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Cybersécurité, climat, IA et éthique : Entretien avec le Général Pierre-Joseph Givre

Cybersécurité, climat, IA et éthique : Entretien avec le Général Pierre-Joseph Givre

25min |27/02/2025
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25min |27/02/2025
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Description

Dans ce nouvel épisode d’Interface, le podcast de la communauté Impact Sociétal du CEA, le podcast où la science et l’innovation rencontrent la société, nous avons eu l’honneur et le privilège d'accueillir le Général de corps d’armée Pierre-Joseph Givre, Commandeur de la Légion d’honneur et Commandeur de l’ordre national du Mérite .
Officier des troupes de montagne, diplômé de Sciences Po Lyon et de Saint-Cyr, le Général GIVRE a commandé le 27e bataillon de chasseurs alpins avant d’occuper des postes stratégiques au sein de l’État-major des armées et du Commandement des forces terrestres.
Son riche parcours opérationnel l’a conduit en Guyane, dans les Balkans, en Afghanistan et en Irak. En 2020, il a été chef d’État-major de la force des Nations Unies au Mali, puis directeur du Centre de doctrine et d’enseignement du commandement de l’armée de Terre (CDEC).
Avec ce spécialiste des environnements extrêmes et des stratégies militaires, nous parlerons cybersécurité, IA et éthique, bouleversements climatiques ou encore engagement de la jeunesse. Un échange passionnant et riche en enseignements.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La démographie, les boîtes de développement mettent en danger notre planète et ses apôtres. L'état vert. L'ulti-vert. L'humidité. Peu importe le scénario, il faudra compter avec les forces les plus puissantes de notre époque. L'écologie et l'humidité. Celles-ci doivent évoluer dans le sens d'un développement vertueux et attentif où les gens ne répondent pas aux besoins de nos personnes.

  • Speaker #1

    C'est la projection de la lumière. Bienvenue pour ce nouvel épisode d'Interface, le podcast de la communauté Impact Sociétal du CEA. Le podcast où la science et l'innovation rencontrent la société. Aujourd'hui, j'ai l'honneur et le privilège d'accueillir le général de corps d'armée Pierre-Joseph Givre, directeur du service national et de la jeunesse au ministère des Armées. Bonjour mon général.

  • Speaker #0

    Bonjour Julien.

  • Speaker #1

    Officier des troupes de montagne, vous êtes diplômé de Sciences Po Lyon, ancien élève de Saint-Cyr et breveté de l'école de guerre. Après avoir commandé le 27e bataillon de chasseurs alpins, vous avez occupé des postes stratégiques au sein du gouverneur militaire de Paris, de l'état-major des armées et du commandement des forces terrestres. Fort d'une riche expérience opérationnelle dans les Balkans, en Afghanistan ou en Irak, vous avez été chef d'état-major de la force des Nations Unies au Mali en 2020 avant de diriger le centre de doctrine et d'enseignement du commandement de l'armée de terre, un organisme clé dans la réflexion stratégique et la formation des cadres militaires. Vous êtes également auteur de plusieurs ouvrages de référence, dont « Guerre en montagne » qui exporte les spécificités du combat en haute altitude, et « Enjeux de guerre » en 2012, une analyse des évolutions contemporaines des conflits, récompensée par le prix Edmond Fréville-Pierre Messmer de l'Académie des sciences morales et politiques. Enfin, vous êtes commandeur de l'Ordre national du mérite et officier de la Légion d'honneur, distinction qui vient de couronner un parcours d'exception au service de la défense et de la réflexion stratégique. Pour débuter, et comme avec chaque invité... Pouvez-vous me dire quelle est votre définition personnelle de l'impact sociétal ?

  • Speaker #0

    Ma définition, c'est que des experts d'un domaine, que ce soit un expert technologique, expert scientifique, expert professionnel, partagent avec le reste de la société leurs projets, leurs idées, les usages qu'ils imaginent de leur activité, de leur découverte. Pour moi, c'est clé, notamment dans le domaine militaire, afin que notre action soit légitime. soient acceptés et donc soutenables avec la société.

  • Speaker #1

    Justement, pouvez-vous nous dire un mot sur où nous trouvons-nous aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    On se trouve à Alpexpo, au premier salon international des troupes de montagne. Alors effectivement, c'est peut-être une forme de résumé de ce que je viens de vous dire. C'est un espace où on retrouve les troupes de montagne, les soldats de montagne, français et du monde entier, puisqu'il y a plus de 16 délégations étrangères, des Américains, bien sûr, à tous les Européens de l'arc alpin. mais également du Moyen-Orient, puisqu'il y a des Émériens et des Jordaniens de présent, mais également des pays du Caucase, des Arméniens, les Georgiens. C'est un endroit assez unique où se retrouvent et dialoguent, échangent le monde scientifique, puisque le CEA Technologie de Grenoble est présent, mais également des entreprises de l'arc alpin, des entreprises françaises et des entreprises européennes, et puis des soldats de montagne. des forces spéciales, également j'ai vu des gendarmes, du secours en montagne et du SDIS, et des pompiers du SDIS.

  • Speaker #1

    Comment êtes-vous venu à vous intéresser à l'impact sociétal des technologies ? Y a-t-il eu un événement, une prise de conscience particulière, quelque chose de déterminant dans votre parcours ? Et de manière un peu plus générale, armé impact sociétal, on ne pense pas forcément qu'il y ait un lien, donc comment on peut me dire un mot là-dessus également ?

  • Speaker #0

    L'impact sociétal est absolument pour moi une notion clé. tourne finalement autour de la légitimité, de la légitimation de l'action militaire. Cette action, elle est très singulière puisque nous, non seulement on peut recevoir la mort, mais il y en a d'autres qui peuvent la recevoir, mais on va la donner, et on va la donner au nom de la société. Donc vous voyez bien que si la société ne comprend pas ce qu'on fait, si elle n'a pas confiance en nous, si elle n'a pas confiance, si elle ne pense pas que nous sommes porteurs des mêmes valeurs et de la même éthique, eh bien on aura au mieux une indifférence, au pire de l'hostilité, notamment le jour où il y aura... une situation de guerre qui malheureusement peut provoquer des moments d'extrême tension, voire engendrer parfois des dérapages et donc des incompréhensions. Moi comme militaire, nous très jeunes, en école d'officier, on est sensibilisés aux questions notamment de dissuasion nucléaire. Or quand on parle de nucléaire, ça ne va pas de soi, notamment le nucléaire militaire, puisque c'est comme la référence, c'est l'apocalypse du Japon. On sait déjà, rien que sur le sujet du nucléaire, qu'il peut y avoir des discussions, qu'il peut y avoir des discussions philosophiques extrêmement... profondes et que là encore ça génère des débats dans la société donc possiblement des clivages et donc possiblement une hostilité à l'égard de ceux qui sont les détenteurs légitimes de cette arme c'est à dire les armées donc rien que pour cette raison nous avons un impératif une exigence de dialoguer et d'échanger avec nos concitoyens pour expliquer que ce qu'on fait, on le fait en leur nom et qu'on le fait dans le cadre de la loi, bien sûr, mais surtout dans l'esprit des valeurs de notre pays. Et c'est valable pour tous les autres systèmes d'armes aussi. C'est pour ça que, encore une fois, c'est fondamental. Là, on a la situation d'Ukraine. On a la guerre d'Ukraine, on a la guerre de Gaza et du Liban. Le terrorisme est toujours une menace extrêmement prégnante en France et en Europe en général. On est dans une situation qui, finalement, est favorable à la compréhension mutuelle en ce moment. Et même, on se rend compte que la population dit, « Ok, oui, il y a un tel danger, une telle menace. » Donc, oui, on fait confiance dans nos militaires. Et regardez même sur la question du nucléaire, alors pas militaire, cette fois-ci, du nucléaire civil, autour des questions environnementales. Finalement, du fait de la crise énergétique provoquée par les Russes, on considère que c'est une énergie verte, ce qui aurait dû être considéré pour moi bien avant. Donc là, les circonstances font que ça devient plus évident. Simplement. Souvenons-nous, il y a deux ans, avant le déclenchement de la guerre en Russie, on était en Europe à Don't Bank the Bombs. La banque dans laquelle j'étais, qui est une banque anglo-saxonne, il était écrit dans le credo de la banque, nous ne finançons pas des activités liées au nucléaire militaire. C'est incroyable quand vous pensez à ça. C'est-à-dire qu'on était dans une logique de désarmement moral, de relégation de la chose militaire comme finalement marginale. Et peut-être même... dans l'esprit de certains comme la cause de la guerre. Alors qu'en fait, ce n'est pas la cause de la guerre, c'est ce qui doit empêcher la guerre et surtout nous défendre contre ceux qui nous attaquent. Donc, ce n'est jamais gagné. Et que si nous ne faisons pas l'effort, mais que la science est exactement sur un autre giste, mais exactement dans le même dilemme, si on ne fait pas l'effort d'aller expliquer, on ne générera pas la confiance qui ensuite nous permet d'agir et d'être à la hauteur de la mission qui nous est confiée.

  • Speaker #1

    Justement, nous vivons une période marquée par une montée des tensions géopolitiques. en Europe, au Moyen-Orient et même en Asie. Comment l'armée française adapte-t-elle sa doctrine et ses capacités face à ces nouveaux environnements stratégiques ?

  • Speaker #0

    L'armée française n'est pas seule pour le faire. Il y a aussi tout l'environnement économique, l'environnement des entreprises et bien sûr l'autorité politique qui elle-même définit le cadre de l'action militaire. Elle le fait en observant ce qui se passe, elle le fait en cultivant sa... ses propres dynamiques, ses propres réflexions, notamment dans le cadre des technologies, mais pas que, dans les modes d'action. Parce que l'observation extérieure est très importante, mais à chaque fois, vous devez transformer ce que vous observez, les usages, les nouvelles technologies, vous devez les mettre à votre main, dans le cadre qui est le nôtre, normatif, philosophique, de la culture militaire de la France. On assiste aujourd'hui à une dynamique de violence totalement débridé, qui en plus est associé à une créativité par nos adversaires également débridée. Ça peut être un paradoxe, c'est à dire que bon la violence malheureusement ça peut être l'apanage de tous ceux qui nous veulent du mal, mais en revanche la créativité c'était pas évident. On pouvait se retrouver face à des adversaires comme c'était le cas avec Saddam Hussein qui avait aucune intelligence militaire, peu d'intelligence politique je pense, et il décède de la malformé. Aujourd'hui vous avez des adversaires qu'ils soient étatiques ou non étatiques. Il n'y a qu'à voir la performance militaire jusqu'à leur destruction par Israël, mais du Hezbollah, qui était incroyable. Ce qu'a fait le Hamas était inimaginable, même pour les Israéliens, même s'ils avaient toutes les informations sur ce qui allait se passer. En tout cas, ils n'avaient pas pensé que ça allait passer à l'acte. Et donc, ça nous oblige à beaucoup, beaucoup d'humilité, à regarder quelles sont nos forces, mais également quelles sont nos vulnérabilités, à nous adapter extrêmement vite. Et c'est là où ça rejoint beaucoup ce que fait le CEA, mais ce que font la société civile, moi, ce que je pense aujourd'hui. C'est que nous n'avons pas, nous militaires seuls, la solution. On a dominé notre sujet jusqu'à maintenant par rapport aux groupes terroristes, aux groupes de guerrillas, aux sales, etc. Ça, c'était à notre main. Mais là, on pourrait se retrouver face à des vraies surprises, de nouvelles surprises, du fait de la créativité, de l'inventivité de nos adversaires. Et pourquoi sont-ils créatifs, inventifs, ou comment le sont-ils, et pourquoi ils pourraient nous surprendre ? Ce n'est pas parce qu'ils ont plus d'argent que nous, ce n'est pas parce qu'ils ont plus d'armement que nous, forcément, mais c'est qu'eux... peut-être encore plus spontanément que nous, s'inspirent des usages et des technologies civiles qu'ils transforment très très vite en usage et technologies militaires. Et ils ont cette agilité, cette souplesse que nous n'avons pas forcément d'emblée.

  • Speaker #1

    Je vous laisserai remonter, mais on parle beaucoup d'IA. Quelle est la place de l'IA dans leur moment et est-ce qu'on laisse une place à l'éthique ? Comment ça se passe par rapport à, vous disiez, des adversaires qui sont peut-être tant dans leur matériau, dans leur matériel que dans leur façon de faire,

  • Speaker #0

    Oui, qui n'ont pas de limite et qui n'ont pas de règle. La symétrie de valeur. Sur la question des valeurs, je pense que les valeurs sont intangibles, mais qu'en revanche, dans leur mise en œuvre, il y a une gradation et elles doivent être... adapté, selon des limites que doit définir l'autorité politique qui est la seule délégataire de la souveraineté, donc en fait qui est l'expression de ce que veulent ou ne veulent pas la population. Pour être encore plus clair, à un moment on a dit que les drones ne devaient pas être armés, comme si c'était une position. Le principe c'est qu'ils ne sont pas armés. Aujourd'hui nos drones sont armés, parce que les autres les ont armés, donc on a bougé, heureusement. Ce qu'il ne faut pas c'est être dogmatique, c'est être figé. Il faut toujours mettre l'application de nos valeurs, en tout cas la déclinaison de nos valeurs. en accord avec l'état final qu'on recherche. Donc c'est une gradation, ça ne peut pas être figé. Il y avait une autre chose, à un moment on avait dit, également en France, qu'il n'y aurait toujours l'homme dans la boucle des systèmes d'armement, c'est-à-dire qu'il n'y aurait aucun système automatique. Pourquoi ? L'homme est dans la boucle des algorithmes ? Oui, que l'homme soit dans la boucle pour dire on fait ou on ne fait pas en mode automatique. Bien sûr, mais il peut y avoir des boucles de décision sur lesquelles l'homme devient un handicap et va causer la perte peut-être de soldats ou d'installations ou parce qu'on n'aura pas... cibler assez vite l'adversaire, on n'aura pas laissé la machine travailler plus vite que l'homme n'est capable de digérer une information complexe. Donc, moi, je me... je souhaite qu'on soit très prudent et qu'on discute à chaque fois les limites qu'on se fixe, mais qu'on ne fixe pas de limites d'emblée parce que si on se fixe des limites d'emblée et qu'il y a des limites basses de temps de paix, là, on n'aura que des mauvaises surprises. Et pour terminer sur la question de l'IA, si vous n'avez pas aujourd'hui d'IA, l'IA... dans certains domaines, est plus puissante que le cerveau humain. Si vous avez un adversaire qui l'utilise face à vous et que vous vous refusez ou vous mettez des règles éthiques qui freinent systématiquement le processus de décision, vous serez systématiquement frappé avant l'adversaire. Donc il faut être très pragmatique et donc mettre en place des process, pas du temps de paix, mais du temps de guerre. Et c'est là où ça rejoint les problématiques de taxonomie, de normes européennes. Sur l'IA, on commence par l'éthique. Mais ça veut dire quoi ? Si vous avez une éthique et que vous êtes... Vous êtes submergé par une IA chinoise et une IA américaine parce que vous avez mis tellement de normes aux entreprises européennes que vous êtes incapable de produire des algorithmes, incapable de collecter de la donnée parce que tout est... Tout le monde considère qu'attention à la liberté individuelle, etc. Vous allez perdre au bilan, vous allez perdre la liberté collective, la capacité de vous défendre et donc vous allez perdre votre liberté individuelle. C'est ça qui va se produire. Et il faut absolument... L'Europe commence à réagir, mais on est très en retard là-dessus parce qu'on a des réflexes de société. individualistes, de sociétés de temps de paix et de sociétés insulaires préservées du reste du monde ou qui pensent que leurs valeurs sont partagées par le reste du monde entier. Ce qui est faux, le monde entier nous est aujourd'hui globalement hostile. Il faut qu'on prenne conscience de ça et qu'on s'arme moralement, normativement, low fare, technologiquement, avec des équipements militaires nombreux et de haute technologie pour faire face. Si on ne le fait pas, on sera enfoncé de toutes parts.

