#48 Marine Boyer : et si la mutualisation était "la" réponse aux défis agricoles ? cover
#48 Marine Boyer : et si la mutualisation était "la" réponse aux défis agricoles ? cover
Finta! L'Aveyron par ses voix

#48 Marine Boyer : et si la mutualisation était "la" réponse aux défis agricoles ?

#48 Marine Boyer : et si la mutualisation était "la" réponse aux défis agricoles ?

47min |01/11/2025
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Finta! L'Aveyron par ses voix

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#48 Marine Boyer : et si la mutualisation était "la" réponse aux défis agricoles ?

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Description

Quand elle a plaqué sa vie d’avant, Marine Boyer n’imaginait pas que, huit ans plus tard, on lui réclamerait des selfies. Pas plus qu’elle n’imaginait côtoyer les plus grandes figures politiques et syndicales agricoles toutes les semaines. Si elle avait choisi de s’installer comme éleveuse de vaches limousines sur le Ségala, c’était d’abord pour s’inscrire dans sa lignée familiale avec son conjoint, Loïc.


Après une installation qu’elle décrit comme « chaotique », c’est son engagement dans des associations locales d’entraide qui lui a permis de s’intégrer pleinement dans le paysage agricole aveyronnais. C’est cet engagement, vraisemblablement héréditaire, qui l’a propulsée dans une autre dimension. Voilà donc Marine Boyer, 36 ans, présidente de la Fédération nationale des Cuma.


Créées après la Seconde guerre mondiale, pour permettre aux agriculteurs de mutualiser du matériel et de la main d’œuvre, on compte aujourd’hui en France plus de 10 000 Cuma. Concrètement, un agriculteur sur deux en France adhère à une Cuma locale. Et si elles fêtent, en 2025, leurs 80 ans, c’est la première fois de leur histoire qu’elles ont, à leur tête, une femme.


Et c’est sur sa ferme, à La Bastide-l’Evêque, que je la retrouve. De la place des femmes dans l’agriculture française aujourd’hui, de la coopération et de l’entraide salvatrice pour les agriculteurs face aux défis environnementaux et au renouvellement des générations, du dialogue par-delà les clivages politiques et syndicaux : ce sont autant de sujets que l’on a abordés ensemble. Bonne écoute !


😍 Pour continuer sur ce sujet, je vous recommande l’épisode avec Marie-Thérèse Lacombe, disponible dans la collection des Pionnières de Finta!


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Ecrit, réalisé et produit par Lola Cros / mixé par Studio Qude. Tous droits réservés.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Alors déjà, j'ai la chance d'être la fille de mon père, parce qu'il a eu deux filles et qu'il nous a mis sur les tracteurs très tôt, parce qu'il avait besoin aussi que, des fois, pour distribuer le maïs aux vaches ou quoi, on puisse tenir le volant du tracteur pendant que lui faisait tomber les épis au sol. Pareil, il avait besoin de nos petites mains pour aller, des fois, dévisser des trucs dans les moteurs, les machins comme ça. Donc, il nous a toujours... Voilà. Il n'a jamais considéré que comme on était des filles, vous allez rester dans la maison avec maman et faire la cuisine.

  • Speaker #1

    Explorer les basculements d'une époque, sentir frémir des énergies, voir les ruralités se transformer avec celles et ceux qui les provoquent, les repensent et les bousculent. Finta, c'est le podcast qui nourrit les esprits, les envies d'agir et des espoirs. très concret, à l'échelle locale. Finta donne à entendre l'Aveyron à travers celles et ceux qui ont choisi d'habiter ici et maintenant. Je suis Lola Cross et j'arpente ce bout de campagne depuis 12 ans comme journaliste. Avec Finta, je vous invite à pousser la porte de vos voisins, à croiser des regards, à Finter de plus près. Et ça commence tout de suite. Quand elle a plaqué sa vie d'avant, Marine Boyer n'imaginait pas que, huit ans plus tard, on lui réclamerait des selfies. Pas plus qu'elle n'imaginait côtoyer les plus grandes figures politiques et syndicales agricoles toutes les semaines. Si elle avait choisi de s'installer comme éleveuse de vaches et limousines sur le Ségala, c'était d'abord pour s'inscrire dans sa lignée familiale avec son conjoint Loïc. Après une installation chaotique, c'est son engagement dans des associations locales d'entraide qui lui ont permis de s'intégrer pleinement. dans le paysage agricole avéronné. Et c'est ce même engagement, vraisemblablement héréditaire, qui l'a propulsé dans une autre dimension. Voilà donc Marine Boyer, 36 ans, présidente de la Fédération Nationale des Cumas. Créée après la Seconde Guerre Mondiale pour permettre aux agriculteurs de mutualiser du matériel et de la main-d'œuvre, on compte aujourd'hui en France plus de 10 000 cumas. Concrètement, un agriculteur sur deux, en France, adhère à une cuma locale. Et si elles fêtent aujourd'hui, en 2025, leurs 80 ans, c'est la première fois de leur histoire qu'elles ont, à leur tête, une femme. Et c'est sur sa ferme, à la Bastille de l'Évêque, que je retrouve Marine Boyer. De la place des femmes dans l'agriculture française aujourd'hui, de la coopération et de l'entraide, salvatrice pour les agriculteurs face aux défis environnementaux, du dialogue par-delà les clivages politiques et syndicaux, ce sont autant de sujets que l'on a abordés ensemble, à travers son parcours. Bonne écoute.

  • Speaker #0

    Alors ici, on est dans la maison familiale, sur plusieurs générations. Et c'est vraiment un lieu auquel je tiens énormément. Effectivement, mes arrières, Il y a vraiment plusieurs générations qui ont vécu dans cette maison. Et même moi, quand j'étais petite, on était trois générations à vivre ensemble. Mes grands-parents, mes parents, ma sœur et moi. Donc il y a vraiment une histoire avec cette maison. Ça a toujours été un lieu d'accueil pour les amis, la famille. Ça a toujours été une terre d'accueil. Et donc reprendre un peu cette maison, c'était tout un symbole. Et ça fait aussi partie... de l'idée de reprendre l'exploitation, c'était aussi reprendre la maison avec. Les gens viennent dormir ici, les gens viennent vivre ici avec nous. Et donc, c'est tout ça que je voulais hériter.

  • Speaker #1

    Mais au quotidien, vous n'êtes que deux.

  • Speaker #0

    Oui, au quotidien, on n'est que deux, voire quatre avec les deux gros toutous qui nous accompagnent, les vaches aussi, le lapin, les Ausha. Non, au quotidien, on n'est que deux.

  • Speaker #1

    On n'a pas précisé, mais on est sur la commune de la Bastille de l'Évêque, entre rue Pérou et ville Franche, pour situer peut-être un peu. Peut-être juste un petit mot sur l'univers qui nous entoure. Alors moi, je ne m'y attendais pas. Rentrant dans une maison d'agriculteurs, d'agricultrices sur les fermes, je ne suis pas habituée à cette décoration. Qu'est-ce qu'il y a autour de nous ?

  • Speaker #0

    Alors, autour de nous, il y a un univers. En fait, c'est ça, c'est que pour se sentir bien chez soi, Je pense qu'il faut que la maison reflète un peu ce qu'on est. On vit dans des lieux qui nous ressemblent et pas trop dans des modèles aseptisés avec les meubles, tout est gris et puis il y a un mur rouge et puis la cuisine est blanche. Donc là, pour le coup, c'est les jeux vidéo, les dessins animés un peu vintage, les livres. Beaucoup. Et puis, un univers chaleureux. Un peu d'agriculture aussi. On ne l'a pas vu, mais dans le salon, il y a un peu d'agriculture. Mais des photos, évidemment. Des photos de nos voyages, de nos proches. Je crois que pour se sentir bien chez soi, il faut se personnaliser.

  • Speaker #1

    Alors moi, dans mon champ de vision, je t'ai toi. J'ai une immense affiche d'Alice au Pays des Merveilles. Je vois ça et j'en suis ravie pour échanger avec toi. Tu nous parles de ta famille, comme quoi tu as grandi dans ce cocon-là, avec plusieurs générations regroupées sous le même toit. Dans quelle famille est-ce que tu as grandi ? Qui sont-ils, ses parents, grands-parents ?

  • Speaker #0

    Ses parents, ses grands-parents, ce sont des gens engagés. Déjà aimants, qui aiment la nature aussi, les animaux beaucoup. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours vu des chiens, énormément de chiens à la maison. des Ausha, j'ai grandi avec tous ces animaux et l'amour de ces animaux. J'ai grandi avec, je disais, des gens généreux qui ont, via le sens de l'accueil, c'est sûr, mais qui ont toujours donné aux gens. Et puis, le sens de l'engagement, parce que, que ce soit à chaque génération et même du côté, finalement, de ma maman, qui est sur, évidemment, une autre maison, Mes grands-parents ont toujours été investis et engagés, donc pour le coup ici mes deux grands-pères étaient à la municipalité. Finalement j'ai toujours vu mes parents s'investir dans des associations, du village, voilà. Donc en fait, et mon père aussi à la municipalité, donc au final un sens de l'engagement qui se traduisait par, eh bien, si on veut... que si on veut que notre territoire vive, si on veut que le village y vive, il faut s'y investir. Je crois que c'est des valeurs qui nous ont été transmises à ma sœur et moi.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'ils travaillaient tous sur la ferme ?

  • Speaker #0

    Non. Alors, mes grands-parents, oui. Donc, avec ma grand-mère sans statut, je sais que tu as rencontré Marie-Thérèse Lacombe, donc tu sais ce que c'était à cette époque-là. Ma maman était professeure des écoles, elle est à la retraite et donc mon père était seul sur l'exploitation.

  • Speaker #1

    Elle ressemblait à quoi l'exploitation du temps de ton père ?

  • Speaker #0

    Alors du temps de mon père c'était 35 hectares avec à peu près une trentaine d'animaux et alors avec des pratiques sans pesticides depuis 89 parce qu'il avait suivi une formation à la chambre d'agriculture. Et puis, il avait été accompagné d'un ami pour arrêter justement les pesticides et pour voir quelles étaient les solutions alternatives. Et donc, c'était une petite exploitation qui a eu, et bien comme toutes les exploitations pendant la vache folle, des difficultés. Et donc, mon père a accumulé à un moment donné un deuxième emploi en plus de l'exploitation de chauffeur laitier.

  • Speaker #1

    Est-ce que toi... et Petite, tu rêvais d'être agricultrice ?

  • Speaker #0

    Oui, déjà enfant, avec ma sœur, on était tout le temps dehors. On était tout le temps avec les animaux, tout le temps à jouer au tracteur à pédales, tout le temps dans les pattes de notre papa. Et en grandissant, j'ai aidé mon père aux travaux de la ferme, ma sœur également. Et donc au collège, oui, effectivement, la question s'est posée, mais vu le contexte. économique. Encore une fois, cette crise sanitaire qui frappait les exploitations à l'époque, mes parents ne souhaitaient pas que je m'oriente dans un lycée agricole et que je fasse autre chose, une filière plus générale. Je suis partie pas du tout dans l'agriculture. Je suis partie faire de l'informatique.

  • Speaker #1

    À Toulouse, pour tes études, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça. J'ai fait mes études à Toulouse. Et puis un stage qui a amené à un CDI dans une entreprise toulousaine. Et pareil, développer un logiciel dans une entreprise toulousaine. Et c'est vrai que ça a été une expérience aussi. C'était quand même un milieu que j'aimais. C'est-à-dire que si on revient à l'ambiance de la maison, l'ambiance de ma chambre quand j'étais enfant, c'était que je récupérais tout ce qui était hi-fi, ordinateur. Donc en fait, à un moment donné, dans ma chambre, il y avait une télé magnétoscope que j'avais récupérée. Mes parents n'ont jamais acheté de télé ou de magnétoscope, mais je me débrouillais en fait. Et l'ordinateur, c'était pareil. J'avais récupéré l'ordinateur d'un ami à mes parents, j'avais récupéré un autre ordinateur et j'étais tout le temps en train de bidouiller dessus quand il pleuvait dehors. C'est-à-dire que quand il faisait beau, j'étais dehors, mais quand il ne faisait pas beau, j'étais dedans à bidouiller. Mes choses, j'avais trouvé des consoles de jeux, ça et là, donc c'est pareil, je jouais beaucoup à la console et donc je suis allée vers là, tout simplement.

  • Speaker #1

    Quand tes parents te disent, va peut-être voir ailleurs, la conjoncture n'est pas bonne dans l'agriculture, toi tu ne le vis pas comme un renoncement pour autant ?

  • Speaker #0

    Non, parce que je crois qu'à cette époque-là, on n'est jamais trop sûr de ce qu'on veut faire dans la vie. Et en plus, il y avait un contexte qui faisait peur aussi, quand même. Et en fait, je ne m'étais jamais posée aussi, je pense, à cette époque-là, la question de, un jour, la ferme peut disparaître. Tu sais, ça reste un moment où tu te dis que tout ça, c'est à ton papa que ça va rester comme ça toute la vie. Et que même si je suis informaticienne à Toulouse, je peux rentrer les week-ends. pour être sur l'exploitation, voir des animaux, aider mon papa. Donc il n'y avait pas un renoncement parce que je ne sentais pas que j'abandonnais quelque chose.

  • Speaker #1

    Donc Toulouse, tu y restes combien de temps finalement ?

  • Speaker #0

    Donc Toulouse en tout, j'y reste bien 5-6 ans. Et après, je pars à... Après, en fait, l'expérience toulousaine, c'était aussi vivre en appartement. Donc très difficile que ce soit pour mon conjoint ou moi, on était absolument pas bien dans cette vie-là et donc on a décidé de partir au Canada. On a obtenu un permis vacances-travail à l'époque où c'était un petit peu le tirage au sort pour l'obtenir et donc on a réussi à l'obtenir et on est parti un an et ça a complètement chamboulé notre vie. et ça a complètement remis en question nos projets. Et donc, en fait, une fois là-bas, on a pris conscience, je pense, tous les deux, des patrimoines de nos parents, des entreprises, de ce que ça signifiait pour nous, de l'importance que, comme je l'ai expliqué au début, la maison, etc., mais aussi l'exploitation et de cette envie aussi de vivre la vie dehors. Et donc, on s'est dit, en fait, est-ce qu'on ne deviendrait pas agriculteurs ?

  • Speaker #1

    Donc, c'est vraiment au Canada que vous avez cette idée-là ? Oui. Qu'est-ce que vous avez fait au Canada, Panaména ? Vous avez travaillé où ?

  • Speaker #0

    On a travaillé dans l'événementiel. Donc, on est resté six mois à Montréal et puis six mois à Québec. Et à six mois à Montréal, on a travaillé six mois dans l'événementiel. Et à Québec, c'était pareil. On a fait des petits jobs un peu dans l'événementiel. Et puis, on a trouvé d'autres jobs comme ça. Mais voilà, on a toujours travaillé tout le long. Et le deal, c'était qu'on avait, très tôt dans le voyage, on a acheté une voiture pour vadrouiller un peu partout.

  • Speaker #1

    Mais vous n'aviez pas envie de voir des pratiques agricoles, vous n'étiez pas là pour autant ?

  • Speaker #0

    Si, ce qui est rigolo, c'est qu'en fait, c'est là où on a vu aussi notre intérêt. Je ne sais pas si c'est le destin, mais en fait, quand on a déménagé à Québec, dans une maison, dans un sous-sol, ça se fait beaucoup au Québec, on vit sous les maisons, en demi-sous-sol. Au-dessus de ce demi-sous-sol, notre propriétaire, Suzanne, qui est devenue depuis une amie très proche. Et dans cette famille-là, le papa de Suzanne a travaillé à ce qui s'appelle le Crédit Agricole au Québec, mais ce n'est pas la banque que l'on connaît, c'est vraiment un service d'accompagnement au conseil, à la gestion des exploitations, etc. Et donc... Très vite, les sujets agricoles sont arrivés. Et donc, il nous a proposé, effectivement, de nous intéresser au monde agricole québécois. Et ça a été très riche de connaître cet aspect-là aussi. Et ça nous a fait encore plus mûrir nos idées, parce qu'on s'est dit, ah oui, en fait, si même là-bas, on trouve intérêt à parler d'agriculture, c'est le moment.

  • Speaker #1

    Donc ton conjoint, pour le coup, vient aussi d'une famille d'agriculteurs. Donc au moment où vous vous dites, OK, on veut rentrer et on veut s'installer, vous avez deux fermes sur les mains. Comment ça se passe à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    Eh bien déjà, ça se passe qu'il faut convaincre les parents. Enfin, convaincre. Oui et non, parce que ça reste un choix personnel. Donc on est quand même libre de faire ce qu'on veut. Mais ça reste leur entreprise. Ils vont la céder parce qu'ils vont partir à la retraite. Donc c'est quand même être sûre que notre projet leur parle. Et donc en fait, on fait venir mes parents d'abord 15 jours au Québec pour leur faire visiter évidemment le pays dans lequel on vit depuis tous ces mois. Et puis on leur aimait l'idée qu'en rentrant, il y aura peut-être une installation ou deux, une reprise. Et puis on fait venir les parents de mon conjoint, pareil, 15 jours. Et on leur aimait la même idée. Et puis au final, les mamans étaient très inquiètes parce que la reprise d'exploitation agricole, alors que finalement on était deux diplômés avec potentiellement de bons jobs et pouvant aller à de bons salaires. Là, on veut devenir agriculteur. Donc voilà, avec toutes les difficultés qu'ils ont vécues avant nous, je pense que ça résonnait un peu mal à eux. Et puis en fait, les papas étaient super fiers de voir leur outil perdurer dans le temps. Et donc, l'idée de départ, c'était quand même de s'installer chacun de son côté, de ne pas faire forcément un gag, mais de s'installer chacun de son côté. Et puis en fait, c'est lors du parcours à l'installation qu'on a changé notre projet. Et les deux fermes sont distantes de 18 kilomètres. Il y avait aussi cette notion d'organisation, d'aspect collectif. De dire qu'on avait aussi des loisirs, des moments qu'on voulait pour nous, et que si on avait chacun nos exploitations de chaque côté, l'organisation allait être vraiment compliquée, pour le côté personnel.

  • Speaker #1

    Donc comment vous avez scindé ? C'est quoi l'organisation ? Qu'est-ce qu'il y a là-bas ? Qu'est-ce qu'il y a ici ? Comment vous naviguez entre les deux ?

  • Speaker #0

    Alors aujourd'hui, ici, on a le troupeau principal, notre production principale, donc les mères, les limousines, les vaches. Et là-bas, on se retrouve plutôt avec les réformes, donc les mamies et les petites génisses qui restent là-bas juste avant le vêlage. Donc, dès qu'elles sont prêtes à veiller, en général, on essaie de les faire venir ici pour s'occuper du vêlage, etc. Mais c'est vrai que le troupeau qui demande le plus d'attention est ici avec nous.

  • Speaker #1

    Tu as raconté... Récemment, quand tu as eu l'occasion de t'exprimer sur ton parcours, que cette installation-là, elle a été chaotique. C'est un mot qui est ressorti, qui est fort. Pourquoi ?

  • Speaker #0

    Parce que, en fait, ce n'était pas seulement sur le contexte extérieur, c'était aussi sur un contexte plus personnel. C'est-à-dire qu'en fait, je crois qu'on a réalisé, je vais dire on, parce que je pense que lui aussi n'avait pas que moi. On a réalisé que c'était vraiment le parcours du combattant, mais pas seulement administratif, c'était aussi un parcours dans la tête. Le parcours à l'installation, il est tellement semé d'embûches. Si tu n'es pas pleinement motivé à devenir agriculteur ou agricultrice, je pense que tu n'arrives pas au bout. Donc en fait, c'est cette force mentale de se dire, il ne faut rien lâcher. Il ne faut pas se laisser détourner par soi. Le voisin qui dit qu'on ne sera pas capable de tenir l'exploitation ou par les parents qui disent « mais vous êtes sûr que vous ne voulez pas faire un truc à côté parce qu'économiquement, peut-être ça ne va pas le faire » On va dire que toutes les peurs que les gens nous mettent sur nous, il faut savoir les surmonter pour se dire « non mais je suis sûre de moi, je veux y aller » . Et en fait, c'est ça. C'est que le côté chaotique, ça a été de se battre pour le foncier et en même temps de se battre pour convaincre les gens de ce que nous, on était persuadés de vouloir faire. Et ça, déjà, en plus de l'énergie de s'installer, de créer une entreprise, de signer sur des prêts qui engagent quand même pas mal de sommes, sur des durées aussi de fermage, etc. On se rend compte que là, notre vie aussi, elle bascule. Elle bascule en fait parce que ça reste un engagement fort de cette haleine agriculture. En plus, on va sur du vivant, 7 jours sur 7. Donc, il y a vraiment une idée que la vie va changer. que vraiment, ça va switcher.

  • Speaker #1

    Mais on peut avoir l'impression, quand tu prends la suite de ton père, de ta mère, que tu restes dans la famille, que ces embûches-là, elles sont moindres. On a presque l'impression que c'est une continuité. Alors, toi, tu as dû créer une nouvelle entreprise ? Tu es repartie, pas de zéro, mais presque ?

  • Speaker #0

    En fait, c'est-à-dire que si on prend la base qu'on a annoncée tout à l'heure sur l'exploitation de mon père, donc je disais 35 hectares, une trentaine de vaches, Le projet aujourd'hui, il est de 135 hectares pour 90 mères. Donc 90 mères, ce n'est pas 90 vaches. C'est les veaux, c'est les réformes, c'est les génisses en plus. Au total, je ne sais pas, moi, d'animaux, je ne te parle pas en UGB, mais d'animaux sur l'exploitation, oui, on est presque à 200. Donc en fait, il y a quand même... C'est un autre projet pour moi. Oui, j'ai repris l'exploitation de mon père. mais on l'a fait évoluer considérablement. Donc on est quand même sur d'autres investissements, sur d'autres perspectives économiques. Et du coup, oui, c'est la reprise d'exploitation, mais je ne peux jamais, même à la base, au départ, à l'installation, je ne peux jamais me référer aux chiffres de mon père, à ce que faisait mon père, etc. Sauf dans les pratiques culturales, parce que finalement, c'est la seule chose qu'on a gardée. C'est-à-dire que les pratiques culturales, on a fait labelliser la ferme en bio, parce que là où mon père faisait les pratiques depuis 89, il n'a jamais pris le label parce que contraignant administrativement. Donc en fait, on se retrouve quand même dans un schéma où il y a quelque chose qui ressort de l'héritage, mais on est sur un projet complètement différent.

  • Speaker #1

    Tu as aussi dit que ton entourage... proches, a priori, te disaient peut-être laisse ton compagnon s'installer tout seul, toi va voir ailleurs. Pourquoi on t'a renvoyé ça, d'après toi ?

