#Pionnières #13 Audrey Girmens, pour pousser les portes du numérique aux jeunes filles cover
#Pionnières #13 Audrey Girmens, pour pousser les portes du numérique aux jeunes filles cover
Finta! L'Aveyron par ses voix

#Pionnières #13 Audrey Girmens, pour pousser les portes du numérique aux jeunes filles

#Pionnières #13 Audrey Girmens, pour pousser les portes du numérique aux jeunes filles

24min |16/03/2024
Play
#Pionnières #13 Audrey Girmens, pour pousser les portes du numérique aux jeunes filles cover
#Pionnières #13 Audrey Girmens, pour pousser les portes du numérique aux jeunes filles cover
Finta! L'Aveyron par ses voix

#Pionnières #13 Audrey Girmens, pour pousser les portes du numérique aux jeunes filles

#Pionnières #13 Audrey Girmens, pour pousser les portes du numérique aux jeunes filles

24min |16/03/2024
Play

Description

Après Marie-Thérèse Lacombe, Nicole Fagegaltier, Danièle Dastugue, Danielle Puech, Sarah Singla, Emmanuelle Gazel et Josette Hart, dans la première saison, Ginette Marchive, Pauline Broqua, Audrey Dussutour et Catherine André, dans la deuxième saison, et Yseulys Costes, je vous propose d’embarquer pour une troisième saison des Pionnières. Aujourd’hui, avec Audrey Girmens.


On pourrait les compter aisément sur les doigts d’une seule main. Les femmes dirigeantes dans l’univers du numérique ne sont, en Aveyron comme ailleurs, pas légion. A la tête d’Inforsud Technologies, poids lourd du secteur dans le département, Audrey Girmens fait partie de celles-là.


De sa mère geek et pionnière, qui lui a donné le goût des jeux vidéos, jusqu’à ses premières expériences numériques, avant même la naissance d’internet, Audrey Girmens le dit elle-même, elle a pris l’ascenseur social. De longues études et des échelons gravis un à un, elle a tracé sa route sans pertes ni fracas. Avec, pour seul espoir, d’emmener d’autres filles dans son sillage.


Loin d’apprécier la maigre représentation féminine dans ses rangs, Audrey Girmens s’est engagée, de longue date, pour faire connaître toutes les facettes du numérique et espérer ainsi créer des vocations auprès des jeunes filles. A son échelle, elle est le modèle féminin dont elle a manqué.


Cet épisode a été enregistré avec les Wifilles, un groupe de collégiennes des Quatre-Saisons à Onet-le-Château, engagées dans un programme de découverte des métiers du numérique, mené en partenariat avec l’association Face Aveyron-Tarn. Merci à Marion Roch, pour sa supervision, à Jean-François, leur professeur de technologie, et à Victoria Bouyssi, la CPE du collège castonétois, pour leur participation active en coulisses.

Bonne écoute !


Episode enregistré en décembre 2023.


Finta est un podcast réalisé, produit et écrit par Lola Cros. Il est mixé par le studio Qude. Plus d'infos : www.fintapodcast.fr Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Elles ont défriché des chemins, ouvert des voies, porté une voie, en avéron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. À partir de la ruralité qui les a naturellement façonnées, le témoignage de ces pionnières contribue à penser le rapport à l'accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l'enclavement. D'hier jusqu'à aujourd'hui. Et si la journaliste Annick Cogent compare le parcours des femmes à des courses d'obstacles, la ruralité en serait-il un de plus ? C'est la question, en creux, à laquelle répondent les pionnières que j'ai invitées au micro de Finta. Après Marie-Thérèse Lacombe, Nicole Fage-Galtier, Daniel Dastugue, Daniel Puech, Sarah Sengla, Emmanuelle Gazel et Josette Hart dans la première saison, Ginette Marchive, Pauline Broca... Audrey Dussutour et Catherine André dans la deuxième saison. Je vous propose d'embarquer pour une troisième saison des pionnières. Aujourd'hui, avec Audrey Germain. On pourrait les compter aisément sur les doigts d'une seule main. Les femmes dirigeantes dans l'univers du numérique ne sont, en avérons comme ailleurs, pas légion. À la tête d'un forçu de technologie, poids lourd du secteur dans le département, Audrey Germain fait partie de celle-là.

  • Speaker #1

    De sa mère geek et pionnière qui lui a donné le goût. des jeux vidéo jusqu'à ses premières expériences numériques, avant même la naissance d'Internet. De longues études et des échelons gravis un à un, elle a traversé sa route sans perte ni fracas, avec pour un seul espoir d'amener d'autres filles dans son sillage. Loin d'apprécier la maigre représentation féminine dans ses rangs, Audrey Germain s'est engagée de longue date pour faire connaître toutes les facettes du numérique et espérer ainsi créer des vocations auprès des jeunes filles. À son échelle, elle est le modèle féminin dont elle a manqué. Loli Rose, Calixtine, Yasmine, Lina, Rojda, Chaynez.

  • Speaker #0

    Cet épisode a été enregistré avec les 8 filles, un groupe de collégiennes des 4 saisons à O'Neill Ausha, engagés dans un programme de découverte des métiers du numérique mené en partenariat avec l'association Face à Vérontharne. Merci à Marion Roch pour sa supervision, à Jean-François Segon, leur professeur de technologie, et à Victoria Bouissi, la CPE du Collège Caston-Étoile, pour leur participation active en coulisses. Bonne époute.

  • Speaker #1

    Pour commencer, nous voudrions vous demander pourquoi. Pourquoi avez-vous accepté de jouer ce jeu aujourd'hui avec nous et de répondre à nos questions ?

  • Speaker #2

    C'est un engagement qui me suit depuis plusieurs années. j'ai eu la chance de profiter de l'ascenseur social. Et donc je trouve normal de rendre à la société ce qu'elle m'a rendu. Ça c'est un premier objectif. Et le deuxième objectif, c'est que je travaille dans le milieu du numérique et que nous sommes très peu de femmes dans le milieu du numérique. Probablement parce qu'il y a une difficulté sur l'image et la représentation des femmes dans l'informatique. Et du coup, je trouve normal de témoigner, de participer à des événements et d'être là avec vous pour vous expliquer comment fonctionnent les femmes dans le milieu de l'informatique, par exemple.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est Audrey Gemmes qui nous parle ou la directrice d'Infosud Technologies ?

  • Speaker #2

    Ah, ça c'est difficile. Dans l'entreprise, je leur fais souvent la blague à mes collaborateurs de savoir avec quelle casquette je parle, parce qu'il y en a plusieurs. Et donc entre Audrey Germain et la directrice générale, c'est à la fois les deux. Il y a toujours un peu de personnel, mais il y a aussi de la représentation de l'entreprise. Mais l'engagement, il est surtout personnel. Je ne suis pas sûre que d'autres directeurs dans le milieu informatique feraient la même chose ou d'autres directrices dans d'autres milieux feraient la même chose. Donc c'est avant tout d'abord un engagement personnel.

  • Speaker #1

    Si l'on remonte dans le temps et que l'on se retrouve au début des années 90, Vous aviez notre âge, 14 ans. Il ressemblait à quoi le numérique à cette époque-là ?

  • Speaker #2

    Waouh, à rien ! Au collège, j'en avais pas d'informatique. Alors moi, j'ai découvert l'informatique avec un prof, un enseignant, pardon, en CM2, qui était passionné par, on ne disait pas encore l'informatique ou les nouvelles technologies, par les ordinateurs. Et il avait monté, un peu comme vous avec le groupe Wifi, un petit groupe avec des élèves qui s'intéressaient. Et après les cours, il nous faisait découvrir les ordinateurs et le langage de programmation basique. C'est une espèce de tortue qui se déplaçait. Et je faisais ça en CM2. Mon papa... Il était intéressé, il était proche de cet enseignant. Et du coup, on a eu un premier ordinateur. Alors, il faut imaginer, regardez les vieux films, des gros tubes cathodiques avec des disquettes dures à l'époque. Il y avait déjà Windows, mais c'était un truc qui ne ressemble pas à ce qui ressemble aujourd'hui. Et c'est comme ça que j'ai commencé à faire un peu d'informatique. Mais au départ, c'était quand même pour jouer. Donc, je faisais du solitaire, des jeux qui existent encore sur le PC.

  • Speaker #1

    Vous, quel est votre... Premier souvenir avec le numérique, à quel moment l'avez-vous découvert ?

  • Speaker #2

    Le numérique, on peut y mettre des trucs super larges derrière. Il y a cette histoire avec mon prof de CM2, et ce premier ordinateur et ce langage de programmation en basique. Après, je vais peut-être vous faire rire, mais ma maman est passionnée par les jeux vidéo. On avait dans les premiers à la maison la fameuse Nintendo. La vieille est vieille maintenant, qui est collecteur, qu'elle a toujours. On regarde régulièrement combien ça coûte, si on pourrait devenir millionnaire avec, mais toujours pas quand même. Et donc, j'ai joué au premier Zelda, toute petite. Et si on met les jeux vidéo dans le numérique et toute cette partie ordinateur, voilà mes premières expériences sur le numérique. Après, je n'aurais jamais dit que j'aurais travaillé dans le numérique. C'est juste une première sensibilisation, on va dire.

  • Speaker #1

    Comment avez-vous su que vous vouliez en faire votre métier ?

  • Speaker #2

    Je ne l'ai jamais su. C'est un parcours, c'est des opportunités. Même si j'avais touché à un ordinateur petit ou que je jouais à des jeux vidéo, au collège, à votre âge, j'ai d'abord voulu devenir ornithologue, journaliste, jardinière, paysagiste. Puis après, comme c'était quand même très différent, je ne savais pas trop ce que je voulais faire. Au lycée, je ne savais toujours pas ce que je voulais faire. Par contre, je détestais la physique, donc j'ai vite arrêté la physique. J'ai pris une voie un peu transverse, médiane, autour de l'économie et la gestion. Et c'est quand j'ai intégré une école, après mon bac plus 2, que j'ai redécouvert finalement l'informatique et les métiers autour de l'informatique. Et c'est à ce moment-là que j'ai fait un choix en me disant je vais plutôt faire de l'informatique plutôt que de la gestion. Puis je me suis fait rattraper par la gestion à la fin.

  • Speaker #0

    Vous avez parlé de la censure sociale. Qu'est-ce que vous entendez par la censure sociale que vous avez prise ?

  • Speaker #2

    Alors, je suis une des premières dans ma famille, côté paternelle et maternelle, à avoir eu le bac. Mes parents se sont rencontrés à Perpignan, dans ce qui s'appelait l'usine des poupées Bella. C'était d'anciennes poupées, et donc ma mère travaillait à la chaîne en tant que couturière sur ces poupées. Et après mon père a fait un parcours dans la fonction publique, il était douanier maritime, mais sans diplôme au départ. Et dans ma famille, il y avait très peu de diplômés, j'ai une cousine qui avait eu son bac juste avant moi. Donc mes parents étaient très fiers que leur fille aînée ait son bac. C'était un enjeu pour eux. Alors faire une prépa, continuer dans des études supérieures et intégrer une école de commerce et ingénieur, c'était quasiment le saint Graal. Donc c'est pour ça que je parle d'ascenseur social. Quand j'ai touché mon premier salaire, quand j'ai été embauchée pour la première fois, mon père était à la fois très fier, mais très vexé aussi. Parce que j'ai gagné plus que lui. Voilà.

  • Speaker #0

    Et vous, vous en faisiez un objectif que de sortir d'une certaine classe sociale et d'aller vers une autre par les études ? Ou est-ce que ça s'est fait assez naturellement ?

  • Speaker #2

    Ça s'est fait naturellement. Enfin, c'est pas quelque chose... C'était pas un plan de carrière ou un objectif ou un enjeu. Parce qu'on peut lire plein de trucs ou entendre plein de choses aujourd'hui dans la presse, les radios, les médias. Quand on voit les parcours des start-upeurs qui rêvent de devenir milliardaires ou quoi que ce soit, ça n'a jamais été un objectif en propre. Moi, j'aime bien dire aux collaborateurs, si je fais ce travail-là, c'est parce que j'arrive le matin avec plaisir, en chantant et en ayant la banane. Ce n'est pas tous les jours facile, on est d'accord, mais c'est ça qui me motive. Donc, je n'avais pas cet objectif-là, ça s'est fait naturellement. Puis après, j'ai eu de la chance aussi, j'étais toujours très bonne élève. J'ai suivi quelque part le parcours, j'ai été bien conseillée par des enseignants à un moment donné, donc j'ai suivi le truc et puis ça m'allait bien et ça me fait plaisir encore.

