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Penser la nature dans l’Histoire : le regard des Anciens

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18min |02/07/2025
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18min |02/07/2025
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Description

Et si notre façon de voir notre environnement ne venait pas seulement de nous mais de siècles d’histoires, d’idées, de récits ? 🌿
Dans ce premier épisode de "Penser la nature dans l'Histoire", on remonte le fil du temps jusqu’à l’Antiquité, pour explorer comment nos anciens comprenaient la nature. 🏞️

On y croise des philosophes-poètes, des pionnières de la science, des questions vertigineuses et des visions du monde bien différentes des nôtres. 🧐
De Gargi à Aristote, de Démocrite à Hypatie, on va découvrir comment ces penseurs et penseuses ont appréhendé la Terre, le ciel, le vivant… et ce que ça dit de nous aujourd’hui. 🌍

Très bonne écoute à vous ! 🐙


Biblio 

  • Bailey Ogilvie Marilyn , “Women in Science: Antiquity through the Nineteenth Century”, 1986.

  • Dumont Jean-Paul (Sous la direction de), Les écoles présocratiques, 1991.

  • Nixey Catherine, L’obscurcissement du monde. La destruction de la culture classique par le christianisme, 2019.

  • Sawyer Deborah, Women and Religion in the First Christian Centuries, Routledge, 1996.

  • Worms Frédéric (dir.), La Nature, coll. “Les Notions philosophiques”, 2013.

  • "Aglaonice of Thessaly: Astronomer or Sorceress?" – Journal of the History of Astronomy, vol. 7, 1976.

  • Brihadaranyaka Upanishad (Upanishad du Grand Livre de la forêt), traduction de Martine Buttex, 2007-2008.

  • "Le concept de nature à travers les âges", ISDD, 23 mars 2023.

Ressources en ligne utilisées


Images (de haut en bas, droite à gauche) : 

  • Mosaïque du Nil (ou parfois simplement Mosaïque marine de Pompéi), Ier siècle av. J.-C, auteur inconnu.

  • Mosaïque de Neptune et des créatures marines, Fin du IIe siècle - début du IIIe siècle ap. J.-C, auteur inconnu.

  • Jardin de la villa de Livia (ou Jardin de Livia à Primaporta), Vers 30–20 av. J.-C, auteur inconnu.

  • Diane de Versailles, vers 330 av. J.-C, Attribué à Léocharès.


Crédits musicaux (Licensed under Creative Commons : By Attribution 4.0 License - https://incompetech.com/) :

