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Environ

Art contemporain et environnement avec Eva Pchelka

Art contemporain et environnement avec Eva Pchelka

49min |22/11/2024
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Art contemporain et environnement avec Eva Pchelka

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Description

Aujourd'hui c'est nouveau format d'épisode ! 🌱 Dans cet entretien avec Eva, diplômée de master en histoire de l'art contemporain, on va voir que ce dernier joue un rôle clé dans la redéfinition de notre rapport à l’environnement, en repensant les liens entre humanité et nature à travers des pratiques variées et parfois engagées.🖼️🌳 J'espère que ce nouveau format vous plaira et vous souhaite une excellente écoute ! 🐙 (Désolé d'avance pour la voix malade d'intro et outro, bientôt l'hiver, tout ça...)

Instagram : @environ_podcast

Vignette : Paysage rocheux dans la Elbsandsteingebirge, Caspar David Friedrich, 1823, Palais du Belvédère.

Crédits musicaux : 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour ou bonsoir à tous et à toutes, et bienvenue sur Environ, le podcast sur l'histoire de l'environnement. Aujourd'hui, je voulais vous présenter avec cet épisode un nouveau type de format qui est celui de l'échange. Le principe étant de faire intervenir une personne, universitaire, professionnelle ou passionnée, sensible et ou mieux informée, sur une thématique concernant l'histoire environnementale. Et aujourd'hui, le thème sera autour du rapport entre l'histoire de l'art contemporain et l'environnement, la question écologique. Du coup, je ne vous en dis pas plus, et allons ensemble découvrir ce nouvel environ. Salut ! Salut ! Est-ce que tu pourrais te présenter un petit peu ?

  • Speaker #1

    Ouais. Je suis Eva Pchelka, j'ai fait un parcours classique en histoire de l'art. donc une licence, puis un master. J'ai écrit un mémoire sur un artiste contemporain qui fait majoritairement de la peinture abstraite. Et là, je prépare tout doucement le concours de conservateur du patrimoine.

  • Speaker #0

    Ok. Et c'est quel artiste du coup ?

  • Speaker #1

    C'était Saito Mbli, c'est un artiste américain qui a émigré en Italie dans les années 60. qui est mort très récemment, en 2011, il me semble.

  • Speaker #0

    Je voulais te demander, du coup, c'est quoi ton rapport à l'environnement et ou à l'histoire de l'environnement, à l'écologie, à la nature, etc. Enfin, tu as le droit de partir depuis que tu étais tout petite, il n'y a aucun souci, mais c'est quoi ton rapport à cela ?

  • Speaker #1

    Le rapport à la nature, à l'écologie, etc., je pense que ça part de quelque chose qui est vraiment interne. et qui part d'un sentiment assez poétique et juste d'un regard vers la nature. Je pense que ça part de là et puis je me dis, quand j'ai voulu écrire mon mémoire, j'ai hésité entre justement l'artiste dont je t'ai parlé et l'art écologique et tout plein d'artistes qui sont liés à la nature ou à l'écologie de près ou de loin.

  • Speaker #0

    À partir du XIXe siècle, est-ce qu'il y a des mouvements où... des artistes qui vont faire comme une sorte de scission et offrir une nouvelle représentation de la nature plus réelle ?

  • Speaker #1

    On peut voir déjà une sorte de changement à partir de la révolution, parce que la révolution française engendre des révolutions un peu partout, et ça engendre un changement de mentalité dans une globalité, c'est-à-dire qu'il y a... Il y a des changements dans l'art, il y a des changements en politique, en sociologie, etc. Je ne rentrerai pas trop dans les détails, mais on voit un changement de la volonté de l'homme de se placer face à la nature. On voit qu'avec la révolution, il y a eu ces changements sociaux, puis ça a entraîné tout simplement le progrès continuel. Au XIXe siècle, par exemple, on a plusieurs révolutions industrielles. Ces révolutions industrielles, on voit qu'elles changent grandement le regard des artistes sur l'art parce que, par exemple, le fait qu'il y ait des chemins de fer, les artistes peuvent prendre maintenant le train et aller au bord de la mer. Avant d'aller au bord de la mer, ils peuvent aller tout simplement un peu plus loin, c'est-à-dire de Paris. aller dans les banlieues parisiennes, par exemple, notamment Fontainebleau. Et on retrouve un groupe d'artistes qui sont généralement appelés les peintres de Barbizon, puisqu'ils se retrouvent dans cette forêt-là et ils y retrouvent quelque chose d'une nature intouchée, de quelque chose qui ne côtoie plus dans la société dans laquelle ils vivent. Parce que... Ils se situent à Paris. Leur commanditaire demande, par exemple, des portraits de société, etc. Il y en a qui font autre chose, bien sûr, mais il y a toute une part de peintres qui veulent représenter la modernité. Après, justement, il y a cette scission avec les peintres de Parapézons qui décident de partir et de... de retrouver cette nature qui est brute et intouchée.

  • Speaker #0

    Oui, donc il y a clairement une petite scission avec ces peintres que tu as cités, mais pas non plus un retour brut à la nature. Cela reste isolé. Mais d'ailleurs, il y en a d'autres des artistes dans cette veine, justement.

  • Speaker #1

    Alors, ce qui est marrant, en fait, avec... Je me permets de revenir un petit peu, mais... Par exemple, Théodore Rousseau, il ne se rendait pas compte à quel point ça le percuterait de voir cette nature brute. De là à créer une peinture qui est incroyable suite à une découverte de... d'arbres abattus au bord de la Seine en 1847. Cette Seine le bouleverse et il crée une peinture qui représente des arbres abattus et rien d'autre, vraiment juste de la nature. Il appelle ce tableau le massacre des innocents. C'est vraiment quelque chose de très puissant ce qui lui est arrivé. Ce choc vraiment artistique qu'il a voulu construire.

  • Speaker #0

    Ouais, donc avec Théodore Rousseau, il y a une idée d'aller au-delà de la simple représentation graphique de la nature. Il y a quasiment, presque, un début de sensibilité environnementale, en fait.

  • Speaker #1

    En fait, Théodore Rousseau est appelé par certains historiens de l'art comme le premier artiste écologiste, en tout cas, engagé pour l'environnement, parce qu'après, il milite contre l'abattage des arbres. Je ne sais plus exactement dans quelles circonstances. Il est très proche de Georges Sand. On peut parler d'une lutte. Après, je n'ai pas exactement les détails, mais déjà, cette peinture, elle révèle beaucoup, je trouve. Théodore Rousseau est une exception quand même à la règle. Et ses contemporains, notamment, on va juste citer les impressionnistes, Claude Monet, Sisley, tout cela représente... certes la nature, mais la nature d'une modernité, et qui est celle des loisirs, de l'oisiveté, du fait que les bourgeois vont à la mer et se prélassent. Mais il n'y a pas ce regard conscient envers la nature. Théodore Rousseau est vraiment une exception là-dedans. Et en fait, c'est plus la forme. Je dirais, dans le début de l'ère contemporaine, la nature, et même... Avant, on peut difficilement parler de conscience écologique, et donc juste la nature sert à la forme et non aux propos. Alors que les artistes contemporains, de plus en plus avec les questionnements écologiques qui naissent, vont plus se positionner sur une sorte de propos plutôt que de forme.

  • Speaker #0

    On avance un petit peu, mais le XXe siècle, c'est un peu le moment où le monde commence doucement à conscientiser, comme le faisait un peu Théodore Rousseau en tant que, entre guillemets, premier artiste écologique, les impacts violents de l'homme sur la nature, avec les révolutions industrielles, puis à la deuxième moitié du siècle, les débuts de la mondialisation. Mais du coup, quels artistes ou mouvements vont cristalliser, en quelque sorte, cette sorte de début de conscience écologique ? ...

  • Speaker #1

    Au XXe siècle, je dirais même au début du XXe siècle, ce qui est assez prenant dans les arts, c'est vraiment l'impact de la guerre. Il y a un retour au style, un retour vers un classicisme, mais en même temps une volonté de faire autre chose. Il y a aussi des artistes qui... En fait, il y a beaucoup de réactions par rapport à la guerre. plus que par rapport à une conscience écologique. La conscience écologique, je pense, viendra plus tard. Je ne pense pas qu'il y ait des artistes qui l'ont mis de côté. Il y a sûrement eu des artistes écologistes qui ont fait des choses, mais en tout cas au début du XXème siècle, c'est un petit peu compliqué. En tout cas, par la suite, il y a quelques exemples de premières artistes qui commencent réellement à se poser la question d'un impact et de comment présenter cet impact par les arts.

  • Speaker #0

    Après, c'est vrai que ça peut faire sens dans le sens où... J'en avais parlé dans le premier épisode d'Environ, je crois, que la naissance des combats écologiques, c'était avec les années 70, avec Rachel Carson qui écrit Le printemps silencieux, le premier Earth Day, même les mouvements hippies, ce qui était aussi contre la guerre au Vietnam. Et c'est vraiment les années 70 où la conscience, tu la vois. tu la sens totalement, mais je me posais la question justement, si auparavant, et c'est vrai que je ne pense pas que Théodore Rousseau, comme tu disais tout à l'heure, était beaucoup plus pionnier dans cela, et qu'il va y avoir une sorte de trou avant qu'on reprenne des idées écologiques, mais bien après la guerre, années 70, et reste quand les gens en prennent conscience.

  • Speaker #1

    Après, je ne pense pas que ça a été mis de côté. Je pense qu'il y a eu un impact plus fort de la guerre, et qui a remis au second plan les idées, justement les notions de faire attention à la nature, etc. Parce que... Justement, il y a cette guerre qui a bouleversé les gens dans tous les plans. Et oui, l'écologie, à ce moment-là, n'était pas... La nature devait servir à la guerre, tout simplement, je pense. C'était vraiment maîtriser l'environnement.

  • Speaker #0

    Le projet Manhattan avec les bombes nucléaires, maîtrise de la nature qui est au paroxysme.

  • Speaker #1

    Et on ne se pose pas la question de... Là, on se pose la question du maintenant et on ne se pose pas la question de l'après.

  • Speaker #0

    Mais justement, est-ce qu'il y a eu un médium artistique en particulier durant l'époque contemporaine qui porte de manière significative des idées écologistes ?

  • Speaker #1

    La photographie, par exemple. Au début, on a des photographies de portraits, de la recherche stylistique avec les pictorialistes au début du XIXe siècle. Puis... Aux États-Unis, on a un mouvement de photographie humaniste qui se tourne vers l'humain pour capturer vraiment la pauvreté dans les portraits de personnes qui en soi, ce ne sont pas des portraits mais une représentation de la société. Et par rapport à cette photographie humaniste, se développent plein d'autres courants avec la photographie du photojournalisme. la photographie documentaire. Et dans la photographie documentaire notamment, on a beaucoup d'engagement, parce que, comme dans le photojournalisme en soi, c'est de vouloir capturer des faits et de produire des émotions sur la personne qui regarde la photo. Parce que beaucoup de photographes sont reliés à des agences de photographie qui par la suite vont publier ces photographies dans des magazines comme Life par exemple. aux Etats-Unis. Et donc, ils recherchent justement à provoquer quelque chose chez le spectateur. On a par exemple, on pourrait citer William Eugene Smith qui, en fait, va se consacrer à démontrer on dirait aujourd'hui un scandale sanitaire, un scandale écologique. avec sa femme, ils vont publier un livre qui va être relayé par le magazine Life. Il y a des résonances et une envie de partage de ce genre de catastrophes. Il y a le développement du journal National Geographic qui prône justement, qui a cette volonté de publier de belles photographies. du monde et de montrer un monde en couleur qu'on ne voit pas dans nos sociétés où on vit dans des villes et on ne voit pas tout ce monde sauvage.

  • Speaker #0

    Ils ne vont pas gratter en dessous.

  • Speaker #1

    C'est ça. Mais pourtant, ils ont un engagement quand même. C'est vraiment l'engagement de vouloir préserver par l'image.

  • Speaker #0

    Et du coup, Eugene Smith, c'est à peu près vers quelles années qu'il commence à... Enfin, qu'il fait ses photographies, ses... Surtout fin 19e, début 20e ?

  • Speaker #1

    En fait, ils voient ça lors d'un voyage au Japon en 1970. Et en fait, c'est à la suite, il me semble, de 30 ans d'années de mauvaise gestion d'une usine pétrochimique où ils ont pollué des eaux et créé des dégâts. En fait, il a fallu 30 ans. pour qu'on s'en rende compte. William James Smith arrive dans les années 70 et est vraiment choqué par tout ça et décide personnellement de... faire un reportage.

  • Speaker #0

    Oui, ça rejoint ce que je disais plus tôt, dans le sens où ça tombe à point nommé, vu qu'on est pile dans les années 70, avec le début de la conscience écologique. Et William O.J. Smith, comme tu dis, il s'inscrit dans ce mouvement. Après, je ne sais pas si c'était sciemment, mais il voulait tout de même montrer les désastres que provoque une usine pétrochimique. Et comme tu disais, quand tu grattes derrière la ville, il y a ce truc un peu funeste.

  • Speaker #1

    Et d'autant plus, c'est marrant parce que la photographie, au début, Quand elle a commencé, elle a vraiment disrupté l'équilibre des arts, parce que c'est une nouvelle forme d'art. Et les photographes, au début, ne se sentaient pas légitimes d'être artistes. Il y en a qui ne se considéraient pas du tout comme artistes. D'autres ont cherché à prouver cette qualité stylistique importante de la photographie. Et en tout cas... La photo, c'est hyper intéressant d'un point de vue écologique parce que ça capture tout de suite, l'instantané, etc. Après, ça n'a pas toujours été le cas. On a eu l'instantané, je ne sais plus exactement, mais ça naît dans les années 1930, je crois, un truc comme ça, avec le Polaroïd, etc. Et en fait une photographie ne peut pas mentir entre guillemets.

  • Speaker #0

    Il n'y avait pas photoshop à l'époque.

  • Speaker #1

    Il n'y avait pas photoshop mais ils arrivaient quand même à faire des choses absolument fantastiques avec des photos montage faits à base de solarisation de la pellicule. Enfin je n'ai pas les termes exacts parce que je suis la spécialiste de la photographie. Mais vraiment du photoshopage brut. Vraiment avec la matière, limite du collage imagé avec la lumière.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que le podcast, du coup, c'est un art ? Non, je plaisante, je plaisante.

  • Speaker #1

    Tout peut être un art en soi, mais après, c'est la photographie qui, par son médium, est constamment remise en question. Et les photographes, ils oscillent entre l'art et la... prise de documentaire et notamment dans les années 70, il y a eu un mouvement des nouveaux topographes qui veulent représenter enfin capturer l'image de nouveaux paysages urbains, le paysage urbain contemporain en fait. Et voilà, dans les années 70, il y a eu une exposition par rapport à ça et il y a tout un groupe de photographes dans ce groupe.

  • Speaker #0

    C'est aussi un peu les débuts des reportages animaliers qu'on connaît aujourd'hui, avec National Geographic par exemple, où ils pouvaient prendre en photo des espèces d'oiseaux déjà rares.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, en parlant d'oiseaux, ça me fait penser à un autre photographe. Décidément, les photographes sont très représentatifs d'un début de la naissance de la conscience écologique dans les années 60. Oui,

  • Speaker #0

    du coup, oui.

  • Speaker #1

    Lui, dans les années 60. Il prend en photo des animaux dans une forêt dans Nouvelle-Angleterre. Et dans les années 60, son livre sort et c'est un succès énorme. Donc on lui commande d'autres photographies, mais dans des espaces qu'il connaît beaucoup moins. Il va en Basse-Californie, au Mexique, au Galapagos, etc. Et en fait, il porte son attention envers cette diversité écologique qui... bien en dehors de son environnement habituel. Et franchement, il s'implique beaucoup dans ce mouvement de la conservation de la nature. Et même dans une interview, il dit qu'il faut amener les gens à prendre la conservation de la nature au sérieux. Il dit que si un scientifique dit que l'air va devenir irrespirable, on ne le croit pas. Et effectivement, en ce moment, on arrive à respirer, donc on n'est pas inquiet.

  • Speaker #0

    C'est vraiment un peu comme les appels du GIEC, où c'est des cris au loup, quelqu'un qui appelle au loup, et personne ne nous croit parce qu'on dit, non, le changement climatique, finalement, regardez, il fait très froid, et on n'a pas la chaleur. Alors que oui, les scientifiques sont alarmés. C'est vrai que ça fait un peu écho à cela. C'est une sorte, on dirait aujourd'hui plus lanceur d'alerte, je crois. Mais ouais, c'est clairement dans la veine. Il a conscience que c'est bordel. personne n'écoute quoi.

  • Speaker #1

    C'est ça et vu que c'est dans un futur où on n'est pas, ça marche aussi par rapport à un placement géographique, c'est à dire que là, Elliot Porter il va dans d'autres habitats que lui-même ne côtoie pas, il prend en photo des animaux qu'il n'a pas l'habitude de voir tous les jours etc et s'il commence à dire que tel animal va peut-être être en voie d'extinction. C'est un peu pareil, c'est-à-dire que c'est trop loin. On ne s'en rend pas compte. Et même la photographie, quelque part, ne fait pas prendre conscience aux gens. Et c'est pour ça que, par exemple, il y a un artiste contemporain que je trouve incroyable qui a voulu amener la situation jusqu'à nous.

  • Speaker #0

    Comment il s'appelle, pardon ?

  • Speaker #1

    C'est Olafur Eliasson. Et en 2014... ou plus ou moins en 2015, je ne sais plus, il a fait une installation, il a ramené 80 tonnes de glace du Groenland, qu'il a disposé des blocs plus ou moins ronds, mais très taillés de manière brute, en cercle. Il y en avait 12, il me semble, pour justement symboliser une horloge. Et il les a laissés fondre. Donc vraiment, ce passage du temps, et que si on ne fait rien... Voilà, le temps est compté, en fait. Et je trouve que c'est vachement beau d'avoir fait ça, de ramener la chose à nous, vraiment. Et en plus, il me semble que c'était pour un événement de la COP21.

  • Speaker #0

    Non mais ouais, c'est fou. Sachant que cette œuvre est contemporaine à nous, et que même avec le photographe que tu as évoqué plus tôt, il y a un peu ce truc où en écologie, bon, peut-être aussi dans d'autres domaines, je pense, quand des scientifiques qualifiés vont dire que c'est pas possible, que c'est trop tard et qu'on va tous crever, clairement, on ne les croit pas. Il y a une réelle crise de la croyance. Et même avec l'art, en l'occurrence la photographie, lorsque l'on montre des espèces en danger, certaines personnes ne vont pas du tout s'alarmer. Certaines et certaines seront limite sceptiques. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clair. Et après, il ne faut pas non plus perdre espoir totalement, parce que parfois ça marche. Comme par exemple les reporters de la guerre du Vietnam, où quand ils ont pris des photos sur les champs de bataille, ils ont été invités par l'armée pour prendre ces photos. et quand ils sont revenus avec et que les photos ont été publiées, le public a réagi de manière très virulente et s'est rendu compte de l'impact de cette guerre sur la population et le public a commencé à s'insurger. Donc quelque part, parfois ça marche. Pas toujours, mais... Bon voilà, après, il y a aussi cette chose que la photographie documentaire... peut être parfois contestable en termes de formes d'art. Les artistes, après, dans un terme global, qu'ils soient photographes, documentaires, qu'ils soient peintres, qu'ils fassent de la sculpture, etc., ça dépend. Il y en a qui appuient le fait qu'ils ont un idéal écologique, d'autres le font sans trop l'appuyer. Et je trouve que c'est important de dire quand l'artiste a vraiment cette volonté. de démontrer quelque chose, d'être dans une démarche écologique, de vouloir être un artiste engagé et donc un artiste écologique, écologiste. Ils ne le sont pas tous et donc c'est très difficile d'essayer lequel l'est et lequel ne l'est pas.

  • Speaker #0

    Ça fait un peu lien avec une question que je voulais te poser également. C'était justement, est-ce que l'art, après là je ne te parle pas uniquement de l'art contemporain, même si ça résonne plus aujourd'hui j'ai l'impression, mais est-ce que l'art peut contribuer à inspirer des changements écologiques, enfin des changements concrets qui va dans le sens de la préservation de la nature, dans le réveil des consciences écologiques ? Est-ce qu'il y a vraiment des exemples où une différence se fait par rapport à cela ?

  • Speaker #1

    Je dirais que c'est comme avec tout, c'est-à-dire que c'est... Une démarche artistique, si elle se veut militante, c'est un pari. Et comme par exemple, de nos jours, on entend parler des écologistes qui vont dans les musées et qui balancent de la soupe sur, dernièrement, la Joconde, par exemple. Il y en a qui sont d'accord, il y en a qui ne sont pas d'accord. Quel est le lien avec l'art ? C'est un pari et c'est juste... Quelque part, il faut provoquer quelque chose. Un artiste cherche à représenter, un artiste cherche peut-être à juste donner sa sensibilité, un artiste veut provoquer, ça dépend de la volonté de l'artiste, ça dépend aussi de comment on accueille. l'oeuvre qu'il ou elle produit, c'est très compliqué je trouve. En tout cas, si on ne veut pas partir dans des généralités, on peut se focaliser sur des artistes qui vraiment concrètement se considèrent comme engagés, comme par exemple Joseph Beuys, qui avait toute une action, enfin une installation très intéressante, mais je ne rentrerai pas dans le détail, mais ce que je trouve intéressant, c'est ce qu'il dit, c'est que chaque version de l'humanité humaine, même... éplucher une patate, c'est une œuvre d'art, du moment que c'est un acte conscient. Et par exemple, il y a une autre artiste, Agnès Dénès, je ne sais pas exactement si je le prononce bien, mais elle a fait une action choc que je trouve incroyable, c'est qu'elle a acheté une parcelle de terrain sur un morceau de territoire hyper convoité à New York, et elle y a planté du blé. Et elle voulait dénoncer justement cette folie en fait de... Il y a certains terrains qui sont plus prisés et pourtant sur cette petite parcelle, on peut faire autant de blé et elle dénonce vraiment la famine dans le monde. Enfin, l'absurdité en fait de l'économie par rapport à juste la nature et les besoins naturels de l'homme.

