- Speaker #0
Je me suis échappée quelques temps en Italie. Et sans le savoir, je faisais une fugue. Eh oui, une fugue ! Une expérience ainsi conceptualisée par Alice Chéron, fondatrice de Alediferenze. Cette idée qu'à certains moments dans nos vies, quitter le lieu dans lequel nous sommes, nos habitudes, notre cadre de référence pour aller nous ressourcer seuls, Et c'est important, le seul, assez loin, ailleurs en tout cas, est une véritable aubaine. Alors bien sûr, dans ces circonstances-là, on fait face immédiatement à nos propres questionnements, au bourdonnement de nos pensées qui virevoltent, nos inquiétudes, nos peurs qui refont surface, à ce dialogue intérieur, cette petite voix qui n'est plus petite du tout et qui, soudain, peuvent tous devenir assourdissants, prendre une place monumentale. inquiétant en ce même. J'ai eu la grande chance d'aller rencontrer Alice sous un merveilleux soleil d'automne florentin et de lui demander comment faire ami-ami avec cette parole intérieure lorsqu'on se retrouve seul. Bienvenue dans Éclat de voix, le podcast des prises de paroles engagées qui donne envie de s'exprimer. et vous guide vers une communication vibrante, percutante, décomplexée parce qu'elle vient du cœur. Je suis Anne-Claire Delval, ancienne journaliste, modératrice, facilitatrice de cette prise de parole engagée. À ce micro, je vous donne de l'impulsion, des pistes, de la matière à réflexion, méditation, réaction. Je piétine allègrement quelques idées reçues et autres injonctions. exaspérante pour qu'à votre tour vous osiez rayonner. Portez haut et fort vos convictions, vos projets, vos entreprises. Dire plutôt que taire. Eccoci à l'épisode audio d'O.G. Alice a emmené beaucoup de femmes en fugue. Attention, des fugues exclusivement italiennes, puisque l'Italie est devenue sa seconde patrie. Dans le livre qu'elle a consacré à cette parenthèse initiatique, l'appel de la fugue, elle écrit ceci. La fugue s'accompagne d'une liberté folle, mais ce fait a un prix, celui de la transparence, une honnêteté que l'on se doit à soi-même. Affronter ses démons, réfléchir à ses échecs de manière constructive, se poser les questions qui fâchent, dans son cas à elle suis-je capable d'être mère, font partie des moments... clés de la fugue. Ce sont ces derniers qui nous donnent aussi le sentiment d'avancer, d'avoir débloqué quelque chose. Quel que soit le résultat de la fugue, action concrète, silence, réflexion à mener sur le long terme, discussion avec son conjoint ou son patron, l'objectif principal reste d'être clair avec nous-mêmes sur les raisons qui nous poussent à ce choix. Je vous emmène donc. à Florence pour l'écouter en sirotant un café macchiato, en savourant un risotto aux légumes du soleil dont vous trouverez la recette sur son site Alice di Firenze ou une glace à la pistache. Mais une vraie, pas celle toute verte et artificielle. Nous allons nous régaler !
- Speaker #1
Bonjour Alice ! Bonjour Anne-Claire !
- Speaker #2
Merci d'avoir accepté de participer au podcast.
- Speaker #1
Merci à toi.
- Speaker #2
Alors, ces fugues, ça peut faire rêver, ça donne envie. Et en même temps, je me dis, quand on se retrouve dans cette situation de fugue, même si on l'a choisie, même si on l'a préparée, comme tu en parles dans le livre, tu le proposes tout un parcours à faire, je me dis, une fois qu'on est là, on va se retrouver face à soi-même, on va se parler à soi-même. Comment est-ce qu'on peut traduire,
- Speaker #0
toucher,
- Speaker #2
apprivoiser tous ces mots ? qui vont commencer à tourbillonner dans notre tête.
