#Pionnières #11 Catherine André, l’épopée mondiale d’une créatrice de mode cover
#Pionnières #11 Catherine André, l’épopée mondiale d’une créatrice de mode cover
Finta! L'Aveyron par ses voix

#Pionnières #11 Catherine André, l’épopée mondiale d’une créatrice de mode

#Pionnières #11 Catherine André, l’épopée mondiale d’une créatrice de mode

35min |01/04/2023
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#Pionnières #11 Catherine André, l’épopée mondiale d’une créatrice de mode cover
#Pionnières #11 Catherine André, l’épopée mondiale d’une créatrice de mode cover
Finta! L'Aveyron par ses voix

#Pionnières #11 Catherine André, l’épopée mondiale d’une créatrice de mode

#Pionnières #11 Catherine André, l’épopée mondiale d’une créatrice de mode

35min |01/04/2023
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Description

Depuis Millau où elle s’est installée, Catherine André s’est fait un nom parmi les grandes maisons du luxe français. On dit d’elle qu’elle est la magicienne de la maille. Elle cite Jane Campion, Marguerite Duras, George Sand comme ses muses. 


Son atelier, dans une ancienne mégisserie, à Millau, et sa dernière boutique, à Rodez, où nous nous sommes retrouvées pour l’enregistrement, soulignent son attachement à cet Aveyron où elle a choisi de vivre pour mieux rayonner à l’international. C’est en suivant son époux, aveyronnais et médecin, qu’elle est arrivée à Rodez d’abord, à Millau ensuite. Sa maison, à Aguessac, c’est son refuge, là où elle aime s’isoler pour créer et puiser son inspiration. Dans les paysages sud-aveyronnais qu’elle sillonne et qui lui rappellent l’Irlande. Mais c’est dans le Nord-Aveyron, sur les causses du Comtal et de l’Aubrac, qu’elle entend réellement le “chant de la terre” aveyronnaise.


Comme toutes les Pionnières de la collection de Finta, je lui ai demandé de commencer par cette phrase, à la manière d’Annick Cojean. Je ne serais pas arrivée là, si…


🎧 Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou redécouvrant les femmes “Pionnières” de la première saison, sur www.fintapodcast.fr ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un peu le temps.


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Finta! c’est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d’agir et des espoirs très concrets à l’échelle locale. Finta! part du département de l’Aveyron pour explorer les voix de la ruralité. Le podcast s’écoute gratuitement sur www.fintapodcast.fr ou sur toutes les plateformes habituelles (Deezer, Spotify, etc). Finta! est un podcast écrit, réalisé et produit par la journaliste indépendante Lola Cros.


Pionnières.

Elles ont défriché des chemins, ouvert des voies, porté une voix en Aveyron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. A partir de la ruralité, qui les a naturellement façonnées, le témoignage de ces « Pionnières » contribue à penser le rapport à l’accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l’enclavement, d’hier à aujourd’hui.  


Et si la journaliste Annick Cojean compare le parcours des femmes à des « courses d’obstacles », la ruralité en est-il un... de plus ? C’est la question, en creux, à laquelle répondent les « Pionnières » que j’ai invitées au micro de Finta!


Après Marie-Thérèse Lacombe, Daniele Puech, Nicole Fagegaltier, Danielle Dastugue, Emmanuelle Gazel, Sarah Singla et Josette Hart, qui se sont livrées dans la première saison des Pionnières, je vous propose de compléter la collection. Aujourd’hui, avec Catherine André.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Le métier de styliste était tout nouveau. Marie Beretta, Jean-Paul Gaultier, Sonia Riquel venaient juste d'arriver en tant que designer et avaient introduit, après Saint-Laurent, l'idée du concept du prêt-à-porter. Et puis moi, je suis arrivée par le biais de l'industrie, par les filatures. Et je pense que ce qui a fonctionné, c'est que je connaissais la technique, puisque je m'étais frottée. au métier, à la filature, puis ensuite au métier à tricoter. Hé, finit ! Finit !

  • Speaker #1

    Elles ont dépêché des chemins, ouvert des voies, porté une voie, en avéron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. À partir de la ruralité qui les a naturellement façonnées, Le témoignage de ces pionnières contribue à penser le rapport à l'accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l'enclavement d'hier jusqu'à aujourd'hui. Et si la journaliste Annick Cogent compare le parcours des femmes à des courtes d'obstacles, la ruralité en serait-il un de plus ? C'est la question, en creux, à laquelle répondent les pionnières que j'ai invitées au micro de Finta. Après Marie-Thérèse Lacombe, Daniel Puèche, Nicole Fagegaltier, Daniel Dastug, Emmanuel Gazel, Sarah Sengla et Josette Hart, qui se sont livrées dans la première saison des Pionnières, je vous propose de compléter la collection. Aujourd'hui, avec Catherine André. Depuis Millau, où elle s'est installée, Catherine André s'est faite un nom parmi les grandes maisons du luxe français. On dit d'elle qu'elle est la magicienne de la maille. Elle, cite Jeanne Campion, Marguerite Duras, Georges Sand, comme ses muses. Son atelier dans une ancienne mégisserie, à Millau, et sa dernière boutique, à Rodez, où nous nous sommes retrouvés pour cet enregistrement, soulignent son attachement à cet Aveyron où elle a choisi de vivre, pour mieux rayonner à l'international. C'est en suivant son époux, Aveyroné et Médecin, qu'elle est arrivée à Rodez d'abord, à Millau ensuite. Sa maison, à Aguesac, c'est son refuge. Là où elle aime s'isoler pour créer et puiser son inspiration, dans les paysages sud-avéronnés qu'elle sillonne et qui lui rappelle l'Irlande. Mais c'est dans le nord-Aveyron, sur les costes du Contal et de l'Aubrac, qu'elle entend réellement le chant de la terre avéronnaise. Comme toutes les pionnières de la collection de Finta, je lui ai demandé de commencer par cette phrase, à la manière d'Anik Kojan. Je ne serais pas arrivée là si...

  • Speaker #0

    Et bien, si je n'étais pas arrivée en Aveyron, dans le nord Aveyron, particulièrement à Rodez, si je n'avais pas voyagé en Écosse et en Irlande, si je n'avais pas rencontré mon mari, s'il y en a des tas, des tas d'autres, mais ce sont ceux qui me viennent à l'esprit là.

  • Speaker #1

    Donc si on revient à la mode qui est... au cœur de votre métier. Vous avez créé votre marque il y a presque 30 ans.

  • Speaker #0

    Maintenant, en 1995.

  • Speaker #1

    Anne Millot, elle vient d'où cette vocation ?

  • Speaker #0

    De créer une entreprise, ce n'était pas une envie, ce n'était pas quelque chose de prévu, ce n'était pas un projet construit, etc. C'est que depuis 1980, je me suis trouvée... parachutée dans le milieu de l'industrie du textile et donc de la mode. Et donc j'ai travaillé pendant pas loin de 20 ans, pendant 15 ans, en freelance auprès de designers, de quelques couturiers, en tant que... enfin je fondais des maillettes de mailles, et auprès des filatures en tant que conseil. maille et conseil, conseil couleur et fil. Je n'ai jamais été salariée, j'ai toujours été indépendante. Et puis, je pense que c'est la naissance de mes deux garçons qui m'ont fait réaliser que ce que je faisais, en fait, ce travail de conseil que j'adorais, je voyageais en Italie, j'étais tout le temps à Paris, je rencontrais une faune complètement atypique. très particulier, l'univers du textile. Et puis, j'ai eu mes deux garçons, et là, je me suis dit quand même que je trouvais que je faisais des choses bien, je m'occupais des choses bien futiles. Et c'est mon mari qui... Non, oui, en fait, c'est... Je m'étais liée d'amitié avec Claude Barthélémy, qui était véronais d'origine, que j'avais rencontré parce qu'il faisait partie de mes clients, mais il ne m'avait jamais rien acheté. Et puis un week-end, il nous invite chez lui, près de Villefranche-Panna. Et puis au bout d'une longue soirée de discussion, au petit matin, il me dit « Catherine, arrête de faire ce que tu fais, monte, arrête de vendre tes dessins. » Fais ta collection, tu as tout ce qu'il faut pour faire ta collection. Avec Jean-Luc, mon mari, on me demande, mais ça c'est peut-être un peu compliqué, comment il faut faire ? On ne sait pas du tout. C'est simple, tu auras bien un filateur, un fabricant qui va t'aider pour ta première collection. Tu ne paieras pas les frais de développement. Tu prends un tout petit stand au salon du prêt-à-porter. Et si tu vends 500 pièces, ça veut dire que tu as une place sur le marché. Donc c'est ce qu'on a fait. J'ai fait une collection et on a vendu plus de 500 pièces. On a vendu 1000 pièces. Donc il y a eu un gros succès. Sauf qu'on ne savait pas du tout ce que c'était qu'une latte de crédit, puisqu'on avait quand même une grosse commande de japonais. que mon mari avait pris dans une cabine téléphonique sur un bord d'autoroute. Moi, je ne me voyais pas du tout à la tête d'une entreprise, donc je me reposais complètement sur les épaules de mon mari qui avait son cabinet de pédopsychiatre. Donc il venait jeter un coup d'œil. Il vérifiait et regardait la compta quand même. Et en Bonavérona, il est quand même perclu de mon sens. On a tout de suite vendu à l'export. Comme on a eu cette grosse commande de japonais, on a cherché comment faire un salon au Japon. Et on a eu notre première clientèle, surtout japonaise en fait, finalement.

  • Speaker #1

    Là, c'est toujours l'essentiel de votre activité,

  • Speaker #0

    l'export ? Oui. Plus avec nos boutiques maintenant, puisque avec nos quatre boutiques, c'est à peu près l'équivalent de ce qu'on fait, l'export.

  • Speaker #1

    La mode, vous ne vous y destinez pas ? Initialement, en sortie d'études en tout cas.

  • Speaker #0

    Je n'ai pas fait d'études de mode du tout. Comment vous avez alors ri ? J'ai appris sur le tas. J'ai fait une année de beaux-arts, parce qu'à ce moment-là, ça me trottait un peu dans la tête de faire quelque chose. de ma vie parce que j'ai jamais eu aucune ambition je suis partie en fac de lettres parce que j'avais envie de parler les langues étrangères peut-être pour voyager mais voilà comme ça juste pour le plaisir de la langue mais c'est tout ça n'est pas plus loin et quand je suis arrivée à Rodès je me suis dit là ma petite il faut que tu fasses quelque chose parce qu'en fait avant Rodès euh Mon mari et moi, on habitait dans le Gard. Et donc, il y avait toute une population d'artistes, de peintres, écrivains, anglo-saxons, américains, anglais, etc. qui me commentaient des pulls. Parce qu'à l'époque, je tricotais à la main. J'avais tricoté pour des amis. Et puis ensuite, je me suis dit, je vais peut-être essayer de gagner quelques sous en tricotant des pulls. Et ça marchait très, très bien. Donc j'ai fait pas mal de salons artisanaux avec mes pulls tricotés main. Et donc c'est arrivé à Vaudèze où là, j'ai plus du tout ce miroir de gens qui me renvoyaient l'image d'une artiste un petit peu, mais bon, d'une créatrice. Et puis bon, j'étais beaucoup plus dans l'ombre de mon mari qui était médecin à l'époque. sur Odesse. C'est à ce moment-là que je suis partie sur Paris avec mon book de photos de tous les pulls que j'avais faits depuis quelques années. J'ai pris des rendez-vous dans tous les bureaux de style, de style imaginable sur Paris. J'ai fait chou blanc, bien sûr, sauf à mon dernier rendez-vous, j'avais un rendez-vous avec Pro Hostile à 6h du soir avant le Vaudi, avec une styliste qui était partie en week-end. Bien sûr, elle avait oublié le rendez-vous. Une parfaite inconnue. Mais j'ai trouvé quelqu'un, pour le faire court, qui m'a orientée vers Rosana Orlandi, qui, à l'époque, dans les années 80, a dirigé le bureau de style de l'affilature de son père, près de Milan. Et le bureau de style Orlandi, c'était le bureau de style qui présentait les collections de fils, mais qui était vraiment le pôle d'attraction de toutes les marques italiennes de haute couture et de prêt-à-porter. Donc je suis allée voir cette dame, qui était à l'époque la paise de la mode et de la maille, et c'est là que j'ai tout appris, qu'on a appris en stage. Un stage qui s'est prolongé sur huit ans. qu'ensuite, ça n'était plus un stage. Je venais l'aider sur les collections, sur quelques jours, plusieurs jours par mois. On m'a prise pour la collaboratrice d'Ozana, parce que je n'étais pas du tout. Et j'ai eu des tas de contacts sur Paris, de maisons de prêt-à-porter, etc. Et voilà, c'est là que tout a commencé.

  • Speaker #1

    Ce qui est intéressant dans votre parcours, je trouve, c'est que la mode paraît être un univers difficile à pénétrer. Et que vous avez fait votre bonhomme de chemin en saisissant les opportunités,

  • Speaker #0

    les rencontres. Oui, alors j'ai fait le chemin. Bon, la mode, maintenant, c'est les podiums, c'est être une star. Mais à l'époque, c'était ça aussi un petit peu. Le métier de styliste était tout nouveau. Marie Beretta, Jean-Paul Gaultier, Sonia Riquel venaient juste d'arriver en tant que designer et avaient introduit après Saint-Laurent l'idée, le concept du prêt-à-porter. Et puis moi, je suis arrivée par le biais de l'industrie quand même, par l'infilature. Et je pense que ce qui a fonctionné, c'est que j'avais... En plus d'un certain talent à manipuler la couleur et une expertise en maille, je connaissais la technique puisque je m'étais frottée au métier, à l'affilature, puis ensuite au métier à tricoter.

  • Speaker #1

    À quel moment est-ce que vous choisissez la maille ?

  • Speaker #0

    Tout de suite, puisque j'ai très vite tricoté. Ma grand-mère m'avait appris à tricoter quand j'étais enfant, mais ensuite je n'ai jamais vraiment tricoté parce que je trouvais ça très ennuyeux. Je n'arrivais jamais à terminer un pull aux Grandes Dames de ma grand-mère. Et puis, ça a démarré quand j'ai fait mon premier voyage en Irlande avec une amie. Pourquoi on a choisi l'Irlande, je ne me souviens pas. Et là, vraiment, je suis tombée amoureuse de ce pays à taille humaine. Et j'ai découvert toute la tradition textile, en fait. Les tweeds, les mailles à rang. J'avais l'intention d'écrire mon journal de voyage parce que c'était mon premier voyage seul en fait, avec une amie. Je me suis mise en tête de tricoter mon journal de voyage. Mon journal de voyage, c'était un panneau de maille qui est devenu une énorme écharpe que je tricotais avec des chutes de fil. des usines de tweed que je mettais bout à bout, que je nouais. Je les nouais avec une certaine architecture de couleurs. Ce qui me fascinait, c'est un peu comme l'écriture automatique en fait, ce qui me fascinait, c'est qu'ensuite, quand ils étaient tricotés, du fait du nœud du tricot, il y avait des harmonies de couleurs complètement différentes. Il y avait d'abord la suite de couleurs. que je faisais avec des noeuds, avec des sections de fil plus ou moins grandes. Ensuite, la mise en plot, qui était encore quelque chose de différent, parce qu'on voyait toutes les couleurs comme ça s'amonceler. Et ensuite, le tricot, qui devenait quelque chose de complètement différent. Je faisais du jersey, je ne faisais pas de maille fantaisie ni quoi que ce soit. Et rien que ça, je trouvais ça fascinant. Et je tricotais un petit bout tous les soirs. tradition myrlandaise qui vous a plongé dedans. Le fait aussi de tricoter une histoire. Là, ce n'était pas une histoire, c'était des fils. Enfin, si, c'était mon histoire à moi. Et a germé l'idée de, plutôt que de faire des pull-unis ou des pulls avec des rayures qui étaient toujours un travail un peu mécanique et monotone, c'était comment C'était peau d'âne en fait, comment faire un pull qui raconte une histoire. Et à l'époque, une de mes meilleures amies a eu un accident. Elle a dû rester allongée avec un corset pendant des mois. Et pour la consoler, avec trois autres amies, on lui a tricoté un pull à 16 mains. Ah non, à 8 mains. qu'on a ensuite assemblée. Donc, il y avait une personne qui faisait le dos, une autre, voilà. Ça a donné une espèce de pull paysage. En plus, c'était vraiment, à l'époque, c'était la fin des années 70, c'était la pleine tendance des pulls paysages. J'avais pu voir en Irlande toute l'histoire, en fait, que chaque point a une signification. C'est comme un mot, c'est comme les pulls que les femmes de pêcheurs tricotent à leur pêcheur de mari. Il a une signification et ça permet aussi de les reconnaître en cas de drame et en cas de naufrage. C'est-à-dire ? C'est-à-dire qu'on reconnaissait, quand les corps n'étaient plus identifiables, on reconnaissait le pêcheur grâce à son pull. Et quand vous dites que chaque point a une stématique ? C'est-à-dire que chaque point a un symbole, c'est comme sur les tapis traditionnels marocains, iraniens, etc. Tout travail textile, chaque motif a une signification, liée souvent à la nature. L'épic blé, le sapin, le chardon, voilà.

