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Après deux séries à avoir tendu le micro à des patients, Abdelawacheria, victime du centre dentaire Dentexia et cofondateur de l'association La Dents Bleues, puis Sabrina Lebars, patiente partenaire et cofondatrice de l'association Corasso, qui sensibilise au cancer tête et cou, nous allons revenir vers une dentiste, mais qui a la particularité d'être aussi passée de l'autre côté du fauteuil. Marion Melly est chirurgienne dentiste, d'abord omnipraticienne, elle s'est progressivement orientée vers un exercice exclusif en endodontie. Ce choix, elle nous l'a raconté dans l'épisode précédent. Mais ce que je vous expliquais juste avant, c'est que Marion a aussi expérimenté la position inconfortable, parfois traumatisante, que vivent nos patients. A 22 ans, encore étudiante, Marion a été confrontée à une gêne lors de la mastication. Un examen a révélé une importante destruction osseuse au niveau de ses incisives, conséquence d'un traumatisme non traité survenu à l'âge de 12 ans. Après extraction, greffe et pose d'implant, un de ses implants a échoué 10 ans plus tard. Entre tristesse et résignation, Marion a dû affronter son mal-être, un sentiment qu'elle aurait préféré garder pour elle, mais qui est devenu visible aux yeux de tous. Cette expérience a transformé sa vision des soins dentaires, c'est ce que nous allons explorer plus en détail dans cette deuxième partie. Ce que nous explique Marion, c'est qu'il lui a fallu faire avec cette nouvelle image de soi, et avec un sourire qui n'arrête pas de changer. Elle nous explique aussi que ces différentes interventions ont eu un impact à la fois au niveau psychologique bien sûr, mais au niveau organique aussi. Elle a ressenti une forte diminution d'énergie, une perte de vitalité, une dévitalisation comme nous l'expliquait Abdelawacharia dans une des séries précédentes. Ce qu'elle nous raconte aussi, c'est qu'au travers de son vécu, elle est parvenue à mieux comprendre certains comportements de nos patients, qui peuvent parfois nous sembler irrationnels et même nous exaspérer. Et la compréhension de cette dimension émotionnelle a fortement contribué à donner encore plus de sens à sa pratique. Marion fait partie des très belles rencontres qui jalonnent mon aventure dans le podcast. Elle s'est livrée à moi sur un sujet sensible pour elle, et je la remercie pour sa confiance. Elle voulait que je coupe son rire qu'elle trouvait trop présent. Désolée Marion, mais j'ai pas pu. Et Pauline, ma réalisatrice son non plus d'ailleurs. Nous sommes tombés d'accord toutes les deux qu'on ne pouvait pas censurer une telle joie de vivre. Et moi-même, je me trouve d'ailleurs assez exaltée dans cet échange, preuve que le contact est bien passé. J'espère que vous prendrez autant de plaisir à nous écouter que j'en ai eu à discuter avec Marion. Bonne écoute. Maintenant, on va parler un petit peu de l'autre facette, à la fois de ta personnalité, mais aussi d'une autre expérience. Donc en fait, on voit dans l'approche que tu as du métier de dentiste, on sent qu'en fait, il y a une place très importante laissée à l'écoute des patients, là où je trouve que peut-être beaucoup d'entre nous essayons plutôt de nous protéger de la relation. Moi, je me souviens, il y a quelques années, au début de mon exercice, mais ça faisait déjà quelques années que j'exerçais, et je me souviens avoir dit, en fait, ça serait beaucoup plus simple si les patients nous protégeaient. poser leur bouche, qu'ils partaient, et ensuite, ils revenaient la chercher. Donc un peu comme on pose la voiture chez le garagiste. Et je ne pense pas être la seule à avoir dit ça. Qu'est-ce qui fait que finalement, tu as développé cette capacité d'empathie et d'écoute ?
- Marion
Alors... Je pense qu'avec le temps et l'expérience, je me suis rendue compte de toute la symbolique émotionnelle qu'il y avait dans la bouche, à la fois grâce à mes patients et aussi grâce à mon propre vécu. Et ces émotions, on n'est pas formé à les prendre en charge, on dit ça. On va aller gérer, gérer ses émotions. Déjà, gérer ses propres émotions, ce n'est pas simple. Mais alors, quand il faut en plus gérer celles des patients, qui sont parfois complètement, pas forcément rationnelles, une émotion, ça nous submerge, ça vient comme ça, on ne peut pas expliquer pourquoi. C'est compliqué. Je me suis rendue compte qu'il y avait certains patients comme ça, qui étaient beaucoup plus expressifs que d'autres. Et puis, pour moi aussi, cette connexion qu'on peut avoir avec le patient, dans le sens où tout se transmet. Une équipe stressée autour du patient va stresser un patient, un patient stressé va nous stresser, C'est comme si on était dans cette petite bulle autour du fauteuil, comme si tout était un peu décuplé. Moi, je ressens les choses fortement comme ça. Et il fait un bond. On fait tous des bonds. On est tous connectés au corps, par la bouche et par ces émotions-là. Et là, je me suis dit, il faut que je travaille sur moi d'abord pour réussir à... Prendre du recul, lâcher, se dire que tout ça, la réaction du patient, sa colère, son angoisse, c'est pas personnel. Lui laisser son espace, le temps pour qu'il se fasse. Toutes ces choses-là, effectivement, je pense que je n'avais pas conscience forcément que j'avais ces capacités-là au départ. et que aujourd'hui, tout simplement, je les décuple.