  • Speaker #0

    Alors déjà parce qu'on est sur des territoires ruraux avec des croyances limitantes où on pense que les femmes sont un peu moins capables d'être avec les animaux je pense, de gérer tout ce qui est bovins, etc. Je pense que l'entourage s'est dit, bon ben voilà, vous allez dans une situation économique qui sera difficile, parce que pour eux ça l'était. Laisse ton conjoint s'installer, va faire institutrice, va travailler dans l'entreprise informatique qu'il y a à côté, et tu l'aideras le week-end, et c'est ok. Ouais, c'était vraiment ça le discours. Il faut savoir que quand même, c'est que même moi, pendant le parcours, je me suis dit, Ok, je vais regarder pour passer le concours, pour devenir prof des écoles. Mais en fait, non. Bon, je vais regarder l'entreprise d'à côté, qu'est-ce qu'elle demande comme prérequis pour travailler chez elle. Mais en fait, non. Je pense que c'est quand même mon copain, mon conjoint qui a dit que non mais stop, arrête d'écouter tout le monde là, ton projet c'était le mien aussi. On partait pour être agriculteurs, agricultrices, on continue vers ça, quoi.

  • Speaker #1

    Tu faisais référence à Marie-Thérèse Lacombe, donc elle qui raconte vraiment les conditions des agricultrices dans les années 50, 60, 70. Et en fait, ce qu'on lit un peu dans ton parcours, c'est que oui, on a évolué, oui, il y a un statut aujourd'hui reconnu pour les femmes agricultrices. Mais ces croyances limitantes-là font que l'évolution n'est quand même pas flagrante et ce n'est pas facile aujourd'hui encore de s'installer, d'être reconnu, d'être respecté dans son rôle. Et pourtant, un tiers des installations aujourd'hui en Aveyron sont faites par des femmes. Donc, on en est où d'après toi ? Comment tu le regardes ce constat-là ?

  • Speaker #0

    C'est compliqué parce que personne n'a la même vision. Il y a des femmes qui ne ressentent pas du tout. le fait d'être une femme en agriculture, et puis il y en a d'autres qui se sentent vraiment persécutées. À côté de ça, il y a quand même des efforts qui sont faits. Néanmoins, on est quand même sur des comportements, mais surtout sur le terrain, qui reste, comme je le disais, avec des croyances limitantes, qu'une femme n'est pas capable, et puis le tracteur est beaucoup trop gros, mais ça ne vient pas que des hommes, ça vient aussi des femmes elles-mêmes. Aujourd'hui, une femme qui s'installe avec son mari, et même à 40 ans, c'est « Oh non, moi le tracteur, je ne monte pas, c'est trop gros » . Et ça, pour moi, ce n'est pas entendable, parce qu'une femme qui a fait le choix d'être agricultrice doit pouvoir maîtriser l'ensemble des tâches de son exploitation. Et ça implique aussi le tracteur, conduire le tracteur. Aujourd'hui, il n'y a pas plus simple pour conduire un tracteur, c'est bourré de boutons. direction archi-assistée. Je veux dire, quand j'ai commencé à conduire un tracteur à 7 ans, que je pouvais toucher les pédales, c'était le sommet de mon grand-père, c'était super dur de direction, etc. Là, je pense qu'on est quand même sur des facilités. Et voilà. Mais je pense que la difficulté... Dans la reconnaissance, c'est peut-être aussi l'image que l'on renvoie, c'est-à-dire des fois d'être un petit peu plus effacée, de ne pas vouloir se mêler à certaines décisions parce qu'on pense qu'on n'a pas la compétence technique pour en parler. Tout le monde a la capacité d'eux. Je veux dire, ce n'est pas un homme qui arrive mieux à réfléchir sur un tracteur qu'une femme. Mais la question n'est pas réglée, c'est certain. Il y a toujours un sujet pour moi.

  • Speaker #1

    Quelles ont été, toi, les stratégies que tu as mises en place pour te faire ta place, pour forcer quelques portes et pour ne pas avoir à t'excuser d'être une femme ici ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, j'ai la chance d'être la fille de mon père, parce qu'il a eu deux filles et qu'il nous a mis sur les tracteurs très tôt, parce qu'il avait besoin aussi que, des fois, pour distribuer le maïs aux vaches ou quoi, on puisse tenir le volant du tracteur pendant que lui faisait tomber les épis au sol. Pareil, il avait besoin de nos petites mains pour aller des fois dévisser des trucs dans les moteurs, les machins comme ça. Donc, il nous a toujours... Voilà, il n'a jamais considéré que comme on était des filles, bon, vous allez rester dans la maison avec maman et faire la cuisine. Et parce que ma mère aussi n'était pas comme ça. Ma mère a toujours été quelqu'un qui... qui s'est beaucoup investie dans sa carrière, qui a beaucoup évolué. Et pour elle, c'est important que pour qu'une femme s'accomplisse dans sa vie, elle sache faire tout ce qu'elle veut faire quand elle veut faire un métier. Donc en fait, ma place, je l'ai trouvée aussi par les compétences que j'ai eues, que j'ai réussi à avoir de mon père quand j'étais plus jeune. Et en fait, quand je suis arrivée dans ce métier, je ne me suis pas du tout dit oh là là je suis pas je pars de zéro, ça va être dur, tout ça, tout ça. Non, non, je savais déjà reculer avec une remorque, je savais déjà faire plein de choses, et donc j'étais déjà assurée. Et pour m'assurer plus avec, si tu veux, le territoire, c'était de se dire, j'ai repris le poste de trésorier de la CUMA de mon père, et puis j'ai dit, je vais intégrer le conseil d'administration de la CUMA locale. Comme ça, en fait, je m'intègre. Bonjour, je m'appelle Marine, j'ai 34 ans, je viens de m'installer. Enfin non, en fait, j'avais 28, mais bon, bref. Je viens de m'installer, ravie de vous rencontrer. On se connaît depuis que je suis petite, mais en fait, on ne se connaît pas vraiment. Et on n'a qu'à apprendre à se connaître et travailler ensemble.

  • Speaker #1

    Et tu as eu quoi comme retour à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    En fait, très bon, parce que pendant l'installation, personne ne nous connaissait vraiment. Donc c'était beaucoup de handi, beaucoup de « ils n'en seront pas capables, ils viennent de la ville, ils ont fait d'autres métiers, ils ne connaissent rien à l'agriculture » . Mais au final, après, quand on s'investit dans ce genre de structure associative, locale, vraiment, on ne peut pas être plus local qu'une Cuma. Eh bien, là, ça ouvre des perspectives. Les gens nous voient autrement, apprennent à nous connaître. Et puis, de toute façon, on est là maintenant. Donc, il faut nous prendre.

  • Speaker #1

    Donc les CUMA, je rappelle rapidement ce sont ces groupements d'achats et de mise en commun de matériel agricole qui ont été créés après la seconde guerre mondiale pour permettre aux agriculteurs d'acheter en commun justement un tracteur quand c'était dur d'avoir un tracteur sur chaque ferme, donc on mettait en commun notamment tous ces matériels-là Tu es la première femme présidente de la Fédération Nationale des CUMA Oui. Ça c'est quand même assez incroyable. Alors avant d'arriver à cette élection, à ce mandat que tu as commencé en juin 2025, pourquoi tu as souhaité passer de la Cuma communale à la Cuma ville francheoise départementale, puisque tu étais investie...

  • Speaker #0

    C'est ça, la Fédération départementale des Cuma, oui, en Aveyron.

  • Speaker #1

    Et pourquoi passer au national ? Qu'est-ce qu'il dit cet engagement-là ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, oui, comme je disais, ça part de la base, ça part de reprendre le poste de trésorerie de mon père. hein ? De comprendre le fonctionnement de ces petites coopératives où on mutualise du matériel mais aussi de la main d'oeuvre et en fait comprendre que c'est aussi là que se passent les discussions sur les besoins des entreprises de chacun. C'est là où se passent un petit peu les synergies entre agriculteurs, l'entraide, la solidarité, le respect et la créativité finalement de ces groupes. Et donc, très rapidement, après avoir pris ce poste de trésorier à la Cuma du Franchois, qui est une intercuma, nous ce qu'on appelle une intercuma, c'est-à-dire une cuma qui rayonne sur un espace un peu plus grand qu'une cuma. parce qu'elle a du matériel un peu plus performant, très rapidement, j'ai des collègues de cette Cuma qui sont venus me voir et qui m'ont dit qu'en fait, Marine, il y a le réseau Cuma qui accompagne les Cuma. Parce que moi, j'ai toujours vu l'animatrice venir, mais on ne s'intéresse pas vraiment au réseau. On sait qu'elle vient, qu'elle nous aide. Je réalise que l'accompagnement des Cuma, l'accompagnement de ses collectifs, l'accompagnement des agriculteurs, c'est quand même quelque chose de... C'est incroyable. Et en fait, rapidement, j'ai pris des responsabilités et j'ai été repérée par le National pour une mission. C'était d'être élue au Conseil de la coopération agricole. Donc, en fait, c'est le Conseil qui va délivrer les agréments aux coopératives agricoles en France. Et en fait, je m'épanouis tellement dans cette mission. En fait, je me retrouve à ce que le Haut Conseil me propose une formation à Sciences Po Paris et en collaboration avec l'IFCAM du Crédit Agricole. Et donc, une formation qui est en fait un certificat sur six mois qui s'appelle « Gouvernance d'une entreprise coopérative » où finalement, je parfait un petit peu cette formation. c'est-à-dire que Via cette expérience au conseil, où j'étais déjà depuis deux ans, j'avais déjà pas mal de bagages juridiques. Mais alors là, je suis arrivée à Sciences Po et l'IFCAM avec le bagage aussi fiscal et puis la gouvernance aussi. Comment on fait pour gouverner dans une coopérative et comment on fait pour conduire un conseil d'administration. Et comment on fait... Voilà. Et puis, donc là, je sens que je prends encore plus de bouteilles. Et voilà, et là, j'avais vraiment cette envie de dire, je ne veux plus être seulement spectatrice ou rapportrice de ce que la Fédération Nationale doit faire, je veux aussi m'impliquer pour que moi aussi, je participe aux décisions qui peuvent faire avancer le droit des Kumas, et ce qu'elles ont le droit de faire sur le terrain, et comment elles peuvent mieux se développer. Et donc, l'idée au départ, c'était... Ce n'était pas ce poste de présidente. Je ne suis jamais arrivée là en me disant « Je vais être présidente de la Fédération nationale des Kumas » . Ça n'a jamais été une ambition personnelle. Là, je me suis dit « J'ai pris la bouteille, je suis formée. Le réseau aussi a investi en moi. Le conseil et le réseau Kuma ont investi en moi. Donc, je vais rejoindre le bureau. » C'est ce qui était souhaité. Au fur et à mesure des mois, des semaines, etc., eh bien, en fait... Je comprenais que je pouvais aussi amener quelque chose en étant présidente. Ça pouvait paraître tôt pour certains parce que je n'ai que 36 ans. Alors je suis trop vieille pour le foot mais trop jeune pour l'agriculture. Mais voilà, en fait c'était le bon timing parce que les idées je les avais là, je les maîtrisais maintenant. Et qu'à ce stade-là où est le réseau Cuma, la Fédération Nationale des Cumas, j'avais quelque chose à apporter. Donc, en fait, au final, j'ai levé la main et j'ai dit, bon, en fait, je me présenterais bien présidente. Et en parallèle de ce lever de doigts, qui était un peu timide au début, c'était plutôt en mode, non, mais si personne ne veut y aller, j'y vais. Bon, en fait, il y avait du monde qui voulait y aller aussi, mais j'étais à bon, mais on peut s'entendre et tout ça. Mais bon, voilà, j'ai passé, je ne sais pas moi. 30 orales du bac au téléphone, j'exagère, mais ce que je veux dire c'était que c'était beaucoup de téléphones, de convaincre des gens, parler de ma vision, de ce que j'imaginais pour le réseau. Et c'était en fait de se dire j'ai vraiment une idée et on peut y aller tous ensemble et venez avec moi et ça va être chouette et tout. Et donc voilà, on en est là aujourd'hui. Je me suis toujours dit que si ça passait pas, ça passait pas et puis je ferais autre chose dans le réseau, mais dans le réseau.

  • Speaker #1

    Donc on est ce jour-là de juin, qu'est-ce qui te traverse l'esprit à ce moment-là, sachant que ça fait moins de huit ans que tu es installée ? Donc en fait, tous ces changements, toutes ces évolutions, elles ont eu lieu quand même dans un laps de temps assez court, et tu te retrouves première femme présidente de la Fédération nationale des Kumas. Il y a quoi dans ta tête ce jour-là ?

  • Speaker #0

    Déjà, ça fait huit ans d'installation, sept ans dans le réseau, d'investissement quand même assez important. Le jour de l'élection, beaucoup de pression, on s'imagine. J'avais un petit discours à faire juste à la fin de la journée, après mon élection. Je me suis blindée au max parce que je ne voulais pas que ça transparesse trop. Pour moi, ce n'est pas la concrétisation. Quand j'arrive sur scène et qu'on me dit Marine Boyer et puis nouvelle présidente de la FNCuma que... que les gens m'applaudissent et se lèvent, je me dis... J'essaie de me blender, de faire... Je ne suis pas là. Je ne vis pas ce moment. Je ne réalise pas, en fait. Et même la soirée se passe, les gens viennent te féliciter, tout ça, tout ça. Et là encore, je pense que je ne réalise pas la portée de ma décision. Donc, j'ai pris mon ordinateur, je me suis calée avec les équipes de la FN Cuma, je l'ai ouvert. Et en fait, à partir du moment où on s'est mis à travailler, je me suis dit, non mais c'est ma place. C'est go, on y va. Et il y a plein de choses à faire et c'est parti.

  • Speaker #1

    Et justement, tu y vas avec quelle envie ? Qu'est-ce que tu as envie de porter sur ce mandat ? Les priorités ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, comme pas mal de structures, on a quand même ce souci de la baisse du nombre d'agriculteurs. Ça fait dix ans qu'on dit que dans dix ans, il y a la moitié des agriculteurs qui partent à la retraite. Et nous, demain, c'est comment on accompagne, on continue à accompagner les cumas sans qu'on perde un peu ce maillage territorial. Après, c'est toute la question de... de décarbonisation de l'agriculture. Et aujourd'hui, on se doit, nous, face à ces enjeux-là, de répondre présent et de donner des solutions. Aujourd'hui, il y a un gros soutien fiscal de la mécanisation agricole individuelle sur l'investissement individuel. Et aujourd'hui, c'est de dire... En tant que Cuma, en tant que collectif, on se positionne pour amener une autre vision, amener quelque chose de neuf qui finalement existe depuis toujours, l'entraide, mais qui finalement peut être l'avenir aussi de l'agriculture. C'est-à-dire qu'à plusieurs, un agriculteur peut se sentir soutenu, peut se sentir plus confiant de faire des investissements et sans mettre en péril son exploitation. Nous, on a envie de répondre que les cumas peuvent être l'outil qui permet à l'agriculteur de rester aux manettes de sa ferme sans y être pour autant esclave. C'est-à-dire qu'avec la mutualisation de travaux, avec la mutualisation de salariés, il va pouvoir se dégager du temps, il va pouvoir vivre une vie plus moderne et qui ressemble un peu plus aux attentes aussi de cette nouvelle génération qui veut s'installer. Et tout ça, en fait, on le porte parce qu'on est persuadé que ça peut être aussi la clé là de perdurer ce monde agricole. Et une autre avancée fondamentale à laquelle on tient, et finalement on l'a vu avec le contexte actuel, c'est-à-dire qu'il y a vraiment un fossé entre la société et le monde agricole. Nous, notre proposition dans le réseau Cuma pour faire un lien entre la société Et l'agriculture, c'est qu'on a inventé un volontariat agricole, un volontariat agricole, ce qui en fait se traduit par un service civique. Et en fait, ça va permettre à quelqu'un qui est non-issue du monde agricole, qui est curieux de voir comment ça fonctionne, de venir faire un service civique dans une cuma, et de découvrir un peu ce panel d'activités qu'il peut y avoir. parce que C'est aussi l'avantage des coopératives d'utilisation de matériel agricole, c'est qu'elles regroupent plusieurs productions, plusieurs activités. Un salarié, un service civique ne fera pas la même tâche du jour au lendemain. Ça va être des fois du service complet, vraiment de la conduite de matériel, mais ça va être de la mise à disposition sur l'exploitation. Donc en fait, ça va être découvrir un peu le panel large de ce qu'est l'agriculture. C'est à nous de faire ce travail de promotion. de ce service civique, de le rendre accessible, de le rendre attrayant et qu'on ait plus de volontaires.

  • Speaker #1

    Donc on était un peu sur les défis et que peut la Cuma ? Ce qui est intéressant, particulièrement dans les Cuma et dans la Fédération, c'est que vous dépassez aussi un peu les intérêts politiques partisans qui peuvent diviser le monde agricole aussi à l'intérieur. Qu'est-ce qui fait, toi, que dans le monde agricole, tu te dis que la Cuma peut être ? Alors, J'allais dire une porte de sortie à la crise, non peut-être pas, mais en tout cas une lueur d'espoir, quelque chose qui réenchante le métier.

  • Speaker #0

    En fait, on est le reflet de ce qui se passe en local. Un voisin qui est syndiqué dans un syndicat, l'autre voisin qui est syndiqué dans l'autre syndicat, localement ils vont se parler. Et en fait, dans la CUMA, les groupes, dès lors que les agriculteurs viennent pour parler du matériel, tous les clivages... politique, syndical, etc., tout s'efface. Donc, en fait, le réseau jusqu'au bout, jusqu'au national... Il est régi par ça, c'est-à-dire que pourquoi il n'y a pas de prise de position politique ou syndicale ? Tout simplement parce qu'on est le reflet des adhérents. Et les adhérents aujourd'hui, c'est 50% des agriculteurs en France. Donc 50% des agriculteurs, ça représente un panel d'agriculteurs qui viennent de tous bords et qui ont besoin, eux, juste de mutualiser. C'est-à-dire que c'est vu comme un outil. Et nous, derrière, en fait... ça, ça reste un enjeu. C'est-à-dire qu'on souhaite pouvoir être entendu, être écouté par tout le monde. Alors après, des fois, ça ne marche pas. Des fois, on ne nous ouvre pas la porte. Mais l'intérêt, c'est quand même qu'on reflète ce qui se passe sur le terrain. Aujourd'hui, oui, le réseau humain peut être le lien entre ce monde agricole qui, des fois, aussi, se comprend pas. Nous, on peut jouer ce rôle de lien, en tout cas d'intérêt commun, on va dire. Et c'est en ça que je dirais que ça donne un brin d'espoir, c'est parce qu'on peut créer une synergie que peut-être un syndicat ne pourra pas créer parce que trop clivant, etc. Nous, en fait, on peut se positionner en disant, voilà, regardez les agriculteurs. Les agriculteurs voudraient ça, nous on peut le porter avec vous. Qu'est-ce que vous en dites et du coup d'y aller à plusieurs ?

  • Speaker #1

    Quel regard est-ce que tu portes toi aujourd'hui sur ces dernières dix années de l'informatique à Montréal jusqu'à aujourd'hui installée, chef d'exploitation, présidente des Cuma ?

  • Speaker #0

    Je dirais que c'est un parcours en fait. ces parcours et je dirais que chaque... Chaque étape a fait que je suis là aujourd'hui, pas seulement en tant que présidente mais en tant qu'agricultrice. Et donc je dirais que c'est vraiment un cheminement et ce n'est pas des opportunités. Je n'ai jamais été quelqu'un d'opportuniste, donc c'est vraiment juste des moments de vie qui font que je suis là aujourd'hui, des expériences, des formations, du coaching. et donc voilà c'est C'est une accumulation de choses qui font que je suis là aujourd'hui. Vraiment, aujourd'hui, je me sens pleinement épanouie, que ce soit dans mes fonctions, que ce soit dans mon métier et dans ma vie personnelle.

  • Speaker #1

    Quel regard portent tes parents, tes beaux-parents sur ce parcours-là, après les doutes qu'ils ont eus il y a dix ans ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, ils sont rassurés, déjà sur notre situation économique, quand on parle de l'entreprise. Donc voilà, là, ils sont pleinement... Rassurés, ils voyaient à quel point on est investi et à quel point on fait marcher notre entreprise. Donc là, il n'y a plus de doute. Évidemment qu'ils sont fiers de l'engagement que je dirais que nous prenons. Parce que finalement, oui, c'est moi qui suis présidente de la FN Cuma, mais mon conjoint participe aussi à ça. On est une équipe. Parce qu'en fait, sans le fait que, déjà sans son soutien infaillible, mais aussi sans le fait qu'il prenne à bras le corps notre entreprise. Donc on a quand même des salariés de Cuma qui peuvent venir l'aider. On a quand même des aides, de l'entraide de la part des voisins, de la famille, etc. Néanmoins, c'est quand même lui qui pilote, qui chapote. Dès que je suis là, je l'aide au mieux. Mais sans ça, en fait, voilà. je ne pourrais pas faire ce que je fais aujourd'hui donc extrêmement reconnaissante pour ça et donc nos parents je pense qu'ils sont très fiers de ce qu'on a accompli tous les deux.

  • Speaker #1

    Une question juste logistique, ton mandat il dure combien de temps ?

  • Speaker #0

    Ce sont des mandats de 3 ans.

  • Speaker #1

    3 ans et ça représente quoi comme rythme pour toi ? C'est beaucoup d'allées et venues à Paris ?

  • Speaker #0

    Oui quand même il faut compter à 2-3 jours par semaine sur Paris ou en tout cas en déplacement Donc un déplacement, ça veut dire sur des territoires, en région ou bien sur des salons. Mais on va dire que ça prend deux, trois jours de déplacement. Mais il y a quand même pas mal de travail d'écriture, de mail, etc. Et heureusement, maintenant, on a les oreillettes Bluetooth, donc c'est mieux. Mais oui, il y a toujours un moment. On va dire que quand même du lundi au vendredi, je suis dans mon poste. Je suis hors de la ferme vraiment deux à trois jours par semaine.

  • Speaker #1

    Et une dernière question, je te sors peut-être un peu de tous tes rôles, mais je la pose à tous les invités, c'est en quoi est-ce que tu crois ?

  • Speaker #0

    En quoi est-ce que je crois ? C'est super dur ! Je crois en l'être humain. Je crois en l'être humain et à ses capacités à pouvoir avancer et à trouver des idées. Je crois en la créativité en fait en chacun de nous. Je crois que tout le monde est capable de tout, je n'ai pas l'impression qu'on soit limité. Et d'ailleurs tout le parcours, tout mon parcours mais tout le parcours que les gens font, c'est la preuve qu'en fait il ne faut pas se fier aux croyances limitantes etc. dès lors qu'on veut entreprendre quelque chose et bien si on s'en donne les moyens alors on est capable de le faire donc je crois à l'être humain à sa capacité à être créatif

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Marine Merci à toi

  • Speaker #0

    Voilà, c'était tout

  • Speaker #1

    Si vous voulez continuer sur ce sujet je vous recommande l'écoute de l'épisode de Finta avec Marie-Thérèse Lacombe il est disponible dans la collection des pionnières de Finta Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de Finta jusqu'au bout. J'espère qu'il vous a plu, inspiré, questionné et fait voyager peut-être. Viens me dire sur Instagram ou sur fintapodcast.fr ce que tu en as pensé. Je suis toujours curieuse de vous lire pour faire grandir Finta. Si tu fais partie de ceux qui apprécient le podcast et qui veulent continuer à cheminer avec moi dans les contrées avéronaises, tu peux désormais soutenir financièrement le podcast en donnant quelques euros par mois ou en faisant un don ponctuel. Tu participes à renforcer l'indépendance éditoriale de Finta et tu valorises, par la même occasion, le temps que j'y consacre chaque semaine. Figure-toi que si chaque auditeur donne un euro par mois, Finta peut vivre sans publicité dès aujourd'hui. Le lien de la cagnotte est disponible en description de cet épisode. Pour que Finta vive, partage-le autour de toi, parle-en à tes amis, laisse-lui des étoiles et des commentaires sur toutes les applis d'écoute. C'est vraiment... le meilleur soutien que tu puisses nous apporter. À très bientôt.