  • Speaker #1

    Vous avez grandi à Perpignan, où vous avez débuté votre scolarité jusqu'à décrocher un bac S. Vous avez ensuite été diplômé des mines de Paris comme ingénieur informatique. Et c'est d'abord pour la carrière de votre époux que vous posez un pied en Aveyron. De responsable du cloud à InforSud, en 2009, vous êtes donc devenue directrice générale en 2016. Qu'est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    La diversité. Je ne sais jamais de quoi va être faite ma journée, même si j'ai un planning bien rempli, un agenda avec des réunions et plein de sujets différents. Donc le métier d'un directeur général ou une directrice générale, parce que c'est le même, qu'il soit masculin ou féminin, c'est de donner le cap à ses équipes, à ses collaborateurs. C'est un peu comme le commandant sur un bateau. On part du port, on va aller à un autre endroit, mais il faut déjà définir à quel port et comment on va y aller, par quelle route on va passer. Et puis, il faut pouvoir gérer les réserves qu'on va avoir, comment on va mobiliser les différents matelots dans le bateau. Est-ce qu'on a assez ? Prendre des vieux bateaux de charbon, par exemple, pour faire avancer le bateau. C'est un peu la même chose quand on est directeur général. On organise le fonctionnement des équipes pour que tout se passe bien. Mais il y a toujours des surprises. Donc, sur une journée, je peux passer du temps avec mon comptable pour parler gestion, facture des clients, facture des fournisseurs. signer des documents justement pour pouvoir payer des fournisseurs par exemple. L'heure d'après, je vais travailler avec les équipes techniques sur une réponse à un appel d'offres que je vais relire pour savoir à combien on va engager la société et qu'est-ce qu'on a en capacité de faire. Et puis comme j'ai quand même un côté un peu geek quelque part, j'ai gardé la main sur un certain nombre d'outils et de temps en temps j'ai des collaborateurs qui m'appellent pour paramétrer une fonctionnalité, ce genre de choses. Donc j'ai des journées qui sont très variées et c'est ça qui m'amuse, parce que je pense, pour me connaître un peu plus avec l'âge, que la routine m'ennuie, donc j'aime bien les surprises et c'est ça qui est enrichissant dans le métier.

  • Speaker #1

    Vous êtes très engagée dans la diversité en entreprise, pour que les femmes soient aussi plus nombreuses dans les métiers du numérique. Observez-vous une évolution ? Êtes-vous plutôt optimiste sur ce sujet ?

  • Speaker #2

    part des femmes diminue tous les ans. Il y a de moins en moins de jeunes filles qui choisissent des formations autour du numérique. Du coup, il y a des programmes de reconversion pour ramener des femmes après dans le numérique par la suite. Mais c'est assez pessimiste et c'est aussi pour ça que je suis là, pour essayer d'expliquer qu'il y a un intérêt. Je le redis régulièrement. On peut faire plein de métiers très enrichissants dans le milieu de l'informatique. C'est un peu comme en médecine, il y a plein de spécialités différentes. On peut aussi sauver le monde quand on fait de l'informatique. On parle beaucoup d'intelligence artificielle, travailler dans de la médecine et ainsi de suite. Donc j'espère qu'en développant et en expliquant à chaque fois ces différentes options, on amènera un peu plus de femmes dans le numérique.

  • Speaker #0

    Vous parliez donc aussi du fait qu'il n'y a toujours pas assez de femmes dans les métiers du numérique. Comment vous l'expliquez ? Qu'est-ce qui coince encore ?

  • Speaker #2

    Il y a toujours l'image un peu geek, quelque part, du numérique, où on imagine que quand on est informaticien, pour schématiser, on est derrière un PC toute la journée et qu'on rencontre personne. En fait, non, déjà, il y a une équipe autour de nous. Quel que soit le métier et le niveau, en fait, dans l'informatique, il y a toujours une équipe autour, des gens avec qui aller prendre un café, partager un déjeuner, des problématiques. Il y a des clients avec qui on est au téléphone, mais qu'on va voir aussi régulièrement sur site. Chez nous, les collaborateurs, deux à trois jours par semaine, ils sont chez les clients. Ils ne sont pas derrière un PC. Alors, ils travaillent sur des claviers et des écrans, OK. Mais ils sont en contact avec eux, ils vont prendre le café avec eux, ils vont manger avec eux, ils vont essayer de comprendre comment fonctionne l'entreprise et ainsi de suite. Donc, ce n'est pas un métier qui est enfermé derrière un PC. Il y en a. Il y a des gens qui préfèrent travailler comme ça. Ceux qui sont en freelance, en télétravail à 100%. Mais il y en a plein d'autres, non. On est vraiment en contact des clients. Puis, un deuxième aspect, c'est que, pour l'avoir été vue petite... ... J'ai parlé quand j'étais au collège, je voulais être journaliste, ornithologue, jardinière, paysagiste. Avant, je voulais être maîtresse d'école et infirmière, comme beaucoup de petites filles à un moment donné, avec cette idée de soigner, d'être dans ce qu'on appelle le care. Dans l'informatique, on peut l'être aussi, parce qu'il y a toutes les avancées médicales qui se font aujourd'hui avec des outils informatiques. Et s'il n'y a pas des informaticiens pour travailler dans des laboratoires de recherche, ça n'avance pas non plus. Donc il y a aussi tous ces métiers-là qui ne sont pas forcément mis en avant, parce qu'on ne le voit pas à la télé, on n'entend pas parler dans les journaux ou à la radio. Je ne suis pas la meilleure pour en parler parce que je n'ai pas touché moi cette partie-là.

  • Speaker #0

    Ça veut dire que depuis que vous travaillez, vous n'observez pas une évolution. De ce côté-là, les modèles que vous n'avez pas eus, vous n'avez pas l'impression de les voir aujourd'hui pour les jeunes filles. Et c'est peut-être ce Ausha que vous endossez aujourd'hui.

  • Speaker #2

    Oui, parce qu'il y a vraiment, quand on regarde des films, il y a cet informaticien qui est derrière son PC. Même dans les séries policières. les NCIS, et au New York, Miami, enfin plein d'autres séries, il y a toujours l'informaticienne. Parfois, il y a une informaticienne, mais elle est dans son laboratoire, derrière ses écrans, et elle ne sort jamais. Donc, il y a quand même un problème de représentativité, et ça porte préjudice, je pense, à un moment donné, à nos métiers. Donc, je suis là pour ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez juste nous rappeler, Audrey, une dernière fois, la proportion de femmes chez M4 Sud ?

  • Speaker #2

    On est 34%, je crois, au dernier chiffre. Mais si on enlève les commerciales, l'ARH, on va tomber à 15% dans les métiers techniques.

  • Speaker #0

    C'est une proportion qu'on retrouve dans les écoles ?

  • Speaker #2

    Non, on est bien meilleur que dans les écoles et dans d'autres entreprises. Sur les dernières promotions, je vais prendre l'IUT de Rodez, par exemple. Je crois qu'ils sont en quarantaine. Il doit y avoir deux filles. La troisième, l'école d'ingénieurs, il doit y avoir 35. Ils sont peut-être trois, voilà. Donc, ce n'est pas beaucoup.

  • Speaker #1

    Est-ce que le fait d'être une femme a été, un jour dans votre parcours, un obstacle ?

  • Speaker #2

    Parfois un peu de sexisme, il faut appeler un chat un chat. Je me souviendrai toujours, et ça m'a marquée, c'est aussi pour ça que je suis là. J'avais 23 ans, 24 ans, donc je venais de finir mon école, j'étais sur une première mission chez un client. Donc je travaillais à Paris à l'époque, dans une grande entreprise qui travaille toujours dans le télécom. Et j'avais cette... cette mission d'être chef de projet, donc d'encadrer une équipe de développeurs. Et donc, mon client rentre dans la salle, regarde, nous étions plusieurs assis autour de la table, et me voyant pour la première fois, me dit, mademoiselle, vous êtes là pour prendre des notes ? Et donc, j'ai gentiment répondu que non, c'était moi qui étais la chef de projet, donc j'encadrais toutes les personnes autour, et que eux allaient prendre des notes, il n'y avait aucun souci. C'était la première anecdote et puis il y en a d'autres comme ça. Donc, ce n'est pas forcément un obstacle. Il faut le savoir, il faut en jouer avec aussi, des fois. Ça m'amuse toujours quand je vais encore en réunion chez des prospects, des gens qui ne nous connaissent pas ou qui ne se sont pas très bien renseignés sur un forçu de technologie. J'y vais parfois avec un représentant commercial, souvent ce sont des hommes, ils aiment bien mettre des costumes, des cravates, et moi je suis toute petite à côté, pas forcément d'ailleurs en tailleur jupe, et systématiquement le prospect, que ce soit un homme ou une femme, va commencer par dire bonjour à la personne de sexe masculin à côté de moi. Et puis, ah, oups, je savais pas que vous étiez la directrice et s'excuse platement pour pas m'avoir dit bonjour en premier, mais c'est toujours rigolo. Donc ce n'est pas un obstacle, mais il ne faut pas le prendre non plus avec mauvaise foi ou être blessé. Il faut savoir en jouer et en rire aussi quelque part.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qui serait différent dans votre quotidien professionnel si vous étiez un homme ?

  • Speaker #2

    Justement, peut-être qu'on me dirait bonjour en premier, plutôt qu'en dernier des fois. Et à part ça, je ne pense pas que ça changerait grand-chose. Je serais peut-être plus grande, ça c'est sûr. Mais non, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Par exemple, auriez-vous le même salaire si vous étiez un homme ?

  • Speaker #2

    Alors la réponse est oui. Pour le coup, j'ai eu la chance d'avoir un parcours professionnel qui m'a amenée à rencontrer des gens, je vais dire, bien. corrects, normaux, quelque part. Mon premier patron avait deux filles et un garçon. Ces deux filles travaillaient dans l'entreprise, donc il était très attentif à ce genre de choses. Et à un fort sud, c'est la même chose. C'est un groupe qui dépend d'un groupe bancaire, donc ils sont aussi très attentifs à ces aspects-là. Et donc j'ai un bon salaire, au même niveau que celui d'un homme. J'ai des collègues féminines qui sont dans d'autres sociétés et qui remontent ce type de constats et de problèmes. Donc moi, j'y suis vigilante.

  • Speaker #1

    Audrey, nous arrivons à la fin de notre échange et nous avons deux dernières questions pour vous. D'abord, quels ont été vos modèles qui vous ont inspiré ou qui continuent de vous inspirer aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    Waouh, c'est compliqué. J'ai pas eu de modèle, enfin je sais pas. Je n'avais pas préparé cette question-là, mais c'est normal. Un modèle, il n'y a pas de... Dans mon métier, il n'y a pas forcément de modèle particulier. Je sais qu'un garçon, sur la partie numérique, vous citera un Zuckerberg, un Jeff Bezos ou un Elon Musk ou d'autres. Côté féminin, on n'a pas ces grandes figures. Donc, je n'ai pas de modèle. en particulier. J'ai plutôt essayé de prendre ce qui me plaisait chez les personnes que j'ai rencontrées tout au long de mon parcours professionnel. J'ai parlé de mon premier patron. Il était attentif à cette mixité, mais il était aussi très heureux de payer, par exemple, beaucoup d'impôts parce que ça rendait à la société ce qu'il avait pu avoir à un moment donné. Donc, dans chaque rencontre que j'ai pu faire, j'ai plutôt pêché les... Les points qui m'intéressaient, qui me parlaient, qui faisaient écho à ce que je suis. Donc, je n'ai pas un modèle unique ou une idole, ou je ne suis pas fan de quelqu'un, mais je vais plutôt essayer d'aller prendre ces petits trucs-là chez les uns et les autres. Les unes et les autres aussi, de temps en temps.

  • Speaker #1

    Et une dernière question, si c'était à refaire, changeriez-vous quelque chose ?

  • Speaker #2

    Rien du tout. Je suis super contente.

  • Speaker #0

    Elle n'est pas si difficile, mais Audrey, en quoi est-ce que vous croyez ?

  • Speaker #2

    Waouh, ça c'est dur comme question. En quoi est-ce que je crois ? En l'équité. C'est une valeur qui me tient, je pense, depuis peut-être petite. En l'équité entre les hommes, les femmes, dans les métiers, dans tout.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que vous l'avez forgée alors cette croyance ? Qu'est-ce qui vous a convaincu que l'équité devait être ? Partout.

  • Speaker #2

    Peut-être que ça part d'un sentiment d'injustice, peut-être comme tout enfant. Je pense que quand on discute avec des enfants de 3, 4, 5 ans, quand ils voient quelque chose d'injuste, ça les prend aux tripes et ça remonte parfois. Ça donne des psychodrames des fois et je pense que ça vient de là. Après, je ne saurais pas dire. Quel moment particulier. Je n'ai jamais vu un psychologue ni un psychiatre. Je ne me considère pas non plus comme malade, mais peut-être que ça vient de là.

  • Speaker #1

    Audrey, merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé aujourd'hui. Et à bientôt.

  • Speaker #2

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    Audrey, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter à destination des Wi-Fi peut-être ?

  • Speaker #2

    Il ne faut pas avoir peur, il faut y aller. Quel que soit le métier que vous choisirez après, éclatez-vous, choisissez les matières qui vous font plaisir, celles où vous êtes les meilleurs. Parce que travailler, pardon pour l'enseignant dans la salle, on essaye souvent de travailler les matières où on est les moins bons. Alors il faut le travailler un minimum pour pouvoir avoir un socle, mais c'est les matières où on est les meilleurs et on s'éclate le plus qui vont nous porter par la suite. Et ça, je pense qu'on ne le dit pas encore assez.

