- Florence Gault
Alors notre économie est-elle condamnée à s'opposer aux vivants ? Face à l'urgence écologique, un nombre croissant d'acteurs cherche à transformer nos manières de produire et d'échanger. Mais comment passer d'une économie extractive à une économie qui régénère. C'est précisément le défi que porte Isabelle Delannoy, ingénieure agronome qui a théorisé le concept d'économie symbiotique. Alors je vous vois déjà froncer les sourcils, rassurez-vous, on va tout vous expliquer. Depuis plus de 15 ans, Isabelle Delannoy explore cette autre voie, celle d'une économie qui ne se contente pas de réduire ses impacts négatifs, mais qui restaure les milieux naturels et renforce les liens sociaux. Je la rencontre à Lyon, à l'occasion des rencontres de l'économie régénérative, un événement qui réunit ses débuts novembre dirigeants, entrepreneurs, chercheurs, élus et citoyens autour d'une même ambition, réinventer nos manières de produire, d'échanger et de coopérer pour bâtir une économie en symbiose avec le vivant. Bonjour Isabelle Delannoy.
- Isabelle Delannoy
Bonjour, bonjour à tous, merci. Bonjour Florence.
- Florence Gault
Merci d'avoir répondu présente à notre invitation. Alors, on va revenir sur ce mot très étrange qui peut peut-être faire peur, économie symbiotique. Mais peut-être avant d'entrer dans le vif du sujet, on peut peut-être revenir sur votre parcours et surtout, qu'est-ce qui vous a amené à ce sujet-là ? Je crois savoir que tout est parti du sol.
- Isabelle Delannoy
En fait je suis C'est vrai que ce n'est pas du tout évident de se dire parce qu'on produit, on régénère. Aujourd'hui, on a une vision d'une économie qui forcément, l'humain, si l'humain est un animal, ce n'est pas une plante, si elle veut subsenter à ses besoins, elle doit aller chercher la nourriture. Et au fond, on a aussi des machines, donc on doit aussi aller extraire la roche du sol et les minerais. pour satisfaire nos besoins. En fait, on est vraiment moulé dans cette économie extractive. Et on n'imagine pas que c'est une économie possible. Pour nous, c'est l'économie. Et on peut regarder l'économie socialiste, communiste, ultra-libérale. Vous regardez partout où ces modèles se sont développés. En fait, ils s'accordent sur une chose, c'est l'extraction. C'est-à-dire qu'on ne change pas. et ils sont peut-être... Elles répartissent peut-être la valeur différemment, elles répartissent peut-être l'outil de production différemment, mais elles ne posent jamais la question de l'extraction. C'est le paradigme dominant. L'économie symbiotique a été le premier ouvrage qui a permis de dire que la régénération est possible au niveau d'une économie. Ça, ça a été mon travail. Et en fait, moi, je l'ai découvert. Je n'aurais pas imaginé avant. C'est-à-dire, c'est en me posant la question de comment répondre aux défis bioclimatiques. Comment répondre à ces sols qui s'épuisent, à ce climat qui est en train de se déséquilibrer ? J'ai cherché des pratiques qui d'abord pouvaient répondre à la crise écologique, déjà. Et en fait, un jour j'ai eu un déclic, j'écrivais Home, le film de Yann Arthus-Bertrand sur l'état des lieux, de la planète, et je vais dans un parc et je vois une abeille se poser sur une pâquerette. Là je me dis, c'est bien ça nous notre problème les humains, c'est que nous aussi on prend mais on rend jamais. Pourquoi j'ai cette pensée ? Parce que l'abeille prend du nectar dans la fleur pour faire son miel, mais ce faisant elle se charge de pollen même si elle ne le veut pas, et en allant sur une autre pâquerette reprendre du nectar pour faire son miel, en fait elle pollinise la fleur et elle rend à la fleur. Et donc en fait ce faisant elle régénère la fertilité du milieu dont elle dépend. Et là j'ai eu un vrai déclic et je me dis mais est-ce que nous les humains on est capable de faire ça ? Parce qu'on produit, on régénère la fertilité de notre milieu. Et là j'ai trouvé mes découvertes, mais que ce n'était pas une, un, deux, trois exemples, c'est des dizaines de milliers d'exemples. Donc déjà on peut régénérer le vivant. Quand vous avez besoin d'infiltrer les eaux de pluie, vous pouvez construire du tout égout ou déjà faire des jardins de pluie qui permettent de recueillir l'eau près des trottoirs, soit entre les trottoirs et la rue, c'est la noue des campagnes, et de la ralentir, de la canaliser et de pouvoir s'infiltrer doucement. Peut-être rejoindre les réseaux d'égout s'ils sont existants. En tout cas, vous n'avez pas besoin de les agrandir, et sinon même de les refiltrer directement à la nappe. On peut régénérer le vivant aussi en utilisant tout simplement ses fonctions, pour aussi épurer l'eau. Un des maîtres de ça. qui a fait 1000 projets dans 250 villes, c'est Kongjian qui a l'agence Turenscape en Chine. Moi je vous propose, après cette émission, d'aller voir les villes que nous pouvons avoir à partir du moment où on fait l'alliance avec le vivant. La beauté, les endroits de rencontres, les endroits de pique-nique, la fraîcheur et la survie. Parce que si Konyongyo a commencé en Chine aussi, parce que c'est un pays très sensible aux inondations. Donc c'est à la chinoise, c'est gigantesque, mais il y a d'autres endroits beaucoup plus petits. Et c'est juste magique, en fait.