Description

Quand elle a plaqué sa vie d’avant, Marine Boyer n’imaginait pas que, huit ans plus tard, on lui réclamerait des selfies. Pas plus qu’elle n’imaginait côtoyer les plus grandes figures politiques et syndicales agricoles toutes les semaines. Si elle avait choisi de s’installer comme éleveuse de vaches limousines sur le Ségala, c’était d’abord pour s’inscrire dans sa lignée familiale avec son conjoint, Loïc.


Après une installation qu’elle décrit comme « chaotique », c’est son engagement dans des associations locales d’entraide qui lui a permis de s’intégrer pleinement dans le paysage agricole aveyronnais. C’est cet engagement, vraisemblablement héréditaire, qui l’a propulsée dans une autre dimension. Voilà donc Marine Boyer, 36 ans, présidente de la Fédération nationale des Cuma.


Créées après la Seconde guerre mondiale, pour permettre aux agriculteurs de mutualiser du matériel et de la main d’œuvre, on compte aujourd’hui en France plus de 10 000 Cuma. Concrètement, un agriculteur sur deux en France adhère à une Cuma locale. Et si elles fêtent, en 2025, leurs 80 ans, c’est la première fois de leur histoire qu’elles ont, à leur tête, une femme.


Et c’est sur sa ferme, à La Bastide-l’Evêque, que je la retrouve. De la place des femmes dans l’agriculture française aujourd’hui, de la coopération et de l’entraide salvatrice pour les agriculteurs face aux défis environnementaux et au renouvellement des générations, du dialogue par-delà les clivages politiques et syndicaux : ce sont autant de sujets que l’on a abordés ensemble. Bonne écoute !


😍 Pour continuer sur ce sujet, je vous recommande l’épisode avec Marie-Thérèse Lacombe, disponible dans la collection des Pionnières de Finta!


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Ecrit, réalisé et produit par Lola Cros / mixé par Studio Qude. Tous droits réservés.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Alors déjà, j'ai la chance d'être la fille de mon père, parce qu'il a eu deux filles et qu'il nous a mis sur les tracteurs très tôt, parce qu'il avait besoin aussi que, des fois, pour distribuer le maïs aux vaches ou quoi, on puisse tenir le volant du tracteur pendant que lui faisait tomber les épis au sol. Pareil, il avait besoin de nos petites mains pour aller, des fois, dévisser des trucs dans les moteurs, les machins comme ça. Donc, il nous a toujours... Voilà. Il n'a jamais considéré que comme on était des filles, vous allez rester dans la maison avec maman et faire la cuisine.

  • Speaker #1

    Explorer les basculements d'une époque, sentir frémir des énergies, voir les ruralités se transformer avec celles et ceux qui les provoquent, les repensent et les bousculent. Finta, c'est le podcast qui nourrit les esprits, les envies d'agir et des espoirs. très concret, à l'échelle locale. Finta donne à entendre l'Aveyron à travers celles et ceux qui ont choisi d'habiter ici et maintenant. Je suis Lola Cross et j'arpente ce bout de campagne depuis 12 ans comme journaliste. Avec Finta, je vous invite à pousser la porte de vos voisins, à croiser des regards, à Finter de plus près. Et ça commence tout de suite. Quand elle a plaqué sa vie d'avant, Marine Boyer n'imaginait pas que, huit ans plus tard, on lui réclamerait des selfies. Pas plus qu'elle n'imaginait côtoyer les plus grandes figures politiques et syndicales agricoles toutes les semaines. Si elle avait choisi de s'installer comme éleveuse de vaches et limousines sur le Ségala, c'était d'abord pour s'inscrire dans sa lignée familiale avec son conjoint Loïc. Après une installation chaotique, c'est son engagement dans des associations locales d'entraide qui lui ont permis de s'intégrer pleinement. dans le paysage agricole avéronné. Et c'est ce même engagement, vraisemblablement héréditaire, qui l'a propulsé dans une autre dimension. Voilà donc Marine Boyer, 36 ans, présidente de la Fédération Nationale des Cumas. Créée après la Seconde Guerre Mondiale pour permettre aux agriculteurs de mutualiser du matériel et de la main-d'œuvre, on compte aujourd'hui en France plus de 10 000 cumas. Concrètement, un agriculteur sur deux, en France, adhère à une cuma locale. Et si elles fêtent aujourd'hui, en 2025, leurs 80 ans, c'est la première fois de leur histoire qu'elles ont, à leur tête, une femme. Et c'est sur sa ferme, à la Bastille de l'Évêque, que je retrouve Marine Boyer. De la place des femmes dans l'agriculture française aujourd'hui, de la coopération et de l'entraide, salvatrice pour les agriculteurs face aux défis environnementaux, du dialogue par-delà les clivages politiques et syndicaux, ce sont autant de sujets que l'on a abordés ensemble, à travers son parcours. Bonne écoute.

  • Speaker #0

    Alors ici, on est dans la maison familiale, sur plusieurs générations. Et c'est vraiment un lieu auquel je tiens énormément. Effectivement, mes arrières, Il y a vraiment plusieurs générations qui ont vécu dans cette maison. Et même moi, quand j'étais petite, on était trois générations à vivre ensemble. Mes grands-parents, mes parents, ma sœur et moi. Donc il y a vraiment une histoire avec cette maison. Ça a toujours été un lieu d'accueil pour les amis, la famille. Ça a toujours été une terre d'accueil. Et donc reprendre un peu cette maison, c'était tout un symbole. Et ça fait aussi partie... de l'idée de reprendre l'exploitation, c'était aussi reprendre la maison avec. Les gens viennent dormir ici, les gens viennent vivre ici avec nous. Et donc, c'est tout ça que je voulais hériter.

  • Speaker #1

    Mais au quotidien, vous n'êtes que deux.

  • Speaker #0

    Oui, au quotidien, on n'est que deux, voire quatre avec les deux gros toutous qui nous accompagnent, les vaches aussi, le lapin, les Ausha. Non, au quotidien, on n'est que deux.

  • Speaker #1

    On n'a pas précisé, mais on est sur la commune de la Bastille de l'Évêque, entre rue Pérou et ville Franche, pour situer peut-être un peu. Peut-être juste un petit mot sur l'univers qui nous entoure. Alors moi, je ne m'y attendais pas. Rentrant dans une maison d'agriculteurs, d'agricultrices sur les fermes, je ne suis pas habituée à cette décoration. Qu'est-ce qu'il y a autour de nous ?

  • Speaker #0

    Alors, autour de nous, il y a un univers. En fait, c'est ça, c'est que pour se sentir bien chez soi, Je pense qu'il faut que la maison reflète un peu ce qu'on est. On vit dans des lieux qui nous ressemblent et pas trop dans des modèles aseptisés avec les meubles, tout est gris et puis il y a un mur rouge et puis la cuisine est blanche. Donc là, pour le coup, c'est les jeux vidéo, les dessins animés un peu vintage, les livres. Beaucoup. Et puis, un univers chaleureux. Un peu d'agriculture aussi. On ne l'a pas vu, mais dans le salon, il y a un peu d'agriculture. Mais des photos, évidemment. Des photos de nos voyages, de nos proches. Je crois que pour se sentir bien chez soi, il faut se personnaliser.

  • Speaker #1

    Alors moi, dans mon champ de vision, je t'ai toi. J'ai une immense affiche d'Alice au Pays des Merveilles. Je vois ça et j'en suis ravie pour échanger avec toi. Tu nous parles de ta famille, comme quoi tu as grandi dans ce cocon-là, avec plusieurs générations regroupées sous le même toit. Dans quelle famille est-ce que tu as grandi ? Qui sont-ils, ses parents, grands-parents ?

  • Speaker #0

    Ses parents, ses grands-parents, ce sont des gens engagés. Déjà aimants, qui aiment la nature aussi, les animaux beaucoup. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours vu des chiens, énormément de chiens à la maison. des Ausha, j'ai grandi avec tous ces animaux et l'amour de ces animaux. J'ai grandi avec, je disais, des gens généreux qui ont, via le sens de l'accueil, c'est sûr, mais qui ont toujours donné aux gens. Et puis, le sens de l'engagement, parce que, que ce soit à chaque génération et même du côté, finalement, de ma maman, qui est sur, évidemment, une autre maison, Mes grands-parents ont toujours été investis et engagés, donc pour le coup ici mes deux grands-pères étaient à la municipalité. Finalement j'ai toujours vu mes parents s'investir dans des associations, du village, voilà. Donc en fait, et mon père aussi à la municipalité, donc au final un sens de l'engagement qui se traduisait par, eh bien, si on veut... que si on veut que notre territoire vive, si on veut que le village y vive, il faut s'y investir. Je crois que c'est des valeurs qui nous ont été transmises à ma sœur et moi.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'ils travaillaient tous sur la ferme ?

  • Speaker #0

    Non. Alors, mes grands-parents, oui. Donc, avec ma grand-mère sans statut, je sais que tu as rencontré Marie-Thérèse Lacombe, donc tu sais ce que c'était à cette époque-là. Ma maman était professeure des écoles, elle est à la retraite et donc mon père était seul sur l'exploitation.

  • Speaker #1

    Elle ressemblait à quoi l'exploitation du temps de ton père ?

  • Speaker #0

    Alors du temps de mon père c'était 35 hectares avec à peu près une trentaine d'animaux et alors avec des pratiques sans pesticides depuis 89 parce qu'il avait suivi une formation à la chambre d'agriculture. Et puis, il avait été accompagné d'un ami pour arrêter justement les pesticides et pour voir quelles étaient les solutions alternatives. Et donc, c'était une petite exploitation qui a eu, et bien comme toutes les exploitations pendant la vache folle, des difficultés. Et donc, mon père a accumulé à un moment donné un deuxième emploi en plus de l'exploitation de chauffeur laitier.

  • Speaker #1

    Est-ce que toi... et Petite, tu rêvais d'être agricultrice ?

  • Speaker #0

    Oui, déjà enfant, avec ma sœur, on était tout le temps dehors. On était tout le temps avec les animaux, tout le temps à jouer au tracteur à pédales, tout le temps dans les pattes de notre papa. Et en grandissant, j'ai aidé mon père aux travaux de la ferme, ma sœur également. Et donc au collège, oui, effectivement, la question s'est posée, mais vu le contexte. économique. Encore une fois, cette crise sanitaire qui frappait les exploitations à l'époque, mes parents ne souhaitaient pas que je m'oriente dans un lycée agricole et que je fasse autre chose, une filière plus générale. Je suis partie pas du tout dans l'agriculture. Je suis partie faire de l'informatique.

  • Speaker #1

    À Toulouse, pour tes études, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça. J'ai fait mes études à Toulouse. Et puis un stage qui a amené à un CDI dans une entreprise toulousaine. Et pareil, développer un logiciel dans une entreprise toulousaine. Et c'est vrai que ça a été une expérience aussi. C'était quand même un milieu que j'aimais. C'est-à-dire que si on revient à l'ambiance de la maison, l'ambiance de ma chambre quand j'étais enfant, c'était que je récupérais tout ce qui était hi-fi, ordinateur. Donc en fait, à un moment donné, dans ma chambre, il y avait une télé magnétoscope que j'avais récupérée. Mes parents n'ont jamais acheté de télé ou de magnétoscope, mais je me débrouillais en fait. Et l'ordinateur, c'était pareil. J'avais récupéré l'ordinateur d'un ami à mes parents, j'avais récupéré un autre ordinateur et j'étais tout le temps en train de bidouiller dessus quand il pleuvait dehors. C'est-à-dire que quand il faisait beau, j'étais dehors, mais quand il ne faisait pas beau, j'étais dedans à bidouiller. Mes choses, j'avais trouvé des consoles de jeux, ça et là, donc c'est pareil, je jouais beaucoup à la console et donc je suis allée vers là, tout simplement.

  • Speaker #1

    Quand tes parents te disent, va peut-être voir ailleurs, la conjoncture n'est pas bonne dans l'agriculture, toi tu ne le vis pas comme un renoncement pour autant ?

  • Speaker #0

    Non, parce que je crois qu'à cette époque-là, on n'est jamais trop sûr de ce qu'on veut faire dans la vie. Et en plus, il y avait un contexte qui faisait peur aussi, quand même. Et en fait, je ne m'étais jamais posée aussi, je pense, à cette époque-là, la question de, un jour, la ferme peut disparaître. Tu sais, ça reste un moment où tu te dis que tout ça, c'est à ton papa que ça va rester comme ça toute la vie. Et que même si je suis informaticienne à Toulouse, je peux rentrer les week-ends. pour être sur l'exploitation, voir des animaux, aider mon papa. Donc il n'y avait pas un renoncement parce que je ne sentais pas que j'abandonnais quelque chose.

  • Speaker #1

    Donc Toulouse, tu y restes combien de temps finalement ?

  • Speaker #0

    Donc Toulouse en tout, j'y reste bien 5-6 ans. Et après, je pars à... Après, en fait, l'expérience toulousaine, c'était aussi vivre en appartement. Donc très difficile que ce soit pour mon conjoint ou moi, on était absolument pas bien dans cette vie-là et donc on a décidé de partir au Canada. On a obtenu un permis vacances-travail à l'époque où c'était un petit peu le tirage au sort pour l'obtenir et donc on a réussi à l'obtenir et on est parti un an et ça a complètement chamboulé notre vie. et ça a complètement remis en question nos projets. Et donc, en fait, une fois là-bas, on a pris conscience, je pense, tous les deux, des patrimoines de nos parents, des entreprises, de ce que ça signifiait pour nous, de l'importance que, comme je l'ai expliqué au début, la maison, etc., mais aussi l'exploitation et de cette envie aussi de vivre la vie dehors. Et donc, on s'est dit, en fait, est-ce qu'on ne deviendrait pas agriculteurs ?

  • Speaker #1

    Donc, c'est vraiment au Canada que vous avez cette idée-là ? Oui. Qu'est-ce que vous avez fait au Canada, Panaména ? Vous avez travaillé où ?

  • Speaker #0

    On a travaillé dans l'événementiel. Donc, on est resté six mois à Montréal et puis six mois à Québec. Et à six mois à Montréal, on a travaillé six mois dans l'événementiel. Et à Québec, c'était pareil. On a fait des petits jobs un peu dans l'événementiel. Et puis, on a trouvé d'autres jobs comme ça. Mais voilà, on a toujours travaillé tout le long. Et le deal, c'était qu'on avait, très tôt dans le voyage, on a acheté une voiture pour vadrouiller un peu partout.

  • Speaker #1

    Mais vous n'aviez pas envie de voir des pratiques agricoles, vous n'étiez pas là pour autant ?

  • Speaker #0

    Si, ce qui est rigolo, c'est qu'en fait, c'est là où on a vu aussi notre intérêt. Je ne sais pas si c'est le destin, mais en fait, quand on a déménagé à Québec, dans une maison, dans un sous-sol, ça se fait beaucoup au Québec, on vit sous les maisons, en demi-sous-sol. Au-dessus de ce demi-sous-sol, notre propriétaire, Suzanne, qui est devenue depuis une amie très proche. Et dans cette famille-là, le papa de Suzanne a travaillé à ce qui s'appelle le Crédit Agricole au Québec, mais ce n'est pas la banque que l'on connaît, c'est vraiment un service d'accompagnement au conseil, à la gestion des exploitations, etc. Et donc... Très vite, les sujets agricoles sont arrivés. Et donc, il nous a proposé, effectivement, de nous intéresser au monde agricole québécois. Et ça a été très riche de connaître cet aspect-là aussi. Et ça nous a fait encore plus mûrir nos idées, parce qu'on s'est dit, ah oui, en fait, si même là-bas, on trouve intérêt à parler d'agriculture, c'est le moment.

  • Speaker #1

    Donc ton conjoint, pour le coup, vient aussi d'une famille d'agriculteurs. Donc au moment où vous vous dites, OK, on veut rentrer et on veut s'installer, vous avez deux fermes sur les mains. Comment ça se passe à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    Eh bien déjà, ça se passe qu'il faut convaincre les parents. Enfin, convaincre. Oui et non, parce que ça reste un choix personnel. Donc on est quand même libre de faire ce qu'on veut. Mais ça reste leur entreprise. Ils vont la céder parce qu'ils vont partir à la retraite. Donc c'est quand même être sûre que notre projet leur parle. Et donc en fait, on fait venir mes parents d'abord 15 jours au Québec pour leur faire visiter évidemment le pays dans lequel on vit depuis tous ces mois. Et puis on leur aimait l'idée qu'en rentrant, il y aura peut-être une installation ou deux, une reprise. Et puis on fait venir les parents de mon conjoint, pareil, 15 jours. Et on leur aimait la même idée. Et puis au final, les mamans étaient très inquiètes parce que la reprise d'exploitation agricole, alors que finalement on était deux diplômés avec potentiellement de bons jobs et pouvant aller à de bons salaires. Là, on veut devenir agriculteur. Donc voilà, avec toutes les difficultés qu'ils ont vécues avant nous, je pense que ça résonnait un peu mal à eux. Et puis en fait, les papas étaient super fiers de voir leur outil perdurer dans le temps. Et donc, l'idée de départ, c'était quand même de s'installer chacun de son côté, de ne pas faire forcément un gag, mais de s'installer chacun de son côté. Et puis en fait, c'est lors du parcours à l'installation qu'on a changé notre projet. Et les deux fermes sont distantes de 18 kilomètres. Il y avait aussi cette notion d'organisation, d'aspect collectif. De dire qu'on avait aussi des loisirs, des moments qu'on voulait pour nous, et que si on avait chacun nos exploitations de chaque côté, l'organisation allait être vraiment compliquée, pour le côté personnel.

  • Speaker #1

    Donc comment vous avez scindé ? C'est quoi l'organisation ? Qu'est-ce qu'il y a là-bas ? Qu'est-ce qu'il y a ici ? Comment vous naviguez entre les deux ?

  • Speaker #0

    Alors aujourd'hui, ici, on a le troupeau principal, notre production principale, donc les mères, les limousines, les vaches. Et là-bas, on se retrouve plutôt avec les réformes, donc les mamies et les petites génisses qui restent là-bas juste avant le vêlage. Donc, dès qu'elles sont prêtes à veiller, en général, on essaie de les faire venir ici pour s'occuper du vêlage, etc. Mais c'est vrai que le troupeau qui demande le plus d'attention est ici avec nous.

  • Speaker #1

    Tu as raconté... Récemment, quand tu as eu l'occasion de t'exprimer sur ton parcours, que cette installation-là, elle a été chaotique. C'est un mot qui est ressorti, qui est fort. Pourquoi ?

  • Speaker #0

    Parce que, en fait, ce n'était pas seulement sur le contexte extérieur, c'était aussi sur un contexte plus personnel. C'est-à-dire qu'en fait, je crois qu'on a réalisé, je vais dire on, parce que je pense que lui aussi n'avait pas que moi. On a réalisé que c'était vraiment le parcours du combattant, mais pas seulement administratif, c'était aussi un parcours dans la tête. Le parcours à l'installation, il est tellement semé d'embûches. Si tu n'es pas pleinement motivé à devenir agriculteur ou agricultrice, je pense que tu n'arrives pas au bout. Donc en fait, c'est cette force mentale de se dire, il ne faut rien lâcher. Il ne faut pas se laisser détourner par soi. Le voisin qui dit qu'on ne sera pas capable de tenir l'exploitation ou par les parents qui disent « mais vous êtes sûr que vous ne voulez pas faire un truc à côté parce qu'économiquement, peut-être ça ne va pas le faire » On va dire que toutes les peurs que les gens nous mettent sur nous, il faut savoir les surmonter pour se dire « non mais je suis sûre de moi, je veux y aller » . Et en fait, c'est ça. C'est que le côté chaotique, ça a été de se battre pour le foncier et en même temps de se battre pour convaincre les gens de ce que nous, on était persuadés de vouloir faire. Et ça, déjà, en plus de l'énergie de s'installer, de créer une entreprise, de signer sur des prêts qui engagent quand même pas mal de sommes, sur des durées aussi de fermage, etc. On se rend compte que là, notre vie aussi, elle bascule. Elle bascule en fait parce que ça reste un engagement fort de cette haleine agriculture. En plus, on va sur du vivant, 7 jours sur 7. Donc, il y a vraiment une idée que la vie va changer. que vraiment, ça va switcher.

  • Speaker #1

    Mais on peut avoir l'impression, quand tu prends la suite de ton père, de ta mère, que tu restes dans la famille, que ces embûches-là, elles sont moindres. On a presque l'impression que c'est une continuité. Alors, toi, tu as dû créer une nouvelle entreprise ? Tu es repartie, pas de zéro, mais presque ?

  • Speaker #0

    En fait, c'est-à-dire que si on prend la base qu'on a annoncée tout à l'heure sur l'exploitation de mon père, donc je disais 35 hectares, une trentaine de vaches, Le projet aujourd'hui, il est de 135 hectares pour 90 mères. Donc 90 mères, ce n'est pas 90 vaches. C'est les veaux, c'est les réformes, c'est les génisses en plus. Au total, je ne sais pas, moi, d'animaux, je ne te parle pas en UGB, mais d'animaux sur l'exploitation, oui, on est presque à 200. Donc en fait, il y a quand même... C'est un autre projet pour moi. Oui, j'ai repris l'exploitation de mon père. mais on l'a fait évoluer considérablement. Donc on est quand même sur d'autres investissements, sur d'autres perspectives économiques. Et du coup, oui, c'est la reprise d'exploitation, mais je ne peux jamais, même à la base, au départ, à l'installation, je ne peux jamais me référer aux chiffres de mon père, à ce que faisait mon père, etc. Sauf dans les pratiques culturales, parce que finalement, c'est la seule chose qu'on a gardée. C'est-à-dire que les pratiques culturales, on a fait labelliser la ferme en bio, parce que là où mon père faisait les pratiques depuis 89, il n'a jamais pris le label parce que contraignant administrativement. Donc en fait, on se retrouve quand même dans un schéma où il y a quelque chose qui ressort de l'héritage, mais on est sur un projet complètement différent.

  • Speaker #1

    Tu as aussi dit que ton entourage... proches, a priori, te disaient peut-être laisse ton compagnon s'installer tout seul, toi va voir ailleurs. Pourquoi on t'a renvoyé ça, d'après toi ?

  • Speaker #0

    Alors déjà parce qu'on est sur des territoires ruraux avec des croyances limitantes où on pense que les femmes sont un peu moins capables d'être avec les animaux je pense, de gérer tout ce qui est bovins, etc. Je pense que l'entourage s'est dit, bon ben voilà, vous allez dans une situation économique qui sera difficile, parce que pour eux ça l'était. Laisse ton conjoint s'installer, va faire institutrice, va travailler dans l'entreprise informatique qu'il y a à côté, et tu l'aideras le week-end, et c'est ok. Ouais, c'était vraiment ça le discours. Il faut savoir que quand même, c'est que même moi, pendant le parcours, je me suis dit, Ok, je vais regarder pour passer le concours, pour devenir prof des écoles. Mais en fait, non. Bon, je vais regarder l'entreprise d'à côté, qu'est-ce qu'elle demande comme prérequis pour travailler chez elle. Mais en fait, non. Je pense que c'est quand même mon copain, mon conjoint qui a dit que non mais stop, arrête d'écouter tout le monde là, ton projet c'était le mien aussi. On partait pour être agriculteurs, agricultrices, on continue vers ça, quoi.