- Florence
Oui, mais je te rejoins beaucoup là-dessus parce que je pense que déjà, on démarre les études à un âge où on n'a pas du tout d'expérience ou peu d'expérience pour la plupart d'entre nous. On découvre un métier, on découvre un apprentissage et ce qui nous intéresse au début. Et puis il ne faut pas se mentir non plus. Ce qui nous plaît au départ quand on rentre dans le métier, c'est justement de découvrir la technique, le matériel, de progresser. En fait, le patient, c'est un peu l'argument pour pouvoir mettre nos compétences, en tout cas nos apprentissages et de les tester, cette dimension humaine. Je pense qu'elle est en nous, mais elle n'est pas innée. Elle reste aussi à développer, à travailler.
- Marion
À développer, tout à fait. Elle reste à développer, mais elle passe aussi par son propre développement. Alors des fois, c'est plus facile, on n'ose pas aller travailler ce qu'on a à travailler. Mais pour moi, l'autre, le patient en l'occurrence, il me permet vraiment d'évoluer. Et que ça soit en bien ou en mal, tu vois. J'évoquais l'autre jour cette expérience de ce père agressif qui était venu au cabinet et qui avait un peu choqué toute notre équipe de soins parce qu'il n'en pouvait plus de voir sa fille souffrir. sur laquelle j'avais fait un coiffage pulpaire et qui vraisemblablement ne fonctionnait pas. Sauf que... On n'avait pas pris la mesure de l'ampleur de la souffrance de la jeune fille que j'avais vue la veille. Et je lui avais dit, bon bah effectivement ça semble pas fonctionner, mais on va faire la pulpectomie. Mais voilà, le contexte faisait que je ne pouvais pas la faire tout de suite. Et donc il a déboulé vraiment à furibon, avec des menaces de tout péter dans le cabinet, en criant à la salle d'attente que j'avais fait une erreur médicale, enfin voilà. Et cet épisode-là... Il m'a tétanisée, mais il m'a fait m'ouvrir sur comment je pouvais, moi, mieux gérer mes relations aux autres, comment je pouvais mieux comprendre leur schéma, leur façon d'être. Donc, je me suis formée dans la formation de gestion des conflits en milieu professionnel. Et puis, après tout le volet, un peu, justement, émotion. Et au final, je lui dis merci, quoi. J'ai dit merci parce qu'il m'a renvoyé quelque chose où moi je ne me sentais pas bien, je me sentais vulnérable, mais qui m'a permis de me dépasser.
- Florence
Alors justement, après être revenue sur cet événement et avoir peut-être formé ou avoir essayé de comprendre un petit peu ce qui s'était passé à ce moment-là, comment maintenant tu aurais géré la situation ?
- Marion
C'est une bonne question. Je pense que déjà, j'aurais pris mon courage à deux mains. Ce jour-là, je ne l'ai pas eu. Ce jour-là, j'étais vraiment tétanisée.
- Florence
Le courage par rapport au patient, de lui parler ?
- Marion
Par rapport au patient, parce qu'en fait, au final, ce n'est pas moi qui ai géré la crise. Parce qu'on a plusieurs façons de réagir quand on est en danger. En l'occurrence, ce mois-là, c'était plutôt la fuite.
- Florence
Et par rapport à la jeune fille, je veux dire la situation avant la colère, en fait, avant la colère du patient.
- Marion
Avant la colère, ah oui. Est-ce que... Pourtant, elles sont toujours prévenues que ça peut ne pas fonctionner, et en l'occurrence, elles l'étaient. Après, entre le message qui est reçu, c'est surtout ça en fait que j'ai compris, c'est qu'on a différents canaux sensoriels de prédilection, où on est plus ou moins réceptif, entre l'auditif, le visuel, le kinesthésique, etc. et que quand on arrive à cerner un petit peu le profil du patient, on peut plus facilement adapter son vocabulaire et son discours pour être sûr que le message passe bien. Alors, quand on est rentré de cette formation, on était à fond en train d'essayer de décrypter un petit peu tous les profils de nos patients. Je me suis vite rendu compte que c'était quand même très compliqué, pas si simple. Et au final, ce que j'ai... mis en place derrière, c'est une façon de communiquer qui englobe ces trois canaux. Je me dis, je vais jouer sur les trois canaux, je fais des dessins, je parle, j'emploie tout le vocabulaire, je fais du feedback, je demande à m'expliquer ce qu'ils ont compris, pour être sûre que le message est passé et comment réagir en cas d'urgence. L'ASCIS. Ce qui s'est passé, c'est que malheureusement, ça tombait très très mal parce que c'était un moment où moi je devais me faire opérer de la main, donc je n'étais pas réactive pour pouvoir faire le soin. Heureusement, j'ai une bonne équipe qui a géré et qui a pu soulager ma patiente. Parfois, dans le contexte, ça ne marche pas. Il faut l'accepter aussi.
- Florence
Donc toi, au niveau... Expérience patient, tu peux nous en dire un petit peu plus sur ce que tu as vécu et la façon dont ça s'est passé et ce que tu en as retenu ?
