undefined cover
undefined cover
Yvette Horner : l'accordéon au cœur de la musique moderne et populaire (1990) cover
Yvette Horner : l'accordéon au cœur de la musique moderne et populaire (1990) cover
Entretiens avec des auteurs, compositeurs, éditeurs Sacem

Yvette Horner : l'accordéon au cœur de la musique moderne et populaire (1990)

Yvette Horner : l'accordéon au cœur de la musique moderne et populaire (1990)

16min |29/05/2018
Play
undefined cover
undefined cover
Yvette Horner : l'accordéon au cœur de la musique moderne et populaire (1990) cover
Yvette Horner : l'accordéon au cœur de la musique moderne et populaire (1990) cover
Entretiens avec des auteurs, compositeurs, éditeurs Sacem

Yvette Horner : l'accordéon au cœur de la musique moderne et populaire (1990)

Yvette Horner : l'accordéon au cœur de la musique moderne et populaire (1990)

16min |29/05/2018
Play

Description

Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode des grands entretiens. Avec cette fois quelque chose d’un peu particulier : c’est pas du rock, c’est pas du jazz, c’est pas du classique, mais un peu tout ça à la fois puisqu’il s’agit d’Yvette Horner. 

Eh oui, Yvette Horner, la reine de l’accordéon, du 14 juillet, du Tour de France et des bals populaires, le symbole français d’un instrument bien de chez nous. 

Cette interview date de janvier 1990, et à l’époque Yvette Horner était devenue très branchée. Le couturier Jean-Paul Gaultier s’était intéressé à elle, l’avait habillée et ils avaient même tourné un clip vidéo ensemble. 

De plus, Yvette Horner venait d’enregistrer un album sur lequel elle reprenait des airs de Michael Jackson et David Bowie... on ne peut pas faire plus branché. 

L’interview s’est déroulée à Nogent sur Marne, chez Yvette Horner, et j’en ai gardé un souvenir ému puisque dans sa maison, tout était en forme d’accordéon.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Les grands entretiens du musée de la Sacem avec Philippe Barbot.

  • Speaker #1

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode des grands entretiens, avec cette fois-ci quelque chose d'un petit peu particulier. C'est pas du rock, c'est pas du jazz, c'est pas du classique. C'est un peu tout ça à la fois puisque c'est Yvette Horner. Et oui, Yvette Horner, la reine de l'accordéon, la reine du 14 juillet, la reine du Tour de France, le symbole français d'un instrument aussi très français. Alors pourquoi cette interview ? Ça date de janvier 1990, et à l'époque Yvette Horner était devenue très très très branchée. Pourquoi ? Parce que le couturier Jean-Paul Gaultier s'était intéressé à elle, et lui avait fait, l'avait habillée tout simplement, ils ont même fait un clip ensemble. Et en plus, Yvette Horner venait d'enregistrer un album sur lequel elle reprenait des chansons de Michael Jackson ou David Bowie, on ne peut pas faire plus brancher. Donc l'interview a eu lieu en janvier 1990 à Nogent-sur-Marne, chez Yvette Horner, et j'ai gardé un souvenir ému, puisque dans sa maison, tout était en forme d'accordéon. Alors évidemment, quand on rencontre Yvette Horner, de quoi on parle au départ ? De l'accordéon. L'accordéon, instrument populaire, et on va le découvrir, un instrument qui peut tout faire.

  • Speaker #0

    N'est-ce pas que l'accordéon avait une palette très étendue sur lequel instrument, sur lequel... quand le musicien est derrière, sur lequel on peut absolument tout faire. Avec l'accordéon, on peut jouer un orchestre symphonique, on peut jouer un solo, on peut accompagner des chanteurs, il y a pas mal de vedettes qui sont accompagnées pour avoir une note spéciale, une note d'accordéon, une couleur. Il y en a qui prennent l'accordéon quand il y avait Brel. Donc, oui, il y a besoin d'un solo, ça je l'ai dit. J'ai des lettres d'enfants de 7 ans, de 8 ans, de 10 ans, de 15 ans, qui jouent de l'accordéon. Il n'y a pas une ville en France où il n'y ait pas un professeur d'accordéon. Donc, quand il y a une grande ville, bien sûr, il y en a plusieurs. Maintenant, l'accordéon est admis. Il y a une classe d'accordéon de nombreux. conservatoires régionaux en France et a maintenant un diplôme d'État concernant le professeur. Et donc, vous voyez, l'accordéon a fait un pas énorme.

  • Speaker #1

    L'accordéon est populaire en France pourtant. Pour la plupart des gens, il reste limité aux balmusettes. Ce n'est pas du tout l'avis d'Yvette Horner, qui a fait bien d'autres interprétations d'autres styles de musique, en particulier une chanson de Michael Jackson.

  • Speaker #0

    Oui, il est vrai que c'est la première fois que l'on fait du Jackson. Mais il y en a d'autres qui ont joué du jazz, à l'Amérique qui jouent du jazz. Il y en a qui jouent d'ailleurs très bien, c'est l'accordéon à touche piano. Ils jouent très bien, mais on ne peut pas... Ça veut dire quoi ? les gens ont l'impression qu'on s'arrête quand il y a la valse suivante, il n'y a plus rien. Mais non, c'est un vrai servicement de concert.

  • Speaker #1

    Alors le plus incroyable, c'est qu'en fait Yvette Horner ne voulait pas faire de l'accordéon au départ, pas du tout. Elle voulait faire du piano classique. Et ce sont ses parents qui l'ont obligé à faire de l'accordéon. Elle raconte.

  • Speaker #0

    Des pianistes, tous les ans, depuis des années, des années, des années, tous les conservatoires, mais des femmes accordistes, il n'y en a pas. J'ai pleuré pendant trois ans. Ça a été la perte d'un très grand tabou. Je ne l'ai encore pas pu oublier, mais je l'ai toujours pratiqué en silence. Mais maintenant, je dois dire que si c'était recommencé, je ferais la même chose. Parce que moi, j'ai l'accordéon dans la peau, dans mes pores. J'adore, j'adore.

  • Speaker #1

    Alors évidemment, tout le monde connaît Yvette Horner, l'accordionniste, mais on sait peu qu'elle est aussi une pianiste virtuose. Normal qu'on le sache peu, puisqu'elle a attendu plusieurs décennies avant d'oser jouer du piano en concert. On se demande d'ailleurs pourquoi elle a attendu si longtemps.

  • Speaker #0

    Pourquoi ? Parce que j'étais partie dans un... J'étais sur des rails, on m'avait mis sur des rails, Yvette Horner, etc., elle arrive à Paris, elle rapporte la Coupe du Monde... de tous les pays. Elle fait le tour de France, elle est reine des six jours. J'étais partie sur des rails et vous savez, c'est difficile d'en sortir. C'est difficile d'en sortir. C'est comme quand on dit, quand on dit, bon ben, vous n'êtes pas bien, vous ne vous entendez pas dans votre ménage, eh bien, divorcez. C'est plus facile à dire que de faire. N'est-ce pas ? Alors ça, c'est pareil, c'est sur des rails, j'étais sur des rails du populaire, du public sportif, de tout ça. Et puis, d'un coup, les engagements venaient, pleuvaient, etc. Et il s'est dit, tiquez son instrument. Pour le profiter, le posséder, ça demande toute une vie. Alors, quand vous en possédez, il faut passer le double de temps avec le piano. Par exemple, un autre deuxième instrument. Alors, encore un autre ? Non, après, c'est du...

  • Speaker #1

    Contrairement à d'autres accordonistes très connus, par exemple Marcel Azzola, le célèbre chauffe Marcel de Jacques Brel. Yvette Horner, elle, elle a peu accompagné de chanteurs.

  • Speaker #0

    Au départ, j'accompagnais des chanteurs à la Bordillon, j'accompagnais au piano, dans les tournées. Oui, oui. J'ai tout fait. Il y a des chanteurs que vous auriez aimé ? Non. Je veux jouer un... Comment dire ? Un concertiste. Non, ça ne m'intéresse pas. Ce n'est pas dire que je ne l'apprécie pas. Attention, il y a des nuances. La langue française est très riche. Non, moi, ce qui m'intéresse, c'est de jouer. Moi, de jouer, d'interpréter les morceaux que je veux, mais accompagner quelqu'un.