  • Speaker #1

    Tu faisais référence à Marie-Thérèse Lacombe, donc elle qui raconte vraiment les conditions des agricultrices dans les années 50, 60, 70. Et en fait, ce qu'on lit un peu dans ton parcours, c'est que oui, on a évolué, oui, il y a un statut aujourd'hui reconnu pour les femmes agricultrices. Mais ces croyances limitantes-là font que l'évolution n'est quand même pas flagrante et ce n'est pas facile aujourd'hui encore de s'installer, d'être reconnu, d'être respecté dans son rôle. Et pourtant, un tiers des installations aujourd'hui en Aveyron sont faites par des femmes. Donc, on en est où d'après toi ? Comment tu le regardes ce constat-là ?

  • Speaker #0

    C'est compliqué parce que personne n'a la même vision. Il y a des femmes qui ne ressentent pas du tout. le fait d'être une femme en agriculture, et puis il y en a d'autres qui se sentent vraiment persécutées. À côté de ça, il y a quand même des efforts qui sont faits. Néanmoins, on est quand même sur des comportements, mais surtout sur le terrain, qui reste, comme je le disais, avec des croyances limitantes, qu'une femme n'est pas capable, et puis le tracteur est beaucoup trop gros, mais ça ne vient pas que des hommes, ça vient aussi des femmes elles-mêmes. Aujourd'hui, une femme qui s'installe avec son mari, et même à 40 ans, c'est « Oh non, moi le tracteur, je ne monte pas, c'est trop gros » . Et ça, pour moi, ce n'est pas entendable, parce qu'une femme qui a fait le choix d'être agricultrice doit pouvoir maîtriser l'ensemble des tâches de son exploitation. Et ça implique aussi le tracteur, conduire le tracteur. Aujourd'hui, il n'y a pas plus simple pour conduire un tracteur, c'est bourré de boutons. direction archi-assistée. Je veux dire, quand j'ai commencé à conduire un tracteur à 7 ans, que je pouvais toucher les pédales, c'était le sommet de mon grand-père, c'était super dur de direction, etc. Là, je pense qu'on est quand même sur des facilités. Et voilà. Mais je pense que la difficulté... Dans la reconnaissance, c'est peut-être aussi l'image que l'on renvoie, c'est-à-dire des fois d'être un petit peu plus effacée, de ne pas vouloir se mêler à certaines décisions parce qu'on pense qu'on n'a pas la compétence technique pour en parler. Tout le monde a la capacité d'eux. Je veux dire, ce n'est pas un homme qui arrive mieux à réfléchir sur un tracteur qu'une femme. Mais la question n'est pas réglée, c'est certain. Il y a toujours un sujet pour moi.

  • Speaker #1

    Quelles ont été, toi, les stratégies que tu as mises en place pour te faire ta place, pour forcer quelques portes et pour ne pas avoir à t'excuser d'être une femme ici ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, j'ai la chance d'être la fille de mon père, parce qu'il a eu deux filles et qu'il nous a mis sur les tracteurs très tôt, parce qu'il avait besoin aussi que, des fois, pour distribuer le maïs aux vaches ou quoi, on puisse tenir le volant du tracteur pendant que lui faisait tomber les épis au sol. Pareil, il avait besoin de nos petites mains pour aller des fois dévisser des trucs dans les moteurs, les machins comme ça. Donc, il nous a toujours... Voilà, il n'a jamais considéré que comme on était des filles, bon, vous allez rester dans la maison avec maman et faire la cuisine. Et parce que ma mère aussi n'était pas comme ça. Ma mère a toujours été quelqu'un qui... qui s'est beaucoup investie dans sa carrière, qui a beaucoup évolué. Et pour elle, c'est important que pour qu'une femme s'accomplisse dans sa vie, elle sache faire tout ce qu'elle veut faire quand elle veut faire un métier. Donc en fait, ma place, je l'ai trouvée aussi par les compétences que j'ai eues, que j'ai réussi à avoir de mon père quand j'étais plus jeune. Et en fait, quand je suis arrivée dans ce métier, je ne me suis pas du tout dit oh là là je suis pas je pars de zéro, ça va être dur, tout ça, tout ça. Non, non, je savais déjà reculer avec une remorque, je savais déjà faire plein de choses, et donc j'étais déjà assurée. Et pour m'assurer plus avec, si tu veux, le territoire, c'était de se dire, j'ai repris le poste de trésorier de la CUMA de mon père, et puis j'ai dit, je vais intégrer le conseil d'administration de la CUMA locale. Comme ça, en fait, je m'intègre. Bonjour, je m'appelle Marine, j'ai 34 ans, je viens de m'installer. Enfin non, en fait, j'avais 28, mais bon, bref. Je viens de m'installer, ravie de vous rencontrer. On se connaît depuis que je suis petite, mais en fait, on ne se connaît pas vraiment. Et on n'a qu'à apprendre à se connaître et travailler ensemble.

  • Speaker #1

    Et tu as eu quoi comme retour à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    En fait, très bon, parce que pendant l'installation, personne ne nous connaissait vraiment. Donc c'était beaucoup de handi, beaucoup de « ils n'en seront pas capables, ils viennent de la ville, ils ont fait d'autres métiers, ils ne connaissent rien à l'agriculture » . Mais au final, après, quand on s'investit dans ce genre de structure associative, locale, vraiment, on ne peut pas être plus local qu'une Cuma. Eh bien, là, ça ouvre des perspectives. Les gens nous voient autrement, apprennent à nous connaître. Et puis, de toute façon, on est là maintenant. Donc, il faut nous prendre.

  • Speaker #1

    Donc les CUMA, je rappelle rapidement ce sont ces groupements d'achats et de mise en commun de matériel agricole qui ont été créés après la seconde guerre mondiale pour permettre aux agriculteurs d'acheter en commun justement un tracteur quand c'était dur d'avoir un tracteur sur chaque ferme, donc on mettait en commun notamment tous ces matériels-là Tu es la première femme présidente de la Fédération Nationale des CUMA Oui. Ça c'est quand même assez incroyable. Alors avant d'arriver à cette élection, à ce mandat que tu as commencé en juin 2025, pourquoi tu as souhaité passer de la Cuma communale à la Cuma ville francheoise départementale, puisque tu étais investie...

  • Speaker #0

    C'est ça, la Fédération départementale des Cuma, oui, en Aveyron.

  • Speaker #1

    Et pourquoi passer au national ? Qu'est-ce qu'il dit cet engagement-là ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, oui, comme je disais, ça part de la base, ça part de reprendre le poste de trésorerie de mon père. hein ? De comprendre le fonctionnement de ces petites coopératives où on mutualise du matériel mais aussi de la main d'oeuvre et en fait comprendre que c'est aussi là que se passent les discussions sur les besoins des entreprises de chacun. C'est là où se passent un petit peu les synergies entre agriculteurs, l'entraide, la solidarité, le respect et la créativité finalement de ces groupes. Et donc, très rapidement, après avoir pris ce poste de trésorier à la Cuma du Franchois, qui est une intercuma, nous ce qu'on appelle une intercuma, c'est-à-dire une cuma qui rayonne sur un espace un peu plus grand qu'une cuma. parce qu'elle a du matériel un peu plus performant, très rapidement, j'ai des collègues de cette Cuma qui sont venus me voir et qui m'ont dit qu'en fait, Marine, il y a le réseau Cuma qui accompagne les Cuma. Parce que moi, j'ai toujours vu l'animatrice venir, mais on ne s'intéresse pas vraiment au réseau. On sait qu'elle vient, qu'elle nous aide. Je réalise que l'accompagnement des Cuma, l'accompagnement de ses collectifs, l'accompagnement des agriculteurs, c'est quand même quelque chose de... C'est incroyable. Et en fait, rapidement, j'ai pris des responsabilités et j'ai été repérée par le National pour une mission. C'était d'être élue au Conseil de la coopération agricole. Donc, en fait, c'est le Conseil qui va délivrer les agréments aux coopératives agricoles en France. Et en fait, je m'épanouis tellement dans cette mission. En fait, je me retrouve à ce que le Haut Conseil me propose une formation à Sciences Po Paris et en collaboration avec l'IFCAM du Crédit Agricole. Et donc, une formation qui est en fait un certificat sur six mois qui s'appelle « Gouvernance d'une entreprise coopérative » où finalement, je parfait un petit peu cette formation. c'est-à-dire que Via cette expérience au conseil, où j'étais déjà depuis deux ans, j'avais déjà pas mal de bagages juridiques. Mais alors là, je suis arrivée à Sciences Po et l'IFCAM avec le bagage aussi fiscal et puis la gouvernance aussi. Comment on fait pour gouverner dans une coopérative et comment on fait pour conduire un conseil d'administration. Et comment on fait... Voilà. Et puis, donc là, je sens que je prends encore plus de bouteilles. Et voilà, et là, j'avais vraiment cette envie de dire, je ne veux plus être seulement spectatrice ou rapportrice de ce que la Fédération Nationale doit faire, je veux aussi m'impliquer pour que moi aussi, je participe aux décisions qui peuvent faire avancer le droit des Kumas, et ce qu'elles ont le droit de faire sur le terrain, et comment elles peuvent mieux se développer. Et donc, l'idée au départ, c'était... Ce n'était pas ce poste de présidente. Je ne suis jamais arrivée là en me disant « Je vais être présidente de la Fédération nationale des Kumas » . Ça n'a jamais été une ambition personnelle. Là, je me suis dit « J'ai pris la bouteille, je suis formée. Le réseau aussi a investi en moi. Le conseil et le réseau Kuma ont investi en moi. Donc, je vais rejoindre le bureau. » C'est ce qui était souhaité. Au fur et à mesure des mois, des semaines, etc., eh bien, en fait... Je comprenais que je pouvais aussi amener quelque chose en étant présidente. Ça pouvait paraître tôt pour certains parce que je n'ai que 36 ans. Alors je suis trop vieille pour le foot mais trop jeune pour l'agriculture. Mais voilà, en fait c'était le bon timing parce que les idées je les avais là, je les maîtrisais maintenant. Et qu'à ce stade-là où est le réseau Cuma, la Fédération Nationale des Cumas, j'avais quelque chose à apporter. Donc, en fait, au final, j'ai levé la main et j'ai dit, bon, en fait, je me présenterais bien présidente. Et en parallèle de ce lever de doigts, qui était un peu timide au début, c'était plutôt en mode, non, mais si personne ne veut y aller, j'y vais. Bon, en fait, il y avait du monde qui voulait y aller aussi, mais j'étais à bon, mais on peut s'entendre et tout ça. Mais bon, voilà, j'ai passé, je ne sais pas moi. 30 orales du bac au téléphone, j'exagère, mais ce que je veux dire c'était que c'était beaucoup de téléphones, de convaincre des gens, parler de ma vision, de ce que j'imaginais pour le réseau. Et c'était en fait de se dire j'ai vraiment une idée et on peut y aller tous ensemble et venez avec moi et ça va être chouette et tout. Et donc voilà, on en est là aujourd'hui. Je me suis toujours dit que si ça passait pas, ça passait pas et puis je ferais autre chose dans le réseau, mais dans le réseau.

  • Speaker #1

    Donc on est ce jour-là de juin, qu'est-ce qui te traverse l'esprit à ce moment-là, sachant que ça fait moins de huit ans que tu es installée ? Donc en fait, tous ces changements, toutes ces évolutions, elles ont eu lieu quand même dans un laps de temps assez court, et tu te retrouves première femme présidente de la Fédération nationale des Kumas. Il y a quoi dans ta tête ce jour-là ?

  • Speaker #0

    Déjà, ça fait huit ans d'installation, sept ans dans le réseau, d'investissement quand même assez important. Le jour de l'élection, beaucoup de pression, on s'imagine. J'avais un petit discours à faire juste à la fin de la journée, après mon élection. Je me suis blindée au max parce que je ne voulais pas que ça transparesse trop. Pour moi, ce n'est pas la concrétisation. Quand j'arrive sur scène et qu'on me dit Marine Boyer et puis nouvelle présidente de la FNCuma que... que les gens m'applaudissent et se lèvent, je me dis... J'essaie de me blender, de faire... Je ne suis pas là. Je ne vis pas ce moment. Je ne réalise pas, en fait. Et même la soirée se passe, les gens viennent te féliciter, tout ça, tout ça. Et là encore, je pense que je ne réalise pas la portée de ma décision. Donc, j'ai pris mon ordinateur, je me suis calée avec les équipes de la FN Cuma, je l'ai ouvert. Et en fait, à partir du moment où on s'est mis à travailler, je me suis dit, non mais c'est ma place. C'est go, on y va. Et il y a plein de choses à faire et c'est parti.

  • Speaker #1

    Et justement, tu y vas avec quelle envie ? Qu'est-ce que tu as envie de porter sur ce mandat ? Les priorités ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, comme pas mal de structures, on a quand même ce souci de la baisse du nombre d'agriculteurs. Ça fait dix ans qu'on dit que dans dix ans, il y a la moitié des agriculteurs qui partent à la retraite. Et nous, demain, c'est comment on accompagne, on continue à accompagner les cumas sans qu'on perde un peu ce maillage territorial. Après, c'est toute la question de... de décarbonisation de l'agriculture. Et aujourd'hui, on se doit, nous, face à ces enjeux-là, de répondre présent et de donner des solutions. Aujourd'hui, il y a un gros soutien fiscal de la mécanisation agricole individuelle sur l'investissement individuel. Et aujourd'hui, c'est de dire... En tant que Cuma, en tant que collectif, on se positionne pour amener une autre vision, amener quelque chose de neuf qui finalement existe depuis toujours, l'entraide, mais qui finalement peut être l'avenir aussi de l'agriculture. C'est-à-dire qu'à plusieurs, un agriculteur peut se sentir soutenu, peut se sentir plus confiant de faire des investissements et sans mettre en péril son exploitation. Nous, on a envie de répondre que les cumas peuvent être l'outil qui permet à l'agriculteur de rester aux manettes de sa ferme sans y être pour autant esclave. C'est-à-dire qu'avec la mutualisation de travaux, avec la mutualisation de salariés, il va pouvoir se dégager du temps, il va pouvoir vivre une vie plus moderne et qui ressemble un peu plus aux attentes aussi de cette nouvelle génération qui veut s'installer. Et tout ça, en fait, on le porte parce qu'on est persuadé que ça peut être aussi la clé là de perdurer ce monde agricole. Et une autre avancée fondamentale à laquelle on tient, et finalement on l'a vu avec le contexte actuel, c'est-à-dire qu'il y a vraiment un fossé entre la société et le monde agricole. Nous, notre proposition dans le réseau Cuma pour faire un lien entre la société Et l'agriculture, c'est qu'on a inventé un volontariat agricole, un volontariat agricole, ce qui en fait se traduit par un service civique. Et en fait, ça va permettre à quelqu'un qui est non-issue du monde agricole, qui est curieux de voir comment ça fonctionne, de venir faire un service civique dans une cuma, et de découvrir un peu ce panel d'activités qu'il peut y avoir. parce que C'est aussi l'avantage des coopératives d'utilisation de matériel agricole, c'est qu'elles regroupent plusieurs productions, plusieurs activités. Un salarié, un service civique ne fera pas la même tâche du jour au lendemain. Ça va être des fois du service complet, vraiment de la conduite de matériel, mais ça va être de la mise à disposition sur l'exploitation. Donc en fait, ça va être découvrir un peu le panel large de ce qu'est l'agriculture. C'est à nous de faire ce travail de promotion. de ce service civique, de le rendre accessible, de le rendre attrayant et qu'on ait plus de volontaires.

  • Speaker #1

    Donc on était un peu sur les défis et que peut la Cuma ? Ce qui est intéressant, particulièrement dans les Cuma et dans la Fédération, c'est que vous dépassez aussi un peu les intérêts politiques partisans qui peuvent diviser le monde agricole aussi à l'intérieur. Qu'est-ce qui fait, toi, que dans le monde agricole, tu te dis que la Cuma peut être ? Alors, J'allais dire une porte de sortie à la crise, non peut-être pas, mais en tout cas une lueur d'espoir, quelque chose qui réenchante le métier.

  • Speaker #0

    En fait, on est le reflet de ce qui se passe en local. Un voisin qui est syndiqué dans un syndicat, l'autre voisin qui est syndiqué dans l'autre syndicat, localement ils vont se parler. Et en fait, dans la CUMA, les groupes, dès lors que les agriculteurs viennent pour parler du matériel, tous les clivages... politique, syndical, etc., tout s'efface. Donc, en fait, le réseau jusqu'au bout, jusqu'au national... Il est régi par ça, c'est-à-dire que pourquoi il n'y a pas de prise de position politique ou syndicale ? Tout simplement parce qu'on est le reflet des adhérents. Et les adhérents aujourd'hui, c'est 50% des agriculteurs en France. Donc 50% des agriculteurs, ça représente un panel d'agriculteurs qui viennent de tous bords et qui ont besoin, eux, juste de mutualiser. C'est-à-dire que c'est vu comme un outil. Et nous, derrière, en fait... ça, ça reste un enjeu. C'est-à-dire qu'on souhaite pouvoir être entendu, être écouté par tout le monde. Alors après, des fois, ça ne marche pas. Des fois, on ne nous ouvre pas la porte. Mais l'intérêt, c'est quand même qu'on reflète ce qui se passe sur le terrain. Aujourd'hui, oui, le réseau humain peut être le lien entre ce monde agricole qui, des fois, aussi, se comprend pas. Nous, on peut jouer ce rôle de lien, en tout cas d'intérêt commun, on va dire. Et c'est en ça que je dirais que ça donne un brin d'espoir, c'est parce qu'on peut créer une synergie que peut-être un syndicat ne pourra pas créer parce que trop clivant, etc. Nous, en fait, on peut se positionner en disant, voilà, regardez les agriculteurs. Les agriculteurs voudraient ça, nous on peut le porter avec vous. Qu'est-ce que vous en dites et du coup d'y aller à plusieurs ?

  • Speaker #1

    Quel regard est-ce que tu portes toi aujourd'hui sur ces dernières dix années de l'informatique à Montréal jusqu'à aujourd'hui installée, chef d'exploitation, présidente des Cuma ?

  • Speaker #0

    Je dirais que c'est un parcours en fait. ces parcours et je dirais que chaque... Chaque étape a fait que je suis là aujourd'hui, pas seulement en tant que présidente mais en tant qu'agricultrice. Et donc je dirais que c'est vraiment un cheminement et ce n'est pas des opportunités. Je n'ai jamais été quelqu'un d'opportuniste, donc c'est vraiment juste des moments de vie qui font que je suis là aujourd'hui, des expériences, des formations, du coaching. et donc voilà c'est C'est une accumulation de choses qui font que je suis là aujourd'hui. Vraiment, aujourd'hui, je me sens pleinement épanouie, que ce soit dans mes fonctions, que ce soit dans mon métier et dans ma vie personnelle.

  • Speaker #1

    Quel regard portent tes parents, tes beaux-parents sur ce parcours-là, après les doutes qu'ils ont eus il y a dix ans ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, ils sont rassurés, déjà sur notre situation économique, quand on parle de l'entreprise. Donc voilà, là, ils sont pleinement... Rassurés, ils voyaient à quel point on est investi et à quel point on fait marcher notre entreprise. Donc là, il n'y a plus de doute. Évidemment qu'ils sont fiers de l'engagement que je dirais que nous prenons. Parce que finalement, oui, c'est moi qui suis présidente de la FN Cuma, mais mon conjoint participe aussi à ça. On est une équipe. Parce qu'en fait, sans le fait que, déjà sans son soutien infaillible, mais aussi sans le fait qu'il prenne à bras le corps notre entreprise. Donc on a quand même des salariés de Cuma qui peuvent venir l'aider. On a quand même des aides, de l'entraide de la part des voisins, de la famille, etc. Néanmoins, c'est quand même lui qui pilote, qui chapote. Dès que je suis là, je l'aide au mieux. Mais sans ça, en fait, voilà. je ne pourrais pas faire ce que je fais aujourd'hui donc extrêmement reconnaissante pour ça et donc nos parents je pense qu'ils sont très fiers de ce qu'on a accompli tous les deux.

  • Speaker #1

    Une question juste logistique, ton mandat il dure combien de temps ?

  • Speaker #0

    Ce sont des mandats de 3 ans.

  • Speaker #1

    3 ans et ça représente quoi comme rythme pour toi ? C'est beaucoup d'allées et venues à Paris ?

  • Speaker #0

    Oui quand même il faut compter à 2-3 jours par semaine sur Paris ou en tout cas en déplacement Donc un déplacement, ça veut dire sur des territoires, en région ou bien sur des salons. Mais on va dire que ça prend deux, trois jours de déplacement. Mais il y a quand même pas mal de travail d'écriture, de mail, etc. Et heureusement, maintenant, on a les oreillettes Bluetooth, donc c'est mieux. Mais oui, il y a toujours un moment. On va dire que quand même du lundi au vendredi, je suis dans mon poste. Je suis hors de la ferme vraiment deux à trois jours par semaine.

  • Speaker #1

    Et une dernière question, je te sors peut-être un peu de tous tes rôles, mais je la pose à tous les invités, c'est en quoi est-ce que tu crois ?

  • Speaker #0

    En quoi est-ce que je crois ? C'est super dur ! Je crois en l'être humain. Je crois en l'être humain et à ses capacités à pouvoir avancer et à trouver des idées. Je crois en la créativité en fait en chacun de nous. Je crois que tout le monde est capable de tout, je n'ai pas l'impression qu'on soit limité. Et d'ailleurs tout le parcours, tout mon parcours mais tout le parcours que les gens font, c'est la preuve qu'en fait il ne faut pas se fier aux croyances limitantes etc. dès lors qu'on veut entreprendre quelque chose et bien si on s'en donne les moyens alors on est capable de le faire donc je crois à l'être humain à sa capacité à être créatif

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Marine Merci à toi

  • Speaker #0

    Voilà, c'était tout

  • Speaker #1

    Si vous voulez continuer sur ce sujet je vous recommande l'écoute de l'épisode de Finta avec Marie-Thérèse Lacombe il est disponible dans la collection des pionnières de Finta Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de Finta jusqu'au bout. J'espère qu'il vous a plu, inspiré, questionné et fait voyager peut-être. Viens me dire sur Instagram ou sur fintapodcast.fr ce que tu en as pensé. Je suis toujours curieuse de vous lire pour faire grandir Finta. Si tu fais partie de ceux qui apprécient le podcast et qui veulent continuer à cheminer avec moi dans les contrées avéronaises, tu peux désormais soutenir financièrement le podcast en donnant quelques euros par mois ou en faisant un don ponctuel. Tu participes à renforcer l'indépendance éditoriale de Finta et tu valorises, par la même occasion, le temps que j'y consacre chaque semaine. Figure-toi que si chaque auditeur donne un euro par mois, Finta peut vivre sans publicité dès aujourd'hui. Le lien de la cagnotte est disponible en description de cet épisode. Pour que Finta vive, partage-le autour de toi, parle-en à tes amis, laisse-lui des étoiles et des commentaires sur toutes les applis d'écoute. C'est vraiment... le meilleur soutien que tu puisses nous apporter. À très bientôt.