  • Speaker #1

    Comment l'armée s'adapte-t-elle aux défis environnementaux, que ce soit d'un point de vue logistique, des équipements, de nouvelles menaces ? Et la France adopte-t-elle une approche similaire à celle du Pentagone, qui considère le climat comme un multiplicateur de menaces ?

  • Speaker #0

    En tant que commandant de la 27 et montagnard, on partage le même constat que ceux qui pratiquent la montagne ou qui sont des professionnels de la montagne. Oui, le changement climatique impacte. impacte notre montagne. Nous, on adresse ce sujet de plusieurs manières. La première manière, et ça rejoint l'enjeu d'impact sociétal, c'est que on ne peut pas être indifférent au changement, comme nous constatons. On peut peut-être être sceptique en disant que demain, il y aura d'autres phénomènes qui interviendront et que ça évoluera encore dans un sens, mais comme tout le monde, nous, on le constate. Et on ne peut pas être en opposition avec nos concitoyens. Et aujourd'hui, chez les jeunes comme chez les moins jeunes, il y a la conscience que que l'humain est une partie de la cause du réchauffement climatique, donc il faut agir. Donc les armées doivent agir et veulent agir au diapason de la société. Donc ça, c'est très clair. On va dire que c'est la posture philosophique ou citoyenne des armées. Elles ne peuvent pas être en dehors de ce sujet. Maintenant, il faut voir qu'il y a quelques difficultés quand même pour nous, particulièrement et notamment si on doit faire la guerre, c'est notamment autour des énergies, de la production énergétique. C'est pour ça qu'on est très intéressé par les évolutions technologiques, parce que nous, on est très dépendant du thermique. C'est comme pour le nucléaire militaire. Le jour où il n'y a plus de nucléaire civil, il n'y a plus de nucléaire militaire. S'il n'y a plus de thermique civil, il n'y a plus de thermique militaire, parce qu'on ne va pas former des mécanos, on ne va pas avoir des producteurs de moteurs thermiques uniquement pour l'armée française, vous imaginez ? Donc ça ne peut pas fonctionner comme ça. C'est pour ça qu'on doit travailler ensemble, mais c'est valable aussi pour les entreprises privées, sur une évolution des normes, mais qui soit soutenable. acceptables et qui nous permettent de remplir notre mission en cas de guerre. Donc il y a un gros travail à faire. Moi, je pense qu'il y a un énorme travail à faire sur l'énergie. Effectivement, sur la logistique, derrière, c'est la question de la signature logistique, diminuer notre emploi de carbone au maximum. Et là, on a un double intérêt. Nous, ça a un intérêt parce que moins on a de liens logistiques lourds, moins on est vulnérable. Et là, on voit bien qu'on pourrait avoir un effet aussi positif sur l'environnement. Mais ce que je sais des travaux, c'est assez complexe. Et sur la motorisation en particulier, on n'est pas... pas encore très avancé. Peut-être que les systèmes SMR, peut-être que l'hydrogène sont des solutions à terme, mais je ne sais pas. Ce que je dis simplement, c'est qu'il faut qu'on avance, il faut qu'on investisse, mais aussi que la société civile comprenne qu'il faut encore une fois trouver un compromis pour ne pas abaisser nos capacités de combat au nom de normes décidées en temps de paix. Sinon, pour ce qui est du reste du changement et de ses conséquences sur la situation géopolitique... Oui, on aura inévitablement, on le sait très bien, et donc c'est là que nous, évidemment, on a la même position, la même analyse que le Pentagone. Ça concerne déjà le nord de l'Europe, la zone arctique, qui est en immense frontière avec la Russie. Le jour où le conflit en Ukraine sera terminé ou gelé, il est évident que la menace de nouveau se diffusera tout le long de la frontière entre la Russie, l'Europe et l'OTAN, et que la zone arctique... du fait du changement climatique, reste une zone très inhospitalière, mais offre des opportunités pour celui qui maîtrise cet environnement extrême, notamment de la part des Russes, de pouvoir menacer l'Europe.

  • Speaker #1

    Par rapport à des passages justement qu'on peut passer puisqu'il y a moins de banquises, c'est principalement ça l'enjeu ?

  • Speaker #0

    C'est les passages maritimes, mais également l'exploitation des sous-sols. même si on a toujours des hivertériaux, des températures extrêmes, on voit que ça ouvre des opportunités économiques et d'exploitation, notamment des sols, pas que des passages maritimes, qui peuvent devenir plus intéressantes et plus rentables. Sans parler du fait que sur ces grands espaces qui sont très difficiles à défendre, ça peut présenter une opportunité pour un adversaire de saisir des gages, par exemple. Donc oui, il y a une ouverture. N'oublions pas que le changement climatique a aussi des conséquences dans des zones arides, qui sont très montagneuses aussi. On parlait du Moyen-Orient, mais on parle de l'Afrique aussi. Et donc, de fait, ça va créer des tensions sur les ressources rares, sur l'agriculture, sur l'alimentation, sur l'eau. Donc, des prétextes à conflits.

  • Speaker #1

    Vous êtes directeur du service national et de la jeunesse au ministère des armées. Quel est votre rôle exactement ? Quelles sont vos missions ?

  • Speaker #0

    La direction du service national et de la jeunesse, c'est une héritière de la guerre froide et du temps de la conscription. Le service militaire a été suspendu en 1997 et on a conservé une direction qui est chargée de superviser le recensement citoyen obligatoire de tous les jeunes français, garçons et filles, à 16 ans. Ça se fait en mairie ou par voie numérique. La loi prévoit également que nous organisions une journée dite « Défense et citoyenneté » . Alors ça porte bien son nom, parce qu'on parle de défense, de militarité et de citoyenneté à travers les valeurs militaires, comme une déclinaison. Et là, nous sommes en cours de refonte complète de ce dispositif. Cette refonte a été voulue, décidée par le ministre Sébastien Lecornu, et avalisée par le président de la République récemment dans ses déclarations. Et donc, on va changer tout ça pour en faire une journée beaucoup plus expérientielle, une journée vraiment fraternelle et inclusive, puisque les jeunes sont en groupe et acteurs de leur journée.

  • Speaker #1

    Donc concrètement, moins de PowerPoint, moins de présentation, mais un petit peu d'expérience et de rencontres.

  • Speaker #0

    Des rencontres, des témoignages, un accès aussi à la technologie à travers l'immersion dans la réalité virtuelle. Il y aura du tir à la carabine laser de type biathlon, sans effort physique, mais une mise en situation. On va faire aussi des jeux de rôle. donc un serious game autour de la défense et il y aura un forum des métiers. Et sur l'aspect citoyen, on va faire une cérémonie des couleurs avec la Marseillaise chantée et la déclaration des droits aidés. Le plus important encore des droits aujourd'hui, des devoirs des citoyens en République. Il y aura un moment de revoir républicain, un peu comme font les hockeyeurs, vous savez, les brûleurs de loups à la fin du match, tout le monde se serre la main. Nous on va demander aux jeunes et aux instructeurs de serrer la main de tout le monde. Alors on remettra le certificat de la JDC sur un espace connecté, pour essayer d'économiser du papier, puisqu'on a 800 000 diplômes chaque année à éditer. Et il y aura deux autres moments très forts, un déjeuner en ration militaire, donc les jeunes déjeuneront avec une ration militaire, et on leur expliquera à ce moment-là aussi pourquoi on veille à l'équilibre nutritionnel, pourquoi c'est important pour que le soldat soit performant, qui plus est en montagne. On leur parlera aussi de tri sélectif et de lutte contre le gaspillage. Mais tout ça, vous avez compris, de manière très inductive. Pas du tout, on ne donne pas de leçons. Je suis qui pour donner des leçons aux jeunes français ? Ils peuvent peut-être m'en donner dans certains domaines. Donc nous, c'est vraiment, on veut qu'ils soient acteurs, qu'ils adhèrent à cette journée, et que tous, quels que soient, il n'y a aucun prérequis, ni physique, ni intellectuel, qu'ils aient ressenti des émotions. Et les émotions, peut-être le clou de la journée, sera un forum des métiers, où là, ils pourront rencontrer des militaires, et échanger avec eux sur les carrières, sur leur vie, sur les opérations, sur l'entraînement en montagne. Voilà, ça sera très libre. Là, ce sera un moment d'échange extrêmement libre et convivial.

  • Speaker #1

    À quelle échéance ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, on déploie ces premiers types de journées de défense et de sécurité avec les jeunes appelés, qui, quand ils font leur judicie, ont environ 17 ans et demi, 18 ans. Donc, on est en train de déployer ça pour que nos équipes s'acculturent à ce nouveau modèle. Et le déploiement, la généralisation aura lieu à partir du 1er septembre. Il y a un triptyque, donc j'ai dit le triptyque c'est le recensement citoyen obligatoire, la journée défense et citoyenneté, qui est un modèle très singulier en Europe, qui nous est très regardé par d'autres pays, parce que derrière ce caractère, à la fois rencontre avec la défense et citoyenneté. Et puis nous sommes chargés, si les circonstances exigeaient, du rappel sous les drapeaux des Français, aujourd'hui des jeunes entre 18 ans et 25 ans, demain je ne sais pas. Et donc on est en train de travailler sur tout un lien numérique depuis le recensement. jusqu'à un rappel éventuellement sur le drapeau qui pourrait, je ne sais pas quelle forme il prendrait, pas forcément d'un service militaire, pas forcément un rappel sous les armées, mais par rapport à une meilleure connaissance des potentiels, des talents, des potentiels, et plus tard des compétences de chacun, qu'on puisse rappeler de manière ciblée, soit volontaire, soit sous forme de réquisition, des gens dont la défense nationale pourrait avoir besoin en cas de très grave crise ou de guerre. sur une forme soit volontaire, soit obligatoire de réquisition. Mais là, on est vraiment sur la consolidation du système existant et la réhabilitation du système, la modernisation. Ce qu'on veut aussi, ce qui est très important, c'est que les données qu'on aura collectées, soit à droit constant ou volontaire, on puisse les redonner aux jeunes. On veut que ça soit vraiment un échange, que ce soit une plateforme de dialogue, de proposition d'emploi, proposition de forme d'engagement. Peut-être de rappel en disant que vous avez des compétences, par exemple dans le domaine cyber, on a besoin de vous. Vous savez parler le Farsi, c'est-à-dire le Perse, on peut avoir besoin de vous pour telle opération. Est-ce que vous voulez venir ? Ou si vous ne voulez pas venir, on est désolé, mais là on va devoir vous réquisitionner. Et vous pourrez travailler pour nous ou proposer des formes d'engagement à temps partiel ou à temps continu. On veut un modèle très souple et un modèle dans lequel le jeune s'y retrouve et sur les données qu'on aura collectées, lui proposer un bilan de talent. Moi, j'y crois beaucoup. C'est de lui renvoyer ce qu'il a donné au collectif pour l'aider lui-même à s'accomplir comme citoyen et à mieux se connaître par un tiers totalement neutre, totalement agnostique. Contrairement aux parents, contrairement aux profs, contrairement à peut-être d'autres personnes qui ont déjà des idées sur ce que doit devenir le jeune. Mais nous, on veut lui rendre ça. Voilà, donc c'est un énorme, énorme chantier, vous l'avez compris, autour de la JDC, qui sera la dimension physique de ce rendez-vous avec les jeunesses. Et puis autour du système d'information, du numérisation, du lien. de manière la plus moderne possible, pour qu'on puisse échanger beaucoup plus facilement avec les jeunes et que tout le monde s'y retrouve, qu'on soit dans une logique de gagnant-gagnant.

  • Speaker #1

    Pour conclure, quel rôle pensez-vous que des initiatives telles que la communauté Impact Sociétal du CEA pourraient avoir dans l'innovation dans les prochaines années à l'avenir ?

  • Speaker #0

    Écoutez, moi, je garde un souvenir vraiment très ému de l'ouverture du CEA par Impact Sociétal, mais pas que par Impact Sociétal. Stéphane Siebert, Julie Galland, toutes vos équipes ont été incroyablement ouvertes quand par un réserviste du CEA, les contacts se sont établis avec la brigade de montagne. Et moi, comme je sortais de l'état-major des armées et j'étais sur l'innovation et la transition numérique, je me suis dit, le CEA c'est peut-être très intéressant, vous avez l'air de travailler avec les entreprises, vous êtes dans l'écosystème local, vous êtes des montagnards, en tout cas vous avez une sensibilité, vous êtes en plus une institution publique, mais vous êtes très ouverte sur l'écosystème. du monde de l'entreprise. Ici, Grenoble, c'est incroyable. Il y a des gens très divers qui se parlent. Peut-être parce que la montagne les rassemble au-delà de leurs opinions personnelles, politiques, des étiquettes. Et ça a marché. Le CIBA a ouvert les portes. Et pour moi, c'est ça la réussite d'Impact Societal. Impact Societal, c'est quoi ? C'est accepter de se parler, pas avoir de préjugés les uns sur les autres, d'accepter de se découvrir en considérant que l'autre n'est pas un autre nous-mêmes et que l'autre est respectable et surtout... être très intéressant. Au-delà d'être intéressant, c'est que dans une société, on ne peut pas fonctionner sur un mode de défiance, on ne peut pas fonctionner sans se parler, et surtout, on a tellement à apprendre des autres, que quand on s'unit, on est plus fort que seul. Et ça, c'est peut-être la dernière leçon philosophique. Il va falloir qu'on inverse la tendance. On ne peut pas continuer sur l'individualisme à outrance. Bien sûr, les convictions personnelles sont très importantes, le droit d'expression, le droit d'avoir des opinions différentes. Mais je crois qu'on est tellement loin dans l'individuation qu'on en a oublié l'importance du collectif et que face au péril, la seule solution de s'en sortir, c'est d'être solidaire, c'est la cohésion, c'est le dialogue et c'est l'action collective qui parfois, et nous on le sait, militaires, peut exiger pas d'abdiquer ses convictions, pas d'abdiquer sa liberté individuelle, mais en tout cas parfois de considérer que la priorité doit être donnée au collectif et donc d'accepter ponctuellement de s'effacer.