- Marion
Alors, moi ce qui s'est passé en fait c'est que je me suis rendu compte à l'âge de 22-23 ans quand j'étais en études dentaires que j'avais finalement Une gêne quand je mastiquais, quand je viens écraser le bol alimentaire sur ma voûte palatine, pour prendre des termes bien dentaires. Et quand on a fait le bilan, on s'est rendu compte en fait que j'avais une destruction osseuse importante au niveau du prémaxillaire qui intéressait mes deux incisives en transcorticale,
- Florence
bicorticale. Et qui serait d'origine occlusale ?
- Marion
Qui serait d'origine traumatique. Parce qu'après, du coup, j'ai retrouvé une panoramique que j'avais faite à l'âge de 12 ans, où on voyait que j'avais un apex fracturé sur la ronde, et qui, à l'époque, n'avait pas été traité, et surtout n'avait pas été suivi. Parce qu'à l'époque, j'avais eu une petite sensibilité. mais derrière, il n'y a pas eu de suivi plus que ça. Donc, ce qui s'est passé, c'est que, en plus, j'ai eu de l'orthodontie à ce moment-là, pendant quatre ans, et donc j'ai eu oblitération canalaire, résorption des apex et granulomes qui se sont développés. Donc, à l'époque, j'ai été traitée par les enseignants de la fac en endo. C'était un peu les débuts de l'endo de 2000. Deux, 2003. Donc sous microscope, ça n'a pas été concluant. Et en chirurgie, j'ai eu des curetages, sans obturation à rétro, à l'époque, qui n'ont pas non plus fonctionné. Donc à chaque fois, ça récidivait. Si bien qu'à un moment donné, j'ai eu une fistule. Et que du coup, il a fallu prendre une décision et de se dire que peut-être le problème c'était les dents. Et du coup, on m'a proposé de les enlever et de les remplacer par des implants. Et ce qui se passe aujourd'hui, c'est qu'au final, c'est revenu à nouveau. Une nouvelle inflammation. Au niveau des implants ? Au niveau d'un implant, principalement. Je pensais que je faisais une périimplantite. On l'a enlevée. Il tenait bien, mais je ne voulais pas rester avec cette inflammation. Le fait de l'avoir enlevée, ça n'a rien changé. J'avais toujours cette infection. Finalement, j'ai un terrain. qui n'est pas sain là-dessous. J'avais une nécrose osseuse encore importante et le biomatériau qui n'avait pas pris bio à cette époque. Donc voilà, en fait, s'est posée la question, lors du curetage, de devoir enlever une nouvelle incisive. Et pour le coup, là, c'était juste... impensable pour moi. Là, je me suis dit, non, là, il faut arrêter de m'enlever des dents, parce que, enfin, c'est les dents, effectivement, c'est les incisives, donc déjà, je ne savais pas vraiment comment j'allais repartir. Enfin, voilà, c'était compliqué, ce n'était pas envisageable. Donc aujourd'hui, j'ai une nouvelle greffe, une halogreffe avec Biobank. On fait des choses nouvelles. Et on essaie de voir si on peut reconstruire pour que je puisse avoir des dents et sourire à nouveau. Je suis quelqu'un qui sourit beaucoup. Donc du coup, c'est pas facile. Il faut faire avec cette nouvelle image de soi Ce que je disais quand on m'a enlevé mes incisives, là, il y a 10 ans, et qu'on m'a mis des implants, moi, je ne me reconnaissais pas dans la glace. J'avais vraiment l'impression que ce n'était pas moi, quoi. À chaque fois que je le voyais en train de sourire... je me disais, enfin, voilà, c'était pas moi. Bon là, depuis un an, mon sourire n'arrête pas de changer. Donc maintenant, je ne le regarde plus. Mais c'est vrai que toute cette dimension, toute cette dimension du sourire, pour moi, c'est la relation à l'autre aussi. Et c'est l'image de soi, de ce que ça renvoie. Et je me suis rendue compte de l'impact que ça avait physiquement sur mon corps. Je me suis sentie vraiment en perte d'énergie complète. J'avais l'impression que ça me coupait les ailes.
- Florence
parce que j'avais plein de projets ça fait écho à la série que j'ai enregistrée avec Abdel Awacheria qui a été victime des centres d'antexéla et qui est docteur en biologie donc qui a aussi cette casquette scientifique et puis très proche d'Edgar Morin donc un côté aussi sur la pensée systémique qui lui donne une vision très globale et très intéressante et qui dit en fait quelque chose moi qui m'a vraiment marquée sur le principe de la dévitalisation. Oui,
- Marion
je l'ai entendu ce mot-là, ça m'a fait...
- Florence
Et nous en fait quand on parle de dévitalisation, c'est un mot qui est vraiment du jargon dentaire, dévitalisation, on retire le nerf, on rebouche les canaux, etc. Mais il y a aussi la dimension vitale de l'être en fait, c'est-à-dire on dévitalise. On retire de la vitalité. Je pense que c'est vraiment quelque chose, quand on reçoit des patients, qu'on leur fait des fois des soins lourds, qui durent plusieurs heures, et avec des transitions, où le patient, avec des provisoires, que des fois il ne supporte pas, qu'il ne va pas porter, qu'il va s'adapter plus ou moins, on ne se rend pas compte de cette dimension que ça peut avoir au niveau... Une fois qu'il rentre chez lui, sur ses relations aux autres, sur son travail, sur lui face à lui-même dans le miroir, donc l'estime de soi, c'est quelque chose qu'on ne mesure pas.