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Quand elle a plaqué sa vie d’avant, Marine Boyer n’imaginait pas que, huit ans plus tard, on lui réclamerait des selfies. Pas plus qu’elle n’imaginait côtoyer les plus grandes figures politiques et syndicales agricoles toutes les semaines. Si elle avait choisi de s’installer comme éleveuse de vaches limousines sur le Ségala, c’était d’abord pour s’inscrire dans sa lignée familiale avec son conjoint, Loïc.


Après une installation qu’elle décrit comme « chaotique », c’est son engagement dans des associations locales d’entraide qui lui a permis de s’intégrer pleinement dans le paysage agricole aveyronnais. C’est cet engagement, vraisemblablement héréditaire, qui l’a propulsée dans une autre dimension. Voilà donc Marine Boyer, 36 ans, présidente de la Fédération nationale des Cuma.


Créées après la Seconde guerre mondiale, pour permettre aux agriculteurs de mutualiser du matériel et de la main d’œuvre, on compte aujourd’hui en France plus de 10 000 Cuma. Concrètement, un agriculteur sur deux en France adhère à une Cuma locale. Et si elles fêtent, en 2025, leurs 80 ans, c’est la première fois de leur histoire qu’elles ont, à leur tête, une femme.


Et c’est sur sa ferme, à La Bastide-l’Evêque, que je la retrouve. De la place des femmes dans l’agriculture française aujourd’hui, de la coopération et de l’entraide salvatrice pour les agriculteurs face aux défis environnementaux et au renouvellement des générations, du dialogue par-delà les clivages politiques et syndicaux : ce sont autant de sujets que l’on a abordés ensemble. Bonne écoute !


😍 Pour continuer sur ce sujet, je vous recommande l’épisode avec Marie-Thérèse Lacombe, disponible dans la collection des Pionnières de Finta!


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Ecrit, réalisé et produit par Lola Cros / mixé par Studio Qude. Tous droits réservés.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Alors déjà, j'ai la chance d'être la fille de mon père, parce qu'il a eu deux filles et qu'il nous a mis sur les tracteurs très tôt, parce qu'il avait besoin aussi que, des fois, pour distribuer le maïs aux vaches ou quoi, on puisse tenir le volant du tracteur pendant que lui faisait tomber les épis au sol. Pareil, il avait besoin de nos petites mains pour aller, des fois, dévisser des trucs dans les moteurs, les machins comme ça. Donc, il nous a toujours... Voilà. Il n'a jamais considéré que comme on était des filles, vous allez rester dans la maison avec maman et faire la cuisine.

  • Speaker #1

    Explorer les basculements d'une époque, sentir frémir des énergies, voir les ruralités se transformer avec celles et ceux qui les provoquent, les repensent et les bousculent. Finta, c'est le podcast qui nourrit les esprits, les envies d'agir et des espoirs. très concret, à l'échelle locale. Finta donne à entendre l'Aveyron à travers celles et ceux qui ont choisi d'habiter ici et maintenant. Je suis Lola Cross et j'arpente ce bout de campagne depuis 12 ans comme journaliste. Avec Finta, je vous invite à pousser la porte de vos voisins, à croiser des regards, à Finter de plus près. Et ça commence tout de suite. Quand elle a plaqué sa vie d'avant, Marine Boyer n'imaginait pas que, huit ans plus tard, on lui réclamerait des selfies. Pas plus qu'elle n'imaginait côtoyer les plus grandes figures politiques et syndicales agricoles toutes les semaines. Si elle avait choisi de s'installer comme éleveuse de vaches et limousines sur le Ségala, c'était d'abord pour s'inscrire dans sa lignée familiale avec son conjoint Loïc. Après une installation chaotique, c'est son engagement dans des associations locales d'entraide qui lui ont permis de s'intégrer pleinement. dans le paysage agricole avéronné. Et c'est ce même engagement, vraisemblablement héréditaire, qui l'a propulsé dans une autre dimension. Voilà donc Marine Boyer, 36 ans, présidente de la Fédération Nationale des Cumas. Créée après la Seconde Guerre Mondiale pour permettre aux agriculteurs de mutualiser du matériel et de la main-d'œuvre, on compte aujourd'hui en France plus de 10 000 cumas. Concrètement, un agriculteur sur deux, en France, adhère à une cuma locale. Et si elles fêtent aujourd'hui, en 2025, leurs 80 ans, c'est la première fois de leur histoire qu'elles ont, à leur tête, une femme. Et c'est sur sa ferme, à la Bastille de l'Évêque, que je retrouve Marine Boyer. De la place des femmes dans l'agriculture française aujourd'hui, de la coopération et de l'entraide, salvatrice pour les agriculteurs face aux défis environnementaux, du dialogue par-delà les clivages politiques et syndicaux, ce sont autant de sujets que l'on a abordés ensemble, à travers son parcours. Bonne écoute.

  • Speaker #0

    Alors ici, on est dans la maison familiale, sur plusieurs générations. Et c'est vraiment un lieu auquel je tiens énormément. Effectivement, mes arrières, Il y a vraiment plusieurs générations qui ont vécu dans cette maison. Et même moi, quand j'étais petite, on était trois générations à vivre ensemble. Mes grands-parents, mes parents, ma sœur et moi. Donc il y a vraiment une histoire avec cette maison. Ça a toujours été un lieu d'accueil pour les amis, la famille. Ça a toujours été une terre d'accueil. Et donc reprendre un peu cette maison, c'était tout un symbole. Et ça fait aussi partie... de l'idée de reprendre l'exploitation, c'était aussi reprendre la maison avec. Les gens viennent dormir ici, les gens viennent vivre ici avec nous. Et donc, c'est tout ça que je voulais hériter.

  • Speaker #1

    Mais au quotidien, vous n'êtes que deux.

  • Speaker #0

    Oui, au quotidien, on n'est que deux, voire quatre avec les deux gros toutous qui nous accompagnent, les vaches aussi, le lapin, les Ausha. Non, au quotidien, on n'est que deux.

  • Speaker #1

    On n'a pas précisé, mais on est sur la commune de la Bastille de l'Évêque, entre rue Pérou et ville Franche, pour situer peut-être un peu. Peut-être juste un petit mot sur l'univers qui nous entoure. Alors moi, je ne m'y attendais pas. Rentrant dans une maison d'agriculteurs, d'agricultrices sur les fermes, je ne suis pas habituée à cette décoration. Qu'est-ce qu'il y a autour de nous ?

  • Speaker #0

    Alors, autour de nous, il y a un univers. En fait, c'est ça, c'est que pour se sentir bien chez soi, Je pense qu'il faut que la maison reflète un peu ce qu'on est. On vit dans des lieux qui nous ressemblent et pas trop dans des modèles aseptisés avec les meubles, tout est gris et puis il y a un mur rouge et puis la cuisine est blanche. Donc là, pour le coup, c'est les jeux vidéo, les dessins animés un peu vintage, les livres. Beaucoup. Et puis, un univers chaleureux. Un peu d'agriculture aussi. On ne l'a pas vu, mais dans le salon, il y a un peu d'agriculture. Mais des photos, évidemment. Des photos de nos voyages, de nos proches. Je crois que pour se sentir bien chez soi, il faut se personnaliser.

  • Speaker #1

    Alors moi, dans mon champ de vision, je t'ai toi. J'ai une immense affiche d'Alice au Pays des Merveilles. Je vois ça et j'en suis ravie pour échanger avec toi. Tu nous parles de ta famille, comme quoi tu as grandi dans ce cocon-là, avec plusieurs générations regroupées sous le même toit. Dans quelle famille est-ce que tu as grandi ? Qui sont-ils, ses parents, grands-parents ?

  • Speaker #0

    Ses parents, ses grands-parents, ce sont des gens engagés. Déjà aimants, qui aiment la nature aussi, les animaux beaucoup. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours vu des chiens, énormément de chiens à la maison. des Ausha, j'ai grandi avec tous ces animaux et l'amour de ces animaux. J'ai grandi avec, je disais, des gens généreux qui ont, via le sens de l'accueil, c'est sûr, mais qui ont toujours donné aux gens. Et puis, le sens de l'engagement, parce que, que ce soit à chaque génération et même du côté, finalement, de ma maman, qui est sur, évidemment, une autre maison, Mes grands-parents ont toujours été investis et engagés, donc pour le coup ici mes deux grands-pères étaient à la municipalité. Finalement j'ai toujours vu mes parents s'investir dans des associations, du village, voilà. Donc en fait, et mon père aussi à la municipalité, donc au final un sens de l'engagement qui se traduisait par, eh bien, si on veut... que si on veut que notre territoire vive, si on veut que le village y vive, il faut s'y investir. Je crois que c'est des valeurs qui nous ont été transmises à ma sœur et moi.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'ils travaillaient tous sur la ferme ?

  • Speaker #0

    Non. Alors, mes grands-parents, oui. Donc, avec ma grand-mère sans statut, je sais que tu as rencontré Marie-Thérèse Lacombe, donc tu sais ce que c'était à cette époque-là. Ma maman était professeure des écoles, elle est à la retraite et donc mon père était seul sur l'exploitation.

  • Speaker #1

    Elle ressemblait à quoi l'exploitation du temps de ton père ?

  • Speaker #0

    Alors du temps de mon père c'était 35 hectares avec à peu près une trentaine d'animaux et alors avec des pratiques sans pesticides depuis 89 parce qu'il avait suivi une formation à la chambre d'agriculture. Et puis, il avait été accompagné d'un ami pour arrêter justement les pesticides et pour voir quelles étaient les solutions alternatives. Et donc, c'était une petite exploitation qui a eu, et bien comme toutes les exploitations pendant la vache folle, des difficultés. Et donc, mon père a accumulé à un moment donné un deuxième emploi en plus de l'exploitation de chauffeur laitier.

  • Speaker #1

    Est-ce que toi... et Petite, tu rêvais d'être agricultrice ?

  • Speaker #0

    Oui, déjà enfant, avec ma sœur, on était tout le temps dehors. On était tout le temps avec les animaux, tout le temps à jouer au tracteur à pédales, tout le temps dans les pattes de notre papa. Et en grandissant, j'ai aidé mon père aux travaux de la ferme, ma sœur également. Et donc au collège, oui, effectivement, la question s'est posée, mais vu le contexte. économique. Encore une fois, cette crise sanitaire qui frappait les exploitations à l'époque, mes parents ne souhaitaient pas que je m'oriente dans un lycée agricole et que je fasse autre chose, une filière plus générale. Je suis partie pas du tout dans l'agriculture. Je suis partie faire de l'informatique.

  • Speaker #1

    À Toulouse, pour tes études, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça. J'ai fait mes études à Toulouse. Et puis un stage qui a amené à un CDI dans une entreprise toulousaine. Et pareil, développer un logiciel dans une entreprise toulousaine. Et c'est vrai que ça a été une expérience aussi. C'était quand même un milieu que j'aimais. C'est-à-dire que si on revient à l'ambiance de la maison, l'ambiance de ma chambre quand j'étais enfant, c'était que je récupérais tout ce qui était hi-fi, ordinateur. Donc en fait, à un moment donné, dans ma chambre, il y avait une télé magnétoscope que j'avais récupérée. Mes parents n'ont jamais acheté de télé ou de magnétoscope, mais je me débrouillais en fait. Et l'ordinateur, c'était pareil. J'avais récupéré l'ordinateur d'un ami à mes parents, j'avais récupéré un autre ordinateur et j'étais tout le temps en train de bidouiller dessus quand il pleuvait dehors. C'est-à-dire que quand il faisait beau, j'étais dehors, mais quand il ne faisait pas beau, j'étais dedans à bidouiller. Mes choses, j'avais trouvé des consoles de jeux, ça et là, donc c'est pareil, je jouais beaucoup à la console et donc je suis allée vers là, tout simplement.

  • Speaker #1

    Quand tes parents te disent, va peut-être voir ailleurs, la conjoncture n'est pas bonne dans l'agriculture, toi tu ne le vis pas comme un renoncement pour autant ?

  • Speaker #0

    Non, parce que je crois qu'à cette époque-là, on n'est jamais trop sûr de ce qu'on veut faire dans la vie. Et en plus, il y avait un contexte qui faisait peur aussi, quand même. Et en fait, je ne m'étais jamais posée aussi, je pense, à cette époque-là, la question de, un jour, la ferme peut disparaître. Tu sais, ça reste un moment où tu te dis que tout ça, c'est à ton papa que ça va rester comme ça toute la vie. Et que même si je suis informaticienne à Toulouse, je peux rentrer les week-ends. pour être sur l'exploitation, voir des animaux, aider mon papa. Donc il n'y avait pas un renoncement parce que je ne sentais pas que j'abandonnais quelque chose.

  • Speaker #1

    Donc Toulouse, tu y restes combien de temps finalement ?

  • Speaker #0

    Donc Toulouse en tout, j'y reste bien 5-6 ans. Et après, je pars à... Après, en fait, l'expérience toulousaine, c'était aussi vivre en appartement. Donc très difficile que ce soit pour mon conjoint ou moi, on était absolument pas bien dans cette vie-là et donc on a décidé de partir au Canada. On a obtenu un permis vacances-travail à l'époque où c'était un petit peu le tirage au sort pour l'obtenir et donc on a réussi à l'obtenir et on est parti un an et ça a complètement chamboulé notre vie. et ça a complètement remis en question nos projets. Et donc, en fait, une fois là-bas, on a pris conscience, je pense, tous les deux, des patrimoines de nos parents, des entreprises, de ce que ça signifiait pour nous, de l'importance que, comme je l'ai expliqué au début, la maison, etc., mais aussi l'exploitation et de cette envie aussi de vivre la vie dehors. Et donc, on s'est dit, en fait, est-ce qu'on ne deviendrait pas agriculteurs ?

  • Speaker #1

    Donc, c'est vraiment au Canada que vous avez cette idée-là ? Oui. Qu'est-ce que vous avez fait au Canada, Panaména ? Vous avez travaillé où ?

  • Speaker #0

    On a travaillé dans l'événementiel. Donc, on est resté six mois à Montréal et puis six mois à Québec. Et à six mois à Montréal, on a travaillé six mois dans l'événementiel. Et à Québec, c'était pareil. On a fait des petits jobs un peu dans l'événementiel. Et puis, on a trouvé d'autres jobs comme ça. Mais voilà, on a toujours travaillé tout le long. Et le deal, c'était qu'on avait, très tôt dans le voyage, on a acheté une voiture pour vadrouiller un peu partout.

  • Speaker #1

    Mais vous n'aviez pas envie de voir des pratiques agricoles, vous n'étiez pas là pour autant ?

  • Speaker #0

    Si, ce qui est rigolo, c'est qu'en fait, c'est là où on a vu aussi notre intérêt. Je ne sais pas si c'est le destin, mais en fait, quand on a déménagé à Québec, dans une maison, dans un sous-sol, ça se fait beaucoup au Québec, on vit sous les maisons, en demi-sous-sol. Au-dessus de ce demi-sous-sol, notre propriétaire, Suzanne, qui est devenue depuis une amie très proche. Et dans cette famille-là, le papa de Suzanne a travaillé à ce qui s'appelle le Crédit Agricole au Québec, mais ce n'est pas la banque que l'on connaît, c'est vraiment un service d'accompagnement au conseil, à la gestion des exploitations, etc. Et donc... Très vite, les sujets agricoles sont arrivés. Et donc, il nous a proposé, effectivement, de nous intéresser au monde agricole québécois. Et ça a été très riche de connaître cet aspect-là aussi. Et ça nous a fait encore plus mûrir nos idées, parce qu'on s'est dit, ah oui, en fait, si même là-bas, on trouve intérêt à parler d'agriculture, c'est le moment.

  • Speaker #1

    Donc ton conjoint, pour le coup, vient aussi d'une famille d'agriculteurs. Donc au moment où vous vous dites, OK, on veut rentrer et on veut s'installer, vous avez deux fermes sur les mains. Comment ça se passe à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    Eh bien déjà, ça se passe qu'il faut convaincre les parents. Enfin, convaincre. Oui et non, parce que ça reste un choix personnel. Donc on est quand même libre de faire ce qu'on veut. Mais ça reste leur entreprise. Ils vont la céder parce qu'ils vont partir à la retraite. Donc c'est quand même être sûre que notre projet leur parle. Et donc en fait, on fait venir mes parents d'abord 15 jours au Québec pour leur faire visiter évidemment le pays dans lequel on vit depuis tous ces mois. Et puis on leur aimait l'idée qu'en rentrant, il y aura peut-être une installation ou deux, une reprise. Et puis on fait venir les parents de mon conjoint, pareil, 15 jours. Et on leur aimait la même idée. Et puis au final, les mamans étaient très inquiètes parce que la reprise d'exploitation agricole, alors que finalement on était deux diplômés avec potentiellement de bons jobs et pouvant aller à de bons salaires. Là, on veut devenir agriculteur. Donc voilà, avec toutes les difficultés qu'ils ont vécues avant nous, je pense que ça résonnait un peu mal à eux. Et puis en fait, les papas étaient super fiers de voir leur outil perdurer dans le temps. Et donc, l'idée de départ, c'était quand même de s'installer chacun de son côté, de ne pas faire forcément un gag, mais de s'installer chacun de son côté. Et puis en fait, c'est lors du parcours à l'installation qu'on a changé notre projet. Et les deux fermes sont distantes de 18 kilomètres. Il y avait aussi cette notion d'organisation, d'aspect collectif. De dire qu'on avait aussi des loisirs, des moments qu'on voulait pour nous, et que si on avait chacun nos exploitations de chaque côté, l'organisation allait être vraiment compliquée, pour le côté personnel.

  • Speaker #1

    Donc comment vous avez scindé ? C'est quoi l'organisation ? Qu'est-ce qu'il y a là-bas ? Qu'est-ce qu'il y a ici ? Comment vous naviguez entre les deux ?

  • Speaker #0

    Alors aujourd'hui, ici, on a le troupeau principal, notre production principale, donc les mères, les limousines, les vaches. Et là-bas, on se retrouve plutôt avec les réformes, donc les mamies et les petites génisses qui restent là-bas juste avant le vêlage. Donc, dès qu'elles sont prêtes à veiller, en général, on essaie de les faire venir ici pour s'occuper du vêlage, etc. Mais c'est vrai que le troupeau qui demande le plus d'attention est ici avec nous.

  • Speaker #1

    Tu as raconté... Récemment, quand tu as eu l'occasion de t'exprimer sur ton parcours, que cette installation-là, elle a été chaotique. C'est un mot qui est ressorti, qui est fort. Pourquoi ?

  • Speaker #0

    Parce que, en fait, ce n'était pas seulement sur le contexte extérieur, c'était aussi sur un contexte plus personnel. C'est-à-dire qu'en fait, je crois qu'on a réalisé, je vais dire on, parce que je pense que lui aussi n'avait pas que moi. On a réalisé que c'était vraiment le parcours du combattant, mais pas seulement administratif, c'était aussi un parcours dans la tête. Le parcours à l'installation, il est tellement semé d'embûches. Si tu n'es pas pleinement motivé à devenir agriculteur ou agricultrice, je pense que tu n'arrives pas au bout. Donc en fait, c'est cette force mentale de se dire, il ne faut rien lâcher. Il ne faut pas se laisser détourner par soi. Le voisin qui dit qu'on ne sera pas capable de tenir l'exploitation ou par les parents qui disent « mais vous êtes sûr que vous ne voulez pas faire un truc à côté parce qu'économiquement, peut-être ça ne va pas le faire » On va dire que toutes les peurs que les gens nous mettent sur nous, il faut savoir les surmonter pour se dire « non mais je suis sûre de moi, je veux y aller » . Et en fait, c'est ça. C'est que le côté chaotique, ça a été de se battre pour le foncier et en même temps de se battre pour convaincre les gens de ce que nous, on était persuadés de vouloir faire. Et ça, déjà, en plus de l'énergie de s'installer, de créer une entreprise, de signer sur des prêts qui engagent quand même pas mal de sommes, sur des durées aussi de fermage, etc. On se rend compte que là, notre vie aussi, elle bascule. Elle bascule en fait parce que ça reste un engagement fort de cette haleine agriculture. En plus, on va sur du vivant, 7 jours sur 7. Donc, il y a vraiment une idée que la vie va changer. que vraiment, ça va switcher.

  • Speaker #1

    Mais on peut avoir l'impression, quand tu prends la suite de ton père, de ta mère, que tu restes dans la famille, que ces embûches-là, elles sont moindres. On a presque l'impression que c'est une continuité. Alors, toi, tu as dû créer une nouvelle entreprise ? Tu es repartie, pas de zéro, mais presque ?

  • Speaker #0

    En fait, c'est-à-dire que si on prend la base qu'on a annoncée tout à l'heure sur l'exploitation de mon père, donc je disais 35 hectares, une trentaine de vaches, Le projet aujourd'hui, il est de 135 hectares pour 90 mères. Donc 90 mères, ce n'est pas 90 vaches. C'est les veaux, c'est les réformes, c'est les génisses en plus. Au total, je ne sais pas, moi, d'animaux, je ne te parle pas en UGB, mais d'animaux sur l'exploitation, oui, on est presque à 200. Donc en fait, il y a quand même... C'est un autre projet pour moi. Oui, j'ai repris l'exploitation de mon père. mais on l'a fait évoluer considérablement. Donc on est quand même sur d'autres investissements, sur d'autres perspectives économiques. Et du coup, oui, c'est la reprise d'exploitation, mais je ne peux jamais, même à la base, au départ, à l'installation, je ne peux jamais me référer aux chiffres de mon père, à ce que faisait mon père, etc. Sauf dans les pratiques culturales, parce que finalement, c'est la seule chose qu'on a gardée. C'est-à-dire que les pratiques culturales, on a fait labelliser la ferme en bio, parce que là où mon père faisait les pratiques depuis 89, il n'a jamais pris le label parce que contraignant administrativement. Donc en fait, on se retrouve quand même dans un schéma où il y a quelque chose qui ressort de l'héritage, mais on est sur un projet complètement différent.

  • Speaker #1

    Tu as aussi dit que ton entourage... proches, a priori, te disaient peut-être laisse ton compagnon s'installer tout seul, toi va voir ailleurs. Pourquoi on t'a renvoyé ça, d'après toi ?

  • Speaker #0

    Alors déjà parce qu'on est sur des territoires ruraux avec des croyances limitantes où on pense que les femmes sont un peu moins capables d'être avec les animaux je pense, de gérer tout ce qui est bovins, etc. Je pense que l'entourage s'est dit, bon ben voilà, vous allez dans une situation économique qui sera difficile, parce que pour eux ça l'était. Laisse ton conjoint s'installer, va faire institutrice, va travailler dans l'entreprise informatique qu'il y a à côté, et tu l'aideras le week-end, et c'est ok. Ouais, c'était vraiment ça le discours. Il faut savoir que quand même, c'est que même moi, pendant le parcours, je me suis dit, Ok, je vais regarder pour passer le concours, pour devenir prof des écoles. Mais en fait, non. Bon, je vais regarder l'entreprise d'à côté, qu'est-ce qu'elle demande comme prérequis pour travailler chez elle. Mais en fait, non. Je pense que c'est quand même mon copain, mon conjoint qui a dit que non mais stop, arrête d'écouter tout le monde là, ton projet c'était le mien aussi. On partait pour être agriculteurs, agricultrices, on continue vers ça, quoi.