  • Speaker #1

    Merci mon général.

  • Speaker #0

    Merci.

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Dans ce nouvel épisode d’Interface, le podcast de la communauté Impact Sociétal du CEA, le podcast où la science et l’innovation rencontrent la société, nous avons eu l’honneur et le privilège d'accueillir le Général de corps d’armée Pierre-Joseph Givre, Commandeur de la Légion d’honneur et Commandeur de l’ordre national du Mérite .
Officier des troupes de montagne, diplômé de Sciences Po Lyon et de Saint-Cyr, le Général GIVRE a commandé le 27e bataillon de chasseurs alpins avant d’occuper des postes stratégiques au sein de l’État-major des armées et du Commandement des forces terrestres.
Son riche parcours opérationnel l’a conduit en Guyane, dans les Balkans, en Afghanistan et en Irak. En 2020, il a été chef d’État-major de la force des Nations Unies au Mali, puis directeur du Centre de doctrine et d’enseignement du commandement de l’armée de Terre (CDEC).
Avec ce spécialiste des environnements extrêmes et des stratégies militaires, nous parlerons cybersécurité, IA et éthique, bouleversements climatiques ou encore engagement de la jeunesse. Un échange passionnant et riche en enseignements.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

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  • Speaker #0

    La démographie, les boîtes de développement mettent en danger notre planète et ses apôtres. L'état vert. L'ulti-vert. L'humidité. Peu importe le scénario, il faudra compter avec les forces les plus puissantes de notre époque. L'écologie et l'humidité. Celles-ci doivent évoluer dans le sens d'un développement vertueux et attentif où les gens ne répondent pas aux besoins de nos personnes.

  • Speaker #1

    C'est la projection de la lumière. Bienvenue pour ce nouvel épisode d'Interface, le podcast de la communauté Impact Sociétal du CEA. Le podcast où la science et l'innovation rencontrent la société. Aujourd'hui, j'ai l'honneur et le privilège d'accueillir le général de corps d'armée Pierre-Joseph Givre, directeur du service national et de la jeunesse au ministère des Armées. Bonjour mon général.

  • Speaker #0

    Bonjour Julien.

  • Speaker #1

    Officier des troupes de montagne, vous êtes diplômé de Sciences Po Lyon, ancien élève de Saint-Cyr et breveté de l'école de guerre. Après avoir commandé le 27e bataillon de chasseurs alpins, vous avez occupé des postes stratégiques au sein du gouverneur militaire de Paris, de l'état-major des armées et du commandement des forces terrestres. Fort d'une riche expérience opérationnelle dans les Balkans, en Afghanistan ou en Irak, vous avez été chef d'état-major de la force des Nations Unies au Mali en 2020 avant de diriger le centre de doctrine et d'enseignement du commandement de l'armée de terre, un organisme clé dans la réflexion stratégique et la formation des cadres militaires. Vous êtes également auteur de plusieurs ouvrages de référence, dont « Guerre en montagne » qui exporte les spécificités du combat en haute altitude, et « Enjeux de guerre » en 2012, une analyse des évolutions contemporaines des conflits, récompensée par le prix Edmond Fréville-Pierre Messmer de l'Académie des sciences morales et politiques. Enfin, vous êtes commandeur de l'Ordre national du mérite et officier de la Légion d'honneur, distinction qui vient de couronner un parcours d'exception au service de la défense et de la réflexion stratégique. Pour débuter, et comme avec chaque invité... Pouvez-vous me dire quelle est votre définition personnelle de l'impact sociétal ?

  • Speaker #0

    Ma définition, c'est que des experts d'un domaine, que ce soit un expert technologique, expert scientifique, expert professionnel, partagent avec le reste de la société leurs projets, leurs idées, les usages qu'ils imaginent de leur activité, de leur découverte. Pour moi, c'est clé, notamment dans le domaine militaire, afin que notre action soit légitime. soient acceptés et donc soutenables avec la société.

  • Speaker #1

    Justement, pouvez-vous nous dire un mot sur où nous trouvons-nous aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    On se trouve à Alpexpo, au premier salon international des troupes de montagne. Alors effectivement, c'est peut-être une forme de résumé de ce que je viens de vous dire. C'est un espace où on retrouve les troupes de montagne, les soldats de montagne, français et du monde entier, puisqu'il y a plus de 16 délégations étrangères, des Américains, bien sûr, à tous les Européens de l'arc alpin. mais également du Moyen-Orient, puisqu'il y a des Émériens et des Jordaniens de présent, mais également des pays du Caucase, des Arméniens, les Georgiens. C'est un endroit assez unique où se retrouvent et dialoguent, échangent le monde scientifique, puisque le CEA Technologie de Grenoble est présent, mais également des entreprises de l'arc alpin, des entreprises françaises et des entreprises européennes, et puis des soldats de montagne. des forces spéciales, également j'ai vu des gendarmes, du secours en montagne et du SDIS, et des pompiers du SDIS.

  • Speaker #1

    Comment êtes-vous venu à vous intéresser à l'impact sociétal des technologies ? Y a-t-il eu un événement, une prise de conscience particulière, quelque chose de déterminant dans votre parcours ? Et de manière un peu plus générale, armé impact sociétal, on ne pense pas forcément qu'il y ait un lien, donc comment on peut me dire un mot là-dessus également ?

  • Speaker #0

    L'impact sociétal est absolument pour moi une notion clé. tourne finalement autour de la légitimité, de la légitimation de l'action militaire. Cette action, elle est très singulière puisque nous, non seulement on peut recevoir la mort, mais il y en a d'autres qui peuvent la recevoir, mais on va la donner, et on va la donner au nom de la société. Donc vous voyez bien que si la société ne comprend pas ce qu'on fait, si elle n'a pas confiance en nous, si elle n'a pas confiance, si elle ne pense pas que nous sommes porteurs des mêmes valeurs et de la même éthique, eh bien on aura au mieux une indifférence, au pire de l'hostilité, notamment le jour où il y aura... une situation de guerre qui malheureusement peut provoquer des moments d'extrême tension, voire engendrer parfois des dérapages et donc des incompréhensions. Moi comme militaire, nous très jeunes, en école d'officier, on est sensibilisés aux questions notamment de dissuasion nucléaire. Or quand on parle de nucléaire, ça ne va pas de soi, notamment le nucléaire militaire, puisque c'est comme la référence, c'est l'apocalypse du Japon. On sait déjà, rien que sur le sujet du nucléaire, qu'il peut y avoir des discussions, qu'il peut y avoir des discussions philosophiques extrêmement... profondes et que là encore ça génère des débats dans la société donc possiblement des clivages et donc possiblement une hostilité à l'égard de ceux qui sont les détenteurs légitimes de cette arme c'est à dire les armées donc rien que pour cette raison nous avons un impératif une exigence de dialoguer et d'échanger avec nos concitoyens pour expliquer que ce qu'on fait, on le fait en leur nom et qu'on le fait dans le cadre de la loi, bien sûr, mais surtout dans l'esprit des valeurs de notre pays. Et c'est valable pour tous les autres systèmes d'armes aussi. C'est pour ça que, encore une fois, c'est fondamental. Là, on a la situation d'Ukraine. On a la guerre d'Ukraine, on a la guerre de Gaza et du Liban. Le terrorisme est toujours une menace extrêmement prégnante en France et en Europe en général. On est dans une situation qui, finalement, est favorable à la compréhension mutuelle en ce moment. Et même, on se rend compte que la population dit, « Ok, oui, il y a un tel danger, une telle menace. » Donc, oui, on fait confiance dans nos militaires. Et regardez même sur la question du nucléaire, alors pas militaire, cette fois-ci, du nucléaire civil, autour des questions environnementales. Finalement, du fait de la crise énergétique provoquée par les Russes, on considère que c'est une énergie verte, ce qui aurait dû être considéré pour moi bien avant. Donc là, les circonstances font que ça devient plus évident. Simplement. Souvenons-nous, il y a deux ans, avant le déclenchement de la guerre en Russie, on était en Europe à Don't Bank the Bombs. La banque dans laquelle j'étais, qui est une banque anglo-saxonne, il était écrit dans le credo de la banque, nous ne finançons pas des activités liées au nucléaire militaire. C'est incroyable quand vous pensez à ça. C'est-à-dire qu'on était dans une logique de désarmement moral, de relégation de la chose militaire comme finalement marginale. Et peut-être même... dans l'esprit de certains comme la cause de la guerre. Alors qu'en fait, ce n'est pas la cause de la guerre, c'est ce qui doit empêcher la guerre et surtout nous défendre contre ceux qui nous attaquent. Donc, ce n'est jamais gagné. Et que si nous ne faisons pas l'effort, mais que la science est exactement sur un autre giste, mais exactement dans le même dilemme, si on ne fait pas l'effort d'aller expliquer, on ne générera pas la confiance qui ensuite nous permet d'agir et d'être à la hauteur de la mission qui nous est confiée.

  • Speaker #1

    Justement, nous vivons une période marquée par une montée des tensions géopolitiques. en Europe, au Moyen-Orient et même en Asie. Comment l'armée française adapte-t-elle sa doctrine et ses capacités face à ces nouveaux environnements stratégiques ?

  • Speaker #0

    L'armée française n'est pas seule pour le faire. Il y a aussi tout l'environnement économique, l'environnement des entreprises et bien sûr l'autorité politique qui elle-même définit le cadre de l'action militaire. Elle le fait en observant ce qui se passe, elle le fait en cultivant sa... ses propres dynamiques, ses propres réflexions, notamment dans le cadre des technologies, mais pas que, dans les modes d'action. Parce que l'observation extérieure est très importante, mais à chaque fois, vous devez transformer ce que vous observez, les usages, les nouvelles technologies, vous devez les mettre à votre main, dans le cadre qui est le nôtre, normatif, philosophique, de la culture militaire de la France. On assiste aujourd'hui à une dynamique de violence totalement débridé, qui en plus est associé à une créativité par nos adversaires également débridée. Ça peut être un paradoxe, c'est à dire que bon la violence malheureusement ça peut être l'apanage de tous ceux qui nous veulent du mal, mais en revanche la créativité c'était pas évident. On pouvait se retrouver face à des adversaires comme c'était le cas avec Saddam Hussein qui avait aucune intelligence militaire, peu d'intelligence politique je pense, et il décède de la malformé. Aujourd'hui vous avez des adversaires qu'ils soient étatiques ou non étatiques. Il n'y a qu'à voir la performance militaire jusqu'à leur destruction par Israël, mais du Hezbollah, qui était incroyable. Ce qu'a fait le Hamas était inimaginable, même pour les Israéliens, même s'ils avaient toutes les informations sur ce qui allait se passer. En tout cas, ils n'avaient pas pensé que ça allait passer à l'acte. Et donc, ça nous oblige à beaucoup, beaucoup d'humilité, à regarder quelles sont nos forces, mais également quelles sont nos vulnérabilités, à nous adapter extrêmement vite. Et c'est là où ça rejoint beaucoup ce que fait le CEA, mais ce que font la société civile, moi, ce que je pense aujourd'hui. C'est que nous n'avons pas, nous militaires seuls, la solution. On a dominé notre sujet jusqu'à maintenant par rapport aux groupes terroristes, aux groupes de guerrillas, aux sales, etc. Ça, c'était à notre main. Mais là, on pourrait se retrouver face à des vraies surprises, de nouvelles surprises, du fait de la créativité, de l'inventivité de nos adversaires. Et pourquoi sont-ils créatifs, inventifs, ou comment le sont-ils, et pourquoi ils pourraient nous surprendre ? Ce n'est pas parce qu'ils ont plus d'argent que nous, ce n'est pas parce qu'ils ont plus d'armement que nous, forcément, mais c'est qu'eux... peut-être encore plus spontanément que nous, s'inspirent des usages et des technologies civiles qu'ils transforment très très vite en usage et technologies militaires. Et ils ont cette agilité, cette souplesse que nous n'avons pas forcément d'emblée.

  • Speaker #1

    Je vous laisserai remonter, mais on parle beaucoup d'IA. Quelle est la place de l'IA dans leur moment et est-ce qu'on laisse une place à l'éthique ? Comment ça se passe par rapport à, vous disiez, des adversaires qui sont peut-être tant dans leur matériau, dans leur matériel que dans leur façon de faire,

  • Speaker #0

    Oui, qui n'ont pas de limite et qui n'ont pas de règle. La symétrie de valeur. Sur la question des valeurs, je pense que les valeurs sont intangibles, mais qu'en revanche, dans leur mise en œuvre, il y a une gradation et elles doivent être... adapté, selon des limites que doit définir l'autorité politique qui est la seule délégataire de la souveraineté, donc en fait qui est l'expression de ce que veulent ou ne veulent pas la population. Pour être encore plus clair, à un moment on a dit que les drones ne devaient pas être armés, comme si c'était une position. Le principe c'est qu'ils ne sont pas armés. Aujourd'hui nos drones sont armés, parce que les autres les ont armés, donc on a bougé, heureusement. Ce qu'il ne faut pas c'est être dogmatique, c'est être figé. Il faut toujours mettre l'application de nos valeurs, en tout cas la déclinaison de nos valeurs. en accord avec l'état final qu'on recherche. Donc c'est une gradation, ça ne peut pas être figé. Il y avait une autre chose, à un moment on avait dit, également en France, qu'il n'y aurait toujours l'homme dans la boucle des systèmes d'armement, c'est-à-dire qu'il n'y aurait aucun système automatique. Pourquoi ? L'homme est dans la boucle des algorithmes ? Oui, que l'homme soit dans la boucle pour dire on fait ou on ne fait pas en mode automatique. Bien sûr, mais il peut y avoir des boucles de décision sur lesquelles l'homme devient un handicap et va causer la perte peut-être de soldats ou d'installations ou parce qu'on n'aura pas... cibler assez vite l'adversaire, on n'aura pas laissé la machine travailler plus vite que l'homme n'est capable de digérer une information complexe. Donc, moi, je me... je souhaite qu'on soit très prudent et qu'on discute à chaque fois les limites qu'on se fixe, mais qu'on ne fixe pas de limites d'emblée parce que si on se fixe des limites d'emblée et qu'il y a des limites basses de temps de paix, là, on n'aura que des mauvaises surprises. Et pour terminer sur la question de l'IA, si vous n'avez pas aujourd'hui d'IA, l'IA... dans certains domaines, est plus puissante que le cerveau humain. Si vous avez un adversaire qui l'utilise face à vous et que vous vous refusez ou vous mettez des règles éthiques qui freinent systématiquement le processus de décision, vous serez systématiquement frappé avant l'adversaire. Donc il faut être très pragmatique et donc mettre en place des process, pas du temps de paix, mais du temps de guerre. Et c'est là où ça rejoint les problématiques de taxonomie, de normes européennes. Sur l'IA, on commence par l'éthique. Mais ça veut dire quoi ? Si vous avez une éthique et que vous êtes... Vous êtes submergé par une IA chinoise et une IA américaine parce que vous avez mis tellement de normes aux entreprises européennes que vous êtes incapable de produire des algorithmes, incapable de collecter de la donnée parce que tout est... Tout le monde considère qu'attention à la liberté individuelle, etc. Vous allez perdre au bilan, vous allez perdre la liberté collective, la capacité de vous défendre et donc vous allez perdre votre liberté individuelle. C'est ça qui va se produire. Et il faut absolument... L'Europe commence à réagir, mais on est très en retard là-dessus parce qu'on a des réflexes de société. individualistes, de sociétés de temps de paix et de sociétés insulaires préservées du reste du monde ou qui pensent que leurs valeurs sont partagées par le reste du monde entier. Ce qui est faux, le monde entier nous est aujourd'hui globalement hostile. Il faut qu'on prenne conscience de ça et qu'on s'arme moralement, normativement, low fare, technologiquement, avec des équipements militaires nombreux et de haute technologie pour faire face. Si on ne le fait pas, on sera enfoncé de toutes parts.