  • Speaker #0

    Mais ouais, c'est sûr. Après, je ne vais pas rentrer dans les détails. Mais en agriculture urbaine, on dit souvent que c'est compliqué de produire, car les sols sont pollués. Mais d'un côté, si on n'essaie pas, on ne saura jamais. Puis on peut faire aussi dans la mesure des possibles. Ce ne sera jamais ce qu'on imagine, donc de la production de masse à l'intérieur des villes, mais on pourra toujours nourrir des personnes dans le besoin, même si ce n'est pas beaucoup. Et clairement, oui, comme tu disais, c'est absurde, ces espaces privatisés, à des prix de zinzin en plus.

  • Speaker #1

    Oui, c'est clair. Et je trouve que les artistes sont là aussi pour... un peu assoufflé, quoi, pour permettre de donner un peu de... un peu de rigoler du pathétique de cette situation, de vraiment, genre, nous dire c'est ridicule Il y a un autre artiste qui, par exemple, a réuni un G5 des interespèces, et je trouve ça extrêmement drôle, il rassemble minéral, végétal, animal, humain et intelligence artificielle. Et il se moque. concrètement du G20. Aujourd'hui, on peut se demander à quoi ça sert si on y invite des gens qui viennent des sociétés ultra-capitalistes et qui défendent l'écologie alors qu'ils la massacrent.

  • Speaker #0

    C'est les mêmes qui vont venir en avion pour la conférence, par exemple.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    C'est une sorte d'ironie qu'il y a. C'est limite sarcastique. J'ai l'impression qu'il y a une véritable crise dans ce que ça représente. ce G20 et le fait qu'ils ne prennent pas de véritables décisions concrètes, ils sont limite insensibles. Je ne sais pas ce que tu en penses. Oui,

  • Speaker #1

    et je trouve que vraiment le lien entre l'art et l'écologie, c'est ce lien que voit l'artiste en tant qu'homme envers la nature et le fait qu'il y a cette recherche de lien juste. Par exemple, ça me fait penser à une artiste qui, bon, ça paraît un peu fou, mais elle s'appelle Marion Laval-Jantet et elle a fait une performance qui s'appelle Que le cheval vive en moi, où elle s'injecte du sang de cheval. Ah oui ? Oui. Où c'est vraiment, bon, c'est poussé à l'extrême, mais c'est cette idée de vouloir justement voir l'homme et la nature faire communion. Ou bien, il y a encore Hermann De Vries. qui lui décide de ne pas mettre de majuscule à son prénom, à son nom de famille, parce qu'il considère que l'homme n'a pas à se valoriser par rapport à la nature, et il se base plutôt sur une sorte de philosophie orientale pour trouver une espèce de démarche contemplative dans le positionnement de l'homme au sein de la nature.

  • Speaker #0

    Je me disais, dans ma tête, quand tu disais ça, c'était qu'il voulait supprimer les majuscules pour pas que ça prenne trop d'encre sur un crayon ou même sur une impression, mais... Non, c'est pas du tout par rapport à ça, ok.

  • Speaker #1

    C'est vraiment idéologique, plutôt, et c'est marrant, parce que... Il y a ces artistes contemporains qui sont de plus en plus engagés, mais il y en a quelques bouts, déjà, par-ci, par-là, dès le XIXe siècle, par exemple, Rosa Bonheur, qui est une peintre incroyable, animalière, qui... qui regarde, qui vraiment se tourne vers les animaux, qui a cette tendresse et dans son regard qui fait de la sculpture, de la peinture, qui les représente de la manière la plus véridique qu'elles veulent transmettre. Et d'ailleurs, artiste incroyable qui a dû avoir une dérogation auprès de la préfecture de police pour pouvoir porter un pantalon, pour pouvoir mieux se déplacer et observer les animaux.

  • Speaker #0

    La proto-histoire de l'écoféminisme.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, c'est clair. Et elle, elle disait que l'homme, en fait, il vaut rien par rapport à l'animal, enfin quelque chose dans ce sens-là. Et Rosa Bonheur, aujourd'hui, on peut avoir une sorte de lecture un peu féministe de cette personne. C'est un peu compliqué de dire ça pour cette époque-là, mais aujourd'hui, on peut parler effectivement d'écoféminisme par rapport à Anna Mandietta. qui dans les années 60 fait des performances qui sont enragées, qui témoignent vraiment de quelque chose de puissant, où en fait elle, elle décide de mettre en scène son corps recouvert de plumes de poules, de sang de poules, et dont en fait elle vient elle-même de l'égorger, donc elle prend vraiment en main la chose elle-même. Et elle compare en fait ce corps animal au corps féminin.

  • Speaker #0

    Pardon à tous les véganes d'ailleurs.

  • Speaker #1

    Ouais, les performances choc forcément vont dans le lard pour faire une blague pas très végane aussi. Mais en tout cas, par exemple, il y a aussi cette performance touchante de Joseph Boyce qui va en Amérique. Joseph Boyce, artiste allemand qui a servi dans la Luftwaffe, qui a été abattu, retrouvé par des gens et puis mis dans du feutre et de la graisse pour recourir de ses blessures. Et ça l'a vachement atteint, il est devenu assez militant je dirais. Et quand il est parti... Aux États-Unis, pour cette performance, il a décidé de ne pas du tout vouloir voir le pays, de se cacher dans son tissu de feutre jusqu'à la galerie et de s'enfermer pendant, je ne sais plus, je crois que c'était une semaine, avec un coyote sauvage. Il prend ce risque et il est là, il s'y met à 100%. Justement, j'appuie d'autant plus que vraiment, les artistes prennent des risques, non seulement stylistiques, mais aussi... corporel.

  • Speaker #0

    Après je vois, enfin je pourrais voir des personnes venir en disant genre oui non mais les coyotes ça va c'est effectivement des petits chiens. En vrai c'est pas un puma mais je pense que comme tu disais si c'est une semaine sans manger ou vraiment dans une même pièce avec un animal, l'animal va commencer à avoir faim donc c'est ouais c'est comme tu dis c'est une véritable prise de risque et enfin de montrer ça quoi.

  • Speaker #1

    Après ils mangeaient je pense, je crois qu'ils mangeaient deux choses séparées effectivement mais ils cohabitaient ensemble. C'est incroyable. Et je crois qu'au bout d'un moment, ils ont commencé à devenir mes potes.

  • Speaker #0

    Moi et mon pote coyote.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, toujours Joseph Boyce, dans les années 80, pour la Biennale de Kassel, qui est une manifestation artistique qui a lieu tous les quelques années, a planté des colonnes de basalte dans le sol. Et il voulait faire participer le spectateur en remplaçant ses colonnes de basalte par des arbres. Et en fait, c'était vraiment la volonté de faire disparaître petit à petit les colonnes de basalte et de les remplacer par l'arbre. Et vraiment, cette idée, ce serait pur et très simple de vouloir faire du monde une grande forêt et bâtir les villes et les environnements comme des forêts. Ça me fait penser au Land Art. Et le LendArt, c'est typiquement des artistes qui prennent la nature, l'art, et qui font un mix des deux, et juste qui n'utilisent pas des pinceaux, de l'appareil photographique, ils utilisent la nature. pour créer de l'art. Par exemple, Robert Smithson avec sa spiral jetty du côté de la Californie, il me semble, qui a créé comme un espèce d'îlot qui fait une spirale en fait, avec des cailloux, enfin, quelque chose vraiment massif pour que ça puisse tenir dans le temps. C'était dans les années 80, aujourd'hui, on la voit plus.

  • Speaker #0

    C'est quand même récent, comme si ça datait... Je veux dire, il y a des vestiges qu'on a de l'Antiquité qui sont encore présents, mais là, ça n'a pas duré. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clair. Et on pourrait se dire, bon, il a mis des cailloux au bord de la mer, forcément, ça ne se verra plus. Mais il a fait en sorte à ce que ce soit quelque chose qui se voulait durable à la base. Et ce n'est pas resté. Il y a plein d'œuvres de Land Art. Ça arrive, par exemple, Walter de Maria, qui a placé des... pareil, des colonnes de fer ou de, je ne sais plus, d'un métal, dans un champ qu'il a eu, tout simplement, qu'il a privatisé, etc. Où ces colonnes étaient censées attirer des tonnerres, en fait, des éclairs. Des tonnerres, oui. C'est ça, des paratonnerres, et tout calculé, etc. pour que ce soit tous au même niveau. Il y avait des colonnes qui étaient plus grandes que d'autres, etc. Et aujourd'hui, bah... Pareil, ça a été dégradé par le temps et ça ne marche plus.

  • Speaker #0

    Après, d'une manière un peu triste, que ce soit pour les cailloux dont tu me parlais, l'œuvre qui a été dégradée, qui n'est plus présente, ou alors les paratonnerres, c'est que finalement, même dans cette tristesse, ça prouve le point de ces artistes par rapport à ce rapport que l'homme a avec la nature. C'est-à-dire qu'on a des choses qui sont belles. enfin pas forcément belles mais qui sont aussi utiles dans l'environnement et parfois elles disparaissent et on est triste de perdre un peu ce patrimoine qui est aussi important et c'est un peu ça j'ai l'impression, enfin quand tu m'expliques ce que représente le land art, même si c'était pas le but premier des artistes, c'est que au final c'est exactement ça le point ça disparaît, ça ne reste pas éternellement la planète c'est un peu pareil l'environnement et l'écologie c'est un peu la même chose tout à fait et dans l'autre sens,

  • Speaker #1

    ce qui est extrêmement marrant c'est que Il y a des artistes comme Christo et Jeanne Claude qui vont recouvrir l'art récemment, l'année dernière je crois, qui recouvrent l'arc de triomphe d'une bâche de tissu. Et les gens s'insurgent de qu'est-ce que c'est que cette horreur à l'art contemporain, etc. Et qu'en fait, effectivement, c'est du land art, donc ça part aussi de cette idée d'un art éphémère. Mais on voit que là, on porte plus d'importance à ce qu'il y a en dessous de cette nouvelle installation, c'est-à-dire l'Arc de Triomphe avec les reliefs de François Rude, etc. Et on ne regarde pas la création contemporaine, on ne s'y intéresse pas. Et pourtant, la création contemporaine, ça nous dit quelque chose de la société d'aujourd'hui aussi.

  • Speaker #0

    Oui, c'est complètement la société qui s'effondre. On retrouve d'ailleurs cette idée dans la collapsologie, il me semble.

  • Speaker #1

    Et je voulais juste rajouter que c'est ce rapport à l'art et l'environnement. Il y a un rapport très compliqué, c'est-à-dire qu'on sacralise l'art. Et pour revenir encore une fois aux gens qui balancent des soupes sur les œuvres, tant qu'il y a une vitre, je ne sais pas, mais on s'insurge plus contre la possible destruction d'une œuvre d'art qui, certes, est inestimable. Mais après, effectivement, il y a des raisons plus intéressantes. Il y a des questions écologiques qui sont plus intéressantes.

  • Speaker #0

    C'est vrai que quand tu te retiens, que tu pèses un peu tes mots, il ne sort rien de l'art. Si tu dis des choses qui vont être retenues contre toi, tu vas être placristée. Ne t'inquiète pas, je n'ai pas encore assez d'écoute pour ça.

  • Speaker #1

    Non, mais ce n'est pas ça. C'est vrai qu'en tant que faisant partie du monde de la culture et de la volonté de conservation des œuvres d'art, ça me fait peur effectivement de voir des oeuvres qui peuvent être mises en danger. Après, effectivement, on met les moyens pour les protéger. Donc, si elles sont mises en danger de cette manière-là, c'est-à-dire qu'il y a une vitre, certes, ça coûte de l'argent pour l'entretien, etc. Il y a toute une chose qui s'engraine par derrière. Et effectivement...... Et je comprends les écologistes qui veulent avoir leur voix qui est entendue. Et je comprends aussi leur frustration de voir les gens s'intéresser plus à l'art.

  • Speaker #0

    à l'art du passé surtout que de s'intéresser aux problématiques d'aujourd'hui et de regarder vers le futur d'ailleurs oui par rapport au futur ça me fait penser il me semble qu'il y a des oeuvres justement qui parlent pas peut-être spécifiquement de collapsologie ou d'effondrement mais en tout cas de ce qui se passerait dans le futur dans l'après par rapport à ça,

  • Speaker #1

    il y a des oeuvres qui en parlent quand même je trouve alors par exemple par rapport à la collapsologie, c'est vraiment ce courant de pensée qui prédit à quoi amènera la crise écologique. Moi, ça me fait penser à un artiste, Piotr Kowalski, qui a créé un... On pourrait dire que c'est une sculpture cinétique, parce que cinétique qui implique le mouvement. Et en fait, c'est un cube transparent qui... inclut des petites billes qui représentent un humain. Et en fait, le cube de la population, comme il l'appelle, peut contenir 10 milliards, il me semble, de billes. Je ne sais plus combien on est sur la planète, 7 milliards, il me semble.

  • Speaker #0

    On a dépassé ce chiffre depuis longtemps.

  • Speaker #1

    Voilà. Et en fait, le cube peut contenir 10 milliards de billes, une bille étant un humain. Et en fait, en bas, on a un tube qui enlève certaines billes. par rapport aux morts et par le dessus on a un autre tube qui alimente de nouvelles pilles. Et en fait toute cette œuvre est reliée aux statistiques en fait et vraiment aux données réelles des naissances et des morts. Donc c'est une œuvre très compliquée, vraiment qui tient de l'ingénierie et qui témoigne de vraiment d'une manière extrêmement visuelle que... ce cube ne peut contenir qu'une certaine quantité de billes. Donc au bout d'un moment, on ne pourra plus arriver. Et malheureusement, aujourd'hui, je ne sais pas combien on est de milliards sur la planète, mais le cube de la population, de toute façon, ne fonctionne plus. Parce qu'il y a eu de la poussière dedans et il ne peut plus fonctionner. Pour des raisons de conservation, il ne fonctionne plus.

  • Speaker #0

    D'où l'effondrement, oui. Est-ce que tu faisais lien avec la collapsologie ? Le cube, soit il passe cassé, ce serait un peu l'allégorie. de la planète, même si c'est quand même vu grossièrement. Mais voilà, ça va se casser la gueule parce que c'est pas assez, il est foutu.

  • Speaker #1

    Ce qui est d'autant plus marrant, c'est qu'il n'avait pas prévu que le cube n'allait plus marcher. Lui, il pensait vraiment qu'il allait continuer et être un témoin un peu de l'avancement de notre population. Et en fait, le cube ne fonctionne plus comme notre planète, en quelque sorte.

  • Speaker #0

    C'est un peu la voix de la panique, là.

  • Speaker #1

    Ouais. Ce qui est marrant aussi, c'est que tu as d'autres artistes qui engendrent de nouveaux termes, comme la solastalgie, qui en fait est une détresse psychologique qui est assimilée à une forme de deuil par rapport à quelque chose qu'on a perdu ou qui ne pourra jamais être réparé. Voilà, c'est quelque chose qui tient presque de l'éco-anxiété, mais c'est pas vraiment ça.

  • Speaker #0

    Oui, ça me fait penser un peu à ce sentiment général où on a une grosse tendance à idéaliser la nature d'avant, des forêts vierges d'antan. On parle même de nature originelle, alors qu'en vérité, c'était pas tellement le cas. C'est un peu des idées qui héritent directement du christianisme avec le jardin d'Éden, ou même avant, chez les grecs, avec le jardin des Hespérides. C'est marrant, ouais, la solastos... ça fait sens j'ai l'impression que ça fait beaucoup lien avec les co-anciétés et que c'est quelque chose que même aujourd'hui même si c'est des projections vers le futur c'est des choses que de plus en plus de personnes moi,

  • Speaker #1

    on ressent ouais et en fait il y a un truc ça me fait penser encore à un autre artiste qui se concentre sur des odeurs de fleurs qui n'existent plus Et ça s'appelle Resurrecting the Sublime. Et je trouve que c'est vraiment cette idée justement du jardin d'Éden, d'un truc inconnu, où par exemple les œuvres, que ce soit des œuvres de Jérôme Bosch, etc., où il peint le jardin d'Éden, etc., où il représente des fleurs qui existent réellement. Après, je n'ai pas trop d'exemples, mais il y a sûrement des... plantes qui ont été inventées, etc. Mais souvent, on se rapporte à des choses qui existent. Et le fait que cet artiste-là aille vers un truc, vers une chose qu'on ne connaît pas, je trouve que c'est... Il y a quelque chose qui tient de la poésie, de l'inconnu et du sublime. Ça renvoie à cette idée du XIXe siècle, où le romantisme, quand il naît, il naît à cause d'un mouvement allemand qui s'appelle Sturm und Drang, qui veut dire tempête et sentiment, je crois. Et c'est cette idée qui se développe ensuite avec un autre philosophe. C'est le sublime. Le sublime, c'est cette idée que l'homme est tout petit face à la nature. Et que vraiment, ça se caractérise franchement dans les œuvres de Kaspar David Friedrich, où on voit cet homme devant une mer de nuages. Et je ne sais pas, je pense que... Tout spectateur, quand il voit ce tableau, il comprend ce que ça veut dire. C'est vraiment quelque chose de... Même si l'homme est au sommet, il est rien.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, ça m'amène à ma dernière question. Premier après, ça, je te lâche. Mais est-ce que tu penses que l'art peut sauver la nature ?

  • Speaker #1

    Ce qui, je trouve, est assez révélateur, c'est que... L'art en soi, qu'il soit sonore avec la musique, qu'il soit visuel, graphique, avec tous les arts visuels, qu'il soit littéraire avec la poésie, les romans, l'art en général n'est pas quelque chose d'essentiel en soi, mais l'humain s'y accroche quand même. Moi j'essaye de vouloir aller vers un métier qui est dans la conservation du patrimoine. et on veut conserver tout ça, on veut avoir la trace, on s'accroche à quelque chose qui... Pour moi, j'ai une sensibilité où je dirais toujours qu'il y a quelque chose de poétique dans l'art, même qu'il soit aussi loin de la poésie qu'il le veuille l'être, l'art est quelque chose qui exprime l'intériorité, je trouve. Et en fait... Quand on repense à tout ce qu'on a dit, l'intériorité c'est quoi ? C'est aussi être au sein de la nature, en phase avec la nature, et se rendre compte qu'on est quelque chose parmi tout un univers, un environnement. Et cette intériorité, elle se met au milieu de tous les aspects de la nature, des animaux, de tout, et que l'humain fait partie de la nature, qu'il se considère. au dessus ou en dessous d'elle. L'art est un témoignage de l'humain et donc l'art a forcément un lien envers la nature et je trouve qu'il faut utiliser l'art pour dénoncer des choses, pour militer, pour dire des choses, toujours.

  • Speaker #0

    Donc c'est pas tellement l'art qui sauve la nature, c'est plus ce que l'impact que va créer une oeuvre qu'on aura conservée. car il faut la conserver, nous nous montrera qui nous provoquera de nous et qui nous poussera à la sauver ouais je pense,

  • Speaker #1

    je pense que c'est vraiment cette idée de conservation si on a ça envers les oeuvres d'art je sais pas, on devrait avoir ça envers la nature tout simplement, ça devrait être beaucoup plus dîné que de juste enfin c'est ce regard qu'on a envers l'art c'est quelque chose c'est de l'art, c'est de l'art du passé on prend ça vraiment comme du patrimoine et Pourtant, on n'a pas ce regard-là envers la nature. Et je pense que l'art doit servir à la cause de la nature. Et je défends l'art écologique, tout simplement, qu'il se développe. Je trouve que c'est vraiment hyper intéressant de voir des artistes qui sont engagés et qui militent pour quelque chose.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Merci de m'avoir donné ton temps.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Je vous remercie pour votre écoute de cet épisode légèrement plus long que ce précédent. J'espère que le format vous a plu, que vous avez appris des choses, et surtout passé un bon moment. Il y aura d'autres épisodes de ce type, afin de vous faire découvrir l'histoire de l'environnement avec d'autres voix que la mienne. Il naît de si bonne compagnie qui ne se sépare, et en attendant les prochains épisodes, je vous dis au revoir. Et à très vite sur Environ.

Chapters

  • Présentation

    00:48

  • Premiers mouvements au XIXème siècle

    02:21

  • Théodore Rousseau

    04:51

  • Au XXème siècle

    07:48

  • Et la photographie dans tout ça ?

    11:25

  • Eliott Porter

    17:41

  • La contribution de l'art dans l'éveil des consciences

    23:15

  • Rosa Bonheur et éco-féminisme

    29:26

  • Joseph Boyce et Land Art

    31:25

  • Art contemporain et collapsologie

    37:26

  • L'art peut-il sauver la nature ?