  • "Documentary Nature Ambient" DELOSound

  • "Seek India" Hans Johnson

  • "Karpathos" Emmanuel Jacob

  • "Half Moon" Itai Armon

  • "Walking Garden" T_Asco

  • "Kimray" Emmanuel Jacob

  • "Chalkis" Emmanuel Jacob

  • "A New Start" The Bows

  • "My Sifnos" Emmanuel Jacob



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour ou bonsoir à tous et à toutes, et bienvenue sur Environ, le podcast qui parle d'histoire de l'environnement. Peut-être que vous vous êtes déjà demandé comment vous perceviez la nature. Un décor, un paysage, une ressource, un temple ? Mais cette vision, eh bien vous ne l'avez pas choisie, on vous l'a transmise. Crise climatique, effondrement de la biodiversité, pollution massive, on pense souvent que ce sont des problèmes techniques, donc du CO2 à réduire, des forêts à protéger. Mais si le cœur du problème, c'était notre vision de la nature, de notre environnement. Ce qu'on appelle crise environnementale pourrait bien être, avant tout, une crise de perception. Et afin de comprendre comment on en est arrivé là, il faut remonter le fil de notre histoire, l'histoire de notre regard sur la nature. Dans cette série d'épisodes, on va essayer de couvrir 2500 ans d'idées, de récits, mais aussi de croyances. Bon, dit comme ça, ça a l'air un peu énorme, mais vous en faites pas, on va y aller petit pas par petit pas. Sur ce, je ne vous en dis pas plus, et allons ensemble découvrir ce nouvel environ. Il y a plus de 2700 ans, bien avant que les sciences modernes n'existent, une femme s'est levée pour poser une question. Une question si simple et pourtant si vertigineuse qu'elle résonne encore aujourd'hui. Cette femme, c'est Gargi Vajaknabi. Au cœur de l'Inde ancienne, dans un monde où les hommes dominent les débats philosophiques, Gargi s'est levée pour parler. Devant des rois, des sages et des prêtres, elle a osé interroger la nature de tout ce qui existe. Sur quoi repose le monde et ce qui le soutient, qu'est-ce qui le soutient encore ? Et ça, ce n'est pas une devinette, ce n'est pas non plus un exercice intellectuel, c'est une quête, celle de comprendre l'invisible, l'infini, ce lien mystérieux qui relie toute chose. Pour Gargi, la Terre, le ciel, les étoiles, les arbres et les hommes, tout cela fait partie d'un immense tissu, un ordre cosmique, un souffle. Et ce souffle, elle l'appelle Brahman. Non pas un dieu, mais une réalité profonde qu'on ne peut ni voir, ni toucher, mais qui est là, partout. En posant ces grandes questions, elle nous invite déjà à respecter ce que nous ne comprenons pas entièrement, à vivre avec humilité dans un monde qui nous dépasse. Dans un certain sens, on peut dire qu'elle a planté une graine, celle d'une écologie intérieure, qui commence par une question sincère. Qu'est-ce qui nous relie vraiment aux autres, à la nature, à l'univers ? Je s'appelle Goop. Avec elle, la nature n'est pas autre que nous. Ce que nous faisons à la Terre, c'est à nous-mêmes que nous le faisons. Chez les grecs anciens, la nature ne se résume pas à un simple décor, à une série de paysages ou même à des ressources. Non. Il parle de « fusis » . Et ce mot veut dire bien plus que « nature » . Fusis, c'est le souffle même de la croissance, de l'apparition et de la transformation. C'est la puissance d'engendrement, une dynamique qui est interne à la réalité. Je dis simplement que la vie trouve toujours un chemin. Autrement dit, la fusis est vivante, en mouvement, et elle suit son propre rythme. On va commencer au 5e siècle avant Jésus-Christ avec... Empédocle. Empédocle, c'est un peu un philosophe poète. Il regarde autour de lui et se dit « Tout ce que je vois, les arbres, les animaux, l'eau, le feu, les hommes, ne pourrait-il pas y avoir une sorte de recette de base à toute cette diversité ? » C'est alors qu'il va proposer une idée assez révolutionnaire pour l'époque. Tout dans le monde est fait d'un mélange de quatre éléments. L'eau, la terre. Le feu. L'air. Un peu comme des ingrédients dans une soupe, ces éléments se mélangent dans différentes proportions pour créer tout ce qui existe. Mais ce n'est pas tout. Il dit aussi que deux grandes forces invisibles agissent sur ces éléments, l'amour et la haine. Ces forces seraient à l'origine du grand balai cosmique, c'est-à-dire l'amour assemble et la haine disperse. Grâce à elle, les choses naissent, évoluent, puis disparaissent. Et grâce à cette vision, Empédocle nous invite à voir la nature comme un système en mouvement perpétuel, où les transformations sont naturelles et logiques, pas des punitions divines. De son côté, Démocrite est un peu plus scientifique, plus bricoleur de l'invisible. Lui aussi cherche à comprendre ce qui compose le monde, mais il va encore plus loin. Il imagine que tout, absolument tout, et fait de minuscules particules invisibles qu'il appelle atomes. Je persiste à dire, et démocrite mon été moi, que tout ce qui arrive est le fruit du destin. Tout, invisible, indivisible, éternel, les atomes dansent dans le vide, forgeant tout ce qui existe, même nos pensées. Tout ce que nous percevons, dit-il, est le résultat de ces mouvements d'atomes. Je vous le donne dans le mille, le mec a quasiment inventé ce qu'on appelle la physique moderne. La nature n'est alors pas magique. ou capricieuse, elle est ordonnée, compréhensible, régie par des lois. L'environnement devient peu à peu un objet d'étude, on peut chercher à comprendre pourquoi il pleut, pourquoi les plantes poussent, pourquoi les corps tombent ou brûlent, sans invoquer les dieux. Empédocle et Démocrite ouvrent la voie à la science moderne, chacun un peu à leur manière. Empédocle en pensant en termes de cycles et d'équilibre, et Démocrite en posant les bases d'une pensée atomique matérialiste. Durant le même siècle, Platon, lui, arrive avec une autre vision. La nature, c'est le monde sensible, ce que l'on voit, ce que l'on touche. Mais ce monde, selon lui, est imparfait. C'est une copie, une imitation. La matrice est la simulation d'un monde imaginaire, créé dans le seul but de nous maintenir sous contrôle. Le vrai, le beau, le parfait, ça se trouve ailleurs, dans ce qu'il appelle le monde des idées. Un monde immuable, Invisible, mais bizarrement plus réel que le nôtre. La nature, chez Platon, ce n'est pas une fin en soi. Elle est un reflet déformé. Et cette séparation va durablement influencer notre rapport au réel. Ce qu'on voit n'est peut-être pas ce qui compte vraiment. Le siècle suivant, c'est-à-dire au IVe siècle avant Jésus-Christ, Aristote va un peu reprendre le flambeau. Mais pour lui, la nature n'est pas une copie déformée ni chaos. Elle est une structure ordonnée et intelligible. Chaque chose a une fonction, une place, une finalité. Par exemple, si on imagine que vous donniez une montre à Aristote, eh bien il vous dirait que chaque rouage de cette montre a un rôle. Pour lui, la nature fonctionne absolument pareil. Les ailes de l'oiseau ? Bah c'est pour voler. Les nageoires du poisson ? Bah c'est pour nager. Même les cailloux cherchent à tomber selon lui. « Et là ! C'est juste un caillou ! » Cela leur permettrait ainsi... de rejoindre leur lieu naturel, qui, après déduction de ma part, pourrait s'avérer être le sol. Faut dire, l'ambition d'un caillou, finalement, c'est pas de toucher des étoiles, c'est juste de toucher Terre, littéralement. Mais attention, Aristote, ce n'est pas un simplificateur. Il parle de quatre causes pour expliquer le réel. Tout d'abord, la cause matérielle, donc de quoi c'est fait. La cause formelle, la forme que cela prend. La cause efficiente. ce qui met en mouvement, et enfin la cause finale, qui est le but. Il est aussi l'un des premiers à dire que la connaissance passe par l'observation. Il va donc disséquer des animaux, observer leurs comportements, et dans un sens, il fonde ce qu'on pourrait appeler aujourd'hui la biologie. Sa conviction profonde, la nature ne fait rien au hasard, ni rien en vain. A la fin du IVe siècle, arrivent ensuite les stoïciens. Pour vous la faire courte, le stoïcisme, c'est une école philosophique née en Grèce et fondée par Zénon de Citium. C'est une pensée qui prône la maîtrise de soi, la raison et l'acceptation sereine du destin comme voie vers la sagesse, mais aussi vers la tranquillité de l'âme. Les stoïciens voient dans la nature une structure rationnelle. Tout est gouverné par une force cosmique qu'ils appellent le Logos, un principe d'ordre, de raison, quasiment divin. Et leur objectif, c'est de vivre en harmonie avec cet ordre. Accepter ce qui est, ne pas lutter contre la nature des choses, pour eux, la sagesse, c'est de comprendre que tout est lié et que la vertu humaine, c'est de s'accorder à la raison du monde. Passons à présent au premier siècle avant Jésus-Christ. Imaginez un homme qui ne cherche pas à dominer la nature, ni à en percer les secrets pour le simple plaisir de savoir. Cet homme, c'est Strabon. C'est pas un philosophe dans une toge en train de méditer sur les nuages. Non, lui c'est un explorateur. Il observe, il voyage, il trace des cartes, un peu comme Dora l'exploratrice, mais version antique. Ce qui l'intéresse, ce n'est pas la nature pour elle-même, mais ce qu'elle fait aux humains. Pourquoi certaines civilisations grandissent, prospèrent, inventent, et d'autres s'effondrent ? Est-ce le climat, la géographie, l'environnement ? Oui, mais pas uniquement. Pour Strabon, il faut aussi regarder l'histoire, la culture et les décisions humaines. Il est l'un des premiers à dire « Comprendre la relation entre l'homme et son milieu, c'est aider les sociétés à mieux vivre. » En reliant la nature Ausha humains, Strabon ne le sait certainement pas, mais il est un peu en train d'inventer la géographie, voire carrément l'histoire de l'environnement. Faisons un petit bond en arrière. Toujours en Grèce, mais au IIe siècle avant Jésus-Christ. Imaginez les cieux sans lumière artificielle, une voûte étoilée éclatante, des constellations familières aux navigateurs, aux paysans, aux poètes, et une lune brillante maîtresse des nuits. Et parfois, cette lune disparaît, comme avalée, éteinte. À une époque où les éclipses sont vécues comme des signes des dieux ou même des présages de malheur, une femme, Aglaonis de Thessalie, va sortir de l'ombre. Elle ne tremble pas devant ce spectacle céleste. Non, elle sait, elle prédit ces éclipses. Et mieux encore, elle les annonce à l'avance. Oui, Aglaonis est ce que l'on pourrait appeler une des premières astronomes de l'histoire. On raconte qu'elle connaissait suffisamment bien les cycles lunaires pour prévoir les moments où la Lune serait éclipsée par l'ombre de la Terre. En son temps, ce savoir était perçu comme un pouvoir quasi magique. On la disait sorcière. Pas étonnant. Une femme, seule, capable de faire disparaître la Lune, Ça faisait trembler plus d'un patriarque grec. Ok, boomer ! Mais ce qu'Aglanis faisait, ce n'était pas de la magie. C'était de la science, de l'observation, de la méthode. Elle regardait la nature, elle l'écoutait, elle l'analysait. Et ça, c'est une petite révolution. Encore à cette époque, beaucoup voyaient dans chaque phénomène naturel une manifestation divine, un oracle, une punition, un message. Et elle, au contraire, a montré qu'on pouvait comprendre ce phénomène qu'ils obéissaient à des lois, que l'environnement n'était pas une entité capricieuse, mais un monde lisible, rythmé et prévisible. En cela, Aglaonis a participé à un basculement essentiel, le passage du mythe à la connaissance. Et petite anecdote, un cratère lunaire porte aujourd'hui son nom, hommage mérité à celle qui a su lire la Lune comme un livre ouvert. Mais la science antique ne s'exprime pas seulement par les démonstrations. Avec Lucrèce, elle devient un chant. Son œuvre de la nature des choses est un des chefs-d'œuvre de la science avant-l'œuvre. Lucrèce ne croit pas aux éclairs envoyés par Zeus, ni aux tremblements de terre comme des punitions divines. Pour lui, tout s'explique par des lois naturelles, et il s'inspire d'ailleurs d'Épicure et de Démocrite, qui disaient déjà avant que tout est composé d'atomes. Il parle des saisons, des maladies, des plantes, de la foudre, des volcans, et cherche à comprendre. Il refuse la peur des dieux et propose une autre voie, la même qu'Aglaonis de Thessalie, celle de la connaissance. Sa pensée est simple, mais forte. Nous faisons partie de la nature, nous ne sommes pas au-dessus d'elle. Pour en finir avec l'Antiquité, je vous propose de quitter un peu les grands systèmes philosophiques pour rejoindre Alexandrie. l'un des derniers bastions du savoir antique, où une femme va incarner cette quête de compréhension du monde, une figure précieuse et symbolique, j'ai nommé Hippatie. Hippatie, c'est une philosophe, une astronome, une mathématicienne et aussi une prof. Un génie, playboy, philanthrope, milliardaire. Oui, au IVe siècle, elle enseigne la pensée, les sciences, le ciel et les nombres. Elle ne parle pas d'écologie ou d'environnement comme on le fait aujourd'hui, mais elle pose une question essentielle. Comment fonctionne la nature ? Et surtout, peut-on la comprendre ? Pour elle, c'est la nature. Le monde n'est pas un caprice des dieux, ni un chaos incompréhensible. Le monde, c'est un langage. Et ce langage, on peut le déchiffrer, pas avec la foi, avec la raison. Dans son école à Alexandrie, elle enseigne les grands penseurs comme Platon, Euclide, et elle utilise probablement un astrolabe, qui est si vous voulez un instrument qui permet de lire les étoiles et de comprendre les mouvements du ciel. Ce qu'elle transmet à ses élèves, ce n'est pas seulement du savoir. C'est une idée révolutionnaire, la nature a une logique. Et en la comprenant, on touche à quelque chose de plus grand, de beau, de presque divin. Mais voilà, Alexandrie, c'est aussi une poudrière prête à exploser. L'Empire romain devient chrétien et les anciennes traditions philosophiques païennes vacillent. Hippatie est proche du gouverneur Orestes, engagé dans un bras de fer. avec le puissant patriarche chrétien Syrie. Très vite, Hypatie devient une cible. On l'accuse de sorcellerie, d'empêcher la paix et aussi d'être l'ennemi du Christ. En 415, alors qu'elle circule en char dans les rues d'Alexandrie, elle est interceptée par une foule fanatique. Traînée dans une église, elle est déshabillée, mutilée à coups de tessons et son corps est brûlé. C'est plus qu'un meurtre, c'est un symbole. celui de la fin d'une époque où la pensée le doute et la science avaient encore leur place dans la cité hippatie meurt mais elle devient une figure éternelle de la raison face à l'obscurantisme des premiers philosophes de la grèce antique aux pensées éclairées de l'inde ou d'alexandrie une même volonté traverse les siècles comprendre la nature non plus comme un mystère effrayant ou sacré, mais comme un ordre vivant, logique, parfois même poétique. À travers Empédocle, Démocrite, Aristote, Hippatie, Lucrèce ou encore Gargi, se construit peu à peu une vision du monde où la nature devient un objet de savoir, d'admiration, mais aussi de respect. Tu crois que c'est du respect, ça ? Tu crois que c'est du respect, mon garçon ? Ces penseurs et penseuses jettent un peu les bases d'une science encore jeune, mais déjà ambitieuse, qui cherchent à déchiffrer les lois du vivant plutôt qu'à les craindre. Mais ce dialogue entre l'homme et la nature ne s'arrête pas là. À l'aube du Moyen-Âge, une nouvelle ère s'ouvre, celle où la pensée chrétienne s'empare de ses héritages antiques pour les relire à la lumière de la foi. La nature y sera alors perçue non seulement comme un ordre, mais aussi comme une création divine, reflète d'un dessein supérieur. Mais cette histoire-là sera pour le prochain épisode. Merci beaucoup d'avoir écouté ce premier épisode consacré à l'histoire de notre regard sur la nature. J'espère tout d'abord que le sujet vous a plu, et si ce n'est pas encore le cas, je laisserai les prochains épisodes vous surprendre. N'hésitez surtout pas à me faire part de vos retours sur les réseaux sociaux, car vos avis, vos partages et vos commentaires sont vraiment précieux pour faire grandir ce projet. Parlez-en autour de vous, toujours dans un esprit de bienveillance, et bien sûr, pensez à vous abonner à la chaîne pour ne rien manquer. Il n'est de si bonne compagnie qui ne se sépare. Et en attendant les prochains épisodes de cette série, je vous dis au revoir et à très vite sur Environ.

