- Speaker #0
Bienvenue dans ce dernier épisode de cette longue série dédiée à l'argent. Aujourd'hui, nous allons explorer un sujet fondamental, mais parfois complexe à saisir, l'éthique dans le soin. Ce thème me semble crucial pour comprendre comment, en tant que professionnels de santé, nous pouvons naviguer entre des enjeux souvent contradictoires, rendre les soins accessibles, offrir une qualité optimale, tout en assurant la stabilité financière de nos cabinets. J'ai choisi de conclure cette série de l'argent avec une réflexion sur l'éthique, Car c'est peut-être ce qui finalement nous aide à fixer des limites et à trouver cet équilibre difficile entre argent et soins. Pour cet épisode, je suis très heureuse de recevoir Flora Bastiani, philosophe et spécialiste de l'éthique en santé. Ensemble, nous discuterons de la manière dont l'éthique peut éclairer ces dilemmes. J'en profite également pour vous annoncer la sortie de son dernier ouvrage, Philosophie du soin critique, qui aborde la relation dans des contextes comme la réanimation, les soins intensifs et le prélèvement d'organes. Pour tous ceux qui soutiennent le podcast sur Tipeee ou qui aura envie de le faire, un épisode bonus sera accessible via un lien à tous les contributeurs. Dans cet épisode, je recevrai Nicolas Decodin, cofondateur d'Avenue des Investisseurs. Nous y parlerons de budget, d'épargne et d'investissement financier pour la gestion de la cabine identitaire. Épisode 8, au cœur du soin, quand l'argent rencontre l'éthique.
- Speaker #1
Flora Bastiani, je suis enseignant-chercheur en philosophie. Mon grade, c'est maître de conférence, habilité à diriger les recherches. Donc, je suis philosophe à l'origine, mais je suis spécialiste de l'éthique de la santé. Ma thèse portait sur Lévinas, donc c'était ma première étude en éthique. Et désormais, je m'intéresse aux pratiques infirmières, c'est-à-dire vraiment la pratique quotidienne des infirmières, quel est le sens qu'on leur donne et quel est le fondement de la relation de soins.
- Speaker #0
Avant qu'on rentre dans les problématiques un peu plus spécifiques sur le dentaire et sur les questions d'argent, est-ce que tu peux nous expliquer en quoi la philosophie est importante dans le domaine de la santé et comment elle peut contribuer à une meilleure compréhension du soin ?
- Speaker #1
Alors, en général, la philosophie, c'est utile pour deux choses. Poser des questions, ça n'aura échappé à personne qui avait l'idée que la philosophie posait beaucoup de questions sans forcément y répondre. Ce n'est pas une idée fausse, mais elle aide à bien poser les questions. Et par ailleurs, la deuxième chose que fait la philosophie, c'est penser des concepts. Et là, on est plus proche de ce qui relève de la réponse, c'est-à-dire... essayer de tirer les fils du sens des questions qu'on se pose. Donc poser des questions, c'est aller au-delà des apparences, interroger des choses qui nous paraissent évidentes habituellement et qu'on ne prend pas le temps de penser dans notre pratique quotidienne, par exemple. Alors, à l'intérieur de la philosophie, moi j'appartiens à une sorte d'école particulière qui s'appelle la phénoménologie. L'intérêt de la phénoménologie, c'est de se poser la question de ce qui se passe dans notre perception. Et ça amène à questionner comment on ressent son corps, comment on ressent justement le contact, comment on vit avec le passage du temps ou comment on s'inscrit dans l'espace, par exemple. Et donc la phénoménologie, c'est une manière de faire de la philosophie qui amène très proche du concret, très proche des situations vécues. Et donc c'est à partir de cette manière de réfléchir là que vraiment il y a un fort intérêt pour aborder le terrain de la santé, puisqu'en fait la réflexion philosophique, et en particulier phénoménologique, va permettre de comprendre le sens de ce qui traverse ce qu'on fait, c'est-à-dire... ce qu'on fait habituellement sans l'interroger, on va y découvrir un sens auquel on n'avait pas pensé, on ne s'était pas rendu compte que vraiment dans ce qu'on était en train de faire, il y avait la construction de ce sens. Et donc retrouver le sens de la pratique quotidienne et aussi, particulièrement pour les professionnels de santé, il y a l'enjeu de prendre conscience de ce qui nous attache à ces pratiques. Pourquoi ? En tant que professionnelle, je peux me reconnaître dans mes missions, pourquoi je peux me reconnaître dans les valeurs qui sont portées par l'activité que j'ai et pourquoi en fait je m'y retrouve ou je ne m'y retrouve pas d'ailleurs. C'est vraiment une manière d'interroger l'expérience. qui apporte aux professionnels de santé quelque chose comme une resituation dans ses missions et une interrogation du pourquoi. Pourquoi je fais ça ? Pourquoi je choisis une manière ou une autre de pratiquer, par exemple ? Et de sentir à quel point on se retrouve dans ses missions et dans son travail quotidien. En fait... Évidemment, aborder la santé à partir de la philosophie, c'est se poser les questions de ce qu'on apporte en tant que professionnel personnellement dans son métier. C'est-à-dire retourner un peu à la source de ce pour quoi on s'est engagé dans ce travail, dans ces missions, quel est le sens donné à l'évolution de sa carrière par exemple. Et finalement ? Dans mon travail, en tout cas avec les praticiens et les infirmières, ressort beaucoup une surprise de... Ah oui, en fait, je ne m'étais pas rendue compte que ce que je faisais avait autant d'intérêt pour la réflexion. Je pense que c'est lié au fait que les... Les professionnels sont en général toute la journée la tête dans le guidon, toute la journée dans leur pratique petit à petit, et qu'ils n'ont pas l'espace de se poser des questions.