  • Speaker #0

    Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de la saison 3 de Finta. J'espère qu'il vous a plu et que cette conversation avec Audrey Germain ouvre votre champ des possibles comme il a ouvert le mien. Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou en redécouvrant les femmes pionnières de la première saison sur www.fintapodcast.fr ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un tout petit peu le temps. Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par moi-même, Lola Cross. Il est mixé par Mathieu Viguier du studio Qude. Si vous appréciez Finta et que vous souhaitez soutenir ce travail indépendant, parlez-en autour de vous. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter au podcast. Vous pouvez suivre toute son actualité sur www.fintapodcast.fr, sur les réseaux sociaux avec finta.lepodcast, et aussi vous abonner à la newsletter pour recevoir les nouveaux épisodes directement dans votre boîte email. A très bientôt !

Description

Après Marie-Thérèse Lacombe, Nicole Fagegaltier, Danièle Dastugue, Danielle Puech, Sarah Singla, Emmanuelle Gazel et Josette Hart, dans la première saison, Ginette Marchive, Pauline Broqua, Audrey Dussutour et Catherine André, dans la deuxième saison, et Yseulys Costes, je vous propose d’embarquer pour une troisième saison des Pionnières. Aujourd’hui, avec Audrey Girmens.


On pourrait les compter aisément sur les doigts d’une seule main. Les femmes dirigeantes dans l’univers du numérique ne sont, en Aveyron comme ailleurs, pas légion. A la tête d’Inforsud Technologies, poids lourd du secteur dans le département, Audrey Girmens fait partie de celles-là.


De sa mère geek et pionnière, qui lui a donné le goût des jeux vidéos, jusqu’à ses premières expériences numériques, avant même la naissance d’internet, Audrey Girmens le dit elle-même, elle a pris l’ascenseur social. De longues études et des échelons gravis un à un, elle a tracé sa route sans pertes ni fracas. Avec, pour seul espoir, d’emmener d’autres filles dans son sillage.


Loin d’apprécier la maigre représentation féminine dans ses rangs, Audrey Girmens s’est engagée, de longue date, pour faire connaître toutes les facettes du numérique et espérer ainsi créer des vocations auprès des jeunes filles. A son échelle, elle est le modèle féminin dont elle a manqué.


Cet épisode a été enregistré avec les Wifilles, un groupe de collégiennes des Quatre-Saisons à Onet-le-Château, engagées dans un programme de découverte des métiers du numérique, mené en partenariat avec l’association Face Aveyron-Tarn. Merci à Marion Roch, pour sa supervision, à Jean-François, leur professeur de technologie, et à Victoria Bouyssi, la CPE du collège castonétois, pour leur participation active en coulisses.

Bonne écoute !


Episode enregistré en décembre 2023.


Finta est un podcast réalisé, produit et écrit par Lola Cros. Il est mixé par le studio Qude. Plus d'infos : www.fintapodcast.fr Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Elles ont défriché des chemins, ouvert des voies, porté une voie, en avéron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. À partir de la ruralité qui les a naturellement façonnées, le témoignage de ces pionnières contribue à penser le rapport à l'accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l'enclavement. D'hier jusqu'à aujourd'hui. Et si la journaliste Annick Cogent compare le parcours des femmes à des courses d'obstacles, la ruralité en serait-il un de plus ? C'est la question, en creux, à laquelle répondent les pionnières que j'ai invitées au micro de Finta. Après Marie-Thérèse Lacombe, Nicole Fage-Galtier, Daniel Dastugue, Daniel Puech, Sarah Sengla, Emmanuelle Gazel et Josette Hart dans la première saison, Ginette Marchive, Pauline Broca... Audrey Dussutour et Catherine André dans la deuxième saison. Je vous propose d'embarquer pour une troisième saison des pionnières. Aujourd'hui, avec Audrey Germain. On pourrait les compter aisément sur les doigts d'une seule main. Les femmes dirigeantes dans l'univers du numérique ne sont, en avérons comme ailleurs, pas légion. À la tête d'un forçu de technologie, poids lourd du secteur dans le département, Audrey Germain fait partie de celle-là.

  • Speaker #1

    De sa mère geek et pionnière qui lui a donné le goût. des jeux vidéo jusqu'à ses premières expériences numériques, avant même la naissance d'Internet. De longues études et des échelons gravis un à un, elle a traversé sa route sans perte ni fracas, avec pour un seul espoir d'amener d'autres filles dans son sillage. Loin d'apprécier la maigre représentation féminine dans ses rangs, Audrey Germain s'est engagée de longue date pour faire connaître toutes les facettes du numérique et espérer ainsi créer des vocations auprès des jeunes filles. À son échelle, elle est le modèle féminin dont elle a manqué. Loli Rose, Calixtine, Yasmine, Lina, Rojda, Chaynez.

  • Speaker #0

    Cet épisode a été enregistré avec les 8 filles, un groupe de collégiennes des 4 saisons à O'Neill Ausha, engagés dans un programme de découverte des métiers du numérique mené en partenariat avec l'association Face à Vérontharne. Merci à Marion Roch pour sa supervision, à Jean-François Segon, leur professeur de technologie, et à Victoria Bouissi, la CPE du Collège Caston-Étoile, pour leur participation active en coulisses. Bonne époute.

  • Speaker #1

    Pour commencer, nous voudrions vous demander pourquoi. Pourquoi avez-vous accepté de jouer ce jeu aujourd'hui avec nous et de répondre à nos questions ?

  • Speaker #2

    C'est un engagement qui me suit depuis plusieurs années. j'ai eu la chance de profiter de l'ascenseur social. Et donc je trouve normal de rendre à la société ce qu'elle m'a rendu. Ça c'est un premier objectif. Et le deuxième objectif, c'est que je travaille dans le milieu du numérique et que nous sommes très peu de femmes dans le milieu du numérique. Probablement parce qu'il y a une difficulté sur l'image et la représentation des femmes dans l'informatique. Et du coup, je trouve normal de témoigner, de participer à des événements et d'être là avec vous pour vous expliquer comment fonctionnent les femmes dans le milieu de l'informatique, par exemple.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est Audrey Gemmes qui nous parle ou la directrice d'Infosud Technologies ?

  • Speaker #2

    Ah, ça c'est difficile. Dans l'entreprise, je leur fais souvent la blague à mes collaborateurs de savoir avec quelle casquette je parle, parce qu'il y en a plusieurs. Et donc entre Audrey Germain et la directrice générale, c'est à la fois les deux. Il y a toujours un peu de personnel, mais il y a aussi de la représentation de l'entreprise. Mais l'engagement, il est surtout personnel. Je ne suis pas sûre que d'autres directeurs dans le milieu informatique feraient la même chose ou d'autres directrices dans d'autres milieux feraient la même chose. Donc c'est avant tout d'abord un engagement personnel.

  • Speaker #1

    Si l'on remonte dans le temps et que l'on se retrouve au début des années 90, Vous aviez notre âge, 14 ans. Il ressemblait à quoi le numérique à cette époque-là ?

  • Speaker #2

    Waouh, à rien ! Au collège, j'en avais pas d'informatique. Alors moi, j'ai découvert l'informatique avec un prof, un enseignant, pardon, en CM2, qui était passionné par, on ne disait pas encore l'informatique ou les nouvelles technologies, par les ordinateurs. Et il avait monté, un peu comme vous avec le groupe Wifi, un petit groupe avec des élèves qui s'intéressaient. Et après les cours, il nous faisait découvrir les ordinateurs et le langage de programmation basique. C'est une espèce de tortue qui se déplaçait. Et je faisais ça en CM2. Mon papa... Il était intéressé, il était proche de cet enseignant. Et du coup, on a eu un premier ordinateur. Alors, il faut imaginer, regardez les vieux films, des gros tubes cathodiques avec des disquettes dures à l'époque. Il y avait déjà Windows, mais c'était un truc qui ne ressemble pas à ce qui ressemble aujourd'hui. Et c'est comme ça que j'ai commencé à faire un peu d'informatique. Mais au départ, c'était quand même pour jouer. Donc, je faisais du solitaire, des jeux qui existent encore sur le PC.

  • Speaker #1

    Vous, quel est votre... Premier souvenir avec le numérique, à quel moment l'avez-vous découvert ?

  • Speaker #2

    Le numérique, on peut y mettre des trucs super larges derrière. Il y a cette histoire avec mon prof de CM2, et ce premier ordinateur et ce langage de programmation en basique. Après, je vais peut-être vous faire rire, mais ma maman est passionnée par les jeux vidéo. On avait dans les premiers à la maison la fameuse Nintendo. La vieille est vieille maintenant, qui est collecteur, qu'elle a toujours. On regarde régulièrement combien ça coûte, si on pourrait devenir millionnaire avec, mais toujours pas quand même. Et donc, j'ai joué au premier Zelda, toute petite. Et si on met les jeux vidéo dans le numérique et toute cette partie ordinateur, voilà mes premières expériences sur le numérique. Après, je n'aurais jamais dit que j'aurais travaillé dans le numérique. C'est juste une première sensibilisation, on va dire.

  • Speaker #1

    Comment avez-vous su que vous vouliez en faire votre métier ?

  • Speaker #2

    Je ne l'ai jamais su. C'est un parcours, c'est des opportunités. Même si j'avais touché à un ordinateur petit ou que je jouais à des jeux vidéo, au collège, à votre âge, j'ai d'abord voulu devenir ornithologue, journaliste, jardinière, paysagiste. Puis après, comme c'était quand même très différent, je ne savais pas trop ce que je voulais faire. Au lycée, je ne savais toujours pas ce que je voulais faire. Par contre, je détestais la physique, donc j'ai vite arrêté la physique. J'ai pris une voie un peu transverse, médiane, autour de l'économie et la gestion. Et c'est quand j'ai intégré une école, après mon bac plus 2, que j'ai redécouvert finalement l'informatique et les métiers autour de l'informatique. Et c'est à ce moment-là que j'ai fait un choix en me disant je vais plutôt faire de l'informatique plutôt que de la gestion. Puis je me suis fait rattraper par la gestion à la fin.

  • Speaker #0

    Vous avez parlé de la censure sociale. Qu'est-ce que vous entendez par la censure sociale que vous avez prise ?

  • Speaker #2

    Alors, je suis une des premières dans ma famille, côté paternelle et maternelle, à avoir eu le bac. Mes parents se sont rencontrés à Perpignan, dans ce qui s'appelait l'usine des poupées Bella. C'était d'anciennes poupées, et donc ma mère travaillait à la chaîne en tant que couturière sur ces poupées. Et après mon père a fait un parcours dans la fonction publique, il était douanier maritime, mais sans diplôme au départ. Et dans ma famille, il y avait très peu de diplômés, j'ai une cousine qui avait eu son bac juste avant moi. Donc mes parents étaient très fiers que leur fille aînée ait son bac. C'était un enjeu pour eux. Alors faire une prépa, continuer dans des études supérieures et intégrer une école de commerce et ingénieur, c'était quasiment le saint Graal. Donc c'est pour ça que je parle d'ascenseur social. Quand j'ai touché mon premier salaire, quand j'ai été embauchée pour la première fois, mon père était à la fois très fier, mais très vexé aussi. Parce que j'ai gagné plus que lui. Voilà.

  • Speaker #0

    Et vous, vous en faisiez un objectif que de sortir d'une certaine classe sociale et d'aller vers une autre par les études ? Ou est-ce que ça s'est fait assez naturellement ?

  • Speaker #2

    Ça s'est fait naturellement. Enfin, c'est pas quelque chose... C'était pas un plan de carrière ou un objectif ou un enjeu. Parce qu'on peut lire plein de trucs ou entendre plein de choses aujourd'hui dans la presse, les radios, les médias. Quand on voit les parcours des start-upeurs qui rêvent de devenir milliardaires ou quoi que ce soit, ça n'a jamais été un objectif en propre. Moi, j'aime bien dire aux collaborateurs, si je fais ce travail-là, c'est parce que j'arrive le matin avec plaisir, en chantant et en ayant la banane. Ce n'est pas tous les jours facile, on est d'accord, mais c'est ça qui me motive. Donc, je n'avais pas cet objectif-là, ça s'est fait naturellement. Puis après, j'ai eu de la chance aussi, j'étais toujours très bonne élève. J'ai suivi quelque part le parcours, j'ai été bien conseillée par des enseignants à un moment donné, donc j'ai suivi le truc et puis ça m'allait bien et ça me fait plaisir encore.