Chapters

  • La nature comme force vivante, autonome et mystérieuse

    01:25

  • La nature comme ordre imparfait ou finalisé

    06:29

  • La nature comme objet de savoir rationnel et universel

    09:51

  • Etducoup ? (Conclusion)

    16:46

Description

Et si notre façon de voir notre environnement ne venait pas seulement de nous mais de siècles d’histoires, d’idées, de récits ? 🌿
Dans ce premier épisode de "Penser la nature dans l'Histoire", on remonte le fil du temps jusqu’à l’Antiquité, pour explorer comment nos anciens comprenaient la nature. 🏞️

On y croise des philosophes-poètes, des pionnières de la science, des questions vertigineuses et des visions du monde bien différentes des nôtres. 🧐
De Gargi à Aristote, de Démocrite à Hypatie, on va découvrir comment ces penseurs et penseuses ont appréhendé la Terre, le ciel, le vivant… et ce que ça dit de nous aujourd’hui. 🌍

Très bonne écoute à vous ! 🐙


Biblio 

  • Bailey Ogilvie Marilyn , “Women in Science: Antiquity through the Nineteenth Century”, 1986.

  • Dumont Jean-Paul (Sous la direction de), Les écoles présocratiques, 1991.

  • Nixey Catherine, L’obscurcissement du monde. La destruction de la culture classique par le christianisme, 2019.

  • Sawyer Deborah, Women and Religion in the First Christian Centuries, Routledge, 1996.

  • Worms Frédéric (dir.), La Nature, coll. “Les Notions philosophiques”, 2013.

  • "Aglaonice of Thessaly: Astronomer or Sorceress?" – Journal of the History of Astronomy, vol. 7, 1976.

  • Brihadaranyaka Upanishad (Upanishad du Grand Livre de la forêt), traduction de Martine Buttex, 2007-2008.

  • "Le concept de nature à travers les âges", ISDD, 23 mars 2023.

Ressources en ligne utilisées


Images (de haut en bas, droite à gauche) : 

  • Mosaïque du Nil (ou parfois simplement Mosaïque marine de Pompéi), Ier siècle av. J.-C, auteur inconnu.

  • Mosaïque de Neptune et des créatures marines, Fin du IIe siècle - début du IIIe siècle ap. J.-C, auteur inconnu.

  • Jardin de la villa de Livia (ou Jardin de Livia à Primaporta), Vers 30–20 av. J.-C, auteur inconnu.

  • Diane de Versailles, vers 330 av. J.-C, Attribué à Léocharès.


Crédits musicaux (Licensed under Creative Commons : By Attribution 4.0 License - https://incompetech.com/) :