  • Speaker #1

    Et donc là, on parle de vous comme la magicienne de la maille.

  • Speaker #0

    Oui, je ne sais pas trop ce que ça veut dire. Oui, je vis des instants de magie, mais ce n'est presque pas moi qui les crée. C'est vrai que c'est vrai. que chaque pièce devient unique dès l'instant où elle est portée par telle ou telle personne. Parce que le vêtement, ça n'est pas rien. C'est bourré de sens. C'est notre deuxième enveloppe. Ça parle. J'adore rencontrer les clientes dans mes boutiques, leur parler, voir comment elles se sont appropriées le vêtement, comment elles le customisent, comment elles le portent avec d'autres. Avec d'autres marques, comment elles le coordonnent avec un pull qui a 10 ans. Parce que c'est ça aussi ce que j'ai découvert au Japon avec le contact de mes clientes japonaises. Elles gardent mes pulls comme leur kimono dans leurs armoires. Et ensuite, quand elles ne peuvent plus les porter, quand elles ont dénu le temps de la transmission et du don, elles en font cadeau à leur fille ou à leur petite-fille.

  • Speaker #1

    Ça, c'est une volonté aussi de votre part, d'avoir une ligne intemporelle, de transgresser les saisons ?

  • Speaker #0

    Oui, même si je suis quand même pas mal imprégnée des tendances, puisque je fais partie du comité français de la couleur. Donc, qu'est-ce que vous y faites ? On est là pour une gamme de couleurs qui sera universelle, qui va... qui va servir à... qui va voyager dans les salons, qui va être... Et dont vont servir les bureaux de style, bien sûr. Qui regroupent, pas des designers comme moi, mais ça peut être des gens de la communication, des architectes, des gens vraiment de tout or. Donc vous, vous avez ce lien avec la couleur de la saison. Oui, oui.

  • Speaker #1

    Mais après, vous vous donnez complètement la liberté de sortir des autres...

  • Speaker #0

    Oui, mais en fait... Le vêtement étant un objet de communication, avant chaque collection, il y a une histoire. Il faut construire une histoire, une espèce de scénario pour qu'un type de femme se dessine. Et donc, s'il y a histoire, il y a gamme de couleurs aussi, il y a un vocabulaire graphique aussi particulier, bien attaché à cette histoire. Tout doit s'abriquer. tout doit avoir un sens même si on laisse aussi au fil de l'élaboration de la collection le hasard mettre un peu de désherbe dans tout ça Est-ce que vos scénarios ce sont ceux des voyages ? Tout ça n'est pas possible Non, c'est quand même un petit peu mais là cet hiver c'est les aurores boréales les pays scandinaves et nordiques d'où les Merci. D'où les vitrines qui sont axées sur les explorateurs polaires. L'été précédent, c'était tout simplement Jacques-Henri Lartigue, les photos de Jacques-Henri Lartigue et la personnalité. La joie de vivre, le bonheur de vivre qui se dégage des photos de cet homme. Vivre d'avant, c'était... Ah oui, alors ça c'est né un petit peu d'une histoire avec une cliente belge. Et elle a acheté un château en Écosse sur Nile. Et donc ça fait quand même quelques années de ça. Ça doit faire 4 ans, 4 ou 5 ans. Et quand je l'ai rencontrée, la première fois que je l'ai rencontrée, elle m'a dit « Ah, mais il faut absolument que vous veniez faire des photos dans mon château, etc. » Et donc, moi qui suis amoureuse des îles anglo-saxonnes, de l'Écosse, de l'Iran, que cette île qui était complètement, presque la plus lointaine des îles Zébrides, j'ai commencé à complètement renverger, à rêver de ça. J'ai fait une collection sur ce rêve, sur la restauration de ce château, avec la découverte des blasons, etc. Et puis encore avant, c'était le Covid, donc là ça a été une collection très particulière, qui s'est faite juste avec ma première assistante. On était tous seuls à travailler dans mon bureau, et là on s'est taxés sur David Hockney. Ah oui, parce que j'avais vu il n'y a pas longtemps, c'est un film plus vieux que ça, mais un film d'un Italien, The Biggest Splash. C'est le titre d'un tableau d'Ockney, avec une comédienne que j'adore, qui est Tilda Swinton. C'était une histoire de piscine, en fait. Au début, j'ai voulu faire une collection un petit peu sur ce décalage entre ce que portait Tilda Swinton dans cette île italienne au large de la Sardaigne, je crois, ou de la Sicile, je ne sais plus. Et puis ensuite, avec le titre du film, je suis venue à David Hockney. Et comme par hasard, quand j'habite à Guesac, et tous les jours quand je le mets au bureau... Il y a une petite route qui, de l'autre côté du Tarn, il y a une petite route qui serpente dans les cerisiers. Et c'est vraiment pas dans les mêmes couleurs, parce que les couleurs du tableau de David Hume, elles sont beaucoup plus fortes. Mais ça me fait penser à un tableau, je ne sais plus qui s'intitule, une petite route qui serpente avec deux, trois palmiers, des petites maisons. Voilà, c'est tout un tas d'associations, d'idées. Puis comme je suis beaucoup en voiture, je conduis beaucoup, je me déplace beaucoup. Donc c'est à ce moment-là que les idées se décantent et qu'il y a des choses qui remontent.

  • Speaker #1

    Et à partir de là, du moment où vous avez l'idée, où vous croisez les idées, comment est-ce que vous travaillez ?

  • Speaker #0

    Alors, avec David Dugnais, c'était facile. On a élaboré une gamme de couleurs vraiment directement inspirées de ces tableaux. avec beaucoup de nuances turquoises à cause des piscines, on a commencé à travailler des dessins de mailles, des jacquards, et des imprimés, puisqu'on était au fait pas mal d'imprimer aussi, basés sous les reflets d'eau de piscine.

  • Speaker #1

    Donc ça c'est avec vos assistantes ? Oui. Votre premier cercle d'assistantes ?

  • Speaker #0

    Voilà, j'ai que deux assistantes. Une assistante qui est très axée à imprimer, et qui m'aide aussi dans la... toute la logistique de la collection. Et puis une assistante qui est avec moi depuis le début, et qui s'est mise à la maille petit à petit, qui elle s'occupe plus particulièrement des mailles. Donc vous dessinez ensemble les premiers modèles ? Oui, les modèles viennent après, les formes viennent après. C'est avant tout, parce qu'en fait on part du fil jusqu'au produit génie. Donc la priorité c'est élaborer la gamme de couleurs pour pouvoir... On choisit nos fils en même temps, en parallèle, mais bon, c'est relativement simple, puisque c'était plus compliqué au moment du Covid parce qu'il n'y avait pas de salon, donc on s'est fait envoyer les collections par l'affiliateur. Mais comme j'ai quand même pas mal de contraintes, à savoir, je prends toujours des fils qui peuvent se laver facilement, ou leur couleur tient. Et puis, j'essaie de prendre au maximum des couleurs naturelles. Donc, c'est des 100% coton, ultra-fins, c'est des mélanges viscoses polyamides. Et donc, la gamme de couleurs pour pouvoir commander toutes les couleurs de façon à pouvoir faire nos coloriages, décider des couleurs et ensuite recommander. parce que bien sûr il y a du déchet, donc on fait une première gamme de couleurs. Très très vite, il faut mettre en place les jacquards et faire les coloriages. Là, il y a des couleurs qui s'éliminent. Et ensuite, on passe aux commandes pour, en vue de fabriquer les modèles. En fait, tout se bouscule un petit peu parce qu'on doit, tant qu'on prévoit les mailles et les imprimés sur des bases de coton, une voile de coton pour l'été, il faut aussi qu'on... construisent la collection et qu'on pense au modèle. Donc même si on a quand même une bonne proportion de pièces qui sont permanentes, un t-shirt reste un t-shirt, on ne va pas changer grand-chose, peut-être l'encolure ou les manches, etc. Il y a quand même un bon pourcentage de modèles nouveaux. Et donc là, il faut les lancer. commencer à les mettre au point en même temps que tout ce travail de mise au point de mailles se fait. Donc la modéliste commence à travailler en fait Quasiment en même temps que nous, on lui donne quand même des idées de nouvelles bases de pull, de pantalon, de manteau, de veste, etc. Ensuite, une fois que les dessins de mailles et d'imprimés sont prêts, on envoie les imprimés. en Italie à faire imprimer sur ce qu'on appelle des pièces, donc une pièce c'est 50 mètres de tissu. Et là par contre on va chez nos tricoteurs qui sont en France pour étudier les coloriages. Et là on passe une hache de deux journées et on revient avec... 10, 8, parfois plus, de coloriage. On se pose au studio, on fait le tri, on fait refaire. Une fois que tout ça est arrêté, que tout ça s'imbrique, que les familles de couleurs... Parce que dans une gamme de couleurs, en fait, on a en général trois histoires de couleurs. On va avoir des froids, des chauds et puis des neutres. Schématiquement, c'est ça. On fait en sorte que tous ces coloriages de mailles rentrent dans ces cases-là. Ensuite, si on a bien commandé le fil à temps pour tricoter une pièce dans chaque jacquard ou chaque maille, on lance la fabrication des premiers modèles de la collection. Et là, c'est des va-et-vient incessants entre le studio et le fabricant. Il va fabriquer, il va tricoter, il va fabriquer, il va confectionner le modèle. Donc ça revient au studio. Il y a des modifications où il n'y en a pas. Parfois la maille ne correspond pas du tout à ce qu'on veut faire en termes de modèle. Donc il faut la refaire, il faut rajouter un fil, il faut l'alléger ou l'allourdir.

  • Speaker #1

    Les fabricants,

  • Speaker #0

    ils sont au puits. Au puits, oui. un petit peu à Rouen et plus récemment en Belgique. Donc la collection, il y a une réunion commerciale au sein de l'entreprise et on lance ce qu'on appelle les SMS, les Salesman Samples, c'est les répétitions pour nos différents agents et showrooms. Ça veut dire qu'on multiplie cette collection, donc ça veut dire en général 80 modèles, accessoires compris. par 9 avec un timing de livraison pour pouvoir ensuite parce que toutes ces répétitions reviennent à Millou pour être vérifiées, validées étiquetées et renvoyées aux différents agents qui vont les présenter en showroom ou au salon donc là tout ce processus c'est l'équivalent de 6 mois c'est ça maintenant ? parce que là pour l'hiver par exemple, on a commencé en juillet par le salon défilateur. Je dois attendre début septembre pour pouvoir faire les premiers essais de file. Donc on commence vraiment, on entame un petit peu en juillet, on brosse le scénario, etc. Et on arrête la collection fin novembre pour faire les prises de vue, parce qu'il y a les prises de vue aussi début décembre. Et pour la pression du lookbook qui nous est livré fin décembre, début janvier.

  • Speaker #1

    Et pour des vêtements qu'on retrouve en boutique ou à la vente ?

  • Speaker #0

    Ils vont être retrouvés en boutique, toute première pièce, fin juillet dans nos boutiques.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous, à un moment dans votre parcours, vous avez ressenti une difficulté, eu affaire à des obstacles ? Parce que vous étiez une femme.

  • Speaker #0

    Obstacle, pas vraiment, mais la première fois que je suis allée au Japon, oui. Les premières fois, j'étais avec une interprète femme. Quand j'ai eu affaire à des grosses sociétés japonaises, des gros groupes japonais, des Ausha, dirigés par des hommes, et que j'étais avec mon époux. Je devenais transparente, ça c'est sûr. Mais pas quand j'étais seule. Professionnellement, non.

  • Speaker #1

    Et même question par rapport Ausha d'être un avéron, d'être loin de Paris, loin du cœur du réacteur. Est-ce que ça a pu être un obstacle pour vous ?

  • Speaker #0

    Ce n'est pas un obstacle, au contraire, je crois. Si, dans la mesure où je... Tant que je peux voyager, ce n'est pas un obstacle. Au contraire, c'est un luxe de pouvoir travailler en plus. Franchement, ça m'inspire de moins en moins. Il y a de moins en moins de créateurs que j'aime, que j'admire.

  • Speaker #1

    C'était qui que vous admirez ?

  • Speaker #0

    Dries Van Noten, ça reste quelqu'un que j'admire beaucoup, même si depuis quelques saisons, ça a beaucoup changé. Il s'est mis à quai, c'était pour moi un vrai créateur. C'était un niveau technique, c'était un inventeur. Comme tout le monde, j'ai adoré, j'ai admiré Chanel, Saint-Laurent, tous les grands d'outre-couture, Palencia, Dior. Et ensuite, Sonia Riquel, ça reste une grande dame, elle a une très belle histoire. Après, il y en a des tas, il y a beaucoup de designers japonais, de maisons comme Cabane de Zucca. Il y a des Italiens aussi, bien sûr. Non, il y en a quand même beaucoup. Il y en reste beaucoup.

  • Speaker #1

    Et j'avais peut-être une question qui n'en est presque pas une. Elle n'est pas formulée telle qu'elle, mais votre travail me donne vraiment l'impression de vous parler de vous comme une créatrice, une designeuse. J'ai l'impression que vous êtes aussi un artisan, une artisane.

  • Speaker #0

    Oui, j'aime pas trop le mot créatrice parce qu'on ne crée rien. On ne crée rien. Personne ne crée rien. Personne. On interprète. On interprète.

  • Speaker #1

    Catherine, je voudrais vous amener sur la dernière question du podcast, qui est une question également rituelle. Donc on commence et on finit par deux questions inamovibles. Et donc celle qui conclut le podcast,

  • Speaker #2

    c'est en quoi est-ce que vous croyez ?

  • Speaker #0

    En quoi ? Ah oui, j'attendais la suite. J'attendais la suite.

  • Speaker #1

    Il n'y en a pas,

  • Speaker #2

    c'est vous qui l'écrivez.

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup de choses. Qu'est-ce que je vais dire en premier ? Je crois en la vie, je crois en l'amour, l'amitié. Vous ne me faites pas rire. J'ai l'air... Je vais vous le dire. Oui, donc c'est simple. La communion avec les gens. Merci beaucoup. C'est peut-être votre regard qui m'émeut, parce que vous avez un regard tellement clair que... Je suis désolée. Mais non,

  • Speaker #2

    il n'y a pas de soucis.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup d'avoir pris ce temps-là, partagé votre parcours.