  • Speaker #1

    Comment l'armée s'adapte-t-elle aux défis environnementaux, que ce soit d'un point de vue logistique, des équipements, de nouvelles menaces ? Et la France adopte-t-elle une approche similaire à celle du Pentagone, qui considère le climat comme un multiplicateur de menaces ?

  • Speaker #0

    En tant que commandant de la 27 et montagnard, on partage le même constat que ceux qui pratiquent la montagne ou qui sont des professionnels de la montagne. Oui, le changement climatique impacte. impacte notre montagne. Nous, on adresse ce sujet de plusieurs manières. La première manière, et ça rejoint l'enjeu d'impact sociétal, c'est que on ne peut pas être indifférent au changement, comme nous constatons. On peut peut-être être sceptique en disant que demain, il y aura d'autres phénomènes qui interviendront et que ça évoluera encore dans un sens, mais comme tout le monde, nous, on le constate. Et on ne peut pas être en opposition avec nos concitoyens. Et aujourd'hui, chez les jeunes comme chez les moins jeunes, il y a la conscience que que l'humain est une partie de la cause du réchauffement climatique, donc il faut agir. Donc les armées doivent agir et veulent agir au diapason de la société. Donc ça, c'est très clair. On va dire que c'est la posture philosophique ou citoyenne des armées. Elles ne peuvent pas être en dehors de ce sujet. Maintenant, il faut voir qu'il y a quelques difficultés quand même pour nous, particulièrement et notamment si on doit faire la guerre, c'est notamment autour des énergies, de la production énergétique. C'est pour ça qu'on est très intéressé par les évolutions technologiques, parce que nous, on est très dépendant du thermique. C'est comme pour le nucléaire militaire. Le jour où il n'y a plus de nucléaire civil, il n'y a plus de nucléaire militaire. S'il n'y a plus de thermique civil, il n'y a plus de thermique militaire, parce qu'on ne va pas former des mécanos, on ne va pas avoir des producteurs de moteurs thermiques uniquement pour l'armée française, vous imaginez ? Donc ça ne peut pas fonctionner comme ça. C'est pour ça qu'on doit travailler ensemble, mais c'est valable aussi pour les entreprises privées, sur une évolution des normes, mais qui soit soutenable. acceptables et qui nous permettent de remplir notre mission en cas de guerre. Donc il y a un gros travail à faire. Moi, je pense qu'il y a un énorme travail à faire sur l'énergie. Effectivement, sur la logistique, derrière, c'est la question de la signature logistique, diminuer notre emploi de carbone au maximum. Et là, on a un double intérêt. Nous, ça a un intérêt parce que moins on a de liens logistiques lourds, moins on est vulnérable. Et là, on voit bien qu'on pourrait avoir un effet aussi positif sur l'environnement. Mais ce que je sais des travaux, c'est assez complexe. Et sur la motorisation en particulier, on n'est pas... pas encore très avancé. Peut-être que les systèmes SMR, peut-être que l'hydrogène sont des solutions à terme, mais je ne sais pas. Ce que je dis simplement, c'est qu'il faut qu'on avance, il faut qu'on investisse, mais aussi que la société civile comprenne qu'il faut encore une fois trouver un compromis pour ne pas abaisser nos capacités de combat au nom de normes décidées en temps de paix. Sinon, pour ce qui est du reste du changement et de ses conséquences sur la situation géopolitique... Oui, on aura inévitablement, on le sait très bien, et donc c'est là que nous, évidemment, on a la même position, la même analyse que le Pentagone. Ça concerne déjà le nord de l'Europe, la zone arctique, qui est en immense frontière avec la Russie. Le jour où le conflit en Ukraine sera terminé ou gelé, il est évident que la menace de nouveau se diffusera tout le long de la frontière entre la Russie, l'Europe et l'OTAN, et que la zone arctique... du fait du changement climatique, reste une zone très inhospitalière, mais offre des opportunités pour celui qui maîtrise cet environnement extrême, notamment de la part des Russes, de pouvoir menacer l'Europe.

  • Speaker #1

    Par rapport à des passages justement qu'on peut passer puisqu'il y a moins de banquises, c'est principalement ça l'enjeu ?

  • Speaker #0

    C'est les passages maritimes, mais également l'exploitation des sous-sols. même si on a toujours des hivertériaux, des températures extrêmes, on voit que ça ouvre des opportunités économiques et d'exploitation, notamment des sols, pas que des passages maritimes, qui peuvent devenir plus intéressantes et plus rentables. Sans parler du fait que sur ces grands espaces qui sont très difficiles à défendre, ça peut présenter une opportunité pour un adversaire de saisir des gages, par exemple. Donc oui, il y a une ouverture. N'oublions pas que le changement climatique a aussi des conséquences dans des zones arides, qui sont très montagneuses aussi. On parlait du Moyen-Orient, mais on parle de l'Afrique aussi. Et donc, de fait, ça va créer des tensions sur les ressources rares, sur l'agriculture, sur l'alimentation, sur l'eau. Donc, des prétextes à conflits.

  • Speaker #1

    Vous êtes directeur du service national et de la jeunesse au ministère des armées. Quel est votre rôle exactement ? Quelles sont vos missions ?

  • Speaker #0

    La direction du service national et de la jeunesse, c'est une héritière de la guerre froide et du temps de la conscription. Le service militaire a été suspendu en 1997 et on a conservé une direction qui est chargée de superviser le recensement citoyen obligatoire de tous les jeunes français, garçons et filles, à 16 ans. Ça se fait en mairie ou par voie numérique. La loi prévoit également que nous organisions une journée dite « Défense et citoyenneté » . Alors ça porte bien son nom, parce qu'on parle de défense, de militarité et de citoyenneté à travers les valeurs militaires, comme une déclinaison. Et là, nous sommes en cours de refonte complète de ce dispositif. Cette refonte a été voulue, décidée par le ministre Sébastien Lecornu, et avalisée par le président de la République récemment dans ses déclarations. Et donc, on va changer tout ça pour en faire une journée beaucoup plus expérientielle, une journée vraiment fraternelle et inclusive, puisque les jeunes sont en groupe et acteurs de leur journée.

  • Speaker #1

    Donc concrètement, moins de PowerPoint, moins de présentation, mais un petit peu d'expérience et de rencontres.

  • Speaker #0

    Des rencontres, des témoignages, un accès aussi à la technologie à travers l'immersion dans la réalité virtuelle. Il y aura du tir à la carabine laser de type biathlon, sans effort physique, mais une mise en situation. On va faire aussi des jeux de rôle. donc un serious game autour de la défense et il y aura un forum des métiers. Et sur l'aspect citoyen, on va faire une cérémonie des couleurs avec la Marseillaise chantée et la déclaration des droits aidés. Le plus important encore des droits aujourd'hui, des devoirs des citoyens en République. Il y aura un moment de revoir républicain, un peu comme font les hockeyeurs, vous savez, les brûleurs de loups à la fin du match, tout le monde se serre la main. Nous on va demander aux jeunes et aux instructeurs de serrer la main de tout le monde. Alors on remettra le certificat de la JDC sur un espace connecté, pour essayer d'économiser du papier, puisqu'on a 800 000 diplômes chaque année à éditer. Et il y aura deux autres moments très forts, un déjeuner en ration militaire, donc les jeunes déjeuneront avec une ration militaire, et on leur expliquera à ce moment-là aussi pourquoi on veille à l'équilibre nutritionnel, pourquoi c'est important pour que le soldat soit performant, qui plus est en montagne. On leur parlera aussi de tri sélectif et de lutte contre le gaspillage. Mais tout ça, vous avez compris, de manière très inductive. Pas du tout, on ne donne pas de leçons. Je suis qui pour donner des leçons aux jeunes français ? Ils peuvent peut-être m'en donner dans certains domaines. Donc nous, c'est vraiment, on veut qu'ils soient acteurs, qu'ils adhèrent à cette journée, et que tous, quels que soient, il n'y a aucun prérequis, ni physique, ni intellectuel, qu'ils aient ressenti des émotions. Et les émotions, peut-être le clou de la journée, sera un forum des métiers, où là, ils pourront rencontrer des militaires, et échanger avec eux sur les carrières, sur leur vie, sur les opérations, sur l'entraînement en montagne. Voilà, ça sera très libre. Là, ce sera un moment d'échange extrêmement libre et convivial.

  • Speaker #1

    À quelle échéance ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, on déploie ces premiers types de journées de défense et de sécurité avec les jeunes appelés, qui, quand ils font leur judicie, ont environ 17 ans et demi, 18 ans. Donc, on est en train de déployer ça pour que nos équipes s'acculturent à ce nouveau modèle. Et le déploiement, la généralisation aura lieu à partir du 1er septembre. Il y a un triptyque, donc j'ai dit le triptyque c'est le recensement citoyen obligatoire, la journée défense et citoyenneté, qui est un modèle très singulier en Europe, qui nous est très regardé par d'autres pays, parce que derrière ce caractère, à la fois rencontre avec la défense et citoyenneté. Et puis nous sommes chargés, si les circonstances exigeaient, du rappel sous les drapeaux des Français, aujourd'hui des jeunes entre 18 ans et 25 ans, demain je ne sais pas. Et donc on est en train de travailler sur tout un lien numérique depuis le recensement. jusqu'à un rappel éventuellement sur le drapeau qui pourrait, je ne sais pas quelle forme il prendrait, pas forcément d'un service militaire, pas forcément un rappel sous les armées, mais par rapport à une meilleure connaissance des potentiels, des talents, des potentiels, et plus tard des compétences de chacun, qu'on puisse rappeler de manière ciblée, soit volontaire, soit sous forme de réquisition, des gens dont la défense nationale pourrait avoir besoin en cas de très grave crise ou de guerre. sur une forme soit volontaire, soit obligatoire de réquisition. Mais là, on est vraiment sur la consolidation du système existant et la réhabilitation du système, la modernisation. Ce qu'on veut aussi, ce qui est très important, c'est que les données qu'on aura collectées, soit à droit constant ou volontaire, on puisse les redonner aux jeunes. On veut que ça soit vraiment un échange, que ce soit une plateforme de dialogue, de proposition d'emploi, proposition de forme d'engagement. Peut-être de rappel en disant que vous avez des compétences, par exemple dans le domaine cyber, on a besoin de vous. Vous savez parler le Farsi, c'est-à-dire le Perse, on peut avoir besoin de vous pour telle opération. Est-ce que vous voulez venir ? Ou si vous ne voulez pas venir, on est désolé, mais là on va devoir vous réquisitionner. Et vous pourrez travailler pour nous ou proposer des formes d'engagement à temps partiel ou à temps continu. On veut un modèle très souple et un modèle dans lequel le jeune s'y retrouve et sur les données qu'on aura collectées, lui proposer un bilan de talent. Moi, j'y crois beaucoup. C'est de lui renvoyer ce qu'il a donné au collectif pour l'aider lui-même à s'accomplir comme citoyen et à mieux se connaître par un tiers totalement neutre, totalement agnostique. Contrairement aux parents, contrairement aux profs, contrairement à peut-être d'autres personnes qui ont déjà des idées sur ce que doit devenir le jeune. Mais nous, on veut lui rendre ça. Voilà, donc c'est un énorme, énorme chantier, vous l'avez compris, autour de la JDC, qui sera la dimension physique de ce rendez-vous avec les jeunesses. Et puis autour du système d'information, du numérisation, du lien. de manière la plus moderne possible, pour qu'on puisse échanger beaucoup plus facilement avec les jeunes et que tout le monde s'y retrouve, qu'on soit dans une logique de gagnant-gagnant.

  • Speaker #1

    Pour conclure, quel rôle pensez-vous que des initiatives telles que la communauté Impact Sociétal du CEA pourraient avoir dans l'innovation dans les prochaines années à l'avenir ?

  • Speaker #0

    Écoutez, moi, je garde un souvenir vraiment très ému de l'ouverture du CEA par Impact Sociétal, mais pas que par Impact Sociétal. Stéphane Siebert, Julie Galland, toutes vos équipes ont été incroyablement ouvertes quand par un réserviste du CEA, les contacts se sont établis avec la brigade de montagne. Et moi, comme je sortais de l'état-major des armées et j'étais sur l'innovation et la transition numérique, je me suis dit, le CEA c'est peut-être très intéressant, vous avez l'air de travailler avec les entreprises, vous êtes dans l'écosystème local, vous êtes des montagnards, en tout cas vous avez une sensibilité, vous êtes en plus une institution publique, mais vous êtes très ouverte sur l'écosystème. du monde de l'entreprise. Ici, Grenoble, c'est incroyable. Il y a des gens très divers qui se parlent. Peut-être parce que la montagne les rassemble au-delà de leurs opinions personnelles, politiques, des étiquettes. Et ça a marché. Le CIBA a ouvert les portes. Et pour moi, c'est ça la réussite d'Impact Societal. Impact Societal, c'est quoi ? C'est accepter de se parler, pas avoir de préjugés les uns sur les autres, d'accepter de se découvrir en considérant que l'autre n'est pas un autre nous-mêmes et que l'autre est respectable et surtout... être très intéressant. Au-delà d'être intéressant, c'est que dans une société, on ne peut pas fonctionner sur un mode de défiance, on ne peut pas fonctionner sans se parler, et surtout, on a tellement à apprendre des autres, que quand on s'unit, on est plus fort que seul. Et ça, c'est peut-être la dernière leçon philosophique. Il va falloir qu'on inverse la tendance. On ne peut pas continuer sur l'individualisme à outrance. Bien sûr, les convictions personnelles sont très importantes, le droit d'expression, le droit d'avoir des opinions différentes. Mais je crois qu'on est tellement loin dans l'individuation qu'on en a oublié l'importance du collectif et que face au péril, la seule solution de s'en sortir, c'est d'être solidaire, c'est la cohésion, c'est le dialogue et c'est l'action collective qui parfois, et nous on le sait, militaires, peut exiger pas d'abdiquer ses convictions, pas d'abdiquer sa liberté individuelle, mais en tout cas parfois de considérer que la priorité doit être donnée au collectif et donc d'accepter ponctuellement de s'effacer.