- Florence Gault
On ira mettre quelques liens dans la fiche de l'épisode en complément. Si on devait essayer de définir de manière simple, peut-être pour nos auditeurs qui ne s'y connaissent pas bien en économie, L'économie symbiotique ?
- Isabelle Delannoy
En fait, le design régénératif, l'entreprise régénérative seule, voit surtout ce qu'on appelle les solutions fondées sur la nature, ce que je viens de vous dire. Certaines voient aussi la régénération sociale, notamment le régénésis groupe, etc. aux Etats-Unis, qui part vraiment de comment on va faire émerger tout le potentiel d'un territoire et tout le potentiel de chacun dans son unicité. Ça, c'est très important. Par contre, la technique avait été un peu oubliée. Or, c'est très important ça, parce que la technique, en fait, aujourd'hui, la masse de nos infrastructures et de nos machines est supérieure à la masse de tout ce qui vit sur Terre. On a dépassé par nos constructions et nos machines. Et nos matériaux, les plastiques, la masse de tout ce qui vit sur Terre. Donc il faut absolument adresser ça. On peut régénérer des territoires de façon vivante, avec la vie, avec le social, les savants, en lien. Et puis vous achetez un 4x4, et comment est fabriqué ce 4x4 ? Et comment est fabriqué votre ordinateur, et votre téléphone, et votre machine à laver ? Voilà, est-ce qu'on va abandonner la machine à laver ? Moi je suis une femme, j'ai vraiment pas envie qu'on abandonne la machine à laver parce que je sais qu'il fait la lessive dans ces cas-là. Est-ce qu'on va abandonner la voiture ? Alors qu'on sait que ça donne la prospérité économique d'un territoire et la prospérité aussi sociale. Évidemment c'est pas de faire des autoroutes, mais de faire ces chemins qui nous relient. Donc, ce que moi j'ai montré, c'est qu'en fait, les systèmes techniques, dès lors qu'ils fonctionnaient en écosystème, que votre objet fonctionne comme une boîte de Lego, que vos fabricants et les consommateurs fonctionnent aussi dans un même écosystème, eh bien, on avait les mêmes processus qui se faisaient. C'est-à-dire qu'on peut générer de l'abondance, comme je vous ai parlé pour les villes éponges, de l'abondance, voilà, pour le vivant, ça avait de l'abondance de... de paysages, de beauté. Pour le technique, ça va être de l'abondance de moyens techniques, d'usages techniques, sans extraire davantage, et même en diminuant l'extraction. Comment c'est possible ? C'est parce que, justement, il y a cette dynamique d'écosystème. Quand vous faites ça, c'est comme un Lego. Un Lego seul, il ne peut pas... Par contre, une boîte de Lego, vous pouvez faire une voiture, la démonter, puis faire une maison, et puis faire... Voilà. Parce qu'elles répondent tous au même langage, parce que vous conservez les pièces. Un fabricant peut réutiliser jusqu'à 80% des pièces, voire 95% des pièces dans certains systèmes très aboutis. Donc il va pouvoir, à 94% exactement, vous avez 16 fois l'objet qui peut être refait. à 95% vous devez être à 20 fois à 98% vous êtes à plus de 100 fois, et à 100% vous êtes à l'infini, vous pouvez toujours refaire. C'est-à-dire que c'est énorme la capacité qu'on a à pouvoir avoir un objet dans la poche, mon téléphone aujourd'hui est comme ça, c'est mon téléphone, je ne le partage pas, mais je ne le possède pas, et ce faisant, les composants vont pouvoir être constamment réutilisés. Donc ça génère de l'abondance, parce que ça coûte moins cher, les objets sont plus robustes. et vous n'extrayez plus.
- Florence Gault
Donc vous dites que l'économie symbiotique ne se contente pas de moins détruire, puisqu'elle régénère activement les ressources naturelles, sociales, territoriales. Comment, à partir de ça, on construit effectivement une économie ? C'est peut-être un peu difficile de se rendre compte comment on repense un modèle qui est très loin de celui qu'on connaît aujourd'hui.