  • Speaker #1

    Tu faisais référence à Marie-Thérèse Lacombe, donc elle qui raconte vraiment les conditions des agricultrices dans les années 50, 60, 70. Et en fait, ce qu'on lit un peu dans ton parcours, c'est que oui, on a évolué, oui, il y a un statut aujourd'hui reconnu pour les femmes agricultrices. Mais ces croyances limitantes-là font que l'évolution n'est quand même pas flagrante et ce n'est pas facile aujourd'hui encore de s'installer, d'être reconnu, d'être respecté dans son rôle. Et pourtant, un tiers des installations aujourd'hui en Aveyron sont faites par des femmes. Donc, on en est où d'après toi ? Comment tu le regardes ce constat-là ?

  • Speaker #0

    C'est compliqué parce que personne n'a la même vision. Il y a des femmes qui ne ressentent pas du tout. le fait d'être une femme en agriculture, et puis il y en a d'autres qui se sentent vraiment persécutées. À côté de ça, il y a quand même des efforts qui sont faits. Néanmoins, on est quand même sur des comportements, mais surtout sur le terrain, qui reste, comme je le disais, avec des croyances limitantes, qu'une femme n'est pas capable, et puis le tracteur est beaucoup trop gros, mais ça ne vient pas que des hommes, ça vient aussi des femmes elles-mêmes. Aujourd'hui, une femme qui s'installe avec son mari, et même à 40 ans, c'est « Oh non, moi le tracteur, je ne monte pas, c'est trop gros » . Et ça, pour moi, ce n'est pas entendable, parce qu'une femme qui a fait le choix d'être agricultrice doit pouvoir maîtriser l'ensemble des tâches de son exploitation. Et ça implique aussi le tracteur, conduire le tracteur. Aujourd'hui, il n'y a pas plus simple pour conduire un tracteur, c'est bourré de boutons. direction archi-assistée. Je veux dire, quand j'ai commencé à conduire un tracteur à 7 ans, que je pouvais toucher les pédales, c'était le sommet de mon grand-père, c'était super dur de direction, etc. Là, je pense qu'on est quand même sur des facilités. Et voilà. Mais je pense que la difficulté... Dans la reconnaissance, c'est peut-être aussi l'image que l'on renvoie, c'est-à-dire des fois d'être un petit peu plus effacée, de ne pas vouloir se mêler à certaines décisions parce qu'on pense qu'on n'a pas la compétence technique pour en parler. Tout le monde a la capacité d'eux. Je veux dire, ce n'est pas un homme qui arrive mieux à réfléchir sur un tracteur qu'une femme. Mais la question n'est pas réglée, c'est certain. Il y a toujours un sujet pour moi.

  • Speaker #1

    Quelles ont été, toi, les stratégies que tu as mises en place pour te faire ta place, pour forcer quelques portes et pour ne pas avoir à t'excuser d'être une femme ici ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, j'ai la chance d'être la fille de mon père, parce qu'il a eu deux filles et qu'il nous a mis sur les tracteurs très tôt, parce qu'il avait besoin aussi que, des fois, pour distribuer le maïs aux vaches ou quoi, on puisse tenir le volant du tracteur pendant que lui faisait tomber les épis au sol. Pareil, il avait besoin de nos petites mains pour aller des fois dévisser des trucs dans les moteurs, les machins comme ça. Donc, il nous a toujours... Voilà, il n'a jamais considéré que comme on était des filles, bon, vous allez rester dans la maison avec maman et faire la cuisine. Et parce que ma mère aussi n'était pas comme ça. Ma mère a toujours été quelqu'un qui... qui s'est beaucoup investie dans sa carrière, qui a beaucoup évolué. Et pour elle, c'est important que pour qu'une femme s'accomplisse dans sa vie, elle sache faire tout ce qu'elle veut faire quand elle veut faire un métier. Donc en fait, ma place, je l'ai trouvée aussi par les compétences que j'ai eues, que j'ai réussi à avoir de mon père quand j'étais plus jeune. Et en fait, quand je suis arrivée dans ce métier, je ne me suis pas du tout dit oh là là je suis pas je pars de zéro, ça va être dur, tout ça, tout ça. Non, non, je savais déjà reculer avec une remorque, je savais déjà faire plein de choses, et donc j'étais déjà assurée. Et pour m'assurer plus avec, si tu veux, le territoire, c'était de se dire, j'ai repris le poste de trésorier de la CUMA de mon père, et puis j'ai dit, je vais intégrer le conseil d'administration de la CUMA locale. Comme ça, en fait, je m'intègre. Bonjour, je m'appelle Marine, j'ai 34 ans, je viens de m'installer. Enfin non, en fait, j'avais 28, mais bon, bref. Je viens de m'installer, ravie de vous rencontrer. On se connaît depuis que je suis petite, mais en fait, on ne se connaît pas vraiment. Et on n'a qu'à apprendre à se connaître et travailler ensemble.

  • Speaker #1

    Et tu as eu quoi comme retour à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    En fait, très bon, parce que pendant l'installation, personne ne nous connaissait vraiment. Donc c'était beaucoup de handi, beaucoup de « ils n'en seront pas capables, ils viennent de la ville, ils ont fait d'autres métiers, ils ne connaissent rien à l'agriculture » . Mais au final, après, quand on s'investit dans ce genre de structure associative, locale, vraiment, on ne peut pas être plus local qu'une Cuma. Eh bien, là, ça ouvre des perspectives. Les gens nous voient autrement, apprennent à nous connaître. Et puis, de toute façon, on est là maintenant. Donc, il faut nous prendre.

  • Speaker #1

    Donc les CUMA, je rappelle rapidement ce sont ces groupements d'achats et de mise en commun de matériel agricole qui ont été créés après la seconde guerre mondiale pour permettre aux agriculteurs d'acheter en commun justement un tracteur quand c'était dur d'avoir un tracteur sur chaque ferme, donc on mettait en commun notamment tous ces matériels-là Tu es la première femme présidente de la Fédération Nationale des CUMA Oui. Ça c'est quand même assez incroyable. Alors avant d'arriver à cette élection, à ce mandat que tu as commencé en juin 2025, pourquoi tu as souhaité passer de la Cuma communale à la Cuma ville francheoise départementale, puisque tu étais investie...

  • Speaker #0

    C'est ça, la Fédération départementale des Cuma, oui, en Aveyron.

  • Speaker #1

    Et pourquoi passer au national ? Qu'est-ce qu'il dit cet engagement-là ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, oui, comme je disais, ça part de la base, ça part de reprendre le poste de trésorerie de mon père. hein ? De comprendre le fonctionnement de ces petites coopératives où on mutualise du matériel mais aussi de la main d'oeuvre et en fait comprendre que c'est aussi là que se passent les discussions sur les besoins des entreprises de chacun. C'est là où se passent un petit peu les synergies entre agriculteurs, l'entraide, la solidarité, le respect et la créativité finalement de ces groupes. Et donc, très rapidement, après avoir pris ce poste de trésorier à la Cuma du Franchois, qui est une intercuma, nous ce qu'on appelle une intercuma, c'est-à-dire une cuma qui rayonne sur un espace un peu plus grand qu'une cuma. parce qu'elle a du matériel un peu plus performant, très rapidement, j'ai des collègues de cette Cuma qui sont venus me voir et qui m'ont dit qu'en fait, Marine, il y a le réseau Cuma qui accompagne les Cuma. Parce que moi, j'ai toujours vu l'animatrice venir, mais on ne s'intéresse pas vraiment au réseau. On sait qu'elle vient, qu'elle nous aide. Je réalise que l'accompagnement des Cuma, l'accompagnement de ses collectifs, l'accompagnement des agriculteurs, c'est quand même quelque chose de... C'est incroyable. Et en fait, rapidement, j'ai pris des responsabilités et j'ai été repérée par le National pour une mission. C'était d'être élue au Conseil de la coopération agricole. Donc, en fait, c'est le Conseil qui va délivrer les agréments aux coopératives agricoles en France. Et en fait, je m'épanouis tellement dans cette mission. En fait, je me retrouve à ce que le Haut Conseil me propose une formation à Sciences Po Paris et en collaboration avec l'IFCAM du Crédit Agricole. Et donc, une formation qui est en fait un certificat sur six mois qui s'appelle « Gouvernance d'une entreprise coopérative » où finalement, je parfait un petit peu cette formation. c'est-à-dire que Via cette expérience au conseil, où j'étais déjà depuis deux ans, j'avais déjà pas mal de bagages juridiques. Mais alors là, je suis arrivée à Sciences Po et l'IFCAM avec le bagage aussi fiscal et puis la gouvernance aussi. Comment on fait pour gouverner dans une coopérative et comment on fait pour conduire un conseil d'administration. Et comment on fait... Voilà. Et puis, donc là, je sens que je prends encore plus de bouteilles. Et voilà, et là, j'avais vraiment cette envie de dire, je ne veux plus être seulement spectatrice ou rapportrice de ce que la Fédération Nationale doit faire, je veux aussi m'impliquer pour que moi aussi, je participe aux décisions qui peuvent faire avancer le droit des Kumas, et ce qu'elles ont le droit de faire sur le terrain, et comment elles peuvent mieux se développer. Et donc, l'idée au départ, c'était... Ce n'était pas ce poste de présidente. Je ne suis jamais arrivée là en me disant « Je vais être présidente de la Fédération nationale des Kumas » . Ça n'a jamais été une ambition personnelle. Là, je me suis dit « J'ai pris la bouteille, je suis formée. Le réseau aussi a investi en moi. Le conseil et le réseau Kuma ont investi en moi. Donc, je vais rejoindre le bureau. » C'est ce qui était souhaité. Au fur et à mesure des mois, des semaines, etc., eh bien, en fait... Je comprenais que je pouvais aussi amener quelque chose en étant présidente. Ça pouvait paraître tôt pour certains parce que je n'ai que 36 ans. Alors je suis trop vieille pour le foot mais trop jeune pour l'agriculture. Mais voilà, en fait c'était le bon timing parce que les idées je les avais là, je les maîtrisais maintenant. Et qu'à ce stade-là où est le réseau Cuma, la Fédération Nationale des Cumas, j'avais quelque chose à apporter. Donc, en fait, au final, j'ai levé la main et j'ai dit, bon, en fait, je me présenterais bien présidente. Et en parallèle de ce lever de doigts, qui était un peu timide au début, c'était plutôt en mode, non, mais si personne ne veut y aller, j'y vais. Bon, en fait, il y avait du monde qui voulait y aller aussi, mais j'étais à bon, mais on peut s'entendre et tout ça. Mais bon, voilà, j'ai passé, je ne sais pas moi. 30 orales du bac au téléphone, j'exagère, mais ce que je veux dire c'était que c'était beaucoup de téléphones, de convaincre des gens, parler de ma vision, de ce que j'imaginais pour le réseau. Et c'était en fait de se dire j'ai vraiment une idée et on peut y aller tous ensemble et venez avec moi et ça va être chouette et tout. Et donc voilà, on en est là aujourd'hui. Je me suis toujours dit que si ça passait pas, ça passait pas et puis je ferais autre chose dans le réseau, mais dans le réseau.

  • Speaker #1

    Donc on est ce jour-là de juin, qu'est-ce qui te traverse l'esprit à ce moment-là, sachant que ça fait moins de huit ans que tu es installée ? Donc en fait, tous ces changements, toutes ces évolutions, elles ont eu lieu quand même dans un laps de temps assez court, et tu te retrouves première femme présidente de la Fédération nationale des Kumas. Il y a quoi dans ta tête ce jour-là ?

  • Speaker #0

    Déjà, ça fait huit ans d'installation, sept ans dans le réseau, d'investissement quand même assez important. Le jour de l'élection, beaucoup de pression, on s'imagine. J'avais un petit discours à faire juste à la fin de la journée, après mon élection. Je me suis blindée au max parce que je ne voulais pas que ça transparesse trop. Pour moi, ce n'est pas la concrétisation. Quand j'arrive sur scène et qu'on me dit Marine Boyer et puis nouvelle présidente de la FNCuma que... que les gens m'applaudissent et se lèvent, je me dis... J'essaie de me blender, de faire... Je ne suis pas là. Je ne vis pas ce moment. Je ne réalise pas, en fait. Et même la soirée se passe, les gens viennent te féliciter, tout ça, tout ça. Et là encore, je pense que je ne réalise pas la portée de ma décision. Donc, j'ai pris mon ordinateur, je me suis calée avec les équipes de la FN Cuma, je l'ai ouvert. Et en fait, à partir du moment où on s'est mis à travailler, je me suis dit, non mais c'est ma place. C'est go, on y va. Et il y a plein de choses à faire et c'est parti.

  • Speaker #1

    Et justement, tu y vas avec quelle envie ? Qu'est-ce que tu as envie de porter sur ce mandat ? Les priorités ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, comme pas mal de structures, on a quand même ce souci de la baisse du nombre d'agriculteurs. Ça fait dix ans qu'on dit que dans dix ans, il y a la moitié des agriculteurs qui partent à la retraite. Et nous, demain, c'est comment on accompagne, on continue à accompagner les cumas sans qu'on perde un peu ce maillage territorial. Après, c'est toute la question de... de décarbonisation de l'agriculture. Et aujourd'hui, on se doit, nous, face à ces enjeux-là, de répondre présent et de donner des solutions. Aujourd'hui, il y a un gros soutien fiscal de la mécanisation agricole individuelle sur l'investissement individuel. Et aujourd'hui, c'est de dire... En tant que Cuma, en tant que collectif, on se positionne pour amener une autre vision, amener quelque chose de neuf qui finalement existe depuis toujours, l'entraide, mais qui finalement peut être l'avenir aussi de l'agriculture. C'est-à-dire qu'à plusieurs, un agriculteur peut se sentir soutenu, peut se sentir plus confiant de faire des investissements et sans mettre en péril son exploitation. Nous, on a envie de répondre que les cumas peuvent être l'outil qui permet à l'agriculteur de rester aux manettes de sa ferme sans y être pour autant esclave. C'est-à-dire qu'avec la mutualisation de travaux, avec la mutualisation de salariés, il va pouvoir se dégager du temps, il va pouvoir vivre une vie plus moderne et qui ressemble un peu plus aux attentes aussi de cette nouvelle génération qui veut s'installer. Et tout ça, en fait, on le porte parce qu'on est persuadé que ça peut être aussi la clé là de perdurer ce monde agricole. Et une autre avancée fondamentale à laquelle on tient, et finalement on l'a vu avec le contexte actuel, c'est-à-dire qu'il y a vraiment un fossé entre la société et le monde agricole. Nous, notre proposition dans le réseau Cuma pour faire un lien entre la société Et l'agriculture, c'est qu'on a inventé un volontariat agricole, un volontariat agricole, ce qui en fait se traduit par un service civique. Et en fait, ça va permettre à quelqu'un qui est non-issue du monde agricole, qui est curieux de voir comment ça fonctionne, de venir faire un service civique dans une cuma, et de découvrir un peu ce panel d'activités qu'il peut y avoir. parce que C'est aussi l'avantage des coopératives d'utilisation de matériel agricole, c'est qu'elles regroupent plusieurs productions, plusieurs activités. Un salarié, un service civique ne fera pas la même tâche du jour au lendemain. Ça va être des fois du service complet, vraiment de la conduite de matériel, mais ça va être de la mise à disposition sur l'exploitation. Donc en fait, ça va être découvrir un peu le panel large de ce qu'est l'agriculture. C'est à nous de faire ce travail de promotion. de ce service civique, de le rendre accessible, de le rendre attrayant et qu'on ait plus de volontaires.

  • Speaker #1

    Donc on était un peu sur les défis et que peut la Cuma ? Ce qui est intéressant, particulièrement dans les Cuma et dans la Fédération, c'est que vous dépassez aussi un peu les intérêts politiques partisans qui peuvent diviser le monde agricole aussi à l'intérieur. Qu'est-ce qui fait, toi, que dans le monde agricole, tu te dis que la Cuma peut être ? Alors, J'allais dire une porte de sortie à la crise, non peut-être pas, mais en tout cas une lueur d'espoir, quelque chose qui réenchante le métier.

  • Speaker #0

    En fait, on est le reflet de ce qui se passe en local. Un voisin qui est syndiqué dans un syndicat, l'autre voisin qui est syndiqué dans l'autre syndicat, localement ils vont se parler. Et en fait, dans la CUMA, les groupes, dès lors que les agriculteurs viennent pour parler du matériel, tous les clivages... politique, syndical, etc., tout s'efface. Donc, en fait, le réseau jusqu'au bout, jusqu'au national... Il est régi par ça, c'est-à-dire que pourquoi il n'y a pas de prise de position politique ou syndicale ? Tout simplement parce qu'on est le reflet des adhérents. Et les adhérents aujourd'hui, c'est 50% des agriculteurs en France. Donc 50% des agriculteurs, ça représente un panel d'agriculteurs qui viennent de tous bords et qui ont besoin, eux, juste de mutualiser. C'est-à-dire que c'est vu comme un outil. Et nous, derrière, en fait... ça, ça reste un enjeu. C'est-à-dire qu'on souhaite pouvoir être entendu, être écouté par tout le monde. Alors après, des fois, ça ne marche pas. Des fois, on ne nous ouvre pas la porte. Mais l'intérêt, c'est quand même qu'on reflète ce qui se passe sur le terrain. Aujourd'hui, oui, le réseau humain peut être le lien entre ce monde agricole qui, des fois, aussi, se comprend pas. Nous, on peut jouer ce rôle de lien, en tout cas d'intérêt commun, on va dire. Et c'est en ça que je dirais que ça donne un brin d'espoir, c'est parce qu'on peut créer une synergie que peut-être un syndicat ne pourra pas créer parce que trop clivant, etc. Nous, en fait, on peut se positionner en disant, voilà, regardez les agriculteurs. Les agriculteurs voudraient ça, nous on peut le porter avec vous. Qu'est-ce que vous en dites et du coup d'y aller à plusieurs ?

  • Speaker #1

    Quel regard est-ce que tu portes toi aujourd'hui sur ces dernières dix années de l'informatique à Montréal jusqu'à aujourd'hui installée, chef d'exploitation, présidente des Cuma ?

  • Speaker #0

    Je dirais que c'est un parcours en fait. ces parcours et je dirais que chaque... Chaque étape a fait que je suis là aujourd'hui, pas seulement en tant que présidente mais en tant qu'agricultrice. Et donc je dirais que c'est vraiment un cheminement et ce n'est pas des opportunités. Je n'ai jamais été quelqu'un d'opportuniste, donc c'est vraiment juste des moments de vie qui font que je suis là aujourd'hui, des expériences, des formations, du coaching. et donc voilà c'est C'est une accumulation de choses qui font que je suis là aujourd'hui. Vraiment, aujourd'hui, je me sens pleinement épanouie, que ce soit dans mes fonctions, que ce soit dans mon métier et dans ma vie personnelle.

  • Speaker #1

    Quel regard portent tes parents, tes beaux-parents sur ce parcours-là, après les doutes qu'ils ont eus il y a dix ans ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, ils sont rassurés, déjà sur notre situation économique, quand on parle de l'entreprise. Donc voilà, là, ils sont pleinement... Rassurés, ils voyaient à quel point on est investi et à quel point on fait marcher notre entreprise. Donc là, il n'y a plus de doute. Évidemment qu'ils sont fiers de l'engagement que je dirais que nous prenons. Parce que finalement, oui, c'est moi qui suis présidente de la FN Cuma, mais mon conjoint participe aussi à ça. On est une équipe. Parce qu'en fait, sans le fait que, déjà sans son soutien infaillible, mais aussi sans le fait qu'il prenne à bras le corps notre entreprise. Donc on a quand même des salariés de Cuma qui peuvent venir l'aider. On a quand même des aides, de l'entraide de la part des voisins, de la famille, etc. Néanmoins, c'est quand même lui qui pilote, qui chapote. Dès que je suis là, je l'aide au mieux. Mais sans ça, en fait, voilà. je ne pourrais pas faire ce que je fais aujourd'hui donc extrêmement reconnaissante pour ça et donc nos parents je pense qu'ils sont très fiers de ce qu'on a accompli tous les deux.

  • Speaker #1

    Une question juste logistique, ton mandat il dure combien de temps ?

  • Speaker #0

    Ce sont des mandats de 3 ans.

  • Speaker #1

    3 ans et ça représente quoi comme rythme pour toi ? C'est beaucoup d'allées et venues à Paris ?

  • Speaker #0

    Oui quand même il faut compter à 2-3 jours par semaine sur Paris ou en tout cas en déplacement Donc un déplacement, ça veut dire sur des territoires, en région ou bien sur des salons. Mais on va dire que ça prend deux, trois jours de déplacement. Mais il y a quand même pas mal de travail d'écriture, de mail, etc. Et heureusement, maintenant, on a les oreillettes Bluetooth, donc c'est mieux. Mais oui, il y a toujours un moment. On va dire que quand même du lundi au vendredi, je suis dans mon poste. Je suis hors de la ferme vraiment deux à trois jours par semaine.

  • Speaker #1

    Et une dernière question, je te sors peut-être un peu de tous tes rôles, mais je la pose à tous les invités, c'est en quoi est-ce que tu crois ?

  • Speaker #0

    En quoi est-ce que je crois ? C'est super dur ! Je crois en l'être humain. Je crois en l'être humain et à ses capacités à pouvoir avancer et à trouver des idées. Je crois en la créativité en fait en chacun de nous. Je crois que tout le monde est capable de tout, je n'ai pas l'impression qu'on soit limité. Et d'ailleurs tout le parcours, tout mon parcours mais tout le parcours que les gens font, c'est la preuve qu'en fait il ne faut pas se fier aux croyances limitantes etc. dès lors qu'on veut entreprendre quelque chose et bien si on s'en donne les moyens alors on est capable de le faire donc je crois à l'être humain à sa capacité à être créatif

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Marine Merci à toi

  • Speaker #0

    Voilà, c'était tout

  • Speaker #1

    Si vous voulez continuer sur ce sujet je vous recommande l'écoute de l'épisode de Finta avec Marie-Thérèse Lacombe il est disponible dans la collection des pionnières de Finta Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de Finta jusqu'au bout. J'espère qu'il vous a plu, inspiré, questionné et fait voyager peut-être. Viens me dire sur Instagram ou sur fintapodcast.fr ce que tu en as pensé. Je suis toujours curieuse de vous lire pour faire grandir Finta. Si tu fais partie de ceux qui apprécient le podcast et qui veulent continuer à cheminer avec moi dans les contrées avéronaises, tu peux désormais soutenir financièrement le podcast en donnant quelques euros par mois ou en faisant un don ponctuel. Tu participes à renforcer l'indépendance éditoriale de Finta et tu valorises, par la même occasion, le temps que j'y consacre chaque semaine. Figure-toi que si chaque auditeur donne un euro par mois, Finta peut vivre sans publicité dès aujourd'hui. Le lien de la cagnotte est disponible en description de cet épisode. Pour que Finta vive, partage-le autour de toi, parle-en à tes amis, laisse-lui des étoiles et des commentaires sur toutes les applis d'écoute. C'est vraiment... le meilleur soutien que tu puisses nous apporter. À très bientôt.