    45:14

Description

Aujourd'hui c'est nouveau format d'épisode ! 🌱 Dans cet entretien avec Eva, diplômée de master en histoire de l'art contemporain, on va voir que ce dernier joue un rôle clé dans la redéfinition de notre rapport à l’environnement, en repensant les liens entre humanité et nature à travers des pratiques variées et parfois engagées.🖼️🌳 J'espère que ce nouveau format vous plaira et vous souhaite une excellente écoute ! 🐙 (Désolé d'avance pour la voix malade d'intro et outro, bientôt l'hiver, tout ça...)

Instagram : @environ_podcast

Vignette : Paysage rocheux dans la Elbsandsteingebirge, Caspar David Friedrich, 1823, Palais du Belvédère.

Crédits musicaux : 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour ou bonsoir à tous et à toutes, et bienvenue sur Environ, le podcast sur l'histoire de l'environnement. Aujourd'hui, je voulais vous présenter avec cet épisode un nouveau type de format qui est celui de l'échange. Le principe étant de faire intervenir une personne, universitaire, professionnelle ou passionnée, sensible et ou mieux informée, sur une thématique concernant l'histoire environnementale. Et aujourd'hui, le thème sera autour du rapport entre l'histoire de l'art contemporain et l'environnement, la question écologique. Du coup, je ne vous en dis pas plus, et allons ensemble découvrir ce nouvel environ. Salut ! Salut ! Est-ce que tu pourrais te présenter un petit peu ?

  • Speaker #1

    Ouais. Je suis Eva Pchelka, j'ai fait un parcours classique en histoire de l'art. donc une licence, puis un master. J'ai écrit un mémoire sur un artiste contemporain qui fait majoritairement de la peinture abstraite. Et là, je prépare tout doucement le concours de conservateur du patrimoine.

  • Speaker #0

    Ok. Et c'est quel artiste du coup ?

  • Speaker #1

    C'était Saito Mbli, c'est un artiste américain qui a émigré en Italie dans les années 60. qui est mort très récemment, en 2011, il me semble.

  • Speaker #0

    Je voulais te demander, du coup, c'est quoi ton rapport à l'environnement et ou à l'histoire de l'environnement, à l'écologie, à la nature, etc. Enfin, tu as le droit de partir depuis que tu étais tout petite, il n'y a aucun souci, mais c'est quoi ton rapport à cela ?

  • Speaker #1

    Le rapport à la nature, à l'écologie, etc., je pense que ça part de quelque chose qui est vraiment interne. et qui part d'un sentiment assez poétique et juste d'un regard vers la nature. Je pense que ça part de là et puis je me dis, quand j'ai voulu écrire mon mémoire, j'ai hésité entre justement l'artiste dont je t'ai parlé et l'art écologique et tout plein d'artistes qui sont liés à la nature ou à l'écologie de près ou de loin.

  • Speaker #0

    À partir du XIXe siècle, est-ce qu'il y a des mouvements où... des artistes qui vont faire comme une sorte de scission et offrir une nouvelle représentation de la nature plus réelle ?

  • Speaker #1

    On peut voir déjà une sorte de changement à partir de la révolution, parce que la révolution française engendre des révolutions un peu partout, et ça engendre un changement de mentalité dans une globalité, c'est-à-dire qu'il y a... Il y a des changements dans l'art, il y a des changements en politique, en sociologie, etc. Je ne rentrerai pas trop dans les détails, mais on voit un changement de la volonté de l'homme de se placer face à la nature. On voit qu'avec la révolution, il y a eu ces changements sociaux, puis ça a entraîné tout simplement le progrès continuel. Au XIXe siècle, par exemple, on a plusieurs révolutions industrielles. Ces révolutions industrielles, on voit qu'elles changent grandement le regard des artistes sur l'art parce que, par exemple, le fait qu'il y ait des chemins de fer, les artistes peuvent prendre maintenant le train et aller au bord de la mer. Avant d'aller au bord de la mer, ils peuvent aller tout simplement un peu plus loin, c'est-à-dire de Paris. aller dans les banlieues parisiennes, par exemple, notamment Fontainebleau. Et on retrouve un groupe d'artistes qui sont généralement appelés les peintres de Barbizon, puisqu'ils se retrouvent dans cette forêt-là et ils y retrouvent quelque chose d'une nature intouchée, de quelque chose qui ne côtoie plus dans la société dans laquelle ils vivent. Parce que... Ils se situent à Paris. Leur commanditaire demande, par exemple, des portraits de société, etc. Il y en a qui font autre chose, bien sûr, mais il y a toute une part de peintres qui veulent représenter la modernité. Après, justement, il y a cette scission avec les peintres de Parapézons qui décident de partir et de... de retrouver cette nature qui est brute et intouchée.

  • Speaker #0

    Oui, donc il y a clairement une petite scission avec ces peintres que tu as cités, mais pas non plus un retour brut à la nature. Cela reste isolé. Mais d'ailleurs, il y en a d'autres des artistes dans cette veine, justement.

  • Speaker #1

    Alors, ce qui est marrant, en fait, avec... Je me permets de revenir un petit peu, mais... Par exemple, Théodore Rousseau, il ne se rendait pas compte à quel point ça le percuterait de voir cette nature brute. De là à créer une peinture qui est incroyable suite à une découverte de... d'arbres abattus au bord de la Seine en 1847. Cette Seine le bouleverse et il crée une peinture qui représente des arbres abattus et rien d'autre, vraiment juste de la nature. Il appelle ce tableau le massacre des innocents. C'est vraiment quelque chose de très puissant ce qui lui est arrivé. Ce choc vraiment artistique qu'il a voulu construire.

  • Speaker #0

    Ouais, donc avec Théodore Rousseau, il y a une idée d'aller au-delà de la simple représentation graphique de la nature. Il y a quasiment, presque, un début de sensibilité environnementale, en fait.

  • Speaker #1

    En fait, Théodore Rousseau est appelé par certains historiens de l'art comme le premier artiste écologiste, en tout cas, engagé pour l'environnement, parce qu'après, il milite contre l'abattage des arbres. Je ne sais plus exactement dans quelles circonstances. Il est très proche de Georges Sand. On peut parler d'une lutte. Après, je n'ai pas exactement les détails, mais déjà, cette peinture, elle révèle beaucoup, je trouve. Théodore Rousseau est une exception quand même à la règle. Et ses contemporains, notamment, on va juste citer les impressionnistes, Claude Monet, Sisley, tout cela représente... certes la nature, mais la nature d'une modernité, et qui est celle des loisirs, de l'oisiveté, du fait que les bourgeois vont à la mer et se prélassent. Mais il n'y a pas ce regard conscient envers la nature. Théodore Rousseau est vraiment une exception là-dedans. Et en fait, c'est plus la forme. Je dirais, dans le début de l'ère contemporaine, la nature, et même... Avant, on peut difficilement parler de conscience écologique, et donc juste la nature sert à la forme et non aux propos. Alors que les artistes contemporains, de plus en plus avec les questionnements écologiques qui naissent, vont plus se positionner sur une sorte de propos plutôt que de forme.

  • Speaker #0

    On avance un petit peu, mais le XXe siècle, c'est un peu le moment où le monde commence doucement à conscientiser, comme le faisait un peu Théodore Rousseau en tant que, entre guillemets, premier artiste écologique, les impacts violents de l'homme sur la nature, avec les révolutions industrielles, puis à la deuxième moitié du siècle, les débuts de la mondialisation. Mais du coup, quels artistes ou mouvements vont cristalliser, en quelque sorte, cette sorte de début de conscience écologique ? ...

  • Speaker #1

    Au XXe siècle, je dirais même au début du XXe siècle, ce qui est assez prenant dans les arts, c'est vraiment l'impact de la guerre. Il y a un retour au style, un retour vers un classicisme, mais en même temps une volonté de faire autre chose. Il y a aussi des artistes qui... En fait, il y a beaucoup de réactions par rapport à la guerre. plus que par rapport à une conscience écologique. La conscience écologique, je pense, viendra plus tard. Je ne pense pas qu'il y ait des artistes qui l'ont mis de côté. Il y a sûrement eu des artistes écologistes qui ont fait des choses, mais en tout cas au début du XXème siècle, c'est un petit peu compliqué. En tout cas, par la suite, il y a quelques exemples de premières artistes qui commencent réellement à se poser la question d'un impact et de comment présenter cet impact par les arts.

  • Speaker #0

    Après, c'est vrai que ça peut faire sens dans le sens où... J'en avais parlé dans le premier épisode d'Environ, je crois, que la naissance des combats écologiques, c'était avec les années 70, avec Rachel Carson qui écrit Le printemps silencieux, le premier Earth Day, même les mouvements hippies, ce qui était aussi contre la guerre au Vietnam. Et c'est vraiment les années 70 où la conscience, tu la vois. tu la sens totalement, mais je me posais la question justement, si auparavant, et c'est vrai que je ne pense pas que Théodore Rousseau, comme tu disais tout à l'heure, était beaucoup plus pionnier dans cela, et qu'il va y avoir une sorte de trou avant qu'on reprenne des idées écologiques, mais bien après la guerre, années 70, et reste quand les gens en prennent conscience.

  • Speaker #1

    Après, je ne pense pas que ça a été mis de côté. Je pense qu'il y a eu un impact plus fort de la guerre, et qui a remis au second plan les idées, justement les notions de faire attention à la nature, etc. Parce que... Justement, il y a cette guerre qui a bouleversé les gens dans tous les plans. Et oui, l'écologie, à ce moment-là, n'était pas... La nature devait servir à la guerre, tout simplement, je pense. C'était vraiment maîtriser l'environnement.

  • Speaker #0

    Le projet Manhattan avec les bombes nucléaires, maîtrise de la nature qui est au paroxysme.

  • Speaker #1

    Et on ne se pose pas la question de... Là, on se pose la question du maintenant et on ne se pose pas la question de l'après.

  • Speaker #0

    Mais justement, est-ce qu'il y a eu un médium artistique en particulier durant l'époque contemporaine qui porte de manière significative des idées écologistes ?

  • Speaker #1

    La photographie, par exemple. Au début, on a des photographies de portraits, de la recherche stylistique avec les pictorialistes au début du XIXe siècle. Puis... Aux États-Unis, on a un mouvement de photographie humaniste qui se tourne vers l'humain pour capturer vraiment la pauvreté dans les portraits de personnes qui en soi, ce ne sont pas des portraits mais une représentation de la société. Et par rapport à cette photographie humaniste, se développent plein d'autres courants avec la photographie du photojournalisme. la photographie documentaire. Et dans la photographie documentaire notamment, on a beaucoup d'engagement, parce que, comme dans le photojournalisme en soi, c'est de vouloir capturer des faits et de produire des émotions sur la personne qui regarde la photo. Parce que beaucoup de photographes sont reliés à des agences de photographie qui par la suite vont publier ces photographies dans des magazines comme Life par exemple. aux Etats-Unis. Et donc, ils recherchent justement à provoquer quelque chose chez le spectateur. On a par exemple, on pourrait citer William Eugene Smith qui, en fait, va se consacrer à démontrer on dirait aujourd'hui un scandale sanitaire, un scandale écologique. avec sa femme, ils vont publier un livre qui va être relayé par le magazine Life. Il y a des résonances et une envie de partage de ce genre de catastrophes. Il y a le développement du journal National Geographic qui prône justement, qui a cette volonté de publier de belles photographies. du monde et de montrer un monde en couleur qu'on ne voit pas dans nos sociétés où on vit dans des villes et on ne voit pas tout ce monde sauvage.

  • Speaker #0

    Ils ne vont pas gratter en dessous.

  • Speaker #1

    C'est ça. Mais pourtant, ils ont un engagement quand même. C'est vraiment l'engagement de vouloir préserver par l'image.

  • Speaker #0

    Et du coup, Eugene Smith, c'est à peu près vers quelles années qu'il commence à... Enfin, qu'il fait ses photographies, ses... Surtout fin 19e, début 20e ?

  • Speaker #1

    En fait, ils voient ça lors d'un voyage au Japon en 1970. Et en fait, c'est à la suite, il me semble, de 30 ans d'années de mauvaise gestion d'une usine pétrochimique où ils ont pollué des eaux et créé des dégâts. En fait, il a fallu 30 ans. pour qu'on s'en rende compte. William James Smith arrive dans les années 70 et est vraiment choqué par tout ça et décide personnellement de... faire un reportage.

  • Speaker #0

    Oui, ça rejoint ce que je disais plus tôt, dans le sens où ça tombe à point nommé, vu qu'on est pile dans les années 70, avec le début de la conscience écologique. Et William O.J. Smith, comme tu dis, il s'inscrit dans ce mouvement. Après, je ne sais pas si c'était sciemment, mais il voulait tout de même montrer les désastres que provoque une usine pétrochimique. Et comme tu disais, quand tu grattes derrière la ville, il y a ce truc un peu funeste.

  • Speaker #1

    Et d'autant plus, c'est marrant parce que la photographie, au début, Quand elle a commencé, elle a vraiment disrupté l'équilibre des arts, parce que c'est une nouvelle forme d'art. Et les photographes, au début, ne se sentaient pas légitimes d'être artistes. Il y en a qui ne se considéraient pas du tout comme artistes. D'autres ont cherché à prouver cette qualité stylistique importante de la photographie. Et en tout cas... La photo, c'est hyper intéressant d'un point de vue écologique parce que ça capture tout de suite, l'instantané, etc. Après, ça n'a pas toujours été le cas. On a eu l'instantané, je ne sais plus exactement, mais ça naît dans les années 1930, je crois, un truc comme ça, avec le Polaroïd, etc. Et en fait une photographie ne peut pas mentir entre guillemets.

  • Speaker #0

    Il n'y avait pas photoshop à l'époque.

  • Speaker #1

    Il n'y avait pas photoshop mais ils arrivaient quand même à faire des choses absolument fantastiques avec des photos montage faits à base de solarisation de la pellicule. Enfin je n'ai pas les termes exacts parce que je suis la spécialiste de la photographie. Mais vraiment du photoshopage brut. Vraiment avec la matière, limite du collage imagé avec la lumière.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que le podcast, du coup, c'est un art ? Non, je plaisante, je plaisante.

  • Speaker #1

    Tout peut être un art en soi, mais après, c'est la photographie qui, par son médium, est constamment remise en question. Et les photographes, ils oscillent entre l'art et la... prise de documentaire et notamment dans les années 70, il y a eu un mouvement des nouveaux topographes qui veulent représenter enfin capturer l'image de nouveaux paysages urbains, le paysage urbain contemporain en fait. Et voilà, dans les années 70, il y a eu une exposition par rapport à ça et il y a tout un groupe de photographes dans ce groupe.

  • Speaker #0

    C'est aussi un peu les débuts des reportages animaliers qu'on connaît aujourd'hui, avec National Geographic par exemple, où ils pouvaient prendre en photo des espèces d'oiseaux déjà rares.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, en parlant d'oiseaux, ça me fait penser à un autre photographe. Décidément, les photographes sont très représentatifs d'un début de la naissance de la conscience écologique dans les années 60. Oui,

  • Speaker #0

    du coup, oui.

  • Speaker #1

    Lui, dans les années 60. Il prend en photo des animaux dans une forêt dans Nouvelle-Angleterre. Et dans les années 60, son livre sort et c'est un succès énorme. Donc on lui commande d'autres photographies, mais dans des espaces qu'il connaît beaucoup moins. Il va en Basse-Californie, au Mexique, au Galapagos, etc. Et en fait, il porte son attention envers cette diversité écologique qui... bien en dehors de son environnement habituel. Et franchement, il s'implique beaucoup dans ce mouvement de la conservation de la nature. Et même dans une interview, il dit qu'il faut amener les gens à prendre la conservation de la nature au sérieux. Il dit que si un scientifique dit que l'air va devenir irrespirable, on ne le croit pas. Et effectivement, en ce moment, on arrive à respirer, donc on n'est pas inquiet.

  • Speaker #0

    C'est vraiment un peu comme les appels du GIEC, où c'est des cris au loup, quelqu'un qui appelle au loup, et personne ne nous croit parce qu'on dit, non, le changement climatique, finalement, regardez, il fait très froid, et on n'a pas la chaleur. Alors que oui, les scientifiques sont alarmés. C'est vrai que ça fait un peu écho à cela. C'est une sorte, on dirait aujourd'hui plus lanceur d'alerte, je crois. Mais ouais, c'est clairement dans la veine. Il a conscience que c'est bordel. personne n'écoute quoi.

  • Speaker #1

    C'est ça et vu que c'est dans un futur où on n'est pas, ça marche aussi par rapport à un placement géographique, c'est à dire que là, Elliot Porter il va dans d'autres habitats que lui-même ne côtoie pas, il prend en photo des animaux qu'il n'a pas l'habitude de voir tous les jours etc et s'il commence à dire que tel animal va peut-être être en voie d'extinction. C'est un peu pareil, c'est-à-dire que c'est trop loin. On ne s'en rend pas compte. Et même la photographie, quelque part, ne fait pas prendre conscience aux gens. Et c'est pour ça que, par exemple, il y a un artiste contemporain que je trouve incroyable qui a voulu amener la situation jusqu'à nous.

  • Speaker #0

    Comment il s'appelle, pardon ?

  • Speaker #1

    C'est Olafur Eliasson. Et en 2014... ou plus ou moins en 2015, je ne sais plus, il a fait une installation, il a ramené 80 tonnes de glace du Groenland, qu'il a disposé des blocs plus ou moins ronds, mais très taillés de manière brute, en cercle. Il y en avait 12, il me semble, pour justement symboliser une horloge. Et il les a laissés fondre. Donc vraiment, ce passage du temps, et que si on ne fait rien... Voilà, le temps est compté, en fait. Et je trouve que c'est vachement beau d'avoir fait ça, de ramener la chose à nous, vraiment. Et en plus, il me semble que c'était pour un événement de la COP21.

  • Speaker #0

    Non mais ouais, c'est fou. Sachant que cette œuvre est contemporaine à nous, et que même avec le photographe que tu as évoqué plus tôt, il y a un peu ce truc où en écologie, bon, peut-être aussi dans d'autres domaines, je pense, quand des scientifiques qualifiés vont dire que c'est pas possible, que c'est trop tard et qu'on va tous crever, clairement, on ne les croit pas. Il y a une réelle crise de la croyance. Et même avec l'art, en l'occurrence la photographie, lorsque l'on montre des espèces en danger, certaines personnes ne vont pas du tout s'alarmer. Certaines et certaines seront limite sceptiques. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clair. Et après, il ne faut pas non plus perdre espoir totalement, parce que parfois ça marche. Comme par exemple les reporters de la guerre du Vietnam, où quand ils ont pris des photos sur les champs de bataille, ils ont été invités par l'armée pour prendre ces photos. et quand ils sont revenus avec et que les photos ont été publiées, le public a réagi de manière très virulente et s'est rendu compte de l'impact de cette guerre sur la population et le public a commencé à s'insurger. Donc quelque part, parfois ça marche. Pas toujours, mais... Bon voilà, après, il y a aussi cette chose que la photographie documentaire... peut être parfois contestable en termes de formes d'art. Les artistes, après, dans un terme global, qu'ils soient photographes, documentaires, qu'ils soient peintres, qu'ils fassent de la sculpture, etc., ça dépend. Il y en a qui appuient le fait qu'ils ont un idéal écologique, d'autres le font sans trop l'appuyer. Et je trouve que c'est important de dire quand l'artiste a vraiment cette volonté. de démontrer quelque chose, d'être dans une démarche écologique, de vouloir être un artiste engagé et donc un artiste écologique, écologiste. Ils ne le sont pas tous et donc c'est très difficile d'essayer lequel l'est et lequel ne l'est pas.

  • Speaker #0

    Ça fait un peu lien avec une question que je voulais te poser également. C'était justement, est-ce que l'art, après là je ne te parle pas uniquement de l'art contemporain, même si ça résonne plus aujourd'hui j'ai l'impression, mais est-ce que l'art peut contribuer à inspirer des changements écologiques, enfin des changements concrets qui va dans le sens de la préservation de la nature, dans le réveil des consciences écologiques ? Est-ce qu'il y a vraiment des exemples où une différence se fait par rapport à cela ?

  • Speaker #1

    Je dirais que c'est comme avec tout, c'est-à-dire que c'est... Une démarche artistique, si elle se veut militante, c'est un pari. Et comme par exemple, de nos jours, on entend parler des écologistes qui vont dans les musées et qui balancent de la soupe sur, dernièrement, la Joconde, par exemple. Il y en a qui sont d'accord, il y en a qui ne sont pas d'accord. Quel est le lien avec l'art ? C'est un pari et c'est juste... Quelque part, il faut provoquer quelque chose. Un artiste cherche à représenter, un artiste cherche peut-être à juste donner sa sensibilité, un artiste veut provoquer, ça dépend de la volonté de l'artiste, ça dépend aussi de comment on accueille. l'oeuvre qu'il ou elle produit, c'est très compliqué je trouve. En tout cas, si on ne veut pas partir dans des généralités, on peut se focaliser sur des artistes qui vraiment concrètement se considèrent comme engagés, comme par exemple Joseph Beuys, qui avait toute une action, enfin une installation très intéressante, mais je ne rentrerai pas dans le détail, mais ce que je trouve intéressant, c'est ce qu'il dit, c'est que chaque version de l'humanité humaine, même... éplucher une patate, c'est une œuvre d'art, du moment que c'est un acte conscient. Et par exemple, il y a une autre artiste, Agnès Dénès, je ne sais pas exactement si je le prononce bien, mais elle a fait une action choc que je trouve incroyable, c'est qu'elle a acheté une parcelle de terrain sur un morceau de territoire hyper convoité à New York, et elle y a planté du blé. Et elle voulait dénoncer justement cette folie en fait de... Il y a certains terrains qui sont plus prisés et pourtant sur cette petite parcelle, on peut faire autant de blé et elle dénonce vraiment la famine dans le monde. Enfin, l'absurdité en fait de l'économie par rapport à juste la nature et les besoins naturels de l'homme.