- Speaker #0
Ce concept dont parle Flora, la phénoménologie, peut paraître abstrait au premier abord. Cependant, cette approche philosophique nous aide à redonner du sens à nos gestes quotidiens en tant que soignants. En réfléchissant à nos perceptions, nos interactions, et à la relation que nous entretenons avec nos patients, la phénoménologie... nous permet de ne pas voir le soin uniquement comme une succession de gestes techniques, mais bien comme une pratique ancrée dans l'humain et le vécu. C'est une manière de retrouver la profondeur derrière nos actions habituelles et de se reconnecter aux valeurs qui nous guident. Après avoir exploré comment la phénoménologie peut nous aider à redonner du sens à nos pratiques quotidiennes, je me suis demandé comment peut-on définir précisément le soin. Pour certains, il s'agit d'un acte technique, pour d'autres c'est une relation. J'ai donc demandé à Flora de nous donner sa propre définition du soin. En effet, Avant de rentrer dans le vif du sujet, j'ai voulu revoir avec elle ses définitions clés. Qu'est-ce que le soin finalement ? Quelle est la place de la philosophie dans la santé ? Et surtout, qu'est-ce que l'éthique ? Ces questions peuvent paraître loin de la question de l'argent dans les soins, mais elles sont indispensables pour comprendre comment, en tant que soignants, nous naviguons dans un monde où l'éthique doit cohabiter avec la réalité économique. J'aurais bien aimé qu'on revoie un petit peu, qu'on reprenne et qu'on s'attarde plus sur la définition du soin, qui peut être très différente peut-être en fonction des personnes. Donc j'aurais aimé savoir comment toi, tu le définirais.
- Speaker #1
Alors je dirais que le soin, c'est un ensemble formé par la maîtrise technique, puisqu'il y a quand même à la base du soin... apprentissage technique très important et qui justifie qu'on devienne, qu'on soit considéré comme un professionnel du soin. Donc c'est un ensemble formé à la fois par la maîtrise technique et par la conscience que le praticien a d'agir sur une personne. C'est-à-dire que le geste de soin, il a à la fois une dimension de précision. d'usage des outils, un usage maîtrisé des outils, de lecture clinique aussi de la situation. Et en même temps, à travers toute cette technique, il y a la conscience de la destination de cette technique. Donc le soin, c'est cet ensemble de... Alors certains diraient technique et relationnel. Moi, je dirais juste que... Ce qui forme le soin, c'est à la fois le savoir-faire et avoir conscience du pourquoi on le fait, c'est-à-dire à quelle destination. Donc la technique, elle est dans le soin toujours mise au service de la personne soignée. C'est pourquoi je parle beaucoup des soignants et je travaille avec les soignants, parce que pour moi, le soin ne peut pas être pensé sans le soignant, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de soin théorique. C'est le soignant qui est obligé de tenir tous ces aspects ensemble, cette composition entre le savoir-faire technique d'un côté et à l'intérieur de ce savoir-faire technique, savoir pourquoi on le fait, c'est-à-dire pour soigner quelqu'un.
- Speaker #0
On va maintenant aborder un peu le cœur de ton sujet qui est l'éthique. Et là aussi, j'aurais aimé peut-être mettre un cadre autour de ce terme qui finalement a été traité par plusieurs philosophes, donc qui peut être traité peut-être différemment. Dans le cadre du soin dont on parle aujourd'hui, comment on pourrait définir l'éthique ? Quels sont les principes qui vont guider l'éthique dans le soin ?