- Isabelle Delannoy
C'est ça. Il faut changer les regards. Donc, moi j'ai un cours au Conservatoire National des Arts et Métiers où je... C'est-à-dire pour les adultes, où je leur apprends l'économie régénérative comme ça, grâce à la théorie symbiotique. Alors, en fait, il faut toujours partir des besoins. Vous êtes une collectivité, par exemple. Vous avez justement, je suis sensible aux inondations. Et si je fais des cuves de rétention des eaux de puits et de stockage, ça va me coûter plusieurs millions d'euros. Et si j'aurais agrandi mes égouts, idem. En fait, si vous faites des jardins de pluie, si vous faites des toits végétalisés, vous allez vous intéresser aux solutions basées sur la nature qui permettent de répondre à votre problème. Ok, et vous allez regarder ensuite, tiens, tiens c'est marrant, ça, ça m'amène des choses que m'auraient pas amené les solutions techniques. Les rues sont plus jolies. Tiens, ça augmente le prix de l'immobilier. Ah bon, ben faisons attention à la gentrification. Peut-être que ça peut être intéressant de revendre tel bâtiment dans cet endroit où on a revégétalisé, qui est beau, pour pouvoir faire un centre social ou réinvestir dans des infrastructures vertes à cet endroit, qui est plus social et tendre comme ça. Donc vous avez de nouvelles ressources comme ça, qui arrivent. Et ça fait fréquenter davantage les magasins. Donc, alors une fois que les travaux sont terminés, ok, donc c'est bien, ça augmente la fréquentation du centre-ville. Donc, ça vous amène à chaque fois des effets collatéraux, mais positifs, qui vous permettent de penser autrement votre prospérité. Vous avez plus de magasins, ah ben peut-être que je vais avoir plus de taxes foncières. Voilà, il y a un tas de choses comme ça. Si vous êtes une entreprise, donc... J'ai tel besoin, par exemple, j'ai des besoins de... J'avais une entreprise comme ça, une PME de logistique. Qu'est-ce que la logistique a à voir avec le symbiotique, quoi ? Mais en fait, c'était une entreprise familiale. Et elle se voyait concurrencée par les grands géants de la logistique internationaux et qui n'étaient plus des entreprises familiales. Eh bien, en fait... On a travaillé à rassembler les entreprises familiales sur cette valeur-là en Europe et finalement de se rendre compte qu'ensemble elles pouvaient faire des hubs et que du coup les camionneurs n'avaient plus à faire tout le trajet mais pouvaient avoir des relais à des endroits, revenir et finalement on diminuait leurs impacts énormément. au niveau écologique et socialement en fait on permettait économiquement à ces entreprises de subsister et de ne pas avoir que les gros géants et donc c'est une forme de régénération économique et socialement c'était des entreprises en plus qui allaient vers tout ce qui est ce qu'on appelle les entreprises opales où leur innovation venait beaucoup de leurs salariés.
- Florence Gault
J'ai l'impression que cette économie là s'appuie beaucoup sur les territoires, que c'est Facile de partir de l'échelle d'un territoire, d'une collectivité, vous donniez cet exemple pour mettre en place cette économie symbiotique. Comment switcher une économie qui aujourd'hui est mondiale, globalisée, comment ça peut se mettre en place à cette échelle au-dessus ?
- Isabelle Delannoy
Alors c'est une économie qui part des territoires, qui valorise... En fait, aujourd'hui on a tant de sens à... C'est des modèles économiques qu'on appelle de volume. Pour faire du volume, vous faites du produit standard que vous allez essayer d'arroser le monde entier, les magasins du monde entier. Et donc, du coup, on finit par avoir des magasins standards qui vendent des produits standards et qui standardisent aussi la culture. Là, au contraire, on a une économie, et on le voit, moi je le vois, que Lyon, par exemple, est beaucoup moins standardisé que quand j'y faisais mes études il y a 30 ans. Il y a beaucoup plus de petites boutiques, etc., de fournitures locales. Cette économie, elle est en mouvement, elle est en croissance. Vous partez des territoires, vous partez de ses spécificités. Mais pourquoi ? Tout ce que je vous dis sur les solutions fondées sur la nature. Un brin d'herbe, il n'a jamais été planté en bourse. Il est planté sur un territoire.
- Florence Gault
Je ne crois pas, en tout cas. Aux dernières nouvelles, non.
- Isabelle Delannoy
Aux dernières nouvelles, il n'est pas là. Il peut maintenant. Être dans des cours de bourse, oui, mais il n'est pas planté là, il est planté sur les territoires. Et du coup, en fait, tous les services écologiques que vous allez avoir, qui vont permettre d'épurer vos eaux, que vous soyez un industriel ou une collectivité, de les infiltrer, de produire du bien-être à vos habitants, de l'encraser. territorial, il est sur le territoire, déjà. Donc la régénération écologique, elle se fait à partir de nos besoins et sur le territoire. Ensuite, tout ce qui est écologie industrielle territoriale. Si vous voulez vous assurer des flux d'énergie, de matière, évidemment, si vous allez trop loin, la matière va se disperser, l'énergie aussi. par exemple aujourd'hui on a besoin d'une économie de l'information justement pour aller vite pour pour pour aller vite dans les solutions, justement, pour se relier, etc. Mais pourquoi les data centers sont centralisés ? Nos data centers, ils seraient décentralisés, ils pourraient devenir les chauffages urbains. On pourrait faire une écologie industrielle territoriale avec les data centers dans nos villes. Plutôt que de consommer de l'énergie de chauffage et de consommer de l'énergie de data center, le chauffage produit par le fonctionnement des data centers, pourquoi ça serait... c'est territorial.