  • Speaker #0

    Mais ouais, c'est sûr. Après, je ne vais pas rentrer dans les détails. Mais en agriculture urbaine, on dit souvent que c'est compliqué de produire, car les sols sont pollués. Mais d'un côté, si on n'essaie pas, on ne saura jamais. Puis on peut faire aussi dans la mesure des possibles. Ce ne sera jamais ce qu'on imagine, donc de la production de masse à l'intérieur des villes, mais on pourra toujours nourrir des personnes dans le besoin, même si ce n'est pas beaucoup. Et clairement, oui, comme tu disais, c'est absurde, ces espaces privatisés, à des prix de zinzin en plus.

  • Speaker #1

    Oui, c'est clair. Et je trouve que les artistes sont là aussi pour... un peu assoufflé, quoi, pour permettre de donner un peu de... un peu de rigoler du pathétique de cette situation, de vraiment, genre, nous dire c'est ridicule Il y a un autre artiste qui, par exemple, a réuni un G5 des interespèces, et je trouve ça extrêmement drôle, il rassemble minéral, végétal, animal, humain et intelligence artificielle. Et il se moque. concrètement du G20. Aujourd'hui, on peut se demander à quoi ça sert si on y invite des gens qui viennent des sociétés ultra-capitalistes et qui défendent l'écologie alors qu'ils la massacrent.

  • Speaker #0

    C'est les mêmes qui vont venir en avion pour la conférence, par exemple.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    C'est une sorte d'ironie qu'il y a. C'est limite sarcastique. J'ai l'impression qu'il y a une véritable crise dans ce que ça représente. ce G20 et le fait qu'ils ne prennent pas de véritables décisions concrètes, ils sont limite insensibles. Je ne sais pas ce que tu en penses. Oui,

  • Speaker #1

    et je trouve que vraiment le lien entre l'art et l'écologie, c'est ce lien que voit l'artiste en tant qu'homme envers la nature et le fait qu'il y a cette recherche de lien juste. Par exemple, ça me fait penser à une artiste qui, bon, ça paraît un peu fou, mais elle s'appelle Marion Laval-Jantet et elle a fait une performance qui s'appelle Que le cheval vive en moi, où elle s'injecte du sang de cheval. Ah oui ? Oui. Où c'est vraiment, bon, c'est poussé à l'extrême, mais c'est cette idée de vouloir justement voir l'homme et la nature faire communion. Ou bien, il y a encore Hermann De Vries. qui lui décide de ne pas mettre de majuscule à son prénom, à son nom de famille, parce qu'il considère que l'homme n'a pas à se valoriser par rapport à la nature, et il se base plutôt sur une sorte de philosophie orientale pour trouver une espèce de démarche contemplative dans le positionnement de l'homme au sein de la nature.

  • Speaker #0

    Je me disais, dans ma tête, quand tu disais ça, c'était qu'il voulait supprimer les majuscules pour pas que ça prenne trop d'encre sur un crayon ou même sur une impression, mais... Non, c'est pas du tout par rapport à ça, ok.

  • Speaker #1

    C'est vraiment idéologique, plutôt, et c'est marrant, parce que... Il y a ces artistes contemporains qui sont de plus en plus engagés, mais il y en a quelques bouts, déjà, par-ci, par-là, dès le XIXe siècle, par exemple, Rosa Bonheur, qui est une peintre incroyable, animalière, qui... qui regarde, qui vraiment se tourne vers les animaux, qui a cette tendresse et dans son regard qui fait de la sculpture, de la peinture, qui les représente de la manière la plus véridique qu'elles veulent transmettre. Et d'ailleurs, artiste incroyable qui a dû avoir une dérogation auprès de la préfecture de police pour pouvoir porter un pantalon, pour pouvoir mieux se déplacer et observer les animaux.

  • Speaker #0

    La proto-histoire de l'écoféminisme.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, c'est clair. Et elle, elle disait que l'homme, en fait, il vaut rien par rapport à l'animal, enfin quelque chose dans ce sens-là. Et Rosa Bonheur, aujourd'hui, on peut avoir une sorte de lecture un peu féministe de cette personne. C'est un peu compliqué de dire ça pour cette époque-là, mais aujourd'hui, on peut parler effectivement d'écoféminisme par rapport à Anna Mandietta. qui dans les années 60 fait des performances qui sont enragées, qui témoignent vraiment de quelque chose de puissant, où en fait elle, elle décide de mettre en scène son corps recouvert de plumes de poules, de sang de poules, et dont en fait elle vient elle-même de l'égorger, donc elle prend vraiment en main la chose elle-même. Et elle compare en fait ce corps animal au corps féminin.

  • Speaker #0

    Pardon à tous les véganes d'ailleurs.

  • Speaker #1

    Ouais, les performances choc forcément vont dans le lard pour faire une blague pas très végane aussi. Mais en tout cas, par exemple, il y a aussi cette performance touchante de Joseph Boyce qui va en Amérique. Joseph Boyce, artiste allemand qui a servi dans la Luftwaffe, qui a été abattu, retrouvé par des gens et puis mis dans du feutre et de la graisse pour recourir de ses blessures. Et ça l'a vachement atteint, il est devenu assez militant je dirais. Et quand il est parti... Aux États-Unis, pour cette performance, il a décidé de ne pas du tout vouloir voir le pays, de se cacher dans son tissu de feutre jusqu'à la galerie et de s'enfermer pendant, je ne sais plus, je crois que c'était une semaine, avec un coyote sauvage. Il prend ce risque et il est là, il s'y met à 100%. Justement, j'appuie d'autant plus que vraiment, les artistes prennent des risques, non seulement stylistiques, mais aussi... corporel.

  • Speaker #0

    Après je vois, enfin je pourrais voir des personnes venir en disant genre oui non mais les coyotes ça va c'est effectivement des petits chiens. En vrai c'est pas un puma mais je pense que comme tu disais si c'est une semaine sans manger ou vraiment dans une même pièce avec un animal, l'animal va commencer à avoir faim donc c'est ouais c'est comme tu dis c'est une véritable prise de risque et enfin de montrer ça quoi.

  • Speaker #1

    Après ils mangeaient je pense, je crois qu'ils mangeaient deux choses séparées effectivement mais ils cohabitaient ensemble. C'est incroyable. Et je crois qu'au bout d'un moment, ils ont commencé à devenir mes potes.

  • Speaker #0

    Moi et mon pote coyote.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, toujours Joseph Boyce, dans les années 80, pour la Biennale de Kassel, qui est une manifestation artistique qui a lieu tous les quelques années, a planté des colonnes de basalte dans le sol. Et il voulait faire participer le spectateur en remplaçant ses colonnes de basalte par des arbres. Et en fait, c'était vraiment la volonté de faire disparaître petit à petit les colonnes de basalte et de les remplacer par l'arbre. Et vraiment, cette idée, ce serait pur et très simple de vouloir faire du monde une grande forêt et bâtir les villes et les environnements comme des forêts. Ça me fait penser au Land Art. Et le LendArt, c'est typiquement des artistes qui prennent la nature, l'art, et qui font un mix des deux, et juste qui n'utilisent pas des pinceaux, de l'appareil photographique, ils utilisent la nature. pour créer de l'art. Par exemple, Robert Smithson avec sa spiral jetty du côté de la Californie, il me semble, qui a créé comme un espèce d'îlot qui fait une spirale en fait, avec des cailloux, enfin, quelque chose vraiment massif pour que ça puisse tenir dans le temps. C'était dans les années 80, aujourd'hui, on la voit plus.

  • Speaker #0

    C'est quand même récent, comme si ça datait... Je veux dire, il y a des vestiges qu'on a de l'Antiquité qui sont encore présents, mais là, ça n'a pas duré. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clair. Et on pourrait se dire, bon, il a mis des cailloux au bord de la mer, forcément, ça ne se verra plus. Mais il a fait en sorte à ce que ce soit quelque chose qui se voulait durable à la base. Et ce n'est pas resté. Il y a plein d'œuvres de Land Art. Ça arrive, par exemple, Walter de Maria, qui a placé des... pareil, des colonnes de fer ou de, je ne sais plus, d'un métal, dans un champ qu'il a eu, tout simplement, qu'il a privatisé, etc. Où ces colonnes étaient censées attirer des tonnerres, en fait, des éclairs. Des tonnerres, oui. C'est ça, des paratonnerres, et tout calculé, etc. pour que ce soit tous au même niveau. Il y avait des colonnes qui étaient plus grandes que d'autres, etc. Et aujourd'hui, bah... Pareil, ça a été dégradé par le temps et ça ne marche plus.

  • Speaker #0

    Après, d'une manière un peu triste, que ce soit pour les cailloux dont tu me parlais, l'œuvre qui a été dégradée, qui n'est plus présente, ou alors les paratonnerres, c'est que finalement, même dans cette tristesse, ça prouve le point de ces artistes par rapport à ce rapport que l'homme a avec la nature. C'est-à-dire qu'on a des choses qui sont belles. enfin pas forcément belles mais qui sont aussi utiles dans l'environnement et parfois elles disparaissent et on est triste de perdre un peu ce patrimoine qui est aussi important et c'est un peu ça j'ai l'impression, enfin quand tu m'expliques ce que représente le land art, même si c'était pas le but premier des artistes, c'est que au final c'est exactement ça le point ça disparaît, ça ne reste pas éternellement la planète c'est un peu pareil l'environnement et l'écologie c'est un peu la même chose tout à fait et dans l'autre sens,

  • Speaker #1

    ce qui est extrêmement marrant c'est que Il y a des artistes comme Christo et Jeanne Claude qui vont recouvrir l'art récemment, l'année dernière je crois, qui recouvrent l'arc de triomphe d'une bâche de tissu. Et les gens s'insurgent de qu'est-ce que c'est que cette horreur à l'art contemporain, etc. Et qu'en fait, effectivement, c'est du land art, donc ça part aussi de cette idée d'un art éphémère. Mais on voit que là, on porte plus d'importance à ce qu'il y a en dessous de cette nouvelle installation, c'est-à-dire l'Arc de Triomphe avec les reliefs de François Rude, etc. Et on ne regarde pas la création contemporaine, on ne s'y intéresse pas. Et pourtant, la création contemporaine, ça nous dit quelque chose de la société d'aujourd'hui aussi.

  • Speaker #0

    Oui, c'est complètement la société qui s'effondre. On retrouve d'ailleurs cette idée dans la collapsologie, il me semble.

  • Speaker #1

    Et je voulais juste rajouter que c'est ce rapport à l'art et l'environnement. Il y a un rapport très compliqué, c'est-à-dire qu'on sacralise l'art. Et pour revenir encore une fois aux gens qui balancent des soupes sur les œuvres, tant qu'il y a une vitre, je ne sais pas, mais on s'insurge plus contre la possible destruction d'une œuvre d'art qui, certes, est inestimable. Mais après, effectivement, il y a des raisons plus intéressantes. Il y a des questions écologiques qui sont plus intéressantes.

  • Speaker #0

    C'est vrai que quand tu te retiens, que tu pèses un peu tes mots, il ne sort rien de l'art. Si tu dis des choses qui vont être retenues contre toi, tu vas être placristée. Ne t'inquiète pas, je n'ai pas encore assez d'écoute pour ça.

  • Speaker #1

    Non, mais ce n'est pas ça. C'est vrai qu'en tant que faisant partie du monde de la culture et de la volonté de conservation des œuvres d'art, ça me fait peur effectivement de voir des oeuvres qui peuvent être mises en danger. Après, effectivement, on met les moyens pour les protéger. Donc, si elles sont mises en danger de cette manière-là, c'est-à-dire qu'il y a une vitre, certes, ça coûte de l'argent pour l'entretien, etc. Il y a toute une chose qui s'engraine par derrière. Et effectivement...... Et je comprends les écologistes qui veulent avoir leur voix qui est entendue. Et je comprends aussi leur frustration de voir les gens s'intéresser plus à l'art.

  • Speaker #0

    à l'art du passé surtout que de s'intéresser aux problématiques d'aujourd'hui et de regarder vers le futur d'ailleurs oui par rapport au futur ça me fait penser il me semble qu'il y a des oeuvres justement qui parlent pas peut-être spécifiquement de collapsologie ou d'effondrement mais en tout cas de ce qui se passerait dans le futur dans l'après par rapport à ça,

  • Speaker #1

    il y a des oeuvres qui en parlent quand même je trouve alors par exemple par rapport à la collapsologie, c'est vraiment ce courant de pensée qui prédit à quoi amènera la crise écologique. Moi, ça me fait penser à un artiste, Piotr Kowalski, qui a créé un... On pourrait dire que c'est une sculpture cinétique, parce que cinétique qui implique le mouvement. Et en fait, c'est un cube transparent qui... inclut des petites billes qui représentent un humain. Et en fait, le cube de la population, comme il l'appelle, peut contenir 10 milliards, il me semble, de billes. Je ne sais plus combien on est sur la planète, 7 milliards, il me semble.

  • Speaker #0

    On a dépassé ce chiffre depuis longtemps.

  • Speaker #1

    Voilà. Et en fait, le cube peut contenir 10 milliards de billes, une bille étant un humain. Et en fait, en bas, on a un tube qui enlève certaines billes. par rapport aux morts et par le dessus on a un autre tube qui alimente de nouvelles pilles. Et en fait toute cette œuvre est reliée aux statistiques en fait et vraiment aux données réelles des naissances et des morts. Donc c'est une œuvre très compliquée, vraiment qui tient de l'ingénierie et qui témoigne de vraiment d'une manière extrêmement visuelle que... ce cube ne peut contenir qu'une certaine quantité de billes. Donc au bout d'un moment, on ne pourra plus arriver. Et malheureusement, aujourd'hui, je ne sais pas combien on est de milliards sur la planète, mais le cube de la population, de toute façon, ne fonctionne plus. Parce qu'il y a eu de la poussière dedans et il ne peut plus fonctionner. Pour des raisons de conservation, il ne fonctionne plus.

  • Speaker #0

    D'où l'effondrement, oui. Est-ce que tu faisais lien avec la collapsologie ? Le cube, soit il passe cassé, ce serait un peu l'allégorie. de la planète, même si c'est quand même vu grossièrement. Mais voilà, ça va se casser la gueule parce que c'est pas assez, il est foutu.

  • Speaker #1

    Ce qui est d'autant plus marrant, c'est qu'il n'avait pas prévu que le cube n'allait plus marcher. Lui, il pensait vraiment qu'il allait continuer et être un témoin un peu de l'avancement de notre population. Et en fait, le cube ne fonctionne plus comme notre planète, en quelque sorte.

  • Speaker #0

    C'est un peu la voix de la panique, là.

  • Speaker #1

    Ouais. Ce qui est marrant aussi, c'est que tu as d'autres artistes qui engendrent de nouveaux termes, comme la solastalgie, qui en fait est une détresse psychologique qui est assimilée à une forme de deuil par rapport à quelque chose qu'on a perdu ou qui ne pourra jamais être réparé. Voilà, c'est quelque chose qui tient presque de l'éco-anxiété, mais c'est pas vraiment ça.

  • Speaker #0

    Oui, ça me fait penser un peu à ce sentiment général où on a une grosse tendance à idéaliser la nature d'avant, des forêts vierges d'antan. On parle même de nature originelle, alors qu'en vérité, c'était pas tellement le cas. C'est un peu des idées qui héritent directement du christianisme avec le jardin d'Éden, ou même avant, chez les grecs, avec le jardin des Hespérides. C'est marrant, ouais, la solastos... ça fait sens j'ai l'impression que ça fait beaucoup lien avec les co-anciétés et que c'est quelque chose que même aujourd'hui même si c'est des projections vers le futur c'est des choses que de plus en plus de personnes moi,

  • Speaker #1

    on ressent ouais et en fait il y a un truc ça me fait penser encore à un autre artiste qui se concentre sur des odeurs de fleurs qui n'existent plus Et ça s'appelle Resurrecting the Sublime. Et je trouve que c'est vraiment cette idée justement du jardin d'Éden, d'un truc inconnu, où par exemple les œuvres, que ce soit des œuvres de Jérôme Bosch, etc., où il peint le jardin d'Éden, etc., où il représente des fleurs qui existent réellement. Après, je n'ai pas trop d'exemples, mais il y a sûrement des... plantes qui ont été inventées, etc. Mais souvent, on se rapporte à des choses qui existent. Et le fait que cet artiste-là aille vers un truc, vers une chose qu'on ne connaît pas, je trouve que c'est... Il y a quelque chose qui tient de la poésie, de l'inconnu et du sublime. Ça renvoie à cette idée du XIXe siècle, où le romantisme, quand il naît, il naît à cause d'un mouvement allemand qui s'appelle Sturm und Drang, qui veut dire tempête et sentiment, je crois. Et c'est cette idée qui se développe ensuite avec un autre philosophe. C'est le sublime. Le sublime, c'est cette idée que l'homme est tout petit face à la nature. Et que vraiment, ça se caractérise franchement dans les œuvres de Kaspar David Friedrich, où on voit cet homme devant une mer de nuages. Et je ne sais pas, je pense que... Tout spectateur, quand il voit ce tableau, il comprend ce que ça veut dire. C'est vraiment quelque chose de... Même si l'homme est au sommet, il est rien.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, ça m'amène à ma dernière question. Premier après, ça, je te lâche. Mais est-ce que tu penses que l'art peut sauver la nature ?

  • Speaker #1

    Ce qui, je trouve, est assez révélateur, c'est que... L'art en soi, qu'il soit sonore avec la musique, qu'il soit visuel, graphique, avec tous les arts visuels, qu'il soit littéraire avec la poésie, les romans, l'art en général n'est pas quelque chose d'essentiel en soi, mais l'humain s'y accroche quand même. Moi j'essaye de vouloir aller vers un métier qui est dans la conservation du patrimoine. et on veut conserver tout ça, on veut avoir la trace, on s'accroche à quelque chose qui... Pour moi, j'ai une sensibilité où je dirais toujours qu'il y a quelque chose de poétique dans l'art, même qu'il soit aussi loin de la poésie qu'il le veuille l'être, l'art est quelque chose qui exprime l'intériorité, je trouve. Et en fait... Quand on repense à tout ce qu'on a dit, l'intériorité c'est quoi ? C'est aussi être au sein de la nature, en phase avec la nature, et se rendre compte qu'on est quelque chose parmi tout un univers, un environnement. Et cette intériorité, elle se met au milieu de tous les aspects de la nature, des animaux, de tout, et que l'humain fait partie de la nature, qu'il se considère. au dessus ou en dessous d'elle. L'art est un témoignage de l'humain et donc l'art a forcément un lien envers la nature et je trouve qu'il faut utiliser l'art pour dénoncer des choses, pour militer, pour dire des choses, toujours.

  • Speaker #0

    Donc c'est pas tellement l'art qui sauve la nature, c'est plus ce que l'impact que va créer une oeuvre qu'on aura conservée. car il faut la conserver, nous nous montrera qui nous provoquera de nous et qui nous poussera à la sauver ouais je pense,

  • Speaker #1

    je pense que c'est vraiment cette idée de conservation si on a ça envers les oeuvres d'art je sais pas, on devrait avoir ça envers la nature tout simplement, ça devrait être beaucoup plus dîné que de juste enfin c'est ce regard qu'on a envers l'art c'est quelque chose c'est de l'art, c'est de l'art du passé on prend ça vraiment comme du patrimoine et Pourtant, on n'a pas ce regard-là envers la nature. Et je pense que l'art doit servir à la cause de la nature. Et je défends l'art écologique, tout simplement, qu'il se développe. Je trouve que c'est vraiment hyper intéressant de voir des artistes qui sont engagés et qui militent pour quelque chose.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Merci de m'avoir donné ton temps.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Je vous remercie pour votre écoute de cet épisode légèrement plus long que ce précédent. J'espère que le format vous a plu, que vous avez appris des choses, et surtout passé un bon moment. Il y aura d'autres épisodes de ce type, afin de vous faire découvrir l'histoire de l'environnement avec d'autres voix que la mienne. Il naît de si bonne compagnie qui ne se sépare, et en attendant les prochains épisodes, je vous dis au revoir. Et à très vite sur Environ.

Chapters

  • Présentation

    00:48

  • Premiers mouvements au XIXème siècle

    02:21

  • Théodore Rousseau

    04:51

  • Au XXème siècle

    07:48

  • Et la photographie dans tout ça ?

    11:25

  • Eliott Porter

    17:41

  • La contribution de l'art dans l'éveil des consciences

    23:15

  • Rosa Bonheur et éco-féminisme

    29:26

  • Joseph Boyce et Land Art

    31:25

  • Art contemporain et collapsologie

    37:26

  • L'art peut-il sauver la nature ?