  • Speaker #1

    Merci mon général.

  • Speaker #0

    Merci.

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Description

Dans ce nouvel épisode d’Interface, le podcast de la communauté Impact Sociétal du CEA, le podcast où la science et l’innovation rencontrent la société, nous avons eu l’honneur et le privilège d'accueillir le Général de corps d’armée Pierre-Joseph Givre, Commandeur de la Légion d’honneur et Commandeur de l’ordre national du Mérite .
Officier des troupes de montagne, diplômé de Sciences Po Lyon et de Saint-Cyr, le Général GIVRE a commandé le 27e bataillon de chasseurs alpins avant d’occuper des postes stratégiques au sein de l’État-major des armées et du Commandement des forces terrestres.
Son riche parcours opérationnel l’a conduit en Guyane, dans les Balkans, en Afghanistan et en Irak. En 2020, il a été chef d’État-major de la force des Nations Unies au Mali, puis directeur du Centre de doctrine et d’enseignement du commandement de l’armée de Terre (CDEC).
Avec ce spécialiste des environnements extrêmes et des stratégies militaires, nous parlerons cybersécurité, IA et éthique, bouleversements climatiques ou encore engagement de la jeunesse. Un échange passionnant et riche en enseignements.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La démographie, les boîtes de développement mettent en danger notre planète et ses apôtres. L'état vert. L'ulti-vert. L'humidité. Peu importe le scénario, il faudra compter avec les forces les plus puissantes de notre époque. L'écologie et l'humidité. Celles-ci doivent évoluer dans le sens d'un développement vertueux et attentif où les gens ne répondent pas aux besoins de nos personnes.

  • Speaker #1

    C'est la projection de la lumière. Bienvenue pour ce nouvel épisode d'Interface, le podcast de la communauté Impact Sociétal du CEA. Le podcast où la science et l'innovation rencontrent la société. Aujourd'hui, j'ai l'honneur et le privilège d'accueillir le général de corps d'armée Pierre-Joseph Givre, directeur du service national et de la jeunesse au ministère des Armées. Bonjour mon général.

  • Speaker #0

    Bonjour Julien.

  • Speaker #1

    Officier des troupes de montagne, vous êtes diplômé de Sciences Po Lyon, ancien élève de Saint-Cyr et breveté de l'école de guerre. Après avoir commandé le 27e bataillon de chasseurs alpins, vous avez occupé des postes stratégiques au sein du gouverneur militaire de Paris, de l'état-major des armées et du commandement des forces terrestres. Fort d'une riche expérience opérationnelle dans les Balkans, en Afghanistan ou en Irak, vous avez été chef d'état-major de la force des Nations Unies au Mali en 2020 avant de diriger le centre de doctrine et d'enseignement du commandement de l'armée de terre, un organisme clé dans la réflexion stratégique et la formation des cadres militaires. Vous êtes également auteur de plusieurs ouvrages de référence, dont « Guerre en montagne » qui exporte les spécificités du combat en haute altitude, et « Enjeux de guerre » en 2012, une analyse des évolutions contemporaines des conflits, récompensée par le prix Edmond Fréville-Pierre Messmer de l'Académie des sciences morales et politiques. Enfin, vous êtes commandeur de l'Ordre national du mérite et officier de la Légion d'honneur, distinction qui vient de couronner un parcours d'exception au service de la défense et de la réflexion stratégique. Pour débuter, et comme avec chaque invité... Pouvez-vous me dire quelle est votre définition personnelle de l'impact sociétal ?

  • Speaker #0

    Ma définition, c'est que des experts d'un domaine, que ce soit un expert technologique, expert scientifique, expert professionnel, partagent avec le reste de la société leurs projets, leurs idées, les usages qu'ils imaginent de leur activité, de leur découverte. Pour moi, c'est clé, notamment dans le domaine militaire, afin que notre action soit légitime. soient acceptés et donc soutenables avec la société.

  • Speaker #1

    Justement, pouvez-vous nous dire un mot sur où nous trouvons-nous aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    On se trouve à Alpexpo, au premier salon international des troupes de montagne. Alors effectivement, c'est peut-être une forme de résumé de ce que je viens de vous dire. C'est un espace où on retrouve les troupes de montagne, les soldats de montagne, français et du monde entier, puisqu'il y a plus de 16 délégations étrangères, des Américains, bien sûr, à tous les Européens de l'arc alpin. mais également du Moyen-Orient, puisqu'il y a des Émériens et des Jordaniens de présent, mais également des pays du Caucase, des Arméniens, les Georgiens. C'est un endroit assez unique où se retrouvent et dialoguent, échangent le monde scientifique, puisque le CEA Technologie de Grenoble est présent, mais également des entreprises de l'arc alpin, des entreprises françaises et des entreprises européennes, et puis des soldats de montagne. des forces spéciales, également j'ai vu des gendarmes, du secours en montagne et du SDIS, et des pompiers du SDIS.

  • Speaker #1

    Comment êtes-vous venu à vous intéresser à l'impact sociétal des technologies ? Y a-t-il eu un événement, une prise de conscience particulière, quelque chose de déterminant dans votre parcours ? Et de manière un peu plus générale, armé impact sociétal, on ne pense pas forcément qu'il y ait un lien, donc comment on peut me dire un mot là-dessus également ?

  • Speaker #0

    L'impact sociétal est absolument pour moi une notion clé. tourne finalement autour de la légitimité, de la légitimation de l'action militaire. Cette action, elle est très singulière puisque nous, non seulement on peut recevoir la mort, mais il y en a d'autres qui peuvent la recevoir, mais on va la donner, et on va la donner au nom de la société. Donc vous voyez bien que si la société ne comprend pas ce qu'on fait, si elle n'a pas confiance en nous, si elle n'a pas confiance, si elle ne pense pas que nous sommes porteurs des mêmes valeurs et de la même éthique, eh bien on aura au mieux une indifférence, au pire de l'hostilité, notamment le jour où il y aura... une situation de guerre qui malheureusement peut provoquer des moments d'extrême tension, voire engendrer parfois des dérapages et donc des incompréhensions. Moi comme militaire, nous très jeunes, en école d'officier, on est sensibilisés aux questions notamment de dissuasion nucléaire. Or quand on parle de nucléaire, ça ne va pas de soi, notamment le nucléaire militaire, puisque c'est comme la référence, c'est l'apocalypse du Japon. On sait déjà, rien que sur le sujet du nucléaire, qu'il peut y avoir des discussions, qu'il peut y avoir des discussions philosophiques extrêmement... profondes et que là encore ça génère des débats dans la société donc possiblement des clivages et donc possiblement une hostilité à l'égard de ceux qui sont les détenteurs légitimes de cette arme c'est à dire les armées donc rien que pour cette raison nous avons un impératif une exigence de dialoguer et d'échanger avec nos concitoyens pour expliquer que ce qu'on fait, on le fait en leur nom et qu'on le fait dans le cadre de la loi, bien sûr, mais surtout dans l'esprit des valeurs de notre pays. Et c'est valable pour tous les autres systèmes d'armes aussi. C'est pour ça que, encore une fois, c'est fondamental. Là, on a la situation d'Ukraine. On a la guerre d'Ukraine, on a la guerre de Gaza et du Liban. Le terrorisme est toujours une menace extrêmement prégnante en France et en Europe en général. On est dans une situation qui, finalement, est favorable à la compréhension mutuelle en ce moment. Et même, on se rend compte que la population dit, « Ok, oui, il y a un tel danger, une telle menace. » Donc, oui, on fait confiance dans nos militaires. Et regardez même sur la question du nucléaire, alors pas militaire, cette fois-ci, du nucléaire civil, autour des questions environnementales. Finalement, du fait de la crise énergétique provoquée par les Russes, on considère que c'est une énergie verte, ce qui aurait dû être considéré pour moi bien avant. Donc là, les circonstances font que ça devient plus évident. Simplement. Souvenons-nous, il y a deux ans, avant le déclenchement de la guerre en Russie, on était en Europe à Don't Bank the Bombs. La banque dans laquelle j'étais, qui est une banque anglo-saxonne, il était écrit dans le credo de la banque, nous ne finançons pas des activités liées au nucléaire militaire. C'est incroyable quand vous pensez à ça. C'est-à-dire qu'on était dans une logique de désarmement moral, de relégation de la chose militaire comme finalement marginale. Et peut-être même... dans l'esprit de certains comme la cause de la guerre. Alors qu'en fait, ce n'est pas la cause de la guerre, c'est ce qui doit empêcher la guerre et surtout nous défendre contre ceux qui nous attaquent. Donc, ce n'est jamais gagné. Et que si nous ne faisons pas l'effort, mais que la science est exactement sur un autre giste, mais exactement dans le même dilemme, si on ne fait pas l'effort d'aller expliquer, on ne générera pas la confiance qui ensuite nous permet d'agir et d'être à la hauteur de la mission qui nous est confiée.

  • Speaker #1

    Justement, nous vivons une période marquée par une montée des tensions géopolitiques. en Europe, au Moyen-Orient et même en Asie. Comment l'armée française adapte-t-elle sa doctrine et ses capacités face à ces nouveaux environnements stratégiques ?

  • Speaker #0

    L'armée française n'est pas seule pour le faire. Il y a aussi tout l'environnement économique, l'environnement des entreprises et bien sûr l'autorité politique qui elle-même définit le cadre de l'action militaire. Elle le fait en observant ce qui se passe, elle le fait en cultivant sa... ses propres dynamiques, ses propres réflexions, notamment dans le cadre des technologies, mais pas que, dans les modes d'action. Parce que l'observation extérieure est très importante, mais à chaque fois, vous devez transformer ce que vous observez, les usages, les nouvelles technologies, vous devez les mettre à votre main, dans le cadre qui est le nôtre, normatif, philosophique, de la culture militaire de la France. On assiste aujourd'hui à une dynamique de violence totalement débridé, qui en plus est associé à une créativité par nos adversaires également débridée. Ça peut être un paradoxe, c'est à dire que bon la violence malheureusement ça peut être l'apanage de tous ceux qui nous veulent du mal, mais en revanche la créativité c'était pas évident. On pouvait se retrouver face à des adversaires comme c'était le cas avec Saddam Hussein qui avait aucune intelligence militaire, peu d'intelligence politique je pense, et il décède de la malformé. Aujourd'hui vous avez des adversaires qu'ils soient étatiques ou non étatiques. Il n'y a qu'à voir la performance militaire jusqu'à leur destruction par Israël, mais du Hezbollah, qui était incroyable. Ce qu'a fait le Hamas était inimaginable, même pour les Israéliens, même s'ils avaient toutes les informations sur ce qui allait se passer. En tout cas, ils n'avaient pas pensé que ça allait passer à l'acte. Et donc, ça nous oblige à beaucoup, beaucoup d'humilité, à regarder quelles sont nos forces, mais également quelles sont nos vulnérabilités, à nous adapter extrêmement vite. Et c'est là où ça rejoint beaucoup ce que fait le CEA, mais ce que font la société civile, moi, ce que je pense aujourd'hui. C'est que nous n'avons pas, nous militaires seuls, la solution. On a dominé notre sujet jusqu'à maintenant par rapport aux groupes terroristes, aux groupes de guerrillas, aux sales, etc. Ça, c'était à notre main. Mais là, on pourrait se retrouver face à des vraies surprises, de nouvelles surprises, du fait de la créativité, de l'inventivité de nos adversaires. Et pourquoi sont-ils créatifs, inventifs, ou comment le sont-ils, et pourquoi ils pourraient nous surprendre ? Ce n'est pas parce qu'ils ont plus d'argent que nous, ce n'est pas parce qu'ils ont plus d'armement que nous, forcément, mais c'est qu'eux... peut-être encore plus spontanément que nous, s'inspirent des usages et des technologies civiles qu'ils transforment très très vite en usage et technologies militaires. Et ils ont cette agilité, cette souplesse que nous n'avons pas forcément d'emblée.

  • Speaker #1

    Je vous laisserai remonter, mais on parle beaucoup d'IA. Quelle est la place de l'IA dans leur moment et est-ce qu'on laisse une place à l'éthique ? Comment ça se passe par rapport à, vous disiez, des adversaires qui sont peut-être tant dans leur matériau, dans leur matériel que dans leur façon de faire,

  • Speaker #0

    Oui, qui n'ont pas de limite et qui n'ont pas de règle. La symétrie de valeur. Sur la question des valeurs, je pense que les valeurs sont intangibles, mais qu'en revanche, dans leur mise en œuvre, il y a une gradation et elles doivent être... adapté, selon des limites que doit définir l'autorité politique qui est la seule délégataire de la souveraineté, donc en fait qui est l'expression de ce que veulent ou ne veulent pas la population. Pour être encore plus clair, à un moment on a dit que les drones ne devaient pas être armés, comme si c'était une position. Le principe c'est qu'ils ne sont pas armés. Aujourd'hui nos drones sont armés, parce que les autres les ont armés, donc on a bougé, heureusement. Ce qu'il ne faut pas c'est être dogmatique, c'est être figé. Il faut toujours mettre l'application de nos valeurs, en tout cas la déclinaison de nos valeurs. en accord avec l'état final qu'on recherche. Donc c'est une gradation, ça ne peut pas être figé. Il y avait une autre chose, à un moment on avait dit, également en France, qu'il n'y aurait toujours l'homme dans la boucle des systèmes d'armement, c'est-à-dire qu'il n'y aurait aucun système automatique. Pourquoi ? L'homme est dans la boucle des algorithmes ? Oui, que l'homme soit dans la boucle pour dire on fait ou on ne fait pas en mode automatique. Bien sûr, mais il peut y avoir des boucles de décision sur lesquelles l'homme devient un handicap et va causer la perte peut-être de soldats ou d'installations ou parce qu'on n'aura pas... cibler assez vite l'adversaire, on n'aura pas laissé la machine travailler plus vite que l'homme n'est capable de digérer une information complexe. Donc, moi, je me... je souhaite qu'on soit très prudent et qu'on discute à chaque fois les limites qu'on se fixe, mais qu'on ne fixe pas de limites d'emblée parce que si on se fixe des limites d'emblée et qu'il y a des limites basses de temps de paix, là, on n'aura que des mauvaises surprises. Et pour terminer sur la question de l'IA, si vous n'avez pas aujourd'hui d'IA, l'IA... dans certains domaines, est plus puissante que le cerveau humain. Si vous avez un adversaire qui l'utilise face à vous et que vous vous refusez ou vous mettez des règles éthiques qui freinent systématiquement le processus de décision, vous serez systématiquement frappé avant l'adversaire. Donc il faut être très pragmatique et donc mettre en place des process, pas du temps de paix, mais du temps de guerre. Et c'est là où ça rejoint les problématiques de taxonomie, de normes européennes. Sur l'IA, on commence par l'éthique. Mais ça veut dire quoi ? Si vous avez une éthique et que vous êtes... Vous êtes submergé par une IA chinoise et une IA américaine parce que vous avez mis tellement de normes aux entreprises européennes que vous êtes incapable de produire des algorithmes, incapable de collecter de la donnée parce que tout est... Tout le monde considère qu'attention à la liberté individuelle, etc. Vous allez perdre au bilan, vous allez perdre la liberté collective, la capacité de vous défendre et donc vous allez perdre votre liberté individuelle. C'est ça qui va se produire. Et il faut absolument... L'Europe commence à réagir, mais on est très en retard là-dessus parce qu'on a des réflexes de société. individualistes, de sociétés de temps de paix et de sociétés insulaires préservées du reste du monde ou qui pensent que leurs valeurs sont partagées par le reste du monde entier. Ce qui est faux, le monde entier nous est aujourd'hui globalement hostile. Il faut qu'on prenne conscience de ça et qu'on s'arme moralement, normativement, low fare, technologiquement, avec des équipements militaires nombreux et de haute technologie pour faire face. Si on ne le fait pas, on sera enfoncé de toutes parts.

