- Speaker #0
Bonjour Romain, bonjour Léa, je suis ravie aujourd'hui de commencer à parler de ce beau projet qu'on a créé ensemble à six mains. Ce projet c'est Regards, qui est une série d'illustrations que tu as faites toi Léa, tu es artiste illustratrice et c'est toi qui les as produites Romain. Tu es imprimeur, scénographe et graphiste. Donc aujourd'hui on est dans ton atelier Romain, on a pris le temps de parler de ce projet. Je crois savoir, et on va rentrer dans les détails, mais que c'est un projet qui fait écho à nos valeurs à tous, puisque c'est un projet qui met en avant l'artisanat. On va commencer par toi, Léa. Est-ce que tu peux nous expliquer ton parcours en tant qu'artiste illustratrice et engagée pour la mise en lumière des métiers d'art ?
- Speaker #1
Bonjour Lisa et merci pour cette invitation. Je suis très heureuse de pouvoir parler aujourd'hui de ce projet qu'on a fait tous ensemble. Je suis illustratrice et je spécialise mon travail autour des métiers d'art. Et cela a commencé autour de ma passion pour le verre soufflé, qui est une matière qui m'inspire depuis mon enfance, on peut dire, et surtout depuis que j'ai rencontré un des artistes verriers qui s'appelle Jérémy-Maxuel Vintrébert. Et donc avec lui et d'autres artistes que j'ai rencontrés par la suite, je réalise en ce moment une bande dessinée reportée. sur le vers soufflé que je vais publier avec les éditions Pantera et ça sortira en fin d'année 2025. C'est un projet qui est très important et qui m'ouvre aussi les portes vers d'autres métiers. Je suis toujours curieuse de découvrir des métiers d'art et j'aime transmettre la beauté d'un savoir-faire technique et sensible à travers les mots et les images.
- Speaker #0
Donc en effet Léa, on s'est rencontré chez Jérémy-Maxol Ventrebert pour ta BD. Ce qui m'a touchée et la raison pour laquelle j'ai voulu travailler avec toi sur ce projet Regards, c'est ta faculté. à retranscrire le geste en illustration et en dessin. Est-ce que justement, tu peux nous expliquer comment tu t'es inspirée de ces quatre artisans du podcast que tu as illustrés, qui sont Robert Mercier, Adrien Jaminet, Aurore Boutter et Valérie Tanfin. Donc, quatre artisanats complètement différents. Comment tu as fait pour retranscrire ces gestes-là ?
- Speaker #1
J'aime partir à la rencontre des artisans. Aurore Boutter, je la connaissais déjà avant de faire ce projet ensemble. Et donc, ce n'était pas forcément le cas pour les... trois autres. Donc j'ai eu la chance de rencontrer Robert Mercier qui m'a ouvert les portes de son atelier. C'était une très belle rencontre. Je ne connaissais pas du tout le cuir finalement et c'était incroyable de pouvoir en savoir plus à travers son métier, son univers qui est fantastique. Malheureusement, je n'ai pas pu encore rencontrer Valérie Tanfin et Adrien Jaminet pour des raisons géographiques ou de timing, mais j'ai essayé de me plonger autrement dans leurs univers. à travers une recherche iconome graphique. Je me suis plongée dans des photos, des vidéos que tu avais pu m'envoyer, tes podcasts aussi, bien sûr, que j'ai pu écouter. Tout ça dans l'idée de retranscrire l'univers de chacun. J'ai commencé par me poser la question à savoir quel geste allait être le plus important à représenter parce que forcément, je ne pouvais pas tout représenter. Ils peuvent avoir des techniques différentes en fonction des pièces qu'ils vont créer. J'ai apporté ma sensibilité aussi, ce que j'avais envie de raconter en dessin. J'ai voulu... condenser en une planche à la fois l'univers, les gestes et aussi le portrait de chacun parce que j'aurais très bien pu représenter seulement des gestes sans voir le visage mais ça me semblait important de pouvoir montrer la personnalité qu'il y a derrière un objet pour donner une âme supplémentaire et c'est ça qui m'intéresse aussi. Je trouve une humanité, une chaleur humaine dans les ateliers qui est réconfortante. C'est ça qui est beau dans l'artisanat et c'est tout ça que je voulais représenter.