- Marion
Et qui est très, très important. À prendre en compte, même dans l'acceptation d'une prothèse par exemple. Souvent on se dit, allez hop, on la pose, c'est bon, ça ne bouge pas, j'ai vérifié mon équilibration, donc il n'y a pas de raison que ça n'aille pas. Sauf qu'en fait derrière, il y a tout ce que ça implique, toute la symbolique. Et puis comment je vais me sentir moi quand je vais mâcher. Voilà, c'est vrai que ce terme-là, il m'a aussi vraiment... Il a résonné en moi quand il l'a prononcé, quand j'ai écouté le podcast. Et je me suis dit, mais c'est ça. Et puis, il y a plein d'expressions, tu sais. On dit avoir du mordant, croquer la vie à pleines dents. Et cette symbolique de perdre un bout de soi qui ne repoussera jamais, finalement. C'est comme être un peu estropié. Oui, il manque un membre.
- Florence
Il y a peut-être un travail, le mot est peut-être fort, mais je n'en trouve pas d'autre, mais il y a aussi quand même peut-être un travail de deuil à faire sur les dents d'avant, le sourire d'avant, l'acceptation finalement. Même si c'est toi, je ne suis pas sûre que pour le coup... Ce que toi, tu as vécu avec les incisives, est-ce que ça a eu un impact sur le regard de ton entourage ?
- Marion
Non. Non, non.
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Quelques temps après notre enregistrement, j'ai reçu un message de Marion sur WhatsApp dans lequel elle me disait souhaiter compléter une réponse à une question que je lui avais posée parce qu'elle avait l'impression d'avoir répondu à côté ou en tout cas de ne pas avoir répondu complètement. Ça, c'est le côté perfectionniste de l'endodontiste qui ressort. C'est ce que vous allez écouter en suivant et qui explique que le son n'est pas tout à fait le même. À la question Est-ce que tu as l'impression que le regard des autres a changé sur toi ? Je réponds Non Je réponds que je n'ai pas spécialement l'impression qu'ils se rendent compte de l'impact que ça a sur moi. J'ai surtout l'impression que c'est mon propre regard qui a changé sur moi et que c'est mon... C'est pour ça que j'ai commencé un travail pour accepter, finalement, pour faire le deuil de ce sourire, de ces dents. Et en fait, c'est un problème entre moi et moi. Et ce n'est pas toujours facilement compréhensible vu de l'extérieur, parce que ça ne paraît pas grave. Et foncièrement, ça n'allait pas plus que ça. Je veux dire, ce n'est pas une grosse pathologie non plus. Mais moi, je me sens touchée dans mon fort intérieur. Je me sens touchée dans ma chair, comme je disais. Je me sens coupée les ailes. Ça m'a vraiment fait perdre une énergie importante. Et j'ai eu besoin de faire un travail pour me réconcilier avec moi. Et là, ça va faire bientôt un an. Et une fois, il y a une amie qui m'a dit Tu sais Marion, Avec ou sans tes dents, de toute façon, tu continueras à sourire parce que la loi, elle est en toi. Et ça m'a énormément touchée et bouleversée. C'est une phrase qui me revient régulièrement. Et je me dis, mais oui, moi, je suis quelqu'un de joyeuse. Je ne peux pas m'empêcher de rire, je ne peux pas m'empêcher de sourire, même si j'ai deux dents en moins de vent. j'aime trop la vie en fait et à un moment donné je me suis dit mais tu vas t'enfermer combien de temps comme ça dans ta coquille tu vas te brider en fait combien de temps quoi regarde les autres autour de toi ils t'empêchent pas d'avancer en fait ils se rendent même pas compte de ce que tu es et je crois que pour cette nouvelle année qui commence j'ai envie de m'enfuir en fait et de continuer à sourire.
- Marion
Tu sais, on a cette déformation professionnelle. Nous, on ne regarde que les dents des gens, mais la plupart des gens se regardent dans les yeux. Hier, il y avait une maman qui m'a amené son gamin parce que je suis pour un trauma. Il s'était recassé, il s'est tapé la dent que je venais de lui faire. Et il s'est recassé son incisive. Et puis, elle me dit, il a mis deux jours à me le dire. Je lui dis, ça se voit quand même,
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dès qu'il sourit, ça se voit.
- Marion
Mais elle n'avait pas remarqué. Donc, en fait, les gens ne se... Regarde pas dans les dents ! Les gens se regardent dans la globalité, dans les yeux, dans la posture, mais nous on est là en train de se regarder dans les dents. C'est une déformation professionnelle qu'on a.
- Florence
Peut-être, mais il y a quand même une dimension psychologique, sociale, économique depuis longtemps autour des dents. On parle justement de l'expression des sans-dents qui est très déclassante. C'est-à-dire que les personnes qui ne peuvent pas se faire soigner des dents, C'est des gens qui sont pauvres, c'est des gens qui... Et c'est quand même une réalité aussi.