- Speaker #1
Ce n'est pas une question facile, parce que je pense que pour s'écouter convenablement, il faut avoir une attitude bienveillante envers soi-même. Et bien souvent, quand on arrive en fugue, quand on est dans des moments de changement, quand on se pose beaucoup de questions, ce n'est pas évident d'avoir ce rapport-là. avec soi-même. Il y a même parfois des techniques d'évitement où en fait on est très éloigné de nos envies profondes, de qui l'on est, etc. On a mis beaucoup de couches par dessus tout ça. Donc revenir dans le dialogue, c'est accepter de s'envisager comme une personne bienveillante. C'est travailler ce rapport-là de bienveillance entre soi et soi-même. C'est pas facile. Moi je dis toujours, j'aime l'idée de laisser les idées remonter à la surface un peu comme des bulles. Donc je crois qu'il faut se laisser un petit peu de temps dans le moment de la fugue pour voir ces idées. Qu'est-ce qu'on va se dire en fait ? On ne sait pas ce qu'on va se dire. On ne sait pas ce qui va arriver dans nos têtes, dans nos cœurs, dans notre esprit. C'est aussi en fonction de ce qu'on va faire que des choses vont aussi émerger. En fait, bien souvent, je l'ai remarqué dans mes propres fugues personnelles, mais aussi dans les fugues italiennes, où on a accompagné plus de 300 femmes dans ce projet des fugues, que bien souvent, tu arrives en fugue en étant sûr du sujet que tu dois traiter, parce que justement, tu as un changement en tête, tu as quelque chose dans ta charge mentale, mais bien souvent, à la fin des deux jours, trois jours, quatre jours, tu repars en ayant pensé complètement à autre chose. Parce qu'en fait, avoir cette espèce de... page blanche, de terrain, de neutralité, où que tu sois. En fait c'est ça la magie, c'est ça qui fait peur parce que tu ne sais pas ce qui va se passer, mais je pense que c'est ça le plus beau cadeau dans le contexte de la fugue, c'est de laisser le point d'interrogation, d'accepter que c'est une page blanche et de voir ce qu'il va ressortir.
- Speaker #2
C'est intéressant parce que souvent on se parle à soi-même comme jamais on parlait à un ami, donc la question de la bienveillance envers soi-même. Peut-être qu'il faut qu'on la cultive un petit peu avant de partir, je ne sais pas, parce qu'écouter sa propre voix, parfois ça peut faire peur. Alors comment est-ce qu'on peut justement dépasser plutôt ce brouhaha mental qui va probablement induire une sorte de chaos émotionnel, parce qu'on part peut-être avec une idée, comme tu l'as bien dit, souvent il y a autre chose qui advient et qui était peut-être plus en profondeur, qui en profite pour remonter à la surface, comme tu le disais. Comment est-ce qu'on peut faire au cours de ce temps qui finalement est une introspection pour gérer ce qui peut arriver, enfin gérer tant et qu'on puisse gérer, mais en tout cas accueillir ce qui est là ?
- Speaker #1
Alors déjà moi je rebondis sur ce que tu as dit sur le rapport de bienveillance. Moi il y a eu un moment où je me suis rendu compte qu'en fait je me parlais à moi-même, mais je ne parlais à personne d'autre comme ça en fait. Le temps, les accusations, la dureté, le niveau d'exigence, je n'ai... aucune de ces choses-là avec d'autres personnes qu'avec moi-même. Je me dis en fait, une amie, je ne lui dirai pas ça comme ça, ma sœur, je ne lui dirai jamais ça comme ça, commençons par faire redescendre la pression. Donc déjà, ça c'est vraiment un truc fondamental, et je crois qu'en fait, c'est qu'une question de déclic. Tant que tu ne t'en rends pas compte, tu continues. Quand tu as ce petit moment où tu te dis, ah non mais là en fait, je ne peux pas me traiter d'incapable totale parce que je n'ai pas réussi à faire ça. Donc c'est... Une histoire de réflexe, ça se travaille. Et en effet, comment accueillir cette espèce de flot qui peut nous tomber dessus en fugue ? Alors déjà, je pense qu'il faut envisager tout projet de la fugue comme quelque chose d'extrêmement positif. C'est-à-dire qu'il ne faut pas mettre, moi je dis toujours à mes fugueuses, de ne pas mettre d'objectif à leur fugue. La fugue s'est déjà gagnée parce qu'elles sont là, elles sont présentes là où elles sont. Donc en fait, le fait de partir est déjà un succès en soi. Encore une fois, pour ne pas s'en rajouter sur les épaules. avec cette idée de transformer l'essai, où je pars et il faut que j'en fasse quelque chose. Non, déjà, il faut être dans le plaisir. On est là pour prendre du