    45:14

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Description

Aujourd'hui c'est nouveau format d'épisode ! 🌱 Dans cet entretien avec Eva, diplômée de master en histoire de l'art contemporain, on va voir que ce dernier joue un rôle clé dans la redéfinition de notre rapport à l’environnement, en repensant les liens entre humanité et nature à travers des pratiques variées et parfois engagées.🖼️🌳 J'espère que ce nouveau format vous plaira et vous souhaite une excellente écoute ! 🐙 (Désolé d'avance pour la voix malade d'intro et outro, bientôt l'hiver, tout ça...)

Instagram : @environ_podcast

Vignette : Paysage rocheux dans la Elbsandsteingebirge, Caspar David Friedrich, 1823, Palais du Belvédère.

Crédits musicaux : 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour ou bonsoir à tous et à toutes, et bienvenue sur Environ, le podcast sur l'histoire de l'environnement. Aujourd'hui, je voulais vous présenter avec cet épisode un nouveau type de format qui est celui de l'échange. Le principe étant de faire intervenir une personne, universitaire, professionnelle ou passionnée, sensible et ou mieux informée, sur une thématique concernant l'histoire environnementale. Et aujourd'hui, le thème sera autour du rapport entre l'histoire de l'art contemporain et l'environnement, la question écologique. Du coup, je ne vous en dis pas plus, et allons ensemble découvrir ce nouvel environ. Salut ! Salut ! Est-ce que tu pourrais te présenter un petit peu ?

  • Speaker #1

    Ouais. Je suis Eva Pchelka, j'ai fait un parcours classique en histoire de l'art. donc une licence, puis un master. J'ai écrit un mémoire sur un artiste contemporain qui fait majoritairement de la peinture abstraite. Et là, je prépare tout doucement le concours de conservateur du patrimoine.

  • Speaker #0

    Ok. Et c'est quel artiste du coup ?

  • Speaker #1

    C'était Saito Mbli, c'est un artiste américain qui a émigré en Italie dans les années 60. qui est mort très récemment, en 2011, il me semble.

  • Speaker #0

    Je voulais te demander, du coup, c'est quoi ton rapport à l'environnement et ou à l'histoire de l'environnement, à l'écologie, à la nature, etc. Enfin, tu as le droit de partir depuis que tu étais tout petite, il n'y a aucun souci, mais c'est quoi ton rapport à cela ?

  • Speaker #1

    Le rapport à la nature, à l'écologie, etc., je pense que ça part de quelque chose qui est vraiment interne. et qui part d'un sentiment assez poétique et juste d'un regard vers la nature. Je pense que ça part de là et puis je me dis, quand j'ai voulu écrire mon mémoire, j'ai hésité entre justement l'artiste dont je t'ai parlé et l'art écologique et tout plein d'artistes qui sont liés à la nature ou à l'écologie de près ou de loin.

  • Speaker #0

    À partir du XIXe siècle, est-ce qu'il y a des mouvements où... des artistes qui vont faire comme une sorte de scission et offrir une nouvelle représentation de la nature plus réelle ?

  • Speaker #1

    On peut voir déjà une sorte de changement à partir de la révolution, parce que la révolution française engendre des révolutions un peu partout, et ça engendre un changement de mentalité dans une globalité, c'est-à-dire qu'il y a... Il y a des changements dans l'art, il y a des changements en politique, en sociologie, etc. Je ne rentrerai pas trop dans les détails, mais on voit un changement de la volonté de l'homme de se placer face à la nature. On voit qu'avec la révolution, il y a eu ces changements sociaux, puis ça a entraîné tout simplement le progrès continuel. Au XIXe siècle, par exemple, on a plusieurs révolutions industrielles. Ces révolutions industrielles, on voit qu'elles changent grandement le regard des artistes sur l'art parce que, par exemple, le fait qu'il y ait des chemins de fer, les artistes peuvent prendre maintenant le train et aller au bord de la mer. Avant d'aller au bord de la mer, ils peuvent aller tout simplement un peu plus loin, c'est-à-dire de Paris. aller dans les banlieues parisiennes, par exemple, notamment Fontainebleau. Et on retrouve un groupe d'artistes qui sont généralement appelés les peintres de Barbizon, puisqu'ils se retrouvent dans cette forêt-là et ils y retrouvent quelque chose d'une nature intouchée, de quelque chose qui ne côtoie plus dans la société dans laquelle ils vivent. Parce que... Ils se situent à Paris. Leur commanditaire demande, par exemple, des portraits de société, etc. Il y en a qui font autre chose, bien sûr, mais il y a toute une part de peintres qui veulent représenter la modernité. Après, justement, il y a cette scission avec les peintres de Parapézons qui décident de partir et de... de retrouver cette nature qui est brute et intouchée.

  • Speaker #0

    Oui, donc il y a clairement une petite scission avec ces peintres que tu as cités, mais pas non plus un retour brut à la nature. Cela reste isolé. Mais d'ailleurs, il y en a d'autres des artistes dans cette veine, justement.

  • Speaker #1

    Alors, ce qui est marrant, en fait, avec... Je me permets de revenir un petit peu, mais... Par exemple, Théodore Rousseau, il ne se rendait pas compte à quel point ça le percuterait de voir cette nature brute. De là à créer une peinture qui est incroyable suite à une découverte de... d'arbres abattus au bord de la Seine en 1847. Cette Seine le bouleverse et il crée une peinture qui représente des arbres abattus et rien d'autre, vraiment juste de la nature. Il appelle ce tableau le massacre des innocents. C'est vraiment quelque chose de très puissant ce qui lui est arrivé. Ce choc vraiment artistique qu'il a voulu construire.

  • Speaker #0

    Ouais, donc avec Théodore Rousseau, il y a une idée d'aller au-delà de la simple représentation graphique de la nature. Il y a quasiment, presque, un début de sensibilité environnementale, en fait.

  • Speaker #1

    En fait, Théodore Rousseau est appelé par certains historiens de l'art comme le premier artiste écologiste, en tout cas, engagé pour l'environnement, parce qu'après, il milite contre l'abattage des arbres. Je ne sais plus exactement dans quelles circonstances. Il est très proche de Georges Sand. On peut parler d'une lutte. Après, je n'ai pas exactement les détails, mais déjà, cette peinture, elle révèle beaucoup, je trouve. Théodore Rousseau est une exception quand même à la règle. Et ses contemporains, notamment, on va juste citer les impressionnistes, Claude Monet, Sisley, tout cela représente... certes la nature, mais la nature d'une modernité, et qui est celle des loisirs, de l'oisiveté, du fait que les bourgeois vont à la mer et se prélassent. Mais il n'y a pas ce regard conscient envers la nature. Théodore Rousseau est vraiment une exception là-dedans. Et en fait, c'est plus la forme. Je dirais, dans le début de l'ère contemporaine, la nature, et même... Avant, on peut difficilement parler de conscience écologique, et donc juste la nature sert à la forme et non aux propos. Alors que les artistes contemporains, de plus en plus avec les questionnements écologiques qui naissent, vont plus se positionner sur une sorte de propos plutôt que de forme.

  • Speaker #0

    On avance un petit peu, mais le XXe siècle, c'est un peu le moment où le monde commence doucement à conscientiser, comme le faisait un peu Théodore Rousseau en tant que, entre guillemets, premier artiste écologique, les impacts violents de l'homme sur la nature, avec les révolutions industrielles, puis à la deuxième moitié du siècle, les débuts de la mondialisation. Mais du coup, quels artistes ou mouvements vont cristalliser, en quelque sorte, cette sorte de début de conscience écologique ? ...

  • Speaker #1

    Au XXe siècle, je dirais même au début du XXe siècle, ce qui est assez prenant dans les arts, c'est vraiment l'impact de la guerre. Il y a un retour au style, un retour vers un classicisme, mais en même temps une volonté de faire autre chose. Il y a aussi des artistes qui... En fait, il y a beaucoup de réactions par rapport à la guerre. plus que par rapport à une conscience écologique. La conscience écologique, je pense, viendra plus tard. Je ne pense pas qu'il y ait des artistes qui l'ont mis de côté. Il y a sûrement eu des artistes écologistes qui ont fait des choses, mais en tout cas au début du XXème siècle, c'est un petit peu compliqué. En tout cas, par la suite, il y a quelques exemples de premières artistes qui commencent réellement à se poser la question d'un impact et de comment présenter cet impact par les arts.

  • Speaker #0

    Après, c'est vrai que ça peut faire sens dans le sens où... J'en avais parlé dans le premier épisode d'Environ, je crois, que la naissance des combats écologiques, c'était avec les années 70, avec Rachel Carson qui écrit Le printemps silencieux, le premier Earth Day, même les mouvements hippies, ce qui était aussi contre la guerre au Vietnam. Et c'est vraiment les années 70 où la conscience, tu la vois. tu la sens totalement, mais je me posais la question justement, si auparavant, et c'est vrai que je ne pense pas que Théodore Rousseau, comme tu disais tout à l'heure, était beaucoup plus pionnier dans cela, et qu'il va y avoir une sorte de trou avant qu'on reprenne des idées écologiques, mais bien après la guerre, années 70, et reste quand les gens en prennent conscience.

  • Speaker #1

    Après, je ne pense pas que ça a été mis de côté. Je pense qu'il y a eu un impact plus fort de la guerre, et qui a remis au second plan les idées, justement les notions de faire attention à la nature, etc. Parce que... Justement, il y a cette guerre qui a bouleversé les gens dans tous les plans. Et oui, l'écologie, à ce moment-là, n'était pas... La nature devait servir à la guerre, tout simplement, je pense. C'était vraiment maîtriser l'environnement.

  • Speaker #0

    Le projet Manhattan avec les bombes nucléaires, maîtrise de la nature qui est au paroxysme.

  • Speaker #1

    Et on ne se pose pas la question de... Là, on se pose la question du maintenant et on ne se pose pas la question de l'après.

  • Speaker #0

    Mais justement, est-ce qu'il y a eu un médium artistique en particulier durant l'époque contemporaine qui porte de manière significative des idées écologistes ?

  • Speaker #1

    La photographie, par exemple. Au début, on a des photographies de portraits, de la recherche stylistique avec les pictorialistes au début du XIXe siècle. Puis... Aux États-Unis, on a un mouvement de photographie humaniste qui se tourne vers l'humain pour capturer vraiment la pauvreté dans les portraits de personnes qui en soi, ce ne sont pas des portraits mais une représentation de la société. Et par rapport à cette photographie humaniste, se développent plein d'autres courants avec la photographie du photojournalisme. la photographie documentaire. Et dans la photographie documentaire notamment, on a beaucoup d'engagement, parce que, comme dans le photojournalisme en soi, c'est de vouloir capturer des faits et de produire des émotions sur la personne qui regarde la photo. Parce que beaucoup de photographes sont reliés à des agences de photographie qui par la suite vont publier ces photographies dans des magazines comme Life par exemple. aux Etats-Unis. Et donc, ils recherchent justement à provoquer quelque chose chez le spectateur. On a par exemple, on pourrait citer William Eugene Smith qui, en fait, va se consacrer à démontrer on dirait aujourd'hui un scandale sanitaire, un scandale écologique. avec sa femme, ils vont publier un livre qui va être relayé par le magazine Life. Il y a des résonances et une envie de partage de ce genre de catastrophes. Il y a le développement du journal National Geographic qui prône justement, qui a cette volonté de publier de belles photographies. du monde et de montrer un monde en couleur qu'on ne voit pas dans nos sociétés où on vit dans des villes et on ne voit pas tout ce monde sauvage.

  • Speaker #0

    Ils ne vont pas gratter en dessous.

  • Speaker #1

    C'est ça. Mais pourtant, ils ont un engagement quand même. C'est vraiment l'engagement de vouloir préserver par l'image.

  • Speaker #0

    Et du coup, Eugene Smith, c'est à peu près vers quelles années qu'il commence à... Enfin, qu'il fait ses photographies, ses... Surtout fin 19e, début 20e ?

  • Speaker #1

    En fait, ils voient ça lors d'un voyage au Japon en 1970. Et en fait, c'est à la suite, il me semble, de 30 ans d'années de mauvaise gestion d'une usine pétrochimique où ils ont pollué des eaux et créé des dégâts. En fait, il a fallu 30 ans. pour qu'on s'en rende compte. William James Smith arrive dans les années 70 et est vraiment choqué par tout ça et décide personnellement de... faire un reportage.

  • Speaker #0

    Oui, ça rejoint ce que je disais plus tôt, dans le sens où ça tombe à point nommé, vu qu'on est pile dans les années 70, avec le début de la conscience écologique. Et William O.J. Smith, comme tu dis, il s'inscrit dans ce mouvement. Après, je ne sais pas si c'était sciemment, mais il voulait tout de même montrer les désastres que provoque une usine pétrochimique. Et comme tu disais, quand tu grattes derrière la ville, il y a ce truc un peu funeste.

  • Speaker #1

    Et d'autant plus, c'est marrant parce que la photographie, au début, Quand elle a commencé, elle a vraiment disrupté l'équilibre des arts, parce que c'est une nouvelle forme d'art. Et les photographes, au début, ne se sentaient pas légitimes d'être artistes. Il y en a qui ne se considéraient pas du tout comme artistes. D'autres ont cherché à prouver cette qualité stylistique importante de la photographie. Et en tout cas... La photo, c'est hyper intéressant d'un point de vue écologique parce que ça capture tout de suite, l'instantané, etc. Après, ça n'a pas toujours été le cas. On a eu l'instantané, je ne sais plus exactement, mais ça naît dans les années 1930, je crois, un truc comme ça, avec le Polaroïd, etc. Et en fait une photographie ne peut pas mentir entre guillemets.

  • Speaker #0

    Il n'y avait pas photoshop à l'époque.

  • Speaker #1

    Il n'y avait pas photoshop mais ils arrivaient quand même à faire des choses absolument fantastiques avec des photos montage faits à base de solarisation de la pellicule. Enfin je n'ai pas les termes exacts parce que je suis la spécialiste de la photographie. Mais vraiment du photoshopage brut. Vraiment avec la matière, limite du collage imagé avec la lumière.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que le podcast, du coup, c'est un art ? Non, je plaisante, je plaisante.

  • Speaker #1

    Tout peut être un art en soi, mais après, c'est la photographie qui, par son médium, est constamment remise en question. Et les photographes, ils oscillent entre l'art et la... prise de documentaire et notamment dans les années 70, il y a eu un mouvement des nouveaux topographes qui veulent représenter enfin capturer l'image de nouveaux paysages urbains, le paysage urbain contemporain en fait. Et voilà, dans les années 70, il y a eu une exposition par rapport à ça et il y a tout un groupe de photographes dans ce groupe.

  • Speaker #0

    C'est aussi un peu les débuts des reportages animaliers qu'on connaît aujourd'hui, avec National Geographic par exemple, où ils pouvaient prendre en photo des espèces d'oiseaux déjà rares.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, en parlant d'oiseaux, ça me fait penser à un autre photographe. Décidément, les photographes sont très représentatifs d'un début de la naissance de la conscience écologique dans les années 60. Oui,

  • Speaker #0

    du coup, oui.

  • Speaker #1

    Lui, dans les années 60. Il prend en photo des animaux dans une forêt dans Nouvelle-Angleterre. Et dans les années 60, son livre sort et c'est un succès énorme. Donc on lui commande d'autres photographies, mais dans des espaces qu'il connaît beaucoup moins. Il va en Basse-Californie, au Mexique, au Galapagos, etc. Et en fait, il porte son attention envers cette diversité écologique qui... bien en dehors de son environnement habituel. Et franchement, il s'implique beaucoup dans ce mouvement de la conservation de la nature. Et même dans une interview, il dit qu'il faut amener les gens à prendre la conservation de la nature au sérieux. Il dit que si un scientifique dit que l'air va devenir irrespirable, on ne le croit pas. Et effectivement, en ce moment, on arrive à respirer, donc on n'est pas inquiet.

  • Speaker #0

    C'est vraiment un peu comme les appels du GIEC, où c'est des cris au loup, quelqu'un qui appelle au loup, et personne ne nous croit parce qu'on dit, non, le changement climatique, finalement, regardez, il fait très froid, et on n'a pas la chaleur. Alors que oui, les scientifiques sont alarmés. C'est vrai que ça fait un peu écho à cela. C'est une sorte, on dirait aujourd'hui plus lanceur d'alerte, je crois. Mais ouais, c'est clairement dans la veine. Il a conscience que c'est bordel. personne n'écoute quoi.

  • Speaker #1

    C'est ça et vu que c'est dans un futur où on n'est pas, ça marche aussi par rapport à un placement géographique, c'est à dire que là, Elliot Porter il va dans d'autres habitats que lui-même ne côtoie pas, il prend en photo des animaux qu'il n'a pas l'habitude de voir tous les jours etc et s'il commence à dire que tel animal va peut-être être en voie d'extinction. C'est un peu pareil, c'est-à-dire que c'est trop loin. On ne s'en rend pas compte. Et même la photographie, quelque part, ne fait pas prendre conscience aux gens. Et c'est pour ça que, par exemple, il y a un artiste contemporain que je trouve incroyable qui a voulu amener la situation jusqu'à nous.

  • Speaker #0

    Comment il s'appelle, pardon ?

  • Speaker #1

    C'est Olafur Eliasson. Et en 2014... ou plus ou moins en 2015, je ne sais plus, il a fait une installation, il a ramené 80 tonnes de glace du Groenland, qu'il a disposé des blocs plus ou moins ronds, mais très taillés de manière brute, en cercle. Il y en avait 12, il me semble, pour justement symboliser une horloge. Et il les a laissés fondre. Donc vraiment, ce passage du temps, et que si on ne fait rien... Voilà, le temps est compté, en fait. Et je trouve que c'est vachement beau d'avoir fait ça, de ramener la chose à nous, vraiment. Et en plus, il me semble que c'était pour un événement de la COP21.

  • Speaker #0

    Non mais ouais, c'est fou. Sachant que cette œuvre est contemporaine à nous, et que même avec le photographe que tu as évoqué plus tôt, il y a un peu ce truc où en écologie, bon, peut-être aussi dans d'autres domaines, je pense, quand des scientifiques qualifiés vont dire que c'est pas possible, que c'est trop tard et qu'on va tous crever, clairement, on ne les croit pas. Il y a une réelle crise de la croyance. Et même avec l'art, en l'occurrence la photographie, lorsque l'on montre des espèces en danger, certaines personnes ne vont pas du tout s'alarmer. Certaines et certaines seront limite sceptiques. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clair. Et après, il ne faut pas non plus perdre espoir totalement, parce que parfois ça marche. Comme par exemple les reporters de la guerre du Vietnam, où quand ils ont pris des photos sur les champs de bataille, ils ont été invités par l'armée pour prendre ces photos. et quand ils sont revenus avec et que les photos ont été publiées, le public a réagi de manière très virulente et s'est rendu compte de l'impact de cette guerre sur la population et le public a commencé à s'insurger. Donc quelque part, parfois ça marche. Pas toujours, mais... Bon voilà, après, il y a aussi cette chose que la photographie documentaire... peut être parfois contestable en termes de formes d'art. Les artistes, après, dans un terme global, qu'ils soient photographes, documentaires, qu'ils soient peintres, qu'ils fassent de la sculpture, etc., ça dépend. Il y en a qui appuient le fait qu'ils ont un idéal écologique, d'autres le font sans trop l'appuyer. Et je trouve que c'est important de dire quand l'artiste a vraiment cette volonté. de démontrer quelque chose, d'être dans une démarche écologique, de vouloir être un artiste engagé et donc un artiste écologique, écologiste. Ils ne le sont pas tous et donc c'est très difficile d'essayer lequel l'est et lequel ne l'est pas.

  • Speaker #0

    Ça fait un peu lien avec une question que je voulais te poser également. C'était justement, est-ce que l'art, après là je ne te parle pas uniquement de l'art contemporain, même si ça résonne plus aujourd'hui j'ai l'impression, mais est-ce que l'art peut contribuer à inspirer des changements écologiques, enfin des changements concrets qui va dans le sens de la préservation de la nature, dans le réveil des consciences écologiques ? Est-ce qu'il y a vraiment des exemples où une différence se fait par rapport à cela ?

  • Speaker #1

    Je dirais que c'est comme avec tout, c'est-à-dire que c'est... Une démarche artistique, si elle se veut militante, c'est un pari. Et comme par exemple, de nos jours, on entend parler des écologistes qui vont dans les musées et qui balancent de la soupe sur, dernièrement, la Joconde, par exemple. Il y en a qui sont d'accord, il y en a qui ne sont pas d'accord. Quel est le lien avec l'art ? C'est un pari et c'est juste... Quelque part, il faut provoquer quelque chose. Un artiste cherche à représenter, un artiste cherche peut-être à juste donner sa sensibilité, un artiste veut provoquer, ça dépend de la volonté de l'artiste, ça dépend aussi de comment on accueille. l'oeuvre qu'il ou elle produit, c'est très compliqué je trouve. En tout cas, si on ne veut pas partir dans des généralités, on peut se focaliser sur des artistes qui vraiment concrètement se considèrent comme engagés, comme par exemple Joseph Beuys, qui avait toute une action, enfin une installation très intéressante, mais je ne rentrerai pas dans le détail, mais ce que je trouve intéressant, c'est ce qu'il dit, c'est que chaque version de l'humanité humaine, même... éplucher une patate, c'est une œuvre d'art, du moment que c'est un acte conscient. Et par exemple, il y a une autre artiste, Agnès Dénès, je ne sais pas exactement si je le prononce bien, mais elle a fait une action choc que je trouve incroyable, c'est qu'elle a acheté une parcelle de terrain sur un morceau de territoire hyper convoité à New York, et elle y a planté du blé. Et elle voulait dénoncer justement cette folie en fait de... Il y a certains terrains qui sont plus prisés et pourtant sur cette petite parcelle, on peut faire autant de blé et elle dénonce vraiment la famine dans le monde. Enfin, l'absurdité en fait de l'économie par rapport à juste la nature et les besoins naturels de l'homme.