- Speaker #0
Eh bien, tu l'as fait avec brio, donc félicitations. Merci. Il y a quelque chose qui me touche beaucoup dans ton trait aussi. J'utilise tout le temps ce même terme de douceur, mais je trouve que ça transmet ta personnalité. Tu as un coup de crayon très doux. Est-ce que tu peux nous expliquer peut-être un peu plus techniquement comment tu retransmets cette douceur ?
- Speaker #1
Déjà, merci beaucoup pour ce compliment. Je l'utilise le crayon parce que c'est une technique qui me plaît particulièrement. J'aime le grain, le contact avec le papier. Ça me permet aussi d'avoir un trait qui est non lisse, non figé. Et c'est ce côté aléatoire qui me plaît aussi pour pouvoir faire écho au savoir-faire manuel.
- Speaker #0
Je suis complètement d'accord et je pense que c'est un très beau médium pour retranscrire l'artisanat.
- Speaker #1
Il y a toujours une part numérique aussi dans mon travail. J'ai dû adapter mes illustrations pour le format de la sérigraphie parce qu'il fallait décomposer pour pouvoir réaliser les couleurs qui s'impriment couche par couche.
- Speaker #0
C'est une excellente transition. pour parler de Romain. Romain, je l'ai dit en introduction, tu es imprimeur, sérigraphe et graphiste. Tu es le fondateur de l'atelier Fouels chez qui nous avons imprimé ces illustrations. Et nous sommes aujourd'hui dans ton atelier, donc je peux voir autour de moi que tu as beaucoup de créations et beaucoup de créations en relation avec des artistes. Est-ce que tu peux nous expliquer justement la façon dont tu travailles avec eux ?
- Speaker #2
Bonjour Lisa. Merci aussi pour ce moment convivial autour de notre artisanat et de nos savoir-faire. Effectivement, l'atelier Fwells que je dirige depuis bientôt 12 ans, On participe à cet essor artistique et artisanat aussi, où l'artiste est vraiment au centre de nos créations. Et on va les faire vraiment comme avec, par exemple, Léa, avec qui on a déjà travaillé sur trois projets précédemment ensemble. On va vraiment opter sur une rencontre. On invite chaque acteur, chaque illustrateur à venir à l'atelier directement, travailler ensemble, expliquer la sérigraphie, expliquer ce qu'est la sérigraphie, parce que là, Léa nous parle de couches, effectivement. Dans notre processus, on est obligé de séparer chacune des couleurs et de venir ensuite les rassembler. Donc ça nous donne un choix multiple avec nos encres. Donc on peut utiliser n'importe quel type d'encre en sérigraphie, n'importe quel type de teinte, mais surtout on peut les créer sur mesure, comme dans le projet avec ces quatre illustrations, où on a dû créer deux teintes par série. Ça, on l'a fait en étroite collaboration avec l'artiste. Donc le premier pas, c'est vraiment se rencontrer à l'atelier, commencer le travail et le commencer ensemble. Avec Léa, on avait déjà travaillé avant. sur d'autres projets aussi, où on avait déjà séparé les couleurs sur ordinateur. Donc on est venu rescanner des planches, les planches dessinées. Donc on voit les œuvres originales aussi, comme elles sont en premier. Et ensuite, il y a son travail de séparation des couleurs. On donne des fois des petites astuces pour le faire. On va intégrer encore une fois l'artiste dans les premiers processus. On va faire des essais de couleurs, on va faire des essais de combinaisons. Et on va continuer à l'accompagner, parce que l'artiste est vraiment en demande aussi de suivre le processus. C'est ce qu'on essaye de faire, de rendre vraiment la chose très humaine. Ce n'est pas juste un fichier, ce n'est pas juste un coup de crayon, c'est également essayer de retranscrire au mieux ce qu'on nous a demandé de faire aussi et puis de le faire avec passion.
- Speaker #0
La technique de la scérographie, on reviendra dessus dans les prochains épisodes. C'est une technique artisanale de production. Est-ce que, brièvement, juste pour teaser un peu nos auditeurs, tu peux nous expliquer en quoi ça consiste ?