temps, réfléchir, peut-être, mais en fait, accueillir dans un contexte qui est quand même censé être un petit peu joyeux et un petit peu en phase avec ce qu'on a envie de faire. Et ça, je trouve que déjà, ça fait redescendre un peu la pression. Moi, je pourrais conseiller peut-être de noter, en fait, d'avoir un petit carnet, petit format, là, glissé dans le sac. pour faire que toutes ces pensées qui peuvent partir dans tous les sens, ces espèces d'illuminations aussi qu'on peut avoir, tu sais, des fois tu as des espèces de fulgurances, alors qu'en fait tu es juste en train de boire un verre de pinard devant un petit canal quelque part, de le noter en fait, et de ne pas forcément le relire tout de suite, c'est peut-être quelque chose qui se relie à la fin de la fugue, dans le trajet du retour notamment, où tu peux tenter de faire un petit bilan de tes pensées, de voir ce qui t'a surpris, ce qui ne t'a pas surpris. Et puis après, on n'est pas là en fugue pour, et ça rejoint le point de l'objectif, se mettre trois jours à réfléchir comme une dingue et à s'en mettre plein la poire de nouveau dans les objectifs. Donc en fait, si je pars pour le plaisir, j'imagine que des choses vont remonter, mais en fait tout ça est plus léger quand même. Sauf bien sûr, tu vois, j'ai déjà vu des femmes qui ont vraiment eu le besoin de partir trois, quatre jours parce que... l'aspect vraiment nécessaire du fait de prendre une décision. notamment pour des changements professionnels, où j'ai une amie qui était partie 4 jours, s'enfermer dans une maison de campagne, pendant 4 jours, elle a écrit tout ce qu'elle avait besoin d'écrire pour faire le bilan de son état professionnel, les deux voies qui étaient devant elle, et prendre des décisions. Donc là, c'est quand même une fugue, tu vois qu'il y a un contexte vraiment très très précis, mais je pense que dans le cadre d'une fugue autour d'une dimension de plaisir, il faut laisser les choses venir plus légèrement. Et je pense qu'écrire, c'est toujours quand même un bon moyen pour déposer.
- Speaker #2
Je partage l'idée et j'aime bien dans le livre le fait que ça se soit proposé. D'ailleurs, tu proposes aussi des petits carnets qui guident un petit peu peut-être de la vie, parce que la feuille blanche, ça fait aussi peur que les paroles qui montent dans la tête et qui se collent les unes les autres.
- Speaker #1
Mais tu sais, je trouve que parfois, le carnet, en fait, il ne faut pas le voir comme un carnet, comme un journal intime, il faut le voir comme un espèce de flot. Moi, je n'arrive pas trop à le faire sur le carnet, le flow, j'arrive plutôt à le faire sur mon téléphone. J'ai une note qui s'appelle flow et sur le flow, ça n'a aucun sens, ça n'a ni queue ni tête. Des fois, il y a des mots, des fois, il y a des phrases, des fois, il y a des références, mais j'ai déposé quelque part ce que j'avais dans la tête. Et c'est vraiment cette idée de sortir de la tête, poser quelque part, et donc mettre le problème un petit peu à distance, la situation à distance, et la regarder un petit peu différemment plutôt que la laisser comme ça mariner à l'intérieur.
- Speaker #2
C'est une démarche qui permet du recul, qui permet aussi d'apaiser parce que c'est vrai qu'on est tellement dans un flot, mais alors un autre, une agitation permanente, que prendre ne serait-ce qu'un moment pour se dire attends, j'ai ça, je vais tout de suite avant d'oublier, ça me percute tellement fort que j'en garde une trace c'est vrai que c'est intéressant.
- Speaker #1
Oui, mais des fois tu as des idées qui te viennent et en fait c'est dans la formulation de l'idée que va être aussi sa force, c'est-à-dire... que tu veux te séparer de ton conjoint, par exemple. Et puis, il y a un moment, en fait, la façon dont tu vas envisager la situation, peut-être vis-à-vis de toi et pas vis-à-vis de lui. Enfin, c'est parfois... Parfois, les mots comptent énormément dans la prise de décision. Et donc, poser quelque part tout ça, quand ça nous vient, je trouve ça toujours utile.
- Speaker #2
Alors, j'ai découvert grâce à toi que je faisais une fugue. Et je l'ai fait en Italie. Je ne parle pas l'italien, je parle le spagnol, je parle le français. Les Italiens parlent très... peu l'anglais donc ça me met dans une situation qui moi me convient parce que j'aime bien cette mise à distance mais pour beaucoup ça peut être anxiogène, angoissant ou peut-être perturbant. Qu'est-ce que tu proposes dans ce genre de situation ?