Description

Quand elle a plaqué sa vie d’avant, Marine Boyer n’imaginait pas que, huit ans plus tard, on lui réclamerait des selfies. Pas plus qu’elle n’imaginait côtoyer les plus grandes figures politiques et syndicales agricoles toutes les semaines. Si elle avait choisi de s’installer comme éleveuse de vaches limousines sur le Ségala, c’était d’abord pour s’inscrire dans sa lignée familiale avec son conjoint, Loïc.


Après une installation qu’elle décrit comme « chaotique », c’est son engagement dans des associations locales d’entraide qui lui a permis de s’intégrer pleinement dans le paysage agricole aveyronnais. C’est cet engagement, vraisemblablement héréditaire, qui l’a propulsée dans une autre dimension. Voilà donc Marine Boyer, 36 ans, présidente de la Fédération nationale des Cuma.


Créées après la Seconde guerre mondiale, pour permettre aux agriculteurs de mutualiser du matériel et de la main d’œuvre, on compte aujourd’hui en France plus de 10 000 Cuma. Concrètement, un agriculteur sur deux en France adhère à une Cuma locale. Et si elles fêtent, en 2025, leurs 80 ans, c’est la première fois de leur histoire qu’elles ont, à leur tête, une femme.


Et c’est sur sa ferme, à La Bastide-l’Evêque, que je la retrouve. De la place des femmes dans l’agriculture française aujourd’hui, de la coopération et de l’entraide salvatrice pour les agriculteurs face aux défis environnementaux et au renouvellement des générations, du dialogue par-delà les clivages politiques et syndicaux : ce sont autant de sujets que l’on a abordés ensemble. Bonne écoute !


😍 Pour continuer sur ce sujet, je vous recommande l’épisode avec Marie-Thérèse Lacombe, disponible dans la collection des Pionnières de Finta!


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Ecrit, réalisé et produit par Lola Cros / mixé par Studio Qude. Tous droits réservés.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Alors déjà, j'ai la chance d'être la fille de mon père, parce qu'il a eu deux filles et qu'il nous a mis sur les tracteurs très tôt, parce qu'il avait besoin aussi que, des fois, pour distribuer le maïs aux vaches ou quoi, on puisse tenir le volant du tracteur pendant que lui faisait tomber les épis au sol. Pareil, il avait besoin de nos petites mains pour aller, des fois, dévisser des trucs dans les moteurs, les machins comme ça. Donc, il nous a toujours... Voilà. Il n'a jamais considéré que comme on était des filles, vous allez rester dans la maison avec maman et faire la cuisine.

  • Speaker #1

    Explorer les basculements d'une époque, sentir frémir des énergies, voir les ruralités se transformer avec celles et ceux qui les provoquent, les repensent et les bousculent. Finta, c'est le podcast qui nourrit les esprits, les envies d'agir et des espoirs. très concret, à l'échelle locale. Finta donne à entendre l'Aveyron à travers celles et ceux qui ont choisi d'habiter ici et maintenant. Je suis Lola Cross et j'arpente ce bout de campagne depuis 12 ans comme journaliste. Avec Finta, je vous invite à pousser la porte de vos voisins, à croiser des regards, à Finter de plus près. Et ça commence tout de suite. Quand elle a plaqué sa vie d'avant, Marine Boyer n'imaginait pas que, huit ans plus tard, on lui réclamerait des selfies. Pas plus qu'elle n'imaginait côtoyer les plus grandes figures politiques et syndicales agricoles toutes les semaines. Si elle avait choisi de s'installer comme éleveuse de vaches et limousines sur le Ségala, c'était d'abord pour s'inscrire dans sa lignée familiale avec son conjoint Loïc. Après une installation chaotique, c'est son engagement dans des associations locales d'entraide qui lui ont permis de s'intégrer pleinement. dans le paysage agricole avéronné. Et c'est ce même engagement, vraisemblablement héréditaire, qui l'a propulsé dans une autre dimension. Voilà donc Marine Boyer, 36 ans, présidente de la Fédération Nationale des Cumas. Créée après la Seconde Guerre Mondiale pour permettre aux agriculteurs de mutualiser du matériel et de la main-d'œuvre, on compte aujourd'hui en France plus de 10 000 cumas. Concrètement, un agriculteur sur deux, en France, adhère à une cuma locale. Et si elles fêtent aujourd'hui, en 2025, leurs 80 ans, c'est la première fois de leur histoire qu'elles ont, à leur tête, une femme. Et c'est sur sa ferme, à la Bastille de l'Évêque, que je retrouve Marine Boyer. De la place des femmes dans l'agriculture française aujourd'hui, de la coopération et de l'entraide, salvatrice pour les agriculteurs face aux défis environnementaux, du dialogue par-delà les clivages politiques et syndicaux, ce sont autant de sujets que l'on a abordés ensemble, à travers son parcours. Bonne écoute.

  • Speaker #0

    Alors ici, on est dans la maison familiale, sur plusieurs générations. Et c'est vraiment un lieu auquel je tiens énormément. Effectivement, mes arrières, Il y a vraiment plusieurs générations qui ont vécu dans cette maison. Et même moi, quand j'étais petite, on était trois générations à vivre ensemble. Mes grands-parents, mes parents, ma sœur et moi. Donc il y a vraiment une histoire avec cette maison. Ça a toujours été un lieu d'accueil pour les amis, la famille. Ça a toujours été une terre d'accueil. Et donc reprendre un peu cette maison, c'était tout un symbole. Et ça fait aussi partie... de l'idée de reprendre l'exploitation, c'était aussi reprendre la maison avec. Les gens viennent dormir ici, les gens viennent vivre ici avec nous. Et donc, c'est tout ça que je voulais hériter.

  • Speaker #1

    Mais au quotidien, vous n'êtes que deux.

  • Speaker #0

    Oui, au quotidien, on n'est que deux, voire quatre avec les deux gros toutous qui nous accompagnent, les vaches aussi, le lapin, les Ausha. Non, au quotidien, on n'est que deux.

  • Speaker #1

    On n'a pas précisé, mais on est sur la commune de la Bastille de l'Évêque, entre rue Pérou et ville Franche, pour situer peut-être un peu. Peut-être juste un petit mot sur l'univers qui nous entoure. Alors moi, je ne m'y attendais pas. Rentrant dans une maison d'agriculteurs, d'agricultrices sur les fermes, je ne suis pas habituée à cette décoration. Qu'est-ce qu'il y a autour de nous ?

  • Speaker #0

    Alors, autour de nous, il y a un univers. En fait, c'est ça, c'est que pour se sentir bien chez soi, Je pense qu'il faut que la maison reflète un peu ce qu'on est. On vit dans des lieux qui nous ressemblent et pas trop dans des modèles aseptisés avec les meubles, tout est gris et puis il y a un mur rouge et puis la cuisine est blanche. Donc là, pour le coup, c'est les jeux vidéo, les dessins animés un peu vintage, les livres. Beaucoup. Et puis, un univers chaleureux. Un peu d'agriculture aussi. On ne l'a pas vu, mais dans le salon, il y a un peu d'agriculture. Mais des photos, évidemment. Des photos de nos voyages, de nos proches. Je crois que pour se sentir bien chez soi, il faut se personnaliser.

  • Speaker #1

    Alors moi, dans mon champ de vision, je t'ai toi. J'ai une immense affiche d'Alice au Pays des Merveilles. Je vois ça et j'en suis ravie pour échanger avec toi. Tu nous parles de ta famille, comme quoi tu as grandi dans ce cocon-là, avec plusieurs générations regroupées sous le même toit. Dans quelle famille est-ce que tu as grandi ? Qui sont-ils, ses parents, grands-parents ?

  • Speaker #0

    Ses parents, ses grands-parents, ce sont des gens engagés. Déjà aimants, qui aiment la nature aussi, les animaux beaucoup. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours vu des chiens, énormément de chiens à la maison. des Ausha, j'ai grandi avec tous ces animaux et l'amour de ces animaux. J'ai grandi avec, je disais, des gens généreux qui ont, via le sens de l'accueil, c'est sûr, mais qui ont toujours donné aux gens. Et puis, le sens de l'engagement, parce que, que ce soit à chaque génération et même du côté, finalement, de ma maman, qui est sur, évidemment, une autre maison, Mes grands-parents ont toujours été investis et engagés, donc pour le coup ici mes deux grands-pères étaient à la municipalité. Finalement j'ai toujours vu mes parents s'investir dans des associations, du village, voilà. Donc en fait, et mon père aussi à la municipalité, donc au final un sens de l'engagement qui se traduisait par, eh bien, si on veut... que si on veut que notre territoire vive, si on veut que le village y vive, il faut s'y investir. Je crois que c'est des valeurs qui nous ont été transmises à ma sœur et moi.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'ils travaillaient tous sur la ferme ?

  • Speaker #0

    Non. Alors, mes grands-parents, oui. Donc, avec ma grand-mère sans statut, je sais que tu as rencontré Marie-Thérèse Lacombe, donc tu sais ce que c'était à cette époque-là. Ma maman était professeure des écoles, elle est à la retraite et donc mon père était seul sur l'exploitation.

  • Speaker #1

    Elle ressemblait à quoi l'exploitation du temps de ton père ?

  • Speaker #0

    Alors du temps de mon père c'était 35 hectares avec à peu près une trentaine d'animaux et alors avec des pratiques sans pesticides depuis 89 parce qu'il avait suivi une formation à la chambre d'agriculture. Et puis, il avait été accompagné d'un ami pour arrêter justement les pesticides et pour voir quelles étaient les solutions alternatives. Et donc, c'était une petite exploitation qui a eu, et bien comme toutes les exploitations pendant la vache folle, des difficultés. Et donc, mon père a accumulé à un moment donné un deuxième emploi en plus de l'exploitation de chauffeur laitier.

  • Speaker #1

    Est-ce que toi... et Petite, tu rêvais d'être agricultrice ?

  • Speaker #0

    Oui, déjà enfant, avec ma sœur, on était tout le temps dehors. On était tout le temps avec les animaux, tout le temps à jouer au tracteur à pédales, tout le temps dans les pattes de notre papa. Et en grandissant, j'ai aidé mon père aux travaux de la ferme, ma sœur également. Et donc au collège, oui, effectivement, la question s'est posée, mais vu le contexte. économique. Encore une fois, cette crise sanitaire qui frappait les exploitations à l'époque, mes parents ne souhaitaient pas que je m'oriente dans un lycée agricole et que je fasse autre chose, une filière plus générale. Je suis partie pas du tout dans l'agriculture. Je suis partie faire de l'informatique.

  • Speaker #1

    À Toulouse, pour tes études, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça. J'ai fait mes études à Toulouse. Et puis un stage qui a amené à un CDI dans une entreprise toulousaine. Et pareil, développer un logiciel dans une entreprise toulousaine. Et c'est vrai que ça a été une expérience aussi. C'était quand même un milieu que j'aimais. C'est-à-dire que si on revient à l'ambiance de la maison, l'ambiance de ma chambre quand j'étais enfant, c'était que je récupérais tout ce qui était hi-fi, ordinateur. Donc en fait, à un moment donné, dans ma chambre, il y avait une télé magnétoscope que j'avais récupérée. Mes parents n'ont jamais acheté de télé ou de magnétoscope, mais je me débrouillais en fait. Et l'ordinateur, c'était pareil. J'avais récupéré l'ordinateur d'un ami à mes parents, j'avais récupéré un autre ordinateur et j'étais tout le temps en train de bidouiller dessus quand il pleuvait dehors. C'est-à-dire que quand il faisait beau, j'étais dehors, mais quand il ne faisait pas beau, j'étais dedans à bidouiller. Mes choses, j'avais trouvé des consoles de jeux, ça et là, donc c'est pareil, je jouais beaucoup à la console et donc je suis allée vers là, tout simplement.

  • Speaker #1

    Quand tes parents te disent, va peut-être voir ailleurs, la conjoncture n'est pas bonne dans l'agriculture, toi tu ne le vis pas comme un renoncement pour autant ?

  • Speaker #0

    Non, parce que je crois qu'à cette époque-là, on n'est jamais trop sûr de ce qu'on veut faire dans la vie. Et en plus, il y avait un contexte qui faisait peur aussi, quand même. Et en fait, je ne m'étais jamais posée aussi, je pense, à cette époque-là, la question de, un jour, la ferme peut disparaître. Tu sais, ça reste un moment où tu te dis que tout ça, c'est à ton papa que ça va rester comme ça toute la vie. Et que même si je suis informaticienne à Toulouse, je peux rentrer les week-ends. pour être sur l'exploitation, voir des animaux, aider mon papa. Donc il n'y avait pas un renoncement parce que je ne sentais pas que j'abandonnais quelque chose.

  • Speaker #1

    Donc Toulouse, tu y restes combien de temps finalement ?

  • Speaker #0

    Donc Toulouse en tout, j'y reste bien 5-6 ans. Et après, je pars à... Après, en fait, l'expérience toulousaine, c'était aussi vivre en appartement. Donc très difficile que ce soit pour mon conjoint ou moi, on était absolument pas bien dans cette vie-là et donc on a décidé de partir au Canada. On a obtenu un permis vacances-travail à l'époque où c'était un petit peu le tirage au sort pour l'obtenir et donc on a réussi à l'obtenir et on est parti un an et ça a complètement chamboulé notre vie. et ça a complètement remis en question nos projets. Et donc, en fait, une fois là-bas, on a pris conscience, je pense, tous les deux, des patrimoines de nos parents, des entreprises, de ce que ça signifiait pour nous, de l'importance que, comme je l'ai expliqué au début, la maison, etc., mais aussi l'exploitation et de cette envie aussi de vivre la vie dehors. Et donc, on s'est dit, en fait, est-ce qu'on ne deviendrait pas agriculteurs ?

  • Speaker #1

    Donc, c'est vraiment au Canada que vous avez cette idée-là ? Oui. Qu'est-ce que vous avez fait au Canada, Panaména ? Vous avez travaillé où ?

  • Speaker #0

    On a travaillé dans l'événementiel. Donc, on est resté six mois à Montréal et puis six mois à Québec. Et à six mois à Montréal, on a travaillé six mois dans l'événementiel. Et à Québec, c'était pareil. On a fait des petits jobs un peu dans l'événementiel. Et puis, on a trouvé d'autres jobs comme ça. Mais voilà, on a toujours travaillé tout le long. Et le deal, c'était qu'on avait, très tôt dans le voyage, on a acheté une voiture pour vadrouiller un peu partout.

  • Speaker #1

    Mais vous n'aviez pas envie de voir des pratiques agricoles, vous n'étiez pas là pour autant ?

  • Speaker #0

    Si, ce qui est rigolo, c'est qu'en fait, c'est là où on a vu aussi notre intérêt. Je ne sais pas si c'est le destin, mais en fait, quand on a déménagé à Québec, dans une maison, dans un sous-sol, ça se fait beaucoup au Québec, on vit sous les maisons, en demi-sous-sol. Au-dessus de ce demi-sous-sol, notre propriétaire, Suzanne, qui est devenue depuis une amie très proche. Et dans cette famille-là, le papa de Suzanne a travaillé à ce qui s'appelle le Crédit Agricole au Québec, mais ce n'est pas la banque que l'on connaît, c'est vraiment un service d'accompagnement au conseil, à la gestion des exploitations, etc. Et donc... Très vite, les sujets agricoles sont arrivés. Et donc, il nous a proposé, effectivement, de nous intéresser au monde agricole québécois. Et ça a été très riche de connaître cet aspect-là aussi. Et ça nous a fait encore plus mûrir nos idées, parce qu'on s'est dit, ah oui, en fait, si même là-bas, on trouve intérêt à parler d'agriculture, c'est le moment.

  • Speaker #1

    Donc ton conjoint, pour le coup, vient aussi d'une famille d'agriculteurs. Donc au moment où vous vous dites, OK, on veut rentrer et on veut s'installer, vous avez deux fermes sur les mains. Comment ça se passe à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    Eh bien déjà, ça se passe qu'il faut convaincre les parents. Enfin, convaincre. Oui et non, parce que ça reste un choix personnel. Donc on est quand même libre de faire ce qu'on veut. Mais ça reste leur entreprise. Ils vont la céder parce qu'ils vont partir à la retraite. Donc c'est quand même être sûre que notre projet leur parle. Et donc en fait, on fait venir mes parents d'abord 15 jours au Québec pour leur faire visiter évidemment le pays dans lequel on vit depuis tous ces mois. Et puis on leur aimait l'idée qu'en rentrant, il y aura peut-être une installation ou deux, une reprise. Et puis on fait venir les parents de mon conjoint, pareil, 15 jours. Et on leur aimait la même idée. Et puis au final, les mamans étaient très inquiètes parce que la reprise d'exploitation agricole, alors que finalement on était deux diplômés avec potentiellement de bons jobs et pouvant aller à de bons salaires. Là, on veut devenir agriculteur. Donc voilà, avec toutes les difficultés qu'ils ont vécues avant nous, je pense que ça résonnait un peu mal à eux. Et puis en fait, les papas étaient super fiers de voir leur outil perdurer dans le temps. Et donc, l'idée de départ, c'était quand même de s'installer chacun de son côté, de ne pas faire forcément un gag, mais de s'installer chacun de son côté. Et puis en fait, c'est lors du parcours à l'installation qu'on a changé notre projet. Et les deux fermes sont distantes de 18 kilomètres. Il y avait aussi cette notion d'organisation, d'aspect collectif. De dire qu'on avait aussi des loisirs, des moments qu'on voulait pour nous, et que si on avait chacun nos exploitations de chaque côté, l'organisation allait être vraiment compliquée, pour le côté personnel.

  • Speaker #1

    Donc comment vous avez scindé ? C'est quoi l'organisation ? Qu'est-ce qu'il y a là-bas ? Qu'est-ce qu'il y a ici ? Comment vous naviguez entre les deux ?

  • Speaker #0

    Alors aujourd'hui, ici, on a le troupeau principal, notre production principale, donc les mères, les limousines, les vaches. Et là-bas, on se retrouve plutôt avec les réformes, donc les mamies et les petites génisses qui restent là-bas juste avant le vêlage. Donc, dès qu'elles sont prêtes à veiller, en général, on essaie de les faire venir ici pour s'occuper du vêlage, etc. Mais c'est vrai que le troupeau qui demande le plus d'attention est ici avec nous.

  • Speaker #1

    Tu as raconté... Récemment, quand tu as eu l'occasion de t'exprimer sur ton parcours, que cette installation-là, elle a été chaotique. C'est un mot qui est ressorti, qui est fort. Pourquoi ?

  • Speaker #0

    Parce que, en fait, ce n'était pas seulement sur le contexte extérieur, c'était aussi sur un contexte plus personnel. C'est-à-dire qu'en fait, je crois qu'on a réalisé, je vais dire on, parce que je pense que lui aussi n'avait pas que moi. On a réalisé que c'était vraiment le parcours du combattant, mais pas seulement administratif, c'était aussi un parcours dans la tête. Le parcours à l'installation, il est tellement semé d'embûches. Si tu n'es pas pleinement motivé à devenir agriculteur ou agricultrice, je pense que tu n'arrives pas au bout. Donc en fait, c'est cette force mentale de se dire, il ne faut rien lâcher. Il ne faut pas se laisser détourner par soi. Le voisin qui dit qu'on ne sera pas capable de tenir l'exploitation ou par les parents qui disent « mais vous êtes sûr que vous ne voulez pas faire un truc à côté parce qu'économiquement, peut-être ça ne va pas le faire » On va dire que toutes les peurs que les gens nous mettent sur nous, il faut savoir les surmonter pour se dire « non mais je suis sûre de moi, je veux y aller » . Et en fait, c'est ça. C'est que le côté chaotique, ça a été de se battre pour le foncier et en même temps de se battre pour convaincre les gens de ce que nous, on était persuadés de vouloir faire. Et ça, déjà, en plus de l'énergie de s'installer, de créer une entreprise, de signer sur des prêts qui engagent quand même pas mal de sommes, sur des durées aussi de fermage, etc. On se rend compte que là, notre vie aussi, elle bascule. Elle bascule en fait parce que ça reste un engagement fort de cette haleine agriculture. En plus, on va sur du vivant, 7 jours sur 7. Donc, il y a vraiment une idée que la vie va changer. que vraiment, ça va switcher.

  • Speaker #1

    Mais on peut avoir l'impression, quand tu prends la suite de ton père, de ta mère, que tu restes dans la famille, que ces embûches-là, elles sont moindres. On a presque l'impression que c'est une continuité. Alors, toi, tu as dû créer une nouvelle entreprise ? Tu es repartie, pas de zéro, mais presque ?

  • Speaker #0

    En fait, c'est-à-dire que si on prend la base qu'on a annoncée tout à l'heure sur l'exploitation de mon père, donc je disais 35 hectares, une trentaine de vaches, Le projet aujourd'hui, il est de 135 hectares pour 90 mères. Donc 90 mères, ce n'est pas 90 vaches. C'est les veaux, c'est les réformes, c'est les génisses en plus. Au total, je ne sais pas, moi, d'animaux, je ne te parle pas en UGB, mais d'animaux sur l'exploitation, oui, on est presque à 200. Donc en fait, il y a quand même... C'est un autre projet pour moi. Oui, j'ai repris l'exploitation de mon père. mais on l'a fait évoluer considérablement. Donc on est quand même sur d'autres investissements, sur d'autres perspectives économiques. Et du coup, oui, c'est la reprise d'exploitation, mais je ne peux jamais, même à la base, au départ, à l'installation, je ne peux jamais me référer aux chiffres de mon père, à ce que faisait mon père, etc. Sauf dans les pratiques culturales, parce que finalement, c'est la seule chose qu'on a gardée. C'est-à-dire que les pratiques culturales, on a fait labelliser la ferme en bio, parce que là où mon père faisait les pratiques depuis 89, il n'a jamais pris le label parce que contraignant administrativement. Donc en fait, on se retrouve quand même dans un schéma où il y a quelque chose qui ressort de l'héritage, mais on est sur un projet complètement différent.

  • Speaker #1

    Tu as aussi dit que ton entourage... proches, a priori, te disaient peut-être laisse ton compagnon s'installer tout seul, toi va voir ailleurs. Pourquoi on t'a renvoyé ça, d'après toi ?

  • Speaker #0

    Alors déjà parce qu'on est sur des territoires ruraux avec des croyances limitantes où on pense que les femmes sont un peu moins capables d'être avec les animaux je pense, de gérer tout ce qui est bovins, etc. Je pense que l'entourage s'est dit, bon ben voilà, vous allez dans une situation économique qui sera difficile, parce que pour eux ça l'était. Laisse ton conjoint s'installer, va faire institutrice, va travailler dans l'entreprise informatique qu'il y a à côté, et tu l'aideras le week-end, et c'est ok. Ouais, c'était vraiment ça le discours. Il faut savoir que quand même, c'est que même moi, pendant le parcours, je me suis dit, Ok, je vais regarder pour passer le concours, pour devenir prof des écoles. Mais en fait, non. Bon, je vais regarder l'entreprise d'à côté, qu'est-ce qu'elle demande comme prérequis pour travailler chez elle. Mais en fait, non. Je pense que c'est quand même mon copain, mon conjoint qui a dit que non mais stop, arrête d'écouter tout le monde là, ton projet c'était le mien aussi. On partait pour être agriculteurs, agricultrices, on continue vers ça, quoi.