  • Speaker #1

    Yvette Horner est une virtuose de l'accordéon. On peut même se demander, puisqu'elle a tout fait, tout joué, du classique, du jazz, du musette, de la variété, est-ce qu'elle n'a pas atteint ? Un niveau maximum, est-ce qu'on peut encore progresser quand on joue comme Yvette Horner ?

  • Speaker #0

    L'accordéon, l'instrument, on ne sait jamais. Il faut se remettre toujours en question. On est toujours d'éternels élèves. Toujours. On ne peut pas rouler des mécaniques. Celui qui roule des mécaniques, c'est un ignorant. C'est qui ne connaît rien. Celui qui roule des mécaniques, c'est qui ne connaît pas la musique. Il ne connaît rien. Il ne connaît rien. Il n'a aucun bagage, aucune profondeur. Il n'y a rien. Non. Il faut toujours se remettre en question. Je travaille toujours comme si je suis une élève. Quand je fais, je travaille dans l'instrument.

  • Speaker #1

    Alors l'accordéon, ce piano à bretelles, comme on le surnomme aussi, d'ailleurs Léo Ferré disait le piano du pauvre. L'accordéon, c'est une grosse boîte compliquée, volumineuse, pleine de soufflets, de boutons, de claviers. On se demande si ce n'est pas un petit peu difficile à jouer quand même.

  • Speaker #0

    Cette question ne se pose pas, je vous le dis pas. Parce que tous les instruments, quand il faut qu'ils soient joués avec beaucoup de finesse musicale, de virtuosité, tous les instruments sont difficiles. Vous me direz, il y a peut-être plus de... Mais là, on est au niveau de la musique et rien n'est facile. Bien sûr, l'accordement n'est pas facile du tout, parce qu'il y a le soufflet, déjà, d'une part, vous voyez le soufflet, il y a les claviers, d'abord, que vous ne voyez pas, deuxièmement. Donc, ça dépend, il fait 12, 14, 16, 17 kilos. Alors, bien sûr, ça n'est pas une bonne chose. N'étant jamais satisfaite de moi, je cherche toujours à aller de l'avant, toujours à apprendre, toujours travailler, toujours la toilette des doigts, quelle soit. Il vous arrive même en faisant une toilette des doigts fantastique de faire des fois du cannerie. Alors celui qui ne travaille pas, vous voyez ce que ça donne. En fait, il n'en sait rien. À part des gens avertis. Bon, alors moi je veux toujours aller de l'avant. Je n'aurais jamais voulu faire une profession et ne pas avoir un bagage. Alors, ce bagage de la musique, je l'ai, qui est important, ce qui me permet de faire des listes au piano, de jouer du Jackson. Pour moi, c'est quelque chose de plus simple.

  • Speaker #1

    En 1990 donc, Yvette Horner, véritable vedette populaire, est devenue aussi... Une idole, des discothèques et des dancefloors branchés, pas seulement dans les balles du samedi soir. Une nouvelle image, en partie façonnée par un couturier de chez nous, qui d'ailleurs plus tard habillera d'autres stars, mais internationales, comme Madonna ou Lady Gaga, Jean-Paul Gaultier. Mais comment s'est donc passée cette rencontre improbable ?

  • Speaker #0

    Mais je ne vais au-devant de rien, je ne vais pas solliciter des choses. C'est lui qui m'a téléphoné de la maison, j'avais vu sur un journal les personnalités que j'aimerais habiller, et puis j'ai vu mon nom, j'ai lu ça comme je le dis d'autres, c'est tout. Et j'étais flattée, d'accord, mais c'est tout. Et puis après un jour il m'a téléphoné pour me dire si je voulais faire un clip. Alors j'ai fait un clip et c'est comme ça que la rencontre s'est faite. C'est un garçon... admirable, qui est très simple. Alors, avec moi, ça fait tilt, ça. Parce que là, je sens la prétention à des kilomètres. Et ça m'a fait sortir plein de boutons sur la figure. Je ne peux pas supporter ça. Je suis allergique à des gens qui viennent se présentant comme le pape et qui ne seraient pas coutus de servir la messe. Alors, moi, je n'aime pas. J'aime bien la simplicité parce que... Quand on regarde auprès, quand on compare avec tout ce qui peut se passer dans la nature elle-même, qui est la perfection, mon Dieu, on est très peu de choses. Je pense que chaque individu a une cellule dans son cerveau qui a une brillance naturelle. Seulement, voilà, l'intelligence, c'est que les parents ne savent pas la découvrir. Souvent, bien sûr, mais ils ne savent pas toujours la découvrir. Et c'est ça, parce que nous avons tous du talent. pour quelque chose, ou pour la cuisine, ou pour la couture, ou pour le dessin. Alors, pourquoi vouloir écraser et dire je suis aussi jeune ? Non, moi je fais mon travail, je veux toujours apprendre. Je joue par amour, et le reste suit. Ça vous va vous rendre compte.

  • Speaker #1

    Yvette Horner aime à décrire son accordéon non comme un simple instrument, mais comme une sorte de prolongement d'elle-même, un compagnon humain. Un compagnon humain, d'accord, mais qu'il faut porter sur ses épaules et qui pèse quand même son poids.

  • Speaker #0

    Et très humain, oui, parce que c'est un instrument qui peut apporter une joie considérable, une joie extraordinaire. C'est un instrument nostalgique, c'est un instrument qui peut faire pleurer. J'y suis arrivée 20 fois. Je joue depuis que je suis enfant, alors bien sûr... Si je joue toujours avec une manvelpo, c'est parce que j'ai joué quand j'étais enfant. Je n'étais pas formée. Et j'avais un instrument qui pesait. Donc, il y a un accartement des eaux qui est anormal par rapport à quelqu'un d'autre.

  • Speaker #1

    Parmi tous ces trophées, prix SACEM, victoire de la musique et autres Grammy Awards, il y a une récompense, plutôt une décoration d'ailleurs, qui fait chaud au cœur d'Yves Etterner. La Légion d'honneur. Même si elle fait preuve de modestie quand on le lui rappelle.

  • Speaker #0

    Et laquelle est... Je me vois pourquoi j'ai eu la Légion d'honneur. Bon, par quoi je cherche, moi. Je ne me suis jamais vue comme... Je ne sais pas. C'est les autres qui me voient. Moi, pour moi, je suis une musicienne. Qui n'a vu qu'une chose, c'était de travailler, de bien jouer, de jouer proprement. Toujours cherché, je suis une perfectionniste, j'ai toujours cherché la perfection. J'ai toujours cherché sans jamais l'atteindre. Et j'ai vu ça dans moi. Je n'ai pas vu le nom qui se formait, je n'ai pas vu, souvent, combien de fois on me dit, il y a des journalistes qui me disent, vous êtes une institution, vous êtes ceci, vous êtes un symbole. Je ne vois rien du tout, je ne sais pas, je ne sais pas du tout. Moi, je suis toujours comme quand j'avais... Je ne suis pas bête, je suis débile quand même. Je sais très bien que j'ai un nom important dans ma catégorie à moi. Et alors, c'est tout. Alors, la Légion d'honneur, c'est pour ça que j'ai été étonnée. Parce que quand on dit, attention, pour avoir la Légion d'honneur, il faut le demander. Mais là, je suis un exemple que jamais... Ah non !

  • Speaker #1

    Souvent habillée en bleu, blanc, rouge, reine des 14 juillets et des belles populaires, Yvette et son accordéon symbolisent la France. Un rôle qu'elle accepte et mieux, qu'elle revendique.

  • Speaker #0

    J'adore. Je mourrais dans un tapis. Et je dois dire même que je me suis battue. Ce n'est pas joli, ça. Ce n'est pas dans ma nature, on peut dire comme ça. J'ai été une fois à l'étranger, mais je ne dirais pas où. L'agent a l'habitude de mettre tout le monde dans le même sac. Partout, il y a des gens bêtes, il y a des gens intelligents, il y a des gens compréhensifs, il y a des gens tolérants. Partout, parce que c'est entier, tous les pays. C'est pourquoi, notre temps date s'est généralisé. Bon, qu'est-ce que j'avais entendu ? Que vous parlez mal des Français, des Françaises, de la France ? Oh, les Français sont fainéants, j'avais entendu dire ça. Ils sont volages. Les Françaises sont volages aussi, elles sont sales. Les Français chez vous, on sort les poubelles à 5 heures, les soirs. Et alors, c'était une conversation comme ça qui a duré. Et puis alors, je n'ai pas pu entendre ça, ce que j'ai fait. Les Français sont ceci, ils sont cela. Alors, je lui dis, écoutez, vous ne pourrez pas dire que les Français sont des lâches.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté ce podcast consacré à Yvette Horner et ce magnifique et pourtant trop méconnu instrument qu'est l'accordéon. Au revoir et à la prochaine fois.