  • Speaker #1

    Comment l'armée s'adapte-t-elle aux défis environnementaux, que ce soit d'un point de vue logistique, des équipements, de nouvelles menaces ? Et la France adopte-t-elle une approche similaire à celle du Pentagone, qui considère le climat comme un multiplicateur de menaces ?

  • Speaker #0

    En tant que commandant de la 27 et montagnard, on partage le même constat que ceux qui pratiquent la montagne ou qui sont des professionnels de la montagne. Oui, le changement climatique impacte. impacte notre montagne. Nous, on adresse ce sujet de plusieurs manières. La première manière, et ça rejoint l'enjeu d'impact sociétal, c'est que on ne peut pas être indifférent au changement, comme nous constatons. On peut peut-être être sceptique en disant que demain, il y aura d'autres phénomènes qui interviendront et que ça évoluera encore dans un sens, mais comme tout le monde, nous, on le constate. Et on ne peut pas être en opposition avec nos concitoyens. Et aujourd'hui, chez les jeunes comme chez les moins jeunes, il y a la conscience que que l'humain est une partie de la cause du réchauffement climatique, donc il faut agir. Donc les armées doivent agir et veulent agir au diapason de la société. Donc ça, c'est très clair. On va dire que c'est la posture philosophique ou citoyenne des armées. Elles ne peuvent pas être en dehors de ce sujet. Maintenant, il faut voir qu'il y a quelques difficultés quand même pour nous, particulièrement et notamment si on doit faire la guerre, c'est notamment autour des énergies, de la production énergétique. C'est pour ça qu'on est très intéressé par les évolutions technologiques, parce que nous, on est très dépendant du thermique. C'est comme pour le nucléaire militaire. Le jour où il n'y a plus de nucléaire civil, il n'y a plus de nucléaire militaire. S'il n'y a plus de thermique civil, il n'y a plus de thermique militaire, parce qu'on ne va pas former des mécanos, on ne va pas avoir des producteurs de moteurs thermiques uniquement pour l'armée française, vous imaginez ? Donc ça ne peut pas fonctionner comme ça. C'est pour ça qu'on doit travailler ensemble, mais c'est valable aussi pour les entreprises privées, sur une évolution des normes, mais qui soit soutenable. acceptables et qui nous permettent de remplir notre mission en cas de guerre. Donc il y a un gros travail à faire. Moi, je pense qu'il y a un énorme travail à faire sur l'énergie. Effectivement, sur la logistique, derrière, c'est la question de la signature logistique, diminuer notre emploi de carbone au maximum. Et là, on a un double intérêt. Nous, ça a un intérêt parce que moins on a de liens logistiques lourds, moins on est vulnérable. Et là, on voit bien qu'on pourrait avoir un effet aussi positif sur l'environnement. Mais ce que je sais des travaux, c'est assez complexe. Et sur la motorisation en particulier, on n'est pas... pas encore très avancé. Peut-être que les systèmes SMR, peut-être que l'hydrogène sont des solutions à terme, mais je ne sais pas. Ce que je dis simplement, c'est qu'il faut qu'on avance, il faut qu'on investisse, mais aussi que la société civile comprenne qu'il faut encore une fois trouver un compromis pour ne pas abaisser nos capacités de combat au nom de normes décidées en temps de paix. Sinon, pour ce qui est du reste du changement et de ses conséquences sur la situation géopolitique... Oui, on aura inévitablement, on le sait très bien, et donc c'est là que nous, évidemment, on a la même position, la même analyse que le Pentagone. Ça concerne déjà le nord de l'Europe, la zone arctique, qui est en immense frontière avec la Russie. Le jour où le conflit en Ukraine sera terminé ou gelé, il est évident que la menace de nouveau se diffusera tout le long de la frontière entre la Russie, l'Europe et l'OTAN, et que la zone arctique... du fait du changement climatique, reste une zone très inhospitalière, mais offre des opportunités pour celui qui maîtrise cet environnement extrême, notamment de la part des Russes, de pouvoir menacer l'Europe.

  • Speaker #1

    Par rapport à des passages justement qu'on peut passer puisqu'il y a moins de banquises, c'est principalement ça l'enjeu ?

  • Speaker #0

    C'est les passages maritimes, mais également l'exploitation des sous-sols. même si on a toujours des hivertériaux, des températures extrêmes, on voit que ça ouvre des opportunités économiques et d'exploitation, notamment des sols, pas que des passages maritimes, qui peuvent devenir plus intéressantes et plus rentables. Sans parler du fait que sur ces grands espaces qui sont très difficiles à défendre, ça peut présenter une opportunité pour un adversaire de saisir des gages, par exemple. Donc oui, il y a une ouverture. N'oublions pas que le changement climatique a aussi des conséquences dans des zones arides, qui sont très montagneuses aussi. On parlait du Moyen-Orient, mais on parle de l'Afrique aussi. Et donc, de fait, ça va créer des tensions sur les ressources rares, sur l'agriculture, sur l'alimentation, sur l'eau. Donc, des prétextes à conflits.

  • Speaker #1

    Vous êtes directeur du service national et de la jeunesse au ministère des armées. Quel est votre rôle exactement ? Quelles sont vos missions ?

  • Speaker #0

    La direction du service national et de la jeunesse, c'est une héritière de la guerre froide et du temps de la conscription. Le service militaire a été suspendu en 1997 et on a conservé une direction qui est chargée de superviser le recensement citoyen obligatoire de tous les jeunes français, garçons et filles, à 16 ans. Ça se fait en mairie ou par voie numérique. La loi prévoit également que nous organisions une journée dite « Défense et citoyenneté » . Alors ça porte bien son nom, parce qu'on parle de défense, de militarité et de citoyenneté à travers les valeurs militaires, comme une déclinaison. Et là, nous sommes en cours de refonte complète de ce dispositif. Cette refonte a été voulue, décidée par le ministre Sébastien Lecornu, et avalisée par le président de la République récemment dans ses déclarations. Et donc, on va changer tout ça pour en faire une journée beaucoup plus expérientielle, une journée vraiment fraternelle et inclusive, puisque les jeunes sont en groupe et acteurs de leur journée.

  • Speaker #1

    Donc concrètement, moins de PowerPoint, moins de présentation, mais un petit peu d'expérience et de rencontres.

  • Speaker #0

    Des rencontres, des témoignages, un accès aussi à la technologie à travers l'immersion dans la réalité virtuelle. Il y aura du tir à la carabine laser de type biathlon, sans effort physique, mais une mise en situation. On va faire aussi des jeux de rôle. donc un serious game autour de la défense et il y aura un forum des métiers. Et sur l'aspect citoyen, on va faire une cérémonie des couleurs avec la Marseillaise chantée et la déclaration des droits aidés. Le plus important encore des droits aujourd'hui, des devoirs des citoyens en République. Il y aura un moment de revoir républicain, un peu comme font les hockeyeurs, vous savez, les brûleurs de loups à la fin du match, tout le monde se serre la main. Nous on va demander aux jeunes et aux instructeurs de serrer la main de tout le monde. Alors on remettra le certificat de la JDC sur un espace connecté, pour essayer d'économiser du papier, puisqu'on a 800 000 diplômes chaque année à éditer. Et il y aura deux autres moments très forts, un déjeuner en ration militaire, donc les jeunes déjeuneront avec une ration militaire, et on leur expliquera à ce moment-là aussi pourquoi on veille à l'équilibre nutritionnel, pourquoi c'est important pour que le soldat soit performant, qui plus est en montagne. On leur parlera aussi de tri sélectif et de lutte contre le gaspillage. Mais tout ça, vous avez compris, de manière très inductive. Pas du tout, on ne donne pas de leçons. Je suis qui pour donner des leçons aux jeunes français ? Ils peuvent peut-être m'en donner dans certains domaines. Donc nous, c'est vraiment, on veut qu'ils soient acteurs, qu'ils adhèrent à cette journée, et que tous, quels que soient, il n'y a aucun prérequis, ni physique, ni intellectuel, qu'ils aient ressenti des émotions. Et les émotions, peut-être le clou de la journée, sera un forum des métiers, où là, ils pourront rencontrer des militaires, et échanger avec eux sur les carrières, sur leur vie, sur les opérations, sur l'entraînement en montagne. Voilà, ça sera très libre. Là, ce sera un moment d'échange extrêmement libre et convivial.

  • Speaker #1

    À quelle échéance ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, on déploie ces premiers types de journées de défense et de sécurité avec les jeunes appelés, qui, quand ils font leur judicie, ont environ 17 ans et demi, 18 ans. Donc, on est en train de déployer ça pour que nos équipes s'acculturent à ce nouveau modèle. Et le déploiement, la généralisation aura lieu à partir du 1er septembre. Il y a un triptyque, donc j'ai dit le triptyque c'est le recensement citoyen obligatoire, la journée défense et citoyenneté, qui est un modèle très singulier en Europe, qui nous est très regardé par d'autres pays, parce que derrière ce caractère, à la fois rencontre avec la défense et citoyenneté. Et puis nous sommes chargés, si les circonstances exigeaient, du rappel sous les drapeaux des Français, aujourd'hui des jeunes entre 18 ans et 25 ans, demain je ne sais pas. Et donc on est en train de travailler sur tout un lien numérique depuis le recensement. jusqu'à un rappel éventuellement sur le drapeau qui pourrait, je ne sais pas quelle forme il prendrait, pas forcément d'un service militaire, pas forcément un rappel sous les armées, mais par rapport à une meilleure connaissance des potentiels, des talents, des potentiels, et plus tard des compétences de chacun, qu'on puisse rappeler de manière ciblée, soit volontaire, soit sous forme de réquisition, des gens dont la défense nationale pourrait avoir besoin en cas de très grave crise ou de guerre. sur une forme soit volontaire, soit obligatoire de réquisition. Mais là, on est vraiment sur la consolidation du système existant et la réhabilitation du système, la modernisation. Ce qu'on veut aussi, ce qui est très important, c'est que les données qu'on aura collectées, soit à droit constant ou volontaire, on puisse les redonner aux jeunes. On veut que ça soit vraiment un échange, que ce soit une plateforme de dialogue, de proposition d'emploi, proposition de forme d'engagement. Peut-être de rappel en disant que vous avez des compétences, par exemple dans le domaine cyber, on a besoin de vous. Vous savez parler le Farsi, c'est-à-dire le Perse, on peut avoir besoin de vous pour telle opération. Est-ce que vous voulez venir ? Ou si vous ne voulez pas venir, on est désolé, mais là on va devoir vous réquisitionner. Et vous pourrez travailler pour nous ou proposer des formes d'engagement à temps partiel ou à temps continu. On veut un modèle très souple et un modèle dans lequel le jeune s'y retrouve et sur les données qu'on aura collectées, lui proposer un bilan de talent. Moi, j'y crois beaucoup. C'est de lui renvoyer ce qu'il a donné au collectif pour l'aider lui-même à s'accomplir comme citoyen et à mieux se connaître par un tiers totalement neutre, totalement agnostique. Contrairement aux parents, contrairement aux profs, contrairement à peut-être d'autres personnes qui ont déjà des idées sur ce que doit devenir le jeune. Mais nous, on veut lui rendre ça. Voilà, donc c'est un énorme, énorme chantier, vous l'avez compris, autour de la JDC, qui sera la dimension physique de ce rendez-vous avec les jeunesses. Et puis autour du système d'information, du numérisation, du lien. de manière la plus moderne possible, pour qu'on puisse échanger beaucoup plus facilement avec les jeunes et que tout le monde s'y retrouve, qu'on soit dans une logique de gagnant-gagnant.

  • Speaker #1

    Pour conclure, quel rôle pensez-vous que des initiatives telles que la communauté Impact Sociétal du CEA pourraient avoir dans l'innovation dans les prochaines années à l'avenir ?

  • Speaker #0

    Écoutez, moi, je garde un souvenir vraiment très ému de l'ouverture du CEA par Impact Sociétal, mais pas que par Impact Sociétal. Stéphane Siebert, Julie Galland, toutes vos équipes ont été incroyablement ouvertes quand par un réserviste du CEA, les contacts se sont établis avec la brigade de montagne. Et moi, comme je sortais de l'état-major des armées et j'étais sur l'innovation et la transition numérique, je me suis dit, le CEA c'est peut-être très intéressant, vous avez l'air de travailler avec les entreprises, vous êtes dans l'écosystème local, vous êtes des montagnards, en tout cas vous avez une sensibilité, vous êtes en plus une institution publique, mais vous êtes très ouverte sur l'écosystème. du monde de l'entreprise. Ici, Grenoble, c'est incroyable. Il y a des gens très divers qui se parlent. Peut-être parce que la montagne les rassemble au-delà de leurs opinions personnelles, politiques, des étiquettes. Et ça a marché. Le CIBA a ouvert les portes. Et pour moi, c'est ça la réussite d'Impact Societal. Impact Societal, c'est quoi ? C'est accepter de se parler, pas avoir de préjugés les uns sur les autres, d'accepter de se découvrir en considérant que l'autre n'est pas un autre nous-mêmes et que l'autre est respectable et surtout... être très intéressant. Au-delà d'être intéressant, c'est que dans une société, on ne peut pas fonctionner sur un mode de défiance, on ne peut pas fonctionner sans se parler, et surtout, on a tellement à apprendre des autres, que quand on s'unit, on est plus fort que seul. Et ça, c'est peut-être la dernière leçon philosophique. Il va falloir qu'on inverse la tendance. On ne peut pas continuer sur l'individualisme à outrance. Bien sûr, les convictions personnelles sont très importantes, le droit d'expression, le droit d'avoir des opinions différentes. Mais je crois qu'on est tellement loin dans l'individuation qu'on en a oublié l'importance du collectif et que face au péril, la seule solution de s'en sortir, c'est d'être solidaire, c'est la cohésion, c'est le dialogue et c'est l'action collective qui parfois, et nous on le sait, militaires, peut exiger pas d'abdiquer ses convictions, pas d'abdiquer sa liberté individuelle, mais en tout cas parfois de considérer que la priorité doit être donnée au collectif et donc d'accepter ponctuellement de s'effacer.