  • Speaker #2

    Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de la saison 3 de Finta. J'espère qu'il vous a plu et que cette conversation avec Catherine André ouvre votre champ des possibles comme il a ouvert le mien. Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou redécouvrant toutes les femmes pionnières de la première saison sur www.fintapodcast. Sous-titrage Soci ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un tout petit peu le temps. Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par moi-même, Lola, Cross. Il est mixé par Mathieu Viguier du studio Qt. Si vous appréciez Finta et que vous souhaitez soutenir mon travail indépendant, parlez-en autour de vous. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter au podcast. Vous pouvez suivre toute son actualité sur www.fintapodcast.fr sur les réseaux sociaux avec finta.podcast et aussi vous abonner à la newsletter pour recevoir tous les nouveaux épisodes directement dans votre boîte mail. A très bientôt !

Description

Depuis Millau où elle s’est installée, Catherine André s’est fait un nom parmi les grandes maisons du luxe français. On dit d’elle qu’elle est la magicienne de la maille. Elle cite Jane Campion, Marguerite Duras, George Sand comme ses muses. 


Son atelier, dans une ancienne mégisserie, à Millau, et sa dernière boutique, à Rodez, où nous nous sommes retrouvées pour l’enregistrement, soulignent son attachement à cet Aveyron où elle a choisi de vivre pour mieux rayonner à l’international. C’est en suivant son époux, aveyronnais et médecin, qu’elle est arrivée à Rodez d’abord, à Millau ensuite. Sa maison, à Aguessac, c’est son refuge, là où elle aime s’isoler pour créer et puiser son inspiration. Dans les paysages sud-aveyronnais qu’elle sillonne et qui lui rappellent l’Irlande. Mais c’est dans le Nord-Aveyron, sur les causses du Comtal et de l’Aubrac, qu’elle entend réellement le “chant de la terre” aveyronnaise.


Comme toutes les Pionnières de la collection de Finta, je lui ai demandé de commencer par cette phrase, à la manière d’Annick Cojean. Je ne serais pas arrivée là, si…


🎧 Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou redécouvrant les femmes “Pionnières” de la première saison, sur www.fintapodcast.fr ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un peu le temps.


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Finta! c’est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d’agir et des espoirs très concrets à l’échelle locale. Finta! part du département de l’Aveyron pour explorer les voix de la ruralité. Le podcast s’écoute gratuitement sur www.fintapodcast.fr ou sur toutes les plateformes habituelles (Deezer, Spotify, etc). Finta! est un podcast écrit, réalisé et produit par la journaliste indépendante Lola Cros.


Pionnières.

Elles ont défriché des chemins, ouvert des voies, porté une voix en Aveyron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. A partir de la ruralité, qui les a naturellement façonnées, le témoignage de ces « Pionnières » contribue à penser le rapport à l’accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l’enclavement, d’hier à aujourd’hui.  


Et si la journaliste Annick Cojean compare le parcours des femmes à des « courses d’obstacles », la ruralité en est-il un... de plus ? C’est la question, en creux, à laquelle répondent les « Pionnières » que j’ai invitées au micro de Finta!


Après Marie-Thérèse Lacombe, Daniele Puech, Nicole Fagegaltier, Danielle Dastugue, Emmanuelle Gazel, Sarah Singla et Josette Hart, qui se sont livrées dans la première saison des Pionnières, je vous propose de compléter la collection. Aujourd’hui, avec Catherine André.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Le métier de styliste était tout nouveau. Marie Beretta, Jean-Paul Gaultier, Sonia Riquel venaient juste d'arriver en tant que designer et avaient introduit, après Saint-Laurent, l'idée du concept du prêt-à-porter. Et puis moi, je suis arrivée par le biais de l'industrie, par les filatures. Et je pense que ce qui a fonctionné, c'est que je connaissais la technique, puisque je m'étais frottée. au métier, à la filature, puis ensuite au métier à tricoter. Hé, finit ! Finit !

  • Speaker #1

    Elles ont dépêché des chemins, ouvert des voies, porté une voie, en avéron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. À partir de la ruralité qui les a naturellement façonnées, Le témoignage de ces pionnières contribue à penser le rapport à l'accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l'enclavement d'hier jusqu'à aujourd'hui. Et si la journaliste Annick Cogent compare le parcours des femmes à des courtes d'obstacles, la ruralité en serait-il un de plus ? C'est la question, en creux, à laquelle répondent les pionnières que j'ai invitées au micro de Finta. Après Marie-Thérèse Lacombe, Daniel Puèche, Nicole Fagegaltier, Daniel Dastug, Emmanuel Gazel, Sarah Sengla et Josette Hart, qui se sont livrées dans la première saison des Pionnières, je vous propose de compléter la collection. Aujourd'hui, avec Catherine André. Depuis Millau, où elle s'est installée, Catherine André s'est faite un nom parmi les grandes maisons du luxe français. On dit d'elle qu'elle est la magicienne de la maille. Elle, cite Jeanne Campion, Marguerite Duras, Georges Sand, comme ses muses. Son atelier dans une ancienne mégisserie, à Millau, et sa dernière boutique, à Rodez, où nous nous sommes retrouvés pour cet enregistrement, soulignent son attachement à cet Aveyron où elle a choisi de vivre, pour mieux rayonner à l'international. C'est en suivant son époux, Aveyroné et Médecin, qu'elle est arrivée à Rodez d'abord, à Millau ensuite. Sa maison, à Aguesac, c'est son refuge. Là où elle aime s'isoler pour créer et puiser son inspiration, dans les paysages sud-avéronnés qu'elle sillonne et qui lui rappelle l'Irlande. Mais c'est dans le nord-Aveyron, sur les costes du Contal et de l'Aubrac, qu'elle entend réellement le chant de la terre avéronnaise. Comme toutes les pionnières de la collection de Finta, je lui ai demandé de commencer par cette phrase, à la manière d'Anik Kojan. Je ne serais pas arrivée là si...

  • Speaker #0

    Et bien, si je n'étais pas arrivée en Aveyron, dans le nord Aveyron, particulièrement à Rodez, si je n'avais pas voyagé en Écosse et en Irlande, si je n'avais pas rencontré mon mari, s'il y en a des tas, des tas d'autres, mais ce sont ceux qui me viennent à l'esprit là.

  • Speaker #1

    Donc si on revient à la mode qui est... au cœur de votre métier. Vous avez créé votre marque il y a presque 30 ans.

  • Speaker #0

    Maintenant, en 1995.

  • Speaker #1

    Anne Millot, elle vient d'où cette vocation ?

  • Speaker #0

    De créer une entreprise, ce n'était pas une envie, ce n'était pas quelque chose de prévu, ce n'était pas un projet construit, etc. C'est que depuis 1980, je me suis trouvée... parachutée dans le milieu de l'industrie du textile et donc de la mode. Et donc j'ai travaillé pendant pas loin de 20 ans, pendant 15 ans, en freelance auprès de designers, de quelques couturiers, en tant que... enfin je fondais des maillettes de mailles, et auprès des filatures en tant que conseil. maille et conseil, conseil couleur et fil. Je n'ai jamais été salariée, j'ai toujours été indépendante. Et puis, je pense que c'est la naissance de mes deux garçons qui m'ont fait réaliser que ce que je faisais, en fait, ce travail de conseil que j'adorais, je voyageais en Italie, j'étais tout le temps à Paris, je rencontrais une faune complètement atypique. très particulier, l'univers du textile. Et puis, j'ai eu mes deux garçons, et là, je me suis dit quand même que je trouvais que je faisais des choses bien, je m'occupais des choses bien futiles. Et c'est mon mari qui... Non, oui, en fait, c'est... Je m'étais liée d'amitié avec Claude Barthélémy, qui était véronais d'origine, que j'avais rencontré parce qu'il faisait partie de mes clients, mais il ne m'avait jamais rien acheté. Et puis un week-end, il nous invite chez lui, près de Villefranche-Panna. Et puis au bout d'une longue soirée de discussion, au petit matin, il me dit « Catherine, arrête de faire ce que tu fais, monte, arrête de vendre tes dessins. » Fais ta collection, tu as tout ce qu'il faut pour faire ta collection. Avec Jean-Luc, mon mari, on me demande, mais ça c'est peut-être un peu compliqué, comment il faut faire ? On ne sait pas du tout. C'est simple, tu auras bien un filateur, un fabricant qui va t'aider pour ta première collection. Tu ne paieras pas les frais de développement. Tu prends un tout petit stand au salon du prêt-à-porter. Et si tu vends 500 pièces, ça veut dire que tu as une place sur le marché. Donc c'est ce qu'on a fait. J'ai fait une collection et on a vendu plus de 500 pièces. On a vendu 1000 pièces. Donc il y a eu un gros succès. Sauf qu'on ne savait pas du tout ce que c'était qu'une latte de crédit, puisqu'on avait quand même une grosse commande de japonais. que mon mari avait pris dans une cabine téléphonique sur un bord d'autoroute. Moi, je ne me voyais pas du tout à la tête d'une entreprise, donc je me reposais complètement sur les épaules de mon mari qui avait son cabinet de pédopsychiatre. Donc il venait jeter un coup d'œil. Il vérifiait et regardait la compta quand même. Et en Bonavérona, il est quand même perclu de mon sens. On a tout de suite vendu à l'export. Comme on a eu cette grosse commande de japonais, on a cherché comment faire un salon au Japon. Et on a eu notre première clientèle, surtout japonaise en fait, finalement.

  • Speaker #1

    Là, c'est toujours l'essentiel de votre activité,

  • Speaker #0

    l'export ? Oui. Plus avec nos boutiques maintenant, puisque avec nos quatre boutiques, c'est à peu près l'équivalent de ce qu'on fait, l'export.

  • Speaker #1

    La mode, vous ne vous y destinez pas ? Initialement, en sortie d'études en tout cas.

  • Speaker #0

    Je n'ai pas fait d'études de mode du tout. Comment vous avez alors ri ? J'ai appris sur le tas. J'ai fait une année de beaux-arts, parce qu'à ce moment-là, ça me trottait un peu dans la tête de faire quelque chose. de ma vie parce que j'ai jamais eu aucune ambition je suis partie en fac de lettres parce que j'avais envie de parler les langues étrangères peut-être pour voyager mais voilà comme ça juste pour le plaisir de la langue mais c'est tout ça n'est pas plus loin et quand je suis arrivée à Rodès je me suis dit là ma petite il faut que tu fasses quelque chose parce qu'en fait avant Rodès euh Mon mari et moi, on habitait dans le Gard. Et donc, il y avait toute une population d'artistes, de peintres, écrivains, anglo-saxons, américains, anglais, etc. qui me commentaient des pulls. Parce qu'à l'époque, je tricotais à la main. J'avais tricoté pour des amis. Et puis ensuite, je me suis dit, je vais peut-être essayer de gagner quelques sous en tricotant des pulls. Et ça marchait très, très bien. Donc j'ai fait pas mal de salons artisanaux avec mes pulls tricotés main. Et donc c'est arrivé à Vaudèze où là, j'ai plus du tout ce miroir de gens qui me renvoyaient l'image d'une artiste un petit peu, mais bon, d'une créatrice. Et puis bon, j'étais beaucoup plus dans l'ombre de mon mari qui était médecin à l'époque. sur Odesse. C'est à ce moment-là que je suis partie sur Paris avec mon book de photos de tous les pulls que j'avais faits depuis quelques années. J'ai pris des rendez-vous dans tous les bureaux de style, de style imaginable sur Paris. J'ai fait chou blanc, bien sûr, sauf à mon dernier rendez-vous, j'avais un rendez-vous avec Pro Hostile à 6h du soir avant le Vaudi, avec une styliste qui était partie en week-end. Bien sûr, elle avait oublié le rendez-vous. Une parfaite inconnue. Mais j'ai trouvé quelqu'un, pour le faire court, qui m'a orientée vers Rosana Orlandi, qui, à l'époque, dans les années 80, a dirigé le bureau de style de l'affilature de son père, près de Milan. Et le bureau de style Orlandi, c'était le bureau de style qui présentait les collections de fils, mais qui était vraiment le pôle d'attraction de toutes les marques italiennes de haute couture et de prêt-à-porter. Donc je suis allée voir cette dame, qui était à l'époque la paise de la mode et de la maille, et c'est là que j'ai tout appris, qu'on a appris en stage. Un stage qui s'est prolongé sur huit ans. qu'ensuite, ça n'était plus un stage. Je venais l'aider sur les collections, sur quelques jours, plusieurs jours par mois. On m'a prise pour la collaboratrice d'Ozana, parce que je n'étais pas du tout. Et j'ai eu des tas de contacts sur Paris, de maisons de prêt-à-porter, etc. Et voilà, c'est là que tout a commencé.

  • Speaker #1

    Ce qui est intéressant dans votre parcours, je trouve, c'est que la mode paraît être un univers difficile à pénétrer. Et que vous avez fait votre bonhomme de chemin en saisissant les opportunités,

  • Speaker #0

    les rencontres. Oui, alors j'ai fait le chemin. Bon, la mode, maintenant, c'est les podiums, c'est être une star. Mais à l'époque, c'était ça aussi un petit peu. Le métier de styliste était tout nouveau. Marie Beretta, Jean-Paul Gaultier, Sonia Riquel venaient juste d'arriver en tant que designer et avaient introduit après Saint-Laurent l'idée, le concept du prêt-à-porter. Et puis moi, je suis arrivée par le biais de l'industrie quand même, par l'infilature. Et je pense que ce qui a fonctionné, c'est que j'avais... En plus d'un certain talent à manipuler la couleur et une expertise en maille, je connaissais la technique puisque je m'étais frottée au métier, à l'affilature, puis ensuite au métier à tricoter.

  • Speaker #1

    À quel moment est-ce que vous choisissez la maille ?

  • Speaker #0

    Tout de suite, puisque j'ai très vite tricoté. Ma grand-mère m'avait appris à tricoter quand j'étais enfant, mais ensuite je n'ai jamais vraiment tricoté parce que je trouvais ça très ennuyeux. Je n'arrivais jamais à terminer un pull aux Grandes Dames de ma grand-mère. Et puis, ça a démarré quand j'ai fait mon premier voyage en Irlande avec une amie. Pourquoi on a choisi l'Irlande, je ne me souviens pas. Et là, vraiment, je suis tombée amoureuse de ce pays à taille humaine. Et j'ai découvert toute la tradition textile, en fait. Les tweeds, les mailles à rang. J'avais l'intention d'écrire mon journal de voyage parce que c'était mon premier voyage seul en fait, avec une amie. Je me suis mise en tête de tricoter mon journal de voyage. Mon journal de voyage, c'était un panneau de maille qui est devenu une énorme écharpe que je tricotais avec des chutes de fil. des usines de tweed que je mettais bout à bout, que je nouais. Je les nouais avec une certaine architecture de couleurs. Ce qui me fascinait, c'est un peu comme l'écriture automatique en fait, ce qui me fascinait, c'est qu'ensuite, quand ils étaient tricotés, du fait du nœud du tricot, il y avait des harmonies de couleurs complètement différentes. Il y avait d'abord la suite de couleurs. que je faisais avec des noeuds, avec des sections de fil plus ou moins grandes. Ensuite, la mise en plot, qui était encore quelque chose de différent, parce qu'on voyait toutes les couleurs comme ça s'amonceler. Et ensuite, le tricot, qui devenait quelque chose de complètement différent. Je faisais du jersey, je ne faisais pas de maille fantaisie ni quoi que ce soit. Et rien que ça, je trouvais ça fascinant. Et je tricotais un petit bout tous les soirs. tradition myrlandaise qui vous a plongé dedans. Le fait aussi de tricoter une histoire. Là, ce n'était pas une histoire, c'était des fils. Enfin, si, c'était mon histoire à moi. Et a germé l'idée de, plutôt que de faire des pull-unis ou des pulls avec des rayures qui étaient toujours un travail un peu mécanique et monotone, c'était comment C'était peau d'âne en fait, comment faire un pull qui raconte une histoire. Et à l'époque, une de mes meilleures amies a eu un accident. Elle a dû rester allongée avec un corset pendant des mois. Et pour la consoler, avec trois autres amies, on lui a tricoté un pull à 16 mains. Ah non, à 8 mains. qu'on a ensuite assemblée. Donc, il y avait une personne qui faisait le dos, une autre, voilà. Ça a donné une espèce de pull paysage. En plus, c'était vraiment, à l'époque, c'était la fin des années 70, c'était la pleine tendance des pulls paysages. J'avais pu voir en Irlande toute l'histoire, en fait, que chaque point a une signification. C'est comme un mot, c'est comme les pulls que les femmes de pêcheurs tricotent à leur pêcheur de mari. Il a une signification et ça permet aussi de les reconnaître en cas de drame et en cas de naufrage. C'est-à-dire ? C'est-à-dire qu'on reconnaissait, quand les corps n'étaient plus identifiables, on reconnaissait le pêcheur grâce à son pull. Et quand vous dites que chaque point a une stématique ? C'est-à-dire que chaque point a un symbole, c'est comme sur les tapis traditionnels marocains, iraniens, etc. Tout travail textile, chaque motif a une signification, liée souvent à la nature. L'épic blé, le sapin, le chardon, voilà.

