peu moins coupables vis-à-vis de nos comportements, ou de se dire, mais non, je ne suis pas tout seul, tout le monde est concerné. Mais je me dis, les gens, en leur offrant mon livre, tu leur proposes une fenêtre, tu leur proposes d'aller voir au-delà, d'avoir, de commettre un acte de curiosité. Donc, la curiosité, elle peut venir aussi de choses, de rencontres, de choses simples.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Moi, j'encourage vraiment la curiosité, je pense que c'est une des meilleures qualités. C'est d'être curieux et de ne pas prendre pour argent comptant certaines choses. Mais de nouveau, c'est compliqué parce que même en lisant et en sachant ça, en sachant que les réseaux sociaux nous rendent addicts, ce n'est pas pour ça qu'on arrive forcément à s'en défaire.

  • Speaker #0

    À s'en défaire, oui, bien sûr.

  • Speaker #3

    Donc même en sachant, c'est compliqué.

  • Speaker #0

    Mais il y a cette notion de la conscience aussi, de savoir, c'est aussi avoir une conscience qui est plus musclée. Et muscler sa conscience, c'est aussi... se rendre compte qu'on peut faire toujours un petit pas en arrière, un petit pas pour avoir une vision un peu plus globale, pour prendre un peu de recul et de se dire « Ok, je suis dans ce système, j'y contribue d'une certaine manière, parce que c'est difficile de ne pas y contribuer,

  • Speaker #1

    mais jusqu'où je peux aller ?

  • Speaker #0

    Et si je faisais quelque chose différemment ? » On n'est pas obligé de faire des choses complètement dingues, mais on peut.

  • Speaker #3

    C'est la première étape, la prise de conscience.

  • Speaker #0

    C'est mon élan, je pense. Alors, j'ai entendu poser cette question un tantinet terrifiante. Et si le sommet devenait quelque chose qu'il fallait payer ? Alors, la question est angoissante, mais moi j'en ai une autre qui suit, encore plus angoissante. Et est-ce qu'il y aurait d'autres besoins fondamentaux qui risquent, d'après toi, d'être privatisés par la tech ?

  • Speaker #3

    Oui, alors notre attention l'est déjà, non ?

  • Speaker #0

    C'est vrai, oui, Thérèse.

  • Speaker #3

    Notre ennui aussi, on ne s'ennuie plus. Je dis toujours à mon fils, il me dit « Maman, je m'ennuie » et moi je lui dis « C'est génial, Loulou, ennuie-toi, c'est la meilleure chose qui puisse t'arriver » parce que c'est là aussi qu'on a la curiosité qui arrive dans ces moments d'ennui. J'avais remarqué aussi les rires et les cris des enfants dans les rues, on les entend beaucoup moins qu'avant, ils jouent moins.

  • Speaker #0

    Ils sont moins dehors.

  • Speaker #3

    Exactement, on voit marcher des ados dans la rue, ils sont sur leur téléphone en marchant. On peut imaginer la même chose pour l'air qu'on respire, imaginons qu'on doive payer pour respirer un air pur. Le silence, l'intimité, le droit de posséder son corps, on voit l'avortement aux Etats-Unis, ce qui est en train d'arriver. La lenteur, la paresse, la lecture, les promenades dans la nature, les arbres. Dans mon livre, je parle d'un musée des arbres, parce qu'il y a beaucoup moins d'arbres dans le monde que j'ai imaginé. Et dans ce musée, il faut payer pour voir des arbres encore vivants, une diversité d'arbres. Et en fait, je me dis que potentiellement, tout ce qui est gratuit et naturel peut être transformé en marchandise. Et ce n'est pas forcément la rareté qui crée la valeur, mais le fait d'être dépossédé de certaines choses. Quand on nous les retire, on peut nous faire payer pour quelque chose qu'on avait déjà.

  • Speaker #0

    C'est quand même... Schizophrène comme posture, mais tu as raison, quand on y regarde de plus près, c'est un peu quand même ce qui est en train de se passer. Et il y a quelques temps de ça, j'assistais à une conférence sur la nature, où ils expliquaient quelque chose, dire qu'il faut des études scientifiques pour le prouver, qu'un homme ou une femme, enfin un humain, est mieux quand il est en contact avec la nature. Bon, je simplifie volontairement. C'est ça,

  • Speaker #3

    on entend les oiseaux.

  • Speaker #0

    Mais voilà. Et je me dis, mais c'est peut-être un acte de rébellion qu'on peut avoir, nous, dès maintenant, de retourner dans cette nature, de nous reconnecter à ces choses qui sont simples et qui vont nous permettre justement de prendre de la hauteur sur le reste et de nous dire que c'est là qu'est l'essentiel, c'est là qu'est notre vie, et pas uniquement dans la tech ou dans les réseaux sociaux. Et dans ton roman, tu pousses le bouchon carrément un peu plus loin parce que la santé n'est plus un droit. C'est carrément devenu un produit qui a déjà un peu répondu préalablement, mais on voit cette dérive déjà dans notre société actuelle.

  • Speaker #3

    Oui, on voit clairement le basculement de la santé vers le domaine privé. Et quand ça se privatise, c'est un basculement vers le produit, les marchandises. Et mon roman pousse la logique jusqu'à l'extrême et s'appuie sur une réalité déjà tangible. Le glissement progressif de la santé du domaine du droit vers un produit marchand. Et on le voit avec plusieurs acteurs, la médecine, les assurances, les big tech, l'industrie pharmaceutique. Pour quelques exemples, on voit aux États-Unis, ce qui est déjà le cas pour les assurances. Ce sont les sociétés qui assurent les gens, ils pourront être en bonne santé, respecter certaines règles pour être bien assurés, pour ne pas payer une prime trop chère. On le voit avec la médecine, la médecine à la carte ou personnalisée. C'est un peu une médecine à deux vitesses. Il y a la médecine curative pour le plus grand nombre, et heureusement. Et puis il y a la médecine préventive et prédictive pour les autres.

  • Speaker #0

    Alors, ça aussi, c'est quand même fou parce que tu te dis, la médecine telle qu'elle existe aujourd'hui a des failles, comme tout système, comme toute chose. C'est tout à fait naturel, rien n'est parfait. Et au lieu d'aller repuiser dans des connaissances ancestrales, de s'appuyer sur... des approches plus holistiques, on a tendance à les mettre, je trouve, de côté en se disant « Oh oui, on parle de médecine parallèle ou de médecine douce » comme s'il y avait une sorte de classement, que c'était inférieur, alors que ça a aussi ses vertus, ça a aussi son approche qui est beaucoup plus, là encore, connectée au vivant dans son ensemble. mais ça C'est de plus en plus, et tu viens de le dire, réservé à une minorité parce qu'il faut payer pour des choses qui nous maintiennent en bonne santé. C'est fou.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. De toute façon, on voit clairement l'orientation des big tech vers le domaine de la santé. Il y a clairement un besoin, justement, d'avoir tout réuni en un seul endroit, avoir une médecine holistique. Et il y a des players qui se mettent vraiment dans... Dans ce chemin-là ?

  • Speaker #0

    Sur ce chemin, oui, c'est exact. Tu décris comment tu as commencé à voir ton corps non plus comme quelque chose avec lequel vivre, mais comme quelque chose à optimiser. Ce mot optimiser, performer aussi, une déshumanisation en quelque sorte. Comment elle s'opère concrètement ?

  • Speaker #3

    C'est terrible. En fait, ça a commencé, je dirais, avec ma montre connectée. pendant le que vide mon chéri mais en faire une montre connectée parce que je voulais me remettre au sport on était enfermé donc c'était vraiment voilà j'avais besoin de bouger et donc je me suis dit on ne peut améliorer que ce qu'on peut mesurer et voilà j'aime bien l'année J'ai commencé à m'améliorer aussi bien physiquement que mentalement. C'est un peu ma personnalité. Et donc avec cette montre, j'ai commencé à me mesurer. J'ai commencé à me sentir coupable de ne pas faire mes 10 000 pas par jour. J'ai commencé à regarder mon fitness age. Je vois que tu n'as pas de montre, mais tant mieux. Elle te donne ton fitness age. Donc au plus tu fais du sport, au plus ton fitness age diminue, donc ton âge biologique, entre guillemets, tu as ton âge chronologique et biologique. Et donc je suis arrivée dans une obsession de diminuer un maximum mon fitness age. Et par exemple, c'était tellement... C'est là que j'ai posé des questions parce que j'ai eu un limbago. Et je me suis dit, ma première pensée, c'était pas mince. Comment guérir mon dos ? Que faire pour ça ? C'était mince, je vais pas pouvoir faire du sport. C'est horrible, mon fitness age va augmenter. Non mais c'est terrible. Et donc on se met au final, c'est totalement un contresens parce que quelque chose, on est censé être dans le bien-être. Et en fait, c'est quelque chose qui commence à nous posséder et à devenir obsessionnel.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on n'est plus dans le bien-être, on est dans le bien-être contrôlé.

  • Speaker #3

    Contrôlé, voilà. Performance, mesurée, s'améliorer constamment, voilà, c'était vraiment ça. Et c'est ça que j'ai cherché à comprendre et à mettre en avant dans mon livre, qui est un peu une société focalisée autour de la santé, une santé obligatoire.

  • Speaker #0

    Une santé obligatoire et qui devient complètement délirante à certains moments, parce que tu cites, ou tu as déjà mentionné plusieurs fois Brian Johnson, qui est un homme qui investit, attention, 2 millions par an pour redevenir jeune. C'est incroyable ce truc. Alors, cette obsession de l'optimisation de soi par rapport à notre humanité et notre finitude, qu'est-ce que ça révèle ? Parce que comme le disait Patricia Ferrand dans l'épisode 49, je peux le citer parce qu'il est récent le chiffre, sinon j'oublie. d'éclats de voix qu'on avait consacré au deuil, elle nous disait justement « Mais notre seul projet commun à tous sur cette planète, que nous soyons dans telle ou telle société, que nous ayons telle ou telle culture, c'est que nous sommes finis, que nous allons mourir. » Donc là, il y a quelque chose qui est complètement nié presque.

  • Speaker #3

    Ah oui, c'est totalement dingue. Justement, Brian Johnson, l'homme le plus mesuré au monde...

  • Speaker #0

    Ah, tu as un concurrent.

  • Speaker #3

    Oui ! Ça fait que je n'ai que ma montre. Ah non, mais il mesure l'âge de tous ses organes. Donc, de son cœur, de son cerveau, de ses poumons, même de son pénis. Il mesure tout et il veut diminuer l'âge biologique de tous ses organes. C'est complètement dingue. Et par rapport à la finitude, moi, je trouve que c'est vraiment... Ça va dans des extrêmes parce qu'on se déconnecte, au final, du plaisir. Pour moi, la vie, ça doit être le plaisir. C'est ça qui est génial. Et de nouveau pour revenir à Brian Johnson, lui tous les matins au petit-déj il ne mange qu'une fois par jour avec plein de médicaments. Et pendant qu'il mange son petit-déj, il s'entraîne à sa souplesse et il fait des grands écarts. Donc je me dis, un des grands plaisirs de la vie c'est manger, non ? Donc super, son cœur il est sans doute plus jeune que le mien, mais voilà, moi en tout cas je prends plaisir à manger.

  • Speaker #0

    Non mais on se dit qu'il finira dans une boîte anyway, donc bon, avec un cœur peut-être plus jeune que le tien. J'imagine la scène. Un film. Il aurait pu être dans ton roman, ce gars-là.

  • Speaker #3

    Ah, mais je m'en suis inspirée. J'avais oublié, justement. Je m'en suis inspirée pour Mon vilain. Cette quête, cette obsession, le transhumanisme. Voilà. Donc, Mon vilain, j'ai pris certaines choses de Brian Johnson.

  • Speaker #0

    Allez lire, allez lire. Je ne saurais que vous le répétez et vous inciter à le faire. Alors, justement, dans ce monde où l'IA, puisqu'on parle d'elle, commence à pouvoir détecter des maladies avant même les symptômes, je me dis, mais est-ce qu'on n'est pas en passe de perdre ce rapport instinctif, intime, intuitif aussi, d'intuition à notre propre corps ? Est-ce qu'on est... Aujourd'hui, moi, je me pose la question, est-ce qu'on est vraiment prêt à déléguer tous ces pouvoirs à des machines ? Au final, quels bénéfices on va vraiment en tirer ? Sans compter que... Il faut être honnête, les machines, pas plus que les humains, aujourd'hui ne sont fiables à 100%, parce qu'on n'est pas tous des robots, on n'est pas tous clonés, donc on n'est pas systématiquement identiques. Je veux dire, nos ADN sont différents, à l'intérieur de nous...

  • Speaker #1

    Si on regarde une forêt,

  • Speaker #0

    il n'y a pas deux arbres qui sont strictement les mêmes. Donc c'est pareil pour les humains. Les machines, elles, par contre, ce sont les mêmes. Donc il y a une sorte, pour moi, de décalage entre les deux. Mais ce qui m'inquiète, c'est comment est-ce qu'on... peut vouloir, à ce point, nous remettre entre les mains d'un robot.

  • Speaker #3

    C'est dingue parce que ta question, ça m'est vraiment arrivé. Je vais commencer par un exemple, c'est le score de sommeil de ma montre connectée. Donc les matins, je ne le fais plus, j'ai appris la leçon, mais les matins en me levant, je regardais mon score sommeil et j'ai remarqué que je me levais par exemple pleine d'énergie et je regardais ensuite mon score sommeil qui était de 23%, donc tout pourri.

  • Speaker #0

    Révélation, le score sommeil d'Anna est pourri.

  • Speaker #3

    Mais oui, et je me dis, mais comme tu dis, c'est des moyennes, Donc... Donc, par rapport à la moyenne qui dort super bien, moi, j'étais à 23 %, donc nulle. Et donc, ça me mettait le moral dans les chaussettes alors que je me sentais pleine d'énergie. Et je me dis, mais c'est quand même ridicule. Là, je me sens pleine d'énergie, en forme et un score parce que la montre a dit que j'ai mal dormi. Moral dans les chaussettes. Donc, du coup, elle avait raison. C'est un peu une prédiction autoréalisatrice. Donc, voilà, tout à fait. On perd un peu la notion de s'écouter. mais oui il y a des bénéfices immenses de certaines technologies, de détecter plus tôt, de sauver des vies, d'anticiper des crises. Mais il faut garder le droit de ne pas tout savoir et surtout de ressentir plutôt que de mesurer, d'être à l'écoute de son corps au final et de rester propriétaire de nos corps.

  • Speaker #0

    Ça, j'aime bien, le droit de ne pas tout savoir. Parce que finalement, pour l'instant, nos cerveaux ont beau être ultra puissants, nos ordinateurs aussi, même plus que peut-être un jour nos cerveaux, je ne sais pas ça. mais en tous les cas une chose est certaine c'est que le miracle de la vie personne pour l'instant n'a la clé tout à fait alors les l'écriture comme forme de résistance tu dis que tu as écrit les premières lignes de ton roman à la main la nuit loin de tout écran donc est-ce que tu avais ta montre pendant ces moments là C'est pour ça que tu avais un score de 23%. Si tu écris la nuit, forcément, tu as 23% à l'arrivée. Excuse-moi.

  • Speaker #3

    Non, alors bon. Mon livre s'appelle Sans Sommeil. Je suis un petit peu insomniaque. Donc, c'est aussi un espace de créativité. Mais donc, cette nuit-là, c'est plutôt... J'ai fait ça sur papier et dans un carnet. C'est plutôt une hygiène de vie. Donc, je dors avec ma montre, mais mon téléphone ne rentre pas dans la chambre le soir. Voilà.

  • Speaker #0

    Donc, c'est un petit peu... En faisant ça, c'est une sorte de rébellion, d'acte de résistance d'écrire à la main par rapport à la technologie ou c'était juste comme ça ?

  • Speaker #3

    J'adore les cahiers, les crayons, j'adore écrire, faire des petits dessins. Et de nouveau, ce n'est pas possible d'avoir un écran à côté de moi la nuit. Imagine, j'ouvre un écran bleu. Non, non, c'est vraiment, j'ai mon cahier parce que j'aime bien me souvenir de mes rêves aussi. Donc, je note mes rêves pendant mes insomnies. Voilà, un petit carnet.

  • Speaker #0

    Alors, est-ce que cette fiction dans laquelle tu as choisi de t'installer, t'a permis de dire des vérités ? Un essai, par exemple, ou bien un rapport de consultant comme tu étais avant, ça t'aurait permis de l'exprimer ?

  • Speaker #3

    Le roman, en fait, je trouve qu'il touche beaucoup plus un public plus large. L'essai, c'est quelque chose un peu pour démontrer, c'est beaucoup plus factuel. Le roman laisse de la place à justement la curiosité, à poser des questions. Moi, ce que j'ai voulu, c'est poser des problématiques, pas pour donner des solutions, mais pour qu'on puisse se questionner, laisser des montres. Le consultant clarifie, il donne des chiffres, il oriente. Alors que moi, je voulais peut-être un petit peu troubler, faire bouger quelques lignes, en tout cas, faire se poser des questions.

  • Speaker #0

    C'est une bonne chose. Et ma question était évidemment un petit peu... provocatrice parce que bien évidemment un roman n'a rien à voir avec un rapport de consultant mais c'était juste pour dire que malgré tout un rapport ça donne une certaine lecture du monde oui à des gens et j'étais entendu cité octavia butler qui dit de point ouvre les guillemets l'acte même d'essayer de regarder vers l'avenir pour discerner les possibilités et offrir des avertissements est est en soi Un acte d'espoir. Fermez les guillemets. Est-ce que, si on pousse le bouchon encore un petit peu plus loin, tu dirais que cette écriture dystopique que tu as choisie pourrait être considérée comme une forme d'acte politique ?

  • Speaker #3

    Alors, non, je ne dirais pas que c'est un acte politique. Ce que je fais, comme je disais un petit peu avant, c'est poser des questions et explorer des possibles. Me poser la question « et si ? » « Et si ? » J'adore. C'est un livre génial. « Et si ? » de Jean-Michel Ausha. Non mais j'adore, c'est une question vraiment géniale, ça permet d'imaginer et je ne veux pas te donner de solutions ni de leçons. Ce que je veux c'est vraiment d'ouvrir un espace de réflexion, de suicider. des interrogations et de porter un regard attentif sur notre époque en fait. Et comme disait Octavia justement, c'est vraiment un acte d'espoir de tenter de voir ce qui peut arriver et de mieux le comprendre pour que ça n'arrive pas.

  • Speaker #0

    Alors pour que ça n'arrive pas, tu dis construisons non pas ce qui est possible mais ce qui est humain. Qu'est-ce que toi tu proposerais aux acteurs de la tech pour que ça n'arrive pas ?

  • Speaker #3

    Alors je dirais de recentrer les... Les technologies et les innovations sur les besoins réels des personnes. Il y a beaucoup d'innovations célèbres, par exemple l'iPhone, la réalité virtuelle ou les réseaux sociaux, qui ont été inventés pas par un besoin. Franchement, on n'a pas besoin d'iPhone, non ? Ou les réseaux sociaux.

  • Speaker #0

    Non, pas du tout.

  • Speaker #3

    Ça ne vient pas du tout d'un besoin, ça vient d'un génie qui a une idée. Et donc le monde s'est adapté à une technologie. On a tous été dans la même direction d'un génie un peu fou. Au lieu d'écouter vraiment nos besoins et les choses importantes, donc ça pose un problème parce qu'on peut créer des fois des objets et des services avant même de s'interroger sur l'impact humain, social et éthique. Je pense que la régulation a beaucoup à jouer là-dedans. Je sais qu'on dit que l'Europe c'est un peu vieux jeu parce qu'on essaie de tout réguler, mais au final dans ce monde contrôlé de plus en plus par l'intelligence artificielle, je pense que c'est la bonne direction à prendre.