- Speaker #1
Alors je pense que la beauté de partir dans un pays où on ne parle pas forcément la langue c'est que dans la mesure où organiser une fugue ce n'est pas facile. Même au bout d'année où tu as l'habitude de partir toute seule, ça demande quand même un effort de logistique, d'organisation. pas forcément vis-à-vis de la famille, vis-à-vis du travail, il y a le chien, il y a des choses à penser pour organiser ce petit bout de temps là pour toi. Le fait de ne pas toujours être dans la possibilité de pouvoir partir dix jours, parfois plutôt trois jours, tu vois, sur des formats courts, il n'y a rien de mieux qu'une langue étrangère pour te faire couper net avec ton quotidien et te plonger à vitesse accélérée dans un autre univers qui est cette espèce de spatio-temporalité de ta fugue tu vois, pendant 48-72 heures. Donc il faut le voir aussi comme ça, comme quelque chose qui t'aide à couper très net avec le quotidien. Et ensuite, je vais utiliser un conseil que j'avais adoré de la part de Miquela, qui est une artisane qu'on a visitée à Venise et qui a toute une démarche éco-responsable autour du tourisme à Venise. Elle crée des bougies qui représentent la lagune qui est en train de s'effondrer avec, tu vois, la cire qui fond, reprenant des motifs de l'architecture de la ville. Enfin, c'est magnifique. Et Miquela, elle m'avait dit un truc, je lui ai trouvé ça génial, c'est qu'elle, elle adore partir dans des pays où elle ne parle pas la langue. C'est pas un critère pour elle de parler la langue quand elle part quelque part. Mais comment elle fait, parce qu'elle, elle a besoin, elle veut toujours se connecter avec les locaux, c'est très important. Comment est-ce qu'elle fait ça ? En fait, elle réfléchit à ses passions et ses centres d'intérêt. Et elle va rencontrer des gens en face qui ont les mêmes passions et les mêmes centres d'intérêt. Elle, c'est une artisane qui fait main. Quand elle part au Maroc... et qu'elle parle pas la langue et qu'elle est au milieu du désert, elle va voir les artisans qui font du fait main. Et en fait, c'est dans les gestes, c'est dans la passion, c'est dans le produit que la communication elle va se faire. C'est pas sujet-verbe-complément, mais c'est... en fait on parle le même langage, toi et moi, via les mains, y'a plein d'autres choses, et c'est comme ça que le lien se fait. J'avais trouvé ça absolument formidable.
- Speaker #2
Alors, en t'entendant parler, objectivement j'ai vraiment des frissons et ça m'émeut beaucoup parce que c'est exactement la démarche que j'ai eue aujourd'hui. Je suis venue en Italie, je me suis connectée, je fais du vélo, je me suis connectée à des cyclistes qui m'ont emmenée découvrir les tours de Luca, ils étaient tellement contents de me montrer. Et ainsi de suite. Et la joie qui avait dans leurs yeux était équivalente à la mienne et en fait c'est là où on se rend compte que la communication elle peut aller au-delà aussi des mots et qu'elle prend une autre forme, une autre dimension. Et on se laisse plus porter dans ce genre de cas.
- Speaker #1
Oui parce qu'en fait tu maîtrises des codes, tu maîtrises les tiens. Tu sais comment le vélo fonctionne, que tu sois ici ou ailleurs. Donc en fait ça te fait un point d'entrée où tu as un tout petit peu de sécurité par rapport au format, à ce qui va se passer. Et évidemment que la communication, elle va se faire d'une manière ou d'une autre quoi. Et ça je trouve ça assez magique. Mais j'avais adoré que Michaela le propose, toi c'est via le sport, parfait exemple, elle c'est via le travail des mains, la manualité où elle va rentrer. chez un encadreur comme chez quelqu'un qui fait de la céramique et en fait ils vont parler le même langage.
- Speaker #2
J'ai beaucoup aimé dans le livre le témoignage d'Anne-Sophie qui dit Une fugue c'est écouter son silence Là encore, on en revient toujours aux mêmes choses, le silence pour certaines ça va être Je vais me plonger dans un petit cocon, enfin on va arrêter de me parler ! Donc on peut imaginer les introverties ou celles qui sont trop agitées, mais pour beaucoup ça peut être Waouh ! face à ce... On pourrait mettre entre guillemets comme étant un vide, l'ennui d'ailleurs, je reviens encore dans le livre, mais ça fait souvent écho à ce que moi je pense aussi, tu décris bien que l'ennui, le vide c'est absolument fondamental, donc là comment est-ce qu'on peut naviguer dans ce vide qui finalement est au fond super créatif ?