  • Speaker #0

    Mais ouais, c'est sûr. Après, je ne vais pas rentrer dans les détails. Mais en agriculture urbaine, on dit souvent que c'est compliqué de produire, car les sols sont pollués. Mais d'un côté, si on n'essaie pas, on ne saura jamais. Puis on peut faire aussi dans la mesure des possibles. Ce ne sera jamais ce qu'on imagine, donc de la production de masse à l'intérieur des villes, mais on pourra toujours nourrir des personnes dans le besoin, même si ce n'est pas beaucoup. Et clairement, oui, comme tu disais, c'est absurde, ces espaces privatisés, à des prix de zinzin en plus.

  • Speaker #1

    Oui, c'est clair. Et je trouve que les artistes sont là aussi pour... un peu assoufflé, quoi, pour permettre de donner un peu de... un peu de rigoler du pathétique de cette situation, de vraiment, genre, nous dire c'est ridicule Il y a un autre artiste qui, par exemple, a réuni un G5 des interespèces, et je trouve ça extrêmement drôle, il rassemble minéral, végétal, animal, humain et intelligence artificielle. Et il se moque. concrètement du G20. Aujourd'hui, on peut se demander à quoi ça sert si on y invite des gens qui viennent des sociétés ultra-capitalistes et qui défendent l'écologie alors qu'ils la massacrent.

  • Speaker #0

    C'est les mêmes qui vont venir en avion pour la conférence, par exemple.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    C'est une sorte d'ironie qu'il y a. C'est limite sarcastique. J'ai l'impression qu'il y a une véritable crise dans ce que ça représente. ce G20 et le fait qu'ils ne prennent pas de véritables décisions concrètes, ils sont limite insensibles. Je ne sais pas ce que tu en penses. Oui,

  • Speaker #1

    et je trouve que vraiment le lien entre l'art et l'écologie, c'est ce lien que voit l'artiste en tant qu'homme envers la nature et le fait qu'il y a cette recherche de lien juste. Par exemple, ça me fait penser à une artiste qui, bon, ça paraît un peu fou, mais elle s'appelle Marion Laval-Jantet et elle a fait une performance qui s'appelle Que le cheval vive en moi, où elle s'injecte du sang de cheval. Ah oui ? Oui. Où c'est vraiment, bon, c'est poussé à l'extrême, mais c'est cette idée de vouloir justement voir l'homme et la nature faire communion. Ou bien, il y a encore Hermann De Vries. qui lui décide de ne pas mettre de majuscule à son prénom, à son nom de famille, parce qu'il considère que l'homme n'a pas à se valoriser par rapport à la nature, et il se base plutôt sur une sorte de philosophie orientale pour trouver une espèce de démarche contemplative dans le positionnement de l'homme au sein de la nature.

  • Speaker #0

    Je me disais, dans ma tête, quand tu disais ça, c'était qu'il voulait supprimer les majuscules pour pas que ça prenne trop d'encre sur un crayon ou même sur une impression, mais... Non, c'est pas du tout par rapport à ça, ok.

  • Speaker #1

    C'est vraiment idéologique, plutôt, et c'est marrant, parce que... Il y a ces artistes contemporains qui sont de plus en plus engagés, mais il y en a quelques bouts, déjà, par-ci, par-là, dès le XIXe siècle, par exemple, Rosa Bonheur, qui est une peintre incroyable, animalière, qui... qui regarde, qui vraiment se tourne vers les animaux, qui a cette tendresse et dans son regard qui fait de la sculpture, de la peinture, qui les représente de la manière la plus véridique qu'elles veulent transmettre. Et d'ailleurs, artiste incroyable qui a dû avoir une dérogation auprès de la préfecture de police pour pouvoir porter un pantalon, pour pouvoir mieux se déplacer et observer les animaux.

  • Speaker #0

    La proto-histoire de l'écoféminisme.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, c'est clair. Et elle, elle disait que l'homme, en fait, il vaut rien par rapport à l'animal, enfin quelque chose dans ce sens-là. Et Rosa Bonheur, aujourd'hui, on peut avoir une sorte de lecture un peu féministe de cette personne. C'est un peu compliqué de dire ça pour cette époque-là, mais aujourd'hui, on peut parler effectivement d'écoféminisme par rapport à Anna Mandietta. qui dans les années 60 fait des performances qui sont enragées, qui témoignent vraiment de quelque chose de puissant, où en fait elle, elle décide de mettre en scène son corps recouvert de plumes de poules, de sang de poules, et dont en fait elle vient elle-même de l'égorger, donc elle prend vraiment en main la chose elle-même. Et elle compare en fait ce corps animal au corps féminin.

  • Speaker #0

    Pardon à tous les véganes d'ailleurs.

  • Speaker #1

    Ouais, les performances choc forcément vont dans le lard pour faire une blague pas très végane aussi. Mais en tout cas, par exemple, il y a aussi cette performance touchante de Joseph Boyce qui va en Amérique. Joseph Boyce, artiste allemand qui a servi dans la Luftwaffe, qui a été abattu, retrouvé par des gens et puis mis dans du feutre et de la graisse pour recourir de ses blessures. Et ça l'a vachement atteint, il est devenu assez militant je dirais. Et quand il est parti... Aux États-Unis, pour cette performance, il a décidé de ne pas du tout vouloir voir le pays, de se cacher dans son tissu de feutre jusqu'à la galerie et de s'enfermer pendant, je ne sais plus, je crois que c'était une semaine, avec un coyote sauvage. Il prend ce risque et il est là, il s'y met à 100%. Justement, j'appuie d'autant plus que vraiment, les artistes prennent des risques, non seulement stylistiques, mais aussi... corporel.

  • Speaker #0

    Après je vois, enfin je pourrais voir des personnes venir en disant genre oui non mais les coyotes ça va c'est effectivement des petits chiens. En vrai c'est pas un puma mais je pense que comme tu disais si c'est une semaine sans manger ou vraiment dans une même pièce avec un animal, l'animal va commencer à avoir faim donc c'est ouais c'est comme tu dis c'est une véritable prise de risque et enfin de montrer ça quoi.

  • Speaker #1

    Après ils mangeaient je pense, je crois qu'ils mangeaient deux choses séparées effectivement mais ils cohabitaient ensemble. C'est incroyable. Et je crois qu'au bout d'un moment, ils ont commencé à devenir mes potes.

  • Speaker #0

    Moi et mon pote coyote.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, toujours Joseph Boyce, dans les années 80, pour la Biennale de Kassel, qui est une manifestation artistique qui a lieu tous les quelques années, a planté des colonnes de basalte dans le sol. Et il voulait faire participer le spectateur en remplaçant ses colonnes de basalte par des arbres. Et en fait, c'était vraiment la volonté de faire disparaître petit à petit les colonnes de basalte et de les remplacer par l'arbre. Et vraiment, cette idée, ce serait pur et très simple de vouloir faire du monde une grande forêt et bâtir les villes et les environnements comme des forêts. Ça me fait penser au Land Art. Et le LendArt, c'est typiquement des artistes qui prennent la nature, l'art, et qui font un mix des deux, et juste qui n'utilisent pas des pinceaux, de l'appareil photographique, ils utilisent la nature. pour créer de l'art. Par exemple, Robert Smithson avec sa spiral jetty du côté de la Californie, il me semble, qui a créé comme un espèce d'îlot qui fait une spirale en fait, avec des cailloux, enfin, quelque chose vraiment massif pour que ça puisse tenir dans le temps. C'était dans les années 80, aujourd'hui, on la voit plus.

  • Speaker #0

    C'est quand même récent, comme si ça datait... Je veux dire, il y a des vestiges qu'on a de l'Antiquité qui sont encore présents, mais là, ça n'a pas duré. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clair. Et on pourrait se dire, bon, il a mis des cailloux au bord de la mer, forcément, ça ne se verra plus. Mais il a fait en sorte à ce que ce soit quelque chose qui se voulait durable à la base. Et ce n'est pas resté. Il y a plein d'œuvres de Land Art. Ça arrive, par exemple, Walter de Maria, qui a placé des... pareil, des colonnes de fer ou de, je ne sais plus, d'un métal, dans un champ qu'il a eu, tout simplement, qu'il a privatisé, etc. Où ces colonnes étaient censées attirer des tonnerres, en fait, des éclairs. Des tonnerres, oui. C'est ça, des paratonnerres, et tout calculé, etc. pour que ce soit tous au même niveau. Il y avait des colonnes qui étaient plus grandes que d'autres, etc. Et aujourd'hui, bah... Pareil, ça a été dégradé par le temps et ça ne marche plus.

  • Speaker #0

    Après, d'une manière un peu triste, que ce soit pour les cailloux dont tu me parlais, l'œuvre qui a été dégradée, qui n'est plus présente, ou alors les paratonnerres, c'est que finalement, même dans cette tristesse, ça prouve le point de ces artistes par rapport à ce rapport que l'homme a avec la nature. C'est-à-dire qu'on a des choses qui sont belles. enfin pas forcément belles mais qui sont aussi utiles dans l'environnement et parfois elles disparaissent et on est triste de perdre un peu ce patrimoine qui est aussi important et c'est un peu ça j'ai l'impression, enfin quand tu m'expliques ce que représente le land art, même si c'était pas le but premier des artistes, c'est que au final c'est exactement ça le point ça disparaît, ça ne reste pas éternellement la planète c'est un peu pareil l'environnement et l'écologie c'est un peu la même chose tout à fait et dans l'autre sens,

  • Speaker #1

    ce qui est extrêmement marrant c'est que Il y a des artistes comme Christo et Jeanne Claude qui vont recouvrir l'art récemment, l'année dernière je crois, qui recouvrent l'arc de triomphe d'une bâche de tissu. Et les gens s'insurgent de qu'est-ce que c'est que cette horreur à l'art contemporain, etc. Et qu'en fait, effectivement, c'est du land art, donc ça part aussi de cette idée d'un art éphémère. Mais on voit que là, on porte plus d'importance à ce qu'il y a en dessous de cette nouvelle installation, c'est-à-dire l'Arc de Triomphe avec les reliefs de François Rude, etc. Et on ne regarde pas la création contemporaine, on ne s'y intéresse pas. Et pourtant, la création contemporaine, ça nous dit quelque chose de la société d'aujourd'hui aussi.

  • Speaker #0

    Oui, c'est complètement la société qui s'effondre. On retrouve d'ailleurs cette idée dans la collapsologie, il me semble.

  • Speaker #1

    Et je voulais juste rajouter que c'est ce rapport à l'art et l'environnement. Il y a un rapport très compliqué, c'est-à-dire qu'on sacralise l'art. Et pour revenir encore une fois aux gens qui balancent des soupes sur les œuvres, tant qu'il y a une vitre, je ne sais pas, mais on s'insurge plus contre la possible destruction d'une œuvre d'art qui, certes, est inestimable. Mais après, effectivement, il y a des raisons plus intéressantes. Il y a des questions écologiques qui sont plus intéressantes.

  • Speaker #0

    C'est vrai que quand tu te retiens, que tu pèses un peu tes mots, il ne sort rien de l'art. Si tu dis des choses qui vont être retenues contre toi, tu vas être placristée. Ne t'inquiète pas, je n'ai pas encore assez d'écoute pour ça.

  • Speaker #1

    Non, mais ce n'est pas ça. C'est vrai qu'en tant que faisant partie du monde de la culture et de la volonté de conservation des œuvres d'art, ça me fait peur effectivement de voir des oeuvres qui peuvent être mises en danger. Après, effectivement, on met les moyens pour les protéger. Donc, si elles sont mises en danger de cette manière-là, c'est-à-dire qu'il y a une vitre, certes, ça coûte de l'argent pour l'entretien, etc. Il y a toute une chose qui s'engraine par derrière. Et effectivement...... Et je comprends les écologistes qui veulent avoir leur voix qui est entendue. Et je comprends aussi leur frustration de voir les gens s'intéresser plus à l'art.

  • Speaker #0

    à l'art du passé surtout que de s'intéresser aux problématiques d'aujourd'hui et de regarder vers le futur d'ailleurs oui par rapport au futur ça me fait penser il me semble qu'il y a des oeuvres justement qui parlent pas peut-être spécifiquement de collapsologie ou d'effondrement mais en tout cas de ce qui se passerait dans le futur dans l'après par rapport à ça,

  • Speaker #1

    il y a des oeuvres qui en parlent quand même je trouve alors par exemple par rapport à la collapsologie, c'est vraiment ce courant de pensée qui prédit à quoi amènera la crise écologique. Moi, ça me fait penser à un artiste, Piotr Kowalski, qui a créé un... On pourrait dire que c'est une sculpture cinétique, parce que cinétique qui implique le mouvement. Et en fait, c'est un cube transparent qui... inclut des petites billes qui représentent un humain. Et en fait, le cube de la population, comme il l'appelle, peut contenir 10 milliards, il me semble, de billes. Je ne sais plus combien on est sur la planète, 7 milliards, il me semble.

  • Speaker #0

    On a dépassé ce chiffre depuis longtemps.

  • Speaker #1

    Voilà. Et en fait, le cube peut contenir 10 milliards de billes, une bille étant un humain. Et en fait, en bas, on a un tube qui enlève certaines billes. par rapport aux morts et par le dessus on a un autre tube qui alimente de nouvelles pilles. Et en fait toute cette œuvre est reliée aux statistiques en fait et vraiment aux données réelles des naissances et des morts. Donc c'est une œuvre très compliquée, vraiment qui tient de l'ingénierie et qui témoigne de vraiment d'une manière extrêmement visuelle que... ce cube ne peut contenir qu'une certaine quantité de billes. Donc au bout d'un moment, on ne pourra plus arriver. Et malheureusement, aujourd'hui, je ne sais pas combien on est de milliards sur la planète, mais le cube de la population, de toute façon, ne fonctionne plus. Parce qu'il y a eu de la poussière dedans et il ne peut plus fonctionner. Pour des raisons de conservation, il ne fonctionne plus.

  • Speaker #0

    D'où l'effondrement, oui. Est-ce que tu faisais lien avec la collapsologie ? Le cube, soit il passe cassé, ce serait un peu l'allégorie. de la planète, même si c'est quand même vu grossièrement. Mais voilà, ça va se casser la gueule parce que c'est pas assez, il est foutu.

  • Speaker #1

    Ce qui est d'autant plus marrant, c'est qu'il n'avait pas prévu que le cube n'allait plus marcher. Lui, il pensait vraiment qu'il allait continuer et être un témoin un peu de l'avancement de notre population. Et en fait, le cube ne fonctionne plus comme notre planète, en quelque sorte.

  • Speaker #0

    C'est un peu la voix de la panique, là.

  • Speaker #1

    Ouais. Ce qui est marrant aussi, c'est que tu as d'autres artistes qui engendrent de nouveaux termes, comme la solastalgie, qui en fait est une détresse psychologique qui est assimilée à une forme de deuil par rapport à quelque chose qu'on a perdu ou qui ne pourra jamais être réparé. Voilà, c'est quelque chose qui tient presque de l'éco-anxiété, mais c'est pas vraiment ça.

  • Speaker #0

    Oui, ça me fait penser un peu à ce sentiment général où on a une grosse tendance à idéaliser la nature d'avant, des forêts vierges d'antan. On parle même de nature originelle, alors qu'en vérité, c'était pas tellement le cas. C'est un peu des idées qui héritent directement du christianisme avec le jardin d'Éden, ou même avant, chez les grecs, avec le jardin des Hespérides. C'est marrant, ouais, la solastos... ça fait sens j'ai l'impression que ça fait beaucoup lien avec les co-anciétés et que c'est quelque chose que même aujourd'hui même si c'est des projections vers le futur c'est des choses que de plus en plus de personnes moi,

  • Speaker #1

    on ressent ouais et en fait il y a un truc ça me fait penser encore à un autre artiste qui se concentre sur des odeurs de fleurs qui n'existent plus Et ça s'appelle Resurrecting the Sublime. Et je trouve que c'est vraiment cette idée justement du jardin d'Éden, d'un truc inconnu, où par exemple les œuvres, que ce soit des œuvres de Jérôme Bosch, etc., où il peint le jardin d'Éden, etc., où il représente des fleurs qui existent réellement. Après, je n'ai pas trop d'exemples, mais il y a sûrement des... plantes qui ont été inventées, etc. Mais souvent, on se rapporte à des choses qui existent. Et le fait que cet artiste-là aille vers un truc, vers une chose qu'on ne connaît pas, je trouve que c'est... Il y a quelque chose qui tient de la poésie, de l'inconnu et du sublime. Ça renvoie à cette idée du XIXe siècle, où le romantisme, quand il naît, il naît à cause d'un mouvement allemand qui s'appelle Sturm und Drang, qui veut dire tempête et sentiment, je crois. Et c'est cette idée qui se développe ensuite avec un autre philosophe. C'est le sublime. Le sublime, c'est cette idée que l'homme est tout petit face à la nature. Et que vraiment, ça se caractérise franchement dans les œuvres de Kaspar David Friedrich, où on voit cet homme devant une mer de nuages. Et je ne sais pas, je pense que... Tout spectateur, quand il voit ce tableau, il comprend ce que ça veut dire. C'est vraiment quelque chose de... Même si l'homme est au sommet, il est rien.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, ça m'amène à ma dernière question. Premier après, ça, je te lâche. Mais est-ce que tu penses que l'art peut sauver la nature ?

  • Speaker #1

    Ce qui, je trouve, est assez révélateur, c'est que... L'art en soi, qu'il soit sonore avec la musique, qu'il soit visuel, graphique, avec tous les arts visuels, qu'il soit littéraire avec la poésie, les romans, l'art en général n'est pas quelque chose d'essentiel en soi, mais l'humain s'y accroche quand même. Moi j'essaye de vouloir aller vers un métier qui est dans la conservation du patrimoine. et on veut conserver tout ça, on veut avoir la trace, on s'accroche à quelque chose qui... Pour moi, j'ai une sensibilité où je dirais toujours qu'il y a quelque chose de poétique dans l'art, même qu'il soit aussi loin de la poésie qu'il le veuille l'être, l'art est quelque chose qui exprime l'intériorité, je trouve. Et en fait... Quand on repense à tout ce qu'on a dit, l'intériorité c'est quoi ? C'est aussi être au sein de la nature, en phase avec la nature, et se rendre compte qu'on est quelque chose parmi tout un univers, un environnement. Et cette intériorité, elle se met au milieu de tous les aspects de la nature, des animaux, de tout, et que l'humain fait partie de la nature, qu'il se considère. au dessus ou en dessous d'elle. L'art est un témoignage de l'humain et donc l'art a forcément un lien envers la nature et je trouve qu'il faut utiliser l'art pour dénoncer des choses, pour militer, pour dire des choses, toujours.

  • Speaker #0

    Donc c'est pas tellement l'art qui sauve la nature, c'est plus ce que l'impact que va créer une oeuvre qu'on aura conservée. car il faut la conserver, nous nous montrera qui nous provoquera de nous et qui nous poussera à la sauver ouais je pense,

  • Speaker #1

    je pense que c'est vraiment cette idée de conservation si on a ça envers les oeuvres d'art je sais pas, on devrait avoir ça envers la nature tout simplement, ça devrait être beaucoup plus dîné que de juste enfin c'est ce regard qu'on a envers l'art c'est quelque chose c'est de l'art, c'est de l'art du passé on prend ça vraiment comme du patrimoine et Pourtant, on n'a pas ce regard-là envers la nature. Et je pense que l'art doit servir à la cause de la nature. Et je défends l'art écologique, tout simplement, qu'il se développe. Je trouve que c'est vraiment hyper intéressant de voir des artistes qui sont engagés et qui militent pour quelque chose.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Merci de m'avoir donné ton temps.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Je vous remercie pour votre écoute de cet épisode légèrement plus long que ce précédent. J'espère que le format vous a plu, que vous avez appris des choses, et surtout passé un bon moment. Il y aura d'autres épisodes de ce type, afin de vous faire découvrir l'histoire de l'environnement avec d'autres voix que la mienne. Il naît de si bonne compagnie qui ne se sépare, et en attendant les prochains épisodes, je vous dis au revoir. Et à très vite sur Environ.

Chapters

  • Présentation

    00:48

  • Premiers mouvements au XIXème siècle

    02:21

  • Théodore Rousseau

    04:51

  • Au XXème siècle

    07:48

  • Et la photographie dans tout ça ?

    11:25

  • Eliott Porter

    17:41

  • La contribution de l'art dans l'éveil des consciences

    23:15

  • Rosa Bonheur et éco-féminisme

    29:26

  • Joseph Boyce et Land Art

    31:25

  • Art contemporain et collapsologie

    37:26

  • L'art peut-il sauver la nature ?