  • Speaker #1

    Et donc là, on parle de vous comme la magicienne de la maille.

  • Speaker #0

    Oui, je ne sais pas trop ce que ça veut dire. Oui, je vis des instants de magie, mais ce n'est presque pas moi qui les crée. C'est vrai que c'est vrai. que chaque pièce devient unique dès l'instant où elle est portée par telle ou telle personne. Parce que le vêtement, ça n'est pas rien. C'est bourré de sens. C'est notre deuxième enveloppe. Ça parle. J'adore rencontrer les clientes dans mes boutiques, leur parler, voir comment elles se sont appropriées le vêtement, comment elles le customisent, comment elles le portent avec d'autres. Avec d'autres marques, comment elles le coordonnent avec un pull qui a 10 ans. Parce que c'est ça aussi ce que j'ai découvert au Japon avec le contact de mes clientes japonaises. Elles gardent mes pulls comme leur kimono dans leurs armoires. Et ensuite, quand elles ne peuvent plus les porter, quand elles ont dénu le temps de la transmission et du don, elles en font cadeau à leur fille ou à leur petite-fille.

  • Speaker #1

    Ça, c'est une volonté aussi de votre part, d'avoir une ligne intemporelle, de transgresser les saisons ?

  • Speaker #0

    Oui, même si je suis quand même pas mal imprégnée des tendances, puisque je fais partie du comité français de la couleur. Donc, qu'est-ce que vous y faites ? On est là pour une gamme de couleurs qui sera universelle, qui va... qui va servir à... qui va voyager dans les salons, qui va être... Et dont vont servir les bureaux de style, bien sûr. Qui regroupent, pas des designers comme moi, mais ça peut être des gens de la communication, des architectes, des gens vraiment de tout or. Donc vous, vous avez ce lien avec la couleur de la saison. Oui, oui.

  • Speaker #1

    Mais après, vous vous donnez complètement la liberté de sortir des autres...

  • Speaker #0

    Oui, mais en fait... Le vêtement étant un objet de communication, avant chaque collection, il y a une histoire. Il faut construire une histoire, une espèce de scénario pour qu'un type de femme se dessine. Et donc, s'il y a histoire, il y a gamme de couleurs aussi, il y a un vocabulaire graphique aussi particulier, bien attaché à cette histoire. Tout doit s'abriquer. tout doit avoir un sens même si on laisse aussi au fil de l'élaboration de la collection le hasard mettre un peu de désherbe dans tout ça Est-ce que vos scénarios ce sont ceux des voyages ? Tout ça n'est pas possible Non, c'est quand même un petit peu mais là cet hiver c'est les aurores boréales les pays scandinaves et nordiques d'où les Merci. D'où les vitrines qui sont axées sur les explorateurs polaires. L'été précédent, c'était tout simplement Jacques-Henri Lartigue, les photos de Jacques-Henri Lartigue et la personnalité. La joie de vivre, le bonheur de vivre qui se dégage des photos de cet homme. Vivre d'avant, c'était... Ah oui, alors ça c'est né un petit peu d'une histoire avec une cliente belge. Et elle a acheté un château en Écosse sur Nile. Et donc ça fait quand même quelques années de ça. Ça doit faire 4 ans, 4 ou 5 ans. Et quand je l'ai rencontrée, la première fois que je l'ai rencontrée, elle m'a dit « Ah, mais il faut absolument que vous veniez faire des photos dans mon château, etc. » Et donc, moi qui suis amoureuse des îles anglo-saxonnes, de l'Écosse, de l'Iran, que cette île qui était complètement, presque la plus lointaine des îles Zébrides, j'ai commencé à complètement renverger, à rêver de ça. J'ai fait une collection sur ce rêve, sur la restauration de ce château, avec la découverte des blasons, etc. Et puis encore avant, c'était le Covid, donc là ça a été une collection très particulière, qui s'est faite juste avec ma première assistante. On était tous seuls à travailler dans mon bureau, et là on s'est taxés sur David Hockney. Ah oui, parce que j'avais vu il n'y a pas longtemps, c'est un film plus vieux que ça, mais un film d'un Italien, The Biggest Splash. C'est le titre d'un tableau d'Ockney, avec une comédienne que j'adore, qui est Tilda Swinton. C'était une histoire de piscine, en fait. Au début, j'ai voulu faire une collection un petit peu sur ce décalage entre ce que portait Tilda Swinton dans cette île italienne au large de la Sardaigne, je crois, ou de la Sicile, je ne sais plus. Et puis ensuite, avec le titre du film, je suis venue à David Hockney. Et comme par hasard, quand j'habite à Guesac, et tous les jours quand je le mets au bureau... Il y a une petite route qui, de l'autre côté du Tarn, il y a une petite route qui serpente dans les cerisiers. Et c'est vraiment pas dans les mêmes couleurs, parce que les couleurs du tableau de David Hume, elles sont beaucoup plus fortes. Mais ça me fait penser à un tableau, je ne sais plus qui s'intitule, une petite route qui serpente avec deux, trois palmiers, des petites maisons. Voilà, c'est tout un tas d'associations, d'idées. Puis comme je suis beaucoup en voiture, je conduis beaucoup, je me déplace beaucoup. Donc c'est à ce moment-là que les idées se décantent et qu'il y a des choses qui remontent.

  • Speaker #1

    Et à partir de là, du moment où vous avez l'idée, où vous croisez les idées, comment est-ce que vous travaillez ?

  • Speaker #0

    Alors, avec David Dugnais, c'était facile. On a élaboré une gamme de couleurs vraiment directement inspirées de ces tableaux. avec beaucoup de nuances turquoises à cause des piscines, on a commencé à travailler des dessins de mailles, des jacquards, et des imprimés, puisqu'on était au fait pas mal d'imprimer aussi, basés sous les reflets d'eau de piscine.

  • Speaker #1

    Donc ça c'est avec vos assistantes ? Oui. Votre premier cercle d'assistantes ?

  • Speaker #0

    Voilà, j'ai que deux assistantes. Une assistante qui est très axée à imprimer, et qui m'aide aussi dans la... toute la logistique de la collection. Et puis une assistante qui est avec moi depuis le début, et qui s'est mise à la maille petit à petit, qui elle s'occupe plus particulièrement des mailles. Donc vous dessinez ensemble les premiers modèles ? Oui, les modèles viennent après, les formes viennent après. C'est avant tout, parce qu'en fait on part du fil jusqu'au produit génie. Donc la priorité c'est élaborer la gamme de couleurs pour pouvoir... On choisit nos fils en même temps, en parallèle, mais bon, c'est relativement simple, puisque c'était plus compliqué au moment du Covid parce qu'il n'y avait pas de salon, donc on s'est fait envoyer les collections par l'affiliateur. Mais comme j'ai quand même pas mal de contraintes, à savoir, je prends toujours des fils qui peuvent se laver facilement, ou leur couleur tient. Et puis, j'essaie de prendre au maximum des couleurs naturelles. Donc, c'est des 100% coton, ultra-fins, c'est des mélanges viscoses polyamides. Et donc, la gamme de couleurs pour pouvoir commander toutes les couleurs de façon à pouvoir faire nos coloriages, décider des couleurs et ensuite recommander. parce que bien sûr il y a du déchet, donc on fait une première gamme de couleurs. Très très vite, il faut mettre en place les jacquards et faire les coloriages. Là, il y a des couleurs qui s'éliminent. Et ensuite, on passe aux commandes pour, en vue de fabriquer les modèles. En fait, tout se bouscule un petit peu parce qu'on doit, tant qu'on prévoit les mailles et les imprimés sur des bases de coton, une voile de coton pour l'été, il faut aussi qu'on... construisent la collection et qu'on pense au modèle. Donc même si on a quand même une bonne proportion de pièces qui sont permanentes, un t-shirt reste un t-shirt, on ne va pas changer grand-chose, peut-être l'encolure ou les manches, etc. Il y a quand même un bon pourcentage de modèles nouveaux. Et donc là, il faut les lancer. commencer à les mettre au point en même temps que tout ce travail de mise au point de mailles se fait. Donc la modéliste commence à travailler en fait Quasiment en même temps que nous, on lui donne quand même des idées de nouvelles bases de pull, de pantalon, de manteau, de veste, etc. Ensuite, une fois que les dessins de mailles et d'imprimés sont prêts, on envoie les imprimés. en Italie à faire imprimer sur ce qu'on appelle des pièces, donc une pièce c'est 50 mètres de tissu. Et là par contre on va chez nos tricoteurs qui sont en France pour étudier les coloriages. Et là on passe une hache de deux journées et on revient avec... 10, 8, parfois plus, de coloriage. On se pose au studio, on fait le tri, on fait refaire. Une fois que tout ça est arrêté, que tout ça s'imbrique, que les familles de couleurs... Parce que dans une gamme de couleurs, en fait, on a en général trois histoires de couleurs. On va avoir des froids, des chauds et puis des neutres. Schématiquement, c'est ça. On fait en sorte que tous ces coloriages de mailles rentrent dans ces cases-là. Ensuite, si on a bien commandé le fil à temps pour tricoter une pièce dans chaque jacquard ou chaque maille, on lance la fabrication des premiers modèles de la collection. Et là, c'est des va-et-vient incessants entre le studio et le fabricant. Il va fabriquer, il va tricoter, il va fabriquer, il va confectionner le modèle. Donc ça revient au studio. Il y a des modifications où il n'y en a pas. Parfois la maille ne correspond pas du tout à ce qu'on veut faire en termes de modèle. Donc il faut la refaire, il faut rajouter un fil, il faut l'alléger ou l'allourdir.

  • Speaker #1

    Les fabricants,

  • Speaker #0

    ils sont au puits. Au puits, oui. un petit peu à Rouen et plus récemment en Belgique. Donc la collection, il y a une réunion commerciale au sein de l'entreprise et on lance ce qu'on appelle les SMS, les Salesman Samples, c'est les répétitions pour nos différents agents et showrooms. Ça veut dire qu'on multiplie cette collection, donc ça veut dire en général 80 modèles, accessoires compris. par 9 avec un timing de livraison pour pouvoir ensuite parce que toutes ces répétitions reviennent à Millou pour être vérifiées, validées étiquetées et renvoyées aux différents agents qui vont les présenter en showroom ou au salon donc là tout ce processus c'est l'équivalent de 6 mois c'est ça maintenant ? parce que là pour l'hiver par exemple, on a commencé en juillet par le salon défilateur. Je dois attendre début septembre pour pouvoir faire les premiers essais de file. Donc on commence vraiment, on entame un petit peu en juillet, on brosse le scénario, etc. Et on arrête la collection fin novembre pour faire les prises de vue, parce qu'il y a les prises de vue aussi début décembre. Et pour la pression du lookbook qui nous est livré fin décembre, début janvier.

  • Speaker #1

    Et pour des vêtements qu'on retrouve en boutique ou à la vente ?

  • Speaker #0

    Ils vont être retrouvés en boutique, toute première pièce, fin juillet dans nos boutiques.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous, à un moment dans votre parcours, vous avez ressenti une difficulté, eu affaire à des obstacles ? Parce que vous étiez une femme.

  • Speaker #0

    Obstacle, pas vraiment, mais la première fois que je suis allée au Japon, oui. Les premières fois, j'étais avec une interprète femme. Quand j'ai eu affaire à des grosses sociétés japonaises, des gros groupes japonais, des Ausha, dirigés par des hommes, et que j'étais avec mon époux. Je devenais transparente, ça c'est sûr. Mais pas quand j'étais seule. Professionnellement, non.

  • Speaker #1

    Et même question par rapport Ausha d'être un avéron, d'être loin de Paris, loin du cœur du réacteur. Est-ce que ça a pu être un obstacle pour vous ?

  • Speaker #0

    Ce n'est pas un obstacle, au contraire, je crois. Si, dans la mesure où je... Tant que je peux voyager, ce n'est pas un obstacle. Au contraire, c'est un luxe de pouvoir travailler en plus. Franchement, ça m'inspire de moins en moins. Il y a de moins en moins de créateurs que j'aime, que j'admire.

  • Speaker #1

    C'était qui que vous admirez ?

  • Speaker #0

    Dries Van Noten, ça reste quelqu'un que j'admire beaucoup, même si depuis quelques saisons, ça a beaucoup changé. Il s'est mis à quai, c'était pour moi un vrai créateur. C'était un niveau technique, c'était un inventeur. Comme tout le monde, j'ai adoré, j'ai admiré Chanel, Saint-Laurent, tous les grands d'outre-couture, Palencia, Dior. Et ensuite, Sonia Riquel, ça reste une grande dame, elle a une très belle histoire. Après, il y en a des tas, il y a beaucoup de designers japonais, de maisons comme Cabane de Zucca. Il y a des Italiens aussi, bien sûr. Non, il y en a quand même beaucoup. Il y en reste beaucoup.

  • Speaker #1

    Et j'avais peut-être une question qui n'en est presque pas une. Elle n'est pas formulée telle qu'elle, mais votre travail me donne vraiment l'impression de vous parler de vous comme une créatrice, une designeuse. J'ai l'impression que vous êtes aussi un artisan, une artisane.

  • Speaker #0

    Oui, j'aime pas trop le mot créatrice parce qu'on ne crée rien. On ne crée rien. Personne ne crée rien. Personne. On interprète. On interprète.

  • Speaker #1

    Catherine, je voudrais vous amener sur la dernière question du podcast, qui est une question également rituelle. Donc on commence et on finit par deux questions inamovibles. Et donc celle qui conclut le podcast,

  • Speaker #2

    c'est en quoi est-ce que vous croyez ?

  • Speaker #0

    En quoi ? Ah oui, j'attendais la suite. J'attendais la suite.

  • Speaker #1

    Il n'y en a pas,

  • Speaker #2

    c'est vous qui l'écrivez.

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup de choses. Qu'est-ce que je vais dire en premier ? Je crois en la vie, je crois en l'amour, l'amitié. Vous ne me faites pas rire. J'ai l'air... Je vais vous le dire. Oui, donc c'est simple. La communion avec les gens. Merci beaucoup. C'est peut-être votre regard qui m'émeut, parce que vous avez un regard tellement clair que... Je suis désolée. Mais non,

  • Speaker #2

    il n'y a pas de soucis.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup d'avoir pris ce temps-là, partagé votre parcours.