- Florence Gault
Donc tout passe par le territoire ?
- Isabelle Delannoy
Tout passe par le territoire, presque. Par exemple, en venant tout à l'heure, je passais devant l'usine Youplay à Vienne. Ce n'est pas pour faire de la pub pour Youplay, mais Youplay chauffe une grande partie de Vienne parce qu'ils ont pensé en écologie industrielle territoriale. Donc c'est territorial. Si je me mets à ne plus posséder mes objets, c'est vraiment important ça, sinon on n'arrivera pas à maintenir un confort. Elisabeth Leleu on va avoir des pénuries de ressources qui fait que notre confort va être extrêmement difficile à avoir. Bon, si j'ai une machine à laver que je ne possède pas, qui est toujours l'objet du fabricant, le fabricant a intérêt à ce qu'elle dure le plus longtemps possible. Donc il a intérêt à me faire, par exemple, je ne sais pas, moi, tous les mille lavages, un check total de ma machine à laver, de réparer ce qu'il faut, et hop, parce que moi je vais payer les cycles, par exemple, de lavage. Alors, il a besoin d'être là, en fait. Et s'il veut la récupérer une fois qu'elle ne peut plus, pour récupérer les composants, pour les réassembler. En fait, il a besoin de ces bassins économiques territoriaux. Pourquoi c'est en croissance ? Parce que justement, lorsque vous pouvez répondre à vos besoins comme ça, par l'écosystème autour de vous, vous voyez bien ce que je dis avec les data centers, tout à coup vous diminuez vos besoins, vous diminuez vos besoins d'énergie. Ça va être la même chose pour une entreprise. Elle va s'apercevoir en mutualisant qu'elle va diminuer ses besoins. Vous allez découvrir des nouvelles possibilités. Par exemple, vous mutualisez vos besoins avec une salle, un tiers-lieu. Avec une autre entreprise, vous mettez une partie de vos équipes dans ce tiers-lieu, ils vont discuter, il va naître plein d'innovations. Donc vous augmentez vos capacités. C'est une économie qui diminue les besoins et augmente les capacités. Par contre, elle demande de savoir travailler ensemble. Elle demande de savoir gérer la coopération. Or, on est dans un droit de la compétition. Donc, c'est de passer à un droit de la coopération, c'est de savoir faire les contrats ensemble. C'est de savoir se relier pour trouver qu'est-ce qui pourrait être les pistes de coopération. Et donc, d'avoir confiance aussi les uns dans les autres. Je dis par exemple, c'est une économie de contrats. Contrairement à ce qu'on pense, c'est une économie de contrats en fait. On a besoin d'avoir confiance les uns dans les autres pour coopérer. Donc voilà, tout ça, ça se passe à partir des territoires. Par contre, votre machine à laver, vous pouvez tout à fait produire les composants à un endroit, faire des boucles de réutilisation sur le territoire, aller vous implanter en mutualisant vos investissements avec les communes, avec même vos usagers ou d'autres acteurs économiques qui ont le même intérêt et vous refaites une usine locale où vous avez... une grande part des investissements du capital, mais peut-être pas que. Et ça, ça change tout, en fait.
- Florence Gault
Alors, est-ce qu'il y a des initiatives qui ont déjà été mises en place qui nous permettraient de percevoir, justement, ce à quoi ça pourrait ressembler ? Je crois que certains territoires... sont déjà inspirés de ça. Dans les exemples que vous avez déjà pu évoquer, il me semble qu'il y a Portland, aux Etats-Unis, il y a la bioraffinerie de Bazancourt-Pomacle, par exemple, qui fait de la valorisation intégrale de la biomasse. Ça, ce sont des exemples d'économies symbiotiques ?
- Isabelle Delannoy
Oui, c'est des exemples où on voit que tout le monde fonctionne en écosystème et la raffinerie de Bazancourt-Pomacle en En espérant ne plus écorcher le nom, c'est une raffinerie à partir de la biomasse. C'est une raffinerie qui ne se trouve pas sur les ports. Elle se trouve en plein champ en fait. Et elle va récupérer toute la biomasse, pas forcément utiliser justement des champs autour, elle est en pleine Champagne-Ardenne et elle va valoriser 100%. Ça veut dire qu'il n'y a pas de déchets qui sortent. Et pour faire ça, en fait, elle met en écosystème plusieurs activités. L'une va faire du bioéthanol, puis de l'autre du vin de bois avec ce qui reste, et puis l'autre des molécules chimiques et médicinales. Ici, jusqu'à la fin, on n'a plus rien. Et ce qui est intéressant, c'est que ça diminue les impacts. Mais ce n'est pas pour ça que ça va régénérer les sols. Au contraire, ça va tendance peut-être même à épuiser les sols, parce qu'on va essayer de faire le maximum de biomasse. Donc ce qui est très intéressant c'est que ça a nourri une réflexion en agroécologie pour pouvoir permettre en fait une pensée à long terme aussi des sols puisque là on avait quand même aussi une raffinerie avec des investissements à long terme, il fallait que les terres aussi autour tiennent le coup. Et donc du coup ça a motivé aussi une vraie réflexion portée à l'époque en tout cas quand moi je l'étudiais par le président de la FDSEA. local, donc la fédération des agriculteurs locales qui cherchaient vraiment à pouvoir renourrir ces sols qui sont très épuisés en Europe, on a des sols très épuisés, et qui est des nouvelles pratiques, là encore où on pense son exploitation et on pense sa parcelle comme un écosystème.