  • Speaker #1

    Vous avez grandi à Perpignan, où vous avez débuté votre scolarité jusqu'à décrocher un bac S. Vous avez ensuite été diplômé des mines de Paris comme ingénieur informatique. Et c'est d'abord pour la carrière de votre époux que vous posez un pied en Aveyron. De responsable du cloud à InforSud, en 2009, vous êtes donc devenue directrice générale en 2016. Qu'est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    La diversité. Je ne sais jamais de quoi va être faite ma journée, même si j'ai un planning bien rempli, un agenda avec des réunions et plein de sujets différents. Donc le métier d'un directeur général ou une directrice générale, parce que c'est le même, qu'il soit masculin ou féminin, c'est de donner le cap à ses équipes, à ses collaborateurs. C'est un peu comme le commandant sur un bateau. On part du port, on va aller à un autre endroit, mais il faut déjà définir à quel port et comment on va y aller, par quelle route on va passer. Et puis, il faut pouvoir gérer les réserves qu'on va avoir, comment on va mobiliser les différents matelots dans le bateau. Est-ce qu'on a assez ? Prendre des vieux bateaux de charbon, par exemple, pour faire avancer le bateau. C'est un peu la même chose quand on est directeur général. On organise le fonctionnement des équipes pour que tout se passe bien. Mais il y a toujours des surprises. Donc, sur une journée, je peux passer du temps avec mon comptable pour parler gestion, facture des clients, facture des fournisseurs. signer des documents justement pour pouvoir payer des fournisseurs par exemple. L'heure d'après, je vais travailler avec les équipes techniques sur une réponse à un appel d'offres que je vais relire pour savoir à combien on va engager la société et qu'est-ce qu'on a en capacité de faire. Et puis comme j'ai quand même un côté un peu geek quelque part, j'ai gardé la main sur un certain nombre d'outils et de temps en temps j'ai des collaborateurs qui m'appellent pour paramétrer une fonctionnalité, ce genre de choses. Donc j'ai des journées qui sont très variées et c'est ça qui m'amuse, parce que je pense, pour me connaître un peu plus avec l'âge, que la routine m'ennuie, donc j'aime bien les surprises et c'est ça qui est enrichissant dans le métier.

  • Speaker #1

    Vous êtes très engagée dans la diversité en entreprise, pour que les femmes soient aussi plus nombreuses dans les métiers du numérique. Observez-vous une évolution ? Êtes-vous plutôt optimiste sur ce sujet ?

  • Speaker #2

    part des femmes diminue tous les ans. Il y a de moins en moins de jeunes filles qui choisissent des formations autour du numérique. Du coup, il y a des programmes de reconversion pour ramener des femmes après dans le numérique par la suite. Mais c'est assez pessimiste et c'est aussi pour ça que je suis là, pour essayer d'expliquer qu'il y a un intérêt. Je le redis régulièrement. On peut faire plein de métiers très enrichissants dans le milieu de l'informatique. C'est un peu comme en médecine, il y a plein de spécialités différentes. On peut aussi sauver le monde quand on fait de l'informatique. On parle beaucoup d'intelligence artificielle, travailler dans de la médecine et ainsi de suite. Donc j'espère qu'en développant et en expliquant à chaque fois ces différentes options, on amènera un peu plus de femmes dans le numérique.

  • Speaker #0

    Vous parliez donc aussi du fait qu'il n'y a toujours pas assez de femmes dans les métiers du numérique. Comment vous l'expliquez ? Qu'est-ce qui coince encore ?

  • Speaker #2

    Il y a toujours l'image un peu geek, quelque part, du numérique, où on imagine que quand on est informaticien, pour schématiser, on est derrière un PC toute la journée et qu'on rencontre personne. En fait, non, déjà, il y a une équipe autour de nous. Quel que soit le métier et le niveau, en fait, dans l'informatique, il y a toujours une équipe autour, des gens avec qui aller prendre un café, partager un déjeuner, des problématiques. Il y a des clients avec qui on est au téléphone, mais qu'on va voir aussi régulièrement sur site. Chez nous, les collaborateurs, deux à trois jours par semaine, ils sont chez les clients. Ils ne sont pas derrière un PC. Alors, ils travaillent sur des claviers et des écrans, OK. Mais ils sont en contact avec eux, ils vont prendre le café avec eux, ils vont manger avec eux, ils vont essayer de comprendre comment fonctionne l'entreprise et ainsi de suite. Donc, ce n'est pas un métier qui est enfermé derrière un PC. Il y en a. Il y a des gens qui préfèrent travailler comme ça. Ceux qui sont en freelance, en télétravail à 100%. Mais il y en a plein d'autres, non. On est vraiment en contact des clients. Puis, un deuxième aspect, c'est que, pour l'avoir été vue petite... ... J'ai parlé quand j'étais au collège, je voulais être journaliste, ornithologue, jardinière, paysagiste. Avant, je voulais être maîtresse d'école et infirmière, comme beaucoup de petites filles à un moment donné, avec cette idée de soigner, d'être dans ce qu'on appelle le care. Dans l'informatique, on peut l'être aussi, parce qu'il y a toutes les avancées médicales qui se font aujourd'hui avec des outils informatiques. Et s'il n'y a pas des informaticiens pour travailler dans des laboratoires de recherche, ça n'avance pas non plus. Donc il y a aussi tous ces métiers-là qui ne sont pas forcément mis en avant, parce qu'on ne le voit pas à la télé, on n'entend pas parler dans les journaux ou à la radio. Je ne suis pas la meilleure pour en parler parce que je n'ai pas touché moi cette partie-là.

  • Speaker #0

    Ça veut dire que depuis que vous travaillez, vous n'observez pas une évolution. De ce côté-là, les modèles que vous n'avez pas eus, vous n'avez pas l'impression de les voir aujourd'hui pour les jeunes filles. Et c'est peut-être ce Ausha que vous endossez aujourd'hui.

  • Speaker #2

    Oui, parce qu'il y a vraiment, quand on regarde des films, il y a cet informaticien qui est derrière son PC. Même dans les séries policières. les NCIS, et au New York, Miami, enfin plein d'autres séries, il y a toujours l'informaticienne. Parfois, il y a une informaticienne, mais elle est dans son laboratoire, derrière ses écrans, et elle ne sort jamais. Donc, il y a quand même un problème de représentativité, et ça porte préjudice, je pense, à un moment donné, à nos métiers. Donc, je suis là pour ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez juste nous rappeler, Audrey, une dernière fois, la proportion de femmes chez M4 Sud ?

  • Speaker #2

    On est 34%, je crois, au dernier chiffre. Mais si on enlève les commerciales, l'ARH, on va tomber à 15% dans les métiers techniques.

  • Speaker #0

    C'est une proportion qu'on retrouve dans les écoles ?

  • Speaker #2

    Non, on est bien meilleur que dans les écoles et dans d'autres entreprises. Sur les dernières promotions, je vais prendre l'IUT de Rodez, par exemple. Je crois qu'ils sont en quarantaine. Il doit y avoir deux filles. La troisième, l'école d'ingénieurs, il doit y avoir 35. Ils sont peut-être trois, voilà. Donc, ce n'est pas beaucoup.

  • Speaker #1

    Est-ce que le fait d'être une femme a été, un jour dans votre parcours, un obstacle ?

  • Speaker #2

    Parfois un peu de sexisme, il faut appeler un chat un chat. Je me souviendrai toujours, et ça m'a marquée, c'est aussi pour ça que je suis là. J'avais 23 ans, 24 ans, donc je venais de finir mon école, j'étais sur une première mission chez un client. Donc je travaillais à Paris à l'époque, dans une grande entreprise qui travaille toujours dans le télécom. Et j'avais cette... cette mission d'être chef de projet, donc d'encadrer une équipe de développeurs. Et donc, mon client rentre dans la salle, regarde, nous étions plusieurs assis autour de la table, et me voyant pour la première fois, me dit, mademoiselle, vous êtes là pour prendre des notes ? Et donc, j'ai gentiment répondu que non, c'était moi qui étais la chef de projet, donc j'encadrais toutes les personnes autour, et que eux allaient prendre des notes, il n'y avait aucun souci. C'était la première anecdote et puis il y en a d'autres comme ça. Donc, ce n'est pas forcément un obstacle. Il faut le savoir, il faut en jouer avec aussi, des fois. Ça m'amuse toujours quand je vais encore en réunion chez des prospects, des gens qui ne nous connaissent pas ou qui ne se sont pas très bien renseignés sur un forçu de technologie. J'y vais parfois avec un représentant commercial, souvent ce sont des hommes, ils aiment bien mettre des costumes, des cravates, et moi je suis toute petite à côté, pas forcément d'ailleurs en tailleur jupe, et systématiquement le prospect, que ce soit un homme ou une femme, va commencer par dire bonjour à la personne de sexe masculin à côté de moi. Et puis, ah, oups, je savais pas que vous étiez la directrice et s'excuse platement pour pas m'avoir dit bonjour en premier, mais c'est toujours rigolo. Donc ce n'est pas un obstacle, mais il ne faut pas le prendre non plus avec mauvaise foi ou être blessé. Il faut savoir en jouer et en rire aussi quelque part.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qui serait différent dans votre quotidien professionnel si vous étiez un homme ?

  • Speaker #2

    Justement, peut-être qu'on me dirait bonjour en premier, plutôt qu'en dernier des fois. Et à part ça, je ne pense pas que ça changerait grand-chose. Je serais peut-être plus grande, ça c'est sûr. Mais non, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Par exemple, auriez-vous le même salaire si vous étiez un homme ?

  • Speaker #2

    Alors la réponse est oui. Pour le coup, j'ai eu la chance d'avoir un parcours professionnel qui m'a amenée à rencontrer des gens, je vais dire, bien. corrects, normaux, quelque part. Mon premier patron avait deux filles et un garçon. Ces deux filles travaillaient dans l'entreprise, donc il était très attentif à ce genre de choses. Et à un fort sud, c'est la même chose. C'est un groupe qui dépend d'un groupe bancaire, donc ils sont aussi très attentifs à ces aspects-là. Et donc j'ai un bon salaire, au même niveau que celui d'un homme. J'ai des collègues féminines qui sont dans d'autres sociétés et qui remontent ce type de constats et de problèmes. Donc moi, j'y suis vigilante.

  • Speaker #1

    Audrey, nous arrivons à la fin de notre échange et nous avons deux dernières questions pour vous. D'abord, quels ont été vos modèles qui vous ont inspiré ou qui continuent de vous inspirer aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    Waouh, c'est compliqué. J'ai pas eu de modèle, enfin je sais pas. Je n'avais pas préparé cette question-là, mais c'est normal. Un modèle, il n'y a pas de... Dans mon métier, il n'y a pas forcément de modèle particulier. Je sais qu'un garçon, sur la partie numérique, vous citera un Zuckerberg, un Jeff Bezos ou un Elon Musk ou d'autres. Côté féminin, on n'a pas ces grandes figures. Donc, je n'ai pas de modèle. en particulier. J'ai plutôt essayé de prendre ce qui me plaisait chez les personnes que j'ai rencontrées tout au long de mon parcours professionnel. J'ai parlé de mon premier patron. Il était attentif à cette mixité, mais il était aussi très heureux de payer, par exemple, beaucoup d'impôts parce que ça rendait à la société ce qu'il avait pu avoir à un moment donné. Donc, dans chaque rencontre que j'ai pu faire, j'ai plutôt pêché les... Les points qui m'intéressaient, qui me parlaient, qui faisaient écho à ce que je suis. Donc, je n'ai pas un modèle unique ou une idole, ou je ne suis pas fan de quelqu'un, mais je vais plutôt essayer d'aller prendre ces petits trucs-là chez les uns et les autres. Les unes et les autres aussi, de temps en temps.

  • Speaker #1

    Et une dernière question, si c'était à refaire, changeriez-vous quelque chose ?

  • Speaker #2

    Rien du tout. Je suis super contente.

  • Speaker #0

    Elle n'est pas si difficile, mais Audrey, en quoi est-ce que vous croyez ?

  • Speaker #2

    Waouh, ça c'est dur comme question. En quoi est-ce que je crois ? En l'équité. C'est une valeur qui me tient, je pense, depuis peut-être petite. En l'équité entre les hommes, les femmes, dans les métiers, dans tout.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que vous l'avez forgée alors cette croyance ? Qu'est-ce qui vous a convaincu que l'équité devait être ? Partout.

  • Speaker #2

    Peut-être que ça part d'un sentiment d'injustice, peut-être comme tout enfant. Je pense que quand on discute avec des enfants de 3, 4, 5 ans, quand ils voient quelque chose d'injuste, ça les prend aux tripes et ça remonte parfois. Ça donne des psychodrames des fois et je pense que ça vient de là. Après, je ne saurais pas dire. Quel moment particulier. Je n'ai jamais vu un psychologue ni un psychiatre. Je ne me considère pas non plus comme malade, mais peut-être que ça vient de là.

  • Speaker #1

    Audrey, merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé aujourd'hui. Et à bientôt.

  • Speaker #2

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    Audrey, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter à destination des Wi-Fi peut-être ?

  • Speaker #2

    Il ne faut pas avoir peur, il faut y aller. Quel que soit le métier que vous choisirez après, éclatez-vous, choisissez les matières qui vous font plaisir, celles où vous êtes les meilleurs. Parce que travailler, pardon pour l'enseignant dans la salle, on essaye souvent de travailler les matières où on est les moins bons. Alors il faut le travailler un minimum pour pouvoir avoir un socle, mais c'est les matières où on est les meilleurs et on s'éclate le plus qui vont nous porter par la suite. Et ça, je pense qu'on ne le dit pas encore assez.

  • Speaker #0

    Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de la saison 3 de Finta. J'espère qu'il vous a plu et que cette conversation avec Audrey Germain ouvre votre champ des possibles comme il a ouvert le mien. Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou en redécouvrant les femmes pionnières de la première saison sur www.fintapodcast.fr ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un tout petit peu le temps. Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par moi-même, Lola Cross. Il est mixé par Mathieu Viguier du studio Qude. Si vous appréciez Finta et que vous souhaitez soutenir ce travail indépendant, parlez-en autour de vous. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter au podcast. Vous pouvez suivre toute son actualité sur www.fintapodcast.fr, sur les réseaux sociaux avec finta.lepodcast, et aussi vous abonner à la newsletter pour recevoir les nouveaux épisodes directement dans votre boîte email. A très bientôt !