  • Speaker #2

    Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de la saison 3 de Finta. J'espère qu'il vous a plu et que cette conversation avec Catherine André ouvre votre champ des possibles comme il a ouvert le mien. Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou redécouvrant toutes les femmes pionnières de la première saison sur www.fintapodcast. Sous-titrage Soci ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un tout petit peu le temps. Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par moi-même, Lola, Cross. Il est mixé par Mathieu Viguier du studio Qt. Si vous appréciez Finta et que vous souhaitez soutenir mon travail indépendant, parlez-en autour de vous. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter au podcast. Vous pouvez suivre toute son actualité sur www.fintapodcast.fr sur les réseaux sociaux avec finta.podcast et aussi vous abonner à la newsletter pour recevoir tous les nouveaux épisodes directement dans votre boîte mail. A très bientôt !

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Description

Depuis Millau où elle s’est installée, Catherine André s’est fait un nom parmi les grandes maisons du luxe français. On dit d’elle qu’elle est la magicienne de la maille. Elle cite Jane Campion, Marguerite Duras, George Sand comme ses muses. 


Son atelier, dans une ancienne mégisserie, à Millau, et sa dernière boutique, à Rodez, où nous nous sommes retrouvées pour l’enregistrement, soulignent son attachement à cet Aveyron où elle a choisi de vivre pour mieux rayonner à l’international. C’est en suivant son époux, aveyronnais et médecin, qu’elle est arrivée à Rodez d’abord, à Millau ensuite. Sa maison, à Aguessac, c’est son refuge, là où elle aime s’isoler pour créer et puiser son inspiration. Dans les paysages sud-aveyronnais qu’elle sillonne et qui lui rappellent l’Irlande. Mais c’est dans le Nord-Aveyron, sur les causses du Comtal et de l’Aubrac, qu’elle entend réellement le “chant de la terre” aveyronnaise.


Comme toutes les Pionnières de la collection de Finta, je lui ai demandé de commencer par cette phrase, à la manière d’Annick Cojean. Je ne serais pas arrivée là, si…


🎧 Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou redécouvrant les femmes “Pionnières” de la première saison, sur www.fintapodcast.fr ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un peu le temps.


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Finta! c’est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d’agir et des espoirs très concrets à l’échelle locale. Finta! part du département de l’Aveyron pour explorer les voix de la ruralité. Le podcast s’écoute gratuitement sur www.fintapodcast.fr ou sur toutes les plateformes habituelles (Deezer, Spotify, etc). Finta! est un podcast écrit, réalisé et produit par la journaliste indépendante Lola Cros.


Pionnières.

Elles ont défriché des chemins, ouvert des voies, porté une voix en Aveyron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. A partir de la ruralité, qui les a naturellement façonnées, le témoignage de ces « Pionnières » contribue à penser le rapport à l’accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l’enclavement, d’hier à aujourd’hui.  


Et si la journaliste Annick Cojean compare le parcours des femmes à des « courses d’obstacles », la ruralité en est-il un... de plus ? C’est la question, en creux, à laquelle répondent les « Pionnières » que j’ai invitées au micro de Finta!


Après Marie-Thérèse Lacombe, Daniele Puech, Nicole Fagegaltier, Danielle Dastugue, Emmanuelle Gazel, Sarah Singla et Josette Hart, qui se sont livrées dans la première saison des Pionnières, je vous propose de compléter la collection. Aujourd’hui, avec Catherine André.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Le métier de styliste était tout nouveau. Marie Beretta, Jean-Paul Gaultier, Sonia Riquel venaient juste d'arriver en tant que designer et avaient introduit, après Saint-Laurent, l'idée du concept du prêt-à-porter. Et puis moi, je suis arrivée par le biais de l'industrie, par les filatures. Et je pense que ce qui a fonctionné, c'est que je connaissais la technique, puisque je m'étais frottée. au métier, à la filature, puis ensuite au métier à tricoter. Hé, finit ! Finit !

  • Speaker #1

    Elles ont dépêché des chemins, ouvert des voies, porté une voie, en avéron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. À partir de la ruralité qui les a naturellement façonnées, Le témoignage de ces pionnières contribue à penser le rapport à l'accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l'enclavement d'hier jusqu'à aujourd'hui. Et si la journaliste Annick Cogent compare le parcours des femmes à des courtes d'obstacles, la ruralité en serait-il un de plus ? C'est la question, en creux, à laquelle répondent les pionnières que j'ai invitées au micro de Finta. Après Marie-Thérèse Lacombe, Daniel Puèche, Nicole Fagegaltier, Daniel Dastug, Emmanuel Gazel, Sarah Sengla et Josette Hart, qui se sont livrées dans la première saison des Pionnières, je vous propose de compléter la collection. Aujourd'hui, avec Catherine André. Depuis Millau, où elle s'est installée, Catherine André s'est faite un nom parmi les grandes maisons du luxe français. On dit d'elle qu'elle est la magicienne de la maille. Elle, cite Jeanne Campion, Marguerite Duras, Georges Sand, comme ses muses. Son atelier dans une ancienne mégisserie, à Millau, et sa dernière boutique, à Rodez, où nous nous sommes retrouvés pour cet enregistrement, soulignent son attachement à cet Aveyron où elle a choisi de vivre, pour mieux rayonner à l'international. C'est en suivant son époux, Aveyroné et Médecin, qu'elle est arrivée à Rodez d'abord, à Millau ensuite. Sa maison, à Aguesac, c'est son refuge. Là où elle aime s'isoler pour créer et puiser son inspiration, dans les paysages sud-avéronnés qu'elle sillonne et qui lui rappelle l'Irlande. Mais c'est dans le nord-Aveyron, sur les costes du Contal et de l'Aubrac, qu'elle entend réellement le chant de la terre avéronnaise. Comme toutes les pionnières de la collection de Finta, je lui ai demandé de commencer par cette phrase, à la manière d'Anik Kojan. Je ne serais pas arrivée là si...

  • Speaker #0

    Et bien, si je n'étais pas arrivée en Aveyron, dans le nord Aveyron, particulièrement à Rodez, si je n'avais pas voyagé en Écosse et en Irlande, si je n'avais pas rencontré mon mari, s'il y en a des tas, des tas d'autres, mais ce sont ceux qui me viennent à l'esprit là.

  • Speaker #1

    Donc si on revient à la mode qui est... au cœur de votre métier. Vous avez créé votre marque il y a presque 30 ans.

  • Speaker #0

    Maintenant, en 1995.

  • Speaker #1

    Anne Millot, elle vient d'où cette vocation ?

  • Speaker #0

    De créer une entreprise, ce n'était pas une envie, ce n'était pas quelque chose de prévu, ce n'était pas un projet construit, etc. C'est que depuis 1980, je me suis trouvée... parachutée dans le milieu de l'industrie du textile et donc de la mode. Et donc j'ai travaillé pendant pas loin de 20 ans, pendant 15 ans, en freelance auprès de designers, de quelques couturiers, en tant que... enfin je fondais des maillettes de mailles, et auprès des filatures en tant que conseil. maille et conseil, conseil couleur et fil. Je n'ai jamais été salariée, j'ai toujours été indépendante. Et puis, je pense que c'est la naissance de mes deux garçons qui m'ont fait réaliser que ce que je faisais, en fait, ce travail de conseil que j'adorais, je voyageais en Italie, j'étais tout le temps à Paris, je rencontrais une faune complètement atypique. très particulier, l'univers du textile. Et puis, j'ai eu mes deux garçons, et là, je me suis dit quand même que je trouvais que je faisais des choses bien, je m'occupais des choses bien futiles. Et c'est mon mari qui... Non, oui, en fait, c'est... Je m'étais liée d'amitié avec Claude Barthélémy, qui était véronais d'origine, que j'avais rencontré parce qu'il faisait partie de mes clients, mais il ne m'avait jamais rien acheté. Et puis un week-end, il nous invite chez lui, près de Villefranche-Panna. Et puis au bout d'une longue soirée de discussion, au petit matin, il me dit « Catherine, arrête de faire ce que tu fais, monte, arrête de vendre tes dessins. » Fais ta collection, tu as tout ce qu'il faut pour faire ta collection. Avec Jean-Luc, mon mari, on me demande, mais ça c'est peut-être un peu compliqué, comment il faut faire ? On ne sait pas du tout. C'est simple, tu auras bien un filateur, un fabricant qui va t'aider pour ta première collection. Tu ne paieras pas les frais de développement. Tu prends un tout petit stand au salon du prêt-à-porter. Et si tu vends 500 pièces, ça veut dire que tu as une place sur le marché. Donc c'est ce qu'on a fait. J'ai fait une collection et on a vendu plus de 500 pièces. On a vendu 1000 pièces. Donc il y a eu un gros succès. Sauf qu'on ne savait pas du tout ce que c'était qu'une latte de crédit, puisqu'on avait quand même une grosse commande de japonais. que mon mari avait pris dans une cabine téléphonique sur un bord d'autoroute. Moi, je ne me voyais pas du tout à la tête d'une entreprise, donc je me reposais complètement sur les épaules de mon mari qui avait son cabinet de pédopsychiatre. Donc il venait jeter un coup d'œil. Il vérifiait et regardait la compta quand même. Et en Bonavérona, il est quand même perclu de mon sens. On a tout de suite vendu à l'export. Comme on a eu cette grosse commande de japonais, on a cherché comment faire un salon au Japon. Et on a eu notre première clientèle, surtout japonaise en fait, finalement.

  • Speaker #1

    Là, c'est toujours l'essentiel de votre activité,

  • Speaker #0

    l'export ? Oui. Plus avec nos boutiques maintenant, puisque avec nos quatre boutiques, c'est à peu près l'équivalent de ce qu'on fait, l'export.

  • Speaker #1

    La mode, vous ne vous y destinez pas ? Initialement, en sortie d'études en tout cas.

  • Speaker #0

    Je n'ai pas fait d'études de mode du tout. Comment vous avez alors ri ? J'ai appris sur le tas. J'ai fait une année de beaux-arts, parce qu'à ce moment-là, ça me trottait un peu dans la tête de faire quelque chose. de ma vie parce que j'ai jamais eu aucune ambition je suis partie en fac de lettres parce que j'avais envie de parler les langues étrangères peut-être pour voyager mais voilà comme ça juste pour le plaisir de la langue mais c'est tout ça n'est pas plus loin et quand je suis arrivée à Rodès je me suis dit là ma petite il faut que tu fasses quelque chose parce qu'en fait avant Rodès euh Mon mari et moi, on habitait dans le Gard. Et donc, il y avait toute une population d'artistes, de peintres, écrivains, anglo-saxons, américains, anglais, etc. qui me commentaient des pulls. Parce qu'à l'époque, je tricotais à la main. J'avais tricoté pour des amis. Et puis ensuite, je me suis dit, je vais peut-être essayer de gagner quelques sous en tricotant des pulls. Et ça marchait très, très bien. Donc j'ai fait pas mal de salons artisanaux avec mes pulls tricotés main. Et donc c'est arrivé à Vaudèze où là, j'ai plus du tout ce miroir de gens qui me renvoyaient l'image d'une artiste un petit peu, mais bon, d'une créatrice. Et puis bon, j'étais beaucoup plus dans l'ombre de mon mari qui était médecin à l'époque. sur Odesse. C'est à ce moment-là que je suis partie sur Paris avec mon book de photos de tous les pulls que j'avais faits depuis quelques années. J'ai pris des rendez-vous dans tous les bureaux de style, de style imaginable sur Paris. J'ai fait chou blanc, bien sûr, sauf à mon dernier rendez-vous, j'avais un rendez-vous avec Pro Hostile à 6h du soir avant le Vaudi, avec une styliste qui était partie en week-end. Bien sûr, elle avait oublié le rendez-vous. Une parfaite inconnue. Mais j'ai trouvé quelqu'un, pour le faire court, qui m'a orientée vers Rosana Orlandi, qui, à l'époque, dans les années 80, a dirigé le bureau de style de l'affilature de son père, près de Milan. Et le bureau de style Orlandi, c'était le bureau de style qui présentait les collections de fils, mais qui était vraiment le pôle d'attraction de toutes les marques italiennes de haute couture et de prêt-à-porter. Donc je suis allée voir cette dame, qui était à l'époque la paise de la mode et de la maille, et c'est là que j'ai tout appris, qu'on a appris en stage. Un stage qui s'est prolongé sur huit ans. qu'ensuite, ça n'était plus un stage. Je venais l'aider sur les collections, sur quelques jours, plusieurs jours par mois. On m'a prise pour la collaboratrice d'Ozana, parce que je n'étais pas du tout. Et j'ai eu des tas de contacts sur Paris, de maisons de prêt-à-porter, etc. Et voilà, c'est là que tout a commencé.

  • Speaker #1

    Ce qui est intéressant dans votre parcours, je trouve, c'est que la mode paraît être un univers difficile à pénétrer. Et que vous avez fait votre bonhomme de chemin en saisissant les opportunités,

  • Speaker #0

    les rencontres. Oui, alors j'ai fait le chemin. Bon, la mode, maintenant, c'est les podiums, c'est être une star. Mais à l'époque, c'était ça aussi un petit peu. Le métier de styliste était tout nouveau. Marie Beretta, Jean-Paul Gaultier, Sonia Riquel venaient juste d'arriver en tant que designer et avaient introduit après Saint-Laurent l'idée, le concept du prêt-à-porter. Et puis moi, je suis arrivée par le biais de l'industrie quand même, par l'infilature. Et je pense que ce qui a fonctionné, c'est que j'avais... En plus d'un certain talent à manipuler la couleur et une expertise en maille, je connaissais la technique puisque je m'étais frottée au métier, à l'affilature, puis ensuite au métier à tricoter.

  • Speaker #1

    À quel moment est-ce que vous choisissez la maille ?

  • Speaker #0

    Tout de suite, puisque j'ai très vite tricoté. Ma grand-mère m'avait appris à tricoter quand j'étais enfant, mais ensuite je n'ai jamais vraiment tricoté parce que je trouvais ça très ennuyeux. Je n'arrivais jamais à terminer un pull aux Grandes Dames de ma grand-mère. Et puis, ça a démarré quand j'ai fait mon premier voyage en Irlande avec une amie. Pourquoi on a choisi l'Irlande, je ne me souviens pas. Et là, vraiment, je suis tombée amoureuse de ce pays à taille humaine. Et j'ai découvert toute la tradition textile, en fait. Les tweeds, les mailles à rang. J'avais l'intention d'écrire mon journal de voyage parce que c'était mon premier voyage seul en fait, avec une amie. Je me suis mise en tête de tricoter mon journal de voyage. Mon journal de voyage, c'était un panneau de maille qui est devenu une énorme écharpe que je tricotais avec des chutes de fil. des usines de tweed que je mettais bout à bout, que je nouais. Je les nouais avec une certaine architecture de couleurs. Ce qui me fascinait, c'est un peu comme l'écriture automatique en fait, ce qui me fascinait, c'est qu'ensuite, quand ils étaient tricotés, du fait du nœud du tricot, il y avait des harmonies de couleurs complètement différentes. Il y avait d'abord la suite de couleurs. que je faisais avec des noeuds, avec des sections de fil plus ou moins grandes. Ensuite, la mise en plot, qui était encore quelque chose de différent, parce qu'on voyait toutes les couleurs comme ça s'amonceler. Et ensuite, le tricot, qui devenait quelque chose de complètement différent. Je faisais du jersey, je ne faisais pas de maille fantaisie ni quoi que ce soit. Et rien que ça, je trouvais ça fascinant. Et je tricotais un petit bout tous les soirs. tradition myrlandaise qui vous a plongé dedans. Le fait aussi de tricoter une histoire. Là, ce n'était pas une histoire, c'était des fils. Enfin, si, c'était mon histoire à moi. Et a germé l'idée de, plutôt que de faire des pull-unis ou des pulls avec des rayures qui étaient toujours un travail un peu mécanique et monotone, c'était comment C'était peau d'âne en fait, comment faire un pull qui raconte une histoire. Et à l'époque, une de mes meilleures amies a eu un accident. Elle a dû rester allongée avec un corset pendant des mois. Et pour la consoler, avec trois autres amies, on lui a tricoté un pull à 16 mains. Ah non, à 8 mains. qu'on a ensuite assemblée. Donc, il y avait une personne qui faisait le dos, une autre, voilà. Ça a donné une espèce de pull paysage. En plus, c'était vraiment, à l'époque, c'était la fin des années 70, c'était la pleine tendance des pulls paysages. J'avais pu voir en Irlande toute l'histoire, en fait, que chaque point a une signification. C'est comme un mot, c'est comme les pulls que les femmes de pêcheurs tricotent à leur pêcheur de mari. Il a une signification et ça permet aussi de les reconnaître en cas de drame et en cas de naufrage. C'est-à-dire ? C'est-à-dire qu'on reconnaissait, quand les corps n'étaient plus identifiables, on reconnaissait le pêcheur grâce à son pull. Et quand vous dites que chaque point a une stématique ? C'est-à-dire que chaque point a un symbole, c'est comme sur les tapis traditionnels marocains, iraniens, etc. Tout travail textile, chaque motif a une signification, liée souvent à la nature. L'épic blé, le sapin, le chardon, voilà.