    45:14

Description

Aujourd'hui c'est nouveau format d'épisode ! 🌱 Dans cet entretien avec Eva, diplômée de master en histoire de l'art contemporain, on va voir que ce dernier joue un rôle clé dans la redéfinition de notre rapport à l’environnement, en repensant les liens entre humanité et nature à travers des pratiques variées et parfois engagées.🖼️🌳 J'espère que ce nouveau format vous plaira et vous souhaite une excellente écoute ! 🐙 (Désolé d'avance pour la voix malade d'intro et outro, bientôt l'hiver, tout ça...)

Instagram : @environ_podcast

Vignette : Paysage rocheux dans la Elbsandsteingebirge, Caspar David Friedrich, 1823, Palais du Belvédère.

Crédits musicaux : 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour ou bonsoir à tous et à toutes, et bienvenue sur Environ, le podcast sur l'histoire de l'environnement. Aujourd'hui, je voulais vous présenter avec cet épisode un nouveau type de format qui est celui de l'échange. Le principe étant de faire intervenir une personne, universitaire, professionnelle ou passionnée, sensible et ou mieux informée, sur une thématique concernant l'histoire environnementale. Et aujourd'hui, le thème sera autour du rapport entre l'histoire de l'art contemporain et l'environnement, la question écologique. Du coup, je ne vous en dis pas plus, et allons ensemble découvrir ce nouvel environ. Salut ! Salut ! Est-ce que tu pourrais te présenter un petit peu ?

  • Speaker #1

    Ouais. Je suis Eva Pchelka, j'ai fait un parcours classique en histoire de l'art. donc une licence, puis un master. J'ai écrit un mémoire sur un artiste contemporain qui fait majoritairement de la peinture abstraite. Et là, je prépare tout doucement le concours de conservateur du patrimoine.

  • Speaker #0

    Ok. Et c'est quel artiste du coup ?

  • Speaker #1

    C'était Saito Mbli, c'est un artiste américain qui a émigré en Italie dans les années 60. qui est mort très récemment, en 2011, il me semble.

  • Speaker #0

    Je voulais te demander, du coup, c'est quoi ton rapport à l'environnement et ou à l'histoire de l'environnement, à l'écologie, à la nature, etc. Enfin, tu as le droit de partir depuis que tu étais tout petite, il n'y a aucun souci, mais c'est quoi ton rapport à cela ?

  • Speaker #1

    Le rapport à la nature, à l'écologie, etc., je pense que ça part de quelque chose qui est vraiment interne. et qui part d'un sentiment assez poétique et juste d'un regard vers la nature. Je pense que ça part de là et puis je me dis, quand j'ai voulu écrire mon mémoire, j'ai hésité entre justement l'artiste dont je t'ai parlé et l'art écologique et tout plein d'artistes qui sont liés à la nature ou à l'écologie de près ou de loin.

  • Speaker #0

    À partir du XIXe siècle, est-ce qu'il y a des mouvements où... des artistes qui vont faire comme une sorte de scission et offrir une nouvelle représentation de la nature plus réelle ?

  • Speaker #1

    On peut voir déjà une sorte de changement à partir de la révolution, parce que la révolution française engendre des révolutions un peu partout, et ça engendre un changement de mentalité dans une globalité, c'est-à-dire qu'il y a... Il y a des changements dans l'art, il y a des changements en politique, en sociologie, etc. Je ne rentrerai pas trop dans les détails, mais on voit un changement de la volonté de l'homme de se placer face à la nature. On voit qu'avec la révolution, il y a eu ces changements sociaux, puis ça a entraîné tout simplement le progrès continuel. Au XIXe siècle, par exemple, on a plusieurs révolutions industrielles. Ces révolutions industrielles, on voit qu'elles changent grandement le regard des artistes sur l'art parce que, par exemple, le fait qu'il y ait des chemins de fer, les artistes peuvent prendre maintenant le train et aller au bord de la mer. Avant d'aller au bord de la mer, ils peuvent aller tout simplement un peu plus loin, c'est-à-dire de Paris. aller dans les banlieues parisiennes, par exemple, notamment Fontainebleau. Et on retrouve un groupe d'artistes qui sont généralement appelés les peintres de Barbizon, puisqu'ils se retrouvent dans cette forêt-là et ils y retrouvent quelque chose d'une nature intouchée, de quelque chose qui ne côtoie plus dans la société dans laquelle ils vivent. Parce que... Ils se situent à Paris. Leur commanditaire demande, par exemple, des portraits de société, etc. Il y en a qui font autre chose, bien sûr, mais il y a toute une part de peintres qui veulent représenter la modernité. Après, justement, il y a cette scission avec les peintres de Parapézons qui décident de partir et de... de retrouver cette nature qui est brute et intouchée.

  • Speaker #0

    Oui, donc il y a clairement une petite scission avec ces peintres que tu as cités, mais pas non plus un retour brut à la nature. Cela reste isolé. Mais d'ailleurs, il y en a d'autres des artistes dans cette veine, justement.

  • Speaker #1

    Alors, ce qui est marrant, en fait, avec... Je me permets de revenir un petit peu, mais... Par exemple, Théodore Rousseau, il ne se rendait pas compte à quel point ça le percuterait de voir cette nature brute. De là à créer une peinture qui est incroyable suite à une découverte de... d'arbres abattus au bord de la Seine en 1847. Cette Seine le bouleverse et il crée une peinture qui représente des arbres abattus et rien d'autre, vraiment juste de la nature. Il appelle ce tableau le massacre des innocents. C'est vraiment quelque chose de très puissant ce qui lui est arrivé. Ce choc vraiment artistique qu'il a voulu construire.

  • Speaker #0

    Ouais, donc avec Théodore Rousseau, il y a une idée d'aller au-delà de la simple représentation graphique de la nature. Il y a quasiment, presque, un début de sensibilité environnementale, en fait.

  • Speaker #1

    En fait, Théodore Rousseau est appelé par certains historiens de l'art comme le premier artiste écologiste, en tout cas, engagé pour l'environnement, parce qu'après, il milite contre l'abattage des arbres. Je ne sais plus exactement dans quelles circonstances. Il est très proche de Georges Sand. On peut parler d'une lutte. Après, je n'ai pas exactement les détails, mais déjà, cette peinture, elle révèle beaucoup, je trouve. Théodore Rousseau est une exception quand même à la règle. Et ses contemporains, notamment, on va juste citer les impressionnistes, Claude Monet, Sisley, tout cela représente... certes la nature, mais la nature d'une modernité, et qui est celle des loisirs, de l'oisiveté, du fait que les bourgeois vont à la mer et se prélassent. Mais il n'y a pas ce regard conscient envers la nature. Théodore Rousseau est vraiment une exception là-dedans. Et en fait, c'est plus la forme. Je dirais, dans le début de l'ère contemporaine, la nature, et même... Avant, on peut difficilement parler de conscience écologique, et donc juste la nature sert à la forme et non aux propos. Alors que les artistes contemporains, de plus en plus avec les questionnements écologiques qui naissent, vont plus se positionner sur une sorte de propos plutôt que de forme.

  • Speaker #0

    On avance un petit peu, mais le XXe siècle, c'est un peu le moment où le monde commence doucement à conscientiser, comme le faisait un peu Théodore Rousseau en tant que, entre guillemets, premier artiste écologique, les impacts violents de l'homme sur la nature, avec les révolutions industrielles, puis à la deuxième moitié du siècle, les débuts de la mondialisation. Mais du coup, quels artistes ou mouvements vont cristalliser, en quelque sorte, cette sorte de début de conscience écologique ? ...

  • Speaker #1

    Au XXe siècle, je dirais même au début du XXe siècle, ce qui est assez prenant dans les arts, c'est vraiment l'impact de la guerre. Il y a un retour au style, un retour vers un classicisme, mais en même temps une volonté de faire autre chose. Il y a aussi des artistes qui... En fait, il y a beaucoup de réactions par rapport à la guerre. plus que par rapport à une conscience écologique. La conscience écologique, je pense, viendra plus tard. Je ne pense pas qu'il y ait des artistes qui l'ont mis de côté. Il y a sûrement eu des artistes écologistes qui ont fait des choses, mais en tout cas au début du XXème siècle, c'est un petit peu compliqué. En tout cas, par la suite, il y a quelques exemples de premières artistes qui commencent réellement à se poser la question d'un impact et de comment présenter cet impact par les arts.

  • Speaker #0

    Après, c'est vrai que ça peut faire sens dans le sens où... J'en avais parlé dans le premier épisode d'Environ, je crois, que la naissance des combats écologiques, c'était avec les années 70, avec Rachel Carson qui écrit Le printemps silencieux, le premier Earth Day, même les mouvements hippies, ce qui était aussi contre la guerre au Vietnam. Et c'est vraiment les années 70 où la conscience, tu la vois. tu la sens totalement, mais je me posais la question justement, si auparavant, et c'est vrai que je ne pense pas que Théodore Rousseau, comme tu disais tout à l'heure, était beaucoup plus pionnier dans cela, et qu'il va y avoir une sorte de trou avant qu'on reprenne des idées écologiques, mais bien après la guerre, années 70, et reste quand les gens en prennent conscience.

  • Speaker #1

    Après, je ne pense pas que ça a été mis de côté. Je pense qu'il y a eu un impact plus fort de la guerre, et qui a remis au second plan les idées, justement les notions de faire attention à la nature, etc. Parce que... Justement, il y a cette guerre qui a bouleversé les gens dans tous les plans. Et oui, l'écologie, à ce moment-là, n'était pas... La nature devait servir à la guerre, tout simplement, je pense. C'était vraiment maîtriser l'environnement.

  • Speaker #0

    Le projet Manhattan avec les bombes nucléaires, maîtrise de la nature qui est au paroxysme.

  • Speaker #1

    Et on ne se pose pas la question de... Là, on se pose la question du maintenant et on ne se pose pas la question de l'après.

  • Speaker #0

    Mais justement, est-ce qu'il y a eu un médium artistique en particulier durant l'époque contemporaine qui porte de manière significative des idées écologistes ?

  • Speaker #1

    La photographie, par exemple. Au début, on a des photographies de portraits, de la recherche stylistique avec les pictorialistes au début du XIXe siècle. Puis... Aux États-Unis, on a un mouvement de photographie humaniste qui se tourne vers l'humain pour capturer vraiment la pauvreté dans les portraits de personnes qui en soi, ce ne sont pas des portraits mais une représentation de la société. Et par rapport à cette photographie humaniste, se développent plein d'autres courants avec la photographie du photojournalisme. la photographie documentaire. Et dans la photographie documentaire notamment, on a beaucoup d'engagement, parce que, comme dans le photojournalisme en soi, c'est de vouloir capturer des faits et de produire des émotions sur la personne qui regarde la photo. Parce que beaucoup de photographes sont reliés à des agences de photographie qui par la suite vont publier ces photographies dans des magazines comme Life par exemple. aux Etats-Unis. Et donc, ils recherchent justement à provoquer quelque chose chez le spectateur. On a par exemple, on pourrait citer William Eugene Smith qui, en fait, va se consacrer à démontrer on dirait aujourd'hui un scandale sanitaire, un scandale écologique. avec sa femme, ils vont publier un livre qui va être relayé par le magazine Life. Il y a des résonances et une envie de partage de ce genre de catastrophes. Il y a le développement du journal National Geographic qui prône justement, qui a cette volonté de publier de belles photographies. du monde et de montrer un monde en couleur qu'on ne voit pas dans nos sociétés où on vit dans des villes et on ne voit pas tout ce monde sauvage.

  • Speaker #0

    Ils ne vont pas gratter en dessous.

  • Speaker #1

    C'est ça. Mais pourtant, ils ont un engagement quand même. C'est vraiment l'engagement de vouloir préserver par l'image.

  • Speaker #0

    Et du coup, Eugene Smith, c'est à peu près vers quelles années qu'il commence à... Enfin, qu'il fait ses photographies, ses... Surtout fin 19e, début 20e ?

  • Speaker #1

    En fait, ils voient ça lors d'un voyage au Japon en 1970. Et en fait, c'est à la suite, il me semble, de 30 ans d'années de mauvaise gestion d'une usine pétrochimique où ils ont pollué des eaux et créé des dégâts. En fait, il a fallu 30 ans. pour qu'on s'en rende compte. William James Smith arrive dans les années 70 et est vraiment choqué par tout ça et décide personnellement de... faire un reportage.

  • Speaker #0

    Oui, ça rejoint ce que je disais plus tôt, dans le sens où ça tombe à point nommé, vu qu'on est pile dans les années 70, avec le début de la conscience écologique. Et William O.J. Smith, comme tu dis, il s'inscrit dans ce mouvement. Après, je ne sais pas si c'était sciemment, mais il voulait tout de même montrer les désastres que provoque une usine pétrochimique. Et comme tu disais, quand tu grattes derrière la ville, il y a ce truc un peu funeste.

  • Speaker #1

    Et d'autant plus, c'est marrant parce que la photographie, au début, Quand elle a commencé, elle a vraiment disrupté l'équilibre des arts, parce que c'est une nouvelle forme d'art. Et les photographes, au début, ne se sentaient pas légitimes d'être artistes. Il y en a qui ne se considéraient pas du tout comme artistes. D'autres ont cherché à prouver cette qualité stylistique importante de la photographie. Et en tout cas... La photo, c'est hyper intéressant d'un point de vue écologique parce que ça capture tout de suite, l'instantané, etc. Après, ça n'a pas toujours été le cas. On a eu l'instantané, je ne sais plus exactement, mais ça naît dans les années 1930, je crois, un truc comme ça, avec le Polaroïd, etc. Et en fait une photographie ne peut pas mentir entre guillemets.

  • Speaker #0

    Il n'y avait pas photoshop à l'époque.

  • Speaker #1

    Il n'y avait pas photoshop mais ils arrivaient quand même à faire des choses absolument fantastiques avec des photos montage faits à base de solarisation de la pellicule. Enfin je n'ai pas les termes exacts parce que je suis la spécialiste de la photographie. Mais vraiment du photoshopage brut. Vraiment avec la matière, limite du collage imagé avec la lumière.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu penses que le podcast, du coup, c'est un art ? Non, je plaisante, je plaisante.

  • Speaker #1

    Tout peut être un art en soi, mais après, c'est la photographie qui, par son médium, est constamment remise en question. Et les photographes, ils oscillent entre l'art et la... prise de documentaire et notamment dans les années 70, il y a eu un mouvement des nouveaux topographes qui veulent représenter enfin capturer l'image de nouveaux paysages urbains, le paysage urbain contemporain en fait. Et voilà, dans les années 70, il y a eu une exposition par rapport à ça et il y a tout un groupe de photographes dans ce groupe.

  • Speaker #0

    C'est aussi un peu les débuts des reportages animaliers qu'on connaît aujourd'hui, avec National Geographic par exemple, où ils pouvaient prendre en photo des espèces d'oiseaux déjà rares.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, en parlant d'oiseaux, ça me fait penser à un autre photographe. Décidément, les photographes sont très représentatifs d'un début de la naissance de la conscience écologique dans les années 60. Oui,

  • Speaker #0

    du coup, oui.

  • Speaker #1

    Lui, dans les années 60. Il prend en photo des animaux dans une forêt dans Nouvelle-Angleterre. Et dans les années 60, son livre sort et c'est un succès énorme. Donc on lui commande d'autres photographies, mais dans des espaces qu'il connaît beaucoup moins. Il va en Basse-Californie, au Mexique, au Galapagos, etc. Et en fait, il porte son attention envers cette diversité écologique qui... bien en dehors de son environnement habituel. Et franchement, il s'implique beaucoup dans ce mouvement de la conservation de la nature. Et même dans une interview, il dit qu'il faut amener les gens à prendre la conservation de la nature au sérieux. Il dit que si un scientifique dit que l'air va devenir irrespirable, on ne le croit pas. Et effectivement, en ce moment, on arrive à respirer, donc on n'est pas inquiet.

  • Speaker #0

    C'est vraiment un peu comme les appels du GIEC, où c'est des cris au loup, quelqu'un qui appelle au loup, et personne ne nous croit parce qu'on dit, non, le changement climatique, finalement, regardez, il fait très froid, et on n'a pas la chaleur. Alors que oui, les scientifiques sont alarmés. C'est vrai que ça fait un peu écho à cela. C'est une sorte, on dirait aujourd'hui plus lanceur d'alerte, je crois. Mais ouais, c'est clairement dans la veine. Il a conscience que c'est bordel. personne n'écoute quoi.

  • Speaker #1

    C'est ça et vu que c'est dans un futur où on n'est pas, ça marche aussi par rapport à un placement géographique, c'est à dire que là, Elliot Porter il va dans d'autres habitats que lui-même ne côtoie pas, il prend en photo des animaux qu'il n'a pas l'habitude de voir tous les jours etc et s'il commence à dire que tel animal va peut-être être en voie d'extinction. C'est un peu pareil, c'est-à-dire que c'est trop loin. On ne s'en rend pas compte. Et même la photographie, quelque part, ne fait pas prendre conscience aux gens. Et c'est pour ça que, par exemple, il y a un artiste contemporain que je trouve incroyable qui a voulu amener la situation jusqu'à nous.

  • Speaker #0

    Comment il s'appelle, pardon ?

  • Speaker #1

    C'est Olafur Eliasson. Et en 2014... ou plus ou moins en 2015, je ne sais plus, il a fait une installation, il a ramené 80 tonnes de glace du Groenland, qu'il a disposé des blocs plus ou moins ronds, mais très taillés de manière brute, en cercle. Il y en avait 12, il me semble, pour justement symboliser une horloge. Et il les a laissés fondre. Donc vraiment, ce passage du temps, et que si on ne fait rien... Voilà, le temps est compté, en fait. Et je trouve que c'est vachement beau d'avoir fait ça, de ramener la chose à nous, vraiment. Et en plus, il me semble que c'était pour un événement de la COP21.

  • Speaker #0

    Non mais ouais, c'est fou. Sachant que cette œuvre est contemporaine à nous, et que même avec le photographe que tu as évoqué plus tôt, il y a un peu ce truc où en écologie, bon, peut-être aussi dans d'autres domaines, je pense, quand des scientifiques qualifiés vont dire que c'est pas possible, que c'est trop tard et qu'on va tous crever, clairement, on ne les croit pas. Il y a une réelle crise de la croyance. Et même avec l'art, en l'occurrence la photographie, lorsque l'on montre des espèces en danger, certaines personnes ne vont pas du tout s'alarmer. Certaines et certaines seront limite sceptiques. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clair. Et après, il ne faut pas non plus perdre espoir totalement, parce que parfois ça marche. Comme par exemple les reporters de la guerre du Vietnam, où quand ils ont pris des photos sur les champs de bataille, ils ont été invités par l'armée pour prendre ces photos. et quand ils sont revenus avec et que les photos ont été publiées, le public a réagi de manière très virulente et s'est rendu compte de l'impact de cette guerre sur la population et le public a commencé à s'insurger. Donc quelque part, parfois ça marche. Pas toujours, mais... Bon voilà, après, il y a aussi cette chose que la photographie documentaire... peut être parfois contestable en termes de formes d'art. Les artistes, après, dans un terme global, qu'ils soient photographes, documentaires, qu'ils soient peintres, qu'ils fassent de la sculpture, etc., ça dépend. Il y en a qui appuient le fait qu'ils ont un idéal écologique, d'autres le font sans trop l'appuyer. Et je trouve que c'est important de dire quand l'artiste a vraiment cette volonté. de démontrer quelque chose, d'être dans une démarche écologique, de vouloir être un artiste engagé et donc un artiste écologique, écologiste. Ils ne le sont pas tous et donc c'est très difficile d'essayer lequel l'est et lequel ne l'est pas.

  • Speaker #0

    Ça fait un peu lien avec une question que je voulais te poser également. C'était justement, est-ce que l'art, après là je ne te parle pas uniquement de l'art contemporain, même si ça résonne plus aujourd'hui j'ai l'impression, mais est-ce que l'art peut contribuer à inspirer des changements écologiques, enfin des changements concrets qui va dans le sens de la préservation de la nature, dans le réveil des consciences écologiques ? Est-ce qu'il y a vraiment des exemples où une différence se fait par rapport à cela ?

  • Speaker #1

    Je dirais que c'est comme avec tout, c'est-à-dire que c'est... Une démarche artistique, si elle se veut militante, c'est un pari. Et comme par exemple, de nos jours, on entend parler des écologistes qui vont dans les musées et qui balancent de la soupe sur, dernièrement, la Joconde, par exemple. Il y en a qui sont d'accord, il y en a qui ne sont pas d'accord. Quel est le lien avec l'art ? C'est un pari et c'est juste... Quelque part, il faut provoquer quelque chose. Un artiste cherche à représenter, un artiste cherche peut-être à juste donner sa sensibilité, un artiste veut provoquer, ça dépend de la volonté de l'artiste, ça dépend aussi de comment on accueille. l'oeuvre qu'il ou elle produit, c'est très compliqué je trouve. En tout cas, si on ne veut pas partir dans des généralités, on peut se focaliser sur des artistes qui vraiment concrètement se considèrent comme engagés, comme par exemple Joseph Beuys, qui avait toute une action, enfin une installation très intéressante, mais je ne rentrerai pas dans le détail, mais ce que je trouve intéressant, c'est ce qu'il dit, c'est que chaque version de l'humanité humaine, même... éplucher une patate, c'est une œuvre d'art, du moment que c'est un acte conscient. Et par exemple, il y a une autre artiste, Agnès Dénès, je ne sais pas exactement si je le prononce bien, mais elle a fait une action choc que je trouve incroyable, c'est qu'elle a acheté une parcelle de terrain sur un morceau de territoire hyper convoité à New York, et elle y a planté du blé. Et elle voulait dénoncer justement cette folie en fait de... Il y a certains terrains qui sont plus prisés et pourtant sur cette petite parcelle, on peut faire autant de blé et elle dénonce vraiment la famine dans le monde. Enfin, l'absurdité en fait de l'économie par rapport à juste la nature et les besoins naturels de l'homme.