  • "Documentary Nature Ambient" DELOSound

  • "Seek India" Hans Johnson

  • "Karpathos" Emmanuel Jacob

  • "Half Moon" Itai Armon

  • "Walking Garden" T_Asco

  • "Kimray" Emmanuel Jacob

  • "Chalkis" Emmanuel Jacob

  • "A New Start" The Bows

  • "My Sifnos" Emmanuel Jacob



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour ou bonsoir à tous et à toutes, et bienvenue sur Environ, le podcast qui parle d'histoire de l'environnement. Peut-être que vous vous êtes déjà demandé comment vous perceviez la nature. Un décor, un paysage, une ressource, un temple ? Mais cette vision, eh bien vous ne l'avez pas choisie, on vous l'a transmise. Crise climatique, effondrement de la biodiversité, pollution massive, on pense souvent que ce sont des problèmes techniques, donc du CO2 à réduire, des forêts à protéger. Mais si le cœur du problème, c'était notre vision de la nature, de notre environnement. Ce qu'on appelle crise environnementale pourrait bien être, avant tout, une crise de perception. Et afin de comprendre comment on en est arrivé là, il faut remonter le fil de notre histoire, l'histoire de notre regard sur la nature. Dans cette série d'épisodes, on va essayer de couvrir 2500 ans d'idées, de récits, mais aussi de croyances. Bon, dit comme ça, ça a l'air un peu énorme, mais vous en faites pas, on va y aller petit pas par petit pas. Sur ce, je ne vous en dis pas plus, et allons ensemble découvrir ce nouvel environ. Il y a plus de 2700 ans, bien avant que les sciences modernes n'existent, une femme s'est levée pour poser une question. Une question si simple et pourtant si vertigineuse qu'elle résonne encore aujourd'hui. Cette femme, c'est Gargi Vajaknabi. Au cœur de l'Inde ancienne, dans un monde où les hommes dominent les débats philosophiques, Gargi s'est levée pour parler. Devant des rois, des sages et des prêtres, elle a osé interroger la nature de tout ce qui existe. Sur quoi repose le monde et ce qui le soutient, qu'est-ce qui le soutient encore ? Et ça, ce n'est pas une devinette, ce n'est pas non plus un exercice intellectuel, c'est une quête, celle de comprendre l'invisible, l'infini, ce lien mystérieux qui relie toute chose. Pour Gargi, la Terre, le ciel, les étoiles, les arbres et les hommes, tout cela fait partie d'un immense tissu, un ordre cosmique, un souffle. Et ce souffle, elle l'appelle Brahman. Non pas un dieu, mais une réalité profonde qu'on ne peut ni voir, ni toucher, mais qui est là, partout. En posant ces grandes questions, elle nous invite déjà à respecter ce que nous ne comprenons pas entièrement, à vivre avec humilité dans un monde qui nous dépasse. Dans un certain sens, on peut dire qu'elle a planté une graine, celle d'une écologie intérieure, qui commence par une question sincère. Qu'est-ce qui nous relie vraiment aux autres, à la nature, à l'univers ? Je s'appelle Goop. Avec elle, la nature n'est pas autre que nous. Ce que nous faisons à la Terre, c'est à nous-mêmes que nous le faisons. Chez les grecs anciens, la nature ne se résume pas à un simple décor, à une série de paysages ou même à des ressources. Non. Il parle de « fusis » . Et ce mot veut dire bien plus que « nature » . Fusis, c'est le souffle même de la croissance, de l'apparition et de la transformation. C'est la puissance d'engendrement, une dynamique qui est interne à la réalité. Je dis simplement que la vie trouve toujours un chemin. Autrement dit, la fusis est vivante, en mouvement, et elle suit son propre rythme. On va commencer au 5e siècle avant Jésus-Christ avec... Empédocle. Empédocle, c'est un peu un philosophe poète. Il regarde autour de lui et se dit « Tout ce que je vois, les arbres, les animaux, l'eau, le feu, les hommes, ne pourrait-il pas y avoir une sorte de recette de base à toute cette diversité ? » C'est alors qu'il va proposer une idée assez révolutionnaire pour l'époque. Tout dans le monde est fait d'un mélange de quatre éléments. L'eau, la terre. Le feu. L'air. Un peu comme des ingrédients dans une soupe, ces éléments se mélangent dans différentes proportions pour créer tout ce qui existe. Mais ce n'est pas tout. Il dit aussi que deux grandes forces invisibles agissent sur ces éléments, l'amour et la haine. Ces forces seraient à l'origine du grand balai cosmique, c'est-à-dire l'amour assemble et la haine disperse. Grâce à elle, les choses naissent, évoluent, puis disparaissent. Et grâce à cette vision, Empédocle nous invite à voir la nature comme un système en mouvement perpétuel, où les transformations sont naturelles et logiques, pas des punitions divines. De son côté, Démocrite est un peu plus scientifique, plus bricoleur de l'invisible. Lui aussi cherche à comprendre ce qui compose le monde, mais il va encore plus loin. Il imagine que tout, absolument tout, et fait de minuscules particules invisibles qu'il appelle atomes. Je persiste à dire, et démocrite mon été moi, que tout ce qui arrive est le fruit du destin. Tout, invisible, indivisible, éternel, les atomes dansent dans le vide, forgeant tout ce qui existe, même nos pensées. Tout ce que nous percevons, dit-il, est le résultat de ces mouvements d'atomes. Je vous le donne dans le mille, le mec a quasiment inventé ce qu'on appelle la physique moderne. La nature n'est alors pas magique. ou capricieuse, elle est ordonnée, compréhensible, régie par des lois. L'environnement devient peu à peu un objet d'étude, on peut chercher à comprendre pourquoi il pleut, pourquoi les plantes poussent, pourquoi les corps tombent ou brûlent, sans invoquer les dieux. Empédocle et Démocrite ouvrent la voie à la science moderne, chacun un peu à leur manière. Empédocle en pensant en termes de cycles et d'équilibre, et Démocrite en posant les bases d'une pensée atomique matérialiste. Durant le même siècle, Platon, lui, arrive avec une autre vision. La nature, c'est le monde sensible, ce que l'on voit, ce que l'on touche. Mais ce monde, selon lui, est imparfait. C'est une copie, une imitation. La matrice est la simulation d'un monde imaginaire, créé dans le seul but de nous maintenir sous contrôle. Le vrai, le beau, le parfait, ça se trouve ailleurs, dans ce qu'il appelle le monde des idées. Un monde immuable, Invisible, mais bizarrement plus réel que le nôtre. La nature, chez Platon, ce n'est pas une fin en soi. Elle est un reflet déformé. Et cette séparation va durablement influencer notre rapport au réel. Ce qu'on voit n'est peut-être pas ce qui compte vraiment. Le siècle suivant, c'est-à-dire au IVe siècle avant Jésus-Christ, Aristote va un peu reprendre le flambeau. Mais pour lui, la nature n'est pas une copie déformée ni chaos. Elle est une structure ordonnée et intelligible. Chaque chose a une fonction, une place, une finalité. Par exemple, si on imagine que vous donniez une montre à Aristote, eh bien il vous dirait que chaque rouage de cette montre a un rôle. Pour lui, la nature fonctionne absolument pareil. Les ailes de l'oiseau ? Bah c'est pour voler. Les nageoires du poisson ? Bah c'est pour nager. Même les cailloux cherchent à tomber selon lui. « Et là ! C'est juste un caillou ! » Cela leur permettrait ainsi... de rejoindre leur lieu naturel, qui, après déduction de ma part, pourrait s'avérer être le sol. Faut dire, l'ambition d'un caillou, finalement, c'est pas de toucher des étoiles, c'est juste de toucher Terre, littéralement. Mais attention, Aristote, ce n'est pas un simplificateur. Il parle de quatre causes pour expliquer le réel. Tout d'abord, la cause matérielle, donc de quoi c'est fait. La cause formelle, la forme que cela prend. La cause efficiente. ce qui met en mouvement, et enfin la cause finale, qui est le but. Il est aussi l'un des premiers à dire que la connaissance passe par l'observation. Il va donc disséquer des animaux, observer leurs comportements, et dans un sens, il fonde ce qu'on pourrait appeler aujourd'hui la biologie. Sa conviction profonde, la nature ne fait rien au hasard, ni rien en vain. A la fin du IVe siècle, arrivent ensuite les stoïciens. Pour vous la faire courte, le stoïcisme, c'est une école philosophique née en Grèce et fondée par Zénon de Citium. C'est une pensée qui prône la maîtrise de soi, la raison et l'acceptation sereine du destin comme voie vers la sagesse, mais aussi vers la tranquillité de l'âme. Les stoïciens voient dans la nature une structure rationnelle. Tout est gouverné par une force cosmique qu'ils appellent le Logos, un principe d'ordre, de raison, quasiment divin. Et leur objectif, c'est de vivre en harmonie avec cet ordre. Accepter ce qui est, ne pas lutter contre la nature des choses, pour eux, la sagesse, c'est de comprendre que tout est lié et que la vertu humaine, c'est de s'accorder à la raison du monde. Passons à présent au premier siècle avant Jésus-Christ. Imaginez un homme qui ne cherche pas à dominer la nature, ni à en percer les secrets pour le simple plaisir de savoir. Cet homme, c'est Strabon. C'est pas un philosophe dans une toge en train de méditer sur les nuages. Non, lui c'est un explorateur. Il observe, il voyage, il trace des cartes, un peu comme Dora l'exploratrice, mais version antique. Ce qui l'intéresse, ce n'est pas la nature pour elle-même, mais ce qu'elle fait aux humains. Pourquoi certaines civilisations grandissent, prospèrent, inventent, et d'autres s'effondrent ? Est-ce le climat, la géographie, l'environnement ? Oui, mais pas uniquement. Pour Strabon, il faut aussi regarder l'histoire, la culture et les décisions humaines. Il est l'un des premiers à dire « Comprendre la relation entre l'homme et son milieu, c'est aider les sociétés à mieux vivre. » En reliant la nature Ausha humains, Strabon ne le sait certainement pas, mais il est un peu en train d'inventer la géographie, voire carrément l'histoire de l'environnement. Faisons un petit bond en arrière. Toujours en Grèce, mais au IIe siècle avant Jésus-Christ. Imaginez les cieux sans lumière artificielle, une voûte étoilée éclatante, des constellations familières aux navigateurs, aux paysans, aux poètes, et une lune brillante maîtresse des nuits. Et parfois, cette lune disparaît, comme avalée, éteinte. À une époque où les éclipses sont vécues comme des signes des dieux ou même des présages de malheur, une femme, Aglaonis de Thessalie, va sortir de l'ombre. Elle ne tremble pas devant ce spectacle céleste. Non, elle sait, elle prédit ces éclipses. Et mieux encore, elle les annonce à l'avance. Oui, Aglaonis est ce que l'on pourrait appeler une des premières astronomes de l'histoire. On raconte qu'elle connaissait suffisamment bien les cycles lunaires pour prévoir les moments où la Lune serait éclipsée par l'ombre de la Terre. En son temps, ce savoir était perçu comme un pouvoir quasi magique. On la disait sorcière. Pas étonnant. Une femme, seule, capable de faire disparaître la Lune, Ça faisait trembler plus d'un patriarque grec. Ok, boomer ! Mais ce qu'Aglanis faisait, ce n'était pas de la magie. C'était de la science, de l'observation, de la méthode. Elle regardait la nature, elle l'écoutait, elle l'analysait. Et ça, c'est une petite révolution. Encore à cette époque, beaucoup voyaient dans chaque phénomène naturel une manifestation divine, un oracle, une punition, un message. Et elle, au contraire, a montré qu'on pouvait comprendre ce phénomène qu'ils obéissaient à des lois, que l'environnement n'était pas une entité capricieuse, mais un monde lisible, rythmé et prévisible. En cela, Aglaonis a participé à un basculement essentiel, le passage du mythe à la connaissance. Et petite anecdote, un cratère lunaire porte aujourd'hui son nom, hommage mérité à celle qui a su lire la Lune comme un livre ouvert. Mais la science antique ne s'exprime pas seulement par les démonstrations. Avec Lucrèce, elle devient un chant. Son œuvre de la nature des choses est un des chefs-d'œuvre de la science avant-l'œuvre. Lucrèce ne croit pas aux éclairs envoyés par Zeus, ni aux tremblements de terre comme des punitions divines. Pour lui, tout s'explique par des lois naturelles, et il s'inspire d'ailleurs d'Épicure et de Démocrite, qui disaient déjà avant que tout est composé d'atomes. Il parle des saisons, des maladies, des plantes, de la foudre, des volcans, et cherche à comprendre. Il refuse la peur des dieux et propose une autre voie, la même qu'Aglaonis de Thessalie, celle de la connaissance. Sa pensée est simple, mais forte. Nous faisons partie de la nature, nous ne sommes pas au-dessus d'elle. Pour en finir avec l'Antiquité, je vous propose de quitter un peu les grands systèmes philosophiques pour rejoindre Alexandrie. l'un des derniers bastions du savoir antique, où une femme va incarner cette quête de compréhension du monde, une figure précieuse et symbolique, j'ai nommé Hippatie. Hippatie, c'est une philosophe, une astronome, une mathématicienne et aussi une prof. Un génie, playboy, philanthrope, milliardaire. Oui, au IVe siècle, elle enseigne la pensée, les sciences, le ciel et les nombres. Elle ne parle pas d'écologie ou d'environnement comme on le fait aujourd'hui, mais elle pose une question essentielle. Comment fonctionne la nature ? Et surtout, peut-on la comprendre ? Pour elle, c'est la nature. Le monde n'est pas un caprice des dieux, ni un chaos incompréhensible. Le monde, c'est un langage. Et ce langage, on peut le déchiffrer, pas avec la foi, avec la raison. Dans son école à Alexandrie, elle enseigne les grands penseurs comme Platon, Euclide, et elle utilise probablement un astrolabe, qui est si vous voulez un instrument qui permet de lire les étoiles et de comprendre les mouvements du ciel. Ce qu'elle transmet à ses élèves, ce n'est pas seulement du savoir. C'est une idée révolutionnaire, la nature a une logique. Et en la comprenant, on touche à quelque chose de plus grand, de beau, de presque divin. Mais voilà, Alexandrie, c'est aussi une poudrière prête à exploser. L'Empire romain devient chrétien et les anciennes traditions philosophiques païennes vacillent. Hippatie est proche du gouverneur Orestes, engagé dans un bras de fer. avec le puissant patriarche chrétien Syrie. Très vite, Hypatie devient une cible. On l'accuse de sorcellerie, d'empêcher la paix et aussi d'être l'ennemi du Christ. En 415, alors qu'elle circule en char dans les rues d'Alexandrie, elle est interceptée par une foule fanatique. Traînée dans une église, elle est déshabillée, mutilée à coups de tessons et son corps est brûlé. C'est plus qu'un meurtre, c'est un symbole. celui de la fin d'une époque où la pensée le doute et la science avaient encore leur place dans la cité hippatie meurt mais elle devient une figure éternelle de la raison face à l'obscurantisme des premiers philosophes de la grèce antique aux pensées éclairées de l'inde ou d'alexandrie une même volonté traverse les siècles comprendre la nature non plus comme un mystère effrayant ou sacré, mais comme un ordre vivant, logique, parfois même poétique. À travers Empédocle, Démocrite, Aristote, Hippatie, Lucrèce ou encore Gargi, se construit peu à peu une vision du monde où la nature devient un objet de savoir, d'admiration, mais aussi de respect. Tu crois que c'est du respect, ça ? Tu crois que c'est du respect, mon garçon ? Ces penseurs et penseuses jettent un peu les bases d'une science encore jeune, mais déjà ambitieuse, qui cherchent à déchiffrer les lois du vivant plutôt qu'à les craindre. Mais ce dialogue entre l'homme et la nature ne s'arrête pas là. À l'aube du Moyen-Âge, une nouvelle ère s'ouvre, celle où la pensée chrétienne s'empare de ses héritages antiques pour les relire à la lumière de la foi. La nature y sera alors perçue non seulement comme un ordre, mais aussi comme une création divine, reflète d'un dessein supérieur. Mais cette histoire-là sera pour le prochain épisode. Merci beaucoup d'avoir écouté ce premier épisode consacré à l'histoire de notre regard sur la nature. J'espère tout d'abord que le sujet vous a plu, et si ce n'est pas encore le cas, je laisserai les prochains épisodes vous surprendre. N'hésitez surtout pas à me faire part de vos retours sur les réseaux sociaux, car vos avis, vos partages et vos commentaires sont vraiment précieux pour faire grandir ce projet. Parlez-en autour de vous, toujours dans un esprit de bienveillance, et bien sûr, pensez à vous abonner à la chaîne pour ne rien manquer. Il n'est de si bonne compagnie qui ne se sépare. Et en attendant les prochains épisodes de cette série, je vous dis au revoir et à très vite sur Environ.