  • Speaker #1

    Et donc là, on parle de vous comme la magicienne de la maille.

  • Speaker #0

    Oui, je ne sais pas trop ce que ça veut dire. Oui, je vis des instants de magie, mais ce n'est presque pas moi qui les crée. C'est vrai que c'est vrai. que chaque pièce devient unique dès l'instant où elle est portée par telle ou telle personne. Parce que le vêtement, ça n'est pas rien. C'est bourré de sens. C'est notre deuxième enveloppe. Ça parle. J'adore rencontrer les clientes dans mes boutiques, leur parler, voir comment elles se sont appropriées le vêtement, comment elles le customisent, comment elles le portent avec d'autres. Avec d'autres marques, comment elles le coordonnent avec un pull qui a 10 ans. Parce que c'est ça aussi ce que j'ai découvert au Japon avec le contact de mes clientes japonaises. Elles gardent mes pulls comme leur kimono dans leurs armoires. Et ensuite, quand elles ne peuvent plus les porter, quand elles ont dénu le temps de la transmission et du don, elles en font cadeau à leur fille ou à leur petite-fille.

  • Speaker #1

    Ça, c'est une volonté aussi de votre part, d'avoir une ligne intemporelle, de transgresser les saisons ?

  • Speaker #0

    Oui, même si je suis quand même pas mal imprégnée des tendances, puisque je fais partie du comité français de la couleur. Donc, qu'est-ce que vous y faites ? On est là pour une gamme de couleurs qui sera universelle, qui va... qui va servir à... qui va voyager dans les salons, qui va être... Et dont vont servir les bureaux de style, bien sûr. Qui regroupent, pas des designers comme moi, mais ça peut être des gens de la communication, des architectes, des gens vraiment de tout or. Donc vous, vous avez ce lien avec la couleur de la saison. Oui, oui.

  • Speaker #1

    Mais après, vous vous donnez complètement la liberté de sortir des autres...

  • Speaker #0

    Oui, mais en fait... Le vêtement étant un objet de communication, avant chaque collection, il y a une histoire. Il faut construire une histoire, une espèce de scénario pour qu'un type de femme se dessine. Et donc, s'il y a histoire, il y a gamme de couleurs aussi, il y a un vocabulaire graphique aussi particulier, bien attaché à cette histoire. Tout doit s'abriquer. tout doit avoir un sens même si on laisse aussi au fil de l'élaboration de la collection le hasard mettre un peu de désherbe dans tout ça Est-ce que vos scénarios ce sont ceux des voyages ? Tout ça n'est pas possible Non, c'est quand même un petit peu mais là cet hiver c'est les aurores boréales les pays scandinaves et nordiques d'où les Merci. D'où les vitrines qui sont axées sur les explorateurs polaires. L'été précédent, c'était tout simplement Jacques-Henri Lartigue, les photos de Jacques-Henri Lartigue et la personnalité. La joie de vivre, le bonheur de vivre qui se dégage des photos de cet homme. Vivre d'avant, c'était... Ah oui, alors ça c'est né un petit peu d'une histoire avec une cliente belge. Et elle a acheté un château en Écosse sur Nile. Et donc ça fait quand même quelques années de ça. Ça doit faire 4 ans, 4 ou 5 ans. Et quand je l'ai rencontrée, la première fois que je l'ai rencontrée, elle m'a dit « Ah, mais il faut absolument que vous veniez faire des photos dans mon château, etc. » Et donc, moi qui suis amoureuse des îles anglo-saxonnes, de l'Écosse, de l'Iran, que cette île qui était complètement, presque la plus lointaine des îles Zébrides, j'ai commencé à complètement renverger, à rêver de ça. J'ai fait une collection sur ce rêve, sur la restauration de ce château, avec la découverte des blasons, etc. Et puis encore avant, c'était le Covid, donc là ça a été une collection très particulière, qui s'est faite juste avec ma première assistante. On était tous seuls à travailler dans mon bureau, et là on s'est taxés sur David Hockney. Ah oui, parce que j'avais vu il n'y a pas longtemps, c'est un film plus vieux que ça, mais un film d'un Italien, The Biggest Splash. C'est le titre d'un tableau d'Ockney, avec une comédienne que j'adore, qui est Tilda Swinton. C'était une histoire de piscine, en fait. Au début, j'ai voulu faire une collection un petit peu sur ce décalage entre ce que portait Tilda Swinton dans cette île italienne au large de la Sardaigne, je crois, ou de la Sicile, je ne sais plus. Et puis ensuite, avec le titre du film, je suis venue à David Hockney. Et comme par hasard, quand j'habite à Guesac, et tous les jours quand je le mets au bureau... Il y a une petite route qui, de l'autre côté du Tarn, il y a une petite route qui serpente dans les cerisiers. Et c'est vraiment pas dans les mêmes couleurs, parce que les couleurs du tableau de David Hume, elles sont beaucoup plus fortes. Mais ça me fait penser à un tableau, je ne sais plus qui s'intitule, une petite route qui serpente avec deux, trois palmiers, des petites maisons. Voilà, c'est tout un tas d'associations, d'idées. Puis comme je suis beaucoup en voiture, je conduis beaucoup, je me déplace beaucoup. Donc c'est à ce moment-là que les idées se décantent et qu'il y a des choses qui remontent.

  • Speaker #1

    Et à partir de là, du moment où vous avez l'idée, où vous croisez les idées, comment est-ce que vous travaillez ?

  • Speaker #0

    Alors, avec David Dugnais, c'était facile. On a élaboré une gamme de couleurs vraiment directement inspirées de ces tableaux. avec beaucoup de nuances turquoises à cause des piscines, on a commencé à travailler des dessins de mailles, des jacquards, et des imprimés, puisqu'on était au fait pas mal d'imprimer aussi, basés sous les reflets d'eau de piscine.

  • Speaker #1

    Donc ça c'est avec vos assistantes ? Oui. Votre premier cercle d'assistantes ?

  • Speaker #0

    Voilà, j'ai que deux assistantes. Une assistante qui est très axée à imprimer, et qui m'aide aussi dans la... toute la logistique de la collection. Et puis une assistante qui est avec moi depuis le début, et qui s'est mise à la maille petit à petit, qui elle s'occupe plus particulièrement des mailles. Donc vous dessinez ensemble les premiers modèles ? Oui, les modèles viennent après, les formes viennent après. C'est avant tout, parce qu'en fait on part du fil jusqu'au produit génie. Donc la priorité c'est élaborer la gamme de couleurs pour pouvoir... On choisit nos fils en même temps, en parallèle, mais bon, c'est relativement simple, puisque c'était plus compliqué au moment du Covid parce qu'il n'y avait pas de salon, donc on s'est fait envoyer les collections par l'affiliateur. Mais comme j'ai quand même pas mal de contraintes, à savoir, je prends toujours des fils qui peuvent se laver facilement, ou leur couleur tient. Et puis, j'essaie de prendre au maximum des couleurs naturelles. Donc, c'est des 100% coton, ultra-fins, c'est des mélanges viscoses polyamides. Et donc, la gamme de couleurs pour pouvoir commander toutes les couleurs de façon à pouvoir faire nos coloriages, décider des couleurs et ensuite recommander. parce que bien sûr il y a du déchet, donc on fait une première gamme de couleurs. Très très vite, il faut mettre en place les jacquards et faire les coloriages. Là, il y a des couleurs qui s'éliminent. Et ensuite, on passe aux commandes pour, en vue de fabriquer les modèles. En fait, tout se bouscule un petit peu parce qu'on doit, tant qu'on prévoit les mailles et les imprimés sur des bases de coton, une voile de coton pour l'été, il faut aussi qu'on... construisent la collection et qu'on pense au modèle. Donc même si on a quand même une bonne proportion de pièces qui sont permanentes, un t-shirt reste un t-shirt, on ne va pas changer grand-chose, peut-être l'encolure ou les manches, etc. Il y a quand même un bon pourcentage de modèles nouveaux. Et donc là, il faut les lancer. commencer à les mettre au point en même temps que tout ce travail de mise au point de mailles se fait. Donc la modéliste commence à travailler en fait Quasiment en même temps que nous, on lui donne quand même des idées de nouvelles bases de pull, de pantalon, de manteau, de veste, etc. Ensuite, une fois que les dessins de mailles et d'imprimés sont prêts, on envoie les imprimés. en Italie à faire imprimer sur ce qu'on appelle des pièces, donc une pièce c'est 50 mètres de tissu. Et là par contre on va chez nos tricoteurs qui sont en France pour étudier les coloriages. Et là on passe une hache de deux journées et on revient avec... 10, 8, parfois plus, de coloriage. On se pose au studio, on fait le tri, on fait refaire. Une fois que tout ça est arrêté, que tout ça s'imbrique, que les familles de couleurs... Parce que dans une gamme de couleurs, en fait, on a en général trois histoires de couleurs. On va avoir des froids, des chauds et puis des neutres. Schématiquement, c'est ça. On fait en sorte que tous ces coloriages de mailles rentrent dans ces cases-là. Ensuite, si on a bien commandé le fil à temps pour tricoter une pièce dans chaque jacquard ou chaque maille, on lance la fabrication des premiers modèles de la collection. Et là, c'est des va-et-vient incessants entre le studio et le fabricant. Il va fabriquer, il va tricoter, il va fabriquer, il va confectionner le modèle. Donc ça revient au studio. Il y a des modifications où il n'y en a pas. Parfois la maille ne correspond pas du tout à ce qu'on veut faire en termes de modèle. Donc il faut la refaire, il faut rajouter un fil, il faut l'alléger ou l'allourdir.

  • Speaker #1

    Les fabricants,

  • Speaker #0

    ils sont au puits. Au puits, oui. un petit peu à Rouen et plus récemment en Belgique. Donc la collection, il y a une réunion commerciale au sein de l'entreprise et on lance ce qu'on appelle les SMS, les Salesman Samples, c'est les répétitions pour nos différents agents et showrooms. Ça veut dire qu'on multiplie cette collection, donc ça veut dire en général 80 modèles, accessoires compris. par 9 avec un timing de livraison pour pouvoir ensuite parce que toutes ces répétitions reviennent à Millou pour être vérifiées, validées étiquetées et renvoyées aux différents agents qui vont les présenter en showroom ou au salon donc là tout ce processus c'est l'équivalent de 6 mois c'est ça maintenant ? parce que là pour l'hiver par exemple, on a commencé en juillet par le salon défilateur. Je dois attendre début septembre pour pouvoir faire les premiers essais de file. Donc on commence vraiment, on entame un petit peu en juillet, on brosse le scénario, etc. Et on arrête la collection fin novembre pour faire les prises de vue, parce qu'il y a les prises de vue aussi début décembre. Et pour la pression du lookbook qui nous est livré fin décembre, début janvier.

  • Speaker #1

    Et pour des vêtements qu'on retrouve en boutique ou à la vente ?

  • Speaker #0

    Ils vont être retrouvés en boutique, toute première pièce, fin juillet dans nos boutiques.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous, à un moment dans votre parcours, vous avez ressenti une difficulté, eu affaire à des obstacles ? Parce que vous étiez une femme.

  • Speaker #0

    Obstacle, pas vraiment, mais la première fois que je suis allée au Japon, oui. Les premières fois, j'étais avec une interprète femme. Quand j'ai eu affaire à des grosses sociétés japonaises, des gros groupes japonais, des Ausha, dirigés par des hommes, et que j'étais avec mon époux. Je devenais transparente, ça c'est sûr. Mais pas quand j'étais seule. Professionnellement, non.

  • Speaker #1

    Et même question par rapport Ausha d'être un avéron, d'être loin de Paris, loin du cœur du réacteur. Est-ce que ça a pu être un obstacle pour vous ?

  • Speaker #0

    Ce n'est pas un obstacle, au contraire, je crois. Si, dans la mesure où je... Tant que je peux voyager, ce n'est pas un obstacle. Au contraire, c'est un luxe de pouvoir travailler en plus. Franchement, ça m'inspire de moins en moins. Il y a de moins en moins de créateurs que j'aime, que j'admire.

  • Speaker #1

    C'était qui que vous admirez ?

  • Speaker #0

    Dries Van Noten, ça reste quelqu'un que j'admire beaucoup, même si depuis quelques saisons, ça a beaucoup changé. Il s'est mis à quai, c'était pour moi un vrai créateur. C'était un niveau technique, c'était un inventeur. Comme tout le monde, j'ai adoré, j'ai admiré Chanel, Saint-Laurent, tous les grands d'outre-couture, Palencia, Dior. Et ensuite, Sonia Riquel, ça reste une grande dame, elle a une très belle histoire. Après, il y en a des tas, il y a beaucoup de designers japonais, de maisons comme Cabane de Zucca. Il y a des Italiens aussi, bien sûr. Non, il y en a quand même beaucoup. Il y en reste beaucoup.

  • Speaker #1

    Et j'avais peut-être une question qui n'en est presque pas une. Elle n'est pas formulée telle qu'elle, mais votre travail me donne vraiment l'impression de vous parler de vous comme une créatrice, une designeuse. J'ai l'impression que vous êtes aussi un artisan, une artisane.

  • Speaker #0

    Oui, j'aime pas trop le mot créatrice parce qu'on ne crée rien. On ne crée rien. Personne ne crée rien. Personne. On interprète. On interprète.

  • Speaker #1

    Catherine, je voudrais vous amener sur la dernière question du podcast, qui est une question également rituelle. Donc on commence et on finit par deux questions inamovibles. Et donc celle qui conclut le podcast,

  • Speaker #2

    c'est en quoi est-ce que vous croyez ?

  • Speaker #0

    En quoi ? Ah oui, j'attendais la suite. J'attendais la suite.

  • Speaker #1

    Il n'y en a pas,

  • Speaker #2

    c'est vous qui l'écrivez.

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup de choses. Qu'est-ce que je vais dire en premier ? Je crois en la vie, je crois en l'amour, l'amitié. Vous ne me faites pas rire. J'ai l'air... Je vais vous le dire. Oui, donc c'est simple. La communion avec les gens. Merci beaucoup. C'est peut-être votre regard qui m'émeut, parce que vous avez un regard tellement clair que... Je suis désolée. Mais non,

  • Speaker #2

    il n'y a pas de soucis.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup d'avoir pris ce temps-là, partagé votre parcours.

  • Speaker #2

    Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de la saison 3 de Finta. J'espère qu'il vous a plu et que cette conversation avec Catherine André ouvre votre champ des possibles comme il a ouvert le mien. Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou redécouvrant toutes les femmes pionnières de la première saison sur www.fintapodcast. Sous-titrage Soci ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un tout petit peu le temps. Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par moi-même, Lola, Cross. Il est mixé par Mathieu Viguier du studio Qt. Si vous appréciez Finta et que vous souhaitez soutenir mon travail indépendant, parlez-en autour de vous. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter au podcast. Vous pouvez suivre toute son actualité sur www.fintapodcast.fr sur les réseaux sociaux avec finta.podcast et aussi vous abonner à la newsletter pour recevoir tous les nouveaux épisodes directement dans votre boîte mail. A très bientôt !