Chapters

  • Introduction à Yvette Horner et son parcours

    00:04

  • L'accordéon : un instrument polyvalent

    00:15

  • Les débuts d'Yvette Horner et ses choix musicaux

    04:21

  • L'impact de Jean-Paul Gaultier sur sa carrière

    09:55

  • Yvette Horner, une icône de la musique française

    13:09

Description

Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode des grands entretiens. Avec cette fois quelque chose d’un peu particulier : c’est pas du rock, c’est pas du jazz, c’est pas du classique, mais un peu tout ça à la fois puisqu’il s’agit d’Yvette Horner. 

Eh oui, Yvette Horner, la reine de l’accordéon, du 14 juillet, du Tour de France et des bals populaires, le symbole français d’un instrument bien de chez nous. 

Cette interview date de janvier 1990, et à l’époque Yvette Horner était devenue très branchée. Le couturier Jean-Paul Gaultier s’était intéressé à elle, l’avait habillée et ils avaient même tourné un clip vidéo ensemble. 

De plus, Yvette Horner venait d’enregistrer un album sur lequel elle reprenait des airs de Michael Jackson et David Bowie... on ne peut pas faire plus branché. 

L’interview s’est déroulée à Nogent sur Marne, chez Yvette Horner, et j’en ai gardé un souvenir ému puisque dans sa maison, tout était en forme d’accordéon.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Les grands entretiens du musée de la Sacem avec Philippe Barbot.

  • Speaker #1

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode des grands entretiens, avec cette fois-ci quelque chose d'un petit peu particulier. C'est pas du rock, c'est pas du jazz, c'est pas du classique. C'est un peu tout ça à la fois puisque c'est Yvette Horner. Et oui, Yvette Horner, la reine de l'accordéon, la reine du 14 juillet, la reine du Tour de France, le symbole français d'un instrument aussi très français. Alors pourquoi cette interview ? Ça date de janvier 1990, et à l'époque Yvette Horner était devenue très très très branchée. Pourquoi ? Parce que le couturier Jean-Paul Gaultier s'était intéressé à elle, et lui avait fait, l'avait habillée tout simplement, ils ont même fait un clip ensemble. Et en plus, Yvette Horner venait d'enregistrer un album sur lequel elle reprenait des chansons de Michael Jackson ou David Bowie, on ne peut pas faire plus brancher. Donc l'interview a eu lieu en janvier 1990 à Nogent-sur-Marne, chez Yvette Horner, et j'ai gardé un souvenir ému, puisque dans sa maison, tout était en forme d'accordéon. Alors évidemment, quand on rencontre Yvette Horner, de quoi on parle au départ ? De l'accordéon. L'accordéon, instrument populaire, et on va le découvrir, un instrument qui peut tout faire.

  • Speaker #0

    N'est-ce pas que l'accordéon avait une palette très étendue sur lequel instrument, sur lequel... quand le musicien est derrière, sur lequel on peut absolument tout faire. Avec l'accordéon, on peut jouer un orchestre symphonique, on peut jouer un solo, on peut accompagner des chanteurs, il y a pas mal de vedettes qui sont accompagnées pour avoir une note spéciale, une note d'accordéon, une couleur. Il y en a qui prennent l'accordéon quand il y avait Brel. Donc, oui, il y a besoin d'un solo, ça je l'ai dit. J'ai des lettres d'enfants de 7 ans, de 8 ans, de 10 ans, de 15 ans, qui jouent de l'accordéon. Il n'y a pas une ville en France où il n'y ait pas un professeur d'accordéon. Donc, quand il y a une grande ville, bien sûr, il y en a plusieurs. Maintenant, l'accordéon est admis. Il y a une classe d'accordéon de nombreux. conservatoires régionaux en France et a maintenant un diplôme d'État concernant le professeur. Et donc, vous voyez, l'accordéon a fait un pas énorme.

  • Speaker #1

    L'accordéon est populaire en France pourtant. Pour la plupart des gens, il reste limité aux balmusettes. Ce n'est pas du tout l'avis d'Yvette Horner, qui a fait bien d'autres interprétations d'autres styles de musique, en particulier une chanson de Michael Jackson.

  • Speaker #0

    Oui, il est vrai que c'est la première fois que l'on fait du Jackson. Mais il y en a d'autres qui ont joué du jazz, à l'Amérique qui jouent du jazz. Il y en a qui jouent d'ailleurs très bien, c'est l'accordéon à touche piano. Ils jouent très bien, mais on ne peut pas... Ça veut dire quoi ? les gens ont l'impression qu'on s'arrête quand il y a la valse suivante, il n'y a plus rien. Mais non, c'est un vrai servicement de concert.

  • Speaker #1

    Alors le plus incroyable, c'est qu'en fait Yvette Horner ne voulait pas faire de l'accordéon au départ, pas du tout. Elle voulait faire du piano classique. Et ce sont ses parents qui l'ont obligé à faire de l'accordéon. Elle raconte.

  • Speaker #0

    Des pianistes, tous les ans, depuis des années, des années, des années, tous les conservatoires, mais des femmes accordistes, il n'y en a pas. J'ai pleuré pendant trois ans. Ça a été la perte d'un très grand tabou. Je ne l'ai encore pas pu oublier, mais je l'ai toujours pratiqué en silence. Mais maintenant, je dois dire que si c'était recommencé, je ferais la même chose. Parce que moi, j'ai l'accordéon dans la peau, dans mes pores. J'adore, j'adore.

  • Speaker #1

    Alors évidemment, tout le monde connaît Yvette Horner, l'accordionniste, mais on sait peu qu'elle est aussi une pianiste virtuose. Normal qu'on le sache peu, puisqu'elle a attendu plusieurs décennies avant d'oser jouer du piano en concert. On se demande d'ailleurs pourquoi elle a attendu si longtemps.

  • Speaker #0

    Pourquoi ? Parce que j'étais partie dans un... J'étais sur des rails, on m'avait mis sur des rails, Yvette Horner, etc., elle arrive à Paris, elle rapporte la Coupe du Monde... de tous les pays. Elle fait le tour de France, elle est reine des six jours. J'étais partie sur des rails et vous savez, c'est difficile d'en sortir. C'est difficile d'en sortir. C'est comme quand on dit, quand on dit, bon ben, vous n'êtes pas bien, vous ne vous entendez pas dans votre ménage, eh bien, divorcez. C'est plus facile à dire que de faire. N'est-ce pas ? Alors ça, c'est pareil, c'est sur des rails, j'étais sur des rails du populaire, du public sportif, de tout ça. Et puis, d'un coup, les engagements venaient, pleuvaient, etc. Et il s'est dit, tiquez son instrument. Pour le profiter, le posséder, ça demande toute une vie. Alors, quand vous en possédez, il faut passer le double de temps avec le piano. Par exemple, un autre deuxième instrument. Alors, encore un autre ? Non, après, c'est du...

  • Speaker #1

    Contrairement à d'autres accordonistes très connus, par exemple Marcel Azzola, le célèbre chauffe Marcel de Jacques Brel. Yvette Horner, elle, elle a peu accompagné de chanteurs.

  • Speaker #0

    Au départ, j'accompagnais des chanteurs à la Bordillon, j'accompagnais au piano, dans les tournées. Oui, oui. J'ai tout fait. Il y a des chanteurs que vous auriez aimé ? Non. Je veux jouer un... Comment dire ? Un concertiste. Non, ça ne m'intéresse pas. Ce n'est pas dire que je ne l'apprécie pas. Attention, il y a des nuances. La langue française est très riche. Non, moi, ce qui m'intéresse, c'est de jouer. Moi, de jouer, d'interpréter les morceaux que je veux, mais accompagner quelqu'un.

  • Speaker #1

    Yvette Horner est une virtuose de l'accordéon. On peut même se demander, puisqu'elle a tout fait, tout joué, du classique, du jazz, du musette, de la variété, est-ce qu'elle n'a pas atteint ? Un niveau maximum, est-ce qu'on peut encore progresser quand on joue comme Yvette Horner ?