Chapters

  • La nature comme force vivante, autonome et mystérieuse

    01:25

  • La nature comme ordre imparfait ou finalisé

    06:29

  • La nature comme objet de savoir rationnel et universel

    09:51

  • Etducoup ? (Conclusion)

    16:46

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Description

Et si notre façon de voir notre environnement ne venait pas seulement de nous mais de siècles d’histoires, d’idées, de récits ? 🌿
Dans ce premier épisode de "Penser la nature dans l'Histoire", on remonte le fil du temps jusqu’à l’Antiquité, pour explorer comment nos anciens comprenaient la nature. 🏞️

On y croise des philosophes-poètes, des pionnières de la science, des questions vertigineuses et des visions du monde bien différentes des nôtres. 🧐
De Gargi à Aristote, de Démocrite à Hypatie, on va découvrir comment ces penseurs et penseuses ont appréhendé la Terre, le ciel, le vivant… et ce que ça dit de nous aujourd’hui. 🌍

Très bonne écoute à vous ! 🐙


Biblio 

  • Bailey Ogilvie Marilyn , “Women in Science: Antiquity through the Nineteenth Century”, 1986.

  • Dumont Jean-Paul (Sous la direction de), Les écoles présocratiques, 1991.

  • Nixey Catherine, L’obscurcissement du monde. La destruction de la culture classique par le christianisme, 2019.

  • Sawyer Deborah, Women and Religion in the First Christian Centuries, Routledge, 1996.

  • Worms Frédéric (dir.), La Nature, coll. “Les Notions philosophiques”, 2013.

  • "Aglaonice of Thessaly: Astronomer or Sorceress?" – Journal of the History of Astronomy, vol. 7, 1976.

  • Brihadaranyaka Upanishad (Upanishad du Grand Livre de la forêt), traduction de Martine Buttex, 2007-2008.

  • "Le concept de nature à travers les âges", ISDD, 23 mars 2023.

Ressources en ligne utilisées


Images (de haut en bas, droite à gauche) : 

  • Mosaïque du Nil (ou parfois simplement Mosaïque marine de Pompéi), Ier siècle av. J.-C, auteur inconnu.

  • Mosaïque de Neptune et des créatures marines, Fin du IIe siècle - début du IIIe siècle ap. J.-C, auteur inconnu.

  • Jardin de la villa de Livia (ou Jardin de Livia à Primaporta), Vers 30–20 av. J.-C, auteur inconnu.

  • Diane de Versailles, vers 330 av. J.-C, Attribué à Léocharès.


Crédits musicaux (Licensed under Creative Commons : By Attribution 4.0 License - https://incompetech.com/) :