  • Speaker #1

    Merci mon général.

  • Speaker #0

    Merci.

Description

Dans ce nouvel épisode d’Interface, le podcast de la communauté Impact Sociétal du CEA, le podcast où la science et l’innovation rencontrent la société, nous avons eu l’honneur et le privilège d'accueillir le Général de corps d’armée Pierre-Joseph Givre, Commandeur de la Légion d’honneur et Commandeur de l’ordre national du Mérite .
Officier des troupes de montagne, diplômé de Sciences Po Lyon et de Saint-Cyr, le Général GIVRE a commandé le 27e bataillon de chasseurs alpins avant d’occuper des postes stratégiques au sein de l’État-major des armées et du Commandement des forces terrestres.
Son riche parcours opérationnel l’a conduit en Guyane, dans les Balkans, en Afghanistan et en Irak. En 2020, il a été chef d’État-major de la force des Nations Unies au Mali, puis directeur du Centre de doctrine et d’enseignement du commandement de l’armée de Terre (CDEC).
Avec ce spécialiste des environnements extrêmes et des stratégies militaires, nous parlerons cybersécurité, IA et éthique, bouleversements climatiques ou encore engagement de la jeunesse. Un échange passionnant et riche en enseignements.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La démographie, les boîtes de développement mettent en danger notre planète et ses apôtres. L'état vert. L'ulti-vert. L'humidité. Peu importe le scénario, il faudra compter avec les forces les plus puissantes de notre époque. L'écologie et l'humidité. Celles-ci doivent évoluer dans le sens d'un développement vertueux et attentif où les gens ne répondent pas aux besoins de nos personnes.

  • Speaker #1

    C'est la projection de la lumière. Bienvenue pour ce nouvel épisode d'Interface, le podcast de la communauté Impact Sociétal du CEA. Le podcast où la science et l'innovation rencontrent la société. Aujourd'hui, j'ai l'honneur et le privilège d'accueillir le général de corps d'armée Pierre-Joseph Givre, directeur du service national et de la jeunesse au ministère des Armées. Bonjour mon général.

  • Speaker #0

    Bonjour Julien.

  • Speaker #1

    Officier des troupes de montagne, vous êtes diplômé de Sciences Po Lyon, ancien élève de Saint-Cyr et breveté de l'école de guerre. Après avoir commandé le 27e bataillon de chasseurs alpins, vous avez occupé des postes stratégiques au sein du gouverneur militaire de Paris, de l'état-major des armées et du commandement des forces terrestres. Fort d'une riche expérience opérationnelle dans les Balkans, en Afghanistan ou en Irak, vous avez été chef d'état-major de la force des Nations Unies au Mali en 2020 avant de diriger le centre de doctrine et d'enseignement du commandement de l'armée de terre, un organisme clé dans la réflexion stratégique et la formation des cadres militaires. Vous êtes également auteur de plusieurs ouvrages de référence, dont « Guerre en montagne » qui exporte les spécificités du combat en haute altitude, et « Enjeux de guerre » en 2012, une analyse des évolutions contemporaines des conflits, récompensée par le prix Edmond Fréville-Pierre Messmer de l'Académie des sciences morales et politiques. Enfin, vous êtes commandeur de l'Ordre national du mérite et officier de la Légion d'honneur, distinction qui vient de couronner un parcours d'exception au service de la défense et de la réflexion stratégique. Pour débuter, et comme avec chaque invité... Pouvez-vous me dire quelle est votre définition personnelle de l'impact sociétal ?

  • Speaker #0

    Ma définition, c'est que des experts d'un domaine, que ce soit un expert technologique, expert scientifique, expert professionnel, partagent avec le reste de la société leurs projets, leurs idées, les usages qu'ils imaginent de leur activité, de leur découverte. Pour moi, c'est clé, notamment dans le domaine militaire, afin que notre action soit légitime. soient acceptés et donc soutenables avec la société.

  • Speaker #1

    Justement, pouvez-vous nous dire un mot sur où nous trouvons-nous aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    On se trouve à Alpexpo, au premier salon international des troupes de montagne. Alors effectivement, c'est peut-être une forme de résumé de ce que je viens de vous dire. C'est un espace où on retrouve les troupes de montagne, les soldats de montagne, français et du monde entier, puisqu'il y a plus de 16 délégations étrangères, des Américains, bien sûr, à tous les Européens de l'arc alpin. mais également du Moyen-Orient, puisqu'il y a des Émériens et des Jordaniens de présent, mais également des pays du Caucase, des Arméniens, les Georgiens. C'est un endroit assez unique où se retrouvent et dialoguent, échangent le monde scientifique, puisque le CEA Technologie de Grenoble est présent, mais également des entreprises de l'arc alpin, des entreprises françaises et des entreprises européennes, et puis des soldats de montagne. des forces spéciales, également j'ai vu des gendarmes, du secours en montagne et du SDIS, et des pompiers du SDIS.

  • Speaker #1

    Comment êtes-vous venu à vous intéresser à l'impact sociétal des technologies ? Y a-t-il eu un événement, une prise de conscience particulière, quelque chose de déterminant dans votre parcours ? Et de manière un peu plus générale, armé impact sociétal, on ne pense pas forcément qu'il y ait un lien, donc comment on peut me dire un mot là-dessus également ?

  • Speaker #0

    L'impact sociétal est absolument pour moi une notion clé. tourne finalement autour de la légitimité, de la légitimation de l'action militaire. Cette action, elle est très singulière puisque nous, non seulement on peut recevoir la mort, mais il y en a d'autres qui peuvent la recevoir, mais on va la donner, et on va la donner au nom de la société. Donc vous voyez bien que si la société ne comprend pas ce qu'on fait, si elle n'a pas confiance en nous, si elle n'a pas confiance, si elle ne pense pas que nous sommes porteurs des mêmes valeurs et de la même éthique, eh bien on aura au mieux une indifférence, au pire de l'hostilité, notamment le jour où il y aura... une situation de guerre qui malheureusement peut provoquer des moments d'extrême tension, voire engendrer parfois des dérapages et donc des incompréhensions. Moi comme militaire, nous très jeunes, en école d'officier, on est sensibilisés aux questions notamment de dissuasion nucléaire. Or quand on parle de nucléaire, ça ne va pas de soi, notamment le nucléaire militaire, puisque c'est comme la référence, c'est l'apocalypse du Japon. On sait déjà, rien que sur le sujet du nucléaire, qu'il peut y avoir des discussions, qu'il peut y avoir des discussions philosophiques extrêmement... profondes et que là encore ça génère des débats dans la société donc possiblement des clivages et donc possiblement une hostilité à l'égard de ceux qui sont les détenteurs légitimes de cette arme c'est à dire les armées donc rien que pour cette raison nous avons un impératif une exigence de dialoguer et d'échanger avec nos concitoyens pour expliquer que ce qu'on fait, on le fait en leur nom et qu'on le fait dans le cadre de la loi, bien sûr, mais surtout dans l'esprit des valeurs de notre pays. Et c'est valable pour tous les autres systèmes d'armes aussi. C'est pour ça que, encore une fois, c'est fondamental. Là, on a la situation d'Ukraine. On a la guerre d'Ukraine, on a la guerre de Gaza et du Liban. Le terrorisme est toujours une menace extrêmement prégnante en France et en Europe en général. On est dans une situation qui, finalement, est favorable à la compréhension mutuelle en ce moment. Et même, on se rend compte que la population dit, « Ok, oui, il y a un tel danger, une telle menace. » Donc, oui, on fait confiance dans nos militaires. Et regardez même sur la question du nucléaire, alors pas militaire, cette fois-ci, du nucléaire civil, autour des questions environnementales. Finalement, du fait de la crise énergétique provoquée par les Russes, on considère que c'est une énergie verte, ce qui aurait dû être considéré pour moi bien avant. Donc là, les circonstances font que ça devient plus évident. Simplement. Souvenons-nous, il y a deux ans, avant le déclenchement de la guerre en Russie, on était en Europe à Don't Bank the Bombs. La banque dans laquelle j'étais, qui est une banque anglo-saxonne, il était écrit dans le credo de la banque, nous ne finançons pas des activités liées au nucléaire militaire. C'est incroyable quand vous pensez à ça. C'est-à-dire qu'on était dans une logique de désarmement moral, de relégation de la chose militaire comme finalement marginale. Et peut-être même... dans l'esprit de certains comme la cause de la guerre. Alors qu'en fait, ce n'est pas la cause de la guerre, c'est ce qui doit empêcher la guerre et surtout nous défendre contre ceux qui nous attaquent. Donc, ce n'est jamais gagné. Et que si nous ne faisons pas l'effort, mais que la science est exactement sur un autre giste, mais exactement dans le même dilemme, si on ne fait pas l'effort d'aller expliquer, on ne générera pas la confiance qui ensuite nous permet d'agir et d'être à la hauteur de la mission qui nous est confiée.

  • Speaker #1

    Justement, nous vivons une période marquée par une montée des tensions géopolitiques. en Europe, au Moyen-Orient et même en Asie. Comment l'armée française adapte-t-elle sa doctrine et ses capacités face à ces nouveaux environnements stratégiques ?

  • Speaker #0

    L'armée française n'est pas seule pour le faire. Il y a aussi tout l'environnement économique, l'environnement des entreprises et bien sûr l'autorité politique qui elle-même définit le cadre de l'action militaire. Elle le fait en observant ce qui se passe, elle le fait en cultivant sa... ses propres dynamiques, ses propres réflexions, notamment dans le cadre des technologies, mais pas que, dans les modes d'action. Parce que l'observation extérieure est très importante, mais à chaque fois, vous devez transformer ce que vous observez, les usages, les nouvelles technologies, vous devez les mettre à votre main, dans le cadre qui est le nôtre, normatif, philosophique, de la culture militaire de la France. On assiste aujourd'hui à une dynamique de violence totalement débridé, qui en plus est associé à une créativité par nos adversaires également débridée. Ça peut être un paradoxe, c'est à dire que bon la violence malheureusement ça peut être l'apanage de tous ceux qui nous veulent du mal, mais en revanche la créativité c'était pas évident. On pouvait se retrouver face à des adversaires comme c'était le cas avec Saddam Hussein qui avait aucune intelligence militaire, peu d'intelligence politique je pense, et il décède de la malformé. Aujourd'hui vous avez des adversaires qu'ils soient étatiques ou non étatiques. Il n'y a qu'à voir la performance militaire jusqu'à leur destruction par Israël, mais du Hezbollah, qui était incroyable. Ce qu'a fait le Hamas était inimaginable, même pour les Israéliens, même s'ils avaient toutes les informations sur ce qui allait se passer. En tout cas, ils n'avaient pas pensé que ça allait passer à l'acte. Et donc, ça nous oblige à beaucoup, beaucoup d'humilité, à regarder quelles sont nos forces, mais également quelles sont nos vulnérabilités, à nous adapter extrêmement vite. Et c'est là où ça rejoint beaucoup ce que fait le CEA, mais ce que font la société civile, moi, ce que je pense aujourd'hui. C'est que nous n'avons pas, nous militaires seuls, la solution. On a dominé notre sujet jusqu'à maintenant par rapport aux groupes terroristes, aux groupes de guerrillas, aux sales, etc. Ça, c'était à notre main. Mais là, on pourrait se retrouver face à des vraies surprises, de nouvelles surprises, du fait de la créativité, de l'inventivité de nos adversaires. Et pourquoi sont-ils créatifs, inventifs, ou comment le sont-ils, et pourquoi ils pourraient nous surprendre ? Ce n'est pas parce qu'ils ont plus d'argent que nous, ce n'est pas parce qu'ils ont plus d'armement que nous, forcément, mais c'est qu'eux... peut-être encore plus spontanément que nous, s'inspirent des usages et des technologies civiles qu'ils transforment très très vite en usage et technologies militaires. Et ils ont cette agilité, cette souplesse que nous n'avons pas forcément d'emblée.

  • Speaker #1

    Je vous laisserai remonter, mais on parle beaucoup d'IA. Quelle est la place de l'IA dans leur moment et est-ce qu'on laisse une place à l'éthique ? Comment ça se passe par rapport à, vous disiez, des adversaires qui sont peut-être tant dans leur matériau, dans leur matériel que dans leur façon de faire,

  • Speaker #0

    Oui, qui n'ont pas de limite et qui n'ont pas de règle. La symétrie de valeur. Sur la question des valeurs, je pense que les valeurs sont intangibles, mais qu'en revanche, dans leur mise en œuvre, il y a une gradation et elles doivent être... adapté, selon des limites que doit définir l'autorité politique qui est la seule délégataire de la souveraineté, donc en fait qui est l'expression de ce que veulent ou ne veulent pas la population. Pour être encore plus clair, à un moment on a dit que les drones ne devaient pas être armés, comme si c'était une position. Le principe c'est qu'ils ne sont pas armés. Aujourd'hui nos drones sont armés, parce que les autres les ont armés, donc on a bougé, heureusement. Ce qu'il ne faut pas c'est être dogmatique, c'est être figé. Il faut toujours mettre l'application de nos valeurs, en tout cas la déclinaison de nos valeurs. en accord avec l'état final qu'on recherche. Donc c'est une gradation, ça ne peut pas être figé. Il y avait une autre chose, à un moment on avait dit, également en France, qu'il n'y aurait toujours l'homme dans la boucle des systèmes d'armement, c'est-à-dire qu'il n'y aurait aucun système automatique. Pourquoi ? L'homme est dans la boucle des algorithmes ? Oui, que l'homme soit dans la boucle pour dire on fait ou on ne fait pas en mode automatique. Bien sûr, mais il peut y avoir des boucles de décision sur lesquelles l'homme devient un handicap et va causer la perte peut-être de soldats ou d'installations ou parce qu'on n'aura pas... cibler assez vite l'adversaire, on n'aura pas laissé la machine travailler plus vite que l'homme n'est capable de digérer une information complexe. Donc, moi, je me... je souhaite qu'on soit très prudent et qu'on discute à chaque fois les limites qu'on se fixe, mais qu'on ne fixe pas de limites d'emblée parce que si on se fixe des limites d'emblée et qu'il y a des limites basses de temps de paix, là, on n'aura que des mauvaises surprises. Et pour terminer sur la question de l'IA, si vous n'avez pas aujourd'hui d'IA, l'IA... dans certains domaines, est plus puissante que le cerveau humain. Si vous avez un adversaire qui l'utilise face à vous et que vous vous refusez ou vous mettez des règles éthiques qui freinent systématiquement le processus de décision, vous serez systématiquement frappé avant l'adversaire. Donc il faut être très pragmatique et donc mettre en place des process, pas du temps de paix, mais du temps de guerre. Et c'est là où ça rejoint les problématiques de taxonomie, de normes européennes. Sur l'IA, on commence par l'éthique. Mais ça veut dire quoi ? Si vous avez une éthique et que vous êtes... Vous êtes submergé par une IA chinoise et une IA américaine parce que vous avez mis tellement de normes aux entreprises européennes que vous êtes incapable de produire des algorithmes, incapable de collecter de la donnée parce que tout est... Tout le monde considère qu'attention à la liberté individuelle, etc. Vous allez perdre au bilan, vous allez perdre la liberté collective, la capacité de vous défendre et donc vous allez perdre votre liberté individuelle. C'est ça qui va se produire. Et il faut absolument... L'Europe commence à réagir, mais on est très en retard là-dessus parce qu'on a des réflexes de société. individualistes, de sociétés de temps de paix et de sociétés insulaires préservées du reste du monde ou qui pensent que leurs valeurs sont partagées par le reste du monde entier. Ce qui est faux, le monde entier nous est aujourd'hui globalement hostile. Il faut qu'on prenne conscience de ça et qu'on s'arme moralement, normativement, low fare, technologiquement, avec des équipements militaires nombreux et de haute technologie pour faire face. Si on ne le fait pas, on sera enfoncé de toutes parts.