  • Speaker #1

    Tu faisais référence à Marie-Thérèse Lacombe, donc elle qui raconte vraiment les conditions des agricultrices dans les années 50, 60, 70. Et en fait, ce qu'on lit un peu dans ton parcours, c'est que oui, on a évolué, oui, il y a un statut aujourd'hui reconnu pour les femmes agricultrices. Mais ces croyances limitantes-là font que l'évolution n'est quand même pas flagrante et ce n'est pas facile aujourd'hui encore de s'installer, d'être reconnu, d'être respecté dans son rôle. Et pourtant, un tiers des installations aujourd'hui en Aveyron sont faites par des femmes. Donc, on en est où d'après toi ? Comment tu le regardes ce constat-là ?

  • Speaker #0

    C'est compliqué parce que personne n'a la même vision. Il y a des femmes qui ne ressentent pas du tout. le fait d'être une femme en agriculture, et puis il y en a d'autres qui se sentent vraiment persécutées. À côté de ça, il y a quand même des efforts qui sont faits. Néanmoins, on est quand même sur des comportements, mais surtout sur le terrain, qui reste, comme je le disais, avec des croyances limitantes, qu'une femme n'est pas capable, et puis le tracteur est beaucoup trop gros, mais ça ne vient pas que des hommes, ça vient aussi des femmes elles-mêmes. Aujourd'hui, une femme qui s'installe avec son mari, et même à 40 ans, c'est « Oh non, moi le tracteur, je ne monte pas, c'est trop gros » . Et ça, pour moi, ce n'est pas entendable, parce qu'une femme qui a fait le choix d'être agricultrice doit pouvoir maîtriser l'ensemble des tâches de son exploitation. Et ça implique aussi le tracteur, conduire le tracteur. Aujourd'hui, il n'y a pas plus simple pour conduire un tracteur, c'est bourré de boutons. direction archi-assistée. Je veux dire, quand j'ai commencé à conduire un tracteur à 7 ans, que je pouvais toucher les pédales, c'était le sommet de mon grand-père, c'était super dur de direction, etc. Là, je pense qu'on est quand même sur des facilités. Et voilà. Mais je pense que la difficulté... Dans la reconnaissance, c'est peut-être aussi l'image que l'on renvoie, c'est-à-dire des fois d'être un petit peu plus effacée, de ne pas vouloir se mêler à certaines décisions parce qu'on pense qu'on n'a pas la compétence technique pour en parler. Tout le monde a la capacité d'eux. Je veux dire, ce n'est pas un homme qui arrive mieux à réfléchir sur un tracteur qu'une femme. Mais la question n'est pas réglée, c'est certain. Il y a toujours un sujet pour moi.

  • Speaker #1

    Quelles ont été, toi, les stratégies que tu as mises en place pour te faire ta place, pour forcer quelques portes et pour ne pas avoir à t'excuser d'être une femme ici ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, j'ai la chance d'être la fille de mon père, parce qu'il a eu deux filles et qu'il nous a mis sur les tracteurs très tôt, parce qu'il avait besoin aussi que, des fois, pour distribuer le maïs aux vaches ou quoi, on puisse tenir le volant du tracteur pendant que lui faisait tomber les épis au sol. Pareil, il avait besoin de nos petites mains pour aller des fois dévisser des trucs dans les moteurs, les machins comme ça. Donc, il nous a toujours... Voilà, il n'a jamais considéré que comme on était des filles, bon, vous allez rester dans la maison avec maman et faire la cuisine. Et parce que ma mère aussi n'était pas comme ça. Ma mère a toujours été quelqu'un qui... qui s'est beaucoup investie dans sa carrière, qui a beaucoup évolué. Et pour elle, c'est important que pour qu'une femme s'accomplisse dans sa vie, elle sache faire tout ce qu'elle veut faire quand elle veut faire un métier. Donc en fait, ma place, je l'ai trouvée aussi par les compétences que j'ai eues, que j'ai réussi à avoir de mon père quand j'étais plus jeune. Et en fait, quand je suis arrivée dans ce métier, je ne me suis pas du tout dit oh là là je suis pas je pars de zéro, ça va être dur, tout ça, tout ça. Non, non, je savais déjà reculer avec une remorque, je savais déjà faire plein de choses, et donc j'étais déjà assurée. Et pour m'assurer plus avec, si tu veux, le territoire, c'était de se dire, j'ai repris le poste de trésorier de la CUMA de mon père, et puis j'ai dit, je vais intégrer le conseil d'administration de la CUMA locale. Comme ça, en fait, je m'intègre. Bonjour, je m'appelle Marine, j'ai 34 ans, je viens de m'installer. Enfin non, en fait, j'avais 28, mais bon, bref. Je viens de m'installer, ravie de vous rencontrer. On se connaît depuis que je suis petite, mais en fait, on ne se connaît pas vraiment. Et on n'a qu'à apprendre à se connaître et travailler ensemble.

  • Speaker #1

    Et tu as eu quoi comme retour à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    En fait, très bon, parce que pendant l'installation, personne ne nous connaissait vraiment. Donc c'était beaucoup de handi, beaucoup de « ils n'en seront pas capables, ils viennent de la ville, ils ont fait d'autres métiers, ils ne connaissent rien à l'agriculture » . Mais au final, après, quand on s'investit dans ce genre de structure associative, locale, vraiment, on ne peut pas être plus local qu'une Cuma. Eh bien, là, ça ouvre des perspectives. Les gens nous voient autrement, apprennent à nous connaître. Et puis, de toute façon, on est là maintenant. Donc, il faut nous prendre.

  • Speaker #1

    Donc les CUMA, je rappelle rapidement ce sont ces groupements d'achats et de mise en commun de matériel agricole qui ont été créés après la seconde guerre mondiale pour permettre aux agriculteurs d'acheter en commun justement un tracteur quand c'était dur d'avoir un tracteur sur chaque ferme, donc on mettait en commun notamment tous ces matériels-là Tu es la première femme présidente de la Fédération Nationale des CUMA Oui. Ça c'est quand même assez incroyable. Alors avant d'arriver à cette élection, à ce mandat que tu as commencé en juin 2025, pourquoi tu as souhaité passer de la Cuma communale à la Cuma ville francheoise départementale, puisque tu étais investie...

  • Speaker #0

    C'est ça, la Fédération départementale des Cuma, oui, en Aveyron.

  • Speaker #1

    Et pourquoi passer au national ? Qu'est-ce qu'il dit cet engagement-là ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, oui, comme je disais, ça part de la base, ça part de reprendre le poste de trésorerie de mon père. hein ? De comprendre le fonctionnement de ces petites coopératives où on mutualise du matériel mais aussi de la main d'oeuvre et en fait comprendre que c'est aussi là que se passent les discussions sur les besoins des entreprises de chacun. C'est là où se passent un petit peu les synergies entre agriculteurs, l'entraide, la solidarité, le respect et la créativité finalement de ces groupes. Et donc, très rapidement, après avoir pris ce poste de trésorier à la Cuma du Franchois, qui est une intercuma, nous ce qu'on appelle une intercuma, c'est-à-dire une cuma qui rayonne sur un espace un peu plus grand qu'une cuma. parce qu'elle a du matériel un peu plus performant, très rapidement, j'ai des collègues de cette Cuma qui sont venus me voir et qui m'ont dit qu'en fait, Marine, il y a le réseau Cuma qui accompagne les Cuma. Parce que moi, j'ai toujours vu l'animatrice venir, mais on ne s'intéresse pas vraiment au réseau. On sait qu'elle vient, qu'elle nous aide. Je réalise que l'accompagnement des Cuma, l'accompagnement de ses collectifs, l'accompagnement des agriculteurs, c'est quand même quelque chose de... C'est incroyable. Et en fait, rapidement, j'ai pris des responsabilités et j'ai été repérée par le National pour une mission. C'était d'être élue au Conseil de la coopération agricole. Donc, en fait, c'est le Conseil qui va délivrer les agréments aux coopératives agricoles en France. Et en fait, je m'épanouis tellement dans cette mission. En fait, je me retrouve à ce que le Haut Conseil me propose une formation à Sciences Po Paris et en collaboration avec l'IFCAM du Crédit Agricole. Et donc, une formation qui est en fait un certificat sur six mois qui s'appelle « Gouvernance d'une entreprise coopérative » où finalement, je parfait un petit peu cette formation. c'est-à-dire que Via cette expérience au conseil, où j'étais déjà depuis deux ans, j'avais déjà pas mal de bagages juridiques. Mais alors là, je suis arrivée à Sciences Po et l'IFCAM avec le bagage aussi fiscal et puis la gouvernance aussi. Comment on fait pour gouverner dans une coopérative et comment on fait pour conduire un conseil d'administration. Et comment on fait... Voilà. Et puis, donc là, je sens que je prends encore plus de bouteilles. Et voilà, et là, j'avais vraiment cette envie de dire, je ne veux plus être seulement spectatrice ou rapportrice de ce que la Fédération Nationale doit faire, je veux aussi m'impliquer pour que moi aussi, je participe aux décisions qui peuvent faire avancer le droit des Kumas, et ce qu'elles ont le droit de faire sur le terrain, et comment elles peuvent mieux se développer. Et donc, l'idée au départ, c'était... Ce n'était pas ce poste de présidente. Je ne suis jamais arrivée là en me disant « Je vais être présidente de la Fédération nationale des Kumas » . Ça n'a jamais été une ambition personnelle. Là, je me suis dit « J'ai pris la bouteille, je suis formée. Le réseau aussi a investi en moi. Le conseil et le réseau Kuma ont investi en moi. Donc, je vais rejoindre le bureau. » C'est ce qui était souhaité. Au fur et à mesure des mois, des semaines, etc., eh bien, en fait... Je comprenais que je pouvais aussi amener quelque chose en étant présidente. Ça pouvait paraître tôt pour certains parce que je n'ai que 36 ans. Alors je suis trop vieille pour le foot mais trop jeune pour l'agriculture. Mais voilà, en fait c'était le bon timing parce que les idées je les avais là, je les maîtrisais maintenant. Et qu'à ce stade-là où est le réseau Cuma, la Fédération Nationale des Cumas, j'avais quelque chose à apporter. Donc, en fait, au final, j'ai levé la main et j'ai dit, bon, en fait, je me présenterais bien présidente. Et en parallèle de ce lever de doigts, qui était un peu timide au début, c'était plutôt en mode, non, mais si personne ne veut y aller, j'y vais. Bon, en fait, il y avait du monde qui voulait y aller aussi, mais j'étais à bon, mais on peut s'entendre et tout ça. Mais bon, voilà, j'ai passé, je ne sais pas moi. 30 orales du bac au téléphone, j'exagère, mais ce que je veux dire c'était que c'était beaucoup de téléphones, de convaincre des gens, parler de ma vision, de ce que j'imaginais pour le réseau. Et c'était en fait de se dire j'ai vraiment une idée et on peut y aller tous ensemble et venez avec moi et ça va être chouette et tout. Et donc voilà, on en est là aujourd'hui. Je me suis toujours dit que si ça passait pas, ça passait pas et puis je ferais autre chose dans le réseau, mais dans le réseau.

  • Speaker #1

    Donc on est ce jour-là de juin, qu'est-ce qui te traverse l'esprit à ce moment-là, sachant que ça fait moins de huit ans que tu es installée ? Donc en fait, tous ces changements, toutes ces évolutions, elles ont eu lieu quand même dans un laps de temps assez court, et tu te retrouves première femme présidente de la Fédération nationale des Kumas. Il y a quoi dans ta tête ce jour-là ?

  • Speaker #0

    Déjà, ça fait huit ans d'installation, sept ans dans le réseau, d'investissement quand même assez important. Le jour de l'élection, beaucoup de pression, on s'imagine. J'avais un petit discours à faire juste à la fin de la journée, après mon élection. Je me suis blindée au max parce que je ne voulais pas que ça transparesse trop. Pour moi, ce n'est pas la concrétisation. Quand j'arrive sur scène et qu'on me dit Marine Boyer et puis nouvelle présidente de la FNCuma que... que les gens m'applaudissent et se lèvent, je me dis... J'essaie de me blender, de faire... Je ne suis pas là. Je ne vis pas ce moment. Je ne réalise pas, en fait. Et même la soirée se passe, les gens viennent te féliciter, tout ça, tout ça. Et là encore, je pense que je ne réalise pas la portée de ma décision. Donc, j'ai pris mon ordinateur, je me suis calée avec les équipes de la FN Cuma, je l'ai ouvert. Et en fait, à partir du moment où on s'est mis à travailler, je me suis dit, non mais c'est ma place. C'est go, on y va. Et il y a plein de choses à faire et c'est parti.

  • Speaker #1

    Et justement, tu y vas avec quelle envie ? Qu'est-ce que tu as envie de porter sur ce mandat ? Les priorités ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, comme pas mal de structures, on a quand même ce souci de la baisse du nombre d'agriculteurs. Ça fait dix ans qu'on dit que dans dix ans, il y a la moitié des agriculteurs qui partent à la retraite. Et nous, demain, c'est comment on accompagne, on continue à accompagner les cumas sans qu'on perde un peu ce maillage territorial. Après, c'est toute la question de... de décarbonisation de l'agriculture. Et aujourd'hui, on se doit, nous, face à ces enjeux-là, de répondre présent et de donner des solutions. Aujourd'hui, il y a un gros soutien fiscal de la mécanisation agricole individuelle sur l'investissement individuel. Et aujourd'hui, c'est de dire... En tant que Cuma, en tant que collectif, on se positionne pour amener une autre vision, amener quelque chose de neuf qui finalement existe depuis toujours, l'entraide, mais qui finalement peut être l'avenir aussi de l'agriculture. C'est-à-dire qu'à plusieurs, un agriculteur peut se sentir soutenu, peut se sentir plus confiant de faire des investissements et sans mettre en péril son exploitation. Nous, on a envie de répondre que les cumas peuvent être l'outil qui permet à l'agriculteur de rester aux manettes de sa ferme sans y être pour autant esclave. C'est-à-dire qu'avec la mutualisation de travaux, avec la mutualisation de salariés, il va pouvoir se dégager du temps, il va pouvoir vivre une vie plus moderne et qui ressemble un peu plus aux attentes aussi de cette nouvelle génération qui veut s'installer. Et tout ça, en fait, on le porte parce qu'on est persuadé que ça peut être aussi la clé là de perdurer ce monde agricole. Et une autre avancée fondamentale à laquelle on tient, et finalement on l'a vu avec le contexte actuel, c'est-à-dire qu'il y a vraiment un fossé entre la société et le monde agricole. Nous, notre proposition dans le réseau Cuma pour faire un lien entre la société Et l'agriculture, c'est qu'on a inventé un volontariat agricole, un volontariat agricole, ce qui en fait se traduit par un service civique. Et en fait, ça va permettre à quelqu'un qui est non-issue du monde agricole, qui est curieux de voir comment ça fonctionne, de venir faire un service civique dans une cuma, et de découvrir un peu ce panel d'activités qu'il peut y avoir. parce que C'est aussi l'avantage des coopératives d'utilisation de matériel agricole, c'est qu'elles regroupent plusieurs productions, plusieurs activités. Un salarié, un service civique ne fera pas la même tâche du jour au lendemain. Ça va être des fois du service complet, vraiment de la conduite de matériel, mais ça va être de la mise à disposition sur l'exploitation. Donc en fait, ça va être découvrir un peu le panel large de ce qu'est l'agriculture. C'est à nous de faire ce travail de promotion. de ce service civique, de le rendre accessible, de le rendre attrayant et qu'on ait plus de volontaires.

  • Speaker #1

    Donc on était un peu sur les défis et que peut la Cuma ? Ce qui est intéressant, particulièrement dans les Cuma et dans la Fédération, c'est que vous dépassez aussi un peu les intérêts politiques partisans qui peuvent diviser le monde agricole aussi à l'intérieur. Qu'est-ce qui fait, toi, que dans le monde agricole, tu te dis que la Cuma peut être ? Alors, J'allais dire une porte de sortie à la crise, non peut-être pas, mais en tout cas une lueur d'espoir, quelque chose qui réenchante le métier.

  • Speaker #0

    En fait, on est le reflet de ce qui se passe en local. Un voisin qui est syndiqué dans un syndicat, l'autre voisin qui est syndiqué dans l'autre syndicat, localement ils vont se parler. Et en fait, dans la CUMA, les groupes, dès lors que les agriculteurs viennent pour parler du matériel, tous les clivages... politique, syndical, etc., tout s'efface. Donc, en fait, le réseau jusqu'au bout, jusqu'au national... Il est régi par ça, c'est-à-dire que pourquoi il n'y a pas de prise de position politique ou syndicale ? Tout simplement parce qu'on est le reflet des adhérents. Et les adhérents aujourd'hui, c'est 50% des agriculteurs en France. Donc 50% des agriculteurs, ça représente un panel d'agriculteurs qui viennent de tous bords et qui ont besoin, eux, juste de mutualiser. C'est-à-dire que c'est vu comme un outil. Et nous, derrière, en fait... ça, ça reste un enjeu. C'est-à-dire qu'on souhaite pouvoir être entendu, être écouté par tout le monde. Alors après, des fois, ça ne marche pas. Des fois, on ne nous ouvre pas la porte. Mais l'intérêt, c'est quand même qu'on reflète ce qui se passe sur le terrain. Aujourd'hui, oui, le réseau humain peut être le lien entre ce monde agricole qui, des fois, aussi, se comprend pas. Nous, on peut jouer ce rôle de lien, en tout cas d'intérêt commun, on va dire. Et c'est en ça que je dirais que ça donne un brin d'espoir, c'est parce qu'on peut créer une synergie que peut-être un syndicat ne pourra pas créer parce que trop clivant, etc. Nous, en fait, on peut se positionner en disant, voilà, regardez les agriculteurs. Les agriculteurs voudraient ça, nous on peut le porter avec vous. Qu'est-ce que vous en dites et du coup d'y aller à plusieurs ?

  • Speaker #1

    Quel regard est-ce que tu portes toi aujourd'hui sur ces dernières dix années de l'informatique à Montréal jusqu'à aujourd'hui installée, chef d'exploitation, présidente des Cuma ?

  • Speaker #0

    Je dirais que c'est un parcours en fait. ces parcours et je dirais que chaque... Chaque étape a fait que je suis là aujourd'hui, pas seulement en tant que présidente mais en tant qu'agricultrice. Et donc je dirais que c'est vraiment un cheminement et ce n'est pas des opportunités. Je n'ai jamais été quelqu'un d'opportuniste, donc c'est vraiment juste des moments de vie qui font que je suis là aujourd'hui, des expériences, des formations, du coaching. et donc voilà c'est C'est une accumulation de choses qui font que je suis là aujourd'hui. Vraiment, aujourd'hui, je me sens pleinement épanouie, que ce soit dans mes fonctions, que ce soit dans mon métier et dans ma vie personnelle.

  • Speaker #1

    Quel regard portent tes parents, tes beaux-parents sur ce parcours-là, après les doutes qu'ils ont eus il y a dix ans ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, ils sont rassurés, déjà sur notre situation économique, quand on parle de l'entreprise. Donc voilà, là, ils sont pleinement... Rassurés, ils voyaient à quel point on est investi et à quel point on fait marcher notre entreprise. Donc là, il n'y a plus de doute. Évidemment qu'ils sont fiers de l'engagement que je dirais que nous prenons. Parce que finalement, oui, c'est moi qui suis présidente de la FN Cuma, mais mon conjoint participe aussi à ça. On est une équipe. Parce qu'en fait, sans le fait que, déjà sans son soutien infaillible, mais aussi sans le fait qu'il prenne à bras le corps notre entreprise. Donc on a quand même des salariés de Cuma qui peuvent venir l'aider. On a quand même des aides, de l'entraide de la part des voisins, de la famille, etc. Néanmoins, c'est quand même lui qui pilote, qui chapote. Dès que je suis là, je l'aide au mieux. Mais sans ça, en fait, voilà. je ne pourrais pas faire ce que je fais aujourd'hui donc extrêmement reconnaissante pour ça et donc nos parents je pense qu'ils sont très fiers de ce qu'on a accompli tous les deux.

  • Speaker #1

    Une question juste logistique, ton mandat il dure combien de temps ?

  • Speaker #0

    Ce sont des mandats de 3 ans.

  • Speaker #1

    3 ans et ça représente quoi comme rythme pour toi ? C'est beaucoup d'allées et venues à Paris ?

  • Speaker #0

    Oui quand même il faut compter à 2-3 jours par semaine sur Paris ou en tout cas en déplacement Donc un déplacement, ça veut dire sur des territoires, en région ou bien sur des salons. Mais on va dire que ça prend deux, trois jours de déplacement. Mais il y a quand même pas mal de travail d'écriture, de mail, etc. Et heureusement, maintenant, on a les oreillettes Bluetooth, donc c'est mieux. Mais oui, il y a toujours un moment. On va dire que quand même du lundi au vendredi, je suis dans mon poste. Je suis hors de la ferme vraiment deux à trois jours par semaine.

  • Speaker #1

    Et une dernière question, je te sors peut-être un peu de tous tes rôles, mais je la pose à tous les invités, c'est en quoi est-ce que tu crois ?

  • Speaker #0

    En quoi est-ce que je crois ? C'est super dur ! Je crois en l'être humain. Je crois en l'être humain et à ses capacités à pouvoir avancer et à trouver des idées. Je crois en la créativité en fait en chacun de nous. Je crois que tout le monde est capable de tout, je n'ai pas l'impression qu'on soit limité. Et d'ailleurs tout le parcours, tout mon parcours mais tout le parcours que les gens font, c'est la preuve qu'en fait il ne faut pas se fier aux croyances limitantes etc. dès lors qu'on veut entreprendre quelque chose et bien si on s'en donne les moyens alors on est capable de le faire donc je crois à l'être humain à sa capacité à être créatif

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Marine Merci à toi

  • Speaker #0

    Voilà, c'était tout

  • Speaker #1

    Si vous voulez continuer sur ce sujet je vous recommande l'écoute de l'épisode de Finta avec Marie-Thérèse Lacombe il est disponible dans la collection des pionnières de Finta Merci d'avoir écouté ce nouvel épisode de Finta jusqu'au bout. J'espère qu'il vous a plu, inspiré, questionné et fait voyager peut-être. Viens me dire sur Instagram ou sur fintapodcast.fr ce que tu en as pensé. Je suis toujours curieuse de vous lire pour faire grandir Finta. Si tu fais partie de ceux qui apprécient le podcast et qui veulent continuer à cheminer avec moi dans les contrées avéronaises, tu peux désormais soutenir financièrement le podcast en donnant quelques euros par mois ou en faisant un don ponctuel. Tu participes à renforcer l'indépendance éditoriale de Finta et tu valorises, par la même occasion, le temps que j'y consacre chaque semaine. Figure-toi que si chaque auditeur donne un euro par mois, Finta peut vivre sans publicité dès aujourd'hui. Le lien de la cagnotte est disponible en description de cet épisode. Pour que Finta vive, partage-le autour de toi, parle-en à tes amis, laisse-lui des étoiles et des commentaires sur toutes les applis d'écoute. C'est vraiment... le meilleur soutien que tu puisses nous apporter. À très bientôt.

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