  • Speaker #0

    La bonne démarche à avoir, oui. Alors toi, tu as une particularité quand même, c'est que tu as vécu une forme de passage de la transformation digitale à l'écriture, dans un premier temps, dystopique, et ça te donne finalement une perspective unique. En partant de là, est-ce que tu crois qu'on peut imaginer une tech qui soit plus humaine et aussi potentiellement plus écologiquement soutenable ?

  • Speaker #3

    Oui, je pense que c'est possible, à condition de renoncer à la vitesse et à la nouveauté comme valeur suprême, et aussi à la consommation. Malheureusement, la plupart des intérêts sont driveés par l'argent. Et donc, c'est un peu ça qui définit les technologies. Et le fait qu'on nous mette entre les mains des choses finalement pas très utiles et qui peuvent nous rendre accros. Et en ce sens, mon parcours me fait voir que la tech, ne doit pas être une fin en soi, mais un moyen. Ça doit vraiment être un outil et pas quelque chose qui nous contrôle et est néfaste pour nous.

  • Speaker #0

    Ce que j'entends en filigrane, c'est que c'est même pas le problème de la tech, c'est encore et toujours le problème de l'argent.

  • Speaker #3

    Oui, je pense que c'est un bon résumé.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu espères que ton roman transforme le regard des lecteurs sur leur propre rapport à la technologie ?

  • Speaker #3

    Alors, je ne cherche pas à convaincre, mais si le lecteur, après avoir lu mon roman, se pose une question qu'il ne s'était jamais posée, alors c'est génial. C'est la prise de conscience que je trouve super. Et s'il découvre de nouvelles choses, si ça l'aide à être plus curieux sur certaines thématiques, c'est parfait.

  • Speaker #0

    Donc, allez-y, ouvrez le livre pour être curieux et avoir vous poser de bonnes questions. Qu'est-ce qui serait pour toi le succès de ce qui se révèle aujourd'hui être une forme de prise de parole qui est la tienne avec ce premier roman ? Ce serait de l'ordre de, je ne sais pas, voyons large, grand, changer les comportements individuels, voire influencer les politiques publiques, même si on l'a bien entendu tout à l'heure, tu nous as dit que ce n'était pas un acte politique pour toi d'écrire.

  • Speaker #3

    Eh bien mon envie première, c'est que le lecteur passe un bon moment, qu'il se déconnecte. qui prennent le temps, de la lenteur, de la lecture, qui rient, qui apprennent des choses et que, comme je disais, qu'ils puissent se poser des questions qu'ils ne s'étaient jamais posées avant. Et j'ai eu deux remarques de deux lecteurs qui m'ont énormément touchée. C'est de Sarah et Dany. Ils m'ont dit que grâce à mon roman, ils s'étaient remis à la lecture.

  • Speaker #0

    C'est incroyable.

  • Speaker #3

    J'ai trouvé ça incroyable parce que c'est mon activité préférée. Le fait que deux personnes lisent plus maintenant grâce au fait d'avoir lu mon roman, c'est incroyable.

  • Speaker #0

    Ah, ça fait des frissons ! Oui, c'est génial ! Alors, pour continuer dans cette dynamique, est-ce qu'après Sans Sommeil, tu comptes continuer à utiliser la fiction comme outil de, je mets des guillemets, d'énonciation ? Parce que je pense que tu vas me dire que ce n'est pas vraiment ça, mais est-ce qu'il y a d'autres sujets qui t'interpellent pour ça ?

  • Speaker #3

    Oui, alors, beaucoup de sujets m'interpellent. Les inégalités, les injustices, la technologie, l'obsession de la santé. J'aime bien explorer de nouvelles formes, j'aime pas les cases, j'aime pas être mise dans une case. Donc voilà, j'ai envie d'explorer quelque chose d'autre que la fiction. En tout cas, la dystopie, j'avais une idée d'écrire un roman sur les robots et la fin du monde, qui est un peu un classique des dystopies. Et là, je m'oriente plus vers une biographie d'une personne décédée qui me passionne. Voilà, donc j'aimerais commencer en septembre et faire autre chose, mais toujours dans l'écriture.

  • Speaker #0

    Wow ! Donc, on sait qu'il y aura potentiellement plus tard un roman pour en revenir avec les robots, la fin du monde et l'attendant. Ah ah, la biographie mystère. Mystère. Ouah, j'adore.

  • Speaker #3

    Et il pourrait y avoir une suite à Sans Sommeil. Ah ! J'ai beaucoup de demandes de lecteurs qui aimeraient justement une suite. Tu me diras ce que tu en penses.

  • Speaker #0

    C'est fou parce que souvent les écrivains disent ça, que les gens ont envie, une fois qu'ils sont plongés dans leur univers, de poursuivre un peu. C'est un goût de trop peu, on a envie d'aller encore plus loin.

  • Speaker #3

    Et quel commentaire !

  • Speaker #0

    C'est génial. Alors, pour conclure cet épisode, j'avais envie de te demander, mais comment est-ce que tu aimerais qu'à leur tour, nos auditrices, nos auditeurs s'engagent, puisque encore une fois, c'est le concept favori d'Éclat de Voix, sur ces sujets qui sont brûlants, voire clivants parfois, il faut bien l'admettre, et quel premier pas tu leur suggérerais ?

  • Speaker #3

    Alors, breaking news ! Alors, ça serait lire, lire, lire. C'est une ode à la lecture que je fais, mon activité préférée. Lire des avis différents, se faire sa propre opinion, continuer à développer l'esprit critique, lire aussi bien des livres, des romans, des essais, des biographies, un peu de poésie dans notre vie, et lire des médias indépendants. Je recommande un super livre qui est « Sauver l'information de l'emprise des milliardaires » d'Olivier Legrain et Vincent Hédin. C'est absolument « eye-opener » , comme on dit. On apprend beaucoup de choses. Questionner ce qu'on lit et ne pas prendre pour agent content sur toutes les opinions. Aujourd'hui, les opinions sont un peu annoncées comme des faits, ce qui n'est vraiment pas le cas. Et enfin, c'est être curieux, qualité principale numéro un, et humble devant le peu de choses que nous savons en final.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'on ne sait pas grand-chose. On a l'impression de beaucoup savoir parfois, mais pas du tout. curiosité lecture ça me va je coche les caches j'adore merci merci beaucoup on mettra les la référence du livre dans les notes de l'épisode je te prends un peu à brûle pourpoint là mais avant vraiment de rendre l'antenne ce

  • Speaker #3

    serait quoi ton dernier éclat de voix alors ce serait de prendre plaisir à la vie et il ya quelque chose que j'aime bien dire c'est que la vie est trop courte pour tirer la gueule

  • Speaker #0

    En tout cas, ce n'est pas ton cas. Merci, merci Anna d'avoir été là avec nous pour cet entretien passionnant. Les amis, vous savez qu'il faut absolument aller lire ce livre Sans Sommeil que vous retrouvez partout ?

  • Speaker #3

    Partout, oui. Donc, il est chez Ernst & Co dans les librairies. On peut le commander dans n'importe quelle librairie. Il est sur toutes les plateformes. Et en version digitale, il est à 3,99 euros. J'insiste sur le 99 parce que je suis belge.

  • Speaker #0

    Excellent. Merci, merci mille fois, ça a été un plaisir de partager ce moment avec toi Anna.

  • Speaker #3

    Merci Anne-Claire, tu m'as vraiment mise mal à l'aise, j'étais un peu stressée mais ça s'est super bien passé et je te trouve très accueillante et très prudente tout ce que tu fais, merci à toi.

  • Speaker #0

    Bon alors du coup tu étais plus mal à l'aise après.

  • Speaker #3

    Non, c'est génial. Venez, venez, elle est top.

  • Speaker #0

    Merci, à bientôt. « La vie est trop courte pour tirer la gueule » ,

  • Speaker #1

    nous a dit Anna. Alors quittons montres, applications et autres écrans qui nous épuisent et qui nous poussent constamment à optimiser notre existence au lieu de la vivre. Prenons le chemin inverse,

  • Speaker #0

    celui du papier plutôt que de l'écran, du corps qui s'étire au lieu de la performance qui stresse,

  • Speaker #1

    de la respiration profonde au lieu de la respiration superficielle, synonyme de stress, elle aussi. Et c'est exactement ce que je vous propose dans la retraite que je vous invite à venir vivre avec moi du 31 août au 6 septembre en Drôme-Provençal. La voix du corps, l'écho des mots à la ferme salade. Six jours pour désapprendre l'optimisation et réapprendre l'intuition, entre autres. Et puis, laisser aussi les mots couler comme ils viennent, retrouver une fluidité, une naturalité. Je crois que ça n'existe pas ce mot. Enfin bref, une façon de s'exprimer naturelle sans algorithme pour nous mesurer. Parce qu'au fond, Anna nous le montre bien. Si on veut faire bouger les choses, ça commence par soi, par une reconnexion profonde à soi-même et à ce que l'on a vraiment envie de proposer et de vivre dans ce monde-là, loin du bruit et près de l'essentiel. Vous retrouverez tous les détails sur mon site, je mettrai tous les liens. aussi dans la description de l'épisode. Et puis maintenant, vous allez éteindre votre montre et vous allez marcher sans compter vos pas.

  • Speaker #0

    Voilà.

  • Speaker #1

    Ah oui, non mais avant ça, avant ça, avant ça. Et d'ici notre prochain rendez-vous,

  • Speaker #0

    je vous souhaite des éclats de voix un peu dystopiques,

  • Speaker #1

    très romanesques et surtout plein d'espoir.

Description

Dans un monde où nos nuits deviennent des données exploitables, où la santé se vend en abonnement premium et où l’humain s’optimise à coups d’algorithmes, quelle place reste-t-il pour notre libre arbitre? Pour son premier roman “Sang Sommeil”, Anna Vassileva signe une dystopie glaçante, mais profondément humaine, transformant une angoisse personnelle en une critique sociétale.


Ancienne consultante en transformation digitale, elle utilise aujourd’hui l’écriture comme une prise de parole engagée, comme une sorte de résistance poétique face aux dérives de la technologie.


Dans cet épisode, il est question de notre complicité passive face à des systèmes que nous savons défaillants, de la perte de notre instinct corporel face à la quantification de soi, et de l’importance de reprendre le temps. De lire. D’écouter. De penser.

Anna nous invite à la curiosité, à questionner ce qui nous semble normal.

**************************************************************************

Retrouvez Anna: https://www.instagram.com/sangsommeil/ ou https://www.linkedin.com/in/anna-vassileva-autrice/

Références:

Épisodes à r(é)écouter:

39 - https://smartlink.ausha.co/eclatsdevoix/entre-journalisme-fiction-et-communication-la-plume-cameleon-de-jean-michel-gaudron

12- https://smartlink.ausha.co/eclatsdevoix/ev-12-qui-ecoutera-saura-avec-jean-michel-gaudron


🎧 Éclats de Voix, le podcast des prises de parole engagées. Abonnez-vous pour ne pas manquer les voix qui font résonner les idées, les colères et les espoirs d’aujourd’hui.

Merci de le soutenir en lui mettant des ⭐️ et en le partageant sans modération!

✨ Plus d'informations:

💻 Mon site: www.anneclairedelval.com

➡️ Échanger sur LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/anneclairedelval/ 

📝 Me rejoindre sur Instagram: https://www.instagram.com/anneclaire_delval/ 

**************************************************************************

Production et montage: Anne-Claire Delval, Jean-Michel Gaudron, Cyriaque Motro

Musique: Meydän

Titre:  Synthwave Vibe

Auteur: Meydän

Source: https://meydan.bandcamp.com

Licence: https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Éclat de voix débarre !

  • Speaker #1

    Le podcast des prises de paroles engagées qui transforme vos peurs en audace vocale. Je suis Anne-Claire Delval, ancienne journaliste, rédactrice, modératrice, facilitatrice de ces prises de paroles engagées. Et oui, j'ai envie de vous prouver que chaque voix compte, y compris la vôtre. Parce que dire « plutôt que terre reste mon mantra » , parce que Merci. votre message est attendu par tout le monde. Inspirez-vous des invités. Et d'ailleurs, puisque ce podcast va vous donner des ailes, mais montrez-le. Donnez-lui 5 étoiles, commentez-le, partagez-le, ensemble, libérons toutes ces voix qui n'osent pas encore.

  • Speaker #2

    Imaginez-vous en 2054, c'est dans 30 ans, l'hémisphère nord est frappé d'un mal terrible, une pandémie d'insomnie, dont l'issue ne peut être que la folie, puis la mort. Heureusement, une société technologique a inventé les somnibules, des casques permettant de générer et réguler le sommeil. Tout est bien qui finit bien alors ? Eh bien non, évidemment, car sous couverte à l'intérêt de la santé publique, l'utilisation faite de ces somnibules dépasse largement l'objectif premier. Et c'est toute une population qui se retrouve sous le contrôle d'un pouvoir quasi dictatorial pour lequel le sommeil est devenu une ressource précieuse au cœur d'enjeux technologiques et économiques. Pour s'élever contre ces dérives, Vanilla Acevan, une jeune scientifique renommée, va s'engager dans une lutte depuis l'intérieur du système pour sauver son fils, lui aussi atteint par la pandémie. Mais jusqu'où pourra-t-elle aller ? Aura-t-elle assez de force pour faire face aux découvertes toutes plus angoissantes les unes que les autres qui jalonnent son parcours ? Voilà résumé, Sans Sommeil, un roman très prenant et plein de suspense. Une dystopie certes, mais on ne peut s'empêcher de reconnaître certaines dérives déjà présentes dans notre quotidien. Ce récit nous entraîne en tous les cas dans une aventure haletante qu'on appelle... pas envie d'arrêter de lire avant d'être arrivé à la fin. Très documenté et très plausible, ce premier roman d'Anna Vasileva mérite assurément qu'on y consacre un podcast.

  • Speaker #1

    Vous l'avez reconnu cette voix ? Ah oui,

  • Speaker #0

    c'est celle de Jean-Michel Gaudron,

  • Speaker #1

    un autre écrivain luxembourgeois qui connaît bien Anna et qui a été par deux fois l'invité des Cladois dans les épisodes 12 et 39. Dans l'un, il nous a expliqué comment il donnait la parole à ses... personnages et dans le deuxième, les différents types d'écriture. Mais, mais, ils n'avaient pas abordé ce style particulier,

  • Speaker #0

    la dystopie. Alors la dystopie,

  • Speaker #1

    étymologiquement, ça signifie lieu mauvais et c'est en réalité l'antithèse de l'utopie. Elle est aujourd'hui présente non seulement en littérature, mais aussi, on va la retrouver dans le cinéma, aussi dans des jeux vidéo, dans la avant de dessiner. Et pour Laurent Bazin, qui est maître de conférences en littérature à l'université de Versailles Saint-Quentin, et qui avait été interrogé au micro de ZoomZoomZen de France Inter, l'idée de dystopie et de son contraire l'utopie remonte à la Renaissance, au moment où on va quitter un système purement théologique pour prendre son destin un peu plus en main à travers notamment le voyage. Et en 1920, c'est Egvini Zamiatin, désolé j'ai du mal à prononcer, qui a écrit Nous Autres, considéré, lui, comme le tout premier roman dystopique moderne. Et Laurent Bazin ajoute que la dystopie est là pour alerter que tout projet utopique met aussi en danger l'équilibre collectif. Alors dans Sans Sommeil, Anna Vassileva nous tend un vrai miroir. Et à travers cette dystopie technologique, si on peut dire ça comme ça, elle questionne à la fois nos choix, nos habitudes, mais surtout notre complicité face à un système qui nous dépasse. Alors bien sûr, écrire un roman comme celui-là, c'est aussi un acte d'espoir, une manière de reprendre la parole, d'ouvrir un dialogue sur ce qui nous échappe. Et c'est ce dont il va être question. Bonjour.

  • Speaker #0

    Salut Anna.

  • Speaker #3

    Salut Anne-Claire.

  • Speaker #0

    Alors, il faut remettre un petit peu de contexte pour nos auditeurs, mais notre rencontre a été quelque chose de magique il y a quelque temps, une vraie étincelle, comme si on se connaissait depuis toujours. Et puis, depuis, on ne se quitte plus,

  • Speaker #1

    notamment parce que ton livre est toujours sur ma table de chevet. Il est très gros.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de venir sur le podcast, Anna.

  • Speaker #3

    Merci à toi, je suis très émue, c'est mon premier podcast et je suis vraiment enchantée de le faire avec toi.

  • Speaker #0

    Oh, ça me réjouit, ça me fait plaisir et ça me flatte. Alors, pour expliquer un petit peu à nos auditeurs, tu avais au départ une carrière que d'aucuns qualifieraient de prestigieuse chez PWC et tu l'as quittée pour embrasser celle d'écrivaine. Alors, en quoi ? Pour toi, l'écriture finalement est devenue une forme d'engagement, puisque tu sais que c'est le sujet principal d'Éclat de Voix et qui me tient tant à cœur. Et en quoi tu as l'impression que cette forme d'engagement qu'est l'écriture fait maintenant plus de sens pour toi aujourd'hui ? Pourquoi ?

  • Speaker #3

    Alors moi, c'est vraiment un engagement d'un point de vue énergie, personnel. J'avais envie de me lever le matin avec la banane. Et de faire quelque chose qui me passionne. Ma passion première, c'est la lecture. Je lis plus de 150 livres par an. J'adore ça.

  • Speaker #0

    Waouh ! Tu mets le curseur bien haut. Waouh, 150.

  • Speaker #3

    Voilà, j'adore ça. Et l'écriture, j'écrivais certaines choses comme ça, mais vraiment pas un texte structuré. Et il y a eu cette idée obsédante et passionnante, en tout cas pour moi, et qui devait sortir. Donc, c'était vraiment, j'ai voulu faire quelque chose, un métier qui est aligné à ma passion.

  • Speaker #0

    Waouh ! Mais alors ? Tu commences fort parce que tu as choisi la dystopie. Alors tu dis que ce n'est pas par pessimisme mais par optimisme. J'aimerais bien savoir comment un genre littéraire aussi sombre peut être un acte d'espoir, tu nous dis ?

  • Speaker #3

    Oui, donc c'est la dystopie. Et avant une petite définition, ça fait partie de la science-fiction. Et c'est un genre littéraire qui est un récit pour mettre en valeur les dérives dans notre société, poussées à leur paroxysme. C'est une extrapolation à partir du réel. c'est de la fiction spéculative et le côté optimiste en fait il vient du fait que montrer les dérives possibles c'est croire qu'on peut ajuster agir pour que ça ne se réalise pas faire d'autres choix pour un futur différent

  • Speaker #0

    Merci beaucoup d'avoir posé ce cadre qui permet effectivement de répondre à la question et qui est très intéressant Dans ce roman Sans Sommeil tu en as profité ou tu l'as utilisé ? pour quelque part transformer une de tes angoisses personnelles dont tu parles, qui était une forme d'obsession de santé et de résultats qui était liée à cette fameuse montre connectée que plein de gens ont aujourd'hui. Tu l'as donc transformée, cette angoisse, en une critique sociétale. À ton avis, est-ce que cette expérience qui relève de l'intime peut vraiment nourrir une réflexion, voire même un engagement ? J'y reviens. qui serait plus de l'ordre du collectif.

  • Speaker #3

    Oui, je pense que toute expérience part d'abord de l'intime, et ça devient collectif quand il touche une corde universelle. Le culte de la performance, par exemple, l'obsession de la santé, la longévité, le bien-être, sont tous des sujets universels, et ils traitent finalement notre finitude, de nos angoisses les plus profondes.

  • Speaker #0

    Oui, c'est vrai.

  • Speaker #3

    Comme tu disais, c'est partie d'une angoisse personnelle, et j'ai voulu comprendre ce qui est en train de m'arriver, cette obsession un peu du bien-être. Et donc j'ai fait pendant six mois des recherches, beaucoup de lectures, des essais, des biographies, des articles scientifiques, pour voir si c'était quelque chose qui n'arrivait qu'à moi, ou alors est-ce que ça touchait d'autres personnes. Donc voilà, j'ai vraiment, je pense, l'universalité vient aussi de mes lectures et d'autres personnes qui ont écrit sur le sujet.