Description

Depuis Millau où elle s’est installée, Catherine André s’est fait un nom parmi les grandes maisons du luxe français. On dit d’elle qu’elle est la magicienne de la maille. Elle cite Jane Campion, Marguerite Duras, George Sand comme ses muses. 


Son atelier, dans une ancienne mégisserie, à Millau, et sa dernière boutique, à Rodez, où nous nous sommes retrouvées pour l’enregistrement, soulignent son attachement à cet Aveyron où elle a choisi de vivre pour mieux rayonner à l’international. C’est en suivant son époux, aveyronnais et médecin, qu’elle est arrivée à Rodez d’abord, à Millau ensuite. Sa maison, à Aguessac, c’est son refuge, là où elle aime s’isoler pour créer et puiser son inspiration. Dans les paysages sud-aveyronnais qu’elle sillonne et qui lui rappellent l’Irlande. Mais c’est dans le Nord-Aveyron, sur les causses du Comtal et de l’Aubrac, qu’elle entend réellement le “chant de la terre” aveyronnaise.


Comme toutes les Pionnières de la collection de Finta, je lui ai demandé de commencer par cette phrase, à la manière d’Annick Cojean. Je ne serais pas arrivée là, si…


🎧 Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou redécouvrant les femmes “Pionnières” de la première saison, sur www.fintapodcast.fr ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un peu le temps.


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Finta! c’est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d’agir et des espoirs très concrets à l’échelle locale. Finta! part du département de l’Aveyron pour explorer les voix de la ruralité. Le podcast s’écoute gratuitement sur www.fintapodcast.fr ou sur toutes les plateformes habituelles (Deezer, Spotify, etc). Finta! est un podcast écrit, réalisé et produit par la journaliste indépendante Lola Cros.


Pionnières.

Elles ont défriché des chemins, ouvert des voies, porté une voix en Aveyron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. A partir de la ruralité, qui les a naturellement façonnées, le témoignage de ces « Pionnières » contribue à penser le rapport à l’accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l’enclavement, d’hier à aujourd’hui.  


Et si la journaliste Annick Cojean compare le parcours des femmes à des « courses d’obstacles », la ruralité en est-il un... de plus ? C’est la question, en creux, à laquelle répondent les « Pionnières » que j’ai invitées au micro de Finta!


Après Marie-Thérèse Lacombe, Daniele Puech, Nicole Fagegaltier, Danielle Dastugue, Emmanuelle Gazel, Sarah Singla et Josette Hart, qui se sont livrées dans la première saison des Pionnières, je vous propose de compléter la collection. Aujourd’hui, avec Catherine André.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Le métier de styliste était tout nouveau. Marie Beretta, Jean-Paul Gaultier, Sonia Riquel venaient juste d'arriver en tant que designer et avaient introduit, après Saint-Laurent, l'idée du concept du prêt-à-porter. Et puis moi, je suis arrivée par le biais de l'industrie, par les filatures. Et je pense que ce qui a fonctionné, c'est que je connaissais la technique, puisque je m'étais frottée. au métier, à la filature, puis ensuite au métier à tricoter. Hé, finit ! Finit !

  • Speaker #1

    Elles ont dépêché des chemins, ouvert des voies, porté une voie, en avéron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. À partir de la ruralité qui les a naturellement façonnées, Le témoignage de ces pionnières contribue à penser le rapport à l'accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l'enclavement d'hier jusqu'à aujourd'hui. Et si la journaliste Annick Cogent compare le parcours des femmes à des courtes d'obstacles, la ruralité en serait-il un de plus ? C'est la question, en creux, à laquelle répondent les pionnières que j'ai invitées au micro de Finta. Après Marie-Thérèse Lacombe, Daniel Puèche, Nicole Fagegaltier, Daniel Dastug, Emmanuel Gazel, Sarah Sengla et Josette Hart, qui se sont livrées dans la première saison des Pionnières, je vous propose de compléter la collection. Aujourd'hui, avec Catherine André. Depuis Millau, où elle s'est installée, Catherine André s'est faite un nom parmi les grandes maisons du luxe français. On dit d'elle qu'elle est la magicienne de la maille. Elle, cite Jeanne Campion, Marguerite Duras, Georges Sand, comme ses muses. Son atelier dans une ancienne mégisserie, à Millau, et sa dernière boutique, à Rodez, où nous nous sommes retrouvés pour cet enregistrement, soulignent son attachement à cet Aveyron où elle a choisi de vivre, pour mieux rayonner à l'international. C'est en suivant son époux, Aveyroné et Médecin, qu'elle est arrivée à Rodez d'abord, à Millau ensuite. Sa maison, à Aguesac, c'est son refuge. Là où elle aime s'isoler pour créer et puiser son inspiration, dans les paysages sud-avéronnés qu'elle sillonne et qui lui rappelle l'Irlande. Mais c'est dans le nord-Aveyron, sur les costes du Contal et de l'Aubrac, qu'elle entend réellement le chant de la terre avéronnaise. Comme toutes les pionnières de la collection de Finta, je lui ai demandé de commencer par cette phrase, à la manière d'Anik Kojan. Je ne serais pas arrivée là si...

  • Speaker #0

    Et bien, si je n'étais pas arrivée en Aveyron, dans le nord Aveyron, particulièrement à Rodez, si je n'avais pas voyagé en Écosse et en Irlande, si je n'avais pas rencontré mon mari, s'il y en a des tas, des tas d'autres, mais ce sont ceux qui me viennent à l'esprit là.

  • Speaker #1

    Donc si on revient à la mode qui est... au cœur de votre métier. Vous avez créé votre marque il y a presque 30 ans.

  • Speaker #0

    Maintenant, en 1995.

  • Speaker #1

    Anne Millot, elle vient d'où cette vocation ?

  • Speaker #0

    De créer une entreprise, ce n'était pas une envie, ce n'était pas quelque chose de prévu, ce n'était pas un projet construit, etc. C'est que depuis 1980, je me suis trouvée... parachutée dans le milieu de l'industrie du textile et donc de la mode. Et donc j'ai travaillé pendant pas loin de 20 ans, pendant 15 ans, en freelance auprès de designers, de quelques couturiers, en tant que... enfin je fondais des maillettes de mailles, et auprès des filatures en tant que conseil. maille et conseil, conseil couleur et fil. Je n'ai jamais été salariée, j'ai toujours été indépendante. Et puis, je pense que c'est la naissance de mes deux garçons qui m'ont fait réaliser que ce que je faisais, en fait, ce travail de conseil que j'adorais, je voyageais en Italie, j'étais tout le temps à Paris, je rencontrais une faune complètement atypique. très particulier, l'univers du textile. Et puis, j'ai eu mes deux garçons, et là, je me suis dit quand même que je trouvais que je faisais des choses bien, je m'occupais des choses bien futiles. Et c'est mon mari qui... Non, oui, en fait, c'est... Je m'étais liée d'amitié avec Claude Barthélémy, qui était véronais d'origine, que j'avais rencontré parce qu'il faisait partie de mes clients, mais il ne m'avait jamais rien acheté. Et puis un week-end, il nous invite chez lui, près de Villefranche-Panna. Et puis au bout d'une longue soirée de discussion, au petit matin, il me dit « Catherine, arrête de faire ce que tu fais, monte, arrête de vendre tes dessins. » Fais ta collection, tu as tout ce qu'il faut pour faire ta collection. Avec Jean-Luc, mon mari, on me demande, mais ça c'est peut-être un peu compliqué, comment il faut faire ? On ne sait pas du tout. C'est simple, tu auras bien un filateur, un fabricant qui va t'aider pour ta première collection. Tu ne paieras pas les frais de développement. Tu prends un tout petit stand au salon du prêt-à-porter. Et si tu vends 500 pièces, ça veut dire que tu as une place sur le marché. Donc c'est ce qu'on a fait. J'ai fait une collection et on a vendu plus de 500 pièces. On a vendu 1000 pièces. Donc il y a eu un gros succès. Sauf qu'on ne savait pas du tout ce que c'était qu'une latte de crédit, puisqu'on avait quand même une grosse commande de japonais. que mon mari avait pris dans une cabine téléphonique sur un bord d'autoroute. Moi, je ne me voyais pas du tout à la tête d'une entreprise, donc je me reposais complètement sur les épaules de mon mari qui avait son cabinet de pédopsychiatre. Donc il venait jeter un coup d'œil. Il vérifiait et regardait la compta quand même. Et en Bonavérona, il est quand même perclu de mon sens. On a tout de suite vendu à l'export. Comme on a eu cette grosse commande de japonais, on a cherché comment faire un salon au Japon. Et on a eu notre première clientèle, surtout japonaise en fait, finalement.

  • Speaker #1

    Là, c'est toujours l'essentiel de votre activité,

  • Speaker #0

    l'export ? Oui. Plus avec nos boutiques maintenant, puisque avec nos quatre boutiques, c'est à peu près l'équivalent de ce qu'on fait, l'export.

  • Speaker #1

    La mode, vous ne vous y destinez pas ? Initialement, en sortie d'études en tout cas.

  • Speaker #0

    Je n'ai pas fait d'études de mode du tout. Comment vous avez alors ri ? J'ai appris sur le tas. J'ai fait une année de beaux-arts, parce qu'à ce moment-là, ça me trottait un peu dans la tête de faire quelque chose. de ma vie parce que j'ai jamais eu aucune ambition je suis partie en fac de lettres parce que j'avais envie de parler les langues étrangères peut-être pour voyager mais voilà comme ça juste pour le plaisir de la langue mais c'est tout ça n'est pas plus loin et quand je suis arrivée à Rodès je me suis dit là ma petite il faut que tu fasses quelque chose parce qu'en fait avant Rodès euh Mon mari et moi, on habitait dans le Gard. Et donc, il y avait toute une population d'artistes, de peintres, écrivains, anglo-saxons, américains, anglais, etc. qui me commentaient des pulls. Parce qu'à l'époque, je tricotais à la main. J'avais tricoté pour des amis. Et puis ensuite, je me suis dit, je vais peut-être essayer de gagner quelques sous en tricotant des pulls. Et ça marchait très, très bien. Donc j'ai fait pas mal de salons artisanaux avec mes pulls tricotés main. Et donc c'est arrivé à Vaudèze où là, j'ai plus du tout ce miroir de gens qui me renvoyaient l'image d'une artiste un petit peu, mais bon, d'une créatrice. Et puis bon, j'étais beaucoup plus dans l'ombre de mon mari qui était médecin à l'époque. sur Odesse. C'est à ce moment-là que je suis partie sur Paris avec mon book de photos de tous les pulls que j'avais faits depuis quelques années. J'ai pris des rendez-vous dans tous les bureaux de style, de style imaginable sur Paris. J'ai fait chou blanc, bien sûr, sauf à mon dernier rendez-vous, j'avais un rendez-vous avec Pro Hostile à 6h du soir avant le Vaudi, avec une styliste qui était partie en week-end. Bien sûr, elle avait oublié le rendez-vous. Une parfaite inconnue. Mais j'ai trouvé quelqu'un, pour le faire court, qui m'a orientée vers Rosana Orlandi, qui, à l'époque, dans les années 80, a dirigé le bureau de style de l'affilature de son père, près de Milan. Et le bureau de style Orlandi, c'était le bureau de style qui présentait les collections de fils, mais qui était vraiment le pôle d'attraction de toutes les marques italiennes de haute couture et de prêt-à-porter. Donc je suis allée voir cette dame, qui était à l'époque la paise de la mode et de la maille, et c'est là que j'ai tout appris, qu'on a appris en stage. Un stage qui s'est prolongé sur huit ans. qu'ensuite, ça n'était plus un stage. Je venais l'aider sur les collections, sur quelques jours, plusieurs jours par mois. On m'a prise pour la collaboratrice d'Ozana, parce que je n'étais pas du tout. Et j'ai eu des tas de contacts sur Paris, de maisons de prêt-à-porter, etc. Et voilà, c'est là que tout a commencé.

  • Speaker #1

    Ce qui est intéressant dans votre parcours, je trouve, c'est que la mode paraît être un univers difficile à pénétrer. Et que vous avez fait votre bonhomme de chemin en saisissant les opportunités,

  • Speaker #0

    les rencontres. Oui, alors j'ai fait le chemin. Bon, la mode, maintenant, c'est les podiums, c'est être une star. Mais à l'époque, c'était ça aussi un petit peu. Le métier de styliste était tout nouveau. Marie Beretta, Jean-Paul Gaultier, Sonia Riquel venaient juste d'arriver en tant que designer et avaient introduit après Saint-Laurent l'idée, le concept du prêt-à-porter. Et puis moi, je suis arrivée par le biais de l'industrie quand même, par l'infilature. Et je pense que ce qui a fonctionné, c'est que j'avais... En plus d'un certain talent à manipuler la couleur et une expertise en maille, je connaissais la technique puisque je m'étais frottée au métier, à l'affilature, puis ensuite au métier à tricoter.

  • Speaker #1

    À quel moment est-ce que vous choisissez la maille ?

  • Speaker #0

    Tout de suite, puisque j'ai très vite tricoté. Ma grand-mère m'avait appris à tricoter quand j'étais enfant, mais ensuite je n'ai jamais vraiment tricoté parce que je trouvais ça très ennuyeux. Je n'arrivais jamais à terminer un pull aux Grandes Dames de ma grand-mère. Et puis, ça a démarré quand j'ai fait mon premier voyage en Irlande avec une amie. Pourquoi on a choisi l'Irlande, je ne me souviens pas. Et là, vraiment, je suis tombée amoureuse de ce pays à taille humaine. Et j'ai découvert toute la tradition textile, en fait. Les tweeds, les mailles à rang. J'avais l'intention d'écrire mon journal de voyage parce que c'était mon premier voyage seul en fait, avec une amie. Je me suis mise en tête de tricoter mon journal de voyage. Mon journal de voyage, c'était un panneau de maille qui est devenu une énorme écharpe que je tricotais avec des chutes de fil. des usines de tweed que je mettais bout à bout, que je nouais. Je les nouais avec une certaine architecture de couleurs. Ce qui me fascinait, c'est un peu comme l'écriture automatique en fait, ce qui me fascinait, c'est qu'ensuite, quand ils étaient tricotés, du fait du nœud du tricot, il y avait des harmonies de couleurs complètement différentes. Il y avait d'abord la suite de couleurs. que je faisais avec des noeuds, avec des sections de fil plus ou moins grandes. Ensuite, la mise en plot, qui était encore quelque chose de différent, parce qu'on voyait toutes les couleurs comme ça s'amonceler. Et ensuite, le tricot, qui devenait quelque chose de complètement différent. Je faisais du jersey, je ne faisais pas de maille fantaisie ni quoi que ce soit. Et rien que ça, je trouvais ça fascinant. Et je tricotais un petit bout tous les soirs. tradition myrlandaise qui vous a plongé dedans. Le fait aussi de tricoter une histoire. Là, ce n'était pas une histoire, c'était des fils. Enfin, si, c'était mon histoire à moi. Et a germé l'idée de, plutôt que de faire des pull-unis ou des pulls avec des rayures qui étaient toujours un travail un peu mécanique et monotone, c'était comment C'était peau d'âne en fait, comment faire un pull qui raconte une histoire. Et à l'époque, une de mes meilleures amies a eu un accident. Elle a dû rester allongée avec un corset pendant des mois. Et pour la consoler, avec trois autres amies, on lui a tricoté un pull à 16 mains. Ah non, à 8 mains. qu'on a ensuite assemblée. Donc, il y avait une personne qui faisait le dos, une autre, voilà. Ça a donné une espèce de pull paysage. En plus, c'était vraiment, à l'époque, c'était la fin des années 70, c'était la pleine tendance des pulls paysages. J'avais pu voir en Irlande toute l'histoire, en fait, que chaque point a une signification. C'est comme un mot, c'est comme les pulls que les femmes de pêcheurs tricotent à leur pêcheur de mari. Il a une signification et ça permet aussi de les reconnaître en cas de drame et en cas de naufrage. C'est-à-dire ? C'est-à-dire qu'on reconnaissait, quand les corps n'étaient plus identifiables, on reconnaissait le pêcheur grâce à son pull. Et quand vous dites que chaque point a une stématique ? C'est-à-dire que chaque point a un symbole, c'est comme sur les tapis traditionnels marocains, iraniens, etc. Tout travail textile, chaque motif a une signification, liée souvent à la nature. L'épic blé, le sapin, le chardon, voilà.