Share

Embed

You may also like

Description

Après Marie-Thérèse Lacombe, Nicole Fagegaltier, Danièle Dastugue, Danielle Puech, Sarah Singla, Emmanuelle Gazel et Josette Hart, dans la première saison, Ginette Marchive, Pauline Broqua, Audrey Dussutour et Catherine André, dans la deuxième saison, et Yseulys Costes, je vous propose d’embarquer pour une troisième saison des Pionnières. Aujourd’hui, avec Audrey Girmens.


On pourrait les compter aisément sur les doigts d’une seule main. Les femmes dirigeantes dans l’univers du numérique ne sont, en Aveyron comme ailleurs, pas légion. A la tête d’Inforsud Technologies, poids lourd du secteur dans le département, Audrey Girmens fait partie de celles-là.


De sa mère geek et pionnière, qui lui a donné le goût des jeux vidéos, jusqu’à ses premières expériences numériques, avant même la naissance d’internet, Audrey Girmens le dit elle-même, elle a pris l’ascenseur social. De longues études et des échelons gravis un à un, elle a tracé sa route sans pertes ni fracas. Avec, pour seul espoir, d’emmener d’autres filles dans son sillage.


Loin d’apprécier la maigre représentation féminine dans ses rangs, Audrey Girmens s’est engagée, de longue date, pour faire connaître toutes les facettes du numérique et espérer ainsi créer des vocations auprès des jeunes filles. A son échelle, elle est le modèle féminin dont elle a manqué.


Cet épisode a été enregistré avec les Wifilles, un groupe de collégiennes des Quatre-Saisons à Onet-le-Château, engagées dans un programme de découverte des métiers du numérique, mené en partenariat avec l’association Face Aveyron-Tarn. Merci à Marion Roch, pour sa supervision, à Jean-François, leur professeur de technologie, et à Victoria Bouyssi, la CPE du collège castonétois, pour leur participation active en coulisses.

Bonne écoute !


Episode enregistré en décembre 2023.


Finta est un podcast réalisé, produit et écrit par Lola Cros. Il est mixé par le studio Qude. Plus d'infos : www.fintapodcast.fr Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Elles ont défriché des chemins, ouvert des voies, porté une voie, en avéron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. À partir de la ruralité qui les a naturellement façonnées, le témoignage de ces pionnières contribue à penser le rapport à l'accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l'enclavement. D'hier jusqu'à aujourd'hui. Et si la journaliste Annick Cogent compare le parcours des femmes à des courses d'obstacles, la ruralité en serait-il un de plus ? C'est la question, en creux, à laquelle répondent les pionnières que j'ai invitées au micro de Finta. Après Marie-Thérèse Lacombe, Nicole Fage-Galtier, Daniel Dastugue, Daniel Puech, Sarah Sengla, Emmanuelle Gazel et Josette Hart dans la première saison, Ginette Marchive, Pauline Broca... Audrey Dussutour et Catherine André dans la deuxième saison. Je vous propose d'embarquer pour une troisième saison des pionnières. Aujourd'hui, avec Audrey Germain. On pourrait les compter aisément sur les doigts d'une seule main. Les femmes dirigeantes dans l'univers du numérique ne sont, en avérons comme ailleurs, pas légion. À la tête d'un forçu de technologie, poids lourd du secteur dans le département, Audrey Germain fait partie de celle-là.

  • Speaker #1

    De sa mère geek et pionnière qui lui a donné le goût. des jeux vidéo jusqu'à ses premières expériences numériques, avant même la naissance d'Internet. De longues études et des échelons gravis un à un, elle a traversé sa route sans perte ni fracas, avec pour un seul espoir d'amener d'autres filles dans son sillage. Loin d'apprécier la maigre représentation féminine dans ses rangs, Audrey Germain s'est engagée de longue date pour faire connaître toutes les facettes du numérique et espérer ainsi créer des vocations auprès des jeunes filles. À son échelle, elle est le modèle féminin dont elle a manqué. Loli Rose, Calixtine, Yasmine, Lina, Rojda, Chaynez.

  • Speaker #0

    Cet épisode a été enregistré avec les 8 filles, un groupe de collégiennes des 4 saisons à O'Neill Ausha, engagés dans un programme de découverte des métiers du numérique mené en partenariat avec l'association Face à Vérontharne. Merci à Marion Roch pour sa supervision, à Jean-François Segon, leur professeur de technologie, et à Victoria Bouissi, la CPE du Collège Caston-Étoile, pour leur participation active en coulisses. Bonne époute.

  • Speaker #1

    Pour commencer, nous voudrions vous demander pourquoi. Pourquoi avez-vous accepté de jouer ce jeu aujourd'hui avec nous et de répondre à nos questions ?

  • Speaker #2

    C'est un engagement qui me suit depuis plusieurs années. j'ai eu la chance de profiter de l'ascenseur social. Et donc je trouve normal de rendre à la société ce qu'elle m'a rendu. Ça c'est un premier objectif. Et le deuxième objectif, c'est que je travaille dans le milieu du numérique et que nous sommes très peu de femmes dans le milieu du numérique. Probablement parce qu'il y a une difficulté sur l'image et la représentation des femmes dans l'informatique. Et du coup, je trouve normal de témoigner, de participer à des événements et d'être là avec vous pour vous expliquer comment fonctionnent les femmes dans le milieu de l'informatique, par exemple.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est Audrey Gemmes qui nous parle ou la directrice d'Infosud Technologies ?

  • Speaker #2

    Ah, ça c'est difficile. Dans l'entreprise, je leur fais souvent la blague à mes collaborateurs de savoir avec quelle casquette je parle, parce qu'il y en a plusieurs. Et donc entre Audrey Germain et la directrice générale, c'est à la fois les deux. Il y a toujours un peu de personnel, mais il y a aussi de la représentation de l'entreprise. Mais l'engagement, il est surtout personnel. Je ne suis pas sûre que d'autres directeurs dans le milieu informatique feraient la même chose ou d'autres directrices dans d'autres milieux feraient la même chose. Donc c'est avant tout d'abord un engagement personnel.

  • Speaker #1

    Si l'on remonte dans le temps et que l'on se retrouve au début des années 90, Vous aviez notre âge, 14 ans. Il ressemblait à quoi le numérique à cette époque-là ?

  • Speaker #2

    Waouh, à rien ! Au collège, j'en avais pas d'informatique. Alors moi, j'ai découvert l'informatique avec un prof, un enseignant, pardon, en CM2, qui était passionné par, on ne disait pas encore l'informatique ou les nouvelles technologies, par les ordinateurs. Et il avait monté, un peu comme vous avec le groupe Wifi, un petit groupe avec des élèves qui s'intéressaient. Et après les cours, il nous faisait découvrir les ordinateurs et le langage de programmation basique. C'est une espèce de tortue qui se déplaçait. Et je faisais ça en CM2. Mon papa... Il était intéressé, il était proche de cet enseignant. Et du coup, on a eu un premier ordinateur. Alors, il faut imaginer, regardez les vieux films, des gros tubes cathodiques avec des disquettes dures à l'époque. Il y avait déjà Windows, mais c'était un truc qui ne ressemble pas à ce qui ressemble aujourd'hui. Et c'est comme ça que j'ai commencé à faire un peu d'informatique. Mais au départ, c'était quand même pour jouer. Donc, je faisais du solitaire, des jeux qui existent encore sur le PC.

  • Speaker #1

    Vous, quel est votre... Premier souvenir avec le numérique, à quel moment l'avez-vous découvert ?

  • Speaker #2

    Le numérique, on peut y mettre des trucs super larges derrière. Il y a cette histoire avec mon prof de CM2, et ce premier ordinateur et ce langage de programmation en basique. Après, je vais peut-être vous faire rire, mais ma maman est passionnée par les jeux vidéo. On avait dans les premiers à la maison la fameuse Nintendo. La vieille est vieille maintenant, qui est collecteur, qu'elle a toujours. On regarde régulièrement combien ça coûte, si on pourrait devenir millionnaire avec, mais toujours pas quand même. Et donc, j'ai joué au premier Zelda, toute petite. Et si on met les jeux vidéo dans le numérique et toute cette partie ordinateur, voilà mes premières expériences sur le numérique. Après, je n'aurais jamais dit que j'aurais travaillé dans le numérique. C'est juste une première sensibilisation, on va dire.

  • Speaker #1

    Comment avez-vous su que vous vouliez en faire votre métier ?

  • Speaker #2

    Je ne l'ai jamais su. C'est un parcours, c'est des opportunités. Même si j'avais touché à un ordinateur petit ou que je jouais à des jeux vidéo, au collège, à votre âge, j'ai d'abord voulu devenir ornithologue, journaliste, jardinière, paysagiste. Puis après, comme c'était quand même très différent, je ne savais pas trop ce que je voulais faire. Au lycée, je ne savais toujours pas ce que je voulais faire. Par contre, je détestais la physique, donc j'ai vite arrêté la physique. J'ai pris une voie un peu transverse, médiane, autour de l'économie et la gestion. Et c'est quand j'ai intégré une école, après mon bac plus 2, que j'ai redécouvert finalement l'informatique et les métiers autour de l'informatique. Et c'est à ce moment-là que j'ai fait un choix en me disant je vais plutôt faire de l'informatique plutôt que de la gestion. Puis je me suis fait rattraper par la gestion à la fin.

  • Speaker #0

    Vous avez parlé de la censure sociale. Qu'est-ce que vous entendez par la censure sociale que vous avez prise ?

  • Speaker #2

    Alors, je suis une des premières dans ma famille, côté paternelle et maternelle, à avoir eu le bac. Mes parents se sont rencontrés à Perpignan, dans ce qui s'appelait l'usine des poupées Bella. C'était d'anciennes poupées, et donc ma mère travaillait à la chaîne en tant que couturière sur ces poupées. Et après mon père a fait un parcours dans la fonction publique, il était douanier maritime, mais sans diplôme au départ. Et dans ma famille, il y avait très peu de diplômés, j'ai une cousine qui avait eu son bac juste avant moi. Donc mes parents étaient très fiers que leur fille aînée ait son bac. C'était un enjeu pour eux. Alors faire une prépa, continuer dans des études supérieures et intégrer une école de commerce et ingénieur, c'était quasiment le saint Graal. Donc c'est pour ça que je parle d'ascenseur social. Quand j'ai touché mon premier salaire, quand j'ai été embauchée pour la première fois, mon père était à la fois très fier, mais très vexé aussi. Parce que j'ai gagné plus que lui. Voilà.

  • Speaker #0

    Et vous, vous en faisiez un objectif que de sortir d'une certaine classe sociale et d'aller vers une autre par les études ? Ou est-ce que ça s'est fait assez naturellement ?

  • Speaker #2

    Ça s'est fait naturellement. Enfin, c'est pas quelque chose... C'était pas un plan de carrière ou un objectif ou un enjeu. Parce qu'on peut lire plein de trucs ou entendre plein de choses aujourd'hui dans la presse, les radios, les médias. Quand on voit les parcours des start-upeurs qui rêvent de devenir milliardaires ou quoi que ce soit, ça n'a jamais été un objectif en propre. Moi, j'aime bien dire aux collaborateurs, si je fais ce travail-là, c'est parce que j'arrive le matin avec plaisir, en chantant et en ayant la banane. Ce n'est pas tous les jours facile, on est d'accord, mais c'est ça qui me motive. Donc, je n'avais pas cet objectif-là, ça s'est fait naturellement. Puis après, j'ai eu de la chance aussi, j'étais toujours très bonne élève. J'ai suivi quelque part le parcours, j'ai été bien conseillée par des enseignants à un moment donné, donc j'ai suivi le truc et puis ça m'allait bien et ça me fait plaisir encore.

  • Speaker #1

    Vous avez grandi à Perpignan, où vous avez débuté votre scolarité jusqu'à décrocher un bac S. Vous avez ensuite été diplômé des mines de Paris comme ingénieur informatique. Et c'est d'abord pour la carrière de votre époux que vous posez un pied en Aveyron. De responsable du cloud à InforSud, en 2009, vous êtes donc devenue directrice générale en 2016. Qu'est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    La diversité. Je ne sais jamais de quoi va être faite ma journée, même si j'ai un planning bien rempli, un agenda avec des réunions et plein de sujets différents. Donc le métier d'un directeur général ou une directrice générale, parce que c'est le même, qu'il soit masculin ou féminin, c'est de donner le cap à ses équipes, à ses collaborateurs. C'est un peu comme le commandant sur un bateau. On part du port, on va aller à un autre endroit, mais il faut déjà définir à quel port et comment on va y aller, par quelle route on va passer. Et puis, il faut pouvoir gérer les réserves qu'on va avoir, comment on va mobiliser les différents matelots dans le bateau. Est-ce qu'on a assez ? Prendre des vieux bateaux de charbon, par exemple, pour faire avancer le bateau. C'est un peu la même chose quand on est directeur général. On organise le fonctionnement des équipes pour que tout se passe bien. Mais il y a toujours des surprises. Donc, sur une journée, je peux passer du temps avec mon comptable pour parler gestion, facture des clients, facture des fournisseurs. signer des documents justement pour pouvoir payer des fournisseurs par exemple. L'heure d'après, je vais travailler avec les équipes techniques sur une réponse à un appel d'offres que je vais relire pour savoir à combien on va engager la société et qu'est-ce qu'on a en capacité de faire. Et puis comme j'ai quand même un côté un peu geek quelque part, j'ai gardé la main sur un certain nombre d'outils et de temps en temps j'ai des collaborateurs qui m'appellent pour paramétrer une fonctionnalité, ce genre de choses. Donc j'ai des journées qui sont très variées et c'est ça qui m'amuse, parce que je pense, pour me connaître un peu plus avec l'âge, que la routine m'ennuie, donc j'aime bien les surprises et c'est ça qui est enrichissant dans le métier.