- Speaker #1
Alors, je suis au départ spécialiste de l'Evinas. J'ai fait ma thèse de doctorat sur l'Evinas il y a quelques années maintenant. Et donc, quand je parle d'éthique, je m'inspire de la pensée de l'Evinas qui est une pensée de l'éthique et une pensée qui a la particularité de placer l'éthique comme l'ouverture qui a lieu dans la rencontre. entre moi et un autre être humain. Donc, tout simplement, on peut penser l'éthique comme ça, comme cette rencontre avec un autre être humain dont je sens la vulnérabilité. Mais il y a un aspect important, c'est peut-être que ça peut être intéressant de distinguer, pour bien te répondre, l'éthique et la morale. Parce qu'en fait... Il y a souvent une confusion qui se fait, même chez certains auteurs d'ailleurs, mais en général, on confond l'éthique et la morale. Or, comme tu sais, il y a des comités d'éthique et il n'y a pas de comité de morale, jusqu'à présent en tout cas. En fait, la distinction entre les deux, c'est que la morale consiste à poser des principes totalement théoriques, c'est-à-dire à concevoir avant toute expérience. Quelle est la bonne manière d'agir en dehors de toute expérience ? Le grand penseur de la morale, c'est Kant, Emmanuel Kant. Et donc lui, par exemple, il propose de poser des principes avant toute expérience. C'est un de ses concepts, ça s'appelle a priori, c'est-à-dire avant toute expérience. Et donc il propose de réfléchir à comment bien agir dans l'absolu. La différence de l'éthique, c'est que... Donc il ne s'agit pas de penser en dehors de l'expérience, justement, mais l'éthique, elle est adaptée, enfin, c'est une adaptation à la situation. Donc devant l'autre être humain que je rencontre, en particulier lorsqu'il est en position de vulnérabilité, et comme c'est le cas en général dans les soins, l'analyse de l'éthique nous amène à comprendre qu'on a une responsabilité vis-à-vis de l'autre. qu'on doit mettre des moyens à la disposition de son soin, parce qu'il s'agit en fait de répondre à un devoir humain, c'est-à-dire la solidarité humaine qui nous unit, nous oblige dans cette rencontre de l'autre vulnérable à l'aider, on pourrait dire. Donc on parle souvent des principes de l'éthique comme L'autonomie du patient, la non-malfaisance, la bienfaisance, ce sont des choses dont on entend parler très souvent quand on parle d'éthique. Mais il y a toujours une part très théorique dans cette manière d'aborder l'éthique, d'après moi, c'est-à-dire qu'on se donne des principes qui parfois sont difficiles à relier à notre expérience. Et donc, je pense qu'on pourrait fixer les choses... plus simplement et plus en les ancrant dans la pratique, en disant que l'éthique consiste à écouter l'autre, à écouter autrui, à écouter la situation, et donc à entendre ce qui se joue dans une rencontre. Donc il y a un aspect à ajouter à ça, que j'ai mentionné tout à l'heure à propos du sens, c'est le temps. C'est-à-dire que... Dans la question éthique, il y a une question de temps. Et je dirais parfois, il est urgent de prendre le temps pour penser la situation. C'est-à-dire, il est urgent d'attendre pour laisser la pensée se développer, pour penser son soin, pour s'assurer que la décision qu'on va prendre, c'est la décision la plus adaptée. Dans ce sens, à cet endroit-là justement de la réflexion, il ne faut pas oublier quelque chose dont je... dont je pourrais dire là pour le coup que c'est une sorte de principe, mais qui est lié à cette idée d'adaptation à la situation, c'est la collégialité. C'est pas du tout facile quand on travaille en cabinet d'avoir le réflexe de la collégialité, c'est-à-dire d'appeler ses pairs, quels qu'ils soient, pour leur dire dans quelle situation, quand on est face à une situation complexe, je parle pas dans toute situation, mais d'avoir ce réflexe de dire je vais en parler à quelqu'un qui peut-être s'est trouvé dans la même situation que moi ou qui est susceptible. de s'y trouver un jour pour voir si son regard converge avec le mien ou pour voir s'il apporte d'autres éléments de réflexion sur cette situation. Mais ça, encore une fois, c'est... Enfin, tu l'entends, je pense, dans ma réponse, c'est encore une fois être à l'écoute des besoins particuliers, être à l'écoute de la personne, être à l'écoute de sa situation particulière. Donc je dirais qu'il n'y a pas de... principe au sens de règles générales à respecter dans l'éthique mais il ya une attention portée à ce qu'il y a de spécial dans la rencontre avec une personne c'est à dire qu'il ya tout le sens de la rencontre il vient de cette attention qu'on va porter à ce qui ressemble pas à une autre situation quoi alors ce qui fait que cette situation là et à part par rapport aux autres Dans le cadre du soin, on pourrait dire qu'en raison de l'éthique, on a le devoir d'évaluer la situation du patient, de répondre de manière adaptée, de ne pas soigner tous les patients d'une manière identique, avec les mêmes méthodes, avec les mêmes dosages, etc. Mais de chercher l'adaptation. de chercher à se rapprocher de ce qui paraît dans cette situation spécifique le plus adapté. Donc l'éthique, ça oblige à entendre le cas particulier et, dans le meilleur des cas, évidemment, là on ne parle pas de toutes les contraintes qui pèsent sur le praticien, mais dans le meilleur des cas, quand son soin est le plus éthique possible, à faire du sur-mesure. de manière à respecter les différences de la personne qu'on soigne.
- Speaker #0
Ainsi, ce que Flora nous propose ici, c'est une vision très nuancée et humaine de l'éthique dans le soin. Loin de l'application mécanique de règles, il s'agit d'une écoute attentive de chaque patient, de sa situation singulière et de ce qui rend chaque rencontre unique. Dans cette option, l'éthique devient une forme de surmesure où chaque décision doit s'adapter à la réalité spécifique du patient. C'est beau de parler de rencontre parce que finalement on aborde rarement la relation de soins sous cet angle-là. Il y a souvent encore, même si la relation de soins a quand même beaucoup changé, elle est moins paternaliste qu'elle l'a été. En fait cette dimension je trouve, surtout quand tu accueilles un patient pour la première fois. Je trouve que cette dimension de rencontre, de l'aborder de cette manière, ça peut changer pas mal notre état d'esprit à ce moment-là.