  • Speaker #0

    L'accordéon, l'instrument, on ne sait jamais. Il faut se remettre toujours en question. On est toujours d'éternels élèves. Toujours. On ne peut pas rouler des mécaniques. Celui qui roule des mécaniques, c'est un ignorant. C'est qui ne connaît rien. Celui qui roule des mécaniques, c'est qui ne connaît pas la musique. Il ne connaît rien. Il ne connaît rien. Il n'a aucun bagage, aucune profondeur. Il n'y a rien. Non. Il faut toujours se remettre en question. Je travaille toujours comme si je suis une élève. Quand je fais, je travaille dans l'instrument.

  • Speaker #1

    Alors l'accordéon, ce piano à bretelles, comme on le surnomme aussi, d'ailleurs Léo Ferré disait le piano du pauvre. L'accordéon, c'est une grosse boîte compliquée, volumineuse, pleine de soufflets, de boutons, de claviers. On se demande si ce n'est pas un petit peu difficile à jouer quand même.

  • Speaker #0

    Cette question ne se pose pas, je vous le dis pas. Parce que tous les instruments, quand il faut qu'ils soient joués avec beaucoup de finesse musicale, de virtuosité, tous les instruments sont difficiles. Vous me direz, il y a peut-être plus de... Mais là, on est au niveau de la musique et rien n'est facile. Bien sûr, l'accordement n'est pas facile du tout, parce qu'il y a le soufflet, déjà, d'une part, vous voyez le soufflet, il y a les claviers, d'abord, que vous ne voyez pas, deuxièmement. Donc, ça dépend, il fait 12, 14, 16, 17 kilos. Alors, bien sûr, ça n'est pas une bonne chose. N'étant jamais satisfaite de moi, je cherche toujours à aller de l'avant, toujours à apprendre, toujours travailler, toujours la toilette des doigts, quelle soit. Il vous arrive même en faisant une toilette des doigts fantastique de faire des fois du cannerie. Alors celui qui ne travaille pas, vous voyez ce que ça donne. En fait, il n'en sait rien. À part des gens avertis. Bon, alors moi je veux toujours aller de l'avant. Je n'aurais jamais voulu faire une profession et ne pas avoir un bagage. Alors, ce bagage de la musique, je l'ai, qui est important, ce qui me permet de faire des listes au piano, de jouer du Jackson. Pour moi, c'est quelque chose de plus simple.

  • Speaker #1

    En 1990 donc, Yvette Horner, véritable vedette populaire, est devenue aussi... Une idole, des discothèques et des dancefloors branchés, pas seulement dans les balles du samedi soir. Une nouvelle image, en partie façonnée par un couturier de chez nous, qui d'ailleurs plus tard habillera d'autres stars, mais internationales, comme Madonna ou Lady Gaga, Jean-Paul Gaultier. Mais comment s'est donc passée cette rencontre improbable ?

  • Speaker #0

    Mais je ne vais au-devant de rien, je ne vais pas solliciter des choses. C'est lui qui m'a téléphoné de la maison, j'avais vu sur un journal les personnalités que j'aimerais habiller, et puis j'ai vu mon nom, j'ai lu ça comme je le dis d'autres, c'est tout. Et j'étais flattée, d'accord, mais c'est tout. Et puis après un jour il m'a téléphoné pour me dire si je voulais faire un clip. Alors j'ai fait un clip et c'est comme ça que la rencontre s'est faite. C'est un garçon... admirable, qui est très simple. Alors, avec moi, ça fait tilt, ça. Parce que là, je sens la prétention à des kilomètres. Et ça m'a fait sortir plein de boutons sur la figure. Je ne peux pas supporter ça. Je suis allergique à des gens qui viennent se présentant comme le pape et qui ne seraient pas coutus de servir la messe. Alors, moi, je n'aime pas. J'aime bien la simplicité parce que... Quand on regarde auprès, quand on compare avec tout ce qui peut se passer dans la nature elle-même, qui est la perfection, mon Dieu, on est très peu de choses. Je pense que chaque individu a une cellule dans son cerveau qui a une brillance naturelle. Seulement, voilà, l'intelligence, c'est que les parents ne savent pas la découvrir. Souvent, bien sûr, mais ils ne savent pas toujours la découvrir. Et c'est ça, parce que nous avons tous du talent. pour quelque chose, ou pour la cuisine, ou pour la couture, ou pour le dessin. Alors, pourquoi vouloir écraser et dire je suis aussi jeune ? Non, moi je fais mon travail, je veux toujours apprendre. Je joue par amour, et le reste suit. Ça vous va vous rendre compte.

  • Speaker #1

    Yvette Horner aime à décrire son accordéon non comme un simple instrument, mais comme une sorte de prolongement d'elle-même, un compagnon humain. Un compagnon humain, d'accord, mais qu'il faut porter sur ses épaules et qui pèse quand même son poids.

  • Speaker #0

    Et très humain, oui, parce que c'est un instrument qui peut apporter une joie considérable, une joie extraordinaire. C'est un instrument nostalgique, c'est un instrument qui peut faire pleurer. J'y suis arrivée 20 fois. Je joue depuis que je suis enfant, alors bien sûr... Si je joue toujours avec une manvelpo, c'est parce que j'ai joué quand j'étais enfant. Je n'étais pas formée. Et j'avais un instrument qui pesait. Donc, il y a un accartement des eaux qui est anormal par rapport à quelqu'un d'autre.

  • Speaker #1

    Parmi tous ces trophées, prix SACEM, victoire de la musique et autres Grammy Awards, il y a une récompense, plutôt une décoration d'ailleurs, qui fait chaud au cœur d'Yves Etterner. La Légion d'honneur. Même si elle fait preuve de modestie quand on le lui rappelle.

  • Speaker #0

    Et laquelle est... Je me vois pourquoi j'ai eu la Légion d'honneur. Bon, par quoi je cherche, moi. Je ne me suis jamais vue comme... Je ne sais pas. C'est les autres qui me voient. Moi, pour moi, je suis une musicienne. Qui n'a vu qu'une chose, c'était de travailler, de bien jouer, de jouer proprement. Toujours cherché, je suis une perfectionniste, j'ai toujours cherché la perfection. J'ai toujours cherché sans jamais l'atteindre. Et j'ai vu ça dans moi. Je n'ai pas vu le nom qui se formait, je n'ai pas vu, souvent, combien de fois on me dit, il y a des journalistes qui me disent, vous êtes une institution, vous êtes ceci, vous êtes un symbole. Je ne vois rien du tout, je ne sais pas, je ne sais pas du tout. Moi, je suis toujours comme quand j'avais... Je ne suis pas bête, je suis débile quand même. Je sais très bien que j'ai un nom important dans ma catégorie à moi. Et alors, c'est tout. Alors, la Légion d'honneur, c'est pour ça que j'ai été étonnée. Parce que quand on dit, attention, pour avoir la Légion d'honneur, il faut le demander. Mais là, je suis un exemple que jamais... Ah non !

  • Speaker #1

    Souvent habillée en bleu, blanc, rouge, reine des 14 juillets et des belles populaires, Yvette et son accordéon symbolisent la France. Un rôle qu'elle accepte et mieux, qu'elle revendique.

  • Speaker #0

    J'adore. Je mourrais dans un tapis. Et je dois dire même que je me suis battue. Ce n'est pas joli, ça. Ce n'est pas dans ma nature, on peut dire comme ça. J'ai été une fois à l'étranger, mais je ne dirais pas où. L'agent a l'habitude de mettre tout le monde dans le même sac. Partout, il y a des gens bêtes, il y a des gens intelligents, il y a des gens compréhensifs, il y a des gens tolérants. Partout, parce que c'est entier, tous les pays. C'est pourquoi, notre temps date s'est généralisé. Bon, qu'est-ce que j'avais entendu ? Que vous parlez mal des Français, des Françaises, de la France ? Oh, les Français sont fainéants, j'avais entendu dire ça. Ils sont volages. Les Françaises sont volages aussi, elles sont sales. Les Français chez vous, on sort les poubelles à 5 heures, les soirs. Et alors, c'était une conversation comme ça qui a duré. Et puis alors, je n'ai pas pu entendre ça, ce que j'ai fait. Les Français sont ceci, ils sont cela. Alors, je lui dis, écoutez, vous ne pourrez pas dire que les Français sont des lâches.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté ce podcast consacré à Yvette Horner et ce magnifique et pourtant trop méconnu instrument qu'est l'accordéon. Au revoir et à la prochaine fois.