- Speaker #1
Ouais, alors tu vois plus j'avance en âge, plus m'ennuyer, trouver des plages... de rien ou de très petites activités sans objectifs, pas surplanifiées, en tout cas essayer de maintenir des plages de vitre comme ça dans le quotidien, c'est devenu complètement fondamental. Moi j'ai l'impression de temps en temps, tu vois, quand je suis dans une frénésie totale de choses à faire, la vie sociale par-dessus, la vie de famille par-dessus, le quotidien hystérique, en fait j'ai l'impression que je vis pas dans mon propre corps. Enfin tu vois, t'as un espèce de truc dissociatif où tu fais avancer la machine comme une dingue. et tu ne sais plus où tu habites. Et il y a un moment, il faut être capable de se poser, il faut être capable de voir ce qui se passe quand il ne se passe rien. Parce qu'en fait, le rapport entre toi et toi-même, l'écoute, l'observation, et qu'est-ce que je fais quand je m'ennuie, ça va être quoi la première petite activité ? Est-ce que je retourne vers mon bouquin ? Est-ce que je sors mon carnet à dessin ? Est-ce que je me rappelle ce que je faisais quand j'avais 7 ans ? Est-ce qu'en fait j'ai envie ? de m'asseoir là et de regarder le paysage et en fait peut-être je le fais 20 minutes peut-être que je le fais 2 heures c'est ça qui est intéressant je trouve que c'est là où la beauté d'un moment avec soi-même il se joue dans ces moments là il se joue pas dans planifier une fugue où tu vas mettre 25 visites en fait ça va plutôt se jouer dans les entre deux entre ces deux choses que tu auras prévues quand tu décideras de ne pas faire ce que tu avais prévu, mais de te poser là, en fait, juste parce qu'en fait, tu es sur une petite place, il y a des gamins qui jouent, tu as envie de reboire un café et de rien faire et de regarder, et c'est très bien. Et du coup, je pense que ça se réapprivoise, cette chose-là. C'est jamais perdu pour toujours, et même quand on n'a pas l'habitude, ça peut se cultiver. On a toujours l'exemple de la femme au restaurant seule, qui serait ce truc où là, vraiment, et vite, t'as envie de sortir ton téléphone pour te donner de la contenance, tu vois, et d'ouvrir sur ton téléphone. Ben en fait, il y a un moment, faire le test de mettre le téléphone dans le sac et d'être là, et puis de regarder et de siroter son coca ou son verre de vin, ben c'est pas mal quoi. Et c'est moins traumatisant que ce qu'on pense que ça va être, et on en retire parfois des grandes satisfactions, donc je trouve que ça peut être intéressant. de ce sens, parce qu'on se violente pas non plus, tu vois, mais sur des petits tests comme ça, si on part toute seule, ouais, c'est pas mal d'essayer.
- Speaker #2
J'aime beaucoup ce côté très positif et engageant que tu mets dans cette notion de la fuite, qui n'est pas juste et ça, tu le dis bien, c'est pas une fuite absolument, c'est une sorte de bulle, je sais pas comment on pourrait la caractériser.
- Speaker #1
C'est vraiment une parenthèse de quelques jours qui coupe absolument avec le quotidien. d'une certaine manière pour mieux y revenir. Il n'y a jamais eu cette idée, en effet, comme tu le dis, de fuite, parce que là, je pense qu'on serait dans un autre type de problématique aussi. Là, on est plus sur cette petite prise de hauteur, ou ce pas de côté, pour regarder la situation avec un tout petit peu plus de recul, un autre point de vue, en étant peut-être légèrement plus reposé, parce qu'on a eu le temps de faire deux siestes, tu vois, sur le week-end, plus joyeuse parce qu'on a pu faire trois musées alors qu'on a des gamins et qu'on ne peut plus mettre un pied au musée. C'est récupérer quelque chose pour soi qui te permet de mieux réfléchir ou de regarder la situation avec un peu plus de justesse.
- Speaker #2
Et alors justement, quand on va replonger dans ce quotidien, revient encore une fois cette question de la communication, parce que j'imagine qu'il y a évidemment toutes les tendances possibles, mais peut-être qu'on n'a pas envie de tout partager. Les autres n'ont pas été avec nous, n'ont pas pu manifester ou contribuer à cette fugue. Alors comment est-ce que la connexion se refait quand on rentre ? Comment est-ce que les gens vivent ce retour au quotidien ?