  • Speaker #1

    Vous êtes très engagée dans la diversité en entreprise, pour que les femmes soient aussi plus nombreuses dans les métiers du numérique. Observez-vous une évolution ? Êtes-vous plutôt optimiste sur ce sujet ?

  • Speaker #2

    part des femmes diminue tous les ans. Il y a de moins en moins de jeunes filles qui choisissent des formations autour du numérique. Du coup, il y a des programmes de reconversion pour ramener des femmes après dans le numérique par la suite. Mais c'est assez pessimiste et c'est aussi pour ça que je suis là, pour essayer d'expliquer qu'il y a un intérêt. Je le redis régulièrement. On peut faire plein de métiers très enrichissants dans le milieu de l'informatique. C'est un peu comme en médecine, il y a plein de spécialités différentes. On peut aussi sauver le monde quand on fait de l'informatique. On parle beaucoup d'intelligence artificielle, travailler dans de la médecine et ainsi de suite. Donc j'espère qu'en développant et en expliquant à chaque fois ces différentes options, on amènera un peu plus de femmes dans le numérique.

  • Speaker #0

    Vous parliez donc aussi du fait qu'il n'y a toujours pas assez de femmes dans les métiers du numérique. Comment vous l'expliquez ? Qu'est-ce qui coince encore ?

  • Speaker #2

    Il y a toujours l'image un peu geek, quelque part, du numérique, où on imagine que quand on est informaticien, pour schématiser, on est derrière un PC toute la journée et qu'on rencontre personne. En fait, non, déjà, il y a une équipe autour de nous. Quel que soit le métier et le niveau, en fait, dans l'informatique, il y a toujours une équipe autour, des gens avec qui aller prendre un café, partager un déjeuner, des problématiques. Il y a des clients avec qui on est au téléphone, mais qu'on va voir aussi régulièrement sur site. Chez nous, les collaborateurs, deux à trois jours par semaine, ils sont chez les clients. Ils ne sont pas derrière un PC. Alors, ils travaillent sur des claviers et des écrans, OK. Mais ils sont en contact avec eux, ils vont prendre le café avec eux, ils vont manger avec eux, ils vont essayer de comprendre comment fonctionne l'entreprise et ainsi de suite. Donc, ce n'est pas un métier qui est enfermé derrière un PC. Il y en a. Il y a des gens qui préfèrent travailler comme ça. Ceux qui sont en freelance, en télétravail à 100%. Mais il y en a plein d'autres, non. On est vraiment en contact des clients. Puis, un deuxième aspect, c'est que, pour l'avoir été vue petite... ... J'ai parlé quand j'étais au collège, je voulais être journaliste, ornithologue, jardinière, paysagiste. Avant, je voulais être maîtresse d'école et infirmière, comme beaucoup de petites filles à un moment donné, avec cette idée de soigner, d'être dans ce qu'on appelle le care. Dans l'informatique, on peut l'être aussi, parce qu'il y a toutes les avancées médicales qui se font aujourd'hui avec des outils informatiques. Et s'il n'y a pas des informaticiens pour travailler dans des laboratoires de recherche, ça n'avance pas non plus. Donc il y a aussi tous ces métiers-là qui ne sont pas forcément mis en avant, parce qu'on ne le voit pas à la télé, on n'entend pas parler dans les journaux ou à la radio. Je ne suis pas la meilleure pour en parler parce que je n'ai pas touché moi cette partie-là.

  • Speaker #0

    Ça veut dire que depuis que vous travaillez, vous n'observez pas une évolution. De ce côté-là, les modèles que vous n'avez pas eus, vous n'avez pas l'impression de les voir aujourd'hui pour les jeunes filles. Et c'est peut-être ce Ausha que vous endossez aujourd'hui.

  • Speaker #2

    Oui, parce qu'il y a vraiment, quand on regarde des films, il y a cet informaticien qui est derrière son PC. Même dans les séries policières. les NCIS, et au New York, Miami, enfin plein d'autres séries, il y a toujours l'informaticienne. Parfois, il y a une informaticienne, mais elle est dans son laboratoire, derrière ses écrans, et elle ne sort jamais. Donc, il y a quand même un problème de représentativité, et ça porte préjudice, je pense, à un moment donné, à nos métiers. Donc, je suis là pour ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez juste nous rappeler, Audrey, une dernière fois, la proportion de femmes chez M4 Sud ?

  • Speaker #2

    On est 34%, je crois, au dernier chiffre. Mais si on enlève les commerciales, l'ARH, on va tomber à 15% dans les métiers techniques.

  • Speaker #0

    C'est une proportion qu'on retrouve dans les écoles ?

  • Speaker #2

    Non, on est bien meilleur que dans les écoles et dans d'autres entreprises. Sur les dernières promotions, je vais prendre l'IUT de Rodez, par exemple. Je crois qu'ils sont en quarantaine. Il doit y avoir deux filles. La troisième, l'école d'ingénieurs, il doit y avoir 35. Ils sont peut-être trois, voilà. Donc, ce n'est pas beaucoup.

  • Speaker #1

    Est-ce que le fait d'être une femme a été, un jour dans votre parcours, un obstacle ?

  • Speaker #2

    Parfois un peu de sexisme, il faut appeler un chat un chat. Je me souviendrai toujours, et ça m'a marquée, c'est aussi pour ça que je suis là. J'avais 23 ans, 24 ans, donc je venais de finir mon école, j'étais sur une première mission chez un client. Donc je travaillais à Paris à l'époque, dans une grande entreprise qui travaille toujours dans le télécom. Et j'avais cette... cette mission d'être chef de projet, donc d'encadrer une équipe de développeurs. Et donc, mon client rentre dans la salle, regarde, nous étions plusieurs assis autour de la table, et me voyant pour la première fois, me dit, mademoiselle, vous êtes là pour prendre des notes ? Et donc, j'ai gentiment répondu que non, c'était moi qui étais la chef de projet, donc j'encadrais toutes les personnes autour, et que eux allaient prendre des notes, il n'y avait aucun souci. C'était la première anecdote et puis il y en a d'autres comme ça. Donc, ce n'est pas forcément un obstacle. Il faut le savoir, il faut en jouer avec aussi, des fois. Ça m'amuse toujours quand je vais encore en réunion chez des prospects, des gens qui ne nous connaissent pas ou qui ne se sont pas très bien renseignés sur un forçu de technologie. J'y vais parfois avec un représentant commercial, souvent ce sont des hommes, ils aiment bien mettre des costumes, des cravates, et moi je suis toute petite à côté, pas forcément d'ailleurs en tailleur jupe, et systématiquement le prospect, que ce soit un homme ou une femme, va commencer par dire bonjour à la personne de sexe masculin à côté de moi. Et puis, ah, oups, je savais pas que vous étiez la directrice et s'excuse platement pour pas m'avoir dit bonjour en premier, mais c'est toujours rigolo. Donc ce n'est pas un obstacle, mais il ne faut pas le prendre non plus avec mauvaise foi ou être blessé. Il faut savoir en jouer et en rire aussi quelque part.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qui serait différent dans votre quotidien professionnel si vous étiez un homme ?

  • Speaker #2

    Justement, peut-être qu'on me dirait bonjour en premier, plutôt qu'en dernier des fois. Et à part ça, je ne pense pas que ça changerait grand-chose. Je serais peut-être plus grande, ça c'est sûr. Mais non, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Par exemple, auriez-vous le même salaire si vous étiez un homme ?

  • Speaker #2

    Alors la réponse est oui. Pour le coup, j'ai eu la chance d'avoir un parcours professionnel qui m'a amenée à rencontrer des gens, je vais dire, bien. corrects, normaux, quelque part. Mon premier patron avait deux filles et un garçon. Ces deux filles travaillaient dans l'entreprise, donc il était très attentif à ce genre de choses. Et à un fort sud, c'est la même chose. C'est un groupe qui dépend d'un groupe bancaire, donc ils sont aussi très attentifs à ces aspects-là. Et donc j'ai un bon salaire, au même niveau que celui d'un homme. J'ai des collègues féminines qui sont dans d'autres sociétés et qui remontent ce type de constats et de problèmes. Donc moi, j'y suis vigilante.

  • Speaker #1

    Audrey, nous arrivons à la fin de notre échange et nous avons deux dernières questions pour vous. D'abord, quels ont été vos modèles qui vous ont inspiré ou qui continuent de vous inspirer aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    Waouh, c'est compliqué. J'ai pas eu de modèle, enfin je sais pas. Je n'avais pas préparé cette question-là, mais c'est normal. Un modèle, il n'y a pas de... Dans mon métier, il n'y a pas forcément de modèle particulier. Je sais qu'un garçon, sur la partie numérique, vous citera un Zuckerberg, un Jeff Bezos ou un Elon Musk ou d'autres. Côté féminin, on n'a pas ces grandes figures. Donc, je n'ai pas de modèle. en particulier. J'ai plutôt essayé de prendre ce qui me plaisait chez les personnes que j'ai rencontrées tout au long de mon parcours professionnel. J'ai parlé de mon premier patron. Il était attentif à cette mixité, mais il était aussi très heureux de payer, par exemple, beaucoup d'impôts parce que ça rendait à la société ce qu'il avait pu avoir à un moment donné. Donc, dans chaque rencontre que j'ai pu faire, j'ai plutôt pêché les... Les points qui m'intéressaient, qui me parlaient, qui faisaient écho à ce que je suis. Donc, je n'ai pas un modèle unique ou une idole, ou je ne suis pas fan de quelqu'un, mais je vais plutôt essayer d'aller prendre ces petits trucs-là chez les uns et les autres. Les unes et les autres aussi, de temps en temps.

  • Speaker #1

    Et une dernière question, si c'était à refaire, changeriez-vous quelque chose ?

  • Speaker #2

    Rien du tout. Je suis super contente.

  • Speaker #0

    Elle n'est pas si difficile, mais Audrey, en quoi est-ce que vous croyez ?

  • Speaker #2

    Waouh, ça c'est dur comme question. En quoi est-ce que je crois ? En l'équité. C'est une valeur qui me tient, je pense, depuis peut-être petite. En l'équité entre les hommes, les femmes, dans les métiers, dans tout.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que vous l'avez forgée alors cette croyance ? Qu'est-ce qui vous a convaincu que l'équité devait être ? Partout.

  • Speaker #2

    Peut-être que ça part d'un sentiment d'injustice, peut-être comme tout enfant. Je pense que quand on discute avec des enfants de 3, 4, 5 ans, quand ils voient quelque chose d'injuste, ça les prend aux tripes et ça remonte parfois. Ça donne des psychodrames des fois et je pense que ça vient de là. Après, je ne saurais pas dire. Quel moment particulier. Je n'ai jamais vu un psychologue ni un psychiatre. Je ne me considère pas non plus comme malade, mais peut-être que ça vient de là.

  • Speaker #1

    Audrey, merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé aujourd'hui. Et à bientôt.

  • Speaker #2

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    Audrey, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter à destination des Wi-Fi peut-être ?

  • Speaker #2

    Il ne faut pas avoir peur, il faut y aller. Quel que soit le métier que vous choisirez après, éclatez-vous, choisissez les matières qui vous font plaisir, celles où vous êtes les meilleurs. Parce que travailler, pardon pour l'enseignant dans la salle, on essaye souvent de travailler les matières où on est les moins bons. Alors il faut le travailler un minimum pour pouvoir avoir un socle, mais c'est les matières où on est les meilleurs et on s'éclate le plus qui vont nous porter par la suite. Et ça, je pense qu'on ne le dit pas encore assez.

  • Speaker #0

    Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de la saison 3 de Finta. J'espère qu'il vous a plu et que cette conversation avec Audrey Germain ouvre votre champ des possibles comme il a ouvert le mien. Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou en redécouvrant les femmes pionnières de la première saison sur www.fintapodcast.fr ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un tout petit peu le temps. Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par moi-même, Lola Cross. Il est mixé par Mathieu Viguier du studio Qude. Si vous appréciez Finta et que vous souhaitez soutenir ce travail indépendant, parlez-en autour de vous. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter au podcast. Vous pouvez suivre toute son actualité sur www.fintapodcast.fr, sur les réseaux sociaux avec finta.lepodcast, et aussi vous abonner à la newsletter pour recevoir les nouveaux épisodes directement dans votre boîte email. A très bientôt !