  • Speaker #0

    Ah oui, et tu t'es rendu compte que ce qui est finalement une sorte de th��rapie pour toi, elle le sera pour tout le monde parce qu'on est tous baignés dans le même... Dans le même jus finalement d'inquiétude par rapport à toutes ces questions.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Et surtout avec les lecteurs que j'ai de mon livre, les discussions que j'ai en ce moment, c'est vraiment ça. Beaucoup de gens me disent « mais j'ai exactement la même chose, un montre, elle me possède » . Enfin voilà, donc c'est vraiment des sujets très intéressants.

  • Speaker #1

    Je m'appelle Vanilla. Et j'ai 42 ans. Un bébé à notre époque d'humain augmenté, réparé, reconfiguré, amélioré. Lorsque la pandémie nous a frappés, j'avais 33 ans. Et Eli en avait 3. Pour pouvoir dormir, j'utilise un somnibule, un casque de sommeil fourni par Hypnos. Quand je dis « je » , il faut comprendre que les trois quarts de l'humanité dépendent de lui pour dormir. Ce n'est pas une option de le porter de temps en temps selon nos envies. Il est indispensable. pour pouvoir s'endormir et rester dans cet état pour la nuit. Sans lui, nous, les survivants, des années sans sommeil, aurions au mieux sombré dans la folie, au pire, vers une mort certaine. Jusqu'à récemment, j'étais considérée comme une chanceuse, ayant droit à 8 heures de sommeil réparateur chaque nuit. Tous les humains n'ont pas cette chance et ne bénéficient pas des mêmes privilèges en la matière. Le sommeil... est devenue une ressource précieuse, une monnaie, contrôlée par Hypnos, selon des quotas gérés par le ministère européen du sommet.

  • Speaker #0

    Dans ce roman, ton héroïne contribue à développer une technologie qu'elle va finir par questionner. Est-ce que ce n'est pas finalement ça, le dilemme de notre époque ? Parce que finalement, on se rend complice d'un système qui se développe. que certains dénoncent carrément et que beaucoup d'autres soupçonnent qu'il n'est pas si...

  • Speaker #3

    Si vertueux ?

  • Speaker #0

    Oui, si vertueux,

  • Speaker #3

    si fiable.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #3

    c'est vraiment une question difficile et je me dis, est-ce que nous ne sommes pas toujours complices par facilité, par manque de temps, par paresse intellectuelle, manque de curiosité, manque d'analyse, de comparaison, de prendre le temps de comparer les choses ? par recherche du plaisir immédiat, voilà donc beaucoup de choses. Et je me dis aussi qu'un de nos plus grands pouvoirs d'action réside dans le fait de notre choix de consommation, ou plutôt de ne pas consommer certaines choses. Et chacun participe grâce à ses choix, de façon plus ou moins grande, à tout ce qu'on fabrique et à tout ce qui arrive. Et de nouveau, rien n'est simple dans cette question, parce qu'il y a aussi des obsessions. qui peuvent se créer et qui peuvent naître. Arrêter parfois de consommer peut s'avérer très compliqué, notamment pour Meta, les grandes plateformes, ils ont des addictologues qui nous aident bien à être accros de leurs produits.

  • Speaker #0

    Ah oui, alors, redisons, reformulons ça, Meta a des addictologues dans ses équipes, ce qui est juste complètement incroyable quand on y réfléchit, mais qui nous permet aussi de nous sentir peut-être un petit peu moins coupables vis-à-vis de nos comportements, ou de se dire, mais non, je ne suis pas tout seul, tout le monde est concerné. Mais je me dis, les gens, en leur offrant mon livre, tu leur proposes une fenêtre, tu leur proposes d'aller voir au-delà, d'avoir, de commettre un acte de curiosité. Donc, la curiosité, elle peut venir aussi de choses, de rencontres, de choses simples.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Moi, j'encourage vraiment la curiosité, je pense que c'est une des meilleures qualités. C'est d'être curieux et de ne pas prendre pour argent comptant certaines choses. Mais de nouveau, c'est compliqué parce que même en lisant et en sachant ça, en sachant que les réseaux sociaux nous rendent addicts, ce n'est pas pour ça qu'on arrive forcément à s'en défaire.

  • Speaker #0

    À s'en défaire, oui, bien sûr.

  • Speaker #3

    Donc même en sachant, c'est compliqué.

  • Speaker #0

    Mais il y a cette notion de la conscience aussi, de savoir, c'est aussi avoir une conscience qui est plus musclée. Et muscler sa conscience, c'est aussi... se rendre compte qu'on peut faire toujours un petit pas en arrière, un petit pas pour avoir une vision un peu plus globale, pour prendre un peu de recul et de se dire « Ok, je suis dans ce système, j'y contribue d'une certaine manière, parce que c'est difficile de ne pas y contribuer,

  • Speaker #1

    mais jusqu'où je peux aller ?

  • Speaker #0

    Et si je faisais quelque chose différemment ? » On n'est pas obligé de faire des choses complètement dingues, mais on peut.

  • Speaker #3

    C'est la première étape, la prise de conscience.

  • Speaker #0

    C'est mon élan, je pense. Alors, j'ai entendu poser cette question un tantinet terrifiante. Et si le sommet devenait quelque chose qu'il fallait payer ? Alors, la question est angoissante, mais moi j'en ai une autre qui suit, encore plus angoissante. Et est-ce qu'il y aurait d'autres besoins fondamentaux qui risquent, d'après toi, d'être privatisés par la tech ?

  • Speaker #3

    Oui, alors notre attention l'est déjà, non ?

  • Speaker #0

    C'est vrai, oui, Thérèse.

  • Speaker #3

    Notre ennui aussi, on ne s'ennuie plus. Je dis toujours à mon fils, il me dit « Maman, je m'ennuie » et moi je lui dis « C'est génial, Loulou, ennuie-toi, c'est la meilleure chose qui puisse t'arriver » parce que c'est là aussi qu'on a la curiosité qui arrive dans ces moments d'ennui. J'avais remarqué aussi les rires et les cris des enfants dans les rues, on les entend beaucoup moins qu'avant, ils jouent moins.

  • Speaker #0

    Ils sont moins dehors.

  • Speaker #3

    Exactement, on voit marcher des ados dans la rue, ils sont sur leur téléphone en marchant. On peut imaginer la même chose pour l'air qu'on respire, imaginons qu'on doive payer pour respirer un air pur. Le silence, l'intimité, le droit de posséder son corps, on voit l'avortement aux Etats-Unis, ce qui est en train d'arriver. La lenteur, la paresse, la lecture, les promenades dans la nature, les arbres. Dans mon livre, je parle d'un musée des arbres, parce qu'il y a beaucoup moins d'arbres dans le monde que j'ai imaginé. Et dans ce musée, il faut payer pour voir des arbres encore vivants, une diversité d'arbres. Et en fait, je me dis que potentiellement, tout ce qui est gratuit et naturel peut être transformé en marchandise. Et ce n'est pas forcément la rareté qui crée la valeur, mais le fait d'être dépossédé de certaines choses. Quand on nous les retire, on peut nous faire payer pour quelque chose qu'on avait déjà.

  • Speaker #0

    C'est quand même... Schizophrène comme posture, mais tu as raison, quand on y regarde de plus près, c'est un peu quand même ce qui est en train de se passer. Et il y a quelques temps de ça, j'assistais à une conférence sur la nature, où ils expliquaient quelque chose, dire qu'il faut des études scientifiques pour le prouver, qu'un homme ou une femme, enfin un humain, est mieux quand il est en contact avec la nature. Bon, je simplifie volontairement. C'est ça,

  • Speaker #3

    on entend les oiseaux.

  • Speaker #0

    Mais voilà. Et je me dis, mais c'est peut-être un acte de rébellion qu'on peut avoir, nous, dès maintenant, de retourner dans cette nature, de nous reconnecter à ces choses qui sont simples et qui vont nous permettre justement de prendre de la hauteur sur le reste et de nous dire que c'est là qu'est l'essentiel, c'est là qu'est notre vie, et pas uniquement dans la tech ou dans les réseaux sociaux. Et dans ton roman, tu pousses le bouchon carrément un peu plus loin parce que la santé n'est plus un droit. C'est carrément devenu un produit qui a déjà un peu répondu préalablement, mais on voit cette dérive déjà dans notre société actuelle.

  • Speaker #3

    Oui, on voit clairement le basculement de la santé vers le domaine privé. Et quand ça se privatise, c'est un basculement vers le produit, les marchandises. Et mon roman pousse la logique jusqu'à l'extrême et s'appuie sur une réalité déjà tangible. Le glissement progressif de la santé du domaine du droit vers un produit marchand. Et on le voit avec plusieurs acteurs, la médecine, les assurances, les big tech, l'industrie pharmaceutique. Pour quelques exemples, on voit aux États-Unis, ce qui est déjà le cas pour les assurances. Ce sont les sociétés qui assurent les gens, ils pourront être en bonne santé, respecter certaines règles pour être bien assurés, pour ne pas payer une prime trop chère. On le voit avec la médecine, la médecine à la carte ou personnalisée. C'est un peu une médecine à deux vitesses. Il y a la médecine curative pour le plus grand nombre, et heureusement. Et puis il y a la médecine préventive et prédictive pour les autres.

  • Speaker #0

    Alors, ça aussi, c'est quand même fou parce que tu te dis, la médecine telle qu'elle existe aujourd'hui a des failles, comme tout système, comme toute chose. C'est tout à fait naturel, rien n'est parfait. Et au lieu d'aller repuiser dans des connaissances ancestrales, de s'appuyer sur... des approches plus holistiques, on a tendance à les mettre, je trouve, de côté en se disant « Oh oui, on parle de médecine parallèle ou de médecine douce » comme s'il y avait une sorte de classement, que c'était inférieur, alors que ça a aussi ses vertus, ça a aussi son approche qui est beaucoup plus, là encore, connectée au vivant dans son ensemble. mais ça C'est de plus en plus, et tu viens de le dire, réservé à une minorité parce qu'il faut payer pour des choses qui nous maintiennent en bonne santé. C'est fou.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. De toute façon, on voit clairement l'orientation des big tech vers le domaine de la santé. Il y a clairement un besoin, justement, d'avoir tout réuni en un seul endroit, avoir une médecine holistique. Et il y a des players qui se mettent vraiment dans... Dans ce chemin-là ?

  • Speaker #0

    Sur ce chemin, oui, c'est exact. Tu décris comment tu as commencé à voir ton corps non plus comme quelque chose avec lequel vivre, mais comme quelque chose à optimiser. Ce mot optimiser, performer aussi, une déshumanisation en quelque sorte. Comment elle s'opère concrètement ?

  • Speaker #3

    C'est terrible. En fait, ça a commencé, je dirais, avec ma montre connectée. pendant le que vide mon chéri mais en faire une montre connectée parce que je voulais me remettre au sport on était enfermé donc c'était vraiment voilà j'avais besoin de bouger et donc je me suis dit on ne peut améliorer que ce qu'on peut mesurer et voilà j'aime bien l'année J'ai commencé à m'améliorer aussi bien physiquement que mentalement. C'est un peu ma personnalité. Et donc avec cette montre, j'ai commencé à me mesurer. J'ai commencé à me sentir coupable de ne pas faire mes 10 000 pas par jour. J'ai commencé à regarder mon fitness age. Je vois que tu n'as pas de montre, mais tant mieux. Elle te donne ton fitness age. Donc au plus tu fais du sport, au plus ton fitness age diminue, donc ton âge biologique, entre guillemets, tu as ton âge chronologique et biologique. Et donc je suis arrivée dans une obsession de diminuer un maximum mon fitness age. Et par exemple, c'était tellement... C'est là que j'ai posé des questions parce que j'ai eu un limbago. Et je me suis dit, ma première pensée, c'était pas mince. Comment guérir mon dos ? Que faire pour ça ? C'était mince, je vais pas pouvoir faire du sport. C'est horrible, mon fitness age va augmenter. Non mais c'est terrible. Et donc on se met au final, c'est totalement un contresens parce que quelque chose, on est censé être dans le bien-être. Et en fait, c'est quelque chose qui commence à nous posséder et à devenir obsessionnel.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on n'est plus dans le bien-être, on est dans le bien-être contrôlé.

  • Speaker #3

    Contrôlé, voilà. Performance, mesurée, s'améliorer constamment, voilà, c'était vraiment ça. Et c'est ça que j'ai cherché à comprendre et à mettre en avant dans mon livre, qui est un peu une société focalisée autour de la santé, une santé obligatoire.

  • Speaker #0

    Une santé obligatoire et qui devient complètement délirante à certains moments, parce que tu cites, ou tu as déjà mentionné plusieurs fois Brian Johnson, qui est un homme qui investit, attention, 2 millions par an pour redevenir jeune. C'est incroyable ce truc. Alors, cette obsession de l'optimisation de soi par rapport à notre humanité et notre finitude, qu'est-ce que ça révèle ? Parce que comme le disait Patricia Ferrand dans l'épisode 49, je peux le citer parce qu'il est récent le chiffre, sinon j'oublie. d'éclats de voix qu'on avait consacré au deuil, elle nous disait justement « Mais notre seul projet commun à tous sur cette planète, que nous soyons dans telle ou telle société, que nous ayons telle ou telle culture, c'est que nous sommes finis, que nous allons mourir. » Donc là, il y a quelque chose qui est complètement nié presque.

  • Speaker #3

    Ah oui, c'est totalement dingue. Justement, Brian Johnson, l'homme le plus mesuré au monde...

  • Speaker #0

    Ah, tu as un concurrent.

  • Speaker #3

    Oui ! Ça fait que je n'ai que ma montre. Ah non, mais il mesure l'âge de tous ses organes. Donc, de son cœur, de son cerveau, de ses poumons, même de son pénis. Il mesure tout et il veut diminuer l'âge biologique de tous ses organes. C'est complètement dingue. Et par rapport à la finitude, moi, je trouve que c'est vraiment... Ça va dans des extrêmes parce qu'on se déconnecte, au final, du plaisir. Pour moi, la vie, ça doit être le plaisir. C'est ça qui est génial. Et de nouveau pour revenir à Brian Johnson, lui tous les matins au petit-déj il ne mange qu'une fois par jour avec plein de médicaments. Et pendant qu'il mange son petit-déj, il s'entraîne à sa souplesse et il fait des grands écarts. Donc je me dis, un des grands plaisirs de la vie c'est manger, non ? Donc super, son cœur il est sans doute plus jeune que le mien, mais voilà, moi en tout cas je prends plaisir à manger.

  • Speaker #0

    Non mais on se dit qu'il finira dans une boîte anyway, donc bon, avec un cœur peut-être plus jeune que le tien. J'imagine la scène. Un film. Il aurait pu être dans ton roman, ce gars-là.

  • Speaker #3

    Ah, mais je m'en suis inspirée. J'avais oublié, justement. Je m'en suis inspirée pour Mon vilain. Cette quête, cette obsession, le transhumanisme. Voilà. Donc, Mon vilain, j'ai pris certaines choses de Brian Johnson.

  • Speaker #0

    Allez lire, allez lire. Je ne saurais que vous le répétez et vous inciter à le faire. Alors, justement, dans ce monde où l'IA, puisqu'on parle d'elle, commence à pouvoir détecter des maladies avant même les symptômes, je me dis, mais est-ce qu'on n'est pas en passe de perdre ce rapport instinctif, intime, intuitif aussi, d'intuition à notre propre corps ? Est-ce qu'on est... Aujourd'hui, moi, je me pose la question, est-ce qu'on est vraiment prêt à déléguer tous ces pouvoirs à des machines ? Au final, quels bénéfices on va vraiment en tirer ? Sans compter que... Il faut être honnête, les machines, pas plus que les humains, aujourd'hui ne sont fiables à 100%, parce qu'on n'est pas tous des robots, on n'est pas tous clonés, donc on n'est pas systématiquement identiques. Je veux dire, nos ADN sont différents, à l'intérieur de nous...

  • Speaker #1

    Si on regarde une forêt,

  • Speaker #0

    il n'y a pas deux arbres qui sont strictement les mêmes. Donc c'est pareil pour les humains. Les machines, elles, par contre, ce sont les mêmes. Donc il y a une sorte, pour moi, de décalage entre les deux. Mais ce qui m'inquiète, c'est comment est-ce qu'on... peut vouloir, à ce point, nous remettre entre les mains d'un robot.

  • Speaker #3

    C'est dingue parce que ta question, ça m'est vraiment arrivé. Je vais commencer par un exemple, c'est le score de sommeil de ma montre connectée. Donc les matins, je ne le fais plus, j'ai appris la leçon, mais les matins en me levant, je regardais mon score sommeil et j'ai remarqué que je me levais par exemple pleine d'énergie et je regardais ensuite mon score sommeil qui était de 23%, donc tout pourri.

  • Speaker #0

    Révélation, le score sommeil d'Anna est pourri.

  • Speaker #3

    Mais oui, et je me dis, mais comme tu dis, c'est des moyennes, Donc... Donc, par rapport à la moyenne qui dort super bien, moi, j'étais à 23 %, donc nulle. Et donc, ça me mettait le moral dans les chaussettes alors que je me sentais pleine d'énergie. Et je me dis, mais c'est quand même ridicule. Là, je me sens pleine d'énergie, en forme et un score parce que la montre a dit que j'ai mal dormi. Moral dans les chaussettes. Donc, du coup, elle avait raison. C'est un peu une prédiction autoréalisatrice. Donc, voilà, tout à fait. On perd un peu la notion de s'écouter. mais oui il y a des bénéfices immenses de certaines technologies, de détecter plus tôt, de sauver des vies, d'anticiper des crises. Mais il faut garder le droit de ne pas tout savoir et surtout de ressentir plutôt que de mesurer, d'être à l'écoute de son corps au final et de rester propriétaire de nos corps.

  • Speaker #0

    Ça, j'aime bien, le droit de ne pas tout savoir. Parce que finalement, pour l'instant, nos cerveaux ont beau être ultra puissants, nos ordinateurs aussi, même plus que peut-être un jour nos cerveaux, je ne sais pas ça. mais en tous les cas une chose est certaine c'est que le miracle de la vie personne pour l'instant n'a la clé tout à fait alors les l'écriture comme forme de résistance tu dis que tu as écrit les premières lignes de ton roman à la main la nuit loin de tout écran donc est-ce que tu avais ta montre pendant ces moments là C'est pour ça que tu avais un score de 23%. Si tu écris la nuit, forcément, tu as 23% à l'arrivée. Excuse-moi.

  • Speaker #3

    Non, alors bon. Mon livre s'appelle Sans Sommeil. Je suis un petit peu insomniaque. Donc, c'est aussi un espace de créativité. Mais donc, cette nuit-là, c'est plutôt... J'ai fait ça sur papier et dans un carnet. C'est plutôt une hygiène de vie. Donc, je dors avec ma montre, mais mon téléphone ne rentre pas dans la chambre le soir. Voilà.

  • Speaker #0

    Donc, c'est un petit peu... En faisant ça, c'est une sorte de rébellion, d'acte de résistance d'écrire à la main par rapport à la technologie ou c'était juste comme ça ?

  • Speaker #3

    J'adore les cahiers, les crayons, j'adore écrire, faire des petits dessins. Et de nouveau, ce n'est pas possible d'avoir un écran à côté de moi la nuit. Imagine, j'ouvre un écran bleu. Non, non, c'est vraiment, j'ai mon cahier parce que j'aime bien me souvenir de mes rêves aussi. Donc, je note mes rêves pendant mes insomnies. Voilà, un petit carnet.

  • Speaker #0

    Alors, est-ce que cette fiction dans laquelle tu as choisi de t'installer, t'a permis de dire des vérités ? Un essai, par exemple, ou bien un rapport de consultant comme tu étais avant, ça t'aurait permis de l'exprimer ?