- Marion
Alors tu sais que je me suis dit, ça y est, je suis une sans-dents. Et je suis tombée sur un article en Afrique du Sud. En fait, c'est esthétique là-bas de se faire enlever les incisives. Et ça montre justement qu'on appartient à une classe. Et du coup, je me disais, vraiment, comme quoi ? Finalement, tout est biaisé. Tout est une question de filtre, de façon de comment on voit le monde.
- Florence
De culture.
- Marion
Moi, je serais là-bas, je serais à la mode, quoi.
- Florence
Les ornements aussi, tu vois, les dents en or. Je me souviens d'avoir eu un patient qui était le chef des gitans de la région et qui était super et qui était hyper réglo et qui venait se faire soigner au cabinet et qui voulait des dents en métal devant ou des dents en or, je ne me souviens plus exactement, mais parce que c'était signe de richesse, de puissance. etc. Ça, c'est aussi une dimension culturelle. Après, au-delà de cette dimension de toi, de ce que tu as vécu au niveau de l'image, il y a aussi toute la dimension douleur et la dimension de confier son corps et sa bouche à quelqu'un d'autre. Ça, tu l'as vécu comment ?
- Marion
Alors, plus ça va. Moi, je le vis bien. Je pense qu'il y a une mémoire du corps, enfin, en tout cas, moi, je le constate comme ça. C'est un site où, du coup, j'ai eu, je ne sais pas, j'ai arrêté de compter, mais au moins huit interventions. Et du coup, effectivement, il y a une sorte d'angoisse qui s'installe juste avant. Et même si je suis formée aux techniques hypnotiques, et même si je le fais sur mes patients, quand il s'agit de le faire sur moi, quand je m'allonge, je suis raide comme un bout de bois, j'ai vraiment du mal à me laisser complètement... Allez quoi ! Et vraiment, le maxillaire supérieur, parce que je ne sais pas si ça fait pareil à la mandibule, mais le maxillaire supérieur, ça résonne de fou dans toute la tête.
- Florence
Ça, tu vois, même sans l'avoir vécu.
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C'est quelque chose qu'on pressent, tu vois, quand on intervient sur le maxillaire inférieur ou quand on va intervenir sur le maxillaire supérieur. Moi, je n'ai pas la même appréhension sur le patient, je veux dire. Je le préviens un peu. Alors, c'est vrai que des fois, tu ne vas pas non plus trop en rajouter parce que ce n'est pas la peine de lui faire peur. Mais en tout cas, moi, j'y suis attentive. Est-ce que toi, du coup, quand tu es sur le fauteuil et qu'on est dans une situation qui est particulièrement vulnérable, tu es très attentive à l'attitude, aux gestes, aux détails du praticien qui te soigne.
- Florence
Là, en ce moment, je pense que la praticienne qui m'a prise en charge, je ne suis pas un cadeau pour elle, parce que je pleure, parce que ce n'est pas facile, et que je vois bien qu'elle fait tout ce qu'elle peut pour que ça se passe bien, et je sais qu'elle donne le meilleur d'elle-même, et je me sens en confiance avec elle. Mais c'est moi avec moi, en fait, quand je suis sur le fauteuil. Finalement, La personne qui me soigne autour, j'ai besoin d'être rassurée sur ses intentions, c'est-à-dire qu'on soit d'accord sur ce qu'on va faire. Et d'ailleurs, je l'ai remerciée parce que je pense qu'elle me l'aurait enlevée, cette dent. Elle a entendu que ce n'était pas envisageable pour moi et qu'il fallait me laisser le temps. De me faire à l'idée que peut-être j'allais l'enlever, même si, tu vois, j'ai pas encore fait, j'y suis pas encore. Et d'accepter de me prendre telle que je suis. Et donc, des fois, je pleure, des fois, je bourdonne, des fois, j'ai envie de... Mais elle me laisse faire, quoi. Et juste ça, c'est déjà génial, parce qu'en fait, elle le prend pas pour elle. Et hier, c'était rigolo, parce que j'ai eu une patiente phobie. Et justement, à un moment donné, je commençais à entendre un petit bruit. Je me disais, mais c'est quoi ce bruit sourd que j'entends ? Et j'ai réalisé que c'était la patiente qui bourdonnait.
-
C'est quoi que tu appelles bourdonner ?
- Florence
Comme un enfant, une fois, il m'avait déjà fait ça quand je le soignais. Il faisait là... Et il fait ça. J'ai laissé faire. J'ai intégré dans l'hypnose en me disant que peut-être, autour de l'endroit où elle se trouvait, il y avait des petites abeilles et qu'elle pouvait laisser aller au bourdonnement environnant, etc. Et à la fin, elle m'a dit mais merci Et en fait, j'ai senti que ça l'avait vraiment apaisée de faire ça. Et à la fin, elle m'a dit merci Merci de m'avoir laissé faire. Et je lui ai dit, de toute façon, je n'aurais pas pu vous empêcher de le faire parce que je ressens, moi, le même besoin de faire ça. Et je ne sais pas pourquoi. Peut-être que de vibrer comme ça...
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Un ronronnement un peu apaisant ? Tu sais, la thérapie avec les animaux, tu poses un chat sur le patient. Oui,
- Florence
mais le yoga fait ça aussi. Le yoga fait vibrer comme ça.
-
Oui, c'est vrai, c'est des vibrations.