- Florence Gault
Si on s'intéresse à Portland par exemple, c'est intéressant, donc il y a de la renaturation urbaine. suppression d'autoroutes, gestion des eaux par des jardins filtrants. Il y a aussi de la démocratie participative qui est mise en place. C'est quoi les critères clés pour réussir justement à mettre en place cette économie symbiotique ?
- Isabelle Delannoy
Il faut partir des besoins. Il faut être pragmatique et pas idéologique. Premier P, on a cinq P comme ça. Partez toujours des besoins. Une entreprise. C'est tellement différent ces modèles, ils se structurent tellement différemment qu'une entreprise, une collectivité, si elle ne part pas de ses besoins stratégiques, elle va échouer. Donc il faut expérimenter, il ne faut pas vouloir tout changer. C'est une structure radicalement différente. Donc il faut expérimenter un endroit et faire grandir. Peut-être pour remplacer le modèle mainstream plus tard. Mais il faut expérimenter et tester. Donc... partir des besoins, être pragmatique et pas idéologique. Il faut penser proximité et non pas loin, mondial, etc. Il faut penser près de chez soi. On a tendance, mais on est tous pareils. Ça nous est arrivé dans notre entreprise il n'y a pas longtemps. De nouveau, on cherchait loin alors que finalement la ressource était près de chez nous. Vos fournisseurs, vos... les personnes avec qui vous pouvez justement mutualiser vos partenaires, un talent, d'abord le chercher près de chez soi. Souvent 80% des ressources dont on a besoin sont dans le territoire. Il faut arrêter de penser diminution d'impact négatif, il faut penser positif, production d'impact positif. En fait, le négatif ne crée pas de préférence. Alors que de produire du positif, ça crée de la préférence et ça crée aussi les conditions de la coopération. Parce que si j'ai des impacts négatifs sur vous, même si je les diminue... Vous allez me dire : t'as l'air bien gentille Isabelle, mais...
- Florence Gault
Mais je ne suis pas sûre de vouloir ce négatif-là, on est d'accord.
- Isabelle Delannoy
Mets-toi un peu plus loin s'il te plaît !!! Si on a des impacts positifs l'une pour l'autre... Mais on va avoir envie de se voir, on va se dire mais attends tu fais quoi cet après-midi parce que j'ai besoin de faire ça, est-ce que ça t'intéresse ? On va coopérer ensemble et peut-être qu'on va même monter un produit ensemble ou se dire à toi aussi tu as besoin de ça, ben attends on va l'acheter ensemble et faire des économies ensemble. Donc le positif c'est très important et on en vient à mon troisième P, c'est le plaisir. On ne coopère pas sans plaisir. Là, dans les journées où on était, on était dans un atelier, on cherchait les moyens de la coopération et de l'alliance, le plaisir. Faire la fête, se rencontrer, se voir, se connaître et pouvoir discuter.
- Florence Gault
Rejoindre la convivialité.
- Isabelle Delannoy
C'est-à-dire rejoindre la convivialité, chère Patrick Vivray. Exactement. Et au dialogue en humanité. Quand vous pensez positif, comment je vais gérer des impacts positifs ? C'est vraiment comment je vais générer de l'abondance. Quand on parle de l'économie de l'usage, de la fonctionnalité, c'est quand même Comment je peux générer plein de mobilité, vraiment un accès à l'usage pour moins cher pour les gens ? Je génère de l'abondance. Alors qu'aujourd'hui, on dit, je génère de la rareté, comme ça, mon scooter va être plus cher. Et pour qu'il soit rare, en fait, je vais le construire mal. Du coup, en fait, dans deux ans, tu devras... en racheter un autre. On génère la rareté aujourd'hui. Et tant qu'on est sûr, ça a géré la pénurie. Même en écologie, on n'a pas les bons réflexes. Il faut se dire comment je peux générer l'abondance.
- Florence Gault
Isabelle Delannoy, vous dites que l'économie symbiotique aujourd'hui c'est la seule alternative viable au capitalisme. Vous parlez d'un modèle à la fois radical et concret. Est-ce qu'on peut parler d'utopie réalisable ? On a déjà donné un petit peu plus tôt quelques exemples qui semblent montrer que ça peut fonctionner. Cette économie à l'échelle systémique, au passage d'échelle justement, c'est possible ?