  • Speaker #3

    Le roman, en fait, je trouve qu'il touche beaucoup plus un public plus large. L'essai, c'est quelque chose un peu pour démontrer, c'est beaucoup plus factuel. Le roman laisse de la place à justement la curiosité, à poser des questions. Moi, ce que j'ai voulu, c'est poser des problématiques, pas pour donner des solutions, mais pour qu'on puisse se questionner, laisser des montres. Le consultant clarifie, il donne des chiffres, il oriente. Alors que moi, je voulais peut-être un petit peu troubler, faire bouger quelques lignes, en tout cas, faire se poser des questions.

  • Speaker #0

    C'est une bonne chose. Et ma question était évidemment un petit peu... provocatrice parce que bien évidemment un roman n'a rien à voir avec un rapport de consultant mais c'était juste pour dire que malgré tout un rapport ça donne une certaine lecture du monde oui à des gens et j'étais entendu cité octavia butler qui dit de point ouvre les guillemets l'acte même d'essayer de regarder vers l'avenir pour discerner les possibilités et offrir des avertissements est est en soi Un acte d'espoir. Fermez les guillemets. Est-ce que, si on pousse le bouchon encore un petit peu plus loin, tu dirais que cette écriture dystopique que tu as choisie pourrait être considérée comme une forme d'acte politique ?

  • Speaker #3

    Alors, non, je ne dirais pas que c'est un acte politique. Ce que je fais, comme je disais un petit peu avant, c'est poser des questions et explorer des possibles. Me poser la question « et si ? » « Et si ? » J'adore. C'est un livre génial. « Et si ? » de Jean-Michel Ausha. Non mais j'adore, c'est une question vraiment géniale, ça permet d'imaginer et je ne veux pas te donner de solutions ni de leçons. Ce que je veux c'est vraiment d'ouvrir un espace de réflexion, de suicider. des interrogations et de porter un regard attentif sur notre époque en fait. Et comme disait Octavia justement, c'est vraiment un acte d'espoir de tenter de voir ce qui peut arriver et de mieux le comprendre pour que ça n'arrive pas.

  • Speaker #0

    Alors pour que ça n'arrive pas, tu dis construisons non pas ce qui est possible mais ce qui est humain. Qu'est-ce que toi tu proposerais aux acteurs de la tech pour que ça n'arrive pas ?

  • Speaker #3

    Alors je dirais de recentrer les... Les technologies et les innovations sur les besoins réels des personnes. Il y a beaucoup d'innovations célèbres, par exemple l'iPhone, la réalité virtuelle ou les réseaux sociaux, qui ont été inventés pas par un besoin. Franchement, on n'a pas besoin d'iPhone, non ? Ou les réseaux sociaux.

  • Speaker #0

    Non, pas du tout.

  • Speaker #3

    Ça ne vient pas du tout d'un besoin, ça vient d'un génie qui a une idée. Et donc le monde s'est adapté à une technologie. On a tous été dans la même direction d'un génie un peu fou. Au lieu d'écouter vraiment nos besoins et les choses importantes, donc ça pose un problème parce qu'on peut créer des fois des objets et des services avant même de s'interroger sur l'impact humain, social et éthique. Je pense que la régulation a beaucoup à jouer là-dedans. Je sais qu'on dit que l'Europe c'est un peu vieux jeu parce qu'on essaie de tout réguler, mais au final dans ce monde contrôlé de plus en plus par l'intelligence artificielle, je pense que c'est la bonne direction à prendre.

  • Speaker #0

    La bonne démarche à avoir, oui. Alors toi, tu as une particularité quand même, c'est que tu as vécu une forme de passage de la transformation digitale à l'écriture, dans un premier temps, dystopique, et ça te donne finalement une perspective unique. En partant de là, est-ce que tu crois qu'on peut imaginer une tech qui soit plus humaine et aussi potentiellement plus écologiquement soutenable ?

  • Speaker #3

    Oui, je pense que c'est possible, à condition de renoncer à la vitesse et à la nouveauté comme valeur suprême, et aussi à la consommation. Malheureusement, la plupart des intérêts sont driveés par l'argent. Et donc, c'est un peu ça qui définit les technologies. Et le fait qu'on nous mette entre les mains des choses finalement pas très utiles et qui peuvent nous rendre accros. Et en ce sens, mon parcours me fait voir que la tech, ne doit pas être une fin en soi, mais un moyen. Ça doit vraiment être un outil et pas quelque chose qui nous contrôle et est néfaste pour nous.

  • Speaker #0

    Ce que j'entends en filigrane, c'est que c'est même pas le problème de la tech, c'est encore et toujours le problème de l'argent.

  • Speaker #3

    Oui, je pense que c'est un bon résumé.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu espères que ton roman transforme le regard des lecteurs sur leur propre rapport à la technologie ?

  • Speaker #3

    Alors, je ne cherche pas à convaincre, mais si le lecteur, après avoir lu mon roman, se pose une question qu'il ne s'était jamais posée, alors c'est génial. C'est la prise de conscience que je trouve super. Et s'il découvre de nouvelles choses, si ça l'aide à être plus curieux sur certaines thématiques, c'est parfait.

  • Speaker #0

    Donc, allez-y, ouvrez le livre pour être curieux et avoir vous poser de bonnes questions. Qu'est-ce qui serait pour toi le succès de ce qui se révèle aujourd'hui être une forme de prise de parole qui est la tienne avec ce premier roman ? Ce serait de l'ordre de, je ne sais pas, voyons large, grand, changer les comportements individuels, voire influencer les politiques publiques, même si on l'a bien entendu tout à l'heure, tu nous as dit que ce n'était pas un acte politique pour toi d'écrire.

  • Speaker #3

    Eh bien mon envie première, c'est que le lecteur passe un bon moment, qu'il se déconnecte. qui prennent le temps, de la lenteur, de la lecture, qui rient, qui apprennent des choses et que, comme je disais, qu'ils puissent se poser des questions qu'ils ne s'étaient jamais posées avant. Et j'ai eu deux remarques de deux lecteurs qui m'ont énormément touchée. C'est de Sarah et Dany. Ils m'ont dit que grâce à mon roman, ils s'étaient remis à la lecture.

  • Speaker #0

    C'est incroyable.

  • Speaker #3

    J'ai trouvé ça incroyable parce que c'est mon activité préférée. Le fait que deux personnes lisent plus maintenant grâce au fait d'avoir lu mon roman, c'est incroyable.

  • Speaker #0

    Ah, ça fait des frissons ! Oui, c'est génial ! Alors, pour continuer dans cette dynamique, est-ce qu'après Sans Sommeil, tu comptes continuer à utiliser la fiction comme outil de, je mets des guillemets, d'énonciation ? Parce que je pense que tu vas me dire que ce n'est pas vraiment ça, mais est-ce qu'il y a d'autres sujets qui t'interpellent pour ça ?

  • Speaker #3

    Oui, alors, beaucoup de sujets m'interpellent. Les inégalités, les injustices, la technologie, l'obsession de la santé. J'aime bien explorer de nouvelles formes, j'aime pas les cases, j'aime pas être mise dans une case. Donc voilà, j'ai envie d'explorer quelque chose d'autre que la fiction. En tout cas, la dystopie, j'avais une idée d'écrire un roman sur les robots et la fin du monde, qui est un peu un classique des dystopies. Et là, je m'oriente plus vers une biographie d'une personne décédée qui me passionne. Voilà, donc j'aimerais commencer en septembre et faire autre chose, mais toujours dans l'écriture.

  • Speaker #0

    Wow ! Donc, on sait qu'il y aura potentiellement plus tard un roman pour en revenir avec les robots, la fin du monde et l'attendant. Ah ah, la biographie mystère. Mystère. Ouah, j'adore.

  • Speaker #3

    Et il pourrait y avoir une suite à Sans Sommeil. Ah ! J'ai beaucoup de demandes de lecteurs qui aimeraient justement une suite. Tu me diras ce que tu en penses.

  • Speaker #0

    C'est fou parce que souvent les écrivains disent ça, que les gens ont envie, une fois qu'ils sont plongés dans leur univers, de poursuivre un peu. C'est un goût de trop peu, on a envie d'aller encore plus loin.

  • Speaker #3

    Et quel commentaire !

  • Speaker #0

    C'est génial. Alors, pour conclure cet épisode, j'avais envie de te demander, mais comment est-ce que tu aimerais qu'à leur tour, nos auditrices, nos auditeurs s'engagent, puisque encore une fois, c'est le concept favori d'Éclat de Voix, sur ces sujets qui sont brûlants, voire clivants parfois, il faut bien l'admettre, et quel premier pas tu leur suggérerais ?

  • Speaker #3

    Alors, breaking news ! Alors, ça serait lire, lire, lire. C'est une ode à la lecture que je fais, mon activité préférée. Lire des avis différents, se faire sa propre opinion, continuer à développer l'esprit critique, lire aussi bien des livres, des romans, des essais, des biographies, un peu de poésie dans notre vie, et lire des médias indépendants. Je recommande un super livre qui est « Sauver l'information de l'emprise des milliardaires » d'Olivier Legrain et Vincent Hédin. C'est absolument « eye-opener » , comme on dit. On apprend beaucoup de choses. Questionner ce qu'on lit et ne pas prendre pour agent content sur toutes les opinions. Aujourd'hui, les opinions sont un peu annoncées comme des faits, ce qui n'est vraiment pas le cas. Et enfin, c'est être curieux, qualité principale numéro un, et humble devant le peu de choses que nous savons en final.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'on ne sait pas grand-chose. On a l'impression de beaucoup savoir parfois, mais pas du tout. curiosité lecture ça me va je coche les caches j'adore merci merci beaucoup on mettra les la référence du livre dans les notes de l'épisode je te prends un peu à brûle pourpoint là mais avant vraiment de rendre l'antenne ce

  • Speaker #3

    serait quoi ton dernier éclat de voix alors ce serait de prendre plaisir à la vie et il ya quelque chose que j'aime bien dire c'est que la vie est trop courte pour tirer la gueule

  • Speaker #0

    En tout cas, ce n'est pas ton cas. Merci, merci Anna d'avoir été là avec nous pour cet entretien passionnant. Les amis, vous savez qu'il faut absolument aller lire ce livre Sans Sommeil que vous retrouvez partout ?

  • Speaker #3

    Partout, oui. Donc, il est chez Ernst & Co dans les librairies. On peut le commander dans n'importe quelle librairie. Il est sur toutes les plateformes. Et en version digitale, il est à 3,99 euros. J'insiste sur le 99 parce que je suis belge.

  • Speaker #0

    Excellent. Merci, merci mille fois, ça a été un plaisir de partager ce moment avec toi Anna.

  • Speaker #3

    Merci Anne-Claire, tu m'as vraiment mise mal à l'aise, j'étais un peu stressée mais ça s'est super bien passé et je te trouve très accueillante et très prudente tout ce que tu fais, merci à toi.

  • Speaker #0

    Bon alors du coup tu étais plus mal à l'aise après.

  • Speaker #3

    Non, c'est génial. Venez, venez, elle est top.

  • Speaker #0

    Merci, à bientôt. « La vie est trop courte pour tirer la gueule » ,

  • Speaker #1

    nous a dit Anna. Alors quittons montres, applications et autres écrans qui nous épuisent et qui nous poussent constamment à optimiser notre existence au lieu de la vivre. Prenons le chemin inverse,

  • Speaker #0

    celui du papier plutôt que de l'écran, du corps qui s'étire au lieu de la performance qui stresse,

  • Speaker #1

    de la respiration profonde au lieu de la respiration superficielle, synonyme de stress, elle aussi. Et c'est exactement ce que je vous propose dans la retraite que je vous invite à venir vivre avec moi du 31 août au 6 septembre en Drôme-Provençal. La voix du corps, l'écho des mots à la ferme salade. Six jours pour désapprendre l'optimisation et réapprendre l'intuition, entre autres. Et puis, laisser aussi les mots couler comme ils viennent, retrouver une fluidité, une naturalité. Je crois que ça n'existe pas ce mot. Enfin bref, une façon de s'exprimer naturelle sans algorithme pour nous mesurer. Parce qu'au fond, Anna nous le montre bien. Si on veut faire bouger les choses, ça commence par soi, par une reconnexion profonde à soi-même et à ce que l'on a vraiment envie de proposer et de vivre dans ce monde-là, loin du bruit et près de l'essentiel. Vous retrouverez tous les détails sur mon site, je mettrai tous les liens. aussi dans la description de l'épisode. Et puis maintenant, vous allez éteindre votre montre et vous allez marcher sans compter vos pas.

  • Speaker #0

    Voilà.

  • Speaker #1

    Ah oui, non mais avant ça, avant ça, avant ça. Et d'ici notre prochain rendez-vous,

  • Speaker #0

    je vous souhaite des éclats de voix un peu dystopiques,

  • Speaker #1

    très romanesques et surtout plein d'espoir.

Share

Embed

You may also like

Description

Dans un monde où nos nuits deviennent des données exploitables, où la santé se vend en abonnement premium et où l’humain s’optimise à coups d’algorithmes, quelle place reste-t-il pour notre libre arbitre? Pour son premier roman “Sang Sommeil”, Anna Vassileva signe une dystopie glaçante, mais profondément humaine, transformant une angoisse personnelle en une critique sociétale.


Ancienne consultante en transformation digitale, elle utilise aujourd’hui l’écriture comme une prise de parole engagée, comme une sorte de résistance poétique face aux dérives de la technologie.


Dans cet épisode, il est question de notre complicité passive face à des systèmes que nous savons défaillants, de la perte de notre instinct corporel face à la quantification de soi, et de l’importance de reprendre le temps. De lire. D’écouter. De penser.

Anna nous invite à la curiosité, à questionner ce qui nous semble normal.

**************************************************************************

Retrouvez Anna: https://www.instagram.com/sangsommeil/ ou https://www.linkedin.com/in/anna-vassileva-autrice/

Références:

Épisodes à r(é)écouter:

39 - https://smartlink.ausha.co/eclatsdevoix/entre-journalisme-fiction-et-communication-la-plume-cameleon-de-jean-michel-gaudron

12- https://smartlink.ausha.co/eclatsdevoix/ev-12-qui-ecoutera-saura-avec-jean-michel-gaudron


🎧 Éclats de Voix, le podcast des prises de parole engagées. Abonnez-vous pour ne pas manquer les voix qui font résonner les idées, les colères et les espoirs d’aujourd’hui.

Merci de le soutenir en lui mettant des ⭐️ et en le partageant sans modération!

✨ Plus d'informations:

💻 Mon site: www.anneclairedelval.com

➡️ Échanger sur LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/anneclairedelval/ 

📝 Me rejoindre sur Instagram: https://www.instagram.com/anneclaire_delval/ 

**************************************************************************

Production et montage: Anne-Claire Delval, Jean-Michel Gaudron, Cyriaque Motro

Musique: Meydän

Titre:  Synthwave Vibe

Auteur: Meydän

Source: https://meydan.bandcamp.com

Licence: https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Éclat de voix débarre !

  • Speaker #1

    Le podcast des prises de paroles engagées qui transforme vos peurs en audace vocale. Je suis Anne-Claire Delval, ancienne journaliste, rédactrice, modératrice, facilitatrice de ces prises de paroles engagées. Et oui, j'ai envie de vous prouver que chaque voix compte, y compris la vôtre. Parce que dire « plutôt que terre reste mon mantra » , parce que Merci. votre message est attendu par tout le monde. Inspirez-vous des invités. Et d'ailleurs, puisque ce podcast va vous donner des ailes, mais montrez-le. Donnez-lui 5 étoiles, commentez-le, partagez-le, ensemble, libérons toutes ces voix qui n'osent pas encore.

  • Speaker #2

    Imaginez-vous en 2054, c'est dans 30 ans, l'hémisphère nord est frappé d'un mal terrible, une pandémie d'insomnie, dont l'issue ne peut être que la folie, puis la mort. Heureusement, une société technologique a inventé les somnibules, des casques permettant de générer et réguler le sommeil. Tout est bien qui finit bien alors ? Eh bien non, évidemment, car sous couverte à l'intérêt de la santé publique, l'utilisation faite de ces somnibules dépasse largement l'objectif premier. Et c'est toute une population qui se retrouve sous le contrôle d'un pouvoir quasi dictatorial pour lequel le sommeil est devenu une ressource précieuse au cœur d'enjeux technologiques et économiques. Pour s'élever contre ces dérives, Vanilla Acevan, une jeune scientifique renommée, va s'engager dans une lutte depuis l'intérieur du système pour sauver son fils, lui aussi atteint par la pandémie. Mais jusqu'où pourra-t-elle aller ? Aura-t-elle assez de force pour faire face aux découvertes toutes plus angoissantes les unes que les autres qui jalonnent son parcours ? Voilà résumé, Sans Sommeil, un roman très prenant et plein de suspense. Une dystopie certes, mais on ne peut s'empêcher de reconnaître certaines dérives déjà présentes dans notre quotidien. Ce récit nous entraîne en tous les cas dans une aventure haletante qu'on appelle... pas envie d'arrêter de lire avant d'être arrivé à la fin. Très documenté et très plausible, ce premier roman d'Anna Vasileva mérite assurément qu'on y consacre un podcast.

  • Speaker #1

    Vous l'avez reconnu cette voix ? Ah oui,

  • Speaker #0

    c'est celle de Jean-Michel Gaudron,

  • Speaker #1

    un autre écrivain luxembourgeois qui connaît bien Anna et qui a été par deux fois l'invité des Cladois dans les épisodes 12 et 39. Dans l'un, il nous a expliqué comment il donnait la parole à ses... personnages et dans le deuxième, les différents types d'écriture. Mais, mais, ils n'avaient pas abordé ce style particulier,

  • Speaker #0

    la dystopie. Alors la dystopie,

  • Speaker #1

    étymologiquement, ça signifie lieu mauvais et c'est en réalité l'antithèse de l'utopie. Elle est aujourd'hui présente non seulement en littérature, mais aussi, on va la retrouver dans le cinéma, aussi dans des jeux vidéo, dans la avant de dessiner. Et pour Laurent Bazin, qui est maître de conférences en littérature à l'université de Versailles Saint-Quentin, et qui avait été interrogé au micro de ZoomZoomZen de France Inter, l'idée de dystopie et de son contraire l'utopie remonte à la Renaissance, au moment où on va quitter un système purement théologique pour prendre son destin un peu plus en main à travers notamment le voyage. Et en 1920, c'est Egvini Zamiatin, désolé j'ai du mal à prononcer, qui a écrit Nous Autres, considéré, lui, comme le tout premier roman dystopique moderne. Et Laurent Bazin ajoute que la dystopie est là pour alerter que tout projet utopique met aussi en danger l'équilibre collectif. Alors dans Sans Sommeil, Anna Vassileva nous tend un vrai miroir. Et à travers cette dystopie technologique, si on peut dire ça comme ça, elle questionne à la fois nos choix, nos habitudes, mais surtout notre complicité face à un système qui nous dépasse. Alors bien sûr, écrire un roman comme celui-là, c'est aussi un acte d'espoir, une manière de reprendre la parole, d'ouvrir un dialogue sur ce qui nous échappe. Et c'est ce dont il va être question. Bonjour.

  • Speaker #0

    Salut Anna.

  • Speaker #3

    Salut Anne-Claire.

  • Speaker #0

    Alors, il faut remettre un petit peu de contexte pour nos auditeurs, mais notre rencontre a été quelque chose de magique il y a quelque temps, une vraie étincelle, comme si on se connaissait depuis toujours. Et puis, depuis, on ne se quitte plus,

  • Speaker #1

    notamment parce que ton livre est toujours sur ma table de chevet. Il est très gros.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de venir sur le podcast, Anna.

  • Speaker #3

    Merci à toi, je suis très émue, c'est mon premier podcast et je suis vraiment enchantée de le faire avec toi.