Chapters

  • Introduction à Yvette Horner et son parcours

    00:04

  • L'accordéon : un instrument polyvalent

    00:15

  • Les débuts d'Yvette Horner et ses choix musicaux

    04:21

  • L'impact de Jean-Paul Gaultier sur sa carrière

    09:55

  • Yvette Horner, une icône de la musique française

    13:09

Share

Embed

You may also like

Description

Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode des grands entretiens. Avec cette fois quelque chose d’un peu particulier : c’est pas du rock, c’est pas du jazz, c’est pas du classique, mais un peu tout ça à la fois puisqu’il s’agit d’Yvette Horner. 

Eh oui, Yvette Horner, la reine de l’accordéon, du 14 juillet, du Tour de France et des bals populaires, le symbole français d’un instrument bien de chez nous. 

Cette interview date de janvier 1990, et à l’époque Yvette Horner était devenue très branchée. Le couturier Jean-Paul Gaultier s’était intéressé à elle, l’avait habillée et ils avaient même tourné un clip vidéo ensemble. 

De plus, Yvette Horner venait d’enregistrer un album sur lequel elle reprenait des airs de Michael Jackson et David Bowie... on ne peut pas faire plus branché. 

L’interview s’est déroulée à Nogent sur Marne, chez Yvette Horner, et j’en ai gardé un souvenir ému puisque dans sa maison, tout était en forme d’accordéon.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Les grands entretiens du musée de la Sacem avec Philippe Barbot.

  • Speaker #1

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode des grands entretiens, avec cette fois-ci quelque chose d'un petit peu particulier. C'est pas du rock, c'est pas du jazz, c'est pas du classique. C'est un peu tout ça à la fois puisque c'est Yvette Horner. Et oui, Yvette Horner, la reine de l'accordéon, la reine du 14 juillet, la reine du Tour de France, le symbole français d'un instrument aussi très français. Alors pourquoi cette interview ? Ça date de janvier 1990, et à l'époque Yvette Horner était devenue très très très branchée. Pourquoi ? Parce que le couturier Jean-Paul Gaultier s'était intéressé à elle, et lui avait fait, l'avait habillée tout simplement, ils ont même fait un clip ensemble. Et en plus, Yvette Horner venait d'enregistrer un album sur lequel elle reprenait des chansons de Michael Jackson ou David Bowie, on ne peut pas faire plus brancher. Donc l'interview a eu lieu en janvier 1990 à Nogent-sur-Marne, chez Yvette Horner, et j'ai gardé un souvenir ému, puisque dans sa maison, tout était en forme d'accordéon. Alors évidemment, quand on rencontre Yvette Horner, de quoi on parle au départ ? De l'accordéon. L'accordéon, instrument populaire, et on va le découvrir, un instrument qui peut tout faire.

  • Speaker #0

    N'est-ce pas que l'accordéon avait une palette très étendue sur lequel instrument, sur lequel... quand le musicien est derrière, sur lequel on peut absolument tout faire. Avec l'accordéon, on peut jouer un orchestre symphonique, on peut jouer un solo, on peut accompagner des chanteurs, il y a pas mal de vedettes qui sont accompagnées pour avoir une note spéciale, une note d'accordéon, une couleur. Il y en a qui prennent l'accordéon quand il y avait Brel. Donc, oui, il y a besoin d'un solo, ça je l'ai dit. J'ai des lettres d'enfants de 7 ans, de 8 ans, de 10 ans, de 15 ans, qui jouent de l'accordéon. Il n'y a pas une ville en France où il n'y ait pas un professeur d'accordéon. Donc, quand il y a une grande ville, bien sûr, il y en a plusieurs. Maintenant, l'accordéon est admis. Il y a une classe d'accordéon de nombreux. conservatoires régionaux en France et a maintenant un diplôme d'État concernant le professeur. Et donc, vous voyez, l'accordéon a fait un pas énorme.

  • Speaker #1

    L'accordéon est populaire en France pourtant. Pour la plupart des gens, il reste limité aux balmusettes. Ce n'est pas du tout l'avis d'Yvette Horner, qui a fait bien d'autres interprétations d'autres styles de musique, en particulier une chanson de Michael Jackson.

  • Speaker #0

    Oui, il est vrai que c'est la première fois que l'on fait du Jackson. Mais il y en a d'autres qui ont joué du jazz, à l'Amérique qui jouent du jazz. Il y en a qui jouent d'ailleurs très bien, c'est l'accordéon à touche piano. Ils jouent très bien, mais on ne peut pas... Ça veut dire quoi ? les gens ont l'impression qu'on s'arrête quand il y a la valse suivante, il n'y a plus rien. Mais non, c'est un vrai servicement de concert.

  • Speaker #1

    Alors le plus incroyable, c'est qu'en fait Yvette Horner ne voulait pas faire de l'accordéon au départ, pas du tout. Elle voulait faire du piano classique. Et ce sont ses parents qui l'ont obligé à faire de l'accordéon. Elle raconte.

  • Speaker #0

    Des pianistes, tous les ans, depuis des années, des années, des années, tous les conservatoires, mais des femmes accordistes, il n'y en a pas. J'ai pleuré pendant trois ans. Ça a été la perte d'un très grand tabou. Je ne l'ai encore pas pu oublier, mais je l'ai toujours pratiqué en silence. Mais maintenant, je dois dire que si c'était recommencé, je ferais la même chose. Parce que moi, j'ai l'accordéon dans la peau, dans mes pores. J'adore, j'adore.

  • Speaker #1

    Alors évidemment, tout le monde connaît Yvette Horner, l'accordionniste, mais on sait peu qu'elle est aussi une pianiste virtuose. Normal qu'on le sache peu, puisqu'elle a attendu plusieurs décennies avant d'oser jouer du piano en concert. On se demande d'ailleurs pourquoi elle a attendu si longtemps.

  • Speaker #0

    Pourquoi ? Parce que j'étais partie dans un... J'étais sur des rails, on m'avait mis sur des rails, Yvette Horner, etc., elle arrive à Paris, elle rapporte la Coupe du Monde... de tous les pays. Elle fait le tour de France, elle est reine des six jours. J'étais partie sur des rails et vous savez, c'est difficile d'en sortir. C'est difficile d'en sortir. C'est comme quand on dit, quand on dit, bon ben, vous n'êtes pas bien, vous ne vous entendez pas dans votre ménage, eh bien, divorcez. C'est plus facile à dire que de faire. N'est-ce pas ? Alors ça, c'est pareil, c'est sur des rails, j'étais sur des rails du populaire, du public sportif, de tout ça. Et puis, d'un coup, les engagements venaient, pleuvaient, etc. Et il s'est dit, tiquez son instrument. Pour le profiter, le posséder, ça demande toute une vie. Alors, quand vous en possédez, il faut passer le double de temps avec le piano. Par exemple, un autre deuxième instrument. Alors, encore un autre ? Non, après, c'est du...

  • Speaker #1

    Contrairement à d'autres accordonistes très connus, par exemple Marcel Azzola, le célèbre chauffe Marcel de Jacques Brel. Yvette Horner, elle, elle a peu accompagné de chanteurs.

  • Speaker #0

    Au départ, j'accompagnais des chanteurs à la Bordillon, j'accompagnais au piano, dans les tournées. Oui, oui. J'ai tout fait. Il y a des chanteurs que vous auriez aimé ? Non. Je veux jouer un... Comment dire ? Un concertiste. Non, ça ne m'intéresse pas. Ce n'est pas dire que je ne l'apprécie pas. Attention, il y a des nuances. La langue française est très riche. Non, moi, ce qui m'intéresse, c'est de jouer. Moi, de jouer, d'interpréter les morceaux que je veux, mais accompagner quelqu'un.

  • Speaker #1

    Yvette Horner est une virtuose de l'accordéon. On peut même se demander, puisqu'elle a tout fait, tout joué, du classique, du jazz, du musette, de la variété, est-ce qu'elle n'a pas atteint ? Un niveau maximum, est-ce qu'on peut encore progresser quand on joue comme Yvette Horner ?