- Isabelle Delannoy
Oui. En fait, elle est en train de se faire. Vous voyez, on a créé des ateliers, nous, justement pour ça. Pour montrer aux acteurs que les familiariser à ces pratiques régénératives qu'on trouve dans tout. Et tout ce qu'on vient de dire. Et de leur donner des exemples pour les inspirer. Et puis d'identifier les régénérateurs autour de chez eux. C'est-à-dire les gens qui adoptent ces pratiques. Et on a créé ces ateliers pour ça parce que ça permet de montrer que c'est proche. Que c'est déjà là. d'identifier autour de soi, à proximité, les acteurs qui fonctionnent comme ça, de se sentir une même espèce économique. Et du coup, en fait, on prend de la force quand on ne se sent pas seul. Tous ces acteurs se sentent un peu seuls, en fait. Et nos médias nous renvoient à une image plutôt des arbres qui s'effondrent que de la forêt qui pousse. Et donc, du coup... C'est vraiment, voilà, nous on a créé ces outils-là justement pour ça, pour permettre de se sentir relié et de montrer que c'est en fait, on voit un truc comme on n'a pas de solution, on est dans le noir. C'est pas vrai en fait, il y a des milliers et même des centaines de milliers de gens en France qui ont entrepris autrement, des communes qui font autrement. et donc T'es pas tout seul Jeff, et surtout c'est pas tout noir. Par contre, si on continue à croire que tout est noir, que ce qui nous arrive, les populismes des Etats-Unis, c'est-à-dire ce côté profondément inégalitaire, où tout le monde n'a plus les mêmes chances, c'est la fatalité. que ça va être ça notre avenir et que c'est normal, on ne peut pas nourrir tout le monde, on doit gérer la pénurie justement, et bien là on va perdre. Il faut regarder l'abondance, comment gère l'air l'abondance. Et l'abondance ce n'est pas la surconsommation.
- Florence Gault
Effectivement, et on le voit bien, je le vois en tout cas depuis deux ans qu'En un battement d'ailes existe. Je suis uniquement concentrée sur les solutions qui existent en Auvergne-Rhône-Alpes. Je pense que je suis loin d'avoir épuisé toutes les solutions qui existent à l'échelle de la région et en tout cas on voit bien que les initiatives sont présentes et qu'un grand nombre de gens sont à l'oeuvre en tout cas et cherchent à expérimenter.
- Isabelle Delannoy
Et je suis sûre qu'aujourd'hui même il y a une structure qui se crée de ce type, donc vous n'aurez jamais terminé parce qu'en réalité il y en a chaque jour une nouvelle.
- Florence Gault
et je crois en plus que les citoyens et les citoyennes sont demandeurs, à ce qu'on leur montre qu'il y a des choses qui fonctionnent, d'aller plus vers de solutions pour sortir aussi d'un traitement catastrophiste et d'une vision catastrophiste et anxiogène du monde en fait.
- Isabelle Delannoy
Prenons juste l'exemple de Duralex et de son crowdfunding alors qu'il était en difficulté là il y a quelques jours. Il a récolté, donc Duralex qui a fait une coopérative pour sauver l'entreprise avec ses salariés, a récolté 13 millions en 13 heures. Donc ça montre bien que nous tenons collectivement à cette économie. Simplement, nous n'y croyons pas. Lorsque nous allons sur nos responsables politiques, etc., d'abord, la plupart ne l'ont pas vu. Je parle au niveau national, au niveau territorial. On a des gens qui l'ont vu et qui en parlent et qui la font. Le Grand Lyon fait partie. Mais on voit bien, dans des cas comme ça, que les gens... Ils veulent garder leurs industries, ils veulent que cette économie-là se développe plus juste.
- Florence Gault
Quels sont selon vous les principaux freins aujourd'hui à la généralisation justement de l'économie symbiotique ?
- Isabelle Delannoy
Tout ! C'est simple, elle est exactement inverse. C'est une économie de la diversité et de la diversification. Et on est aujourd'hui tout fait pour la standardisation. C'est une économie de la coopération, de notre droit et de la compétition. Donc ça demande... à savoir faire des contrats ensemble, des contrats des communs. Les communs ont commencé à disparaître d'Europe au XIIe siècle, c'est pour vous dire. Donc c'est vraiment la... C'est une économie qui crée des écosystèmes, on sait surtout les détruire. Donc on sait contrôler, on ne sait pas donner des règles pour interagir ensemble. Donc notre environnement, c'est vraiment... On a un environnement institutionnel, juridique, réglementaire, financier qui est à l'encontre. Par contre, on a de plus en plus de gens qui, dans les collectivités, utilisent le droit d'expérimentation. On a de plus en plus d'entreprises qui y vont, y compris pour répondre aux crises de l'inflation, de l'énergie, etc. Parce que cette économie est plus rentable et répond mieux. On a des financiers qui s'intéressent. à des nouveaux produits financiers, des nouvelles façons de faire et qu'il soit plus sur un rendement aussi élevé à court terme et plus sur le long terme. Donc, parce qu'on a besoin de ça pour l'installer, cette économie. Donc voilà, on a ces niches. On a besoin pour pouvoir la développer, on a besoin de financements locaux. On voit d'ailleurs de plus en plus de fonds régionaux d'investissement qui se créent. C'est très bien. On aurait besoin de crowdfunding local, on aurait besoin de produits d'épargne local, on aurait besoin aussi de se réapproprier les réseaux sociaux locaux, réseaux sociaux et de façon locale. Les villes pourraient tout à fait être les pionnières de nouveaux réseaux sociaux à gouvernance partagée, qui soient de nouveau dans ce qu'a connu le début de l'internet au service des gens et pas appropriés par des gros acteurs. Donc on a absolument besoin de ce pouvoir. politique locale, comme ça, et que les entreprises se sentent indigènes de leur territoire, et cherchent à regarder comment, en fait, elles peuvent diminuer leurs besoins, augmenter leurs capacités, à partir de leur local. Ce serait déjà un premier point.