  • "Documentary Nature Ambient" DELOSound

  • "Seek India" Hans Johnson

  • "Karpathos" Emmanuel Jacob

  • "Half Moon" Itai Armon

  • "Walking Garden" T_Asco

  • "Kimray" Emmanuel Jacob

  • "Chalkis" Emmanuel Jacob

  • "A New Start" The Bows

  • "My Sifnos" Emmanuel Jacob



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour ou bonsoir à tous et à toutes, et bienvenue sur Environ, le podcast qui parle d'histoire de l'environnement. Peut-être que vous vous êtes déjà demandé comment vous perceviez la nature. Un décor, un paysage, une ressource, un temple ? Mais cette vision, eh bien vous ne l'avez pas choisie, on vous l'a transmise. Crise climatique, effondrement de la biodiversité, pollution massive, on pense souvent que ce sont des problèmes techniques, donc du CO2 à réduire, des forêts à protéger. Mais si le cœur du problème, c'était notre vision de la nature, de notre environnement. Ce qu'on appelle crise environnementale pourrait bien être, avant tout, une crise de perception. Et afin de comprendre comment on en est arrivé là, il faut remonter le fil de notre histoire, l'histoire de notre regard sur la nature. Dans cette série d'épisodes, on va essayer de couvrir 2500 ans d'idées, de récits, mais aussi de croyances. Bon, dit comme ça, ça a l'air un peu énorme, mais vous en faites pas, on va y aller petit pas par petit pas. Sur ce, je ne vous en dis pas plus, et allons ensemble découvrir ce nouvel environ. Il y a plus de 2700 ans, bien avant que les sciences modernes n'existent, une femme s'est levée pour poser une question. Une question si simple et pourtant si vertigineuse qu'elle résonne encore aujourd'hui. Cette femme, c'est Gargi Vajaknabi. Au cœur de l'Inde ancienne, dans un monde où les hommes dominent les débats philosophiques, Gargi s'est levée pour parler. Devant des rois, des sages et des prêtres, elle a osé interroger la nature de tout ce qui existe. Sur quoi repose le monde et ce qui le soutient, qu'est-ce qui le soutient encore ? Et ça, ce n'est pas une devinette, ce n'est pas non plus un exercice intellectuel, c'est une quête, celle de comprendre l'invisible, l'infini, ce lien mystérieux qui relie toute chose. Pour Gargi, la Terre, le ciel, les étoiles, les arbres et les hommes, tout cela fait partie d'un immense tissu, un ordre cosmique, un souffle. Et ce souffle, elle l'appelle Brahman. Non pas un dieu, mais une réalité profonde qu'on ne peut ni voir, ni toucher, mais qui est là, partout. En posant ces grandes questions, elle nous invite déjà à respecter ce que nous ne comprenons pas entièrement, à vivre avec humilité dans un monde qui nous dépasse. Dans un certain sens, on peut dire qu'elle a planté une graine, celle d'une écologie intérieure, qui commence par une question sincère. Qu'est-ce qui nous relie vraiment aux autres, à la nature, à l'univers ? Je s'appelle Goop. Avec elle, la nature n'est pas autre que nous. Ce que nous faisons à la Terre, c'est à nous-mêmes que nous le faisons. Chez les grecs anciens, la nature ne se résume pas à un simple décor, à une série de paysages ou même à des ressources. Non. Il parle de « fusis » . Et ce mot veut dire bien plus que « nature » . Fusis, c'est le souffle même de la croissance, de l'apparition et de la transformation. C'est la puissance d'engendrement, une dynamique qui est interne à la réalité. Je dis simplement que la vie trouve toujours un chemin. Autrement dit, la fusis est vivante, en mouvement, et elle suit son propre rythme. On va commencer au 5e siècle avant Jésus-Christ avec... Empédocle. Empédocle, c'est un peu un philosophe poète. Il regarde autour de lui et se dit « Tout ce que je vois, les arbres, les animaux, l'eau, le feu, les hommes, ne pourrait-il pas y avoir une sorte de recette de base à toute cette diversité ? » C'est alors qu'il va proposer une idée assez révolutionnaire pour l'époque. Tout dans le monde est fait d'un mélange de quatre éléments. L'eau, la terre. Le feu. L'air. Un peu comme des ingrédients dans une soupe, ces éléments se mélangent dans différentes proportions pour créer tout ce qui existe. Mais ce n'est pas tout. Il dit aussi que deux grandes forces invisibles agissent sur ces éléments, l'amour et la haine. Ces forces seraient à l'origine du grand balai cosmique, c'est-à-dire l'amour assemble et la haine disperse. Grâce à elle, les choses naissent, évoluent, puis disparaissent. Et grâce à cette vision, Empédocle nous invite à voir la nature comme un système en mouvement perpétuel, où les transformations sont naturelles et logiques, pas des punitions divines. De son côté, Démocrite est un peu plus scientifique, plus bricoleur de l'invisible. Lui aussi cherche à comprendre ce qui compose le monde, mais il va encore plus loin. Il imagine que tout, absolument tout, et fait de minuscules particules invisibles qu'il appelle atomes. Je persiste à dire, et démocrite mon été moi, que tout ce qui arrive est le fruit du destin. Tout, invisible, indivisible, éternel, les atomes dansent dans le vide, forgeant tout ce qui existe, même nos pensées. Tout ce que nous percevons, dit-il, est le résultat de ces mouvements d'atomes. Je vous le donne dans le mille, le mec a quasiment inventé ce qu'on appelle la physique moderne. La nature n'est alors pas magique. ou capricieuse, elle est ordonnée, compréhensible, régie par des lois. L'environnement devient peu à peu un objet d'étude, on peut chercher à comprendre pourquoi il pleut, pourquoi les plantes poussent, pourquoi les corps tombent ou brûlent, sans invoquer les dieux. Empédocle et Démocrite ouvrent la voie à la science moderne, chacun un peu à leur manière. Empédocle en pensant en termes de cycles et d'équilibre, et Démocrite en posant les bases d'une pensée atomique matérialiste. Durant le même siècle, Platon, lui, arrive avec une autre vision. La nature, c'est le monde sensible, ce que l'on voit, ce que l'on touche. Mais ce monde, selon lui, est imparfait. C'est une copie, une imitation. La matrice est la simulation d'un monde imaginaire, créé dans le seul but de nous maintenir sous contrôle. Le vrai, le beau, le parfait, ça se trouve ailleurs, dans ce qu'il appelle le monde des idées. Un monde immuable, Invisible, mais bizarrement plus réel que le nôtre. La nature, chez Platon, ce n'est pas une fin en soi. Elle est un reflet déformé. Et cette séparation va durablement influencer notre rapport au réel. Ce qu'on voit n'est peut-être pas ce qui compte vraiment. Le siècle suivant, c'est-à-dire au IVe siècle avant Jésus-Christ, Aristote va un peu reprendre le flambeau. Mais pour lui, la nature n'est pas une copie déformée ni chaos. Elle est une structure ordonnée et intelligible. Chaque chose a une fonction, une place, une finalité. Par exemple, si on imagine que vous donniez une montre à Aristote, eh bien il vous dirait que chaque rouage de cette montre a un rôle. Pour lui, la nature fonctionne absolument pareil. Les ailes de l'oiseau ? Bah c'est pour voler. Les nageoires du poisson ? Bah c'est pour nager. Même les cailloux cherchent à tomber selon lui. « Et là ! C'est juste un caillou ! » Cela leur permettrait ainsi... de rejoindre leur lieu naturel, qui, après déduction de ma part, pourrait s'avérer être le sol. Faut dire, l'ambition d'un caillou, finalement, c'est pas de toucher des étoiles, c'est juste de toucher Terre, littéralement. Mais attention, Aristote, ce n'est pas un simplificateur. Il parle de quatre causes pour expliquer le réel. Tout d'abord, la cause matérielle, donc de quoi c'est fait. La cause formelle, la forme que cela prend. La cause efficiente. ce qui met en mouvement, et enfin la cause finale, qui est le but. Il est aussi l'un des premiers à dire que la connaissance passe par l'observation. Il va donc disséquer des animaux, observer leurs comportements, et dans un sens, il fonde ce qu'on pourrait appeler aujourd'hui la biologie. Sa conviction profonde, la nature ne fait rien au hasard, ni rien en vain. A la fin du IVe siècle, arrivent ensuite les stoïciens. Pour vous la faire courte, le stoïcisme, c'est une école philosophique née en Grèce et fondée par Zénon de Citium. C'est une pensée qui prône la maîtrise de soi, la raison et l'acceptation sereine du destin comme voie vers la sagesse, mais aussi vers la tranquillité de l'âme. Les stoïciens voient dans la nature une structure rationnelle. Tout est gouverné par une force cosmique qu'ils appellent le Logos, un principe d'ordre, de raison, quasiment divin. Et leur objectif, c'est de vivre en harmonie avec cet ordre. Accepter ce qui est, ne pas lutter contre la nature des choses, pour eux, la sagesse, c'est de comprendre que tout est lié et que la vertu humaine, c'est de s'accorder à la raison du monde. Passons à présent au premier siècle avant Jésus-Christ. Imaginez un homme qui ne cherche pas à dominer la nature, ni à en percer les secrets pour le simple plaisir de savoir. Cet homme, c'est Strabon. C'est pas un philosophe dans une toge en train de méditer sur les nuages. Non, lui c'est un explorateur. Il observe, il voyage, il trace des cartes, un peu comme Dora l'exploratrice, mais version antique. Ce qui l'intéresse, ce n'est pas la nature pour elle-même, mais ce qu'elle fait aux humains. Pourquoi certaines civilisations grandissent, prospèrent, inventent, et d'autres s'effondrent ? Est-ce le climat, la géographie, l'environnement ? Oui, mais pas uniquement. Pour Strabon, il faut aussi regarder l'histoire, la culture et les décisions humaines. Il est l'un des premiers à dire « Comprendre la relation entre l'homme et son milieu, c'est aider les sociétés à mieux vivre. » En reliant la nature Ausha humains, Strabon ne le sait certainement pas, mais il est un peu en train d'inventer la géographie, voire carrément l'histoire de l'environnement. Faisons un petit bond en arrière. Toujours en Grèce, mais au IIe siècle avant Jésus-Christ. Imaginez les cieux sans lumière artificielle, une voûte étoilée éclatante, des constellations familières aux navigateurs, aux paysans, aux poètes, et une lune brillante maîtresse des nuits. Et parfois, cette lune disparaît, comme avalée, éteinte. À une époque où les éclipses sont vécues comme des signes des dieux ou même des présages de malheur, une femme, Aglaonis de Thessalie, va sortir de l'ombre. Elle ne tremble pas devant ce spectacle céleste. Non, elle sait, elle prédit ces éclipses. Et mieux encore, elle les annonce à l'avance. Oui, Aglaonis est ce que l'on pourrait appeler une des premières astronomes de l'histoire. On raconte qu'elle connaissait suffisamment bien les cycles lunaires pour prévoir les moments où la Lune serait éclipsée par l'ombre de la Terre. En son temps, ce savoir était perçu comme un pouvoir quasi magique. On la disait sorcière. Pas étonnant. Une femme, seule, capable de faire disparaître la Lune, Ça faisait trembler plus d'un patriarque grec. Ok, boomer ! Mais ce qu'Aglanis faisait, ce n'était pas de la magie. C'était de la science, de l'observation, de la méthode. Elle regardait la nature, elle l'écoutait, elle l'analysait. Et ça, c'est une petite révolution. Encore à cette époque, beaucoup voyaient dans chaque phénomène naturel une manifestation divine, un oracle, une punition, un message. Et elle, au contraire, a montré qu'on pouvait comprendre ce phénomène qu'ils obéissaient à des lois, que l'environnement n'était pas une entité capricieuse, mais un monde lisible, rythmé et prévisible. En cela, Aglaonis a participé à un basculement essentiel, le passage du mythe à la connaissance. Et petite anecdote, un cratère lunaire porte aujourd'hui son nom, hommage mérité à celle qui a su lire la Lune comme un livre ouvert. Mais la science antique ne s'exprime pas seulement par les démonstrations. Avec Lucrèce, elle devient un chant. Son œuvre de la nature des choses est un des chefs-d'œuvre de la science avant-l'œuvre. Lucrèce ne croit pas aux éclairs envoyés par Zeus, ni aux tremblements de terre comme des punitions divines. Pour lui, tout s'explique par des lois naturelles, et il s'inspire d'ailleurs d'Épicure et de Démocrite, qui disaient déjà avant que tout est composé d'atomes. Il parle des saisons, des maladies, des plantes, de la foudre, des volcans, et cherche à comprendre. Il refuse la peur des dieux et propose une autre voie, la même qu'Aglaonis de Thessalie, celle de la connaissance. Sa pensée est simple, mais forte. Nous faisons partie de la nature, nous ne sommes pas au-dessus d'elle. Pour en finir avec l'Antiquité, je vous propose de quitter un peu les grands systèmes philosophiques pour rejoindre Alexandrie. l'un des derniers bastions du savoir antique, où une femme va incarner cette quête de compréhension du monde, une figure précieuse et symbolique, j'ai nommé Hippatie. Hippatie, c'est une philosophe, une astronome, une mathématicienne et aussi une prof. Un génie, playboy, philanthrope, milliardaire. Oui, au IVe siècle, elle enseigne la pensée, les sciences, le ciel et les nombres. Elle ne parle pas d'écologie ou d'environnement comme on le fait aujourd'hui, mais elle pose une question essentielle. Comment fonctionne la nature ? Et surtout, peut-on la comprendre ? Pour elle, c'est la nature. Le monde n'est pas un caprice des dieux, ni un chaos incompréhensible. Le monde, c'est un langage. Et ce langage, on peut le déchiffrer, pas avec la foi, avec la raison. Dans son école à Alexandrie, elle enseigne les grands penseurs comme Platon, Euclide, et elle utilise probablement un astrolabe, qui est si vous voulez un instrument qui permet de lire les étoiles et de comprendre les mouvements du ciel. Ce qu'elle transmet à ses élèves, ce n'est pas seulement du savoir. C'est une idée révolutionnaire, la nature a une logique. Et en la comprenant, on touche à quelque chose de plus grand, de beau, de presque divin. Mais voilà, Alexandrie, c'est aussi une poudrière prête à exploser. L'Empire romain devient chrétien et les anciennes traditions philosophiques païennes vacillent. Hippatie est proche du gouverneur Orestes, engagé dans un bras de fer. avec le puissant patriarche chrétien Syrie. Très vite, Hypatie devient une cible. On l'accuse de sorcellerie, d'empêcher la paix et aussi d'être l'ennemi du Christ. En 415, alors qu'elle circule en char dans les rues d'Alexandrie, elle est interceptée par une foule fanatique. Traînée dans une église, elle est déshabillée, mutilée à coups de tessons et son corps est brûlé. C'est plus qu'un meurtre, c'est un symbole. celui de la fin d'une époque où la pensée le doute et la science avaient encore leur place dans la cité hippatie meurt mais elle devient une figure éternelle de la raison face à l'obscurantisme des premiers philosophes de la grèce antique aux pensées éclairées de l'inde ou d'alexandrie une même volonté traverse les siècles comprendre la nature non plus comme un mystère effrayant ou sacré, mais comme un ordre vivant, logique, parfois même poétique. À travers Empédocle, Démocrite, Aristote, Hippatie, Lucrèce ou encore Gargi, se construit peu à peu une vision du monde où la nature devient un objet de savoir, d'admiration, mais aussi de respect. Tu crois que c'est du respect, ça ? Tu crois que c'est du respect, mon garçon ? Ces penseurs et penseuses jettent un peu les bases d'une science encore jeune, mais déjà ambitieuse, qui cherchent à déchiffrer les lois du vivant plutôt qu'à les craindre. Mais ce dialogue entre l'homme et la nature ne s'arrête pas là. À l'aube du Moyen-Âge, une nouvelle ère s'ouvre, celle où la pensée chrétienne s'empare de ses héritages antiques pour les relire à la lumière de la foi. La nature y sera alors perçue non seulement comme un ordre, mais aussi comme une création divine, reflète d'un dessein supérieur. Mais cette histoire-là sera pour le prochain épisode. Merci beaucoup d'avoir écouté ce premier épisode consacré à l'histoire de notre regard sur la nature. J'espère tout d'abord que le sujet vous a plu, et si ce n'est pas encore le cas, je laisserai les prochains épisodes vous surprendre. N'hésitez surtout pas à me faire part de vos retours sur les réseaux sociaux, car vos avis, vos partages et vos commentaires sont vraiment précieux pour faire grandir ce projet. Parlez-en autour de vous, toujours dans un esprit de bienveillance, et bien sûr, pensez à vous abonner à la chaîne pour ne rien manquer. Il n'est de si bonne compagnie qui ne se sépare. Et en attendant les prochains épisodes de cette série, je vous dis au revoir et à très vite sur Environ.