- Speaker #1
Le problème, c'est... Enfin, le problème. Je pense qu'il y a beaucoup de contraintes, notamment celle du temps. Tu as compris que c'est un point auquel je tiens beaucoup parce qu'il est fondamental, je pense, à la fois pour le sens, à la fois pour la qualité du soin. Le temps, ça change à peu près tout. Et ça, c'est vraiment la force de la proposition de Lévinas, c'est-à-dire le sens de ce qu'on fait et le sens de notre vie quotidienne, d'après lui, il est porté par les rencontres que nous faisons. Donc ça peut être les rencontres des personnes proches, comme ça peut être la rencontre d'une personne inconnue. Au fond de cette rencontre, il y a la notion vraiment de vulnérabilité, c'est-à-dire qu'en rencontrant une personne, mais même si cette personne c'est mon banquier, par exemple, il y a un moment, même si notre relation est saisie à l'intérieur d'un fonctionnement social très particulier, même dans cette rencontre-là, Il y a un moment où je peux sentir que la personne que j'ai en face de moi, c'est vraiment un être humain, dans toute sa vulnérabilité, dans toute sa fragilité, et que cet aspect-là d'autrui... nous quelque chose de la relation au fond de moi finalement dans mon intimité je me rends compte que Autrui peut être en difficulté que la vie d'autrui finalement elle n'est pas elle n'est pas pérenne enfin tous ces aspects de la fragilité de la vie humaine finalement ils font de la rencontre chez Levinas et donc ça permet de d'envisager les relations sociales d'une manière différente.
- Speaker #0
Après avoir exploré la dimension humaine et éthique du soin, il y a une réalité à laquelle sont confrontés de nombreux et nombreuses dentistes, surtout dans le cadre libéral, celle de l'Arlin. C'est un aspect parfois délicat, mais incontournable dans la pratique quotidienne, car plus de 80% de la profession travaille en libéral. Cette dimension économique peut parfois créer des dilemmes éthiques pour les praticiens. Alors comment peut-on gérer cette tension ? Est-il possible de prendre du recul et de ne pas laisser l'aspect économique dominer la relation de soin ?
- Speaker #1
En fait, dans la question de l'argent, il y a un décalage par rapport à la question éthique. C'est-à-dire que, philosophiquement, l'argent, et en particulier la valeur de l'argent, puisqu'en soi l'argent n'est rien, c'est la valeur qu'on lui donne, ça apparaît comme une interruption de l'éthique, parce que c'est une sortie justement de la situation singulière. L'argent dans la société a une fonction unifiante. C'est un prisme qui traduit toutes les choses qui nous entourent en valeur et qui permet de dire d'une manière certaine, puisqu'elle évolue avec le temps aussi, quelle est la valeur d'une chose, quelle est la valeur d'un service. Et donc ça fait sortir... de la singularité de la rencontre en fait. On oppose ici ce qui est pareil pour tout le monde, c'est-à-dire la valeur financière d'un bien ou d'un service, c'est la même valeur en argent pour tout le monde. Et de notre côté, on a dans le soin quelque chose qui est unique pour une personne et dans le cadre d'une relation. Donc on voit bien que là, la tension, elle s'établit entre la particularité, justement, être à l'écoute, etc., et revenir à un système de valeurs qui met de côté toute cette singularité, finalement. Donc ça, c'est une chose, mais il y a une autre chose, c'est que l'argent, c'est ce qu'écrit Lévinas, d'ailleurs, parce que... Comme tu m'as invité, je suis allée re-regarder, il a écrit un texte qui s'appelle Socialité et argent Et je me suis dit Ah tiens, là ça tombe à pic, il va y avoir des choses intéressantes pour cette discussion Et donc il écrit L'argent c'est la médiation par excellence Qu'est-ce qu'il entend par là ? C'est que la fonction de l'argent c'est d'entrer en relation et c'est de pouvoir échanger des choses et des services. Donc c'est un outil de mesure qui permet la reconnaissance de la valeur d'une chose et d'un service, mais en quelque sorte, on pourrait dire que l'argent, ça aplanit les relations de manière à leur permettre de paraître équitable en tout cas. Même si après, l'effet n'est pas forcément celui-là, mais en principe, ça pourrait être ça. C'est-à-dire que l'argent fait rentrer dans un système qui n'est pas... seulement celui du face-à-face, de l'éthique, mais qui est celui de la vie sociale. Et donc l'argent, c'est quand même ça qui permet de venir demander un service à un inconnu et de s'attendre à ce que cet inconnu rende ce service contre de l'argent. Donc l'argent fait partie des systèmes qui contribuent à nous donner à tous accès à des choses et à des services. qui contribuent aussi à cette santé, à notre santé. Donc il n'est pas nécessaire finalement, s'il n'y avait pas l'argent, qu'est-ce qui se passerait ? C'est ce à quoi j'ai réfléchi. Si les soignants n'avaient pas une mission à l'échelle de la société, et donc ils n'avaient pas de salaire pour leur travail, peut-être qu'ils soigneraient que leurs proches, peut-être qu'ils soigneraient que les personnes qu'ils connaissent. Donc finalement, l'argent qui fait rentrer dans le système social permet d'entendre tout le monde de la même manière, permet d'ouvrir un accès à des services et à des biens d'une manière qui est presque la même pour tout le monde. Et donc, c'est en ce sens que je disais, ça a plané d'une certaine manière les relations sociales en substituant la valeur de l'argent à la fermeture sur un milieu, sur un clan, sur une famille. ce genre de formation sociale fermée. Et