Description

Après Marie-Thérèse Lacombe, Nicole Fagegaltier, Danièle Dastugue, Danielle Puech, Sarah Singla, Emmanuelle Gazel et Josette Hart, dans la première saison, Ginette Marchive, Pauline Broqua, Audrey Dussutour et Catherine André, dans la deuxième saison, et Yseulys Costes, je vous propose d’embarquer pour une troisième saison des Pionnières. Aujourd’hui, avec Audrey Girmens.


On pourrait les compter aisément sur les doigts d’une seule main. Les femmes dirigeantes dans l’univers du numérique ne sont, en Aveyron comme ailleurs, pas légion. A la tête d’Inforsud Technologies, poids lourd du secteur dans le département, Audrey Girmens fait partie de celles-là.


De sa mère geek et pionnière, qui lui a donné le goût des jeux vidéos, jusqu’à ses premières expériences numériques, avant même la naissance d’internet, Audrey Girmens le dit elle-même, elle a pris l’ascenseur social. De longues études et des échelons gravis un à un, elle a tracé sa route sans pertes ni fracas. Avec, pour seul espoir, d’emmener d’autres filles dans son sillage.


Loin d’apprécier la maigre représentation féminine dans ses rangs, Audrey Girmens s’est engagée, de longue date, pour faire connaître toutes les facettes du numérique et espérer ainsi créer des vocations auprès des jeunes filles. A son échelle, elle est le modèle féminin dont elle a manqué.


Cet épisode a été enregistré avec les Wifilles, un groupe de collégiennes des Quatre-Saisons à Onet-le-Château, engagées dans un programme de découverte des métiers du numérique, mené en partenariat avec l’association Face Aveyron-Tarn. Merci à Marion Roch, pour sa supervision, à Jean-François, leur professeur de technologie, et à Victoria Bouyssi, la CPE du collège castonétois, pour leur participation active en coulisses.

Bonne écoute !


Episode enregistré en décembre 2023.


Finta est un podcast réalisé, produit et écrit par Lola Cros. Il est mixé par le studio Qude. Plus d'infos : www.fintapodcast.fr Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Elles ont défriché des chemins, ouvert des voies, porté une voie, en avéron et parfois bien au-delà. Toutes ont en commun ce territoire. À partir de la ruralité qui les a naturellement façonnées, le témoignage de ces pionnières contribue à penser le rapport à l'accomplissement des femmes à la campagne, au féminisme et à l'enclavement. D'hier jusqu'à aujourd'hui. Et si la journaliste Annick Cogent compare le parcours des femmes à des courses d'obstacles, la ruralité en serait-il un de plus ? C'est la question, en creux, à laquelle répondent les pionnières que j'ai invitées au micro de Finta. Après Marie-Thérèse Lacombe, Nicole Fage-Galtier, Daniel Dastugue, Daniel Puech, Sarah Sengla, Emmanuelle Gazel et Josette Hart dans la première saison, Ginette Marchive, Pauline Broca... Audrey Dussutour et Catherine André dans la deuxième saison. Je vous propose d'embarquer pour une troisième saison des pionnières. Aujourd'hui, avec Audrey Germain. On pourrait les compter aisément sur les doigts d'une seule main. Les femmes dirigeantes dans l'univers du numérique ne sont, en avérons comme ailleurs, pas légion. À la tête d'un forçu de technologie, poids lourd du secteur dans le département, Audrey Germain fait partie de celle-là.

  • Speaker #1

    De sa mère geek et pionnière qui lui a donné le goût. des jeux vidéo jusqu'à ses premières expériences numériques, avant même la naissance d'Internet. De longues études et des échelons gravis un à un, elle a traversé sa route sans perte ni fracas, avec pour un seul espoir d'amener d'autres filles dans son sillage. Loin d'apprécier la maigre représentation féminine dans ses rangs, Audrey Germain s'est engagée de longue date pour faire connaître toutes les facettes du numérique et espérer ainsi créer des vocations auprès des jeunes filles. À son échelle, elle est le modèle féminin dont elle a manqué. Loli Rose, Calixtine, Yasmine, Lina, Rojda, Chaynez.

  • Speaker #0

    Cet épisode a été enregistré avec les 8 filles, un groupe de collégiennes des 4 saisons à O'Neill Ausha, engagés dans un programme de découverte des métiers du numérique mené en partenariat avec l'association Face à Vérontharne. Merci à Marion Roch pour sa supervision, à Jean-François Segon, leur professeur de technologie, et à Victoria Bouissi, la CPE du Collège Caston-Étoile, pour leur participation active en coulisses. Bonne époute.

  • Speaker #1

    Pour commencer, nous voudrions vous demander pourquoi. Pourquoi avez-vous accepté de jouer ce jeu aujourd'hui avec nous et de répondre à nos questions ?

  • Speaker #2

    C'est un engagement qui me suit depuis plusieurs années. j'ai eu la chance de profiter de l'ascenseur social. Et donc je trouve normal de rendre à la société ce qu'elle m'a rendu. Ça c'est un premier objectif. Et le deuxième objectif, c'est que je travaille dans le milieu du numérique et que nous sommes très peu de femmes dans le milieu du numérique. Probablement parce qu'il y a une difficulté sur l'image et la représentation des femmes dans l'informatique. Et du coup, je trouve normal de témoigner, de participer à des événements et d'être là avec vous pour vous expliquer comment fonctionnent les femmes dans le milieu de l'informatique, par exemple.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est Audrey Gemmes qui nous parle ou la directrice d'Infosud Technologies ?

  • Speaker #2

    Ah, ça c'est difficile. Dans l'entreprise, je leur fais souvent la blague à mes collaborateurs de savoir avec quelle casquette je parle, parce qu'il y en a plusieurs. Et donc entre Audrey Germain et la directrice générale, c'est à la fois les deux. Il y a toujours un peu de personnel, mais il y a aussi de la représentation de l'entreprise. Mais l'engagement, il est surtout personnel. Je ne suis pas sûre que d'autres directeurs dans le milieu informatique feraient la même chose ou d'autres directrices dans d'autres milieux feraient la même chose. Donc c'est avant tout d'abord un engagement personnel.

  • Speaker #1

    Si l'on remonte dans le temps et que l'on se retrouve au début des années 90, Vous aviez notre âge, 14 ans. Il ressemblait à quoi le numérique à cette époque-là ?

  • Speaker #2

    Waouh, à rien ! Au collège, j'en avais pas d'informatique. Alors moi, j'ai découvert l'informatique avec un prof, un enseignant, pardon, en CM2, qui était passionné par, on ne disait pas encore l'informatique ou les nouvelles technologies, par les ordinateurs. Et il avait monté, un peu comme vous avec le groupe Wifi, un petit groupe avec des élèves qui s'intéressaient. Et après les cours, il nous faisait découvrir les ordinateurs et le langage de programmation basique. C'est une espèce de tortue qui se déplaçait. Et je faisais ça en CM2. Mon papa... Il était intéressé, il était proche de cet enseignant. Et du coup, on a eu un premier ordinateur. Alors, il faut imaginer, regardez les vieux films, des gros tubes cathodiques avec des disquettes dures à l'époque. Il y avait déjà Windows, mais c'était un truc qui ne ressemble pas à ce qui ressemble aujourd'hui. Et c'est comme ça que j'ai commencé à faire un peu d'informatique. Mais au départ, c'était quand même pour jouer. Donc, je faisais du solitaire, des jeux qui existent encore sur le PC.

  • Speaker #1

    Vous, quel est votre... Premier souvenir avec le numérique, à quel moment l'avez-vous découvert ?

  • Speaker #2

    Le numérique, on peut y mettre des trucs super larges derrière. Il y a cette histoire avec mon prof de CM2, et ce premier ordinateur et ce langage de programmation en basique. Après, je vais peut-être vous faire rire, mais ma maman est passionnée par les jeux vidéo. On avait dans les premiers à la maison la fameuse Nintendo. La vieille est vieille maintenant, qui est collecteur, qu'elle a toujours. On regarde régulièrement combien ça coûte, si on pourrait devenir millionnaire avec, mais toujours pas quand même. Et donc, j'ai joué au premier Zelda, toute petite. Et si on met les jeux vidéo dans le numérique et toute cette partie ordinateur, voilà mes premières expériences sur le numérique. Après, je n'aurais jamais dit que j'aurais travaillé dans le numérique. C'est juste une première sensibilisation, on va dire.

  • Speaker #1

    Comment avez-vous su que vous vouliez en faire votre métier ?

  • Speaker #2

    Je ne l'ai jamais su. C'est un parcours, c'est des opportunités. Même si j'avais touché à un ordinateur petit ou que je jouais à des jeux vidéo, au collège, à votre âge, j'ai d'abord voulu devenir ornithologue, journaliste, jardinière, paysagiste. Puis après, comme c'était quand même très différent, je ne savais pas trop ce que je voulais faire. Au lycée, je ne savais toujours pas ce que je voulais faire. Par contre, je détestais la physique, donc j'ai vite arrêté la physique. J'ai pris une voie un peu transverse, médiane, autour de l'économie et la gestion. Et c'est quand j'ai intégré une école, après mon bac plus 2, que j'ai redécouvert finalement l'informatique et les métiers autour de l'informatique. Et c'est à ce moment-là que j'ai fait un choix en me disant je vais plutôt faire de l'informatique plutôt que de la gestion. Puis je me suis fait rattraper par la gestion à la fin.

  • Speaker #0

    Vous avez parlé de la censure sociale. Qu'est-ce que vous entendez par la censure sociale que vous avez prise ?

  • Speaker #2

    Alors, je suis une des premières dans ma famille, côté paternelle et maternelle, à avoir eu le bac. Mes parents se sont rencontrés à Perpignan, dans ce qui s'appelait l'usine des poupées Bella. C'était d'anciennes poupées, et donc ma mère travaillait à la chaîne en tant que couturière sur ces poupées. Et après mon père a fait un parcours dans la fonction publique, il était douanier maritime, mais sans diplôme au départ. Et dans ma famille, il y avait très peu de diplômés, j'ai une cousine qui avait eu son bac juste avant moi. Donc mes parents étaient très fiers que leur fille aînée ait son bac. C'était un enjeu pour eux. Alors faire une prépa, continuer dans des études supérieures et intégrer une école de commerce et ingénieur, c'était quasiment le saint Graal. Donc c'est pour ça que je parle d'ascenseur social. Quand j'ai touché mon premier salaire, quand j'ai été embauchée pour la première fois, mon père était à la fois très fier, mais très vexé aussi. Parce que j'ai gagné plus que lui. Voilà.

  • Speaker #0

    Et vous, vous en faisiez un objectif que de sortir d'une certaine classe sociale et d'aller vers une autre par les études ? Ou est-ce que ça s'est fait assez naturellement ?

  • Speaker #2

    Ça s'est fait naturellement. Enfin, c'est pas quelque chose... C'était pas un plan de carrière ou un objectif ou un enjeu. Parce qu'on peut lire plein de trucs ou entendre plein de choses aujourd'hui dans la presse, les radios, les médias. Quand on voit les parcours des start-upeurs qui rêvent de devenir milliardaires ou quoi que ce soit, ça n'a jamais été un objectif en propre. Moi, j'aime bien dire aux collaborateurs, si je fais ce travail-là, c'est parce que j'arrive le matin avec plaisir, en chantant et en ayant la banane. Ce n'est pas tous les jours facile, on est d'accord, mais c'est ça qui me motive. Donc, je n'avais pas cet objectif-là, ça s'est fait naturellement. Puis après, j'ai eu de la chance aussi, j'étais toujours très bonne élève. J'ai suivi quelque part le parcours, j'ai été bien conseillée par des enseignants à un moment donné, donc j'ai suivi le truc et puis ça m'allait bien et ça me fait plaisir encore.

  • Speaker #1

    Vous avez grandi à Perpignan, où vous avez débuté votre scolarité jusqu'à décrocher un bac S. Vous avez ensuite été diplômé des mines de Paris comme ingénieur informatique. Et c'est d'abord pour la carrière de votre époux que vous posez un pied en Aveyron. De responsable du cloud à InforSud, en 2009, vous êtes donc devenue directrice générale en 2016. Qu'est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    La diversité. Je ne sais jamais de quoi va être faite ma journée, même si j'ai un planning bien rempli, un agenda avec des réunions et plein de sujets différents. Donc le métier d'un directeur général ou une directrice générale, parce que c'est le même, qu'il soit masculin ou féminin, c'est de donner le cap à ses équipes, à ses collaborateurs. C'est un peu comme le commandant sur un bateau. On part du port, on va aller à un autre endroit, mais il faut déjà définir à quel port et comment on va y aller, par quelle route on va passer. Et puis, il faut pouvoir gérer les réserves qu'on va avoir, comment on va mobiliser les différents matelots dans le bateau. Est-ce qu'on a assez ? Prendre des vieux bateaux de charbon, par exemple, pour faire avancer le bateau. C'est un peu la même chose quand on est directeur général. On organise le fonctionnement des équipes pour que tout se passe bien. Mais il y a toujours des surprises. Donc, sur une journée, je peux passer du temps avec mon comptable pour parler gestion, facture des clients, facture des fournisseurs. signer des documents justement pour pouvoir payer des fournisseurs par exemple. L'heure d'après, je vais travailler avec les équipes techniques sur une réponse à un appel d'offres que je vais relire pour savoir à combien on va engager la société et qu'est-ce qu'on a en capacité de faire. Et puis comme j'ai quand même un côté un peu geek quelque part, j'ai gardé la main sur un certain nombre d'outils et de temps en temps j'ai des collaborateurs qui m'appellent pour paramétrer une fonctionnalité, ce genre de choses. Donc j'ai des journées qui sont très variées et c'est ça qui m'amuse, parce que je pense, pour me connaître un peu plus avec l'âge, que la routine m'ennuie, donc j'aime bien les surprises et c'est ça qui est enrichissant dans le métier.