- Florence Gault
On entend bien, en tout cas, que le changement que vous proposez, il ne passe pas uniquement par des outils ou des techniques, mais c'est clairement un basculement civilisationnel, culturel, organisationnel. Elle ressemblerait à quoi cette société où on aurait pleinement intégré l'économie symbiotique ?
- Isabelle Delannoy
Alors elle est en train de se faire, sincèrement. Moi je ne parle pas du topi, je parle de transtopi. Vous savez, topi, topos, le lieu, u qui n'existe pas. En fait, on voit bien que les endroits où elle s'est mise en place, on change de civilisation. Quand vous passez les portes d'un tiers-lieu, c'est différent d'une entreprise lambda. C'est un champ en permaculture, c'est très différent d'un champ en monoculture, donc je parle de transtopie. Il faut imaginer la ville comme, non pas la ville jardin, mais la ville comme plantée dans un jardin. Se dire, tiens, ils ont planté une ville dans ce jardin là.
- Florence Gault
Ok.
- Isabelle Delannoy
Vous voyez, c'est-à-dire que vraiment, on commence à avoir des réalisations comme ça, où vraiment quand on utilise, on se... On utilise les solutions fondées sur la nature, j'aime pas ce terme, mais c'est comme ça qu'on les appelle maintenant, pour gérer les métabolismes d'une ville, c'est extraordinaire. Et quand les paysagers s'y mettent, ça crée 3,5 fois plus d'emplois en moyenne, les métiers d'espace vert. Donc en fait, c'est une ville où ça grouille d'emplois. Ça grouille de gens qui vraiment réparent, travaillent, qui organisent les collègues des petits producteurs qui vont les mener à vélo, par exemple. dans des lieux comme des magasins qui vont servir de point d'accès. C'est les entreprises qui vraiment travaillent localement et on est co-investisseurs tous. Je prends par exemple Virgo Cop en Occitanie qui va travailler des fibres textiles locales et où ils sont à plusieurs centaines de coopérateurs, qu'ils soient des consommateurs, des magasins, des producteurs ensemble. Et ça, on va retrouver ces produits du territoire, à côté d'autres, qui viennent d'autres territoires, mais là. On a donc des endroits, on voit ça arriver en Afrique, et c'est vraiment une autre façon de faire la ville que moi je trouve exceptionnelle, des fablabs au centre des quartiers qui vont... à prendre les habitants, à répondre aux besoins de leur quartier, et à faire des applis avec une nouvelle monnaie, et à créer un jardin potager là, et à dealer avec la mairie, etc. Donc c'est lieu de fabrication du commun local. Donc vous voyez cette ville dont je vous parle, elle est très verte, elle est très fraîche, vous pouvez peut-être même cueillir une pomme à côté de vous là, elle est Très réglée, les gens ont des droits et des devoirs, mais elle est très grouillante parce que ça crée beaucoup d'emplois, beaucoup d'interactions locales. Vous avez peut-être à côté une très grande entreprise là, qui parce qu'elle a une ressource particulière sur son territoire et qu'elle, elle exporte dans le monde entier. C'est peut-être du café, c'est peut-être du thé, c'est peut-être un métal particulier, c'est peut-être même un savoir-faire particulier. un composant particulier qu'on va retrouver. Mais localement, vous avez une autre usine qui, elle, assemble des scooters, par exemple, des machines à laver, des voitures, qui utilisent les composants faits par une de ces grosses usines-là, peut-être encore ailleurs dans le monde, mais qui est là. Et vous n'avez plus de supermarché, en fait, parce que finalement... Vous avez des usines qui produisent vos machines à laver, vos voitures, et donc vous n'avez plus besoin de stocks. Les stocks sont chez les gens.
- Florence Gault
En préparant cette interview, j'ai lu un article du Monde écrit par Frédéric Joignot, qui retracait votre démarche et dans lequel il évoque le scepticisme qui peut être rencontré par votre approche. Il cite notamment le sociologue Baptiste Monsingeau, auteur d'Homo Detritus, qui parle d'un vœu pieux. Tandis que la philosophe Catherine Larère, elle craint que ces pratiques finalement se limitent à des hétérotopies, des îlots utopiques dans un océan productiviste. Qu'est-ce que vous pouvez répondre à ce scepticisme ?