  • Speaker #1

    Et donc là, on parle de vous comme la magicienne de la maille.

  • Speaker #0

    Oui, je ne sais pas trop ce que ça veut dire. Oui, je vis des instants de magie, mais ce n'est presque pas moi qui les crée. C'est vrai que c'est vrai. que chaque pièce devient unique dès l'instant où elle est portée par telle ou telle personne. Parce que le vêtement, ça n'est pas rien. C'est bourré de sens. C'est notre deuxième enveloppe. Ça parle. J'adore rencontrer les clientes dans mes boutiques, leur parler, voir comment elles se sont appropriées le vêtement, comment elles le customisent, comment elles le portent avec d'autres. Avec d'autres marques, comment elles le coordonnent avec un pull qui a 10 ans. Parce que c'est ça aussi ce que j'ai découvert au Japon avec le contact de mes clientes japonaises. Elles gardent mes pulls comme leur kimono dans leurs armoires. Et ensuite, quand elles ne peuvent plus les porter, quand elles ont dénu le temps de la transmission et du don, elles en font cadeau à leur fille ou à leur petite-fille.

  • Speaker #1

    Ça, c'est une volonté aussi de votre part, d'avoir une ligne intemporelle, de transgresser les saisons ?

  • Speaker #0

    Oui, même si je suis quand même pas mal imprégnée des tendances, puisque je fais partie du comité français de la couleur. Donc, qu'est-ce que vous y faites ? On est là pour une gamme de couleurs qui sera universelle, qui va... qui va servir à... qui va voyager dans les salons, qui va être... Et dont vont servir les bureaux de style, bien sûr. Qui regroupent, pas des designers comme moi, mais ça peut être des gens de la communication, des architectes, des gens vraiment de tout or. Donc vous, vous avez ce lien avec la couleur de la saison. Oui, oui.

  • Speaker #1

    Mais après, vous vous donnez complètement la liberté de sortir des autres...

  • Speaker #0

    Oui, mais en fait... Le vêtement étant un objet de communication, avant chaque collection, il y a une histoire. Il faut construire une histoire, une espèce de scénario pour qu'un type de femme se dessine. Et donc, s'il y a histoire, il y a gamme de couleurs aussi, il y a un vocabulaire graphique aussi particulier, bien attaché à cette histoire. Tout doit s'abriquer. tout doit avoir un sens même si on laisse aussi au fil de l'élaboration de la collection le hasard mettre un peu de désherbe dans tout ça Est-ce que vos scénarios ce sont ceux des voyages ? Tout ça n'est pas possible Non, c'est quand même un petit peu mais là cet hiver c'est les aurores boréales les pays scandinaves et nordiques d'où les Merci. D'où les vitrines qui sont axées sur les explorateurs polaires. L'été précédent, c'était tout simplement Jacques-Henri Lartigue, les photos de Jacques-Henri Lartigue et la personnalité. La joie de vivre, le bonheur de vivre qui se dégage des photos de cet homme. Vivre d'avant, c'était... Ah oui, alors ça c'est né un petit peu d'une histoire avec une cliente belge. Et elle a acheté un château en Écosse sur Nile. Et donc ça fait quand même quelques années de ça. Ça doit faire 4 ans, 4 ou 5 ans. Et quand je l'ai rencontrée, la première fois que je l'ai rencontrée, elle m'a dit « Ah, mais il faut absolument que vous veniez faire des photos dans mon château, etc. » Et donc, moi qui suis amoureuse des îles anglo-saxonnes, de l'Écosse, de l'Iran, que cette île qui était complètement, presque la plus lointaine des îles Zébrides, j'ai commencé à complètement renverger, à rêver de ça. J'ai fait une collection sur ce rêve, sur la restauration de ce château, avec la découverte des blasons, etc. Et puis encore avant, c'était le Covid, donc là ça a été une collection très particulière, qui s'est faite juste avec ma première assistante. On était tous seuls à travailler dans mon bureau, et là on s'est taxés sur David Hockney. Ah oui, parce que j'avais vu il n'y a pas longtemps, c'est un film plus vieux que ça, mais un film d'un Italien, The Biggest Splash. C'est le titre d'un tableau d'Ockney, avec une comédienne que j'adore, qui est Tilda Swinton. C'était une histoire de piscine, en fait. Au début, j'ai voulu faire une collection un petit peu sur ce décalage entre ce que portait Tilda Swinton dans cette île italienne au large de la Sardaigne, je crois, ou de la Sicile, je ne sais plus. Et puis ensuite, avec le titre du film, je suis venue à David Hockney. Et comme par hasard, quand j'habite à Guesac, et tous les jours quand je le mets au bureau... Il y a une petite route qui, de l'autre côté du Tarn, il y a une petite route qui serpente dans les cerisiers. Et c'est vraiment pas dans les mêmes couleurs, parce que les couleurs du tableau de David Hume, elles sont beaucoup plus fortes. Mais ça me fait penser à un tableau, je ne sais plus qui s'intitule, une petite route qui serpente avec deux, trois palmiers, des petites maisons. Voilà, c'est tout un tas d'associations, d'idées. Puis comme je suis beaucoup en voiture, je conduis beaucoup, je me déplace beaucoup. Donc c'est à ce moment-là que les idées se décantent et qu'il y a des choses qui remontent.

  • Speaker #1

    Et à partir de là, du moment où vous avez l'idée, où vous croisez les idées, comment est-ce que vous travaillez ?

  • Speaker #0

    Alors, avec David Dugnais, c'était facile. On a élaboré une gamme de couleurs vraiment directement inspirées de ces tableaux. avec beaucoup de nuances turquoises à cause des piscines, on a commencé à travailler des dessins de mailles, des jacquards, et des imprimés, puisqu'on était au fait pas mal d'imprimer aussi, basés sous les reflets d'eau de piscine.

  • Speaker #1

    Donc ça c'est avec vos assistantes ? Oui. Votre premier cercle d'assistantes ?

  • Speaker #0

    Voilà, j'ai que deux assistantes. Une assistante qui est très axée à imprimer, et qui m'aide aussi dans la... toute la logistique de la collection. Et puis une assistante qui est avec moi depuis le début, et qui s'est mise à la maille petit à petit, qui elle s'occupe plus particulièrement des mailles. Donc vous dessinez ensemble les premiers modèles ? Oui, les modèles viennent après, les formes viennent après. C'est avant tout, parce qu'en fait on part du fil jusqu'au produit génie. Donc la priorité c'est élaborer la gamme de couleurs pour pouvoir... On choisit nos fils en même temps, en parallèle, mais bon, c'est relativement simple, puisque c'était plus compliqué au moment du Covid parce qu'il n'y avait pas de salon, donc on s'est fait envoyer les collections par l'affiliateur. Mais comme j'ai quand même pas mal de contraintes, à savoir, je prends toujours des fils qui peuvent se laver facilement, ou leur couleur tient. Et puis, j'essaie de prendre au maximum des couleurs naturelles. Donc, c'est des 100% coton, ultra-fins, c'est des mélanges viscoses polyamides. Et donc, la gamme de couleurs pour pouvoir commander toutes les couleurs de façon à pouvoir faire nos coloriages, décider des couleurs et ensuite recommander. parce que bien sûr il y a du déchet, donc on fait une première gamme de couleurs. Très très vite, il faut mettre en place les jacquards et faire les coloriages. Là, il y a des couleurs qui s'éliminent. Et ensuite, on passe aux commandes pour, en vue de fabriquer les modèles. En fait, tout se bouscule un petit peu parce qu'on doit, tant qu'on prévoit les mailles et les imprimés sur des bases de coton, une voile de coton pour l'été, il faut aussi qu'on... construisent la collection et qu'on pense au modèle. Donc même si on a quand même une bonne proportion de pièces qui sont permanentes, un t-shirt reste un t-shirt, on ne va pas changer grand-chose, peut-être l'encolure ou les manches, etc. Il y a quand même un bon pourcentage de modèles nouveaux. Et donc là, il faut les lancer. commencer à les mettre au point en même temps que tout ce travail de mise au point de mailles se fait. Donc la modéliste commence à travailler en fait Quasiment en même temps que nous, on lui donne quand même des idées de nouvelles bases de pull, de pantalon, de manteau, de veste, etc. Ensuite, une fois que les dessins de mailles et d'imprimés sont prêts, on envoie les imprimés. en Italie à faire imprimer sur ce qu'on appelle des pièces, donc une pièce c'est 50 mètres de tissu. Et là par contre on va chez nos tricoteurs qui sont en France pour étudier les coloriages. Et là on passe une hache de deux journées et on revient avec... 10, 8, parfois plus, de coloriage. On se pose au studio, on fait le tri, on fait refaire. Une fois que tout ça est arrêté, que tout ça s'imbrique, que les familles de couleurs... Parce que dans une gamme de couleurs, en fait, on a en général trois histoires de couleurs. On va avoir des froids, des chauds et puis des neutres. Schématiquement, c'est ça. On fait en sorte que tous ces coloriages de mailles rentrent dans ces cases-là. Ensuite, si on a bien commandé le fil à temps pour tricoter une pièce dans chaque jacquard ou chaque maille, on lance la fabrication des premiers modèles de la collection. Et là, c'est des va-et-vient incessants entre le studio et le fabricant. Il va fabriquer, il va tricoter, il va fabriquer, il va confectionner le modèle. Donc ça revient au studio. Il y a des modifications où il n'y en a pas. Parfois la maille ne correspond pas du tout à ce qu'on veut faire en termes de modèle. Donc il faut la refaire, il faut rajouter un fil, il faut l'alléger ou l'allourdir.

  • Speaker #1

    Les fabricants,

  • Speaker #0

    ils sont au puits. Au puits, oui. un petit peu à Rouen et plus récemment en Belgique. Donc la collection, il y a une réunion commerciale au sein de l'entreprise et on lance ce qu'on appelle les SMS, les Salesman Samples, c'est les répétitions pour nos différents agents et showrooms. Ça veut dire qu'on multiplie cette collection, donc ça veut dire en général 80 modèles, accessoires compris. par 9 avec un timing de livraison pour pouvoir ensuite parce que toutes ces répétitions reviennent à Millou pour être vérifiées, validées étiquetées et renvoyées aux différents agents qui vont les présenter en showroom ou au salon donc là tout ce processus c'est l'équivalent de 6 mois c'est ça maintenant ? parce que là pour l'hiver par exemple, on a commencé en juillet par le salon défilateur. Je dois attendre début septembre pour pouvoir faire les premiers essais de file. Donc on commence vraiment, on entame un petit peu en juillet, on brosse le scénario, etc. Et on arrête la collection fin novembre pour faire les prises de vue, parce qu'il y a les prises de vue aussi début décembre. Et pour la pression du lookbook qui nous est livré fin décembre, début janvier.

  • Speaker #1

    Et pour des vêtements qu'on retrouve en boutique ou à la vente ?

  • Speaker #0

    Ils vont être retrouvés en boutique, toute première pièce, fin juillet dans nos boutiques.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous, à un moment dans votre parcours, vous avez ressenti une difficulté, eu affaire à des obstacles ? Parce que vous étiez une femme.

  • Speaker #0

    Obstacle, pas vraiment, mais la première fois que je suis allée au Japon, oui. Les premières fois, j'étais avec une interprète femme. Quand j'ai eu affaire à des grosses sociétés japonaises, des gros groupes japonais, des Ausha, dirigés par des hommes, et que j'étais avec mon époux. Je devenais transparente, ça c'est sûr. Mais pas quand j'étais seule. Professionnellement, non.

  • Speaker #1

    Et même question par rapport Ausha d'être un avéron, d'être loin de Paris, loin du cœur du réacteur. Est-ce que ça a pu être un obstacle pour vous ?

  • Speaker #0

    Ce n'est pas un obstacle, au contraire, je crois. Si, dans la mesure où je... Tant que je peux voyager, ce n'est pas un obstacle. Au contraire, c'est un luxe de pouvoir travailler en plus. Franchement, ça m'inspire de moins en moins. Il y a de moins en moins de créateurs que j'aime, que j'admire.

  • Speaker #1

    C'était qui que vous admirez ?

  • Speaker #0

    Dries Van Noten, ça reste quelqu'un que j'admire beaucoup, même si depuis quelques saisons, ça a beaucoup changé. Il s'est mis à quai, c'était pour moi un vrai créateur. C'était un niveau technique, c'était un inventeur. Comme tout le monde, j'ai adoré, j'ai admiré Chanel, Saint-Laurent, tous les grands d'outre-couture, Palencia, Dior. Et ensuite, Sonia Riquel, ça reste une grande dame, elle a une très belle histoire. Après, il y en a des tas, il y a beaucoup de designers japonais, de maisons comme Cabane de Zucca. Il y a des Italiens aussi, bien sûr. Non, il y en a quand même beaucoup. Il y en reste beaucoup.

  • Speaker #1

    Et j'avais peut-être une question qui n'en est presque pas une. Elle n'est pas formulée telle qu'elle, mais votre travail me donne vraiment l'impression de vous parler de vous comme une créatrice, une designeuse. J'ai l'impression que vous êtes aussi un artisan, une artisane.

  • Speaker #0

    Oui, j'aime pas trop le mot créatrice parce qu'on ne crée rien. On ne crée rien. Personne ne crée rien. Personne. On interprète. On interprète.

  • Speaker #1

    Catherine, je voudrais vous amener sur la dernière question du podcast, qui est une question également rituelle. Donc on commence et on finit par deux questions inamovibles. Et donc celle qui conclut le podcast,

  • Speaker #2

    c'est en quoi est-ce que vous croyez ?

  • Speaker #0

    En quoi ? Ah oui, j'attendais la suite. J'attendais la suite.

  • Speaker #1

    Il n'y en a pas,

  • Speaker #2

    c'est vous qui l'écrivez.

  • Speaker #0

    Il y a beaucoup de choses. Qu'est-ce que je vais dire en premier ? Je crois en la vie, je crois en l'amour, l'amitié. Vous ne me faites pas rire. J'ai l'air... Je vais vous le dire. Oui, donc c'est simple. La communion avec les gens. Merci beaucoup. C'est peut-être votre regard qui m'émeut, parce que vous avez un regard tellement clair que... Je suis désolée. Mais non,

  • Speaker #2

    il n'y a pas de soucis.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup d'avoir pris ce temps-là, partagé votre parcours.

  • Speaker #2

    Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de la saison 3 de Finta. J'espère qu'il vous a plu et que cette conversation avec Catherine André ouvre votre champ des possibles comme il a ouvert le mien. Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou redécouvrant toutes les femmes pionnières de la première saison sur www.fintapodcast. Sous-titrage Soci ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un tout petit peu le temps. Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par moi-même, Lola, Cross. Il est mixé par Mathieu Viguier du studio Qt. Si vous appréciez Finta et que vous souhaitez soutenir mon travail indépendant, parlez-en autour de vous. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter au podcast. Vous pouvez suivre toute son actualité sur www.fintapodcast.fr sur les réseaux sociaux avec finta.podcast et aussi vous abonner à la newsletter pour recevoir tous les nouveaux épisodes directement dans votre boîte mail. A très bientôt !

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