donc, avec l'argent, on inscrit la relation de soins dans la société. Donc, c'est plus simplement... Là est la tension, c'est que ce n'est plus simplement le face-à-face, mais c'est aussi la vie sociale, la vie financière. C'est aussi des préoccupations qui ne sont pas directement dans cette rencontre-là, ni dans ce soin. Et c'est ce qui implique qu'il y a une forte tension. c'est que ce sont des sphères distinctes qui se rencontrent. Donc on a un croisement entre, en fait finalement, dans la même rencontre et dans le même moment, on a à la fois la rencontre du patient, que ce soit pour la première fois ou pour la xième fois, donc un patient avec lequel on établit une relation, même si elle n'est pas à pousser, à approfondir, on a quand même une relation avec elle. Et si le patient s'adresse à tel soignant, c'est parce qu'il compte bien sur lui pour réaliser un soin. Donc c'est des sphères distinctes, c'est-à-dire d'un côté l'éthique de la relation et de la rencontre, et de l'autre côté le système d'échange de services et de biens. Et ces deux sphères distinctes se rencontrent finalement au même endroit. Et c'est ça qui va, qui forcément crée des tensions parce que c'est difficile de switcher d'un moment à l'autre, d'une sphère à l'autre. Donc je ne dirais pas qu'il y a des principes qui permettent de sortir de ces tensions-là, bien sûr. Mais en tout cas, je pense que d'y penser de cette manière-là, de penser que... L'argent, c'est aussi ça, en plus du système de santé qu'on a en France, évidemment, mais c'est aussi ça qui permet à un patient de venir voir un professionnel de santé. C'est-à-dire que sans ça, peut-être que cette rencontre-là n'aurait pas lieu et que c'est en ça que c'est une médiation. C'est-à-dire que quelque chose se loue qui n'est pas de la rencontre éthique, mais qui est de la mise en relation.
- Speaker #0
Flora nous a donc expliqué que l'argent, en tant que valeur unifiante, crée une certaine tension par rapport à l'éthique du soin. Là où le soin est unique et singulier, l'argent, lui, traduit chaque service ou acte en une valeur commune et abstraite, ce qui peut sembler en contradiction avec la rencontre individuelle entre un praticien et un patient. En même temps, comme Flora le souligne, l'argent est une médiation nécessaire dans notre société. Il permet d'établir des relations sociales, même dans des contextes où le lien personnel n'existe pas encore, et rend possible l'accès aux soins. Sans cette médiation, la relation de soins pourrait être limitée à des cercles privés, comme la famille ou les proches. Toutefois, cette coexistence entre les deux sphères, l'éthique de la rencontre et la réalité économique, crée une tension permanente dans la pratique. Cette tension se renforce encore davantage en dentisterie où une partie des soins n'est pas ou peu remboursée. Cela crée une inégalité d'accès aux soins pour certains patients qui doivent parfois faire des choix difficiles en raison des contraintes financières. Cela pose la question de savoir comment un praticien peut gérer cette problématique, particulièrement lorsqu'il se trouve face à un patient, pour qui l'accès aux soins est un véritable obstacle.
- Speaker #1
Oui, bien sûr, ça c'est une bonne question parce que finalement tout ce que je disais c'était que l'argent permet la mise en relation. permet à ce système-là d'exister, ça permet une forme d'accès, mais en même temps, c'est là que c'est aussi sur la base de ce système-là que se louent toutes les inégalités face à la santé, c'est-à-dire évidemment des personnes qui justement, précisément, en raison de l'argent, ne vont pas venir en consultation, vont attendre. très longtemps il va y avoir une perte de chance pour leur santé qui est énorme évidemment enfin tout ça est aussi engendré par l'argent donc c'est assez c'est une situation assez complexe et dans
- Speaker #0
Je pense qu'en tout cas, pour le soignant, dans ce contexte de tension, parce qu'évidemment, lui, il ne peut pas savoir que des personnes vont s'abstenir de venir le voir pour cette raison. Il n'emporte pas la responsabilité, c'est ça que je veux dire. Mais il a une forme de responsabilité quand il est face à un patient et qu'il doit lui annoncer quelque chose. Il doit lui présenter un devis, lui expliquer le... des soins qui pourraient recevoir et qui serait sans doute le mieux qu'ils reçoivent dans ce contexte la tension de tension entre ces deux ces deux aspects je pense que c'est à la source de la alors je vais faire une réponse de philosophe qui peut-être sera pas hyper satisfaisante puisque c'est pas c'est pas très évident mais je crois que la seule manière de s'y retrouver ces deux C'est qu'à la source de la relation, on peut puiser les contours de sa pratique, c'est-à-dire présenter les choses à l'intérieur de cette relation, c'est-à-dire établir une relation dans laquelle il est possible d'exposer d'une manière claire ce qu'il en est de la question financière des soins, du coût des soins. C'est aussi une occasion dans laquelle... Pour revenir au sens même de l'éthique, on revient à la source de la relation, on revient à écouter les particularités de ce patient. Un patient vulnérable sur le plan de la santé, ça peut aussi être un patient vulnérable sur le plan économique, sur le plan social. Et donc là, c'est comme une... un double fond de la vulnérabilité, c'est-à-dire que non seulement il est vulnérable dans ce qui l'amène à consulter, mais il est en plus vulnérable parce que sur le plan social, donc en dehors de l'éthique et sur