  • Speaker #1

    Comment l'armée s'adapte-t-elle aux défis environnementaux, que ce soit d'un point de vue logistique, des équipements, de nouvelles menaces ? Et la France adopte-t-elle une approche similaire à celle du Pentagone, qui considère le climat comme un multiplicateur de menaces ?

  • Speaker #0

    En tant que commandant de la 27 et montagnard, on partage le même constat que ceux qui pratiquent la montagne ou qui sont des professionnels de la montagne. Oui, le changement climatique impacte. impacte notre montagne. Nous, on adresse ce sujet de plusieurs manières. La première manière, et ça rejoint l'enjeu d'impact sociétal, c'est que on ne peut pas être indifférent au changement, comme nous constatons. On peut peut-être être sceptique en disant que demain, il y aura d'autres phénomènes qui interviendront et que ça évoluera encore dans un sens, mais comme tout le monde, nous, on le constate. Et on ne peut pas être en opposition avec nos concitoyens. Et aujourd'hui, chez les jeunes comme chez les moins jeunes, il y a la conscience que que l'humain est une partie de la cause du réchauffement climatique, donc il faut agir. Donc les armées doivent agir et veulent agir au diapason de la société. Donc ça, c'est très clair. On va dire que c'est la posture philosophique ou citoyenne des armées. Elles ne peuvent pas être en dehors de ce sujet. Maintenant, il faut voir qu'il y a quelques difficultés quand même pour nous, particulièrement et notamment si on doit faire la guerre, c'est notamment autour des énergies, de la production énergétique. C'est pour ça qu'on est très intéressé par les évolutions technologiques, parce que nous, on est très dépendant du thermique. C'est comme pour le nucléaire militaire. Le jour où il n'y a plus de nucléaire civil, il n'y a plus de nucléaire militaire. S'il n'y a plus de thermique civil, il n'y a plus de thermique militaire, parce qu'on ne va pas former des mécanos, on ne va pas avoir des producteurs de moteurs thermiques uniquement pour l'armée française, vous imaginez ? Donc ça ne peut pas fonctionner comme ça. C'est pour ça qu'on doit travailler ensemble, mais c'est valable aussi pour les entreprises privées, sur une évolution des normes, mais qui soit soutenable. acceptables et qui nous permettent de remplir notre mission en cas de guerre. Donc il y a un gros travail à faire. Moi, je pense qu'il y a un énorme travail à faire sur l'énergie. Effectivement, sur la logistique, derrière, c'est la question de la signature logistique, diminuer notre emploi de carbone au maximum. Et là, on a un double intérêt. Nous, ça a un intérêt parce que moins on a de liens logistiques lourds, moins on est vulnérable. Et là, on voit bien qu'on pourrait avoir un effet aussi positif sur l'environnement. Mais ce que je sais des travaux, c'est assez complexe. Et sur la motorisation en particulier, on n'est pas... pas encore très avancé. Peut-être que les systèmes SMR, peut-être que l'hydrogène sont des solutions à terme, mais je ne sais pas. Ce que je dis simplement, c'est qu'il faut qu'on avance, il faut qu'on investisse, mais aussi que la société civile comprenne qu'il faut encore une fois trouver un compromis pour ne pas abaisser nos capacités de combat au nom de normes décidées en temps de paix. Sinon, pour ce qui est du reste du changement et de ses conséquences sur la situation géopolitique... Oui, on aura inévitablement, on le sait très bien, et donc c'est là que nous, évidemment, on a la même position, la même analyse que le Pentagone. Ça concerne déjà le nord de l'Europe, la zone arctique, qui est en immense frontière avec la Russie. Le jour où le conflit en Ukraine sera terminé ou gelé, il est évident que la menace de nouveau se diffusera tout le long de la frontière entre la Russie, l'Europe et l'OTAN, et que la zone arctique... du fait du changement climatique, reste une zone très inhospitalière, mais offre des opportunités pour celui qui maîtrise cet environnement extrême, notamment de la part des Russes, de pouvoir menacer l'Europe.

  • Speaker #1

    Par rapport à des passages justement qu'on peut passer puisqu'il y a moins de banquises, c'est principalement ça l'enjeu ?

  • Speaker #0

    C'est les passages maritimes, mais également l'exploitation des sous-sols. même si on a toujours des hivertériaux, des températures extrêmes, on voit que ça ouvre des opportunités économiques et d'exploitation, notamment des sols, pas que des passages maritimes, qui peuvent devenir plus intéressantes et plus rentables. Sans parler du fait que sur ces grands espaces qui sont très difficiles à défendre, ça peut présenter une opportunité pour un adversaire de saisir des gages, par exemple. Donc oui, il y a une ouverture. N'oublions pas que le changement climatique a aussi des conséquences dans des zones arides, qui sont très montagneuses aussi. On parlait du Moyen-Orient, mais on parle de l'Afrique aussi. Et donc, de fait, ça va créer des tensions sur les ressources rares, sur l'agriculture, sur l'alimentation, sur l'eau. Donc, des prétextes à conflits.

  • Speaker #1

    Vous êtes directeur du service national et de la jeunesse au ministère des armées. Quel est votre rôle exactement ? Quelles sont vos missions ?

  • Speaker #0

    La direction du service national et de la jeunesse, c'est une héritière de la guerre froide et du temps de la conscription. Le service militaire a été suspendu en 1997 et on a conservé une direction qui est chargée de superviser le recensement citoyen obligatoire de tous les jeunes français, garçons et filles, à 16 ans. Ça se fait en mairie ou par voie numérique. La loi prévoit également que nous organisions une journée dite « Défense et citoyenneté » . Alors ça porte bien son nom, parce qu'on parle de défense, de militarité et de citoyenneté à travers les valeurs militaires, comme une déclinaison. Et là, nous sommes en cours de refonte complète de ce dispositif. Cette refonte a été voulue, décidée par le ministre Sébastien Lecornu, et avalisée par le président de la République récemment dans ses déclarations. Et donc, on va changer tout ça pour en faire une journée beaucoup plus expérientielle, une journée vraiment fraternelle et inclusive, puisque les jeunes sont en groupe et acteurs de leur journée.

  • Speaker #1

    Donc concrètement, moins de PowerPoint, moins de présentation, mais un petit peu d'expérience et de rencontres.

  • Speaker #0

    Des rencontres, des témoignages, un accès aussi à la technologie à travers l'immersion dans la réalité virtuelle. Il y aura du tir à la carabine laser de type biathlon, sans effort physique, mais une mise en situation. On va faire aussi des jeux de rôle. donc un serious game autour de la défense et il y aura un forum des métiers. Et sur l'aspect citoyen, on va faire une cérémonie des couleurs avec la Marseillaise chantée et la déclaration des droits aidés. Le plus important encore des droits aujourd'hui, des devoirs des citoyens en République. Il y aura un moment de revoir républicain, un peu comme font les hockeyeurs, vous savez, les brûleurs de loups à la fin du match, tout le monde se serre la main. Nous on va demander aux jeunes et aux instructeurs de serrer la main de tout le monde. Alors on remettra le certificat de la JDC sur un espace connecté, pour essayer d'économiser du papier, puisqu'on a 800 000 diplômes chaque année à éditer. Et il y aura deux autres moments très forts, un déjeuner en ration militaire, donc les jeunes déjeuneront avec une ration militaire, et on leur expliquera à ce moment-là aussi pourquoi on veille à l'équilibre nutritionnel, pourquoi c'est important pour que le soldat soit performant, qui plus est en montagne. On leur parlera aussi de tri sélectif et de lutte contre le gaspillage. Mais tout ça, vous avez compris, de manière très inductive. Pas du tout, on ne donne pas de leçons. Je suis qui pour donner des leçons aux jeunes français ? Ils peuvent peut-être m'en donner dans certains domaines. Donc nous, c'est vraiment, on veut qu'ils soient acteurs, qu'ils adhèrent à cette journée, et que tous, quels que soient, il n'y a aucun prérequis, ni physique, ni intellectuel, qu'ils aient ressenti des émotions. Et les émotions, peut-être le clou de la journée, sera un forum des métiers, où là, ils pourront rencontrer des militaires, et échanger avec eux sur les carrières, sur leur vie, sur les opérations, sur l'entraînement en montagne. Voilà, ça sera très libre. Là, ce sera un moment d'échange extrêmement libre et convivial.

  • Speaker #1

    À quelle échéance ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, on déploie ces premiers types de journées de défense et de sécurité avec les jeunes appelés, qui, quand ils font leur judicie, ont environ 17 ans et demi, 18 ans. Donc, on est en train de déployer ça pour que nos équipes s'acculturent à ce nouveau modèle. Et le déploiement, la généralisation aura lieu à partir du 1er septembre. Il y a un triptyque, donc j'ai dit le triptyque c'est le recensement citoyen obligatoire, la journée défense et citoyenneté, qui est un modèle très singulier en Europe, qui nous est très regardé par d'autres pays, parce que derrière ce caractère, à la fois rencontre avec la défense et citoyenneté. Et puis nous sommes chargés, si les circonstances exigeaient, du rappel sous les drapeaux des Français, aujourd'hui des jeunes entre 18 ans et 25 ans, demain je ne sais pas. Et donc on est en train de travailler sur tout un lien numérique depuis le recensement. jusqu'à un rappel éventuellement sur le drapeau qui pourrait, je ne sais pas quelle forme il prendrait, pas forcément d'un service militaire, pas forcément un rappel sous les armées, mais par rapport à une meilleure connaissance des potentiels, des talents, des potentiels, et plus tard des compétences de chacun, qu'on puisse rappeler de manière ciblée, soit volontaire, soit sous forme de réquisition, des gens dont la défense nationale pourrait avoir besoin en cas de très grave crise ou de guerre. sur une forme soit volontaire, soit obligatoire de réquisition. Mais là, on est vraiment sur la consolidation du système existant et la réhabilitation du système, la modernisation. Ce qu'on veut aussi, ce qui est très important, c'est que les données qu'on aura collectées, soit à droit constant ou volontaire, on puisse les redonner aux jeunes. On veut que ça soit vraiment un échange, que ce soit une plateforme de dialogue, de proposition d'emploi, proposition de forme d'engagement. Peut-être de rappel en disant que vous avez des compétences, par exemple dans le domaine cyber, on a besoin de vous. Vous savez parler le Farsi, c'est-à-dire le Perse, on peut avoir besoin de vous pour telle opération. Est-ce que vous voulez venir ? Ou si vous ne voulez pas venir, on est désolé, mais là on va devoir vous réquisitionner. Et vous pourrez travailler pour nous ou proposer des formes d'engagement à temps partiel ou à temps continu. On veut un modèle très souple et un modèle dans lequel le jeune s'y retrouve et sur les données qu'on aura collectées, lui proposer un bilan de talent. Moi, j'y crois beaucoup. C'est de lui renvoyer ce qu'il a donné au collectif pour l'aider lui-même à s'accomplir comme citoyen et à mieux se connaître par un tiers totalement neutre, totalement agnostique. Contrairement aux parents, contrairement aux profs, contrairement à peut-être d'autres personnes qui ont déjà des idées sur ce que doit devenir le jeune. Mais nous, on veut lui rendre ça. Voilà, donc c'est un énorme, énorme chantier, vous l'avez compris, autour de la JDC, qui sera la dimension physique de ce rendez-vous avec les jeunesses. Et puis autour du système d'information, du numérisation, du lien. de manière la plus moderne possible, pour qu'on puisse échanger beaucoup plus facilement avec les jeunes et que tout le monde s'y retrouve, qu'on soit dans une logique de gagnant-gagnant.

  • Speaker #1

    Pour conclure, quel rôle pensez-vous que des initiatives telles que la communauté Impact Sociétal du CEA pourraient avoir dans l'innovation dans les prochaines années à l'avenir ?

  • Speaker #0

    Écoutez, moi, je garde un souvenir vraiment très ému de l'ouverture du CEA par Impact Sociétal, mais pas que par Impact Sociétal. Stéphane Siebert, Julie Galland, toutes vos équipes ont été incroyablement ouvertes quand par un réserviste du CEA, les contacts se sont établis avec la brigade de montagne. Et moi, comme je sortais de l'état-major des armées et j'étais sur l'innovation et la transition numérique, je me suis dit, le CEA c'est peut-être très intéressant, vous avez l'air de travailler avec les entreprises, vous êtes dans l'écosystème local, vous êtes des montagnards, en tout cas vous avez une sensibilité, vous êtes en plus une institution publique, mais vous êtes très ouverte sur l'écosystème. du monde de l'entreprise. Ici, Grenoble, c'est incroyable. Il y a des gens très divers qui se parlent. Peut-être parce que la montagne les rassemble au-delà de leurs opinions personnelles, politiques, des étiquettes. Et ça a marché. Le CIBA a ouvert les portes. Et pour moi, c'est ça la réussite d'Impact Societal. Impact Societal, c'est quoi ? C'est accepter de se parler, pas avoir de préjugés les uns sur les autres, d'accepter de se découvrir en considérant que l'autre n'est pas un autre nous-mêmes et que l'autre est respectable et surtout... être très intéressant. Au-delà d'être intéressant, c'est que dans une société, on ne peut pas fonctionner sur un mode de défiance, on ne peut pas fonctionner sans se parler, et surtout, on a tellement à apprendre des autres, que quand on s'unit, on est plus fort que seul. Et ça, c'est peut-être la dernière leçon philosophique. Il va falloir qu'on inverse la tendance. On ne peut pas continuer sur l'individualisme à outrance. Bien sûr, les convictions personnelles sont très importantes, le droit d'expression, le droit d'avoir des opinions différentes. Mais je crois qu'on est tellement loin dans l'individuation qu'on en a oublié l'importance du collectif et que face au péril, la seule solution de s'en sortir, c'est d'être solidaire, c'est la cohésion, c'est le dialogue et c'est l'action collective qui parfois, et nous on le sait, militaires, peut exiger pas d'abdiquer ses convictions, pas d'abdiquer sa liberté individuelle, mais en tout cas parfois de considérer que la priorité doit être donnée au collectif et donc d'accepter ponctuellement de s'effacer.

  • Speaker #1

    Merci mon général.

  • Speaker #0

    Merci.

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