- Speaker #2
Alors la scérographie, on peut dire que c'est une technique d'impression au pochoir qui va venir séparer les couches. et nous on va venir les rassembler, donc couleur par couleur. Les trois principes, plus ou moins, enfin les trois atouts, avantages de la scénographie, c'est le choix de la couleur, des couleurs multiples, on peut utiliser n'importe quel type d'encre et de couleurs, de teintes, on peut les créer, donc phosphorescent, fluorescent, mais je vous en dirai plus la prochaine fois. Et c'est aussi multi-domaine, c'est une technique qui est polyvalente et qui s'adapte sur absolument tout type de support à plat. Donc on peut aussi bien imprimer en signalétique que là sur du papier. Et le papier c'est quand même notre cœur de métier, mais sans... On en parlera un peu plus en détail, j'ai l'impression, la prochaine fois.
- Speaker #0
Est-ce que tu peux nous expliquer, dans le cadre du projet Regards, concrètement, quelles ont été les étapes, que ce soit avec Léa ou avec moi ?
- Speaker #2
Déjà, de se rencontrer, Lisa, on ne se connaissait pas. Oui, c'est vrai. Déjà, de se rencontrer. C'est jamais venu. De parler de ce projet. Bon, Léa, on la connaissait et puis on est toujours ravis de l'avoir à l'atelier avec nous. De toute façon, c'est vrai.
- Speaker #0
Une petite douceur dans l'atelier.
- Speaker #2
Exactement. Et les premiers pas ont été vraiment de vous amener sur un choix de papier. Là, le sujet était vraiment d'imprimer sur papier. On ne voulait pas un papier trop blanc. On voulait vraiment une gamme qui soit un peu sympa aussi en main, mais qui respecte aussi toute norme aussi de forêt protégée, parce que ça aussi, on y tient beaucoup.
- Speaker #0
Il a fallu décider quelle taille on faisait aussi. C'était très important. Je n'arrivais pas du tout à me décider. Est-ce qu'on faisait un carré ? Est-ce qu'on faisait des petites cartes postales ? Est-ce qu'on faisait un grand poster ? J'étais incapable de décider. Et du coup, on a choisi le 20 par 30.
- Speaker #2
C'est ça, oui. On a dû affiner effectivement le format. On n'était pas sûr. Ensuite, il faut aussi que ça rentre dans les intérieurs. Il faut que ce soit aussi une petite pièce qui respecte aussi le travail de Léa, qui soit adaptée. Je crois qu'il y a eu quelques petits ajustements que Léa a dû faire, justement, en fonction de ces choix-là, qui ont été faits après le choix du papier, finalement, qu'on a dû adapter. Et ensuite, avec Léa, on a aussi correspondu, entre-temps, par rapport au fichier, par rapport à la séparation des couleurs, justement, qui nous servent à les traduire sur film. pour les passer en sérigraphie. Et c'est vrai qu'après, toujours dans notre processus, on va quand même fournir un bond à tirer. Donc on va quand même faire une première épreuve avec les couleurs qu'on avait. Et ensuite, on a essayé d'affiner parce qu'on a essayé d'avoir le pantone précis. Mais ensuite, on est toujours obligé de l'ajuster. On a beau être sur la couleur, avec le papier qui était quand même d'une teinte un peu plus marquée, on ne va pas avoir le même rendu. Donc on a dû affiner après ces couleurs-là. Et c'est vrai qu'on s'est revus pour ces couleurs, pour affiner les couleurs. Entre-temps, avec Léa aussi. On a réajusté certains passages. J'ai de la chance, Léa n'habite pas très très loin. Donc on a pu aussi faire des fois juste se raccorder juste avant le tirage, qu'elle vienne valider une des couleurs aussi. On a fait une session avec des photos. Parce que pareil, il y a cet échange-là aussi qui est intéressant. Quand l'artiste fait partie du processus, on arrive à se dégager un peu de temps aussi pour montrer ce qu'on fait et comment ça a été fait. Je pense que quand ça sortira, on verra aussi un peu les coulisses de l'atelier. Donc ça fait partie aussi d'une étape importante. Et ensuite, ça a été vraiment la coupe, le conditionnement et puis la livraison ensemble.