le plan de la vie de la société, il est aussi vulnérable. Et donc, s'en sortir avec ça, c'est... Là, c'est... Je pense, dans la relation, moi, j'opterais pour cette... Cette idée-là qu'on peut se tourner vers la relation pour partager avec le patient tous les éléments de la décision qu'on lui propose, qui n'est pas forcément une décision, mais qui peut être une proposition avec plusieurs variantes, par exemple, je suppose, en lui expliquant véritablement pourquoi. pourquoi on pense qu'une décision est meilleure qu'une autre et pourquoi, peut-être, le coût est justifié. C'est-à-dire que la raison pour laquelle on exerce cette mission de soins, elle doit être claire, pour pouvoir permettre d'être à l'aise dans la rencontre et dans l'échange sur ces questions. Si j'exerce pour gagner de l'argent, alors je n'aurai aucun mal à présenter le devis à mes patients. Ça, ça résout tous les problèmes. Si j'exerce en vue du bien du patient, et donc en espérant que tout se passe au mieux pour lui, je devrais là non plus pas avoir de mal à lui expliquer les différentes possibilités et les raisons pour lesquelles ces possibilités représentent des coûts différents. C'est-à-dire que l'accès à ces soins, il est conditionné par le choix du patient par le choix du soignant, en principe. Donc, il faudrait, enfin, dans l'idéal, il faudrait qu'il y ait une co-construction du projet de soins à partir d'une discussion assez claire. D'un autre côté, si on décale la question, on peut se dire que, on peut se demander, est-ce qu'un vendeur de voiture a des scrupules à voir ? Un père de famille s'endettait pour des années pour acheter quelque chose qui est au-dessus de ses moyens. Pas du tout, parce qu'il considère que son métier, c'est de vendre, quelles que soient les conséquences. Alors évidemment, la différence, la grande différence dans le soin, c'est qu'on vend quelque chose qui est beaucoup plus précieux qu'une voiture, et que tout bien d'ailleurs. Et en même temps, cette chose qui est plus précieuse, elle est moins visible socialement. elle est moins valorisée socialement. On vend une meilleure santé, on vend une meilleure qualité de vie. Lorsqu'on parle de dentisterie, on vend aussi... une amélioration de l'image de soi, un accès à la vie sociale améliorée. Donc c'est bien plus important qu'un bien matériel, mais en même temps c'est souvent tout à fait immatériel, c'est-à-dire que ça se loge dans des actes et dans des modifications qui sont internes et donc qui ne vont pas forcément beaucoup se voir. Donc, il y a une difficulté aussi, mais là, c'est une difficulté d'ordre plutôt social, à donner beaucoup de valeur à quelque chose qui est immatériel. Et en revanche, on a tendance à donner beaucoup de valeur, je parle sur le plan financier, à ce qui est matériel, ce qu'on va pouvoir utiliser, montrer, etc. Donc le... Le problème, l'attention, elle vient aussi de la manière d'expliquer la valeur financière d'un acte ou d'un bien qui n'est pas manifeste, mais qui repose sur l'intérêt immédiat ou à venir du patient, donc qui est d'une certaine manière impalpable pour le patient. C'est-à-dire que lui, si jamais dans son raisonnement, il se dit qu'est-ce que je vais avoir en échange de ce... de cet argent, ce n'est pas toujours accessible pour lui de bien se rendre compte de la valeur ou la dimension très précieuse de ce qu'il va obtenir. Donc je pense que cette différence d'approche, elle ne peut se résoudre que finalement dans la discussion. Alors là, encore une fois, on revient sur cette question du temps, prendre le temps de la discussion. C'est un luxe qui parfois est difficile à obtenir, des deux côtés d'ailleurs parfois, à la fois parce qu'il faut tenir sa journée de rendez-vous et à la fois parce que la personne qu'on a en face de soi, elle n'est pas forcément dans le dialogue, elle n'est pas forcément en recherche d'explications et ce qu'elle voit finalement, ça peut être seulement le résultat. Mais le seul moyen de s'en sortir à mon sens, c'est d'essayer le plus possible de faire converger ces deux mondes, ces deux visions différentes de ce qu'est le soin et de ce qu'il va apporter à la personne.
- Speaker #1
Flora souligne la complexité de l'argent dans la relation de soins. Même si c'est une médiation qui permet l'accès au service, elle crée aussi des inégalités et peut rendre la discussion autour des devis difficile à gérer, tant pour le praticien que pour le patient. Cette difficulté est exacerbée par la nature immatérielle des soins dentaires qui ne sont pas toujours perçus dans toutes leurs valeurs, contrairement à des biens matériels. Cela pose un vrai défi d'explication pour le praticien. Cela me fait réfléchir à un risque que j'ai observé dans certaines formations récentes en dentisterie. De plus en plus, on voit apparaître des approches qui flirtent avec la dimension commerciale, où le langage peut sembler proche de l'éthique, mais... où l'objectif est de convaincre le patient, presque comme un vendeur. On cherche à identifier des leviers personnels. Par exemple, si un patient aime particulièrement manger, partager des repas, on mettra l'accent sur la restauration de sa capacité à manger confortablement. Cette approche me paraît sortir du cadre éthique, car on se rapproche d'une stratégie de vente. Et je pense que de nombreux praticiens, praticiennes, tout comme moi, ressentent cette tension entre l'aspect éthique de leur métier et les contraintes économiques qui peuvent parfois les pousser vers des solutions qui ne leur conviennent pas.