  • Speaker #1

    Vous êtes très engagée dans la diversité en entreprise, pour que les femmes soient aussi plus nombreuses dans les métiers du numérique. Observez-vous une évolution ? Êtes-vous plutôt optimiste sur ce sujet ?

  • Speaker #2

    part des femmes diminue tous les ans. Il y a de moins en moins de jeunes filles qui choisissent des formations autour du numérique. Du coup, il y a des programmes de reconversion pour ramener des femmes après dans le numérique par la suite. Mais c'est assez pessimiste et c'est aussi pour ça que je suis là, pour essayer d'expliquer qu'il y a un intérêt. Je le redis régulièrement. On peut faire plein de métiers très enrichissants dans le milieu de l'informatique. C'est un peu comme en médecine, il y a plein de spécialités différentes. On peut aussi sauver le monde quand on fait de l'informatique. On parle beaucoup d'intelligence artificielle, travailler dans de la médecine et ainsi de suite. Donc j'espère qu'en développant et en expliquant à chaque fois ces différentes options, on amènera un peu plus de femmes dans le numérique.

  • Speaker #0

    Vous parliez donc aussi du fait qu'il n'y a toujours pas assez de femmes dans les métiers du numérique. Comment vous l'expliquez ? Qu'est-ce qui coince encore ?

  • Speaker #2

    Il y a toujours l'image un peu geek, quelque part, du numérique, où on imagine que quand on est informaticien, pour schématiser, on est derrière un PC toute la journée et qu'on rencontre personne. En fait, non, déjà, il y a une équipe autour de nous. Quel que soit le métier et le niveau, en fait, dans l'informatique, il y a toujours une équipe autour, des gens avec qui aller prendre un café, partager un déjeuner, des problématiques. Il y a des clients avec qui on est au téléphone, mais qu'on va voir aussi régulièrement sur site. Chez nous, les collaborateurs, deux à trois jours par semaine, ils sont chez les clients. Ils ne sont pas derrière un PC. Alors, ils travaillent sur des claviers et des écrans, OK. Mais ils sont en contact avec eux, ils vont prendre le café avec eux, ils vont manger avec eux, ils vont essayer de comprendre comment fonctionne l'entreprise et ainsi de suite. Donc, ce n'est pas un métier qui est enfermé derrière un PC. Il y en a. Il y a des gens qui préfèrent travailler comme ça. Ceux qui sont en freelance, en télétravail à 100%. Mais il y en a plein d'autres, non. On est vraiment en contact des clients. Puis, un deuxième aspect, c'est que, pour l'avoir été vue petite... ... J'ai parlé quand j'étais au collège, je voulais être journaliste, ornithologue, jardinière, paysagiste. Avant, je voulais être maîtresse d'école et infirmière, comme beaucoup de petites filles à un moment donné, avec cette idée de soigner, d'être dans ce qu'on appelle le care. Dans l'informatique, on peut l'être aussi, parce qu'il y a toutes les avancées médicales qui se font aujourd'hui avec des outils informatiques. Et s'il n'y a pas des informaticiens pour travailler dans des laboratoires de recherche, ça n'avance pas non plus. Donc il y a aussi tous ces métiers-là qui ne sont pas forcément mis en avant, parce qu'on ne le voit pas à la télé, on n'entend pas parler dans les journaux ou à la radio. Je ne suis pas la meilleure pour en parler parce que je n'ai pas touché moi cette partie-là.

  • Speaker #0

    Ça veut dire que depuis que vous travaillez, vous n'observez pas une évolution. De ce côté-là, les modèles que vous n'avez pas eus, vous n'avez pas l'impression de les voir aujourd'hui pour les jeunes filles. Et c'est peut-être ce Ausha que vous endossez aujourd'hui.

  • Speaker #2

    Oui, parce qu'il y a vraiment, quand on regarde des films, il y a cet informaticien qui est derrière son PC. Même dans les séries policières. les NCIS, et au New York, Miami, enfin plein d'autres séries, il y a toujours l'informaticienne. Parfois, il y a une informaticienne, mais elle est dans son laboratoire, derrière ses écrans, et elle ne sort jamais. Donc, il y a quand même un problème de représentativité, et ça porte préjudice, je pense, à un moment donné, à nos métiers. Donc, je suis là pour ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez juste nous rappeler, Audrey, une dernière fois, la proportion de femmes chez M4 Sud ?

  • Speaker #2

    On est 34%, je crois, au dernier chiffre. Mais si on enlève les commerciales, l'ARH, on va tomber à 15% dans les métiers techniques.

  • Speaker #0

    C'est une proportion qu'on retrouve dans les écoles ?

  • Speaker #2

    Non, on est bien meilleur que dans les écoles et dans d'autres entreprises. Sur les dernières promotions, je vais prendre l'IUT de Rodez, par exemple. Je crois qu'ils sont en quarantaine. Il doit y avoir deux filles. La troisième, l'école d'ingénieurs, il doit y avoir 35. Ils sont peut-être trois, voilà. Donc, ce n'est pas beaucoup.

  • Speaker #1

    Est-ce que le fait d'être une femme a été, un jour dans votre parcours, un obstacle ?

  • Speaker #2

    Parfois un peu de sexisme, il faut appeler un chat un chat. Je me souviendrai toujours, et ça m'a marquée, c'est aussi pour ça que je suis là. J'avais 23 ans, 24 ans, donc je venais de finir mon école, j'étais sur une première mission chez un client. Donc je travaillais à Paris à l'époque, dans une grande entreprise qui travaille toujours dans le télécom. Et j'avais cette... cette mission d'être chef de projet, donc d'encadrer une équipe de développeurs. Et donc, mon client rentre dans la salle, regarde, nous étions plusieurs assis autour de la table, et me voyant pour la première fois, me dit, mademoiselle, vous êtes là pour prendre des notes ? Et donc, j'ai gentiment répondu que non, c'était moi qui étais la chef de projet, donc j'encadrais toutes les personnes autour, et que eux allaient prendre des notes, il n'y avait aucun souci. C'était la première anecdote et puis il y en a d'autres comme ça. Donc, ce n'est pas forcément un obstacle. Il faut le savoir, il faut en jouer avec aussi, des fois. Ça m'amuse toujours quand je vais encore en réunion chez des prospects, des gens qui ne nous connaissent pas ou qui ne se sont pas très bien renseignés sur un forçu de technologie. J'y vais parfois avec un représentant commercial, souvent ce sont des hommes, ils aiment bien mettre des costumes, des cravates, et moi je suis toute petite à côté, pas forcément d'ailleurs en tailleur jupe, et systématiquement le prospect, que ce soit un homme ou une femme, va commencer par dire bonjour à la personne de sexe masculin à côté de moi. Et puis, ah, oups, je savais pas que vous étiez la directrice et s'excuse platement pour pas m'avoir dit bonjour en premier, mais c'est toujours rigolo. Donc ce n'est pas un obstacle, mais il ne faut pas le prendre non plus avec mauvaise foi ou être blessé. Il faut savoir en jouer et en rire aussi quelque part.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qui serait différent dans votre quotidien professionnel si vous étiez un homme ?

  • Speaker #2

    Justement, peut-être qu'on me dirait bonjour en premier, plutôt qu'en dernier des fois. Et à part ça, je ne pense pas que ça changerait grand-chose. Je serais peut-être plus grande, ça c'est sûr. Mais non, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Par exemple, auriez-vous le même salaire si vous étiez un homme ?

  • Speaker #2

    Alors la réponse est oui. Pour le coup, j'ai eu la chance d'avoir un parcours professionnel qui m'a amenée à rencontrer des gens, je vais dire, bien. corrects, normaux, quelque part. Mon premier patron avait deux filles et un garçon. Ces deux filles travaillaient dans l'entreprise, donc il était très attentif à ce genre de choses. Et à un fort sud, c'est la même chose. C'est un groupe qui dépend d'un groupe bancaire, donc ils sont aussi très attentifs à ces aspects-là. Et donc j'ai un bon salaire, au même niveau que celui d'un homme. J'ai des collègues féminines qui sont dans d'autres sociétés et qui remontent ce type de constats et de problèmes. Donc moi, j'y suis vigilante.

  • Speaker #1

    Audrey, nous arrivons à la fin de notre échange et nous avons deux dernières questions pour vous. D'abord, quels ont été vos modèles qui vous ont inspiré ou qui continuent de vous inspirer aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    Waouh, c'est compliqué. J'ai pas eu de modèle, enfin je sais pas. Je n'avais pas préparé cette question-là, mais c'est normal. Un modèle, il n'y a pas de... Dans mon métier, il n'y a pas forcément de modèle particulier. Je sais qu'un garçon, sur la partie numérique, vous citera un Zuckerberg, un Jeff Bezos ou un Elon Musk ou d'autres. Côté féminin, on n'a pas ces grandes figures. Donc, je n'ai pas de modèle. en particulier. J'ai plutôt essayé de prendre ce qui me plaisait chez les personnes que j'ai rencontrées tout au long de mon parcours professionnel. J'ai parlé de mon premier patron. Il était attentif à cette mixité, mais il était aussi très heureux de payer, par exemple, beaucoup d'impôts parce que ça rendait à la société ce qu'il avait pu avoir à un moment donné. Donc, dans chaque rencontre que j'ai pu faire, j'ai plutôt pêché les... Les points qui m'intéressaient, qui me parlaient, qui faisaient écho à ce que je suis. Donc, je n'ai pas un modèle unique ou une idole, ou je ne suis pas fan de quelqu'un, mais je vais plutôt essayer d'aller prendre ces petits trucs-là chez les uns et les autres. Les unes et les autres aussi, de temps en temps.

  • Speaker #1

    Et une dernière question, si c'était à refaire, changeriez-vous quelque chose ?

  • Speaker #2

    Rien du tout. Je suis super contente.

  • Speaker #0

    Elle n'est pas si difficile, mais Audrey, en quoi est-ce que vous croyez ?

  • Speaker #2

    Waouh, ça c'est dur comme question. En quoi est-ce que je crois ? En l'équité. C'est une valeur qui me tient, je pense, depuis peut-être petite. En l'équité entre les hommes, les femmes, dans les métiers, dans tout.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que vous l'avez forgée alors cette croyance ? Qu'est-ce qui vous a convaincu que l'équité devait être ? Partout.

  • Speaker #2

    Peut-être que ça part d'un sentiment d'injustice, peut-être comme tout enfant. Je pense que quand on discute avec des enfants de 3, 4, 5 ans, quand ils voient quelque chose d'injuste, ça les prend aux tripes et ça remonte parfois. Ça donne des psychodrames des fois et je pense que ça vient de là. Après, je ne saurais pas dire. Quel moment particulier. Je n'ai jamais vu un psychologue ni un psychiatre. Je ne me considère pas non plus comme malade, mais peut-être que ça vient de là.

  • Speaker #1

    Audrey, merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé aujourd'hui. Et à bientôt.

  • Speaker #2

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    Audrey, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter à destination des Wi-Fi peut-être ?

  • Speaker #2

    Il ne faut pas avoir peur, il faut y aller. Quel que soit le métier que vous choisirez après, éclatez-vous, choisissez les matières qui vous font plaisir, celles où vous êtes les meilleurs. Parce que travailler, pardon pour l'enseignant dans la salle, on essaye souvent de travailler les matières où on est les moins bons. Alors il faut le travailler un minimum pour pouvoir avoir un socle, mais c'est les matières où on est les meilleurs et on s'éclate le plus qui vont nous porter par la suite. Et ça, je pense qu'on ne le dit pas encore assez.

  • Speaker #0

    Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de la saison 3 de Finta. J'espère qu'il vous a plu et que cette conversation avec Audrey Germain ouvre votre champ des possibles comme il a ouvert le mien. Vous pouvez prolonger le plaisir en découvrant ou en redécouvrant les femmes pionnières de la première saison sur www.fintapodcast.fr ou sur votre appli de podcast préférée. Il suffit de remonter un tout petit peu le temps. Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par moi-même, Lola Cross. Il est mixé par Mathieu Viguier du studio Qude. Si vous appréciez Finta et que vous souhaitez soutenir ce travail indépendant, parlez-en autour de vous. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter au podcast. Vous pouvez suivre toute son actualité sur www.fintapodcast.fr, sur les réseaux sociaux avec finta.lepodcast, et aussi vous abonner à la newsletter pour recevoir les nouveaux épisodes directement dans votre boîte email. A très bientôt !

Share

Embed

You may also like