- Florence
C'est des vibrations. Moi, je ne l'explique pas du tout. Mais tout ce que je peux dire, c'est que ça permet de déconnecter et de s'emmener. Et quelque part, peu importe en fait quelles sont les ressources que le patient a pour aller bien. Nous, notre but, c'est de le soigner. Si son truc, c'est de chanter, de bourdonner ou de pleurer, de laisser aller. Avant-hier, c'est pareil, j'avais une jeune fille, je sais que le soin se passait bien, et d'un coup les larmes se mettent à pleurer, je lui dis j'accueille, laissez couler ce qui est à sortir, elle avait subi un accident de voiture, et donc c'était suite à un trauma suite à ça, et à la fin de la séance, la mère me dit ça fait un an jour pour jour l'accident de voiture. Et moi, je n'avais pas à réaliser ça. Et donc forcément, quand on va travailler dans la bouche, on ne sait pas où part le patient. Il part surtout dans des soins qui durent une heure, deux heures. Et il faut le laisser faire.
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Oui, c'est sûr. Et puis j'ai envie de dire, le patient, on lui a tellement bien expliqué que quand on allait voir le dentiste, on n'était pas chez le psy. En fait, tout est bien compartimenté dans notre médecine. Chaque organe a son spécialiste, donc tu vas chez le dentiste, tu laisses quand même un petit peu de côté. Alors il y en a, c'est pas possible parce que ça les submerge tellement. Mais d'un autre côté, empêcher ces émotions, c'est aussi pour nous en tant que praticien, se mettre des freins énormes pour arriver à bien soigner ces gens-là en fait. Oui,
- Florence
je pense. Et puis l'émotion doit sortir. Comme tu disais, c'est un deuil. Et... Le deuil d'une dévitalisée dents, des fois pour certains patients, il y avait un jeune hier qui me disait, mais moi j'ai déjà une agénésie de 8 dents, j'ai pas envie qu'on me dévitalise une dent en plus. Sa dent était déjà nécrosée, donc je lui explique le principe en fait, je lui dis c'est comme si elle était déjà dévitalisée naturellement, donc il faut juste qu'on désinfecte maintenant. Mais pour eux ça a de l'importance les mots, Une fois qu'on est soigné, qu'on ressort, on n'est pas comme avant. Il y a un avant, il y a un après. Et donc, ces émotions, il faut les accepter, il faut les laisser couler. Et en tant que praticien, si on n'a pas... travailler sur soi pour accepter pour mettre la distance qui va bien pour se dire ce n'est pas moi là elle gère son truc elle a son émotion moi tant que je peux faire mon acte technique c'est ok j'ai
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juste à l'accompagner ce travail d'accompagnement il est Il n'est pas facile à mettre en place, parce qu'il y a deux dimensions dans ce que tu dis. Il peut y avoir le praticien qui se protège et se met à distance des émotions en disant ce n'est pas mon problème en gardant une attitude peut-être haute du sachant, comme plus dans le modèle paternaliste. En tout cas, on peut avoir cette dimension de distance, mais qui n'est pas une distance avec l'empathie. par contre toi ce que tu préconises là c'est un accompagnement par l'hypnose par la parole pour que le patient puisse s'il veut laisser libre cours à ses émotions mais ça ça demande un travail énorme pour le praticien parce que moi qui me suis formée à l'hypnose mais qui ai eu beaucoup de mal à le mettre en pratique et encore aujourd'hui je la pratique pas parce que je trouve ça difficile alors moi je parle beaucoup avec mes patients après et avant le soin Et c'est d'ailleurs un temps qui est presque inclus dans mon temps de travail. Tu vois, j'ai des séances qui sont volontairement un petit peu plus longues que ce dont j'aurais besoin techniquement, parce que je sais que je discute avec mes patients. Alors pas de la puée du beau temps, mais il y a ce temps-là qui est important dans mon activité quotidienne. Mais pour autant, pendant l'acte, j'ai fait quelques séances, alors c'est un manque de pratique, Mais je trouve ça extrêmement difficile d'arriver à la fois à se concentrer sur l'acte technique et à faire ce travail d'accompagnement.
- Florence
Oui, alors moi je fais pas mal d'hypnose conversationnelle, l'hypnose formelle j'en fais quand même peu, mais là c'est juste ne pas juger, tu vois. Ça je pense que tout le monde est capable de faire ça. Juste même prendre un tout petit peu de recul et ne pas juger et laisser faire. Et ça ne va pas durer des plombes en fait. C'est juste qu'on est toujours à regarder sa montre. Et tu as raison de se dire, les patients qui sont un peu phobiques, ils te le disent, naturellement ils te le disent. Moi j'ai très très peur des dentistes, ou d'ailleurs ça se voit dans leur nom verbal, donc tu peux leur poser la question s'ils n'osent pas ouvrir la porte. Mais du coup, ces gens-là, tu vas prendre plus de temps. Moi, mon temps, il est calculé comme toi, par rapport à ça. Et c'est ce que je leur dis justement. Je leur dis, moi j'ai le temps.