  • Speaker #0

    L'accordéon, l'instrument, on ne sait jamais. Il faut se remettre toujours en question. On est toujours d'éternels élèves. Toujours. On ne peut pas rouler des mécaniques. Celui qui roule des mécaniques, c'est un ignorant. C'est qui ne connaît rien. Celui qui roule des mécaniques, c'est qui ne connaît pas la musique. Il ne connaît rien. Il ne connaît rien. Il n'a aucun bagage, aucune profondeur. Il n'y a rien. Non. Il faut toujours se remettre en question. Je travaille toujours comme si je suis une élève. Quand je fais, je travaille dans l'instrument.

  • Speaker #1

    Alors l'accordéon, ce piano à bretelles, comme on le surnomme aussi, d'ailleurs Léo Ferré disait le piano du pauvre. L'accordéon, c'est une grosse boîte compliquée, volumineuse, pleine de soufflets, de boutons, de claviers. On se demande si ce n'est pas un petit peu difficile à jouer quand même.

  • Speaker #0

    Cette question ne se pose pas, je vous le dis pas. Parce que tous les instruments, quand il faut qu'ils soient joués avec beaucoup de finesse musicale, de virtuosité, tous les instruments sont difficiles. Vous me direz, il y a peut-être plus de... Mais là, on est au niveau de la musique et rien n'est facile. Bien sûr, l'accordement n'est pas facile du tout, parce qu'il y a le soufflet, déjà, d'une part, vous voyez le soufflet, il y a les claviers, d'abord, que vous ne voyez pas, deuxièmement. Donc, ça dépend, il fait 12, 14, 16, 17 kilos. Alors, bien sûr, ça n'est pas une bonne chose. N'étant jamais satisfaite de moi, je cherche toujours à aller de l'avant, toujours à apprendre, toujours travailler, toujours la toilette des doigts, quelle soit. Il vous arrive même en faisant une toilette des doigts fantastique de faire des fois du cannerie. Alors celui qui ne travaille pas, vous voyez ce que ça donne. En fait, il n'en sait rien. À part des gens avertis. Bon, alors moi je veux toujours aller de l'avant. Je n'aurais jamais voulu faire une profession et ne pas avoir un bagage. Alors, ce bagage de la musique, je l'ai, qui est important, ce qui me permet de faire des listes au piano, de jouer du Jackson. Pour moi, c'est quelque chose de plus simple.

  • Speaker #1

    En 1990 donc, Yvette Horner, véritable vedette populaire, est devenue aussi... Une idole, des discothèques et des dancefloors branchés, pas seulement dans les balles du samedi soir. Une nouvelle image, en partie façonnée par un couturier de chez nous, qui d'ailleurs plus tard habillera d'autres stars, mais internationales, comme Madonna ou Lady Gaga, Jean-Paul Gaultier. Mais comment s'est donc passée cette rencontre improbable ?

  • Speaker #0

    Mais je ne vais au-devant de rien, je ne vais pas solliciter des choses. C'est lui qui m'a téléphoné de la maison, j'avais vu sur un journal les personnalités que j'aimerais habiller, et puis j'ai vu mon nom, j'ai lu ça comme je le dis d'autres, c'est tout. Et j'étais flattée, d'accord, mais c'est tout. Et puis après un jour il m'a téléphoné pour me dire si je voulais faire un clip. Alors j'ai fait un clip et c'est comme ça que la rencontre s'est faite. C'est un garçon... admirable, qui est très simple. Alors, avec moi, ça fait tilt, ça. Parce que là, je sens la prétention à des kilomètres. Et ça m'a fait sortir plein de boutons sur la figure. Je ne peux pas supporter ça. Je suis allergique à des gens qui viennent se présentant comme le pape et qui ne seraient pas coutus de servir la messe. Alors, moi, je n'aime pas. J'aime bien la simplicité parce que... Quand on regarde auprès, quand on compare avec tout ce qui peut se passer dans la nature elle-même, qui est la perfection, mon Dieu, on est très peu de choses. Je pense que chaque individu a une cellule dans son cerveau qui a une brillance naturelle. Seulement, voilà, l'intelligence, c'est que les parents ne savent pas la découvrir. Souvent, bien sûr, mais ils ne savent pas toujours la découvrir. Et c'est ça, parce que nous avons tous du talent. pour quelque chose, ou pour la cuisine, ou pour la couture, ou pour le dessin. Alors, pourquoi vouloir écraser et dire je suis aussi jeune ? Non, moi je fais mon travail, je veux toujours apprendre. Je joue par amour, et le reste suit. Ça vous va vous rendre compte.

  • Speaker #1

    Yvette Horner aime à décrire son accordéon non comme un simple instrument, mais comme une sorte de prolongement d'elle-même, un compagnon humain. Un compagnon humain, d'accord, mais qu'il faut porter sur ses épaules et qui pèse quand même son poids.

  • Speaker #0

    Et très humain, oui, parce que c'est un instrument qui peut apporter une joie considérable, une joie extraordinaire. C'est un instrument nostalgique, c'est un instrument qui peut faire pleurer. J'y suis arrivée 20 fois. Je joue depuis que je suis enfant, alors bien sûr... Si je joue toujours avec une manvelpo, c'est parce que j'ai joué quand j'étais enfant. Je n'étais pas formée. Et j'avais un instrument qui pesait. Donc, il y a un accartement des eaux qui est anormal par rapport à quelqu'un d'autre.

  • Speaker #1

    Parmi tous ces trophées, prix SACEM, victoire de la musique et autres Grammy Awards, il y a une récompense, plutôt une décoration d'ailleurs, qui fait chaud au cœur d'Yves Etterner. La Légion d'honneur. Même si elle fait preuve de modestie quand on le lui rappelle.

  • Speaker #0

    Et laquelle est... Je me vois pourquoi j'ai eu la Légion d'honneur. Bon, par quoi je cherche, moi. Je ne me suis jamais vue comme... Je ne sais pas. C'est les autres qui me voient. Moi, pour moi, je suis une musicienne. Qui n'a vu qu'une chose, c'était de travailler, de bien jouer, de jouer proprement. Toujours cherché, je suis une perfectionniste, j'ai toujours cherché la perfection. J'ai toujours cherché sans jamais l'atteindre. Et j'ai vu ça dans moi. Je n'ai pas vu le nom qui se formait, je n'ai pas vu, souvent, combien de fois on me dit, il y a des journalistes qui me disent, vous êtes une institution, vous êtes ceci, vous êtes un symbole. Je ne vois rien du tout, je ne sais pas, je ne sais pas du tout. Moi, je suis toujours comme quand j'avais... Je ne suis pas bête, je suis débile quand même. Je sais très bien que j'ai un nom important dans ma catégorie à moi. Et alors, c'est tout. Alors, la Légion d'honneur, c'est pour ça que j'ai été étonnée. Parce que quand on dit, attention, pour avoir la Légion d'honneur, il faut le demander. Mais là, je suis un exemple que jamais... Ah non !

  • Speaker #1

    Souvent habillée en bleu, blanc, rouge, reine des 14 juillets et des belles populaires, Yvette et son accordéon symbolisent la France. Un rôle qu'elle accepte et mieux, qu'elle revendique.

  • Speaker #0

    J'adore. Je mourrais dans un tapis. Et je dois dire même que je me suis battue. Ce n'est pas joli, ça. Ce n'est pas dans ma nature, on peut dire comme ça. J'ai été une fois à l'étranger, mais je ne dirais pas où. L'agent a l'habitude de mettre tout le monde dans le même sac. Partout, il y a des gens bêtes, il y a des gens intelligents, il y a des gens compréhensifs, il y a des gens tolérants. Partout, parce que c'est entier, tous les pays. C'est pourquoi, notre temps date s'est généralisé. Bon, qu'est-ce que j'avais entendu ? Que vous parlez mal des Français, des Françaises, de la France ? Oh, les Français sont fainéants, j'avais entendu dire ça. Ils sont volages. Les Françaises sont volages aussi, elles sont sales. Les Français chez vous, on sort les poubelles à 5 heures, les soirs. Et alors, c'était une conversation comme ça qui a duré. Et puis alors, je n'ai pas pu entendre ça, ce que j'ai fait. Les Français sont ceci, ils sont cela. Alors, je lui dis, écoutez, vous ne pourrez pas dire que les Français sont des lâches.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté ce podcast consacré à Yvette Horner et ce magnifique et pourtant trop méconnu instrument qu'est l'accordéon. Au revoir et à la prochaine fois.