- Speaker #0
J'avais pas du tout pensé à la dimension de convaincre. Parce que ce à quoi je pensais, c'était plutôt au fait que... En fait, une des difficultés de la pratique libérale, c'est qu'on est seul. Quand on est seul face à son patient, bon, il peut y avoir une autre personne, mais enfin, souvent on est seul à expliquer les choses. Et le problème que je vois dans... convaincre et vouloir convaincre, c'est-à-dire vouloir trouver des arguments, finalement faire de la rhétorique pour pouvoir persuader le patient, c'est pourquoi on le fait. C'est-à-dire que si on a la volonté de bien soigner le patient, évidemment on peut soi-même être convaincu. qu'une décision est la meilleure, mais finalement, aller jusqu'à des pratiques qui pourraient avoir l'air de relever de la manipulation, parce que c'est ça que j'entends dans trouver les bons leviers pour persuader une personne de faire quelque chose qu'elle ne souhaiterait pas oui, ça ressemble vraiment à de la vente. Donc c'est très surprenant, je ne savais pas que ça pouvait se faire même. Il y a des pratiques qui viennent du monde hospitalier et qui pourraient être intéressantes, c'est la construction du projet de soins. Finalement, quand on reçoit un patient à l'hôpital, souvent il y a l'idée justement de construire avec lui son projet de soins. Et cette construction, elle repose sur ses attentes aussi, c'est-à-dire... qu'est-ce qui est le plus important pour lui, qu'est-ce qu'il espère du soin, qu'est-ce qui est le plus important pour lui et qu'est-ce qui est moins important pour lui. Et finalement, construire avec le patient un projet de soin, ça peut aussi être une occasion d'interroger ses propres critères à soi comme soignant. C'est-à-dire que les critères du soignant, c'est souvent des critères idéaux de bonne santé. Mais en même temps, il faut qu'il puisse rencontrer les critères du patient. Encore une fois, je reviens à ce que je disais dès le début, se mettre à l'écoute de la particularité du patient et entendre d'où il parle, quelle est sa situation. C'est aussi entendre que l'idée qu'on se fait en tant que professionnel de santé, de ce que devrait être sa santé, n'est pas forcément ce qui lui convient ou ce qui lui correspond. Et donc, ouvrir le dialogue pour pouvoir créer un projet de soins qui n'est pas le projet de soins du soignant pour le patient, mais qui est un projet de soins qui appartient en quelque sorte au patient et qui est co-construit, ça permet aussi de ne pas porter... Pour le soignant, ça permet aussi de ne pas porter seul la responsabilité de la décision. C'est-à-dire que ce que j'entends dans on va chercher des manières de convaincre à tout prix le patient que ça c'est le mieux pour lui c'est en tant que soignant, je sais totalement ce qui est bon pour lui Et là, dans ce cas-là, on revient à une forme de paternalisme quand même. qui enlève l'occasion au patient d'exprimer sa position. Alors pas forcément de l'exprimer dans les termes qui coïncident avec ceux d'un soignant, mais au moins de témoigner de ce que lui, il est venu chercher, de pourquoi il en est arrivé là, et de quelle est sa relation aussi avec le monde du soin. Parce qu'il y a un aspect qui est important. dans la santé et qui est parfois quelque chose qu'on oublie justement parce qu'on est dans sa pratique quotidienne c'est que quand tu reçois un patient, tu représentes pour lui bien souvent le monde de la santé c'est à dire que la relation que tu vas avoir avec lui, elle peut être déterminante pour les autres relations que ce patient va avoir avec d'autres professionnels de santé et donc si... Je donne des exemples au hasard, mais imaginons que ça se passe mal parce que tu fais une remarque qui le fait se sentir hyper honteux, par exemple. C'est un patient qui risque de plus jamais retourner en consultation chez un professionnel de santé parce qu'il aura été marqué par le fait qu'un professionnel de santé ou que la santé, c'est quelque chose qui le fait ressentir de la honte. Et donc il y a une forme de responsabilité qui s'étend au-delà finalement de l'espace de la rencontre et qui est un impact que chaque professionnel de santé va avoir sur la vie du patient et la relation du patient avec le monde de la santé. C'est un élément auquel on pense. pas forcément, mais qui peut être majeure dans certains cas.
- Speaker #1
Flora nous éclaire sur l'importance de co-construire un projet de soins avec le patient en tenant compte de ses attentes et de sa situation personnelle, et pas seulement des critères médicaux du praticien. Cela permet de sortir d'une démarche paternaliste et d'éviter une approche commerciale ou manipulatrice où le soignant imposerait une solution sans consulter véritablement le patient. Cette relation de soins co-construite renforce aussi la confiance et comme Flora l'a rappelé, l'impact qu'un soignant peut avoir sur la manière dont le patient perçoit le monde médical, qui est parfois plus important qu'on ne le réalise. Cela me fait aussi réfléchir à mon propre parcours. Si je suis honnête avec moi-même et avec vous, j'ai orienté ma pratique vers la parodontologie, non seulement par intérêt pour cette discipline, mais aussi pour éviter la complexité de l'omnipratique. C'était une façon pour moi de simplifier certains aspects de la pratique dentaire. Mais aujourd'hui, avec le recul, j'ai pris conscience de cela et je me redirige progressivement vers un exercice plus omnipratique, tout en restant proche des besoins réels des patients et dans cette dynamique de co-construction dont Flora parle. Cela me fait aussi penser à une autre dynamique que l'on observe parfois dans la pratique dentaire, celle des choix de limiter son exercice à telle ou telle discipline comme forme d'évitement de ses tensions éthiques. Certains praticiens, praticiennes, orientent leur exercice vers des actes spécifiques, comme les soins esthétiques ou en implantologie par exemple. Ce type de soins attire naturellement des patients qui ont les moyens de les financer, ce qui réduit les dilemmes financiers. En sélectionnant certains actes, on sélectionne en quelque sorte les patients. Je ne pense pas que tous les praticiens qui limitent leur exercice le font pour se simplifier la vie. Mais je crois qu'il est important de se demander, pourquoi choisit-on de restreindre son activité à certains actes ? Est-ce par appétence ou aussi pour éviter certaines complexités, qu'elles soient éthiques ou économiques ?