  • Speaker #0

    Oh, ça me réjouit, ça me fait plaisir et ça me flatte. Alors, pour expliquer un petit peu à nos auditeurs, tu avais au départ une carrière que d'aucuns qualifieraient de prestigieuse chez PWC et tu l'as quittée pour embrasser celle d'écrivaine. Alors, en quoi ? Pour toi, l'écriture finalement est devenue une forme d'engagement, puisque tu sais que c'est le sujet principal d'Éclat de Voix et qui me tient tant à cœur. Et en quoi tu as l'impression que cette forme d'engagement qu'est l'écriture fait maintenant plus de sens pour toi aujourd'hui ? Pourquoi ?

  • Speaker #3

    Alors moi, c'est vraiment un engagement d'un point de vue énergie, personnel. J'avais envie de me lever le matin avec la banane. Et de faire quelque chose qui me passionne. Ma passion première, c'est la lecture. Je lis plus de 150 livres par an. J'adore ça.

  • Speaker #0

    Waouh ! Tu mets le curseur bien haut. Waouh, 150.

  • Speaker #3

    Voilà, j'adore ça. Et l'écriture, j'écrivais certaines choses comme ça, mais vraiment pas un texte structuré. Et il y a eu cette idée obsédante et passionnante, en tout cas pour moi, et qui devait sortir. Donc, c'était vraiment, j'ai voulu faire quelque chose, un métier qui est aligné à ma passion.

  • Speaker #0

    Waouh ! Mais alors ? Tu commences fort parce que tu as choisi la dystopie. Alors tu dis que ce n'est pas par pessimisme mais par optimisme. J'aimerais bien savoir comment un genre littéraire aussi sombre peut être un acte d'espoir, tu nous dis ?

  • Speaker #3

    Oui, donc c'est la dystopie. Et avant une petite définition, ça fait partie de la science-fiction. Et c'est un genre littéraire qui est un récit pour mettre en valeur les dérives dans notre société, poussées à leur paroxysme. C'est une extrapolation à partir du réel. c'est de la fiction spéculative et le côté optimiste en fait il vient du fait que montrer les dérives possibles c'est croire qu'on peut ajuster agir pour que ça ne se réalise pas faire d'autres choix pour un futur différent

  • Speaker #0

    Merci beaucoup d'avoir posé ce cadre qui permet effectivement de répondre à la question et qui est très intéressant Dans ce roman Sans Sommeil tu en as profité ou tu l'as utilisé ? pour quelque part transformer une de tes angoisses personnelles dont tu parles, qui était une forme d'obsession de santé et de résultats qui était liée à cette fameuse montre connectée que plein de gens ont aujourd'hui. Tu l'as donc transformée, cette angoisse, en une critique sociétale. À ton avis, est-ce que cette expérience qui relève de l'intime peut vraiment nourrir une réflexion, voire même un engagement ? J'y reviens. qui serait plus de l'ordre du collectif.

  • Speaker #3

    Oui, je pense que toute expérience part d'abord de l'intime, et ça devient collectif quand il touche une corde universelle. Le culte de la performance, par exemple, l'obsession de la santé, la longévité, le bien-être, sont tous des sujets universels, et ils traitent finalement notre finitude, de nos angoisses les plus profondes.

  • Speaker #0

    Oui, c'est vrai.

  • Speaker #3

    Comme tu disais, c'est partie d'une angoisse personnelle, et j'ai voulu comprendre ce qui est en train de m'arriver, cette obsession un peu du bien-être. Et donc j'ai fait pendant six mois des recherches, beaucoup de lectures, des essais, des biographies, des articles scientifiques, pour voir si c'était quelque chose qui n'arrivait qu'à moi, ou alors est-ce que ça touchait d'autres personnes. Donc voilà, j'ai vraiment, je pense, l'universalité vient aussi de mes lectures et d'autres personnes qui ont écrit sur le sujet.

  • Speaker #0

    Ah oui, et tu t'es rendu compte que ce qui est finalement une sorte de th��rapie pour toi, elle le sera pour tout le monde parce qu'on est tous baignés dans le même... Dans le même jus finalement d'inquiétude par rapport à toutes ces questions.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Et surtout avec les lecteurs que j'ai de mon livre, les discussions que j'ai en ce moment, c'est vraiment ça. Beaucoup de gens me disent « mais j'ai exactement la même chose, un montre, elle me possède » . Enfin voilà, donc c'est vraiment des sujets très intéressants.

  • Speaker #1

    Je m'appelle Vanilla. Et j'ai 42 ans. Un bébé à notre époque d'humain augmenté, réparé, reconfiguré, amélioré. Lorsque la pandémie nous a frappés, j'avais 33 ans. Et Eli en avait 3. Pour pouvoir dormir, j'utilise un somnibule, un casque de sommeil fourni par Hypnos. Quand je dis « je » , il faut comprendre que les trois quarts de l'humanité dépendent de lui pour dormir. Ce n'est pas une option de le porter de temps en temps selon nos envies. Il est indispensable. pour pouvoir s'endormir et rester dans cet état pour la nuit. Sans lui, nous, les survivants, des années sans sommeil, aurions au mieux sombré dans la folie, au pire, vers une mort certaine. Jusqu'à récemment, j'étais considérée comme une chanceuse, ayant droit à 8 heures de sommeil réparateur chaque nuit. Tous les humains n'ont pas cette chance et ne bénéficient pas des mêmes privilèges en la matière. Le sommeil... est devenue une ressource précieuse, une monnaie, contrôlée par Hypnos, selon des quotas gérés par le ministère européen du sommet.

  • Speaker #0

    Dans ce roman, ton héroïne contribue à développer une technologie qu'elle va finir par questionner. Est-ce que ce n'est pas finalement ça, le dilemme de notre époque ? Parce que finalement, on se rend complice d'un système qui se développe. que certains dénoncent carrément et que beaucoup d'autres soupçonnent qu'il n'est pas si...

  • Speaker #3

    Si vertueux ?

  • Speaker #0

    Oui, si vertueux,

  • Speaker #3

    si fiable.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #3

    c'est vraiment une question difficile et je me dis, est-ce que nous ne sommes pas toujours complices par facilité, par manque de temps, par paresse intellectuelle, manque de curiosité, manque d'analyse, de comparaison, de prendre le temps de comparer les choses ? par recherche du plaisir immédiat, voilà donc beaucoup de choses. Et je me dis aussi qu'un de nos plus grands pouvoirs d'action réside dans le fait de notre choix de consommation, ou plutôt de ne pas consommer certaines choses. Et chacun participe grâce à ses choix, de façon plus ou moins grande, à tout ce qu'on fabrique et à tout ce qui arrive. Et de nouveau, rien n'est simple dans cette question, parce qu'il y a aussi des obsessions. qui peuvent se créer et qui peuvent naître. Arrêter parfois de consommer peut s'avérer très compliqué, notamment pour Meta, les grandes plateformes, ils ont des addictologues qui nous aident bien à être accros de leurs produits.

  • Speaker #0

    Ah oui, alors, redisons, reformulons ça, Meta a des addictologues dans ses équipes, ce qui est juste complètement incroyable quand on y réfléchit, mais qui nous permet aussi de nous sentir peut-être un petit peu moins coupables vis-à-vis de nos comportements, ou de se dire, mais non, je ne suis pas tout seul, tout le monde est concerné. Mais je me dis, les gens, en leur offrant mon livre, tu leur proposes une fenêtre, tu leur proposes d'aller voir au-delà, d'avoir, de commettre un acte de curiosité. Donc, la curiosité, elle peut venir aussi de choses, de rencontres, de choses simples.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Moi, j'encourage vraiment la curiosité, je pense que c'est une des meilleures qualités. C'est d'être curieux et de ne pas prendre pour argent comptant certaines choses. Mais de nouveau, c'est compliqué parce que même en lisant et en sachant ça, en sachant que les réseaux sociaux nous rendent addicts, ce n'est pas pour ça qu'on arrive forcément à s'en défaire.

  • Speaker #0

    À s'en défaire, oui, bien sûr.

  • Speaker #3

    Donc même en sachant, c'est compliqué.

  • Speaker #0

    Mais il y a cette notion de la conscience aussi, de savoir, c'est aussi avoir une conscience qui est plus musclée. Et muscler sa conscience, c'est aussi... se rendre compte qu'on peut faire toujours un petit pas en arrière, un petit pas pour avoir une vision un peu plus globale, pour prendre un peu de recul et de se dire « Ok, je suis dans ce système, j'y contribue d'une certaine manière, parce que c'est difficile de ne pas y contribuer,

  • Speaker #1

    mais jusqu'où je peux aller ?

  • Speaker #0

    Et si je faisais quelque chose différemment ? » On n'est pas obligé de faire des choses complètement dingues, mais on peut.

  • Speaker #3

    C'est la première étape, la prise de conscience.

  • Speaker #0

    C'est mon élan, je pense. Alors, j'ai entendu poser cette question un tantinet terrifiante. Et si le sommet devenait quelque chose qu'il fallait payer ? Alors, la question est angoissante, mais moi j'en ai une autre qui suit, encore plus angoissante. Et est-ce qu'il y aurait d'autres besoins fondamentaux qui risquent, d'après toi, d'être privatisés par la tech ?

  • Speaker #3

    Oui, alors notre attention l'est déjà, non ?

  • Speaker #0

    C'est vrai, oui, Thérèse.

  • Speaker #3

    Notre ennui aussi, on ne s'ennuie plus. Je dis toujours à mon fils, il me dit « Maman, je m'ennuie » et moi je lui dis « C'est génial, Loulou, ennuie-toi, c'est la meilleure chose qui puisse t'arriver » parce que c'est là aussi qu'on a la curiosité qui arrive dans ces moments d'ennui. J'avais remarqué aussi les rires et les cris des enfants dans les rues, on les entend beaucoup moins qu'avant, ils jouent moins.

  • Speaker #0

    Ils sont moins dehors.

  • Speaker #3

    Exactement, on voit marcher des ados dans la rue, ils sont sur leur téléphone en marchant. On peut imaginer la même chose pour l'air qu'on respire, imaginons qu'on doive payer pour respirer un air pur. Le silence, l'intimité, le droit de posséder son corps, on voit l'avortement aux Etats-Unis, ce qui est en train d'arriver. La lenteur, la paresse, la lecture, les promenades dans la nature, les arbres. Dans mon livre, je parle d'un musée des arbres, parce qu'il y a beaucoup moins d'arbres dans le monde que j'ai imaginé. Et dans ce musée, il faut payer pour voir des arbres encore vivants, une diversité d'arbres. Et en fait, je me dis que potentiellement, tout ce qui est gratuit et naturel peut être transformé en marchandise. Et ce n'est pas forcément la rareté qui crée la valeur, mais le fait d'être dépossédé de certaines choses. Quand on nous les retire, on peut nous faire payer pour quelque chose qu'on avait déjà.

  • Speaker #0

    C'est quand même... Schizophrène comme posture, mais tu as raison, quand on y regarde de plus près, c'est un peu quand même ce qui est en train de se passer. Et il y a quelques temps de ça, j'assistais à une conférence sur la nature, où ils expliquaient quelque chose, dire qu'il faut des études scientifiques pour le prouver, qu'un homme ou une femme, enfin un humain, est mieux quand il est en contact avec la nature. Bon, je simplifie volontairement. C'est ça,

  • Speaker #3

    on entend les oiseaux.

  • Speaker #0

    Mais voilà. Et je me dis, mais c'est peut-être un acte de rébellion qu'on peut avoir, nous, dès maintenant, de retourner dans cette nature, de nous reconnecter à ces choses qui sont simples et qui vont nous permettre justement de prendre de la hauteur sur le reste et de nous dire que c'est là qu'est l'essentiel, c'est là qu'est notre vie, et pas uniquement dans la tech ou dans les réseaux sociaux. Et dans ton roman, tu pousses le bouchon carrément un peu plus loin parce que la santé n'est plus un droit. C'est carrément devenu un produit qui a déjà un peu répondu préalablement, mais on voit cette dérive déjà dans notre société actuelle.

  • Speaker #3

    Oui, on voit clairement le basculement de la santé vers le domaine privé. Et quand ça se privatise, c'est un basculement vers le produit, les marchandises. Et mon roman pousse la logique jusqu'à l'extrême et s'appuie sur une réalité déjà tangible. Le glissement progressif de la santé du domaine du droit vers un produit marchand. Et on le voit avec plusieurs acteurs, la médecine, les assurances, les big tech, l'industrie pharmaceutique. Pour quelques exemples, on voit aux États-Unis, ce qui est déjà le cas pour les assurances. Ce sont les sociétés qui assurent les gens, ils pourront être en bonne santé, respecter certaines règles pour être bien assurés, pour ne pas payer une prime trop chère. On le voit avec la médecine, la médecine à la carte ou personnalisée. C'est un peu une médecine à deux vitesses. Il y a la médecine curative pour le plus grand nombre, et heureusement. Et puis il y a la médecine préventive et prédictive pour les autres.

  • Speaker #0

    Alors, ça aussi, c'est quand même fou parce que tu te dis, la médecine telle qu'elle existe aujourd'hui a des failles, comme tout système, comme toute chose. C'est tout à fait naturel, rien n'est parfait. Et au lieu d'aller repuiser dans des connaissances ancestrales, de s'appuyer sur... des approches plus holistiques, on a tendance à les mettre, je trouve, de côté en se disant « Oh oui, on parle de médecine parallèle ou de médecine douce » comme s'il y avait une sorte de classement, que c'était inférieur, alors que ça a aussi ses vertus, ça a aussi son approche qui est beaucoup plus, là encore, connectée au vivant dans son ensemble. mais ça C'est de plus en plus, et tu viens de le dire, réservé à une minorité parce qu'il faut payer pour des choses qui nous maintiennent en bonne santé. C'est fou.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. De toute façon, on voit clairement l'orientation des big tech vers le domaine de la santé. Il y a clairement un besoin, justement, d'avoir tout réuni en un seul endroit, avoir une médecine holistique. Et il y a des players qui se mettent vraiment dans... Dans ce chemin-là ?

  • Speaker #0

    Sur ce chemin, oui, c'est exact. Tu décris comment tu as commencé à voir ton corps non plus comme quelque chose avec lequel vivre, mais comme quelque chose à optimiser. Ce mot optimiser, performer aussi, une déshumanisation en quelque sorte. Comment elle s'opère concrètement ?

  • Speaker #3

    C'est terrible. En fait, ça a commencé, je dirais, avec ma montre connectée. pendant le que vide mon chéri mais en faire une montre connectée parce que je voulais me remettre au sport on était enfermé donc c'était vraiment voilà j'avais besoin de bouger et donc je me suis dit on ne peut améliorer que ce qu'on peut mesurer et voilà j'aime bien l'année J'ai commencé à m'améliorer aussi bien physiquement que mentalement. C'est un peu ma personnalité. Et donc avec cette montre, j'ai commencé à me mesurer. J'ai commencé à me sentir coupable de ne pas faire mes 10 000 pas par jour. J'ai commencé à regarder mon fitness age. Je vois que tu n'as pas de montre, mais tant mieux. Elle te donne ton fitness age. Donc au plus tu fais du sport, au plus ton fitness age diminue, donc ton âge biologique, entre guillemets, tu as ton âge chronologique et biologique. Et donc je suis arrivée dans une obsession de diminuer un maximum mon fitness age. Et par exemple, c'était tellement... C'est là que j'ai posé des questions parce que j'ai eu un limbago. Et je me suis dit, ma première pensée, c'était pas mince. Comment guérir mon dos ? Que faire pour ça ? C'était mince, je vais pas pouvoir faire du sport. C'est horrible, mon fitness age va augmenter. Non mais c'est terrible. Et donc on se met au final, c'est totalement un contresens parce que quelque chose, on est censé être dans le bien-être. Et en fait, c'est quelque chose qui commence à nous posséder et à devenir obsessionnel.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on n'est plus dans le bien-être, on est dans le bien-être contrôlé.

  • Speaker #3

    Contrôlé, voilà. Performance, mesurée, s'améliorer constamment, voilà, c'était vraiment ça. Et c'est ça que j'ai cherché à comprendre et à mettre en avant dans mon livre, qui est un peu une société focalisée autour de la santé, une santé obligatoire.

  • Speaker #0

    Une santé obligatoire et qui devient complètement délirante à certains moments, parce que tu cites, ou tu as déjà mentionné plusieurs fois Brian Johnson, qui est un homme qui investit, attention, 2 millions par an pour redevenir jeune. C'est incroyable ce truc. Alors, cette obsession de l'optimisation de soi par rapport à notre humanité et notre finitude, qu'est-ce que ça révèle ? Parce que comme le disait Patricia Ferrand dans l'épisode 49, je peux le citer parce qu'il est récent le chiffre, sinon j'oublie. d'éclats de voix qu'on avait consacré au deuil, elle nous disait justement « Mais notre seul projet commun à tous sur cette planète, que nous soyons dans telle ou telle société, que nous ayons telle ou telle culture, c'est que nous sommes finis, que nous allons mourir. » Donc là, il y a quelque chose qui est complètement nié presque.

  • Speaker #3

    Ah oui, c'est totalement dingue. Justement, Brian Johnson, l'homme le plus mesuré au monde...

  • Speaker #0

    Ah, tu as un concurrent.

  • Speaker #3

    Oui ! Ça fait que je n'ai que ma montre. Ah non, mais il mesure l'âge de tous ses organes. Donc, de son cœur, de son cerveau, de ses poumons, même de son pénis. Il mesure tout et il veut diminuer l'âge biologique de tous ses organes. C'est complètement dingue. Et par rapport à la finitude, moi, je trouve que c'est vraiment... Ça va dans des extrêmes parce qu'on se déconnecte, au final, du plaisir. Pour moi, la vie, ça doit être le plaisir. C'est ça qui est génial. Et de nouveau pour revenir à Brian Johnson, lui tous les matins au petit-déj il ne mange qu'une fois par jour avec plein de médicaments. Et pendant qu'il mange son petit-déj, il s'entraîne à sa souplesse et il fait des grands écarts. Donc je me dis, un des grands plaisirs de la vie c'est manger, non ? Donc super, son cœur il est sans doute plus jeune que le mien, mais voilà, moi en tout cas je prends plaisir à manger.

  • Speaker #0

    Non mais on se dit qu'il finira dans une boîte anyway, donc bon, avec un cœur peut-être plus jeune que le tien. J'imagine la scène. Un film. Il aurait pu être dans ton roman, ce gars-là.

  • Speaker #3

    Ah, mais je m'en suis inspirée. J'avais oublié, justement. Je m'en suis inspirée pour Mon vilain. Cette quête, cette obsession, le transhumanisme. Voilà. Donc, Mon vilain, j'ai pris certaines choses de Brian Johnson.

  • Speaker #0

    Allez lire, allez lire. Je ne saurais que vous le répétez et vous inciter à le faire. Alors, justement, dans ce monde où l'IA, puisqu'on parle d'elle, commence à pouvoir détecter des maladies avant même les symptômes, je me dis, mais est-ce qu'on n'est pas en passe de perdre ce rapport instinctif, intime, intuitif aussi, d'intuition à notre propre corps ? Est-ce qu'on est... Aujourd'hui, moi, je me pose la question, est-ce qu'on est vraiment prêt à déléguer tous ces pouvoirs à des machines ? Au final, quels bénéfices on va vraiment en tirer ? Sans compter que... Il faut être honnête, les machines, pas plus que les humains, aujourd'hui ne sont fiables à 100%, parce qu'on n'est pas tous des robots, on n'est pas tous clonés, donc on n'est pas systématiquement identiques. Je veux dire, nos ADN sont différents, à l'intérieur de nous...

  • Speaker #1

    Si on regarde une forêt,

  • Speaker #0

    il n'y a pas deux arbres qui sont strictement les mêmes. Donc c'est pareil pour les humains. Les machines, elles, par contre, ce sont les mêmes. Donc il y a une sorte, pour moi, de décalage entre les deux. Mais ce qui m'inquiète, c'est comment est-ce qu'on... peut vouloir, à ce point, nous remettre entre les mains d'un robot.