Chapters

  • Introduction à Yvette Horner et son parcours

    00:04

  • L'accordéon : un instrument polyvalent

    00:15

  • Les débuts d'Yvette Horner et ses choix musicaux

    04:21

  • L'impact de Jean-Paul Gaultier sur sa carrière

    09:55

  • Yvette Horner, une icône de la musique française

    13:09

Description

Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode des grands entretiens. Avec cette fois quelque chose d’un peu particulier : c’est pas du rock, c’est pas du jazz, c’est pas du classique, mais un peu tout ça à la fois puisqu’il s’agit d’Yvette Horner. 

Eh oui, Yvette Horner, la reine de l’accordéon, du 14 juillet, du Tour de France et des bals populaires, le symbole français d’un instrument bien de chez nous. 

Cette interview date de janvier 1990, et à l’époque Yvette Horner était devenue très branchée. Le couturier Jean-Paul Gaultier s’était intéressé à elle, l’avait habillée et ils avaient même tourné un clip vidéo ensemble. 

De plus, Yvette Horner venait d’enregistrer un album sur lequel elle reprenait des airs de Michael Jackson et David Bowie... on ne peut pas faire plus branché. 

L’interview s’est déroulée à Nogent sur Marne, chez Yvette Horner, et j’en ai gardé un souvenir ému puisque dans sa maison, tout était en forme d’accordéon.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Les grands entretiens du musée de la Sacem avec Philippe Barbot.

  • Speaker #1

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode des grands entretiens, avec cette fois-ci quelque chose d'un petit peu particulier. C'est pas du rock, c'est pas du jazz, c'est pas du classique. C'est un peu tout ça à la fois puisque c'est Yvette Horner. Et oui, Yvette Horner, la reine de l'accordéon, la reine du 14 juillet, la reine du Tour de France, le symbole français d'un instrument aussi très français. Alors pourquoi cette interview ? Ça date de janvier 1990, et à l'époque Yvette Horner était devenue très très très branchée. Pourquoi ? Parce que le couturier Jean-Paul Gaultier s'était intéressé à elle, et lui avait fait, l'avait habillée tout simplement, ils ont même fait un clip ensemble. Et en plus, Yvette Horner venait d'enregistrer un album sur lequel elle reprenait des chansons de Michael Jackson ou David Bowie, on ne peut pas faire plus brancher. Donc l'interview a eu lieu en janvier 1990 à Nogent-sur-Marne, chez Yvette Horner, et j'ai gardé un souvenir ému, puisque dans sa maison, tout était en forme d'accordéon. Alors évidemment, quand on rencontre Yvette Horner, de quoi on parle au départ ? De l'accordéon. L'accordéon, instrument populaire, et on va le découvrir, un instrument qui peut tout faire.

  • Speaker #0

    N'est-ce pas que l'accordéon avait une palette très étendue sur lequel instrument, sur lequel... quand le musicien est derrière, sur lequel on peut absolument tout faire. Avec l'accordéon, on peut jouer un orchestre symphonique, on peut jouer un solo, on peut accompagner des chanteurs, il y a pas mal de vedettes qui sont accompagnées pour avoir une note spéciale, une note d'accordéon, une couleur. Il y en a qui prennent l'accordéon quand il y avait Brel. Donc, oui, il y a besoin d'un solo, ça je l'ai dit. J'ai des lettres d'enfants de 7 ans, de 8 ans, de 10 ans, de 15 ans, qui jouent de l'accordéon. Il n'y a pas une ville en France où il n'y ait pas un professeur d'accordéon. Donc, quand il y a une grande ville, bien sûr, il y en a plusieurs. Maintenant, l'accordéon est admis. Il y a une classe d'accordéon de nombreux. conservatoires régionaux en France et a maintenant un diplôme d'État concernant le professeur. Et donc, vous voyez, l'accordéon a fait un pas énorme.

  • Speaker #1

    L'accordéon est populaire en France pourtant. Pour la plupart des gens, il reste limité aux balmusettes. Ce n'est pas du tout l'avis d'Yvette Horner, qui a fait bien d'autres interprétations d'autres styles de musique, en particulier une chanson de Michael Jackson.

  • Speaker #0

    Oui, il est vrai que c'est la première fois que l'on fait du Jackson. Mais il y en a d'autres qui ont joué du jazz, à l'Amérique qui jouent du jazz. Il y en a qui jouent d'ailleurs très bien, c'est l'accordéon à touche piano. Ils jouent très bien, mais on ne peut pas... Ça veut dire quoi ? les gens ont l'impression qu'on s'arrête quand il y a la valse suivante, il n'y a plus rien. Mais non, c'est un vrai servicement de concert.

  • Speaker #1

    Alors le plus incroyable, c'est qu'en fait Yvette Horner ne voulait pas faire de l'accordéon au départ, pas du tout. Elle voulait faire du piano classique. Et ce sont ses parents qui l'ont obligé à faire de l'accordéon. Elle raconte.

  • Speaker #0

    Des pianistes, tous les ans, depuis des années, des années, des années, tous les conservatoires, mais des femmes accordistes, il n'y en a pas. J'ai pleuré pendant trois ans. Ça a été la perte d'un très grand tabou. Je ne l'ai encore pas pu oublier, mais je l'ai toujours pratiqué en silence. Mais maintenant, je dois dire que si c'était recommencé, je ferais la même chose. Parce que moi, j'ai l'accordéon dans la peau, dans mes pores. J'adore, j'adore.

  • Speaker #1

    Alors évidemment, tout le monde connaît Yvette Horner, l'accordionniste, mais on sait peu qu'elle est aussi une pianiste virtuose. Normal qu'on le sache peu, puisqu'elle a attendu plusieurs décennies avant d'oser jouer du piano en concert. On se demande d'ailleurs pourquoi elle a attendu si longtemps.

  • Speaker #0

    Pourquoi ? Parce que j'étais partie dans un... J'étais sur des rails, on m'avait mis sur des rails, Yvette Horner, etc., elle arrive à Paris, elle rapporte la Coupe du Monde... de tous les pays. Elle fait le tour de France, elle est reine des six jours. J'étais partie sur des rails et vous savez, c'est difficile d'en sortir. C'est difficile d'en sortir. C'est comme quand on dit, quand on dit, bon ben, vous n'êtes pas bien, vous ne vous entendez pas dans votre ménage, eh bien, divorcez. C'est plus facile à dire que de faire. N'est-ce pas ? Alors ça, c'est pareil, c'est sur des rails, j'étais sur des rails du populaire, du public sportif, de tout ça. Et puis, d'un coup, les engagements venaient, pleuvaient, etc. Et il s'est dit, tiquez son instrument. Pour le profiter, le posséder, ça demande toute une vie. Alors, quand vous en possédez, il faut passer le double de temps avec le piano. Par exemple, un autre deuxième instrument. Alors, encore un autre ? Non, après, c'est du...

  • Speaker #1

    Contrairement à d'autres accordonistes très connus, par exemple Marcel Azzola, le célèbre chauffe Marcel de Jacques Brel. Yvette Horner, elle, elle a peu accompagné de chanteurs.

  • Speaker #0

    Au départ, j'accompagnais des chanteurs à la Bordillon, j'accompagnais au piano, dans les tournées. Oui, oui. J'ai tout fait. Il y a des chanteurs que vous auriez aimé ? Non. Je veux jouer un... Comment dire ? Un concertiste. Non, ça ne m'intéresse pas. Ce n'est pas dire que je ne l'apprécie pas. Attention, il y a des nuances. La langue française est très riche. Non, moi, ce qui m'intéresse, c'est de jouer. Moi, de jouer, d'interpréter les morceaux que je veux, mais accompagner quelqu'un.

  • Speaker #1

    Yvette Horner est une virtuose de l'accordéon. On peut même se demander, puisqu'elle a tout fait, tout joué, du classique, du jazz, du musette, de la variété, est-ce qu'elle n'a pas atteint ? Un niveau maximum, est-ce qu'on peut encore progresser quand on joue comme Yvette Horner ?

  • Speaker #0

    L'accordéon, l'instrument, on ne sait jamais. Il faut se remettre toujours en question. On est toujours d'éternels élèves. Toujours. On ne peut pas rouler des mécaniques. Celui qui roule des mécaniques, c'est un ignorant. C'est qui ne connaît rien. Celui qui roule des mécaniques, c'est qui ne connaît pas la musique. Il ne connaît rien. Il ne connaît rien. Il n'a aucun bagage, aucune profondeur. Il n'y a rien. Non. Il faut toujours se remettre en question. Je travaille toujours comme si je suis une élève. Quand je fais, je travaille dans l'instrument.