Chapters

  • La nature comme force vivante, autonome et mystérieuse

    01:25

  • La nature comme ordre imparfait ou finalisé

    06:29

  • La nature comme objet de savoir rationnel et universel

    09:51

  • Etducoup ? (Conclusion)

    16:46

Description

Et si notre façon de voir notre environnement ne venait pas seulement de nous mais de siècles d’histoires, d’idées, de récits ? 🌿
Dans ce premier épisode de "Penser la nature dans l'Histoire", on remonte le fil du temps jusqu’à l’Antiquité, pour explorer comment nos anciens comprenaient la nature. 🏞️

On y croise des philosophes-poètes, des pionnières de la science, des questions vertigineuses et des visions du monde bien différentes des nôtres. 🧐
De Gargi à Aristote, de Démocrite à Hypatie, on va découvrir comment ces penseurs et penseuses ont appréhendé la Terre, le ciel, le vivant… et ce que ça dit de nous aujourd’hui. 🌍

Très bonne écoute à vous ! 🐙


Biblio 

  • Bailey Ogilvie Marilyn , “Women in Science: Antiquity through the Nineteenth Century”, 1986.

  • Dumont Jean-Paul (Sous la direction de), Les écoles présocratiques, 1991.

  • Nixey Catherine, L’obscurcissement du monde. La destruction de la culture classique par le christianisme, 2019.

  • Sawyer Deborah, Women and Religion in the First Christian Centuries, Routledge, 1996.

  • Worms Frédéric (dir.), La Nature, coll. “Les Notions philosophiques”, 2013.

  • "Aglaonice of Thessaly: Astronomer or Sorceress?" – Journal of the History of Astronomy, vol. 7, 1976.

  • Brihadaranyaka Upanishad (Upanishad du Grand Livre de la forêt), traduction de Martine Buttex, 2007-2008.

  • "Le concept de nature à travers les âges", ISDD, 23 mars 2023.

Ressources en ligne utilisées


Images (de haut en bas, droite à gauche) : 

  • Mosaïque du Nil (ou parfois simplement Mosaïque marine de Pompéi), Ier siècle av. J.-C, auteur inconnu.

  • Mosaïque de Neptune et des créatures marines, Fin du IIe siècle - début du IIIe siècle ap. J.-C, auteur inconnu.

  • Jardin de la villa de Livia (ou Jardin de Livia à Primaporta), Vers 30–20 av. J.-C, auteur inconnu.

  • Diane de Versailles, vers 330 av. J.-C, Attribué à Léocharès.


Crédits musicaux (Licensed under Creative Commons : By Attribution 4.0 License - https://incompetech.com/) :