- Speaker #0
Dans ce projet, il y avait un, je pense, à la fois Léa comme moi. Et puis, finalement, Romain, on t'a embarqué dans cette idée-là. C'était vraiment la transmission du savoir-faire. C'est ce que tu fais d'ailleurs avec ta future BD. C'est de retranscrire ce geste, ce beau. Quand on a commencé à aborder ce projet, tu m'as fait plusieurs propositions. Tu peux peut-être expliquer quelles étaient les propositions. Pourquoi j'ai choisi Atelier Fwells ? Oui,
- Speaker #1
c'est vrai qu'on s'est posé la question de la technique d'impression. Parce que, comme j'expliquais, j'aime travailler mes dessins au crayon de couleur. Et donc au départ, on s'était dit que ça pourrait être tout simplement une impression numérique pour vraiment garder une trace de l'original. En même temps... J'aime beaucoup la sérigraphie ou la risographie. J'aime pouvoir réfléchir mes dessins avec ces techniques-là parce qu'il y a des paramètres à prendre en compte au niveau des couleurs. Donc c'était vraiment quelque chose qu'il fallait choisir à l'avance. On a opté vraiment pour la sérigraphie parce que ça permettait d'avoir des beaux tirages. avec des couleurs d'un ton direct. Et à la fois, dans la sérigraphie, ce qui me plaît, c'est qu'il peut y avoir des petits défauts qui font leur charme en termes de calage. Même si Romain fait très bien son travail, il y en a très peu, mais il y a toujours la possibilité d'avoir des petits décalages. Et c'est ce côté aléatoire qui m'intéresse dans cette technique. Et à la fois, d'avoir un objet unique en série limitée, ça fait encore une fois écho à la technique d'un savoir-faire traditionnel, artisanal, qui est une pièce unique.
- Speaker #0
Tu m'avais proposé la rhizographie. et la sérigraphie. Est-ce que tu peux nous expliquer ce qu'est la rhizographie ?
- Speaker #1
Alors, je ne suis pas une pro du tout, mais la rhizographie, c'est aussi un travail de couleurs en ton direct, donc des couleurs qui s'impriment couche par couche, mais il y a aussi un passage avec une imprimante. C'est artisanal, mais la sérigraphie, ça permettait d'avoir vraiment un travail fait main de A à Z.
- Speaker #0
Et c'est d'ailleurs ce que je t'ai répondu, c'est que pour moi, la sérigraphie, dans ce projet, avait encore plus sa place. Donc avec Léa, on a parlé de utiliser l'artisanat d'art pour l'art mais je crois savoir que c'est un peu la même histoire pour toi Romain, si je me trompe pas,
- Speaker #2
t'étais d'abord dans l'art et t'as cherché un médium pour l'exprimer Effectivement j'ai toujours recherché à créer via une technique et via un médium, en étant graphiste de formation on passe notre temps derrière un écran et pour assouvir ce besoin de créer et de pouvoir justement le transmettre, il y avait vraiment le papy entre nous et donc c'est ce qui m'a poussé à utiliser la série graphique comme parole. Et effectivement, ce qui est super, c'est qu'on va pouvoir travailler du crayon de couleur, comme travailler de la photo, travailler de la typo, travailler tout ce qui fait le graphisme. À partir de là, on peut créer à l'infini la sérigraphie. À sous vite où se désire.
- Speaker #0
Merci à tous les deux. Merci d'avoir pris un peu de temps pour parler de cette belle collaboration. Je suis ravie d'avoir créé ce projet avec vous. J'invite tous les auditeurs. à vous rendre sur le site internet d'Histoire d'Artisan et de découvrir ces illustrations virtuellement quand vous les commanderez. Sachez que chaque illustration est au profit de l'association Histoire d'Artisan. Atelier Fouels a été rémunéré. Léa a été rémunérée. Atelier Fouels, d'ailleurs, nous a fait don de plusieurs planches. Donc, merci beaucoup. Malheureusement, on te dit au revoir, Léa. Mais Romain, on se retrouve pour les deux prochains épisodes de podcast où tu vas nous parler à la fois de ton métier et à la fois de ton parcours. Merci.
- Speaker #2
Merci.
- Speaker #1
Merci beaucoup Lisa et Romain.