- Speaker #0
Il serait des stratégies d'évitement. Mais en fait, il y a d'autres spécialités qui rencontrent le même problème. Si tu regardes la dermatologie aujourd'hui, en libéral, c'est devenu une énorme... part de pratiques esthétiques. Et je pense que c'est pour les mêmes raisons. C'est-à-dire que ça trie la patientèle de fait. Mais c'est quelque chose qui se pose pour beaucoup de spécialités, je pense. Le fait de ne pas se tourner vers des stratégies d'évitement, c'est aussi une certaine économie personnelle. Je veux dire, exercer comme on le souhaite. avec toutes les valeurs qu'on souhaitait mettre dans son travail. C'est une forme d'apaisement personnel aussi, je pense. Et toutes ces stratégies d'évitement risquent aussi de faire perdre le sens, c'est-à-dire que se confiner à des pratiques pour pouvoir éviter certains problèmes du quotidien, c'est aussi se priver du... Pourquoi on a choisi ce métier ? Pourquoi on continue à l'exercer ? Parce que peut-être qu'à un moment, si les problèmes sont si importants à titre personnel qu'on préfère les éviter, là, je crois qu'il faudrait se poser la question du sens. Vraiment. Pourquoi je suis là ? Est-ce que je suis là pour éviter les problèmes ou est-ce que je suis là pour soigner ? Enfin, voilà, pour le dire d'une manière très simpliste peut-être. Mais ça oblige, enfin, je veux dire, à un moment, il faut aussi se poser la question du pourquoi. Pourquoi on est là ? Pourquoi on fait ce métier ? Pourquoi on l'exerce de cette manière-là et pas d'une autre ? Parce que tout le monde est sensible à certains aspects, mais en fait, on a toujours le choix de changer de manière de pratiquer. On a toujours même le choix de changer de métier. Donc, si on y est, c'est qu'on choisit d'y être. Et si on choisit d'y être, dans le meilleur des cas, il faut vraiment que ça ait un sens personnel pour soi-même. Je pense que c'est indispensable pour sa propre santé, à vrai dire.
- Speaker #1
Je voudrais conclure cet échange en revenant sur une question fondamentale que Flora a soulevée, celle du sens. Pourquoi faisons-nous ce métier ? Ce questionnement va bien au-delà des considérations économiques. Il touche à ce qui nous pousse à nous lever chaque matin et à offrir des soins à nos patients. En tant que soignant, soignante, se demander pourquoi on continue à exercer est essentiel pour garder un cap, pour rester aligné avec nos valeurs et d'éviter de perdre le sens de notre pratique. Au-delà de l'argent, il y a cette rencontre avec l'autre, cette écoute attentive de ses besoins et cette relation de confiance qui se construit au fil des consultations. Cela nous rappelle. que même si la gestion économique est importante, elle ne doit jamais éclipser notre raison d'être, aider, soigner et accompagner nos patients avec bienveillance. En arrivant à la fin de cette série de discussions autour de l'argent en dentisterie, je tiens à dire à quel point chacun de ces échanges m'ont éclairé et aidé à approfondir ma réflexion sur ma propre pratique. J'ai réalisé que ces questions économiques sont indissociables d'une réflexion plus large sur le sens de notre métier et les valeurs qui le guident. Je suis bien consciente que nous n'avons pas fait le tour de toutes les questions. Certains d'entre vous peuvent se sentir frustrés de ne pas avoir vu certains angles abordés, et je vous invite à me le faire savoir. Cela pourrait nourrir de futures discussions, ou être exploré sous d'autres thématiques dans les prochains épisodes. Je tiens à remercier tous les invités qui ont partagé leur savoir, leur expérience et leur réflexion tout au long de cette série. Merci aussi à Pauline Bussy pour le montage, à Maxime Wattieu pour la musique et à Camille Covez pour l'illustration. C'est grâce à vous que tout ce projet a pu voir le jour et évoluer comme il l'a fait. Je vous rappelle que pour soutenir le podcast, vous pouvez participer à la cagnotte. Tous les liens sont dans le descriptif de l'épisode. Et pour ceux qui y contribueront dans le mois suivant la diffusion de cet épisode, un épisode bonus vous sera offert en remerciement. N'oubliez pas l'importance de partager, de mettre des étoiles et de laisser vos avis. Cela aide énormément à faire grandir cette communauté autour du podcast.