  • "Documentary Nature Ambient" DELOSound

  • "Seek India" Hans Johnson

  • "Karpathos" Emmanuel Jacob

  • "Half Moon" Itai Armon

  • "Walking Garden" T_Asco

  • "Kimray" Emmanuel Jacob

  • "Chalkis" Emmanuel Jacob

  • "A New Start" The Bows

  • "My Sifnos" Emmanuel Jacob



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour ou bonsoir à tous et à toutes, et bienvenue sur Environ, le podcast qui parle d'histoire de l'environnement. Peut-être que vous vous êtes déjà demandé comment vous perceviez la nature. Un décor, un paysage, une ressource, un temple ? Mais cette vision, eh bien vous ne l'avez pas choisie, on vous l'a transmise. Crise climatique, effondrement de la biodiversité, pollution massive, on pense souvent que ce sont des problèmes techniques, donc du CO2 à réduire, des forêts à protéger. Mais si le cœur du problème, c'était notre vision de la nature, de notre environnement. Ce qu'on appelle crise environnementale pourrait bien être, avant tout, une crise de perception. Et afin de comprendre comment on en est arrivé là, il faut remonter le fil de notre histoire, l'histoire de notre regard sur la nature. Dans cette série d'épisodes, on va essayer de couvrir 2500 ans d'idées, de récits, mais aussi de croyances. Bon, dit comme ça, ça a l'air un peu énorme, mais vous en faites pas, on va y aller petit pas par petit pas. Sur ce, je ne vous en dis pas plus, et allons ensemble découvrir ce nouvel environ. Il y a plus de 2700 ans, bien avant que les sciences modernes n'existent, une femme s'est levée pour poser une question. Une question si simple et pourtant si vertigineuse qu'elle résonne encore aujourd'hui. Cette femme, c'est Gargi Vajaknabi. Au cœur de l'Inde ancienne, dans un monde où les hommes dominent les débats philosophiques, Gargi s'est levée pour parler. Devant des rois, des sages et des prêtres, elle a osé interroger la nature de tout ce qui existe. Sur quoi repose le monde et ce qui le soutient, qu'est-ce qui le soutient encore ? Et ça, ce n'est pas une devinette, ce n'est pas non plus un exercice intellectuel, c'est une quête, celle de comprendre l'invisible, l'infini, ce lien mystérieux qui relie toute chose. Pour Gargi, la Terre, le ciel, les étoiles, les arbres et les hommes, tout cela fait partie d'un immense tissu, un ordre cosmique, un souffle. Et ce souffle, elle l'appelle Brahman. Non pas un dieu, mais une réalité profonde qu'on ne peut ni voir, ni toucher, mais qui est là, partout. En posant ces grandes questions, elle nous invite déjà à respecter ce que nous ne comprenons pas entièrement, à vivre avec humilité dans un monde qui nous dépasse. Dans un certain sens, on peut dire qu'elle a planté une graine, celle d'une écologie intérieure, qui commence par une question sincère. Qu'est-ce qui nous relie vraiment aux autres, à la nature, à l'univers ? Je s'appelle Goop. Avec elle, la nature n'est pas autre que nous. Ce que nous faisons à la Terre, c'est à nous-mêmes que nous le faisons. Chez les grecs anciens, la nature ne se résume pas à un simple décor, à une série de paysages ou même à des ressources. Non. Il parle de « fusis » . Et ce mot veut dire bien plus que « nature » . Fusis, c'est le souffle même de la croissance, de l'apparition et de la transformation. C'est la puissance d'engendrement, une dynamique qui est interne à la réalité. Je dis simplement que la vie trouve toujours un chemin. Autrement dit, la fusis est vivante, en mouvement, et elle suit son propre rythme. On va commencer au 5e siècle avant Jésus-Christ avec... Empédocle. Empédocle, c'est un peu un philosophe poète. Il regarde autour de lui et se dit « Tout ce que je vois, les arbres, les animaux, l'eau, le feu, les hommes, ne pourrait-il pas y avoir une sorte de recette de base à toute cette diversité ? » C'est alors qu'il va proposer une idée assez révolutionnaire pour l'époque. Tout dans le monde est fait d'un mélange de quatre éléments. L'eau, la terre. Le feu. L'air. Un peu comme des ingrédients dans une soupe, ces éléments se mélangent dans différentes proportions pour créer tout ce qui existe. Mais ce n'est pas tout. Il dit aussi que deux grandes forces invisibles agissent sur ces éléments, l'amour et la haine. Ces forces seraient à l'origine du grand balai cosmique, c'est-à-dire l'amour assemble et la haine disperse. Grâce à elle, les choses naissent, évoluent, puis disparaissent. Et grâce à cette vision, Empédocle nous invite à voir la nature comme un système en mouvement perpétuel, où les transformations sont naturelles et logiques, pas des punitions divines. De son côté, Démocrite est un peu plus scientifique, plus bricoleur de l'invisible. Lui aussi cherche à comprendre ce qui compose le monde, mais il va encore plus loin. Il imagine que tout, absolument tout, et fait de minuscules particules invisibles qu'il appelle atomes. Je persiste à dire, et démocrite mon été moi, que tout ce qui arrive est le fruit du destin. Tout, invisible, indivisible, éternel, les atomes dansent dans le vide, forgeant tout ce qui existe, même nos pensées. Tout ce que nous percevons, dit-il, est le résultat de ces mouvements d'atomes. Je vous le donne dans le mille, le mec a quasiment inventé ce qu'on appelle la physique moderne. La nature n'est alors pas magique. ou capricieuse, elle est ordonnée, compréhensible, régie par des lois. L'environnement devient peu à peu un objet d'étude, on peut chercher à comprendre pourquoi il pleut, pourquoi les plantes poussent, pourquoi les corps tombent ou brûlent, sans invoquer les dieux. Empédocle et Démocrite ouvrent la voie à la science moderne, chacun un peu à leur manière. Empédocle en pensant en termes de cycles et d'équilibre, et Démocrite en posant les bases d'une pensée atomique matérialiste. Durant le même siècle, Platon, lui, arrive avec une autre vision. La nature, c'est le monde sensible, ce que l'on voit, ce que l'on touche. Mais ce monde, selon lui, est imparfait. C'est une copie, une imitation. La matrice est la simulation d'un monde imaginaire, créé dans le seul but de nous maintenir sous contrôle. Le vrai, le beau, le parfait, ça se trouve ailleurs, dans ce qu'il appelle le monde des idées. Un monde immuable, Invisible, mais bizarrement plus réel que le nôtre. La nature, chez Platon, ce n'est pas une fin en soi. Elle est un reflet déformé. Et cette séparation va durablement influencer notre rapport au réel. Ce qu'on voit n'est peut-être pas ce qui compte vraiment. Le siècle suivant, c'est-à-dire au IVe siècle avant Jésus-Christ, Aristote va un peu reprendre le flambeau. Mais pour lui, la nature n'est pas une copie déformée ni chaos. Elle est une structure ordonnée et intelligible. Chaque chose a une fonction, une place, une finalité. Par exemple, si on imagine que vous donniez une montre à Aristote, eh bien il vous dirait que chaque rouage de cette montre a un rôle. Pour lui, la nature fonctionne absolument pareil. Les ailes de l'oiseau ? Bah c'est pour voler. Les nageoires du poisson ? Bah c'est pour nager. Même les cailloux cherchent à tomber selon lui. « Et là ! C'est juste un caillou ! » Cela leur permettrait ainsi... de rejoindre leur lieu naturel, qui, après déduction de ma part, pourrait s'avérer être le sol. Faut dire, l'ambition d'un caillou, finalement, c'est pas de toucher des étoiles, c'est juste de toucher Terre, littéralement. Mais attention, Aristote, ce n'est pas un simplificateur. Il parle de quatre causes pour expliquer le réel. Tout d'abord, la cause matérielle, donc de quoi c'est fait. La cause formelle, la forme que cela prend. La cause efficiente. ce qui met en mouvement, et enfin la cause finale, qui est le but. Il est aussi l'un des premiers à dire que la connaissance passe par l'observation. Il va donc disséquer des animaux, observer leurs comportements, et dans un sens, il fonde ce qu'on pourrait appeler aujourd'hui la biologie. Sa conviction profonde, la nature ne fait rien au hasard, ni rien en vain. A la fin du IVe siècle, arrivent ensuite les stoïciens. Pour vous la faire courte, le stoïcisme, c'est une école philosophique née en Grèce et fondée par Zénon de Citium. C'est une pensée qui prône la maîtrise de soi, la raison et l'acceptation sereine du destin comme voie vers la sagesse, mais aussi vers la tranquillité de l'âme. Les stoïciens voient dans la nature une structure rationnelle. Tout est gouverné par une force cosmique qu'ils appellent le Logos, un principe d'ordre, de raison, quasiment divin. Et leur objectif, c'est de vivre en harmonie avec cet ordre. Accepter ce qui est, ne pas lutter contre la nature des choses, pour eux, la sagesse, c'est de comprendre que tout est lié et que la vertu humaine, c'est de s'accorder à la raison du monde. Passons à présent au premier siècle avant Jésus-Christ. Imaginez un homme qui ne cherche pas à dominer la nature, ni à en percer les secrets pour le simple plaisir de savoir. Cet homme, c'est Strabon. C'est pas un philosophe dans une toge en train de méditer sur les nuages. Non, lui c'est un explorateur. Il observe, il voyage, il trace des cartes, un peu comme Dora l'exploratrice, mais version antique. Ce qui l'intéresse, ce n'est pas la nature pour elle-même, mais ce qu'elle fait aux humains. Pourquoi certaines civilisations grandissent, prospèrent, inventent, et d'autres s'effondrent ? Est-ce le climat, la géographie, l'environnement ? Oui, mais pas uniquement. Pour Strabon, il faut aussi regarder l'histoire, la culture et les décisions humaines. Il est l'un des premiers à dire « Comprendre la relation entre l'homme et son milieu, c'est aider les sociétés à mieux vivre. » En reliant la nature Ausha humains, Strabon ne le sait certainement pas, mais il est un peu en train d'inventer la géographie, voire carrément l'histoire de l'environnement. Faisons un petit bond en arrière. Toujours en Grèce, mais au IIe siècle avant Jésus-Christ. Imaginez les cieux sans lumière artificielle, une voûte étoilée éclatante, des constellations familières aux navigateurs, aux paysans, aux poètes, et une lune brillante maîtresse des nuits. Et parfois, cette lune disparaît, comme avalée, éteinte. À une époque où les éclipses sont vécues comme des signes des dieux ou même des présages de malheur, une femme, Aglaonis de Thessalie, va sortir de l'ombre. Elle ne tremble pas devant ce spectacle céleste. Non, elle sait, elle prédit ces éclipses. Et mieux encore, elle les annonce à l'avance. Oui, Aglaonis est ce que l'on pourrait appeler une des premières astronomes de l'histoire. On raconte qu'elle connaissait suffisamment bien les cycles lunaires pour prévoir les moments où la Lune serait éclipsée par l'ombre de la Terre. En son temps, ce savoir était perçu comme un pouvoir quasi magique. On la disait sorcière. Pas étonnant. Une femme, seule, capable de faire disparaître la Lune, Ça faisait trembler plus d'un patriarque grec. Ok, boomer ! Mais ce qu'Aglanis faisait, ce n'était pas de la magie. C'était de la science, de l'observation, de la méthode. Elle regardait la nature, elle l'écoutait, elle l'analysait. Et ça, c'est une petite révolution. Encore à cette époque, beaucoup voyaient dans chaque phénomène naturel une manifestation divine, un oracle, une punition, un message. Et elle, au contraire, a montré qu'on pouvait comprendre ce phénomène qu'ils obéissaient à des lois, que l'environnement n'était pas une entité capricieuse, mais un monde lisible, rythmé et prévisible. En cela, Aglaonis a participé à un basculement essentiel, le passage du mythe à la connaissance. Et petite anecdote, un cratère lunaire porte aujourd'hui son nom, hommage mérité à celle qui a su lire la Lune comme un livre ouvert. Mais la science antique ne s'exprime pas seulement par les démonstrations. Avec Lucrèce, elle devient un chant. Son œuvre de la nature des choses est un des chefs-d'œuvre de la science avant-l'œuvre. Lucrèce ne croit pas aux éclairs envoyés par Zeus, ni aux tremblements de terre comme des punitions divines. Pour lui, tout s'explique par des lois naturelles, et il s'inspire d'ailleurs d'Épicure et de Démocrite, qui disaient déjà avant que tout est composé d'atomes. Il parle des saisons, des maladies, des plantes, de la foudre, des volcans, et cherche à comprendre. Il refuse la peur des dieux et propose une autre voie, la même qu'Aglaonis de Thessalie, celle de la connaissance. Sa pensée est simple, mais forte. Nous faisons partie de la nature, nous ne sommes pas au-dessus d'elle. Pour en finir avec l'Antiquité, je vous propose de quitter un peu les grands systèmes philosophiques pour rejoindre Alexandrie. l'un des derniers bastions du savoir antique, où une femme va incarner cette quête de compréhension du monde, une figure précieuse et symbolique, j'ai nommé Hippatie. Hippatie, c'est une philosophe, une astronome, une mathématicienne et aussi une prof. Un génie, playboy, philanthrope, milliardaire. Oui, au IVe siècle, elle enseigne la pensée, les sciences, le ciel et les nombres. Elle ne parle pas d'écologie ou d'environnement comme on le fait aujourd'hui, mais elle pose une question essentielle. Comment fonctionne la nature ? Et surtout, peut-on la comprendre ? Pour elle, c'est la nature. Le monde n'est pas un caprice des dieux, ni un chaos incompréhensible. Le monde, c'est un langage. Et ce langage, on peut le déchiffrer, pas avec la foi, avec la raison. Dans son école à Alexandrie, elle enseigne les grands penseurs comme Platon, Euclide, et elle utilise probablement un astrolabe, qui est si vous voulez un instrument qui permet de lire les étoiles et de comprendre les mouvements du ciel. Ce qu'elle transmet à ses élèves, ce n'est pas seulement du savoir. C'est une idée révolutionnaire, la nature a une logique. Et en la comprenant, on touche à quelque chose de plus grand, de beau, de presque divin. Mais voilà, Alexandrie, c'est aussi une poudrière prête à exploser. L'Empire romain devient chrétien et les anciennes traditions philosophiques païennes vacillent. Hippatie est proche du gouverneur Orestes, engagé dans un bras de fer. avec le puissant patriarche chrétien Syrie. Très vite, Hypatie devient une cible. On l'accuse de sorcellerie, d'empêcher la paix et aussi d'être l'ennemi du Christ. En 415, alors qu'elle circule en char dans les rues d'Alexandrie, elle est interceptée par une foule fanatique. Traînée dans une église, elle est déshabillée, mutilée à coups de tessons et son corps est brûlé. C'est plus qu'un meurtre, c'est un symbole. celui de la fin d'une époque où la pensée le doute et la science avaient encore leur place dans la cité hippatie meurt mais elle devient une figure éternelle de la raison face à l'obscurantisme des premiers philosophes de la grèce antique aux pensées éclairées de l'inde ou d'alexandrie une même volonté traverse les siècles comprendre la nature non plus comme un mystère effrayant ou sacré, mais comme un ordre vivant, logique, parfois même poétique. À travers Empédocle, Démocrite, Aristote, Hippatie, Lucrèce ou encore Gargi, se construit peu à peu une vision du monde où la nature devient un objet de savoir, d'admiration, mais aussi de respect. Tu crois que c'est du respect, ça ? Tu crois que c'est du respect, mon garçon ? Ces penseurs et penseuses jettent un peu les bases d'une science encore jeune, mais déjà ambitieuse, qui cherchent à déchiffrer les lois du vivant plutôt qu'à les craindre. Mais ce dialogue entre l'homme et la nature ne s'arrête pas là. À l'aube du Moyen-Âge, une nouvelle ère s'ouvre, celle où la pensée chrétienne s'empare de ses héritages antiques pour les relire à la lumière de la foi. La nature y sera alors perçue non seulement comme un ordre, mais aussi comme une création divine, reflète d'un dessein supérieur. Mais cette histoire-là sera pour le prochain épisode. Merci beaucoup d'avoir écouté ce premier épisode consacré à l'histoire de notre regard sur la nature. J'espère tout d'abord que le sujet vous a plu, et si ce n'est pas encore le cas, je laisserai les prochains épisodes vous surprendre. N'hésitez surtout pas à me faire part de vos retours sur les réseaux sociaux, car vos avis, vos partages et vos commentaires sont vraiment précieux pour faire grandir ce projet. Parlez-en autour de vous, toujours dans un esprit de bienveillance, et bien sûr, pensez à vous abonner à la chaîne pour ne rien manquer. Il n'est de si bonne compagnie qui ne se sépare. Et en attendant les prochains épisodes de cette série, je vous dis au revoir et à très vite sur Environ.

Chapters

  • La nature comme force vivante, autonome et mystérieuse

    01:25

  • La nature comme ordre imparfait ou finalisé

    06:29

  • La nature comme objet de savoir rationnel et universel

    09:51

  • Etducoup ? (Conclusion)

    16:46

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