  • Speaker #0

    Mais ouais, c'est sûr. Après, je ne vais pas rentrer dans les détails. Mais en agriculture urbaine, on dit souvent que c'est compliqué de produire, car les sols sont pollués. Mais d'un côté, si on n'essaie pas, on ne saura jamais. Puis on peut faire aussi dans la mesure des possibles. Ce ne sera jamais ce qu'on imagine, donc de la production de masse à l'intérieur des villes, mais on pourra toujours nourrir des personnes dans le besoin, même si ce n'est pas beaucoup. Et clairement, oui, comme tu disais, c'est absurde, ces espaces privatisés, à des prix de zinzin en plus.

  • Speaker #1

    Oui, c'est clair. Et je trouve que les artistes sont là aussi pour... un peu assoufflé, quoi, pour permettre de donner un peu de... un peu de rigoler du pathétique de cette situation, de vraiment, genre, nous dire c'est ridicule Il y a un autre artiste qui, par exemple, a réuni un G5 des interespèces, et je trouve ça extrêmement drôle, il rassemble minéral, végétal, animal, humain et intelligence artificielle. Et il se moque. concrètement du G20. Aujourd'hui, on peut se demander à quoi ça sert si on y invite des gens qui viennent des sociétés ultra-capitalistes et qui défendent l'écologie alors qu'ils la massacrent.

  • Speaker #0

    C'est les mêmes qui vont venir en avion pour la conférence, par exemple.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    C'est une sorte d'ironie qu'il y a. C'est limite sarcastique. J'ai l'impression qu'il y a une véritable crise dans ce que ça représente. ce G20 et le fait qu'ils ne prennent pas de véritables décisions concrètes, ils sont limite insensibles. Je ne sais pas ce que tu en penses. Oui,

  • Speaker #1

    et je trouve que vraiment le lien entre l'art et l'écologie, c'est ce lien que voit l'artiste en tant qu'homme envers la nature et le fait qu'il y a cette recherche de lien juste. Par exemple, ça me fait penser à une artiste qui, bon, ça paraît un peu fou, mais elle s'appelle Marion Laval-Jantet et elle a fait une performance qui s'appelle Que le cheval vive en moi, où elle s'injecte du sang de cheval. Ah oui ? Oui. Où c'est vraiment, bon, c'est poussé à l'extrême, mais c'est cette idée de vouloir justement voir l'homme et la nature faire communion. Ou bien, il y a encore Hermann De Vries. qui lui décide de ne pas mettre de majuscule à son prénom, à son nom de famille, parce qu'il considère que l'homme n'a pas à se valoriser par rapport à la nature, et il se base plutôt sur une sorte de philosophie orientale pour trouver une espèce de démarche contemplative dans le positionnement de l'homme au sein de la nature.

  • Speaker #0

    Je me disais, dans ma tête, quand tu disais ça, c'était qu'il voulait supprimer les majuscules pour pas que ça prenne trop d'encre sur un crayon ou même sur une impression, mais... Non, c'est pas du tout par rapport à ça, ok.

  • Speaker #1

    C'est vraiment idéologique, plutôt, et c'est marrant, parce que... Il y a ces artistes contemporains qui sont de plus en plus engagés, mais il y en a quelques bouts, déjà, par-ci, par-là, dès le XIXe siècle, par exemple, Rosa Bonheur, qui est une peintre incroyable, animalière, qui... qui regarde, qui vraiment se tourne vers les animaux, qui a cette tendresse et dans son regard qui fait de la sculpture, de la peinture, qui les représente de la manière la plus véridique qu'elles veulent transmettre. Et d'ailleurs, artiste incroyable qui a dû avoir une dérogation auprès de la préfecture de police pour pouvoir porter un pantalon, pour pouvoir mieux se déplacer et observer les animaux.

  • Speaker #0

    La proto-histoire de l'écoféminisme.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, c'est clair. Et elle, elle disait que l'homme, en fait, il vaut rien par rapport à l'animal, enfin quelque chose dans ce sens-là. Et Rosa Bonheur, aujourd'hui, on peut avoir une sorte de lecture un peu féministe de cette personne. C'est un peu compliqué de dire ça pour cette époque-là, mais aujourd'hui, on peut parler effectivement d'écoféminisme par rapport à Anna Mandietta. qui dans les années 60 fait des performances qui sont enragées, qui témoignent vraiment de quelque chose de puissant, où en fait elle, elle décide de mettre en scène son corps recouvert de plumes de poules, de sang de poules, et dont en fait elle vient elle-même de l'égorger, donc elle prend vraiment en main la chose elle-même. Et elle compare en fait ce corps animal au corps féminin.

  • Speaker #0

    Pardon à tous les véganes d'ailleurs.

  • Speaker #1

    Ouais, les performances choc forcément vont dans le lard pour faire une blague pas très végane aussi. Mais en tout cas, par exemple, il y a aussi cette performance touchante de Joseph Boyce qui va en Amérique. Joseph Boyce, artiste allemand qui a servi dans la Luftwaffe, qui a été abattu, retrouvé par des gens et puis mis dans du feutre et de la graisse pour recourir de ses blessures. Et ça l'a vachement atteint, il est devenu assez militant je dirais. Et quand il est parti... Aux États-Unis, pour cette performance, il a décidé de ne pas du tout vouloir voir le pays, de se cacher dans son tissu de feutre jusqu'à la galerie et de s'enfermer pendant, je ne sais plus, je crois que c'était une semaine, avec un coyote sauvage. Il prend ce risque et il est là, il s'y met à 100%. Justement, j'appuie d'autant plus que vraiment, les artistes prennent des risques, non seulement stylistiques, mais aussi... corporel.

  • Speaker #0

    Après je vois, enfin je pourrais voir des personnes venir en disant genre oui non mais les coyotes ça va c'est effectivement des petits chiens. En vrai c'est pas un puma mais je pense que comme tu disais si c'est une semaine sans manger ou vraiment dans une même pièce avec un animal, l'animal va commencer à avoir faim donc c'est ouais c'est comme tu dis c'est une véritable prise de risque et enfin de montrer ça quoi.

  • Speaker #1

    Après ils mangeaient je pense, je crois qu'ils mangeaient deux choses séparées effectivement mais ils cohabitaient ensemble. C'est incroyable. Et je crois qu'au bout d'un moment, ils ont commencé à devenir mes potes.

  • Speaker #0

    Moi et mon pote coyote.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, toujours Joseph Boyce, dans les années 80, pour la Biennale de Kassel, qui est une manifestation artistique qui a lieu tous les quelques années, a planté des colonnes de basalte dans le sol. Et il voulait faire participer le spectateur en remplaçant ses colonnes de basalte par des arbres. Et en fait, c'était vraiment la volonté de faire disparaître petit à petit les colonnes de basalte et de les remplacer par l'arbre. Et vraiment, cette idée, ce serait pur et très simple de vouloir faire du monde une grande forêt et bâtir les villes et les environnements comme des forêts. Ça me fait penser au Land Art. Et le LendArt, c'est typiquement des artistes qui prennent la nature, l'art, et qui font un mix des deux, et juste qui n'utilisent pas des pinceaux, de l'appareil photographique, ils utilisent la nature. pour créer de l'art. Par exemple, Robert Smithson avec sa spiral jetty du côté de la Californie, il me semble, qui a créé comme un espèce d'îlot qui fait une spirale en fait, avec des cailloux, enfin, quelque chose vraiment massif pour que ça puisse tenir dans le temps. C'était dans les années 80, aujourd'hui, on la voit plus.

  • Speaker #0

    C'est quand même récent, comme si ça datait... Je veux dire, il y a des vestiges qu'on a de l'Antiquité qui sont encore présents, mais là, ça n'a pas duré. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clair. Et on pourrait se dire, bon, il a mis des cailloux au bord de la mer, forcément, ça ne se verra plus. Mais il a fait en sorte à ce que ce soit quelque chose qui se voulait durable à la base. Et ce n'est pas resté. Il y a plein d'œuvres de Land Art. Ça arrive, par exemple, Walter de Maria, qui a placé des... pareil, des colonnes de fer ou de, je ne sais plus, d'un métal, dans un champ qu'il a eu, tout simplement, qu'il a privatisé, etc. Où ces colonnes étaient censées attirer des tonnerres, en fait, des éclairs. Des tonnerres, oui. C'est ça, des paratonnerres, et tout calculé, etc. pour que ce soit tous au même niveau. Il y avait des colonnes qui étaient plus grandes que d'autres, etc. Et aujourd'hui, bah... Pareil, ça a été dégradé par le temps et ça ne marche plus.

  • Speaker #0

    Après, d'une manière un peu triste, que ce soit pour les cailloux dont tu me parlais, l'œuvre qui a été dégradée, qui n'est plus présente, ou alors les paratonnerres, c'est que finalement, même dans cette tristesse, ça prouve le point de ces artistes par rapport à ce rapport que l'homme a avec la nature. C'est-à-dire qu'on a des choses qui sont belles. enfin pas forcément belles mais qui sont aussi utiles dans l'environnement et parfois elles disparaissent et on est triste de perdre un peu ce patrimoine qui est aussi important et c'est un peu ça j'ai l'impression, enfin quand tu m'expliques ce que représente le land art, même si c'était pas le but premier des artistes, c'est que au final c'est exactement ça le point ça disparaît, ça ne reste pas éternellement la planète c'est un peu pareil l'environnement et l'écologie c'est un peu la même chose tout à fait et dans l'autre sens,

  • Speaker #1

    ce qui est extrêmement marrant c'est que Il y a des artistes comme Christo et Jeanne Claude qui vont recouvrir l'art récemment, l'année dernière je crois, qui recouvrent l'arc de triomphe d'une bâche de tissu. Et les gens s'insurgent de qu'est-ce que c'est que cette horreur à l'art contemporain, etc. Et qu'en fait, effectivement, c'est du land art, donc ça part aussi de cette idée d'un art éphémère. Mais on voit que là, on porte plus d'importance à ce qu'il y a en dessous de cette nouvelle installation, c'est-à-dire l'Arc de Triomphe avec les reliefs de François Rude, etc. Et on ne regarde pas la création contemporaine, on ne s'y intéresse pas. Et pourtant, la création contemporaine, ça nous dit quelque chose de la société d'aujourd'hui aussi.

  • Speaker #0

    Oui, c'est complètement la société qui s'effondre. On retrouve d'ailleurs cette idée dans la collapsologie, il me semble.

  • Speaker #1

    Et je voulais juste rajouter que c'est ce rapport à l'art et l'environnement. Il y a un rapport très compliqué, c'est-à-dire qu'on sacralise l'art. Et pour revenir encore une fois aux gens qui balancent des soupes sur les œuvres, tant qu'il y a une vitre, je ne sais pas, mais on s'insurge plus contre la possible destruction d'une œuvre d'art qui, certes, est inestimable. Mais après, effectivement, il y a des raisons plus intéressantes. Il y a des questions écologiques qui sont plus intéressantes.

  • Speaker #0

    C'est vrai que quand tu te retiens, que tu pèses un peu tes mots, il ne sort rien de l'art. Si tu dis des choses qui vont être retenues contre toi, tu vas être placristée. Ne t'inquiète pas, je n'ai pas encore assez d'écoute pour ça.

  • Speaker #1

    Non, mais ce n'est pas ça. C'est vrai qu'en tant que faisant partie du monde de la culture et de la volonté de conservation des œuvres d'art, ça me fait peur effectivement de voir des oeuvres qui peuvent être mises en danger. Après, effectivement, on met les moyens pour les protéger. Donc, si elles sont mises en danger de cette manière-là, c'est-à-dire qu'il y a une vitre, certes, ça coûte de l'argent pour l'entretien, etc. Il y a toute une chose qui s'engraine par derrière. Et effectivement...... Et je comprends les écologistes qui veulent avoir leur voix qui est entendue. Et je comprends aussi leur frustration de voir les gens s'intéresser plus à l'art.

  • Speaker #0

    à l'art du passé surtout que de s'intéresser aux problématiques d'aujourd'hui et de regarder vers le futur d'ailleurs oui par rapport au futur ça me fait penser il me semble qu'il y a des oeuvres justement qui parlent pas peut-être spécifiquement de collapsologie ou d'effondrement mais en tout cas de ce qui se passerait dans le futur dans l'après par rapport à ça,

  • Speaker #1

    il y a des oeuvres qui en parlent quand même je trouve alors par exemple par rapport à la collapsologie, c'est vraiment ce courant de pensée qui prédit à quoi amènera la crise écologique. Moi, ça me fait penser à un artiste, Piotr Kowalski, qui a créé un... On pourrait dire que c'est une sculpture cinétique, parce que cinétique qui implique le mouvement. Et en fait, c'est un cube transparent qui... inclut des petites billes qui représentent un humain. Et en fait, le cube de la population, comme il l'appelle, peut contenir 10 milliards, il me semble, de billes. Je ne sais plus combien on est sur la planète, 7 milliards, il me semble.

  • Speaker #0

    On a dépassé ce chiffre depuis longtemps.

  • Speaker #1

    Voilà. Et en fait, le cube peut contenir 10 milliards de billes, une bille étant un humain. Et en fait, en bas, on a un tube qui enlève certaines billes. par rapport aux morts et par le dessus on a un autre tube qui alimente de nouvelles pilles. Et en fait toute cette œuvre est reliée aux statistiques en fait et vraiment aux données réelles des naissances et des morts. Donc c'est une œuvre très compliquée, vraiment qui tient de l'ingénierie et qui témoigne de vraiment d'une manière extrêmement visuelle que... ce cube ne peut contenir qu'une certaine quantité de billes. Donc au bout d'un moment, on ne pourra plus arriver. Et malheureusement, aujourd'hui, je ne sais pas combien on est de milliards sur la planète, mais le cube de la population, de toute façon, ne fonctionne plus. Parce qu'il y a eu de la poussière dedans et il ne peut plus fonctionner. Pour des raisons de conservation, il ne fonctionne plus.

  • Speaker #0

    D'où l'effondrement, oui. Est-ce que tu faisais lien avec la collapsologie ? Le cube, soit il passe cassé, ce serait un peu l'allégorie. de la planète, même si c'est quand même vu grossièrement. Mais voilà, ça va se casser la gueule parce que c'est pas assez, il est foutu.

  • Speaker #1

    Ce qui est d'autant plus marrant, c'est qu'il n'avait pas prévu que le cube n'allait plus marcher. Lui, il pensait vraiment qu'il allait continuer et être un témoin un peu de l'avancement de notre population. Et en fait, le cube ne fonctionne plus comme notre planète, en quelque sorte.

  • Speaker #0

    C'est un peu la voix de la panique, là.

  • Speaker #1

    Ouais. Ce qui est marrant aussi, c'est que tu as d'autres artistes qui engendrent de nouveaux termes, comme la solastalgie, qui en fait est une détresse psychologique qui est assimilée à une forme de deuil par rapport à quelque chose qu'on a perdu ou qui ne pourra jamais être réparé. Voilà, c'est quelque chose qui tient presque de l'éco-anxiété, mais c'est pas vraiment ça.

  • Speaker #0

    Oui, ça me fait penser un peu à ce sentiment général où on a une grosse tendance à idéaliser la nature d'avant, des forêts vierges d'antan. On parle même de nature originelle, alors qu'en vérité, c'était pas tellement le cas. C'est un peu des idées qui héritent directement du christianisme avec le jardin d'Éden, ou même avant, chez les grecs, avec le jardin des Hespérides. C'est marrant, ouais, la solastos... ça fait sens j'ai l'impression que ça fait beaucoup lien avec les co-anciétés et que c'est quelque chose que même aujourd'hui même si c'est des projections vers le futur c'est des choses que de plus en plus de personnes moi,

  • Speaker #1

    on ressent ouais et en fait il y a un truc ça me fait penser encore à un autre artiste qui se concentre sur des odeurs de fleurs qui n'existent plus Et ça s'appelle Resurrecting the Sublime. Et je trouve que c'est vraiment cette idée justement du jardin d'Éden, d'un truc inconnu, où par exemple les œuvres, que ce soit des œuvres de Jérôme Bosch, etc., où il peint le jardin d'Éden, etc., où il représente des fleurs qui existent réellement. Après, je n'ai pas trop d'exemples, mais il y a sûrement des... plantes qui ont été inventées, etc. Mais souvent, on se rapporte à des choses qui existent. Et le fait que cet artiste-là aille vers un truc, vers une chose qu'on ne connaît pas, je trouve que c'est... Il y a quelque chose qui tient de la poésie, de l'inconnu et du sublime. Ça renvoie à cette idée du XIXe siècle, où le romantisme, quand il naît, il naît à cause d'un mouvement allemand qui s'appelle Sturm und Drang, qui veut dire tempête et sentiment, je crois. Et c'est cette idée qui se développe ensuite avec un autre philosophe. C'est le sublime. Le sublime, c'est cette idée que l'homme est tout petit face à la nature. Et que vraiment, ça se caractérise franchement dans les œuvres de Kaspar David Friedrich, où on voit cet homme devant une mer de nuages. Et je ne sais pas, je pense que... Tout spectateur, quand il voit ce tableau, il comprend ce que ça veut dire. C'est vraiment quelque chose de... Même si l'homme est au sommet, il est rien.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, ça m'amène à ma dernière question. Premier après, ça, je te lâche. Mais est-ce que tu penses que l'art peut sauver la nature ?

  • Speaker #1

    Ce qui, je trouve, est assez révélateur, c'est que... L'art en soi, qu'il soit sonore avec la musique, qu'il soit visuel, graphique, avec tous les arts visuels, qu'il soit littéraire avec la poésie, les romans, l'art en général n'est pas quelque chose d'essentiel en soi, mais l'humain s'y accroche quand même. Moi j'essaye de vouloir aller vers un métier qui est dans la conservation du patrimoine. et on veut conserver tout ça, on veut avoir la trace, on s'accroche à quelque chose qui... Pour moi, j'ai une sensibilité où je dirais toujours qu'il y a quelque chose de poétique dans l'art, même qu'il soit aussi loin de la poésie qu'il le veuille l'être, l'art est quelque chose qui exprime l'intériorité, je trouve. Et en fait... Quand on repense à tout ce qu'on a dit, l'intériorité c'est quoi ? C'est aussi être au sein de la nature, en phase avec la nature, et se rendre compte qu'on est quelque chose parmi tout un univers, un environnement. Et cette intériorité, elle se met au milieu de tous les aspects de la nature, des animaux, de tout, et que l'humain fait partie de la nature, qu'il se considère. au dessus ou en dessous d'elle. L'art est un témoignage de l'humain et donc l'art a forcément un lien envers la nature et je trouve qu'il faut utiliser l'art pour dénoncer des choses, pour militer, pour dire des choses, toujours.

  • Speaker #0

    Donc c'est pas tellement l'art qui sauve la nature, c'est plus ce que l'impact que va créer une oeuvre qu'on aura conservée. car il faut la conserver, nous nous montrera qui nous provoquera de nous et qui nous poussera à la sauver ouais je pense,

  • Speaker #1

    je pense que c'est vraiment cette idée de conservation si on a ça envers les oeuvres d'art je sais pas, on devrait avoir ça envers la nature tout simplement, ça devrait être beaucoup plus dîné que de juste enfin c'est ce regard qu'on a envers l'art c'est quelque chose c'est de l'art, c'est de l'art du passé on prend ça vraiment comme du patrimoine et Pourtant, on n'a pas ce regard-là envers la nature. Et je pense que l'art doit servir à la cause de la nature. Et je défends l'art écologique, tout simplement, qu'il se développe. Je trouve que c'est vraiment hyper intéressant de voir des artistes qui sont engagés et qui militent pour quelque chose.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Merci de m'avoir donné ton temps.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Je vous remercie pour votre écoute de cet épisode légèrement plus long que ce précédent. J'espère que le format vous a plu, que vous avez appris des choses, et surtout passé un bon moment. Il y aura d'autres épisodes de ce type, afin de vous faire découvrir l'histoire de l'environnement avec d'autres voix que la mienne. Il naît de si bonne compagnie qui ne se sépare, et en attendant les prochains épisodes, je vous dis au revoir. Et à très vite sur Environ.

Chapters

  • Présentation

    00:48

  • Premiers mouvements au XIXème siècle

    02:21

  • Théodore Rousseau

    04:51

  • Au XXème siècle

    07:48

  • Et la photographie dans tout ça ?

    11:25

  • Eliott Porter

    17:41

  • La contribution de l'art dans l'éveil des consciences

    23:15

  • Rosa Bonheur et éco-féminisme

    29:26

  • Joseph Boyce et Land Art

    31:25

  • Art contemporain et collapsologie

    37:26

  • L'art peut-il sauver la nature ?

    45:14

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