  • Speaker #3

    C'est dingue parce que ta question, ça m'est vraiment arrivé. Je vais commencer par un exemple, c'est le score de sommeil de ma montre connectée. Donc les matins, je ne le fais plus, j'ai appris la leçon, mais les matins en me levant, je regardais mon score sommeil et j'ai remarqué que je me levais par exemple pleine d'énergie et je regardais ensuite mon score sommeil qui était de 23%, donc tout pourri.

  • Speaker #0

    Révélation, le score sommeil d'Anna est pourri.

  • Speaker #3

    Mais oui, et je me dis, mais comme tu dis, c'est des moyennes, Donc... Donc, par rapport à la moyenne qui dort super bien, moi, j'étais à 23 %, donc nulle. Et donc, ça me mettait le moral dans les chaussettes alors que je me sentais pleine d'énergie. Et je me dis, mais c'est quand même ridicule. Là, je me sens pleine d'énergie, en forme et un score parce que la montre a dit que j'ai mal dormi. Moral dans les chaussettes. Donc, du coup, elle avait raison. C'est un peu une prédiction autoréalisatrice. Donc, voilà, tout à fait. On perd un peu la notion de s'écouter. mais oui il y a des bénéfices immenses de certaines technologies, de détecter plus tôt, de sauver des vies, d'anticiper des crises. Mais il faut garder le droit de ne pas tout savoir et surtout de ressentir plutôt que de mesurer, d'être à l'écoute de son corps au final et de rester propriétaire de nos corps.

  • Speaker #0

    Ça, j'aime bien, le droit de ne pas tout savoir. Parce que finalement, pour l'instant, nos cerveaux ont beau être ultra puissants, nos ordinateurs aussi, même plus que peut-être un jour nos cerveaux, je ne sais pas ça. mais en tous les cas une chose est certaine c'est que le miracle de la vie personne pour l'instant n'a la clé tout à fait alors les l'écriture comme forme de résistance tu dis que tu as écrit les premières lignes de ton roman à la main la nuit loin de tout écran donc est-ce que tu avais ta montre pendant ces moments là C'est pour ça que tu avais un score de 23%. Si tu écris la nuit, forcément, tu as 23% à l'arrivée. Excuse-moi.

  • Speaker #3

    Non, alors bon. Mon livre s'appelle Sans Sommeil. Je suis un petit peu insomniaque. Donc, c'est aussi un espace de créativité. Mais donc, cette nuit-là, c'est plutôt... J'ai fait ça sur papier et dans un carnet. C'est plutôt une hygiène de vie. Donc, je dors avec ma montre, mais mon téléphone ne rentre pas dans la chambre le soir. Voilà.

  • Speaker #0

    Donc, c'est un petit peu... En faisant ça, c'est une sorte de rébellion, d'acte de résistance d'écrire à la main par rapport à la technologie ou c'était juste comme ça ?

  • Speaker #3

    J'adore les cahiers, les crayons, j'adore écrire, faire des petits dessins. Et de nouveau, ce n'est pas possible d'avoir un écran à côté de moi la nuit. Imagine, j'ouvre un écran bleu. Non, non, c'est vraiment, j'ai mon cahier parce que j'aime bien me souvenir de mes rêves aussi. Donc, je note mes rêves pendant mes insomnies. Voilà, un petit carnet.

  • Speaker #0

    Alors, est-ce que cette fiction dans laquelle tu as choisi de t'installer, t'a permis de dire des vérités ? Un essai, par exemple, ou bien un rapport de consultant comme tu étais avant, ça t'aurait permis de l'exprimer ?

  • Speaker #3

    Le roman, en fait, je trouve qu'il touche beaucoup plus un public plus large. L'essai, c'est quelque chose un peu pour démontrer, c'est beaucoup plus factuel. Le roman laisse de la place à justement la curiosité, à poser des questions. Moi, ce que j'ai voulu, c'est poser des problématiques, pas pour donner des solutions, mais pour qu'on puisse se questionner, laisser des montres. Le consultant clarifie, il donne des chiffres, il oriente. Alors que moi, je voulais peut-être un petit peu troubler, faire bouger quelques lignes, en tout cas, faire se poser des questions.

  • Speaker #0

    C'est une bonne chose. Et ma question était évidemment un petit peu... provocatrice parce que bien évidemment un roman n'a rien à voir avec un rapport de consultant mais c'était juste pour dire que malgré tout un rapport ça donne une certaine lecture du monde oui à des gens et j'étais entendu cité octavia butler qui dit de point ouvre les guillemets l'acte même d'essayer de regarder vers l'avenir pour discerner les possibilités et offrir des avertissements est est en soi Un acte d'espoir. Fermez les guillemets. Est-ce que, si on pousse le bouchon encore un petit peu plus loin, tu dirais que cette écriture dystopique que tu as choisie pourrait être considérée comme une forme d'acte politique ?

  • Speaker #3

    Alors, non, je ne dirais pas que c'est un acte politique. Ce que je fais, comme je disais un petit peu avant, c'est poser des questions et explorer des possibles. Me poser la question « et si ? » « Et si ? » J'adore. C'est un livre génial. « Et si ? » de Jean-Michel Ausha. Non mais j'adore, c'est une question vraiment géniale, ça permet d'imaginer et je ne veux pas te donner de solutions ni de leçons. Ce que je veux c'est vraiment d'ouvrir un espace de réflexion, de suicider. des interrogations et de porter un regard attentif sur notre époque en fait. Et comme disait Octavia justement, c'est vraiment un acte d'espoir de tenter de voir ce qui peut arriver et de mieux le comprendre pour que ça n'arrive pas.

  • Speaker #0

    Alors pour que ça n'arrive pas, tu dis construisons non pas ce qui est possible mais ce qui est humain. Qu'est-ce que toi tu proposerais aux acteurs de la tech pour que ça n'arrive pas ?

  • Speaker #3

    Alors je dirais de recentrer les... Les technologies et les innovations sur les besoins réels des personnes. Il y a beaucoup d'innovations célèbres, par exemple l'iPhone, la réalité virtuelle ou les réseaux sociaux, qui ont été inventés pas par un besoin. Franchement, on n'a pas besoin d'iPhone, non ? Ou les réseaux sociaux.

  • Speaker #0

    Non, pas du tout.

  • Speaker #3

    Ça ne vient pas du tout d'un besoin, ça vient d'un génie qui a une idée. Et donc le monde s'est adapté à une technologie. On a tous été dans la même direction d'un génie un peu fou. Au lieu d'écouter vraiment nos besoins et les choses importantes, donc ça pose un problème parce qu'on peut créer des fois des objets et des services avant même de s'interroger sur l'impact humain, social et éthique. Je pense que la régulation a beaucoup à jouer là-dedans. Je sais qu'on dit que l'Europe c'est un peu vieux jeu parce qu'on essaie de tout réguler, mais au final dans ce monde contrôlé de plus en plus par l'intelligence artificielle, je pense que c'est la bonne direction à prendre.

  • Speaker #0

    La bonne démarche à avoir, oui. Alors toi, tu as une particularité quand même, c'est que tu as vécu une forme de passage de la transformation digitale à l'écriture, dans un premier temps, dystopique, et ça te donne finalement une perspective unique. En partant de là, est-ce que tu crois qu'on peut imaginer une tech qui soit plus humaine et aussi potentiellement plus écologiquement soutenable ?

  • Speaker #3

    Oui, je pense que c'est possible, à condition de renoncer à la vitesse et à la nouveauté comme valeur suprême, et aussi à la consommation. Malheureusement, la plupart des intérêts sont driveés par l'argent. Et donc, c'est un peu ça qui définit les technologies. Et le fait qu'on nous mette entre les mains des choses finalement pas très utiles et qui peuvent nous rendre accros. Et en ce sens, mon parcours me fait voir que la tech, ne doit pas être une fin en soi, mais un moyen. Ça doit vraiment être un outil et pas quelque chose qui nous contrôle et est néfaste pour nous.

  • Speaker #0

    Ce que j'entends en filigrane, c'est que c'est même pas le problème de la tech, c'est encore et toujours le problème de l'argent.

  • Speaker #3

    Oui, je pense que c'est un bon résumé.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu espères que ton roman transforme le regard des lecteurs sur leur propre rapport à la technologie ?

  • Speaker #3

    Alors, je ne cherche pas à convaincre, mais si le lecteur, après avoir lu mon roman, se pose une question qu'il ne s'était jamais posée, alors c'est génial. C'est la prise de conscience que je trouve super. Et s'il découvre de nouvelles choses, si ça l'aide à être plus curieux sur certaines thématiques, c'est parfait.

  • Speaker #0

    Donc, allez-y, ouvrez le livre pour être curieux et avoir vous poser de bonnes questions. Qu'est-ce qui serait pour toi le succès de ce qui se révèle aujourd'hui être une forme de prise de parole qui est la tienne avec ce premier roman ? Ce serait de l'ordre de, je ne sais pas, voyons large, grand, changer les comportements individuels, voire influencer les politiques publiques, même si on l'a bien entendu tout à l'heure, tu nous as dit que ce n'était pas un acte politique pour toi d'écrire.

  • Speaker #3

    Eh bien mon envie première, c'est que le lecteur passe un bon moment, qu'il se déconnecte. qui prennent le temps, de la lenteur, de la lecture, qui rient, qui apprennent des choses et que, comme je disais, qu'ils puissent se poser des questions qu'ils ne s'étaient jamais posées avant. Et j'ai eu deux remarques de deux lecteurs qui m'ont énormément touchée. C'est de Sarah et Dany. Ils m'ont dit que grâce à mon roman, ils s'étaient remis à la lecture.

  • Speaker #0

    C'est incroyable.

  • Speaker #3

    J'ai trouvé ça incroyable parce que c'est mon activité préférée. Le fait que deux personnes lisent plus maintenant grâce au fait d'avoir lu mon roman, c'est incroyable.

  • Speaker #0

    Ah, ça fait des frissons ! Oui, c'est génial ! Alors, pour continuer dans cette dynamique, est-ce qu'après Sans Sommeil, tu comptes continuer à utiliser la fiction comme outil de, je mets des guillemets, d'énonciation ? Parce que je pense que tu vas me dire que ce n'est pas vraiment ça, mais est-ce qu'il y a d'autres sujets qui t'interpellent pour ça ?

  • Speaker #3

    Oui, alors, beaucoup de sujets m'interpellent. Les inégalités, les injustices, la technologie, l'obsession de la santé. J'aime bien explorer de nouvelles formes, j'aime pas les cases, j'aime pas être mise dans une case. Donc voilà, j'ai envie d'explorer quelque chose d'autre que la fiction. En tout cas, la dystopie, j'avais une idée d'écrire un roman sur les robots et la fin du monde, qui est un peu un classique des dystopies. Et là, je m'oriente plus vers une biographie d'une personne décédée qui me passionne. Voilà, donc j'aimerais commencer en septembre et faire autre chose, mais toujours dans l'écriture.

  • Speaker #0

    Wow ! Donc, on sait qu'il y aura potentiellement plus tard un roman pour en revenir avec les robots, la fin du monde et l'attendant. Ah ah, la biographie mystère. Mystère. Ouah, j'adore.

  • Speaker #3

    Et il pourrait y avoir une suite à Sans Sommeil. Ah ! J'ai beaucoup de demandes de lecteurs qui aimeraient justement une suite. Tu me diras ce que tu en penses.

  • Speaker #0

    C'est fou parce que souvent les écrivains disent ça, que les gens ont envie, une fois qu'ils sont plongés dans leur univers, de poursuivre un peu. C'est un goût de trop peu, on a envie d'aller encore plus loin.

  • Speaker #3

    Et quel commentaire !

  • Speaker #0

    C'est génial. Alors, pour conclure cet épisode, j'avais envie de te demander, mais comment est-ce que tu aimerais qu'à leur tour, nos auditrices, nos auditeurs s'engagent, puisque encore une fois, c'est le concept favori d'Éclat de Voix, sur ces sujets qui sont brûlants, voire clivants parfois, il faut bien l'admettre, et quel premier pas tu leur suggérerais ?

  • Speaker #3

    Alors, breaking news ! Alors, ça serait lire, lire, lire. C'est une ode à la lecture que je fais, mon activité préférée. Lire des avis différents, se faire sa propre opinion, continuer à développer l'esprit critique, lire aussi bien des livres, des romans, des essais, des biographies, un peu de poésie dans notre vie, et lire des médias indépendants. Je recommande un super livre qui est « Sauver l'information de l'emprise des milliardaires » d'Olivier Legrain et Vincent Hédin. C'est absolument « eye-opener » , comme on dit. On apprend beaucoup de choses. Questionner ce qu'on lit et ne pas prendre pour agent content sur toutes les opinions. Aujourd'hui, les opinions sont un peu annoncées comme des faits, ce qui n'est vraiment pas le cas. Et enfin, c'est être curieux, qualité principale numéro un, et humble devant le peu de choses que nous savons en final.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'on ne sait pas grand-chose. On a l'impression de beaucoup savoir parfois, mais pas du tout. curiosité lecture ça me va je coche les caches j'adore merci merci beaucoup on mettra les la référence du livre dans les notes de l'épisode je te prends un peu à brûle pourpoint là mais avant vraiment de rendre l'antenne ce

  • Speaker #3

    serait quoi ton dernier éclat de voix alors ce serait de prendre plaisir à la vie et il ya quelque chose que j'aime bien dire c'est que la vie est trop courte pour tirer la gueule

  • Speaker #0

    En tout cas, ce n'est pas ton cas. Merci, merci Anna d'avoir été là avec nous pour cet entretien passionnant. Les amis, vous savez qu'il faut absolument aller lire ce livre Sans Sommeil que vous retrouvez partout ?

  • Speaker #3

    Partout, oui. Donc, il est chez Ernst & Co dans les librairies. On peut le commander dans n'importe quelle librairie. Il est sur toutes les plateformes. Et en version digitale, il est à 3,99 euros. J'insiste sur le 99 parce que je suis belge.

  • Speaker #0

    Excellent. Merci, merci mille fois, ça a été un plaisir de partager ce moment avec toi Anna.

  • Speaker #3

    Merci Anne-Claire, tu m'as vraiment mise mal à l'aise, j'étais un peu stressée mais ça s'est super bien passé et je te trouve très accueillante et très prudente tout ce que tu fais, merci à toi.

  • Speaker #0

    Bon alors du coup tu étais plus mal à l'aise après.

  • Speaker #3

    Non, c'est génial. Venez, venez, elle est top.

  • Speaker #0

    Merci, à bientôt. « La vie est trop courte pour tirer la gueule » ,

  • Speaker #1

    nous a dit Anna. Alors quittons montres, applications et autres écrans qui nous épuisent et qui nous poussent constamment à optimiser notre existence au lieu de la vivre. Prenons le chemin inverse,

  • Speaker #0

    celui du papier plutôt que de l'écran, du corps qui s'étire au lieu de la performance qui stresse,

  • Speaker #1

    de la respiration profonde au lieu de la respiration superficielle, synonyme de stress, elle aussi. Et c'est exactement ce que je vous propose dans la retraite que je vous invite à venir vivre avec moi du 31 août au 6 septembre en Drôme-Provençal. La voix du corps, l'écho des mots à la ferme salade. Six jours pour désapprendre l'optimisation et réapprendre l'intuition, entre autres. Et puis, laisser aussi les mots couler comme ils viennent, retrouver une fluidité, une naturalité. Je crois que ça n'existe pas ce mot. Enfin bref, une façon de s'exprimer naturelle sans algorithme pour nous mesurer. Parce qu'au fond, Anna nous le montre bien. Si on veut faire bouger les choses, ça commence par soi, par une reconnexion profonde à soi-même et à ce que l'on a vraiment envie de proposer et de vivre dans ce monde-là, loin du bruit et près de l'essentiel. Vous retrouverez tous les détails sur mon site, je mettrai tous les liens. aussi dans la description de l'épisode. Et puis maintenant, vous allez éteindre votre montre et vous allez marcher sans compter vos pas.

  • Speaker #0

    Voilà.

  • Speaker #1

    Ah oui, non mais avant ça, avant ça, avant ça. Et d'ici notre prochain rendez-vous,

  • Speaker #0

    je vous souhaite des éclats de voix un peu dystopiques,

  • Speaker #1

    très romanesques et surtout plein d'espoir.

Description

Dans un monde où nos nuits deviennent des données exploitables, où la santé se vend en abonnement premium et où l’humain s’optimise à coups d’algorithmes, quelle place reste-t-il pour notre libre arbitre? Pour son premier roman “Sang Sommeil”, Anna Vassileva signe une dystopie glaçante, mais profondément humaine, transformant une angoisse personnelle en une critique sociétale.


Ancienne consultante en transformation digitale, elle utilise aujourd’hui l’écriture comme une prise de parole engagée, comme une sorte de résistance poétique face aux dérives de la technologie.


Dans cet épisode, il est question de notre complicité passive face à des systèmes que nous savons défaillants, de la perte de notre instinct corporel face à la quantification de soi, et de l’importance de reprendre le temps. De lire. D’écouter. De penser.

Anna nous invite à la curiosité, à questionner ce qui nous semble normal.

**************************************************************************

Retrouvez Anna: https://www.instagram.com/sangsommeil/ ou https://www.linkedin.com/in/anna-vassileva-autrice/

Références:

Épisodes à r(é)écouter:

39 - https://smartlink.ausha.co/eclatsdevoix/entre-journalisme-fiction-et-communication-la-plume-cameleon-de-jean-michel-gaudron

12- https://smartlink.ausha.co/eclatsdevoix/ev-12-qui-ecoutera-saura-avec-jean-michel-gaudron


🎧 Éclats de Voix, le podcast des prises de parole engagées. Abonnez-vous pour ne pas manquer les voix qui font résonner les idées, les colères et les espoirs d’aujourd’hui.

Merci de le soutenir en lui mettant des ⭐️ et en le partageant sans modération!

✨ Plus d'informations:

💻 Mon site: www.anneclairedelval.com

➡️ Échanger sur LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/anneclairedelval/ 

📝 Me rejoindre sur Instagram: https://www.instagram.com/anneclaire_delval/ 

**************************************************************************

Production et montage: Anne-Claire Delval, Jean-Michel Gaudron, Cyriaque Motro

Musique: Meydän

Titre:  Synthwave Vibe

Auteur: Meydän

Source: https://meydan.bandcamp.com

Licence: https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Éclat de voix débarre !

  • Speaker #1

    Le podcast des prises de paroles engagées qui transforme vos peurs en audace vocale. Je suis Anne-Claire Delval, ancienne journaliste, rédactrice, modératrice, facilitatrice de ces prises de paroles engagées. Et oui, j'ai envie de vous prouver que chaque voix compte, y compris la vôtre. Parce que dire « plutôt que terre reste mon mantra » , parce que Merci. votre message est attendu par tout le monde. Inspirez-vous des invités. Et d'ailleurs, puisque ce podcast va vous donner des ailes, mais montrez-le. Donnez-lui 5 étoiles, commentez-le, partagez-le, ensemble, libérons toutes ces voix qui n'osent pas encore.