  • Speaker #1

    Alors l'accordéon, ce piano à bretelles, comme on le surnomme aussi, d'ailleurs Léo Ferré disait le piano du pauvre. L'accordéon, c'est une grosse boîte compliquée, volumineuse, pleine de soufflets, de boutons, de claviers. On se demande si ce n'est pas un petit peu difficile à jouer quand même.

  • Speaker #0

    Cette question ne se pose pas, je vous le dis pas. Parce que tous les instruments, quand il faut qu'ils soient joués avec beaucoup de finesse musicale, de virtuosité, tous les instruments sont difficiles. Vous me direz, il y a peut-être plus de... Mais là, on est au niveau de la musique et rien n'est facile. Bien sûr, l'accordement n'est pas facile du tout, parce qu'il y a le soufflet, déjà, d'une part, vous voyez le soufflet, il y a les claviers, d'abord, que vous ne voyez pas, deuxièmement. Donc, ça dépend, il fait 12, 14, 16, 17 kilos. Alors, bien sûr, ça n'est pas une bonne chose. N'étant jamais satisfaite de moi, je cherche toujours à aller de l'avant, toujours à apprendre, toujours travailler, toujours la toilette des doigts, quelle soit. Il vous arrive même en faisant une toilette des doigts fantastique de faire des fois du cannerie. Alors celui qui ne travaille pas, vous voyez ce que ça donne. En fait, il n'en sait rien. À part des gens avertis. Bon, alors moi je veux toujours aller de l'avant. Je n'aurais jamais voulu faire une profession et ne pas avoir un bagage. Alors, ce bagage de la musique, je l'ai, qui est important, ce qui me permet de faire des listes au piano, de jouer du Jackson. Pour moi, c'est quelque chose de plus simple.

  • Speaker #1

    En 1990 donc, Yvette Horner, véritable vedette populaire, est devenue aussi... Une idole, des discothèques et des dancefloors branchés, pas seulement dans les balles du samedi soir. Une nouvelle image, en partie façonnée par un couturier de chez nous, qui d'ailleurs plus tard habillera d'autres stars, mais internationales, comme Madonna ou Lady Gaga, Jean-Paul Gaultier. Mais comment s'est donc passée cette rencontre improbable ?

  • Speaker #0

    Mais je ne vais au-devant de rien, je ne vais pas solliciter des choses. C'est lui qui m'a téléphoné de la maison, j'avais vu sur un journal les personnalités que j'aimerais habiller, et puis j'ai vu mon nom, j'ai lu ça comme je le dis d'autres, c'est tout. Et j'étais flattée, d'accord, mais c'est tout. Et puis après un jour il m'a téléphoné pour me dire si je voulais faire un clip. Alors j'ai fait un clip et c'est comme ça que la rencontre s'est faite. C'est un garçon... admirable, qui est très simple. Alors, avec moi, ça fait tilt, ça. Parce que là, je sens la prétention à des kilomètres. Et ça m'a fait sortir plein de boutons sur la figure. Je ne peux pas supporter ça. Je suis allergique à des gens qui viennent se présentant comme le pape et qui ne seraient pas coutus de servir la messe. Alors, moi, je n'aime pas. J'aime bien la simplicité parce que... Quand on regarde auprès, quand on compare avec tout ce qui peut se passer dans la nature elle-même, qui est la perfection, mon Dieu, on est très peu de choses. Je pense que chaque individu a une cellule dans son cerveau qui a une brillance naturelle. Seulement, voilà, l'intelligence, c'est que les parents ne savent pas la découvrir. Souvent, bien sûr, mais ils ne savent pas toujours la découvrir. Et c'est ça, parce que nous avons tous du talent. pour quelque chose, ou pour la cuisine, ou pour la couture, ou pour le dessin. Alors, pourquoi vouloir écraser et dire je suis aussi jeune ? Non, moi je fais mon travail, je veux toujours apprendre. Je joue par amour, et le reste suit. Ça vous va vous rendre compte.

  • Speaker #1

    Yvette Horner aime à décrire son accordéon non comme un simple instrument, mais comme une sorte de prolongement d'elle-même, un compagnon humain. Un compagnon humain, d'accord, mais qu'il faut porter sur ses épaules et qui pèse quand même son poids.

  • Speaker #0

    Et très humain, oui, parce que c'est un instrument qui peut apporter une joie considérable, une joie extraordinaire. C'est un instrument nostalgique, c'est un instrument qui peut faire pleurer. J'y suis arrivée 20 fois. Je joue depuis que je suis enfant, alors bien sûr... Si je joue toujours avec une manvelpo, c'est parce que j'ai joué quand j'étais enfant. Je n'étais pas formée. Et j'avais un instrument qui pesait. Donc, il y a un accartement des eaux qui est anormal par rapport à quelqu'un d'autre.

  • Speaker #1

    Parmi tous ces trophées, prix SACEM, victoire de la musique et autres Grammy Awards, il y a une récompense, plutôt une décoration d'ailleurs, qui fait chaud au cœur d'Yves Etterner. La Légion d'honneur. Même si elle fait preuve de modestie quand on le lui rappelle.

  • Speaker #0

    Et laquelle est... Je me vois pourquoi j'ai eu la Légion d'honneur. Bon, par quoi je cherche, moi. Je ne me suis jamais vue comme... Je ne sais pas. C'est les autres qui me voient. Moi, pour moi, je suis une musicienne. Qui n'a vu qu'une chose, c'était de travailler, de bien jouer, de jouer proprement. Toujours cherché, je suis une perfectionniste, j'ai toujours cherché la perfection. J'ai toujours cherché sans jamais l'atteindre. Et j'ai vu ça dans moi. Je n'ai pas vu le nom qui se formait, je n'ai pas vu, souvent, combien de fois on me dit, il y a des journalistes qui me disent, vous êtes une institution, vous êtes ceci, vous êtes un symbole. Je ne vois rien du tout, je ne sais pas, je ne sais pas du tout. Moi, je suis toujours comme quand j'avais... Je ne suis pas bête, je suis débile quand même. Je sais très bien que j'ai un nom important dans ma catégorie à moi. Et alors, c'est tout. Alors, la Légion d'honneur, c'est pour ça que j'ai été étonnée. Parce que quand on dit, attention, pour avoir la Légion d'honneur, il faut le demander. Mais là, je suis un exemple que jamais... Ah non !

  • Speaker #1

    Souvent habillée en bleu, blanc, rouge, reine des 14 juillets et des belles populaires, Yvette et son accordéon symbolisent la France. Un rôle qu'elle accepte et mieux, qu'elle revendique.

  • Speaker #0

    J'adore. Je mourrais dans un tapis. Et je dois dire même que je me suis battue. Ce n'est pas joli, ça. Ce n'est pas dans ma nature, on peut dire comme ça. J'ai été une fois à l'étranger, mais je ne dirais pas où. L'agent a l'habitude de mettre tout le monde dans le même sac. Partout, il y a des gens bêtes, il y a des gens intelligents, il y a des gens compréhensifs, il y a des gens tolérants. Partout, parce que c'est entier, tous les pays. C'est pourquoi, notre temps date s'est généralisé. Bon, qu'est-ce que j'avais entendu ? Que vous parlez mal des Français, des Françaises, de la France ? Oh, les Français sont fainéants, j'avais entendu dire ça. Ils sont volages. Les Françaises sont volages aussi, elles sont sales. Les Français chez vous, on sort les poubelles à 5 heures, les soirs. Et alors, c'était une conversation comme ça qui a duré. Et puis alors, je n'ai pas pu entendre ça, ce que j'ai fait. Les Français sont ceci, ils sont cela. Alors, je lui dis, écoutez, vous ne pourrez pas dire que les Français sont des lâches.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté ce podcast consacré à Yvette Horner et ce magnifique et pourtant trop méconnu instrument qu'est l'accordéon. Au revoir et à la prochaine fois.

Chapters

  • Introduction à Yvette Horner et son parcours

    00:04

  • L'accordéon : un instrument polyvalent

    00:15

  • Les débuts d'Yvette Horner et ses choix musicaux

    04:21

  • L'impact de Jean-Paul Gaultier sur sa carrière

    09:55

  • Yvette Horner, une icône de la musique française

    13:09

Share

Embed

You may also like