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Je ne suis pas quelqu'un qui ait beaucoup le regard tourné vers le compteur et vers le chiffre d'affaires. Et des fois, ça serait bien que je me penche mieux sur la question d'ailleurs. Mais je ne pense pas en plus que ça ait eu un impact négatif sur justement mon activité. Par contre, quel soulagement en fait pour moi de sortir de cette pression. de la rentabilité permanente et de me dire le patient ne va pas commencer à me raconter sa vie parce que là je n'ai pas le temps je vais lui faire comprendre que je n'ai pas le temps et je vais ouvrir la porte et il va comprendre qu'il faut partir alors quand le patient est en train de te raconter que son fils ou sa fille vient d'avoir un accident grave est dans le coma aujourd'hui même comme avant les gens vivent des choses parfois très difficiles et quand ils te font cette confiance qui est énorme, en fait, de te raconter ça. Moi, j'aime bien savoir que j'ai 5 minutes, 10 minutes pour pouvoir le faire.
- Florence
Oui, on ne choisit pas d'être la personne qui va... Enfin, d'être le confident du moment, en fait. Des fois, il y a des choses qui sortent, et ça a besoin de sortir, en fait. Et donc, on est aussi des soignants. Moi, il y a quelqu'un un jour qui m'a dit, mais Marion, en fait, tu peux faire beaucoup plus que sauver des dents. Et c'est vrai qu'aujourd'hui, moi, quand je soigne ces patients-là, j'ai l'impression d'avoir planté une petite graine, en tout cas d'avoir participé à la construction. d'une petite partie de, si on peut dire ça comme ça, d'avoir été un petit maillon qui va peut-être leur ouvrir la porte des possibles, de retrouver la confiance en soi, de ressentir qu'on est capable de faire les choses. Cette patiente phobique, hier, elle pleurait avant même d'avoir qu'on ait commencé, et quand je lui demande de quoi elle a peur, elle me dit, j'ai peur de partir en courant au milieu du soin. Donc je lui dis... Donc finalement, vous êtes en train de me dire que vous avez peur de vous. Donc je lui dis, c'est une bonne nouvelle déjà. Et du coup, en travaillant là-dessus, sur sa capacité à pouvoir balayer un petit peu cette pensée qu'elle n'est pas capable, et bien du coup, à la fin, c'est pareil. Elle m'a dit, mais merci de m'avoir dit que j'étais capable. C'est comme s'ils ne se croient plus capables. Ils ont des croyances qui sont très, très ancrées. Comme une autre qui m'avait dit, je suis insoignable. Je suis insoignable. Personne ne peut me soigner. Je me fais virer de tous les cabinets. Je suis insoignable. Voilà, celle-là, c'est une croyance qu'il faut casser dès la première consultation. Et si elle reste dans sa croyance, oui, elle sera insoignable. Mais si on arrive à ouvrir une petite brèche pour qu'elle puisse avoir un petit espoir que si elle va pouvoir être soignée, là, on a gagné. Et ça, je trouve ça génial, en fait.
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Oui, c'est génial. Tu rentres vraiment dans la dimension justement du soin, du rôle du soignant qui a énormément de sens en fait. Et c'est ce qui fait que tu es heureux d'aller bosser aussi.
- Florence
Oui.
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La réussite technique, c'est gratifiant, mais ça gratifie, je trouve, plus l'ego. Oui,
- Florence
tout à fait.
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Mais là, savoir que tu peux avoir un impact. Et dans ce que tu dis aussi, c'est la dimension de la bouche. qui pour moi par l'histoire peut-être de notre profession, par l'histoire de la médecine et de la classification un peu des spécialités et qui finalement fait que certains organes paraissent mieux classés que d'autres.
- Florence
C'est vrai.
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Par exemple, le cœur est beaucoup plus noble que la bouche et j'ai l'impression que la bouche, et de part peut-être cette histoire liée à notre profession, a été sacrément déclassée du corps Alors que finalement, mais quel autre organe remplit autant de fonctions ? La fonction sociale, le sourire, l'image de soi, la mastication, la nutrition, la phonation, la respiration. C'est incroyable en fait.
- Florence
C'est rigolo ce que tu dis parce que ça me fait écho à ce que je pensais justement quand j'ai choisi de faire dentaire plutôt que médecine. Ce qui me bloquait pour aller en médecine, c'était la peur de l'échec dramatique et fatal pour un patient. Et je m'étais dit, en dentaire, au pire, c'est qu'une dent.
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Oui, mais je pense qu'en fait, on est nombreux à avoir eu cette réflexion, mais qui est aussi une façon de nous enlever. On a beaucoup de pression. Alors, je ne dis pas que les autres spécialités de médecine n'ont pas beaucoup de pression, parce que c'est sûr, après, tu as un enjeu vital. Mais nous, on nous dit tout le temps, on ne tue pas les gens. Moi, j'ai même un discours qui est revenu régulièrement pendant nos études. Et après, quand on démarre et qu'on a ce stress, on se dit, bon, au moins, nous, déjà, c'est faux. Il y a eu des cas qui ont montré le contraire. On peut aussi avoir un impact important sur la santé des gens et on peut faire malheureusement des erreurs qui sont fatales. Mais oui, je te rejoins là-dessus.