- Isabelle Delannoy
On peut tout à fait arriver à ça. Et l'océan productiviste, des îlots d'utopie. Et puis, moi j'habite la Drôme. Je vois Dix, par exemple, c'est une ville qui a moins de 5000 habitants. Il y a des centaines de commerces sur absolument tout. C'est Saillon, une ville où il doit y avoir au moins 30 à 50 commerces, 1400 habitants. Ça peut être des îlots d'utopie, en tout cas ça marche. La condition pour pas que ce soit des îlots d'utopie, c'est de documenter, documenter ces modèles, de montrer qu'on a besoin de la science, on est des scientifiques tous ceux qui faisons ça en fait. qui est, on a besoin de dire du milieu académique, des universités, pour dire, venez voir ces modèles, venez les documenter avec nous, parce que nous, on y travaille, mais on n'a pas encore beaucoup de... On commence à en avoir un, mais beaucoup de relais académiques. Donc, en effet, ne laissons pas une utopie. On a besoin de... On ne peut pas tout faire. On ne peut pas mener notre entreprise, mener la transition et documenter aussi, quoi. On est un peu épuisés tous, les gens de la transition. On a vraiment besoin de relais. Maintenant, sur l'autre, il y a quelque chose de très important. Moi, ce que je montre, c'est général à la régénération, on a une symbiose avec le territoire. Pour moi, il y a la symbiose avec le territoire et la symbiose, en effet, entre la technique, l'humain et le social. Et c'est ça qui semble utopique aussi, qui est critiqué. En fait, il y a une chose qui est très importante, c'est que symbiose ne veut pas dire fusion. Si vous avez des symbioses négatives, des symbioses positives, le parasitisme est très proche de la symbiose positive. Donc si vous ne mettez pas les règles clairement, ce n'est pas une économie du tout du béni-oui-oui. Il est important de mettre les règles, de conserver l'intégrité de chacun, de se battre pour son intégrité, parce qu'on a un imaginaire de compétition ou de collaboration, très petites fleurs, petits oiseaux. Ce n'est pas du tout comme ça que ça se passe. Ça c'est vraiment important et il y a une chose aussi, est-ce que je trouve où l'Afrique est beaucoup plus, les penseurs africains le pensent beaucoup mieux que nous. J'ai la chance d'avoir pu aller aux ateliers de la pensée de Dakar, de pouvoir être en relation avec des philosophes africains, des vrais penseurs économistes, politologues, historiens africains incroyables. Et nous on considère la technique en dehors du vivant. Du coup c'est facile de laisser aller contre lui. Si vous pensez que la technique est issue du vivant, issue de la vie, elle est issue de l'humain qui est de la vie, enfin je veux dire, elle doit se mettre au service de la vie. Et je pense que nous on n'arrive pas à penser ce continuum et qu'on n'a beaucoup à apprendre des pensées non-occidentales parce que nous on arrive à la fin de notre capacité de... penser le monde correctement. On est encore trop ancré dans le naturalisme qui sépare la nature et l'homme. On est trop ancré dans la mathématisation du réel, c'est-à-dire la pensée cartésienne, Descartes, mais aussi issue souvent de Newton, aussi de Newton qui arrive à expliquer les lois de la gravité et là tout à coup tout le monde se dit mais on peut tout expliquer, on peut tout mathématiser. On doit quitter cette pensée-là. Et pour ça, il faut qu'on aille s'inspirer ailleurs. On a la chance en France d'avoir une France qui n'est pas seulement européenne, qui est aussi caribéenne, qui est aussi polynésienne, qui est aussi de l'océan indien, qui est aussi des froids polaires. Et en fait, on a besoin d'aller écouter la pensée là-bas parce qu'elle nous régénère et que nous, on ne sait plus bien penser.
- Florence Gault
Pour finir, et ce sera ma dernière question, Isabelle, vous voyez déjà les signaux d'un basculement vers cet autre modèle ?
- Isabelle Delannoy
Est-ce qu'il y a les signaux d'un basculement de cet autre modèle ? Il y a déjà cet événement qui, quand même, est incroyable. Donc, les rencontres de l'économie régénérative où on se trouve aujourd'hui. C'est l'économie régénérative qui, avant même de commencer, en font d'ores et déjà un des plus gros événements de l'économie durable. Produit par vraiment beaucoup d'envie, du bénévolat quand même, c'est hallucinant, mille personnes, c'est un événement dont j'ai jamais entendu autant d'émulation, de dire tu vas au rencontre de l'économie régénérative, tu vas, t'as vu il y a ça, est-ce que tu crois que je pourrais proposer un atelier ? Il y a eu une émulation vraiment magnifique. Je pense qu'on ne l'a pas fait ce basculement, on doit le vouloir. Mais on le peut.
- Florence Gault
Merci beaucoup Isabelle pour cet échange et je renvoie les auditeurs à votre livre L'économie symbiotique paru aux éditions Actes Sud et puis vers votre site internet pour découvrir ce que vous faites avec l'entreprise symbiotique.com Merci beaucoup. Merci. Musique