  • Speaker #2

    Imaginez-vous en 2054, c'est dans 30 ans, l'hémisphère nord est frappé d'un mal terrible, une pandémie d'insomnie, dont l'issue ne peut être que la folie, puis la mort. Heureusement, une société technologique a inventé les somnibules, des casques permettant de générer et réguler le sommeil. Tout est bien qui finit bien alors ? Eh bien non, évidemment, car sous couverte à l'intérêt de la santé publique, l'utilisation faite de ces somnibules dépasse largement l'objectif premier. Et c'est toute une population qui se retrouve sous le contrôle d'un pouvoir quasi dictatorial pour lequel le sommeil est devenu une ressource précieuse au cœur d'enjeux technologiques et économiques. Pour s'élever contre ces dérives, Vanilla Acevan, une jeune scientifique renommée, va s'engager dans une lutte depuis l'intérieur du système pour sauver son fils, lui aussi atteint par la pandémie. Mais jusqu'où pourra-t-elle aller ? Aura-t-elle assez de force pour faire face aux découvertes toutes plus angoissantes les unes que les autres qui jalonnent son parcours ? Voilà résumé, Sans Sommeil, un roman très prenant et plein de suspense. Une dystopie certes, mais on ne peut s'empêcher de reconnaître certaines dérives déjà présentes dans notre quotidien. Ce récit nous entraîne en tous les cas dans une aventure haletante qu'on appelle... pas envie d'arrêter de lire avant d'être arrivé à la fin. Très documenté et très plausible, ce premier roman d'Anna Vasileva mérite assurément qu'on y consacre un podcast.

  • Speaker #1

    Vous l'avez reconnu cette voix ? Ah oui,

  • Speaker #0

    c'est celle de Jean-Michel Gaudron,

  • Speaker #1

    un autre écrivain luxembourgeois qui connaît bien Anna et qui a été par deux fois l'invité des Cladois dans les épisodes 12 et 39. Dans l'un, il nous a expliqué comment il donnait la parole à ses... personnages et dans le deuxième, les différents types d'écriture. Mais, mais, ils n'avaient pas abordé ce style particulier,

  • Speaker #0

    la dystopie. Alors la dystopie,

  • Speaker #1

    étymologiquement, ça signifie lieu mauvais et c'est en réalité l'antithèse de l'utopie. Elle est aujourd'hui présente non seulement en littérature, mais aussi, on va la retrouver dans le cinéma, aussi dans des jeux vidéo, dans la avant de dessiner. Et pour Laurent Bazin, qui est maître de conférences en littérature à l'université de Versailles Saint-Quentin, et qui avait été interrogé au micro de ZoomZoomZen de France Inter, l'idée de dystopie et de son contraire l'utopie remonte à la Renaissance, au moment où on va quitter un système purement théologique pour prendre son destin un peu plus en main à travers notamment le voyage. Et en 1920, c'est Egvini Zamiatin, désolé j'ai du mal à prononcer, qui a écrit Nous Autres, considéré, lui, comme le tout premier roman dystopique moderne. Et Laurent Bazin ajoute que la dystopie est là pour alerter que tout projet utopique met aussi en danger l'équilibre collectif. Alors dans Sans Sommeil, Anna Vassileva nous tend un vrai miroir. Et à travers cette dystopie technologique, si on peut dire ça comme ça, elle questionne à la fois nos choix, nos habitudes, mais surtout notre complicité face à un système qui nous dépasse. Alors bien sûr, écrire un roman comme celui-là, c'est aussi un acte d'espoir, une manière de reprendre la parole, d'ouvrir un dialogue sur ce qui nous échappe. Et c'est ce dont il va être question. Bonjour.

  • Speaker #0

    Salut Anna.

  • Speaker #3

    Salut Anne-Claire.

  • Speaker #0

    Alors, il faut remettre un petit peu de contexte pour nos auditeurs, mais notre rencontre a été quelque chose de magique il y a quelque temps, une vraie étincelle, comme si on se connaissait depuis toujours. Et puis, depuis, on ne se quitte plus,

  • Speaker #1

    notamment parce que ton livre est toujours sur ma table de chevet. Il est très gros.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté de venir sur le podcast, Anna.

  • Speaker #3

    Merci à toi, je suis très émue, c'est mon premier podcast et je suis vraiment enchantée de le faire avec toi.

  • Speaker #0

    Oh, ça me réjouit, ça me fait plaisir et ça me flatte. Alors, pour expliquer un petit peu à nos auditeurs, tu avais au départ une carrière que d'aucuns qualifieraient de prestigieuse chez PWC et tu l'as quittée pour embrasser celle d'écrivaine. Alors, en quoi ? Pour toi, l'écriture finalement est devenue une forme d'engagement, puisque tu sais que c'est le sujet principal d'Éclat de Voix et qui me tient tant à cœur. Et en quoi tu as l'impression que cette forme d'engagement qu'est l'écriture fait maintenant plus de sens pour toi aujourd'hui ? Pourquoi ?

  • Speaker #3

    Alors moi, c'est vraiment un engagement d'un point de vue énergie, personnel. J'avais envie de me lever le matin avec la banane. Et de faire quelque chose qui me passionne. Ma passion première, c'est la lecture. Je lis plus de 150 livres par an. J'adore ça.

  • Speaker #0

    Waouh ! Tu mets le curseur bien haut. Waouh, 150.

  • Speaker #3

    Voilà, j'adore ça. Et l'écriture, j'écrivais certaines choses comme ça, mais vraiment pas un texte structuré. Et il y a eu cette idée obsédante et passionnante, en tout cas pour moi, et qui devait sortir. Donc, c'était vraiment, j'ai voulu faire quelque chose, un métier qui est aligné à ma passion.

  • Speaker #0

    Waouh ! Mais alors ? Tu commences fort parce que tu as choisi la dystopie. Alors tu dis que ce n'est pas par pessimisme mais par optimisme. J'aimerais bien savoir comment un genre littéraire aussi sombre peut être un acte d'espoir, tu nous dis ?

  • Speaker #3

    Oui, donc c'est la dystopie. Et avant une petite définition, ça fait partie de la science-fiction. Et c'est un genre littéraire qui est un récit pour mettre en valeur les dérives dans notre société, poussées à leur paroxysme. C'est une extrapolation à partir du réel. c'est de la fiction spéculative et le côté optimiste en fait il vient du fait que montrer les dérives possibles c'est croire qu'on peut ajuster agir pour que ça ne se réalise pas faire d'autres choix pour un futur différent

  • Speaker #0

    Merci beaucoup d'avoir posé ce cadre qui permet effectivement de répondre à la question et qui est très intéressant Dans ce roman Sans Sommeil tu en as profité ou tu l'as utilisé ? pour quelque part transformer une de tes angoisses personnelles dont tu parles, qui était une forme d'obsession de santé et de résultats qui était liée à cette fameuse montre connectée que plein de gens ont aujourd'hui. Tu l'as donc transformée, cette angoisse, en une critique sociétale. À ton avis, est-ce que cette expérience qui relève de l'intime peut vraiment nourrir une réflexion, voire même un engagement ? J'y reviens. qui serait plus de l'ordre du collectif.

  • Speaker #3

    Oui, je pense que toute expérience part d'abord de l'intime, et ça devient collectif quand il touche une corde universelle. Le culte de la performance, par exemple, l'obsession de la santé, la longévité, le bien-être, sont tous des sujets universels, et ils traitent finalement notre finitude, de nos angoisses les plus profondes.

  • Speaker #0

    Oui, c'est vrai.

  • Speaker #3

    Comme tu disais, c'est partie d'une angoisse personnelle, et j'ai voulu comprendre ce qui est en train de m'arriver, cette obsession un peu du bien-être. Et donc j'ai fait pendant six mois des recherches, beaucoup de lectures, des essais, des biographies, des articles scientifiques, pour voir si c'était quelque chose qui n'arrivait qu'à moi, ou alors est-ce que ça touchait d'autres personnes. Donc voilà, j'ai vraiment, je pense, l'universalité vient aussi de mes lectures et d'autres personnes qui ont écrit sur le sujet.

  • Speaker #0

    Ah oui, et tu t'es rendu compte que ce qui est finalement une sorte de th��rapie pour toi, elle le sera pour tout le monde parce qu'on est tous baignés dans le même... Dans le même jus finalement d'inquiétude par rapport à toutes ces questions.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Et surtout avec les lecteurs que j'ai de mon livre, les discussions que j'ai en ce moment, c'est vraiment ça. Beaucoup de gens me disent « mais j'ai exactement la même chose, un montre, elle me possède » . Enfin voilà, donc c'est vraiment des sujets très intéressants.

  • Speaker #1

    Je m'appelle Vanilla. Et j'ai 42 ans. Un bébé à notre époque d'humain augmenté, réparé, reconfiguré, amélioré. Lorsque la pandémie nous a frappés, j'avais 33 ans. Et Eli en avait 3. Pour pouvoir dormir, j'utilise un somnibule, un casque de sommeil fourni par Hypnos. Quand je dis « je » , il faut comprendre que les trois quarts de l'humanité dépendent de lui pour dormir. Ce n'est pas une option de le porter de temps en temps selon nos envies. Il est indispensable. pour pouvoir s'endormir et rester dans cet état pour la nuit. Sans lui, nous, les survivants, des années sans sommeil, aurions au mieux sombré dans la folie, au pire, vers une mort certaine. Jusqu'à récemment, j'étais considérée comme une chanceuse, ayant droit à 8 heures de sommeil réparateur chaque nuit. Tous les humains n'ont pas cette chance et ne bénéficient pas des mêmes privilèges en la matière. Le sommeil... est devenue une ressource précieuse, une monnaie, contrôlée par Hypnos, selon des quotas gérés par le ministère européen du sommet.

  • Speaker #0

    Dans ce roman, ton héroïne contribue à développer une technologie qu'elle va finir par questionner. Est-ce que ce n'est pas finalement ça, le dilemme de notre époque ? Parce que finalement, on se rend complice d'un système qui se développe. que certains dénoncent carrément et que beaucoup d'autres soupçonnent qu'il n'est pas si...

  • Speaker #3

    Si vertueux ?

  • Speaker #0

    Oui, si vertueux,

  • Speaker #3

    si fiable.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #3

    c'est vraiment une question difficile et je me dis, est-ce que nous ne sommes pas toujours complices par facilité, par manque de temps, par paresse intellectuelle, manque de curiosité, manque d'analyse, de comparaison, de prendre le temps de comparer les choses ? par recherche du plaisir immédiat, voilà donc beaucoup de choses. Et je me dis aussi qu'un de nos plus grands pouvoirs d'action réside dans le fait de notre choix de consommation, ou plutôt de ne pas consommer certaines choses. Et chacun participe grâce à ses choix, de façon plus ou moins grande, à tout ce qu'on fabrique et à tout ce qui arrive. Et de nouveau, rien n'est simple dans cette question, parce qu'il y a aussi des obsessions. qui peuvent se créer et qui peuvent naître. Arrêter parfois de consommer peut s'avérer très compliqué, notamment pour Meta, les grandes plateformes, ils ont des addictologues qui nous aident bien à être accros de leurs produits.

  • Speaker #0

    Ah oui, alors, redisons, reformulons ça, Meta a des addictologues dans ses équipes, ce qui est juste complètement incroyable quand on y réfléchit, mais qui nous permet aussi de nous sentir peut-être un petit peu moins coupables vis-à-vis de nos comportements, ou de se dire, mais non, je ne suis pas tout seul, tout le monde est concerné. Mais je me dis, les gens, en leur offrant mon livre, tu leur proposes une fenêtre, tu leur proposes d'aller voir au-delà, d'avoir, de commettre un acte de curiosité. Donc, la curiosité, elle peut venir aussi de choses, de rencontres, de choses simples.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Moi, j'encourage vraiment la curiosité, je pense que c'est une des meilleures qualités. C'est d'être curieux et de ne pas prendre pour argent comptant certaines choses. Mais de nouveau, c'est compliqué parce que même en lisant et en sachant ça, en sachant que les réseaux sociaux nous rendent addicts, ce n'est pas pour ça qu'on arrive forcément à s'en défaire.

  • Speaker #0

    À s'en défaire, oui, bien sûr.

  • Speaker #3

    Donc même en sachant, c'est compliqué.

  • Speaker #0

    Mais il y a cette notion de la conscience aussi, de savoir, c'est aussi avoir une conscience qui est plus musclée. Et muscler sa conscience, c'est aussi... se rendre compte qu'on peut faire toujours un petit pas en arrière, un petit pas pour avoir une vision un peu plus globale, pour prendre un peu de recul et de se dire « Ok, je suis dans ce système, j'y contribue d'une certaine manière, parce que c'est difficile de ne pas y contribuer,

  • Speaker #1

    mais jusqu'où je peux aller ?

  • Speaker #0

    Et si je faisais quelque chose différemment ? » On n'est pas obligé de faire des choses complètement dingues, mais on peut.

  • Speaker #3

    C'est la première étape, la prise de conscience.

  • Speaker #0

    C'est mon élan, je pense. Alors, j'ai entendu poser cette question un tantinet terrifiante. Et si le sommet devenait quelque chose qu'il fallait payer ? Alors, la question est angoissante, mais moi j'en ai une autre qui suit, encore plus angoissante. Et est-ce qu'il y aurait d'autres besoins fondamentaux qui risquent, d'après toi, d'être privatisés par la tech ?

  • Speaker #3

    Oui, alors notre attention l'est déjà, non ?

  • Speaker #0

    C'est vrai, oui, Thérèse.

  • Speaker #3

    Notre ennui aussi, on ne s'ennuie plus. Je dis toujours à mon fils, il me dit « Maman, je m'ennuie » et moi je lui dis « C'est génial, Loulou, ennuie-toi, c'est la meilleure chose qui puisse t'arriver » parce que c'est là aussi qu'on a la curiosité qui arrive dans ces moments d'ennui. J'avais remarqué aussi les rires et les cris des enfants dans les rues, on les entend beaucoup moins qu'avant, ils jouent moins.

  • Speaker #0

    Ils sont moins dehors.

  • Speaker #3

    Exactement, on voit marcher des ados dans la rue, ils sont sur leur téléphone en marchant. On peut imaginer la même chose pour l'air qu'on respire, imaginons qu'on doive payer pour respirer un air pur. Le silence, l'intimité, le droit de posséder son corps, on voit l'avortement aux Etats-Unis, ce qui est en train d'arriver. La lenteur, la paresse, la lecture, les promenades dans la nature, les arbres. Dans mon livre, je parle d'un musée des arbres, parce qu'il y a beaucoup moins d'arbres dans le monde que j'ai imaginé. Et dans ce musée, il faut payer pour voir des arbres encore vivants, une diversité d'arbres. Et en fait, je me dis que potentiellement, tout ce qui est gratuit et naturel peut être transformé en marchandise. Et ce n'est pas forcément la rareté qui crée la valeur, mais le fait d'être dépossédé de certaines choses. Quand on nous les retire, on peut nous faire payer pour quelque chose qu'on avait déjà.

  • Speaker #0

    C'est quand même... Schizophrène comme posture, mais tu as raison, quand on y regarde de plus près, c'est un peu quand même ce qui est en train de se passer. Et il y a quelques temps de ça, j'assistais à une conférence sur la nature, où ils expliquaient quelque chose, dire qu'il faut des études scientifiques pour le prouver, qu'un homme ou une femme, enfin un humain, est mieux quand il est en contact avec la nature. Bon, je simplifie volontairement. C'est ça,

  • Speaker #3

    on entend les oiseaux.

  • Speaker #0

    Mais voilà. Et je me dis, mais c'est peut-être un acte de rébellion qu'on peut avoir, nous, dès maintenant, de retourner dans cette nature, de nous reconnecter à ces choses qui sont simples et qui vont nous permettre justement de prendre de la hauteur sur le reste et de nous dire que c'est là qu'est l'essentiel, c'est là qu'est notre vie, et pas uniquement dans la tech ou dans les réseaux sociaux. Et dans ton roman, tu pousses le bouchon carrément un peu plus loin parce que la santé n'est plus un droit. C'est carrément devenu un produit qui a déjà un peu répondu préalablement, mais on voit cette dérive déjà dans notre société actuelle.

  • Speaker #3

    Oui, on voit clairement le basculement de la santé vers le domaine privé. Et quand ça se privatise, c'est un basculement vers le produit, les marchandises. Et mon roman pousse la logique jusqu'à l'extrême et s'appuie sur une réalité déjà tangible. Le glissement progressif de la santé du domaine du droit vers un produit marchand. Et on le voit avec plusieurs acteurs, la médecine, les assurances, les big tech, l'industrie pharmaceutique. Pour quelques exemples, on voit aux États-Unis, ce qui est déjà le cas pour les assurances. Ce sont les sociétés qui assurent les gens, ils pourront être en bonne santé, respecter certaines règles pour être bien assurés, pour ne pas payer une prime trop chère. On le voit avec la médecine, la médecine à la carte ou personnalisée. C'est un peu une médecine à deux vitesses. Il y a la médecine curative pour le plus grand nombre, et heureusement. Et puis il y a la médecine préventive et prédictive pour les autres.

  • Speaker #0

    Alors, ça aussi, c'est quand même fou parce que tu te dis, la médecine telle qu'elle existe aujourd'hui a des failles, comme tout système, comme toute chose. C'est tout à fait naturel, rien n'est parfait. Et au lieu d'aller repuiser dans des connaissances ancestrales, de s'appuyer sur... des approches plus holistiques, on a tendance à les mettre, je trouve, de côté en se disant « Oh oui, on parle de médecine parallèle ou de médecine douce » comme s'il y avait une sorte de classement, que c'était inférieur, alors que ça a aussi ses vertus, ça a aussi son approche qui est beaucoup plus, là encore, connectée au vivant dans son ensemble. mais ça C'est de plus en plus, et tu viens de le dire, réservé à une minorité parce qu'il faut payer pour des choses qui nous maintiennent en bonne santé. C'est fou.

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. De toute façon, on voit clairement l'orientation des big tech vers le domaine de la santé. Il y a clairement un besoin, justement, d'avoir tout réuni en un seul endroit, avoir une médecine holistique. Et il y a des players qui se mettent vraiment dans... Dans ce chemin-là ?

  • Speaker #0

    Sur ce chemin, oui, c'est exact. Tu décris comment tu as commencé à voir ton corps non plus comme quelque chose avec lequel vivre, mais comme quelque chose à optimiser. Ce mot optimiser, performer aussi, une déshumanisation en quelque sorte. Comment elle s'opère concrètement ?

  • Speaker #3

    C'est terrible. En fait, ça a commencé, je dirais, avec ma montre connectée. pendant le que vide mon chéri mais en faire une montre connectée parce que je voulais me remettre au sport on était enfermé donc c'était vraiment voilà j'avais besoin de bouger et donc je me suis dit on ne peut améliorer que ce qu'on peut mesurer et voilà j'aime bien l'année J'ai commencé à m'améliorer aussi bien physiquement que mentalement. C'est un peu ma personnalité. Et donc avec cette montre, j'ai commencé à me mesurer. J'ai commencé à me sentir coupable de ne pas faire mes 10 000 pas par jour. J'ai commencé à regarder mon fitness age. Je vois que tu n'as pas de montre, mais tant mieux. Elle te donne ton fitness age. Donc au plus tu fais du sport, au plus ton fitness age diminue, donc ton âge biologique, entre guillemets, tu as ton âge chronologique et biologique. Et donc je suis arrivée dans une obsession de diminuer un maximum mon fitness age. Et par exemple, c'était tellement... C'est là que j'ai posé des questions parce que j'ai eu un limbago. Et je me suis dit, ma première pensée, c'était pas mince. Comment guérir mon dos ? Que faire pour ça ? C'était mince, je vais pas pouvoir faire du sport. C'est horrible, mon fitness age va augmenter. Non mais c'est terrible. Et donc on se met au final, c'est totalement un contresens parce que quelque chose, on est censé être dans le bien-être. Et en fait, c'est quelque chose qui commence à nous posséder et à devenir obsessionnel.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on n'est plus dans le bien-être, on est dans le bien-être contrôlé.

  • Speaker #3

    Contrôlé, voilà. Performance, mesurée, s'améliorer constamment, voilà, c'était vraiment ça. Et c'est ça que j'ai cherché à comprendre et à mettre en avant dans mon livre, qui est un peu une société focalisée autour de la santé, une santé obligatoire.