- Speaker #1
Alors moi j'adore... l'idée de cultiver vraiment en fait un espèce de jardin secret autour de cette idée de fugue qui permet aussi dans cette idée de bienveillance de relation avec soi même en fait c'est un espèce de petit héros intérieur tout ça dans le livre on appelle ça le refuge interne qui serait un peu cette chambre d'ado mais en version adulte dans lequel on aurait mis ses meilleurs souvenirs de fugue les pensées qu'on a eues les mots qui ont été importants les gens peut-être qu'on a rencontré et en fait tout ça de toute manière ça nourrira personne d'autre à part soi-même donc déjà le lien il n'existe que parce qu'on l'a encore dans le coeur, dans la tête etc je pense que si les gens sont curieux, il faut moi j'appelle ça donner à manger je suis partie à Venise, j'ai passé trois jours, c'était canon, j'ai visité ça et ça, j'ai mangé des pâtes, terminé le problème c'est si tu laisses un mystère total plané les gens ça les font dingue, bon tu racontes un minimum et puis c'est terminé ça On l'expérimente très souvent dans le cadre encore plus des fugues italiennes, où là les femmes sont parties seules rejoindre un groupe de femmes vécues trois jours top secret, parce qu'en fait elles ne connaissent pas le programme avant, elles ne peuvent rien dire avant, puisqu'elles n'ont pas de matière. Quand elles rentrent, elles ont envie de rien raconter, sauf peut-être à une amie, à quelqu'un, mais en général le sentiment c'est plutôt de tout vouloir garder pour soi, parce qu'il y a cette idée de comment je me suis enrichie en ayant décidé moi-même toute seule pour moi-même de faire quelque chose pour moi et plus là dans ce cadre de le partager avec d'autres femmes qu'elles ne connaissaient pas en fait tout un programme,
- Speaker #2
vraiment merci beaucoup, je suis tellement contente de t'avoir croisée ici à Florence c'était inespéré et tu réponds à plein de questions existentielles à travers ces fugues merci pour tout ce que tu fais pour nous fugueuses je fais merci à toi et bravo pour ce super concept parce que je trouve que les femmes d'aujourd'hui aussi une charge tellement... une pression. Alors il faut qu'on soit... Oui, on est aujourd'hui dans un moment de basculement visiblement dans l'ère post-patriarcale, on va dire ça comme ça de manière un peu caricaturale, mais c'est clair qu'on est en train de reprendre une nouvelle place, mais c'est pas toujours évident, ça nous perd oxygène, ça nous met une pression supplémentaire, ça fait qu'il y a beaucoup de choses qui sont en train en ce moment, j'ai l'impression de, comment dire, de se déconstruire. Offrir ça aux femmes...
- Speaker #1
Enfoiré 4 mots, merci. Je t'en prie.
- Speaker #2
Un petit mot pour terminer ?
- Speaker #1
Écoute, si je devais dire un petit mot pour terminer, je vais te partager peut-être ma réflexion du moment sur le fait, en fait, comment réussir à se définir en étant beaucoup plus détachée de ces succès, guillemets, professionnels, tu vois, la façon dont on se présente aux autres. pour avoir l'impression d'exister bien souvent on a besoin de dire quelque chose et moi j'aimerais réussir à me détacher de ce truc là c'est à dire qui je suis sans mon travail est ce que je m'estime moi même en enlevant cette couche qui a pris énormément de place et peut-être trop à un moment donc de remettre le travail à sa juste place et de réussir à exister de manière en fait plus simple moins dans le rapport à l'autre parce que c'est évidemment un le système de miroir, cette histoire-là, et de retrouver un peu plus de simplicité vis-à-vis de tout ça. Évidemment, en plus, tu rajoutes les réseaux sociaux par-dessus tout ça, il y a aussi cette dimension où ce n'est pas évident de devoir tout le temps alimenter quelque chose et en même temps d'être capable de prendre du recul pour le mettre à sa juste place de nouveau.
- Speaker #2
Merci beaucoup.
- Speaker #1
Merci à toi.
- Speaker #0
Je suis rentrée d'Italie dans un brouillard gris et glacial, ambiance habituelle de novembre au Luxembourg. Mais brille et m'éclaire encore tous les bénéfices de cette escapade toscane et de cet inattendu cadeau, cette conversazione avec Alice. J'espère qu'elle vous aura donné à vous aussi des envies de fugue, de reconnexion intime et de modifier la façon dont vous vous adressez à vous-même. Et pour qu'Eclat de Voix lui aussi continue de briller de mille feux, pensez à lui mettre des étoiles, des commentaires élogieux et à le partager. En attendant de vous retrouver, je vous souhaite des éclats de voix luminosos, dorados, dulces, felices, alegres.