- Florence
Pour rebondir sur le sécundant, je trouve que pendant longtemps, justement, et c'est Abdel Awacharia qui disait que Pascal Station disait la meilleure dent c'est l'implant On a pensé que l'implant pouvait résolver tous les problèmes et que c'était plus noble qu'une dent. Souvent, j'ai entendu dire mais mettre 800 euros pour sauver une dent, franchement, mais mettre 800 euros pour un truc qui n'est pas une dent ! Ou 900 euros pour un implant qui n'est pas une dent. Ça, c'est ta dent, ça t'appartient, c'est ton organe. Et toi, tu préfères payer le même prix, même voire plus, pour un truc de synthèse. Pourquoi ça serait plus noble,
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tu vois ? J'aime bien, tu vois, comparer quand je... On parle beaucoup d'Abdel dans cet épisode, mais Abdel parle des phalanges, et qu'on parle les dents aux phalanges. C'est marrant d'ailleurs, parce que moi c'est aussi une analogie que je fais assez souvent avec mes patients, et je leur dis, une dent c'est un organe, c'est pas un accessoire, c'est pas quelque chose comme ça pour faire joli, c'est un organe. Est-ce que vous auriez la même réaction si je vous disais qu'il fallait vous amputer d'un doigt ? ou d'une phalange, comme le dit Abdel. Mais c'est la même chose. Il faut redonner aussi, quelque part, peut-être, les lettres de noblesse à la bouche et à sa place dans le corps.
- Florence
Tout à fait. C'est beau.
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C'est beau. Donc, voilà. Après, ça pourrait être le point de départ de beaucoup d'autres sujets qu'on développera peut-être un jour dans le podcast. On verra. Finalement, est-ce que tu pourrais dire, et peut-être que ça sera aussi le mot de la fin, est-ce que tu penses que ce que tu as vécu, cette épreuve, a finalement peut-être aussi donné plus de sens à ton métier ?
- Florence
Oui. En fait, je me suis rendue compte que, de façon un peu inconsciente, je m'étais orientée vers l'endodontie et qu'aujourd'hui, je sauvais les dents des gens que je n'avais pas pu sauver chez moi. Et je crois que ça, ça donne du sens pour moi, oui. Parce que je vois bien à quel point, quand elles ne sont plus là, elles nous manquent. et qu'elles ne sont pas remplaçables. Et donc, c'est comme si elles étaient toujours là, finalement. Et du coup, ça donne vraiment du sens pour moi.
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J'ai envie de te dire merci, Marion. pour ce partage parce que c'est pas évident de parler de ça c'est plus facile de parler du métier que de parler de soi et de son vécu surtout quand il y a une dimension douloureuse physiquement et psychologiquement donc c'est super courageux de ta part et très enrichissant pour moi cet échange merci à toi j'espère à bientôt merci Florence Souvent très focalisés sur la technique et la gestion des problématiques inhérentes à nos métiers, nous oublions parfois d'écouter ce que nos patients et patientes ont à nous dire. J'espère que ces séries, dont celle-ci avec Marion Mégli, vous apportera une meilleure compréhension de la dimension émotionnelle de ce que peuvent vivre nos patients et vous aidera à prendre la mesure de la richesse de notre métier. Comme vous le savez, nos dents, notre bouche, sont des organes qui participent à de nombreuses fonctions, mais aussi entretiennent un lien étroit avec toutes les dimensions de notre vie, sociale, économique, psychologique, organique, et j'en oublie certainement. On ne rencontre la dimension humaine de notre rôle de dentiste, c'est prendre la mesure de l'impact qu'ont nos actes, nos gestes, nos paroles sur nos patients, et cette prise de conscience passe forcément par l'écoute de ces derniers. Merci d'avoir écouté cette série jusqu'au bout. Si vous n'avez pas écouté les précédentes avec Abdelawachiria, patient victime des centres dentaires d'Antexia, fondateur du collectif Contre-Dantexia et cofondateur de la Dents Bleues, et Sabrina Lebars, patiente partenaire, atteinte d'un cancer ORL rare, cofondatrice de l'association Corasso, qui œuvre pour sensibiliser au cancer tête et cou, je vous encourage à le faire. Suite à ces trois séries, vous allez devoir patienter un peu le temps que je prépare de nouveaux sujets, mais promis, je reviens très vite pour de nouvelles thématiques et de nouvelles rencontres qui vont, je suis sûre, vous passionner. Vous venez d'écouter un épisode d'Entretien avec un dentiste. Si vous avez aimé, vous pouvez m'aider de plusieurs façons. En mettant des étoiles sur Apple Podcasts ou votre application de podcast, c'est ce qui permettra à d'autres de le découvrir. Vous pouvez aussi le partager sur les réseaux sociaux et en parler tout autour de vous. C'est Pauline Bussy du Son Libre qui a réalisé le montage, la musique Django et de Mr Smith. Les portraits et les séries thématiques d'Entretien avec un dentiste sont à retrouver sur toutes les plateformes d'écoute de podcast, Spotify, Deezer, Apple Podcast, mais aussi sur Youtube ou directement sur le site internet d'Entretien avec un dentiste. N'oubliez pas notre nouveau rendez-vous, la newsletter, tous les deuxièmes jeudis du mois, quand j'y arrive. Pour vous y abonner, suivez le lien dans le descriptif de l'épisode, ou rendez-vous sur le site internet où vous trouverez aussi toutes les précédentes newsletters. Et surtout, n'hésitez pas à me laisser un message sur les réseaux sociaux, ou sur la boîte mail d'entretienvacardantiste à gmail.com, je vous lirai et vous répondrai.
- Florence
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