Speaker #0On écoute ici la version de 1975 de Gisèle Lamadeleine. Un petit clin d'œil à nos amis québécois. Cette chanson est une version romancée de la fusillade de fourmis qui s'est déroulée le 1er mai 1891 dans le nord de la France, alors que les manifestants réclament la journée de 8 heures, la semaine de 48 heures donc. Les fiancés du nord sont Émilie Blondeau, 18 ans, et Clébert Gilotto, 19 ans. Émilie, surnommée Maria, meurt le crâne arraché par un projectile. Clébert, de 5 balles dans la poitrine. Fourmille, au début du XIXe siècle, est une petite ville de 2000 habitants qui connaît une croissance industrielle et démographique rapide grâce à l'industrie textile. En 1891, elle compte 37 filatures et 7000 habitants, majoritairement des ouvriers dont 4000 travaillent dans l'industrie textile. Fourmi se situe à 8 km de la Belgique et 20% de ses habitants sont belges. A partir de 1885, l'industrie textile dans le Nord-Pas-de-Calais est en crise. Crise qui cause des mises au chômage et des baisses de salaire, tandis que les prix de la nourriture et des loyers augmentent. L'hiver 1890-1891 est particulièrement rigoureux. Au cours de celui-ci, 3000 habitants doivent être secourus. En avril, des grèves éclatent dans plusieurs usines. L'Internationale Ouvrière décide de faire du 1er mai une journée de revendication internationale pour réclamer la journée des 8 heures. A Fourmy, la manifestation du 1er mai doit se dérouler dans une ambiance festive et pacifique. A 10 heures, les ouvriers doivent porter leurs revendications à la mairie. Puis, un pique-nique familial est prévu dans un estaminet. Des festivités l'après-midi et un bal en soirée sont inscrits au programme. Le tract précise Le plus grand calme est recommandé, pas de tumulte, pas de récrimination personnelle. Le 30 avril, la veille de la manifestation, les patrons opposés aux revendications des ouvriers apposent sur les murs des usines de fourmis une affiche où l'on peut lire. À l'unanimité, sauf un seul, tous les chefs d'établissement de la région ont décidé que l'on travaillerait le 1er mai comme tous les autres jours. Le maire de Fourmy demande le soutien du sous-préfet d'Avennes qui mobilise un important dispositif de maintien de l'ordre. Trois compagnies d'infanterie arrivent à Fourmy le 30 avril dans la soirée. Le 1er mai, dès 5h du matin, des manifestants sont présents devant les usines de Fourmy. Ils y distribuent des tracts et tentent de convaincre les ouvriers de se joindre à eux. À 9h Après une échauffourée avec les gendarmes à cheval qui chargent la foule, quatre manifestants sont arrêtés. Des renforts sont à nouveau demandés à la sous-préfecture qui envoie deux compagnies d'infanterie casernées à Maubeuge. Le slogan des manifestants, c'est les huit heures qu'il nous faut, se change en c'est nos frères qu'il nous faut. Le programme de la journée se poursuit. A 11h30, les délégations des différentes usines en grève sont reçues à la mairie où elles remettent leurs revendications comme prévues. Pour calmer les esprits, le maire annonce que les ouvriers arrêtés seront libérés à 17h. A 15h30, les renforts d'infanterie en provenance de Maubeuge arrivent en gare de Fourmy. Ils sont accueillis sans hostilité et se dirigent vers la mairie, suivie par les manifestants. Maria Blondeau est en tête du cortège. Elle tient entre les mains un bouquet d'aubépines, offert par son fiancé Cléber Gilotto, lui aussi au premier rang. Il arbore un drapeau rouge. Ils sont jeunes, ils sont innocents, ils sont heureux, ils se sont fiancés le matin même. Ils font face à 30 soldats équipés d'un nouveau fusil Lebel qui contient 9 cartouches de calibre 8 mm. Ces balles peuvent traverser 3 corps humains à 100 mètres. Des cailloux volent, la foule pousse. Pour se libérer, le commandant fait tirer en l'air, mais les manifestants ne reculent pas. Il est 18h25 quand le commandant ordonne de tirer sur une foule désarmée.
Speaker #0En moins d'une minute, l'armée met fin dans le sang à la manifestation. Le bilan est de 35 blessés et de 9 morts, dont Maria Blondo et Cléber Gilotto. Bien que les forces de l'ordre soient mises en cause, neuf manifestants seront condamnés pour entrave à la liberté de travail, outrage, violence à agents et rébellion, à des peines de prison de deux à quatre mois fermes. Les forces de l'ordre, elles, ne subiront aucune condamnation. La loi des huit heures de travail sera adoptée le 23 avril 1919 après des décennies de lutte ouvrière, le décès d'hommes, de femmes, pour obtenir les droits sociaux qui nous paraissent aller de soi aujourd'hui. et qu'il faut veiller à ne pas se laisser confisquer. Voilà le vrai sens du congé du 1er mai. Le 1er mai 1903, Fourmy, un monument à la mémoire des victimes, a été inauguré dans le cimetière du centre. Maria et Cléber y reposent encore aujourd'hui, j'y suis allée. Sa tombe à elle occupe l'emplacement 267, sa tombe à lui l'emplacement 274. Vous n'écouterez plus jamais cette chanson de la même manière à présent. Si vous m'écoutez sur une plateforme qui le permet, n'hésitez pas à me suggérer des chansons au contenu pouvant intéresser mes abonnés. Pour des raisons de droit d'auteur, je ne peux pas partager dans ce podcast l'intégralité des chansons. Je joins un lien lorsque c'est possible. Sinon, je vous invite à les découvrir par vous-même. Lisez les textes, les traductions éventuellement. Soyez curieux. Merci du soutien que vous m'apportez en vous abonnant à ma chaîne. Je vous embrasse et à tout bientôt pour un autre rendez-vous en musique sur Dunebox.