  • Speaker #0

    Une santé obligatoire et qui devient complètement délirante à certains moments, parce que tu cites, ou tu as déjà mentionné plusieurs fois Brian Johnson, qui est un homme qui investit, attention, 2 millions par an pour redevenir jeune. C'est incroyable ce truc. Alors, cette obsession de l'optimisation de soi par rapport à notre humanité et notre finitude, qu'est-ce que ça révèle ? Parce que comme le disait Patricia Ferrand dans l'épisode 49, je peux le citer parce qu'il est récent le chiffre, sinon j'oublie. d'éclats de voix qu'on avait consacré au deuil, elle nous disait justement « Mais notre seul projet commun à tous sur cette planète, que nous soyons dans telle ou telle société, que nous ayons telle ou telle culture, c'est que nous sommes finis, que nous allons mourir. » Donc là, il y a quelque chose qui est complètement nié presque.

  • Speaker #3

    Ah oui, c'est totalement dingue. Justement, Brian Johnson, l'homme le plus mesuré au monde...

  • Speaker #0

    Ah, tu as un concurrent.

  • Speaker #3

    Oui ! Ça fait que je n'ai que ma montre. Ah non, mais il mesure l'âge de tous ses organes. Donc, de son cœur, de son cerveau, de ses poumons, même de son pénis. Il mesure tout et il veut diminuer l'âge biologique de tous ses organes. C'est complètement dingue. Et par rapport à la finitude, moi, je trouve que c'est vraiment... Ça va dans des extrêmes parce qu'on se déconnecte, au final, du plaisir. Pour moi, la vie, ça doit être le plaisir. C'est ça qui est génial. Et de nouveau pour revenir à Brian Johnson, lui tous les matins au petit-déj il ne mange qu'une fois par jour avec plein de médicaments. Et pendant qu'il mange son petit-déj, il s'entraîne à sa souplesse et il fait des grands écarts. Donc je me dis, un des grands plaisirs de la vie c'est manger, non ? Donc super, son cœur il est sans doute plus jeune que le mien, mais voilà, moi en tout cas je prends plaisir à manger.

  • Speaker #0

    Non mais on se dit qu'il finira dans une boîte anyway, donc bon, avec un cœur peut-être plus jeune que le tien. J'imagine la scène. Un film. Il aurait pu être dans ton roman, ce gars-là.

  • Speaker #3

    Ah, mais je m'en suis inspirée. J'avais oublié, justement. Je m'en suis inspirée pour Mon vilain. Cette quête, cette obsession, le transhumanisme. Voilà. Donc, Mon vilain, j'ai pris certaines choses de Brian Johnson.

  • Speaker #0

    Allez lire, allez lire. Je ne saurais que vous le répétez et vous inciter à le faire. Alors, justement, dans ce monde où l'IA, puisqu'on parle d'elle, commence à pouvoir détecter des maladies avant même les symptômes, je me dis, mais est-ce qu'on n'est pas en passe de perdre ce rapport instinctif, intime, intuitif aussi, d'intuition à notre propre corps ? Est-ce qu'on est... Aujourd'hui, moi, je me pose la question, est-ce qu'on est vraiment prêt à déléguer tous ces pouvoirs à des machines ? Au final, quels bénéfices on va vraiment en tirer ? Sans compter que... Il faut être honnête, les machines, pas plus que les humains, aujourd'hui ne sont fiables à 100%, parce qu'on n'est pas tous des robots, on n'est pas tous clonés, donc on n'est pas systématiquement identiques. Je veux dire, nos ADN sont différents, à l'intérieur de nous...

  • Speaker #1

    Si on regarde une forêt,

  • Speaker #0

    il n'y a pas deux arbres qui sont strictement les mêmes. Donc c'est pareil pour les humains. Les machines, elles, par contre, ce sont les mêmes. Donc il y a une sorte, pour moi, de décalage entre les deux. Mais ce qui m'inquiète, c'est comment est-ce qu'on... peut vouloir, à ce point, nous remettre entre les mains d'un robot.

  • Speaker #3

    C'est dingue parce que ta question, ça m'est vraiment arrivé. Je vais commencer par un exemple, c'est le score de sommeil de ma montre connectée. Donc les matins, je ne le fais plus, j'ai appris la leçon, mais les matins en me levant, je regardais mon score sommeil et j'ai remarqué que je me levais par exemple pleine d'énergie et je regardais ensuite mon score sommeil qui était de 23%, donc tout pourri.

  • Speaker #0

    Révélation, le score sommeil d'Anna est pourri.

  • Speaker #3

    Mais oui, et je me dis, mais comme tu dis, c'est des moyennes, Donc... Donc, par rapport à la moyenne qui dort super bien, moi, j'étais à 23 %, donc nulle. Et donc, ça me mettait le moral dans les chaussettes alors que je me sentais pleine d'énergie. Et je me dis, mais c'est quand même ridicule. Là, je me sens pleine d'énergie, en forme et un score parce que la montre a dit que j'ai mal dormi. Moral dans les chaussettes. Donc, du coup, elle avait raison. C'est un peu une prédiction autoréalisatrice. Donc, voilà, tout à fait. On perd un peu la notion de s'écouter. mais oui il y a des bénéfices immenses de certaines technologies, de détecter plus tôt, de sauver des vies, d'anticiper des crises. Mais il faut garder le droit de ne pas tout savoir et surtout de ressentir plutôt que de mesurer, d'être à l'écoute de son corps au final et de rester propriétaire de nos corps.

  • Speaker #0

    Ça, j'aime bien, le droit de ne pas tout savoir. Parce que finalement, pour l'instant, nos cerveaux ont beau être ultra puissants, nos ordinateurs aussi, même plus que peut-être un jour nos cerveaux, je ne sais pas ça. mais en tous les cas une chose est certaine c'est que le miracle de la vie personne pour l'instant n'a la clé tout à fait alors les l'écriture comme forme de résistance tu dis que tu as écrit les premières lignes de ton roman à la main la nuit loin de tout écran donc est-ce que tu avais ta montre pendant ces moments là C'est pour ça que tu avais un score de 23%. Si tu écris la nuit, forcément, tu as 23% à l'arrivée. Excuse-moi.

  • Speaker #3

    Non, alors bon. Mon livre s'appelle Sans Sommeil. Je suis un petit peu insomniaque. Donc, c'est aussi un espace de créativité. Mais donc, cette nuit-là, c'est plutôt... J'ai fait ça sur papier et dans un carnet. C'est plutôt une hygiène de vie. Donc, je dors avec ma montre, mais mon téléphone ne rentre pas dans la chambre le soir. Voilà.

  • Speaker #0

    Donc, c'est un petit peu... En faisant ça, c'est une sorte de rébellion, d'acte de résistance d'écrire à la main par rapport à la technologie ou c'était juste comme ça ?

  • Speaker #3

    J'adore les cahiers, les crayons, j'adore écrire, faire des petits dessins. Et de nouveau, ce n'est pas possible d'avoir un écran à côté de moi la nuit. Imagine, j'ouvre un écran bleu. Non, non, c'est vraiment, j'ai mon cahier parce que j'aime bien me souvenir de mes rêves aussi. Donc, je note mes rêves pendant mes insomnies. Voilà, un petit carnet.

  • Speaker #0

    Alors, est-ce que cette fiction dans laquelle tu as choisi de t'installer, t'a permis de dire des vérités ? Un essai, par exemple, ou bien un rapport de consultant comme tu étais avant, ça t'aurait permis de l'exprimer ?

  • Speaker #3

    Le roman, en fait, je trouve qu'il touche beaucoup plus un public plus large. L'essai, c'est quelque chose un peu pour démontrer, c'est beaucoup plus factuel. Le roman laisse de la place à justement la curiosité, à poser des questions. Moi, ce que j'ai voulu, c'est poser des problématiques, pas pour donner des solutions, mais pour qu'on puisse se questionner, laisser des montres. Le consultant clarifie, il donne des chiffres, il oriente. Alors que moi, je voulais peut-être un petit peu troubler, faire bouger quelques lignes, en tout cas, faire se poser des questions.

  • Speaker #0

    C'est une bonne chose. Et ma question était évidemment un petit peu... provocatrice parce que bien évidemment un roman n'a rien à voir avec un rapport de consultant mais c'était juste pour dire que malgré tout un rapport ça donne une certaine lecture du monde oui à des gens et j'étais entendu cité octavia butler qui dit de point ouvre les guillemets l'acte même d'essayer de regarder vers l'avenir pour discerner les possibilités et offrir des avertissements est est en soi Un acte d'espoir. Fermez les guillemets. Est-ce que, si on pousse le bouchon encore un petit peu plus loin, tu dirais que cette écriture dystopique que tu as choisie pourrait être considérée comme une forme d'acte politique ?

  • Speaker #3

    Alors, non, je ne dirais pas que c'est un acte politique. Ce que je fais, comme je disais un petit peu avant, c'est poser des questions et explorer des possibles. Me poser la question « et si ? » « Et si ? » J'adore. C'est un livre génial. « Et si ? » de Jean-Michel Ausha. Non mais j'adore, c'est une question vraiment géniale, ça permet d'imaginer et je ne veux pas te donner de solutions ni de leçons. Ce que je veux c'est vraiment d'ouvrir un espace de réflexion, de suicider. des interrogations et de porter un regard attentif sur notre époque en fait. Et comme disait Octavia justement, c'est vraiment un acte d'espoir de tenter de voir ce qui peut arriver et de mieux le comprendre pour que ça n'arrive pas.

  • Speaker #0

    Alors pour que ça n'arrive pas, tu dis construisons non pas ce qui est possible mais ce qui est humain. Qu'est-ce que toi tu proposerais aux acteurs de la tech pour que ça n'arrive pas ?

  • Speaker #3

    Alors je dirais de recentrer les... Les technologies et les innovations sur les besoins réels des personnes. Il y a beaucoup d'innovations célèbres, par exemple l'iPhone, la réalité virtuelle ou les réseaux sociaux, qui ont été inventés pas par un besoin. Franchement, on n'a pas besoin d'iPhone, non ? Ou les réseaux sociaux.

  • Speaker #0

    Non, pas du tout.

  • Speaker #3

    Ça ne vient pas du tout d'un besoin, ça vient d'un génie qui a une idée. Et donc le monde s'est adapté à une technologie. On a tous été dans la même direction d'un génie un peu fou. Au lieu d'écouter vraiment nos besoins et les choses importantes, donc ça pose un problème parce qu'on peut créer des fois des objets et des services avant même de s'interroger sur l'impact humain, social et éthique. Je pense que la régulation a beaucoup à jouer là-dedans. Je sais qu'on dit que l'Europe c'est un peu vieux jeu parce qu'on essaie de tout réguler, mais au final dans ce monde contrôlé de plus en plus par l'intelligence artificielle, je pense que c'est la bonne direction à prendre.

  • Speaker #0

    La bonne démarche à avoir, oui. Alors toi, tu as une particularité quand même, c'est que tu as vécu une forme de passage de la transformation digitale à l'écriture, dans un premier temps, dystopique, et ça te donne finalement une perspective unique. En partant de là, est-ce que tu crois qu'on peut imaginer une tech qui soit plus humaine et aussi potentiellement plus écologiquement soutenable ?

  • Speaker #3

    Oui, je pense que c'est possible, à condition de renoncer à la vitesse et à la nouveauté comme valeur suprême, et aussi à la consommation. Malheureusement, la plupart des intérêts sont driveés par l'argent. Et donc, c'est un peu ça qui définit les technologies. Et le fait qu'on nous mette entre les mains des choses finalement pas très utiles et qui peuvent nous rendre accros. Et en ce sens, mon parcours me fait voir que la tech, ne doit pas être une fin en soi, mais un moyen. Ça doit vraiment être un outil et pas quelque chose qui nous contrôle et est néfaste pour nous.

  • Speaker #0

    Ce que j'entends en filigrane, c'est que c'est même pas le problème de la tech, c'est encore et toujours le problème de l'argent.

  • Speaker #3

    Oui, je pense que c'est un bon résumé.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu espères que ton roman transforme le regard des lecteurs sur leur propre rapport à la technologie ?

  • Speaker #3

    Alors, je ne cherche pas à convaincre, mais si le lecteur, après avoir lu mon roman, se pose une question qu'il ne s'était jamais posée, alors c'est génial. C'est la prise de conscience que je trouve super. Et s'il découvre de nouvelles choses, si ça l'aide à être plus curieux sur certaines thématiques, c'est parfait.

  • Speaker #0

    Donc, allez-y, ouvrez le livre pour être curieux et avoir vous poser de bonnes questions. Qu'est-ce qui serait pour toi le succès de ce qui se révèle aujourd'hui être une forme de prise de parole qui est la tienne avec ce premier roman ? Ce serait de l'ordre de, je ne sais pas, voyons large, grand, changer les comportements individuels, voire influencer les politiques publiques, même si on l'a bien entendu tout à l'heure, tu nous as dit que ce n'était pas un acte politique pour toi d'écrire.

  • Speaker #3

    Eh bien mon envie première, c'est que le lecteur passe un bon moment, qu'il se déconnecte. qui prennent le temps, de la lenteur, de la lecture, qui rient, qui apprennent des choses et que, comme je disais, qu'ils puissent se poser des questions qu'ils ne s'étaient jamais posées avant. Et j'ai eu deux remarques de deux lecteurs qui m'ont énormément touchée. C'est de Sarah et Dany. Ils m'ont dit que grâce à mon roman, ils s'étaient remis à la lecture.

  • Speaker #0

    C'est incroyable.

  • Speaker #3

    J'ai trouvé ça incroyable parce que c'est mon activité préférée. Le fait que deux personnes lisent plus maintenant grâce au fait d'avoir lu mon roman, c'est incroyable.

  • Speaker #0

    Ah, ça fait des frissons ! Oui, c'est génial ! Alors, pour continuer dans cette dynamique, est-ce qu'après Sans Sommeil, tu comptes continuer à utiliser la fiction comme outil de, je mets des guillemets, d'énonciation ? Parce que je pense que tu vas me dire que ce n'est pas vraiment ça, mais est-ce qu'il y a d'autres sujets qui t'interpellent pour ça ?

  • Speaker #3

    Oui, alors, beaucoup de sujets m'interpellent. Les inégalités, les injustices, la technologie, l'obsession de la santé. J'aime bien explorer de nouvelles formes, j'aime pas les cases, j'aime pas être mise dans une case. Donc voilà, j'ai envie d'explorer quelque chose d'autre que la fiction. En tout cas, la dystopie, j'avais une idée d'écrire un roman sur les robots et la fin du monde, qui est un peu un classique des dystopies. Et là, je m'oriente plus vers une biographie d'une personne décédée qui me passionne. Voilà, donc j'aimerais commencer en septembre et faire autre chose, mais toujours dans l'écriture.

  • Speaker #0

    Wow ! Donc, on sait qu'il y aura potentiellement plus tard un roman pour en revenir avec les robots, la fin du monde et l'attendant. Ah ah, la biographie mystère. Mystère. Ouah, j'adore.

  • Speaker #3

    Et il pourrait y avoir une suite à Sans Sommeil. Ah ! J'ai beaucoup de demandes de lecteurs qui aimeraient justement une suite. Tu me diras ce que tu en penses.

  • Speaker #0

    C'est fou parce que souvent les écrivains disent ça, que les gens ont envie, une fois qu'ils sont plongés dans leur univers, de poursuivre un peu. C'est un goût de trop peu, on a envie d'aller encore plus loin.

  • Speaker #3

    Et quel commentaire !

  • Speaker #0

    C'est génial. Alors, pour conclure cet épisode, j'avais envie de te demander, mais comment est-ce que tu aimerais qu'à leur tour, nos auditrices, nos auditeurs s'engagent, puisque encore une fois, c'est le concept favori d'Éclat de Voix, sur ces sujets qui sont brûlants, voire clivants parfois, il faut bien l'admettre, et quel premier pas tu leur suggérerais ?

  • Speaker #3

    Alors, breaking news ! Alors, ça serait lire, lire, lire. C'est une ode à la lecture que je fais, mon activité préférée. Lire des avis différents, se faire sa propre opinion, continuer à développer l'esprit critique, lire aussi bien des livres, des romans, des essais, des biographies, un peu de poésie dans notre vie, et lire des médias indépendants. Je recommande un super livre qui est « Sauver l'information de l'emprise des milliardaires » d'Olivier Legrain et Vincent Hédin. C'est absolument « eye-opener » , comme on dit. On apprend beaucoup de choses. Questionner ce qu'on lit et ne pas prendre pour agent content sur toutes les opinions. Aujourd'hui, les opinions sont un peu annoncées comme des faits, ce qui n'est vraiment pas le cas. Et enfin, c'est être curieux, qualité principale numéro un, et humble devant le peu de choses que nous savons en final.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'on ne sait pas grand-chose. On a l'impression de beaucoup savoir parfois, mais pas du tout. curiosité lecture ça me va je coche les caches j'adore merci merci beaucoup on mettra les la référence du livre dans les notes de l'épisode je te prends un peu à brûle pourpoint là mais avant vraiment de rendre l'antenne ce

  • Speaker #3

    serait quoi ton dernier éclat de voix alors ce serait de prendre plaisir à la vie et il ya quelque chose que j'aime bien dire c'est que la vie est trop courte pour tirer la gueule

  • Speaker #0

    En tout cas, ce n'est pas ton cas. Merci, merci Anna d'avoir été là avec nous pour cet entretien passionnant. Les amis, vous savez qu'il faut absolument aller lire ce livre Sans Sommeil que vous retrouvez partout ?

  • Speaker #3

    Partout, oui. Donc, il est chez Ernst & Co dans les librairies. On peut le commander dans n'importe quelle librairie. Il est sur toutes les plateformes. Et en version digitale, il est à 3,99 euros. J'insiste sur le 99 parce que je suis belge.

  • Speaker #0

    Excellent. Merci, merci mille fois, ça a été un plaisir de partager ce moment avec toi Anna.

  • Speaker #3

    Merci Anne-Claire, tu m'as vraiment mise mal à l'aise, j'étais un peu stressée mais ça s'est super bien passé et je te trouve très accueillante et très prudente tout ce que tu fais, merci à toi.

  • Speaker #0

    Bon alors du coup tu étais plus mal à l'aise après.

  • Speaker #3

    Non, c'est génial. Venez, venez, elle est top.

  • Speaker #0

    Merci, à bientôt. « La vie est trop courte pour tirer la gueule » ,

  • Speaker #1

    nous a dit Anna. Alors quittons montres, applications et autres écrans qui nous épuisent et qui nous poussent constamment à optimiser notre existence au lieu de la vivre. Prenons le chemin inverse,

  • Speaker #0

    celui du papier plutôt que de l'écran, du corps qui s'étire au lieu de la performance qui stresse,

  • Speaker #1

    de la respiration profonde au lieu de la respiration superficielle, synonyme de stress, elle aussi. Et c'est exactement ce que je vous propose dans la retraite que je vous invite à venir vivre avec moi du 31 août au 6 septembre en Drôme-Provençal. La voix du corps, l'écho des mots à la ferme salade. Six jours pour désapprendre l'optimisation et réapprendre l'intuition, entre autres. Et puis, laisser aussi les mots couler comme ils viennent, retrouver une fluidité, une naturalité. Je crois que ça n'existe pas ce mot. Enfin bref, une façon de s'exprimer naturelle sans algorithme pour nous mesurer. Parce qu'au fond, Anna nous le montre bien. Si on veut faire bouger les choses, ça commence par soi, par une reconnexion profonde à soi-même et à ce que l'on a vraiment envie de proposer et de vivre dans ce monde-là, loin du bruit et près de l'essentiel. Vous retrouverez tous les détails sur mon site, je mettrai tous les liens. aussi dans la description de l'épisode. Et puis maintenant, vous allez éteindre votre montre et vous allez marcher sans compter vos pas.

  • Speaker #0

    Voilà.

  • Speaker #1

    Ah oui, non mais avant ça, avant ça, avant ça. Et d'ici notre prochain rendez-vous,

  • Speaker #0

    je vous souhaite des éclats de voix un peu dystopiques,

  • Speaker #1

    très romanesques et surtout plein d'espoir.

Share

Embed

You may also like